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Bernard Flusin

Didascalie de Constantin Stilbès sur le mandylion et la sainte


tuile (BHG 796m)
In: Revue des études byzantines, tome 55, 1997. pp. 53-79.

Abstract
REB 55 1997 France p. 53-79
B. Flusin, Didascalie de Constantin Stilbès sur le mandylion et la sainte tuile (BHG 796m). — The Didascalia of Constantine
Stilbes is here published and translated. The date of its delivering can be precised in reference to the author's career. Different
testimonies of the Xth and XIIth centuries shed light on the origin and the nature of the objects which were kept in the Pharos
church in Constantinople.

Résumé
La didascalie de Constantin Stilbès sur le Mandylion et la Tuile est éditée et traduite. La date à laquelle elle fut prononcée peut
être précisée au regard de la carrière de l'auteur. Divers témoignages des 10c-12e siècles permettent d'éclairer l'origine et la
nature des objets conservés dans l'église du Pharos à Constantinople.

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Flusin Bernard. Didascalie de Constantin Stilbès sur le mandylion et la sainte tuile (BHG 796m). In: Revue des études
byzantines, tome 55, 1997. pp. 53-79.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_0766-5598_1997_num_55_1_1936
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES
SUR LE MANDYLION ET LA SAINTE TUILE
{BHG 796m).

Bernard FLUSIN

Résumé : La didascalie de Constantin Stilbès sur le Mandylion et la Tuile est éditée et


traduite. La date à laquelle elle fut prononcée peut être précisée au regard de la carrière de
l'auteur. Divers témoignages des 10c-12e siècles permettent d'éclairer l'origine et la nature
des objets conservés dans l'église du Pharos à Constantinople.

Le dossier de l'image acheiropoiète d'Édesse contient, outre l'homélie


de Grégoire le Référendaire dont le Révérend Père Dubarle donne dans
cette revue la première édition ', une autre pièce inédite : la didascalie de
Constantin Stilbès sur le saint mandylion et sur la sainte tuile BHG 796m
qu'il a paru intéressant de faire connaître simultanément afin de suivre
ainsi, dans la Constantinople du 12e siècle, peu avant la quatrième croi
sade, les destinées de ces reliques et l'évolution des traditions qui les
concernent.

L'auteur et la date de la didascalie

La carrière de Constantin Stilbès, métropolite de Cyzique sous le nom


monastique de Cyrille, est assez bien connue depuis une note où le Père
J. Darrouzès, relevant ce que notre auteur dit dans la leçon inaugurale
qu'il prononce comme didascale du Psautier, propose la reconstitution
suivante : Stilbès fait ses débuts sous Luc Chrysobergès, grade sous
Georges II Xiphilin, et devient enfin didascale de l'Apôtre sous Jean X
Kamatèros 2. Pour Darrouzès, Stilbès commence sa carrière à Saint-Paul,

1. Voir A. -M. Dubarle, L'homélie de Grégoire le Référendaire pour la réception de


l'image d'Édesse, REB 55, 1997, p. 5-51.
2. J. Darrouzès, Notes de littérature et de critique, REB 18, 1960, (= Id., Littérature et
histoire des textes byzantins. Londres, 1972) p. 184-187; voir aussi R. Browning, The

Revue des Études Byzantines 55, 1997, p. 53-79.


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passe ensuite au Chalkitès, puis à Sainte-Sophie. La première leçon pro


noncée par Stilbès au titre de didascale de l'Apôtre permet de préciser
non seulement le déroulement de sa carrière, mais aussi, comme l'a
nnonce le titre 3, le temps passé dans chaque poste. Elle fournit ainsi, pour
dater le discours que nous éditons et auquel elle fait allusion, des indices
assez précis, de sorte qu'il est nécessaire de citer largement le passage4 :

Παύλος ήμ<άς> έφύτευσεν, Άπολλώς ήρδευσεν, ό δε Φεος


ηϋξανε· Παύλος μεν εκείνος άρχιθύτης ό ίσαπόστολος και τον βίον
αντικρυς ευαγγελικός, μονοχίτων καΐ του σταυρού φορτηγός.
Άπολλώς δέ ό μοσχεύσας, ό της ίερας φυτηκομίας η γεωργίας
επώνυμος ιεράρχης- και το πότισμα της αυξήσεως η"ν άρραβών, ό
βαθ-μος ό τω παραδείσω τούτω άγχιστατών. Θεός δε ό αύξήσας,
ε'ιτε ό ούρανόΦεν έπινεύων τοις καΦ'ήμας, ε'ιτε μην ό γη#εν και
μεθ-'ήμών και άνατρέχων εις ουρανούς, ή των πατριαρχών θεοειδής
κορυφή, ό χαριτώνυμος, και τών χαρισμάτων ταμεΐον του
πνεύματος· και εις τόδε της άναΦηλήσεως έξεκαλέσατο, καν ουκ
ευκαρπον εκ φαυλότητος ιδίας το κήπευμα.
Και που ποτέ φύτευσις ή πρώτη και αρχική ; Έν τω του
Παύλου τεμένεΐ' εύσύμ6ολον και τούτο· και ήλίων εξάδα διπλήν

Patriarchal School at Constantinople in the Twelfth Century, II, Byz. 33, 1963, (= Id.,
Studies on Byzantine History, Literature and Education, n° II, Londres, 1977), p. 29-31 ;
U. Criscuolo, Didascalia e versi di Costantino Stilbes, Δίπτυχα 2, 1980-1981, p. 78-79 ;
L. R. Cresci, La prolusione del Maestro dell'Apostolo. Messine, 1987, p. 15-18; W.
Lackner, Eine Abhandlung des Konstantinos Stilbes zum Problem der pseudo-
Chrysostomica, JOB 34, 1984, p. 107-121. La profession de foi éditée par P. van Deun,
La profession de foi de Constantin Stilbès dans l'Athous Vatopedinus 474, Byz.. 59, 1989,
p. 258-263, portant un titre très parallèle à celui de la didascalie ici éditée, confirme que
Cyrille est le nom monastique de Constantin.
3. Voici le début du titre tel que nous l'avons relevé dans le Barocc. gr. 25, fol. 275
(cf. L. R. Cresci, La prolusione del Maestro dell'Apostolo. Messine 1987, p. 42): Του
αύτου, ήτοι του Στιλ€η, διδασκαλία τών Φείων επιστολών έκφωνηΦεϊσα πρώτως· έν
τώ αύτώ διδασκαλικώ. περιηγείται δέ ό λόγος τα διδασκαλικά 6'σα διηλθεν ό
γράφων και τους έν αύτοϊς χρόνους και πόνους και ώς τι σεμνον και αντικρυς και
πλαγίως παρενείρει το περιοδευσαι αύτον τα φθάσαντα διδασκαλικά κατά
συνέχειαν, και άνυπερβάτως μέχρις του τών επιστολών, ώς ούδ'αύτος ό τηνικαϋτα
οικουμενικός, έκ περικοπής αναχθείς εις το εύαγγέλιον : «Du même auteur, Stilbes,
didascalie inaugurale pour les divines épîtres, prononcée en cette même charge de didas
cale. Le discours fait le tour de toutes les charges de didascale qu'a exercées l'auteur, avec
le temps qu'il y a passé et les peines endurées. Directement et obliquement, il insinue,
comme un avantage imposant, le fait d'avoir parcouru les précédentes charges de didas
caledans l'ordre, sans en sauter, jusqu'à celle des épîtres : chose que n'a pas faite même
le didascale œcuménique de l'époque, qui a été bombardé jusqu'à l'évangile en brûlant les
étapes.» À la différence de L. R. Cresci {op. cit., p. 42, 70), qui corrige διδασκαλικώ en
διδασκαλείω, je ne crois pas qu'il faille retoucher le texte. La didascalie dont nous avons
ici le titre n'a pas été prononcée dans le même didaskaleion que la précédente, c'est-à-dire
au Chalkitès, mais dans «le même didas/calikon», c'est-à-dire, me semble-t-il, puisqu'il
vient d'être question d'une didascalie des épîtres, le poste de didascale de l'Apôtre.
4. L. R. Cresci, p. 47-50, dont nous corrigeons tacitement le texte d'après notre propre
copie du Baroccianus.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 55

έξηριθ-μήσαμεν τοΐς εκεί... ΈκεΙΟ-εν άπήραμεν εις σταθμόν τον τοις


εντός τούτοις και προ^αΦμίοις άγχίΦυρον, έκ του αποστόλου έπι
τον άποστείλαντα, και την άλλοίωσιν μετά της δεσποτικής
αλλοιώσεως η έλλάμψεως έωρτάσαμεν και συνεπήρ&ημεν τοις
τελουμένοις εν τω Θαβώρ ει και των τηνικαυτα τριών ένταΰ#α
μαθητών, ε'ιτ'ούν διδασκάλων, χθαμαλώτεροι, προθεαματισΦέντων
την άστραπήν, και τον κέραμον και το υφός προσείπομεν, τα
χριστοειδη. Έκ της τρίβου τούτοις άνεκομίσΦημεν έκείνω τον
ιδρώτα τον πολύν άπεψήσαμεν, τω λί#ω τον κάματον μικρόν
έκοιμίσαμεν, ύποστορέσαντες τη παρειά, και την κατ 'αυτόν
διήγησιν φοροΰντες ένστόμιον εις τά διδασκαλία και
πανηγυρίζοντες εύροώτερον. Κα! κύρδεις έκείνας διττάς
άνανήχοντες του τών ιδρωτών κατακλυσμού διεβλέπομεν
ύπόμνησιν παρακλήσεως, όποιας άνωλέθ-ρους άνέστησεν ό
νεουργός του κόσμου Χριστός, τοις όψιγόνοις θεοσε^εΐν
διδασκαλία. Την ίστορίαν μανθ-άνετε. Και περιεκροτήσαμεν εις
ολας διττάς περιτροχάσεις ήλιακάς, ποσότητα τη ημών προβάσει
όμόλογον...
Και εφεξής εβλεψεν ήμας ό θείος Δαυίδ αναβαίνοντας, καΦώς
φησι, μετ 'αύτου και υποστενοντας το εμμοχ&ον της αναδρομής. "Η
τε 'Ιερουσαλήμ και το ιερόν μετά του προφήτου και βασιλέως
έδέχετο, και όμως έψαλτωδοΰμεν έόρτια της ημών αναβάσεως. Και
πάλιν διττή χρονική περιέλευσις· της γαρ αυτής προχωρήσεως ετι
τά σήμαντρα... άλλ'εχει νυν ήμας εκείθεν το άποστολικόν τοϋτο
κατάστημα· μόλις ως έπι τά σφέτερα έπανήλΦομεν.

«Paul nous a planté, Apollos nous a arrosé, Dieu nous a fait croître.
Paul, c'est le grand sacrificateur, l'égal des apôtres à la vie vraiment
évangélique, celui qui n'avait qu'une tunique et portait sa croix. Apollos,
qui nous a transplanté, c'est le grand prêtre dont le nom rappelle le jardi
nage ou l'agriculture sacrée, et l'eau dont il nous a arrosé était le gage de
notre accroissement : c'était le degré tout voisin de ce paradis. Dieu, qui
nous a fait croître, c'était soit Celui qui, du ciel, veille sur nous, soit
même celui qui, de terre, avec nous, s'élève vers les cieux, la cime sem
blable à Dieu qui domine les autres patriarches, celui qui porte le nom de
la grâce, le trésor des charismes de l'Esprit. C'est lui qui nous a appelé
pour nous faire ainsi fleurir, même si, du fait de notre indignité, la plante
qu'il a jardinéc ne porte pas de fruits.
Où fûmes-nous donc planté la première fois, tout au début ? Dans le
sanctuaire de Paul. Là encore, beau symbole ! Et là, nous avons
décompté double hexade de soleils... De là, nous sommes parti vers
l'étape qui est à la porte de l'espace intérieur où nous sommes, celui qui
précède les degrés : de l'envoyé, nous sommes allé vers Celui qui l'avait
envoyé et ce changement, nous l'avons fêté en même temps que la mutat
iondu Maître, c'est-à-dire Son illumination, et nous avons été exalté en
même temps que les initiés du Thabor, même si, plus bas que les trois
disciples qui se trouvaient là, c'est-à-dire les trois didascales, eux qui
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avaient vu avant nous l'éclair, nous avons adressé nos paroles à la tuile
et au tissu, ces objets qui portent la forme du Christ. Ils nous ont
accueilli après notre chemin : avec le tissu, nous avons essuyé nos sueurs
abondantes ; sur la pierre, placée sous notre joue, nous avons apaisé nos
peines d'un peu de sommeil. Nous sommes revenu à notre enseignement
la bouche emplie du récit qui la concerne et nous l'avons célébrée par un
flot d'éloquence. Ces deux stèles, alors que nous surnagions au déluge
des sueurs, nous les regardions : elles nous remémoraient le réconfort
divin, elles que le Christ, créateur du monde, avait érigées, indestruct
ibles, pour qu'elles enseignassent la piété aux générations à venir. Vous
comprenez l'histoire. Nous les avons applaudies pendant deux courses
complètes du soleil : nombre analogue à notre accroissement... Tout de
suite après, le divin David nous a vu, selon ses termes, monter avec lui et
gémir dans cette montée pénible. Jérusalem et le sanctuaire, avec le roi
prophète, nous accueillaient, et cependant, nous psalmodiions les
psaumes fêtant notre montée. Puis encore le double passage de l'année...
Et nous voici maintenant, après cela, dans cet état apostolique. Nous
voici revenu pour ainsi dire chez nous.»
Malgré le caractère inhabituellement explicite de ce document, des
difficultés subsistent. Les quatre étapes de la carrière de Stilbès (débuts
comme simple didascale à Saint-Paul ; passage au Chalkitès ; nomination
comme didascale du Psautier ; puis comme didascale de l'Apôtre) dépen
dentde trois patriarches, et seules les étapes extrêmes sont rapportées
assurément, pour la première, au patriarche «à la vie évangélique», pour
la dernière à celui «qui a le nom de la grâce». L'identification du premier
patriarche avec Luc Chrysobergès, qui vient naturellement à l'esprit,
pose, ainsi que l'a vu Browning5, un problème insurmontable, puis
qu'elle n'est pas compatible avec la durée de douze ans indiquée par
Stilbès: Luc est en effet patriarche de 1157 à 1170; Georges Xiphilin,
auquel Stilbès doit une ou deux promotions, de 1191 à 1198. La
deuxième difficulté vient de ce que nous ne savons pas clairement s'il
faut rapporter à Georges Xiphilin une seule promotion de Stilbès ou
deux ; de même pour Kamatèros. Il nous paraît donc prudent, pour dater
la didascalie que nous éditons, de tenir compte simplement de deux
faits : entre l'affectation de Stilbès au Chalkitès et sa nomination comme
didascale de l'apôtre quatre ans se sont écoulés ; cette nomination a été
le fait de Jean Kamatèros, tandis que le transfert au Chalkitès revient à
Georges Xiphilin. Comme Kamatèros est patriarche de 1198 à 1206,
Stilbès peut avoir été transféré au Chalkitès au plus tard en 1 198, au plus
tôt en 1 194. La didascalie que nous éditons, et dont nous savons par son
titre qu'elle fut prononcée pendant les deux années que Stilbès passe au
Chalkitès6 est donc à dater des années 1 194-1200. Peut-être voudra-t-on
encore restreindre les possibilités, en admettant avec L. R. Cresci et J.

5. R. Browning, The Patriarchal School ..., p. 30-31.


6. II est clair, par ailleurs, que Stilbès fait allusion à ce discours dans le passage que
nous avons traduit.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 57

Darrouzès 7 que ce fut Xiphilin qui nomma Stilbès didascale du Psautier.


Le discours sur le mandylion et la tuile serait alors antérieur à 1 198, et,
comme nous verrons qu'il fut sans doute prononcé un 16 août et que
Xiphlin meurt le 7 juillet 1198, les seules dates à prendre en considérat
ion seraient les années 1 194-1 197.
Pour le jour auquel la didascalie fut prononcée, l'hésitation est per
mise. La Sainte Tuile, à Constantinople, paraît avoir été d'abord fêtée au
jour anniversaire de sa translation, en même temps que le Précieux Sang,
le 23 ou le 24 janvier8. Un manuscrit de la Translatio de la tuile et du
sang atteste par ailleurs que ces reliques ont été célébrées aussi le
dimanche de l'Orthodoxie9. Ces dates, pour la didascalie de Stilbès,
nous paraissent peu vraisemblables. Il est plus probable que la coutume
s'est instaurée, à une date inconnue, de fêter les deux images acheiro-
poiètes du Sauveur le jour consacré à la plus célèbre d'entre elles, le
mandylion, c'est-à-dire le 16 août. On notera bien sûr que cette date
n'est pas sans signification dans la carrière de Stilbès, puisque son affec
tation au Chalkitès a coïncidé, nous dit-il, avec la Transfiguration du
Christ 10, c'est-à-dire qu'elle a eu lieu un 15 août. Il est tentant, dès lors,
de voir dans la didascalie BHG 796m le discours inaugural prononcé par
Constantin Stilbès au lendemain de sa nomination comme didascale au
Chalkitès, sous le patriarcat de Georges Xiphilin, un 16 août entre 1 194
et 1197.

Sources du récit de Stilbès

Si l'on met à part Tassez long prologue (§1-2) où Stilbès, s'adressant


à ses auditeurs, décrit la fête en cours avant de s'interroger sur ses or
igines, et l'épilogue (§1 1) où notre auteur, allégoriquement, tire la morale
de l'histoire, faisant à la situation politique de l'époque une allusion dont
la référence précise nous échappe ", l'essentiel de la didascalie (§3-10)

7. L. R. Cresci, op. cit., p. 16; V. Grumel, J. Darrouzès, Les regestes des actes dit
patriarcat de Constantinople. Vol. I. Les actes des patriarches. Fasc. II et III. Les regestes
de 715 à 1206, deuxième édition, Paris, 1989, p. 595 (n° 1 183a), p. 597 (n° 1 184 a). W.
Lackner, op. cit. (voir n. 2), p. 107, admet que Stilbès fut didascale du psautier de 1 196 à
1 198; la didascalie, qu'il prononce au Chalkitès, serait alors à dater des années 1194-
1 196.
8. C'est la date, en tout cas, qui est attestée pour la déposition des reliques aux
Blachernes dans la Translatio BHG 80 In, éd. F. Halkin, Inédits byzantins d Ochrida,
Candie et Moscou. [Subsidia hagiographica 38.] Bruxelles 1963, p. 259.
9. F. Halkin, op. cit., p. 255 (Mosc/uensis 161/Vlad. 379, s. XI).
10. L. R. Cresci, op. cit., p. 95, commentant ce passage, rejette l'identification de Val-
loiôsis dont parle Stilbès avec la Transfiguration, qui n'est jamais appelée de ce terme ni
dans les Évangiles, ni chez les Pères ; mais le terme qui glose άλλοίωσις, ελλαμψις,
paraît renvoyer à ελαμψεν de Mat. 17,1 ; par ailleurs, tout le passage fait allusion à l'ill
umination du Thabor.
1 1. Stilbès met en garde, semble-t-il, contre la tentation (pour le patriarche?) d'accéder
à la demande d'un prince (μέγας δυνάστης, αρχικός) qui l'appelle à son aide hors de
Constantinople. Il suffira, a l'exemple du Christ, de répondre par écrit, sans aller se mêler
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est occupé par un récit qui, répondant à la question «D'où nous vient un
si grand trésor?», raconte l'origine du mandylion et de la tuile. Il est
important pour notre propos de dire quel type de tradition représente
Stilbès et de déterminer si possible les sources qu'il utilise.
À partir de la translation de 944, deux traditions concernant l'origine
du mandylion se rencontrent à Constantinople. Pour la première, Jésus,
après s'être lavé le visage, imprime son image sur la serviette qu'il remet
au courrier d'Abgar, Ananias, lequel la porte à son maître. Pour la
deuxième, la sainte image est liée à l'agonie du Christ : elle est imprimée
par les sueurs sanglantes de Jésus sur la serviette qui, cette fois, est
remise à Thomas. Thomas la transmet à Thaddée, qui la porte enfin à
Abgar. Aucune autre tradition, à notre connaissance, n'est attestée dans
la capitale, si l'on excepte celle, tout-à-fait marginale, dont Robert de
Clan se fait l'écho et qui assigne à la «toile» et à la tuile une origine
constantinopolitaine 12. L'hypothèse du Père Dubarle, qui pense recon
naître dans un détail d'une phrase de Grégoire le Référendaire l'écho
d'une troisième tradition mettant en rapport le saint mandylion non plus
seulement avec l'agonie du Christ, mais avec sa mort, nous paraît mal
fondée l3. Ni le mot-à-mot du texte, ni la logique du récit ne sont en sa
faveur et cette légende si impressionnante serait par ailleurs restée sans
écho.
Les deux traditions que nous avons distinguées sont attestées, pour la
première (la serviette est rapportée par Ananias) dans le récit BHG 793
(A de Dobschiitz 14), qui est en particulier celui du Synaxaire de
Constantinople I5 ; pour la deuxième (sueurs de l'agonie et mandylion

«à la tourbe du peuple». Ces allusions semblent renvoyer à des troubles politiques, aux
quels l'orateur conseille de ne pas prendre part. Dans les années agitées de la fin du 12e
siècle, peut-être pensera-t-on plus particulièrement à la révolte du pseudo-Alexis
Comnène, qui contraint Alexis III Ange à quitter momentanément Constantinople : cf.
Nicetae Choniatae Historia, rec. I. A. van Dieten [CFHB XI/1], Berlin New York, 1975,
p. 461-463.
12. «Il eut jadis un saint homme en Constantinople ; si avint que cil sains nom recou
vrait de tuile la maison à une veuve femme pour l'amour Damedieu. Si comme il la
recouvrait, si s'aparut Nostre Sire à lui, si parla à lui. Or avoit li bons hom une toile
entour lui : Ça donne, fist Nostre Sire, celé toile. Et li bons hom li bailla, et Nostre Sire en
envelopa son visage, si que sa forme y fu empreintée ; puis li rebailla ; si li dist qu'il l'em-
portast et qu'il la touchast aus malades, et qui créance y auroit, si serait netoiés de sa
maladie. Et li bons hom la prist, si l'emporta ; mais devant ce qu'il l'emportast, quant
Dieu li eut rendue sa toile, si la prist li bons hom, si la mussa sous une tuile jusques au
vespre. Au vespre, quant il s'en ala, si prist sa toile ; si comme il leva la tuile, si vit la
forme empreintée en la tuile aussi comme en la toile : si emporta la tuile et la toile ; puis
en guarirent maint malade.» (Robert de Clari, La conquête de Constantinople, éd. A.
Pauphilet, Historiens et chroniqueurs du Moyen Age. [Bibliothèque de la Pléiade.] Paris
1952, p. 73-74).
13. Voir Dubarle, op. cit., p. 12-13.
14. BHG 793 (Menées d'août, Dobschiitz) = E. von Dobsciiütz, Christusbilder.
Untersuchungen zur christlichen Legende, Leipzig, 1899, p. 38**-84** ; désormais:
Translatio A.
15. Synax. CP, éd. H. Delehaye, col. 893-901.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 59

apporté à Abgar par Thaddée) par Grégoire le Référendaire 16, et les deux
ensemble par le récit BHG 794 (B de Dobschiitz), c'est-à-dire l'œuvre de
Constantin Porphyrogénète 17.
d' Abgar,
Constantin
nousStilbès
dit-il, ne
se rattache
pouvant au
peindre
premier
le portrait
type de du
tradition
Christ,: le
celui-ci
courrier
le
tire d'embarras en imprimant son image sur la serviette avec laquelle il
vient de s'essuyer. Nous pouvons donc tout d'abord écarter, comme
source principale de Stilbès, l'œuvre de Grégoire le Référendaire ; aucun
détail de la didascalie, à ce qu'il nous semble, ne vient non plus prouver
que notre auteur ait connu cette œuvre. Parmi les textes conservés, il
reste deux candidats en lice : les Translationes A et Β éditées par
Dobschütz. Il est très probable que Stilbès a connu le texte A, dont la dif
fusion était considérable, puisque c'est le texte des synaxaires pour la
fête du 16 août, et il n'est pas impossible qu'il s'en soit inspiré pour le
début de son récit, qui nous paraît, par son allure générale, plus près de
A que de B. De plus, Stilbès expose assez longuement comment
Ananias, alors qu'il voudrait peindre le portrait du Christ, ne le peut (§
6). Cet élément narratif si intéressant se retrouve dans la Translatio A,
mais n'a pas d'équivalent dans le récit B l8. Il semble donc que Stilbès,
directement ou indirectement, dépend du texte des synaxaires.
Mais Stilbès ne peut assurément avoir utilisé cette seule source. Le
propos de notre auteur, en effet, est de raconter l'histoire du mandylion
et de la sainte tuile. Or le récit A ne fait pas mention de celle-ci, alors
que le récit B, au contraire, en raconte l'origine selon un schéma qui est,
pour l'essentiel, conforme à ce que nous lisons chez Stilbès : le courrier
d' Abgar, passant la nuit près d'une briqueterie, dépose le mandylion ; un
feu s'élève; l'image du mandylion se reproduit identiquement sur l'une
des tuiles qui l'abritent 19. On peut donc supposer que le récit de Stilbès
dépend, au moins pour ce point, directement ou indirectement de l'œuvre
de Constantin Porphyrogénète.
Des intermédiaires disparus ne sont pas à exclure. Il faut en effet
remarquer que non seulement dans sa formulation le texte de Stilbès n'a
plus grand chose de commun avec l'œuvre de Constantin, mais aussi que
la substance du récit a été altérée. Dans le récit B, c'est alors qu'il est
près de Hierapolis qu'Ananias passe la nuit près de la briqueterie et que
se produit le miracle de la duplication de l'image. Les habitants de la
ville, inquiétés par le feu, sortent, et ce seront eux qui prendront posses
sion de la tuile qui reste, nous dit Constantin «jusqu'à maintenant», à
Hierapolis 20. Pour Stilbès, qui supprime toute mention de Hierapolis et
de ses habitants, Ananias apporte à Abgar la tuile en même temps que le

1 6. BHG 796g ; voir Dubarle, op. cit., p. 19-23.


17. BHG 794 (a. Constantino VII, a Metaphrasta in menologium inserta) ; éd.
DnRsruf'Tz, Christusbilder, p. 39**-85** : cité désormais Translatio B.
18. Translatio A, § 4, cd. Dobschütz, p. 46**.
19. Translatio B, § 14. éd. Dobschütz, p. 51**.
20. Translatio B, § 14, éd. Dobsciiîtz, p. 51**.
60 BERNARD FLUSIN

mandylion, et l'économie du récit laisse supposer que les deux reliques


connaissent ensuite le même destin avant d'être fêtées à Constantinople
le même jour (§10). Cette façon de présenter les choses, on le voit, est en
désaccord avec le texte B. Le silence qui est fait sur les circonstances de
la translation des deux objets à Constantinople, sous Romain Lécapène
pour le mandylion, sous Nicéphore Phôkas pour la tuile, mérite d'être
relevé aussi, tout comme le récit de la guérison, qui diffère sensiblement
à la fois de la Translatio A et de Β . Nous avons affaire, avec la didascalie
de Stilbès, à une narration assez éloignée des sources du 10e siècle et très
simplifiante, dont l'économie est guidée par une donnée liturgique : le
mandylion et la tuile étant fêtés le même jour, on les unit très tôt dans le
récit. Apportés ensemble par Ananias, ils sont tous deux les instruments
de la guérison d'Abgar, puis tous deux transférés à Constantinople où
l'on célèbre chaque année le souvenir de leur translation. Cette simplifi
cationpeut être imputée à Stilbès. Elle peut s'inspirer aussi de l'œuvre
d'un prédicateur précédent : car rien n'indique que la fête du mandylion
et de la tuile, quand Stilbès prend la parole, soit de création récente.

La translation de la Sainte Tuile

La tradition constantinopolitaine connaît l'existence de deux tuiles qui


auraient porté la réplique de l'image du Christ imprimée sur le mandyl
ion. La première, conservée à Hiérapolis, a été produite dans les ci
rconstances que relatent Constantin VII et Stilbès ainsi que nous venons
de le voir. La seconde serait née miraculeusement à Édesse alors que
l'évêque de la ville, pour protéger le mandylion contre les entreprises du
petit-fils d'Abgar revenu au paganisme, avait fermé la niche où se trou
vait la sainte image après avoir allumé une lampe devant elle. Quelque
quatre cents ans plus tard, au 6e siècle, l'évêque Éulalios, redécouvrant le
mandylion, trouve la lampe encore allumée et constate que l'image du
mandylion est reproduite sur la brique ou la tuile qui fermait la niche21.
De cette tuile d'Edesse, il ne semble plus être question à Constantinople,
sauf peut-être chez Antoine de Novgorod, qui signale deux tuiles à
l'église du Pharos22. La sainte tuile, à Constantinople, est celle de
Hiérapolis que l'empereur Nicéphore Phôkas, après son expédition en
Syrie, rapporte à Constantinople en 967 avec d'autres reliques. C'est ce
qu'atteste le récit BHG 80 In, édité par F. Halkin, qui précise que la tuile,
en même temps que le sang qui avait coulé miraculeusement d'une icône
du Sauveur, arrivée aux Blachcrnes le 23 ou le 24 janvier 967, avait été
déposée en grande pompe à l'église de Tous-les-Saints d'après deux des
trois manuscrits utilisés par F. Halkin, à l'église du Palais d'après le tro
isième 2\

21. Ibid., § 32 (p. 65**)·


22. Voir ci-dessous.
23. F. Halkin, op. cit., p. 260, 1. 12-16, et apparat critique (cod. C = Coislin. 296, s. xii).
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 61

Le témoignage des chroniqueurs est moins clair. Voici le récit que


nous trouvons chez Léon le Diacre : την "Εδεσσαν ούν κατειληφως
κάν τω σήκω των θείων όμολογητών είσεληλυθώς και το θείον
έξευμενισάμενος την στρατιάν διανέπαυεν. ήκηκόει γάρ την έν
κεράμω του σωτηρος και θεοΰ έκτυπωθεισαν μορφήν έν τωδε τω
φρουρίω παρακατέχεσθαι. έκτυπωθηναι δε φασι τούτον τον τρόπον.
[Suit le récit de la genèse miraculeuse de la tuile de Hiérapolis, dont le
nom n'est pas cité.] τότε δέ Νικηφόρος ό βασιλεύς, έξελών το άστυ,
τον τοιούτον σεπτόν κέραμον εκείθεν άνείληφε καΐ χρυσω και
λίθοις θήκην διασκευάσας μετέπειτα και ταύτη περιστείλας
τούτον σεπτώς έν τω της θεομήτορος ναω τω κατά την βασιλειον
οντι έστίαν ανέθηκεν. έπε! δέ το Μέμπετζε παρείληφε φρούριον,
τον Λίβανον το ορός έγκαρσίως υπερβάς τη Τριπόλει προσέσχεν 24.
Le passage, comme on le voit, ne va pas sans quelque problème. Si
le trajet indiqué pour les troupes de Nicéphore Phôkas est cohérent —
Édesse, Hiérapolis, passage du Liban, Tripoli — et paraît rendre vaine la
correction proposée par Dobschiitz (Émèse au lieu d' Édesse), il semble
que Léon le Diacre anticipe quand il localise la sainte tuile à Édesse,
alors qu'il parle de la relique conservée à Hiérapolis-Mabboug
(Membidj), ville citée aussitôt après. Les renseignements sur le rel
iquaire que fait fabriquer Phôkas et sur le lieu du dépôt de la relique à
Constantinople peuvent être pour leur part retenus.
Le témoignage de Jean Skylitzès demande lui aussi à être critiqué :
την βασιλίδα κατέλαβε, φέρων μεθ' έαυτοΰ και τον έχοντα
άχειρότευκτον έκτύπωμα της μορφής του Χρίστου και θεοί) ημών
κέραμον, δν εύρεν έν Ίεραπόλει, ταύτην πεπορθηκώς, και τών
τριχών του Βαπτιστοΰ 'Ιωάννου βόστρυχον ενα πεπιλημένον
αιματι25. Cette fois, le lieu de la découverte de la tuile est correctement
indiqué. Mais la mention des cheveux ensanglantés du Prodrome paraît
sujette à caution. Léon le Diacre, de son côté, porte la translation de che
veux du Baptiste au crédit de Jean Tzimiskès, qui les aurait trouvés en

24. «Arrivé à Édesse, il entra dans le temple des divins Confesseurs et, après avoir
imploré la bienveillance divine, il laissait reposer son armée. Il avait entendu dire, en
effet, qu'on gardait dans cette place forte la forme du Sauveur notre Dieu imprimée sur
une tuile. Voici, d'après ce qu'on raconte, comment elle fut imprimée... Alors, l'empereur
Nicéphore, après avoir enlevé la place, en emporta cette tuile auguste. Il fit fabriquer
ensuite un coffret d'or et de pierreries, y serra la tuile avec révérence et l'offrit à l'église
de la Mère de Dieu qui se trouve dans les demeures impériales. Puis, quand il eut prit la
forteresse de Membidj, il franchit obliquement les monts Liban et vint à Tripoli», Bonn,
p. 70-7 1 , cf. Dobschütz, Christusbilder, p. 2 1 7* (n° 7 1 ).
25. «Il parvint dans la capitale ayant avec lui la tuile sur laquelle était imprimée
l'image acheiropoiète de la forme du Christ notre Dieu, — tuile qu'il avait trouvée à
Hiérapolis lors du sac de cette ville — , ainsi qu'une boucle des cheveux de Jean Baptiste,
collée par son sang», loannis Scvlitzne Synopsis Historiarum. éd. J. Thurn [CFHB 5],
Berlin New York 1973. p. 271
'
.
62 BERNARD FLUSIN

même temps que les sandales du Christ en 975 26. On sait que Skylitzès
ne dit que peu de chose des campagnes de Tzimiskès en Syrie.

Le mandylion et la tuile à Constantinople


AU 11e ET AU 12e SIÈCLE

Nous avons la chance de disposer, pour les reliques du Pharos à la fin


du 12e siècle, très peu d'années après que Stilbès eut composé sa didas-
calie, d'un inventaire que Nicolas Mésaritès, skévophylax des églises du
Palais, et à ce titre bien informé, a inclus dans l'opuscule qu'il consacre
à la révolution de palais de 120027. Mésaritès énumère tout d'abord,
sous la forme d'un décalogue28, les dix reliques que voici : 1. La cou
ronne d'épines ; 2. un clou ; 3. le fouet ; 4. les linges mortuaires du Christ
(εντάφιοι σινδόνες Χριστού), en lin ; 5. le linge du lavement des
pieds ; 6. la lance qui perça le côté du Seigneur ; 7. le manteau pourpre ;
8. le roseau ; 9. les sandales du Seigneur; 10. la pierre arrachée au tom
beau.
Ce n'est qu'ensuite que Mésaritès va mentionner les deux objets qui
nous intéressent : έχεις, ώ λαέ, την δεκάλογον, παραστήσω δε σοι
κάνταϋ#α και τον νομοδότην αύτον ώς εν πρωτοτυπώ
τετυπωμένον τω χειρομάκτρω και τη εύΦρύπτω έγκεκολαμμένον
κεράμω ώς εν άχειροποιήτω τέχνη τινι γραφική, c'est-à-dire:
«Peuple, tu as le décalogue. Je te présenterai ici aussi également le
Législateur en personne imprimé, comme sur un prototype, sur la ser
viette, et gravé sur la tuile tendre comme par l'art du peintre, mais sans
intervention de la main (humaine) 29.» On voit quelle est la composition
du passage : tout d'abord dix reliques de la Passion du Sauveur ; puis, à
part, le mandylion et la sainte tuile. La répartition des sanctuaria en dix
plus deux peut être purement rhétorique : après le décalogue, le
Législateur. Elle a de bonnes chances aussi de correspondre à une réalité
topographique. Par la suite, Mésaritès, dans un passage délicat30 où il
paraît décrire un cycle de mosaïques, revient sur certaines reliques déjà
signalées et semble en ajouter quelques autres : le bassin du Jeudi saint ;
l'appui-pied de la crucifixion ; le suaire {soudarion) qui, avec les linges

26. Bonn, p. 165-166; Dobschütz, Christusbilder, p. 218* ; parmi les reliques rapport
ées par Jean Tzimiskès, Léon (Bonn, p. 166-168) signale l'icône de Beyrouth qui, frap
pée par un Juif, avait laissé couler miraculeusement du sang et de l'eau. Jean la fait dépos
erà l'église de la Chalkè.
27. Nikolaos Mésaritès. Die Palastrevolution des Johannes Komnenos, éd. A.
Heisenberg, Wiirzburg, 1907.
28. «Apprends les noms du décalogue qui est ici gardé comme un trésor» (Mésaritès,
op. cit., § 12, éd. Heisenberg, p. 29) ; la même image du décalogue est reprise à la fin du
paragraphe 13 et au début du paragraphe 14 {ibid., p. 31).
29. Ibid., §14, p. 31.
30. Voir R. J. H. Jenkins, C. Mango, The Date and Significance of the Tenth Homely
ofPhotius, DOP 9-10, 1956, p. 123-140.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 63

mortuaires du décalogue, rappelle la résurrection. Cette enumeration,


comme on le voit, suit l'ordre du récit évangélique et ce procédé de comp
osition met en évidence le désordre apparent avec lequel sont énumérés
les dix premiers sanctuaria. Il est tentant, dès lors, de supposer que la
séquence des objets signalés par le décalogue correspond de quelque
façon à la disposition des reliques.
Antoine de Novgorod, qui visite l'église du Pharos en 1200, donne sur
le dépôt des objets sacrés qu'il y vénère des renseignements qui recou
pentassez largement ceux de Mésaritès31. L'ordre qu'il suit vaut d'être
remarqué. Le pèlerin russe signale tout d'abord huit reliques de la
Passion {Crux veneranda, corona [spinea], spongia, clavi, herum san-
guis, chlamys purpurea, lancea, arundo), puis deux vêtements de la
Vierge (velum Deiparae, zona eiusdem), quatre vêtements du Christ
(Camisia Domini et Focale, Linteum et Socculi), des reliques de cinq
saints (Paul, Philippe, Épimaque, Théodore Tiron, Jean Baptiste surtout).
Il revient ensuite à des reliques du Christ (linteum faciem Christi reprae-
sentans ; ceramidia duo, duaeque Pelves marmoreae, in quarum ininori
pedes discipulorum suorum lavaverat Christus), et finit son enumeration
en signalant deux grandes croix (Cruces dime venerabiles et magnae,
quae omnia in sola ecclesia parva B. Dei genitricis reperiuntur). Outre
le précieux renseignement sur les objets qui nous occupent et la mention,
unique à notre connaissance, des deux tuiles, on notera que les reliques
semblent groupées par catégorie, et que là encore, le désordre apparent
de l'énumération a quelque chance de refléter l'organisation des divers
dépôts au Pharos en 1200. Le mandylion et les tuiles, comme pour
Mésaritès, semblent séparés d'un premier groupe de reliques majeures de
la Passion du Christ ; on passe ensuite, comme chez Mésaritès, au bassin
du Jeudi Saint.
Deux textes permettent de mieux comprendre comment étaient
conservés tuile et mandylion. Le premier est dû à un Latin anonyme que
son éditeur, K. Ciggaar, propose de dater de la fin du 1 Ie siècle 32. Ce
visiteur, qui séjourne longuement à Constantinople, a pu vénérer au
palais la lettre du Christ à Abgar et des reliques de la Passion qu'il énu-
mère. Il passe ensuite aux douze corbeilles de la multiplication des pains,
puis en vient à l'image d'Édesse, qu'il n'a pu voir car, depuis un temps
non précisé, à la suite du tremblement de terre qu'avait provoqué son
ostension, on la conserve au palais dans un vase d'or soigneusement

31. Nous citons ici la traduction latine reproduite par P. E. Riant, Exuviae Sacroe
Constantinopolitanae, II, Genève 1878, p. 223 ; voir aussi la traduction française de B. de
Kiiitrovo, Itinéraires russes en Orient traduits pour la société de l'Orient latin, Genève,
1889. p. 97-98.
32. Voir Κ. Ν. Cigaar, Une Description de Constantinople dans le Tarragonensis 55,
RED 53, 1995, p. 1 17-140. Pour les visiteurs occidentaux à Constantinople du 10e au 12e
siècle, voir l'ouvrage récent du même auteur: Κ. Ν. Cigaar, Western Travellers to
Constantinople. The West and Byzantium, 962-1204. Leiden, New York, Cologne 1996.
64 BERNARD FLUSIN

fermé33. Ce renseignement semble recouper celui, plus précis, que nous


trouvons chez Robert de Clari, pour qui la «toile» et la tuile étaient dans
des vases d'or suspendus au milieu de la chapelle du palais 34.
Deux autres récits, l'un de la fin du 11e siècle ou du début du 12e,
l'autre du milieu du 12e sans doute, signalent la présence du mandylion
au palais : Γ Anonyme Mercati, dont son dernier éditeur, K. Ciggaar, a
montré qu'il était plus ancien que Mercati ne l'avait supposé33, et un
autre anonyme, que P. E. Riant date des environs de 115036 puisqu'il y
est fait mention de la lettre à Abgar37. Le deuxième texte précise que
l'image acheiropoiète est enfermée dans une capsula, sans doute en or
comme celle qui est signalée juste avant38. Les deux pèlerins mention-

33. Éd. K. N. Cigaar, Une Description de Constantinople..., p. 120-121, 1. 53-74 : Est


in eadem civitate gloriosa figure domini nostri Ihesu Christi vultus ab eodem in linteolo,
ut aiunt Greci, hoc modo compositus. Supradictus Abgarus rex adesse civitati nimio
estuabat desiderio videndi preclaram faciem Domini. Cognito Ihesu desiderio régis acce-
pit linteum et involuit faciem suam ex eo et remansit forma et figura vultus eius in linteo.
Sic ergo figuratam faciem in linteo suam Salvator transmisit régi Abgaro, ut ibi conspicc-
ret qualis eius vultus esset. Hoc linteum preciosissimum domini Ihesu vultu et attactu insi-
gnitum maiori pre ceteris reliquiis in palatio veneracione observatur, maiori diligentia
tenetur ita ut semper sit clausum aureo vase et obfirmatum diligentissime. Et cum cetere
omnes reliquiae palacii cunctis quibusque temporibus ostendantur fidelibus, istud linteum
in quo continetur nostri rcdemptoris vultus figuratus nulli demonstratur, nulli aperitur, nec
ipsi Constantinopolitano imperatori. Quodam enim tempore apertum habebatur illud vas
ubi tam sancta res erat et assiduo terremotu civitas omnis cepit concuti mortemque pro-
pinquam omnibus minari. Intimatum est superna visione hoc tantum malum illi civitati
non dcfuturum donec illud linteamen quod in se figuram Domini continebat vultus clau
sum occultaretur et ab humanis obtutibus absentaretur. Factumquc est. Clauso in vase
aurco et diligenter reserato sancto illo linteo, et terremotus cessavit et omnis malicia celi
quievit. Ex illo tempore nullus fuit ausus illud vas aperire nec quid esset intus aspicerc,
credentibus omnibus atque timentibus terremotu omnia concuti si ceperit illud aperiri.
34. «Or avoit encore autres saintuaires en celé chapele que nous vous avions oubliés à
dire : car il avoit deux riches vaisseaus d'or qui pendoient en mi la chapele à deux grosses
chaînes d'argent. En l'un de ces vaissiaus si avoit une tuile et en l'autre une toile.»
(Robert de Clari, éd. A. Pauphilet, Paris 1952, p. 73) ; et, après avoir conté l'histoire de
ces deux sanctuaria, R. de Clari conclut son récit: «Et cil saintuaire pendoient en mi la
chapele, si comme je vous ai dit» (ibid., p. 74).
35. S. G. Mercati, Santuari e reliquie Costantinopolitane secondo il codice ottobo-
niano latino 169 prima délia conquista latina (1204), Rendiconti délia Pontificia
Accademia Romano di Archeologia, XII, 1936, p. 133-156. Nous citons ici l'édition plus
récente et plus complète de K. N. Cigaau, Une description de Constantinople traduite par
un pèlerin anglais, RED 34, 1976, p. 245 : In primis quidem sunt in magno palacio in tem-
plo Sanctae Mariae Dei genitricis haec sanctuaria et sacrae reliquiae: sanctum manuter-
gium in quo est vultus Christi impictus... Sanctum manutergium igitur habet vultum
Salvatoris sine pictura. Sancta tegula in qua apparuit et ipse vultus Christi de sancto
manutergio. Magnum enim miraculum est in eis quia sine pictura habent vultum Christi
Domini nostri. Epistola quam scripsit Christus sua manu... Ipsa epistola est in palacio et
sanctum manutergium et sancta tegula.
36. Relliquiae Constantinopolitanae, éd. P. E. Riant, Exuviae Sacrae, II, 21 1-212.
37. On sait que cette relique avait disparu lors des émeutes de 1 185 : voir Nicetae
Choniatae, p. 347, 1. 52-56.
38. Pera dominica et littere quas in eadem scripsit Dominus, que pera cum litteris consi-
gnata est signo imperatoris in capsula aurea ; et in alia capsula est Mantile, quod, visui
Domini applicatum, imaginem vultus eius retinuit (Relliquiae Constanttnopolitanae, p. 212).
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 65

nent séparément, toujours au palais, le suaire (un suaire) du Christ, mont


rant bien là encore qu'à Constantinople tout au moins, image d'Édesse
et saint suaire étaient choses distinctes 39.

L'ÉDITION

La didascalie BHG 796m est conservée dans un témoin unique, le


Barocciamis gr. 25, de la fin du 13e ou du début du 14e siècle, l'un des
deux principaux témoins des œuvres de Stilbès40. Elle se trouve aux
folios 273-275. Pour notre édition, outre un microfilm conservé à
l'Institut de recherche et d'histoire des textes, nous avons disposé d'une
précieuse copie du Révérend Père J. Paramelle : on verra, en lisant notre
apparat critique, tout ce que l'établissement du texte doit à sa science
généreuse. Qu'il veuille bien trouver ici l'expression de notre gratitude,
ainsi que M. S. Diebler, qui nous a aidé à éclaircir plus d'un passage dif
ficile.
En quelques points du texte, des lettres sont effacées ou bien ont dis
paru avec le bord de la page. Les restitutions se trouvent entre crochets
obliques, de même que les rares additions qui ont paru nécessaires.
L'apparat critique permet de faire la différence. Pour les sources, nous
nous sommes contenté d'indiquer les références scriptural res, ainsi que
les lieux parallèles des récits BHG 793 (= Translat. A), et surtout BHG
794 {-Translat. B), tels qu'on peut les lire dans l'édition de Dobschiitz,
Christusbilder, p. 38**-85**.

39. «Sudaiïum quod fuit super caput eius», Relliquiae Constantinopolitanae, p. 21 1 ;


«lintheamen et sudarium sepulturae eius», Anonvme Mercati, éd. K. N. Ciggaar, p. 245, 1.
16.
40. Voir H. O. Coxf, Cntalogi Codicum mamiscriptorwn Bibliothecae Bndleianae
Pars Prima, Oxford, 1853, p. 32-36; R. Browning, An anonymous basilikos logos
addressed to Alexis I Comnenos. Byz. 28, 1958, p. 31-32 ; L. R. Cresci, La prolusione del
Maestro dell 'Apostolo. p. 37-38.
66 BERNARD FLUSIN

273
Διδασκαλία του μακαρίτου μοναχού Κυρίλλου του
χρηματίσαντος Κυζίκου,
δτε διάκονος ων διδάσκαλος ή"ν εις τον Χαλκίτην
περί των αγίων t του Μανδυλίου και του Κεράμου.

1 . Τί το ιερόν τοΰτο φορτιζόμενον ; τί το ένδεώς φερόμενον ; ή


γαρ τοσαυτη δορυφορία δίδωσί τι σεμνοτερον περί του πράγματος
έννοεΐν. Κιδωτός αρα τοΰτο της χάριτος, δτι και πνευματικός
'Ισραήλ ό πομπεύων, και θησαυροφυλακεί την θειοτέραν και πλάκα
5 περικλαγγάζει την θεοτύπωτον και στάμνον την μαννοδοχον εις
άσυλίαν του θαύματος. "Ορα την κιδωτον μεταχειριζόμενον και
άμφιπονούμενον την μεταφοράν τον ήμέτερον και ύψηλότερον
'Ααρών, τον μέγαν θύτην και ίεράρχην, τον έπιπρεπη τοις
τηλικούτοις σκευαγωγόν και τοις άδύτοις προπέμποντα, τον
10 εύστομουντα άντι του Φαραώ μεν, υπέρ δε του καθ'ήμας 'Ισραήλ,
και τοις κατηχητηρίοις
καταρτίζοντα· οδ και το καταδροντώντα
ένστέρνιον λογείον
μεν μυστικώτερον
εκείνον άλλ'ήμας
και
κρυφιωδέστερον, τήν γάρ τοι καρδίαν γαζοφυλάκιον έσκευάσατο
των τε πνευματικών και των άλλως θείων τε και σοφών, εν φ και ή
15 δήλωσις τών απόκρυφων και αμφιβόλων και ή αλήθεια· και εξ
έπισημοτέρας κατασεμνυνεται της κιδάρεως και του πετάλου του
έπι τω μετώπω χρυσίζοντος. Συνάγονται γάρ αμφω εις τον περί
κορυφής πάμφωτον του άρχιποίμενος νουν, οτι και διορατικώτατον
και μηδέν κίδδηλον έν τοΐς νοήμασι μηδέ τι διακωδωνιζόμενον μηδ'
20 άμαυρόν τε και έ'ννυχον. Το δ' ήμέτερον, τί και πάρεστι, και τί
ποτέ τή πανηγύρει συνερανίζεται ; ενθουσιά προ της κιβωτού και
ψυχικοϊς άνασκιρτα τοις έξάλμασι, και τή προόδω ταύτη ή
έπανόδω ψαλτήριον έπικράσκομεν - άλλ' άπείη τών ημετέρων
καθ'
Μελχόλ, λοίδορος γλώσσα της φυσικής θυρίδος προκύπτουσα
25 ημών και του τών οδόντων φατνώματος και θριγγώματος -,
ψαλτήριον, καν μή δεκάχορδον, πεντάτονον γουν, της τών
συμφωνιών δευτέρας ε'ιτ' ούν έλαττονούσης το σύνθεμα, ε'ιπερ
ημιτελή τα καθ' ήμας προς τα πάλαι και μέγιστα και δαυιτικά1 έκ
γάρ τοι της τών φωνητηρίων συντάξεως συγκροτούμενον, τών τε
30 άλλων και τής λαλούσης αυτής, ην και εις μαγάδας τήν τών
οδόντων συστοιχίαν έντείνομεν, καν ώς χορδή παρά τήν υλην ουκ
εϋμουσος· εκτραχύνεται γαρ ύπο τής άπηγορευμένης τρυφής, και
χαλαρά ταίς ωδαίς <ού>χι σύντονος, βαρύφθογγος ου
καλλίφθογγος.

Lemm.: 1 μοναχού : αρχιεπισκόπου Coxe //.


1. 1 φορτιζόμενον ... φερόμενον in cod. leg. nequ, c Bollandistis (BHG) deprompsi
// 5 περικλαγκάζει Β // 26 γουν Paramelle : ...' οδν Β // 28 δαιτικά Β.
Fontes: 4-5 Ex. 16 ; Ex. 33; 12 Ex. 28, 15-30 21-22 II Regn. 6
1. Deut. 10. 5 15 Ex. 28, 30 24-25 II Regn. 6,
3-4 II Regn. 6 10-1 1 Ex. 7, 1-7 16 Ex. 28, 39, 36 16-23.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 67

Didascalie du bienheureux Cyrille,


qui fut évêque de Cyzique, et qui, à cette époque, étant diacre, était
didascale au Chalkitès.
Sur les sanctuaria que sont le Mandylion et la Tuile.

1. Quel est cet objet sacré qu'on transporte? Que convoie-t-on donc
avec tant de crainte ? Car cette escorte si nombreuse Tait penser qu'il y a
là quelque objet très auguste. Certes, c'est l'arche de la grâce, puisque
voici l'Israël spirituel marchant en procession, lui qui garde dans ses tré
sors l'arche la plus sainte et qui entoure de clameurs la table gravée par
Dieu et l'urne où l'on conserve la manne afin de préserver intacte la
merveille. Vois qui tient l'arche de ses mains pour en assurer le
transport : c'est notre Aaron, plus sublime que l'ancien, le grand sacrif
icateur et le grand hiérarque, digne porteur de tels objets qu'il escorte
vers le sanctuaire, lui qui parle avec éloquence face à Pharaon, certes,
mais pour les Israélites que nous sommes, et qui, des éclats de sa voix, le
foudroie, mais nous affermit. Le rational qu'il porte en pectoral est plus
mystique et plus secret que l'ancien, car il a déposé dans son cœur des
richesses spirituelles non moins que divines et pleines de sagesse,
comme en un trésor où l'on cèle la manifestation des choses cachées ou
ambiguës ainsi que la vérité. Il est ennobli par une tiare plus insigne et
par la plaque rayonnant sur son iront de tout l'éclat de l'or: car tous
deux se rejoignent dans l'intellect du grand pasteur, près de sa tête, intel
lect plein de lumière, puisqu'il est suprêmement clairvoyant aussi et
n'admet dans ses pensées rien de mauvais aloi ni qui rende un son
trouble et ténébreux. Et nous, pourquoi sommes-nous là? Pourquoi donc
nous être assemblés lors de cette fête? Nous sommes pris d'enthou
siasmedevant l'arche et nous exultons en dansant une danse spirituelle.
Pour cette arrivée, ou pour ce retour, nous faisons résonner le psaltèrion
— mais que Melchol soit loin de nous, langue chargée d'insultes qui,
pour nous dénigrer, se penche au balcon qu'a fait la nature, le crénelage
et le parapet formés par les dents — oui, du psaltèrion : et s'il n'a pas dix
cordes, il a du moins cinq tons, ce qui est la composition du second des
accords, celui qui est diminué, puisque nos instruments, par rapport à
ceux, si grands, dont David jadis disposa, ne sont qu'à demi achevés.
Notre psaltèrion, en effet, est composé de l'association des organes de la
parole, en particulier de la langue elle-même que nous tendons, comme
sur des chevalets où l'on fixe les cordes, sur la rangée des dents, quand
bien même, comme corde, elle est peu musicale du fait de sa matière.
Car la mollesse, qui nous est interdite, lui donne de la rudesse, elle est
relâchée pour les chants au lieu d'être tendue, et le son qu'elle rend, loin
d'être beau, est trop grave.
68 BERNARD FLUSIN

2. Άλλα φέρε ζητήσωμεν πόθ-εν ήμϊν η"κε το τηλικοϋτον καλόν,


το πυξίον το θεοτύπωτον, και τίς ό τούτο χειρίσας τω εύαγγελικω
και καθ·' ήμας 'Ισραήλ* ταύτην τερπνόν άσμα τη πανηγύρει
ποιησώμεθα την διήγησιν, ουδέν γαρ τών του Σωτηρος θ-αυμάτων
5 έπιτερπέστερον καΐ μεγαλειότερον, ενταύθα δε και καινά και ου
πάγκοινα τά της διηγήσεως. Ουδέ γαρ έκ της ιστορικής τών του
Δεσπότου βίβλου της θείας και ευαγγελικής, έπε! μηδέ ενεγράφη
ταύτη καθ 'εν τά τέρατα του Χρίστου* και άληθ-ής εις μαρτυρίαν ό
Βροντόπαις τε και Βροντόφωνος. Ει γαρ τω τε πλήθει και τω
10 μεγέθ-ει προς άπειρίαν έξέπιπτον, πώς άν και περιεγράφησαν ; τί δε
τις καΐ έξ απάντων αστέρων και της άμετρίας αυτών το του
ούρανοΰ πειρωτ' αν έξηγεΐσθ-αι θαυμάσιον, εξόν άπό τίνων
εύσημοτέρων το κάλλος παν παραστήσασθ-αι ; τί τάς πάσας
συρμάδας του φωσφόρου κατοπτευτέον και το τούτων
15 περιεργαστέον πολυσχιδές εις βλεφάρων άληκτον κάματον, αν και
έκ μετρίων ή λαμπρότης καταφανής ; ΈκΦετέον ούν την της
εικόνος και του Θαύματος άναστήλωσιν, οιαν εξ ιερών
απαράγραπτων άπέλαδον κύρδεων.

3 . "Αρτι Χριστός τάς έπι γης άνθρωπικάς έποιείτο διατριδάς,


μηδέ τών ύπερουρανίων κατά θεότητα διιστάμενος, καί τις
χωράρχης ή βασιλεύς της κατά Συρίαν 'Εδέσσης και τών ομόρων
αύτη ουκ ανώνυμος - Αύγαρος γαρ ούτος ό μεγαλώνυμος -, φήμη
5 παραλαμδάνων τάς παραδοξοποιίας Χρίστου και άλλοτε αλλάς
σπερματικώς είσδεχόμενος εις ψυχήν, ως αγαθή γη τελεσφορεί της
πίστεως τά έκφόρια, και οξύς ών άλήθειαν συλλογίσασθαι και
συμπεράναι τά άπταιστα, τον Ίησουν &εόν συλλογίζεται. Μέσον
γάρ τών άκρων συναγωγον και αναγκαιοτατον συνδεσμον έντάξας
10 τά θαύματα, και μάλιστα το παλίμβιον τών νεκρών, ως γοΰν άκοη
ώτός άκουσας πεπιστευκεν, έδίψα και πλέον τοίς όφθαλμοΐς || 273 ν
<τουτο> λαβείν το τεράστιον τη μεν γάρ άκοη προς τον
έλαττονούμενον ό'ρον, υποθετικός ό μέσος κ<αι ψευ>δέστατος,
οφθαλμός δε θέσεις ποιείται τάς υποθέσεις αύτης και ομολογίας
15 άριφραδεΐς και σ<υμπεράσμα>τα άναμφίλεκτα. Καν ταχύς ό
βασιλεύς έπι τον ποθούμενόν τε και θ-αυμαζόμενον ωρμ<ησεν>, ως
ελαφος έφ ' ύδωρ ζών και άλλόμενον και μη σταδιαΐον και σεσηπός
έν νεκρώσει μηδέ τι <δι>εφθορός, άν μη νόσου δεσμά περιέκειτο
και καχεξίας ποδοστράδην στερράν το πνεύμα τούτω πρόθ-υμον, ή

2. 7 μηδέ : μη δε Β // 9 τε : τέ Β // 1 2 πειρωτ' : πειρώτο Β.


3. 12 <τοΰτο> λαδεϊν : ... λαβείν Β // 13 κ<αΙ ψευ>δέστατος· Paramellc
κ.,.δέστατος Β // 15 σ<υμπεράσμα>τα : σ. ..τα Β // 16 ωρμ<ησεν> Paramelle : ωρμ..
Β // 18 <δοεφθορός Paramelle : ...εφθορός Β.

2. 3. Translat. Α § 1 ; Β §§ 4- 1 2- 1 5 Job 42, 5.


7-8 Jn 21, 25 7. 17 Ps. 41,2
9 Me 3, 17 6 Le 8, 8 19-20 Mt. 26, 41
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 69

2. Allons donc, cherchons d'où vient pour nous un tel trésor, d'où
vient cette tablette gravée par Dieu et qui l'a remise au véritable Israël
évangélique que nous sommes. Faisons de ce récit un hymne charmant
pour cette fête, puisque rien n'est plus plaisant que les miracles du
Sauveur ni plus grandiose et que, dans ce cas, il s'agit d'un récit nou
veau, nullement galvaudé : car il ne vient pas du livre qui raconte l'his
toire de notre Maître, le divin évangile, où l'on ne trouve pas non plus
écrits un à un les prodiges du Christ, et c'est là ce qu'atteste véridique
ment le Fils du Tonnerre, la Voix Tonnante. En effet, s'il est vrai que leur
nombre et leur grandeur les rendaient infinis, comment les eût-on ci
rconscrits ? Et pourquoi tenter de dire les merveilles du ciel en dénomb
ranttous les astres et leur multitude infinie alors qu'il est possible, avec
certains d'entre eux seulement, plus insignes, de représenter toute sa
beauté? À quoi bon observer toutes les traînées de feu de l'astre du
matin et s'enquérir vainement de leur diversité, causant ainsi à nos yeux
une peine infinie, s'il est vrai que quelques-unes d'entre elles suffisent
pour mettre en évidence l'éclat de sa lumière? Il faut donc exposer com
ment on vit s'ériger cette image et cette merveille, selon ce que j'ai
recueilli en consultant des stèles saintes au témoignage irréfutable.

3. Le Christ séjournait encore sur la terre parmi les hommes, sans que,
par Sa nature divine, II eût quitté les régions supra-célestes, et voici
qu'un prince local ou bien un roi qui régnait sur Edesse de Syrie cl les
pays voisins et n'était point sans illustration — c'était le fameux Abgar
— , apprenant par ouï-dire les prodiges du Christ, les accueille chacun en
son temps dans son âme comme autant de germes et, comme une bonne
terre, mène à leur terme les fruits de la foi. Prompt à mettre la vérité en
forme de syllogisme et à tirer des conclusions infaillibles, il déduit que
Jésus est Dieu. Comme moyen terme, qui réunit les extrêmes et les lie
avec une parfaite nécessité, il pose les miracles, tout particulièrement la
résurrection de morts, et donc, après avoir cru selon ce qui venait à ses
oreilles, voici qu'il avait soif plus encore de voir de ses yeux le prodige.
En effet, si ce qu'on sait du terme mineur vient de l'ouïe, le moyen terme
est hypothétique et tout à fait trompeur; mais l'œil transforme en thèses
ses hypothèses, en propositions évidentes acceptées de tous et en incon
testables conclusions. Le roi se fût précipité vers l'objet de son désir et
de son émerveillement, tout comme le cerf vers l'eau vive et jaillissante,
nullement stagnante, croupie et morte ou corrompue en quelque façon,
s'il n'eût été pris dans les liens d'une maladie et le solide piège41 d'une
cachexie. L'esprit, chez lui, est ardent, mais la chair est faible ; ce qui

41. Le grec podostrabè désigne plus précisément le piège à cerfs, et poursuit donc la
comparaison commencée avec la citation du psaume 41.
70 BERNARD FLUSIN

20 δέ σαρξ ασθενής· οξύ το κινούν, νωθρόν το κινούμενον εύτρεπής ό


ηνίοχος, δυσκινητεί δέ το δχημα νοσημάτων σκόλοψι<ν>
έμποδοστατούμενον. Ποδάγρα γάρ ή νόσος, ην έτεκ<τή>νατό οί
και εις όλοσώματον άρθρίτιν ένέπεμψεν ή των Σύρων
μεμαγγανευμένη δίαιτα, και τρυφερά και υγρά, και το έπ' αύτη
25 άπεπτον, περίπατοι τε και στάσεις του εθους συντονώτεροι και
μακρότεραι και έποχαι συνήθων εκκρίσεων καί, το δλον, υγρών
ώμοχύμων ύπέρ^λυσις· αυτή τον τοπάρχην κατέκλυζε,
συγκατέκλυζε δέ και χυμός πολύς και γλίσχρος και μελαγχολικός,
εις λέπραν μέλαιναν έπι του δέρματος έξανθών και αμορφίας
30 έπενδύων χιτώνιον.

4. 'Υπό τοιούτων παγίδων ό τούτου συλλαμβάνεται πους ό προς


τον Δεσπότην ευκίνητος. Έπιστέλλει τοίνυν Χριστώ, άνομολογεϊ
την πίστιν, την κωλύμην της εις αυτόν πορείας άποσαφεΐ· τέλος
ποτνιαται, λιτάζεται, προς εαυτόν τον σώζοντα μετακαλείται, τον
5 ύγιάζοντα <ό νοσών>, τον δεσπότην ό δούλος, εξ εύνοιας ούκ άπό
θράσους. 'Ασθενής είμι, φησί, και έπίσκεψαι εν φυλακή τω
στενουντι και συμπιεζοντι του σώματος περιφραγματι και έρύματι,
και προς με τους πόδας ευθυνον τους ωραίους, είρήνην των εν
ήμΐν μαχόμενων του σώματος χυμών και αγαθά εύαγγελιζόμενος,
10 ολας σοι τάς πύλας της 'Εδέσσης άναπετάννυμι. Λεπρός εγώ, εις
την οίκίαν ε'ισελθε του λεπρού· παράλυτος, και το της
κατακλίσεως μοι ζήτησον δάπεδον. Ε'ιπου γε βούλει και τών
επίβουλων 'Ιουδαίων άποδραμείν ως άνθρωπος ό θεάνθρωπος, ή
"Εδεσσά σοι καταλυτήριον έρυμνόν, ως και σου το μεγαλοδύναμον
'5 ταύτης εσται τοϊς θεμελίοις, πεπίστευκα, λίθος άτίνακτος και
συνδέτης άκρόγωνος τη τών τειχέων περιβολή.

5. 'Αλλ' άντεπιστέλλει Χριστός· ω εκείνα Θεοχάρακτα


γράμματα, ω θεία πλάξ, <...> έπιστόλιον, ώ νοημάτων ήλίκων οΓά
γε σύμβολα ύπερφυών πρωτοτύπων ύπερφυη τά ινδάλματα,
απόκρυφων ανθράκων σπινθήρες έξαλλόμενοι φεραυγέστατοι.
5 Έπιστέλλει γουν ώς <έν> 'Ιερουσαλήμ τά της οικονομίας
τερματωθήναι χρεών Ου παραιτούμαι τους φονευτάς, φησί. Το γάρ
μοι πάθος έκούσιον και εκδηλον, ει μηδέ το παρά σοι ζητοίην
κρησφύγετον το άνεπιχείρητόν τε καί άσυλον. Ταύτα διά του
γράμματος, μακαρίσας τον και προ της θέας πιστεύσαντα, και τήν
10 εφεσιν του πιστού δούλου παρακαλών, άποστέλλειν τών λογάδων
ενα μαθητών επαγγέλλεται της νόσου θεραπευτήν ού γάρ κατ'

4. 5 post ύγιάζοντα lac. suspicatus est Paramelle <ό νοσών> restitui ex. gratia.
5. 2 post πλάξ lac. suspicatus est Paramelle // 5 εν add. Paramelle.
4. Translat. A § 3; Β § 8. 10-1 1 Mt. 26,6 9 Jn 20, 29
6-7 Mt. 25, 36 15-161 Pe. 2, 6; Eph. 2, 20; 1 0 Mt. 24, 45; 25, 2 1
8-9 Rom. 10, 15; Is. 52, 7; Mt. 7, 24-26 12-13 IV Regn. 4, 31
Nah. 2, 1 5. Translat. A § 6; Β § 12.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 71

meut est vif, mais inerte ce qui est mû ; le cocher est habile, mais le char,
entravé dans les ronces des maladies, peine pour avancer. Car la maladie
n'était autre que la goutte, qu'avaient causée chez le roi et transformée
en une arthrite se diffusant dans tout le corps le régime des Syriens, trop
sophistiqué, riche et humide, l'indigestion qu'il provoque, les prome
nades et les stations debout plus intenses et plus longues qu'il n'est habi
tuel, les rétentions de ce qu'on évacue d'ordinaire, et, en un mot, la su
rabondance des humeurs liquides pleines d'âcreté. C'était là ce qui
inondait le toparque, en même temps que l'inondait une humeur abon
dante et visqueuse, faite de bile noire, qui provoquait une éruption de
lèpre noire sur sa peau, la revêtant d'une tunique hideuse.

4. Tels étaient les liens qui entravaient son pied pourtant prêt à se
hâter vers le Maître. Il écrit donc au Christ, confesse sa loi, expose ce
qui l'empêche d'aller à Lui. Pour finir, il implore, il supplie, il appelle
auprès de lui Celui qui peut le sauver : <malade>, il s'adresse à Celui qui
donne la santé ; esclave, à son Maître, et c'est, non point l'audace, mais
le dévouement qui l'inspire : «Je suis malade, dit-il, viens me visiter dans
mon cachot, moi qui suis à l'étroit et tout enserré dans la clôture et le
mur de mon corps. Dirige vers moi tes beaux pieds, toi qui nous
annonces la bonne nouvelle d'une paix pour les humeurs qui se combatt
ent dans notre corps, ainsi que d'autres bienfaits. Je t'ouvre toutes
grandes les portes d'Édesse. Je suis lépreux : entre dans la maison du
lépreux. Je suis paralysé : cherche aussi le sol où je suis étendu. Et si tu
veux, toi qui es Dieu et homme, parce que tu es homme, échapper aux
complots des Juifs, Edesse t'offre un refuge sûr. Car, j'ai foi en cela, ta
toute-puissance sera pour ses fondations un roc inébranlable, et pour
l'enceinte de ses murs une pierre angulaire qui assure sa cohésion.»

5. Le Christ lui répond — oh, lettres tracées par Dieu ! oh, divine
tablette <...> lettre! oh, images surnaturelles de quelles pensées, comme
le sont les symboles de modèles surnaturels! éblouissantes étincelles
jaillies de braises cachées ! — , II répond donc que Sa mission parmi les
hommes doit trouver son terme à Jérusalem : «Je ne rejette pas mes
meurtriers, dit-Il ; car ma passion est volontaire, et c'est là une chose évi
dente, si je ne vais pas même chercher auprès de toi un refuge inatt
aquable et inviolable.» Voilà ce qu'il dit dans Sa lettre, après avoir félicité
celui qui, avant d'avoir vu, avait cru ; et, comblant le désir de ce fidèle
serviteur, II promet de lui envoyer l'un de Ses disciples choisis, qui so
ignera son mal. Car les apôtres de la grâce, à la différence de ceux de la
loi et des serviteurs d'Elisée, ne sont pas impuissants contre les maladies
et savent au contraire porter remède même aux blessures internes, cou
vertes et pernicieuses.
72 BERNARD FLUSIN

εκείνους τους νομικούς αποστόλους και τα του Έλισσαίου


παιδάρια κατά τών νόσων ασθενείς οί της χάριτος, άλλα και των
εντός και ύπουλων τραυμάτων και ολέθριων άκέστορες.

6 . 'Εντεύθεν ό δυνάστης έκκαίεται μάλλον και τετυρρανηται ε'ις


τε την πίστιν και την θέαν του έπιστείλαντος. Έπει δε και μάθοι
τάς τών 'Ιουδαίων έπιδουλάς ηδη τελευταν τω Σωτηρι προς
θάνατον, κολακεΰσαι μεθόδω την εφεσιν σκέπτεται* και ή εφεσις,
5 εικόνα τυπώσασθαί τε και σχεΐν της θείας μορφής και χαρακτήρα
του ωραίου κάλλει παρά τους τών ανθρώπων υιούς. Τοΐς γαρ πόθω,
και ταϋτ'ένθέω, κάμνουσι, και σκιά του ποθούμενου πανέντιμος
και έπέραστος. 'Εκπέμπει τοίνυν ταχυδρόμον έπι τον Ίησοϋν, ώς
φθάση τον τών 'Ιουδαίων φθόνον, όξύτατον άμα δε και την
10 ζωγράφον τέχνην ό πτηνόπους έξήσκητο. Γίνεται πτερού θαττον, δ
φασιν, έπι τον Χριστόν, καιρόν εις έπίδειξιν || 274 τούτον
ηγούμενος και ποδών και χερών τών μέν δρόμου τών δε της
καλλιγραφίας, εγχειρεί την δεσποτικην όψιν ίνδάλλειν, ύποτίθησι
το εδάφιον δσα και υλην ε'ιδους άτεχνώς ύποδέγμονα, παράγει τα
15 χρώματα, την γραφίδα μεταχειρίζεται, και το σοφόν χρήμα την
ζωγράφον χείρα κινεϊν επιβάλλεται. Έπει δ'έχρην ταύτην έπι το
γραφόμενον χειραγωγεϊσθαι τοις όφθαλμοΐς - τυφλή γαρ ή χειρ έν
έρημία βλέμματος - τω άρχετύπω προσβάλλουσι και άποματ-
τομένοις εντός την μορφην και έπι της αποθέτου κύρ^εως τοΐ3
20 φανταστικού είδοποιοϋσιν η σκιαγραφοΰσιν αϋλον ώς ενυλος
εκείθεν μεταγραφή, αμηχανία τω τεχνίτη ενταύθα, και ή γραφική
σοφία ελέγχεται· άκατάληπτον γαρ όφθαλμοΐς το ενθεον μόρφωμα,
καν συχνάς έπ' αυτό πέμπη τάς τοι5 οπτικού πνευματικάς ακτίνας
ώς χειρών έπαφάς, κατά τον οΰτω φυσικευσάμενον αληπτόν τε και
25 ασχετον, και ή άποστίλδουσα τοΐ3 προσώπου χάρις προσίσταται τω
γραφεί. Φράσω παράδειγμα λίαν συγγενές, οΐμαι, και δέξασθε·
ώσπερ
εχοι καταπηξαι
έπ' αυτόντάς
τοί3κόρας
ηλιακού
και δίσκου
προς άκρίδειαν
τον κύκλον
αυτόν
ούκ είκονίσασθαι,
αν τις άτενές

οΰτως ούδ' έπι την θεανδρικήν μορφην ό γραφεύς ουδέ συλλέγειν


30 το εΐδος εκ της λαμπρότητος. "Ιθυνε την δεξιάν έπι γραμμάς
ευθείας, περιηγμένας και σχήματα τρίγωνα και πολύγωνα -
γεωμετρικά τά ονόματα -, άλλ'ούκ είχε το παν συντελέσαι
θεώρημα ουδέ κατά νουν οϋτε χαράξαι κατά της κύρ^εως.

7. Τέρας τοϋτο μείζονος τέρατος πρόδρομον και προτέλειον


τελετής* την γάρ άπορίαν εις εύπορίαν και ραδιότητα μετέστησεν
ό παντοσθενής. Μετακαλείται τον γραφέα, ΰδωρ αιτείται και

6. 29 ουδέ Paramelle : οϋτε Β.

6. Translat. Α § 4. 6 Ps. 44, 2


3 Act. 9, 24; 20, 3,19 9 Mt. 27, 1 8 7. Translat. A § 5; Β § 13.
D1DASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 73

6. Cela ne fait qu'enflammer davantage le monarque, tyranniquement


poussé vers la foi et vers le désir de voir Celui qui lui avait écrit.
Lorsqu'il eut appris que les complots des Juifs allaient maintenant about
ir à la mort du Sauveur, il réfléchit à un moyen d'apaiser son désir, et ce
désir, c'est de faire tracer et de posséder une image de la forme divine et
une effigie de Celui que Sa beauté distingue parmi les enfants des
hommes. À ceux qui souffrent d'amour, surtout d'amour pour Dieu, en
effet, l'ombre même de celui qu'ils aiment est par-dessus tout précieuse
et désirable. Il dépêche alors un courrier très rapide, qui puisse devancer
la haine des Juifs, un homme aux pieds ailés, en même temps exercé
dans l'art de la peinture. Plus vite qu'un oiseau, comme on dit, il se rend
près du Christ, pensant que c'était là le moment de montrer de quoi
étaient capables, à la course, ses pieds, et ses mains en fait de dessin. Il
entreprend de reproduire la face du Maître. Il dispose son tableau comme
une matière qui doit simplement accueillir une forme, il prépare les cou
leurs, il prend en main le pinceau et s'apprête à mouvoir cet habile in
strument qu'est une main de peintre. Mais alors que celle-ci, pour dessi
ner,devait être guidée par les yeux — car la main est aveugle, quand le
regard fait défaut — , ces yeux qui viennent frapper l'archétype, impri
mant intérieurement la forme et, sur la stèle mystérieuse de l'imaginat
ion, la modelant ou bien l'esquissant immatériellement afin qu'elle soit
ensuite reproduite matériellement, alors, l'artiste se trouve dans l'impuis
sance et l'habileté du peintre est prise en défaut. En effet, la forme divine
est insaisissable pour les yeux, même si l'artiste envoie sans cesse sur
cette forme les rayons spirituels de la vision, comme on touche avec les
mains ; comme le dit celui qui a parlé de Sa nature42, elle est insaisis
sableet illimitée, et la grâce qui fait briller le visage vient arrêter le
peintre. Je vais prendre un exemple très semblable, je crois, et que je
vous prie d'agréer. Pas plus qu'on ne saurait fixer de ses pupilles inte
nsément le cercle même du disque solaire ni en former l'image exacte, pas
davantage le peintre ne pouvait fixer la forme théandrique dont il ne pouv
ait recueillir l'aspect parmi l'éclat de la lumière. Il dirigeait sa main
pour tracer des lignes droites et des courbes, des triangles et des poly
gones — ce sont des termes de géométrie — , mais il ne pouvait exécuter
la totalité de ce qu'il voyait fût-ce même en esprit, non plus que la graver
sur la tablette.

7. Ce prodige annonçait un prodige plus grand et n'était qu'un rite


préparatoire à la célébration. Car le Très Puissant, transformant cet
embarras en aisance et facilité, fait venir le peintre, réclame de l'eau et

42. Le terme αλητττον, rapporté à la nature divine, se trouve par ex. chez Grégoire de
Naz., Or. XXVIII, 5, 1 1, éd. P. Gallay [SC 250] Paris, 1978 ; ασχετον n'est employé,
dans les Discours théologiques, et avec un autre sens, qu'à propos du nom de Fils (Or.
XXX, 15. 17).
74 BERNARD FLUSIN

ραντίζει το πρόσωπον, ό σημειουργήσας πάλαι και τω Γεδεών δια


5 του ύετοΰ καΐ επί τη του Θεσβίτου ζηλωτοϋ θυσία δια του ύδατος,
και πέτραν πηγάσας και χύσιν Έρυθραίαν υλην παραλαβών, και εν
Κανά δια του ύγροϋ και επί τη κολυμβήθρα του Σιλωάμ επί τω
τυφλω, οίκειοϋται κάνταΰθα το στοιχειον ό ποιητής, και όθόνην
λαβών άπομάξασθαι, άύλως ταύτη την μορφήν ένετύπωσεν, ω του
10 θαύματος, άχειρούργητον άπαρεγχείρητον άπαράλλακτον, όποιον
και άπό σφραγίδος εις κηρον το εκσφραγισμα και ώσεί διαφανεί
και διειδεϊ σώματι την μορφήν έναφήκεν άμετάστατον και
άμετακίνητον. "Ω γραφεύς πρόχειρος και σοφότατος, ώ
καλλιγράφος και αληθείας ακριβής είκαστής, ού περιαθρήσεως ή
15 έναθρήσεως δεηθείς ουδέ της αποθεν στάσεως άλλα της εν χρω
μάλλον επαφής,δς εκ
τελεσιούργησις· το του
παράδοξον,
μή οντος και
ώ ουσίας
καινής πάλαι
προσωποποιίας
παρήγαγε
και το των ποιοτήτων παντοδαπόν, αυτός κάνταυθα τήν των
χρωμάτων ποιότητα, ού θαττον άπό σώματος παρασταίη σκιά
20 ούδ'έξ ήλιου απαύγασμα, ως ένταυθοϊ του πρωτοτύπου το
άπεικόνισμα.

εμπόρευμα·
8 . Λαμβάνει
παλινδρομείν
το δώρον ό ταχυδρόμος
συντείνεταί άσμενος,
προς τονάκάματον
στείλαντα,
γαρ το
φυσικόν των ποδών τάχος έπιπτερώσας έκ της χαράς, εσπέρας
περί τινά που καταλύει άγρόν - κεράμων ό αγρός σκευαστήριον -,
5 και έκείσε το θείον χρήμα θησαυροφυλακεϊ ώς εν όστρακίνω
σκεύει κεράμοις άμφιλαβών. Και θαϋμα πάλιν επί τοις θαύμασιν,
έπί τοις δυσί τρίτον, τελειότατος και μυστικός αριθμός. ΤΩ αγρός
ούτος πολύτιμος, κατ' εκείνον τον εύαγγελικόν τον
θησαυροφύλακα, και τίς ούκ αν πάντων χρημάτων όλβου παντός
10 άνεκτήσατο προθύμως αυτόν δια τον όλβιώτερον θησαυρόν ;
Μέσης άσελήνου νυκτός, έπί τής σινδόνος στηρίζει πύρινος
στύλος ουράνιος, αν ό του παλαιοί) θεός 'Ισραήλ κάνταϋθα
τερατουργή, ώς αστήρ έπί τής χριστοδέγμονος στέγης ποτέ,
σελασφόρος ώδέ πυρσός, κάκ τής εικόνος εφ 'ενα των κεράμων τής
15 εικόνος μεταγραφή αυτοσχέδιος άχειροποίητος άγραφος, ώς πυρός
έκ του συνίσχοντος σώματος εις έτερον άμειώτως και άδαπάνως
μετάβασις, ώς έκ φωνής οργάνων έκτος άντιφώνησις - ει και τοΐς
φυσικοϊς || 274ν άντιβάλλω το άφυσίκευτον -, ούτω και άπό τής
γραφής άχειρότευκτον το άντίγραμμα, τύπου τύπος θαυμάσιου
20 θαυμάσιος, ή μάλλον ταύτοτυπία· αγία συν τω πρωτοτυπώ τρισσά,
άβατα λογισμοίς, καν άλλως ένίζονται. Βαβαί τής του αρχετύπου
δυνάμεως, αν έξ εκείνου και ό κέραμος χρώννυται. Ώς γαρ έπί

8. 15 πυρός Paramelle : πυρσός Β.


7. 6 Ex. 17, 1-7; 14, 29 8. Translat. Β § 14.
5 Jud. 6, 36-40 6-7 Jn 2, 1-11 8 Mt. 13,44
4IIIRegn. 17, 1-9 12-13 Ex. 1 3, 2 1 ; Mt. 2, 9.
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 75

s'en asperge le visage. Lui qui jadis avait fait avec de la pluie un miracle
pour Gédéon, avec de l'eau lors du sacrifice du Thesbite plein de zèle,
qui avait fait jaillir une source du rocher et pris comme matière solide les
Ilots de la Mer Rouge, qui s'était servi de l'onde à Cana aussi et à la pis
cine de Siloam pour l'aveugle, le voici qui s'approprie intimement ici
encore cet élément, Lui son créateur. Il prend un linge pour s'essuyer, et
y imprime immatériellement — miracle ! — la forme que la main n'a
pas faite, la forme irréprochable, sans différence aucune, semblable à
l'empreinte du sceau dans la cire. Comme sur un corps diaphane et trans
parent, II a laissé Sa forme : mais immuable, inamovible. Oh dextérité du
plus habile des peintres ! oh le bon dessinateur, qui sait représenter exac
tement la réalité et qui n'a pas eu besoin de regarder tout autour, ni sur
son modèle, ni de se tenir à bonne distance, mais qui, au contraire, entre
avec lui en un contact intime, chose paradoxale! oh portrait inouï, réalisé
de la sorte ! Celui qui jadis a tiré du non-être les essences et la diversité
des qualités, c'est Lui qui, là encore, crée cette qualité que sont les cou
leurs, et l'ombre ne saurait être produite par le corps ni l'éclat par le
soleil plus vite que, ce jour-là, Γ image ne naquit du modèle.

8. Le courrier reçoit ce qu'on lui donne, tout joyeux de cette acquisi


tion qui n'a coûté nulle peine. Il s'empresse de retourner auprès de celui
qui l'avait dépêché, et la joie ajoute des ailes à la rapidité innée de ses
pieds. Un soir, il s'arrête auprès de quelque champ où se trouvait une
fabrique de tuiles, et là, comme en un vase de poterie, il abrite le divin
trésor qu'il entoure de tuiles. Et voici qu'un nouveau miracle s'ajoute
aux précédents, un troisième après les deux premiers, formant ansi un
nombre absolument parfait et mystique. Oh champ précieux, comme
celui dont parle l'évangile et qui recelait un trésor ! Qui donc ne l'eût
acquis avec empressement au prix de tous ses biens et de toute sa
richesse, car il s'y trouvait un trésor plus riche encore ?
Au milieu d'une nuit sans lune, voici que vient prendre appui sur le
linge une céleste colonne de feu, s'il est vrai qu'ici aussi, c'est le Dieu de
l'ancien Israël qui opère des miracles. De même qu'autrefois une étoile
s'était arrêtée au-desus du toit qui accueillait le Christ, ici, c'est un flam
beau lumineux, et, sortant de l'image, la réplique de l'image vient s'im
primer sur l'une des tuiles, réplique spontanée, sans intervention de la
main, sans recours au dessin. De même que le feu, sans diminution ni
sans qu'il lui en coûte, passe du corps qui le contient à un autre, de
même que l'écho naît de la voix sans le secours d'aucun instrument — si
je dois prendre des comparaisons naturelles pour ce dont on ne peut dire
la nature — , ainsi également, de la peinture naît la réplique qu'aucune
main n'a faite, d'une empreinte miraculeuse une empreinte miraculeuse,
ou plutôt une copie identique. Avec le prototype, il y a là trois choses
saintes, inaccessibles aux pensées, même si, sous un autre rapport, elles
ne font qu'un. Oh puissance du modèle, puisqu'il donne à la tuile aussi
ses couleurs! En effet, tout comme, pour les corps très mobiles et peu
denses comme l'air, ou les substances aqueuses, ce qui cause le mouve-
76 BERNARD FLUSIN

των σωμάτων έχει των ευκίνητων τε και μανών, είτε αέρος είτε
δ'
ουσίας ύδατηρας, το μεν α'ιτιον το πρώτως κίνησαν ήρέμησεν, ή
25 έξ εκείνου ροπή δια του πρώτως κινηθέντος μέρους το προσεχές
μετεκίνησε, και έπι το έξης διαδέδηκε και οϋτω συγκίνησις, και
ωσπερ ή της λίθου της τεραστίας ολκή αλλήλων εξαρτά και εαυτή
συναρτά τα παρ' αυτής έπισπώμενα σώματα καν ταύτης
άπέσχισται - έκ των γηίνων γαρ και συνήθων ύμας κατευθύνω
30 προς τα καινά και ουράνια -, και νυν έκ της ισχύος του
άρχικωτάτου αιτίου και ή γραφή και τα μεταγράμματα.

9. Και διπλούν άνθ'άπλοϋ το δώρον ό όξυδρόμος κομίζεται, και


δισσεύεταί οί το της χάριτος τάλαντον ώς άγαθω δούλω και περί το
δώρον εύγνωμονήσαντι, ή βασιλική δραχμή και άκί6δηλον σώζουσα το
έκτύπωμα, και τω πιστω ταΰτα διακομίζεται βασιλεί· και δς - άλλα
5 γαρ ούκ εχω πώς τήν διπλόην εκφράσω τών εκείνου παθών - φρίττει
έπί τω θαύματι, σκιρτά έπι τω -8-εάματι, ύπό της φρίκης τήν καρδίαν
συνάγεται, ύπδ της χαράς διαστέλλεται, και γίνεται τούτω το
περικάρδιον άνθραξ, ένθεν έκριπιζόμενος εκείθεν έπιχρωννύμενος,
δμως και άμφοτέρωθεν το ζέον τηρών και της πίστεως τήν θερμότητα,
10 ώς ακτίνας ύπερφώτου φωσφόρου και απαυγάσματα, τάς εικόνας όρα
άφεθείσας πόρρωθεν έπ' αυτόν, οιαι και τών σωματικών στοιχείων το
εύκραές και έαρινήν κατάστασιν σχεδιάζουσι. Θεοπτίαν το πράγμα
λογίζεται και ύπό πέτρα τω κεράμω θεοΰ πρόσωπον καταθρεϊ, ε'ιποι
τις έμδαθύνων, οπίσθια, το κατά γε τήν έν έσχάτοις σάρκωσιν
15 μόρφωμα ή το μετά τήν ύπόστασιν όπισθεν ήκον και ύστεροχρονοΰν
άπεικόνισμα· αύτοπρόσωπον νομίζει παρ' αύτω γενέσθαι τον Ίησοΰν
και όλον δια τών συμβόλων κομίζεσθαι τον θεάνθρωπον, ήπου και το
διττόν τών αύτοΰ θαυματίζεσθαι φύσεων, διά τε του γηίνου κεράμου
διά τε του της οθόνης λεπτοϋφοΰς και διαφανούς. Λαμβάνει το
20 οστρακον άποξέσειν τους ίχώρας αύτου - το ίερογραφούμενον έπι τω
Ίώβ — τους έκ της λέπρας και της άρθρίτιδος, οστρακον το καινόν το
θείον το μαργαρώδες έξ ένθέου της αστραπής, και τούτω νόσον
άπασαν άποτρίδεται· δέχεται τήν σινδόνα θαυματουργόν, υγιαστικήν
υπέρ εκείνο το κράσπεδον δ πηγάς αίματηράς άπεμάξατο ή
25 άπεξήρανε, και ώς τήν σκιάν του Σωτήρος ήλπισεν εύ μάλα και τήν
εικόνα τούτου τερατουργεϊν, και αδίστακτος ή πεποίθησις και
ακραιφνή τήν της ύγιάσεως <...>. Και νυν βασιλείς σύνετε, -
προφήτης έπισκήπτει και βασιλεύς -, και οξύς αρπάζει τήν έπίσκηψιν
Αυγαρος και έπιγινώσκει τον Σωτήρα [τε] και συμβάλλεται. Ώς άρά
30 γε ου μόνον Νότου βασίλισσα της θέας Σολομώντος έπεθύμησε και
άπήλαυσεν, αλλά και κράτωρ ούτοσι μεγαλοπρεπής και του θήλεος

9. 19-20 Λαμβάνει το οστρακον: ώρ(αϊον) in marg. Β /'post 27 ύγιάσεως : lac. sta-


tuit Paramelle/29 τε seel. Paramellc.
9. Translat. A § 8; Β 3 Mt. 22, 19-21 25-26 Mt. 9, 20 sq
§§15,20-21. 13-15 Ex. 33, 22-23 26 cf. Act. 5, 15
2-3 Mt. 25, 20-22 2 1-22 Job 2,8 28-29 Ps. 2, 10 31-32 III Regn. 10, 1
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 77

ment initial s'immobilise tandis que l'impulsion qu'il a donnée, trans


mise par la première partie mise en mouvement, va faire bouger celle qui
la touche, puis passer à la suivante de sorte qu'elles se meuvent
ensemble ; de même que l'attraction de la pierre prodigieuse attache
ensemble les uns aux autres et se rattache à elle-même les corps qu'elle
attire, même s'ils sont séparés d'elle — car je veux vous conduire de ce
qui est terrestre et habituel vers les réalités inouïes du ciel — , ainsi,
maintenant, la force de la cause parfaitement originelle fait naître et la
peinture et les copies.

9. C'est un double présent, au lieu d'un simple, que le courrier vient


porter. Le talent qu'il a reçu de la grâce est doublé comme pour un bon
serviteur qui a su prendre soin de ce qu'on lui a donné, doublée, la
drachme royale qui préserve inaltérée l'empreinte, et c'est là ce qu'il
apporte au roi plein de foi, et celui-ci — mais je ne sais comment expo
serle double sentiment qu'il ressent — frissonne devant ce miracle,
exulte à ce spectacle. L'effroi lui étreint le cœur, la joie le dilate ; sa poi
trine devient une braise qu'on évente d'un côté et dont la surface rougit
de l'autre, conservant cependant, par ces deux actions, l'ardeur et la fe
rveur de sa foi. Comme les rayons et l'éclat d'un flambeau très lumineux,
il voit, lancées vers lui de loin, les images, qui retracent à l'improviste le
bon tempérament des éléments du corps et l'état qu'il avait au printemps
de la vie. Il pense voir là une apparition divine, et, sous le rocher — la
tuile — , il contemple la face de Dieu : si l'on approfondit, on dira le dos
de Dieu, c'est-à-dire bien sûr la forme qu'il prit lors de l'Incarnation à la
fin des temps, ou l'image qui vint à la suite de l'hypostase et qui lui est
chronologiquement postérieure. Il pense que c'est Jésus en personne qui
est venu chez lui et qu'à travers ces symboles c'est le Dieu homme tout
entier qu'il reçoit ; ou bien, que la tuile de terre et la transparente finesse
de l'étoffe lui donnent de s'émerveiller devant Ses deux natures.
Il prend le tesson afin de racler les suintements — c'est là ce que l'É
criture sainte dit à propos de Job — provoqués par sa lèpre et par son
arthrite : tesson inouï, divin, brillant comme la perle, né de l'éclair divin,
avec lequel il se nettoie de toute maladie. Il accueille l'étoffe miracul
euse, plus salutaire que la frange fameuse qui avait essuyé ou asséché
des sources sanglantes et, comme pour l'ombre du Sauveur, il se met à
espérer à juste titre que son image fait des prodiges, et sa confiance à
l'abri du doute <lui vaut> une guérison également entière.
Et maintenant, rois, comprenez ! c'est un prophète et un roi qui l'o
rdonne et Abgar, bien vite, se saisit de cet ordre : il reconnaît le Sauveur,
et il le rencontre. Et donc, puisque non seulement la reine du Midi, qui
avait désiré contempler Salomon, a joui de sa vue, mais que ce souverain
magnifique aussi, plus décidé et prompt d'esprit que la gent féminine, a
eu soif de contempler le prince de la paix, le Christ, alors, que les Juifs

43. Pour l'allusion politique que semble receler ce passage, voir n. 11


78 BERNARD FLUSIN

εμβριθέστερος τε και άγχινούστερος την του είρηνάρχου Χρίστου


θέαν έδίψησεν, αίσχυνέσθωσαν λοιπόν 'Ιουδαίοι ψευδηγορουντες,
ένδιαβάλλοντες, μηδένα λέγοντες έπιποθήσαι των αρχόντων έπι τον
5 Ίησοΰν, έπεί τοι ζητεϊ τούτον εκ μεν του 'Ισραήλ 'Ιωσήφ και
Νικόδημος, βαθύπλουτοι και βαθύφρονες και συνεδρίω τω σεμνω
σύνθακοι, έκ δέ των εθνών - δπερ και μείζον τεθαύμασται - ό
χωράρχης ούτος και βασιλεύς, κάκ της εξουσίας και του ολδου καΐ
τοΐ3 τρόπου περίδοξος. Τούτου γαρ βασιλέως καρδία εμφανώς
10 χειραγωγείται θεώ και τάττεται και ρυθμίζεται και κινείται προς
θεοσέβειαν.

10. 'Εκείθεν ήμϊν η*κε το τοσούτον || 235 καλόν, εξ 'Εδέσσης της


έωθινής πάμφωτοι συρμάδες έφ'ήμας απεστάλησαν, αρραγή της
εκκλησίας ερείσματα, οσα και άτίνακτοι λίθοι και θέμεθλοι,
συνήγοροι της των εικόνων τιμής αφωνοί τε και μεγαλόφθογγοι ως
5 έκ μέσων πετρών δίδοντες κραυγήν, μάρτυρες αύτομάρτυρες δτι και
υπέρ της αυτών προσκυνήσεως- και την προς την Βασιλίδα ταύτην
εξ εκείνου μεταγωγήν των εικόνων πανηγυρίζομεν σήμερον, κατ'
εθιμον ευσεβές πανήγυριν ένιαύσιον καΐ διττών φωστήρων
έπάνοδον, την της τελετής· έπέπρεπε γαρ ή πορφύρα και λίθος ό
20 πολυτίμητος τή κρατούση τών πόλεων, και μάλλον τα εις εύσέδειαν.

1 1 . 'Αλλά φέρε, μη στώμεν έπι μόνης της πανηγύρεως και της


τών εικόνων θέας τε και έξιστορήσεως, γενοίμεθα και αύτοι του
Σωτήρος είκάσματα, δσον χωρητόν άπομιμούμενοι τον
διδάσκαλον. Καν τις ημάς εφ' αυτόν προσκαλήται, καν
5 προσδιάζηται, καν μέγας τυχόν δυνάστης, καν αρχικός, πόρρω που
της υψηλής 'Ιερουσαλήμ εν f) γεγεννήμεθα μεν την αρχήν, το δ'
έπιτίμιον του θανάτου ταύτης εξω καρτερεϊν κατεκρίθημεν έν
λιθοστρώτω χώρω και βίω τούτω τω τραχεινω, τή του κλαύθμωνος
κοιλάδι και του χειμάρρου τών δακρύων τή σήραγγι, μή δλοι προς
10 αυτόν άποδράμωμεν, πρόφασιν παρακαλέσαι τυχόν παθαινόμενον,
άν συνορώμεν τήν αφιξιν διακοπήν μείζονος έργου Θεοφιλούς και
του σταυρού τών μελών και της τούτων νεκρώσεως, μηδέ
άλλ'
συναναχρανθώμεν πολιτικω συρφετω, εκεί το πλεϊον και το
καίριον μένοντες και το ούράνιον έκζητοΰντες πολίτευμα,
15 γενώμεθα προς αυτόν τύποις του ημών βίου και είκονίσμασιν,
έξοσιωθέντος τω πνεύματι, ή γράμμασι παρακλητικοΐς,
χαρακτήρσι του γράφοντος, και τούτοις διττοϊς, ύλικωτέροις μεν
τοις περί του σώματος, λεπτοτέροις δέ τοις περί του πνεύματος·
δειται γαρ και αμφω της καλής παρακλήσεως, και τω δυσπαθουντι
20 κατά ταύτα συνεπαρήξωμεν έν Χριστώ Ίησοί5 τω Κυρίω ημών.
Αύτω ή δόξα εις τους αιώνας, αμήν.

10. 9 έπάνοδον Paramelle : -ôoç B.


9.
5-7 Jn 7, 48; 3, 1- 10. 11. 12 Col. 3, 5
2; 19,38 5Ps. 103, 12 8Ps. 83, 6 14 Phil. 3, 20
DIDASCALIE DE CONSTANTIN STILBES 79

rougissent de honte, eux qui mentent et qui calomnient quand ils disent
que personne parmi les princes n'a désiré aller trouver Jésus : car, du
sein d'Israël, Joseph et Nicodème le cherchent, eux si riches, si sages, et
qui siègent avec l'auguste sanhédrin ; et, parmi les nations — ce qui pro
voque un étonnement plus grand encore — , ce chef local et ce roi, que sa
puissance, sa richesse et ses mœurs rendent si célèbre. De ce roi, en effet,
à l'évidence, Dieu guide le cœur, l'instruit, le règle et le met en marche
vers la piété.

10. C'est de là que nous est venu un tel trésor, c'est d'Édessc l'orien
tale que nous furent envoyées ces traces toutes lumineuses, inébranlables
étais de l'Église, tels des pierres et des fondations inamovibles, pour les
honneurs qu'on doit aux images avocats muets mais à la voix puissante,
faisant sortir comme d'entre les pierres un cri, et qui sont des témoins
témoignant pour eux-mêmes, puisqu'il s'agit de leur propre vénération !
Et c'est le transfert de ces images dans la reine des villes que, depuis
lors, nous fêtons aujourd'hui selon une pieuse coutume: fête annuelle
qui voit, avec le retour de la célébration, revenir des luminaires jumeaux.
Car la pourpre et la pierre précieuse convenaient à la ville impériale, et
plus encore quand il s'agit de la piété.

11. Mais allons, ne nous arrêtons pas à la seule fête, à la contemplat


ion des images et au récit de leur histoire, mais devenons nous aussi des
répliques du Sauveur imitant tout autant qu'il est possible notre Docteur.
Et si quelqu'un vient à nous appeler à lui, à nous forcer à venir, fût-il un
puissant magnat, d'aventure, ou bien un prince43, en quelque endroit
éloigné de la Jérusalem sublime où nous sommes nés à l'origine, mais
hors de laquelle nous avons été condamnés à endurer le châtiment de la
mort en un lieu pavé de pierres et dans ce monde rugueux, en cette vallée
de gémissements et dans la crevasse du torrent des larmes, ne courons
pas tout entiers auprès de lui — même si, d'aventure, il souffre et a
quelque motif d'appeler à son aide — , si nous voyons que notre départ
doit interrompre une tâche plus importante et plus agréable à Dieu, la
crucifixion de nos membres et leur mortification. N'allons pas nous
mêler à la tourbe du peuple, mais restant là-bas dans l'attente de ce qui
est plus important et fondamental, aspirant à devenir citoyens des deux,
contentons-nous d'aller à lui grâce à la reproduction et à l'image de notre
vie que l'Esprit a sanctifiée, ou bien encore par des lettres d'encourage
ment écrites avec les caractères propres à leur auteur, et qui sont doubles,
les uns, pour le corps, plus matériels, les autres, pour l'esprit, plus subt
ils, car tous deux ont besoin d'une bonne exhortation, et par là portons-
nous au secours de celui qui souffre, dans le Christ Notre Seigneur. À
Lui la gloire pour les siècles, Amen.

Bernard Flusin
Universiic de Pans IV Sorbonne

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