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La Faille: Volume 1 : La quête d'Echo
La Faille: Volume 1 : La quête d'Echo
La Faille: Volume 1 : La quête d'Echo
Ebook331 pages5 hours

La Faille: Volume 1 : La quête d'Echo

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About this ebook

Des siècles se sont écoulés depuis les événements contés dans « Rémoras » et « La Trappe », au cours desquels la face du monde a été profondément transformée.

Plus de place pour l’excentricité ou la contestation, sous peine d’effacement. Mais plus de criminalité, plus de perversion non plus. L’humanité profite désormais d'un monde calme, d’un monde en paix, d’un monde PARFAIT !
Seul un grain de sable persiste. Un petit groupe de femmes et d’hommes – terroriste et criminel aux yeux de la majorité, résistant et libérateur pour une minorité – est prêt à tout pour rendre aux Hommes leur libre arbitre.

Mais perdre le paradis sur Terre, est-ce vraiment souhaitable ?
Victor parviendra-t-il à ouvrir la boîte de Pandore de ce nouveau monde ? La Collecteuse Echo, pièce majeure de cette quête libératrice que très peu souhaitent, parviendra-t-elle à échapper au Traqueur Romeo, lancé à sa poursuite ?
Le passé détient peut-être les clefs du futur, mais le remède ne sera-t-il pas pire que le mal ?

Découvrez « La Quête d’Echo », le premier volume de la nouvelle trilogie de M.I.A... « La Faille ».

LanguageFrançais
Release dateNov 17, 2013
ISBN9791091325967
La Faille: Volume 1 : La quête d'Echo
Author

M.I.A

Le pseudo M.I.A (« Missing In Action ») concrétise la rencontre de deux amis passionnés de littérature, de cinéma, et d'actualité politique, pour ne citer que quelques points communs évidents.La méthode de travail choisie pour l'écriture de ce roman est particulière, car près de 1500 kilomètres nous séparent : qui pourrait penser que « Rémoras » et « La Trappe » ont été intégralement pensés, construits et rédigés à distance, grâce à Internet ?

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    La Faille - M.I.A

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    LA FAILLE

    Volume 1 : La quête d’Echo

    M.I.A

    Published by Éditions Hélène Jacob at Smashwords

    Copyright 2013 Éditions Hélène Jacob

    Smashwords Edition, License Notes

    This ebook is licensed for your personal enjoyment only. This ebook may not be re-sold or given away to other people. If you would like to share this book with another person, please purchase an additional copy for each recipient. If you’re reading this book and did not purchase it, or it was not purchased for your use only, then please return to Smashwords.com and purchase your own copy. Thank you for respecting the hard work of this author.

    Cet ebook est vendu pour une utilisation strictement privée. Cet ebook ne peut être revendu ou donné à d’autres personnes. Si vous souhaitez partager ce livre avec une autre personne, merci d’acquérir une copie additionnelle pour chaque bénéficiaire. Si vous lisez ce livre et ne l’avez pas acheté, ou s’il n’a pas été acheté pour votre utilisation personnelle, merci de retourner sur Smashwords.com et d’acheter votre propre copie. Merci de respecter le travail de cet auteur.

    © Éditions Hélène Jacob, 2013. Collection Science-fiction. Tous droits réservés.

    ISBN : 979-10-91325-96-7

    Prologue

    Lorsque j’étais enfant, les histoires qu’on me racontait à propos du Grand Cataclysme me rendaient terriblement triste. J’imaginais les morts, les blessés et les disparus. Je percevais l’horreur d’un tel effondrement et l’ampleur gigantesque de la Reconstruction, mais sans vraiment comprendre de quoi il s’agissait. Je ressentais surtout le poids de la perte, de la résignation et de l’oubli. Mais mes élans de désespoir ne duraient jamais bien longtemps, seulement le temps du récit, avant d’être remplacés par une simple amertume impalpable qui me poursuivait souvent pendant des jours.

    Les légendes ont une puissance d’évocation particulière et peuvent vous marquer à jamais… paradoxalement sans doute parce qu’on veut croire qu’elles sont exagérées par nature et qu’on aime cultiver les émotions déplacées, les frissons qu’elles nous procurent. Nous n’y voyons que des contes qui nous renvoient un bout déformé de notre passé.

    En grandissant, j’ai compris qu’elles sont pourtant quelquefois moins dures que la réalité et que leurs véritables racines sont progressivement gommées, dans un processus inconscient de lente érosion. Ainsi, elles deviennent plus acceptables par ceux qui les reçoivent et les transmettent à chaque nouvelle génération.

    Mais la légende principale qui a bercé toute ma jeunesse est un tissu de mensonges.

    Rien ne s’est produit comme cela est écrit dans nos bases de données. On nous cache la vérité depuis la nuit des temps et personne n’a jamais remis en cause l’histoire qu’on nous a racontée pendant des siècles pour justifier le mode d’existence qui est le nôtre aujourd’hui. Enfin… presque personne… Mais ils sont si peu nombreux à combattre la thèse officielle…

    L’ampleur de la dissimulation est telle que j’ai de la peine à y croire moi-même, alors que j’en ai toutes les preuves sous les yeux. Je comprends que la légende soit plus simple et moins douloureuse à accepter que la réalité nue, pour la majorité d’entre nous. Car aujourd’hui, je souffre de connaître la vérité. Et si c’était à refaire, je voudrais qu’ils confient ma mission à quelqu’un d’autre.

    Le savoir a un prix, un prix que les ignorants n’auront jamais à payer. Celui de la responsabilité.

    Je suis désormais responsable de cette découverte et ma décision peut tout changer. J’ai le poids de l’avenir sur les épaules et je ne me sens pas capable de faire le bon choix.

    Pourtant, il faut que je me décide vite, car il nous reste très peu de temps…

    Chapitre 1 – Echo

    Sa chute fut violente et elle atterrit sur sa cheville droite, sans avoir le temps de se préparer correctement au choc. L’élancement se propagea immédiatement jusqu’au genou, avant de refluer et de se concentrer au-dessus du pied, en une suite de pulsations rapides et douloureuses.

    Elle s’affaissa sur l’herbe et palpa sa jambe à travers la botte pour constater l’étendue des dégâts. Rien de trop grave. Une simple entorse que sa combinaison intégrale mettrait moins de cinq minutes à soigner, si elle fonctionnait encore correctement.

    Elle se releva très vite et contrôla méthodiquement les emplacements stratégiques de son vêtement, afin de vérifier que le tir reçu quelques secondes plus tôt n’avait pas endommagé l’essentiel.

    Les capteurs digitaux du tissu marron métallisé réagirent normalement sur sa manche gauche et transmirent instantanément les informations requises à son écran rétinien. Température extérieure : 25 °C, qualité de l’air supérieure à la moyenne habituelle, taux d’humidité satisfaisant, fonctions vitales normales, mais pouls anormalement élevé. Elle se sentait effectivement essoufflée et luttait pour reprendre ses esprits.

    Tous les autres transmetteurs de gauche semblaient actifs et elle répéta l’opération sur sa manche droite. Un message d’erreur s’inscrivit en rouge et clignota devant sa rétine. Le système de camouflage semblait mort et le module de transfert était manifestement endommagé.

    Non, surtout pas ça !

    Cette nouvelle la prit au dépourvu. Si la réparation automatique de sa combinaison refusait de se déclencher, elle resterait coincée et aurait fait tout cela pour rien.

    Tentant de lutter contre la panique, elle effleura encore une fois les capteurs et reçut une autre suite de messages négatifs, avant d’obtenir l’information que le système de recyclage de ses fluides corporels était de nouveau opérationnel. Cette fonction était pour le moment le cadet de ses soucis et elle eut un sourire amer.

    Si je ne peux pas rentrer, crever de soif n’a de toute façon pas grande importance…

    Elle fit quelques pas et testa l’état de sa cheville. Le système de guérison était bien actif et la douleur s’estompait déjà. Elle se raccrocha à ce point positif et tenta de mettre de l’ordre dans ses idées, en observant d’un œil vif l’endroit où elle était arrivée.

    La zone alentour était partiellement boisée et elle se trouvait dans une sorte de clairière mal délimitée. Ce fut seulement en contemplant les arbres qu’elle prit pleinement la mesure de la situation.

    Victor avait raison, ça a vraiment marché ! Tout est absolument différent !

    Elle tourna sur elle-même, en espérant trouver quelques traces d’activité humaine, mais ne vit rien d’autre que la végétation chétive et un oiseau qui voletait timidement de branche en branche. Aucune trace de son passage n’était plus perceptible. Elle se sentit terriblement seule et abandonnée.

    Elle retira le sac qu’elle portait sur son dos et fouilla rapidement dedans pour vérifier que tout avait survécu au voyage. Le contenu n’était pas absolument essentiel à sa mission, mais un grand soulagement l’envahit lorsqu’elle constata que rien n’était endommagé. Ces quelques affaires étaient le seul lien qui la rattachait à son point d’origine. Elle n’aurait pas supporté d’en être privée.

    Cette vérification lui avait permis de recouvrer un semblant de calme et elle constata que son pouls était redevenu régulier. Elle étudia rapidement les données géographiques en sa possession afin de s’orienter. Il lui fallait s’éloigner de la zone du point de passage, c’était sa priorité. Elle opta pour le sud.

    Elle referma le sac et le remit en place, tandis que ses réflexes reprenaient le dessus. Elle n’aurait jamais dû perdre autant de temps dans ces circonstances. Plus de trente secondes s’étaient déjà écoulées depuis son arrivée.

    Tandis qu’elle se mettait en marche d’un pas soutenu, elle appuya légèrement sur sa tempe droite et attendit que l’écran rétinien apparaisse à nouveau. Elle fut rassurée de voir que le système d’enregistrement des rapports spéciaux répondait parfaitement.

    Tentant de mettre dans sa voix plus d’assurance qu’elle n’en éprouvait, elle se racla légèrement la gorge avant de parler d’une voix rapide.

    — Rapport spécial numéro 1, enregistré par l’agent-collecteur Echo. Je viens d’effectuer le transfert. D’après les indications de mon système, tout s’est passé correctement. Ma combinaison a subi des dommages et je suis pour l’instant dans l’impossibilité de me rouvrir un passage. La plupart des autres fonctions sont opérationnelles et j’espère que la réparation automatique va finir par s’activer. Le lieu que je suis en train de filmer est celui de mon arrivée et présente une végétation absente de mon point de départ, qui ne figure pas non plus dans ma base documentaire. Cette information confirme mon déplacement temporel. Je dois maintenant quitter la zone pour recueillir de nouvelles données, me mettre à l’abri et poursuivre ma mission. Fin du rapport spécial numéro 1.

    Echo appuya une seconde fois sur le capteur temporal et coupa l’enregistrement. Ce rapport alla se stocker immédiatement dans son centre nerveux, dans une zone distincte du système de sauvegarde permanent. Tout ce qu’elle voyait, entendait et percevait était automatiquement enregistré en temps réel, mais la procédure exigeait que des rapports particuliers soient parallèlement effectués, pour qu’elle puisse rendre compte des événements majeurs.

    Alors qu’elle n’avait parcouru que quelques mètres, elle perçut au loin sur sa droite un bref éclair qui illumina le sous-bois avant de disparaître brusquement.

    Mon Dieu, c’est déjà lui ! Il est beaucoup trop proche !

    Victor avait donc échoué et n’avait pas pu lui faire gagner toute l’avance dont elle avait besoin. Le Traqueur ne mettrait que quelques instants à se remettre de son propre passage et il serait rapidement à sa poursuite. Elle devait à tout prix se dépêcher si elle voulait avoir une chance de lui filer entre les doigts, surtout en l’absence de système de camouflage.

    Changeant d’avis, de façon à mettre le plus de distance possible entre eux, elle prit la direction de l’est et s’élança au pas de course à travers la clairière. Ses bottes ne faisaient aucun bruit sur le sol herbeux et elle disparut rapidement parmi les arbres.

    Chapitre 2 – Romeo

    Il tenait encore son arme brandie lorsqu’il roula sur les feuilles humides qui jonchaient le sous-bois. Il s’accroupit aussitôt en position de tir et chercha vainement sa cible du regard.

    La décharge électrique qu’avait reçue la Collecteuse avant de s’engouffrer dans le passage avait dû la sonner et mettre une partie de son équipement hors de service, au moins temporairement. Elle ne pouvait pas être très loin. Pourtant, plutôt que de lancer immédiatement une détection comme il était censé le faire, Romeo resta immobile quelques secondes afin d’observer le nouveau décor qui l’entourait.

    Ces foutus scientifiques avaient raison ! La faille n’est pas une invention et elle fonctionne vraiment… Dans quoi j’ai été embarqué ?

    L’homme se redressa et accomplit les vérifications matérielles obligatoires. Son équipement avait bien supporté le déplacement. En tout cas, mieux que lui, d’après les données que lui communiqua son système d’analyse corporelle. Il se sentait effectivement nauséeux et il dut s’appuyer à un tronc d’arbre le temps que son malaise se dissipe et que sa respiration redevienne régulière.

    L’odeur métallique du sang envahit ses narines et il se souvint subitement que l’homme qui avait tenté de couvrir la fille l’avait blessé au visage avant qu’il l’écarte brutalement de son chemin. La lame avait entaillé sa joue gauche sous l’œil et la plaie semblait profonde au toucher. Le liquide avait coulé dans son cou et commençait à s’infiltrer sous ses vêtements.

    Forcément… la seule partie de mon corps non protégée et où la combinaison ne peut rien pour moi ! Je vais garder une sale marque pendant mon séjour ici…

    Le Traqueur savait que la balafre serait supprimée à son retour par les spécialistes du centre médical. Quelques minutes suffiraient à l’effacer. Mais pour le moment, il ne pouvait que stopper le saignement et éviter de se promener avec une plaie ouverte.

    Il sortit son nécessaire de secours d’une poche de sa veste et vaporisa une petite quantité d’un produit verdâtre sur sa joue mutilée, tout en observant son visage dans un miroir miniature. Les particules scellèrent sommairement les lèvres de la blessure en moins de vingt secondes et la douleur de la désinfection lui fit plisser les yeux.

    Il se passa rapidement un mouchoir sur la joue pour en retirer grossièrement le sang et rangea ses affaires. Ses soucis esthétiques attendraient… il était temps de se remettre en chasse.

    Mais, avant de reprendre le cours de sa mission, une formalité technique s’imposait. Ses employeurs tenaient à avoir un compte rendu précis du déroulement de ses missions et se montraient très pointilleux quant au respect du protocole.

    — Rapport spécial numéro 1, enregistré par l’agent-traqueur Romeo. J’ai suivi la cible comme convenu, mais elle a eu le temps d’accomplir son transfert. Les données de mon système et mes propres yeux, comme vous pouvez le voir, indiquent un déplacement temporel très surprenant et je préfère obtenir la confirmation de ces informations avant de les enregistrer définitivement. La Collecteuse a quelques minutes d’avance sur moi et je compte la retrouver avant la tombée de la nuit. Fin du rapport spécial numéro 1.

    C’était maintenant que la partie agréable de son travail allait commencer et Romeo sentit les picotements familiers du plaisir qui envahissaient son ventre. La traque était sa raison d’être et il n’avait encore jamais perdu une proie.

    La Collecteuse n’était pas loin, il le savait. Deux transferts accomplis de façon si rapprochée avec un paramétrage unique, même dans ces conditions inhabituelles, ne pouvaient pas donner lieu à plus de cinq cents mètres d’écart à l’arrivée. Il s’agissait de la première des règles scientifiques compliquées qui régissaient l’activité des points de passage. La fille n’était pas loin et elle n’était pas formée pour s’échapper.

    Mais lui était né pour retrouver ses cibles et les ramener.

    En prenant son temps, il procéda à une analyse très simple, consistant à détecter une source de chaleur spécifique dans un rayon de moins d’un kilomètre. L’ouverture d’un passage récent laissait des radiations particulières derrière elle et son capteur lui confirma cette deuxième règle universelle que tout agent devait connaître, même s’il n’en comprenait pas vraiment le fonctionnement.

    Son propre point d’arrivée apparut sur son écran rétinien, à quelques mètres dans son dos. Laissant le détecteur faire son travail, il patienta jusqu’à obtenir une seconde confirmation, à environ quatre cents mètres sur sa gauche. Il courut souplement dans la direction indiquée par le signal et s’arrêta lorsque l’indicateur passa au vert, au milieu d’une zone déboisée.

    Tu as donc atterri ici… Comme tu n’es pas idiote, tu n’as pas traîné et tu as vite déguerpi. Si tu m’as vu arriver, ce qui est probable, tu auras eu l’intelligence de t’éloigner le plus possible. Ne me déçois pas et prouve-moi que tu es un peu plus coriace que les autres…

    Il changea les réglages de ses capteurs et passa en mode olfactif. La fille avait forcément laissé une odeur encore perceptible par le système, surtout dans cette zone vide de toute autre présence humaine. Il obtint encore une fois satisfaction et sentit son cœur battre plus vite lorsque son écran lui renvoya un message positif. L’odeur était peut-être imperceptible pour son nez, mais pas pour son équipement. La trace moléculaire prenait bien la direction de l’est et datait de moins de cinq minutes.

    Merci de rendre ma chasse suffisamment intéressante. J’espère que tu cours vite !

    Un large sourire sur le visage, Romeo se lança à la poursuite de sa cible, en espérant qu’elle durerait assez longtemps pour qu’il puisse au moins s’amuser un peu.

    Chapitre 3 – Victor

    Couché sur le sol dallé, le ventre et la joue pressés contre les pierres froides, les bras écartés, il observait sur sa gauche le ballet des bottes noires qui traversaient son champ de vision. La lame du poignard qu’il avait laissé échapper luisait sous la lumière artificielle de la salle de transfert, à quelques pas de lui.

    En tendant légèrement le cou vers le haut, au mépris des consignes qu’un des hommes venait de lui donner d’un ton sec, il pouvait voir la plate-forme désormais inactive que sa protégée venait d’emprunter.

    Echo, je suis désolé… J’aurais voulu que tu aies plus de temps…

    Sur sa droite, une voix féminine irritée émergea du brouhaha, pour transmettre un message à ce qui devait être son supérieur.

    — Je suis désolée, Monsieur, nous sommes arrivés trop tard pour l’intercepter. Elle a eu le temps de passer, mais le Traqueur qui nous précédait a pu également effectuer le transfert, avec moins d’une minute de retard d’après les indications du système. Il ne doit donc pas être loin d’elle.

    Victor n’entendit pas la réponse qu’elle reçut, mais comprit qu’il était concerné, lorsqu’il reçut un léger coup de botte dans la jambe droite.

    — Relève-toi, tu es attendu !

    Il se mit péniblement à genoux et tenta de retrouver son équilibre. Il se sentait vieux et le Traqueur savait où placer ses coups efficacement : tout son corps était douloureux. La femme le secoua.

    — Dépêche-toi ! J’ai des ordres !… Nous vous l’amenons immédiatement, Monsieur.

    Victor sentit qu’on l’empoignait pour le faire avancer plus vite, en le traînant à moitié. Les deux hommes qui le tenaient portaient l’uniforme de la garde rapprochée du Conseil. Une version argentée de la combinaison en vigueur portée par tous les employés de l’État.

    Le Conseil ? Comment ont-ils pu être au courant aussi vite ?

    Alors qu’on l’emmenait et qu’il jetait un dernier regard à la plate-forme, il revit la scène qui n’avait duré que quelques minutes.

    Pendant que les paramètres de transfert finissaient d’être téléchargés dans le système nerveux d’Echo, il lui avait donné en hâte ses dernières recommandations. Il avait touché ses cheveux roux, comme il le faisait lorsqu’elle était enfant et qu’il voulait lui témoigner silencieusement sa tendresse. Elle avait saisi sa main entre les siennes, avec calme et douceur.

    — Tu n’as pas besoin de me redire tout ça. Je connais par cœur tous les détails de la mission et j’en mesure aussi les risques. Dans quelques minutes, je serai soit morte soit en route pour l’objectif, j’en suis bien consciente. Mais comme j’ai confiance en toi et en tes calculs, je ne suis pas vraiment inquiète.

    Elle affichait un petit sourire brave, le menton légèrement relevé, dans un signe de défi enfantin.

    — J’aurais juste aimé pouvoir calculer mes paramètres encore une fois. Pour être vraiment sûr…

    — Certains facteurs ne dépendent pas de toi, mais de vieux textes qui sont ce qu’ils sont, sans possibilité de savoir si les données qu’ils contiennent sont correctes. Et tu sais très bien que tu douterais toujours autant de tes résultats, même en recalculant mille fois. Tu te fais vieux, Victor, tu commences à radoter !

    Elle l’avait serré dans ses bras pour l’empêcher de répondre. C’était sa façon à elle d’avoir toujours le dernier mot.

    Elle avait resserré les bretelles de son sac à dos, comme pour confirmer qu’elle était prête, et s’était détournée de lui pour s’approcher de la plate-forme.

    — Il est temps de voir où tout ça nous mènera… Appuie sur le bouton, Victor !

    Et tandis qu’il procédait à l’ouverture du passage, il avait entendu du bruit venant du long couloir qui menait à la salle. Un mélange de voix en colère, de pas rapides et de tirs électriques. Quelques secondes plus tard, les deux battants de la porte métallique s’écartaient silencieusement pour laisser passer un Traqueur, reconnaissable au noir intégral de sa combinaison. Il tenait son arme pointée droit devant lui et avait immédiatement visé la jeune femme.

    — Agent-collecteur Echo, vous êtes en état d’arrestation pour trahison, abus de vos prérogatives, tentative d’utilisation non autorisée et modifiée d’un point de passage non référencé… et entente avec un membre identifié du groupe terroriste Croniva.

    Il s’était adressé directement à Victor pour ces derniers mots, en le saluant d’un signe de tête moqueur.

    — Faites immédiatement demi-tour, les mains en l’air, et avancez lentement dans ma direction. Quittez la plate-forme !

    Echo n’avait qu’à moitié obtempéré, en tournant la tête vers son compagnon, alors que le halo bleu apparaissait peu à peu, trois mètres devant elle. Elle lui évoquait de nouveau une petite fille sans défense. Sa voix n’avait guère été plus qu’un murmure. Presque une prière.

    — Victor ?

    Il n’avait hésité qu’une fraction de seconde.

    — Sauve-toi, Echo ! Cours ! Prends de l’avance !

    Il n’avait pas jeté un regard en arrière en s’élançant vers le Traqueur, espérant qu’Echo suivrait son ordre. Le passage resterait ouvert trois minutes et chaque seconde gagnée de ce côté représenterait plusieurs dizaines de mètres de distance entre eux à l’arrivée. Dégainant le couteau à longue lame qui était en permanence accroché à sa ceinture, il avait tenté de couper la route du Traqueur, qui se tenait à une vingtaine de mètres de la plate-forme.

    Mais ce dernier était bien plus rapide que lui et avait eu le temps de tirer avant que Victor soit totalement dans l’axe. Dans son dos, il avait entendu une légère plainte étouffée. Pris de rage, il avait maladroitement couru vers l’homme en noir pour l’attaquer. Sa lame l’avait touché au visage, seule zone de son corps qu’il pouvait espérer blesser en l’absence d’arme électrique.

    Le Traqueur avait encaissé la douleur en grognant à peine, avait stoppé son élan pendant quelques secondes, puis s’était à nouveau rué sur Victor, enfonçant successivement ses poings dans son menton et ses côtes avant de le repousser sur le côté.

    Conscient que son arme était dérisoire et qu’il ne faisait pas le poids, Victor s’était alors désespérément accroché à l’une de ses jambes, tout en se laissant traîner par terre sur plusieurs mètres.

    Quelques secondes de plus, juste quelques secondes…

    Le Traqueur avait assené plusieurs coups de botte sur ses doigts crispés pour se dégager, avant de poursuivre en direction de la plate-forme, sans même se retourner.

    — Tu ne m’intéresses pas, vieil homme. J’ai une autre cible que toi.

    Affalé sur le sol, Victor l’avait regardé franchir le passage, tout en essayant d’évaluer l’avance qu’aurait Echo.

    Je ne lui ai même pas donné une minute… Elle n’a pas plus de cinq cents mètres d’avance… Jamais elle ne lui échappera…

    Moins de deux minutes plus tard, la grande pièce était envahie par d’autres hommes et il se retrouvait à plat ventre sur les dalles. À quelques centimètres de son visage, le sang du Traqueur maculait les pierres blanches.

    Alors que les gardes lui faisaient franchir la porte de la salle et qu’il prenait conscience de sa propre situation, Victor n’eut qu’une seule pensée.

    Echo… ma petite fille…

    Chapitre 4 – Echo

    Elle connaissait parfaitement les capacités des Traqueurs. Après tout, il n’y avait pas encore si longtemps, elle travaillait à leurs côtés. Ce n’étaient pas des hommes ordinaires. Ils étaient choisis pour leur patience et leur détermination, tout autant que pour leurs performances physiques. On ne les raisonnait pas et on ne les apitoyait pas. Si l’un d’entre eux venait vous chercher, vous pouviez aussi bien vous asseoir par terre pour les attendre, ça vous économisait de nombreuses nuits sans sommeil…

    Echo n’avait entendu parler que d’une poignée de rares cas où des cibles s’en étaient sorties, en se terrant pendant des mois, le temps que leur Traqueur soit rappelé pour une autre mission et lâche leur piste. Mais malgré cela, ces personnes n’avaient plus jamais vraiment été les mêmes, trop occupées à regarder derrière leur épaule à chaque fois qu’elles se risquaient à l’extérieur.

    L’homme qui la suivait était plus résistant qu’elle, plus endurant, et elle savait qu’elle ne le distancerait pas en courant. D’ailleurs, après trente minutes de fuite éperdue dans la forêt, elle se sentait déjà épuisée. Elle contrôla une nouvelle fois l’état du mode camouflage de sa combinaison. Rien à faire, il semblait définitivement hors circuit.

    Conservant son rythme, elle tenta de se rappeler les circonstances qui avaient permis à ces fameux rescapés d’échapper à leur poursuivant. Victor lui avait dit qu’ils avaient tous un point commun. L’eau. Les Traqueurs avaient une faiblesse particulière, due au fait qu’ils se reposaient beaucoup trop sur leur détecteur olfactif pour suivre leurs cibles : si l’on pouvait les égarer suffisamment longtemps pour atteindre un fleuve ou un rivage maritime, on pouvait aussi parvenir à les semer, du moins temporairement.

    Tout en continuant à marcher, Echo fit défiler la base des données géographiques sur son écran rétinien. Il lui fallait espérer que le temps n’avait pas trop altéré le terrain et que son intuition était la bonne. Son système lui confirma la présence d’un lac à moins d’un kilomètre, en continuant vers l’est. À son époque, il était enfoui sous des constructions et servait de ressource souterraine. Mais ici, elle pouvait espérer qu’il soit accessible en surface. Elle accéléra encore, puisant dans sa peur la force d’avancer.

    Le Traqueur n’était pas idiot. En la suivant de trop près jusqu’à ce qu’elle atteigne l’eau, il la trouverait avant qu’elle puisse se cacher. Son plan ne marcherait que si elle pouvait lui faire d’abord perdre un peu de temps. Elle devait lui fournir une piste alternative. Une trace olfactive qui ne le tromperait que quelques minutes, mais lui redonnerait un peu d’avance.

    Sans s’arrêter, elle retira son sac pour en sortir son fusil de projection. Une fois déplié, l’appareil ressemblait à une arme, mais ne tirait ni laser ni électricité. Il ne s’agissait que d’un outil utilisé par les Collecteuses, notamment pour installer à distance leurs micros et caméras miniatures, lorsqu’une situation particulière ne leur permettait pas de se rapprocher en personne. Le fusil fonctionnait selon un système d’air comprimé très perfectionné et pouvait envoyer ses projectiles à près de trois cents mètres, avec une précision étonnante. Echo le maniait avec une grande adresse.

    Habituellement, elle insérait dans le canon des éléments solides et de petite taille qui pouvaient se planter ou se ventouser sur des surfaces dures. Mais cette fois, elle avait autre chose en tête et elle espérait que son idée

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