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« In spite of the extraordinary outpouring of notally and partially new products and new ways of doing things

that we are witnessing today, by far the greatest flow of newness is not innovation at all. Rather it is imitation.
»T. Levitt, 1966.

Réflexions sur l’imitation

Mme Benyahia-Taïbi Ghalia


Université d’Oran
Introduction :
Ce travail propose d’expliquer l’imitation et d’approfondir ces réflexions. Il offre une vision
plus claire, plus précise et plus détaillée, sur le concept.
Il n’existe pas de définition pertinente et reconnue de l’imitation outre celles figurant dans les
textes de loi, et de la jurisprudence, en la matière. Ceci a cédé la place à une sorte de
confusion.
La confusion entre ce concept et d’autres (tels que l’innovation et la contrefaçon par
exemple), indique le besoin, d’identifier les caractéristiques de l’imitation(« qu’est-ce que
l’imitation ? »). On pourrait enfin établir les relations entre l’innovation, l’imitation et la
contrefaçon.
La définition de l’imitation ne s’arrête pas ici. Elle ne se résume par à définir et à catégoriser
mais elle réside aussi dans la réponse à la question « pourquoi imiter ? » à travers l’analyse
des différentes incitations, des arguments et des circonstances de l’imitateur et qui justifient
le recours à l’imitation.
Ces éléments seront complétés par l’étude de l’objet de l’imitation (« qui imiter? », « qu’est-
ce qu’on imite ? »), son coûts et son délai dans la littérature existante.

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I. Des réflexions sur l’imitation :
Nous présenterons dans ce qui suit certaines définitions de l’imitation, des typologies ainsi
que sa mise en relation avec les concepts d’innovation et de contrefaçon.

I.1. Les définitions de l’imitation :


L’imitation est à première vue, un ensemble de comportements individuels présentant des
corrélations. Issue de la biologie, l’imitation définit dans cette discipline le comportement de
certains animaux qui se protègent en imitant leur environnement avec leur couleur et leur
forme. De là, on peut déduire que l’imitation fait référence au concept d’adaptation. C’est un
comportement référentiel.
On décrit péjorativement les imitateurs comme étant des contrefacteurs, des clones, des
pirates ou même pire, comme des bandits(M.K. Bolton, 1993).
Les synonymes donnés à l’imitation sont nombreux : caricature, parodie, mimique, copie,
reproduction, plagiat, contrefaçon, faux, contagion, comportement moutonnier, piratage,
transplantation, généralisation, diffusion, etc. Dès lors, ses antonymes peuvent être : la
création, l’originalité, l’authenticité, l’innovation, l’invention, la nouveauté, le leaderschip,
etc.
L’imitation, ses synonymes et ses déclinaisons ont leur place dans les études économiques, les
études sur l’économie de développement, mais aussi en sciences humaines et sociales et en
droit(S. Quiers-Valettes, 1999).
Le concept d’imitation reste cependant peu structuré.
Le droit est peut être la discipline qui donne une vision assez claire. Il précise ce qu’est
l’imitation et le dommage subi ainsi que les sanctions d’une telle activité. L’imitation peut
porter sur les signes distinctifs, sur la publicité ou sur la présentation extérieure d’une œuvre
présentant une certaine originalité. La condamnation de l’imitation est conditionnée par
l’existence d’un risque de confusion.
L’imitation peut être « systématique » s’il y a accumulation systématique d’un ensemble
d’imitations raffinées. Dans le cadre de la liberté du commerce et de l’industrie, le droit
précise aussi de son côté les frontières à ne pas dépasser par les concurrents. Il donne droit à
l’imitateur dans certains cas comme par exemple, en cas de bonne foi(qui reste à prouver par
le défendeur).
En sociologie et en psychologie, imiter est le fait de se soumettre à un leader ou profiter de
ses expériences. C’est le fait de reproduire le comportement modelé par un autre organisme.

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Pour ce faire, il faut que l’imitateur ait compris le sens de l’action elle-même, observer son
intérêt et déduit sa pertinence.
Certains auteurs ont tenté de cerner le concept d’imitation et de lui attribuer une définition.
Pour G. de Tarde(1890), l’imitation est le concept qui explique le tissu social. Il existe selon
G. Tarde une tendance naturelle à imiter les modèles précédents et à s’imiter mutuellement.
Selon R. Collard(1971), l’imitation est fondée sur une efficacité supérieure au niveau de la
production, de la commercialisation, et du contrôle du coût. Elle est appelée aussi « me-too ».
Elle vise à copier de nouvelles conceptions de produits très rapidement et uniquement en vue
de réduire les coûts de la production(ingéniosité ) par l’engineering.
Pour J-P. Debourse(1970)’imitation de l’innovation est la mise au point d’un produit ou d’un
procédé semblable à celui qui fait l’objet de l’innovation. Elle comporte, comme l’innovation
différents degrés qui vont de la copie pure et simple, à la mise au point d’une quasi-
innovation.
Selon R. Le Duff et A. Maisseu(1994), l’imitation est l’appropriation de la nouveauté
introduite par l’innovateur, par d’autres firmes.
Pour E. Julien(1995), l’imitation représente la captation unilatérale d’un flux d’informations
en provenance de l’innovateur vers l’imitateur. La captation est nécessaire mais elle n’est pas
suffisante. D’autres démarches sont à faire par l’imitateur. L’auteur définit l’imitation comme
suit : pour toute innovation A, on dira que B a imité A si B s’approprie tout ou partie de
l’investissement sans l’accord de A.
Pour M. Robert et M. Devaux(1996), l’imitation consiste à copier les produits d’un concurrent
puis de tenter de le surpasser dans la commercialisation, les ventes, la fabrication ou le SAV.
Pour P. Tréfigny(2000), imiter c’est « chercher à reproduire, à copier, reproduire ou copier
plus ou moins bien, un objet de copie, dont l’imitateur a eu préalablement connaissance »1.
Selon L. Philippe(1984), l’imitation est une innovation de perfectionnement. C’est une
modification par rapport à l’innovation relative avec des améliorations de détails. L’imitation
ne modifie pas l’originel ni les fonctions essentielles du produit. Elle comporte une certaine
nouveauté même mineure, qui la différencie de la contrefaçon. L’imitation technologique se
place entre l’innovation relative et la reproduction en copie conforme. L’auteur(L. Philippe,
1984) définit l’innovation relative comme étant une modification dans une ou plusieurs
composantes d’une innovation de rupture ou de forte mutation. L’innovation relative reste en
concordance avec le principe originel(exemple : télévision couleurs, pilules pour hommes,
etc.) ou à faible contenu technologique(exemple : stylos à bille, trombone, etc.). De fait, les
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P. Tréfigny, « L’imitation, contributions à l’étude des comportements référentiels ». PU de Grenoble. 2000, p14.

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imitateurs copient les innovations qui vont de l’innovation relative à l’innovation de forte
mutation technologique.
Le tableau suivant résume les idées de l’auteur :
Innovation de Innovation à forte Innovation relative Imitation
rupture mutation
technologique
Concept Fort Fort Faible Nul
Technique Fort Fort Faible Très faible
Environnement Fort Moyen Moyen/ Fort Faible
socio-économique
Débouchés Fort Moyen /Fort Moyen/ Fort Moyen/ Fort
économiques

Tableau n°1 : L’innovation et l’imitation. L. Philippe, 1984.


En revanche, l’imitation n’est pas un manque de créativité. La définition de l’imitation
souligne en premier lieu, selon M. K. Bolton(1993), deux actes : l’acte de suivre, et l’acte de
s’approprier.
L’imitation ne nécessite pas une copie directe mais d’apporter quelques aspects ou attributs
de l’originel. C’est un moyen d’atteindre un objectif précis. Elle peut être un comportement
rationnel. C’est aussi un comportement référentiel puisqu’un modèle(ou plusieurs modèles)
devrait exister. Elle utilise les connaissances existantes sur le marché pour reproduire un
produit ou un procédé.
Comme pour l’innovation, la décision d’imiter peut entraîner une série de décisions
d’imitation concernant le prix, les fournisseurs, les circuits de distribution, etc.
Par rapport à l’innovation, l’imitation est un réacteur de diffusion. Le processus de
substitution de l’ancienne technologie par la nouvelle passe par l’adoption à travers
l’imitation de la nouvelle technologie, ce qui accélère sa diffusion.
L’imitation est alors le réacteur de la propagation technologique à travers le temps(L.
Philippe, 1984). L’imitation est une forme particulière de la diffusion de l’innovation. C’est
une diffusion inter-firmes dans une industrie. La diffusion concerne généralement la
technologie elle-même. L’imitation est centrée sur la concurrence et le monde des entreprises.

Trop de lois strictes sur la propriété industrielle contraignant l’imitation, peut tuer
l’innovation. En effet, la forte protection peut avoir des effets négatifs sur le développement
d’un secteur donné mais aussi sur le taux d’innovation. Les régimes à fortes protections des
innovations ralentissent les entreprises capables d’apporter des améliorations ou des

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nouveautés dans l’innovation (diffusée) ce qui peut ralentir le progrès global. L’imitation est
de fait un moteur de diffusion.
La définition de l’imitation par rapport au concept de différenciation est donnée par J-M.
Pointet. Le mimétisme est un processus dynamique d’homogénéisation des produits. C’est le
fait de s’inspirer, pour en tirer un avantage concurrentiel, de la stratégie produit des firmes
concurrentes(réelles ou potentielles). Le comportement mimétique consiste donc à imiter les
dimensions stratégiques de certaines firmes concurrentes. L’imitateur intègre ainsi les
caractéristiques des produits concurrents de référence et les assimile dans ses propres
produits.
Le but de l’imitation n’est pas de créer une bonne ressemblance mais d’aboutir à un succès
commercial égal ou supérieur à celui de l’innovation. Par l’imitation, la production elle-même
est en mutation puisqu’elle peut combiner des éléments technologiques standardisés(R.
Nelson, S. Winter, 1994).
Les buts de l’imitation sont double :
1. Par rapport à la firme imitée : le but est de réduire l’avantage concurrentiel de la firme
imitée, détruire son pouvoir de marché et se réfugier dans la niche ou le marché révélé.
2. Par rapport aux consommateurs : l’idée est d’attirer des acheteurs potentiels par la reprise
de certaines caractéristiques des produits concurrents qui font leur succès.
L’imitation peut être gagnante. L’ordre d’entrée sur le marché n’est pas déterminant du succès
ou de l’échec d’une entreprise.

P. Kotler(1997) différencie l’imitation d’un ensemble de concepts assez proches en termes de


stratégie de suiveur.
Il énumère ainsi quatre types de la stratégie du suiveur : la contrefaçon, le clonage, l’imitation
et l’adaptation.
Les contrefacteurs dupliquent le produit du leader et son packaging et le vendent dans le
marché noir ou à travers des dealers.
Les clones imitent les produits du leader, ses outils ou canaux de distribution, sa publicité, etc.
Le produit clone et son packaging peuvent ressembler à ceux du leader alors que le nom de
marque peut être un peu différent(par exemple Coko-Cola à la place de Coca-Cola). Le clone
vit en parasite aux investissements du leader dans le marché.
L’imitateur copie quelques éléments du produit leader mais maintient une différenciation en
termes de packaging, de publicité, de prix, etc. Le leader ne fait pas attention à l’imitateur tant

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que celui-ci ne l’attaque pas agressivement. L’imitateur peut même aider le leader à éviter la
charge d’un monopole.
L’adaptateur peut adapter ou améliorer les produits du leader. Il peut choisir de les vendre
dans des marchés différents et éviter ainsi la confrontation avec le leader. Il peut aussi se
développer en tant qu’un challenger futur, comme ça a été le cas d’entreprises japonaises qui
se sont développées après l’adaptation et l’amélioration des produits développés ailleurs.
Bref, on n’imite pas n’importe qui, n’importe quoi, ni n’importe quand. L’imitation est un
phénomène sélectif et conscient. Elle n’est pas forcément conformiste puisqu’elle peut être
créatrice. L’imitation peut être une anticipation des évolutions techniques et de l’émergence
d’un standard.
Toutefois, l’imitation peut être une étape dans le processus de développement de la firme ou
des nations.
I.2. Les typologies des imitations:
D’après les réflexions passées, l’imitation inter-organisationnelle est l’un des processus par
lesquels les organisations peuvent être influencées par d’autres. Plus il y aurait des entreprises
utilisant la même pratique, plus grande serait la probabilité que d’autres entreprises vont
l’adopter. L’imitation inter-organisationnelle est la façon par laquelle les actions d’un groupe
d’organisations vont influencer les actions des autres groupes (d’organisations).
Plusieurs typologies d’imitation existent. Elle sont issues de différentes disciplines.
En droit, et selon le degré de similitude, la doctrine et la jurisprudence font la distinction entre
une imitation servile et une imitation quasi- servile qui est un cas moins flagrant de copie(E.
Golaz, 1992).
L’imitation peut s’effectuer avec ou sans intention volontaire. Elle peut être explicite ou
implicite, avouée ou tue, avec ou sans risque de confusion, avec ou sans intention de nuire.
Elle peut agir dans un cadre purement privé ou public (P. Tréfigny, 2000).
On distingue aussi en général entre l’imitation frauduleuse et l’imitation de bonne foi (qui est
par ailleurs difficile à prouver), et la contrefaçon.
La contrefaçon s’apprécie selon les ressemblances et non pas les différences entre les
produits. Elle reproduit un produit protégé par un droit de propriété industrielle.
L’imitation frauduleuse est une imitation de mauvaise foi. C’est une reproduction qui
conserve les caractères les plus remarquables du produit nouveau : marque, assonance,
similitudes typographiques, couleurs, poids, formes, etc. Elle reprend les apparences du
produit nouveau, l’emballage aussi. Elle se distingue de la contrefaçon par le fait qu’elle n’est
pas une reproduction totale du produit nouveau(reprise des caractéristiques fonctionnelles et

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techniques et des apparences). Elle se rapproche de la contrefaçon par le fait qu’elle engendre
un risque de confusion entre les deux produits. Le consommateur croit acquérir le vrai
produit.

Selon T. Lehoucq (1995), la copie peut être de trois natures : la copie grossière, la copie
intelligente et la copie sans reprise de l’apparence :
 La copie grossière : c’est une reproduction intégrale. Elle égratigne l’image de marque de
l’entreprise copiée mais ne peut atteindre ses vrais clients potentiels. Les secteurs les plus
touchés par ce type de copie sont : la fabrication de bois, la chaudronnerie, la bijouterie et
l’orfèvrerie.
 La copie intelligente avec reprise de l’apparence : elle laisse une grande confusion dans
l’esprit du consommateur puisqu’il croit acquérir le vrai produit. Ce type de copie peut
engendrer des substitutions d’achats. Il touche ainsi le profit de l’entreprise copiée. Le
consommateur peut être informé que le produit acheté n’est pas originel mais il est
complice vue l’importance de l’image et de l’apparence. Les secteurs les plus touchés par
ce type de copie sont : la filature et le tissage, le caoutchouc, le fabrication de carreaux
céramiques et les matériaux de construction.
 La copie sans reprise de l’apparence : elle est écoulée en général dans les circuits de la
grande distribution. Etant donné que la cible est une firme connue, elle prend
généralement la forme d’une imitation d’emballages ou une contrefaçon de procédé de
fabrication. Ce type de copie peut aussi reprendre le nom d’une grande marque protégée
afin de fabriquer des produits qui ne sont pas inclus dans la gamme de la firme cible. Les
secteurs les plus touchés par ce type de copie sont l’aéronautique et le secteur des
composantes électroniques.
D’autres secteurs sont touchés par les trois types de copie. Tel est le cas de l’industrie du cuir
et des chaussures, le matériel optique, l’horlogerie, l’habillement, les savons et les parfums.
Selon le degré de nouveauté de l’imitation, la similitude avec l’innovation ou le degré de
copie réalisée, il est possible de distinguer l’imitation réflective de l’imitation copie(D. Baize,
1997).
L’imitation réflective a pour but la conquête de parts de marché, la fidélisation des clientèles
existantes et l’acquisition de nouvelles clientèles ainsi que le développement de l’image de
l’entreprise. Elle reprend le concept du produit ainsi que la fonction principale. Ce type
d’imitation peut avoir des effets négatifs sur « l’avantage concurrentiel » de la firme
innovatrice (D. Baize, 1999). Il peut mener à d’énormes profits pour la firme imitatrice ainsi

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qu’à une puissance et une montée de la notoriété de cette firme. Prouver l’imitation réflective
est long, difficile et coûteux surtout parce qu’elle n’est pas une reproduction totale du produit
nouveau. La confusion ne peut être prouvée puisque le produit imitant est distingué par ses
propres caractéristiques notamment esthétiques, et il porte aussi la marque de l’entreprise qui
l’a fabriqué. Ce type d’imitation remet ainsi en cause les outils de protection de la propriété
industrielle puisqu’il n’est souvent pas condamné par les tribunaux. Les droits de propriété
industrielle restent ainsi impuissants devant l’imitation réflective. C’est une copie intelligente
et même innovatrice ou créatrice puisqu’on y introduit différentes améliorations, de part leurs
natures et leurs degrés. Celles-ci peuvent être accompagnées par de fortes campagnes
publicitaires, par la mobilisation des services après-vente ainsi que par des pratiques pour la
fidélisation de la clientèle.
L’imitation réflective engendre un phénomène cumulatif de développements. Le tableau
suivant résume le point de vue de l’auteur :

Points de distinction Contrefaçon (imitation pure) Imitation (imitation réflective)

La loi à travers :
Le statut à l’égard de la loi Illégale Flou : la preuve est plus difficile
Les moyens de lutte Connus et de plus en plus Moins connus, moins efficaces
efficaces
Le produit à travers :
La qualité de la copie Inférieure, Egale ou supérieure
Les caractéristiques copiées du Extérieures, esthétiques, Fonctionnelle, technologique
produit marque, logo, forme, couleur,
etc.
Le copieur à travers :
Le statut du copieur Parasite Peut devenir un concurrent direct
L’attitude du copieur vis-à-vis du Tromper Faire arbitrer
consommateur
Les objectifs du copieur Gains financiers à court terme Parts de marché, notoriété, gains
Les horizons du copieur Court terme financiers à long terme
Moyen ou long terme
Le copié à travers :
Les préjudices pour le copié Essentiellement financiers Position concurrentielle atteinte.
L’impact sur l’avantage Peut important Préjudices financiers en
concurrentiel du copié conséquences.
Peut être important
L’apprentissage à travers :
Le type d’apprentissage Aucun Learning by watching

Tableau n°2 : Le continuum définitionnel de l’imitation. D. Baize, 1997.

La copie simple ou l’imitation copie est une copie intégrale ou servile. Elle porte sur le
packaging et la marque du produit nouveau. L’imitateur reprend les caractéristiques du
produit originel(fonctionnelles et techniques). C’est une copie pure et simple de l’innovation.

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La seule différence pourrait être le nom de marque de l’entreprise imitatrice imposé sur le
produit. La qualité et le prix des deux produits ne se diffèrent pas largement, sauf que le
produit imitant peut être moins cher, ce qui influence le comportement d’achat des
consommateurs.
En représentant le cas japonais comme une imitation réflective, M.K. Bolton(1993) élève
cette stratégie au-delà de la simple copie ou du transfert de connaissances. L’imitation
réflective requiert une adaptation active de la technologie à un nouveau cadre et reflète ainsi
les exigences particulières du nouvel utilisateur. Le tableau suivant résume le point de vue de
l’auteur :

Innovation Imitation réflective Imitation copie


Le processus Learning by doing Learning by watching: Transfert
d’apprentissage impliqué Apprendre en surveillant ou
par l’observation avec
adaptation et modification de
l’originel.
La source majeure de la Interne Interne et externe Externe
connaissance (combinaison)
Le type d’actifs utilisés Spécialisés Génériques en premier, puis ils Génériques
tendent à se spécialiser
Les investissements en Lourds Modérés Faibles
R&D requis
Le flux d’information Internes Des deux cotés (interne et D’un seul coté
externe) (externe)
Le type de connaissances Entièrement nouvelles Il existe celles qui sont Nouvelles pour la
entièrement nouvelles et celles firme
qui sont nouvelles pour la
firme
Exemple USA Japon Pérou

Tableau n° 3 : Les stratégies compétitives de développement d’une nouvelle connaissance.


M.K. Bolton, 1993.

Dans le cadre du transfert ou la diffusion international, L. Philippe(1984) fait la distinction


entre deux modes d’imitation : l’imitation induite et l’imitation volontaire.
L’imitation est induite lorsque l’entreprise ou le pays se trouve capable d’imiter la technologie
ou l’innovation à travers les différents liens avec l’entreprise innovatrice : accords de
coopération, transferts de technologie ou de savoir-faire, assistance technique, etc. L’imitation
est volontaire lorsque l’entreprise ou le pays tente explicitement de copier la nouvelle
technologie ou l’innovation à travers différents mécanismes ou outils volontaires.
J. Zeng(2001) propose une distinction entre deux types d’imitation selon le but et l’effet :
l’imitation qui a pour but la recherche d’une rente, et l’imitation qui cherche à être productive.

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Cette distinction est proche de celle qui différencie l’imitation copie de l’imitation réflective
en termes d’objectifs.

E. Julien(1995) est peut être le seul chercheur a voir analysé en profondeur la définition de
l’imitation et sa typologie. Il propose une typologie de l’imitation inspirée de la typologie
schumpétérienne de l’innovation. De ce fait, il est possible de distinguer entre :
 L’imitation de produit ;
 L’imitation de procédé ;
 L’imitation dans la conquête de nouveaux marchés ;
 L’imitation dans la conquête de nouvelles matières premières(ou des consommations
intermédiaires) ;
 L’imitation organisationnelle (nommée aussi le benchmarking).
L’imitation peut toucher tous les éléments sur lesquels la concurrence peut se baser soit : le
coût, le temps, la marque, et la différenciation produit (E. Julien, 1995)
L’imitation produit/service s’exerce sur les fonctions du produit. Elle est définie par deux
processus concurrentiels suivant sa nature : l’imitation totale, le démarquage scientifique et
l’imitation différenciation (E. Julien, 1995) :
1. L’imitation totale vise la destruction de l’avantage de l’innovateur. Elle crée des
asymétries profitables par des politiques de prix et de services améliorés. Elle a une
meilleure atteinte de la demande avec un délai de retour et des coûts intéressants.
2. Le démarquage scientifique et l’imitation différenciation : les deux types visent la
destruction des avantages concurrentiels de l’innovateur avec une tentative de
positionnement par différenciation- produit. Cette différenciation peut être suggérée au
consommateur : on parlera alors de démarquage scientifique. La différenciation peut être
effective : on parlera d’imitation- différenciation. Ces stratégies sont agrémentées par des
politiques de prix, de services et une meilleure atteinte de la demande.
Trois types d’imitation sont définis par cet auteur : la contrefaçon, le démarquage et
l’imitation- différenciation (E. Julien, 1995) :
1. La contrefaçon : c’est une imitation totale, une copie conforme. C’est la mise au point
d’un produit identique en termes de fonctions et de valeurs techniques de ces fonctions.
2. Le démarquage : l’imitateur présente le produit comme étant différent de l’originel. Le
produit ne reprend que les fonctions d’utilisation. Il ne reprend pas ses valeurs techniques.
En revanche, le produit reprend totalement ou partiellement les fonctions allégoriques.

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3. L’imitation différenciation : les fonctions d’utilisation principales et obligatoires sont les
mêmes. Les produits ne sont pas totalement les mêmes puisqu’il y a une redéfinition
d’autres fonctions complémentaires, facultatives et allégoriques.
Le démarquage se trouve entre l’innovation et l’imitation- différenciation. Les frontières dans
cette typologie sont floues vue la difficulté de définir et de caractériser la fonction considérée
dans le produit.

Sur les marchés financiers, E. Jondeau(2001) distingue entre mimétisme intentionnel et


mimétisme fallacieux. Le mimétisme est intentionnel lorsque les investisseurs imitent
volontairement les comportements des autres investisseurs.
Le mimétisme est fallacieux (involontaire ou induit) lorsqu’un investisseur prend la décision
d’imiter, d’une façon indépendante des décisions des autres investisseurs. C’est le cas où un
groupe a les mêmes objectifs, et dispose des mêmes informations.
Il est aussi possible de faire la distinction entre imitation totale ou partielle. Un autre type
d’imitation existe : l’imitation systématique de toute la gamme de produits d’une firme.
D’après ce qui a été dit, nous pouvons enfin émettre certaines réflexions autour de la relation
entre l’innovation, l’imitation et la contrefaçon.
I.3. La mise en relation des concepts d’innovation, d’imitation et de contrefaçon :
Il a souvent été constaté que l’innovation suscite des imitations de la part des concurrents qui
s’emparent à leurs tours d’une part importante du marché. Ce comportement est si fréquent
que les innovateurs ne peuvent le négliger avant de lancer leurs produits. Ceci s’explique par
le fait que la plupart des humains sont bien davantage enclins à imiter ou copier ce qui leur a
été propice à eux-mêmes ou à leurs besoins dans le passé, qu’à innover (P. Pichat, 1989).
Etant donné que la littérature sur l’imitation n’est pas très abondante, une sorte de confusion
s’est installée. Les limites entre l’imitation, la contrefaçon et l’innovation sont floues.
Pour lever cette confusion, nous allons dans ce qui suit, tenter de tracer la relation entre
l’innovation et l’imitation et distinguer celle-ci de la contrefaçon.
Le phénomène de l’imitation se pose en premier lieu en termes d’appropriation des rentes de
l’innovation. Dès lors, l’imitation serait l’appropriation de la nouveauté introduite par
l’innovateur ainsi que les rentes qui en découlent.
E. Julien(1995) énumère trois relations entre l’innovation et l’imitation : la subordination, la
dualité des acteurs, et le séquentiel.
1. La subordination : puisque l’existence de l’imitation est subordonnée par celle de
l’innovation. L’étude de l’imitation ne peut être indépendante de celle de l’innovation.

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2. La dualité des acteurs : l’innovateur dans ce jeu de concurrence n’est pas l’imitateur. Cette
dualité relève aussi des éléments mis en jeu par ces deux phénomènes.
3. Le séquentiel : l’imitation suit l’action de l’innovateur. Cette relation de séquentiel est
temporelle. Il y a une suite d’innovations et d’imitations.
Cette idée de séquentialité a déjà fait l’objet de recherches antérieures.
J-A. Schumpeter dans son analyse du changement technique, place l’imitation comme une
suite de l’activité de l’innovation. Il propose alors le triptyque « invention/ innovation/
imitation ». L’imitation, après J-A. Schumpeter, a été réservée pour l’étude de la diffusion de
l’innovation et du changement technologique.
E.V. Hayek avance que la concurrence est un processus d’innovation et d’imitation dans
lequel les firmes testent les nouvelles hypothèses pour la résolution d’un problème d’une
façon efficace, et apprennent mutuellement des expériences (positives et négatives) des
concurrents. Ce processus de concurrence peut être interprété comme un processus
d’accumulation des connaissances.
D. Baize(1997) propose l’idée de continuum définitionnel dans lequel se trouve la suite
suivante : contrefaçon, imitation et innovation.
La contrefaçon est une imitation pure. L’imitation réflective est une copie intelligence. Cette
dernière est plus proche ainsi de l’innovation que de la contrefaçon.
La contrefaçon ne touche pas véritablement l’avantage concurrentiel de l’innovateur puisque,
d’un côté, c’est une activité clandestine(l’entreprise qui contrefait n’a pas de notoriété, son
nom à elle ne vaut rien). D’un autre côté, il n’y a presque pas de programmes de fidélisation
des clients à proprement parlé. Les clients sont complices s’il y a renouvellement de l’acte
d’achat. De ce fait, les clients de la contrefaçon sont ceux qui ne peuvent pas acheter le
produit originel, ou qui veulent passer de l’originel à la copie(surtout à cause des différences
de prix). Face à la contrefaçon, les entreprises peuvent entreprendre des investissements en
communication, des opérations médiatiques(telles que la destruction en masse des faux
produits), etc. Pour lutter contre la contrefaçon, les moyens sont connus et effectifs : action
préventive par la propriété intellectuelle et des actions collectives : procès, opérations de
communication et de sensibilisation.
La lutte contre l’imitation est plus difficile. Déjà qu’il n’existe pas de statistiques pour définir
l’ampleur de cette activité.
L’imitation implique un processus d’apprentissage. La contrefaçon ne nécessite qu’un
transfert d’informations. Le processus d’apprentissage impliqué dans l’imitation est un

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apprentissage de type « learning by watching » selon l’expression de M.K. Bolton(1993). En
revanche, l’apprentissage qui soutient l’innovation est de type « learning by doing ».

Il existe une certaine complémentarité entre l’innovation et l’imitation. L’innovation et


l’imitation sont basées sur une technologie similaire mais pas forcément la même.
L’imitation est un important processus d’apprentissage social et organisationnel. Elle
correspond à l’évolution de l’innovation à travers le temps. Cette évolution est synonyme
d’adoption de cette innovation par les autres organisations jusqu’à ce que le produit devient
banal.
On peut conclure, en termes d’avantage concurrentiel, que l’imitation en tant que pur transfert
de connaissances n’attribue pas d’avantage concurrentiel à l’entreprise imitatrice. En
revanche, l’imitation réflective, comme l’innovation, peut le lui attribuer.
II. Pourquoi imiter ? Les arguments, les circonstances et les incitations à imiter
Pour répondre à la question « pourquoi imiter ? », plusieurs champs de réponse peuvent
intervenir. En premier lieu, « pourquoi imiter ? » représente les incitations des imitateurs par
rapport à l’innovation. Ensuite, c’est les conditions dans lesquelles se trouvent l’imitateur qui
le poussent à prendre la décision d’imiter. C’est aussi dans le sens de la saisie d’une
opportunité, les facteurs explicatifs de l’imitation, pourquoi les produits se ressemblent-ils,
qui est ce qu’on imite (H. Haveman, 1993), qu’est ce qu’on imite ou pourquoi l’imitation
existe ?
Dans cette partie réservée à la question « pourquoi imiter ? », nous allons présenter les
facteurs explicatifs de l'imitation, pourquoi l’imitation existe et quelles sont les circonstances
de l’imitateur qui le poussent à imiter. La question de savoir qui imiter et quoi imiter sera
introduite dans la partie dite « Les cibles ou l’objet de l’imitation ». De ce fait, nous pouvons
distinguer entre :
1. Les arguments de l’imitation qui sont les facteurs explicatifs de l’imitation ou ses
déterminants. C’est les facteurs qui sont indépendants de la situation de l’imitateur.
2. Les circonstances de l’imitation qui sont les conditions dans lesquelles se trouvent les
entreprises qui veulent imiter. C’est des facteurs dépendants de la situation de l’imitateur.
3. Les incitations à imiter qui sont les facteurs qui incitent les firmes à imiter et qui sont
fonction de l’entreprise innovatrice. C’est des facteurs relatifs à l’innovation et ce qu’elle
engendre ainsi que les avantages de l’imitation.
Nous allons détailler, dans ce qui suit, tous ces facteurs répondants à la question « pourquoi
imiter ? »

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II.1. Les arguments de l’imitation :
Selon E. Golaz(1992), les produits se ressemblent pour différentes raisons parmi lesquelles :
1. La nécessité fonctionnelle ou technique : En effet, le produit peut imposer son aspect(ses
caractéristiques techniques, ses dimensions, sa forme). L’imitation peut être inhérente à la
nature du produit.
2. La normalisation : Elle peut être la cause des ressemblances entre les produits. Dans le
cas de produits soumis à une réglementation et similaires dans leurs dimensions et leurs
formes, la jurisprudence ne peut pas intervenir.
3. La mode : C’est une habitude collective. Ce phénomène est accentué dans certains
secteurs tels que la confection ou la joaillerie. La mode est présente dans tous les
domaines où le design est important. Ces nouveautés dues à la mode sont de courte durée,
donc rapidement obsolètes. Les droits de propriété industrielle restent impuissants dans
ces cas où la ressemblance est engendrée par une tendance, une vague de mode.
L’imitation peut aussi exister à cause de facteurs tels que : la faiblesse de la protection des
droits de propriété industrielle ou le faible recours à ses instruments dans le secteur considéré,
le manque de possibilités d’innovation par rapport à d’autres secteurs, la facilité des produits,
et la simplicité de la production ou la faiblesse des coûts.
Selon J-N. Kapfefer(1991), les réglementations produisent la ressemblance. Les banques, les
études de marché et les technologies aussi.

II.2. Les circonstances de l’imitateur :


Les circonstances ou les conditions dans lesquelles peut se trouver une entreprise peuvent
l’influencer. C’est aussi des facteurs qui influencent les incitations à imiter. Ces facteurs sont
en relation avec l’environnement de l’imitateur (incertitude, risque, etc.) ou à l’imitateur lui-
même.
Les facteurs relatifs à l’environnement de l’imitateur sont : l’intensité compétitive et les
conditions de cash flow(C. Hill, 1992). L’impact de ces facteurs varie selon le type de
l’innovation (de produit ou de procédé).
L’intensité compétitive est fonction de plusieurs facteurs et qui sont : la concentration de
l’industrie, les barrières à la sortie, les barrières à l’entrée, les conditions de la demande et les
caractéristiques du produit. Un environnement compétitif est celui où la demande est forte, les
barrières à l’entrée sont substantielles avec une grande concentration.
Dans un environnement concurrentiel et non hostile, les concurrents s’imitent peu sur les
innovations de procédés. La concurrence s’oriente vers les produits. En ce qui concerne les

14
procédés, la concurrence est moins vive à cause du manque de pression de coûts. La
concurrence se fait au niveau des éléments hors prix tels que la publicité, le design, la qualité
ou les services. Par conséquent, les concurrents deviennent plus enclins à imiter une
innovation de produit qu’une innovation de procédé afin de se différencier.
L’environnement concurrentiel hostile est celui où la demande est faible, les barrières à
l’entrée et les coûts fixes sont élevés et la concentration est à faible niveau. La combinaison
de ces facteurs déclenche la guerre des prix et de grandes pressions de coûts. Les entreprises
se rivalisent sur les procédés de réduction de coûts et s’imitent ainsi plus sur les innovations
de procédés. De ce fait, une entreprise est plus enclin à imiter si l’intensité compétitive passe
d’un environnement non hostile à un environnement hostile. C’est particulièrement le cas
d’une innovation de procédé.
A propos du cash-flow, si l’entreprise génère encore des profits de ses technologies actuelles,
il lui serait coûteux de passer à de nouvelles technologies. L’adoption de la nouvelle
technologie est associée ainsi à une perte en termes de cash-flow. L’incitation à imiter est
inversement liée aux cash-flow qui peuvent être générés par les processus technologiques
actuels des concurrents.
D’autres circonstances relatives à l’environnement de l’imitateur sont à considérer.
Selon J-M. Keynes(1936), le mimétisme est rationnel en absence d’information. Cette idée a
été développée par A. Orléan(1986). Celui-ci avance qu’en absence d’information, l’imitation
devient rationnelle parce qu’elle cherche à réduire le risque face à la concurrence. Dans le cas
d’une information asymétrique(A. Orléan, 1986), un agent imite un autre agent plus informé
que lui puisqu’il a entamé une action. Dans ce contexte, A. Banerjee(1992) a présenté un
modèle où les individus imitent dans l’espoir que l’individu observé a plus d’informations.
Ceci peut être expliqué par le fait que les secteurs industriels sont caractérisés par une
circulation intense des connaissances donc par une vision commune de l’activité et par des
mécanismes de décision indépendants. Dans des situations de choix risqués et d’avantage au
plus rapide, la tendance au mimétisme règne sur les actions entreprises par les acteurs.
Le mimétisme est rompu par le changement de paradigme à travers les nouveaux entrants(H.
Dumez et al, in F. Charue-Duboc, 1995).
D’après les théories des coûts de l’information et de la légitimité, les firmes, sous
l’incertitude, préfèrent imiter les autres plutôt que de s’engager d’elles-mêmes dans des
recherches d’informations. Cette argumentation de l’imitation est avancée par les travaux sur
l’isomorphisme mimétique(W. Powell, P. Di Maggio, 1983) et les théories économiques sur

15
les comportements moutonniers ou les comportements de troupeau « herd behaviour »(A.
Banerjee, 1992 ; S. Bikhchandani, 1998, etc.).
Par conséquent, l’imitation minimise le risque dans un environnement d’incertitude. En effet,
tant que les rivaux se suivent, aucune de leurs situations ne peut ni s’améliorer ni empirer.
Les capacités concurrentielles, grâce à l’imitation, restent dans la balance.
Tous ces facteurs réunis, relatifs à l’environnement de l’imitateur, peuvent déclencher
l’imitation. Ces facteurs sont : l’intensité de la concurrence dans le secteur considéré, les
profits dégagés des actions actuellement entreprises, l’incertitude et le manque d’information.
Les circonstances relatives à l’imitateur lui-même sont diverses aussi.
Le manque d’inspiration et l’incapacité créative et l’incapacité de projeter le futur sont les
circonstances dans lesquelles une entreprise peut se trouver, et qui peuvent la pousser à imiter.
L’imitateur peut manquer aussi de conviction pour se différencier des autres. La crainte d’être
seul à avoir tort ou un optimisme communicatif peuvent aussi être à la source des imitations.
Selon J-A. Schumpeter, les entrepreneurs qui ont plus de talent innovent. C’est une race rare
d’hommes. Les autres entrepreneurs les suivent parce qu’ils ne possèdent pas le même talent.
C’est le manque de talent, selon J-A. Schumpeter, qui explique le mimétisme entre les
entrepreneurs.
Deus économistes ont pu expliquer le comportement mimétique ou de « troupeau » par deux
facteurs (S. Asaba, M. Lirberman, 1999) :
1. La cascade d’information : chaque agent a sa propre information privée sur l’état du
marché. Un agent se comporte selon sa croyance initiale. Par ailleurs, son comportement
révèle son information privée aux suiveurs. Cette information cause un changement pour
les suiveurs, de leurs premières croyances. Tant que l’information révélée est accumulée,
les suiveurs peuvent ignorer leur propre information et imiter le comportement observé.
2. Le comportement du manager évalué par le marché : il existe des managers « supérieurs »
et des managers « inférieurs » qui, tous deux, ont une information privée sur
l’investissement. Les managers sont évalués sur la base du comportement
d’investissement et la performance ex post. Le marché ne connaît pas le type de chaque
manager, mais sait que les managers supérieurs ont la même information. Afin d’être
évalué comme étant des managers « supérieurs », les managers « inférieurs » ignorent leur
propre information et imitent les autres.
Outre les arguments et les circonstances de l’imitateur, d’autres facteurs expliquent
« pourquoi imiter ? »

16
II.3. Les incitations à imiter :
Le succès et la réussite d’une innovation paraît être la principale incitation qui attire les
imitateurs. Plusieurs chercheurs concordent sur cette idée.
Selon J.A Schumpeter, les imitateurs sont attirés par le succès de l’innovation. Ainsi,
l’innovation réussie suscite les imitateurs pour deux raisons : réaliser des profits et encourir
moins de risques (C. Jessua, 1991). L’imitateur trouvera ainsi moins de difficultés de
financement.
Selon A. Alchian(1950), les firmes imitent ce qui a réussi. Les profits positifs les incitent. Le
comportement mimétique n’est donc pas aléatoire. C’est ce qui a été confirmé par M. Pingle
et R. Day(1996). En effet, l’imitation est un mode d’économisation des choix. Elle économise
les coûts de recherche de solutions aux problèmes(les coûts de prise de décision). Elle peut
être moins chère et plus sécurisée. Elle est donc sélective.
C. Hill (1992) avance l’argument des profits dégagés par l’innovation. L’imitateur est attiré par
les rentes réalisées par l’innovation et veut s’approprier une part de ces rentes.
L’entrée des grands concurrents peut aussi inciter à imiter. En effet, les firmes entrent dans un
nouveau marché ou une niche, lorsque les grands concurrents le font. Cette entrée des grands
concurrents donne un signal aux autres firmes : la demande du produit est en croissance. En
effet, une telle entrée peut donner une certaine légitimité pour le produit et stimule la demande
des consommateurs.
Par ailleurs, les chercheurs dans la théorie des jeux (tel que T. Offerman, J. Sonnemans, 198 ;
K. Schlag, 1998 ; C.S. Ruebeck, 1999) ont aussi concordé sur l’idée que l’imitateur est attiré
par le succès de l’innovation.
Il faut noter enfin qu’on n’imite pas toujours un succès, mais tout ce qui peut porter ou se
révéler un succès. C’est le cas par exemple où une entreprise imite un produit dès son
lancement parce qu’elle estime qu’il sera une réussite. Le but d’être imitateur est peut être
d’apprendre des expériences des leaders et d’éviter les coûts supplémentaires.
L’imitation n’est pas toujours expliquée (par des incitations, des arguments ou des
circonstances). Une entreprise peut imiter parce qu’elle croit que le marché attend d’elle ce
type de comportement. Elle peut aussi imiter pour suivre un mouvement, une tendance. Si la
majorité des firmes optent pour le même choix et opèrent la même stratégie, l’entreprise se
trouve obligée de suivre. C’est ce qu’on va détailler dans ce qui suit.

17
III. L’objet et la cible de l’imitation :
Par l’objet de l’imitation, nous faisons allusion à ce qui est imité(l’élément imité dans le
produit: « qu’est ce qu’on imite ? »). Par la cible de l’imitation, nous faisons allusion aux
caractéristiques de l’entreprise imitée(« qui est imité ? »).
L’objet de l’imitation et la cible de l’imitation sont en relation avec la question du « pourquoi
imiter ? ». Ils prouvent que l’imitation est un comportement sélectif(sauf quelques cas
exceptionnels).
A propos des objets de l’imitation, ils peuvent être la nature, la personne, les actes d’autrui(P.
Tréfigny, 2000). L’imitation de la nature a pour exemple la peinture mais aussi les nouvelles
sciences telles que les biotechnologies. L’imitation peut aussi avoir comme objet la personne
d’autrui. Cette imitation peut s’exercer dans le cadre du théâtre, de monologue, etc.
L’imitation des actes d’autrui ou des productions d’autrui est une pratique assez courante.
A propos de ce qui est imité, G. Tarde(1898) déclare que c’est toujours « une idée ou un
vouloir, un jugement ou un dessin, où s’exprime une certaine dose de croyance et de désir qui
est en effet toute âme des mots d’une langue, des prières d’une religion, des administrations
d’un état, des articles d’un code, des devoirs d’une morale, des travaux d’une industrie, des
procédés d’un art »1
Pour une entreprise, l’objet de l’imitation peut être(C. Leboulanger et F. Perdrieu, 1999) :
1. L’entreprise elle-même avec son nom commercial ou sa dénomination sociale.
2. Ses produits ou ses services.
3. Les signes permettant de distinguer ses produits ou services.
4. Son savoir-faire.
5. Ses publicités.
Il est possible de copier les produits et leurs présentations, les prestations
matérielles(programmes PC, émissions télévisées, enregistrements sonores, etc.), les moyens
publicitaires(affiches, film, spot télé ou radio, encart publicitaire, etc.), les dénominations
sociales, les titres d’œuvres littéraires, des journaux et des périodiques(E. Golaz, 1992).
Différents travaux dans différentes disciplines, ont tenté de déterminer la cible de l’imitation
et ses caractéristiques.
Selon E. V. Hayek(in W. Kerber et K. Saam, 2001) toutes les firmes imitent. Elles imitent la
meilleure firme, la firme leader.
Pour le nouvel institutionnalisme, un modèle de légitimité est construit par les firmes
« leaders ».En effet, les entreprises tendent à adopter des comportements similaires en suivant
1
G. Tarde, opcit, p157.

18
les firmes leaders qui sont les acteurs « centraux » du marché. Le canal de contagion peut être
la notoriété et la réputation de la firme imitée. La convergence vers un modèle dans un secteur
donné est poussée par le besoin de légitimité. Les décisions adoptées par le grand nombre de
firmes acquièrent aussi une certaine légitimité.
Les firmes entrent lorsque les grands concurrents le font aussi, ce qui concorde avec la vision
de G. de Tarde(1890)en sociologie où l’imitation se propage du plus fort au plus faible. En
effet, une telle entrée peut donner une certaine légitimité pour le produit et stimule la
demande des consommateurs.
La vision évolutionniste énonce que les actions engagées permettent aux firmes d’apprendre à
partir du repérage des organisations les plus « efficaces ».
Selon la RBV, les firmes imitent les autres firmes qui ont des dotations en ressources
comparables.
H. Haveman(1993) présente un travail assez intéressant. Il analyse en profondeur la décision
d’imiter en précisant la cible et ses caractéristiques.
Les organisations imitent celles qui sont dans la même population, ont les mêmes structures,
stratégies, ressources et contraintes. Par conséquent, les organisations imitent les autres
organisations avec la même taille et qui sont réussies. Les organisations de grandes tailles sont
des modèles pour les autres organisations avec des tailles comparables. Or, les organisations à
grands profits servent de modèles à toutes les autres organisations et non pas seulement pour
celles qui ont des profits comparables. Ces résultats montrent que les organisations suivent les
actions des organisations qui ont réussi. La présence d’acteurs réussis sur un nouveau marché
légitime ce marché et le rend plus attractif aux entrants potentiels. Toutefois, comme le
nombre d’entrants réussis dans un nouveau marché augmente, un effet concurrentiel va
submerger l’effet de légitimation, en rendant l’entrée moins attractive pour d’autres
organisations.
En fonction de la base de l’imitation, trois modes d’imitation apparaissent: les imitations
basées sur la fréquence, les imitations basées sur les caractéristiques et les imitations basées
sur le résultat ou le profit(P. Haunchild, A. Miner, 1997).
Les imitations de résultats sont surtout avancées en économie. Les travaux sur l’apprentissage
organisationnel prennent en compte l’imitation sociale et technique. La théorie de la diffusion
étudie plutôt les imitations inter-personnelles que les imitations inter-organisationnelles. De
ce fait, trois courants théoriques sous-entendent les trois modes d’imitation : la théorie de la
diffusion, le nouvel institutionnalisme et les travaux sur l’apprentissage organisationnel. Les
modes d’imitation sont alors :

19
 L’imitation basée sur la fréquence d’utilisation(« frequency-based imitation ») : c’est le
cas où les organisations adoptent les pratiques qui sont les plus « utilisées » par d’autres
organisations. Les imitateurs comptent ainsi sur la prédominance par la fréquence comme
indicateur de la valeur de la pratique imitée. Cette pratique sera utilisée jusqu’à ce que les
organisations prouveront la fiabilité d’une autre stratégie ou une pratique, par la fréquence
de son utilisation.
 L’imitation basée sur les caractéristiques(« trait-based imitation ») : les imitateurs
sélectionnent les pratiques utilisées par les organisations qui ont des traits caractérisant :
grands statuts, position centrale, entreprises larges et réussies. C’est aussi des firmes qui
ont un accès supérieur en termes d’informations et de ressources. Le succès de ces
entreprises est un signal. Cette imitation satisfait aussi le besoin de légitimité selon le
nouvel institutionnalisme.
 L’imitation basée sur le profit(« outcome-based imitation ») : les organisations imitent les
pratiques qui paraissent avoir de bons résultats(pratiques bénéfiques) pour d’autres
organisations. Elles évitent, de ce fait, les pratiques avec des résultats inférieurs.
L’imitation est animée par le profit.
Ces trois modes d’imitation sont des imitations sélectives.
Les trois modes d’imitation peuvent se combiner. En effet, les organisations peuvent imiter
par exemple les pratiques réussies (imitation de profit) mais seulement celles qui sont utilisées
par les organisations réussies(imitations de caractéristiques) comme c’est le cas pour les
pratiques de benchmarking.
Les résultats du travail de A. Miner et P. Haunchild (1997) prouvent l’idée que les firmes
apprennent des autres firmes sur une base construite. L’imitation peut être un élément fort
pour la reproduction sociale à travers les organisations.
L’agent dominant (ou l’entreprise dominante) paraît être la meilleure cible de l’imitation dans
la théorie du jeu(F. Squintani, J. Valimaki, 1999) qui confirme la vision des autres travaux sur
la cible de l’imitation.
Les résultats de la théorie des jeux et de la prise de décision montrent que l’imitation n’est pas
toujours une action rationnelle. Ces résultats ont été prouvés par plusieurs autres recherches.
L’imitation peut être non justifiée dans certains cas, mais globalement, l’imitation est
sélective. Elle cible les firmes leaders avec de grandes tailles, performantes et réussies. Dans
ce cas, elle vise à acquérir le même succès et/ou améliorer la légitimité. Elle peut aussi
chercher des avantages du second entrant. En général, les imitateurs copient en fonction de la

20
fréquence des actions engagées par les autres firmes, les actions qui garantissent le succès(F.
Bensebaa, 2000).
En résumé à ce qui a été dit sur la cible de l’imitation, les différents travaux et recherches ont
concordé sur le fait que la cible est souvent une entreprise réussie, leader dans son marché, en
outre, une grande entreprise qui est un acteur central dans le marché avec un accès supérieur
en termes d’informations et de ressources. Outre la taille et la réussite de l’entreprise imitée,
le profit reste un élément clé pour l’imitation.

IV. Les coûts et les délais d’imitation :


Trouver le meilleur choix parmi un ensemble d’alternatives consomme du temps et des
ressources. Comme pour l’innovation, imiter ce qui existe prend du temps, c’est coûteux, et
induit un certain degré d’incertitude. Le coût et le délai d’imitation ne peuvent donc pas être
nuls.
Selon K. Pavitt(1992), l’imitation n’est pas évidente puisque l’accès à l’information publique
n’est pas forcément facile et gratuit. L’innovation est une combinaison de découvertes,
d’invention, de savoirs et savoir-faire propres à l’entreprise. La nature de l’innovation elle-
même rend difficile l’imitation(K. Pavitt, 1992). Cette auteur parle de la protection
« naturelle » de l’innovation qui rend difficile, longue et coûteuse l’imitation. La création et le
transfert ne sont donc pas libres.
Or, dans plusieurs situations, l’imitation serait une pratique moins chère et plus sécurisée que
de résoudre son propre problème du point de départ. En effet, pour chaque action qui
nécessite de grands actifs, suivre la pratique d’un maître est d’habitude la façon la plus rapide
et la plus facile d’acquérir un niveau satisfaisant de compétences(M. Pingle, R. Day, 1996).

VI.1. Les coûts de l’imitation :


Malgré l’importance de l’étude sur le coût de l’imitation, peu de recherches se sont intéressées
à cette variable ou ont tenté de la mesurer.
Calculer le vrai coût d’une stratégie d’imitation est difficile. En effet, le recueil de
l’information nécessaire pour l’imitation et les coûts d’une telle stratégie ne peuvent pas être
intégrés dans des coûts de R&D(sauf si la firme entreprend de la R&D imitative). Ils vont être
cachés ou dissimulés dans des frais généraux et administratifs(M.K. Bolton, 1993). Si les
efforts de collecte des données ne sont pas centralisés ou maîtrisés, ils sont en mesure
d’ajouter des dépenses pour le marketing et la production. Ceci explique pourquoi certaines
firmes combinent imitation et innovation.

21
Différents travaux ont montré que le coût de l’imitation est moindre que celui de l’innovation.
M. Pingle et R. Day (1996)argumentent que l’imitation joue un rôle très important dans le
monde de la prise de décision parce qu’elle est l’une des procédures qui permettent au
décideur d’économiser les coûts de la décision. Les individus agissent selon des modes
d’économisation, un fait présenté par A. Alchian en 1950 dans un article, et un peu plus avant
par J-A. Schumpeter, en 1934. En effet, toute innovation fournit une information utilisable par
ses concurrents à un coût faible.
En imitant, un décideur peut éviter les coûts de décision associés avec la comparaison des
alternatives. En même temps, le choix résultant de l’imitation peut être d’une grande qualité.
Le nouvel institutionnalisme a montré que l’imitation économise les coûts de l’information.
Plusieurs travaux dans différentes disciplines ont ainsi considéré que le coût de l’imitation est
moindre que celui de l’innovation.
L’une des observations les plus marquantes sur le coût de l’imitation, est celle que les coûts
d’imitation d’un produit sont plus faibles que pour un procédé. Ceci peut être expliqué par le
fait que certaines innovations sont plus vulnérables à l’imitation par rapport à d’autres. La
nature de l’innovation peut être la première source de vulnérabilité. Outre le fait que la nature
de l’innovation peut permettre ou non sa protection par les droits de propriété industrielle,
l’innovation de par sa nature conditionne la facilité technique de l’imitation(G. Koenig,
1996). L’imitation peut être coûteuse (et longue) dans le cas d’un produit ou un procédé
complexe : dans le cas de l’industrie de l’assemblage par exemple. En effet, il faut localiser et
identifier les différentes opérations multiples de fabrication et de montage de composants.
D’autres auteurs ne se sont pas contenter de qualifier cette variable(le coût de l’imitation)
mais ont tenté aussi de la mesurer.
E. Mansfiled est l’un des auteurs qui a traité de l’imitation depuis des années. Ses travaux sur
l’imitation sont parmi les travaux fondateurs sur ce phénomène. D’après nos recherches, E.
Mansfield, M. Schwartz, S. Wagner(1981) ont été les premiers à investir dans ce domaine.
En effet, E. Mansfield et alii.(1981) ont été les premiers à réunir des données sur les coûts de
l’imitation pour les comparer avec ceux de l’innovation, ainsi que pour étudier leurs effets sur
l’entrée et la concentration de l’industrie.

Les recherches de E. Mansfield et ses collaborateurs :

22
Le coût de l’imitation selon les auteurs(E. Mansfiled et alii, 1981) est l’ensemble des coûts de
développement et de l’introduction du produit de l’imitation en intégrant la recherche
appliquée, la spécification du produit, la construction ou l’élaboration du prototype,
l’investissement dans l’installation et les équipements, de la manufacture et du marketing.
En cas de présence d’une protection par un brevet, le coût d’inventer autour du brevet est
inclus. Les entreprises ont été choisies à partir d’un échantillon parmi les plus grandes firmes
dans quatre industries localisées dans le nord-est des Etats-Unis. Les nouveaux produits sont
introduits plus ou moins récemment par ces firmes. Les innovateurs ont fourni aux chercheurs
de cette étude des informations concernant le coût de l’innovation et le temps de l’imitation.
Ce dernier(le temps de l’imitation) est considéré comme le temps séparant le début de la
recherche appliquée de l’imitateur (s’il y fait recours), de l’introduction de son produit
imitant sur le marché.
La variable coût est testée et mesurée par 48 innovations de produits d’un échantillon
aléatoire d’entreprises appartenant aux secteurs suivants : le secteur chimie, le
pharmaceutique, l’électronique et la machinerie.
Sur les 48 innovations majeures en termes de chiffre d’affaires, 34 innovations avaient déjà
été imitées à la date de l’étude. Dans 14 cas, aucun imitateur ne s’est encore manifesté. Dans
un cas sur sept(1/7), les coûts de l’imitation sont supérieurs aux coûts de l’innovation. Ces
coûts s’expliquent plutôt par le manque de savoir-faire de la part de l’imitateur et pas
forcément par l’amélioration du produit. La probabilité d’entrée est négativement corrélée au
montant du coût de l’imitation. Lorsque le coût de l’imitation est faible, l’entrée est
découragée par les politiques adoptées par l’innovateur visant la dissuasion de l’entrée(par
exemple, par la réduction des prix) ou du moins, l’abaissement des profits attendus par
l’imitateur. Le niveau de concentration d’une industrie est relativement faible quand les
produits et les procédés des firmes implantées peuvent être imités facilement et à faible coût.
En moyenne, et selon cette étude(E. Mansfield et alii, 1981), le ratio du coût de l’imitation sur
le coût de l’innovation était de (0,65). Le coût de l'imitation ne représente donc que 65% du
coût de l'innovation.
Dans environ la moitié de ces variables, le ratio du coût de l’imitation sur le coût de
l’innovation était soit inférieur à 0,40 ou supérieur à 0,90.
D’après ces résultats, il paraît que les innovateurs introduisent de nouveaux produits malgré
que d’autres firmes puissent les imiter à environ 2/3 du coût et du temps dépensés par
l’innovateur.

23
Parmi les éléments qui influencent les coûts de l’imitation on trouve le brevet. La protection
par un brevet ne peut pas dissuader complètement l’imitation. Le brevet par contre augmente
le coût et le temps de réponse des imitateurs. En effet, l'enquête de E. Mansfield et alii(1981)
indique que le brevet augmente le coût de l'imitation avec une médiane de 11%. Ce taux est
de 30% dans le cas des médicaments, 10% pour les produits chimiques et 7% pour
l'électronique et les machines.
Les travaux de R.C. Levin, A.K. Klerovick, R. Nelson et S.G. Winter(1987) :
Une autre enquête portant sur des cadres responsables de la R&D et concernant 129 lignes de
produits, a montré que beaucoup d'entreprises sont en mesure d'imiter la plupart des produits
nouveaux (R.C. Levin, A.K. Klerovick, R. Nelson et S.G. Winter, 1987, in D. Carlton, J-M.
Perloff, 1998).
En ce qui concerne les produits nouveaux et leurs améliorations, les chiffres sont les suivants:
 Dans 2 % des cas, les entreprises ne sont pas en mesure d'imiter.
 Dans 25 % des cas, une ou deux (1 ou 2) entreprises sont en mesure d'imiter.
 Dans 73 % des cas, trois à cinq (3 à 5 ) entreprises sont en mesure d'imiter.
 Dans 25 % des cas, six à dix (6 à 10) entreprises sont en mesure d'imiter.
 Dans 4% des cas, il y en a plus que 10 entreprises qui sont en mesure d’imiter.
En ce qui concerne les nouveaux produits seulement, les chiffres varient. Elles correspondent
respectivement à : 1%, 5%, 33%, 63% et 26%. Ce qui veut dire que dans 89% des cas, six
entreprises ou plus, seront en mesure d'imiter une innovation de produit. Les auteurs (R.C.
Levin, A.K. Klerovick, R. Nelson et S.G. Winter, 1987, in D.Carlton, J-M. Perloff, 1998) ont
pu constater grâce à une vaste analyse des décisions que prennent les entreprises en matière de
R&D, que la protection garantie par un brevet accroît le coût de l’imitation de 40 points de
pourcentage dans le cas de l’industrie pharmaceutique, de 25 points de pourcentage dans le
cas des produits chimiques courants, de 7 à 15 points dans le cas des semi-conducteurs et du
matériel de communication et de l’informatique, et d’en moyenne 17 points dans le cas des
machines -outils, des pompes et des compresseurs. Ces chiffres sont établis au regard d’une
échelle où la valeur 100 était attribuée à une imitation à coût égal. Les auteurs ont également
constaté que les innovations brevetées ne se trouvaient à l’abri des imitations que dans 12 cas
dans les 127 industries étudiées. Cette même étude a montré que les coûts de la R&D de la
duplication d’un produit nouveau majeur non breveté dépassent 50% de la R&D de
l’innovateur dans 86% des cas, dans les 127 industries étudiées. Les coûts de la duplication
dépassent 75% des coûts originaux dans 40% des industries étudiées.

24
Les recherches de E. Julien(1995) :
L’intérêt de l’imitateur ne concerne pas seulement ses coûts mais aussi ses délais de retour. Il
est possible de faire la distinction entre les types d’imitation selon les coûts(E. Julien, 1995).
Dans le cas d’une imitation totale, la hauteur des coûts irrécouvrables de l’imitation est
inférieure à celle de l’innovation et c’est de même pour les délais de recouvrabilité.
L’auteur présente les formules suivantes :

Coûts irrécouvrables d’imitation

R1 = <1
Coûts irrécouvrables d’innovation

Délais de recouvrement des coûts d’imitation

R2 = <1
Délais de recouvrement des coûts de l’innovation

Pour le démarquage scientifique et l’imitation- différenciation, ces imitations jouent un


double rôle dans les processus concurrentiels, dans la réduction ou le renforcement des
barrières à l’entrée sur le marché de l’innovation. Rappelons ici que dans le cas de
démarquage, le produit de la copie ne reproduit que les fonctions d’utilisation et non pas les
valeurs techniques du produit nouveau. Il reprend aussi(totalement ou partiellement) les
fonctions allégoriques du produit originel. En ce qui concerne l’imitation différenciation, les
fonctions d’utilisation principales et obligatoires sont les mêmes mais avec une redéfinition
des autres fonctions complémentaires, facultatives et allégoriques.
Pour être rentable, l’imitateur doit apprécier juste, la date des autres imitations ou la date des
autres entrées en général. Comme pour l’innovateur, cette appréciation permettra de
configurer le profit temporel de sa courbe d’investissements. Au fur et à mesure des entrées
sur le marché, la vitesse de recouvrement des coûts devient de plus en plus faible. De fait, il
faut être le premier à imiter à condition que l’imitateur ait une meilleure productivité des
coûts d’accès au marché. Cette productivité devrait lui permettre de corriger la vitesse de
recouvrement affaiblie avec les entrées successives sur le marché.

25
Autres recherches :
Ces recherches n’ont pas mesuré empiriquement cette variable(le coût de l’imitation) mais
elles ont participé activement à l’expliquer.
Outre le brevet qui est un instrument qui augmente le coût de l’imitation(selon la théorie des
droits de propriété ainsi que les travaux de E. Mansfield), d’autres facteurs jouent un rôle
négatif dans l’effort de réduction des coûts de l’imitation.
Les différentes théories de l’innovation ont permis de donner une certaine vision sur le coût
de l’imitation même si elle reste primitive et pu approfondie.
Selon la RBV, les caractéristiques des actifs de la firme innovatrice(la complexité
organisationnelle, la spécificité et le caractère tacite) rendent difficile l’imitation et
augmentent son coût. Les mécanismes d’isolation(propriété industrielle, réputation,
asymétries d’informations, etc.) et l’ambiguïté causale augmentent la difficulté d’imiter et par
conséquent, le coût et le délai d’imitation.
Le degré de nouveauté, un concept clé de la théorie de transilience1, rend aussi l’imitation
difficile et coûteuse. Plus l’innovation intègre un haut degré de nouveauté(innovation
destructrice), plus le coût de son imitation est élevé. L’innovation conservatrice serait alors
plus facile à imiter puisque les actifs requis sont déjà possédés par la majorité des entreprises
du secteur.
Les barrières à l’entrée définies par la théorie du même nom, peuvent aussi augmenter le coût
de l’imitation, dissuader ou retarder l’entrée. Ces barrières sont les avantages de coûts, les
économies d’échelle, la différenciation et les avantages en termes de capitaux.
Les coûts de l’imitation sont aussi fonction des efforts de différenciation et de positionnement
de l’imitateur ainsi que des barrières de l’innovateur, de sa capacité d’absorption et des actifs
complémentaires).
Les coûts d’imitation restent inférieurs à ceux de l’innovation puisque les imitateurs
économisent la majorité des investissements de recherche et de prise de décision et du
lancement sur le marché. Ils pourront ainsi allouer plus de ressources aux autres étapes du
développement du produit ou du procédé ou dans la promotion de ceux-ci surtout dans le cas
de produits de grande consommation.
1
Rappelons que l’innovation destructrice nécessite de nouvelles technologies, savoirs et savoir-faire,
connaissances et compétences, équipements, etc. C’est des actifs qui ne sont pas à la portée de toutes les
entreprises, donc, difficiles à imiter et à prendre la décision. L’innovation conservatrice est basée sur des actifs
déjà possédés par plusieurs entreprises dans le secteur. Le risque d’imitation est plus grand pour ce type
d’innovations.

26
IV.2. Le délai d’imitation d’une innovation :
Pour réussir une stratégie d’imitation, il faut entrer vite sur le marché(T. Levitt, 1966).
La phase de lancement chez les imitateurs est plus brève parce que ceux-ci profitent de
l’expérience passée de l’innovateur, réduisent la phase de développement du produit, et
profitent de l’acquis technologique(connaissances, premières ventes, etc.).
L’imitateur doit être au courant de l’innovation et de ses avantages mais cette connaissance ne
peut être parfaite. Lorsqu’une nouvelle technique est diffusée, il faut toujours un certains
temps pour que les imitateurs s’en informent et décident ou non de l’imiter. Des études
portant sur le processus de la diffusion ont montré que l’adoption se faisait d’abord lentement
puis elle s’accélérait. Dans le cas de nouveau produit, la rapidité d’imitation devient une
variable que peut maîtriser l’innovateur. Les entreprises qui fixent le prix d’un produit pour
qu’il rapporte le plus possible en peu de temps, favorisent l’imitation accélérée(puisque le
succès, les rentes, les brevets, incitent plus d’imitation). En revanche, les entreprises qui
choisissent une stratégie dynamique axée sur des prix modestes, peuvent espérer maintenir
plus longtemps leurs places sur le marché.
Le délai d'imitation d'une innovation est un concept relatif au coût de l'imitation. Le concept
clé qui les relie est celui de l'information. Le délai d'imitation est le laps de temps qui s'écoule
entre l'apparition de l’innovation et de sa première copie. Par conséquent, c'est le temps idéal
pour l'innovateur de profiter de son innovation, et c'est la période propice pour percevoir la
rente de sa R&D et de s’assurer des avantages concurrentiels. Le pionnier peut tirer un
bénéfice important puisqu'il est seul sur le nouveau marché, et jouit d'une politique de prix
très favorable. Ultérieurement, cette avance lui permettra de remodeler sa politique de prix,
de son produit ou de son marketing en général. Il peut même dissuader les autres concurrents
de pénétrer son marché ou du moins, les retarder.
Il faut distinguer entre « délai » d’imitation et le « temps » d’imitation. Selon E.
Mansfield(1985), le temps d’imitation est le laps de temps qui sépare le début de la recherche
appliquée chez l’imitateur (s’il y en a) sur le produit imité, de la date de son introduction sur
le marché.

27
La notion de « response time » doit être distinguée de celle de « lead time » selon E. Von
Hippel (1982).
L’avance sur les concurrents(le « lead time ») est le laps de temps qui sépare l’introduction de
l’innovation et la fin des monopoles de l’innovateur (expiration des droits de propriété
industrielle, et des accords de secret). Ce temps représente la durée d’avance de l’innovateur
sur ses concurrents, donc la durée qui lui permettra de mieux profiter des rentes de son
innovation.
Le temps de réponse (« response time ») est le laps de temps que nécessite la réponse des
imitateurs, à partir de la fin des mécanismes de protection de l’innovation. En d’autres termes,
c’est le temps qui sépare entre la date où l’innovation ou plus généralement le savoir sera libre
et d’accès total, et la date de lancement des premiers produits concurrents (les imitations).
Plusieurs recherches ont tenté de mesurer la variable « délai » d’imitation.

Les recherches de E. Mansfield :


Le travail de E. Mansfield (1985), sur 100 firmes américaines, montre que la nature et le
fonctionnement des nouveaux produits ou procédés sont connus par les firmes rivales en
moyenne dans un délai d’un an et d’environ 6 mois pour un tiers (1/3) d’entre elles. La
diffusion des produits est plus rapide que pour les procédés. Pour les produits, le délai
médian est de 6 à 12 mois. Pour les procédés, le délai médian est de 6 à 18 mois(sauf pour la
chimie et le pharmaceutique).
Dans l’article de E. Mansfield et alii(1981), les innovations étaient brevetées dans 70% des
cas, mais il n’y a eu aucun accord de concession de licences (à part un seul cas) sur les
périodes étudiées. Ceci prouve que les innovateurs sont réticents quant à la diffusion des
informations concernant leurs innovations de peur de se créer de nouveaux concurrents dans
le futur. Le temps d’imiter est faible. Il est de 0,70(E. Mansfield et alii., 1981). Les gains
moyens en termes de temps sont de 30% par rapport à l’innovation. Le temps mis pour
imiter, pour la moitié des produits est inférieur à 0.40 ou supérieur à 1.
E. Mansfield et alii(1981)donnent deux ratios sur les coûts et les délais. Sur 28 produits, ils
testent des variables pouvant influencer ces ratios. Dans 50% des cas, trois variables ont
prouvé leurs influences : les dépenses de R&D, et deux variables binaires qui sont les
exigences de santé publique pour les médicaments, et un nouvel usage pour un matériau
connu et breveté. Ces facteurs ont un effet sur le ratio de la vitesse d’imitation à cause de la
forte corrélation de celui-ci avec le coût de l’imitation. Les auteurs ont remarqué qu’il existe
une relation inverse entre le temps et le coût de l’imitation.

28
Les recherches de D. Baize :
L'un des travaux récents sur le délai d'imitation est celui de D. Baize (1996). Elle présente une
étude des déterminants du délai d'imitation d'une innovation à vocation commerciale, à partir
d'une approche par les actifs de l'entreprise. L’auteur a pris le cas de l'industrie des fabricants
de composants mécaniques pour véhicules en Allemagne, aux Etats-Unis, en France et en
Grande Bretagne, avec un total de 749 entreprises.
A partir de l'étude de cinq variables et leurs effets sur le délai d'imitation dans ce secteur (à
savoir : la complexité organisationnelle, le caractère tacite des actifs, la spécificité des actifs,
le degré de nouveauté, et la propriété industrielle), la spécificité des actifs et leurs caractères
tacites se présentent comme un frein à l'imitation. Quatre variables observables permettent de
retarder l'apparition des produits de l'imitation :
1. Le nombre de firmes extérieures disposant des actifs nécessaires à la mise au point de
l'innovation ;
2. Le temps d'apprentissage qui aurait été nécessaire à ces firmes pour mettre au point
l'innovation ;
3. La possibilité de décrire l'innovation dans des plans, schémas ou formules à partir
desquelles un homme de métier pourrait reproduire intégralement l'innovation ;
4. Le montant d'expériences mobilisées par l'entreprise innovatrice.
Le concept de complexité organisationnelle recueille des résultats insatisfaisants. Peut être
parce que le concept lui-même n'exerce pas d'influence causale significative sur le délai
d'imitation. La propriété industrielle exerce un impact significatif sur le délai d'imitation.
C’est un frein au moins psychologique à l'imitation. Le degré de nouveauté quant à lui, exerce
une influence positive sur le délai d'imitation.

Les recherches de F. Bensebaa :


Le délai est l’une des caractéristiques des réactions stratégiques. F. Bensebaa(2000) a étudié le
secteur presse magazine en France : la presse news et la presse économique. Face à
l’abondance des titres de la presse magazine, l’auteur a concentré son attention sur ces deux
segments avec les titres suivants : l’Evénement du Jeudi, le Nouvel Observateur et le Point
pour la presse magazine. Pour la presse économique, l’étude est centrée sur les titres
suivants : Capital, Challenge, Enjeux les Echos, l’entreprise, l’Essentiel du Management,
l’Expansion et le Nouvel Economiste. Une action doit être nouvelle dans le segment considéré
pour être caractérisée comme innovante. Le délai de réaction est mesuré par le temps du

29
déclenchement de la première action. Ce délai permet d’apprécier l’efficacité de l’action
engagée.
L’auteur a trouvé que le délai de réactions médiane pour la presse news est de 1755 jours.
Pour la presse économique, le délai est de 743 jours(F. Bensebaa, 2000).
Ce délai peut être raccourci ou allongé selon plusieurs facteurs. Les actions stratégiques
retardent l’imitation. Ce sont des actions avec de grandes conditions de mises en œuvre(F.
Bensebaa, 2000). C’est des actions qui nécessitent des ressources considérables.

Autres recherches :
Les recherches citées dans cette partie n’ont pas mesuré statistiquement la variable « délai »
mais ont aidé à la comprendre et à saisir les facteurs qui l’influencent positivement et
négativement.
Les différentes théories de l’innovation ont souligné plusieurs facteurs susceptibles
d’influencer le délai d’imitation.
Comme pour le coût de l’imitation, les caractéristiques des actifs de l’entreprise innovante,
selon la RBV(la complexité, le caractère tacite et la spécificité) rendent l’imitation plus
longue à opérer.
L’imitation serait alors moins rapide et plus difficile pour une innovation mise au point à
partir d’actifs spécifiques, tacites dans une organisation complexe, que pour une innovation
élaborée à partir d’actifs génériques, formalisés et peu complexes.
Les mécanismes d’isolation et l’ambiguïté causale remplissent le même rôle dans le
retardement de l’imitation et/ou sa dissuasion.
La théorie de transilience propose le concept de degré de nouveauté. Plus l’innovation intègre
un haut degré de nouveauté, plus son imitation est retardée.
Les différentes barrières à l’entrée(économies d’échelle, différenciation, coût, accès aux
capitaux) peuvent aussi retarder l’apparition des imitations.
Le brevet, ou plus généralement, les outils de protection de la propriété industrielle rendent
l’imitation difficile. Elle tend ainsi à apparaître avec un délai.
J-L. Arrègle et aliiii(2000) expliquent le retard de l’imitation comme réponse à l’innovation
par différents facteurs.
L’avantage concurrentiel réside dans la capacité des firmes à offrir différemment ou à inventer
de nouveaux marchés par de nouveaux produits ou de nouveaux besoins pour les
consommateurs. Il implique la modification des choix des consommateurs par l’intégration de
nouvelles logiques concurrentielles. Les nouvelles logiques intégrées par le jeu de la

30
concurrence déstabilisent les firmes en place. Elles ne peuvent ni avoir un avantage
spécifique, ni répondre rapidement et efficacement à cause notamment du temps d’adaptation
nécessaire et du manque de souplesse (dû à l’inertie par l’effet de l’habitude ).
La caractère de mobilité de la stratégie présente trois dimensions : le temps, l’espace et les
moyens. Le facteur temps est présent par l’effet de l’inertie, ainsi que par la non
compréhension des signaux émis et l’effet de surprise. L’effet d’inertie est en relation avec la
rapidité de l’action entreprise. La non compréhension des signaux émis par l’innovation,
brouille le système de surveillance des entreprises en place. Tout ceci combiné avec l’effet de
surprise, retarde le temps de réaction (d’adaptation) aux nouvelles règles du jeu de la
concurrence. Cette adaptation nécessite la restructuration des processus techniques et de
management ainsi que la mobilisation des compétences et l’acquisition des ressources. C’est
ce qui influence aussi l’écart en terme de temps.
Le poids du retard d'imitation peut être influencé par les obstacles pour obtenir l'information
dus à des éléments tels que le processus de production, le temps nécessaire à l'apprentissage
même après l'obtention de l'information, l'étendue ou le nombre des grandes firmes ou des
multinationales dans l'industrie, etc.
Selon L. Philippe(1984), le retard des entrées peut être le résultat du doute que le nouveau
produit soit vraiment un succès.
Le nombre de réactions est réduit dans le cas d’actions avec de grandes conditions de mise en
œuvre et qui nécessitent des efforts considérables. Le délai d’imitation est plus long dans ce
cas car la plupart des firmes sont incapables de répondre ou incapables de répondre assez
rapidement(M. Chen, K. Smith, C. Grimm, 1992). C’est le cas des actions stratégiques(F.
Bensebaa, 2001).
D’autres facteurs peuvent expliquer le délai d’imitation : le secret, l’imperfection de la
connaissance obtenue par l’imitateur et le savoir-faire de l’innovateur.
Un exemple typique de ce délai peut être représenté par le cas d'EMI avec le scanner médical.
L'estimation du temps d'avance peut être l’une des raisons d'échec de l'entreprise dans le
maintien de son avantage concurrentiel. EMI pensait disposer d'un temps d'avance sur ses
concurrents de 4 ans. Ce qui n'a pas été le cas puisqu'ils ont réussi à la rattraper 18 mois après
le lancement de son produit(le scanner médical). Elle ne disposait pas de temps pour élaborer
une stratégie défensive à partir de la fidélisation des clients, par exemple ou l'amélioration du
produit, et l'élargissement de la gamme.
Comme on l’a vu dans les paragraphes précédant, l’ordre d’entrée sur un marché n’est pas une
garantie absolue du succès ou de l’échec d’une firme. En effet, et dans des marchés

31
caractérisés par l'incertitude technique (impliquant les variations de la technologie) et de
marché(qui renvoie à la demande incertaine d'un produit), le délai d'imitation combiné avec
la retardation d'achat (ou le report d'achat) sera une raison de succès de l'imitation. En effet, le
report d'achat peut anéantir les profits des innovations lorsque les clients remettent leurs
achats à plus tard, anticipant ainsi la prochaine génération de produits qui va incorporer des
caractéristiques plus performantes et des baisses de prix par rapport à la première génération.
Le retard d'une firme n'est donc pas toujours un désavantage.
Soulignons que les capacités de l’imitateur lui-même, ses ressources et ses aptitudes, jouent
un rôle dominant dans la détermination des coûts et des délais d’imitation.

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Conclusion :
Certaines copies ne sont ni des contrefaçons ni des imitations réflectives mais des copies en
« trompe l’œil » selon l’expression de D. Baize(1997) comme c’est le cas des MDD par
exemple. De ce fait, l’imitation est un concept protéiforme. Une définition de l’imitation ne
peut être envisagée sans un continuum.
Pour la définition de l’imitation, sa typologie et sa relation avec l’innovation et la contrefaçon,
D. Baize(1997) propose ainsi un continuum définitionnel puisque l’imitation englobe un
certain nombre de pratiques : de la pure et simple copie jusqu’à la copie réflective ou
intelligente.
Ce continuum va de l’innovation à la contrefaçon en passant par des catégories d’imitations
intermédiaires.
La convergence vers un modèle partagé institutionnalise le comportement parmi les firmes en
concurrence en créant des croyances communes sur le sens et l’appropriation des structures
organisationnelles, des pratiques, des stratégies, des actions et les réseaux de relations. Ceci
facilite l’imitation inter-organisationnelle en permettant au décideur d’interpréter et de donner
un sens à l’information sur les autres firmes et leurs comportements.
Les cibles de l’imitation sont généralement les pratiques les plus utilisées, des entreprises
grandes, larges et réussies avec un accès supérieur en termes de ressources, d’informations et
de capitaux. C’est donc la réussite et le succès qui attire, le plus, les imitateurs.
L’imitation est une stratégie viable dans certaines industries et sous certaines conditions. Elle
économise les coûts et les délais et peut s’avérer fructueuse pour la firme qui l’entreprend
mais aussi pour la concurrence et les consommateurs aussi. D’après ces réflexions, l’imitation
peut être considérée comme une stratégie de suiveur par la reproduction d’un produit ou d’un
procédé nouveau sur le marché. Cette reproduction peut être partielle(on parlera alors
d’imitation réflective) ou totale(on parlera alors d’imitation copie). Une telle stratégie
économise les coûts de R&D, de recherche d’informations et de prise de décision. Ces coûts
peuvent être élevés si l’imitateur réagis tardivement, ne possède pas les ressources requises
pour la reproduction, ou l’expérience dans un domaine qui lui est nouveau par exemple. Il
peuvent l’être aussi(les coûts élevés) en cas de l’existence d’un brevet où l’imitateur devrait
trouver les moyens de le contourner, ou dans le cas de l’introduction d’améliorations dans le
produit nouveau. Le délai d’imitation est fonction des capacités de l’imitateur aussi et du
temps requis pour la reproduction.

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