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Chemical wedding – Le diable dans le sang (titre français) Julian Doyle – sortie DVD le 20

janvier

Chapeau (1 étoile)

Bruce Dickinson mêle sorcellerie et hard science autour de l’occultiste Aleister Crowley,
et se lance dans un récit manifestement trop gros pour lui. Emballé avec trop peu de
rigueur et de dinguerie par Julian Doyle, et malgré quelques bonnes idées, le résultat est
ringard comme du Iron Maiden… Et rigolo comme ses pochettes de disques.

On a envie d’aimer son film, à Bruce. On entame en tous cas le visionnage avec un a
priori positif, tant le musicien, mais aussi son Julian Doyle de réalisateur (monteur de Brazil
tout de même) attirent la sympathie du fait de leurs statuts respectifs. Aleister Crowley,
occultiste du vingtième siècle qui avait déchaîné les passions en son temps ("the wickedest
man in Britain"), est une figure intrigante, suffisamment peu traitée par le passé (au cinéma en
tous cas) pour provoquer au moins un levé de sourcil curieux et motiver toutes les
extravagances narratives.

Mais voilà, l’extravagance, c’est précisément ce qui fait défaut à un film qui s’en
réclame à corps et (surtout) à cris. Le script, confus sans être vraiment complexe, nous montre
Crowley mourant dans les années 40 en maudissant deux étudiants qui se trouvaient là. De
nos jours, à l’université de Cambridge, plusieurs notables adeptes de l’occultisme (dont nos
étudiants depuis montés en graine) parviennent à ressusciter le sulfureux personnage par
l’entremise d’une combinaison de réalité virtuelle qu’est venu tester son inventeur, le
chercheur américain Mathers. Haddo, professeur timide et bègue, est après son passage dans
la combinaison habité par l’esprit de Crowley, qui va chercher à compléter sa résurrection par
un rite puissant, le mariage chimique : pour ce faire, il compte utiliser Lia, très jolie étudiante
rousse, celle-là même que Mathers s’apprête à tutoyer pendant deux bons tiers du film. Ce
faisant bien entendu, cadavres et attentats aux bonnes mœurs s’empilent, physique quantique
et alchimie se rencontrent, les considérations scientifiques pleuvent, les chassés-croisés se
multiplient, chacun poursuivant tous les autres. Y arrivera-t-il, y arrivera-t-il pas, sommes-
nous dans un monde parallèle, la science et la magie sont-elles les deux faces de la même
médaille, pourquoi Haddo s’est-il rasé la tête, et avait-il vraiment besoin de faire pipi sur ses
étudiants (spoiler !) ?

On le voit, la trame en elle-même est ultra linéaire, ce qui ne l’empêche pas de se perdre
dans les méandres de multiples péripéties au mieux esquissées (les mondes parallèles,
l’agence d’escort girls, la relation entre celui qui sait et son camarade en fauteuil roulant), au
pire inutiles (le sabbat en milieu de métrage) ou carrément grotesques (l’affrontement final du
plus haut ridicule en CGI criantes d’amateurisme), mais des péripéties presque toujours
inutiles au déroulement global de l’intrigue. On les jurerait d’ailleurs disséminées au hasard
dans le déroulement du film, ce qui s’avère carrément contre-productif dans un récit qui
entend développer un sens de l’urgence (le tout se déroule sur 4 jours) et du suspense (y
arrivera-t-il, y arrivera-t-il pas, tout ça), et surtout qui touche à des concepts qui réclament une
rigueur accrue dans le traitement, à savoir le paradoxe spatio-temporel. Aux deux tiers du
film, on se contrefout déjà du sort de tous ces personnages : le main plot est en pilote
automatique (bien entendu tout rentre dans l’ordre mais l’épilogue se remet in fine en question
avec l’énigme qui fait peeeuuuur, bref tout ceci est routinier) ; restent des gesticulations
multiples qui s’avèrent fatigantes dans leur démonstrativité.
Car l’autre problème, le principal peut-être, est bien cette démonstrativité qui se verrait
bien en subversion, mais n’atteint guère que la bouffonnerie, au sens médiéval du terme : les
coups d’éclat transgressifs de Haddo/Crowley, loin de susciter phobos et eleos, provoquent le
plus souvent un amusement réel, mais somme toute plutôt bon enfant : Du cul frileux, des
gros mots, un peu de méchanceté gratuite, des saillies scatologiques et une violence le plus
souvent hors-champ. Doyle et Dickinson, eux, sont persuadés de bousculer des tabous et
d’horrifier le chaland à la manière d’un Sade, d’un Rochester ou même pourquoi pas d’un
Manson. Seulement, à part quelques plans de full frontal nudity, un chat crucifié dans un coin
de cadre, de l’ordure assez anecdotique (une scène de rasage se démarque pourtant dans le
subversif, on n’en dira pas plus) et beaucoup de morgue dans l’attitude de Simon Callow (qui
s’amuse comme un petit fou en Crowley et est de loin le meilleur acteur du cast), tout ceci est
plutôt touchant de candeur de la part des auteurs. Ce qui apparaît au final, ce sont de ces
affectations de turpitudes mises en scène par des adolescents qui y croient à mort, de celles
qui fleurissent à longueur de skyblogs de gothiques en carton. Ainsi les turpitudes de Crowley
se manifestent le plus souvent au-dessous de la ceinture ou dans une coprolalie ampoulée, qui
mettrait même en valeur ce qu’on avait pu voir dans le domaine chez Brian Yuzna (dans
Society certes, mais aussi dans Faust, ce qui est franchement plus grave !)… On évoquera ici
ce qu’en dit Pierre Jourde dans l’avant-propos de son indispensable Littérature sans estomac :
« Certains auteurs prétendus « sulfureux » (…) ont l’air de vivre il y a cinquante ans, ils se
gargarisent d’audaces cacochymes, s’étonnent du courage qui consiste à briser des interdits
pulvérisés depuis des lustres. » Ici c’est la même chose, on aurait même l’impression de se
faire arnaquer en termes de déviance filmée si la pompe dont les auteurs font preuve ne
montrait pas, encore une fois, leur candeur vis-à-vis de leur projet.

La preuve de cette candeur, c’est assurément le didactisme excessif dont fait preuve le
dialogue dès qu’il s’agit des références scientifiques et relatives à l’informatique. Trop
pointues, trop pléthoriques, et surtout mal fondues dans le script, elles ne font que parasiter la
célérité du récit et en éjecter le spectateur qui avait déjà du mal à se sentir concerné (le prix de
la réplique incongrue va sans doute, dans le domaine, à un « I feel like Schrödinger’s cat ! »
juste avant le climax ; difficile de faire plus lourd dans le sibyllin !). C’est un peu comme ces
mauvais récits de SF où les personnages se croient obligés de nommer chaque gadget d’un
nom à rallonge qui en dévoile le fonctionnement : vous dites souvent que vous prenez votre
véhicule roulant à énergie fossile, ou que vous vous brossez les dents à l’aide de votre
dispositif à pression hydraulique ? Non ? Alors les gens du futur ne prendront sans doute pas
de douches à radiation ionique inversée, mais simplement des douches, quelque exotique
qu’en soit le principe moteur… C’est tout à fait pareil ici, où les personnages confondent
jargon et vulgarisation au cas où une équipe de Discovery Channel passait par là quand on
cause boulot.

Quant au charabia magique de Crowley, il est à l’avenant (c’est après tout aussi un
jargon), et partant il ne fait quasiment jamais mouche et passe toujours pour un cheveux dans
la soupe, un discours pompeux apposé à la va-comme-je-te-pousse sur des séquences qui n’en
demandaient pas tant. Ce n’est certes pas la subtilité qui étouffe la caractérisation : Haddo est
timide et inoffensif, il est donc bègue et arbore des boucles blondes, caractéristiques qui
s’inversent à l’arrivée de Crowley (boule à zéro, diction emphatique, costume violet vif !). Et
les personnages de s’étonner – sans blague.

Ajoutons à cela une production carrément en dessous de son sujet (la HD, pas assez bien
éclairée, ne fait jamais illusion, et dès qu’on a des matte paintings ou des intégrations, ça
devient vraiment criant), les trois quarts du cast jouant comme des briques (mention spéciale à
Karl "une seule expression faciale" Weber dans le rôle du gentil héros), ET du Dickinson
flanqué aux moments les plus inappropriés du métrage, et on ne pourra pas dire que Chemical
wedding est un bon film. Même pour de la production télé, c’est en dessous des standards
actuels de ce qui se fait au Royaume Uni. Mais il serait injuste de le qualifier de mauvais film,
comme ça, de manière unilatérale. Ce n’est même pas un navet : c’est un vrai petit plaisir
coupable, du genre qu’on se tape un samedi, avec des potes, de la pizza et de la bière ; on sait
que c’est mauvais, mais ça peut tout de même faire plaisir… A condition de ne pas être tout
seul (sino on s’ennuie et on s’énerve) et de savoir avant le visionnage à quoi s’en tenir. Plus
maîtrisé, cela aurait donné une recommandable petite série B sans prétention comme avait pu
l’être un Razor blade smile. Plus fou, moins retenu, dans d’autres mains peut-être, ç’aurait pu
être une vraie bande psychotronique comme on en voit rarement.

Dommage.

Fabien Legeron

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