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Service aux lecteurs


Tout courrier (sauf abonnement)
pour la rédaction est à adresser à :
Edito
Forward - Fédération des Entreprises
de Belgique ASBL
Rue Ravenstein 4, 1000 Bruxelles
Tél. : 02 515 09 44 - fax : 02 515 09 15
forward@vbo-feb.be

Responsable des publications


Stefan Maes - sm@vbo-feb.be “Cette nation factieuse”
Rédaction
Olivier Fabes (chef d’édition) - of@vbo-feb.be
Thomas Leysen, président de la FEB
Sofie Brutsaert - sbr@vbo-feb.be
Florence Delhove - fd@vbo-feb.be

A
Correction des textes
u moment de boucler ces lignes, le 27 avril, la
Anne Michiels Belgique était à nouveau plongée dans un
imbroglio politique dont elle a le secret. Notre
Traduction
gouvernement vient de tomber à cause du dossier
Lyrco (info@lyrco.com)
Tradas - www.tradas.com BHV. A nouveau. Nos responsables politiques n’ont
pas réussi à sortir de leur logique propre, en dépit de
Collaborateurs
l’appel fort lancé il y a deux semaines par les partenai-
L’ensemble des collaborateurs de la FEB,

“crise
Seger Bruninx, Philippe Crémer, Willem De res sociaux réunis au sein du Groupe des 10, les exhor-
Bock, Remco De Jong, Peter Elliott, Bernard
Roisin, Chantal Samson, Johan Van Praet,
Cette nouvelle tant à trouver une solution négociée pour BHV, dans
un souci de préserver notre prospérité. C’est avec
Jeroen Vanstiphout, Hilde Vereecken, Sergueï
Vlassov
pourrait beaucoup de honte pour eux que je dois aujourd’hui

Photographie
bien être fatale constater que les préoccupations politiques et électo-
rales à court terme des partis l’ont emporté sur les
Atelier Image, Jan Caudron, Isopress,
Johan Martens, Daniël Rys, Reporters,
à la réputation intérêts fondamentaux des entreprises et des citoyens
Thierry Strickaert
de notre pays” de ce pays. Une seule chose est certaine : alors que la
Belgique se prépare à assurer la présidence de l'Union
Abonnements
Abonnement annuel : 75 eur européenne, cette nouvelle crise pourrait bien être
Pour l’étranger : 100 eur fatale à la réputation de notre pays en projetant l'image d'une incapacité politique à
Le numéro : 9 eur résoudre un problème 'périphérique', alors que la crise économique s'éternise, que la
Gestion des abonnements et distribution :
Paola Bulot (pb@vbo-feb.be)
Grèce inquiète toute l'Europe et qu'un volcan n'a peut-être pas fini de troubler notre
Tél. 02-515 08 93 - fax : 02-515 09 15 espace aérien …

Régie publicitaire
ADeMar, Graaf de Fienneslaan 21,
En effet, quelques heures à peine après qu'Yves Leterme ait pris le chemin du Palais de
2650 Edegem (Anvers) Laeken, les médias internationaux se sont jetés sur ce qui apparaît à leurs yeux comme
Contact : Nele Brauers et Sally-Anne Watkins un nouveau vaudeville. La presse 'business' notamment n'a pas manqué de signaler l'in-
Tél. : 03 448 07 57 - fax : 03 448 09 57
congruité d'une nouvelle crise à deux mois de la présidence européenne. "La crise arri-
E-mail : nele.brauers@ademaronline.com
ve à un mauvais moment pour la Belgique," a écrit le Wall Street Journal (…), épinglant
Mise en page aussi que la présidence belge devrait être une opportunité de donner à Herman Van
Vanessa Solymosi (Landmarks) Rompuy l'occasion d'asseoir son autorité. Notre pays est qualifié par le journal américain
forward@landmarks.be
de ‘factious nation’, à savoir une nation d'agitateurs, quasiment au bord de l'insurrection.
Impression Les titres de presse vont et viennent, mais on se passerait bien de tels qualificatifs. Au
Geers Offset cours de ces dernières heures, nous avons reçu de nombreux signaux émanant d’entre-
Routage preneurs inquiets. Ils sont extrêmement préoccupés par les conséquences potentielles
Geers Offset de la crise politique actuelle sur le tissu économique : report des investissements, nou-
velle détérioration de l'image de la Belgique, ... Nous ne devons pas sous-estimer ces
Editeur responsable
Olivier Joris signaux et dangers, car leurs répercussions risquent bien d’être durables.
17, rue du Wolvenberg,
1180 Bruxelles On ne rappellera jamais assez à quel point le pays a actuellement besoin de stabilité,
pour rassurer les investisseurs étrangers dont dépend largement notre économie ouver-
te, mais aussi et surtout pour prendre enfin à bras le corps les défis socio-économiques
Membre de l’Union des éditeurs
de la presse périodique. immenses qui se présentent à nous. Le maintien de notre compétitivité, les réformes
ISSN 0771-2987. Tous droits de urgentes en matière, notamment, de marché du travail, de pensions, de formation, ...
reproduction réservés
Les événements des dernières années n’ont hélas pas contribué à un plus grand sens du
Forward est imprimé sur leadership dans le chef de ceux qui doivent diriger notre pays. Les extrémistes ont habi-
du papier issu de la ges-
tion durable des forêts. La lement triomphé des modérés. En ma qualité d’entrepreneur, je veux croire que cette
gestion durable des forêts
tient compte de l'éco- page sombre de l’histoire de notre pays porte en elle les germes du changement. 
système forestier, respecte
les aspects sociaux (droits
des populations indigènes
et des travailleurs fores-
tiers*) et est responsable
d'un point de vue éco-
nomique.

MAI 2010 • 1
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SOMMAIRE

Le CEO
anno 2010

28
L’ACTU
Sous les projecteurs 4 Chief news officer  Filip Van Hool
(Van Hool)
6 3 questions à  Koenraad Van Kerckhove
(Mercer Belgique) : les meilleures
conditions salariales en Europe
8 People, Planet & Profit  Chaleur et
électricité à base de chicons
10 Un an plus tard  Fortis rebaptisée BNP
4 44 Paribas Fortis
Filip Van Hool Didier Bellens 12 En bref  Comment le Code belge de
administrateur de Van Hool CEO de Belgacom gouvernance d'entreprise est-il respecté ?
“Espérons que les voyageurs “Je rêve d'un écran de TV
qui sont restés bloqués à cause qui ressemble à l'interface 14 Echos des secteurs
de l’éruption volcanique réap- d'un iPhone”
prendront à apprécier à sa
juste valeur l’autocar”

OPINIONS
16 Expertises FEB
22 Faits et chiffres  Technologie et
automatisation font la force de
l'économie belge

62 80 24 Controverse  Faut-il supprimer


l'avantage fiscal de l'épargne-pension ?
Werner Annaert France Fannes
directeur général de la FEGE directeur général de BioWin 26 Carte blanche  Après la crise, vient
“Je crains fort que l'incinéra- “J'ai essentiellement un rôle l'optimisme (Liesbeth Noordegraaf-
tion des déchets ne disparais- de passerelle entre le monde
Eelens)
se en Belgique et que nous ne académique et celui de
produisions plus d'énergie l'entreprise”
verte de cette manière”

2 • MAI 2010
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SOMMAIRE

EN COUVERTURE
30 Quel est le profil du CEO idéal ?  Certaines qualités requises
en 2007, le sont un peu moins en 2010 … “attendre
On ne peut pas
de lui
32 Cinq regards de CEO sur leur métier  En 20 ans, comment
ces chefs d'entreprise ont-ils vu évoluer leur métier, à savoir diriger une en- qu'il soit capable
treprise, en bonne entente avec le conseil d'administration qui les a choisis ?
de se réinventer
40 Portrait-robot du top manager en dix traits  Enquête sur le indéfiniment”
profil et le style de vie des top managers belges
41 Pourquoi les salaires des CEO ont grimpé  La rémunération Pierre Francotte
variable : un élément structurel du package salarial (ex-CEO d'Euroclear)

BUSINESS INTERNATIONAL
44 L’interview  Didier Bellens (Belgacom) 64 Analyse  L'inflation de retour ?
48 Jeunes pousses  Alfin Catering, l'étoile 66 Q&A commerce extérieur  Les Carnets
montante de la restauration créative ATA, passeports du commerce mondial
50 Mode d’emploi  Objectif : réduire les frais 67 Sans frontières  Pas de cordon sanitaire
de transport autour de Geert Wilders aux Pays-Bas
52 Stratégie  Le marché de la seconde main
promis à un bel avenir

55 Spécial  Real estate


Six tendances caractérisent l'ADN de la construction
moderne. Une chose est certaine, un bâtiment con-
struit en l'an 2010 vit ! Bourré de domotique et
d'astuces écologiques, il doit abriter plusieurs fonc-
tions de vie. Entreprises du bâtiment et prestataires
de services se confondent de plus en plus.

61 Jurisprudence sociale
62 Enjeux  Ces entreprises vertes qui vivent des déchets
76 En marge
79 Ils bougent
80 Portrait du mois  France Fannes (BioWin)

LIFESTYLE
68 Un entrepreneur étonnant à la tête du théâtre Le Public
71 L'escale culinaire de Bruno Venanzi (Lampiris) à l'Héliport
72 Le vintage ? Les antiquités de demain
77 Jos Linkens (Neuhaus) a lu ‘Corps et âme’ de Frank Conroy
68 71 72

MAI 2010 • 3
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L’ACTU Chief news officer

L’actualité selon Filip Van Hool,


administrateur de Van Hool et responsable pour la division bus & car

Faut-il supprimer le système L'éruption volcanique en Islande :


de prépension ? un gouffre financier pour le secteur
C'est un fait que nous devrons aéronautique
tous travailler plus longtemps, L'ampleur des pertes économiques pour l'ensemble de
mais les prépensions restent l'activité aéronautique est pratiquement impossible à cal-
dans la pratique la seule manière culer. Selon Brussels Airlines, personne dans ce secteur ne
de se débarrasser anticipative- peut tenir face à cette situation et la société demande dès
ment des travailleurs plus âgés. lors l'aide du gouvernement.
Etant donné que rendre la pré-
pension plus chère ne donne
que peu de résultats, Geert Vermeir, “Je ne me prononce pas sur le montant des dégâts pour le sec-
teur et sur la manière dont l'aide éventuelle sera peut-être orga-
conseiller juridique chez SD Worx, ne nisée au niveau européen. Mais il faut rester prudent par rapport
voit qu'une solution: la supprimer. aux mesures de soutien. A priori, nous n'en sommes pas partisans.
Le financement des subsides ne va pas tomber du ciel et risque de peser
“En tant qu'entreprise intensive en main- sur des coûts salariaux déjà élevés en Belgique. La prudence est égale-
d’œuvre employant un grand nombre de ment de rigueur au niveau européen si nous ne voulons pas créer une
techniciens dans 130 disciplines différentes, concurrence déloyale. Si les subsides débouchent sur une lutte à armes
nous suivons avec inquiétude le débat inces- inégales, alors ils minent l'économie plutôt que de la soutenir. A moins
sant sur le vieillissement de la population, la problé- que vous ne deveniez plus combatif en raison de votre position d''under-
matique des pensions et le taux d'emploi des colla-
borateurs plus âgés. Notre entreprise a toujours eu
une opinion bien tranchée sur la mise à la retraite
anticipée de travailleurs et, en filigrane, la perte de
connaissances et de savoir-faire. Pas moins de 84% Les navetteurs préfèrent la voiture
de nos quelque 3.300 travailleurs sont actifs dans des
fonctions critiques. Nous comprenons que les cir-
constances économiques mettent les entreprises
Selon une étude réalisée par la VUB,
dans des situations très délicates et que les situations seulement 9% des navetteurs laisserai-
exceptionnelles demandent des mesures exception- ent leur voiture à la maison si le trans-
nelles. Mais si l'exception devient la règle, pour ainsi port en commun était gratuit. De meil-
dire un droit acquis, alors le système déraille. C'est ce
leures correspondances, une plus gran-
qui se passe aujourd'hui. Les employeurs seraient
bien bêtes de ne pas recourir à la prépension, ce sys-
de rapidité et une accessibilité plus fa-
tème est si attrayant. Ce système qui devait à l'origi- cile des trains pourraient convaincre les
ne offrir une issue pour les entreprises en difficultés, 91% restants de faire le pas.
crée aujourd'hui plus de problèmes que de solutions.
Les gens ne sont pas des produits jetables. Nous
mettons tout en oeuvre pour garder les employés de “Une étude récente réalisée par le Conseil Mobilité de Flandre
plus de 50 ans, Car nous sommes convaincus que (Mobiliteitsraad van Vlaanderen) démontre que le mode de dépla-
l'activité humaine – devoir, pouvoir et vouloir travailler cement a à peine changé depuis 2002: 81,1% des Flamands ne
– est la base de notre prospérité.”  jurent encore que par la voiture et ce malgré les embouteillages en

4 • MAI 2010
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Chief news officer L’ACTU

BUS BUILDER OF THE YEAR 2009


Filip Van Hool (46) a entamé sa carrière ler derrière le volant des imposants autobus à
dans l'entreprise éponyme. C'est la troisième étage. Jauger, c'est savoir. Depuis 2001, Filip
génération à la tête du constructeur d'autobus Van Hool est administrateur de ABC Companies
et d'autocars. Après des études économiques USA, une entreprise américaine spécialisée dans
aux Universités d'Anvers et de Bruxelles la distribution de camions Van Hool et dans
(ESHAL), il a progressé dans l'entreprise jusqu'à l'après-vente de pièces de rechange et de servi-
devenir membre de la direction. D'abord ces d'entretien sur l'ensemble du territoire des
responsable de la production 'bus et cars', il a Etats-Unis et du Canada. Depuis 2007, il est
ensuite également pris en charge les ventes. administrateur de Van Hool sa. Il est également
Une combinaison qui lui va comme un gant. membre du comité de direction d'Agoria. Sa
"Cela me permet de très bien savoir ce que je passion pour son métier et son produit a été
peux vendre et à qui." Pendant le week-end, récompensée en 2009 avec le titre de
l'homme en profite régulièrement pour s'instal- "Constructeur de bus de l'Année".

dog'. Dans notre pays, le secteur aéronautique bénéficie par exem-


ple depuis des années d'une réduction des accises sur le carburant,
La lutte contre le réchauffe-
ce qui renforce la concurrence avec le transport par route, même sur ment climatique a aussi ses
les courtes distances. Cette situation a relancé notre secteur et nous
a permis de choisir résolument la voie de bons côtés
l'innovation et du développement d'au-
tocars et d'autobus sur mesure. La seule Le ministre du climat Paul Magnette trouve
façon de l'emporter sur la concurrence normal que les pays industrialisés occupent
était d'accorder plus d'importance au l'avant-scène dans la lutte contre le réchauf-
confort, au service et à la flexibilité sur
des trajets de 700 à 800 km. Un bon
fement climatique. “Cela joue même en notre
exemple est le Megabus que nous avons faveur. (...) Si nous avions investi il y a dix ans
lancé en 2006 en collaboration avec la dans les voitures électriques, alors nous au-
société américaine Stagecoach Group. rions pu éviter la fermeture d'Opel Anvers.”
Espérons que les voyageurs qui sont res-
tés bloqués à cause de l'éruption volcanique réapprendront à appré-
cier à sa juste valeur l'autocar comme un moyen de transport et de “Je trouve cette dernière phrase exagérée. Le minis-
voyage de qualité.”  tre a toutefois raison lorsqu'il dit que le problème du
climat crée des opportunités, notamment pour un
acteur de niche comme Van
Hool. Au milieu des années quatre-
vingt, nous avons lancé à Gand les pre-
constante augmentation. A peine 11,5% prennent le bus (+ 1,8%) et miers trolleybus à faible niveau sonore
7,4% le train (+0,9%). Même un transport en commun entièrement gra- et de pollution. Ces dernières années,
tuit ne parviendrait pas à convaincre plus de 9% des navetteurs de lais- nous avons lancé des modèles hybrides
ser leur voiture à la maison. La Flandre met trop l'accent sur l'offre. Sans (bus à pile à combustible et bus diesel-
nuire à la qualité et au confort des prestations de services, le transport électrique). Nos systèmes à propulsion
en commun ferait mieux de se laisser guider par la demande et par classique sont également plus écologiques que ce que pré-
exemple organiser les différents modes de transport de manière com- voit la loi. Mais l'innovation coûte cher, surtout au stade
plémentaire au lieu de les mettre en concurrence. Je vous le concède, initial. Il faut savoir que Van Hool construit en moyenne deux
une politique guidée par la demande est plus facile à mettre en œuvre véhicules par commande. Le travail sur mesure est notre
dans des grands pays où les distances entre les villes sont considéra- force. Mais pour que l'innovation soit payable, nous devons
bles que dans une région complexe sur le plan urbanistique comme la produire les volumes nécessaires, et en restant ici, où les
Belgique. Je vois tout de même une solution, même si elle n'est pas coûts de production sont élevés. La question est de savoir à
populaire: rendre l'utilisation de la voiture plus chère. Les taxes auto- quel point le gouvernement doit soutenir les produits inno-
mobiles et les impôts que nous payons déjà ne suffisent en tout cas pas vants. Des appels d'offres innovantes peuvent faciliter des
pour couvrir le coût macro-économique (environnement, routes, percées et les partenariats public-privé servir de levier finan-
embouteillages, …). La taxe au kilomètre, les péages, … génèrent des cier, pour autant que ce soit de façon stable et que les condi-
recettes supplémentaires et poussent les gens à prendre les transports tions ne soient pas modifiées de but en blanc.” 
en commun.”  Interview: Johan Van Praet

MAI 2010 • 5
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L’ACTU En bref

Les meilleures conditions salariales


29% du trafic aérien en Europe

3
mondial affectés en
une semaine
Il est à présent certain que l'impact
questions à Koenraad
financier de la crise engendrée par Van Kerckhove, directeur
l'éruption du volcan Eyjafjallajokull
de Mercer Belgique

1 2
sera bien plus important que celui du
11 septembre 2001. Une donnée
inquiétante pour le secteur aérien
belge quand on se souvient que les
conséquences des attentats avaient
entraîné la faillite de la Sabena, So- Il ressort d'une étude comparative que Y a-t-il aussi des conditions salariales pour
belair, City-bird, Delsey, etc.
les conditions salariales en Belgique (en lesquelles la Belgique obtient de moins
particulier les avantages extralégaux) bons, voire de mauvais résultats ?
A l'heure d'écrire ces lignes, IATA,
sont parmi les meilleures d'Europe occi- “La Belgique n'obtient de mauvais scores
l'association du transport aérien inter-
national, estimait à 1,7 milliard de dentale. Quels sont les domaines dans pour aucune des conditions de travail préci-
dollars le manque à gagner pour les lesquels nous obtenons de bons scores ? tées. Il est extrêmement important pour une
compagnies aériennes, soit 400 mil- “La Belgique est le seul pays qui possède entreprise multinationale qui vient s'établir
lions de dollars par jour d'immobilisa- un système d'augmentation annuelle des dans notre pays d'offrir des conditions de
tion. Des coûts auxquels il faudra salaires qui est lié à l'indice santé. Dans les travail adéquates qui ne les handicapent
ajouter ceux subis par les aéroports, autres pays, les augmentations de salaire pas financièrement sur le marché du travail.
les gestionnaires du trafic aérien, les sont définies sur la base de négociations Au vu des résultats de l'enquête, il y aurait
tour-opérateurs, les agences de voya- entre les employeurs et les syndicats. Dans lieu de se demander quel impact exercent
ges, etc. pour avoir une vue globale des pays comme les Pays-Bas, la Finlande, toutes ces conditions de travail sur notre
des pertes financières pour le secteur. l'Allemagne et la Suède, il n'y a même pas position concurrentielle par rapport au reste
Au niveau belge, qu'en sera-t-il ? "Il
d'augmentation de salaire obligatoire. En de l'Europe.”
est encore trop tôt pour avancer des
Turquie et au Danemark, l'aug-
chiffres", déclare Michèle Lahaye,
secrétaire général de BATA (Belgian
Air Transport Association). "Mais, qu'il
mentation de salaire est uni-
quement obligatoire pour le “Quel impact exercent toutes
s'agisse de pertes conséquentes de personnel qui est affilié à un ces conditions de travail sur notre
revenus, de coûts supplémentaires syndicat. Il existe encore d'au- position concurrentielle par rap-
tres pratiques de rémunéra-
pour aider les passagers bloqués à
port au reste de l'Europe ?”

3
l'étranger ou de coûts opérationnels, tion qui diffèrent fortement se-
la facture sera salée. Sans compter lon les pays. Par exemple, cer-
que les règles européennes de com- tains pays ont un système de paiement d'un Devons-nous nos meilleures conditions sa-
pensation des passagers n'ont pas salaire complémentaire sous la forme d'un lariales ou extra-salariales à notre longue
été conçues pour ce type de situa- treizième mois, un pécule de vacances ou tradition de concertation sociale ou serait-
tion." Quant aux conséquences sur le une participation aux bénéfices. Dans des ce plutôt une compensation pour la pres-
PIB belge, elles ne seront certaine- pays comme l'Italie, le Portugal et l'Espa- sion (para)fiscale élevée sur les salaires ?
ment pas à négliger au vu, d'une part,
gne, les employés reçoivent un complé- “Il est clair qu'un certain nombre de condi-
du poids du secteur aérien dans notre
ment à leur salaire qui est imposé par la loi. tions salariales ont vu le jour pour compen-
économie – "en Belgique, le secteur
Toutes les entreprises en Espagne et au ser la pression (para)fiscale élevée sur les sa-
aérien est aussi important que le sec-
teur de l'automobile" – et, d'autre Portugal ont par exemple un treizième et laires. Mais le fondement culturel joue aussi
part, de ses interactions étroites avec quatorzième mois. En Belgique, le paie- souvent un rôle. En Italie par exemple, il est
les autres pans de notre activité éco- ment d'un treizième mois est très fréquent. obligatoire de proposer au personnel une in-
nomique. "Cette crise remet en ques- Comme la France et la Norvège, la Bel- demnisation pour les frais de déjeuner. On y
tion tant le modus operandi que le gique a une obligation légale minimale accorde plus d'importance aux repas qu'aux
rythme d'intégration européenne en pour ce qui concerne l'indemnisation des Pays-Bas. La Belgique s'est entre-temps ha-
matière de gestion de l'espace frais de déplacement. Une intervention bituée à des conditions salariales généreu-
aérien. Il faudra rapidement en tirer pour les frais de déjeuner – 80% des entre- ses. Changer les choses entraînerait un mur
les leçons et se donner les moyens prises belges proposent cet avantage à leur de protestations. Les Pays-Bas ont aussi une
de mettre en place une vraie poli- personnel – est pratique courante, contrai- longue tradition de concertation sociale et
tique préventive pour l'avenir",
rement aux Pays-Bas par exemple. Une voi- pourtant, les conditions salariales y sont un
conclut Michèle Lahaye.
ture de société est très souvent proposée peu plus sobres qu'en Belgique.” 
FD
dans les pays européens, dont la Belgique
et l'Irlande.” Hilde Vereecken

6 • MAI 2010
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En bref L’ACTU

Focus sur l'attrait économique des villes

Tirlemont inaugure notre Cityzine


Les villes et régions sont cruciales pour le développement et la croissance économique de notre
pays. Il est dès lors logique que FORWARD s'intéresse de près à la dynamique économique des
villes d'affaires en Belgique, en réalisant un cityzine. Tirlemont en inaugure la première édition
dans le présent numéro de FORWARD.

U
ne ville attrayante et qui fonctionne bien a le potentiel de spécial cityzine, envoyé avec FORWARD, la ville peut facilement
rendre un pays riche. Mais la puissance économique des toucher le gratin du monde des affaires en Belgique.
villes est parfois sous-estimée. "Bien que les villes soient La ville de Tirlemont inaugure cette série de cityzines. La ville
devenues plus adultes sur le plan économique, elles restent
confrontées au défi de souligner auprès des investisseurs leur
caractère unique de centre d'innovation et d'entrepreneuriat", “Grâce au cityzine joint à FORWARD,
déclare William Sanchez, secrétaire du 'G27 Pijler Economie & la ville touche facilement le gratin du monde
Werk', un organisme qui incite, aux Pays-Bas, les villes de taille
moyenne à collaborer dans le cadre de la politique des villes dé-
des affaires en Belgique”
finie par le gouvernement néerlandais. Nos villes ne manquent
pas non plus de dynamisme et d'atouts éco- compte miser sur des atouts économiques et sociaux
nomiques, mais tout peut être amélioré. Par pour devenir le centre économique pour l'alimentation
exemple en stimulant les partenariats entre saine dans notre pays. “Les décideurs politiques de
les entreprises et le monde politique, ou en Tirlemont optent clairement pour un développement
liant dans un souci d'efficacité les niveaux économique à long terme et travaillent proactivement
locaux, régionaux et (inter)nationaux. pour faire tomber le préjugé de 'zone industrielle
vieillie'”, témoigne Johan Nijs, CEO du fabricant de
FORWARD offre une plate- panneaux solaires Photovoltech. Le projet Feed Food
forme aux villes dynamiques Health est actuellement la plus belle preuve de la poli-
Selon William Sanchez, il est en effet très im- tique économique volontariste de Tirlemont. En colla-
portant de fédérer les énergies pour exploiter boration avec l'université de Louvain et un certain
au mieux les atouts économiques des villes. nombre d'acteurs spécialisés, la ville construit actuel-
FORWARD peut être le partenaire des villes et lement un cluster axé sur l'alimentation saine pour les
régions qui veulent mettre en avant leur potentiel business. En humains comme pour les animaux. Plusieurs entreprises partici-
premier lieu, le mensuel offre aux villes et régions un forum pent déjà à ce cluster. Vous en saurez plus en lisant le cityzine joint
national pour informer et créer des réseaux au sein de la large au présent numéro de FORWARD. 
communauté d'affaires de notre pays. Par le biais de l'encart JVP

BDO
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L’ACTU En bref

PEOPLE, PLANET & PROFIT

Nos entreprises ont encore une énorme marge de progression en matière d'efficacité énergétique. La FEB esti-
me à 5,3 milliards d'euros le potentiel d'économies d'ici 2030. Chaque mois, nous mettons en évidence une initia-
tive énergétique originale susceptible de vous inspirer.

Chaleur et électricité à base de chicons

A
Nivelles, la plus importante forcerie de chicons de tante que la consommation de la forcerie, le surplus est ensuite en-
Wallonie, Joluwa, et l'imprimerie Rossel couvrent une par- voyé vers l'imprimerie Rossel, située à 800 m à vol d'oiseau des in-
tie ou la totalité de leurs besoins en énergie électrique et stallations de biométhanisation, et qui couvre de cette façon 15%
thermique grâce à une installation de biométhanisation de racines de ses besoins annuels pour l'usage d'eau sanitaire et de chauffa-
de chicons développée par la société GreenWatt. "La biométhani- ge. "Parmi les lieux de valorisation possibles aux alentours de la
sation est un phénomène naturel qui correspond à la dégradation forcerie, Rossel s'est montré très intéressé par le projet. Ce dispo-
de la matière organique via notamment sitif énergétique s'intégrait parfaitement
l'action de différentes populations de bac- dans leur politique de développement
téries. Nous reconstituons dans nos réac- durable." Au niveau du bilan carbone, la
teurs biologiques les meilleures conditions forcerie de chicons économise 440 tonnes
de fonctionnement de ce processus natu- de CO2 par an. Cette économie couvre la
rel", explique Philippe Mengal, managing totalité des émissions produites préalable-
director de GreenWatt. Contrairement à ment pour son fonctionnement, estimée à
d'autres installations de biométhanisation, 400 tonnes de CO2 par an.
celle-ci n'est alimentée que par des dé-
chets végétaux et est particulièrement L'investissement pour la mise en place d'une
appropriée aux activités des industriels de 15% des besoins en eau chaude et en unité de biométhanisation telle que celle de
chauffage de l'imprimerie Rossel sont couverts par la
l'agro-alimentaire. Ces derniers sont en biométhanisation de racines de chicons Nivelles s'élève à 1 million d'euros, auquel il
effet confrontés à des gisements impor- faut ajouter 20 à 25% pour l'installation du
tants de déchets – pouvant aller jusqu'à 100 tonnes par jour de pro- dispositif de valorisation de la chaleur produite. "Pour la forcerie de
duction – dont la gestion est soumise à une réglementation de plus chicons, cela équivaut à un retour sur investissement compris entre
en plus exigeante. 6 et 7 ans."

L'installation de Nivelles transforme 15 à 17 tonnes de racines de Depuis l'inauguration de cette première unité de biométhanisation,
chicons par jour et a une capacité de production de 100 kW. Ceci le concept a déjà séduit plusieurs entreprises disposant de gise-
permet à la forcerie de chicons de couvrir 100% de ses besoins en ments de déchets de légumes et de fruits tant en Belgique, qu'aux
énergie thermique et une grosse partie de ses besoins en énergie Pays-Bas ou en France. 
électrique. La production en énergie thermique étant plus impor- FD

"La France est la "Plus de cinq compag- "Il faut se méfier de l'illusion "L'euro a incité à
seule à appliquer nies de taille moyenne rétrospective qui fait croire prendre des risques
pleinement les ou de petite taille ris- que les grandes avancées que l'on n'aurait pas
DIXIT

restrictions sur les quent de disparaître à communautaires des 40 der- pris avec le franc
bonus (dans le sec- cause de leur manque nières années étaient toutes belge."
teur bancaire)" a de liquidités." Giovanni coulées dans le même Luc Bertrand,
regretté Baudouin Bisignani, directeur moule." Xavier Mabille, prési- président
Prot, président de la général de l'IATA, l'as- dent du Crisp en réaction à d'Ackermans & van
Fédération bancaire sociation du transport l'idée que jadis nous avions Haaren (Trends-
française et patron aérien international, des hommes d'Etat capables Tendances, 22 avril)
de BNP Paribas, suite à l'éruption du de boucler de grands accords
dans La Tribune volcan islandais. communautaires. (La Libre
(16 avril 2010) (L'Echo, 22 avril) Belgique, 22 avril)

8 • MAI 2010
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L’ACTU En bref

UN AN PLUS TARD
>> Dans cette rubrique, FORWARD s'intéresse aux suites données à
une information qui avait fait grand bruit il y a un an.

Fortis rebaptisée BNP Paribas Fortis :


une opération au pas de charge

O
n sait les conditions de la reprise de IT nécessitent encore pas mal de travail", ex- Emilie Jacqueroux. Le résultat d’efforts publici-
Fortis par BNP Paribas. Emotion, ti- plique Emilie Jacqueroux, responsable Adver- taires mais aussi, il faut l’admettre, de l’énorme
ming serré : un contexte particulier tising, Branding & Sponsoring de BNP Paribas couverture de presse dont le rapprochement
pour une absorption de marque que le groupe Fortis. Le maintien de Fortis dans le nouveau mouvementé a fait l’objet. Reste maintenant à
français n’avait pas pu planifier de longue date. nom a fait l’objet d’une étu- travailler sur une image à long
Doté d’un budget de ‘plusieurs millions d’eu-
ros’ (ndlr : le journal Le Soir avait cité l'été der-
de de notoriété, d’attractivi-
té et d’image. Il en ressort “projets
Seuls certains
IT néces-
terme pour le nouvel ensem-
ble. "Les nouvelles campagnes
nier le montant de 150 millions pour rénover que la banque belge avait ont opportunément ciblé l’hu-
l'ensemble des agences et les pourvoir du nou- bâti une relation de grande sitent encore pas main et joué sur l’affectif", ana-
veau logo) et d’une équipe d’une quinzaine de proximité avec ses clients lyse Marc-Antoine Sauvage
personnes, le 'rebranding' a été lancé il y a un dont il eût été dommage de mal de travail” de l’agence Cré-action, qui a
an, comme un projet de communication balisé se départir. La signature BNP travaillé sur la conversion BBL-
par l'équipe d’intégration. Il a ainsi impliqué Paribas doit incarner, elle, la stabilité et l’appar- ING il y a quelques années. “Mais sans doute y
tant la direction de la Communication du Gro- tenance à un leader européen. Quid de l’im- a-t-il encore un travail d’adhésion à la marque
pe BNP Paribas que celle de BNP Paribas For- pact de ce nouveau nom auprès du public ? "Il à faire en interne afin de réconforter un per-
tis et les business units de Fortis. "Le rebran- jouit d’une notoriété de 92 % auprès de la po- sonnel bousculé et qui a dû très rapidement
ding est terminé. Le relooking des 1.100 agen- pulation belge, ce qui est très satisfaisant un an endosser un nouveau costume". 
ces sera finalisé cet été. Seuls certains projets seulement après son lancement", souligne Philippe Cremer

<< REWIND

L'Institut des juristes d'entreprise a fêté ses 10 ans

L
e 30 mars, l'IJE a fêté récente crise financière puis économique : "C'est quand quelqu'un
ses 10 ans en présen- de la famille est malade que l'on s'aperçoit de l'intérêt d'une méde-
ce de plus de 1.000 cine performante. La même réflexion vaut pour le juriste d'entrepri-
© Maarten De Bouw

invités dans l'Auditoire 2000 se”, a comparé le président sortant Jean Cattaruzza.
du Heysel. Cela fait aussi 10
ans que le métier de juriste Thomas Leysen a insisté sur le fait que le
d'entreprise est reconnu et juriste d'entreprise est le défenseur et le
Anne De Wolf, directrice de l'IJE, est protégé comme profession promoteur de l'intérêt juridique de l'en-
revenue sur 10 ans de reconnaissance du
métier de juriste d'entreprise et sur les par la loi. Après avoir rap- treprise : "Son importance ne cesse de
évolutions de la fonction. pelé à quel point la fonction croître face à la réglementation dans
de juriste d'entreprise était tous les domaines et à l'internationalisa-
© Maarten De Bouw

devenue clé dans un monde de l'entreprise qui doit jongler avec des tion”. Le président de la FEB a égale-
réalités comme la gestion des risques, la bonne gouvernance et la ment rappelé l'importance pour les
responsabilité sociétale de l'entreprise, Anne De Wolf, la directrice entreprises de la confidentialité des avis
de l'IJE a cédé la parole au ministre de la Justice, Stefaan De Clerck, des juristes d'entreprise, consacrée par
aux présidents qui se sont succédés à la tête de l'Institut, ainsi qu'à la loi du 1er mars 2000.  Thomas Leysen, président
de la FEB, a insisté sur
divers chefs d'entreprise qui ont donné leur vision du métier. Un l'importance du juriste
métier dont le rôle stratégique apparaît comme renforcé par la d'entreprise comme défen-
seur de l'intérêt juridique
de l'entreprise.

10 • MAI 2010
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L’ACTU En bref

Corporate governance : le Code belge devient la

Comment le Code belge


est-il respecté ?
La FEB et GUBERNA ont réalisé une étude (1) sur le respect par
les sociétés cotées des aspects formels du Code belge de gou-
vernance d’entreprise. Les résultats montrent que ces sociétés
sont de plus en plus conscientes de l’importance de mettre en
œuvre les dispositions reprises dans le Code. Au niveau de la
publicité des rémunérations, des améliorations sont cependant encore possibles, notamment dans les
sociétés du Bel Small.

Taux de respect satisfaisant


L
e 23 avril dernier, la loi visant à renforcer le gouvernement
d'entreprise dans les sociétés cotées et les entreprises pu- Depuis la publication de la première version officielle du Code
bliques autonomes était publiée au Moniteur. Cette nou- belge de gouvernance d'entreprise en 2004, la FEB et GUBERNA
velle loi transpose en droit belge une directive européenne et procèdent régulièrement à des études sur la mise en œuvre de
impose désormais aux sociétés cotées de rédiger une déclara- ce Code par les sociétés cotées. En 2009, une étude a été menée
tion de gouvernement d'entreprise dans leur rapport annuel. Elle auprès des sociétés du Bel 20*, Bel Mid et Bel Small sur la maniè-
oblige par ailleurs ces mêmes sociétés à intégrer dans cette re dont elles respectent le Code. Il est ici important de préciser
que les révisions apportées au Code en 2009 ne font pas l'objet

“En raison de la crise financière, nous


de cette étude puisque leur application n'apparaîtra que dans les
rapports annuels de 2010.
Les résultats de cette étude sont positifs. Le Code est en effet glo-
comprenons le souci d’encadrer certaines balement respecté par 89,9% des sociétés. Suivant le principe
pratiques dans une loi” Philippe Lambrecht ‘comply or explain’, on constate que 86% des sociétés examinées
appliquent de manière générale les dispositions du Code et que
3,9% d’entre elles livrent une explication quant à leur décision de
déclaration un rapport de rémunération de leurs dirigeants. Ce déroger à certaines dispositions. Par rapport à 2006, année où la
rapport devra contenir un certain nombre d'informations reprises précédente étude sur le sujet avait été réalisée, le respect du Code
en partie du Code belge de gouvernance d'entreprise et de la a progressé de 5,1%. "Ces chiffres montrent que, même si le sys-
recommandation européenne du 30 avril 2009 sur la rémuné-
ration des administrateurs des sociétés cotées.
SUIVI DU CODE PAR LES ENTREPRISES
Mais quelle est la principale différence entre cette loi et le Co- (ÉVOLUTION 2006-2009)
de belge de gouvernance d'entreprise 2009 ? Une loi est par
principe obligatoire. Le respect du Code, par contre, repose 2006
sur le principe ‘comply or explain’. Cela signifie que les socié- 2009
tés sont tenues d’appliquer le Code, mais que si elles ne peu-
vent pas appliquer certaines de ses dispositions, elles doivent
en justifier les raisons. En ce sens, la FEB regrette que certains
en %

points du Code – tels que ceux relatifs à la rémunération des


dirigeants – fassent à présent l'objet d'une loi. "C'est perdre
la flexibilité qu'offre le Code", souligne Philippe Lambrecht,
administrateur-secrétaire général de la FEB. "Cependant, en
raison de la crise financière, nous comprenons le souci d’en-
cadrer certaines pratiques dans une loi." Cette nouvelle loi
reconnaît par ailleurs le Code belge de gouvernance d'en-
Application Explication Pas Respect
treprise comme étant le Code de référence pour les socié- d’explication
tés cotées.

12 • MAI 2010
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En bref L’ACTU

référence légale

de gouvernance d’entreprise
tème n'est pas parfait, il fonctionne. Les entreprises ont pris cons- sière d'Euronext Bruxelles, et le Bel Mid environ 15%. "On ob-
cience de l'importance de la gouvernance d'entreprise comme serve donc qu’une très large majorité des capitalisations belges
instrument de leur gestion. Un instrument qui, à travers son carac- respecte ces dispositions du Code", déclare Philippe Lambrecht.
tère flexible, répond aux besoins des sociétés cotées", déclare "Il convient cependant de mettre tout en œuvre pour que cette
Philippe Lambrecht. forte différenciation entre les sociétés, suivant l'indice boursier
On observe par exemple dans l'étude que 91,5% – soit 99,7% de auquel elles appartiennent, diminue."
la capitalisation boursière d’Euronext Bruxelles – des sociétés Il est par ailleurs intéressant de noter que les sociétés qui pu-
cotées examinées publient une Charte de
gouvernance d'entreprise. Par rapport à la
situation de 2006, cela correspond à une APERÇU DES RÉSULTATS PAR INDICE (ÉVOLUTION 2006 - 2009)
progression de 16,7% du nombre de socié-
Application Explication Pas d’explication Respect
tés. Autre exemple de bonne pratique, le
2006 2009 2006 2009 2006 2009 2006 2009
respect à 100% de la disposition demandant
au conseil d'administration de constituer des Bel 20 87,0% 91,8% 4,7% 4,0% 8,3% 4,2% 91,7% 95,8%
comités spécialisés ayant pour mission de Bel Mid 82,3% 87,1% 4,0% 3,0% 13,7% 9,9% 86,3% 90,1%
procéder à l'examen de questions spécifi- Bel Small 73,1% 82,6% 6,4% 4,5% 20,5% 12,9% 79,5% 87,1%
ques et de le conseiller. Total 79,7% 86,0% 5,1% 3,9% 15,2% 10,1% 84,8% 89,9%

Chez GUBERNA, on estime également que


les résultats vont dans la bonne direction. "Des différences sub- blient cette rémunération individuelle du CEO font de plus en
sistent entre les résultats des sociétés du Bel 20, du Bel Mid et plus la distinction entre la rémunération de base, la rémunération
du Bel Small et c'est tout à fait normal. Mais il est très positif que variable et les autres composantes de la rémunération. Par rap-
de plus en plus de petites et moyennes sociétés cotées s'inscri- port à 2006, elles sont en augmentation de 10,5%.
vent dans cette réflexion sur le respect du Code", estime Lutgart Face aux efforts encore à accomplir en matière de publicité des
Van den Berghe, directeur exécutif de GUBERNA. rémunérations, la FEB et GUBERNA soulignent le rôle qu’aura la
nouvelle réglementation, qui rend un certain nombre de disposi-
Publicité des rémunérations tions obligatoires. "La Belgique est allée très loin dans la législa-
En matière de rémunérations, l'étude révèle que plusieurs des tion de la rémunération, peut-être parfois trop loin. Par rapport
dispositions y ayant trait sont bien respectées par les sociétés à nos pays voisins, nous sommes à présent très stricts", estime
cotées et que des progrès ont été accomplis depuis 2006. On Lutgart Van den Berghe.
observe par exemple que les rémunérations des CEO et des aut-
res membres du management exécutif ont fait ces dernières Suivre l’esprit des règles
années l’objet d’une plus grande transparence (voir aussi notre Jusqu’à présent, les études de la FEB et de GUBERNA sur le
dossier de couverture p.41). Ou encore, que 96,8% des sociétés respect du Code de gouvernance d’entreprise portent sur le
étudiées publient une politique de rémunération en tant qu'élé- contrôle de dispositions publiques et matériellement observa-
ment de leur Charte de gouvernance d'entreprise. bles de l’extérieur de l’entreprise. Cela ne concerne qu’une par-
tie des dispositions du Code. A l’avenir, la FEB et GUBERNA veu-
Quelques observations s'imposent cependant. La mise en œuvre lent aller un pas plus loin et développer une nouvelle méthodo-
de certaines dispositions nécessite des améliorations, en particu- logie permettant de procéder à l’évaluation du respect des dis-
lier dans le chef des sociétés du Bel Small. C'est notamment le positions davantage qualitatives, telles que la manière dont les
cas des dispositions relatives à la rémunération des membres du décisions sont prises au sein du conseil d'administration ou enco-
conseil d'administration et du CEO. Au niveau de la publication re la culture d’analyse et de contrôle des risques développée
de la rémunération individuelle des administrateurs, 75% des dans l'entreprise. Une façon d’avoir une meilleure perception de
sociétés du Bel Small respectent cette disposition, 87,1% des la réalité qui se cache réellement derrière les réponses purement
sociétés du Bel Mid et 100% des sociétés du Bel 20. En ce qui formelles des entreprises. 
concerne la publication de la rémunération individuelle du CEO, Florence Delhove
ce sont 75% des sociétés du Bel Small qui respectent cette dispo-
*GDF SUEZ n'étant pas reprise car ses titres sont cotés en France.
sition, 83,3% des sociétés du Bel Mid et 94,7% des sociétés du
(1) Etude menée en mars 2009 auprès de 94 sociétés sur base des rapports
Bel 20. Il faut toutefois préciser que les sociétés du Bel Small ne annuels publiés en 2009 concernant l’exercice 2008. Disponible sur les sites
représentent que 2,5% de l'ensemble de la capitalisation bour- www.feb.be et www.guberna.be.

MAI 2010 • 13
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L’ACTU Echos des secteurs

Les prix du gaz et de Optimisme prudent dans


l'électricité en accord avec le secteur du plastique et
ceux des carburants ? du caoutchouc
Federplast.be entrevoit une embellie pour 2010, tant au ni-
Enquête sur la facture énergétique de 320 entreprises in-
veau du volume de production que de l'emploi dans le secteur
dustrielles. du plastique et du caoutchouc. Avec des opportunités de
croissance durable, notamment dans les nouvelles techniques
de production et de stockage de l'énergie.

C
e sont 320 entreprises industrielles de sept fédérations
professionnelles* qui ont participé à une enquête me-

M
née par Febeliec, la fédération des consommateurs in- algré une baisse de production des entreprises trans-
dustriels d'énergie, sur le coût de leur facture énergétique. Les formatrices de matières plastiques et de caoutchouc
résultats de cette enquête montrent que bien que les prix des de 13,4% en 2009, près d’un dirigeant d’entreprise
carburants aient reculé l'année dernière de près de 40%, les sur deux de ce secteur s’attend à une embellie pour 2010.
grandes entreprises ont vu leur facture d'électricité augmenter C'est ce que révèle une récente enquête menée auprès des
d'au moins 10% en 2009. Entre 2002 et 2009, on a par ailleurs pu affiliés de Federplast.be. Cette association représente les en-
observer que la facture d'électricité est passée du simple au dou- treprises transformatrices de matières plastiques et de caout-
ble pour de nombreuses entreprises. chouc membres d’Agoria, la Fédération de l’industrie techno-
La facture de gaz a quant à elle diminué pour la plupart de logique, et d’essenscia, la Fédéra-
ces entreprises, mais pas dans la même mesure que l'évolu- tion belge des industries chimi-
tion des prix internationaux du gaz. Les consommateurs in- ques et des sciences de la vie.
dustriels belges ont vu leur facture de gaz baisser de 15%, Quelque 44% des dirigeants d’en-
alors que les prix internationaux du gaz ont diminué l’an der- treprise interrogés s’attendent en
nier de 25,5%. Depuis 2002, les prix industriels du gaz ont effet à un volume de production
connu une hausse moyenne de 100 à 110% en Belgique.  équivalent, tandis qu’un pourcen-
tage similaire d’entre eux anticipe
* La Fédération belge des industries chimiques et des sciences un retour à la croissance. 81% de
de la vie (essenscia), la Fédération de l’industrie du verre (FIV), la
ces dirigeants déclarent par ail-
Fédération de l’industrie alimentaire (FEVIA), l’Association des
fabricants de pâtes, papiers et cartons de Belgique (Cobelpa), la leurs s'attendre en 2010 à un em-
Fédération des industries transformatrices de papier et carton ploi stable ou même en légère
(Fetra), la Fédération belge de l’industrie textile, du bois et de augmentation.
l’ameublement (Fedustria) et la Fédération de l’industrie techno-
logique (Agoria).

www.febeliec.be

La suppression des bottins ne sauve pas les arbres


Le consommateur a tendance à associer économie de papier et sauvegarde des arbres. A tort. La pro-
duction de papier permet de valoriser les sous-produits de la forêt et des scieries.

L
e Paper Chain Forum, qui re- fet été décidé qu'à partir de 2011, que année et de sauver 38.000 arb-
groupe 14 fédérations profes- les bottins des pages blanches ne res. Le Paper Chain Forum s'est in-
sionnelles actives dans la filiè- seraient plus disponibles en version digné de cette dernière affirmation.
re du papier, a réagi aux propos du papier que sur demande explicite. "L'argument qui consiste à dire que
ministre pour la Simplification admi- Une mesure qui, selon le ministre, l'économie de papier permet de
nistrative, Vincent Van Quickenbor- permettra de faire des économies sauver des arbres désinforme le
ne, concernant la suppression des de transport et d'impression, d'éco- grand public sur la relation entre le
annuaires téléphoniques. Il a en ef- nomiser 1.512 tonnes de CO2 cha- papier et la forêt", a déclaré Firmin

14 • MAI 2010
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Echos des secteurs L’ACTU

L’industrie des matières plastiques reste par ailleurs


le premier secteur à contribuer à la balance com-
Cuisine traditionnelle et R&D
merciale belge. "Bien que les exportations de font bon ménage
matières plastiques et d’articles en matières plas-
tiques aient chuté de 20% en 2009, le solde à l’ex- Un projet européen pour renforcer la compétitivité et la dura-
portation reste très élevé : 7,8 milliards d’euros, bilité des PME alimentaires européennes était lancé il y a qua-
soit plus de la moitié du solde total à l’exportation tre ans. Grâce à lui, des milliers de PME ont bénéficié de R&D
en Belgique", précise Henri Vliegen, président de de haute qualité.
Federplast.be. En ce qui concerne les opportunités
de croissance, les entreprises du plastique et du

T
caoutchouc misent sur le domaine des économies RUEFOOD, Traditional United Europe Food, est un pro-
d'énergie et les nouvelles techniques de produc- jet européen visant à soutenir les produits alimentaires
tion et de stockage de l'énergie. A titre d'exemple, traditionnels. Le 13 avril dernier, a eu lieu à Bruxelles la
conférence de clôture de ce projet. L'événement était organisé

“estL’industrie
par la FEVIA, la Fédération de l'industrie alimentaire, en colla-
du plastique boration avec les 43 partenaires du projet. "Cette conférence
était l'aboutissement de quatre ans de recherche et d'innova-
le premier secteur à tion dans le but de renforcer la compétitivité et la durabilité du
contribuer à notre balance secteur alimentaire traditionnel. Plus de 6.000 PME à travers 15
commerciale” pays européens ont participé à cette réflexion", a déclaré la
FEVIA.

l'association cite le Solar Impulse, cet avion propul- Le secteur de la production de produits alimentaires tradition-
sé exclusivement à l'énergie solaire et qui devrait nels est en effet confronté à plusieurs attentes. D'une part, il
accomplir prochainement son premier tour du doit d'améliorer la compétitivité de ses produits en identifiant
monde en un vol ininterrompu. Ou encore, de les innovations qui sont conformes à la politique sanitaire et à
manière moins spectaculaire, les mousses d'isola- la réglementation de l'UE. D'autre part, il doit répondre aux
tion qui permettent d'économiser 233 fois plus de demandes générales des consommateurs et satisfaire leurs
CO2 que le CO2 nécessaire à leur production.  attentes vis-à-vis de l’innovation dans les produits alimentaires
traditionnels.
www.essenscia.be et www.agoria.be
Avec un budget de 15,5 millions d'euros, le projet TRUEFOOD
est l’un des plus importants projets fondés par la Commission
européenne dans le cadre du "6e Programme Cadre pour la
Recherche et le Développement technologique". L’implication
des PME le rend unique dans
son genre. "Même si elles ne
sont pas toujours suffisam-
ment prises en compte, les
PME sont essentielles pour
l’industrie alimentaire euro-
François, président du Paper Chain Forum. Avant péenne et pour son avenir. Le
de préciser que la filière papier n'était pas un enne- projet TRUEFOOD a réelle-
mi de l'environnement et que "la production de ment contribué à l’augmen-
papier permet de valoriser les sous-produits de la tation de la compétitivité et
forêt et des scieries." L'association précise en effet de la durabilité des PME eu-
que pour la production de papier, on utilise en pre- ropéennes en leur donnant accès aux dernières innovations en
mier lieu des vieux papiers, complétés par des fib- recherche et développement", précise Daniele Rossi, coordi-
res de bois provenant de produits secondaires de la nateur du projet TRUEFOOD. Même si le projet prend fin cette
forêt et de l’industrie du bois. Ces produits secon- année, le travail entamé continuera sous la coordination d’un
daires sont du bois d’éclaircie provenant de la ges- réseau de douze fédérations nationales et de la CIAA (Con-
tion forestière durable, des branches et des cimes, federation of the Food and Drink Industries of the EU), qui en
ainsi que des déchets de scierie.  assureront également le financement. 

www.paperchainforum.org www.fevia.be

MAI 2010 • 15
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OPINIONS Expertises FEB

Le modèle allemand pour un


retour gagnant des exporta-
ENTRE LES LIGNES
tions : les cigales colportent,
les fourmis exportent !
Forum national Rudi Thomaes,
Douane administrateur délégué
© D. Rys

Situation
D’ici à 2014, les formalités de

D
eux millions de nouveaux emplois dans le secteur de l'export et un doublement
douanes et accises seront complè-
des exportations en cinq ans : telle est l'ambition nourrie par la National Export
tement dématérialisées au sein de
Initiative de Barack Obama. L'Amérique redécouvre l'importance des exporta-
l’UE dans le cadre du 'paperless'
tions. Avec l'avènement de l'euro, nous aussi avons quelque peu perdu de vue à quel
douanes et accises (PLDA). Néan-
point ces dernières sont vitales pour le bien-être dans une petite économie ouverte
moins, ce plan pluriannuel contient
comme la nôtre. Jadis, nous étions une nation exportatrice performante. En Chine, nous
également, à court terme, des
délais qui influenceront considéra- avons fait œuvre de pionnier tant avant que juste
blement la manière de travailler de Le bon sens, les leçons après la révolution culturelle. Mais faire preuve de
bon nombre d’entreprises. tirées des erreurs des an- nostalgie ne nous avancera à rien. Contrairement à
nées 1980 et une volonté une saine ambition. Et c'est de l'ordre du possible.
partagée peuvent redon- Entre 1995 et 2008, l'Allemagne a réussi à maintenir
Impact ner à ce pays le statut de sa part de 10% dans les échanges mondiaux. Durant
L'Excise Movement Control nation exportatrice cette même période, les Pays-Bas ont même accru
System, par exemple, est entré en la leur en la portant à 4%. Toute personne avec quel-
vigueur le 1er avril dernier. D’ici ques années d'expérience dans le domaine de l'exportation sera d'accord avec moi pour
peu, il sera également possible affirmer qu'avec sa formation et sa capacité de travail, notre main-d'œuvre est parfaite-
d’effectuer la déclaration d’impor- ment en mesure de surclasser nos voisins. Or, ces 15 dernières années, nous avons perdu
tation et d’acquitter les droits pratiquement un quart de notre part de marché. Cette tendance doit être enrayée, mais
d’importation dans un seul Etat
pas, comme les Français, en vilipendant les Allemands (et par extension les Néerlandais)
membre, quel que soit l’Etat mem-
pour une cohésion et une discipline que nous n'avons que trop peu réussi à mettre en
bre où les biens entrent physique-
place. À l'instar de ce qui s'est fait dans ces deux pays, nous devons assurer dans une
ment dans l’UE. Pour que cette
large mesure les mécanismes sociaux en défendant notre position sur le marché mondial.
transition se passe au mieux et
Comme en attestent certaines études de la Banque nationale, les entreprises actives au
pour y impliquer les entreprises de
manière proactive, le Forum natio- plan international sont d'ailleurs les garantes d'une plus grande durabilité d'emploi.
nal Douane a été réactivé fin 2009.
Divers groupes de travail s'y pen-
chent sur les problèmes existants
ainsi que sur les changements pro-
grammés.

Stress, violence et harcèlement


Evaluation
Des procédures douanières et
au travail : évaluation de la
'accisiennes' efficaces sont essen-
tielles pour que la Belgique reste
législation
un centre logistique attrayant. Le
passage aux e-customs représente

D
ans le cadre Cette enquête a pour objectif d’évaluer
un défi de taille, tant pour les
de la straté- l’effectivité de la législation relative à la
© D. Rys

entreprises que pour les pouvoirs


gie nationale prévention de la charge psychosociale
publics, et il demandera une gran-
de faculté d’adaptation. Le forum
en matière de bien- occasionnée par le travail. Tous les ac-
international constitue donc une être au travail, le SPF Emploi, Travail et teurs qui, directement ou indirecte-
occasion unique pour préparer au Concertation sociale (SPF ETCS) a lancé ment, traitent de cette matière dans leur
mieux ce changement. un projet de recherche portant sur l’éva- milieu professionnel seront interrogés
luation des modifications apportées en par le biais d’une grande enquête en
Plus d'info ? Alain Lecocq – 2007 à la législation relative à la préven- ligne. En tant qu’employeur, vous pou-
ale@vbo-feb.be tion de la charge psychosociale occa- vez vous aussi participer à cette enquê-
sionnée par le travail, dont la violence, le te sur le site mentionné ci-dessous (*).
harcèlement moral et sexuel au travail. Le traitement anonyme et confidentiel

16 • MAI 2010
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Expertises FEB OPINIONS

Les syndicats, les employeurs et les pouvoirs publics n'ont pas d'al- jeter les bases du retour gagnant des exportations dans leur pays.
ternative. Ils doivent conjuguer leurs efforts pour endiguer cette per- La question est de savoir ce que nous voulons. La question est de
te de parts de marché. Les entreprises ont pour mission d'investir da- savoir de quoi sont partisans nos propres syndicats. Avons-nous l'am-
vantage dans les marchés en croissance et de veiller à une circulation bition de rester des acteurs du jeu mondial en matière d'innovation
suffisante des capitaux à risque. Dans le cénacle des employeurs, il et d'exportation de produits de haute technologie dans le secteur du
faut collaborer plus efficacement à l'internationalisation. Non pas tant verre plat ? Voulons-nous devenir le leader mondial des autobus hy-
pour la gloire de sa propre organisation, mais dans le but de réaliser brides à pile à combustible, sans rejets de CO2 ? Tout cela est bien
des percées. De leur côté, les pouvoirs publics doivent, en sus de ré- beau, mais dans un secteur comme la construction des autobus, où
formes et d'une plus grande efficacité, s'employer à mettre en place 70% de la valeur ajoutée sont engloutis par les salaires et où nous
une collaboration accrue entre les différents niveaux, et aussi, par devons faire face à un handicap salarial de 8 et 14% (respectivement
exemple, au sein des institutions universitaires et entre elles. Le nom- vis-à-vis de l'Allemagne et des Pays-Bas), cette ambition relève de la
bre d'initiatives sous-critiques en matière de R&D dans certains sec- fiction pure, même si l'on dispose de la meilleure technologie. L'inno-
teurs comme les technologies propres et la branche médicale est vation sans la compétitivité des coûts mène droit au précipice. Et que
criant. Parallèlement, nos gouvernements doivent également se po- dire de l'explosion des taxes et des surcoûts sur la facture énergéti-
ser la question de savoir s'ils vont longtemps encore abandonner à que des entreprises ? Les syndicats soulignent à juste titre l'impor-
l'Allemagne et au Royaume-Uni le monopole de ces milliards de re- tance de l'innovation, mais ils doivent eux aussi contribuer à surmon-
cettes que génère la mobilité des patients et des étudiants étrangers. ter tous ces handicaps en matière de coûts.
Il s'agit là également d'une forme d'exportation. Sur ce plan,
nous n'entrevoyons hélas pas même une amorce Ne nous berçons pas d'illusions, le fait que nous
de stratégie. Les syndicats, enfin, peu- devions tous agir de la sorte dans un mon-
vent bien se répandre en critiques à l'é- de où les Russes versent à leur nouvel
gard de quelques situations sociales entraîneur fédéral un salaire qui
anormales en Allemagne, com- laisse pantois et incitera même
me les salaires de misère dans le plus gros brasseur du mon-
l’industrie de transformation de à ouvrir de grands yeux
de la viande. Mais emboîter fera peut-être froncer quel-
le pas à la ministre française ques sourcils, mais ce n'est
Lagarde pour stigmatiser la pas une raison pour refuser
politique allemande – et par l'obstacle.
extension, son homologue Le bon sens, les leçons tirées
néerlandaise – en la taxant de des erreurs des années 1980
‘dumping social’ serait purement et une volonté partagée peu-
et simplement de la démagogie. vent redonner à ce pays le statut
En effet, ce sont les syndicats alle- de nation exportatrice et fière de
mands eux-mêmes qui ont contribué à l'être qui était le sien. Au travail ! 

de toutes les données collectées est garanti. Kris AGENDA


De Meester, premier conseiller au Département
social : “L’introduction de la législation relative à Le Traité de Lisbonne FEB, Bruxelles
6 mai 2010
la charge psychosociale, et plus particulièrement Info : Laurent Sempot,
13h45 à 18h00
de celle relative à la violence et au harcèlement T 02 515 09 83, F 02 515 09 15,
moral et sexuel au travail, avait fait pas mal de re- ls@vbo-feb.be
mous. Il est dès lors important que les employ- 7 mai 2010 La nouvelle loi sur les pratiques FEB, Bruxelles
eurs prennent part à cette évaluation, afin de 9h00 à 12h30 du marché
veiller à ce que la législation soit mieux adaptée Info : Corinne Decoen, T 02 515 08 91,
à la pratique des entreprises et donne lieu à net- F 02 515 09 15, cd@vbo-feb.be
tement moins de procédures juridiques et admi-
18 mai 2010 Le Conseil d’entreprise européen FEB, Bruxelles
nistratives et de règles de protection que ce 2e édition de la FEB Social Academy
14h00 à 17h00
n’est le cas aujourd’hui.”  Info : Corinne Decoen, T 02 515 08 91,
F 02 515 09 15, cd@vbo-feb.be
(*) http://nl.surveymonkey.com/s/FOD_WASO_SPF_ETCS_
ENQUETE_Evaluatie_wetgeving_Evaluation_legislation
20 mai 2010 La concertation sociale et son enjeu FEB, Bruxelles
14h00 à 17h00 2e édition de la FEB Social Academy
Info : Corinne Decoen, T 02 515 08 91,
Kris De Meester – kdm@vbo-feb.be F 02 515 09 15, cd@vbo-feb.be

MAI 2010 • 17
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OPINIONS Expertises FEB

Loi relative à la continuité des entreprises : un an et déjà


un franc succès

E
n avril 2009 entrait en vigueur la loi relati- current pour s'isoler de ses créanciers).” On constate, au demeu-
ve à la continuité des entreprises. Cette rant, que la nouvelle loi rencontre un réel succès dans tous les ar-
© D. Rys

législation réformait l’ancien concordat rondissements judiciaires du pays, alors que l’application de la loi
judiciaire, avec pour objectif de permettre aux de 1997 connaissait des contrastes saisissants entre arrondisse-
entreprises en difficulté de se réorganiser plus ments. Outre ce succès statistique, il faut tenir compte du fait que
facilement. Mission réussie à en croire les statistiques : en effet, la loi relative à la continuité des entreprises fait la part belle aux
comme le démontre la dernière étude chiffrée mesures 'préprocédurales' (accord amia-
de Graydon, 857 jugements octroyant une réor-
ganisation judiciaire ont été prononcés depuis
l’entrée en vigueur de la loi sur la continuité des
“treLaunnouvelle loi rencon-
réel succès dans
ble, médiateur d’entreprise…), partant
du principe qu’il faut éviter autant que
possible les lourdeurs d’une procédure
entreprises. C’est dix fois plus que le nombre tous les arrondissements devant le juge. Il existe aujourd’hui des
d’entreprises ayant fait usage du concordat judi- solutions sur mesure pour toutes les en-
ciaire en 2008, sur base de l’ancienne loi. “La judiciaires du pays” treprises, peu importe leur taille. C’est
FEB a porté la loi relative à la continuité des en- ainsi que tous les commerçants, et plus
treprises sur les fonts baptismaux, rappelle Charles Gheur, expert particulièrement les petites sociétés, ont recours à cette législation,
au Département juridique. Elle se félicite dès lors de ces résultats alors qu’anciennement, seules les grandes entreprises pouvaient se
encourageants. Toutefois, cette loi ne pourra fonctionner correcte- permettre de recourir au concordat judiciaire. Enfin, il ne faut pas se
ment que si tout le monde joue le jeu (on vise en particulier les voiler la face : si la loi sur la continuité des entreprises permet sans
créanciers institutionnels comme le fisc, qui accepte difficilement doute d’amortir le choc de la crise, le nombre de faillites atteint lui
d’avoir perdu les privilèges dont il bénéficiait précédemment). Et à aussi des records… 
condition que l’on n’abuse pas de la nouvelle procédure (il s’agit,
par exemple, d’éviter que des entreprises saines soient victimes Plus d'info ? Charles Gheur – cg@vbo-feb.be
d’une réorganisation judiciaire utilisée artificiellement par un con-

Marché du travail : une hirondelle ne fait pas le printemps

E
n février dernier, le nombre de chômeurs complets indemni- difficultés: 1.666 entreprises ont fait une demande de chômage de
sés était de 446.620 soit 25.432 de plus qu’en février 2009 crise pour leurs employés et 87.000 ouvriers par jour étaient en
et 30.407 de plus qu’en février 2008. Ces chiffres sont moins chômage temporaire en janvier 2010 (après une pointe de 101.000
mauvais que prévu : l’an dernier, on tablait encore sur une aug- en mars 2009 et une moyenne de 36.000 en janvier 2008). “L’effet
mentation du nombre de demandeurs d’emploi de 200.000 en 3 modérateur du chômage temporaire sur l’impact de la crise est
ans (définition large). On observe les premiers signes timides d’un positif, conclut Klaas Soens, chercheur au Département social. En
redressement du marché du travail, notamment au niveau du tra- 2009, la Belgique a connu, derrière l’Allemagne, la plus faible
vail intérimaire et du nombre d’emplois vacants (72.481 emplois augmentation du chômage d’Europe. De nombreuses instances
vacants sur les sites web du Forem, du VDAB et d’Actiris contre insistent toutefois sur la nécessité – après les mesures de crises
72.000 en janvier 2009 et 56.000 au niveau le plus bas en novem- temporaires – de mesures structurelles, en Europe et en Belgique
bre 2009) (*). Cependant, les entreprises connaissent encore des en particulier, pour favoriser la sortie de crise et nous adapter aux
grands défis que sont le vieillissement de la
population, la mondialisation,… Ceux-ci néces-
sitent des finances publiques saines et des ré-
formes approfondies du marché du travail.” 
*Y compris les demandeurs d’emploi inscrits sans
allocation Onem.
**432.498 y compris les demandeurs d’emploi après
temps partiel volontaire et les prépensionnés dispo-
nibles.
Plus d'info ? Klaas Soens –ks@vbo-feb.be
(*) Analyse FEB.

18 • MAI 2010
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Expertises FEB OPINIONS

UE : une nouvelle stratégie L’Europe en bref


pour l’emploi et la
Certaines décisions importantes pou-
croissance vant avoir des conséquences pour les
entreprises belges ont été prises ré-
cemment au niveau européen. Aperçu :

L
a Stratégie Europe 2020 (*), dont la Commission a pré-
senté le projet en mars dernier, devrait bientôt succéder • Lors du Sommet de printemps (25-26 mars
à la Stratégie de Lisbonne 2000-2010. Cette nouvelle 2010), le Conseil européen, outre la Stratégie
stratégie vise à la fois la réalisation d’une croissance intelli- Europe 2020 (cf. ci-contre), s’est penché sur le problème de la
gente (économie fondée sur la connaissance et l’innovation), compétitivité des économies européennes, un aspect essen-
d’une croissance durable (économie sobre en carbone et en tiel des perspectives de croissance de l’UE. A cet égard, les
ressources ainsi que compétitive) ainsi qu’une croissance inclu- chefs d’Etat et de gouvernement ont également évalué l’état
sive (économie à fort taux d’emploi). de la préparation du prochain Sommet du G20. S’agissant du
changement climatique, les membres du Conseil européen
Lors du Sommet de printemps, le Conseil européen a approu- ont estimé qu’une nouvelle impulsion aux négociations est
nécessaire. Ils ont, entre autres, préparé la COP16 (Con-
vé les principaux éléments de cette stratégie, en insistant judi-
ference of the Parties), qui se tiendra à Cancún, ainsi que la
cieusement sur la nécessité de miser sur la croissance et l’em-
position de l’UE en matière de financement pour les pays en
ploi dans les dix années à venir. Les ob-
développement. Enfin, les chefs d’Etat et de gouvernement
jectifs stratégiques relatifs à l’emploi, à
de la zone euro ont rappelé la responsabilité partagée de
la R&D ainsi qu’aux émissions de CO2 chacun de ses membres pour la stabilité économique et finan-
ont été adoptés. En revanche, en matiè- cière de celle-ci.
re d’éducation et de réduction de la
pauvreté, un objectif chiffré doit encore • Le 31 mars dernier, la Commission européenne a présenté son
être discuté par les chefs d’Etat et de nouveau Programme de travail pour 2010. Ce document
gouvernement. contient une série de priorités stratégiques visant à faire sortir
Au-delà du contenu de la stratégie, il l’Europe de la crise ainsi qu’à faire face aux défis de long
importe qu’une gouvernance efficace terme, tels que le changement climatique et le vieillissement.
soit mise en place si l’on veut pallier les L’action de la Commission sera axée autour des quatre élé-
ments suivants : l’adoption de mesures pour lutter contre la

“deDes programmes nationaux


réforme sont en préparation.
crise et soutenir l’économie sociale de marché européenne,
l’élaboration d’un 'projet pour les citoyens', la mise en place
d’un programme de politique extérieure ambitieux et cohé-
rent à dimension mondiale et, enfin, la modernisation des
Le Conseil européen de juin en instruments et des modes de fonctionnement de l’Union
évaluera la teneur” européenne.

• Pour ce qui est plus spécifiquement du volet social du pro-


insuffisances que connaissait la Stratégie de Lisbonne. D’une gramme de travail de la Commission, celle-ci entend mettre
part, il est essentiel que les Etats membres s’approprient réel- l'accent sur l'inclusion des jeunes sur le marché du travail, lut-
lement les objectifs de la stratégie. Pour ce faire, des pro- ter contre l'échec scolaire, accroître la mobilité régionale (y
grammes nationaux de réforme sont actuellement en prépara- compris pour les jeunes entrepreneurs) et développer des
tion et ce, en collaboration avec la Commission européenne. outils pour identifier la formation tant formelle qu'informelle.
Le Conseil européen de juin en évaluera la teneur avant de Les plus âgés feront aussi l’objet d’une attention dans un Livre
procéder à l’adoption formelle de la Stratégie Europe 2020. vert sur les pensions, qui devrait pointer les responsabilités
des États membres et de l’UE pour répondre aux défis du
D’autre part, des mécanismes de contrôle régulier doivent vieillissement. La Commission envisage aussi de traduire la
permettre de mesurer les avancées au niveau national comme charte des femmes en actions concrètes notamment dans le
au niveau européen. A cet égard, on devrait procéder à une domaine de l’égalité salariale, sans oublier le congé de pater-
évaluation simultanée des avancées de la Stratégie Europe nité. Du côté législatif, les sujets à l’ordre du jour sont la révi-
2020 et du Pacte de stabilité et de croissance. De ces derniers sion de la Directive sur le temps de travail, l’uniformisation de
règles en matière d’immigration (travail saisonnier et mouve-
éléments dépend en grande partie le succès de la stratégie,
ments intra-entreprises). Enfin, il est question du suivi de l’ap-
qui – rappelons-le – constitue une dernière chance de posi-
plication de la Directive sur le détachement des travailleurs
tionner l’Europe sur l’échiquier mondial. 
dans le cadre d’une prestation de services qui impose aux
entreprises le respect des conditions de travail dans le pays
(*) www.ec.europa.eu/eu2020.
d’accueil.

Plus d'info ? Arnaud Thysen – at@vbo-feb.be Plus d'info ? Arnaud Thysen – at@vbo-feb.be et Sonja
Kohnenmergen – sk@vbo-feb.be

19
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OPINIONS Faits et chiffres

Modération salariale et innovation


pour préserver notre tissu économique
La Belgique est connue pour sa forte productivité du travail. Cela signifie que, pour
chaque heure travaillée, notre pays produit beaucoup plus de richesses que les autres
pays. Ce phénomène tient plutôt au fait que l’économie belge compte parmi les plus
© D. Rys

automatisées et les plus avancées sur le plan technologique au monde. Comme le mon-
Geert Vancronenburg tre le 1er graphique, il existe effectivement dans notre pays un très grand nombre de
gva@vbo-feb.be
machines pour chaque heure prestée.

L
e nombre élevé de machines par heure prestée dans notre
pays (graphique 1) s’explique en grande partie par l’associa- NOMBRE DE MACHINES PAR HEURE PRESTÉE
(ETATS-UNIS = 1 ; SOURCE : GGDC)
tion du caractère très ouvert de notre économie, d’une part,
et du coût salarial belge élevé, d’autre part. Si les entreprises sont
confrontées à une plus forte évolution du coût salarial que leurs
concurrents étrangers, elles devront compenser d’une manière ou
d’une autre l’effet que cela aura sur leurs coûts totaux. En rempla-
çant les salariés par des machines, on relève la productivité du tra-
vail et on peut ainsi maintenir intacte la position concurrentielle
internationale. Malheureusement, cela explique aussi le faible taux
d’emploi en Belgique.

Depuis le milieu des années 90, cette stratégie ne semble toutefois


plus en mesure de neutraliser nos dérapages salariaux. Tandis que
la Belgique était alors environ 13 % plus productive que la moyen-
ne de nos trois voisins, la productivité de nos voisins a depuis for-
tement progressé, réduisant notre avance à moins de 7 % en 2008.
Les entreprises belges sont depuis 1996 confrontées à deux phé-
nomènes se renforçant l’un l’autre : 1) les coûts salariaux par heure HANDICAP SALARIAL DE LA BELGIQUE PAR RAPPORT
progressent plus vite en Belgique que chez nos trois voisins et 2) AUX TROIS PAYS VOISINS (1996 = 100 ; SOURCE : CCE, OCDE)
cette tendance n’est plus compensée par une hausse de la pro-
ductivité, entraînant ainsi une forte progression de notre handicap
en matière de coûts salariaux, corrigé par la productivité, sur cette
période (2e graphique).

De tels handicaps structurels constituent une menace pour notre


tissu économique, surtout en période de conjoncture défavorable.
Et le passé nous enseigne que, lorsque nos entreprises connaissent
des difficultés, celles-ci ne tardent pas à toucher le marché du tra-
vail et les finances publiques. Il faut donc d'urgence contrer ces
évolutions négatives. C’est pourquoi les questions suivantes doi-
vent être mises en chantier encore cette année. Premièrement, il
faudra tracer une trajectoire qui mette progressivement un terme
au handicap accumulé depuis 1996 en matière de coûts salariaux
coûts salariaux horaires coûts salariaux par unité produite
par heure.

9,2%
Deuxièmement, nous devrons établir un agenda de réformes visant
à relever la croissance de la productivité en Belgique sans que cela
ait d’effet néfaste sur l’évolution de l’emploi. Avec une attention
particulièrement accordée à l’innovation. Dans les décennies qui
ont suivi la Seconde Guerre mondiale, les transferts technologiques Le handicap belge en matière de coûts salariaux
depuis les États-Unis ont permis à notre pays d’atteindre relative- depuis 1996, corrigé par la productivité,
ment vite le seuil technologique. Il ne tient qu’à nous, maintenant, par rapport à nos trois voisins
de poursuivre dans cette voie. 

22 • MAI 2010
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OPINIONS Controverse

Faut-il supprimer l’avantage fiscal


CONTRE

E
n quoi selon vous l'épargne-pension serait structurellement 'supérieur' au troisiè-
a-t-elle toute sa place dans la cons- me pilier. Le deuxième pilier est tout autant
truction actuelle du système de pen- que le troisième pilier un mode d'épargne
sion belge ? 'sponsorisé par l'Etat'. Il l'est même nette-
"Un des grands mérites de l'épargne-pension ment davantage. Dans le cadre du deuxième
est non seulement d'avoir rendu la population pilier, on constate qu'un travailleur n'a que
consciente de la nécessité de se constituer fort peu d'emprise sur son plan de pension et
une pension complémentaire, mais aussi d'a- est grandement tributaire des initiatives pri-
voir en quelque sorte responsabilisé la popu- ses par son employeur – de concert ou non
lation sur ce point." avec les organes sociaux de l'entreprise –, ou
au niveau sectoriel. J'oserais même dire que
D'aucuns affirment que la déduction fiscale sur ce plan, le troisième pilier est plus 'démo-
de l'épargne-pension est un cadeau aux cratique' que le deuxième, car il est librement
plus aisés … accessible à tous. Contrairement au deuxiè-

“pension
L'épargne-
est un
"J'ai du mal à décrypter l'alchimie qui a
déclenché ces derniers temps chez certains
me pilier, l'épargne-pension est en outre
accessible au conjoint ou partenaire au foyer.
ce sentiment d'aversion à l'égard de l'épar- L'épargne-pension est ici plus 'sociale' que la
correctif à l'im- gne-pension. Alors qu'il y a une bonne ving- pension complémentaire et a donc clairement
portant taux de taine d'années, elle était plébiscitée et qu’il y sa raison d'être."
a à peine quatre ans le législateur en a enco-
solidarité inscrit re relevé la cylindrée, d'aucuns veulent Et que répondez-vous à ceux qui souhai-
dans notre aujourd'hui la mettre au rancart. Il faut quand tent supprimer l'avantage fiscal du troisiè-
système de même fortement nuancer cette affirmation de me pilier et utiliser les budgets dégagés
'cadeau aux plus aisés'. Le fait que l'épargne- pour renforcer la pension légale ?
sécurité sociale” pension soit aussi répandue montre que le "Cette 'guerre des piliers' me semble poser
Paul Van Eesbeeck, système est accessible à de très larges cou- un faux dilemme. Interrogeons-nous d'abord
conseiller juridique et ches de la population. Et s'il est vrai que les s'il faut ou non renforcer la pension légale. Si
associé chez Vereycken classes plus aisées ont probablement plus la question appelle une réponse positive, on
& Vereycken Consulting d'assise pour bénéficier du système, il ne faut s'interrogera ensuite sur son financement. Et
pas oublier que ce sont elles aussi qui per- sur ce plan-là, on peut tout envisager : restric-
mettent de faire fonctionner notre système de tions au niveau des avantages fiscaux liés à
pension légale par des cotisations sociales l'épargne-pension, aux chèques-repas, aux
déplafonnées (du moins dans le régime des livrets d'épargne, etc. Ou encore, des coupes
travailleurs salariés), alors que la pension dans les dépenses de l'Etat. Par exemple via
légale se calcule, elle, sur un salaire plafonné. la suppression du Sénat et des organes pro-
Sans compter le fait que les pensions légales vinciaux. Quand on doit trancher, il faut main-
faibles et moyennes ne sont pas taxées, tenir ce qui a le plus de sens et éliminer ce qui
contrairement aux pensions légales plus éle- en a le moins. Selon moi, l'épargne-pension
vées. L'épargne-pension n'est qu'un 'faible' fait plutôt partie de la première catégorie et
correctif à l'important taux de solidarité inscrit son ‘coût’ me semble largement justifié.
dans notre système de sécurité sociale." Comme je l’ai dit, il s’agit plutôt d’un correctif
à une pression fiscale particulièrement éle-
Pour assurer pleinement cette solidarité au vée, qui a le grand mérite de responsabiliser
sein de la collectivité, le deuxième pilier ne la population. Je plaiderais même pour un
devrait-il pas être le seul vecteur permet- relèvement des versements pouvant être
tant la capitalisation individuelle ? affectés à l’épargne-pension." 
"Je ne vois pas en quoi le deuxième pilier

24 • MAI 2010
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Controverse OPINIONS

de l’épargne-pension ?
POUR

P
our quelles raisons êtes-vous favora- pensions. L’idée sur laquelle repose cette
ble, tout comme le propose la FGTB, affirmation est qu’il faut augmenter le taux
à la suppression de l’avantage fiscal d’épargne individuel pour suppléer au niveau
de l'épargne-pension ? des pensions légales que l’on anticipe trop
"La déduction fiscale accordée à l’épargne- faible. Or, en suivant ce raisonnement, le coût
pension est une mesure coûteuse, qui a un lié au troisième pilier va largement se super-
impact direct sur le budget de l’Etat. Le mi- poser à celui du premier pilier durant les
nistre des Finances, Didier Reynders, l'a esti- années qui viennent. Un coût qui risque d'êt-
mé à environ 470 millions d’euros en 2008. re plus important que son bénéfice éventuel.
Cette mesure a aussi un coût indirect qui pro- Le financement des pensions n’en demeure
vient du risque inhérent aux marchés finan- pas moins une question épineuse qui peut
ciers. Investir sur les marchés est un pari sur le selon nous être résolue dans le cadre du pre-
futur et tout pari n’est pas forcément ga- mier pilier, en jouant sur différents paramèt-
gnant. De plus, le système financier connaît res : sources de financement, montant des
régulièrement des crises globales où une par- cotisations, liaison au bien-être, etc. Nous
tie de l'épargne peut disparaître. Or, dans les sommes donc plutôt favorables à un renfor-
débats sur les pensions, on oublie trop sou- cement du premier pilier qui est a priori plus
vent de comptabiliser une variation du niveau efficace, permet aisément la solidarité entre
de risque comme un coût. Par ailleurs, l'épar- et au sein des générations et rend les arbitra-
gne-pension est inégalitaire à plusieurs ni- ges visibles."
veaux. D'une part, ce sont généralement les
mieux lotis qui ont les moyens de participer Décider de supprimer l'avantage fiscal, ne
au troisième pilier de pension. Et d'autre part, serait-ce pas rompre le contrat de confian-
des différences se créent entre participants, ce que près de 3 millions de Belges ont
soit parce qu'ils n'ont pas cotisé au fonds le conclu avec l’Etat et les organismes finan-
plus performant, soit parce que certains récu- ciers ?

“fiscale
La déduction
accordée
pèrent leur mise lors d’une période de basse
conjoncture."
"Nous ne remettons pas en question les
déductions fiscales déjà accordées. Dans le
débat sur le vieillissement, il faut tout remet-
à l’épargne- Dans les années 80, l'épargne-pension a tre à plat. Dès lors que l’on met sur la table la
été instituée notamment pour stimuler l'é- durée et le montant des cotisations légales, il
pension est une conomie belge. N'est-ce pas un argument serait étrange de considérer la remise en cau-
mesure coûteuse en sa faveur ? se du troisième pilier comme un tabou."
pour l'Etat et "C'était effectivement l'objectif initial. Mais,
si le but recherché est aujourd'hui de stimuler Dans le même ordre d'idée, comment res-
inégalitaire” la croissance, il y a certainement des mesures ponsabiliser les individus à se constituer
Tanguy Isaac, assistant en plus efficaces à prendre en ce sens, telles que un complément de pension, si l'épargne
économie à l'UCL, et l’investissement dans les infrastructures de pension devenait un produit d'épargne
Bernard Swartenbroekx, transport ou la réduction de la pression fisca- ‘ordinaire’ ?
chercheur en droit à l'UCL le sur les bas revenus." "Nous sommes dubitatifs face à la question
de la responsabilité. Cela induit l’idée qu’un
Le coût que vous mentionnez n'est-il pas travailleur avec des faibles revenus serait ir-
un ‘mal nécessaire’ à l'efficacité de notre responsable s’il n’a pas ou peu cotisé. N’est-
système de pension dans sa globalité ? ce pas ajouter l’injure à l’injustice ?" 
"Non. Il est vrai qu'aujourd'hui, le troisième
pilier est présenté comme une partie de la Propos recueillis par Florence Delhove
solution à la question du financement des

MAI 2010 • 25
FORWARD_mai010_FR.qxd:FORWARD fr 28/04/10 11:22 Page 26

OPINIONS Carte blanche

Liesbeth Noordegraaf-Eelens

Après la crise, vient l’optimisme

“P
lus jamais ça !” Nombreux sont ceux qui ont pensé et savait précisément où. Des actes destinés à maîtriser les risques
proclamé ces trois mots après la crise financière. Le ont fini par accroître ces risques.
comportement des banquiers avait totalement dérapé
au cours des dernières décennies. Tel le monstre de Frankenstein, Ces deux exemples illustrent bien comment de bonnes intentions
le système financier avait échappé à ses créateurs. Heureusement, et de grandes espérances peuvent finalement tourner court. Ils
la crise a permis de remettre les pendules à l’heure. Voilà qui montrent également que cette dynamique ne se retrouve pas uni-
devrait nous protéger contre de nouvelles crises à venir, pense-t- quement sur les marchés financiers. Selon le sociologue allemand
on. Cela ressemble fort à de l’optimisme, mais c’est une illusion. Ulrich Beck, elle reflète la société dans laquelle nous vivons actuel-
Car, tout comme par le passé, nos actes nous dépasseront à nou- lement, qu’il qualifie de société de risques. L’homme agit en se
veau. Cela entraînera des conséquences imprévues, qui mèneront fondant sur sa grande intelligence, sur des projets élaborés en
à leur tour à de l’incertitude et à de nouvelles crises. Pour certains, détail et une technologie de haut niveau. Mais, il ne peut prévoir
un tel message est peut-être déprimant, mais l’incertitude peut au toutes les conséquences avant d’agir, ni même pendant l’action.
contraire être cause d’optimisme. Beck va même plus loin en ajoutant que la probabilité des effets
non voulus augmente à mesure que la technologie et la connais-
Les actes qui dérapent ne sont pas l’apanage des banquiers, com- sance progressent. C’est l’aspect tragique des bonnes intentions.
me l’illustre la création des chlorofluorocarbones ou CFC. Dans les La connaissance n’est pas seulement une force, elle génère égale-
années 1930, ces substances ont en effet été créées pour servir ment de l’incertitude. L’incertitude ainsi créée laisse présager
d’alternatives aux fluides réfrigé- l’existence de scénarios d’avenir que nous n’avions
rants utilisés alors : l’ammoniaque,
le dioxyde de carbone et le dioxy-
de de soufre. Les CFC étaient con-
“d’incertitude
C’est dans les temps
que les gens
pas envisagés au départ. Il faut donc s’attendre à
voir apparaître davantage de crises. Car une crise
naît au moment où les scénarios imprévus devien-
sidérés comme plus sûrs car, con- nent menaçants.
trairement aux fluides réfrigérants
prennent des décisions qui
d’alors, ils n’étaient ni inflammables révèlent leurs valeurs” Qu’est-ce que cela implique donc pour nos actes ?
ni toxiques. Mais, au milieu des an- Par peur de l’incertitude, nous pourrions conclure
nées 1970, les chimistes ont découvert que les CFC endomma- de ne plus rien faire du tout. C’est une option possible, mais guère
geaient la couche d’ozone de la stratosphère. Les inventeurs n’a- attrayante. L’alternative consiste à rechercher des structures où les
vaient pas prévu de telles conséquences, ils supposaient au con- effets non voulus peuvent trouver leur place. À nous dire, pour tout
traire que leur invention apporterait une sécurité. Un acte censé ce que nous faisons : imaginons que quelque chose tourne mal,
favoriser la sécurité a finalement créé un danger. comment se parer des coups ? Cela peut nous pousser à trouver
des filets de sécurité. Et implique aussi de restreindre nos actions,
Des CFC aux produits financiers tels que les MBS (Mortgage Ba- aussi bien en termes d’ampleur que du nombre de personnes
cked Securities), CDO (Collaterizaled Debt Obligations) et autres concernées. Une autre option consiste à répartir à l’avance les
CDS, il n’y a qu’un pas. Dans les années 1970, une première varian- responsabilités et donc à s’accorder sur qui supportera les risques.
te de ces produits (les MBS) a été mise en place par le ministère
américain du logement. Ces produits devaient assurer une redis- Nous ne devons pas nous laisser effrayer par l’incertitude qui pèse
tribution et une répartition des risques, ce qui les rendait at- sur nos actions. Car c’est dans les temps d’incertitude que les gens
trayants aux yeux des diverses parties concernées : les banquiers prennent des décisions qui importent vraiment et qui révèlent
pouvaient faire des bénéfices, les régulateurs voyaient que les pro- leurs valeurs. Ou, comme l’a dit la philosophe Hannah Arendt :
duits répartissaient les risques et, pour les dirigeants politiques, sans incertitude pas de liberté. Avec la crise, nous avons perçu
l’intérêt résidait dans la promesse d’une maison pour les familles cette incertitude de près. Voilà donc une bonne raison de nous
moins argentées. La dynamique qui s’est développée par la suite montrer optimistes. 
par la négociation de ces produits n’a pas seulement engendré
La Belge Liesbeth Noordegraaf-Eelens est philosophe/économiste à la
des sommes colossales, elle a également jeté les bases de la crise Nederlandsche School voor Openbaar Bestuur de La Haye et à la Erasmus
financière. En raison du succès des produits, les risques étaient tel- School of Economics (Rotterdam).
lement répartis qu’ils étaient à peu près partout, mais personne ne

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

30 Quel est le profil du CEO idéal ?


Certaines qualités requises en 2007, le sont un
peu moins en 2010 …

32 Cinq regards de CEO sur leur


métier
En 20 ans, comment ces chefs d'entreprise ont-
ils vu évoluer leur métier, à savoir diriger une
entreprise, en bonne entente avec le conseil
d'administration qui les a choisis ?

40 Portrait-robot du top manager


en dix traits
Enquête sur le profil et le style de vie des top
managers belges

41 Pourquoi les salaires des CEO


ont grimpé
La rémunération variable : un élément structurel
du package salarial

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Le CEO anno 2010 EN COUVERTURE

Visionnaire mais performant,


rassurant mais qui prend des risques...

Recherché : CEO polymorphe

‘C
hief executive officer'. Ce terme anglo-saxon mener à bien une stratégie et assurer le développement
s'est banalisé ces dernières années. Il dési- de l'entreprise.
gne le directeur général, le directeur exécu- Quel est le profil type du CEO en 2010 ? Quelle est sa
tif, l'administrateur délégué, bref … le patron ou le durée de vie ? Qu'est-ce qui a changé dans son métier ?
numéro 1. Si ce terme s'est imposé, c'est aussi parce Qu'est-ce qui le motive à travailler en moyenne 65 heures
qu'il permet de faire une différence avec l'appellation par semaine ?
quelque peu désuète de PDG – président-directeur
général –, marquant ainsi le fait que le CEO n'est pas, ou Nous avons posé la question à des observateurs privilé-
du moins généralement pas, président du conseil d'ad- giés, à savoir des spécialistes de l''executive search', ces
ministration. Selon la plupart des observateurs, cette chasseurs de têtes mandatés par les conseils d'adminis-
séparation des pouvoirs, de plus en plus fréquente en tration pour trouver la perle rare. Et nous avons interro-
Europe, est d'ailleurs un gage de bonne gouvernance. gé les principaux intéressés, les CEO eux-mêmes. Cinq
d'entre eux, de secteurs et de profils très complémen-
Nous nous intéressons dans ce dossier aux CEO qui taires, jettent des regards souvent fort contrastés sur
n'ont a priori aucun lien historique ou familial avec l'en- une profession multifacette. Enfin, nous dressons un
treprise, qui n'en sont ni fondateurs ni propriétaires. Ils portrait-robot du 'top manager' et nous intéressons au
ont été choisis par un conseil d'administration pour nerf de la guerre, la rémunération. 

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

A nouvelle crise,
nouvelles qualités
requises

Quel est le profil du CEO idéal ?


Assis aux premières
loges, les spécialistes de
l''executive search', en
tant qu'intermédiaires
entre les attentes des
conseils d'administra-
tion et les motivations
des candidats au poste
suprême, ont une assez
bonne vue de l'évolu-
tion du métier de CEO.
Ils nous parlent de
l'évolution des
exigences. Certaines
qualités requises en
2007 le sont un peu
moins en 2010 …

T
out comme les cinq CEO dont vous structurels, d'autres sont plus directement environnement, au sens strict, dans la di-
lirez les témoignages dans ce dos- liés à la crise économique, mais aussi crise mension écologique, mais aussi au niveau
sier, aucun spécialiste du recrute- de confiance, à laquelle certaines entrepri- politique et sociétal. La durabilité n'est pas
ment de CEO n'oserait affirmer que le mé- ses font face depuis 2008. un concept creux. Mais parallèlement, ces
tier de CEO est plus 'difficile' qu'au siècle gens doivent aussi être doués de 'leader-
dernier. Ils parlent plutôt d'un niveau d'exi- CEO à l'écoute ship' et pouvoir motiver les troupes. Trou-
gences globalement supérieur, de semai- "La crise a entraîné un retournement dans ver l'oiseau rare est plus difficile", explique
nes de 65 heures et d'une marge d'erreur l'opinion publique : les CEO sont beau- Jean Van den Eynde, du cabinet Russell
plus étroite, compensés, ils le reconnais- coup moins admirés qu'ils n'ont pu par Reynolds.
sent aussi, par un niveau de rémunération, exemple l'être en plein boom de l'internet.
surtout variable et surtout dans les grandes Les excès en termes de manque d'humili- Boudewijn Arts et Joost Maes, du bureau
entreprises, qui a bien enflé ces dernières té ou les excès de confiance de certains Egon Zehnder, épinglent également les
années, le 'marché' des CEO s'étant inter- CEO font non seulement que l'ensemble aptitudes du 'nouveau CEO' à gérer une
nationalisé et étant perméable aux normes des directeurs généraux vont devoir gérer réglementation grandissante et se montrer
anglo-saxonnes. une vague de réglementations, mais qu'en socialement responsable dès lors qu'il est
plus, le profil recherché par la plupart des davantage exposé publiquement que ja-
Les experts en 'executive search' pointent conseils d'administration est différent d'il y dis. Ils y ajoutent la dimension 'people ma-
toutefois un certain nombre de différences, à trois ans : le CEO flamboyant est moins nager' : "Le CEO doit, plus qu'auparavant,
ou changements d'accent, dans le profil demandé. Les 'boards' recherchent plutôt pouvoir s'intéresser à la dimension humai-
type du CEO. Certains changements sont des gens résistants et à l'écoute de leur ne de son entreprise. Il doit pouvoir con-

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Le CEO anno 2010 EN COUVERTURE

vaincre le ban et l'arrière-ban. Les gens


sont globalement devenus plus exigeants
aussi tendance à considérer sept ans
comme une durée idéale. Ils remarquent
Changements
qu'auparavant. Chacun veut s'épanouir
dans son travail. Seul un management ba-
en tout cas dans les faits qu'il n'y a pas
chez nous d'évolution notable dans la
en 20 ans
sé sur des valeurs peut créer une large durée moyenne des mandats de CEO. Les - L'impact de l'informatisation (géné-
adhésion". CEO ne se font donc pas plus rapidement ralisation des progiciels inté-
'remercier' qu'auparavant, contrairement grés/ERP et des systèmes de repor-
La fin des magiciens ? à ce qui est constaté depuis plusieurs an- ting) permet au CEO de baser ses
décisions sur des données plus
Marc Daelemans, du bureau DRS Execu- nées aux Etats-Unis (*). Au contraire, le
claires et fiables. Le management
tive Search, déplore que, trop souvent, les 'turnover' a tendance à se réduire avec opérationnel est globalement plus
conseils d'administration, de multinationa- la crise. facile et meilleur mais le revers de
les essentiellement, placent des attentes la médaille est que les exigences
irréalistes dans les CEO. "Comment peut- CEO, une fonction critique ? en termes de transparence et de
on croire qu'une entreprise industrielle tra- Vu le niveau d'exigences, faut-il craindre 'reporting' externe ont considéra-
ditionnelle puisse durablement avoir une une pénurie de CEO ? "Malgré la réalité blement augmenté. "La marge
croissance de plus de 10%?", s'interroge-t- de la pyramide des âges, je ne m'inquiète d'erreur est devenue de plus en
il. "Et les bonus gigantesques assortis à la pas trop à propos de la relève. Les jeunes plus étroite", constate Marc
Daelemans.
réalisation de ces objectifs de croissance générations sont plus attentives à l'équili-
incitent à des comportements irrationnels bre vie privée-vie professionnelle, mais je
- Le pourcentage de cadres avec un
qui peuvent être très dommageables pour ne crois pas qu'elles cherchent à travailler diplôme universitaire n'a cessé
moins. Elles jonglent assez d'augmenter. Le CEO peut s'en-

“ansTrois
bien avec les contraintes. Ce tourer de gens souvent hyper com-
ans, c'est trop court. Sept qui m'inquiète plus, c'est que pétents dans leurs matières. C'est
plutôt positif, mais le patron peut
est un bel objectif et après dix de moins en moins de nos
moins se permettre d'être inco-
jeunes cadres prometteurs
ans, tout CEO doit se demander s'il ont l'occasion d'aller engran- hérent.

est toujours à sa place” Jean Van den Eynde ger de l'expérience à l'étran-
- Même si la hiérarchie est générale-
ger. Les entreprises sont plus
ment moins pesante que par le
regardantes et nous avons passé au niveau des organes de
la pérennité de l'entreprise. Or, personne aussi de moins en moins de centres de direction, la distance entre celui
ne peut faire des miracles, même pas les décision en Belgique, susceptibles de for- qui décide et celui qui doit exécu-
meilleurs CEO … Peut-être qu'avec la cri- mer ces futurs CEO", exprime Jean Van ter a tendance à s'élargir. "La diffi-
se les mentalités vont lentement évoluer. den Eynde. "Les formations universitaires culté est dès lors de savoir mobili-
Après tout, les conseils d'administration sont heureusement de plus en plus inter- ser jusqu'aux échelons les plus bas
ont les CEO qu'ils méritent." Heureuse- nationales, mais les jeunes risquent ensui- de l'entreprise", pointe Marc
Daelemans. Bref, le risque pour le
ment, selon Marc Daelemans, que la majo- te d'être freinés dans leur élan."
CEO de s'enfermer dans une tour
rité des entreprises belges, plutôt familia-
d'ivoire est bien présent.
les et avec un actionnaire de référence, Boudewijn Arts et Joost Maes pensent
sont plus mesurées dans leurs exigences. que le CEO a toujours été une fonction cri- - L'internationalisation n'est plus un
tique, mais l'évolution démographique fait luxe, mais une absolue nécessité, y
Durée de vie idéale effectivement qu'il ne sera pas toujours compris vers des pays (en Asie par-
Marc Daelemans estime certainement qu'il simple de remplacer la vague de CEO ticulièrement) qui exigent une plus
faudrait plus d'alternance au sommet des 'baby boomers'. Ils pointent également le grande ouverture culturelle du
entreprises. Trop de CEO restent trop fait que la fonction de CEO est de plus en CEO.
longtemps en place. Mais il n'y a pas de plus concurrencée par d'autres métiers
- Les patrons sont globalement
règle universelle : "Certaines entreprises très valorisants, dans le secteur des inves-
mieux payés, mais travaillent aussi
sur des marchés relativement prévisibles, tissements (private equity) ou dans les davantage d'heures. Le rythme est
dans l'industrie notamment, s'en sortent grands bureaux de consultance.  plus élevé, la semaine de 65 heures
très bien avec des CEO d'une grande lon- est la norme, "ce qui n'était pas le
gévité. D'autres entreprises, sur des mar- Olivier Fabes cas il y a 20 ans", observe Jean Van
chés en transformation, ont besoin régu- den Eynde.
lièrement de sang neuf à leur tête". Jean
Van den Eynde est un peu plus catégo- (*) Selon une étude de Booz Allen, le turnover - Le CEO est plus exposé dans les
médias et généralement plus écou-
rique : "Trois ans, c'est trop court. Sept ans des CEO américains a augmenté de 59% par an
té en dehors des murs de son
est un bel objectif et après dix ans, tout entre 1995 et 2006. Il y a 15 ans, seul 1 CEO
entreprise.
CEO doit se demander s'il est toujours à sur 8 était prié de prendre la porte. En 2006,
sa place". Les experts d'Egon Zehnder ont c'était 1 sur 3…

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

5 regards de CEO sur leur métier


“Plus dur ? Je ne sais pas.
Nous avons demandé à cinq CEO, en bon français 'directeurs généraux' ou 'administrateurs
délégués', de nous parler de l'évolution de leur métier, à savoir diriger une entreprise dont ils
ne sont ni les propriétaires ni les fondateurs, en bonne entente avec le conseil d'administra-
tion qui les a choisis. Ne comptez pas sur les cinq chefs d'entreprise que nous avons rencon-

Sabine Sagaert, CEO d’Arseus Dental


“La barre est désormais placée un peu plus haut”
“On attend d’un directeur général qu’il soit beaucoup plus orienté ‘résultats’ qu’auparavant,
la barre est placée plus haut. Cela accroît la pression. C’est en fait positif, mais il ne faut pas
aller trop loin”, déclare Sabine Sagaert, CEO d’Arseus Dental.

“J’
ai moi aussi ressenti les ef- l’on a besoin de toute la motivation de l’équipe pour être créa-
fets de la crise ces deux der- tif et entreprenant. C’est parfois un exercice très difficile.”
nières années. L’environne-
ment a totalement changé, le nombre L’équilibre entre le court et le long terme a, selon Sabine Sagaert,
de facteurs imprévisibles a considéra- lui aussi subi de profondes modifications. “À l’heure actuelle, il
blement augmenté. Il y a aujourd’hui ne faut pas seulement penser sur le long terme, les résultats à
tant d’interrogations auxquelles un court terme doivent également être là. Il faut semer pour pou-
CEO ne peut répondre en s’appuyant voir récolter. Or, semer coûte cher. Autrefois, on accordait beau-
sur les recettes du passé. Cela im- coup plus d’attention au long terme. La bourse joue peut-être
plique de se réinventer un peu et de en cela un rôle important. Un petit écart dans les résultats inter-
prendre des décisions audacieuses et médiaires peut avoir un impact énorme sur le cours boursier.
intuitives plutôt que de se fonder sur une analyse approfondie. Tout est bien plus sensible qu’avant.” En conséquence, un CEO
On pourrait dire qu’un CEO doit être davantage entrepreneur est beaucoup plus rapidement jugé sur ses résultats qu’avant.
qu’auparavant. La crise a également exercé une pression sur le
chiffre d’affaires et sur les marges, ce qui oblige automatique- L’irrésistible propension à la bonne gouvernance est-elle une
ment à bien maîtriser les coûts. Dans bien des cas, cela donne bonne chose ? “En principe oui, car la bonne gouvernance est
lieu à des économies et à des restructurations, à un moment où un must. Par contre, est-ce que tout doit être réglementé ? J’es-

Du ciment aux produits de dentisterie en passant par la bière


Sabine Sagaert, 43 ans, a entamé sa carrière indus- mer la direction de la Belgique et du Luxembourg. réduisant le nombre de licenciements secs.”
trielle chez le producteur de ciment CBR, où elle a Dès son retour en Belgique, Sabine Sagaert a dû En avril dernier, Sabine Sagaert a jugé qu’il était
assumé différentes fonctions pendant 8 ans, dont effectuer une restructuration. “Ce n’était pas une temps de passer à autre chose. “Après 11 années
celle de directrice de la logistique et des ventes. Il y situation idéale pour commencer. Mais heureuse- passées chez AB InBev, dont dix en Belgique, j’a-
a une dizaine d’années, elle est entrée chez le grou- ment, j’avais de bons contacts avec les clients, les vais envie d’autre chose. Je voulais une fonction à
pe brassicole Interbrew (aujourd’hui AB InBev), où syndicats et les salariés. C’était un immense défi, caractère international, car j’ai toujours aimé l’inte-
elle a d’abord fait carrière dans la vente et le marke- mais je l’ai fait avec plaisir. Il s’agissait d’une res- raction avec les autres cultures. Je préférais tra-
ting avant de prendre la tête de la filiale française. tructuration assez importante, mais nous l’avons vailler dans un secteur totalement différent. J’ai
En 2006, elle a été rappelée en Belgique pour assu- traitée de la manière la plus sociale possible, en choisi Arseus. C’est une jeune entreprise cotée en

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Le CEO anno 2010 EN COUVERTURE

Différent ? Certainement”
trés pour se plaindre que leur job est devenu plus dur qu'il y a 15 ou 20 ans. Mais tous pointent des évo-
lutions notables, positives comme négatives, qui font que les exigences ont changé. Le CEO se doit d'êt-
re à l'aise sur un nombre croissant de terrains. Rassurer tout en osant prendre des risques. Cinq patrons de
différents horizons se livrent à un exercice d'introspection.

time qu’il est toujours sain d’avoir une réglementation de


base, mais reste à savoir jusqu’où aller. Il faut quand même Pierre Francotte,
pouvoir travailler. Depuis quelque temps, on accorde selon
moi beaucoup d’attention à la rémunération. C’est compré- ex-CEO d’Euroclear
“entrepreneur
Un CEO doit être davantage
qu’auparavant”
“Une clé de voûte, mais que
l’on peut remplacer après
quelques années”
hensible vu ce qui s’est récemment passé dans le secteur
bancaire, mais il ne faut pas aller trop loin, à mon sens. En Le métier de CEO est-il plus difficile qu'il y a 15 ou 20
fin de compte, la rémunération est toujours le fruit de l’off- ans ? Pierre Francotte ne va pas jusqu'à tirer cette con-
re et de la demande. On pourra réglementer tant qu’on clusion, même si un certain nombre d'éléments con-
veut, au final, il s’agit toujours d’attirer les bonnes person- joncturels peuvent donner temporairement cette im-
nes aux bons postes.”  pression. Ce qui est certain par contre, c'est que le
Luc Van Aelst
métier a changé à divers points de vue et que le CEO
moderne doit faire preuve de qualités différentes pour
faire face à un rythme de changements plus élevé que
Le CEO n’est plus ce qu’il était jadis. Une de ces qualités est notamment de pouvoir
Evolutions positives partir avant de devenir un éventuel frein au développe-
- L'approche est davantage orientée sur les résultats ment de l'entreprise. Ce que Pierre Francotte a décidé
- Le CEO doit prendre plus d’initiatives
de faire chez Euroclear.
Evolutions négatives
- Trop grande attention portée à la rémunération
- Accent placé sur les résultats à court terme

L
a crise financière, puis économique va sans doute laisser
des traces, durables ou pas, sur le métier de CEO, a for-
tiori dans le secteur financier lui-même, accusé aujour-
d’hui de tous les maux. Ce n'est pas à cause de la crise que
Pierre Francotte a décidé de quitter Euroclear (sa décision
bourse (Arseus est entrée Sabine Sagaert a pris 3 mois était prise bien avant 2008), mais il admet que l'image du pa-
en bourse en 2007 en tant pour faire son choix. “Je tron d'organisme financier est mise à rude épreuve : “Il est nor-
que filiale d’Omega Phar- pouvais entrer en fonction mal que l'opinion publique soit choquée par les parachutes
ma) et je siège au comité sans délai, mais j’ai choisi
dorés qu'ont pu recevoir certains grands patrons de banques
directeur, ce qui est tout de d’examiner avec soin toutes
qui ont échoué. L'inflation ces dernières années de la rémuné-
même important pour moi, les options. Et j’ai profité de
parce que je peux prendre cette période pour faire des ration variable par 'stock options' est également choquante.
en charge la totalité de la choses que je n’avais jamais Mais il faut toutefois faire attention à ce que certains patrons,
politique. Cela me donne eu le temps de faire. Com- lassés par une médiatisation à outrance de certains excès, ne
énormément de motivation me suivre un cours de cata- se disent : 'mais finalement pourquoi est-ce que je ne suis pas
et d’énergie.” maran par exemple.” le numéro 2 ou 3 de l'entreprise ?'. C'est pourquoi il est tout
de même sain de bien rémunérer les patrons qui réussissent”.

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

10 ans, ‘le bon moment’


En plus de devoir gérer ce déficit d'image, le patron d'institu-
tion financière va devoir faire face à un cadre régulatoire de plus
selon Pierre Francotte
en plus strict. "Les conseils d'administration recherchent désor- Nous avons rencontré Pierre Francotte (52 ans) alors
mais un CEO qui inspire la confiance plutôt que quelqu'un qui qu'il vidait son bureau du Boulevard du Roi Albert II.
soit uniquement brillant, voire flamboyant. Cette confiance Début avril, il a en effet quitté Euroclear, le leader mon-
passe par une très grande compétence technique et une inté- dial en matière de règlement-livraison de titres (actions,
grité, ainsi que par une habileté à communiquer non seulement obligations, produits dérivés et fonds d’investissement).
vers les actionnaires, mais aussi les collaborateurs, les clients et La société financière, basée à Bruxelles depuis 1968,
emploie quelque 2.500 personnes en Belgique et un peu
les régulateurs."
moins de 4.000 dans le monde. Après dix ans à la tête
de l'institution, il a estimé qu'il était grand temps de pas-
Au-delà de ces changements entraînés par la conjoncture ex-
ser le flambeau de CEO au Britannique Tim Howell (ex-
ceptionnelle de ces deux dernières années, Pierre Francotte
HSBC). "Quelques personnes que je connais sont res-

“chent
tées quelques années de trop à la tête d'une entreprise.
Les conseils d'administration recher- Je ne voulais pas rater l'opportunité de partir au bon
moment", explique ce diplômé en droit de l'ULB et de
désormais un CEO qui inspire Cambridge, qui a débuté chez Euroclear en 1993, après
la confiance plutôt que quelqu'un qui soit avoir été conseiller général adjoint auprès du FMI. Selon
lui, la durée de vie d'un CEO dans une société comme
uniquement brillant, voire flamboyant” Euroclear ne doit pas excéder dix ans, au risque de
devenir synonyme d'ossification pour l'entreprise. Son
pointe deux changements plus structurels dans le profil type du départ était planifié de longue date. En fait, Pierre
CEO. Premièrement, vu l'internationalisation du paysage con- Francotte serait déjà bien parti il y a deux ans, à l'occa-
currentiel, les directeurs généraux devront avoir l'ouverture né- sion de ses 50 ans, mais la crise financière l'a poussé à
cessaire pour comprendre des mécanismes cultu- prolonger le bail de deux ans. Selon lui, le CEO doit par-
rels de plus en plus complexes, notamment tir avant de devenir un frein au développement de nou-
velles idées. "Au fil des années et de l'expérience, le
dans les pays émergents. Deuxièmement, ils
directeur général est renforcé dans certaines convic-
devront pouvoir répondre aux nouvelles
tions. On ne peut pas attendre de lui qu'il soit capable
attentes des collaborateurs et en particulier
de se réinventer indéfiniment."
ceux de la génération Y (grosso modo les 15
- 30 ans), “plus curieux mais aussi plus exi- Pierre Francotte admet qu'il n'aurait pas pu "tenir" dix
geants en matière d'équilibre vie privée-vie ans dans un environnement trop stable. Chez Euroclear,
professionnelle et en termes d’évo- il a dû gérer des défis comme le lancement de l'euro,
lution de carrière, mais pas tou- l'introduction du passeport financier et une série de
jours prêts à faire les mêmes fusions-acquisitions.
efforts que leurs aînés”. Selon
lui, le CEO ne peut plus être Il quitte l'entreprise de son propre gré et "sans compen-
une personne à une seule sation financière", se plaît-il à souligner. "Je vois tou-
facette, mais un 'chef d'or- jours mon avenir dans l'industrie financière au sens
chestre' qui communique large, mais plutôt dans le conseil et la réflexion straté-
beaucoup, autant vers l'in- gique." Pierre Francotte compte également consacrer
térieur que l'extérieur, en davantage de temps au secteur caritatif (il est déjà prési-
s'appuyant sur un argu- dent de United Fund for Belgium) et à l'enseignement. Il
se réjouit de donner prochainement un cours sur la régu-
mentaire convaincant. 
lation financière et la bonne gouvernance à la Solvay
Olivier Fabes Business School.

Le CEO n’est plus ce qu’il était


Evolutions positives
- Le CEO ne peut plus être une personnalité à une seule facette
- La crise actuelle est une opportunité pour certains dirigeants qui vont trouver un second souffle

Evolutions négatives
- Certains CEO ou candidats CEO vont jeter l'éponge face à la crise actuelle
- Le poids démesuré pris par les compensations financières variables, même pour des patrons qui ont échoué

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Le CEO anno 2010 EN COUVERTURE

Luc De Bruyckere, président et ex-CEO de Ter Beke


“Je ne vois pas d'inconvénient au CEO de longue
durée, au contraire”
Luc De Bruyckere a dirigé le groupe alimentaire Ter Beke pendant 36 ans. Il en a donc connu des
(r)évolutions en tant que CEO. "Je ne sais pas si le métier de CEO en tant que tel est plus difficile
que dans les années 70, mais le monde des affaires est globalement devenu plus dur, moins
humain", constate celui qui côtoie également des dizaines de chefs d'entreprise à travers son
implication dans VOKA (dont il est le président), l'UWE ou encore la FEB. Il estime que la lon-
gévité du CEO est plutôt un gage de réussite.

“L
e métier de CEO est-il plus dur en 2010 qu'en 1980 nières années. "Le CEO d'une
ou 1990 ? Il est difficile de répondre, car chaque si- entreprise cotée en bourse
tuation est spécifique et il faut bien distinguer les doit vraiment veiller à ne pas
défis conjoncturels immenses du moment et les évolutions plus être aspiré par cette tenta-
structurelles. Ce qui est certain néanmoins, c'est que 'faire des tion du court terme. Celle-ci
affaires' est devenu plus difficile, car tout va plus vite et est dé-
sormais à l'échelle internationale. Je constate aussi que les rela-
tions sont devenues plus strictement formelles, purement 'busi-
ness', alors qu'il y avait davantage de place pour l'humain Le CEO n’est plus ce qu’il était
lorsque j'ai démarré comme patron de Ter Beke”, observe sans
nostalgie Luc De Bruyckere, qui se demande au passage si tout Evolutions positives
- Prise de conscience que les aptitudes priment sur les diplômes
cela n'est pas la conséquence logique d'un monde informatisé,
- Les PME belges résistent globalement au 'court-termisme' anglo-saxon
où l'information circule de plus en plus vite. Evolutions négatives
- Le monde des affaires a tendance à se déshumaniser

“damner
- Les patrons, peu populaires, doivent gérer une pression sociale de plus
Autant il est normal de con- en plus forte

une série de scandales ou


bonus injustifiés, autant il est dan-
gereux de généraliser les critiques” est encore plus forte dans le monde anglo-saxon. Heureuse-
ment que nous avons en Belgique encore beaucoup d'entrepri-
ses familiales, avec des actionnaires de référence, qui savent
Dans l'industrie alimentaire, qu'il connaît depuis près de quatre encore réfléchir à long terme."
décennies, il constate par exemple que les principaux clients de
Ter Beke sont désormais des groupes de distribution (Delhaize, Luc De Bruyckere est bien conscient d'avoir été atypique en étant
Tesco, Carrefour, etc.), qui opèrent au minimum à l'échelle euro- resté 36 ans à la tête d'une entreprise dont il n'était pas le fon-
péenne, alors qu'il y a encore 20 ans, Ter Beke fournissait pas dateur. Mais selon lui, cette longévité est justement un garde-fou
mal d'entreprises familiales locales. Parallèlement, les géants de contre la tentation du 'court-termisme'. "Je ne vois absolument
la grande distribution ont désormais à leur tête des 'managers' pas d'inconvénient à rester très longtemps CEO, à condition que
qui n'ont plus un lien avec l'histoire de l'entreprise et ont parfois ce CEO de longue durée ne soit pas un frein au changement. Je
moins d'affinité avec le secteur. "Ce sont des acheteurs très pense même qu'il y a une corrélation entre la longévité du CEO
durs, rompus à la négociation et qui utilisent par exemple la et la réussite de l'entreprise, car un patron ne doit pas aborder
force de l'internet et des ventes aux enchères pour obtenir les son job de façon trop mécanique. Il doit s'abstenir d'importer
meilleurs prix. Cela n'empêche pas qu'il y ait toujours des rela- des recettes toutes faites ou des processus externes et prendre
tions entre les personnes, mais quand même…" le temps de bien comprendre la culture de l'entreprise."

Résister à la pression du court terme Pression sociale


Luc De Bruyckere a œuvré à l'introduction de Ter Beke à la Bour- En plus de la pression des actionnaires, les patrons doivent gérer
se de Bruxelles. Il sait donc ce qu'est une réunion d'analystes une pression sociale de plus en plus forte : "Les employeurs sont
financiers. Selon lui, la tentation de la part du CEO d'être obnu- pour ainsi dire cloués au pilori par l'opinion publique pour l'ins-
bilé par les résultats trimestriels n'a fait qu'augmenter ces der- tant. Il est peu de dire qu'ils ne se situent pas très haut sur

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l'échelle de la popularité. Autant il est


“Le bonheur est le chemin”
normal de condamner une série de scan- Le Gantois Luc De Bruyckere est le président du groupe alimentaire Ter Beke de-
dales ou bonus injustifiés, autant il est puis 2007. Auparavant, il en avait été l'administrateur délégué pendant pas moins de
dangereux de généraliser les critiques à 36 ans. La famille propriétaire de Ter Beke lui avait en effet confié la direction opéra-
l'ensemble des chefs d'entreprise." Mal- tionnelle de l'entreprise en 1971, alors qu'il était à peine âgé de 26 ans... Son 'règne'
gré ce point noir, Luc De Bruyckere est a toutefois connu une petite interruption d'une année en 2000-2001 : après avoir
cédé le flambeau d'administrateur délégué à Johnny Thijs pour devenir président du
optimiste quant à l'émergence d'une
conseil, Luc De Bruyckere a repris quelques mois plus tard les rênes de l'entreprise,
nouvelle génération de CEO. "Il n'y a
son successeur ayant entre-temps cédé aux sirènes de La Poste.
aucune raison de craindre pour la relève.
36 ans, n'est-ce tout de même pas un peu long ? "J'ai toujours été appelé à explo-
Il sera toutefois important de vérifier que rer de nouveaux horizons et à relever de nouveaux défis. Ma chance a été de pou-
les candidats CEO ne disposent pas uni- voir transformer Ter Beke d'une petite entreprise locale en une entreprise moyenne
quement des bons diplômes et des com- cotée en bourse. Le chiffre d'affaires est passé de 2,5 millions à 400 millions d'euros.
pétences techniques, mais surtout des Et les effectifs, de 30 personnes à 2.800 employés répartis sur 10 sites, en Belgique,
qualités et des aptitudes nécessaires. Car en France et aux Pays-Bas", rappelle fièrement Luc De Bruyckere, qui se fait volon-
on attend toujours plus d'eux."  tiers philosophe pour faire l'éloge de sa longévité : "Vous savez, certains cherchent
toute leur vie le chemin vers le bonheur alors que le chemin, c'est le bonheur".
OF

Bernard Delvaux, CEO de Sonaca


“Je ne crois pas aux CEO qui font tout tout seuls”
La conception du métier de CEO se forge aussi au contact de 'grands patrons' côtoyés au cours
d'une carrière. Pour Bernard Delvaux, qui a passé 5 ans à la direction de Belgacom puis de La
Poste, feu John Goossens mais aussi Johnny Thijs ont été des modèles. L'actuel patron de
Sonaca, qui se qualifie de ‘manager de transformation’, a également un avis éclairé sur l'attitu-
de du CEO face aux syndicats.

“J
ohn Goossens et Johnny Thijs respirations en dehors de leur travail et qui savent séparer vie
étaient ou sont des exemples de privée et vie professionnelle", résume le CEO de Sonaca. Si la
patrons qui savent réellement conjoncture très difficile complique bien évidemment la tâche
écouter et qui, de ce fait, valorisent leurs à de nombreux CEO (et Bernard Delvaux ne voit pas d'amé-
interlocuteurs. Des patrons qui savent lioration significative pour l'emploi avant fin 2011), la crise a,
faire preuve d'une véritable empathie. selon lui, au moins cet avantage de ramener certains actionnai-
Leur deuxième force est de savoir créer res à la raison : non, "the sky is not the limit", la croissance à
une équipe autour d'eux et de la moti- deux chiffres n'est pas infinie et oui, le CEO peut échouer.
ver. Ils apprécient les gens qui prennent
des risques. Je ne crois pas aux CEO qui Dès lors qu'il s'agit de transformer l'entreprise, parfois doulou-
font tout tout seuls. Enfin, ce sont des per- reusement, pour l'adapter à un nouvel environnement, le CEO
sonnalités fortes mais qui savent prendre du doit plus que jamais être un excellent communicateur. "Les tra-
recul par rapport à leur métier, qui ont des vailleurs ont besoin d'une perspective et cette perspective
n'est pas uniquement le cours de bourse. Le CEO doit proje-
ter un avenir et communiquer ouvertement aux travailleurs à
propos de l'avenir de l'emploi, de l'évolution des compéten-
Le CEO n’est plus ce qu’il était ces, etc. Cette communication et les actions qui l'accompa-
Evolutions positives gnent doivent être cohérentes pour que le lien émotionnel
- La crise nous rappelle qu'un CEO peut échouer avec l'entreprise ne soit pas brisé par le processus de transfor-
- Le reporting informatique aide le CEO à prendre des décisions clés très vite mation", explique Bernard Delvaux.
Evolutions négatives
- Difficulté grandissante chez certains à séparer vie privée et vie professionnelle Contacts informels avec les syndicats
- Tendance dans le monde syndical à ne plus se préoccuper que du court terme
Ces dix dernières années, il a mené de larges restructurations
et plans sociaux, autant chez Belgacom et à La Poste que, en

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

“Gérer le succès ne m'amuse pas”


A même pas 45 ans, Bernard Delvaux a déjà Poste, dont il prend la direction de la division ralisation des télécoms, il a dû moderniser La
connu les sommets de trois entreprises qui ont 'courrier', avec la mission de stopper l'hémorra- Poste face à la montée en puissance de l'inter-
comme point commun d'avoir l'État comme gie financière. Moins de 5 ans plus tard, il surp- net et la concurrence croissante. “Ce manager
actionnaire principal. Après avoir démarré sa rend à nouveau tout le monde en relevant le de transformation”, comme il se qualifie lui-
carrière chez Cockerill-Sambre (Tôleries Delloye défi de dynamiser Sonaca, leader mondial mais même, a dû mener de profondes restructura-
Matthieu), il gagne ses galons de consultant en proie à des problèmes de productivité. tions, avec des milliers d'emplois passés à la
chez Mc Kinsey. Il rejoint ensuite Belgacom, où "Gérer le succès ne m'amuse pas. Je crois trappe. Chez Sonaca également, dont il est
il grimpe les échelons pour devenir vice-prési- qu'un CEO doit se poser la question de son CEO depuis un an et demi, un plan social a été
dent exécutif de la division ‘réseaux fixes’ et départ éventuel après 4 ou 5 ans. Il y a des inévitable l'automne dernier. Bernard Delvaux a
membre du conseil de direction du groupe. Il patrons qui conviennent bien pour gérer la donc une large expérience de la concertation
restera 5 ans chez l'opérateur télécom. "C'est croissance. Il y en a d'autres qui gèrent mieux le sociale, dont il tire quelques enseignements à
ensuite que mes choix vont me faire passer retournement." Bernard Delvaux se situe dans destination des CEO (lire ci-dessous). "Ce qui
pour fou auprès de mes proches", ironise le la deuxième catégorie. Après avoir vécu de me motive en définitive ? Le projet ou la qualité
Liégeois. En 2004, il décide de rejoindre La près l'entrée en bourse de Belgacom et la libé- de l'équipe. Et la capacité à avoir de l'impact."

automne dernier, chez Sonaca. Il en tire trois leçons sur l'attitude personnelles avec les leaders syndicaux. Je suis un grand partisan
du CEO comme acteur de la concertation sociale. "Première- des contacts informels. Même si cela n'empêche pas qu'à un
ment, le CEO doit avoir une histoire à raconter, du contenu et pas moment donné, un patron doit savoir dire non. Le cadre doit être
de vagues formules. Il doit la communiquer le plus possible par très clair et il faut s'y tenir. Troisièmement, il faut pouvoir se met-
voie directe. A La Poste, nous avons tenu avec Johnny Thijs 2 x tre à la place de son interlocuteur."

“à raconter
Le CEO doit avoir une histoire
et doit la communiquer
Le monde syndical s'est-il radicalisé ? "Je ne dirais pas cela. Mais
je m'inquiète du fait que certains syndicalistes, comme certaines
entreprises d'ailleurs, ne se préoccupent plus que du court terme
et jugent que tout ce qui est bon à prendre doit être pris. Cette
le plus possible par voie directe” réaction s'explique par le fait qu'ils sentent qu'ils perdent,
comme les hommes et femmes politiques, la possibilité d'in-
600 meetings, en laissant la place à des 'questions-réponses' fluencer sur la vie économique à long terme. 'Pourquoi se battre
frontaux. Plus c'est animé, plus les gens apprécient. Deu- pour modérer les salaires si l'entreprise peut quand même délo-
xièmement, il faut prendre le temps d'établir de bonnes relations caliser demain', entend-on." 
OF

Luc Missorten, CEO de Corelio


“Une bonne imbrication entre direction et conseil
d’administration est cruciale”
Luc Missorten, CEO de Corelio, prône une étroite coopération entre, d’un côté, les cadres dirigeants et, de
l’autre, le conseil d’administration. “L’équipe de management doit être étroitement impliquée dans la
stratégie à long terme de l’entreprise et le conseil d’administration doit avoir un contact avec la direc-
tion au quotidien.”

“L
a pression exercée sur le CEO a fortement augmenté dre une série de décisions négatives : faire
ces dernières années”, estime Luc Missorten. “Sur- des économies de coûts par exemple. Il
tout depuis la crise économique. On attend du capi- est aujourd’hui difficile pour un directeur
taine qu’il guide le navire dans la tempête. Ce qui complique les général de réaliser les restructurations
choses, c’est que l’on est confronté en permanence à plusieurs nécessaires, d’une part, et de continuer
facteurs négatifs. La proportion de mauvaises nouvelles est plus à se concentrer sur le potentiel de crois-
importante que celle de bonnes nouvelles. Et cela oblige à pren- sance, d’autre part. C’est comme si

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EN COUVERTURE Le CEO anno 2010

Le CEO n’est plus ce qu’il était du CEO est variable. Plus la carrière évolue, plus l’élément salaire
diminue et plus l’élément rémunération du risque augmente. Il
Evolutions positives
n’empêche que les rémunérations exorbitantes sont inadmissibles,
- La barre est placée plus haut qu’autrefois
- L’indignation suscitée par les parachutes dorés exorbitants surtout en cas de mauvaises performances. Par ailleurs, je trouve
Evolutions négatives bon que les cadres dirigeants acquièrent une participation dans
- Les CEO sont parfois jugés injustement l’entreprise. Cela engendre une rémunération supplémentaire,
- Trop de règles autour des bonnes pratiques de gouvernance mais seulement lorsque l’entreprise engrange de bons résultats.”
Les CEO sont de plus en plus vite et de plus en plus souvent jugés
sur les résultats qu’ils réalisent. “Je ne vois là rien de mal en soi,

“surC’est comme si l’on devait appuyer


le frein et sur l’accélérateur à
mais il faut que cela reste juste. Si l’on veut que l’entraîneur d’une
équipe de hockey sur glace obtienne de bons résultats, il faut lui
fournir du bon matériel. C’est aussi valable pour une entreprise et
c’est pourquoi je préconise une bonne interaction entre le conseil
la fois” d’administration et le management.” 
Luc Van Aelst
l’on devait appuyer sur le frein et sur l’accéléra-
teur à la fois. Cela requiert une bonne commu-
nication, sinon on transmet aux salariés de
mauvais signaux.” Missorten préfère les ‘produits frais’
Luc Missorten, 54 ans, a débuté sa carriè- souvent le cas dans une entreprise en
Les bonnes pratiques de gouvernance sont une
re au sein du cabinet d’avocats Linklaters croissance rapide, il y a eu à un certain
bonne chose aux yeux de Luc Missorten, mais il
puis chez Citibank. Il a ensuite successive- moment un changement à la tête de l’en-
ne faut pas exagérer. “En matière d’éthique ment été directeur financier chez Interbrew treprise. Le nouveau management a placé
d’entreprise, je crois assez dans l’autorégula- (aujourd’hui AB InBev) et UCB. Chez Core- certains accents que je n’approuvais pas.
tion. Il faut être convaincu que le cœur même lio, éditeur entre autres de De Standaard Cela a pesé sur ma motivation.”
de l’entreprise est en règle au niveau des va- et Het Nieuwsblad, il endosse pour la pre- UCB est une tout autre histoire : “Les pro-
leurs et des principes puis irradier vers le reste mière fois la fonction de directeur général. cessus de l’industrie pharmaceutique sont
de l’organisation. Mais je ne sais pas si c’est une “Après avoir travaillé dix ans chez Citi- très longs. Douze ans, voire plus, peuvent
bonne chose de vouloir tout renfermer dans bank, j’ai été approché par un chasseur de s'écouler avant qu’un produit ne passe de
des règles et réglementations.” têtes pour assumer la fonction de direc- la conception à la commercialisation. Mais
teur financier chez Interbrew. L’industrie je préfère les ‘produits frais’, les produits
m’attirait plus que le secteur bancaire. sur lesquels on peut influer rapidement.
Que pense Luc Missorten des nombreux débats
Chez Interbrew, j’ai vécu la transformation Lorsque l’occasion s’est présentée de tra-
publics au sujet de la rémunération des CEO ?
d’une petite entreprise occidentale locale vailler dans le secteur des médias, je n’ai
“D’un côté, je trouve que c’est une forme de
en un acteur mondial. Mais, comme c’est pas réfléchi longtemps.”
voyeurisme. Les gens oublient souvent par ail-
leurs qu’une bonne partie de la rémunération

Portrait-robot du top manager en dix traits


L’
institut de sondage Dedicated Research contre 22% 'le dépassement de soi' et 18% 'la conjoint(e), 40% préfèrent 'choisir' seuls.
s'est livré, auprès de 5.000 CEO d'en- notoriété/réputation'. 8 Altruisme : 63% des CEO font du bénévolat
treprises et administrations publiques 4 Sport : Seuls 52% des topmanagers pra- (association culturelle, œuvre caritative, etc.) et
belges, à une enquête en ligne sur 'le profil et tiquent un sport. Essentiellement le vélo et le quelque 40% ont entre 5 et 10 amis (soit plus
le style de vie des top managers belges'. 302 jogging, le golf ne vient qu'en 5e position que la moyenne belge, proche de 3).
d'entre eux y ont répondu : 84% sont des hom- (12%). 9 Sommeil : La moitié des CEO dorment 7
mes, 54% disposent d'une formation en éco- 5 Congé : 5 semaines de congé, c'est ce que heures par nuit, 95% dorment entre 6 et 8 heu-
nomie et 62% sont trilingues. s'octroient 47% des répondants. En moyenne, res par nuit.
les CEO prennent 4,4 semaines par an, plus 3 10 Tâches quotidiennes : Elles ne sont pas
1 Famille : 94% des répondants sont mariés minis-trips. leur tasse de thé. 26% assurent les devoirs des
ou en couple, contre 6% de célibataires. 25% 6 Culture : Le CEO n'est pas un trend-setter. Il enfants et font les courses, 22% font la vais-
ont 3 enfants (soit plus que la moyenne belge). lit 10 livres par an en moyenne (moins de 2 selle…et seuls 5% le repassage. A noter : les
2 Conviction/idéologie : 35% se déclarent pour la population entière). Il va plus régulière- 16% de femmes interrogées ont répondu 'oui'
d'obédience catholique et 54% athées ou laïcs. ment au cinéma, au théâtre et au concert. à presque toutes les questions de cette
3 Motivation au travail : 56% des CEO épin- 7 Shopping : Le patron aime le shopping ves- rubrique !!!
glent en premier lieu 'la trajectoire de l'entre- timentaire : il en fait 4,6 fois par an en moyen-
prise', 48% 'le bien-être des collaborateurs', ne. 53% des CEO se font accompagner de leur Pour plus d'infos : www.dedicated.be
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Le CEO anno 2010 EN COUVERTURE

Pourquoi les salaires des CEO ont grimpé

La rémunération variable, désormais


une composante structurelle du package salarial
La transparence accrue sur les salaires et la complexification des tâches font grimper la rémunération
des CEO. Ils sont en outre de plus en plus payés en fonction de leurs prestations. La partie variable du
salaire est dès lors devenue plus importante.

L
es patrons d’entreprises cotées en tion et les responsabilités plus éten-
Bourse ont comme tout le monde res- dues que doivent assumer les diri-
senti la crise économique dans leur por- geants d’entreprise. “Alors qu’il y a
tefeuille personnel. Pour 2008, il ressort d'une quinze ans, les entreprises du Bel 20
enquête réalisée par la Vlerick Leuven Gent étaient principalement actives au
Management School et GUBERNA que la ré- niveau local et régional, leur rayon
munération cash totale des CEO d’entrepri- d’action s’est nettement élargi, et
ses belges cotées en Bourse a en effet dans la plupart des entreprises opèrent
l’ensemble baissé d’un tiers par rapport à maintenant au niveau mondial. Le
2007. Mais cette baisse n'a été que temporai- rôle des cadres dirigeants est dès
re, comme il ressort d’une analyse des salaires lors plus complexe et les responsabili-
des CEO des entreprises du Bel 20, basée sur tés plus lourdes. La globalisation fait
les rapports annuels relatifs à 2009. Le packa- également en sorte que le champ de recru- tionnaire. Tandis que la rémunération varia-
ge salarial a l’année dernière de nouveau tement est devenu plus large. On recher- ble était jadis plutôt une récompense pour
grimpé de pas moins de 20% en une prestation supplémentaire, elle est de-
moyenne.
“d’entreprise
Les rémunérations des dirigeants
belges se situent
venue aujourd’hui un élément structurel du
package salarial. Et c’est là un phénomène
Moyenne du peloton universel”, affirme Marcel Rottiers.
européen aujourd’hui à peu près au milieu
“Le package salarial des cadres di- La part plus importante de la composante
rigeants a ces dix à quinze dernières du peloton européen” Marcel Rottiers salariale liée à la prestation dans le package
années clairement surpassé l’infla- salarial total explique également en partie
tion”, affirme Marcel Rottiers, managing che des cadres dirigeants non seulement pourquoi les salaires des cadres dirigeants
consultant de Towers Watson Belgique. Il y a sur le marché du travail belge, mais aussi en ont augmenté. “La rémunération variable
plusieurs explications à cela. Les salaires des dehors. Et ceci explique aussi pourquoi les est une arme à double tranchant. Si les ré-
cadres dirigeants font ces dernières années salaires des cadres dirigeants belges ont sultats d’exploitation sont décevants, le bo-
l’objet d’une plus grande transparence. De- augmenté. Les cadres dirigeants étrangers nus est lui aussi plus modeste”, signale Mar-
puis 2005, le Code belge de gouvernance ont généralement des attentes salariales cel Rottiers. "L’idée sous-jacente est que si
d’entreprise stipule que les entreprises cotées plus élevées”, précise Marcel Rottiers. les actionnaires font du bénéfice, le diri-
en Bourse doivent rendre publics les salaires geant d’entreprise peut lui aussi en profiter,
du CEO et des autres membres du manage- Rémunération liée à et inversement.”
ment exécutif. “L’accroissement de la trans- la prestation Marcel Rottiers ne s’attend pas à ce que la
parence, non seulement chez nous, mais aus- Non seulement les salaires ont augmenté, nouvelle loi en matière de bonne gouver-
si dans d’autres pays européens, a conduit à mais l’architecture du package salarial n’est nance modifie substantiellement la structure
un alignement des salaires des cadres diri- plus comparable à celle d’il y a dix ou quin- du package salarial. “Seules les modalités
geants. Autrement dit, les pays où les cadres ze ans. “Une partie substantielle du salaire changeront. La nouvelle loi impose, entre
dirigeants étaient moins bien rémunérés ont est liée à la prestation et donc variable. On autres, d’étaler le paiement des bonus an-
rattrapé leur retard. Il ressort par exemple de opère encore dans cette partie variable une nuels dans le temps. L’obligation de joindre
nos enquêtes que les rémunérations des diri- distinction entre les bonus à court et à long un rapport de rémunération au rapport an-
geants d’entreprise belges se situent aujour- terme. Les bonus à court terme, les bonus nuel ne fait qu’augmenter la transparence
d’hui à peu près au milieu du peloton euro- annuels, sont greffés sur des critères opéra- entourant la rémunération, ce qui permet
péen”, affirme Marcel Rottiers. tionnels. Les bonus à long terme, comme d’éviter les excès. Et c’est là l’objectif princi-
Un autre motif, plus important, de la hausse les (options sur) actions et les bonus cash, pal de la nouvelle loi.” 
des salaires, est la complexification de la fonc- sont liés à la création de valeur pour l’ac- Hilde Vereecken

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BUSINESS Grand format


© Photonews

Les CEO ne se sont jamais autant montrés


Une étude réalisée début de cette année par la société mondiale pas moins de 96% entre 2007 et 2009. Les patrons des grandes mul-
de relations publiques Weber Shandwick a indiqué que la présence tinationales, particulièrement dans le secteur financier, ne se sont
de CEO parmi le gratin des conférences mondiales a augmenté de jamais autant pressés pour intervenir comme orateurs à différents

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Grand format BUSINESS

sommets et y rencontrer le gratin de la politique, voire s’y affi- (notre photo), sommet orchestré par l'ex-président américain et
cher avec des stars du show-business. Une preuve de plus, qui a lieu chaque année fin septembre à New York. Viennent
comme nous le soulignons dans notre dossier de ce mois, que ensuite le Chief Executive Club de Boston et le Wall Street
le CEO de l'an 2010 se doit d'être multifacettes et excellent Journal CEO Council. Le World Economic Forum de Davos, seul
communicateur. ‘The place to be’ absolu pour les CEO, selon le européen du top 5, arrive en 4e position. 
classement de Weber Shandwick, est la Clinton Global Initiative

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BUSINESS L’interview

C'est un Didier Bellens par-


ticulièrement décontracté
et disert que nous rencon-
trons ce 14 avril. Le fait
qu'il vient d'être 'blanchi',
en assemblée générale,
pour une affaire de suspi-
cion de délit d'initié (achat
d'actions Telindus en 2005)
y est sans doute pour quel-
que chose. Tout comme le
fait d'avoir bouclé une an-
née 2009 avec un bénéfice
en hausse de 13% malgré
la crise économique et de
pouvoir verser de solides
dividendes à l'Etat action-
naire. Ajoutez-y le succès
de Belgacom TV (son bébé)
et vous comprendrez que
l'homme a de quoi parader
et ne s'en prive d'ailleurs
pas. A la tête du 3e em-
ployeur du pays depuis
2003, Didier Bellens sait
toutefois que savourer ne
veut pas dire s'endormir sur
ses lauriers. Logiquement
évasif quant au timing de
potentiels développements
stratégiques intrigants
(expansion internationale,
lancement dans l'électricité
verte ?), il se fait plus conc-
ret pour parler de la priori-
té absolue pour 2010 : la
satisfaction 'client' de bout
en bout.
© D. Rys

Didier Bellens
Age : 54 ans
Formation : ingénieur commercial Solvay (ULB)
Carrière : Deloitte & Touche, consultant (1978-1981);
Groupe Bruxelles Lambert, directeur financier (1981-

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L’interview BUSINESS

Didier Bellens, CEO de Belgacom

“Je rêve d’un écran de TV qui ressemble


à l’interface d’un iPhone”

Q
uelle est votre priorité pour les pour l'innovation et la qualité de nos techno- que des containers soient bloqués pendant
prochains mois ? logies. L'attention extrême pour le service au quinze jours, des entreprises seront prêtes à
client vient en sus.” débloquer des moyens …
“Après une année 2009 'au-delà de nos es- Enfin, sur le marché des particuliers, nous
pérances' en termes de performances finan- Quels sont les moteurs de croissance que pensons que le taux de pénétration de la lar-
cières, notre priorité numéro 1 est la satisfac- vous identifiez pour les années futures ? ge bande fixe va passer à 80 voire 90% de la
tion client de bout en bout. Une priorité qui “Dans le monde des entreprises, je vois un population (ndlr : contre moins de 30% en
n'est donc pas purement financière mais qui potentiel de croissance gigantesque pour la 2008) sous l'impulsion des nouvelles généra-
est très appréciée par l'ensemble des équi- communication ‘machine-to-machine’. Tous tions 'nourries à l'internet et au 'gaming' ainsi
pes, qui ont vécu beaucoup de transforma- les containers qui devront passer en douane que de la TV interactive.”
tions positives ces 10 dernières années.” devront être identifiés électronique-

“On veut rentrer dans un


ment et les données transférées. Une
Qu'est-ce qui est à améliorer prioritaire- bonne communication ‘machine-to-
ment ? machine’ permettra d'assurer une
“On ne suit pas assez bien en interne le che- meilleure traçabilité des marchandi-
cercle vertueux du premier
minement du client à travers nos différents ses en faisant gagner du temps à tout contact jusqu'à la facture”
services. En cas de problème, le client est le monde. Je crois aussi au potentiel
obligé de rappeler au point d'entrée (le call du ‘cloud computing’ : pour des rai-
center), d'où engorgement. On veut rentrer sons de simplicité et de sécurité, les applica- A propos de TV interactive, quelle sera la
dans un cercle vertueux du premier contact tions et les données informatiques ne seront prochaine étape pour Belgacom TV ?
jusqu'à la facture, que nos clients sont d'ail- plus hébergées en local chez l'entreprise, “Une plate-forme 'entertainment', plus large
leurs en droit de mieux comprendre. Cela si- mais sur un serveur chez un tiers et les em- que la télévision, qui inclut la musique, le jeu
gnifie des investissements en ressources hu- ployés pourront y accéder de façon sécurisée interactif et éducatif, etc. Je rêve de me trou-
maines mais aussi en informatique. J'ai nom- de n'importe où et avec n'importe quel ter- ver face à un écran de TV qui ressemble à l'in-
mé quelqu'un du comité de direction pour minal. Ce sera intéressant pour les entrepri- terface d'un iPhone. Réussir le mariage entre
porter ce projet de qualité du service de ses, mais aussi pour les particuliers. Il y a là la TV et l'internet et la téléphonie mobile. ”
bout en bout. Il s'agit de Scott Alcott, le res- toute une série de nouveaux services à offrir,
ponsable pour le 'service delivery' et l'IT. Il qui permettent de fidéliser le client et pour Belgacom TV compte près de 800.000 abon-
doit répondre à une série d'objectifs mesura- lesquels il est prêt à payer un petit peu plus. nés. Qui croyait réellement que Belgacom
bles que nous suivons très régulièrement et Belgacom veut également répondre à des aurait pu atteindre ce chiffre il y a cinq ans,
pour lesquels nous espérons cette année-ci besoins spécifiques pour la Justice, les soins lors du lancement ?
avoir des retombées. ” de santé, etc. Il y a des gens de très grande “Personne sauf... moi. Rappelez-vous que l'ob-
qualité dans nos administrations, avec une vi- jectif ultime que j'avais annoncé à l'époque
Est-ce que ce focus sur la qualité du servi- sion. Ils ne disposent pas nécessairement des était 50% de parts de marché, donc 2 millions
ce va vous faire ralentir le rythme de lan- moyens financiers, mais peuvent conclure de clients grosso modo. Je sais qu'un concur-
cement de nouveautés ? des partenariats. Les douanes, par exemple, rent, pour lequel j'ai par ailleurs beaucoup de
“Non, pour le reste, c'est 'business as usual' n'ont pas d'argent mais si c'est pour éviter sympathie (ndlr : allusion à Daniel Weekers,
patron de BeTV) prédisait, que lors d'un match
de foot sur BelgacomTV, le ballon serait carré
et la pelouse bleue … C'était très créatif de sa
1985); Pargesa-Holding à Genève, directeur Style de management : être présent, écou- part d'imaginer des stades avec des pelouses
général adjoint (1985-1992); retour chez ter, prendre des décisions et en assurer le bleues, mais on n’y est pas encore …”
Groupe Bruxelles Lambert comme adminis- suivi. Je suis favorable à une large déléga-
trateur délégué (1992-2000); RTL Group, tion, sauf en ce qui concerne les contacts Quand pensez-vous atteindre ces 2 millions
administrateur délégué (2000-2003) et CEO stratégiques extérieurs et les nouveaux
d'abonnés pour la TV ?
de Belgacom depuis 2003 développements.
“La progression actuelle est très satisfaisante.
Il faudra encore une certaine période... Com- 

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BUSINESS L’interview

 me notre part de marché pour les conne-


xions à large bande est supérieure à 50%, je
pars du principe que chaque client 'large
bande' devrait prendre tous ses services chez
nous. Je crois en la vente couplée, assortie
de 'discounts' …”

Pour autant que la relation cliente soit im-


Devise
peccable … personnelle
“Exact. D'où notre priorité absolue à la satis-
faction 'client' de bout en bout.” “La vie est trop
courte”
Petite parenthèse historique : combien de
temps a mûri cette décision de s'engager
dans la télévision ?
“Pas longtemps. Je suis arrivé en mars 2003.
La première grande décision que j'ai fait pas-
ser au conseil d'administration était l'élargis-
sement du réseau, avec pour objectif de se
lancer dans la télévision. Pour moi, la télé fait
partie de notre métier. On vend du service et
pas de l'accès. Car si on ne vend que de l'ac-
cès, les câblo-opérateurs vont forcément ga- ans déjà. La rentabilité est stricto sensu plus En septembre, l'État va vendre aux en-
gner car eux vendent du service. La part de faible que celle générée par l'envoi des chères les licences de téléphonie mobile
marché télé des câblo-opérateurs était de SMS, mais ce serait une grosse erreur stra- 4G. Belgacom est logiquement intéressée.
100%. On est arrivé avec la volonté de leur tégique que de se limiter à des business du Qu'est-ce que cette technologie va chan-
prendre 50%. Vous savez, on nous reproche passé parce que les marges y sont plus ger pour les entreprises ?
souvent d'avoir été 'monopolistiques' dans importantes.” “La largeur de bande sera encore supérieure.
le secteur des télécoms. Mais tout le monde La 4G sera un facilitateur pour le 'cloud com-
a été à un moment monopolistique. Pour le Belgacom va-t-elle vendre de l'électricité puting' dont j'ai parlé précédemment. Pour
moment, les câblo-opérateurs le sont tou- verte ? (ndlr : un article dans Le Soir début le reste, chacun puisera ce qu'il veut dans
jours pour la télédistribution analogique et, mars avait fait état d'une volonté de l'o- cette nouvelle technologie, que ce soit au
plus largement, ils ne sont toujours pas régu- pérateur de se lancer sur ce marché) niveau professionnel ou privé, ou d'ailleurs
lés comme nous le sommes.” “Nous nous intéressons à ce marché comme parfois un peu des deux. La 4G permettra
source potentielle pour de nouveaux servi- par exemple encore plus facilement à l'hom-
Les Pays-Bas ont étendu cette régulation ces que nous pourrions offrir à nos clients, me ou la femme d'affaires à l'étranger de res-
au champ des câblo-opérateurs. Voyez- mais ne comptez pas sur moi pour faire état ter en contact avec sa famille, en échangeant
vous des signes en ce sens chez nous ? de projets concrets à ce stade. Tout ce que je des photos, des impressions, etc.”
“Vous savez, nous vivons dans un pays où les peux dire, c'est que Belgacom envoie cha-
choses avancent très lentement. Mais je crois que mois des factures à des centaines de La 4G arrive, mais le paysage actuel de la
que cela va se faire.” milliers de ménages en Belgique (ndlr : sous- téléphonie mobile (3G) va également chan-
entendu, ce contact avec une large clientèle ger, avec l'arrivée attendue cet automne
Que pèse Belgacom TV dans votre chiffre fait que Belgacom n'aurait pas trop de diffi- d'un 4e opérateur …
d'affaires et votre rentabilité ? cultés à vendre des services de tiers). En ou- “C'est un choix politique, à la fois budgétai-
“Les revenus de Belgacom TV se situent au- tre, nous sommes déjà le plus gros acheteur re (ndlr : l'Etat espère récolter quelques dizai-
tour de 240 millions d'euros par an, ce n'est d'électricité verte du pays. Au lieu d'acheter, nes de millions de la mise aux enchères de
tout de même pas négligeable sur un chiffre n'aurions-nous pas intérêt à produire nous- cette 4e licence 3G) et populiste, car on dit
d'affaires total de 5,99 milliards d'euros. mêmes cette énergie, voire à produire pour qu'une 4e licence va doper la concurrence et
Nous avons réussi à créer d'autres ? Je me pose la question et nous faire baisser les prix, alors qu'on constate en
une magnifique PME bel- sommes occupés à l'étudier. Tout est ques- Angleterre, aux Pays-Bas, au Portugal ou en
ge, rentable depuis deux tion de timing…” Suisse, que le nombre d'opérateurs s'est na-

Belgacom Aujourd'hui, Belgacom totalise plus de 5 millions de clients mobiles, 1,52


million de clients à large bande et environ 800.000 abonnés à Belgacom TV
Activités : D'opérateur historique, Belgacom est devenu Personnel (2009) : 16.804 équivalents temps pleins
– grâce à l'intégration de filiales telles que Proximus, Chiffre d’affaires consolidé (2009) :
Telindus, Scarlet et Skynet – un fournisseur de services de 5,99 milliards EUR (en hausse de 0,2% par rapport à 2008)
télécommunication intégrés. Ses premières offres grou- Bénéfice net : 904 millions EUR (en hausse de 13% par rapport à 2008).
pées combinant téléphonie fixe/mobile, ADSL et télévision datent de 2007
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L’interview BUSINESS

turellement réduit. Il n'y a bien fait de se concentrer sur l'innovation en Certains collaborateurs ont suivi jusqu'à 4 ou
qu'en Belgique et en France Belgique. Il y a un temps pour tout. Nous res- 5 formations sur des périodes relativement
qu'on veut passer de 3 à 4. On tons attentifs à d'éventuelles acquisitions, courtes. Il faut pouvoir les accompagner.”
va à l'inverse de l'histoire. Plus tout en sachant qu'il y a peu d'intérêt à rache-
on multiplie le nombre d'ac- ter un autre opérateur européen, avec la mê- Les événements chez France Télécom
teurs, moins chacun investit me croissance et les mêmes contraintes régu- (ndlr : crise sociale à la suite d'une succes-
dans le service.” latoires. C'est autre chose dans les pays sion de suicides) vous ont-ils amené à
émergents, mais il faut alors trouver un pays prendre des actions particulières ?
Prévoyez-vous qu'un jour, et un opérateur avec lequel les différences “Nous avons une communication ouverte
une telle licence puisse être culturelles ne sont pas trop fortes.” avec les syndicats sur la notion de flexibilité,
attribuée à un opérateur in- sur des questions comme l'outsourcing, etc. Il
dien, chinois ou brésilien ? Belgacom est déjà plus présente qu'on le faut être capable de parler du stress. Nous
“Une récente visite en Inde croit à l'international, via BICS, le 'carrier' mesurons la satisfaction de nos employés, qui
m'a fait découvrir que les opé- international (une entreprise qui achemine était d'ailleurs au plus haut en 2009. Il faut res-
rateurs locaux s'intéressent du trafic télécom pour d'autres opérateurs) ter attentif. Je rencontre régulièrement les
surtout à l'Afrique. S'intéresse- contrôlé à 57,6% par Belgacom, 22,4% par syndicats, en dehors de l'agenda officiel. On
ront-ils ensuite à l'Europe ? Swisscom et 20% par le sud-africain MTN… apprend ainsi énormément de choses sur ce
Honnêtement, je n'en sais rien. “BICS a connu une très belle croissance de qui vit dans l'entreprise.”
En tout cas, l'Europe ne pré- 10% en 2009 et a étendu sa collaboration
sente plus de potentiel de avec l'opérateur Sud-Africain MTN. BICS bé- Diriger une entreprise contrôlée à 53% par
croissance très important pour néficie d'une explosion des appels internatio- l'Etat... Quels en sont les bons et mauvais
la téléphonie, vu notamment la naux, même si les prix sont sous pression. côtés ?
décision des régulateurs de faire baisser les Nous sommes à présent 4e mondial dans ce “Au niveau de la gestion courante, il n'y a pas
tarifs de terminaison (ndlr : les frais d'achemi- secteur, derrière Verizon, AT&T et l'indien de différences notables. Pour le reste, le
Bharti. Cette activité est en outre sy- renouvellement de mon mandat a donné lieu

“politique e
La 4 licence, c’est un choix
à la fois budgétaire
nonyme d'un large réseau de con-
tacts en Afrique et au Moyen Orient. Il
y a maintenant une forte attente du
à des jeux troubles, peu envisageables dans
une entreprise privée. Le fait même de ce
mandat, pour six ans, est intéressant et serait
groupe pour que BICS ouvre aussi même à méditer par certaines grandes entre-
et populiste” des portes en Asie.” prises privées. Un contrat à durée déterminée
éviterait que certains CEO restent accrochés
nement d'un appel sur le réseau d'un autre Les rémunérations des patrons du Bel20 à leur poste pendant plus de 20 ans.” 
opérateur). En 2003, le tarif de terminaison ont à nouveau fait les gros titres. Ne pen- Olivier Fabes
était de 19 eurocents. Il est à présent de 1 sez-vous pas qu'il faudrait définir un cadre
eurocent. Peu d'industries ont dû ainsi digérer pour la part de rémunération variable par
une telle diminution de leurs revenus imposée rapport au salaire fixe ? LE MOIS PROCHAIN
par le régulateur. Si les opérateurs de pays “Ma philosophie est simple : si vous voulez
émergents viennent en Europe, ce ne sera avoir des bonnes personnes, avec une vision La famille Kumpen compte parmi les
dons pas pour chercher la croissance. Par stratégique et la capacité d'implémenter cet- pionniers de la nouvelle industrie lim-
contre, ils peuvent être tentés d'acheter du te vision, il faut pouvoir les payer pour les mo- bourgeoise d'après-guerre. C'est aujour-
tiver. C'est une décision stratégique de l'en- d'hui la troisième génération qui est aux
'cash flow' relativement bon marché et de la
commandes, en la personne d'Anthony
compétence.” treprise, qui ne concerne d'ailleurs pas uni-
Kumpen, jeune entrepreneur et admi-
quement le CEO mais l'ensemble du comité
nistrateur du fabricant de vélos de course
Pensez-vous que, comme il y a eu par le de direction, et qui tient compte du marché
Ridley, à Paal-Beringen. Depuis 2009, son
passé des actionnaires américains dans Bel- et des 'concurrents' à l'échelle européenne.”
entreprise a pris une confortable long-
gacom, il pourrait y avoir bientôt des ac-
ueur d'avance sur le peloton de tête des
tionnaires chinois ou indiens ? Mais sur la proportion du salaire variable ?
fabricants belges de vélos. “Jusqu'ici, la
“Je ne crois pas. Mais on ne peut pas écarter “Je crois qu'il faut un salaire variable. Je n'ai crise ne nous a pas atteints.” Ses ingé-
que certains appétits se manifestent d'une pas de point de vue par rapport au pourcen- nieurs se penchent à présent sur un con-
façon ou l'autre, vu notre relative sous-évalua- tage précis que devrait représenter ce varia- cept révolutionnaire de vélo de ville pour
tion et notre excellent cash-flow.” ble, mais il doit faire en sorte que le total navetteurs. Outre le business du vélo, le
reste 'raisonnable' en comparant à une échel- jeune entrepreneur fait aussi bonne im-
Et de votre côté, pourriez-vous procéder à le au moins européenne.” pression comme pilote de course – sa
des acquisitions à l'étranger ? plus grande passion. Vélos de course
“Certains m'ont reproché d'être passé à côté Quel est votre principal défi en matière aérodynamiques et bolides remplissent
d'opportunités internationales. Quand je vois de gestion des ressources humaines ? une bonne part de sa vie. Entre deux
les flops que sont devenues certaines acquisi- “Gérer la pyramide des âges. Et la formation courses, Anthony Kumpen a volontiers
tions à prix d'or en Europe, je me dis qu'on a dans un secteur qui évolue continuellement. libéré un peu de temps pour FORWARD.

MAI 2010 • 47
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BUSINESS Jeunes pousses

Alfin Catering: créateur de tendances


culinaires dans l’événementiel

Passion for food


comme marque de fabrique
L'entreprise gantoise de services de 'restauration créative'
Alfin Catering est devenue en quelques années un parte-
naire de choix pour bon nombre de sociétés actives dans
l’événementiel ainsi que pour toute une série d’entreprises.

La restauration créative
dans l’événementiel devient la priorité

A
u début de cette année, l’équipe Alfin a fusionné avec mai 2007. La croissance fulgurante continue et un an plus tard à
EEB, une société de holding groupant la société belge peine, Alfin enregistre déjà un chiffre d’affaires de deux millions
Gourmet Invent, de Merelbeke, et l’entreprise belgo- d’euros. En septembre 2008, l’équipe déménage avec armes et
française de restauration, Horeto, qui détient une participation bagages vers une ancienne usine de transformation de viande à
majoritaire de 55%. Mais l’intégration n’a rien ôté à la passion Mariakerke, en Flandre orientale. Une surface de production de
de Wim Ballieu (27 ans), le cerveau, le moteur, mais surtout 1.900 m², dont 900 m² réservés à la cuisine. "Nous avions pris
l’inspirateur devant et derrière les fourneaux chez Alfin. conscience qu’un service traiteur de boucherie était une activi-
Le jeune homme a à peine vingt té toute différente de la restauration pour le
ans qu’il dirige déjà la cuisine
du restaurant De Karper, à “d'Al
Intégrez 30% de la culture
fin au groupe de restau-
monde de l’événementiel. J’ai encore le sou-
venir très net du moment où j’ai remplacé les
Machelen, jusqu'à ce qu'il ... se nappes en papier sur les buffets par des nap-
casse le dos en tombant dans ration qui nous chapeaute et pes en lin – aujourd’hui, même le choix de la
les escaliers et doive adopter nous atteindrons le top mon- nappe est un sujet qui donne lieu à de vives
un rythme de vie bien plus cal- réflexions." La restauration créative dans l’évé-
me. "Après ma chute, en 2005, dial dans notre catégorie” nementiel devient la priorité. Jusqu’à aujour-
mes parents décident de lan- d’hui, il s’agit toujours du cheval de bataille de
cer à côté de leur boucherie de Gand une section traiteur où je Wim Ballieu. "Nous occupons-nous encore de fêtes de com-
pourrais déterminer moi-même mon rythme de travail.” munion ? Oui, mais pour 100 invités au moins. À tous les coups,
l’accent se trouve sur l’aspect gastronomique et le côté artisa-
Le dos se rétablit à merveille et rapidement, la carte classique nal. Dans le respect de la cuisine traditionnelle basée sur l’utili-
des plats à emporter et à livrer, s’étend bientôt à des séances de sation de bonnes matières premières et de bons ingrédients,
home-cooking, à du catering business-to-business (b2b) et à nous surfons sur les tendances et les techniques de cuisson les
des réceptions à l’extérieur. Au bout de six mois, le chiffre d’af- plus novatrices. Toutes les recettes, depuis les zakouskis jus-
faires de Wim Ballieu avait dépassé celui de la boucherie. Il qu’au dessert, sont des créations propres. Mais déguster, c’est
achète les immeubles voisins, transforme et rénove la bouche- bien plus que faire bonne chère. L’environnement et l’ambian-
rie de ses parents et fonde Alfin Catering & Events au mois de ce doivent également correspondre aux attentes. C’est pour-

–>
Wim Ballieu se brise le dos et doit abandonner les Alfin Catering & Events débute ses activités en tant
2007
2005

fourneaux du restaurant et les remplacer par une qu’entreprise indépendante. Service traiteur gastronomique
cuisine de traiteur dans la boucherie de ses parents. et artisanal pour des événements, dans un décor original et
un style exclusif.

48 • MAI 2010
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Jeunes pousses BUSINESS

quoi nous nous chargeons également de la Un esprit et une approche


conception de l’événement et de l’intérieur :
aménagement, mobilier, éclairage, musi-
qui soufflent la fraîcheur
que, décoration des tables, et même jus- Wim Ballieu teste chacune
qu’aux tenues du personnel." C’est ainsi de ses décisions importan-
qu’est né Alfin Concept Store, une spin-off tes auprès d’un noyau de
dans laquelle Wim Ballieu et Christophe personnes de confiance,
Verbeke, décorateur d’intérieur, inventent parmi lesquelles Piet
des concepts de plats et de designs hors Lievevrouw, business unit
des sentiers battus. manager chez Imperial
Tufting Company du groupe
La culture novatrice d’Alfin se nourrit de Balta. "Wim est un ami de la
l’apport et de l’enrichissement de ‘congé- maison. Et il s’est déjà occu-


nères’. Ainsi, les bureaux d’architectes et pé d’une de nos fêtes de
Sa créativité famille. Lorsqu’il s’est lancé
les maisons de mode constituent-ils des compense lar- dans l’activité de traiteur,
© www.white-rabbit.be

sources d’inspiration rêvées pour Wim


gement l’une encore tout jeune, j’ai été
Ballieu. "Il en va de même pour les colla-
ou l’autre frappé de voir à quel point
borateurs. Grâce à Alfin Café – un happe- son approche présentait des
ning mensuel de recrutement et de forma- imperfection”
similitudes avec ma vision
tion qui se déroule sur une péniche -, nous du management.
sélectionnons des jeunes gens qui parta- Personnellement, je respecte trois règles d’or :
gent notre ‘passion for food’. De cette ma- faites ce qui n’a encore jamais été réalisé, accor-
nière, nous disposons déjà actuellement dez aux autres le droit de faire des erreurs et
d’un réseau de quelque 70 collaborateurs que nous pouvons accueillir à bord. Et suivez votre instinct. Wim ne se sert jamais de
dans notre Alfin Academy, nous peaufinons en permanence leurs aptitudes en modèles standard. Il écoute avec intensité et
salle ou en cuisine.” invente des concepts qui viennent tout droit de
ses tripes. Il se lance dans la création et ne com-
mence à calculer que par la suite. Sa créativité
De la cuisine à une étoile pour 20.000 invités
compense largement l’une ou l’autre imperfec-
Alfin a-t-elle atteint un palier depuis qu’elle fait partie d’un groupe de 130 colla-
tion. Wim accorde à ses collaborateurs, souvent
borateurs réalisant un chiffre d’affaires de près de 50 millions d’euros (2009) ? "En
jeunes et motivés, la liberté de tirer les ensei-
tant que 'chef créatif', mon objectif est double : pour Alfin, devenir leader du mar- gnements de leurs erreurs. C’est ainsi qu’il
ché dans le segment d’une cuisine de niveau 3 étoiles pour 400 invités – en fait, enthousiasme son équipe. Il rend ses collabora-
nous le sommes déjà. Et pour Gourmet Invent, en faire le créateur de tendances teurs fiers, et en retour, ceux-ci sont prêts à tra-
pour les événements de qualité de plus grande envergure. Autrement dit : si vailler dur, à prendre des responsabilités et à
nous réussissons à transposer 30% de la culture et de la conception d’Alfin au tout donner pour l’entreprise. Wim peut comp-
groupe de restauration qui nous chapeaute, alors nous ferons partie du top mon- ter à 100% sur son équipe, et ça, c’est rare."
dial et nous pourrons rivaliser avec Potel et Chabot de Paris ou avec la Maison
van den Boer aux Pays-Bas. Notre but : proposer une cuisine à une étoile pour C’est pourquoi il est si important que Wim ne
20.000 personnes." perde pas cette dynamique au fur et à mesure
que la maturité arrive, estime Piet Lievevrouw.
A chaque événement, le traiteur doit faire ses preuves. C’est le bon équili-bre "Sa force se cache dans son originalité mais
cette force exige aussi beaucoup d’énergie. Et
entre volume et ambition qui détermine la rentabilité. "Vous ne pouvez pas éter-
accroît le risque financier. Pour cette raison, il est
nellement copier une formule à succès. Un concept qui marque des points à
peut-être bon qu’il puisse désormais donner
Gand, n’enregistrera pas automatiquement un bon résultat à Paris. Les chances
libre cours à sa créativité de façon mieux enca-
de succès dépendent largement des collaborateurs que vous engagez. Aussi, en drée, au sein d’un groupe qui dispose d’une plus
tant que chef d’entreprise, ma mission la plus importante est-elle de continuer à grande assise financière. En effet, les esprits
galvaniser et à inspirer. Je me demande si je peux continuer à fixer la barre tou- créatifs risquent parfois de se perdre en se lais-
jours plus haut. Mon objectif le plus cher est de transmettre l’esprit Alfin, comme sant emporter par leur enthousiasme."
nous l’appelons, à notre équipe de collaborateurs jeunes et motivés afin qu’ils
fassent grandir notre concept, aidés par quelques fortes personnalités pivots." 
Johan Van Praet

Une ancienne usine de transformation de viande, Alfin Lance une Alfin entre dans la société de holding EEB,
2008

2009

2010

d’une surface de 1900 m², devient le nouveau port marque secondaire : copropriété de Gourmet Invent et du groupe
d’attache à Mariakerke (Flandre orientale). la ligne Easy Food. français Horeto.

MAI 2010 • 49
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BUSINESS Mode d'emploi

Les fabricants coopèrent pour la logistique

Objectif : réduire les frais de transport

Le terme ‘logistique collaborative’ n’a été pendant longtemps qu’un mot à la mode, mais quel-
ques beaux projets ont été réalisés ces derniers mois, avec une valeur ajoutée concrète pour les
entreprises participantes.

L
a collaboration entre les entreprises pour ce qui est de construit en 2003 un centre de distribution pour du papier toi-
leurs processus logistiques vise à compenser les points lette, des savons et des produits de soins afin de pouvoir exé-
faibles dans leur chaîne. Les projets de coopération peu- cuter conjointement 70% des livraisons. Résultat : réduction de
vent couvrir toutes sortes de domaines : le transport conjoint, 15% des kilomètres parcourus par les camions et amélioration
l’utilisation du même entrepôt, voire le regroupement des du niveau de service aux supermarchés. Les premiers exemples
belges se sont ensuite quelque peu fait attendre.

“vraiment
Ces derniers temps, les clients sont
disposés à collaborer avec d’autres
Les cas d’ANL Plastics, SKF, Gudrun et Leaf que nous présen-
tons ici se rapportent à des projets de transport. Les entrepri-
ses en question ont été encadrées par des bureaux de consul-
entreprises lorsqu’ils voient de réelles possi- tance qui se sont spécialisés dans cette matière. Ronny Neven
d’ALC-Group : “Nous commençons toujours par une radiogra-
bilités d’économie” Ronny Neven (ALC-Group) phie approfondie de la chaîne d’approvisionnement de notre
client. Nous proposons ensuite des améliorations pour les
achats. Le phénomène est aussi parfois appelé 'regroupement' points qui ont obtenu les moins bons résultats. Nous consta-
ou ‘clustering’. On renvoie dans la littérature à l’exemple de la tons ces derniers temps que les clients sont aussi vraiment
collaboration entre Kimberly-Clark, Lever Fabergé et Kühne & disposés à collaborer avec d’autres entreprises lorsqu’ils voient
Nagel à Raamsdonksveer aux Pays-Bas. Ces entreprises ont de réelles possibilités d’économie.”

50 • MAI 2010
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En pratique

ANL PLASTICS & SKF LOGISTICS SERVICES


Transport conjoint de marchandises lourdes et légères

Ces transports de marchandises con-


joints ressemblent à première vue à la
pratique du groupage des transpor-
A NL Plastics et SKF Logistics Services combi-
nent leurs chargements depuis septembre
2008 en vue de comprimer les coûts. Les camions
mandes que le clustering convient le mieux. C’est
pourquoi nous sommes partis à la recherche d’un
partenaire complémentaire et que nous sommes
teurs. Ceux-ci proposent un transport qui ont des destinations en dehors de la Belgique, finalement tombés sur SKF Logistics à Tongres”.
vers une destination définie et ten- des Pays-Bas ou de la France partent à présent Hans Vander Perre, general manager de SKF Lo-
tent alors de remplir le mieux possi- avec en dessous de leur chargement les roulements gistics Services : “Nous sommes nous-mêmes tou-
ble les camions avec des marchandi- à billes de SKF et au-dessus, les emballages en jours à la recherche de solutions pour améliorer le
ses de différentes entreprises. Mieux plastique légers d’ANL Plastics. Les deux entrepri- taux de remplissage de nos camions. Nous exploi-
ses partagent ainsi les frais de transport et tons plus exactement un réseau de
le camion est rempli, plus l’avantage
atteignent de meilleurs résultats en termes transport avec des liaisons quotidiennes
est grand pour le transporteur. Mais
entre différents centres de distribution
dans le cas du clustering, ce sont d’a- répartis dans toute l’Europe. Nous assu-
bord les entreprises de production Améliorer l’éfficacité de la rons cette prestation de services non seu-
qui réfléchissent à la manière d’or- capacité de chargement lement pour SKF, mais aussi pour des
ganiser des transports réguliers vers clients externes. Le transport conjoint
des destinations fixes. Elles exami- de fiabilité de livraison et de niveau de représente également pour nous une éco-
nent comment remplir ensemble les service. Joris Vrancken, managing direc- nomie importante. SKF a pu, notamment
camions et se mettent ensuite seule- tor d’ANL Plastics : “Ronny Neven nous a proposé grâce au concept du clustering, nettement amélio-
d’examiner le taux de remplissage des camions. rer l’efficacité de sa capacité de chargement.”
ment à la recherche d’un transporteur
Nous sommes en mesure de desservir nos clients La collaboration a été fixée dans un contrat dans le
qui peut prendre le service à son
principaux directement depuis les usines de Wellen cadre duquel SKF Logistics Services intervient en
compte. Une grande partie du béné- et de Cahors en France avec des camions remplis, tant que fournisseur de services logistiques d’ANL
fice généré par le remplissage effica- ce qui est parfait. Mais qu’en est-il des commandes Plastics. SKF garantit la livraison de ses produits sur
ce des camions revient aux entrepri- moins importantes qui doivent elles aussi être la base d’un service 'level agreement'. Et l’entrepri-
ses de production. Celles-ci souhai- livrées dans les 48 heures en Europe ? A cela s’a- se souhaite poursuivre sur cette voie en proposant
tent en outre une continuité dans les joute le fait que notre chargement est assez volu- des formes de coopération comparables à d’autres
transports avec une liaison fixe, adap- mineux, mais très léger. C’est à ce type de com- entreprises. 
tée à leurs propres production et
stock, et associée à un rapportage
efficace des prestations.
GUDRUN & LEAF DISTRIBUTION
Le fabricant de pralines Gudrun fait Camions chargés de pralines et de bonbons
appel à Tri-Vizor en vue de mettre sur
pied une collaboration entre chocola-
tiers. Cette entreprise se positionne
comme le premier 'cross supply chain
L e fabricant de pralines Gudrun, basé à Lier,
entrepose une partie de son stock chez son voi-
sin Leaf Distribution, le département logistique de
C’est la raison pour laquelle Gudrun a décidé de
mettre sur pied une opération de simplification ra-
dicale. La production a été regroupée en un seul
orchestrator' mondial, en assurant une la confiserie qui détient notamment les marques endroit et le nombre d’entrepôts a été réduit (un
gestion opérationnelle des accords de King, Sportlife et Red Band. De là partent un cer- dans l’usine et un 200 mètres plus loin chez Leaf).
coopération sur la base d’un modèle tain nombre de transports conjoints avec Leaf. “Ces courtes distances rendent les choses nette-
de 'gain sharing'. Alex Van Breedam, Cette collaboration fait suite à une étude comman- ment plus simples. Sans oublier l’effet favorable sur
CEO de Tri-Vizor : “La situation est dée par l’Autorité de développement de la provin- notre émission de CO2.”
comparable aux débuts du 'carpoo- ce d’Anvers sur les possibilités de coopération sur Gudrun est également impliquée dans l’initiative de
ling'. Les gens en voyaient l’avanta- les sites industriels. Gudrun a entamé la collabora- Tri-Vizor en vue de mettre en place une collabora-
tion suite à la prise de conscience, par la direction tion durable entre les chocolatiers belges, et ce tant
ge, mais n’étaient en même temps
dans le domaine du 'co-packing' que du transport.

“Dans notre branche, l’entreposage


pas disposés à renoncer au confort
Sur le plan du transport, les fournisseurs de matiè-
de leur voiture privée. Il importe que res premières entrent aussi en ligne de compte
les entreprises sortent de cette zone et le transport sont très onéreux” pour le 'clustering'. “Nous négocions actuellement
de confort afin de pouvoir elles aussi avec une entreprise qui transporte des matières
profiter des avantages. Nous propo- de l’entreprise, que les frais généraux liés à la chaî- premières vers les mêmes régions. Le bénéfice est
sons des solutions afin de les rassurer ne d’approvisionnement étaient trop élevés. René considérable, mais nous pourrions réaliser encore
sur le plan organisationnel, financier Blommaert de Gudrun : “Nous avions jusqu’il y a beaucoup plus d’économies en impliquant une
et légal. Je pense que les choses chan- peu une structure complexe avec deux usines, troisième entreprise dans l’aventure.”
deux unités de conditionnement propres, cinq em- La confiance entre les parties est essentielle à cet
geront vraiment lorsque le prix du
balleurs externes, dix entrepôts et toute une série égard. René Blommaert : “Les négociations sont
diesel connaîtra une nouvelle hausse,
d’accords de coopération avec d’autres entrepri- dans l’intervalle bien avancées, mais il est frappant
ce qui contraindra les entreprises à ses. Tout était parfaitement sous contrôle. Mais de voir la peur injustifiée éprouvée par certains par-
organiser leurs transports de manière nous avons pris conscience après quelque temps tenaires à l’approche de la ligne d’arrivée. Cette
plus efficace.”  que cette structure complexe entraînait également crainte est due au fait qu’une grande partie de la
de nombreux coûts. Et il est très difficile de réper- responsabilité en matière de planification et de lo-
Peter Ooms cuter ces coûts supplémentaires sur nos clients. gistique repose sur les épaules de l’emballeur.
Dans notre branche, l’entreposage et le transport Nous devons déléguer une partie du contrôle de
sont en outre très onéreux parce que nous ne pou- nos propres flux de production. Et c’est une étape
vons pas rompre la chaîne du froid.” qui n’est pas facile à franchir pour certains.” 
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BUSINESS Stratégie

Troc.com et les Kringloopwinkels :


deux visages d'un marché en croissance

La seconde main
promise à un bel avenir
Le marché de la seconde main est un monde à deux
visages. Tandis que les acteurs connus tels que les
Kringloopwinkels ou Oxfam sont des ASBL avec des objec-
tifs sociaux, liés ou non à une prise de conscience environ-
nementale, une chaîne purement commerciale comme
Troc.com entrevoit un énorme potentiel de
croissance dans un marché en grande partie non structuré.

Pierre Boseret (Troc.com)

L
a direction de l'entreprise Troc.com une grande expérience dans la grande dis-
part du principe que le marché de la tribution et a commencé à en appliquer les Internet pour la vente
seconde main en Belgique et au Lux- principes au marché des biens de seconde
embourg représente environ 1 milliard d'eu- main. Dès le début, il a utilisé le concept de d'objets vintage
ros. À titre de comparaison: les Kringloop- dépôt-vente: les gens apportent leurs vieil-
Étonnamment, les deux organisations –
winkels brassent un chiffre d'affaires annuel les marchandises à un endroit où elles sont
Troc.com et les Kringloopwinkels – ne font
de 26 millions d'euros et Troc.com 25 mil- contrôlées et évaluées. Les biens qui sont
que peu voire aucun chiffre d’affaires via
lions d'euros. Pierre Boseret, directeur gé- jugés aptes à la vente se voient attribuer une
l’internet. "Pour Troc.com, des sites web
néral de Troc.com Belgique, Luxembourg et petite place dans le magasin. Un prix de comme eBay et Kapaza sont de redouta-
Allemagne: "Nous pouvons donc tenir vente est convenu de commun accord et les bles concurrents, mais il est très difficile
compte d’une croissance rapide à très court marchandises restent ensuite deux mois d’estimer leur chiffre d’affaires en Belgi-
terme. Le chiffre précité de 1 milliard ne dans le magasin. Lorsqu’un visiteur achète que. Nous avons aussi un vaste site web
tient pas compte des quelque chose, il paie sur lequel il est possible de voir tous les
voitures et des vête-
ments, parce que “ Les Kringloopwinkels ont
en partie pour objectif de
le prix de vente indi-
qué. Cette somme
objets qui sont en magasin. Mais nous ne
réalisons que 2% de notre chiffre d’affaires
via la vente sur l’internet. Chez nous, le
ces produits ne font est partagée entre le
site web est au fond une sorte de vitrine.
pas partie de notre réorienter les travailleurs vers propriétaire et le ma-
gamme. En Belgique, gasin. Troc.com tou-
aucun chiffre officiel
le marché régulier du travail” che aussi une com-
n'est disponible pour mission pour frais de
ce marché. C'est pourquoi nous avons fait gestion qui varie de 38% à 45%. avec une photo. Les gens qui veulent vend-
une extrapolation sur la base des chiffres re leurs marchandises ne doivent donc pas
réalisés en France, le marché domestique Troc.com ne prend donc aucun risque lors placer des annonces eux-mêmes et recevoir
du groupe. En basant notre calcul sur le de ces transactions, car elle n’achète aucu- les acheteurs chez eux à la maison. À la fin
nombre d'habitants, nous sommes parve- ne marchandise. L'entreprise réceptionne du mois, ils reçoivent un relevé des mar-
nus à un total de 1 milliard d’euros". simplement des marchandises et essaie chandises en dépôt et le paiement des cho-
ensuite de les vendre. Ce que la chaîne peut ses vendues. Troc.com fait bien entendu
Le dépôt-vente minimise offrir, c’est la prestation de services. Un une sélection et ne prend pas tout ce que
les risques contrat est établi lors de la réception des les gens proposent. La chaîne est d’ailleurs
Troc.com est une organisation purement marchandises. Celles-ci sont assurées gra- fière de pouvoir dire que 75% des marchan-
commerciale qui a été mise sur pied par le tuitement contre le vol et l’incendie. Tous dises sont vendues après un mois. Cela
Français Jean-Pierre Boudier. Il possédait les objets sont publiés sur le site internet n’est pas seulement dû à la sélection, mais

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Stratégie BUSINESS

à Braine-l’Alleud, Forest et Etterbeek, est un un prix plus élevé pour trouver d’autant plus
des franchisés belges. Autrefois, il était de moyens d’action.
exploitant d'un magasin Disport. "Les dé-
pôts ne sont pas très grands – générale- Certains reprochent aux Kringloopwinkels
ment environ 1.000 m² – mais se trouvent de perturber le fonctionnement du marché
sur un site facilement accessible et attractif. "parce qu’ils financent en partie leurs ac-
L’objectif de chaque gérant est de vendre tions avec des subsides". "Nous tirons 38%
le plus rapidement possible les marchandi- de nos revenus des subsides à l’emploi.
ses en magasin et de générer un chiffre Nous les recevons en grande partie du Dé-
d’affaires plus élevé grâce à cette grande partement flamand de l’Emploi et de l’Éco-
rotation. C’est précisément parce que les nomie sociale pour nos activités déployées
objets sont rapidement vendus que de nou- pour les groupes cibles vulnérables. Sur les
veaux sont régulièrement proposés. Pour 3.500 personnes qui travaillent chez nous,
les acheteurs, cela vaut alors aussi la peine environ 80% d’entre elles appartiennent à
de venir jeter régulièrement un coup d’œil", notre groupe cible: des gens qui sont sans
explique Benoît Savoldi. emploi depuis plus de cinq ans avec un
Troc.com veut ouvrir davantage de maga- niveau d’instruction assez bas. Nous em-
sins dans les années à venir, principalement ployons aussi une série de gens qui reçoi-
en Flandre, et recherche dès lors active- vent un revenu de subsistance du CPAS.
ment des franchisés. Chez nous, ils peuvent occuper toute une
série de jobs: chauffeur, collecteur, nettoy-
Environnement et emploi eur et réparateur de marchandises, réassor-
social tisseur, etc. Nous proposons une grande
En Flandre, les Kringloopwinkels sont des or- diversité de fonctions, si bien que nous
ganisations sans but lucratif. Les membres pouvons placer les gens dans un emploi qui
poursuivent d’une part un objectif environ- leur convient. L’objectif final est qu’un cer-
Les personnes intéressées cherchent ce nemental et veulent d’autre part proposer tain nombre de personnes soient réorien-
qui les intéresse et viennent ensuite au des emplois à des gens qui rencontrent des tées vers le marché régulier du travail, mais
magasin où se trouve l'objet pour pou- difficultés sur le marché régulier de l’emploi. force est de constater que c'est loin d'être
voir l’examiner personnellement et l’a- Les exploitants sont membres de la Cou- faisable pour tout le monde."
cheter. C’est une pratique très courante pole d’entrepreneurs avec une plus-value
pour les meubles. Même pour eBay, ce
écologique dans l’économie sociale ('Koe- Komosie reçoit en outre un subside d’Ovam
n’est pas facile de vendre des meubles
pel van milieuondernemers in de sociale pour ses activités en matière d’environne-
via le site web. La vente sur l’internet
economie' ou en abrégé 'Komosie'). "Nous ment. La coupole ne dispose que de chiff-
fonctionne toutefois très bien pour les
objets vintage. Nous prévoyons même comptons 31 membres qui exploitent au res relatifs à son propre fonctionnement et
pour ces objets des ventes aux enchères total 107 Kringloopwinkels répartis dans pas aux parts de marché. “En 2009, nous
sur l'internet", affirme Pierre Boseret. tout le territoire flamand", explique Marc avons récolté 52.000 tonnes de marchandi-
Willem, directeur général de Komosie. ses. Chaque année, nous enregistrons une
Via www.uwkringding.be, quelques Il est surprenant de constater que les mem- augmentation du volume de l'ordre de 8 à
Kringloopwinkels tentent aussi de ven- bres développent des activités commercia- 13%. Même pendant la crise, ce chiffre con-
dre leurs marchandises aux enchères par les, mais ne sont pas des organisations tinue à progresser de manière constante.
l'internet.
commerciales: il y a 29 ASBL et 2 intercom- Ajoutons qu’environ 45% de ce que nous
munales. Un objectif supplémentaire des récoltons aboutit finalement aussi dans nos
magasins est de pouvoir proposer des pro- magasins et est donc réutilisé. On nous a
duits à bas prix. Dans ce cadre, la coupole a imposé un objectif en matière de réutilisa-
aussi à la connaissance du marché et aux d’ailleurs reçu l’autorisation du gouverne- tion. Le gouvernement flamand veut que
prix pratiqués. Si les objets ne sont pas en- ment de prélever une TVA de 6%. Une con- nous atteignions un taux de réutilisation de
core vendus après deux mois, le prix dimi- dition y est toutefois assortie, selon laquelle 5 kg par habitant d’ici 2015. Pour le mo-
nue de 10%. À partir de ce moment, cette les exploitants ne peuvent pas acheter de ment, nous en sommes à 3,5 kg. Nous som-
diminution est appliquée tous les mois. Le marchandises. Les membres de Komosie mes conscients qu’il faut faire davantage
propriétaire peut toutefois aussi décider de s’accordent toutefois sur d’autres priorités. d’efforts pour encore améliorer les choses,
reprendre sans frais les marchandises après Certains mettent davantage l’accent sur aussi parce que nous constatons une dimi-
deux mois. l’aspect environnemental, d’autres accor- nution de la qualité des marchandises”. 
dent plus d’attention à l’emploi social. Il y a
Troc.com possède en Belgique 4 magasins des magasins qui vendent leurs produits Peter Ooms
et 26 filiales qui sont exploitées par des fran- très bon marché, afin d’aider les plus dému-
chisés. Benoît Savoldi, gérant des magasins nis, tandis que d’autres préfèrent demander

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6 tendances dans le bâtiment aujourd’hui

Analyse de l’ADN de
la construction
moderne
S’il fut un temps où un bâtiment était plutôt un lieu de refuge ou de travail louable, dans le
meilleur des cas pourvu d’une certaine esthétique, nous pouvons dire qu’aujourd’hui ce n’est
plus du tout vrai. Un bâtiment construit en l’an 2010 vit ! Il doit abriter plusieurs fonctions de
vie et pouvoir s’adapter aux besoins changeants. Il est bourré de domotique et d’astuces éco-
logiques nécessitant des experts du bâtiment spécialisés pour quand les choses tournent mal
et pour la maintenance.
Les entreprises du bâtiment s’aventurent de plus en plus sur le terrain de la prestation de ser-
vices et les prestataires de services veulent jouer un rôle plus important dans le processus de
la construction. Les financiers s’investissent davantage pour que le budget final soit bien équi-
libré. Dans le cadre de ce Spécial, FORWARD a rencontré quelques acteurs qui font germer
des idées en matière d’architecture contemporaine. L’intégration semble être le mot clé. Celui
qui n’arrive pas à rassembler l’équipe de construction adaptée en fera les frais par après.
L’ADN de la construction moderne analysé en 6 tendances…

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L’intégration des fonctions

Sous un seul toit : habitation, travail,


shopping, formation et détente

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es gratte-ciels multifonctionnels ont déjà fait couler beaucoup secteur de la santé : les fonctions y sont réparties sur différents bâti-
d’encre... ce sont des villes en soi, regoupant piscines, bu- ments, mais combinées intelligemment au sein d’un domaine sécu-
reaux, habitations, galeries commerciales et même des écoles risé et pourvu d’espaces verts. Eric Verbeeck aussi pense que ce
et des espaces fitness. En Belgique, sont surtout les investisseurs qui ne sont pas enthousiastes par rap-
nous n’en sommes pas encore là et port à de tels projets multifonctionnels. "Les investisseurs préfèrent
une telle forme extrême d’intégra- investir dans des habitations. Ou dans des immeubles d’exploita-
tion de fonctions ne percera proba- tion. Ou dans des magasins. Ils ne savent pas quoi faire de ces
blement pas d’aussitôt. Pourtant combinaisons. Ils vont devoir apprendre à vivre avec. Une solution
nous voyons par-ci par-là surgir des pourrait être de présenter les différentes fonctions aux investis-
seurs dans des blocs de maisons séparés". Il reste à voir si le Belge

“lithique
L’implantation mono-
n’est plus sou-
qui, traditionnellement, est né avec une brique dans le ventre sera
intéressé par de tels projets. Beaucoup ont des doutes à ce sujet.
"En théorie c’est beau, mais en pratique c’est autre chose", estime
Herman Verwimp, administrateur de l’entreprise de construction
haitable aujourd’hui” Gijbels. "Qui veut vivre en plein milieu de la ville au-dessus de son
bureau avec de jeunes enfants ?" Ce qui se rapproche le plus de
projets qui veulent faire un usage ce type de projets d’intégration chez Gijbels, bien qu’ils ne soient
optimal des terrains disponibles, en pas vraiment en augmentation, sont des habitations de concierge
combinant plusieurs fonctions utiles au-dessus d’un magasin, d’un hall ou d’un bureau. Mais ce n'est
dans un seul bâtiment. Selon Eric Verbeeck, président de l’Union pas nouveau. 
Professionnelle du Secteur Immobilier
(UPSI), de plus en plus de ces projets mul-
tifonctionnels verront le jour dans le futur :
"Les autorités se rendent compte que l’im-
plantation monolithique qui s’est instaurée
Habiter au-dessus d’une école
après la Seconde Guerre mondiale n’est Les 23 collaborateurs de chez monde. C’est le seul moyen en outre profiter de cette
plus une pratique souhaitable aujourd’hui, ABV+ Architecten connaissent d’utiliser des terrains cons- infrastructure après les heures
tenant compte de la disponibilité des ter- la musique lorsqu’il s’agit d’in- tructibles – hors de prix à de cours, ce qui apporte un
rains, de la mobilité et des structures socia- tégrer les fonctions. Sans au- Brasschaat – de façon opti- plus grand contrôle social. Et
les. On le constate à l’étranger, surtout cune hésitation ils nous mont- male". L’idée de construire grâce à cette disposition, les
dans les pays anglo-saxons, où c’est déjà rent 10 plans récents d’un une trentaine de maisons frais de chauffage seront
centre de soins et de réédu- duplex et d’appartements au- réduits". Entretemps – à mi-
monnaie courante". Aux Pays-Bas aussi ils
cation et de 52 résidences- dessus d’une école n’a été chemin du projet – toutes les
ont pris de l’avance sur nous. Dans des
services à Wenduine pour le accueillie qu’avec un enthou- parties sont plus que convain-
villes telles qu’Amsterdam, où il n’y a plus compte de l’Administration cues. Les acheteurs aussi ont
du tout de terrains constructibles, c’est de- Centrale des Mutualités été séduits. En fin de compte,
venu une nécessité absolue. "Cela ne tar- Socialistes, ainsi que du la plupart du temps, l’école
dera pas ici", ajoute Marc vande Gucht, projet Nieuw Helmond, où est fermée lorsqu’on est à la
conseiller de différents projets de construc- des habitations sont pré- maison ! Et les investisseurs ?
tion dans le secteur de la santé. "J’en suis vues au-dessus de maga- "Ça ne leur pose pas de pro-
sins et bureaux de services. blèmes parce qu’eux ne sont
fermement convaincu, mais pas tout le
Mais l’idée la plus originale intéressés que par l’aspect
monde". Marc vande Gucht était un des concerne l’école Mariaburg financier. Il s’agit d’un parte-
L’école Mariaburg à Brasschaat
premiers à jumeler une crèche à une sei- à Brasschaat. Les architec- nariat privé-public spécial. Le
gneurie, mais ce n’était pas du goût des tes y ont proposé des habita- siasme mitigé. La direction de bailleur de fonds construit et
investisseurs. "S’il s’agit de gagner beau- tions au-dessus d’une école, l’école ainsi que les riverains la commune prend le relais.
coup d’argent aussi rapidement que possi- ce qui selon eux présenterait ont exprimé leurs doutes. L’avantage de cette construc-
ble, ce n’est en effet pas une bonne idée. beaucoup d’avantages. Erik Andries y trouve pourtant tion est que des résultats
Andries, gérant d’affaires de beaucoup d’avantages et il seront obtenus plus rapide-
Mais si la qualité de vie des habitants est la
ABV+ Architecten : "C’est la défend son projet : "Les ment. L’école se construira en
priorité tout en gardant une marge bénéfi- première fois qu’en Belgique pédagogues plaident pour 2 ans, alors que si les canaux
ciaire convenable, ...". Actuellement, Marc sera réalisé un projet dans le des locaux de classe au rez- habituels pour obtenir des
vande Gucht travaille à un projet pour le secteur des établissements de-chaussée. Dans notre pro- subsides sont utilisés, le
scolaires. Aux Pays-Bas, de jet, un maximum de place début des travaux peut faci-
tels projets ont déjà vu le jour était prévu pour le jeu et la lement être retardé de 10
à la satisfaction de tout le nature. Les habitants peuvent ans", conclut Andries.
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Domotique périence de Marc vande Gucht dans le cadre d’un projet qu’il
n’est pas prêt d’oublier : “Il s’agissait de l’installation de systèmes

James est une… domotiques dans plusieurs séniories. Car si ces systèmes ne sont
pas utiles dans de tels endroits, où peuvent-ils bien l’être ? Nous

télécommande ! avons investi une fortune, près de 1 million d’euros, et nous avons
dû tout enlever après un an. Cela ne marchait tout simplement
pas. Je pense que certains aspects améliorant nettement le confort
perceront dans le futur, mais tout ce
qui est techniquement possible n’est

L’
éclairage de votre bureau est-il relié à un détecteur de mou- pas nécessaire pour l’homme. Une
vement ? Et toutes les fenêtres peuvent-elles, le soir, être fer- machine qui me prévient lorsque mon
mées depuis un point central ? La domotique n’est plus très stylo est vide ne m’intéresse pas !”
loin, mais elle se limite généralement à un certain nombre d’appli- Tous les experts sont d’accord pour di-
cations qui ont démontré leur utilité re qu’il y a encore du pain sur la plan-

“ Ce que nous avons


réalisé pour une entre-
et leur qualité. Herman Verwimp :
“Nous sommes confrontés à relati-
che dans le secteur de la domotique.
On ne veut pas dire que les produits
vement peu de demandes dans la en sont encore à leurs premiers balbu-
prise de Tel Aviv dépas- construction industrielle, si ce n’est tiements, mais presque... Eric Ver-
se l’imagination” Erik Andries l’extinction automatique de l’éclai- beeck voit toutefois la tendance se
Erik Andries
rage et la fermeture automatique poursuivre dans le futur et prévoit une
des stores et des volets d’aération. Cela se limite généralement à percée vers 2025. “Le prix est actuellement encore quelque peu
ça.” Ce n’est peut-être pas si mal, si on en croit la douloureuse ex- élevé, et même si les quadragénaires d’aujourd’hui sont familiari-

3
Passive. Mais sa vision de la situation est plu-
Ecologie tôt optimiste : “On compte en Flandre déjà
1.200 maisons passives et quelques immeu-

En harmonie avec la nature ! bles de bureaux passifs, comme le Havenge-


bouw Gent, le bâtiment de Volvo Trucks à
Oostakker et celui de Nike à Bruxelles. Col-
ruyt projette la construction d’une grande
surface passive mais ne souhaite pas trop en

B
eaucoup en parlent, mais peu investis- “C’est la raison pour laquelle ce sont princi- parler pour l’instant. Londerzeel abrite la pre-
sent dedans. Pour le secteur tradition- palement les choses visibles qui marchent très mière école passive, et 15 autres sont pré-
nel, un bâtiment durable est un bâti- bien, comme les panneaux solaires sur le toit.” vues. On constate un accroissement de l’in-
ment où l’on aime séjourner et où il fait bon Le régime des subventions n’y sera pas non térêt, surtout dans les zones urbaines.” Selon
faire des affaires. Chaque investissement doit plus étranger. C’est également ce que pense la Plate-forme, les principaux intéressés dans
en outre être rentable, et ce n’est qu’en der- Peter Dellaert de l’ASBL Plate-forme Maison ce domaine sont les autorités. Les prix élevés
nier lieu que l’on pense à la planète. “L’aspect
écologique est important, mais quand on li-
vre un bâtiment peu agréable, qui est en
outre très coûteux, il est peu judicieux
de construire un immeuble parfaite- Une alimentation saine dans une
ment recyclable qui est un fournis-
seur net d’énergie. Tel est no-
entreprise saine
tre avis, et à vrai dire aussi ce- Fin du mois passé, le spécialiste de l’alimen- nouveau site de Hain Celestial Europe a été
lui de nos clients”, déclare tation naturelle Hain Celestial Europe – qui a construit conformément à des normes éco-
notre interlocuteur de l’entre- repris il y a 10 ans l’entreprise belge Lima et logiques maximales. Il a pour cela été fait
prise de construction Gijbels. Ce qui a 220 collaborateurs – a ouvert un siège appel à une technologie de pointe telle que
qui ne veut pas dire que Gijbels flambant neuf, écologique et neutre en CO² panneaux solaires et appareils éconénergé-
n’a pas de clients qui pensent éco- à Aalter près de Gand. Philippe Woitrin, tiques, verre super isolant et domotique
logie… mais alors surtout parce CEO de Hain Celestial Europe : “Avec ce pour l’éclairage, et à tout autant de bon
que cela s’avère être une bonne bâtiment hypermoderne, notre intention sens en ce qui concerne l’orientation correc-
était d’étendre la philosophie de l’entrepri- te du bâtiment et des fenêtres, le rappro-
manœuvre sur le plan marketing.
se durable – qui est un élément essentiel de chement des pièces chauffées, l’aménage-
notre philosophie d’entreprise – au site. ment du jardin et de la terrasse de toit avec
Philippe Woitrin
(Hain Celestial Europe) Nous avons fait appel aux techniques de les bonnes plantes. Pour finir, on remarque
construction les plus avancées et appliqué aussi le choix cohérent de matériaux ou
l’architecture écologique dans les bureaux, techniques respectant la nature, comme la
58 • MAI 2010 les entrepôts, le laboratoire et le jardin.” Le menuiserie en bois indigène, les peintures
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SPÉCIAL / REAL ESTATE

sés avec les ordinateurs, ils les


considèrent encore trop souvent
comme un instrument de travail. Les
jeunes d’une vingtaine d’années adoptent
sans état d’âme les ordinateurs dans tous les
domaines de la vie. Ceux-là sont sans aucun doute favorables
à la domotique.” Eric Verbeeck sait aussi que la Belgique marche
plus au moins de pair avec les Pays-Bas et la France, mais est peut-être un
Services

Hardware
et software
4
L
peu plus réticente que l’Angleterre ou l’Allemagne. Sans parler d’Israël ! a construction a à peu près subi la même évo-
Erik Andries peut en parler : “Nous sommes assez souvent confrontés à lution que les voitures. Dans le passé, en cas de
des demandes en matière de domotique, principalement pour des im- problème, on ouvrait le capot. Aujourd’hui, le
meubles de bureaux, compte tenu du prix. Mais ce que nous avons garagiste relie la voiture à un ordinateur qui pose le
récemment réalisé dans le cadre d’un projet pour une entreprise cotée diagnostic. Il n’est plus question depuis longtemps
en Bourse de Tel Aviv dépasse l’imagination ! Le propriétaire peut depuis de bricoler soi-même. Il en va de même pour l’entre-
Tel Aviv, entre autres, commander les stores à Anvers ! Il sait parfaite- tien des bâtiments. Un projet ultramoderne s’avère
ment, grâce à une série de caméras et à un système de badge, qui rent- assez complexe. Domotique commandée par ordi-
re et qui sort. De plus, un appareil intelligent mesure l’intensité lumineu- nateur, écosystèmes hautement technologiques,
se et éteint les lumières par zone lorsque la lumière du jour est suffisan- embrouillamini juridique de propriétaires, de locatai-
te.” Exagéré ? La baisse de la consommation d’énergie et l’accroissement res et de prestataires de services... avoir quelqu’un
de la sécurité en sont en tous cas des conséquences directes, même si qui sait qui est compétent pour quoi n’est pas un lu-
ces aspects ne sont pas toujours faciles à quantifier. Car comment calcu- xe superflu. Yves Van Hooland, président de l’Inter-
ler la plus-value d’une effraction qui n’a pas eu lieu ?  national Facility Management Association IFMA, ne
peut que s’en réjouir. “La
gestion facilitaire intègre
toutes les activités qui ont
pour but de gérer l’envi-
ronnement de travail. On
du pétrole ces dernières années point de vue purement financier, peut grosso modo distin-
ont clairement boosté la tendan- on construit le bâtiment le moins guer deux groupes. D’une
ce. “De nombreux architectes ont cher possible et on le loue le plus part, le secteur ‘dur’, qui
suivi notre formation.” Un bureau cher possible. Mais il y a aussi un regroupe principalement
passif est de 7 à 20% plus onéreux autre type de calculateurs qui les services techniques tels
qu’un projet traditionnel, mais les pensent davantage à long terme que l’entretien des bâti-
frais de chauffage sont jusqu’à et veulent que le bâtiment ait en-
75% inférieurs. Le Havengebouw
Gent avait récupéré l’investisse-
ment supplémentaire en 2 ans ! Si
core une certaine valeur dans 15
ans. La question est de savoir si
on recherche le rendement ou la
“deLesl’asCEO préfèrent s’occuper
pect négociation, considéré
le propriétaire-maître de l’ouvra- qualité”, estime Marc vande
ge est également l’utilisateur du Gucht. Il semblerait en tous cas
comme plus ‘sexy’” Yves Van Hooland
bâtiment, cet investissement sup- que l’entrepreneur qui ne discute
plémentaire est plus rapidement pas d’office de construction écoé- ments et de la technologie qu’ils abritent. D’autre
consenti. Si le bâtiment est cons- nergétique avec son client, peut part, les services aux utilisateurs, regroupés dans le
truit en vue d’être mis en location, déposer le bilan dans un délai de secteur ‘doux’. Cela peut aller du nettoyage à la
la situation est différente. “D’un maximum 15 ans.  sécurité en passant par le catering et l’accueil. Nous
essayons de faire comprendre aux gens que toutes
ces activités doivent être approchées comme un
tout.” Même chez les facility managers sur le terrain,
l’idée doit encore faire son chemin. On parle alors
naturelles, la récupération des
d’‘integrated facility management’. On voit dès lors
eaux de pluie et le recyclage
des déchets. “Le bâtiment a été
apparaître de plus en plus de fournisseurs proposant
construit entièrement étanche à divers services. Yves Van Hooland : “ISS en est un ex-
l’air afin de lutter contre la emple typique. L’entreprise emploie 450.000 person-
déperdition de chaleur par nes dans le monde entier et n’offrait à l’origine que
temps froid, ainsi que pour rete- des services de nettoyage. Aujourd’hui, seulement
nir la chaleur, prévenir les cou- deux tiers des revenus proviennent du nettoyage.
rants d’air et garder l’isolation Le siège flamabant neuf, écologique
et neutre en CO2 de Hain Celestial ISS s’est à cet égard non seulement lancé dans d’au-
au sec. Nous avons investi dans Europe tres services ‘doux’ tels que l’accueil, mais a égale-
l’isolation de toiture, l’isolation
ment proposé ses services pour la rénovation des
des murs extérieurs et l’isolation Europe n’est pas propriétaire du
du sol (valeur U maximale de 0,4 bâtiment. Ils l’ont toutefois fait bureaux de La Poste, par exemple.” On constate la
W/m2K)”, nous déclare fièrement construire conformément à leurs
Philippe Woitrin lors de la visite exigences par Koramic et l’ont
de l’entreprise. Hain Celestial ensuite mis en location. MAI 2010 • 59
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même tendance chez Compass Group


ou Sodexo. Ce dernier s’occupe depuis quel-
Flexibilité
ques années de la gestion facilitaire et immobi-
lière pour KLM. “Assembler les pièces du puzzle
dès la construction et réfléchir à l’utilisation ultérieu-
Valeur de réutilisation
re… cela me semble une évidence, mais on procède

I
encore trop peu de la sorte sur le terrain pour de maginez : vous avez un projet et construisez le bâtiment parfait. Mais l’idée
nombreux projets.” La manière dont le bâtiment est fait un flop. Ou au contraire remporte un franc succès, et vous devez vous
conçu inluence en effet la mobilité, la sécurité, la flexi- agrandir. Ou vous ne trouvez pas de successeur. Dans ce cas, la question sui-
bilité ou le manque de flexibilité. “La construction, l’a- vante se pose : peut-on adapter le bâtiment ou en faire autre chose ? “Il est très
chat, la vente, la location de bâtiments, les obliga- important de s’attarder sur cette question au moment où vous signez des
tions des parties, etc., tout cela figure dans des con- plans. Mais c’est en même temps très difficile”, affirme Marc vande Gucht. Ce
trats compliqués et a, après coup, un impact énorme dernier a par exemple construit un bâtiment sans air conditionné, mais a tout
sur l’entreprise. Les CEO préfèrent s’occuper de l’as- prévu de sorte que le système puisse être ajouté sans rien devoir casser. Dans
pect de négociation de l’achat et de la vente, consi- une maison de repos, il a prévu des chambres deux fois plus grandes que léga-
déré comme plus ‘sexy’. Ils oublient que l’entretien et lement prescrit pour éviter que la maison de repos ne doive fermer ses portes
l’utilisation sont aussi une affaire de gros sous.” Erik en cas de changement de la législation. “Nous avons aussi réfléchi à pouvoir
Andries : “Auparavant on livrait un bâtiment et à par- l’affecter en hôtel. Mais le rendement
tir de ce moment, le propriétaire était responsable.
Aujourd’hui, la tendance est ‘design, build and main-
“ La construction dura- d’un hôtel est inférieur à celui d’une mai-
ble signifie aussi que son de repos.”
tain’. Dans ce cas, l’entrepreneur est responsable de Erik Andries constate dans le marché des
l’entretien, par exemple.” L’entreprise de construction les bâtiments devront bureaux que de plus en plus de bureaux
Gijbels propose également des services supplémen- durer plus longtemps” sont polyvalents. Ils sont moins souvent
taires, principalement des services architectoniques construits en fonction d’une seule entre-
tels que l’entretien, les petites réparations, les petites prise, mais doivent pouvoir s’adapter à l’utilisateur. Eric Verbeeck de l’UPSI
adaptations, un service de bricolage, etc. Herman pense en tout cas qu’on ne pourra plus purement et simplement démolir dans
Verwimp : “Nous parlons également de ce Total Cost le futur. “Les bureaux qui ont plus de 30 ans sont rasés sans pitié. Mais la cons-
of Ownership avec le client. Mais honnêtement, le truction durable signifie aussi que les bâtiments devront durer plus longtemps
client choisit plutôt sur la base des coûts de construc- dans le futur.” Et de mentionner un projet pour lequel un parking souterrain a
tion. Ce qui n’est pas un bon calcul, mais c’est com- été pourvu de plafonds plus hauts pour que – si cela devait un jour être néces-
préhensible. Il a en effet ces coûts de construction saire – les camions puissent charger et décharger sans problème. Aujourd’hui,
sous contrôle, tandis que les autres coûts sont un fu- dénuder un bâtiment coûte plus cher que le démolir et recommencer, mais il y
tur ‘profit’ ou une future ‘économie’.”  a de fortes chances pour que cela change. 

6 Financement
Argent intelligent

“L
’argent est le nerf de la puissent rapidement être apportées pour eux aussi parfois un petit
guerre”, précise Marc mieux pouvoir travailler. Il est ainsi plus facile extra en cas d’éco-projet. Si
vande Gucht pour ré- de construire un quai de chargement supplé- l’Etat est le maître de l’ouvrage,
sumer la situation. Une mai- mentaire si on est propriétaire du bâtiment, il peut y avoir toutes sortes de constructions
son de repos coûte facile- mais il faut parfois passer par des processus PPP. Une banque telle que Dexia va à cet
ment 8 millions d’euros, le décisionnels lents et difficiles quand on tra- égard si loin qu’elle intervient elle-même en
centre de revalidation à vaille avec un investisseur. Il y a aujourd’hui tant que maître de l’ouvrage et gère entière-
Wenduine est estimé à près des clients qui en tiennent compte et qui ment le projet, jusque et y compris la mainte-
Herman Verwimp
de 30 millions d'euros sans cherchent des solutions”, affirme Herman nance. “L’argent peut en effet rendre un pro-
honoraires... “Il y a des clients qui ne veulent Verwimp. Sur le plan énergétique, le principe jet ‘plus intelligent’”, affirme Eric Van Herzele
pas garder leurs biens immobiliers en proprié- du tiers investisseur peut apporter quelque de Dexia. Si le financier est impliqué dès le
té, mais qui ne veulent pas non plus être liés soulagement : celui-ci avance l’argent néces- début – en tant que promoteur ou simple-
aux ‘big boys’. Dans ce cas, un grand investis- saire pour le changement et est remboursé ment en tant que partie –, il y a beaucoup de
seur gère le bâtiment et le client doit accep- grâce à l’économie d’énergie réalisée. Il y a en chance que l’on réfléchisse mieux à l’intégra-
ter le bâtiment dans son état actuel, alors qu’il outre plusieurs possibilités de subventions, tion de tous les aspects du bâtiment.” 
est souvent important que des modifications mais les banques et les investisseurs offrent
Sofie Brutsaert

60 • MAI 2010
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Jurisprudence BUSINESS

Sélection des décisions - publiées et connaissance suffisante des faits auparavant.


L’enquête ne peut avoir été décidée pour
non publiées - de nos cours et tribunaux permettre à l’employeur d’acquérir la preuve
du travail des faits. Elle ne peut avoir objectif de retar-
der artificiellement le point de départ dans

Jurisprudence sociale lequel le congé pour motif grave doit être


notifié.
Cour du travail de Bruxelles, 2 septembre
Nadine Beaufils, avocate 2009. Inédit, RG 50.934.

• Preuve – Légalité – Utilisation de messa-


ges SMS par l’employeur
MOTIF GRAVE (NON) depuis plus de trois jours ouvrables. Il s’agit, Un enregistrement de messages SMS reçus
Exercice d’une activité complémentaire qui d’une part, de vérifier l’existence d’une peut être utilisé comme preuve dans une
ne nuit pas aux intérêts de l’employeur impossibilité immédiate et absolue de pour- cause civile ou pénale. Le droit à la vie privée
L’exercice par le travailleur d’une activité suivre les relations contractuelles et, d’autre n’est pas absolu, mais doit être examiné en
complémentaire n’est pas en soi constitutif part, de s’assurer que le motif grave invoqué tenant compte des principes de légalité, fina-
de motif grave : le travailleur ne se doit aux à l’appui du congé est le motif réel du licen- lité et proportionnalité.
intérêts de l’employeur que dans les limites ciement. Cour du travail de Bruxelles, 13 novembre
d’une mission et d’un temps déterminés ; en Cour du travail de Bruxelles, 2 septembre 2009. Jtt, 2010, p. 74.
dehors de celles-ci et pour autant qu’il s’ab- 2009. Inédit, RG n° 50.934.
stienne de tout agissement susceptible de • Compétence pour licencier – Ratification
nuire à l’employeur, il reste maître d’exercer • Connaissance suffisante des faits – Audi- Un licenciement pour motif grave peut être
ses talents comme il l’entend. tion du travailleur ou enquête interne – Pri- donné par un mandataire de l’employeur.
Note : l’arrêt se réfère à Cour du travail de se de cours du délai de 3 jours Lorsque le licenciement est donné par quel-
Mons, 21 janvier 1988, JTT, 1988, p.60. Pour acquérir une certitude suffisante des qu’un qui est insuffisamment mandaté, ce
Cour du travail de Bruxelles, 20 novembre faits considérés comme graves, l’employeur licenciement peut être ratifié par après par la
2008. Inédit, RG n° 51.090. peut être amené à entendre le travailleur en personne compétente. Une telle ratification
ses explications ou à procéder à une enquête rétroagit à la date du licenciement.
MOTIF GRAVE interne. Dans ce cas, le délai de trois jours ou- Cour du travail de Bruxelles, 13 novembre
• Faits anciens découverts tardivement – vrables prescrit par l’article 35 de la loi du 3 2009. Jtt, 2010, p. 74.
Prise de cours du délai de 3 jours – Preuve
de la connaissance suffisante des faits à INDEMNITÉ DE PRÉAVIS
apporter de manière rigoureuse Mode de calcul – Rémunération varia-
Le fait que la faute commise a été ble – Indemnité de préavis – Avan-
découverte par l’employeur tage – Options sur actions
longtemps après qu’elle a En l’absence de prescrit lé-
été commise ne lui enlève gal, le juge peut en ce qui
pas son caractère de concerne le calcul de l’in-
gravité justifiant la rup- demnité de préavis dé-
ture immédiate du terminer librement le
contrat de travail sans mode de calcul de la ré-
préavis ni indemnité. munération variable qui
Pour être valable, un correspond le mieux à
congé pour motif gra- la notion de rémunéra-
ve doit en tout cas tion. Celle-ci peut être la
avoir été notifié dans les rémunération variable ga-
trois jours ouvrables sui- gnée au cours des douze
vant le moment où l’auteur derniers mois.
de la rupture a eu connaissan- L’octroi d’options sur actions
ce de la faute. donne au travailleur une chance de
La preuve de la date à laquelle l’auteur gain et constitue donc un avantage au
de la rupture a acquis une connaissance suf- sens de l’article 39 de la loi relative aux con-
fisante de faits tardivement découverts doit trats de travail.
être rapportée de manière rigoureuse. Il faut juillet 1978 peut ne commencer à courir qu’au Cet avantage peut être évalué ex aequo et
que le juge puisse acquérir la conviction que terme de l’audition du travailleur ou qu’à la bono en appliquant les règles d’évaluation à
les faits qualifiés de motif grave, qui se sont clôture de l’enquête. Une telle mesure ne fait, des fins fiscales.
produits plusieurs mois avant le licencie- toutefois, courir le délai légal de trois jours Cour du travail de Bruxelles, 30 juillet 2009.
ment, n’étaient pas connus par l’employeur que si l’employeur n’avait pas encore une Jtt, 2010, p. 79.

MAI 2010 • 61
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BUSINESS Enjeux

La grande transformation de la Fédération des entreprises


de gestion de l’environnement (FEGE)

Ces entreprises vertes qui vivent


des déchets
Collecter les déchets, les trier, les traiter, les assainir, les recycler et leur rendre une utilité. Telles
sont les activités des entreprises appartenant à la FEGE. Porte-parole d'un secteur encore très
jeune, la FEGE respire la confiance face à un avenir prometteur. Tout au plus lui reste-t-il à se défai-
re de la concurrence déloyale de certaines intercommunales, à lancer un beau débat sur l’ouverture
des frontières en matière de déchets et à donner un coup de pouce à la politique des déchets de
notre pays. Entretien avec Werner Annaert, directeur général de la FEGE.

Q
ui sont précisément les membres de la FEGE ? problématique dans un souci d’équilibre. Il ne faut pas
"Nos entreprises exercent leurs activités dans ce que le que d’autres secteurs désertent la place à cause d’une
droit environnemental appelle ‘l’hygiène du milieu’. Elle législation qui serait trop sévère. C’est justement pour
porte sur toutes sortes de pollutions : depuis les eaux usées, des cette raison que concilier économie et écologie repré-
sols pollués, de l’air pollué jusqu’aux déchets. C’est là que nos sente un véritable tour de force. Sur la scène politique, nous inter-
entreprises interviennent, par exemple, en épurant l’eau ou en as- venons souvent littéralement comme des ‘go between’ (des inter-
sainissant le sol et en les rendant utilisables à nouveau, en triant des médiaires) entre des organismes employeurs et des mouvements
matériaux réutilisables dans des déchets mélangés ou en transfor- écologistes tels que Bond Beter Leefmilieu ou Greenpeace."
mant des déchets en énergie. Ajoutons que nous regroupons des
entreprises possédant une structure de droit privé. Il peut s’agir Une politique environnementale représente-t-elle une si grande
d’entreprises publiques pour autant qu’elles respectent les lois du ‘menace’ pour la viabilité des entreprises ?
marché et qu’elles luttent avec les mêmes moyens." "Non, au contraire. Voyez Stora

Une grande diversité règne au sein de la FEGE. “intervenons


Sur la scène politique, nous
souvent comme
Enso, le plus grand producteur
de papier d’Europe. Le site de
Peut-elle parler d’une seule voix ? Gand a construit des installa-
"Toutes nos entreprises dépendent de la politique des ‘go between’ entre tions destinées à produire de l’é-
environnementale. Si un pays ou une région n’a pas nergie à partir de déchets et ce
de politique environnementale ou n’a pas l'ambition
organismes employeurs et pour son propre processus de
de recycler les déchets pour produire de l’énergie mouvements écologistes” production. De cette manière,
ou pour assainir des sols, le secteur n’a alors pas l’entreprise dépend moins des
beaucoup de possibilités de se développer. Ces entreprises ont par combustibles primaires. Si les prix du gaz ou du pétrole augmen-
ailleurs toutes pour but de réutiliser la plus grande quantité possi- tent, Gand devient une entreprise intéressante dans le groupe
ble de ces matériaux mis au rebus ou d’en retirer de l’énergie. Stora Enso. C’est également intéressant pour notre secteur, car
Enfin, toutes doivent de plus en plus se mettre à penser au niveau nous pouvons leur livrer nos déchets. Il s’agit clairement d’une
européen. C’est en effet l’Europe qui détermine de plus en plus situation win-win."
notre législation et son suivi."
En ce qui concerne la politique en matière de déchets, estimez-
La FEGE est un lobby d’employeurs atypique... Il n’arrive pas vous qu’il reste beaucoup de travail législatif sur la planche ?
souvent que l’on milite en faveur d’une législation plus sévère ! "Nous avons récemment communiqué trois priorités aux autorités
"Mais, que ceci soit bien clair : nous sommes des employeurs ! concernées. En premier lieu, il y a une demande d’égalité de trai-
Nous partageons les mêmes opinions que la FEB, à 95% ; songez à tement. Là où seules des intercommunales – qui ne paient ni TVA
des thèmes tels que le marché du travail, la fiscalité, ... Toutefois, ni impôts et dont le personnel bénéficie d’un statut de fonction-
lorsqu’il s’agit spécifiquement de la réglementation environnemen- naire – opéraient auparavant dans le domaine des déchets ména-
tale ou énergétique, alors nous défendons peut-être un peu plus gers, nous sommes maintenant plus en concurrence les uns avec
que les entreprises ordinaires une réglementation environnemen- les autres. Nous estimons que toutes les entreprises doivent pou-
tale assez stricte. Mais il convient quand même d’aborder cette voir travailler dans les mêmes conditions. L’internationalisation

62 • MAI 2010
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Enjeux BUSINESS

Attention aux
cow-boys ?!
Les membres de la FEGE signent un
code de déontologie dans lequel ils
promettent de travailler correcte-
ment dans tous les domaines. Lors-
qu’il s’agit de la législation environ-
nementale, cela n’est pas aussi sim-
ple. Werner Annaert, directeur gé-
néral de la FEGE, s’est déjà aperçu
plus d’une fois qu’il existait plusieurs
interprétations possibles. En deman-
dant aux entreprises de signaler des
situations étranges chez des concur-
rents, la FEGE souhaite épingler les
ambiguïtés et les lacunes qui existent
dans la législation. Le code poursuit
un second objectif, qui est de renfor-
cer la collégialité entre les entreprises
du secteur en prônant une manière
d’entreprendre socialement respon-
sable et en assurant la formation du
personnel. "Les entreprises membres
sont fiables et transparentes. Le
monde peut ainsi les distinguer des
quelques cow-boys qui continuent à
sévir sur le marché. Et ceux-là, ils sont
dangereux. Car si des déchets indus-
triels refont surface à un endroit où ils
ne devraient pas, la responsabilité
n’en incombe pas uniquement à ce-
lui qui les a collectés ou transformés
constitue une deuxième priorité. Pour des activités purement éco- tirer les enseignements de nos
mais également à la société dont le
nomiques, la Belgique, l’Allemagne, la France et les Pays-Bas for- erreurs respectives. Mais la déchet provient. Il s’agit donc d'être
ment une grande zone unique de libre-échange, sauf pour le trans- FEGE est souvent obligée de attentif et de bien vérifier avec qui
port des déchets. À présent, l’Europe souhaite également ouvrir servir de pont et d’établir la vous collaborez."
les frontières pour les déchets, mais il est difficile de déterminer communication."
jusqu’où on veut aller. Si l’Allemagne essaie de traiter ses propres
déchets sur son territoire, alors nous ne devons pas nous montrer Ce marché national complexe représente-t-il un handicap pour la
niais et faire traiter nos déchets par l’Allemagne. Troisièmement, position concurrentielle internationale de nos entreprises ?
nous réclamons que l’on se penche sur la responsabilité des pro- "Le grand problème en matière de concurrence se situe surtout au
ducteurs. Les producteurs de matériaux se voient de plus en plus niveau de l’attitude des gouvernements et des opportunités créées
imposer la responsabilité de garantir le financement de la collecte sur les marchés nationaux. Là où il intervient clairement, c’est sur le
et du traitement de leurs produits une fois qu’ils sont retournés à marché de l’incinération des déchets ! Il existe une nette différence de
l’état de déchets. Pour ce faire, ils se groupent dans des organisa- mentalité entre la Belgique et les pays voisins. Les Pays-Bas et l’Al-
tions telles que Fost Plus, VAL-I-PAC ou Recytyre (pneus usagés). lemagne optent résolument pour l’augmentation de la capacité d’in-
Mais les systèmes varient énormément. VAL-I-PAC s’organise sans cinération. Je crains fort que l’incinération des déchets ne disparaisse
perturber le marché et sans y interférer. Fost Plus et Recytyre fonc- en Belgique et que nous en arrivions à faire incinérer nos déchets aux
tionnent très différemment. Ces systèmes débouchent pour l’un Pays-Bas et en Allemagne. Cela signifie que nous perdons notre
sur un monopole de marché et pour l’autre sur un monopole de savoir-faire, nos emplois et du chiffre d’affaires et qu’en outre, nous ne
clients. Cela ne peut exister pour nous." produisons plus d’énergie verte de cette manière. Or, actuellement,
27% de l’énergie verte produite en Flandre proviennent de déchets."
95% de la problématique environnementale se règlent au ni-
veau régional. N’est-ce pas un non-sens d’appliquer une légis- Que pensent les autres secteurs et les utilisateurs finaux de la
lation environnementale à un si petit territoire ? réutilisation de déchets en tant que matière première ?
"Si cela concerne des différences qui ne perturbent pas réellement "Les matières recyclées ne sont plus considérées comme des matiè-
le marché, alors la question revient à savoir quelle importance on y res sans grande valeur, mais parfois, les concepteurs et acheteurs de
accorde. Mais si une Région prenait des décisions par lesquelles il matériaux n’y pensent tout simplement pas. Les entreprises qui con-
deviendrait subitement plus avantageux d’établir vos activités en somment des matières premières et de l’énergie devraient pourtant
Wallonie plutôt qu’en Flandre, ou l’inverse, c’est alors que cela de- au moins examiner les possibilités qu’elles offrent. Le consomma-
viendrait problématique... Par ailleurs, les administrations respecti- teur final réfléchit encore trop peu à tout ceci. Les messages, les in-
ves savent à peine ce qui se passe de l’autre côté de la frontière lin- formations et les logos sont particulièrement confus et dès lors, il
guistique. Et je ne suis pas optimiste à ce sujet. Je ne vois aucune opte le plus souvent pour le produit le moins cher, le plus pratique
évolution vers plus de concertation. Soyons positif : nous pouvons ou le plus beau." 
SBR

MAI 2010 • 63
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INTERNATIONAL Analyse

La forte inflation mondiale a fondu comme neige


au soleil avec l’arrivée de la crise financière et
l’implosion consécutive de l’économie mon-
diale fin 2008. Mais les hausses générales
des prix sont de retour. Devons-nous nous
en inquiéter ?

Pour le moment, l’évolution de


l’inflation n’inspire pas d’inquiétude mais ...

L’inflation de retour ?
L
es économistes s’accordent générale- cation la plus courante à court terme. Mais de telles évolu-
ment à dire que l’inflation, définie com- tions mènent en principe uniquement à des corrections
© D.Rys

me étant un processus de hausse du ni- uniques du niveau des prix. Elles ne peuvent expliquer à elles
Frederic Teerlynck veau général des prix, est la conséquence à seules le phénomène d’inflation, sauf en cas de spirale des
ft@vbo-feb.be long terme d’une hausse continue de la masse salaires et des prix. C’est le cas lorsque les baisses du pouvoir
monétaire disponible dans l’économie. C’est d’achat, résultant de l’inflation ou des anticipations inflation-
la théorie quantitative de la monnaie, inventée par l’économiste nistes, sont compensées par une hausse des salaires et que
américain Irving Fisher. Cette théorie suppose que l’offre de l’augmentation du chômage qui en découle est comblée par
monnaie n’a pas d’influence stable à long terme sur la produc- une politique budgétaire expansive. L’inflation qui s’est pro-
tion, étant donné que celle-ci est déterminée par des facteurs duite en Belgique au milieu des années 70 illustre bien ce
réels tels que le travail disponible, le processus, causé à l’origine par la hausse
capital et la technologie. Mais puisque
la monnaie est nécessaire pour tout
achat, le niveau général des prix doit
“oùLaleChine est le pays
risque de sur-
des prix du pétrole.

La progression des niveaux d’inflation nuit


évoluer proportionnellement au stock
de monnaie en circulation. Cette théorie
chauffe de l’économie au bon fonctionnement de l’économie.
L’inflation perturbe la fonction de signal de
explique notamment pourquoi, au XVIe est le plus présent” la monnaie car les hausses de prix ne sont
siècle, l’arrivée soudaine d’or et d’ar- plus l’indice d’une pénurie sur le marché.
gent en provenance des colonies espagnoles a entraîné une Par ailleurs, l’incertitude – qui règne dans un environnement
augmentation constante des prix en Espagne et dans le reste de inflationniste – complique la réalisation d’investissements à
l’Europe. long terme. La fonction d’échange de la monnaie est elle
aussi compromise en cas de forte inflation. Étant donné que
Maîtriser la masse monétaire conserver de l’argent dans un tel environnement coûte cher,
À court terme, les hausses de prix peuvent toutefois aussi pro- les particuliers essayeront de limiter la quantité mise à la
venir de chocs de l'offre et de la demande. Une hausse des banque pour effectuer des transactions ou des investisse-
coûts de production par exemple, conséquence de la hausse ments. En cas d’hyper-inflation, la monnaie est remplacée par
du prix du pétrole et des matières premières, constitue l’expli- des devises étrangères ou des cigarettes.

64 • MAI 2010
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Analyse INTERNATIONAL

Pour maîtriser l’inflation, il est donc capital de maîtriser ner à zéro leurs taux d’intérêt par des mesures sans précédent
la masse monétaire qui circule dans l’économie. La et à injecter dans le système d’énormes quantités d’argent. De
mission principale des banques centrales consiste l’argent qui, ont averti les économistes, mènerait vite à une
donc à faire concorder la masse monétaire et les hyper-inflation s’il parvenait dans l’économie réelle via le systè-
besoins par le biais de la politique monétaire. me financier.
Avant 1971, la confiance en la monnaie était
soutenue par la promesse de la libre conver- Ces derniers mois, les niveaux d’inflation connaissent à nou-
sion en or. La masse monétaire était par veau une progression ascendante. Ainsi, le niveau d’inflation de
conséquent automatiquement limitée. On ne la zone euro est passé de 0,9% en février à 1,5% en mars. En
pouvait créer plus de monnaie que l’on n’ex- Belgique, le taux est passé de 0,77% à 1,66% sur la même
trayait d’or. Ce frein automatique sur la créa- période. Le taux d’inflation chinois est monté à 2,6% en février,
tion de monnaie a entraîné une quasi-stabili- par rapport à 1,5% en janvier. Nous retrouvons la même évolu-
té des prix pendant une longue période. Mais tion en Inde, où l’inflation s’élève presque à 10% à l’heure
en 1971, la promesse de conversion en or a actuelle. L’Australie en est aujourd’hui à son cinquième relève-
été révoquée, ce qui a levé le frein automa- ment de taux depuis le début de la crise.
tique. La période entre 1970 et 2000 s’est donc Ces évolutions n’inquiètent toutefois pas encore trop les déci-
caractérisée par des niveaux d’inflation mondiaux deurs politiques des pays industrialisés. D’après leurs estima-
records. Depuis que l’on comprend mieux com- tions, ces hausses de prix sont uniques et dues à la hausse du
ment mener la politique monétaire et que la tendan- prix de certaines matières premières et produits d’importation.
ce mondiale est à l’indépendance des banques centra- Il n’est pas encore question, pas plus maintenant qu’à moyen
les, l’inflation s’est à nouveau stabilisée à un niveau accep- terme, d’un enracinement autoalimenté des perspectives d’in-
table ces dernières années. flation. Autant le gouverneur de la Banque d’Angleterre que
Ben Bernanke de la Réserve fédérale et Jean-Claude Trichet de
L’inflation aujourd’hui la Banque centrale européenne estiment que, en raison d’une
À la fin du dernier cycle conjoncturel, été 2008, l’inflation avait demande agrégée basse et de l’importante capacité non utili-
à nouveau atteint de très hauts pics. Les prix des matières pre- sée qui en résulte, l’inflation restera encore quelque temps infé-
mières et des produits alimentaires cotaient à un niveau histo- rieure aux taux fixés.
riquement haut, en raison de la demande importante des mar-
chés émergents. Différents pays se sont retrouvés confrontés à Malgré tout, la crainte de l’inflation peut être légitime dans un
de l’agitation sociale et ont réagi en prenant des mesures, tel- certain nombre de pays qui ont moins souffert de la crise finan-
les que des restrictions à l’exportation, qui ont davantage pous- cière. Le Fonds monétaire international a déjà mis en garde cer-
sé les prix vers le haut. Le prix du pétrole (Brent) affichait à un taines économies émergentes contre les risques de surchauffe
moment 145 dollars par baril. Mais le déclenchement de la crise de l’économie et a préconisé le retrait des plans de relance
économique et financière a rapidement modifié le cours des massifs. La Chine est le pays où cette problématique est pro-
choses. On ne craignait soudain plus l’inflation, mais tout était bablement la plus présente. Le pays a récemment publié ses
mis en œuvre pour éviter une déflation. Les banques centrales chiffres officiels de croissance et ils indiquent que l’économie
du monde entier n’ont pas hésité à gonfler leurs bilans, à rame- chinoise a connu une croissance annuelle d’environ 12 %, soit le
plus fort taux en trois ans. Le risque de surchauffe et d’inflation
est donc bien réel. L’évolution du prix des logements dans les
villes constitue en cela un exemple significatif. Ils ont en effet
INFLATION GLOBALE (% VARIATION ANNUELLE ; progressé de 11,7 % en un an, chiffre pour le moins inquiétant.
SOURCE : FMI)
En revanche, les prêts bancaires ont à nouveau
diminué par rapport aux mois passés. Pourtant, le
Conseil d’État chinois met en garde contre la
hausse du prix des logements. Pour contrer l’infla-
tion à venir, la Chine pourrait à court terme mettre
fin à ses mesures de relance, augmenter les taux
d’intérêt et laisser sa devise prendre de la valeur.
Cette dernière option serait d’ailleurs bien ac-
cueillie par les États-Unis, qui ont intensifié leur
pression politique sur la Chine dans ce but. 

Frederic Teerlynck
1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

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2006

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INTERNATIONAL Sans frontières

Pas de cordon sanitaire autour


de Geert Wilders aux Pays-Bas

Geert Wilders a marqué ces dernières années la


politique néerlandaise depuis les rangs de l'op-
position. Les partis établis ont bien du mal à
stopper l'élan de son Partij voor de Vrijheid
(PVV), parti de droite populiste. Bien que les
sondages indiquent une tendance récente à la
baisse, le PVV sera probablement l'un des plus
grands partis à la Chambre après les élections
de juin. La fédération d'employeurs VNO-NCW
n'est pas partisane d'un gouvernement avec le
© Photonews

PVV, mais plusieurs grands partis refusent de


l'exclure à l'avance.

L’
ascension électorale du PVV est impressionnante : 9 siè- Pays-Bas” à l'étranger et constituer une menace pour l'écono-
ges lors des élections parlementaires de 2006, 17% des mie ouverte des Pays-Bas. Au niveau national, le VNO-NCW
voix lors des élections européennes de 2009 et, lors des craint que l'approche égalitariste du marché du travail ne soit
élections communales de mars, le PVV a été le plus grand parti mise en danger. Wilders a voulu réfuter cette prise de position.
à Almere et le deuxième parti à La Haye. Les sondages situent Il a parlé d'une “fausse information de la part d'employeurs
actuellement le parti de Wilders aux alentours de 15% (environ qui n'ont jamais vu une usine de près”.
22 des 150 sièges). Si le PVV devient effectivement l'un des plus
grands partis, les partis établis devront faire le choix de former Geert Wilders, qui rêve d'endosser des responsabilités au
ou non un gouvernement avec lui. gouvernement, est prêt à participer à
un gouvernement minoritaire de
Les partis de centre gauche excluent La fédération d'employeurs centre droit. Pour prouver ses inten-
une collaboration avec le PVV. Une VNO-NCW a plusieurs fois tions, il est prêt à faire des compro-
coalition avec ce parti ne serait donc mis sur certains fers de lance du PVV
possible qu'avec les chrétiens dé-
clairement indiqué qu'elle ne comme l'immigration et les relations
mocrates du CDA ou les libéraux du voulait pas d'une participation avec l'Islam. Seule l'augmentation de
VVD. Ces deux partis avaient formé l'âge légal de la pension reste un
en 2002 une coalition avec le LPF –
du PVV au gouvernement point de discorde absolu. Ce faisant,
le parti de Pim Fortuyn – et ont déjà Geert Wilders capitalise sur les pré-
indiqué ne vouloir exclure aucun parti d'une possible coalition. occupations des électeurs hollandais à propos de l'état de l'é-
Ce n'est qu'après les élections qu'ils examineront quelles coali- conomie. L'économie semble devoir jouer un rôle bien plus
tions sont faisables. Il n'est dès lors pas question d'un véritable grand que la société multiculturelle dans la campagne électo-
cordon sanitaire. C'est également ce qui a pu être constaté à rale qui s'annonce. C'est un désavantage pour Wilders, qui est
Almere et La Haye, où le PVV – pour l'instant sans résultat – a maintenant face au défi de prouver que son parti est plus
mené des discussions avec tous les partis. qu'un mouvement anti-Islam.

Les entrepreneurs contre Wilders Le monde des entreprises aux Pays-Bas n'y croit pas trop. Une
La fédération d'employeurs VNO-NCW a plusieurs fois claire- enquête récente de la radio BNR a indiqué que plus de la moi-
ment indiqué qu'elle ne voulait pas d'une participation du PVV tié des entrepreneurs interrogés pensent que l'économie néer-
au gouvernement. Le président Bernard Wientjes déconseille landaise pâtirait d'un gouvernement avec Geert Wilders. 
aux politiciens néerlandais de s'allier à Wilders. Les réticences
de l'organisation patronale sont basées sur des arguments Dorine van Kesteren, correspondante aux Pays-Bas
nationaux et internationaux. Une participation de Wilders au
gouvernement pourrait “nuire énormément à la réputation des

66 • MAI 2010
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Commerce extérieur INTERNATIONAL

Q&A sur le commerce extérieur

Focus sur les Carnets ATA, passeports


du commerce mondial
Les voyageurs d’affaires qui souhaitent montrer des prototypes à leurs clients, emporter des instruments
professionnels ou des marchandises pour des foires commerciales, des présentations et des expositions
peuvent faire usage de Carnets ATA (Admission Temporaire/Temporary Admission). Ces documents doua-
niers internationaux permettent d’importer des marchandises sans devoir payer de droits d’importation ou
de taxes sur celles-ci. Les Carnets ATA offrent donc de nombreux avantages.

Question La durée de validité d’un Carnet ATA est d’un an, de sorte que vous
pouvez l’utiliser autant pour votre voyage en Suisse qu’au Japon et, si
Je suis producteur d’appareils de mesure utilisés dans l’industrie du vous le souhaitez, également dans d’autres pays de la chaîne ATA.
bâtiment. Un client en Suisse m’invite à venir donner une démo de Vous pouvez sans problème confier le Carnet ATA à votre transporteur.
mon dernier produit. En juillet 2010, je souhaite participer avec le Le Carnet ATA fait la distinction entre le ‘titulaire’ et l’‘utilisateur’ de
même matériel à une foire à Tokyo. Puis-je utiliser un Carnet ATA ? celui-ci. Votre entreprise est dans ce cas le titulaire, et le transporteur,
Quelles sont les alternatives ? Puis-je confier cette tâche à mon l'utilisateur.
transporteur ? Le type de moyen de transport joue-t-il un rôle à cet Le mode de transport ne joue aucun rôle. Un point important peut tou-
égard ? Puis-je louer ce matériel à une entreprise bel- tefois être le bureau de douane dans lequel vous arri-
ge en vue de l’exécution d’un projet à l’étranger ? vez. Un petit nombre de pays limite en effet les bureaux
de douane habilités à traiter des Carnets ATA.
L’entreprise belge qui exécutera un projet à l’étranger à
Réponse l’aide de votre matériel peut elle-même demander un
Vous avez le choix entre une importation temporaire carnet ou, moyennant votre accord, utiliser le vôtre.
conformément à la réglementation ‘nationale’ et une Dans ce dernier cas, vous demeurez responsable de l’u-
importation temporaire au moyen d’un Carnet ATA. La tilisation correcte de celui-ci.
différence entre les deux instruments est que dans le Les Carnets ATA couvrent pratiquement toutes les mar-
cadre de la réglementation nationale, vous devez ache- chandises : ordinateurs, instruments de réparation, ma-
ter un cautionnement dans le pays de destination, alors tériel photographique et cinématographique, écrans
qu’un Carnet ATA vous offre un cautionnement international valable de visualisation, instruments de musique, machines industrielles, véhi-
dans 39 pays en dehors de l’Union européenne. Vous pouvez obtenir cules, bijoux, vêtements, équipement médical, chevaux de course,
ce Carnet ATA en Belgique. Tant la douane japonaise que suisse ren- costumes de ballet, équipement audio et podiums de groupes de rock.
voient expressément pour l’importation temporaire au Carnet ATA sur Les biens consommables et les denrées périssables ne sont pas cou-
leur site web respectif : verts par le Carnet ATA, de même que les véhicules à usage touristique.
- pour le Japon : www.customs.go.jp/english/summary/temporary.htm Les véhicules suivants sont toutefois couverts par le Carnet ATA : véhi-
- pour la Suisse : www.ezv.admin.ch/zollinfo_firmen/verzollung/00367/ cules destinés à un salon ou à un terrain de test, voitures satellites, voi-
index.html?lang=fr tures de compétition, etc. 

En savoir plus ?
Pour plus d’informations, adressez-vous à votre Chambre de Commerce locale. Toutes les données de contact figurent sur www.cci.be. Etant donné
que le réseau belge des Chambres de Commerce se porte internationalement caution pour les éventuelles créances douanières dans le chef de
votre entreprise, il doit se couvrir contre les risques qui y sont liés. L’assureur crédit en charge doit dès lors approuver la remise du carnet. Cette pro-
cédure peut durer plusieurs jours si aucune information financière récente n’est disponible à propos de votre entreprise.
L’International Chamber of Commerce (ICC) a développé un site web très complet sur les Carnets ATA, abordant tous les aspects en détail :
www.atacarnets.org.
Le Guide to Export-Import Basics (3e édition, version papier & eBook) contient également de nombreuses informations sur le sujet. Ce classique
de l’ICC, qui en est déjà à sa troisième édition, donne un aperçu de tous les instruments qui ont été développés par l'ICC en vue d’exploiter au
maximum les marchés internationaux, et fournit des informations exhaustives sur le processus commercial en termes clairs.
Cette publication est à commander auprès d’ICC Belgique ASBL, rue des Sols 8, 1000 Bruxelles, directement via le site web (www.iccwbo.be) ou par
e-mail info@iccwbo.be. Infos : Paola Bulot, T 02 515 08 93.

Avec la collaboration de Katia Bodard, Policy Manager, ICC Belgique, Koen Vanheusden, Expert Réglementation, Agence pour le Commerce extérieur, et
Christophe Coulie, Legal Affairs Manager, Fédération des Chambres de Commerce et d’Industrie de Belgique.

MAI 2010 • 67
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LIFESTYLE Bizart

D'homme d'affaires à homme


de théâtre: le parcours étonnant
du patron du théâtre Le Public

Du privé au Public
Flamboyant directeur de théâtre, acteur, metteur en
scène, Michel Kacenelenbogen fut d'abord un
homme d'affaires avisé à la tête d'un groupe de
communication, KI Partners, qui employa jusqu'à 490
personnes et fut présent non seulement en Belgique
mais dans plusieurs pays européens. Une entreprise
que le comédien fonde en 1985 dans le but avoué de
réunir de l'argent et de créer une nouvelle scène
bruxelloise. C'est chose faite depuis 15 ans.
Cet ancien 'manager de l'année' dirige aujourd'hui
son théâtre en gardant à l'esprit son passé
d'entrepreneur. Une entreprise qui a longtemps été
privée, avant de se voir subsidiée. Ce qui pose parfois
problème à cet homme partagé entre l'amour
du théâtre et l'esprit d'entreprendre…

cles, ce qui impliquait de réunir des moyens, des artis-


tes, du public, une salle… mener à bien une petite en-

E
n quoi le métier d'acteur vous a-t-il aidé à aborder le treprise en quelque sorte. Bref, le metteur en scène se doit
monde de l'entreprise ? d'être aussi un décideur. L'homme qui m'a enseigné le sens de
la négociation est d'ailleurs un metteur en scène: Thierry Sal-
"Sans être acteur, je n'aurais pas pu, en tout cas au cours des mon. Dans le collectif que nous formions, où chacun était
premières années, jouer le rôle de chef d'entreprise qui fut le acteur tout en étant responsable d'aspects pratiques, il m'avait
mien, puisque je n'en avais pas la formation (rires). confié la recherche de sponsoring. Obtenir du sponsoring sous
Michel Bogen, patron de KI Partners, était au départ un per- forme d'échange sans avoir un franc forme à l'art de la négo-
sonnage. Lorsque je fonde mon entreprise, un prix d'art dra- ciation. Ironie de l'histoire, c'est donc un metteur en scène de
matique à la main, je ne puis être crédi- théâtre expérimental novateur qui m'a
ble qu'en interprétant, dans la vie réelle
cette fois et non plus sur une scène, un
rôle d'entrepreneur.
“Public
Nous constatons au
un accroissement
donné confiance en moi quant à ma
capacité à vendre."

Sans mon métier d'acteur, impossible de 'Le vrai capital, c'est la confiance en
m'identifier au chef d'entreprise que j'al-
de la fréquentation alors soi' est d'ailleurs votre leitmotiv…
lais devenir. A l'époque, je jouais en tant que le revenu moyen par "Tout à fait. Ceci inclut la remise en
que comédien sous le nom de Michel question et le doute. Le vrai capital se
Kacen. Bogen allait devenir le symbole
place, lui, diminue” situe à deux niveaux: l'idéologie que les
de ma carrière économique. parents inculquent, et l'amour qu'ils
Le métier d'acteur, basé sur l'expression et la prise de parole, donnent à leur enfant. Ces deux facteurs réunis fondent l'a-
s'est aussi révélé précieux dans l'aptitude à communiquer, que mour-propre que je nomme confiance en soi. Elle permet d'a-
ce soit avec mes collaborateurs ou mes clients… Enfin, dans border le monde avec un minimum de conviction."
son exploration de grands poètes et auteurs, la formation
d'acteur s'intéresse à la nature humaine sous tous ces as- Mais qu'entendez-vous par idéologie ?
pects... Et gérer une entreprise, c'est avant tout gérer l'humain. "J'ai été élevé dans le marxisme-léninisme, donc dans la remi-
Par ailleurs, avant de me lancer dans le monde des affaires, j'a- se en question du système capitaliste. Mais j'ai aussi été édu-
vais déjà eu l'occasion de mettre en scène pas mal de specta- qué dans la critique du marxisme, en tout cas de son applica-

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Bizart LIFESTYLE

© Th. Strickaert
tion. Tous ces outils m'ont permis de développer une analyse cri-
tique globale de la société. A l'époque par exemple, l'un des suc-
“Ma plus belle réussite
cès de mon entreprise se fondait sur mon niveau de salaire, égal à en tant qu'entrepreneur ?
celui de mes managers. Le personnel de KI Partners était d'ailleurs
bien mieux rémunéré que celui de la concurrence. Le partage des Celle que je réaliserai
revenus de l'entreprise dépassait les limites connues à l'époque
dans le secteur. Jamais je n'aurais agi ainsi sans l'éducation que j'ai demain !”
reçue, qui constitue une partie de la clé de la réussite."
Une des pièces qui évoque le mieux le monde de l'en-
La crise peut-elle avoir un effet positif, le théâtre servant de dis- treprise ?
traction face aux problèmes du quotidien ? "Mère courage de Brecht ou Dom Juan de Molière."
"Non. La crise a pour conséquence que le budget des gens diminue
et que le théâtre souffre. En revanche, nous constatons au Public un Le plus beau rôle de manager que vous ayez joué ?
accroissement de la fréquentation par rapport aux autres années "Celui de père."
alors que le revenu moyen par place, lui, diminue. Ceci s'explique
par exemple par le nombre d'articles 27, c.-à-d. les chômeurs et des Votre plus belle réussite en tant que comédien ?
personnes émargeant du CPAS qui peuvent assister aux spectacles "Monsieur Ibrahim et les fleurs du coran d'Eric Emmanuel
Schmitt, que j'ai joué 250 fois et que j'interprète toujours.
pour un prix dérisoire. En six mois, leur nombre a doublé ! Par
Au cinéma, mon rôle dans Coquelicots de Philippe
ailleurs, le théâtre a lancé un abonnement à prix réduit valable le
Blasband."
mardi et le mercredi, une formule qui rencontre un franc succès.
Il faut savoir qu'en Communauté française, la recette propre
En tant que metteur en scène ?
moyenne au théâtre tourne autour des dix pour cent. Une recette
"Kean d'Alexandre Dumas et Après la répétition d'Ingmar
propre étant une recette apportée par autre chose que de la sub- Bergman."
vention. Au Public, la recette propre est supérieure à la subven-
tion. La recette propre est d’un million sept cent mille euros, la Et comme entrepreneur ?
subvention étant d’un million trois cent mille euros. Le budget de "Celle que je réaliserai demain…"
la dotation théâtre en Communauté française étant de l'ordre de
quarante millions, ce théâtre reçoit donc un peu moins de cinq 

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LIFESTYLE Bizart

La Senne en
 pour cent des subsides, tout en faisant plus de vingt-cinq scène
pour cent de la recette spectateurs."

© Lone Twin Theatre


Quinze ans déjà que Le
Kunstfestivaldesarts propose
Vous venez pourtant de lancer un cri d'alarme ? une sorte de zinneke parade
"Non je n'ai pas lancé de cri d'alarme, mais lorsque les autori- des arts de la scène. Pour l'oc-
tés vous promettent un montant et vous le notifient, et que casion, les deux grandes Com-
Lone Twin Theatre:
vous vous engagez financièrement un an auparavant pour fina- The Festival à voir... et à en- munautés de ce pays unissent
tendre au Beursschouwburg leurs efforts pour proposer une
lement ne pas recevoir la somme promise, forcément vous du 19 au 22 mai.
êtes pris à la gorge. Le Public a déjà connu cette situation une vitrine du théâtre, de la danse
première fois dans le passé et est en train de la revivre du fait et de la musique contemporaine. L'évènement réunit
bien sûr des créations issues des deux côtés de la fron-
de la non-augmentation prévue de la dotation sur le budget
tière linguistique, qui disparaît dans ce Bruxelles qu'elle
2010. Un gel qui grève lourdement nos finances, ce budget
a choisi pour scène, mais elle accueille également sur
étant imputé un an à l'avance lors de la mise sur pied de la
ces tréteaux des créations venues de divers horizons,
présente saison. Dans pareille situation, on en vient à se de-
notamment d'Espagne, d'Iran, de Yougoslavie ou du
mander si ce n'est pas la mort de ce théâtre que l'on souhai- Burkina Fasso.
te… Mais je n'ai jamais lancé d'appel au secours. En 2002, les Provocants, drôles ou déroutants, les spectacles propo-
pouvoirs politiques ont désiré soutenir mon théâtre, et l'en- sés tranchent souvent par leur radicalité et les question-
semble des moyens reçus étant destiné aux artistes, j'ai accep- nements qu'ils renvoient à notre société moderne. Une
té leur aide, dans une structure qui, au départ et depuis 1994, fois encore, tout un mois durant, c'est une drôle de
se voulait entièrement privée. Mais si, à un moment donné, la scène qui va prendre ses quartiers dans la capitale.
promesse d'augmentation de la dotation n'est pas tenue, Bruxelles va bruisser de réflexions, de musiques et d'i-
comme c'est le cas actuellement, on se retrouve face à un dées et résonner d'une kyrielle de langues qui feront
énorme problème. D'où ma réaction…" de cette ville cosmopolite un bouillon de culture des
arts au zénith.
Vous gérez le Public comme une entreprise ?
"Mais c'en est une ! Cent personnes travaillent au Public dont Kunstenfestivaldesarts, à Bruxelles du 7 au 29 mai.
quarante permanents. Près de trois cents artistes viennent Renseignements: 070-222199, www.kfda.be
chaque année travailler au théâtre durant une période qui
varie d’un à six mois. Même s'il s'agit d'une ASBL, le Public est
bien une petite PME."
l'entreprise pris dans son ensemble me paraît finalement plus
A choisir, vous préférez la considération du milieu artis- curieux et plus ouvert que le monde artistique, beaucoup plus
tique ou celle du milieu de l'entreprise ? conservateur qu'il ne le prétend." 
"Je me garde de poser un jugement monolithique sur le Bernard Roisin
monde de la culture ou celui des affaires. Mais l'univers de

COUP DE DE LA RÉDAC DON JOSÉ

L'art lyrique est en fête re' sera cette fois tout en joie puisqu'il prendra 30/50/70’, hommage ému aux 30 ans de pré-
en ce mois de mai et pas les traits de José Van Dam, qui pour l'occasion sence sur notre scène du baron, à ses 50 ans
seulement parce que les fera des adieux enchanteurs à La Monnaie. de carrière internationale et digne célébration
Chœurs européens en- Notre José national a choisi ce rôle qu'il affec- de son 70e anniversaire.
tonnent l'hymne à la joie tionne pour tirer sa révérence en beauté.
le 8 mai venu. Ce joli Lui, qui avoue humblement n'avoir pas choisi
temps marque aussi, le Afin de célébrer les cinquante ans de carrière le métier, mais avoir été choisi par lui, confie :
14 exactement, le cente- de ce maître de musique, le Théâtre Royal de "Quand je suis sorti du Conservatoire de
naire de la première exé- la Monnaie entoure le baryton d'une produc- Bruxelles, de la classe d'Anspach, mon rêve
cution en Belgique du Don Quichotte de tion à la mesure de cet évènement exception- était de chanter ici, à Bruxelles". Il sera com-
Jules Massenet. Le compositeur, qui a 68 ans nel. A cette occasion en effet, Marc Minkowski blé, car le 8 mai, jour de la Fête de l'Europe,
lorsqu’il compose ce 'Don Quichotte' en 1910, reprend la tête de l’Orchestre symphonique et sa performance sera retransmise en direct sur
est alors au sommet de sa notoriété et met des Chœurs de la Monnaie et dirige pour la la Grand-Place de Bruxelles. Ce soir-là, José
toute sa fantaisie et son sens mélodique au première fois cette œuvre de Jules Massenet. Van Dam et son public auront vraiment la tête
service de cette 'Comédie héroïque', dont dans les étoiles...
l'humour et l’émotion sont les ressorts drama- Le 23 mai 2010 aura lieu à la Monnaie un
tiques essentiels. Le 'Chevalier à la triste figu- concert exceptionnel ‘José van Dam, www.lamonnaie.be

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La bonne table de … LIFESTYLE

Souvenirs en bord de Meuse,


L’avis du critique
à l’Héliport L’Héliport
C’est en face du Palais des Congrès de Liège
Bruno Venanzi, le cofondateur et patron de Lampiris, le fournisseur d'é- que Frédéric Salpetier a pris place aux four-
neaux il y a quelques années. Certains s’éton-
lectricité verte, hésitait entre plusieurs restaurants 'coup de cœur' dans neront de devoir sonner pour se voir ouvrir la
sa ville de Liège. La Cantinetta, un italien qui lui rappelle ses origines; le porte mais une fois la porte franchie, le cadre
7&3, une adresse plus branchée, et l'Héliport, valeur sûre de la gastro- rassurant et agréable aide à se détendre. En
soirée, la féérie des ponts illuminés sur la
nomie en bord de Meuse. Finalement, Bruno Venanzi décide de nous
Meuse offre une vue exceptionnelle et apai-
faire découvrir ce dernier, parce que c'est tout simplement 'le meilleur sante. Quant à l’ambiance mi-lounge, mi-
de Liège' et parce qu'il est situé dans le quartier mosan où le jeune marine, elle s’accommode d’un élégant bar
entrepreneur a grandi. où trônent les habitués pour l’apéritif.

Dans l’assiette
La cuisine revisite les grands classiques don-

F
igure de proue d'une nouvelle génération d'entrepreneurs liégeois, Bruno Venanzi sait nant ci et là quelques petites touches de mo-
ce que prendre des risques veut dire. Il a osé défier les mastodontes Electrabel ou Lumi- dernité. Pour débuter, les Saint-Jacques nous
nus en lançant en 2003 avec un autre Bruno (Vanderschueren) la 'petite' Lampiris, qui avec déçurent de par leur peu de saveur malgré
environ 80 personnes est le premier électricien à proposer uniquement de l'énergie verte. leur compagnon d’assiette, un foie de canard
goûteux et bien réalisé. Très bel équilibre en-
Pour une fois, pour le choix de sa 'bonne table', il joue la sécurité en optant pour l'Héliport.
suite, avec notre ravioli de King crabe et son
Pratiquement les pieds dans la Meuse, en plein centre de la Cité ardente, ce haut-lieu de la
émulsion de curry. L’œuf poché était par cont-
gastronomie liégeoise est effectivement toujours flanqué d'une piste pour hélicoptère, utili- re en retrait malgré un lomo iberico et quel-
sée jadis par la force aérienne. Le décor est quant à lui plutôt inspiré d'un autre type de port, ques asperges de belle facture. Beau mariage
fluvial celui-là, avec divers éléments (lucarnes, mobilier) plus marins qu'aériens. d’agneau et d’artichaut pour suivre même si,
"Ce qui m'attire dans ce resto au moins 3 ou 4 fois par an ? C'est avant tout la qualité et la à nouveau, les préparations classiques man-
maîtrise parfaite des plats. Vient ensuite le cadre exceptionnel, avec cette vue très apaisante quaient un rien de relief. La carte des vins
sur la Meuse et la magnifique terrasse les beaux jours. J'ai fait la connaissance du chef, offre un vaste choix tant pour les amateurs de
découverte que pour les buveurs d’étiquette.
Frédéric Salpetier, et l'autre cofondateur, Emmanuel Nava, est un ami d'enfance. En fait, c'est
mon quartier ici. J'ai grandi à deux pas d'ici", explique Bruno Venanzi. Cet entrepreneur de Conclusion
40 ans, qui a compris qu'on pouvait faire du business sérieusement sans trop se prendre au Une impression en demi-teinte en regard de
sérieux, aurait également pu mentionner l'aguichante carte de vins, faisant la part belle à des ce que nous avons déjà vécu comme expé-
découvertes à prix abordables. Mais il est au régime 'eau minérale' pour préparer son premier riences dans cette maison. Le cadre et le per-
sonnel restent très agréables mais certains
marathon, Liège-Maastricht, dans quelques semaines. Un autre plaisir en somme.
envois appellent à un peu plus de rigueur…
Son plus grand souvenir culinaire à ce jour ? "J'ai fait le voyage en Transsibérien avec deux
surtout en connaissant le talent du chef.
amis il y a quelques années. Je me souviendrai longtemps du changement de wagon-restau-
rant à la frontière russo-chinoise. Les mets chinois servis à partir de ce moment étaient aussi Philippe Limbourg, rédacteur en chef du guide
Gault Millau Belux
délicieux que la nourriture russe avait été exécrable jusque-là. Ce contraste restera une gran-
de expérience culinaire." 
OF

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LIFESTYLE Tendances

Succombez-vous également au 'vintage' ?

Les antiquités de demain


Le 'vintage' représente un investissement attrayant, entre les antiquités qui s’avèrent trop chères et la
brocante, trop bon marché. "Le vintage d’aujourd’hui, ce sont les antiquités de demain" : voilà, en quel-
ques mots, comment Huub Suidman, expert international et commerçant, résume le pouvoir d’attrac-
tion du 'vintage'.

A
u sens le plus strict du terme, le 'vintage' ne concerne lés 'vintage'. Certains commerçants considèrent même des
que la présentation de meubles et autres objets design objets design anonymes comme du 'vintage' pour autant
qui ne seront jamais plus réédités. "Leur valeur ne peut qu’ils soient beaux et du vingtième siècle.
qu'augmenter", souligne Marcy Michael, de la galerie de de-
sign anversoise du même nom. Cette définition stricte semble La ®évolution du vingtième siècle
difficile à utiliser dans la pratique. Des originaux historiques tels Au niveau international, les années vingt du siècle dernier ont
que la chaise Wassily de Marcel Breuer et la Chaise Longue LC4 constitué une révolution pour le mobilier et les objets design.
de Le Corbusier sont d’un prix à peine abordable, même pour Des géants comme Breuer et Le Corbusier se sont reconvertis
les riches. En plus, de tels objets uniques sont rarement propo- vers des conceptions strictes mais élégantes en se basant sur
sés, voire jamais, en bon état sur le marché public. C’est d’ail- de nouveaux matériaux. L’Exposition de 1958 a représenté une
leurs pour cette raison que l’on autorise de plus en plus des véritable percée pour la Belgique, au niveau national. Un vent
rééditions officielles de tels objets design de premier plan qui d’optimisme et d’esprit d’entreprise, neuf et rafraîchissant,
se vendent en tant que 'vintage'. Plus fort encore, il y a même encourageait des architectes et d’autres concepteurs à se met-
des meubles et des objets design restés en production sans dis- tre à l’œuvre, avec témérité et le regard résolument tourné
continuer depuis leur introduction, qui sont actuellement appe- vers le futur. Ce sont les Pays-Bas qui ont montré la voie, tant

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Tendances LIFESTYLE

Design Gallery Marcy


Michael, synonyme
du design belge
La Design Gallery Marcy Michael se situe au cœur des com-
merces d’antiquités et de brocante à Anvers. Cette galerie y
vend des meubles originaux et autres objets design du ving-
tième siècle. "C’est encore et toujours sous-estimé", estime
Marcy Michael. L’Anversois nous montre des objets excep-
tionnels de designers belges. Nous nous souvenons des créa-
tions magistrales de Lucien Engels, Alfred Hendrickx, Willy
Van der Meeren – trois architectes et/ou créateurs de meu-
bles des années vingt qui ont fait la mode – et des autres
objets un peu plus frivoles de Pieter De Bruyne et de Claire
Bataille. L’un après l’autre, tous ces objets symbolisent un
design très à l’avance sur
son époque – et qui l’est
parfois encore, d’ailleurs.

Design Gallery Marcy


Michael, Hoogstraat 42,
2000 Anvers,
tél. 0476 22 80 22,
www.marcymichael.com,
info@marcymichael.com

au niveau national qu’international. "Les Hollandais avaient perdu


énormément pendant la Seconde Guerre mondiale", suggère
Diane Wolf, chef d’entreprise de la société liégeoise Design
20ème Siècle, 'vintage' dans
Retro. “Cette situation leur a peut-être rendu plus aisée la recon- la rue Haute à Bruxelles
version vers le nouveau design”.

Le ‘20ème Siècle’ a son adresse dans la Mecque belge du 'vin-


Le Hollandais Huub Suidman, fondateur et
tage', dans la rue Haute à Bruxelles. C’est là que ce magasin
inspirateur de Moetkunsten sera heureux
propose depuis un an des meubles de qualité et d’autres
de l’entendre. "Après la Seconde Guerre objets design à des prix démocratiques. Les années cinquan-
mondiale, les Hollandais écartent leur mo- te et soixante y occupent une place évidente. Le bois confère
bilier et leur équipement de maison pour le ton et l’atmosphère de ce
accueillir chez eux des objets américains et commerce. Grâce à son empla-
scandinaves", ajoute-t-il. "C’est pourquoi cement, il s’adresse à une clien-
on trouve énormément de 'vintage' prove- tèle variée : non seulement aux
nant surtout de la Scandinavie. Jusqu’il y a ‘Bruxellois branchés’ mais éga-
peu, les Belges se tournaient plutôt vers le lement aux ‘BCBG cosmopoli-
tes’, qui le fréquentent volon-

“d’objets
tiers afin d’aménager leurs inté-
Les Belges achètent de plus en plus rieurs. Au ‘20ème Siècle’, ils peu-
aux lignes plus strictes prove- vent sélectionner leurs objets
favoris soit sur place ou bien
nant de la Scandinavie” Huub Suidman (Moetkunsten) également sur le net. Le maga-
sin propose, off line et online, un éventail exceptionnel d’ob-
jets design haut de gamme du siècle passé – exactement
marché français, mais maintenant, ils achètent de plus en plus
dans l’esprit de son nom.
d’objets aux lignes plus strictes provenant de la Scandinavie”. Le
vent nouveau souffle du nord, c’est clair. Mais cela n’a pas toujours 20ème Siècle, rue Haute 22, 1000 Bruxelles, 0477 38 85 56,
été le cas. L’Art nouveau et l’Art déco déterminaient l’aspect de www.20emesiecle.be, e-mail info@20emesiecle.be
nombreux intérieurs en Belgique auparavant. S’il pleuvait à Paris, 

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LIFESTYLE Tendances

Design Retro, un véritable


 il tombait des gouttes à Bruxelles. Ce n’est que
sous l’influence du post-modernisme que les épo-
repère de trésors de tous
ques et les styles se sont mélangés à un niveau plus horizons
mondial. "Actuellement, les Hollandais achè-
tent également de l’Art nouveau", admet Diane Chez Design Retro, Diane Wolf annonce la
Wolf. "Mais, dans ce domaine, les Hollandais couleur. C’est la passion pour le 'vintage' qui a
dévoilent d’autres goûts que les Belges". Les inspiré à cette infirmière l’ouverture d’un
goûts et les couleurs se mélangent de plus en magasin sympathique sur le Quai des
plus. "Quoiqu’il en soit, ce sont nos voisins du Tanneurs. Elle y accueille des invités de tous
les horizons : pas uniquement des quatre coins
nord qui introduisent les nouvelles modes". Au-
de Belgique, des Pays-Bas et d’Allemagne,
jourd’hui, s’il pleut à Amsterdam, il tombe des
mais également de France, de Grande-
gouttes à Paris…
Bretagne, d’Italie et même des États-Unis.
Diane Wolf est connue depuis longtemps pour
Plus la ville est grande, plus elle est également son travail sur commande. Elle a déjà effectué
importante pour les collectionneurs de 'vintage'. le décor de plus d’un film ou d’une exposition,
Paris, Londres et Amsterdam sont les centres inter- seule ou en collaboration avec d’autres. Plus fort encore, à la deman-
nationaux qui donnent le ton dans notre zone géo- de d’un client, elle aime partir à la recherche d’un objet. Forte de
graphique. Le marché est limité dans notre pays. son expérience, elle opte alors pour le contact off line ou online.
Outre le Sablon à Bruxelles et la Rue Haute à An- Finalement, c’est en allant sur place que le client pourra se rendre
vers, Gand et Liège sont les principaux pôles d’at- compte de toutes les merveilles que Design Retro a à offrir.
traction d’envergure nationale. Certains magasins
et marchés de plus petites cités apportent égale- Design Retro, Quai des Tanneurs 12, 4020 Liège, tél. 0477 65 75
ment quelque satisfaction aux collectionneurs 18, www.designretro.be, e-mail diane@designretro.be
acharnés. La pression exercée par l’Internet a inten-
sifié la mondialisation du phénomène du 'vintage'.
Les conséquences de cette situation peuvent être
bonnes ou mauvaises : bonnes parce que, grâce à l’internet, nombreux magazines de luxe, de maisons ou d’intérieurs. En-
l’offre ne connaît plus de frontières, et mauvaises, car la contre- fin, les amateurs restent évidemment l’élément le plus impor-
façon y empoisonne littéralement le nouveau marché mondial. tant pour notre marché."
Les connaisseurs adoptent d’ailleurs une attitude sceptique vis-
à-vis de l’internet. La règle d’or dit qu’il vaut mieux que les Les amateurs apprennent le plus souvent à collectionner le 'vin-
acheteurs contrôlent méticuleusement les pièces sur place. tage' à leurs dépens. "Ce n’est que lorsque vous devenez con-
naisseur que vous reconnaissez immédiatement un original

“Aujourd’hui, ce sont nos voisins du


d’un faux", estime Marcy Michael. "Vous devez étudier pour
apprendre à reconnaître la qualité. Dans notre domaine, le sno-
bisme présente un grand danger". Comment les débutants
nord qui introduisent les nouvelles peuvent-ils, d’après lui, éviter trop de déboires ? "Avant tout,
modes” Diane Wolf (Design Retro) les vieux objets ne peuvent jamais être en bon état", avertit-il.
"La petite histoire veut qu’ils proviennent d’un vieux stock. Il
s’agit le plus souvent de copies. Chaque pièce a son prix. Un
Astuces objet à la moitié du prix, c’est suspect". Huub Suidman con-
Les collectionneurs de 'vintage' sont aussi aventureux que va- seille de demander à vérifier l’origine. "Une marque, un cachet
riés. Ils ont souvent la trentaine ou la quarantaine et ils en veu- ou une plaque peut prouver l’originalité d’une pièce", avise-t-
lent pour leur argent. Pour eux, les antiquités sont trop coûteu- il. "Le mieux est une facture. De tels repères peuvent prouver
ses et la brocante, trop bon marché. Avant la chute du dollar, les l’âge de l’objet à une année près. Mais, il subsiste quand mê-
Américains étaient de fidèles clients des commerçants de vin- me une question de connaissance. La plupart des objets ne
tage européens. Depuis lors, nous les Européens, nous y avons sont absolument pas cotés".
pris goût. Nous décorons nos intérieurs avec du vintage unique,
nous échangeons des pièces moins prisées contre d’autres plus Bref, collectionner le 'vintage' est et reste une aventure pas-
en vogue, nous nous reconvertissons même parfois dans le sionnante. Ce qui fait la différence, ce n’est pas seulement l’a-
commerce, que ce soit ou non via eBay. "Tout le monde peut mour pour un objet, mais aussi la connaissance de cet objet.
collectionner le vintage", affirme Huub Suidman. "Certains col- D’une manière générale, la valeur du 'vintage' augmente au
lectionneurs d’art avisés en prennent de plus en plus souvent. cours des années. La valeur potentielle d’un objet s’accroît dans
Il s’agit indubitablement d’une tendance de ces dernières an- la mesure où il correspond aux termes les plus stricts de la défi-
nées. Les acheteurs vraiment fortunés ne rencontrent plus au- nition du 'vintage'. Le 'vintage' d’aujourd’hui deviendra alors
cun problème à ce sujet. À présent, ils ne décorent plus uni- les antiquités de demain. 
quement leurs demeures d’objets d’art mais également de Seger Bruninx
'vintage'. Il s’inscrit parfaitement dans leur ‘lifestyle’ – voyez les

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BUSINESS En marge

Randstad et la Ville de Bruxelles ouvrent


un bureau d'intérim social à Laeken

“Y
es, you can”. C'est le message principal que le nouveau et après les missions. Il s'agit
bureau d'intérim social Potentia veut donner aux jeunes avant tout de leur apprendre des
chômeurs de Laeken, où un jeune sur trois de moins de attitudes positives afin qu'ils fas-
trente ans ne trouve pas de travail et où 70% d'entre eux disposent sent preuve du dynamisme, de la flexibilité et de la motivation
tout au plus d'un diplôme du secondaire inférieur. Le travail intéri- nécessaires pour exploiter au maximum les opportunités qui se pré-
maire, comme l'a révélé récemment une étude de la fédération pro- sentent", explique Eddy Annys, membre du comité de direction de
fessionnelle Federgon, reste pour les sans-emploi le principal trem- Randstad. Et les employeurs potentiels ? Sont-ils ouverts à la propo-
plin vers un travail. Mais les jeunes de Laeken nécessitent un "accom- sition? Béatrice Culot, directrice de la Mission Locale d’Anderlecht,
pagnement hyperpersonnalisé", a déclaré le bourgmestre de Bru- sait d'expérience que "ce sont surtout les grandes entreprises qui
xelles Freddy Thielemans à l'occasion de l'ouverture officielle du ont le temps et les ressources pour donner une chance à de tels jeu-
bureau. Qu'est-ce qui différencie Potentia d'un autre bureau d'in- nes. Dans de plus petites structures, les employeurs s'attendent à ce
térim ? "Nous croyons que ce partenariat public-privé entre la Ville que ces jeunes fassent leur job d'une façon correcte et efficace".
de Bruxelles, les instances locales et régionales et Randstad, est le Dans les deux semaines qui ont précédé son ouverture officielle,
moyen par excellence pour mettre au travail des jeunes sans-emploi. Potentia a déjà rassemblé 50 C.V. valables et deux contrats ont déjà
Nous voulons aider ces jeunes sans expérience à construire un pro- été signés. "Cette partie de la ville est promise à une renaissance : la
jet professionnel clair rénovation de Tour & Taxis, l'activité industrielle du Port de Bruxelles
et leur donner une ou le Heysel offrent pas mal de possibilités", conclut avec optimisme
chance en les coa- Leila Opdebeeck, coordinatrice de Potentia. 
chant avant, pendant SBR
1.200 km pour
promouvoir l'effica-
cité énergétique
Mi-avril, huit collaborateurs de
Johnson Controls, société spéciali-
Bientôt un ‘Label Egalité Européen’
sée dans l'amélioration de l'efficacité

L
énergétique des bâtiments, ont pris e premier Fonds de dotation européen pour l'égalité
le départ d'une randonnée en vélo professionnelle, Arborus, vient de voir le jour. "Ce Fonds
reliant Bruxelles à Monaco. Ils ont veut promouvoir une culture européenne commune en
franchi la ligne d'arrivée le 25 avril, matière d'égalité professionnelle. Il vise à renforcer la place
juste à temps pour l'ouverture du des femmes dans les entreprises, dans tous les métiers et à
premier forum euro-méditerranéen tous les niveaux hiérarchiques. Les entreprises qui y participe-
sur l'efficacité énergétique. A travers ront pourront y mutualiser leurs moyens et savoirs, notam-
ce voyage, la société voulait montrer ment via un benchmark européen et international des straté-
qu'il est temps d'agir pour lutter gies de ressources humaines en la matière", explique Cristina
contre le changement climatique,
Lunghi, directrice générale du Fonds de dotation Arborus
notamment en travaillant sur l'effica-
"L'égalité professionnelle est pour l'égalité professionnelle en Europe. "L'égalité profes-
cité énergétique des bâtiments qui un enjeu économique, sionnelle est aujourd'hui un enjeu économique, de compétiti-
de compétitivité et de
performance" vité et de performance pour les entreprises", poursuit-elle.
Etant donné son statut juridique, le financement du Fonds ne
provient que d'entreprises privées. Mais il peut compter sur le soutien des institutions euro-
péennes. Lancé essentiellement par de grands groupes français, il souhaite dans les mois qui
viennent accueillir en son sein de nouvelles entreprises actives sur le territoire européen.
"Dans une phase ultérieure, nous comptons toucher les PME par le biais du système de la
sous-traitance."

L'une des premières actions du Fonds sera de lancer le ‘Label Egalité Européen’. "Ce label
est, selon elle, une des actions les permettra d’avoir un outil de pilotage européen de la politique des ressources humaines
plus rapides et les moins coûteuses des entreprises, tout en valorisant les initiatives nationales existantes", conclut Cristina
d'y parvenir. Lunghi. Bureau Veritas Certification a été choisi comme organisme certificateur de ce label
européen. 
FD

76 • MAI 2010
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Livres LIFESTYLE

Le choix de JOS LINKENS,


administrateur délégué de
Résilience organisationnelle. Rebondir face aux
turbulences Neuhaus
Guy Koninckx et Gilles Teneau
"Je ne lis pas de littérature
Toutes les organisations traversent des turbulences et des
pour en savoir plus sur les
crises. Ces situations conduisent à des pertes de repères et
affaires, mais bien sur les
de sens. Les identités ne sont pas épargnées. Dans de tel-
hommes." Voilà qui donne le
les circonstances, comment rebondir ? Quels moyens met-
ton. Dans la vie profession-
tre en œuvre pour favoriser la résilience, cette capacité à nelle, Jos Linkens n'a rien
faire face à l’adversité ? Les auteurs présentent ici le cadre conceptuel de d'un 'littéraire'. À la tête de
la résilience, différents modèles, une démarche opérationnelle et un Neuhaus depuis 2004, l'hom-
ensemble d’outils appropriés. Le modèle CIRERO permet de positionner me se donne à fond, tant par
les organisations sur les trajectoires de résilience. Des stratégies particu- 'amour' pour les produits gas-
lières sont recommandées en fonction des situations de crise. tronomiques que pour réaliser un grand
de boeck, 2010, 32,50 EUR, ISBN : 2804116263 virage. Sous son impulsion, le maître choco-
latier Neuhaus a en effet doublé son chiffre
La médiation civile et commerciale. Comment éviter les d'affaires et s'est transformé en un des fabri-
aléas, le coût et la durée d’un procès cants de chocolats les plus rentables de
Pierre-Paul Renson Belgique, présent dans plus de 50 pays. Jos
L’auteur a choisi d’analyser les divers aspects du droit et de Linkens a reçu 'Corps et âme' (de l'écrivain améri-
la pratique de la médiation – un formidable instrument de cain Frank Conroy) de la part de son épouse, qui
avait demandé conseil auprès de son libraire attitré.
règlement des conflits permettant d’éviter les aléas, le coût
"Corman, une des rares librairies où le conseil est
et la durée d’un procès – par le biais de vingt-trois ques-
encore roi. On lui avait conseillé ce livre après
tions. Les réponses nous renseignent en suivant un ordre
qu'elle ait dévoilé mes goûts littéraires et musi-
logique sur l’opportunité de recourir à la médiation, sur la qualité des par-
caux." L'histoire se passe à New York à la fin des
ties qui peuvent y recourir, sur le choix d’un médiateur et sur son rôle, sur années 1940. Un petit ‘Wunderkind’, Claude
le caractère confidentiel d’une telle procédure et, enfin, sur ses effets. Le Rawlings, passe ses journées à regarder le monde
lecteur peut choisir de ne consulter que certaines questions, puis d’ap- extérieur depuis une cuisine-cave de la 3e Avenue.
profondir ses connaissances par la suite. Un lexique explique les princi- Jusqu'au jour où il trouve, enseveli sous une monta-
pales notions juridiques employées. gne de vieux papiers, un petit piano désaccordé.
Anthemis, 2010, 32,50 EUR, ISBN: 978-2-87455-221-2 Claude Rawlings, comme par magie, va se découvrir
lui-même : il 'est' musicien. Sa vie se trouve transfi-
Au cœur de votre réussite… le marketing gurée par cette découverte, qui fera de lui un musi-
Thierry Colmant cien de renom, ovationné à Carnegie Hall. "S'il y a
Au cœur de l’entreprise, le marketing est une clé incontour- bien un lien entre ce livre et le monde du business,
nable de son succès. Thierry Colmant a choisi de se pen- c'est celui-là : l'importance de transmettre aux jeu-
cher essentiellement sur le marketing appliqué aux PME et nes gens talentueux l'expérience et la connaissan-
TPE. Il nous propose un ouvrage conçu pour devenir une ce, de sorte qu'ils apprennent à se surpasser."
référence méthodologique indispensable, destiné à tous
La beauté, pour décompresser et recharger
les managers ou porteurs de projets. Cette analyse com-
Mais la qualité de l'écriture et le contenu du livre
plète illustrée de nombreux cas concrets permettra d’exploiter au quoti-
l'emportent sur toute autre considération. "La beau-
dien toutes les ressources du marketing et d’assurer ainsi le développe-
té – qu'elle soit liée à l'écriture, l'art plastique ou la
ment rapide et performant de l’entreprise. musique – détend, apaise et, inconsciemment,
edipro, 2010, 36 EUR, ISBN : 978-2-87496-066-6 recharge notre cerveau pour l'activité 'terrestre' qui
suit. Une réflexion que m'inspire ce livre: que beau-
L'atlas du management - 2010/2011. L'encyclopédie du coup de gens ont finalement le potentiel pour briller
management en 100 dossiers-clés dans leur discipline, grâce à une combinaison forte
David Autissier, Faouzi Bensebaa et Fabienne Boudier d'intérêt, de passion, de travail et de guidance de la
Quelles sont les évolutions mondiales qui modifient la ges- part de personnes qui croient en eux et, oui, aussi
tion et le fonctionnement des entreprises ? Quelles sont les d'un brin de chance." C'est donc sur ce fond de
stratégies gagnantes et les entreprises qui réussissent ? fresque foisonnante ayant New York (en pleine muta-
Quelles sont les nouvelles techniques de gestion utilisées tion et guerre contre le communisme) pour sujet que
par les entreprises ? Comment évolue le management des femmes et des Frank Conroy – lui-même musicologue et pianiste de
hommes ? Quels sont les livres, sites et personnes marquantes du monde jazz – détricote les genres musicaux les plus variés.
de l'économie et de la gestion ? Organisé en 5 thématiques, cet ouvrage "Après ce plaisir de 700 pages, il est plutôt dur de
renouer avec la réalité des chiffres et des parts de
aide les chefs d'entreprises et managers à faire le point rapidement sur
marché. Au final, ce livre est captivant et bien ficelé.
les principales tendances à retenir dans un environnement économique
Il permet une belle échappée vers autre chose, un
en perpétuelle mutation.
autre monde. Comme celui de la musique.
Editions d'Organisation, 2010, 30 EUR, ISBN: 2-212-54486-3
Quoique, là aussi, les dollars ont leur importance."
Frank Conroy, Corps et âme, Gallimard, Folio, 204,
ISBN-10: 2070314391
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Ils bougent BUSINESS

Euler Hermes Belgique Duomedia PR

B D
runo Verhofstede est devenu le 1er uomedia PR annonce la création d’un groupe d’experts pour soutenir la
mai 2010 le directeur général de la croissance permanente de l’entreprise. Johnny Kegels en sera conseiller
filiale belge de l’assureur-crédit Eu- externe, ainsi que René Delbar qui en sera aussi le président. Anja René Delbar
ler Hermes. Verhofstede a construit sa D’Hondt et Jo De Pooter y représenteront le management.
carrière chez ING et René Delbar a débuté sa carrière chez Agfa-Gevaert et est ensuite passé chez Barco
était encore récem- Graphics (aujourd’hui EskoArtwork). Il est aujourd’hui actif en tant que Strategic
ment le managing di- Business Consultant pour des sociétés technologiques innovantes, et il soutient les
rector d’ING Commer- clients Duomedia en faisant de la consultance stratégique et en donnant des forma-
cial Finance Belux. Au tions media. Kegels est le fondateur et a été pendant près de 15 ans le directeur de
sein du groupe ING, il l’agence belge de relations publiques 'PR Force', jusqu’à la reprise de celle-ci par
a exercé des fonctions Incepta. Il possède actuellement sa propre société d’investissement, SGVO, et fait de
Johnny Kegels
commerciales aussi la consultance en tant que 'Business Angel'. Duomedia a ses bureaux principaux en
bien à Bruxelles qu’à Belgique près de Bruxelles, avec des managers en relations publiques régionaux à Munich, Francfort,
Bruno Verhofstede Amsterdam, il est in- Milan, Londres, Paris, Barcelone et Hong Kong. 
tervenu dans le développement de nou-
veaux produits, et il a acquis une certai-
ne expérience dans la gestion de ris- IBM
ques. Il est titulaire d’un master en ges-

A
tion d’entreprise à l’I.C.H.E.C., et a suc- près 8 ans à la tête d’IBM Belgium/Luxembourg, Bart Van Den Meersche
cédé à Etienne Defraigne, CEO par inté- cède sa place à Jacques Platieau. Ce dernier reprend les rênes et porte dé-
rim d’Euler Hermes Belgique depuis juin sormais les titres de country general manager IBM Belgium/Luxembourg et
2009. Ce dernier devient aujourd’hui le de sector leader Benelux. Platieau a commencé à travailler chez IBM en 1984 dans la
directeur financier pour la région Europe division Télécommunications. Il a exercé plusieurs fonctions au niveau local et inter-
Jacques Platieau
du nord du groupe Euler Hermes. Cette national. Depuis juillet 2005, il était le general manager de la Division Global Business
région compte 17 filiales du groupe Services pour le Benelux. Bart Van Den Meersche a quant à lui été nommé vice-président Industries
Euler Hermes, dont la Belgique.  & Business Development, IBM Southwest Europe. Van Den Meersche fait ainsi dorénavant partie de la
European Leadership team, mais il continuera à travailler depuis Bruxelles. 

Bosch Benelux
Foyer S.A.

E
ric Bazile est depuis le 1er février

L’
de cette année le managing direc- assemblée générale des actionnaires de Foyer S.A., un groupe d’assurance luxembourgeois,
tor de la société technologique et a en début de mois dernier nommé administrateur Michel Tilmant, auparavant CEO d’ING
prestataire de services Robert Bosch Group. Tilmant devient également administrateur de CapitalatWork Foyer Group, une filiale
Benelux. Il succède à cette fonction à à part entière de Foyer S.A.. CapitalatWork est une société européenne de Gestion de Patrimoine
Matthias Lanwehr, qui retourne en Alle- pour les clients privés et professionnels. 
magne pour devenir
managing director de Ascure
Johanna Solar Tech-

A
nology GmbH. Bosch scure S.A., société de consultance active dans l’operational risk management, renforce son
compte en Belgique à conseil d’administration par les personnes de Georges Anthoon (AXA Banque), Karel Baeck
peu près 2.000 colla- (ex-RVA) et John Dejaeger (Arpadis), trois gestionnaires d’entreprises bien connus dans le
borateurs, répartis dans monde économique belge. Le conseil d’administration d’Ascure compte à présent 7 membres. La
différentes divisions. société gantoise profite, depuis ses débuts en 2000, d’une croissance ininterrompue mais aussi de la
Eric Bazile est porteur crise économique actuelle. Ascure a pour objectif de croître cette année encore de plus de 15% en ter-
d’un diplôme de l’Eco- mes de chiffre d’affaires et de personnel, selon son CEO Filip De Wolf. 
le Supérieure de Commerce de Paris et
est vérificateur des comptes. Il a travaillé
pendant 7 ans en tant qu’auditeur et
Le Français Fabrice Chouraqui est nommé CEO de est le nouveau directeur de Harol France, et la gestion
consultant financier chez Arthur An- Novartis Pharma Belgium et country president de de la qualité tombe sous l’escarcelle de Jan De Lobel
dersen. Il a commencé sa carrière chez Novartis Belgium >> La psychologue Valerie >> Tempo-Team nomme Ann Verleye en tant mana-
Bosch en tant que directeur de la comp- Deweirdt a récemment pris la fonction de consultante ger HR Services >> Et chez Capgemini Consulting, le
chez Quintessence >> Annick Draelants reprend la mathématicien et informaticien Herman Herteleer
tabilité et de l’audit interne chez Robert direction commerciale au directeur général Helmut devient, en tant que 'ICT strategy principal', responsa-
Bosch France SAS. Il est devenu direc- Schmitz dans l’entreprise familiale Harol. Alain Goffart ble de la 'Technology Transformation'.
teur financier en 2001. 

MAI 2010 • 79
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BUSINESS Portrait du mois

France Fannes
Prête à jouer les passerelles
à la tête de BioWin

D
ébut de cette année, France Fannes (48 ans) a pris la tête
de BioWin, le pôle de compétitivité wallon dédié au sec-
teur de la santé et des biotechnologies. Elle a pour mis-
sion de concrétiser une nouvelle vision stratégique et un plan
d'actions de 4 ans. Lancé en 2006, BioWin dispose pour la pério-
de 2010-2014 d'un budget global de 52,4 millions EUR (de la
Région wallonne et de financements privés). 89 acteurs (23 PME,
4 grandes entreprises et 62 laboratoires de recherche) y sont
impliqués. Le nouveau plan met particulièrement l'accent sur le
développement des PME wallonnes.

A cet égard, le profil très 'PME' et 'start-up' de France Fannes est


certainement un atout pour une organisation à qui on reproche
souvent de servir majoritairement les grands noms bien établis.
© Michel Houet Biowin DR

Cette scientifique de formation reste d'abord quelques mois dans


le giron de l'université, mais elle réalise assez vite que la recher-
che académique ne lui convient pas. Elle rejoint alors BioLab, un
laboratoire privé d'une cinquantaine de personnes dans le Bra-
bant wallon, dont elle deviendra responsable de production puis
responsable R&D. Après le rachat par une entreprise américaine,
France Fannes aura l'opportunité de s'expatrier vers la maison-
mère, "mais je n'ai pas eu envie de m'installer aux Etats-Unis pour Un autre atout est certainement sa bonne vision du secteur des
deux côtés de la frontière linguistique : "Le secteur biotechnolo-

“lesUne
gique connaît en Flandre une évolution fulgurante depuis 13 ans.
chef d'entreprise qui comprend Il y règne un pragmatisme intéressant et une grande ouverture".
besoins des PME et dispose en Kris Willems, professeur à la KUL, a travaillé avec France Fannes
au lancement de BioArt et a collaboré à divers projets de recher-
plus d'un background scientifique” che avec elle. "Sans être une scientifique de pointe, France Fan-
nes comprend le langage des chercheurs et est capable de valo-
des raisons culturelles", explique-t-elle. En 1996, elle préfère créer riser leur travail. Ce genre de personnes, qui savent faire l'interfa-
sa propre société, mais, dit-elle, le manque d'infrastructures de ce entre la recherche et le développement de produits, sont plu-
recherche et d'accompagnement en Wallonie la pousse assez tôt rares. Elle peut sans problème jouer ce rôle, tout comme jeter
rapidement à jeter l'éponge. Sa nouvelle mission vise précisé- des ponts entre les paysages biotechnologiques flamand et wal-
ment à limiter ce risque de mésaventure... lon." Kris Willems a été impressionné par la capacité de travail de
France Fannes et son énorme détermination. Une qualité qui, se-
Une Bruxelloise qui a entrepris en Flandre lon lui, pourrait devenir un défaut si elle ne fait pas preuve de la
Autre ironie de l'histoire, vu le côté très wallon de BioWin : entre- patience et de la psychologie nécessaire dans sa nouvelle fonc-
preneuse dans l'âme, la Bruxelloise France Fannes ne désarme tion 'carrefour' (entre les mondes économique, académique et
pas, et sous le conseil d'un ami flamand, crée BioArt à Sint- politiques).
Katelijne Waver. BioArt, PME de 6 personnes, fournit des tests de
diagnostic rapide destinés au secteur biomédical. "BioWin me Jean Stéphenne, président de BioWin et par ailleurs président de
permet de retrouver le contact avec le monde académique, mais GSK Biologicals, voit surtout en France Fannes "une chef d'entre-
sans y être pleinement et en gardant le contact avec le monde de prise qui comprend les besoins des PME et dispose en plus d'un
l'entreprise et de l'entrepreneuriat. J'ai essentiellement un rôle background scientifique." Son conseil à l'égard de la nouvelle
de passerelle." France Fannes a pratiquement occupé toutes les directrice de BioWin est simple et complexe à la fois : "Maintenir
fonctions dans une PME biotechnologique: "J'ai été amenée à une gouvernance très stricte et rester indépendante des influen-
gérer des problématiques spécifiques touchant aux brevets et à ces politiques". 
la propriété intellectuelle par exemple". OF

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