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Jean Bodin et la hausse des prix (1568)

I.Introduction
Croissance, inflation, demande et circulation de la monnaie sont liées, nous le savons aujourd’hui. Mais il
n’en a pas toujours été ainsi. Les lettrés n’ont vraiment commencé à réfléchir à la question qu’au XVIème siècle ;
avant, il y avait simplement eu des descriptions, sans analyse approfondie des causes et des conséquences. Jean
Bodin est l’un des acteurs de ce changement. Né en 1529 à Angers (et mort de la peste en 1596 à Laon), il est fils de
tailleur et appartient à une famille bourgeoise. Il étudie d’abord au couvent des Carmes à Angers puis à l’Université
et au Collège de France à Paris. En homme de son temps, il est très ouvert et s’intéresse à la scolastique comme à
l’humanisme, à la philosophie comme à l’économie. Juriste de formation, il exerce le métier d’avocat et rédige des
traités de droits et de politique comme les Six Livres de la République où il prend le contre-pied de Machiavel ; il est
aussi l’auteur d’une réflexion sur l’histoire. En 1568, il publie la Réponse au paradoxe de M. de Malestroict touchant
l’enchérissement de toutes choses, et le moyen d’y remédier.
C’est de cet ouvrage qu’est issu notre texte. Ce livre est un traité (texte technique destiné aux lettrés et
notamment aux décideurs) d’économie politique (il n’y avait pas vraiment de spécialiste de la question à l’époque
mais il était courant pour les membres des classes supérieures de la société de s’y intéresser) destiné à la publication,
écrit en français. Il a été réédité en 1578. Comme le titre, l’indique, le texte se veut une réponse à un autre
intellectuel, sur les causes de l’inflation. Il convient de noter que l’auteur est contemporain des faits qu’il décrit, ce
qui conforte la valeur de son témoignage, au moins pour les faits. Les années 1350-1450 ont vu un déclin
démographique et agricole à cause de la peste et de la guerre de Cent Ans (1337-1453). Par contraste, certains
historiens ont nommé la première partie du XVIème siècle, le « Beau XVIème siècle ». Cette période dura jusque
vers 1520 à 1550 selon les historiens (Jean Jacquart le fait aller jusque vers 1560) ; ce ne fut guère qu’un rattrapage
démographique et économique. Selon Cornette, la France comptait 20 millions d’habitants en 1320, 10 millions en
1420 et à nouveau 20 millions vers 1450. La production économique augmenta aussi avec la hausse de l’offre et de la
production et la découverte de nouvelles sources de métaux précieux en Amérique que les Espagnols ramenèrent sur
le continent européen. Tout ceci semble a priori positif. Mais en même temps que la croissance, les prix
commencèrent à monter. C’est pourquoi on peut se demander dans quelle mesure la hausse des prix, phénomène non
monocausal, a abouti à des conséquences différenciées. Pour cela, nous verrons dans une première partie la hausse
des prix. Dans un second temps, nous nous intéresserons aux causes de cette hausse des prix selon Bodin. Enfin, nous
nous attacherons aux conséquences différenciées du phénomène.

II.La hausse des prix


Les faits dont il est question
• Jean Bodin décrit brièvement la hausse des prix, principalement dans le premier paragraphe (lignes 1 à 7). La
richesse vient à l’époque de la terre, aussi n’est-ce point étonnant qu’il s’intéresse à l’agriculture. Les
différents lieux évoqués à la ligne 1 et à la ligne 2 sont de grandes zones agricoles, encore aujourd’hui, que ce
soit des bassins sédimentaires de subsidence (tels le Bassin Parisien et la Saintonge dans le Bassin aquitain)
ou des fossés tectoniques d’effondrement (comme la Limagne).
• Bodin affirme que les prix des terres agricoles ont été multipliés par trois en 50 ans (lignes 3 et 4). La fiabilité
de cette affirmation doit être vérifiée étant donné que Bodin publie en 1568 donc remonte jusqu’à la fin des
années 1510. Or il est né en 1529 et ne peut donc pas avoir été un témoin direct.
• Les études dont nous disposons pour Paris affirment qu’entre 1510 et 1580, le taux d’inflation moyen fut de
2,6 %. Rappelons que stricto sensu l’inflation désigne le gonflement de la masse monétaire dont nous savons
aujourd’hui qu’il entraîne une hausse des prix ; d’où le sens commun de ce mot, que nous utiliserons
désormais. Une inflation à 2,6 % par an aboutit à une sur 50 ans à une multiplication des prix par 3,6. On peut
donc penser que Bodin n’exagère pas.
• Nous ne disposons d’archives que pour les produits agricoles mais l’étude de celle que nous avons confirment
encore le chiffre de Bodin : Entre 1520 et 1590, le prix du blé a été multiplié par 5 ; à Toulouse, le froment a
vu son prix tripler entre 1500 et 1560, ce qui correspond plus ou moins à la période dont parle Bodin.
• Avec l’affirmation aux lignes 6 et 7 « écus pesant un dixième moins que ce qu’ils pesaient il y a 300 ans »,
Bodin évoque ce qu’on l’on appelle à l’époque un « surhaussement » de la monnaie, c’est-à-dire une
dévaluation. La dépréciation de la monnaie est un fait avéré, lié à une croissance de la dette de l’Etat.
Une controverse
• La hausse des prix n’est pas passée inaperçue des contemporains. Jean de Malestroit (mort en 1578),
conseiller du roi à la Chambre des comptes fut chargé en 1563 d’une enquête sur l’inflation. Il livre ses
réflexions en 1566 dans Les paradoxes du seigneur de Mallestroit sur le faict des monnoyes. Le mot
« paradoxes » qui apparaît dans le titre vient de sa théorie résumée par la citation suivante : « on se plaint à
tort en France de l’enchérissement de toutes choses, attendu que rien ne s’y est enchéri depuis trois cents
ans ». Autrement dit, il y a eu une hausse des prix en valeur absolue par rapport à la monnaie mais la valeur
des choses n’a pas changé : la monnaie s’est simplement dépréciée. Si les pièces de monnaie contenaient trois
fois plus de métal précieux 50 ans avant, il est logique que pour la même marchandise on ait l’impression de
dépenser trois fois plus. Mais le prix en valeur relative reste constant : la hausse n’est pas réelle mais
nominale.
• En 1568, Jean Bodin manifeste son désaccord (les débats sont fréquents chez les lettrés) dans sa Réponse aux
paradoxes de M. de Malestroit. Dans l’édition de 1568, il se contente d’évoquer la dévaluation comme le
montrent les lignes 6 et 7 (« écus pesant un dixième moins que ce qu’ils pesaient il y a trois cents ans ») ; on
remarque qu’il répond ainsi à la citation précédemment donnée de Malestroit car il utilise la même unité de
temps (300 ans). Dans l’édition de 1578, il conçoit que ce soit une cause de la hausse des prix mais mineure.
Quelles sont alors les explications que Jean Bodin propose pour la hausse des prix ?

III.Les causes selon Bodin


La cause principale : l’afflux de métaux précieux depuis l’Amérique
• C’est dans le deuxième paragraphe et particulièrement aux lignes 8 à 14 que Jean Bodin nous livre son
explication principale, à savoir l’afflux de métaux précieux depuis l’Amérique Latine. Cet afflux de métaux
précieux peut être une cause valable dans la mesure où ce n’est pas la première fois qu’un tel phénomène a
lieu dans l’histoire, avec des conséquences économiques importantes. Ainsi, le pillage de l’empire perse par
Alexandre le Grand a entraîné d’importants flux d’or et d’argent de l’est (Perse) vers l’ouest (la Grèce),
provoquant une chute de la compétitivité de la Grèce et d’autres conséquences majeures.
• Ici, Bodin propose la même explication. À la ligne 9, il évoque les « terres neuves pleines d’or et d’argent »,
périphrase qui renvoie à l’Amérique Latine, sous domination espagnole comme il l’explique à la ligne 10. il
établit ailleurs dans son livre un lien entre l’afflux de métaux précieux et la hausse des prix ainsi que la
diffusion du phénomène en Europe : « « Voilà, Monsieur, les moyens qui nous ont apporté l’or et l’argent en
abondance depuis deux cens ans. Il y en a beaucoup plus en Espagne et en Italie qu'en France, parce que la
noblesse même en Italie trafique, et le peuple d'Espagne n’a autre occupation. Aussi tout est plus cher en
Espagne et en Italie qu'en France, et plus en Espagne qu'en Italie ».
• Les prix ont commencé par monter en Espagne et sa main d’œuvre perd de sa compétitivité, ce qui a favorisé
les importations depuis l’Italie (commerçante) et la France (proche et qui, comme géant démographique,
produit beaucoup). Aux lignes 12 et 13, Bodin énumère les produits concernés, très variés : « les blés, les
toiles, les draps, le pastel, le rodon, le papier, les livres, voire la menuiserie et tous ouvrages de main ».
L’Espagne importe donc tout et pour importer plus est contrainte « d’aller chercher au bout du monde l’or,
l’argent ». De plus en plus de métaux précieux inondent donc le marché français, qui connaît à son tour une
hausse des prix.

Les causes secondaires


• Aux lignes 14 et 15, la Grande-Bretagne, la Scandinavie et la région baltique sont accusées du même
phénomène que l’Espagne, avec leur propres mines : « l’Anglais, l’Ecossais et tout le peuple de Norvège,
Suède, Danemark et de la côte baltique, qui ont une infinité de minières… acheter nos vins, nos safrans, nos
pruneaux, nos pastels et surtout notre sel ». Aux yeux de Bodin, le phénomène semble moins important : il
occupe une place moindre dans le texte et l’énumération est moins longue (sans compter qu’il ne cite que des
produits alimentaires et non des biens manufacturés).
• Une deuxième cause est le développement du commerce international. Sans revenir aux énumérations du
paragraphe deux, on peut citer les « épiceries » à la ligne 14, qui viennent du « bout du monde » mais sont des
produits de consommation finale et non des métaux précieux. Le paragraphe 4 des lignes 25 à 27 parle du
trafic avec le Levant, qui peut-être compris au sens strict donné par les Italiens à la fin du Moyen Âge de
l’ancienne Phénicie (Liban, Syrie) ou plus large d’Orient ; la référence au Ponant dans la partie tronquée du
texte, c’est-à-dire à l’ouest, permet de pencher en faveur de la seconde hypothèse. La France avait accueilli en
1484 une ambassade ottomane mais l’alliance entre les deux pays ne date que des capitulations de 1536,
évoquées à la ligne 26 et à la ligne 27 (« amitié de la maison de France avec la maison des Ottomans du temps
du roi François 1er »). Le développement du commerce maritime est évoqué lignes 10 et 11 par « a montré la
route à nos pilotes pour faire le trou d’Afrique avec un merveilleux profit ». Le sujet est « le Castillan » mais
il convient de noter que le premier européen à avoir atteint le Cap est Bartolomeu Dias et que le premier à
avoir atteint l’Inde en contournant l’Afrique est Vasco de Gama, tous deux portugais. L’Espagne s’intéressait
plus à l’ouest comme le montre Magellan (Portugais, bien qu’au service de la Couronne d’Espagne). Il y a
donc une erreur probable de Bodin, à moins qu’il n’évoque des Espagnols qui auraient suivi les Portugais plus
tard.
• La troisième explication est donnée aux lignes 19 à 24, c’est-à-dire dans le troisième paragraphe. En affirmant
« depuis six ou sept vingt ans, c’est le peuple infini qui est multiplié », Bodin parle de la croissance
démographique qui reprend vers 1450 ; d’ailleurs, si l’on ajoute 120 ans à 1450, on tombe bien à peu près sur
la date de rédaction du livre. Jean Bodin n’évoque pas directement la fin de la guerre de Cent Ans (1337-
1463) mais uniquement le renforcement du pouvoir du roi face à la « maison d’Orléans et de Bourgogne »
(lignes 21 et 22), Louis d’Orléans (1372-1407) s’opposant à Jean Sans Peur (1371-1419) qui soutenait les
Anglais et fit assassiner Louis d’Orléans qui était son cousin. Jean Bodin écrit peu après le début des guerres
de religion (1562) et s’il les évoque (« troubles de la religion » à la ligne 23) comme coup d’arrêt à
l’expansion démographique, il n’a pas le recul nécessaire pour appréhender le phénomène. Le recul de la
mortalité lié à un relatif développement de l’hygiène a joué mais n’est pas évoqué par Bodin (faute de
recul ?) ; dans les parties tronquées du texte, Bodin parle aussi des défrichements (« depuis cent ans, on a
défriché un pays infini de forêts et de landes ».
• La dernière expliquée évoquée par Bodin dans le texte est le développement des activités bancaires à Lyon
notamment sous Henri II (1519-1547-1559) évoqué ligne 29. Deuxième ville du Royaume sous François 1er
(50 000 habitants), la ville était très attractive grâce à ses imprimeurs, à ses quatre foires annuelles, aux
franchises royales, au commerce avec les Etats germaniques et à la soie. C’est au XVIème siècle la première
place bancaire en Europe et elle compte 75 banques italiennes en 1568, date de rédaction du texte. À la ligne
30, Bodin parle d’ailleurs « des Florentins, Lucquois ». Les Suisses sont aussi présents (lignes 30 et 31
« Genevois, Suisses). L’arrivée de capitaux étrangers à Lyon et les placements à Paris entre les lignes 30 et 35
provoquèrent un gonflement de la masse monétaire en France, donc une inflation, tout comme l’essor du
crédit.
• Signalons à titre indicatif que Bodin évoque dans les zones tronquées du texte d’autres causes de l’inflation :
l’urbanisation (qui augmente le recours à la monnaie), les monopoles (renforcés par les corporations
d’artisans), la hausse de la demande extérieure notamment en produits agricoles (qui provoque une hausse des
prix par la loi de l’offre et de la demande ; « le blé n’est pas sitôt en grain que l’Espagnol ne l’emporte ») et
les dépenses somptuaires des plus riches qui tirent la demande vers le haut (mais c’est surtout valable pour les
produits de luxe).

IV.Des conséquences différenciées


Un enrichissement mis en valeur par Bodin
• Le seul jugement clair exprimé ici par Bodin est bref et positif : il s’agit des derniers mots du texte, à savoir
« enrichi cette ville » (à propos de Lyon), à la ligne 35. Les villes accrurent à cette époque leur emprise sur la
campagne car les artisans les plus aisés et les bourgeois bénéficièrent de la hausse des prix. Dans les
campagnes, il en alla de même pour les seigneurs qui avaient des redevances en nature et pour les gros
propriétaires (coqs de village) et laboureurs qui virent leurs excédents augmenter en valeur. Cet
enrichissement, manifestation de la croissance économique, est visible dans les actes des notaires, contrats et
testaments. Jean-Marc Moriceau a montré que les laboureurs parisiens y avaient beaucoup gagné. Les régions
épargnées par les troubles et les catastrophes s’en sortirent plutôt bien.
• La hausse de la population provoqua une hausse de la demande et au début du XVIème siècle la tension sur
les salaires favorisa aussi une partie de la population ou compensa au moins la hausse des prix. C’est
notamment valable pour les artisans, en particulier sur du secteur du luxe. L’Espagne ne put conserver son
monopole sur les métaux précieux et la France en profita largement car son artisanat était plus compétitif
(« l’abondance d’or et d’argent qui est la richesse d’un pays, doit en partie excuser la cherté ») ; la hausse des
prix est donc le symbole d’une activité florissante. On ne peut donc pas dire que la hausse des prix fut
entièrement négative.

Un appauvrissement des plus démunis qui creuse les inégalités


• Il est expliqué par Bodin dans la partie tronquée du texte. Mais on peut néanmoins déceler dans le premier
paragraphe un jugement négatif sur la hausse des prix avec l’emploi de « néanmoins » à la ligne 3 et de l’effet
d’insistance à la ligne 4 (« non pas au double, mais au triple ») et à la ligne 6 (« voire le triple »).
• Après 1520-1530, il y a moins de nécessité et la main d’œuvre, abondante, est pénalisée ; il y a une érosion
des salaires négociés à la baisse. Dans le même temps, l’inflation se poursuit (notamment sous l’effet de
difficultés d’approvisionnement, liées aux guerres de religion) touche d’abord les denrées alimentaires ; il y a
un découplage entre les prix et les salaires.
• Cela creuse donc les écarts sociaux car celui nuit aux plus démunis, appauvris par les coûts élevés de la vie
(paysans et artisans sont les plus touchés). La croissance économique engendre la précarité et les écarts se
creusent. Le Beau XVIème siècle dure peu et a des effets pervers, conduisant une grande partie de la
population sur les marges de la pauvreté, surtout en ville (exode des pauvres depuis la campagne). La
diminution du pouvoir d’achat aurait atteint 2/3 en un siècle. L’immense majorité des paysans qui avaient à
peine de quoi vivre (la croissance démographique a contribué au morcellement des terres) n’a pas tiré parti de
la hausse des prix au début du siècle mais l’ont subi. L’endettement a augmenté et les plus pauvres ont dû
réduire leur consommation de viande, de beurre et de vin au profit du pain, moins onéreux et plus nourricier
en proportion.
• De plus, les moyens de transports peu développés étaient insuffisants pour acheminer les surplus des zones
épargnées par les conditions météorologiques vers celles en crise.
• Notons que même certains seigneurs ont souffert de l’inflation, ceux qui percevaient des redevances en
argent, dévaluées par la hausse des prix (certains ont tenté de les transformer en impôts en nature).

V.Conclusion
Jean Bodin a construit dans ce texte une des premières réflexions sur les causes de l’inflation ; force est de
reconnaître qu’il s’est fondé sur des données fiables et que sa réflexion est de qualité. Le juriste et historien angevin a
expliqué la hausse des prix par l’augmentation de la monnaie en circulation, l’essor du commerce international qui
facilite sa circulation tout comme le crédit mais aussi la paix et la croissance démographique qui tire la demande,
l’urbanisation, les dépenses en articles de luxe, … Cette hausse des prix est donc l’expression de la croissance qui ne
profit pas à tous : certains s’enrichirent alors que d’autres virent leur niveau de vie diminuer, la différenciation se
faisant par les excédents agricoles. Bodin avait vu juste en soulignant le rôle des métaux venus d’Amérique Latine
via l’Espagne. On peut résumer sa thèse par cette citation : « je trouve que la cherté que nous voyons vient de trois
causes. La principale et presque seule est l’abondance d’argent ».
Cette tendance à une explication monocausale a certes été reprise par Fernand Braudel dans sa thèse sur la
méditerranée au temps de Philippe II : « aucun doute n’est possible sur l’effet des arrivées d’or et d’argent en
provenance du Nouveau Monde […] entre la courbe des arrivées des métaux précieux d’Amérique et celle des prix,
au cours du XVIème siècle, la coïncidence est si évident qu’un lien physique, mécanique, paraît lier l’une à l’autre.
Tout a été commandé par l’augmentation du stock de métaux précieux ». L’historien de l’économie italien Carlo
Maria Cipolla a nuancé ce jugement pour l’Italie. Dans la France au XVIème siècle, Laurent Bourquin souligne que
de nombreux historiens considèrent désormais la croissance démographique comme le principal facteur
d’accroissement des prix, à cause de l’augmentation de la demande qui en résulte.
Il n’en reste pas moins qu’entre 1503 et 1600 les arrivées de métaux précieux furent multipliées par 10 en
Espagne (plus de 150 tonnes d’or et près de 7 500 tonnes d’argent arrivèrent dans le pays), ce qui a forcément eu des
conséquences dont la hausse des prix. Montesquieu a repris dans ses Considérations sur la richesse de l’Espagne
l’explication de Bodin pour la hausse des prix. Dans la lignée du dominicain Martin d’Azpilcueta, Jean Bodin a été le
précurseur de la théorie quantitative de la monnaie, théorisée au XIXème siècle par Irving Fisher (MV = PT : le
produit de la monnaie en circulation et de sa vitesse de circulation est égal au prix multiplié par le volume des
transactions). Mais à l’époque, Jean Bodin ne fut pas suivi contrairement à Malestroit. Pourtant, il préconisait un
contrôle de la monnaie (refus de la dévaluation de la livre), un rejet des monopoles et une limitation des exportations
de denrées agricoles. En cela, Bodin est un mercantiliste populationniste (« il n’est de richesse que d’hommes ») qui
annonce le mouvement physiocrate du XVIIIème siècle.

VI.Bibliographie
• Joël Cornette, L’affirmation de l’Etat absolu 1492-1652, Paris : Hachette Supérieur, 2009 (6ème édition)
• Laurent Bourquin, La France au XVIème siècle (1483-1610), Paris : 2007.
• (sous la dir. de Fernand Braudel et Ernest Labrousse) Le Roy Ladurie, Emmanuel et Morineau, Michel, Histoire
économique et sociale de la France. 1 : 1450-1660. Second volume : Paysannerie et croissance, Paris : Presses
Universitaires de France, 2007.
• Jacques Dûpaquier, Histoire de la population française - De la Renaissance à 1789-, Paris : Presses Universitaires
de France, 1995.
• Joël Cornette. Jean Bodin ou la richesse expliquée aux profanes. L’histoire. 2000, n0239 (janvier ; « Mille ans de
croissance économique »), p 54.
• Philippe Desan, L’imaginaire économique de la Renaissance, Paris : presses de l’université de Paris-Sorbone,
2002.
• Jean Bodin, La Response de Jean Bodin à M. de Malestroit- 1568 (édition H. Hauser, Paris : Armand Colin, 1932).

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