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Le "Muslim" Bashing : un triste tropisme républicain

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Le "Muslim" Bashing : un
triste tropisme républicain
- En France - Elections -

Date de mise en ligne : jeudi 29 mars 2007

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Le "Muslim" Bashing : un triste tropisme républicain

Le Ministre préposé à l'intégration a parfois des fulgurances que ses sourires étirés ne
laissent pas a priori présager. Aussi a-t-il pu déclarer, il y a quelque temps déjà, que les
immigrés étaient devenus de "la chair à canon électorale". Azouz Begag, car il s'agit bien de
lui, se vit aussitôt sévèrement tancer par Nicolas Sarkozy.

Et pourtant quelle vérité est contenue dans ces quelques paroles...

En effet, à chaque époque correspond une chair à canon spécifique et un Moloch sur l'autel
duquel sont sacrifiées des victimes. Pour en ce qui concerne les immigrés, ce Moloch a pris
différents visages. Le Moloch de la guerre a eu sa chair à canon militaire. Le film
"Indigènes" a ainsi tenté de rappeler maladroitement l'apport héroïque et dramatiquement
oublié de ces hommes qu'on appellait alors les indigènes des colonies. Le Moloch de la
croissance économique eu également sa chair à canon industrielle broyée sur l'autel des
fructueuses "30 Glorieuses". Yamina Benguigui a pu dans son magistral film "Mémoires
d'immigrés" montrer comment les grandes entreprises françaises organisèrent l'immigration
par villages entiers d'une main d'oeuvre docile, corvéable.

Et maintenant, à quel Moloch veut-on sacrifier cette nouvelle "chair à canon", électorale
cette fois-ci ? A l'ambition frénésique et frénétique d'un seul homme ? Certainement. Mais
pas seulement. Cette chair à canon électorale risque de se voir sacrifiée sur l'autel de
l'identité française, expiant ainsi une crise identitaire dont la France n'a peut-être pas
conscience.

Aussi assistons-nous depuis quelques temps en France à un "Muslim bashing" (du verbe "to
bash" signifiant taper, frapper) comme il y eu un mouvement de "French bashing" aux
Etats-Unis au plus fort de l'opposition française à la guerre en Irak.

Revoilà le coup de l'insécurité... identitaire


Nicolas Sarkozy s'est prononcé pour l'instauration d'un ministère voué à l'immigration et à l'identité nationale. Face
aux réactions suscitées par ce pestilentiel regain d'une idéologie nauséabonde, il a pris son air étonné de Chattemite
comme s'il exposait un principe de bon sens, absolument pas dangereux.

L'habile homme que voilà...On ne peut se défendre, dans un premier temps, de l'idée qu'il s' agit d'un subtil
contre-feux médiatique dont la fumée doit servir à cacher avantageusement les révélations du Canard enchaîné sur
son appartement. Ce dossier explosif n'a pourtant pas fait l'objet de plaintes pour diffamation, comme on aurait pu
attendre de tout homme politique dont la probité a été si clairement et publiquement mise en question.

Monsieur Sarkozy s'est contenté de lancer cette idée, comme cela, mine de rien, sachant parfaitement, en habile
communicateur qu'il est, que les médias, comme les poissons rouges, ont une mémoire à court terme et qu'ils ne
peuvent poursuivre deux actualités en même temps. Allumer un incendie pour détourner l'attention d'un autre feu est
ainsi une technique très prisée par ce candidat pompier-pyromane.

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Cependant, il ne faut pas réduire cette question à ce seul but de manoeuvre de basse cuisine politico-médiatique.
L'idée même d'envisager un ministère de l'identité française révèle beaucoup sur l'état de la société française.

Ce ministère liant immigration et identité traduit un quasi glissement orwellien, rappelant le livre 1984 dans lequel
George Orwell décrit une société où le ministère de la Vérité gére la propagande et le ministère de la Paix s'occupe
de la Guerre. Cette société orwellienne évacue ainsi ses failles, ses mensonges au travers d'une "novlangue"
rassurante, à la transparence opaque. Un peu comme en France où le ministère de l'emploi gère... le chômage.

Ce ministère de l'identité est un avatar de cette "novlangue" sarkosienne ; elle traduit ainsi moins un désir de
rassembler la nation française que de la disperser. Suivant le schéma orwellien, le ministère de l'identité serait moins
voué à la cohésion qu'à l'exclusion.

Vers un "Gallo-Républicanisme" communautaire


Car il est un point essentiel que Monsieur Sarkozy semble vouloir continuer d'ignorer, malgré l'Histoire : l'identité,
dasn la tradition française, ne se décrète pas. Elle est, simplement.
Elle se conjugue mal au passé, sous peine de sacraliser un âge d'or mythifié. Elle ne se conjugue pas mieux au
futur sous peine de se voir imposer sa substance.
En d'autres termes, l'identité n'est pas transcendante mais elle est immanente : elle se définit par ses éléments
propres, se recrée dans un mouvement continu et supporte difficilement qu'on la définisse de l'extérieur.

Cette immanence de l'identité se retrouve parfaitement dans la tradition française. Contrairement à l'Allemagne qui a
fait du droit du sang le seul moyen d'accéder à la Nation allemande, la France a su allier le droit du sol et le droit du
sang. Elle a créé ainsi une "communauté de destin", une "Nation-Contrat", "ce vouloir-vivre ensemble qui est un
plébiscite quotidien" selon les mots d' Ernest Renan. Ces mots résument ainsi cette idée fondamentale que l'identité
française n'est pas figée, définie de l'extérieur, mais se réinvente "quotidiennement" en puisant dans les éléments qui
la composent.

Or en liant immigration et identité, Monsieur Sarkozy casse cette dynamique et fait de cette "Communauté de destin"
un "communautarisme de destinée" en semblant définir a priori ceux qui pourront appartenir à la Nation française de
ceux qui en seront exclus.
Avec l'Etat dans le rôle de celui qui décide, exclusivement, de cette appartenance sans qu'on ne tienne plus compte
de cette manifestation de la volonté de l'individu qui est à la base de la Nation-Contrat française.
Il se base pour cela sur ce qu'il appelle "les valeurs de la République".

République contre Démocratie


Pourquoi cette référence quasi "litanesque" des ces sacro-saintes valeurs dont personne ne sait ce qu'elles
contiennent exactement et dont Monsieur Sarkozy s'est fait le porte-parole jaloux et exclusif . Pourquoi ne pas se
référer tout simplement aux valeurs de Démocratie qui sont un peu plus définissables et surtout qui constituent la
base de notre système politique ?

Peut-être que la réponse à cette question se trouve dans le fait que l'idée même de Démocratie suppose un
universalisme, une égalité de tous qui s'opposerait de facto à toute forme d'exclusion d'un groupe ou d'un individu.
Le Démocratie serait un humanisme là où la République (ou plutôt le "Gallo-républicanisme") ne serait qu'un

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particularisme.

La République (surtout si elle est sarkosienne) suppose des valeurs plus étriquées, moins définies. Elle pose un
ordre public (entendu dans le sens des valeurs de base d'une société) du "vouloir-vivre ensemble" qui glisse
insidieusement, avec ce ministère, vers un ordre public du "vouloir-vivre contre". Surtout, n'étant pas clairement
définie, elle permet tout, suppose tout et n'importe quoi.

Les immigrés : une communauté repoussoir ?


La question que suscite ce ministère de l'identité est simple : la France traverse-t-elle une crise de son identité
nationale ou cette crise est-elle artificiellement provoquée pour éluder les vraies questions politiques, les questions
sociales surtout ?

Il me semble que ces deux hypothèses se valent , ne s'opposent pas mais se conjuguent pour se cristalliser dans
cette campagne présidentielle.
Tout se passe comme si, à l'heure de la mondialisation destructurante, toutes les peurs, tous les maux de la société
française avaient trouvé un exutoire dans les immigrés.

Tous ces problèmes sociaux, économiques demandant des solutions politiques ne sont ainsi vus que sous le prisme
réducteur et intellectuellement reposant de l'immigration et de son nouveau jumeau inversé, l'identité nationale.

Lionel Jospin avait eu l'honnêteté de déclarer que "le politique ne peut pas tout" (l'a-t-il payé le 22 avril 2002 ?) : à
l'heure des flux immatériels et incontrôlables de la mondialisation, les hommes politiques peuvent-ils encore
grand-chose ?

En tout cas il leur reste de se replier sur ce prisme déformant qui leur permet d'offrir des solutions à bon compte, en
versant dans l'invective, la posture et l'imposture.

Aussi Jean-Marie Le Pen a-t-il d'ores et déjà gagné symboliquement ces élections puisque ses mots d'ordre, ses
valeurs, ses solutions ont été repris et suivis par beaucoup d'autres hommes politiques. Si les questions demeurent,
ce sont les réponse lepenistes qui ont pris le pas sur toute autre.

Les immigrés ou leurs enfants deviennent ainsi idéalement une communauté-repoussoir. Ils subissent de la part des
médias et des hommes politiques un transfert d'hostilité, un transfert des maux français.

Le chômage ? c'est la faute aux immigrés, et peu importe que beaucoup d'emplois resteraient inoccupés si on
appliquait la préférence nationale tant leur pénibilité est lourde.

L'insécurité ? c'est la faute aux immigrés criminogènes et peu importe les chiffres des observatoires indépendants et
peu importe que des spécialistes comme le juge Eva Joly ait alerté sur le fait que la principale délinquance est
financière, politique, à cols blancs.

L'inégalité Homme-Femme ? Ce n'est pas en France qu'on verrait une disparité de salaire allant jusqu'à 33% entre
un homme et une femme à compétence et emploi égaux non, non...c'est les immigrés qui sont sexistes, et
seulement eux.

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La violence faite aux femmes ? Voyons, pas de ça chez nous... ce sont encore et toujours ces immigrés, d'ailleurs
souvent musulmans. Mais que je ne sache pas que les femmes battues qui meurent quotidiennement aient toutes
été conjointes de musulmans.

Les viols ou "tournantes" ? Seulement dans les caves des cités, voyons, pas ailleurs. Là ce sont les enfants
d'immigrés qui en seraient les principaux coupables...et peu importe les études de sociologues comme Laurent
Mucchielli.

Cette liste n'est bien sûr pas exhaustive et les derniers soubresauts des relations internationales y ont ajouté le
terrorisme supposé chez tout musulman. Pourtant, la Corse, partie pleine et entière de la Nation française, ne
connaît-elle pas constamment des actes violents rarement qualifiés de terroristes tant ce mot est maintenant
exclusivement réservé aux seuls musulmans ?

Pour conclure, il est deux pratiques dans les sociétés antiques juive et grecque qui sont pleines d'enseignements
pour nos sociétés modernes qui pensent avoir évacué le symbolisme.

Dans la société juive, il était de coutume lors de la fête de Propitiation d'utiliser deux boucs : l'un était offert en
sacrifice pour les pêchés du peuple et l'autre était envoyé dans le désert, emportant avec lui symboliquement les
fautes des hommes.

Dans la Cité grecque, tous les ans, les habitants notaient sur un tesson (ostraka) le nom d'un homme choisi parmi
eux soit pour qu'il expie toutes les fautes commises soit parce qu'il menaçait la cohésion de la Cité. Cet homme était
ensuite banni, "frappé d'ostracisme".

Le même symbolisme semble prévaloir en France par rapport aux immigrés. Certains hommes politiques veulent
faire accroire que tous les problèmes que rencontrent la société française peuvent être résolus par cet "ostracisme" ;
Et le font-ils parce qu'ils n'ont aucune autre solution réellement politique à offrir ? Et de peur également que l'on se
rende compte qu'au final "le Roi est nu" ?

Ou le font-ils aussi parce que cela permet de souder artificiellement les Français par la Peur et la Haine de l'Autre ;
car c'est bien connu, la Peur et la Haine font du bon mortier social. "Souvent, on s'aime de haïr ensemble" écrivait
Albert Cohen. Cela, Nicolas Sarkozy l'a bien compris.

Et ce bouc émissaire est ainsi symboliquement banni dans les toundras-banlieues des villes françaises, et est tout
aussi symboliquement égorgé dans les baignoires dorées de la République française.

"Beaucoup d'entre-nous (...) sont à la merci de cette idée, consciente ou inconsciente, que "l'étranger, c'est
l'ennemi".Le plus souvent, cette conviction sommeille dans les esprits comme une infection latente (...).Mais (...)
lorsque le dogme informulé est promu au rang de prémisse majeure d'un syllogisme, alors au bout de la chaîne
logique, il y a le lager. (...) Tant que la conception a cours, les conséquences nous menacent". Primo Levi, Si c'est
un Homme.

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