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UNIVERSITE DE CAEN

THESE
présentée
pour obtenir le titre de

DOCTEUR DE L'UNIVERSITE DE CAEN

mention : Sciences

par

François ABBÉ

Ingénieur ENSI Caen

FLUAGE EN FLEXION D'UN COMPOSITE SiC-SiC 2D

Soutenue le 11 Juillet 1990

Jury: Pdt. B. ESCA1G , Professeur , Université des Sciences et Techniques de


Lille Flandres Artois

MM. Y. HONNORAT , Chef du Département Matériaux et Procédés,

SNECMA ,lvry

P. LAM1CQ , Directeur Recherche et Technologie, SEP , Suresnes

A. MOCELLIN , Professeur, Ecole des Mines de Nancy


J.L. CHERMANT , Directeur de Recherche , CNRS URA 1317 ,Caen

M.COSTER . Professeur , Université de Caen


LISTE DES PROFESSEURS D E L ' U . F . R . D E SCIENCES

M. L O Z A C ' H Noël Professeur émérite [ C h i m i e ] - D o y e n honoraire


M. MONIER Jean-Claude Professeur émérite [Minéralogie]
M. APERY Roger Professeur émérite [ M a t h é m a t i q u e s pures]
M. BERNARD Maurice Professeur émérite ( C h i m i e minérale] - Doyen honoraire
M. THUILLIER André Professeur émérite (Chimie]

M . SIGNORET Jacques (Embryologie] - D o y e n h o n o r a i re


M . V I A L L E Jean (Chimie]
M . C O J A N Jean-Louis (Physique]
M . BINET Paul [Biologie Végétale]
M . M A B B O U X - S T R O M B E R G Claude (Physique]
M. B A R R A T Jean-Pierre (Physique]
M . M A R G E R I E Jean (Physique]
MleDEMEUSY Noëlle (Biologie]
M. FORTINI André (Physique du solide]
M . A L L A I S Gérerd (Physique]
M . M O L L I E R Yves (Chimie]
M . K A U F F M A N N Jacques (Physiologie bactérienne]
M . DOGUET Gaston [Biologie végétale]
M . HERVE Charles (Mécanique appliquée]
Mme GRANDET Marthe [Mathématiques]
M. GLÜCK Gilbert (Physique]
M . CORNET Daniel ( C h i m i e minérale]
M . B E N A R D Francis [Biologie-Ecologie] - I U T
M . SAUSSEY M i c h e l (Zoologie]
M . ZVENIGOROSKY A l e x a n d r e [Physique]
M . ROCHE Claude (Mathématiques]
M . R A V E A U Bernard (Chimie]
M . LEFEBVRES Jean-François [Physique corpusculaire]
M . ROBERT Pierre (Mathématiques]
M i e SEXER N i c o l e (Physique] - ISMRa
M . M A R T I N Jacques (Electronique]
Mme BARRAT Mireille (Physique)
M . N O Ë L Yves (Chimie]
M. CHEVALIER Michel (Mathématiques)
M . L E H M A N Eric (Mathématiques]
M . L E CLUSE Yves (Physique appliquée] - ISMRa
M . H E L L E G O U A R C H Yves (Mathématiques]
M . L A N I E P C E Bernard [Physique] - D i r e c t e u r de l'UFR
M . R E G I M B A R T R o b e rt (Physique)
M . B L O Y E T Daniel (Electronique) - ISMRa
M . D O U B R E Hubert [Physique corpusculaire]
M . T A M A I N Bernard [Physique corpusculaire) - ISMRa
M . H A M E L Joseph (Physique] - ISMRa
M . G R O U L T Daniel (Chimie) - ISMRa
M . B O U C A U D Jean (Biologie]
M . L E QUERLER Jean-François ( C h i m i e ] - IUT
M. CHANTEPIE Maurice (Physique)
M. GOREAUD Michel (Chimie)
M . LEVESQUE Guy (Chimie]
Mme ADAM-NICOLL E Anne (Informatique)
M. DEHORNOY Patrick (Mathématiques]
M . D U C H E T Jean-Claude (Chimie)
M. ENJALBERT Patrick (Informatique)
M . DUBOIS Eugène (Mathématiques] - ISMRa

.../...
4 '"< : "'1

M . A L T Rene [Informatique]
M . P A T R Y Jean-Pierre (Physique corpusculaire]
M . H E M I D Y Jean-François (Chimie]
M . COSTER Michel [Chimie]
Mme H E R V I E U Maryvonne [ C h i m i e ] - ISMRa
M . C H E R O N Bernard (Physique] I*HS
M . M I C H E L Claude (Chimie] - IUT
Mie LASNE Marie-Claire (Chimie]
M . L E C O L L E Y Jean-François [Physique corpusculaire]
Mme SAUR Odette [Chimie]
M . M A T E T Pierre (Mathématiques]
M . REYSSAT Eric (Mathématiques]
M. L A V I L L E Guy (Mathématiques]
M . P A U L O T Claude [Physique]
M . SATGE Philippe (Mathématiques]
{S&S*

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ß$t\

p. f\^
Je tiens à remercier Jean-Louis CHERMANT, Directeur de Recherches au
CNRS, Directeur du Laboratoire d'Etudes et de Recherches sur les Matériaux,
LERMAT, URA CNRS n"1317, pour m'avoir accueilli chaleureusement au sein de son
laboratoire, apporté constamment son appui pour la réalisation de ce travail
et réservé suffisamment de son précieux temps pour m'aider dans la mise au
point de ce manuscrit.
J'exprime ma profonde gratitude à Monsieur B. ESCAIG, Professeur à l'Uni-
versité des Sciences et Techniques de Lille-Flandres-Artois, pour avoir ac-
cepté d'examiner ce travail et de me faire l'honneur de participer à ce jury.

Messieurs Y. HONNORAT, Chef du Département des Matériaux et Procédés de


la Société Nationale d'Etude et de Construction de Moteurs d'Aviation, SNECMA,
et P. LAMICQ, Directeur Recherche et Technologie de la Société Européenne de
Propulsion, SEP, ont accepté de participer à cette commission d'examen. Qu'ils
trouvent dans ces lignes 1'expression de ma sincère reconnaissance. Je les
remercie de 1'attention qu'ils ont porté à cette étude, malgré leurs charges.

Je tiens à remercier Monsieur A. MOCELLIN, Professeur à l'Ecole des Mines


de Nancy, pour l'intérêt qu'il a bien voulu porter à ce travail en acceptant
d'en être le rapporteur extérieur.

Monsieur M. COSTER, Professeur à l'Université de Caen, a volontiers exa-


miné cette étude. Qu'il voit dans ce travail un hommage d'un de ses anders
étudiants.

Mes remerciements vont également à Monsieur R. CARIN, Assistant Agrégé à


l'Université de Caen, qui m'a laissé disposer de son dispositif expérimental
et fourni son aide lors de la réalisation des marquages lithographiques.

De même, je remercie Monsieur J. VICENS, Maître de Conférence à l'Univer-


sité de Caen, sans lequel les observations en microscopie électronique en
transmission n'auraient pu être effectuées. Qu'il reçoive ici le témoignage de
ma sincère amitié.

Une grande partie de mes travaux d'analyses d'images n'aurait pu être


achevée sans l'aide de Madame L. CHERMANT. Qu'elle en soit de tout coeur
remerciée.

Je tiens à remercier Mesdemoiselles C. JOLY, S. ALLIOT, Madame N. DUVAL


et Monsieur B. AUVRAY pour leur contribution à la réalisation de ce mémoire.

Je ne saurais oublier Messieurs H. CUBERO, J. FOUBERT, S. FOUBERT, tous


les techniciens de 1'atelier, ainsi que tous mes collègues du laboratoire pour
1'ambiance qu'ils ont su faire régner.

Cette étude a été réalisée, avec le soutien d'une Bourse de Docteur


Ingénieur du CNRS cofinancée par 1'Etablissement Public Régional de Basse
Normandie, dans le cadre d'un Contrat BRITE (Project N'P-1348-6-85, Contrat RI
1B-0098) de Collaboration Européenne entre différents laboratoires et la
Société Européenne de Propulsion. Que tous les membres de cette Société, qui
m'ont apporté leur soutien, trouvent ici l'expression de ma sympathie, en
particulier Messieurs M. BOURGEON, F. CHRISTIN, J.-M. JOUIN et J.-C. CAVALIER.
ï\" T "!

m TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

CHAPITRE I : GENERALITES SUR LE FLUAGE


I. FLUAGE DES CERAMIQUES 7
P•
;
.'

>) II. MECANISMES RESPONSABLES DE LA DEFORMATION 11
III. FLUAGE DES COMPOSITES CERAMIQUES 18
1. Position du problème 18
2. Résultats bibliographiques 20
3. Modèles et approches du comportement en fluage 27
POSITION DU PROBLEME 30

CHAPITRE II : LE COMPOSITE A MATRICE CERAMIQUE ET SES CONSTITUANTS


I. LA FIBRE @ 34
1. Elaboration de la fibre Nicalon 37
2. Structure 40
a. Etudes relatives à la fibre nue
v^)
b. Etudes relatives à la fibre dans le composite
3. Comportement thermomécanique 45
CONCLUSION
II. LA MATRICE 50
P 1. Elaboration de la matrice 51
a. Principales méthodes
b. Procédé CVI
rm 2. Etude bibliographique du fluage de SiC 52
a. SiC-HP
b. SiC-FN
c. SiC-RB
d. SiC-DCPV
CONCLUSION
III. L'INTERFACE 62
rwi 1. Rôle de l'interface 64
2. Propriétés interfaciales recherchées 65
3. Différents types d'interface 67
—, 4. Méthodes de caractérisâtion des propriétés mécaniques de
| l'interface 67
a. Méthodes indirectes
b. Méthodes directes
H* 5. Etude bibliographique du comportement mécanique de l'interface 69
IV. LE COMPOSITE SiC-SiC 2D 74
1. Elaboration 74
m 2. Caractérisation morphologique 75
a. Résultats relatifs à la fibre
b. Résultats relatifs à la matrice et aux porosités
„_ 3. Caractérisation microstructurale 80
S a. Résultats relatifs à la fibre
b. Résultats relatifs à 1'interphase et à la matrice
4. Caractérisation mécanique de l'interface 83
P a. Méthode expérimentale
b. Résultats expérimentaux

p CHAPITRE III : COMPORTEMENT EN FLUAGE DU COMPOSITE S I C - S I C 2D :


RESULTATS EXPERIMENTAUX
I. ANALYSE DES COURBES DE FLUAGE 89
1. Détermination du stade stationnaire 92

f::']')

p-fl)
2. Description phénoménologique 93 "*
II. RESULTATS EXPERIMENTAUX 94
1. Déformation en fonction du temps et domaine de fluage 97
2. Influence de la température 97
3. Energie d'activation 101
4. Fractographie 102
CONCLUSION |rPT7\

CHAPITRE IV : INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION


INTRODUCTION
I. DECONVOLUTION 110 ^
1. Problématique 110 _''
2. Analyses théoriques 111
a. Etude bibliographique «n
b. Détermination de la localisation du plan neutre
3. Etude expérimentale 117
a. Fondements théoriques de la modélisation
b. Détermination expérimentale de la localisation du plan neutre
a. Réalisation du marquage lithographique
ß . Mesure de la localisation du plan neutre et calcul du
rapport X "^
4. Résultats et validation du modèle 127
CONCLUSION
II. ETUDE DE L'ETAT TRANSITOIRE 132 m
1. Problématique 132
2. Approche rhéologique 133
a. Fondements théoriques
b. Principe de la méthode
3. Etude expérimentale 138
4. Résultats et discussion de la simulation 140
a. Résultats de la simulation "•)
b. Comparaison avec les données expérimentales
CONCLUSION
III. MECANIQUE DES MILIEUX CONTINUS ENDOMMAGES 143 ^
1. Problématique 143
2. Aspect phénoménologique de la Mécanique des Milieux Continus
Endommagés 144
a. Concept de la contrainte effective "^
b. Loi d'évolution de 1'endommagement
3. Mesure de 1'endommagement 147
a. Méthodes directes m
b. Méthodes indirectes
4. Interprétation des courbes de fluage rupture 149
a. Mesure indirecte de 1'endommagement m
b. Interprétation des résultats
IV. DISCUSSION ET SYNTHESE 153
CONCLUSION 163 «>
BIBLIOGRAPHIE 165
ANNEXE I r-
Rappels succints d'analyse d'images pour le traitement
d'un composite à fibres 173
ANNEXE II «w
Simulation d'une structure composite à fibres 177
ANNEXE III
Description de l'appareillage de fluage et mode opératoire 185 ^
INTRODUCTION

Afin de demeurer compétitives internationalement, les entreprises se


voient dans l'obligation de créer sans cesse, avant leurs concurrents, des
nouvelles bases de leur efficacité pour les précéder sur le chemin de la
croissance. Ce but est aujourd'hui souvent atteint en développant de
nouvelles stratégies qui ont comme centre la valorisation et l'exploitation
des technologies de pointe.

Le domaine des matériaux fait partie de ceux où les mutations technolo-


giques jouent un très grand rôle. Les matériaux traditionnels font l'objet
d'améliorations de leurs caractéristiques par l'introduction de traitements
nouveaux, soit par leur séquence, soit par leur nature. C'est le cas actuel-
lement des aciers ou des fontes. La maîtrise de la production de nouveaux
matériaux peut devenir une technologie verrou. L'application de concepts
novateurs, par exemple l'hypertrempe, les composites, ... engendre de meil-
leurs caractéristiques, fiabilité, maintenance, ... mais surtout des réduc-
tions de coûts. Dans cette perspective, les industries aérospatiales portent
plus particulièrement leurs efforts sur des matériaux de faibles densités :
par exemple les alliages d'aluminium-lithium ou les composites à matrice
polyimides (PMR 15) pour les structures travaillant à des températures pro-
ches de la température ambiante, et les composites thermostructuraux, C-C,
C-SiC, SiC-SiC, Al 0 -Al 0 , SiO -SiO , SiC-LAS, .. . pour des hautes tempe-
fi «J fi O fi fi

ratures. Ces derniers peuvent être optimisés pour leur utilisation dans des
environnements différents et pour augmenter leur longévité. Pour sélection-
ner le meilleur matériau pour une application donnée, parmi toutes ses
caractéristiques - propriétés élastiques, thermiques, résistance à la rup-
ture, ... - l'une des plus importantes est la connaissance de la tenue ther-
momécanique en fonction du temps sous divers environnements. A ce propos,
Introduction

3500
LAMICQ-1990

3000

2500

2000 -
SiC-SiC

1500 •

1000
1E-2 1E-1 100 1000 1E4 1E5
Durée de vie (h)
Variation de la durée de vie de différents composites CMC,
d'après LAMICQ (1990).

sur la figure ci-dessus sont présentées les durées de vie de différents com-
posites à matrice céramique en fonction de la température d'utilisation,
dans des atmosphères réductrice pour le C-C et oxydante pour les C-SiC et
SiC-SiC (LAMICQ, 1990).

L'ampleur et le coût croissant de l'effort de recherche nécessaire au


développement de ces matériaux contraignent désormais les entreprises à se
diriger vers un partenariat. Le thème de notre étude s'inscrit dans le cadre
d'une coopération scientifique européenne (Programme BRITE contrat RI 1B-
0098, projet P-1348-6-85) réunissant les acteurs économiques industriels et
des organismes de recherche européens.

Le principal objectif de notre étude consiste à comprendre les mécanis-


mes responsables de la déformation à haute température d'un composite à
matrice céramique et à fibres céramiques longues, SiC-SiC, afin de mieux
cerner le problème de la détermination de la durée de vie du matériau sous
sollicitations thermomécaniques. Les composites faisant l'objet de notre
étude appartiennent à une nouvelle famille de matériaux, conçue et dévelop-
pée pour répondre aux besoins de l'industrie aérospatiale. Leurs applica-
tions possibles sont nombreuses et l'on peut citer parmi celle-ci les sui-
vantes : protections thermiques de l'avion spatial Hermès, propulsion d'en-
gins, volets de tuyères, composants de moteurs . . .

Ces matériaux sont intrinsèquement complexes par la nature et l'arran-


gement de leurs constituants : fibre, matrice, interphase, porosité. L'étude
Introduction 3

d'un matériau « industriel » s'avérant ardue, remémorons nous les propos


d'OROWAN (1938) au sujet de ce type de recherches :

Creep phenomena have so far been investigated only in terms of old-


style technology. For a number of decades, the usual way of tackling
similar problems was to apply simple and exact tests (e.g. tensile tests)
to the very complex and impure materials used in industry and then
to subject the results of these tests to a subtle mathematical analysis.
As to the prospects of this way of proceeding, we need only to realize
that a piece of iron is far more complicated a structure than, for
example, a watch. Now imagine subjecting a watch, without opening
it, to a compression test; further trying to draw mathematical
conclusion from its undoubtedly very interesting stress-strain curve,
and finally dissolving the watch in acids to determine its chemical
composition. Although the most accurate experimental tools may be
used, and the highest degree of mathematical skill displayed, I doubt
whether in this way much valuable information could be obtained
about how the watch is working and how it could be improved. A
much more promising way is to take the watch to pieces to observe its
design and then to study the technological properties of its parts.
Translated into terms of our present problem: we must first learn the
properties of single crystals, in particular the laws of their plasticity;
then we may proceed to a study of polycrystalline metals with more
chances of succeeding than hitherto.
E Orowan, Trans. AIME, 131, 412 (1938).

Notre démarche tout au long de ce mémoire tentera d'être semblable à


celle préconisée par OROWAN. A ce jour, seules quelques études de fluage sur
les composites céramiques à fibres courtes ou particulaires ont été entre-
prises, mais aucune autre à notre connaissance, mise à part la nôtre en col-
laboration avec la SEP, concerne la déformation en fluage de composites
céramiques à fibres longues.

Pour mener à bien cette tâche, notre action sera guidée par la méthodo-
logie de cette citation. Plus précisément, à propos des composants de la
« montre », de leurs propriétés et de leurs fonctions, nous tenterons de
conduire notre analyse en suivant les variations des grandeurs macroscopi-
ques, après avoir défini les grandeurs liées aux constituants (caractéristi-
ques de la fibre et de la matrice), mais aussi des grandeurs liées à l'in-
4 Introduction

teraction fibre/matrice, puisque ce phénomène de couplage entraîne l'effet


composite tant recherché. En effet, les phénomènes fondamentaux qui influen-
cent le comportement macroscopique du composite peuvent être isolés dans un
premier temps à l'échelle des constituants (bien qu'il existe des mécanismes
de déformation à toutes les échelles dans ce type de matériau), essentielle-
ment parce que c'est à l'échelle de ces constituants qu'un optimum de fabri-
cation peut être établi.

Après avoir rappelé brièvement quelques concepts fondamentaux sur le


fluage au début du premier chapitre, nous tenterons de faire une courte
analyse des études de fluage qui concernent les composites céramiques à
fibres courtes ou à whiskers. Ces études qui sont d'une certaine manière
relativement éloignées de notre cas d'étude permettent néanmoins de définir
les problèmes liés à toutes les études de fluage de matériaux céramiques
composites à fibres et pourront servir ultérieurement de point de
comparaison.

Le contenu du second chapitre correspond à la démarche d'OROWAN en ce


sens qu'il présente les propriétés des différents constituants. Les
propriétés thermomécaniques de la fibre y sont exposées, tandis que celles
de la matrice CVI nous étant à ce jour inconnue, plusieurs matrices SiC plus
ou moins équivalentes permettent de fixer un point de comparaison. Le rôle
très important de 1'interphase entre la fibre et la matrice est également
abordé dans ce chapitre qui se clôt par la présentation des résultats de nos
études en métallographie quantitative, microscopie électronique à transmis-
sion et micro-indentation de fibres (mesure du cisaillement interfacial en
fonction de la température).

Les diagrammes fondamentaux qui résultent des expériences de fluage


font l'objet d'une présentation et d'une première interprétation dans le
troisième chapitre. Plus qu'un compte rendu d'expériences, ce chapitre
soulève des points nécessaires à approfondir.

Le quatrième chapitre reprend ces différents points. Des simulations


des différents phénomènes permettront de confronter les calculs théoriques
aux résultats expérimentaux. Plus particulièrement un effort de
déconvolution de l'essai de flexion sera réalisé en utilisant une méthode
Introduction 5

originale de marquage de la surface des eprouvettes qui permet de valider


des lois de comportement du matériau.

Enfin, une synthèse des différentes approches menées au cours de ce


travail sera alors finalement présentée.

Dans toute la suite de ce mémoire, nous avons utilisé des indices bas
en petite lettre, pour préciser si le composant chimique est sous forme
de particules (p), de fibres (r) ou de whiskers (*). Cependant le maté-
riau de notre étude sera noté SiC-SiC et non pas SiC-SiC .

Par ailleurs nous entendrons par CMC (Composites à Matrice Céramique)


tous composites à matrice céramique renforcée par des fibres céramiques
longues.
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LE FLUAGE

L'utilisation à haute température des céramiques et plus particulière-


ment des composites céramiques thermostructuraux, nécessite de bien con-
naître leur comportement en fluage (c.a.d. la déformation résultant de la
contrainte en fonction du temps). Le comportement du matériau en fluage est
l'une des questions essentielles à résoudre pour tout bureau d'études.

La plupart des essais de fluage sont réalisés, dans le cas des céra-
miques, soit en compression, soit en flexion et plus rarement en traction.
Dans le dernier cas, les difficultés majeures proviennent d'une part du
coût d'usinage des éprouvettes et d'autre part du choix du matériau (et de
ses caractéristiques) pour réaliser l'accastillage de tels essais aux
hautes températures et pendant des temps très longs.

Avant de présenter, puis de discuter de la pertinence des résultats


relatifs à la résistance au fluage des matériaux céramiques, nous allons
rappeler les différentes possibilités de mécanismes de déformation qui
peuvent être rencontrés dans un domaine donné.

I. FLUAGE DES CERAMIQUES

Le mot fluage (synonyme d'écoulement) possède pour le métallurgiste


généralement le sens restreint de "déformation plastique d'un solide sous
sollicitations mécaniques constantes". Ce vocable renvoi donc soit à une
technique d'essais mécaniques, soit au comportement toujours indésirable
d'un matériau (ou d'une structure) qui se déforme en service au cours du
temps.
8 Chapitre I

Dans le cas des matériaux ayant la vocation de travailler à haute


température, ce type d'essai comporte un double but :

- le premier, au caractère fondamental, par la volonté de mettre en


évidence et de comprendre les "mécanismes" responsables du fluage ,
- le second, par l'établissement d'une loi prédictive fiable (sans
vaticiner) de la tenue de la structure en service.

En fait il s'agit, la plupart du temps, d'essais effectués à des tem-


pératures et à des contraintes suffisamment élevées pour qu'une vitesse de
déformation non nulle puisse être définie et de préférence constante au
cours d'expériences de durée limitée (< 3000 h). Le plus souvent on observe
un stade primaire ou transitoire, durant lequel la vitesse de déformation
décroît constamment en fonction du temps, suivi d'un stade secondaire ou
quasi-stationnaire pendant lequel la vitesse de déformation est constante,
puis enfin un stade tertiaire où la vitesse de déformation augmente très
rapidement avant de conduire à la rupture (Fig. 1.1).

u;

1 11 III /

/ ^

t
Fig. I. 1 : Courbe de fluage (déformation, e, en fonction du temps, t) d'un
composite céramique SiC-SiC testé à 1473K en flexion trois points,
sous vide, présentant les trois domaines de fluage.

Le produit d'une série d'essais de fluage est généralement représenté


par une relation empirique décrivant le comportement du matériau, qui est

La terminologie la plus juste serait les mécanismes responsables de la


déformation plastique (Poirier, 1976).
Le fluage des céramiques 9

d'ailleurs valable dans le domaine de températures et de contraintes où


2
cette série a été obtenue .

La majorité des résultats peuvent s'exprimer suivant la loi de DORN


(DORN et al., 1954 ; CANNON et LANGDON, 1983) :

f \ p f > n f \
AD Gb
o b a- -Q
exp (1.1)
e
kT w W [RTJ

avec : e, la vitesse de fluage dans l'état statlonnaire,


A, une constante sans dimension,
G, le module de cisaillement,
b, le vecteur de Burgers,
T, la température absolue,
—23 —i
k, la constante de Boltzmann (1,381 10 J.K ),
d, la taille moyenne des grains,
p, l'exposant de l'inverse de la taille des grains,
o\ la contrainte,
n, l'exposant des contraintes,
R, la constante des gaz parfaits (8,31 J mol" K~ ),
D , le facteur de fréquence,
o
Q, l'énergie d'activation du processus de diffusion.
Une même loi de fluage permet de décrire les mécanismes intervenant lors du
fluage secondaire (ou quasi-stationnaire). Les paramètres expérimentaux n,
p, Q, permettent de relier la loi de fluage à des modèles de déformation.
Les valeurs expérimentales n et Q sont donc essentiellement des valeurs
apparentes. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue qu'en laboratoire on
cherche à comprendre la physico-chimie d'une déformation que l'on souhaite
éviter dans l'industrie ... et à établir les mécanismes mis en jeu.

Le passage de la description phénoménologique (relation 1.1) à l'in-


terprétation physique est réalisé par l'identification des phénomènes
agents de la déformation et de leur séquence. L'approche couramment suivie

2
L'Influence des paramètres d'essais, types de montage, atmosphère n'est
pas négligeable vis-à—vis des quantités mesurées.
10 Chapitre I

consiste à comparer les valeurs déterminées expérimentalement des para-


mètres de cette équation de comportement empirique avec les valeurs
déduites de divers modèles. L'adéquation des valeurs expérimentales et de
celles provenant du modèle est généralement considérée comme une indication
(sinon comme une preuve pour certains auteurs) que ce modèle est le «bon».
Cette approche n'est pas sans danger, la raison essentielle en est la non-
unicité des solutions (POIRIER, 1981).3

De plus, généralement différents processus concourrent à la déforma-


tion, se superposent et/ou interagissent, par exemple dans les céramiques
possédant une seconde phase aux joints de grains ( LANGE et al. , 1980 ;
MOUSSA, 1985 ; EVANS et DALGLEISH, 1987).

Les agents de la déformation sont les divers défauts cristallins. Au


déplacement de chacun des types de défauts correspond un processus élémen-
taire dont l'importance n'est pas toujours comparable dans des conditions
données. La cinétique du processus élémentaire peut être gouvernée par :

- l'initiation du défaut correspondant,


- son déplacement (lui-même gouverné par l'interaction avec d'autres
défauts porteurs ou non de déformation).

La déformation n'est en fait jamais uniforme à l'échelle du grain :


les incompatibilités résultant de la déformation par un processus élémen-
taire peuvent être accommodées par un autre processus faisant intervenir le
déplacement ou la création d'un autre type de défaut. De plus, le processus
d'accommodation peut lui-même être porteur de déformation et comparable en
importance au processus primaire.

Un exemple est le fluage visqueux diffusionnel et le glissement inter-


granulaire qui sont deux processus indépendants, mais couplés : la déforma-
tion résultante peut aussi bien être décrite comme un fluage diffusionnel
ou comme un glissement intergranulaire accommodé par diffusion (RAJ et
ASHBY, 1971).

3
L'égalité de l'exposant des contraintes, provenant d'un ajustement de
points expérimentaux par la méthode des moindres carrés avec un "n" ayant
physiquement un sens, est souvent délicate à confirmer.
Le fluage des céramiques 11

II. MECANISMES RESPONSABLES DE LA DEFORMATION

Les mécanismes responsables de la déformation peuvent être regroupés


en deux catégories :

• la première rassemble les mécanismes concernant le réseau cristallin


(pas de dépendance de la taille des grains (p=0 dans l'équation 1.1)
qui se subdivisent en :
. modèles mettant en jeu les dislocations : par exemple selon le
modèle de FRIEDEL (1964) ou WEERTMAN (1968),
. modèles basés sur la théorie de la diffusion : fluage NABARRO
(1948) - HERRING (1950) ou fluage COBLE (1963).
• la seconde mettant en jeu le glissement aux joints de grains.

Cette distinction reste toutefois académique pour les raisons évoquées au


paragraphe précédent, mais cette vision permet en revanche une description
au niveau élémentaire.

Comparées aux métaux, les céramiques ne présentent pas, généralement


et dans leurs conditions usuelles, de déformation plastique. Le glissement
aux joints de grains sera donc l'un des principaux mécanismes, mettant en
jeu évidemment la qualité du joint de grains, sous l'angle chimique et
visco-élastique.

Cette première distinction des mécanismes (CANNON et LANGDON, 1983)


permet de définir des processus conventionnels de déformation. Les particu-
larités de ces processus sont rassemblées succintement dans les tableaux
1.1 et 1.2. Le premier regroupe les valeurs fondamentales des modèles ayant
trait aux dislocations. Ce tableau est un résumé, car dans le cadre de
notre étude, aucune visualisation de dislocations n'a été effectuée lors de
nos observations, en microscopie électronique à transmission, des échantil-
lons déformés. Le mouvement des dislocations à l'intérieur des grains peut
se produire à haute température (par exemple dans le cas de MgO (CRAMPON et
ESCAIG, 1983)). Toutefois, le mécanisme par mouvement de dislocations peut
être opérant dans les matériaux polycristallins, sans cavitation, si cinq
systèmes de glissement sont disponibles pour être activés. La vitesse de
fluage observée est alors généralement dépendante de la contrainte au cube
ou plus. Cependant, la déformation "homogène" par mouvement de dislocations
12 Chapitre I

est rarement observée dans les structures complexes de la plupart des céra-
miques intéressantes industriellement. Les joints de grains sont le plus
souvent leur point faible.

n P Q
diffusion
Description du Références Type de
mécanisme glissement

1 1 dans les joints fluage visqueux aux CROSSMAN-


points triples ASHBY (1975)

1 2 en volume fluage diffusion en NABARR0-(1948) LIFSHITZ


volume HERRING (1950) (1963)

1 3 dans les joints fluage diffusion COBLE (1963)


aux joints de grains

1 1 dans la phase fluage de la phase 0R0WAN (1947)


dans les joints vitreuse dans les
joints

2 1 en volume glissement accommodé LANGDON (1970) RACHINGER


par cavitation dans (1952)
les joints (dans la
phase vitreuse)

3,5 2 en volume glissement accommodé GIFTKINS (1973)


par cavitation aux
points triples

Tableau I.1 : Description schématisée des mécanismes faisant intervenir le


glissement aux joints de grains.

n Q Description du mécanisme

3 hétérodiffusion glissement et montée de dislocations contrôlés


par le glissement

4 autodiffusion dissolution des dislocations en boucles

4,5 autodiffusion glissement et montée de dislocations contrôlés


par la montée

5-6 auto - hétéro diffusion dans le coeur des dislocations

Tableau 1.2 : Description schématisée des mécanismes associés à la déforma-


tion propre des grains.
Le fluage des céramiques 13
Le second tableau présente les deux types de mécanismes fondamentaux
associés à la déformation des grains :

- glissement aux joints de grains en tant que conséquence de l'exis-


tence de court-circuit pour les phénomènes de diffusion près des
joints triples (LIFSHITZ, 1963) ; un allongement des grains dans la
direction de sollicitation mécanique est alors constaté,
- mécanismes du type RACHINGER (RACHINGER, 1952) qui décrivent par
contre une déformation où il n'y a pas allongement des grains ;
ceux-ci se redivisent en deux groupes suivant qu'il existe ou non
une phase vitreuse aux joints de grains.

Néanmoins, d'autres mécanismes moins conventionnels peuvent apparaître : on


peut citer par exemple :

- la croissance visqueuse de cavités intergranulaires,


- le fluage élastique ...

PABST (1985) a dichotomise ces différents modes de déformation en méca-


nismes conventionnels et non-conventionnels (Tableau 1.3).

Mécanismes Agents de la déformation

dislocations
conven t i onne1s diffusion
glissement aux joints de grains

cavités
non conventionnels microfissures
corrosion intergranulaire
transformation de phase

Tableau 1.3 : Mécanismes conventionnels et non conventionnels.

Cette approche met en évidence non seulement le problème de la prise


en compte de phénomènes dépendant du temps dans la déformation, mais sur-
tout la possibilité de cerner les facteurs limitant les performances des
céramiques à hautes températures. En fait, ces mécanismes sont soit intrin-
sèques, soit extrinsèques. Le tableau 1.4 rassemble quelques exemples de
14 Chapitre I

Type Facteur Exemples

point de fusion SiC : 2700° C ; Al 0 : 2050° C


2 3
intrinsèques décomposition
Si N -* 3Si + 2N (T > 1700° C)
changement de phase 3 4 2
ZrO , o ZrO , (1170° C)
2 (tétra) 2 (mono)

corrosion SIC + 20 -> SiO + CO


2 2 2
extrinsèques contrainte
rupture - fluage

Tableau 1.4 : Quelques facteurs limitant les propriétés de certaines céra-


miques à haute température.

matériaux en précisant les facteurs extrinsèques et intrinsèques pertinents


(DAVIDGE et al. , 1987). La réponse du matériau à une sollicitation méca-
nique dépendra donc de :

- la structure des pores,


- la taille des grains,
- la qualité des joints de grains et des interfaces,
- la densité de microfissures,
- la stoechiométrie,
- l'orientation cristalline,

mais aussi :

- des impuretés,
- des ajouts de frittage, . . .

Chacun de ces facteurs peut être tour à tour en fonction du temps : agent
de déformation dans un mécanisme conventionnel ou non, suivant son impor-
tance.

A ce sujet, la nucléation, la croissance et la percolation de micro-


fissures constituent les étapes d'un des mécanismes "non conventionnels",
mais qui est très souvent rencontré dans la déformation à haute température
des céramiques. Notamment, dans le cas particulier des céramiques fabri-
Le fluage des céramiques 15

quées par pressage à chaud et possédant des grains de petite taille, les
processus diffusionnels ainsi que le mouvement des dislocations sont censés
être responsables de la déformation à haute température ; ceci est d'autant
plus valable que le matériau est constitué principalement d'une phase de
haute pureté. La déformation locale en fluage aux intersections des joints
de grains est accommodée par un processus de diffusion ; mais le plus sou-
vent le résultat s'exprime sous la forme d'une cavitation aux joints de
grains et d'une microfissuration. En revanche dans le cas de céramiques
contenant une phase amorphe aux joints de grains, ces derniers se déforment
élastiquement ; la déformation (visco-élastique) est essentiellement con-
trôlée par la viscosité de cette phase vitreuse (LANGE et al., 1980).
D'ailleurs cet effet de film interfacial semble prépondérant dans le cas
des composites céramiques à fibres courtes (KOESTER et al., 1988 ; GOTO et
Me LEAN, 1989 ; PORTER, 1989) en favorisant le glissement aux interfaces.

Dans le cas de mécanismes compétitifs (parallèles), la déformation


s'exprime alors par la vitesse du mécanisme le plus rapide (LANGE et al.,
1980), ce dernier étant différent selon la température :

=
G G + G + G
cavitation diffusion glissement

A cette équation, MOUSSA (1985) ajouta 2 termes, l'un dû à la déformation


intragranulaire par mouvement de dislocations et l'autre dû à un mécanisme
de dissolution-reprécipitation sous l'effet de la contrainte, proposé par
LEWIS et al., 1977.

D'une manière générale, une température de transition T peut être


définie, au dessus de laquelle une diminution notable de la résistance du
matériau peut être observée. Ce type de comportement est présenté sur la
figure 1.2.

L'établissement de ce diagramme permet dans un premier temps de défi-


nir la zone où intervient la déformation en fonction du temps (zone hachu-
rée). Toutefois ce diagramme à lui seul ne permet pas de représenter l'in-
fluence du temps sur les caractéristiques du matériau. La représentation
isotherme de la variation de la contrainte à la rupture en fonction du
temps à la rupture permet, en revanche, de mieux définir les différents
domaines qui peuvent être dénombrés en trois (Fig. 1.3) :
16 Chapitre I

/
/
/
/
/
/

T, T —

Fig. 1.2 : Illustration de la dépendance de la contrainte à la rupture avec


la température.

- le premier correspondant à des durées courtes et concernant plus le


domaine de la mécanique de la rupture et les critères de propagation
ou de résistance à la propagation de défauts préexistants,
- le second se rapportant à des durées moyennes où intervient la
croissance sous critique de défaut et dont la dépendance reste pro-
portionnelle à la contrainte (le temps à la rupture suit une loi du
type LARSON-MILLER),
- le troisième dont la présence peut dépendre de l'existence d'une
phase vitreuse aux joints de grains (ou bien d'un composant tenant
un rôle identique) ; dans ce dernier cas, la rupture est essentiel-
lement gouvernée par le taux de déformation et peut être décrite par
une relation du type MONKMAN-GRANT.

Le premier paragraphe nous a conduit à définir une "équation d'état"


(Loi de NORTON) dont le caractère unificateur (CANNON et LANGDON, 1983)
permet la comparaison de la résistance au fluage des différents matériaux.
De plus, l'aspect discriminatoire qui peut lui être associé, donne la pos-
sibilité de mettre en évidence les "agents" ou "mécanismes" responsables de
la déformation à haute température et ensuite, par un travail d'analyse
plus fin, la quote-part de ces différents mécanismes. Cette approche sera
donc dans un premier temps la nôtre. Toutefois, afin de ne pas nous écarter
du souci de tout bureau d'études, dans un second temps nous tenterons de
tester l'applicabilité du principe d'équivalence temps-température, sur
lequel repose les calculs de durée de vie des structures.
Le fluage des céramiques 17

1 II lll\

t* t —*
Fig. 1.3 : Schéma illustrant les trois différents domaines de comportement
d'un matériau en fonction du temps.

En effet, les calculs de structures fonctionnant à haute température


font intervenir des paramètres liés aux propriétés mécaniques des matériaux
et en particulier les caractéristiques de fluage (déformation en fonction
du temps, temps à rupture à différentes températures et contraintes). Cer-
tains calculs (dimensionnement des pièces, cumul des dommages, détermina-
tion des contraintes admissibles) nécessitent de connaître aussi bien les
lois d'évolution de caractéristiques spécifiques - telles que le temps à
rupture en fonction de la température et de la contrainte, ou bien loi
d'évolution de 1'endommagement - que l'évolution physico-chimique du maté-
riau dans son environnement en fonction du temps.

Dans la pratique, les structures sont prévues pour fonctionner pendant


des durées soit courtes (quelques centaines de secondes pour la propulsion
d'engins), soit longues (plusieurs milliers d'heures pour un moteur
d'avion). Il apparaît évident qu'il est difficile et trop coûteux d'effec-
tuer des essais en durée réelle. Il est donc essentiel que les lois desti-
nées à représenter le comportement du matériau à l'intérieur du champ expé-
rimental puisse permettre des prédictions des propriétés de fluage à rup-
ture à long terme.

Notre propos sera donc dans un second temps de définir la validité


d'une telle approche dans le cas du matériau faisant l'objet de cette
étude, notamment par la confrontation de différents critères : endommage-
*
ment D, C . .
18 Chapitre I

III. FLUAGE DES COMPOSITES CERAMIQUES

La majorité des céramiques renforcées par des fibres courtes (whis-


kers) ou longues exhibent une amélioration des caractéristiques mécaniques
et plus particulièrement de la résistance à la propagation de fissures
(induites par chocs thermiques par exemple). De plus le renforcement de
céramiques par des fibres semble augmenter sensiblement leur résistance en
fluage (CHOKSHI et PORTER, 1985 ; PORTER et al., 1987 ; PORTER, 1988 ; ABBE
et al., 1989a ; DUCLOS et CRAMPON, 1989). D'ailleurs, l'amélioration se
ressent surtout aux basses plutôt qu'aux hautes contraintes, ce qui appa-
raît d'abord surprenant.

1. Position du problème

Au premier abord, la présence de whiskers ou de fibres longues conduit


à un changement de la variation de la vitesse de déformation en fonction de
la contrainte, qui passe d'un stade quasi-linéaire (n=l à 2) à un stade
fortement non linéaire pour des contraintes plus élevées (CHUANG et
WIEDERHORN, 1988 ; PORTER, 1988 ; ABBE et al., 1989b ; DONALDSON et al.,
1989). De nombreuses raisons, au caractère parfois contradictoire, viennent
d'ailleurs étayer ce type de comportement. Par exemple,la présence de
fibres peut être la cause d'un changement de mécanisme et/ou de cinétique
du mécanisme responsable de la déformation de la matrice. A ce propos, nous
pouvons citer le cas des composites à matrice alumine renforcée par des
fibres courtes SiC (whiskers). La taille des grains d'une telle matrice est
généralement plus petite que celle d'un matériau monolithique en alumine
pour des conditions de fabrication similaires. Du point de vue de la défor-
mation en fluage, une telle diminution de la taille des grains devrait con-
duire à une augmentation de la vitesse de fluage (toutes choses étant par
ailleurs égales), en considérant un fluage contrôlé par la diffusion en
volume (NABARRO-HERRING) ou aux joints de grains (COBLE). En revanche,
grâce à la présence de fibres, des chemins de diffusion sont rallonges,
diminuant d'autant la vitesse de fluage. A contrario, la présence d'une
interface fibre/matrice offre un chemin supplémentaire de diffusion qui
peut entraîner une augmentation de la vitesse de déformation. La quote-part
de ces différents effets sur la cinétique du fluage apparaît donc difficile
à cerner d'autant plus que certaines données, et plus particulièrement les
valeurs des coefficients d'hétérodiffusion, sont inconnues. Ceci vient du
Le fluage des composites céramiques 19

fait du très faible nombre d'études de diffusion et le fait que, pour une
même céramique, d'un fabricant à l'autre, les impuretés seront très diffé-
rentes en type et en fraction volumique. De plus, dans le cas de préformes
infiltrées, la porosité ouverte constitue des chemins de corrosion par
l'environnement, non seulement pour le matériau massif, mais aussi pour
1*interface et le renfort.

L'existence du renforcement est-il responsable de l'augmentation du


degré de non linéarité (n>l)? A ce propos, reprenons l'exemple de l'alumine
renforcée par des fibres courtes qui est l'un des composites céramiques le
plus étudié actuellement. Les données de la littérature (CANNON et LANGDON,
1988) confirment un exposant des contraintes pour l'alumine supérieur ou
égal à 1. Nous sommes donc en présence de mécanismes de fluage dont la
dépendance vis à vis de la contrainte n'est pas linéaire : le processus
n'est donc pas uniquement diffusionnel. Des modèles basés sur la notion de
glissement et/ou montée de dislocations (FRIEDEL, 1964 ; WEERTMAN, 1968)
prédisent un exposant des contraintes de 3 ou 4,5 ; de même si le phénomène
diffusionnel associé est la diffusion dans le coeur des dislocations,
l'exposant des contraintes varierait entre 5 et 6 (FROST et ASHBY, 1982)
(cf. Tableau 1.2). Toutefois, par comparaison avec le comportement des
alliages métalliques à durcissement structural, la présence de fibres peut,
par contre, bloquer le mouvement des dislocations et diminuer ainsi la
vitesse de fluage. Cette hypothèse de mécanisme conduirait de plus, à
retrouver une dépendance linéaire de la vitesse de fluage vis à vis de la
contrainte.

Si le fluage contrôlé par des mécanismes mettant en jeu des disloca-


tions ne semble pas contribuer, d'une manière fondamentale, à la déforma-
tion des composites céramiques que nous étudions, par contre la présence de
fibres peut influencer la formation de microfissures intergranulaires (ex.:
SiC-Al 0 ) ou bien de microfissuration matricielle (concentration de con-
2 3
trainte entre deux fibres cylindriques en contact) : ceci provoque alors
une augmentation de la vitesse de fluage (cf. Tableau I.l, mécanismes de
fluage non conventionnels).

La croissance de fissures conduit en effet à une diminution du module


élastique : la déformation résultante dépend alors du temps (SURESH et
BROCKENBROUGH, 1990) (ce type de mécanisme d'endommagement sera d'ailleurs
20 Chapitre I

détaillé ultérieurement). Ce type de mécanisme est plus connu sous le voca-


ble de fluage élastique et croissance de fissure (VENKASTESWARAN et
HASSELMAN, 1981 ; HASSELMAN et al., 1984).

En outre, la présence de fissures "stationnaires" entraîne une augmen-


tation de la vitesse de fluage, plus particulièrement sous une sollicita-
tion de traction (VENKATESWARAN et HASSELMAN, 1984) ; ceci conduit à un
fluage contrôlé par la nucléation de fissures et/ou à l'intensification des
contraintes (WEERTMAN, 1969 ; HASSELMAN et VENKATESWARAN, 1984) dont la
contribution peut être fortement non négligeable (SURESH et BROCKENBROUGH,
1990) dans le cas des céramiques composites .

A propos du rôle du renfort


L' incorporation de fibres dans le matériau conduit à une augmentation
5

de la ténacité apparente ; il est supposé que le niveau de contrainte


requit pour créer des fissures est également augmenté. Dans le cadre d'une
telle hypothèse il est raisonnable de penser que des effets similaires peu-
vent exister au cours de la déformation en fluage. Les whiskers par exemple
inhiberont la microfissuration intergranulaire : la vitesse de fluage sera
réduite par la suppression à la fois du fluage élastique par croissance de
fissures et du fluage par intensification des contraintes.

2. Résultats bibliographiques

La plupart des études concernant les composites thermostructuraux ont


eu pour objet dans un premier temps l'obtention d'un optimum des propriétés
en parachevant l'élaboration ; cet optimum étant déterminé par des mesures
à température ambiante, il est supposé implicitement qu'il correspond
également à un optimum à haute température. L'étude des propriétés de tels
matériaux s'avérant complexe (bon nombre de caractéristiques sont diffi-

4
Le mécanisme de déformation en fluage aidée par la nucléation et la crois-
sance de microfissures est différent des analyses précédentes (WEERTMAN,
1969 ; MOUSSA, 1985) : la déformation du matériau est alors considérée
comme une conséquence de la modification du champ de contraintes autour des
microfissures.
5
L'utilisation du terme ténacité que le type d'essais mécaniques associe à
sa mesure, reste sujet à contreverse dans le cas des composites céramiques.
Le fluage des composites céramiques 21
ciles à mesurer correctement), de nombreux travaux ont eu pour but de met-
tre en place des méthodologies d'essais (INGHELS, 1987) et de mettre en
évidence la pertinence de certains critères d'évaluation (R'MILI, 1987 ;
GOMINA, 1987) qui ne sont valables pour certains d'entre eux qu'à tempéra-
ture ambiante. En effet, des études récentes (FOURVEL, 1989 ; NAVARRE,
1990), réalisées dans le cadre de la mécanique de la rupture, ont permis de
critiquer la validité des critères établis et de leur applicabilité à haute
température pour caractériser les composites céramiques à fibres longues.

Celle-ci met notamment en évidence le rôle de l'évolution physico-


chimique du matériau ; plus particulièrement l'hypothèse d'une transforma-
tion chimique de l'interface est avancée. Mise à part les travaux de
BRENNAN et PREWO (1982) (Fig. I.4a) qui ont eu pour objet de caractériser
l'un des premiers composite céramique à fibres longues, SiC-LAS (LAS :

p ' BRENNAN--1982 CH0KSHI-1985


1 (0
M
•II» 1E-4 -
1373K

1E-8
1E-5

1273K

1E-6

1173K
1E-9
- -Al203
LAS + 50X SiCf 1E-7 AI2O3 + SiCw

100 200 300 400 20 100


a (MPa) Q (MPa)

Fig. I.4a : Variation de la vitesse Fig. I.4b : Variation de la vitesse


de déformation en fluage en fonction de déformation en fluage en fonction
de la contrainte appliquée pour du de la contrainte appliquée pour une
SiC-LAS, d'après BRENNAN et PREWO alumine monolithique et une alumine
(1982). renforcée par SiC , d'après CH0KSHI
w
et PORTER (1985).
22 Chapitre I

silico-aluminate de lithium), seules sont présentées dans la littérature


des données de fluage se rapportant aux composites céramiques à fibres
courtes (whiskers).

Dans un premier temps nous présenterons et commenterons les résultats


de cette littérature, afin de mieux cerner l'intérêt des composites céra-
miques à fibres céramiques longues.

Deux types de matrices ont été renforcées à ce jour, à partir de whis-


kers SiC : soit des matrices de nitrure de silicium, soit des matrices
d'alumine.

Dans le dernier cas, CHOKSHI et PORTER (1985) ont mis en évidence une
augmentation de la résistance en fluage (flexion 4 points), qui se traduit
par une diminution de la vitesse de déformation de deux ordres de grandeur
pour une même contrainte par rapport au matériau non renforcé. De plus, une
sensibilité plus grande à la contrainte se manifeste plus particulièrement
pour les basses valeurs de la contrainte appliquée (n=2 pour Al 0 ;
n=5 pour Al 0 + 20% SiC ) (Fig. I.4b). Toutefois, ce résultat ne permet
pas de conclure favorablement sur la durée de vie du matériau (temps à la
rupture), mais uniquement sur le type de mécanisme responsable de la défor-
mation. Pour en avoir une idée, nous pouvons comparer les temps nécessaires
pour atteindre le stade stationnaire dans les deux cas. Il semble qu'il
soit atteint en 2-3 heures pour une contrainte de 50 MPa à 1673 K pour
l'alumine ; pour une température plus élevée, 1773 K, et une contrainte du
même ordre, 48 MPa, le stade stationnaire du composite est atteint en 10
heures. On peut donc supposer une augmentation du temps à rupture dans le
cas du composite. L'idée d'une telle amélioration semble d'ailleurs confor-
tée par la mise en évidence d'un mécanisme dû aux whiskers, inhibant la
création de cavités, ou limitant celle-ci à l'interface whiskers/matrice.
L'influence primordiale de la teneur en renfort a été récemment décrite par
PORTER (1989) : dans le cas où la teneur excède 15%, il y a création d'un
réseau interconnecté de whiskers entraînant une modification du comporte-
ment du composite.

KOESTER et al. (1988) ont obtenu des résultats semblables dans le cas
de la mullite renforcée par des whiskers et testée en compression. La
figure 1.5 présente leurs résultats ; il est intéressant de remarquer que
Le fluage des composites céramiques 23

KOESTER-1988 NIEH-1984
I 1E-4
A 1E-5 m
1700K
•w
1E-5 - T = 5 6 1 K

1E-6
1E-6

1E-7 1530K
1E-7

1E-8
1E-8 -

1E-9 I" - - A I
- - Mullite 1530K
1E-9 - —Mullite + SiC Al + 20X SiC
w w
• I •••••!
10 100 20 100
a (MPa) ü (MPa)
Fig. 1.5 : Variation de la v i t e s s e Fig. 1.6 : Variation de la vitesse de
de déformation en fluage en fonc- déformation en fluage en fonction de
tion de la c o n t r a i n t e appliquée la contrainte appliquée pour l'alu-
pour la mullite et la mullite ren- minium et l'aluminium renforcé par
forcée par SiC , d ' a p r è s KOESTER SiC , d'après NIEH (1984).
w
et al. (1988).

dans cette étude, comme pour celle de CH0KSHI et PORTER, les contraintes
limites observées pour les composites sont très peu différentes de celles
des matrices. En outre, une sensibilité à la contrainte plus forte pour les
basses contraintes est aussi observée. A ce propos ce type de matériaux
pouvant présenter une forte anisotropie de ses propriétés, il est bon de
souligner qu'une comparaison peut être établie, car les méthodes de fabri-
cation et les orientations testées sont identiques dans les deux cas.

Si un gain est observé dans la résistance de ces matériaux, il semble


que ceci soit dû à la diminution de la population de défauts à l'origine de
la dégradation du matériau. En effet KOESTER et al. (1988) ont observé une
énergie d'activation identique pour le matériau renforcé et non-renforcé ;
cet effet semble différent de celui observé dans les matériaux à matrice
métallique renforcée par des whiskers (par exemple : Al + 20% SiC (NIEH,
1984)). Une sensibilité à la contrainte (surtout aux basses valeurs) est
24 Chapitre I

généralement mise en évidence (Fig. 1.6), mais le domaine de contraintes


est dans ce cas décalé vers les fortes contraintes. De plus deux ordres de
grandeurs sont gagnés dans les valeurs de vitesses de déformation.

Dans le cas de matériaux à fibres courtes, ce type de comportement est


relativement bien décrit par les modèles basés sur l'approche de KELLY et
STREET (1972), tels ceux de GOTO et Me LEAN (1989) et TAYA et ARSENAULT
(1989). Il n'est pas de notre propos de présenter dans ce chapitre le
détail de ces différents modèles, mais d'en dégager certains points :

- plus la fraction volumique de fibres V (f) sera importante, ainsi


que le rapport longueur sur diamètre (t/d), plus l'on observera une
diminution de la vitesse de fluage du matériau composite ; ceci a
été observé expérimentalement, par exemple par KELLY et STREET
(1972) et NIEH (1984),
- dans le cas d'une interface en décohésion partielle, Ç, (la fibre de
longueur, l, subit une décohésion interfaciale de longueur £Ç) le
modèle de TAYA et ARSENAULT (1989), ainsi que celui de GOTO et Me
LEAN (1989), prédisent une vitesse de déformation d'environ trois
fois supérieure à celle devant être observée pour Ç = 1 (adhésion
parfaite) ; il en résulte que des interfaces fibres/matrice, même
partiellement en décohésion, peuvent engendrer une augmentation
importante des vitesses de fluage diminuant ainsi la résistance au
fluage.

L'effet d'amélioration de la résistance au fluage par incorporation


d'un renfort n'est pas toujours observé. KOESTER et al. (1988) rapportent
dans leur article une augmentation de la vitesse de fluage de Si N renfor-
cé par des SIC par rapport à une matrice monolithique Si N (Fig. 1.7) et
ceci pour deux teneurs en whiskers, 20% et 30%. La sensibilité à la con-
trainte est par contre plus faible en dessous d'un certain seuil de con-
trainte ; elle devient égale à celle du matériau monolithique au delà de ce
seuil (~ 300 MPa). Ce comportement reste inexpliqué à ce jour.

BACKHAUS-RICAULT et al. (1988) ont observé également dans le cas de


Si N (avec MgO comme additif) un comportement identique en compression
3 4
pour des nuances composites renforcées par 5% à 20% de SiC , ainsi qu'une
Le fluage des composites céramiques 25

KOESTER-1988 1 BALDONI-1988
1
M
" - Si3N4 + 20% SiCw «w S i 3 N 4 + 3 0 * SiCp
— Si3N4 1E-7 " • " S i N
1E-7 3 4
— S i 3 N 4 + 30* SiCw S i 3 N 4 + 3 0 * SiCw

/
/
1E-8 *
1E-8 - / y
/ yS
/ yf
/ yf
/ yS
/ yf
1E-9
1570K '/ T = 1473K
1E-9 1 1

50 100 200 50 100 200


a (MPa) a (MPo)
Fig. 1.7 : Variation de la vitesse Fig. 1.8 : Variation de la vitesse de
de déformation en fluage en fonc- déformation en fluage en fonction de
tion de la contrainte appliquée la contrainte appliquée pour Si N -
pour Si N et Si N -SiC , d'après SiC et Si N -SiC , d'après BALD0NI et
3 4 w w 3 4 p
KOESTER et al. (1988). BULJAN (1988).

sensibilité plus faible à la contrainte (n~3, par rapport à n~4 pour


Si N ). Un phénomène semblable avait déjà été observé par PORTER et al.
(1987) et NIXON et al. (1987). Toutefois BALD0NI et BULJAN (1988), qui ont
comparé l'effet de renforcement par des particules sphériques ou des whis-
kers dans Si N , ont observé une légère amélioration de la tenue en fluage
3 4
pour le matériau renforcé par des whiskers (Fig. 1.8), par rapport au maté-
riau renforcé par des particules.

En première conclusion il semble donc que dans les matériaux compo-


sites céramiques dont le fluage est gouverné par la déformation de la
matrice (fibres rigides), la qualité de l'interface soit le point crucial.
En effet, le même mécanisme est invoqué dans ces études : réduction du
glissement des grains par l'incorporation de SiC et surtout amélioration
de la tenue au fluage par diminution de la vitesse de croissance sous cri-
tique de fissures.
26 Chapitre I

DONALDSON et al. (1989) ont présenté une analyse du type de comporte-


ment rencontré lors du fluage des matériaux Al 0 -SiC . Ces auteurs suggè-
rent que les paramètres importants restent la contrainte de cisaillement à
l'interface, x , la valeur du rapport l/d et la qualité de l'interface î)
(coefficient de glissement). Notamment une rupture de fibre entraîne une
diminution du rapport l/d et donc une redistribution des contraintes. Lors-
que l/d diminue, la sensibilité à la contrainte augmente. Toutefois la
variation de la contrainte de cisaillement est inversement proportionnelle
à 7}. Ces auteurs concluent de la même façon que GOTO et Me LEAN sur le rôle
de l/d, dont l'augmentation entraîne une meilleure résistance au fluage ;
toutefois le coefficient de glissement interfacial, T), doit être dans ce
cas le plus faible. En réalité il n'y a pas contradiction avec les observa-
tions expérimentales : dès que le coefficient TJ tend vers 1 (glissement),
on observe un effet néfaste, les whiskers ne servant plus de renfort car
ils supportent une contrainte trop faible et la résistance au fluage chute
alors notablement.

Si TJ->1 , la contrainte est alors transférée de la fibre vers la matrice


au lieu de l'inverse. Da SILVA (1982) a d'ailleurs clairement décrit ce
phénomène de relaxation de contrainte associé (Fig. 1.9). Ce schéma permet
d'éclairer les résultats de BRENNAN et PREWO (1982) sur le composite SiC-
LAS à 1100° C et sous 345 MPa. Une vitesse de l'ordre de I C T V - 1 est obser-
vée et une sensibilité à la contrainte de l'ordre de 1,7. Toutefois la
durée des essais (flexion 3 points) n'excédait pas 24h, ce qui semble
faible (100 h en moyenne). Pour des températures plus faibles, ces auteurs
observent une valeur de n de l'ordre de 0,4, ce qui semble traduire un
fluage visqueux gouverné par la matrice (transitions de la phase vitreuse
résiduelle de la matrice) entraînant un comportement visco-élastique de
celle-ci. Ce type de comportement (matrice visco-élastique et fibres
"rigides") ressemble donc, par certains aspects, à celui rencontré dans le
cas des matériaux où la matrice se déforme plastiquement. Nous verrons
lorsque nous aborderons la discussion de nos résultats que ce type de
modèle ne peut pas être directement transposé au cas des composites céra-
miques à fibres longues SiC-SiC et C-SiC.
Le fluage des composites céramiques 27

Da SILVA-1962 Do SILVA-1982
•w

endommagement
motrice

endommagement
fibre

t
o

Fig. 1.9 : Evolution en fonction du temps, t, de la vitesse de fluage, e,


et de la contrainte, <r, pour les différents éléments constitutifs d'un
composite à fibres longues, d'après Da SILVA (1982).

3. Modèles et approches du comportement en fluage

La plupart des analyses du comportement en fluage des composites cher-


che à le décrire à partir des comportements des constituants pris séparé-
ment : fibre, matrice (y compris l'interface ou 1'interphase pour cer-
tains). Les lois de fluage des matériaux composites peuvent être établies
soit à partir de nombreuses expériences effectuées sur des composites
variés, soit en reliant le fluage du composite à celui de la matrice par
modification de la contrainte et de la vitesse de déformation. Cette der-
nière approche repose sur l'hypothèse implicite que la matrice se déforme
suivant le même mécanisme, qu'il y ait ou non un renfort.

La plupart des modèles proposés pour expliquer le comportement en


fluage des composites ont donc explicitement ou implicitement suivi cette
approche, en réalisant les modifications nécessaires des lois de comporte-
ment en prenant en considération les aspects géométriques dans un premier
temps. Si ces modèles tiennent comptent de l'aspect macroscopique, ils
n'incluent pas des effets interactifs à l'échelle de la microstructure.

Trois grandes classes de matériaux peuvent être dégagées parmi les


composites, dans la perspective du comportement en fluage :
28 Chapitre I

- le premier groupe comprend les composites possédant des fibres ali-


gnées : les modèles concernant cette catégorie reposent sur l'hypo-
thèse d'un transfert de charge de la matrice à la fibre par l'inter-
face, la fibre (à fortiori l'interface) étant sollicitée en cisail-
lement ; les contributions au fluage sont alors analysées par
rapport aux différents constituants : matrice, fibre et interface,
- le second groupe est composé des matériaux composites sollicités
suivant des directions hors axes d'orthotropie, la sollicitation
pouvant être uniaxiale ou biaxiale ; les contributions au fluage
doivent être connues suivant les axes principaux et la fonction de
transfert géométrique établie (ce qui peut se montrer délicat) ; ce
groupe inclut donc les composites à fibres longues tissées et les
composites à fibres courtes distribuées aléatoirement,
- le troisième groupe est constitué par les familles de composites
possédant des fibres orientées dans de nombreuses directions (3D, 4D,
11D . . . ) : les analyses du comportement en fluage en résultant sont
faites sur la base d'une vitesse de déformation égale dans les
divers "éléments" et fonction de la redistribution des contraintes.

La majorité des modèles proposés concerne la première catégorie,


c.a.d. les composites unidirectionnels. MILEIKO (1970) et Me LEAN (1972)
ont considéré un modèle simple comprenant des fibres rigides courtes et une
matrice se déformant par fluage en cisaillement. PEDERSEN (1974) dans le
cadre de ces modèles a analysé la distribution des déformations de la
matrice autour de la fibre en considérant toujours l'interface comme
rigide. KELLY et STREET (1972) ont étendu ces modèles au cas du fluage en
traction et pris en compte le cas de fibres pouvant se déformer en fluage.
Ce modèle fait d'ailleurs l'objet de nombreuses adaptations pour différents
types de composites : Cu-W (Da SILVA, 1982), Ni-Ni Al-Cr C (BULLOCK et
al., 1977 ; Me LEAN, 1980 ; LILHOLT, 1985), Al-SiC (LILHOLT, 1985),
Al 0 -SiC (PORTER, 1988 ; DONALDSON et al., 1989 ; WANG et al., 1989).
2 3 w
Selon les cas ces auteurs ont été amenés à prendre en compte soit l'aspect
du réseau de fibres (PORTER, 1988 ; DONALDSON et al., 1989 ; WANG et al.,
1989), soit des effets interactifs à l'échelle de la microstructure
(BULLOCK et al., 1977).

Toutefois, le modèle initial de KELLY et STREET (1972) ne prend pas en


compte l'évolution d'une variable d'endommagement ; en revanche, il con-
Le fluage des composites céramiques 29

tient une évolution du comportement en fluage tenant compte des propriétés


d'interface pour les fibres courtes. L'extension de ce modèle au cas de
composites à fibres céramiques longues a été effectué récemment par TAYA et
ARSENAULT (1989), ainsi que par GOTO et Me LEAN (1989), dans le cas de
matrices métalliques et une interface dont la valeur de l'adhésion fibre/
matrice varie entre 0 et 1 (0 = pas de glissement, 1 = glissement fibre/
matrice). Ces auteurs concluent à une influence mineure du glissement
interfacial fibres/matrice sur la déformation dans le cas de fibres lon-
gues, tandis que, en revanche, cet effet apparaît comme prépondérant dans
le cas de fibres courtes.

Une seconde approche, menée par SURESH et BROKENBROUGH (1990), consi-


dère la contribution des mécanismes d'endommagement à la déformation du
matériau composite. Le mode principal d'endommagement étant la croissance
de défauts le long des joints de grains et/ou des interfaces. Les hypo-
thèses de travail sont alors les suivantes :

- une matrice constituée de grains, qui est supposée, dans cette


approche, se déformer élastiquement pendant le fluage,
- aucun critère particulier de nucléation de défauts,
- une croissance suivant différents critères de défaut de taille, a ,
i'

à t=0.

Ces derniers critères sont :

- soit une proportionalité de la vitesse de croissance vis à vis de la


o

contrainte : a=ao* ; ce domaine de validité correspond à des durées


courtes où le critère de ténacité peut être utilisé,
- soit une dépendance de la vitesse de croissance vis à vis de la con-
O p
trainte, en loi puissance : a = y<r ,
- soit une vitesse de croissance du défaut imposée par la déformation
instantanée : a = i?e(t).
Ces auteurs ont, de plus, analysé l'influence de différentes geome-
tries de défauts. Deux domaines temporels ont été mis en évidence, corres-
pondant à ceux de la figure 1.3. Leur démarche permet donc, par la prise en
compte de ce seul mécanisme, de décrire le fluage des composites à fibres
courtes, à partir du choix de lois de croissance du défaut. Cette approche
30 Chapitre I

contient deux thèmes qui seront les nôtres :

* une loi d'évolution d'un endommagement proche de celle introduite par


KACHANOV (1958) :

e = E (1-D)
o

avec : <r, la contrainte appliquée,


E , le module d'élasticité,
o
G , la déformation,
D, 1'endommagement, comportant un terme de population de défauts
(nucléation) et de taille de défaut (croissance).

* des critères de propagation du défaut intervenant dans la loi d'évolution


de cet endommagement.

Ce dernier point a d'ailleurs été décrit par KROMP et al. (1987),


comme étant la difficulté majeure. Le tableau 1.5 rassemble à ce sujet ses
conclusions.

Mécanique Concept Critère Durée

Linéaire élastique K a ~ Kn Courte

.n/2
Elasto-plastique J Moyenne
a ~ J

Visco-élastique C a ~ (C*) n / n + 1 Longue

Tableau 1.5 : Critères de propagation d'un défaut macroscopique selon


diverses approches mécaniques, d'après KROMP et al. (1987).

POSITION DU PROBLEME

Dans un premier temps, la question qui se pose consiste à délimiter


les domaines d'étude (cf. les figures 1.2 et 1.3), puis dans un second
temps de déterminer le type de comportement rencontré. Cette seconde étape
nécessite de bien connaître, dans le cas des composites, les comportements
Le fluage des composites céramiques 31

intrinsèques des constituants : fibre, matrice et interface. La caractéri-


sation de ce dernier élément est d'ailleurs la plus difficile. Connaissant
les comportements sous sollicitations mécaniques des constituants, il est
alors possible de mettre en évidence et, dans une certaine mesure, de modé-
liser les mécanismes responsables de la déformation à haute température
ainsi que leur séquence dans chaque domaine. Le problème restant de décrire
la tenue d'une structure en service (avion spatial Hermès par exemple), il
convient d'être capable de définir une loi d'évolution de 1'endommagement,
ainsi qu'un critère lié à la création ou à la propagation de cet endommage-
ment. Ceci soulève deux problèmes : définition du paramètre "endommagement"
et quelle mesure lui associer ? quel critère mécanique lui adjoindre ?
33

CHAPITRE I I : LE COMPOSITE A MATRICE


CERAMIQUE ET SES CONSTITUANTS

Comme nous venons de le mettre en évidence, les caractéristiques des


matériaux composites dépendent tout d'abord de celles de leurs consti-
tuants : fibres, matrice, porosité et interface.

Les caractéristiques de fluage du matériau composite vont donc être


reliées directement à celles des fibres, de la matrice et de l'interface.

Nous allons donc présenter successivement les différents constituants


des composites céramiques à fibres de type SiC, noyées dans une matrice
céramique, en rappelant leurs modes d'élaboration et leurs caractéristiques
qui nous seront utiles pour mieux appréhender le comportement en fluage des
SiC-SiC 2D.

Dans une dernière partie, préalablement à l'étude de la déformation à


haute température, nous présenterons le matériau objet de cette étude, le
SiC-SiC 2D : son procédé d'élaboration, ses caractéristiques morphologiques
et microstructurales, puis nous aborderons la caractérisation mécanique de
son interface.

Ce chapitre a donc essentiellement pour but de présenter des informa-


tions qui nous seront nécessaires pour expliquer le comportement en fluage
du SiC-SiC 2D, puisque nous ne disposons, à notre connaissance, d'aucun
résultat de fluage de matériaux composites céramiques à fibres longues
multidirectionnelles pouvant servir de comparaison à l'heure actuelle.
34 Chapitre II

I. LA FIBRE

Nous allons rappeler maintenant quelques résultats présentés dans la


littérature ayant trait aux propriétés des fibres continues et plus parti-
®
culièrement de la fibre de carbure de silicium, Nicalon , qui est à la base
du renfort fibreux du composite faisant l'objet de ce travail.

Parmi la variété croissante de fibres céramiques potentiellement envi-


sageables comme renfort dans un composite à matrice céramique, la fibre de
carbure de silicium commercialisée par Nippon Carbon sous l'appellation
®
Nicalon représente, en 1990, en quelque sorte la référence dans le domaine
(pour la production industrielle et ses caractéristiques thermomécaniques).
Cet état de fait est dû en grande partie à sa disponibilité commerciale et
à la bonne tissabilité de cette fibre, qui a permis de développer
rapidement des applications nouvelles intéressantes (HERAUD et SPRIET,
1988 ; JAMET, 1989 ; BERNHART, 1990, CHAUMETTE, 1990).

Le souhait actuel, pour développer des matériaux répondant aux besoins


toujours plus exigeants de l'industrie aérospatiale, consiste à disposer
sur le marché d'une fibre présentant de bonnes performances, soit
typiquement :

- des propriétés mécaniques élevées,


- une stabilité chimique de la fibre avec la température et en fonc-
tion du temps,
- une stabilité de ses propriétés mécaniques en atmosphère oxydante à
haute température (jusqu'à 1600° C) pour un usage de longue durée,
- une aptitude à être un renfort textile pour des composites multi-
directionnels (tissabilité, régularité, finesse des filaments).

Le tableau II. 1 (ROUBY, 1987 ; CHORLET, 1988 ; OKAMURA, 1987 ; KO,


1989) rassemble les principaux renforts possibles, actuellement existants,

Nippon Carbon Co. , Tokyo, Japon.


La f i b r e 35

Fabricant Nom Composition P "3 d fim E T


rt GPa max
commercial % massique g. cm MPa

NIPPON Nicalon 58 Si, 31 C 2.55 10-20 2510-3290 180-210 1200


CARBON 12 0

AVCO - SiC - 6-10 2800 280-315 • -

AVCO SCS6 SiC sur 3 140 3450-3900 400 1300


âmes C

UBE Tyranno 48 Si, 4 Ti 2.3-2.5 8-10 2600-3000 200 1300


28 C, 18 0

DOW CORNING 47 Si, 2.3 10-20 1750-2100 175-210 -


DARPA 15 N, 8 0

DOW CORNING 59 Si, 10 C 2.35 8-15 2100-2450 140-175 -


DARPA 29 N, 3 0

DOW CORNING 69 Si, 30 C 2.6-2.7 10-15 1050-1400 175-210 -


DARPA 1 0

RHONE Fiberamic SiCN 2.4 15 1800 220 1400


POULENC

CARBORUNDUM - B.C 2.5 10 2450 275 2200


4

CARBORUNDUM - BN 2.25 4-7 800-1600 100-500 1100

TOA NENRYO Si 2.5 5-10 2500-3300 300 1200


3N4
KOGYO
(TONEN)

DU PONT FP 99 A1 2 0 3 3.9 21 1380-2100 385 1300

MITSUI - identique - 8-12 - - 1000


à FP DUPONT

ICI Saphil 96 A1 2 0 3 3.3-3.4 3 2000 250-300 1000


4Si02

3 M Nextel 312 62 A1 2 0 3 2.7 8-11 1750 150 1200


24 Si0 2
14 B 2 0 3

3 M Nextel 440 70 A1 2 0 3 3.1 10-12 2700 190 1425


28 SiO
2B
2° 3
36 Chapitre II

3 M Nextel 480 (idem 440) 3.05 20 2275 224 1600

SUMITOMO 85 A1 2 0 3 3.2 9-17 1800-2600 210-250 1250


" 15 Si0 2

DENKI 80 A1 2 0 3 3.1 10 2400 240 1200


KAGAKU
" 20 SiO

DU PONT PRD 166 85-75 A1 2 0 3 4.2 21 2100-2450 380 1400


15-25 Zr0 2

QUARTZ ET — 99.99 SiO 2.2-2.5 1-30 100-1000 75-90 1600


SILICE
amorphe

ENKA HT 99.6 SiO 2 10 800 66 1100

ASAHI GLASS - 99.999 SiO 2.2 - 600-900 72 1000

STEVENS Astro- sio2 2.2 9 3450 69 1000


quart z

AVCO - B amorphe 2.6 100 3450 400 320


sur âme C

AMOCO T 300 R C 1.8 10 2760 276 >1650

AMOCO T 40 R C 1.8 10 3450 276 >1650

UNION UHM C 1.96 8-10 2100 690 300air


CARBIDE «2500p

TORREY Torayca C 1.81 6.5 2750 390 300air


M 40 RM «2500p

TORREY Torayca C 1.75 7 3530 230 300air


T 300 HR «2500p

TORREY Torayca C 1.80 5-5 5600 300 300air


T 800 H «2500p

Tableau II. 1 : Principales fibres céramiques longues et quelques unes de


leurs caractéristiques, c : résistance à la rupture en traction ;
rt
E : module d'élasticité; p : densité; d : diamètre des fibres ;
T : température maximale d'utilisation C O . 2500p signifie que
max
le matériau supporte cette température lorsqu'il est graphitise
et/ou protégé.
La fibre 37

pour les composites à matrice céramique. Leurs caractéristiques fondamen-


tales y sont indiquées à titre de comparaison (les valeurs reportées sont
issues de mesures effectuées à température ambiante).

De part leur enjeu stratégique de nombreuses sociétés japonaises,


nord-américaines et européennes ont décidé assez récemment le développement
de cette nouvelle classe de matériaux. Le besoin ciblé est d'obtenir des
fibres plus réfractaires et ayant une stabilité chimique avec la tempéra-
ture la plus grande possible. D'activés recherches sont donc en cours et
quelques rares publications permettent d'en apprécier les évolutions eu
égard à la confidentialité qui accompagne ce type de travaux. Pour attein-
dre les performances thermomécaniques souhaitées, il convient de maîtriser
la structure de la fibre, ainsi que sa stabilité au vieillissement à haute
température.

Nous allons maintenant rappeler brièvement les différentes étapes de


®
préparation de la fibre Nicalon qui constitue le renfort du matériau fai-
sant l'objet de cette étude. Ceci nous permettra de mieux comprendre sa
structure et par la même ses caractéristiques thermomécaniques.

®
1. Elaboration de la fibre Nicalon

Toute une zone de brevets protégeant la méthode de fabrication de la


®
fibre Nicalon {i/d > 100), seules les grandes étapes sont connues et ont
été publiées par l'équipe qui a mis au point cette fibre (YAJIMA et al.,
1976). La figure II.1 illustre les différentes étapes de cette fabrication.

L'esprit de la méthode de préparation proposée par YAJIMA est de


transposer la technologie de fabrication des fibres de carbone à celle de
fibres de carbure de silicium. Afin d'obtenir un polymère précurseur de la
fibre céramique ad hoc, le monomère choisi est le dichlorodiméthylsilane.
La déchloration par l'action du sodium fondu permet la synthèse de
diméthylpolysilane qui est polymérisé en polycarbosilane (PCS). Sa
structure n'est pas linéaire mais de forme "chaise", se rapprochant ainsi
de la structure SiC-ß. La masse moléculaire de ce polymère est toutefois
relativement faible (M = 1500), par rapport à celle de ceux conduisant aux
38 Chapitre II

si
/ \
Cl Cl

Dlchlorodlméthylsllane
Déchloratlon (Va) 0
Œ
3 '
1
— Si —
1
ra
. 3.
Dimethylpolysllane
Polymérisation 470'C, autoclave S
CH H
I3 I
•SI Si
I I
H H
Po 1ycarbos11ane

Fibres de
Filage 350'C, V.
El
Polycarbosilane

Reticulation 190'c, air

Fibres de
Polycarbosilane
réticulé

Pyrolyse 1300'C, 100'C/h, vide ou ff^

Fibres de SIC
amorphes ou
microcristal U n e s

Fig. II. 1 : Etapes de fabrication de la fibre de carbure de silicium selon


YAJIMA et al., 1976.

fibres textiles de type polyacrilonitrile (PAN) utilisées pour la fabrica-


tion des fibres de carbone. Une pâte difficilement filable est alors
obtenue, constituant l'étape cruciale du procédé de fabrication (étape (3)
de la figure II.1). En outre, le caractère bénéfique des traitements
thermiques ultérieurs est malheureusement entaché par le fait que ceux-ci
sont aussi à l'origine de la velléité de la fibre à se transformer à partir
de 1200° C (étapes 4 et 5).

En effet, à l'issu de la polymérisation, l'existence de groupements


méthyl "libres" sur la structure du polymère est responsable en grande par-
tie du carbone "libre" en excès formé après pyrolyse du polymère (étape 5).
La fibre 39

Les conditions thermodynamiques d'équilibre d'un tel système en fonc-


tion de la température et de la pression ne sont pas a priori favorables
dans un milieu oxydant. De plus, le polycarbosilane est réticulé sous air à
une température voisine de 200° C (étape 4). Ce traitement a pour but de
rendre la fibre infusible. Cette étape semble responsable de la présence
d'oxygène au sein de la fibre. Cet écart à la stoechiométrie (présence
d'oxygène et de carbone) par rapport au carbure de silicium constitue la
raison fondamentale de l'évolution structurale de la fibre, observée en
fonction de la température et de l'environnement. A ce propos, GULBRAUSEN
et JANSSON (1972) dans le cas de la stabilité thermodynamique du système
Si-O-C (SiO + SiC + C ), ainsi que SINGHAL (1976) dans le cas des
(s) (s) (s)
cinétiques d'oxydation de SiC, ont été amenés à définir les conditions de
stabilité d'un tel système en fonction de la température, de la pression et

Auteurs % Si % C % 0 Référence fibre


YAJIMA, 1976 54.6 34.1 11.2 -

MAH, 1984 54.3 30 11.8 -

SIMON, 1984 63 15.5 - NLM 102

RAWLINS, 1987 53.5 38.2 8.3 -

AUBIN, 1987 55 34 11 NLM 202

LANCIN, 1987 52.2 35.8 11.9 NLM 202

FAREED, 1987 54.3 30 11.8 NLM 202

SAWYER, 1987 53 31 10 NLM 202


COTTERET, 1987 54 29.7 13 NLM 202

JOHNSON, 1988 58 31 10 -

JASKOWIAK, 1989 57.4 35 7.5 NLM 202

GUTTERL, 1989 54 29.7 13 NLM 202

Tableau II. 2 : Résultats d'analyse chimique de la composition de diffé-


rentes fibres SiC selon divers auteurs.
40 Chapitre II

des pressions partielles des produits éventuels de réactions. Leurs résul-


tats mentionnés ici seront d'une aide précieuse à la compréhension des phé-
nomènes de vieillissement que nous évoquerons dans les chapitres suivants.
Le traitement thermique final est une pyrolyse réalisée par une montée
lente en température (100° C/h) sous vide, jusqu'à une température voisine
de 1300° C. Six étapes peuvent être détaillées lors de la montée en tempéra-
ture : elles correspondent aux différentes modifications structurales qui
conduisent à la fibre (HASEGAWA et OKAMURA, 1983). Le résidu de la pyrolyse
est alors composé de SiC (Si, 0, C) sous une forme plus ou moins stable. Le
tableau II.2 rassemble quelques résultats d'analyses chimiques effectuées
®
par différents auteurs sur les fibres Nicalon .

2. Structure

Les différents travaux de caractérisation menés sur les fibres ont eu


pour but, dans un premier temps, de parfaire la connaissance de la struc-
ture de celles-ci et dans un second temps de mettre en évidence leurs com-
portements à haute température sous des atmosphères variées (air, gaz
neutre, vide).

Les premières études concernent les étapes d'élaboration et/ou de


caractérisation structurale. La plupart des travaux sur ce sujet sont basés
sur des résultats d'observations en microscopie électronique à transmis-
sion, couplées à une analyse chimique pour certains.

Il est important de noter dès à présent, que deux générations de fi-


ls)
bres Nicalon existent : NG 100 et NG 200. Nous considérerons par la suite
que les travaux ne mentionnant pas ce point feront référence à la fibre la
plus ancienne e u égard à la date de parution d e s articles. Les deux colon-
nes d u tableau II. 3 présentent les caractéristiques d u type d e s fibres
actuellement existantes. La différence majeure entre ces deux types pro-
vient de la teneur e n oxygène et, dans une moindre mesure, de leur état de
cristallinité (il est bon d e rappeler que la toute première génération de
fibre était amorphe).
La fibre 41

Type Ref. 0 p E cr e
rt r
X g. cm GPa GPa X

NG 100 SG 16 2.5 200 2.4 -

NG 200 CG 11 2.6 200 2.8 1.5 %

Tableau II.3L : Caractéristiques des deux types de génération de fibres


Nicalon : NG 100 et NG 200. La première génération a conduit aux
fibres dénommées NLP 101, NLM 101, ... et la deuxième à la fibre
NLM 202. 0 : teneur en oxygène; p : densité; E : module d'élasticité;
contrainte à la rupture en traction allongement à la
rt
rupture

Deux catégories d'études sont présentées dans la littérature selon que


les travaux font référence à des observations effectuées sur la fibre nue
ou dans un composite. Dans ce dernier cas, l'interface fibre/matrice, dont
le rôle thermomécanique est crucial, fait plus particulièrement l'objet de
l'attention des auteurs (par exemple BRENNAN, 1986 ; RAWLINS et al., 1987).

a. Etudes relatives à la fibre nue

Quel que soit le type d'étude, les observations effectuées en micro-


scopie électronique à transmission mettent en évidence la présence dans la
fibre de nanocristaux de SiC-ß, dont la taille varie de 1 à 3 nm. Cette
structure fait apparaître des anneaux de diffraction sur les clichés, ce
qui tend à prouver son caractère plutôt amorphe (très petits cristaux).

Parmi les deux structures cristallines principales - cubique et hexa-


gonale - que possède le SiC, les monocristaux de SiC de la fibre se présen-
tent sous la forme de la structure cubique (dite carbure de silicium ß).
Cette structure primaire est normalement stable sous toutes conditions jus-
qu'à 2000° C. Les conditions de transition ß -» a ont fait l'objet de nom-
breuses études (par exemple HEUER et al., 1978).

Une des premières études publiées ayant trait à la stabilité en tempé-


®
rature des fibres Nicalon est celle de MAH et al. (1984). Ces auteurs ont
notamment étudié l'effet combiné de la température et de l'environnement
42 Chapitre II

sur la structure et les propriétés de la fibre. La gamme de températures


variant de la température ambiante à 1400CC, une attention particulière
avait été portée sur les températures les plus hautes (T > 1000° C) ; les
environnements choisis étaient l'air, l'argon et un vide de pression
-5
P=10 torr. La durée de tous les traitements thermiques était de deux
heures, le temps de montée en température relativement court (45 min) (nous
verrons que ce temps possède une très grande importance). Quelle que soit
la méthode d'analyse utilisée - SEM, TEM, XPS, SIMS, AES, - les auteurs
concluent à un phénomène de dégradation des propriétés de la fibre, bien
que seule la résistance résiduelle en traction a été testée.

Deux comportements très différents sont mis en évidence suivant que la


fibre est exposée à un traitement thermique sous une pression partielle
d'oxygène plus ou moins importante. Une évolution structurale est observée
quel que soit l'environnement : soit une croissance des grains SiC plus ou
moins forte (vide ou argon) qui débute par la surface (ce phénomène n'est
donc pas intrinsèque), soit une croissance d'une couche de silice en
surface.

Les conclusions sont identiques à celles issues de travaux plus


récents (SAWYER et al., 1987), dont le but était de comparer les propriétés
®
de la fibre Nicalon à de nouvelles fibres de carbure de silicium (DARPA,
Dow Corning). Ces auteurs abordent par contre l'étude des fibres en terme
de mécanique de la rupture (étude de la taille critique de défauts) vis à
vis de la structure en fonction de la température. Notamment une relation a
été établie reliant la contrainte à la rupture de la fibre au miroir de
rupture correspondant. L'origine de la rupture serait un défaut du type
inclusion riche en carbone. Toutefois l'influence de défauts de surface
n'est pas à écarter.

L'étude statistique de tels défauts en terme de rupture a été réalisée


dès 1980 par ANDERSON et WARREN (1980), puis SIMON et BUNSELL (1984) et
BUNSELL et al. (1988). Ces auteurs mettent en évidence la nécessité de
tenir compte de la distribution en taille de la fibre (diamètre) pour éta-
blir une statistique de Weibull. Cette distribution est relativement acces-
sible facilement par des techniques d'analyse d'images (ABBÉ et al., 1990).
Une publication récente (JASKOWIAK et Di CARLO, 1989) vient de préciser la
La fibre 43

corrélation de la perte de poids sur la dégradation des propriétés méca-


niques et ceci pour toutes les atmosphères de traitement. Outre la mise en
évidence de produits de réactions volatils (perte de poids), cette publica-
®
tion met en évidence le caractère perfectible de la fibre Nicalon . En réa-
lisant un traitement par pressage isostatique sous haute pression et argon,
ces auteurs obtiennent un déplacement de la limite en température, vers
1400° C, pour le début de la dégradation des propriétés.

p Réactions possibles
•c 0 Pa
2
Air < 1900 0.2 SiC + 3/2 0 -» SiO + CO
2 2

0 650 1 SiC + 0 -> SiO + C


2 2 2
C + 0 -> CO
2 2
4
Vide 1100 io- SiO C -» SiO + ...
x l-x (g)
SiO + 2C -» SiC + C0,
(g) (s) (s) (g)

Argon 1100 io- 21 SiC, % -> C, % + Si,


(s) (s) (labile)
Si, v +0 , % -> SiO ,
(labile) 2 (trace) 2 (amorphe)

Tableau II.4: Réactions possibles de décomposition de la fibre SiC en fonc-


tion de la température et de la pression partielle d'oxygène.

Les premières études mettent en évidence une structure relativement


instable à haute température qui, selon l'environnement, évolue différem-
ment à partir de températures d'initiation différentes (Tableau II.4).

Si la structure de la fibre peut être décrite majoritairement par des


liaisons covalentes du type Si-C et, dans une moindre mesure, du type Si-0,
il semble que l'image la plus vraisemblable de la structure de la fibre
puisse être représentée par un réseau de liaisons tridimensionnelles de
type C-O-Si. Un modèle très élaboré, issu d'un travail expérimental mettant
en jeu de nombreuses techniques fines d'analyse de la matière, vient
d'être présenté par LAFFONT et al. (1989) : ce modèle décrit la fibre comme
composée de microcristallites de SiC-ß localisés dans un continuum consti-
44 Chapitre II

tué de tétraèdres SiO C (x < 4). Ces auteurs indiquent plus particulière-
X 1-x
ment que le squelette du matériau inorganique est directement issu de celui
du polymère précurseur.

GUIGON (1988), MANIETTE (1988) et MONTHIOUX et al. (1990), s'appuyant


sur des observations en microscopie électronique en transmission, accrédi-
tent ce modèle en mettant en évidence du carbone présent sous une forme
cristalline bipériodique ("carbone turbostatique") dont le rôle "cataly-
seur" est mis en relief lors de traitement en température (MONTHIOUX et
al., 1990). Le rôle du carbone semble être déterminant sur la croissance
des grains.

Au-dessus de 1000° C les cristaux de SiC grossissent, les unités struc-


turales de base (USB) de carbone aromatique s'associent, enfermant dans des
cages aux parois incomplètes des cristaux de SiC. Lorsque ces derniers
grossissent, ils "repoussent" le carbone (qui est consommé) et les cages
s'agrandissent (MONTHIOUX et al., 1990). Si le comportement intrinsèque de
la fibre dans différents environnements semble en voie d'être expliqué
clairement, grâce à une meilleure connaissance de la structure de la fibre,
en revanche le comportement de la fibre dans le composite est plus diffi-
cile à appréhender en fonction de la température sous des atmosphères
variées.

b. Etudes relatives à la fibre dans le composite

L'équipe de l'U.T.R.C. (United Technologies Research Center à Hartford


(USA)) (BRENNAN et PREWO, 1982 ; BRENNAN, 1986 ; PREWO, 1986, 1987, 1988 ;
NARDONE et PREWO, 1988) a particulièrement étudié le système SiC-LAS
(alumino-silicate de lithium) et ses interfaces. Pour essayer de créer des
barrières de diffusion ils ont été amenés à utiliser des ajouts de Nb 0
2 5
qui ont conduit à des dépôts de niobium autour des fibres, entraînant une
ségrégation de carbone à l'interface fibre/matrice. PERES (1988) conclut
suivant les travaux de BRENNAN au même mécanisme de modification de l'in-
terface pour ce type de composite.
La fibre 45

Les analyses en SIMS effectuées par LANCIN et al. (1987) ont montré
qu'un dépôt en phase vapeur de SiC, pour réaliser un microcomposite, pos-
sède deux zones de stoechiométrie différente, le premier dépôt étant riche
en carbone. MANIETTE (1988), lors de l'étude de 1'interphase fibre/matrice
a révélé l'influence des conditions du dépôt sur les caractéristiques de
1'interphase. Plus particulièrement, il décrit l'influence du temps et de
la pression sur la présence ou l'absence de silice, de silicium ou de car-
bone en surface de la fibre. Les résultats de ces études nous seront pré-
cieux pour interpréter les observations en microscopie électronique
d'échant i1Ions déformés.

Nous venons de voir que la structure de la fibre est complexe, et


qu'elle évolue en fonction de la température. Cette modification struc-
turale entraîne une chute des propriétés mécaniques observée par différents
auteurs. Voyons d'une manière plus détaillée, dans le paragraphe suivant,
les caractéristiques de la fibre à haute température.

3. Comportement thermomécanique

Sur les figures II.2 sont présentées les variations de la contrainte à


®
la rupture en traction de la fibre Nicalon en fonction de la température,
mesurées par différents auteurs sous air (MAH et al., 1984; PFEIFFER, 1988;
FRETY et BOUSSUGE, 1990) et sous différentes atmosphères (MAH et al. , 1984;
ANDERSSON et WARREN, 1980 ; PFEIFFER, 1988 ; JASKOWIAK et Di CARLO, 1989).
L'ensemble des résultats présente une telle diversité qu'il n'est pas pos-
sible de tracer une courbe maîtresse. A cela, plusieurs raisons :

- le résultat de ce type d'essai dépend de la longueur de fibre testée


qui n'est que parfois mentionnée,
- de plus les fibres sont testées soit directement en température soit
après recuit, d'où une grande différence dans les résultats,
- en outre l'environnement n'est pas toujours le même (air, hydrogène,
argon, vide...).
46 Chapitre II

o
a. air
* . 2000

AANDERSSON-1980.N2
1000 1000
OMAH-1984.V
• MAH-1984/J-
V PFEIFFER-19B8,N2 O PFEIFFER-1988
OJASKOWIAK-1989.V OFRETY-1990
• JASKOWlAK-19B9.Ar AMAH-19B4

500 1000 1500 500 1000 1500


T(°C) T (°C) •*

Fig. II.2 : Variation de la contrainte à la rupture en traction de la fibre


Nicalon sous différentes atmosphères (V : vide ; Ar : argon) selon
différents auteurs.

Néanmoins ces études constituent la première étape nécessaire de


caractérisation de la fibre pour valider son utilisation à haute tempéra-
ture. ANDERSON et WARREN (1980) ont été parmi les premiers à montrer la
diminution de la contrainte à la rupture en traction de la fibre en fonc-
tion de la température. Elle est observée dès 1000° C sous H . Dans le même
ordre d'idée, une comparaison de l'effet de l'environnement sur la résis-
tance en traction des fibres a été effectuée par FAREED et al. (1987). Ces
auteurs mettent en évidence une chute des propriétés dès 600° C sous air. A
ce propos, 0KAMURA (1987) a pu relier la chute des propriétés de la fibre
Nicalon en fonction du temps avec l'évolution de la teneur en oxygène. Les
figures II.3 présentent ces résultats relatifs à la fibre Nicalon NLM 202,
testée sous air et sous argon. Ce comportement est invoqué par FRETY et
BOUSSUGE (1990) pour expliquer l'évolution des caractéristiques mécaniques
de leur composite SiC-SiC. En particulier ces auteurs exhibent les analyses
X de l'interface pour donner foi en leurs allégations, démontrant la créa-
tion d'une interphase de silice entre la matrice et la fibre. A ce sujet,
nous reviendrons plus attentivement sur leurs travaux dans la partie con-
cernant l'interface, où figurent les résultats de vieillissement sous air.

L'influence de la température et de la contrainte ainsi que du temps


n'ont été réellement étudiées à ce jour que par l'équipe de BUNSELL et
SIMON (1984 ; 1988). Leurs travaux font référence au fluage de la fibre nue
La f i b r e 47

OKAMURA-1987

. H73K

1673K

air

10 100 1000
t(h)
Fig. II. 3 : Variations de la contrainte à la rupture de la fibre Nicalon
®
NLM 202 en fonction du temps, pour différentes températures de recuit
sous argon et sous air, d'après OKAMURA (1987).

(en réalité deux types de fibre : l'une amorphe, NLP 101, et l'autre micro-
cristalline, NLM 102). Bien que cette étude soit remarquablement détaillée
par une corrélation des propriétés mécaniques avec l'évolution de la micro-
structure (notamment de la teneur en carbone), son applicabilité directe au
comportement de la fibre dans le composite SiC-SiC faisant l'objet de notre
étude sera difficile. A cela deux raisons :

- les fibres étudiées sont d'une ancienne génération par rapport à la


fibre NLM 202 qui constitue le renfort du matériau SiC-SiC : aussi
leurs caractéristiques sont quelque peu différentes,
- le comportement d'une fibre dans un composite est a priori différent
de celui de la fibre nue (dans le cas d'une multifissuration le phé-
nomène de corrosion par l'environnement est complexe).

Néanmoins ces résultats seront d'une importance capitale pour la compréhen-


sion du fluage du matériau composite (chapitre suivant). Rappelons mainte-
nant brièvement les points saillants de leur étude expérimentale :

- le domaine de contraintes exploré était de 50 à 800 MPa,


- l'atmosphère était l'air ou l'argon.
48 Chapitre II

Indépendamment de l'atmosphère d'essai, ces auteurs observent une chute des


propriétés mécaniques dès 1000° C (en particulier du module de WEIBULL, tem-
pérature au dessus de laquelle l'étude en fluage est possible (Fig. II.4a).
En revanche, les fibres demeurent très sensibles aux défauts, puisque même
à cette température la contrainte limite est de 500 MPa. Une contrainte de
moitié peut engendrer une rupture instantanée. Le module de WEIBULL décroît
également, signifiant l'apparition de nouveaux défauts de taille plus
grande, et/ou plus nombreux que les précédents. La sensibilité de la fibre
microcristalline NLM 102 semble moindre. Cet aspect est expliqué par une
diminution de la teneur en carbone observée en RPE,qui est progressive,
ainsi que par la formation d'une couche de SiO en surface ; ce type de
comportement est tout à fait en accord avec les phénomènes décrits par
M0NTHI0UX et al., 1990.

BUNSELL-1988 1E-7 BUNSELL-1988

o
QL
O

T=1573K

1E-8
NICALON (NLM202) NICALON (NLM202)

500 1000 1500 0.2 0.5


T(°C) c (GPa)

Fig. II. 4 : Variation de la contrainte à la rupture, <r, en fonction de la


température, T, et variation de la vitesse de déformation, ^ en fonc-
tion de la contrainte appliquée, cr, pour la fibre Nicalon NLM 202,
d'après BUNSELL et al., 1988.

Pour toutes les températures supérieures à 1000° C, ces auteurs obser-


vent une recristallisation de la fibre à partir de l'évolution de la raie
(hkl) = (111) en diffraction des rayons X. Le degré de cristallisation ini-
tial (pour la fibre NLM 102 par rapport à la fibre NLP 101) joue sur la
La fibre 49

cinétique de recristallisation, de même que la contrainte retarde l'évolu-


tion de cette recristallisation. L'effet de l'environnement est par contre
décisif pour les deux types de fibre : le fluage sous air est plus lent que
sous argon (1 ordre de grandeur dans la vitesse), mais des réactions dégra-
dantes ont été observées sous argon (SIMON, 1984) (Fig. II.4b). Un seuil de
contrainte, <r , est observé. La relation e=A(<r-<r ) est alors utilisée :
o o
le fluage sous argon serait dû à la diffusion du carbone le long des joints
de grains, alors que cette diffusion ne serait pas celle préférentielle
sous air (la formation d'une couche de silice en surface protégerait l'in-
térieur de la fibre).

Quelle que soit la température, la structure évolue pendant le fluage


primaire d'autant plus rapidement que la température augmente (« 20h à
1200° C).

Fibre T (T n Type de fluage


K o GPa kJ/mol

1373 0.30 490 1 NABARR0 (diffusion en volume)

NLP 101 1473 0. 17 380 2 COBLE (diffusion aux joints)


*
1573 <0. 10 270*; 370 1 ; 2 ASHBY et VERRALL (réaction d'in-
terface aux joints)

1373 0.60 - 1 -

NLM 102 1473 <0. 10 - 1 -

1573 0. 15 - 2 -

1373 0.30 - 2 -
NLM 202 *
1573 0.15 - 1 ; 2 -

®
Tableau II.5: Caractéristiques en fluage des 3 principales fibres Nicalon .
T : température de l'essai ; Q : énergie d'activation ; n : exposant
de la contrainte. Ces données correspondent à des résultats d'essais
sous argon et * sous air. D'après BUNSELL et al. (1988).
50 Chapitre II

Enfin, nous avons rassemblé les données fondamentales obtenues par ces
auteurs dans le tableau II.5. Les valeurs concernant la fibre NLM 202 ont
été obtenues à partir de l'analyse des courbes citées par BUNSELL et al.
(1988).

En conclusion : le fluage de la fibre intervient dès 1000° C avec un


seuil de contrainte relativement élevé. Les vitesses de fluage sont plus
élevées sous atmosphère à faible pression partielle d'oxygène. Une recris-
tallisation intervient lors du fluage primaire, celle-ci étant retardée par
la contrainte. Les énergies apparentes d'activation sont par contre plus
basses que celles correspondant à 1'autodiffusion du silicium ou du carbone
dans SiC et inférieures à celles du Si ou du C dans les joints.

CONCLUSION

®
Quel que soit l'environnement, on vient de voir que la fibre Nicalon
subit des transformations chimiques et structurales importantes au-delà de
1250° C. Celles-ci sont particulièrement dégradantes sous vide pour la fibre
nue, en accélérant les réactions entre le carbone libre et les liaisons
Si-0.

Sous air ces modifications interviennent dès 650° C et conduisent à la


formation d'une couche de silice dont l'épaisseur dépendra du temps et de
la température. En revanche sous gaz neutre, il semble que malgré le départ
de SiO gazeux, la fibre se recouvre d'une couche de carbone partiellement
protectrice.

Type Si C N 0
X X X X
®
Fiberamic 56 12 23 9
Nicalon® NLM 202 58 30 - 12

Tableau II.6: Comparaison de la composition chimique (% en poids) des


fibres Fiberamic (Rhône-Poulenc) et Nicalon (Nippon Carbon).
La matrice 51

Signalons enfin que la Société Rhône-Poulenc vient de développer une


fibre très prometteuse (et qui vient de faire l'objet d'un accord d'exclu-
sivité pour sa commercialisation sur le continent nord-américain avec
®
Hercules Advanced Materials & Systems) : la fibre Fiberamic (SiCN),
(PEREZ, 1988 ; PEREZ et SACCO, 1990). Sa composition chimique est donnée à
titre indicatif dans le tableau II.6. Par rapport a la fibre Nicalon , elle
possède une structure vitreuse, ainsi qu'une phase exédentaire en carbone.
Son principal avantage réside dans le fait que sa structure vitreuse se
conserve lors des traitements à 1400° C et au delà, et ceci quelque soit le
®
taux en oxygène (3 à 10%), alors que pour la fibre Nicalon , au dessus de
1200° C apparaît une croissance des grains de SiC, dégradante vis à vis des
propriétés thermomécaniques.

II. LA MATRICE

L'élaboration de la matrice fait partie des dernières étapes de la


fabrication d'un composite après la réalisation de la préforme. La plupart
des efforts se font actuellement vers le développement de techniques et
méthodes de fabrication permettant d'obtenir des composites aux côtes
finies avec des coûts compétitifs.

1. Elaboration de la matrice

Nous n'aborderons pas ici les méthodes devenues très classiques,


basées sur les techniques de frittage qui sont utilisées par exemple pour
les composites céramiques particulaires ou à fibres courtes.

a. Principales méthodes

Pour élaborer un composite céramique à fibres longues, sans détruire


les caractéristiques des fibres et/ou du tissu, il faut partir d'une
préforme, généralement obtenue à l'aide de méthodes de tissage, qui est le
plus souvent imprégnée. Ces préformes sont ensuite infiltrées (CHERMANT,
1989) soit par :

- une barbotine,
- un polymère, qui après polymérisation formera la matrice,
52 Chapitre II

- un sol, qui après séchage se transformera en céramique après trai-


tement thermique,
- une matrice liquide qui infiltrera la préforme avec ou sans réac-
tion,
- une phase gazeuse (procédé CVI : infiltration chimique en phase
vapeur).

CORNIE et al. (1986) ont effectué une description détaillée des différentes
techniques disponibles pour la fabrication aussi bien des composites à
matrice métallique (MMC) qu'à matrice céramique (CMC) renforcée par des
céramiques (fibres ou particules). Le problème majeur se situe dans la
minimisation de 1'endommagement des fibres (réaction chimique fibre-
matrice), ainsi que le taux de porosité de la matrice, tout en obtenant la
densificatipn du matériau. Dans un ouvrage récent CHAWLA (1987) a décrit à
ce propos les avantages et les inconvénients de certaines méthodes.

La plupart des travaux ont eu pour objet l'étude des composites à


matrice verre-céramique type alumino-silicate de lithium. Le processus de
fabrication est identique à celui utilisé pour des matrices verre ; par
contre un traitement thermique supplémentaire ou un refroidissement con-
trôlé permet de développer des germes de cristallisation et de céramiser la
matrice. La justification de l'engouement observé pour ce type de matériau
réside dans son mode de fabrication : simple et rapide, celui-ci se rap-
proche du mode de fabrication des composites à résine thermoplastique (avec
toutefois une température d'élaboration plus élevée). Par contre, les tem-
pératures d'utilisation restent inférieures à celles des composites à
matrice céramique (CVI).

b. Procédé CVI

Une des méthodes qui fournit aujourd'hui les meilleurs résultats pour
obtenir des composites céramiques industriels les plus performants thermo-
mécaniquement (à matrice "non verre") est l'infiltration chimique en phase
vapeur (CVI). Cette méthode consiste en une activation thermique de réac-
tions chimiques d'espèces gazeuses de nature différente (en présence de
catalyseur).

Certains points caractéristiques peuvent être dégagés et parmi les


plus saillants on peut citer :
La Matrice 53

- l'homogénéité de l'infiltration au sein d'un substrat fibreux pour


un système de précurseurs donné qui dépend largement de la pression
et de la température auxquelles s'effectue l'infiltration,
- la taille de la porosité résiduelle (15 à 20%) qui évolue entre le
coeur et la surface des pièces pour les plus épaisses (ABBE et al.,
1987),
- les vitesses de diffusion dans les préformes, les conditions réac-
tionnelles, les stoechiométries et les microstructures des composés
formés qui dépendent du choix des précurseurs.

Cette méthode a été essentiellement développée industriellement pour


les composites carbone-carbone. C'est l'équipe de NASLAIN à l'Université de
Bordeaux qui a développé le procédé d'infiltration de matrices céramiques
par des phases carbures, oxydes et nitrures, dès les années 1980 (CHRISTIN,
1979 ; CHRISTIN et al., 1979 ; NASLAIN et al., 1981 ; NASLAIN, 1985), qui a
été ensuite transféré en milieu industriel d'abord dans le cas des C-SiC et
SiC-SiC. Les compositions, les cycles de températures, les pressions par-
tielles, .. . font évidement partie du secret industriel. Néanmoins on peut
dire que la pression à l'intérieur du réacteur doit être faible de manière
à augmenter le libre parcours moyen des molécules.

Contrairement aux conditions de dépôt chimique en phase vapeur (DCPV


ou CVD), les conditions pour avoir une infiltration à coeur des préformes
(procédé CVI) nécessitent une réaction chimique à basse température et
pression, pour éviter de boucher trop rapidement les pores en surface, ce
qui conduirait à un composite de très forte teneur en porosité.

A ce jour, les caractéristiques mécaniques et de fluage de la matrice


CVI sont inconnues. De façon à avoir un point de repère pour le comporte-
ment en fluage des SiC-SiC 2D, nous allons rappeler brièvement les caracté-
ristiques de fluage des différents types de matériaux SiC monolithiques,
qu'ils soient obtenus par frittage sous charge (SiC-HP), par frittage natu-
rel (SiC-FN), par frittage réaction (SiC-RB) ou par dépôt chimique en phase
vapeur (SiC-DCPV).

Il faudra toujours garder en mémoire le fait que le processus de


fabrication de la matrice peut engendrer un certain nombre d'espèces
chimiques:
54 Chapitre II

Si ; Si + SiC ; SiC ; SiC + C ; C


selon le rapport du gaz porteur et du mélange de réactifs (CHRISTIN, 1979)

2. Etude bibliographique du fluage de SiC

Dans le tableau II. 7 nous avons tenté de rassembler les différents


résultats d'étude de fluage publiés pour différentes nuances de carbure de
silicium. En fait, il apparaît difficile de comparer le comportement en
fluage des céramiques à base de carbure de silicium du fait que les teneurs
en ajouts de frittage ou en impuretés, ainsi que les procédés d'élaboration
ne sont pas les mêmes d'une part, et que les conditions de mesure des
caractéristiques du matériau ne sont pas toujours identiques d'autre part.

(T n
•c HPa kJ/mole

FARNSWORTH & COBLE (1965) HP 1900-2000 1 305


FRANCIS & COBLE (1968) HP 1900-2100 57-143 1 305
MARSHALL & JONES (1969) RB 1000-1200 207-496 1-2 230
KRISCHNAMACHARI & NOTIS (1977) RB 1300-1400 34-86 0.9 145
SCHNÜRER & al. (1980) HP 1000-1300 100-190 1-2 -

GRATHWOHL & al. (1981) RB 1400-1700 100-190 800


RB 1400-1700 100-190 450
HP 1400-1700 100-190 380
DJEMEL & al. (1984) HP 1300-1500 500-1700 290
HP 1300-1500 500-1700 200
FN 1300-1500 500-1700 160
CARRY & MOCELLIN (1983) HP 1900-1950 45-55 630
HP 1800-1900 50-100 670
CARTER & al. (1984a) RB 1500-1700 110-220 5.7 710
CARTER & al. (1984b) CVD 1600-1800 110-220 2-4 175
MOUSSA & al. (1984) HP 1400-1760 80-600 440
HP 1400-1760 80-600 1-2 145-420
WIEDERHORN & al. (1988) RB 1300-1430 60-300 4-11 560
LANE & al. (1988) FN 1400-1800 140-415 1.4-1.7 400-850

Tableau II.7 : Résultats de fluage de différentes nuances de SiC selon dif-


férents auteurs. T : domaines de températures d'essais ; c : con-
trainte appliquée ; n : exposant de la contrainte ; Q : énergie
d'activation apparente.
La Matrice 55

Deux types de matériaux existent, ceux avec des ajouts conduisant à la pré-
sence d'une phase secondaire aux joints grains et aux points triples
(ajouts d'Al, Al 0 , MgO, Y O , .. . ) et ceux ne conduisant pas à une telle
2 3 2 3
phase secondaire (cas des ajouts de B, B C, ... ). Toutefois à partir de ces
4
différentes études il se dégage les remarques suivantes :

- les ajouts conduisent à des vitesses de déformation plus élevées si


leur pourcentage est plus important, car ils sont à l'origine de la
création de phases vitreuses aux joints de grains et par conséquent
sont néfastes pour les propriétés de fluage,
- en revanche, les matériaux avec seconde phase vitreuse résisteront
d'autant mieux en milieu oxydant que cette phase secondaire sera
présente sous la forme amorphe ; une dégradation par oxydation et
diffusion préférentielle le long des joints de grains est alors
observée,
- dans le cas où le domaine de températures d'essai est large, deux
comportements peuvent apparaître avec une température de transition
d'autant plus élevée que la teneur en ajout sera faible.

D'une façon générale, dans le cas des matériaux avec une seconde phase ini-
tialement amorphe, la déformation en fluage sera contrôlée par le volume et
la viscosité de cette phase. On observe alors un glissement aux joints de
grains et une cavitation à des températures très inférieures à celles cor-
respondant aux matériaux sans phase secondaire.

Par contre, les matériaux avec ajouts de bore et sans phase vitreuse,
voient leur résistance en fluage contrôlée par des mécanismes de diffusion
(le plus souvent le long des joints de grains).

Analysons pour chaque type de matériau les résultats bibliographiques:

a. SiC-HP

Le matériau SiC-HP est généralement obtenu par densification et pres-


sage à chaud d'une poudre ultrafine de SiC avec des ajouts d'aluminium, de
fer ou de bore. Le facteur d'intensité de contrainte d'un matériau SiC avec
ajout de bore est généralement invariant en fonction de la température et
de l'environnement jusqu'à 1400° C, s'il est de très bonne qualité. Les
56 Chapitre II

vitesses de fluage observées sont généralement très faibles


10 _1
(ê = 5 , 5 10~
10' s pour <r = 77 MPa à T = 1370° C), la déformation totale ne
s
dépassant pas 0,1%

A ce propos, GRATHWOHL et al. (1981) ont étudié deux nuances de SiC-HP


correspondant à deux pourcentages d'ajout d'aluminium (0,25% et 0,7%). Les
essais mécaniques ont été réalisés sous air et sous vide en flexion 4
points. L'exposant de la contrainte mesuré sous vide pour ces deux nuances
vaut 1. Les valeurs d'énergies d'activation mesurées (Q = 385 kJ/mole et
Q = 6 0 kJ/mole) ont conduit ces auteurs à proposer un mécanisme de type
COBLE, pour lequel l'espèce diffusante aux joints de grains serait le car-
bone. En revanche, sous air, l'exposant des contraintes augmente avec la
température (n=2,3). Ce phénomène est interprété comme une transition d'un
fluage contrôlé par la diffusion vers un fluage contrôlé par glissement aux
joints de grains accommodé par cavitation. Ce comportement est expliqué par
la forte teneur en aluminium et la formation d'une phase silicatée aux
joints de grains.

Une transition similaire a été observée (DJEMEL, 1980 ; DJEMEL et al.,


1984) lors d'essais en compression sous argon. Ces auteurs observent le
passage d'un fluage de type COBLE à faible contrainte à un fluage par cavi-
tation et microfissuration dans les joints de grains parallèles à la direc-
tion de la contrainte appliquée.

L'influence d'ajouts d'aluminium a été particulièrement étudiée par


MOUSSA (1985). Deux nuances (SiC-HP) ont été testées : 0,3% et 1,5%, sous
vide, dans le domaine de températures 1300° C-1760° C. Il est généralement
admis que les ajouts de frittage conduisent à la formation de phases amor-
phes aux joints de grains : on a alors modification à la fois de l'exposant
des contraintes et de l'énergie d'activation. Un phénomène de ce type a
bien été observé par MOUSSA (1985). L'exposant des contraintes et l'éner-
gie d'activation restent constants (n=l,4 ; Q = 440kJ/mole) dans tout le
domaine de températures pour la nuance à 0,3%. Par contre, dans le cas de
la nuance à 1,5%, la valeur de l'exposant des contraintes décroît de 1,6 à
1 lorsque la température varie de 1400° C à 1700° C. Un comportement identi-
que est observé pour l'énergie d'activation : Q = 125 kJ/mole à T = 1400° C
et Q = 460 kJ/mole à T = 1700° C. A ce sujet si l'on analyse les valeurs de
ces énergies apparentes d'activation, les valeurs mesurées sont voisines de
La Matrice 57

celles obtenues par TAJIMA et KINGERY (1982a, 1982b), 460 kJ/mole et 125-
145 kJ/mole, respectivement pour la diffusion de l'aluminium dans SiC et
pour la ségrégation d'aluminium aux joints de grains.

Dans chaque cas, une transition est observée et des valeurs particu-
lières de n et Q sont mesurées. Dans la dernière étude mentionnée (MOUSSA
et al., 1984) la diminution de l'exposant des contraintes en fonction de la
température est expliquée par un changement de mécanisme dans le processus
de cavitation. A haute température les cavités ont une origine visqueuse
(viscocité de la phase secondaire), tandis qu'à plus basse température, une
augmentation de compliance est observée par formation de microfissures
(fluage élastique).

CARRY et MOCELLIN (1983) ont étudié un SiC-HP contenant un fort taux


d'ajouts d'aluminium (12,5%) à plus hautes températures 1800-2000° C et en
compression (c = 110 MPa), sous vide. Pour cette nuance contenant un fort
taux d'ajout, le matériau possède un comportement de type superplastique.

Parmi toutes les nuances de SiC, le SiC-HP semble la nuance la plus


résistante au fluage.

b. SiC-FN

Les matériaux SiC-FN ont une microstructure homogène et fine avec une
teneur faible en seconde phase ; par contre ils possèdent de moins bonnes
caractéristiques mécaniques. Ceci semble dû à la porosité résiduelle ainsi
qu'aux inclusions.

GRATHWOHL et al. (1981) ont étudié sous vide les propriétés mécaniques
de tels matériaux, pour des températures allant jusqu'à 1700° C. Ces auteurs
observent une meilleure résistance au fluage pour la nuance dopée au bore
par rapport à SiC-FN dopé à l'aluminium. Ils concluent à un fluage de type
NABARRO-HERRING dans le premier cas et à une diffusion aux joints de grains
dans le second cas.

LANE et al. (1988) pour leur part ont effectué une étude en microsco-
pie électronique à transmission de nuances de SiC-FN déformées en compres-
sion à haute température. La vitesse de fluage à 1400° C observée pour une
58 Chapitre II

contrainte de 414 MPa était de 3,7 10 s . L'exposant des contraintes


variait entre 1,4 et 1,7 selon la température. La déformation en fluage a
été expliquée par un glissement aux joints de grains à basses températures
(340<Q<430 kJ/mole) accommodé par une diffusion aux joints de grains, tan-
dis que pour les plus hautes températures le glissement est accommodé par
une diffusion en volume (T>1920° C ; 882<Q<914 kJ/mole). Un mécanisme paral-
lèle a été mis en évidence : glissement et montée de dislocations, con-
trôlés par la montée, ainsi que glissement de dislocations contrôlé par des
contraintes de PEIERLS. A ce sujet, un travail intéressant (LEE et al.,
1989) vient de montrer que ce type de mécanisme - montée des dislocations à
partir de dislocations partielles de Schockley dans le plan basai - semble
être présent dans les matériaux déformés par MOUSSA (1985).

c. SiC-RB

Les matériaux de type SiC-RB contiennent un fort pourcentage de sili-


cium libre. Ceci vient du fait qu'ils sont obtenus par infiltration d'une
structure poreuse de SiC par du silicium, soit en phase vapeur soit en
phase liquide. Dans la structure finale il reste généralement 10 à 20% de
silicium qui n'a pas réagi. Ce type de matériau est donc un composite en
soi. Les vitesses de fluage sont plus grandes ici que pour les nuances
précédentes

MARSHALL et JONES (1969) ont été parmi les premiers à étudier les pro-
priétés de fluage de ce matériau entre 1000 et 2200° C. Un fluage primaire
relativement très long a été observé pour des contraintes variant entre 200
et 415 MPa. La mesure d'une énergie d'activation de 230 kJ/mole et d'un
exposant des contraintes entre 1 et 2 n'a pas permis à ces auteurs de con-
clure sur le mécanisme responsable de la déformation. En revanche,
KRISHNAMACHARI et NOTIS (1977) ont décrit la déformation en fluage (flexion
4 points) de SiC KT (nuance RBSC de Carborundum, USA) comme étant due à un
mécanisme de type COBLE dont l'espèce diffusante serait le silicium. Une
énergie d'activation de 145 kJ/mole est mesurée dans un domaine de tempéra-
tures de 1300 à 1400° C et de contraintes de 34 à 86 MPa. Une carte de
déformation a ainsi été établie (Fig. II.5). Par ailleurs SCHNÜRER et al.
La Matrice 59

0.750 0.875 1.0


T/ °-y
Fig. II.5 : Carte de déformation d'une nuance de carbure de silicium obtenu
par frittage réaction. La zone hachurée correspond aux résultats expé-
rimentaux obtenus par KRISHNAMACHARI et NOTIS (1977).

(1980) ont réalisé des essais de fluage en flexion sur SiC-RB aux tempéra
tures 1000 et 1400° C, sous vide et sous air, avec des contraintes dans
l'intervalle - 97, 190 - MPa. L'augmentation de l'exposant des contraintes
a été attribuée à une phase silicium aux joints de grains. Toutefois les
analyses effectuées lors d'observations en microscopie électronique à
transmission (CARTER et al. , 1984a) ont révélé aucune seconde phase aux
joints de grains.

De plus il semble que, en supposant que les joints de grains contien-


nent du silicium, les propriétés de fluage seraient moins bonnes que celles
mesurées pour des températures supérieures à la température de fusion du
silicium. Il apparaît donc probable que pour les températures d'essais
inférieures à 1400° C, la déformation serait essentiellement due à une
croissance sous critique d'un endommagement (microfissures ou cavités). Ce
phénomène a été également rencontré dans le cas du SiC-RB KX 01 (nuance de
Sohio, USA) (CHUANG et WIEDERHORN, 1988). Une étude intéressante (COHRT et
al., 1984a) fait état d'une augmentation de la résistance mécanique du
matériau après essais. Celle-ci est expliquée par des phénomènes de relaxa-
tion des contraintes au cours d'essais de flexion. Cette redistribution des
contraintes génère une contrainte résiduelle de compression dans l'échan-
tillon. La dépendance en temps de la distribution des contraintes doit
alors être prise en compte.
60 Chapitre II

d. SiC-DCPV

Devant l'impossibilité d'obtenir des données concernant la matrice


SiC-CVI, seuls les travaux de CARTER et al. (1984b) sur le carbure de sili-
cium CVD permettent, dans une certaine mesure, de donner une comparaison
plus fidèle que celle menée avec SiC-HP. A titre d'illustration nous avons
reproduit sur la figure II. 6 les résultats de fluage, en compression,
obtenus par CARTER et al. (1984a et b) pour 3 types de SiC, testés dans des
conditions similaires.

Une orientation préférentielle est observée dans ce type de matériau


suivant la direction du dépôt : le plan basal (111) étant perpendiculaire à
celle-ci. De plus un mélange SiC-a, SiC-0 est souvent observé (cela semble
le cas pour la matrice CVI). La déformation en fluage, observée par CARTER
et al., apparaît préférentiellement pour des plans orientés à 45° de la

1E-7 - CARTER-1984 1903K 1E-6 - LANE-1988 2020K

I
M

1E-7 -
1848K
1E-8

1923K
1E-8
1873K
1E-9

•SiC-RB
1E-9
SiC-DCPV SiC-FN

70 100 200 50 100 200 500


a (MPa) a (MPa)
Fig. II. 6 : Comparaison des résultats de fluage en compression de diffé-
rentes nuances de SiC, d'après CARTER et al. (1984a et b) et LANE et
al. (1988). FN : nuance SiC-a, obtenue par frittage naturel ; RB :
nuance SiC obtenue par frittage-réaction ; DCPV : nuance SiC obtenue
par dépôt chimique en phase vapeur.
La Matrice 61

direction de la contrainte appliquée. L'énergie d'activation mesurée, 175


kJ/mole, est plus faible que celle de 1'autodiffusion en volume ou dans les
joints de grains du silicium dans SiC-a. Ces auteurs observent une dépen-
dance en température de l'exposant des contraintes (n=2,3 à 1600° C ; n=3,7
à 1750° C) qui semble indiquer que le mécanisme de fluage est soit un mouve-
ment de dislocations soit un glissement des joints de grains. Les observa-
i

tions en microscopie électronique en transmission confirment l'occurrence


du premier mécanisme.

CONCLUSION

Il semble donc difficile dans le cas des matériaux covalents du type


SiC, d'identifier et de discriminer les processus responsables de la défor-
mation macroscopique. Cette difficulté provient de l'influence de l'envi-
ronnement et de la dépendance du fluage vis à vis des caractéristiques
microstructurales, comme les impuretés, la structure de la porosité. En
conséquence, des processus dépendant du temps, comme l'oxydation de surface
ou de volume, les transformations de phases, les redistributions ou relaxa-
tions des contraintes doivent être pris en compte. La structure initiale du
matériau n'est donc pas maintenue et l'effet du temps doit être étudié.
62 Chapitre II

III. L'INTERFACE

Pour mieux cerner la nécessité de caractériser les propriétés méca-


niques de l'interface, nous redéfinirons dans un premier temps le rôle de
celle-ci dans les mécanismes de renforcement ou d'endommagement, afin de
mieux comprendre dans un second temps les propriétés recherchées à l'inter-
face fibre/matrice, ainsi que les différents types d'interface possibles.
Nous décrirons ensuite les méthodes disponibles pour caractériser mécani-
quement l'interface et les résultats de la littérature sur le sujet.

1. Rôle de l'interface

Les propriétés finales des matériaux composites dépendent des pro-


priétés intrinsèques des deux éléments constitutifs : fibre et matrice,
mais également du troisième élément qui joue un rôle essentiel : l'inter-
face fibre/matrice. Pour bien mettre en relief l'importance que revêt
l'interface dans les matériaux composites, il faut souligner l'influence
des contraintes précisément à cet endroit, qu'elles soient internes ou
issues de sollicitation mécaniques. En effet, 1'interface est un lieu où
régnent intrinsèquement des contraintes mécaniques, par exemple issues de
la fabrication, si les coefficients de dilatation thermique de la fibre a
et de la matrice a sont différents. De plus, lorsque l'ensemble de la
m
structure composite est soumise à des sollicitations thermomécaniques, les
contraintes sont transmises de la matrice vers la fibre ( mécanisme de
transfert de charge) par l'intermédiaire de l'interface.

Dans les composites à renfort fibreux, le rôle de l'interface fibre/


matrice apparaît comme fondamental dans les mécanismes d'endommagement : il
permet généralement au renfort fibreux de jouer pleinement son rôle dans
l'ensemble des mécanismes dissipateurs d'énergie (KERANS et al., 1989 ;
PREWO, 1989). En effet, une adhésion interfaciale optimale entre la fibre
et la matrice permet d'atteindre la valeur limite d'allongement à la rup-
ture des fibres en développant la déviation des fissures et la multifissu-
ration matricielle. Certes, le rôle du renfort fibreux apparaît plus direc-
tement dans un premier temps comme créateur d'obstacles à la progression
L'interface 63

des fissures : il modifie le trajet des fissures ce qui a pour effet d'aug-
menter l'énergie à dépenser pour obtenir la ruine du matériau (puisque la
surface de rupture créée est plus grande que dans le cas d'un matériau sans
renfort). La figure II.7 présente synthétiquement différents cas de rupture
dans un matériau composite à fibres longues.

Fig. II.7 : Schémas synthétiques de différents cas de rupture dans un com-


posite céramique à fibres longues selon les caractéristiques de
l'adhésion interfaciale (AI) : F : forte ; m : moyenne ; f : faible.

Mais cette première phase de propagation de fissures, où les fibres de


faible angle hors axe « cousent » les microfissures et limitent leur propa-
gation, ne peut se produire que si l'interface apparaît comme un lieu éner-
gétiquement plus favorable à la propagation de fissures qu'à la rupture des
fibres. Le rôle essentiel est alors joué par l'interface dont les pro-
priétés interviennent dans les interactions locales entre les fibres et les
microfissures, constituant une source de dissipation d'énergie. En effet,
la déviation de la fissure par le renfort dépend surtout des caractéris-
tiques de l'interface et de l'angle d'incidence de la fissure vis-à-vis de
chaque fibre rencontrée.

Pendant la phase de croissance de 1'endommagement (WEI et al., 1988 ;


INGHELS, 1987 ; PERES, 1988) , les fibres pontent la macrofissure, glissent
dans la matrice et confèrent une pseudo-ductilité au matériau. C'est au
cours de cette phase de déchaussement et d'extraction des fibres que
l'énergie dissipée est maximale. La qualité de l'interface sollicitée en
cisaillement se révèle être le point crucial. Pour analyser le rôle de
l'interface dans les processus d'endommagement, WEI et al. (1988) ont
64 Chapitre II

effectué des essais de flexion trois points dans la chambre d'observation


d'un microscope électronique à balayage, afin de suivre l'évolution de la
fissuration d'un composite ciment-polymère-verre. Cette méthode d'observa-
tion leur a permis d'une part de mettre en évidence le mécanisme d'amorçage
et de propagation des fissures, et d'autre part de vérifier certains
modèles micromécaniques. Au cours de leurs observations, ces auteurs ont pu
mettre en évidence un paramètre significatif caractérisant la pseudo-
ductilité d'un composite à matrice fragile. Cette approche expérimentale a
permis de valider un modèle micromécanique décrivant le moment où les
fibres seules assurent en grande partie la cohésion du matériau et où un
ensemble de fissures, plus ou moins parallèles, peut se développer dans la
matrice. AVESTON, COOPER et KELLY (ACK, 1971), MARSHALL (1984) et EVANS
(1989) ont montré que cet endommagement, se présentant sous la forme de
microfissures equi-espacées, était directement relié à la répartition des
efforts dans le matériau endommagé, ainsi qu'à des caractéristiques intrin-
sèques du composite telles que la valeur du cisaillement interfacial, T.

Cette dernière grandeur, qui caractérise l'adhésion fibre/matrice,


apparaît comme une donnée importante pour la compréhension des mécanismes
d'endommagement et donc pour la durée de vie du matériau à haute
température.

2. Propriétés interfaciales recherchées

La création d'une interface fibre/matrice doit avant tout préserver


les qualités mécaniques du renfort. Ceci exclut donc toutes réactions chi-
miques entre la fibre et la matrice qui conduiraient soit à la formation
d'une zone de réaction trop épaisse possédant un faible allongement à la
rupture, soit à des effets d'entaille dans la fibre.

* Vadhésion interfaciale ne doit pas être trop forte dans le cas où


le mécanisme de renforcement est dû essentiellement aux fibres perpendicu-
laires au front de fissure. De nombreux auteurs ont amené les preuves théo-
riques et expérimentales de ce principe dans de nombreuses monographies et
articles (KELLY, 1973 ; HULL, 1981 ; CHAWLA, 1987 ; EVANS, 1989). Il res-
sort de ces études que la ténacité et la résistance du matériau dépend de
l'interface fibre/matrice choisie. Une approche simplificatrice peut être
L'interface 65

menée en ne considérant dans un premier temps que deux paramètres fondamen-


taux caractérisant l'interface :

- la résistance initiale de l'interface à la rupture en mode II,


- le coefficient de frottement de la fibre dans la matrice après déco-
hésion de celle-ci.

Ce dernier paramètre est directement dépendant des propriétés physico-


chimiques de l'interface. Sur la base des travaux de KENDALL (1975, 1976),
l'équipe d*EVANS (EVANS et MARSHALL, 1988 ; EVANS, 1989) a établi une rela-
tion reliant l'énergie de rupture de l'interface S* (<2 J/m pour le revê-
tement de carbone) à celle de la fibre S? (4 à 10 J/m pour la fibre
®
Nicalon ) qui, si elle est respectée, assure au composite une bonne
ténacité:
g<- £
i 4 f

En conclusion, une adhésion interfaciale faible est souhaitée si l'on


recherche le déchaussement des fibres (processus qui prend part à l'augmen-
tation de la ténacité du matériau), ainsi qu'une bonne résistance longitu-
dinale.

* L'adhésion interfaciale ne doit pas être trop faible pour obtenir


des propiétés mécaniques hors axes d'orthotropie qui ne sont pas trop fai-
bles. Il est à noter que ces propriétés dépendent fortement de la distribu-
tion spatiale des fibres et en particulier du nombre de contacts entre
fibres (TOWATA et YAMADA, 1986), que nous avons déterminé par analyse
d'images.
En conclusion, une adhésion interfaciale forte est souhaitée si l'on
recherche de bonnes propriétés transverses.

3. Différents types d'interface

L'interface recherchée, afin d'obtenir les propriétés optimales des


composites céramiques à fibres longues, sera généralement obtenu par réali-
sation d'un dépôt sur la fibre (effectué le plus souvent en phase vapeur
(CVD ou CVI) ou selon un procédé sol-gel (CRANMER, 1989)) : ce sera soit du
carbone, soit des carbures, nitrures ou oxydes refractaires, ou même, dans
66 Chapitre II

certains cas, des dépôts métalliques. L'épaisseur de ces dépôts jouera un


rôle important ; elle pourra varier de quelques couches atomiques à plu-
sieurs centaines de nanometres. On devrait donc plutôt parler d'interphase
que d'interface.

La maîtrise des qualités de l'interface commence donc par la compré-


hension des différents types d'adhésion possibles entre la fibre et la
matrice. Les deux principaux types d'interface, selon le mécanisme prépon-
dérant mis en jeu, sont :

- l'adhésion chimique : ce type d'adhésion peut avoir deux aspects


particuliers, suivant que l'interaction entre fibre et matrice
intervient à l'échelle atomique (mouiHabilité) ou que l'interface
correspond à une zone de ségrégation (diffusion en volume),
- l'adhésion que l'on appellera mécanique : due aux différences de
dilatation entre la matrice et la fibre qui peuvent engendrer des
forces de compression enserrant la fibre (frettage).

La modification des propriétés thermomécaniques de l'interface par trans-


formation physico-chimique peut être réalisée de différentes manières, par
exemple, par ségrégation de carbone in situ (BRENNAN, 1986; COOPER et
CHYUNG, 1987) et formation d'une couche de carbone en surface de la fibre.

Outre son rôle mécanique, 1'interface ou interphase joue un rôle ther-


mochimique important sous sollicitations à hautes températures, puisque des
phénomènes de diffusion et de réactions chimiques risqueront de la modifier
(MANIETTE 1988 ; KYOTOKU et al., 1988 ; RAWLINS et al., 1987).

Après avoir traité l'aspect interfacial dans les composites céra-


miques, tant du point de vue physico-chimique que mécanique, nous allons
décrire succintement les différentes méthodes de caractérisation des pro-
priétés mécaniques de cette interface, puisqu'il va jouer un rôle primor-
dial lors du transfert des contraintes.
L' interface 67

4. Méthodes de caractérisâtion des propriétés mécaniques de l'interface

Pour caractériser les propriétés mécaniques de l'interface deux types


de méthodes sont actuellement à notre disposition : «

• les méthodes indirectes, qui consistent à solliciter le composite


dans son ensemble, les résultats expérimentaux ne pouvant alors être
décrits qu'à partir d'un modèle micromécanique du comportement
interfacial posé a priori : mesure de la résistance au cisaillement
à partir des distances entre microfissures, mesure de la contrainte
de cisaillement par flexion ou mesure de l'adhésion interfaciale par
méthode laser,
• les méthodes directes, qui consistent à solliciter la fibre dans le
composite, les résultats expérimentaux pouvant alors être confrontés
avec différents modèles rhéologiques décrivant l'interface : mesure
des caractéristiques de traction d'une fibre enrobée et indentation.

a. Méthodes indirectes :

* La résistance au_cisaillement de 1'interface est déterminée à partir de


la mesure des distances séparant les microfissures dans la matrice. Cette
méthode est basée sur le modèle développé par AVESTON, COOPER et KELLY,
(1971). Dans un composite unidirectionnel, la matrice se microfissure à
partir d'une valeur de la contrainte <r et les espacements entre fissures
obtenus sont compris dans l'intervalle [x,2x]. La valeur x peut être reliée
à la fraction volumique des fibres V (f) et de la matrice V (m), ainsi
qu'au rayon des fibres, r, et à la valeur du cisaillement interfacial, T .

(r r V (m)
m v
x = 2 x V (f )
1 v

* L'essai de flexion trois points sur éprouvettes de petites dimensions


permet de déterminer une contrainte_de cisaillement à partir de laquelle x
peut être estimé. Les fibres sont alignées parallèlement à la longueur de
l'éprouvette. Il faut souligner que ces valeurs dépendent d'une manière
68 Chapitre II

complexe de la fraction volumique (PHILLIPS, 1974, 1983 ; GRANDE et al.,


1988) : elles ne peuvent donc pas donner de vraies valeurs caractérisant
1'interface.

* L'adhésion interfaciale peut également être mesurée par une méthode _de
guises laser qui, sous l'effet de puises bien caractérisés permet à partir
des ondes de compression créées, de "tirer" sur le revêtement avec une
énergie déterminée ; on atteint ainsi une caractérisation de l'adhésion
(GUPTA et al., 1989).

b. Méthodes directes :

* L'essai de_traction sur une fibre isolée enrobée en partie dans une
matrice (GRESZCZUK, 1969) ("Fiber pull-out test"), est théoriquement
l'essai le plus approprié, mais il est en pratique difficilement réalisable
dans le cas des matériaux composites céramiques.

* LeE méthodes_basées sur l'essai de microindentation : à partir de la


méthode développée par MARSHALL (1984), fondée sur l'utilisation d'un
indenteur Vickers en diamant pour appuyer sur une fibre enrobée dans une
matrice, se sont développées des méthodes dites d'indentation :

- compression d'une fibre dans un composite de faible épaisseur,


- nanoindentation instrumentée,
- microindentation instrumentée ou non, couplée ou non à de l'émission
acoustique (ROUBY et OSMANI, 1988).

Cette dernière méthode a été choisie pour notre étude des propriétés méca-
niques de l'interface et fera l'objet d'une description plus détaillée
dans la dernière partie de ce chapitre.

Récapitulons, dans un premier temps, les différents résultats de la


littérature sur ce sujet.
L'interface 69

5. Etude bibliographique du comportement mécanique de l'interface

Dans les paragraphes précédents, nous avons tenté de cerner le rôle de


l'interface sur les propriétés mécaniques des composites. Après avoir
décrit les différentes méthodes disponibles pour caractériser mécaniquement
l'interface, nous analyserons la littérature selon deux volets : en premier
lieu, nous présenterons les travaux expérimentaux effectués sur ce sujet,
en portant l'accent sur le désaccord dilatométrique fibre/matrice, puis sur
la nature et l'épaisseur du revêtement de la fibre ; en second lieu, les
études au caractère plus théorique nous apporterons un point de vue cri-
tique des valeurs expérimentales obtenues.

a <a
f m

Auteurs matrice a AT T
m 6 i
x 10" K MPa
COYLE, 1986 Al 0 8.7 1235 50
2 3
MANDELL, 1987 Corning 1723 5.2 600 236
ROUBY, 1988 SiC CVI 4.6 1000 55
LOWDEN, 1988 SIC CVI + ClOOnm 4.6 1200 11
GRANDE, 1988 CAS I 5.0 1230 250

a <a
m f

Auteurs matrice a AT T
i
m
x 10"6 K MPa
MARSHALL, 1987 LAS III 1.5 1250 1-55
LHU, 1987 LAS 1.5 1200 2
ROUBY, 1988 SiO 3.2 1000 10
2
GRANDE, 1988 BMAS III 2.7 1130 60
GRANDE, 1988 LAS III 1.5 1030 56
PERES, 1988 LAS + C 1.5 1100 20
PERES, 1988 73201 Corning +C 3.2 950 15
WEIHS, 1988 LAS III 1.5 1250 3.5

Tableaux II. 8 : Valeurs du cisaillement interfacial, T , pour différents


matériaux de coefficient de dilatation de matrice, a , dans un domaine
m
de température AT, selon différents auteurs. Dans chaque cas, af
®
représente le coefficient de dilatation de la fibre Nicalon .
70 Chapitre II

Sur les tableaux II. 8 sont présentés les résultats de mesures de la


résistance en cisaillement T de l'interface, obtenus par différents
auteurs, pour des matériaux composites céramiques ayant le même renfort
©
fibreux (fibre Nicalon ). Une distinction est établie entre les résultats
obtenus pour des composites pour lesquels il existe un effet de désaccord
®
dilatométrique
M entre la fibre a et la matrice a . Pour la fibre Nicalon ,
f m
a = 3,2 10 K. L'ensemble des matériaux et des résultats présente une telle
diversité qu'il n'est pas possible de proposer un mécanisme unique basé sur
le désaccord dilatométrique Aa.

Toutefois, GOETTLER et FABER (1988) ont étudié particulièrement cet


effet, en faisant varier le coefficient a grâce à un changement de compo-
sa
sition de la matrice. La méthode de test consistait en un essai de traction
sur une fibre enrobée en partie de matrice. Leurs résultats montrent clai-
rement que l'analyse basée sur le paramètre AaAT permet de caractériser un
optimum. Le choix de la matrice et du renfort induit donc une qualité
d'interface particulière.

En revanche, si les différents composites réunis dans ces tableaux


semblent similaires par leur mode d'élaboration, il apparaît une dispersion
relativement grande des résultats. Ainsi, PERES (1988) obtient une valeur
de cisaillement interfacial x de 20 MPa environ, alors que pour des maté-
riaux voisins MARSHALL et OLIVER (1987) ont mesuré des valeurs de x com-
prises entre 1 et 55 MPa. Pour leur part, WEIHS et al. (1988) ont obtenu un
x voisin de 3,5 MPa pour le même type de composite. De plus, aucun de ces
auteurs n'indique de façon précise la manière dont l'interface a été réali-
sée. Néanmoins, MARSHALL et OLIVER (1987) ainsi que THOULESS et al. (1989)
notent l'existence d'une modification interfaciale en fonction de la tempé-
rature qui peut être notable. Le tableau II. 9 rassemble les valeurs du
cisaillement interfacial mesurées par ces derniers auteurs sur des maté-
riaux ayant subi différentes durées de recuit sous air à 800° C.

Ces résultats sont en accord avec les mesures effectuées par LUH et
EVANS (1987) sur le même composite, qui donnent une valeur initiale de
2 MPa et une valeur de 40 MPa après recuit de une heure sous air à 1000° C.
La plupart des auteurs ont proposé un mécanisme de modification chimique de
l'interface par oxydation: le revêtement de carbone initial serait remplacé
L'interface 71

t T
i
h MPa

0 2
4 30
8 30
16 200

Tableau II.9 Evolution de la valeur du cisaillement interfacial, T , en


i
fonction de différents temps de recuit sous air, pour un composite
Nicalon -LAS, d'après THOULESS et al. (1989).

par une couche de silice (PREWO et BRENNAN, 1982 ; COPPER et CHYUNG, 1987).
La nature et la tenue en température du revêtement des fibres apparaît donc
comme crucial (RAWLINS et al., 1987).

L'incidence de la nature de 1'interface sur les propriétés composites


a été particulièrement étudiée par LOWDEN et al. (1988). Le tableau 11.10
présente les valeurs de T obtenues par ces auteurs pour des types de revê-
tements différents, ainsi que les différents types de rupture obtenus dans
®
le cas d'un composite Nicalon -Sic (CVI).

revêtement épaisseur T comportement


i
flm MPa MPa

silicium 0.17 88 118 fragile


carbone 0.17 420 4.3 pull-out
néant 82 49 fragile

Tableau 11.10 Valeurs du cisaillement interfacial, x , en fonction de la


nature _et de l'épaisseur du revêtement, pour des composites
Nicalon -SiC. Sont indiqués également les valeurs de la contrainte à
la rupture, <r, et le type de comportement. D'après LOWDEN et al. (1988).

L'influence des différents revêtements des fibres sur les propriétés


mécaniques des composites a, par exemple, été traitée par HONJO et SHINDO
(1986) dans le cas de composites à fibres de carbone.
72 Chapitre II

Les résultats présentés dans le tableau 11.11 semblent conforter ceux


R
obtenus par PERES (1988) sur u n système N i c a l o n - L A S (élaboré à l'ONERA)
pour lequel le dépôt de carbone en surface de la fibre semble donner les
meilleurs performances pour ce type de composite.

revêtement épaisseur T
i
Jim MPa
carbone 0.06 20
nibium 0.2 20
silicium 0.5 30
néant — 15

Tableau 11.11 : Valeurs d u cisaillement


interfacial, T , en fonction des
i
®
types et épaisseurs de revêtement pour des composites Nicalon -LAS,
d'après PERES (1988).

A ce propos, LOWDEN et STINT0N (1988) ont étudié expérimentalement 1'influ-


is)
ence de l'épaisseur d u dépôt de carbone sur des fibres Nicalon dans une
matrice SiC (CVI). Les résultats obtenus (tableau 11.12) indiquent que les
meilleurs propriétés sont atteintes pour une épaisseur optimale de carbone,
de 0,17 /im environ. Phénoménologiquement, il apparaît donc u n optimum pour
l'épaisseur d'interphase et ceci quel que soit le système fibre/matrice
choisi, l'élément d'interphase étant d'une importance primordiale.

épaisseur <r T
1
Jim MPa MPa
0.03 110 25
0.07 260 11
0.17 420 4.3
0.28 390 0.6

Tableau 11.12 : Valeurs d u cisaillement interfacial,


T , en fonction de
i
®
l'épaisseur d'un dépôt de carbone pour des composites Nicalon -SiC
(CVI), de valeurs de contrainte à la rupture <r, d'après LOWDEN et
STINT0N (1988).
L'interface 73

Parallèlement, des études à caractère plus théorique ont été menées


tant du point de vue de la méthodologie expérimentale qu'au niveau de
l'échelle micromécanique du composite. Ces travaux théoriques mettent en
évidence une répartition complexe des contraintes lors de l'essai de micro-
indentation du composite. Un accord général se dégage sur l'ensemble des
études pour établir une distinction entre les valeurs :

- du cisaillement interfacial de déchaussement, T ,


d
- du cisaillement interfacial de glissement, T , qui dépend des coef-
ficients de friction statique et dynamique.

En outre* la valeur de T , déterminée par la méthode de MARSHALL,


apparaît dépendre de nombreux facteurs et notamment de la longueur de fibre
testée. A ce propos, GRANDE et al. (1988) ont montré, par une analyse uti-
lisant les éléments finis, que la valeur de T passe par un maximum à une
distance z = 0,8 R de la surface, R étant le rayon de la fibre.

Les conclusions de ces différentes études indiquent clairement que la


sollicitation par micro-indentation est complexe. Notamment, la technique
de micro-indentation non instrumentée ne permet pas de donner des valeurs
précises de T , puisque l'hypothèse de glissement à cisaillement constant
ne peut être totalement validée. La méthode de MARSHALL demeure néanmoins
un moyen simple de tester in situ l'interface fibre/matrice et de comparer
les échantillons de manière semi-quantitative.
74 Chapitre II
IV. LE COMPOSITE SiC-SiC 2D

Le but de cette dernière partie de chapitre est de rassembler et de


présenter les différents résultats expérimentaux relatifs aux constituants
du composite SiC-SiC 2D, qui fait l'objet de cette étude de comportement en
fluage. Nous allons présenter tout d'abord les principales caractéristiques
morphologiques du matériau, à l'échelle de la microscopie optique, puis les
caractéristiques microstructurales et leurs évolutions en fonction de la
température à l'échelle de la microscopie électronique ; enfin dans un
dernier paragraphe nous présenterons les résultats expérimentaux de
caractérisation mécanique de l'interface et de l'évolution du cisaillement
interfacial en fonction de la température.

1. Elaboration

Les matériaux qui font l'objet de notre étude sont de provenance


industrielle (SEP, Etablissement de Bordeaux) et appartiennent à la gamme ^
des matériaux composites thermostructuraux (CERASEP, NOVOLTEX, . . . ) .
Ceux-ci sont obtenus par infiltration en phase vapeur d'une préforme
constituée de strates (tissus de fibres Nicalon NLM 202). Les principales
étapes de fabrication peuvent se résumer ainsi (CAVALIER et al. , 1989) :

®
- découpe de strates de tissus en fibres Nicalon NLM 202,
- empilage de ces strates, •",
- mise en place de ces strates dans un outillage spécialement conçu
pour subir l'infiltration en phase vapeur et permettant le contrôle *•*
du taux de fibres désiré (environ 40%),
- consolidation de l'empilage des strates par un premier dépôt de
matrice SiC par CVI,
- démontage de l'outillage et poursuite de la densification par répé-
tition de cycles d'infiltration CVI jusqu'à obtention de la densité
souhaitée, en général 2,5 pour le SiC-SiC 2D.

Sur la figure II.8 nous présentons, à deux grossissements différents,


deux micrographies du matériau SiC-SiC 2D. m*
/"•"Hl

Le composite SiC-SiC 2D 75

500nm lOOjim
Fig. II.8 : Micrographies optiques de SiC-SiC 2D.

2. Caractérisation morphologique

Le comportement mécanique des matériaux, en particulier des com-


posites, est étroitement lié aux caractéristiques morphologiques. Nous
avons donc été amenés à mettre en oeuvre les techniques d'analyse d'images
pour caractériser notre matériau. L'applicabilité de ces techniques aux
composites a déjà été décrite (ABBÉ et al., 1990). Le problème majeur étant
la détection correcte de la microstructure, il apparaît nécessaire de bien
connaître les artefacts de préparation qui sont particuliers à ces maté-
riaux composites. A ce propos, nous avons été amenés à transposer partiel-
lement et à adapter la méthodologie de préparation métallographique des C-
SiC (GOMINA, 1987) aux matériaux SiC-SiC.

Sur la figure II.8 nous pouvons distinguer arbitrairement deux


échelles :

- celle du toron, où les fibres sont enrobées de matrice et où l'on


observe une porosité de petite taille dans les zones de matrice
entre fibres ; à cette échelle le toron est assimilable à un micro-
composite unidirectionnel,
- celle de l'ensemble des torons, où les ondulations du tissu et l'em-
pilement des strates sont bien évidents : on observe une macro-
porosité essentiellement intertorons.

Les micrographies de cette figure révèlent en fait différentes phases que


l'on va caractériser par les méthodes d'analyse automatique d'images :
76 Chapitre II

- les fibres : leur distribution de taille, leur nombre moyen de con-


tacts et la distribution radiale,
- les pores : interfibres et intertorons,
- la matrice.

Pour réaliser cette étude morphologique, nous avons utilisé un analyseur de


texture LEITZ TAS et un analyseur automatique NACHET NS 1500. On trouvera
dans 1'ANNEXE I, les opérations de base que nous avons été amenés à mettre
en oeuvre pour mener à bien cette caracterisation morphologique.

a. Résultats relatifs à la fibre

En ce qui concerne la caracterisation morphologique des fibres, deux


types de mesure ont été effectués, puisque l'ensemble des fibres ne repré-
sente pas une phase interconnectée (en réalité il existe des contacts entre
fibres, mais il est plus intéressant de réaliser une individualisation de
celles-ci). Dans un premier temps nous avons mesuré la distribution en
taille des fibres à partir de la mesure du diamètre équivalent, et dans un
second temps nous nous sommes intéressés à caractériser l'ensemble des
fibres, i.e. leur arrangement, en accédant au nombre de contacts et à la
distribution radiale.

La figure II.9a présente le résultat de l'analyse individuelle granu-


®
lomètrique des fibres de SiC Nicalon NLM 202 (diamètre équivalent des
fibres) qui est donné en densité granulométrique. Un diamètre moyen de
14,4 /im est mesuré. Il apparaît une distribution en taille plus large et
moins régulière que celle des fibres de carbone (Fig. II.9b) (ABBÉ et al.,
1990). Du fait des écarts rencontrés entre les courbes de densité granulo-
métrique des différents échantillons, nous avons représenté, en fait, la
courbe moyenne et aucune corrélation avec une loi logarithmique normale n'a
été testée. Cette distribution nous permettra de discuter de l'échantillon-
nage des fibres testées lors de la caracterisation mécanique de
; •••••
1'interface.
Le composite SiC-SiC 2D 77

03 .

02 .

01

Fig. II. 9 : Courbes granulométriques de fibres de carbure de silicium (a)


et de carbone (b) dans des composites à matrice carbure de silicium.

Au sujet de l'arrangement des fibres, le nombre moyen de contacts


entre fibres a été déterminé, par analyse individuelle de chaque fibre,
celle-ci étant dilatée puis intersectée avec l'ensemble des fibres du champ
de mesures. La valeur de n trouvée est de 2,7 ; elle semble indépendante
c
du nombre de cycles de densification. En revanche la distribution radiale
des fibres mesurée à partir des érodés ultimes et de dilatations succes-
sives d'un érodé (Fig. 11.10) est un paramètre important dans la création
de la microporosité dans le toron au cours de la densification. Une modéli-
sation de la structure (ABBÉ et CHERMANT, 1988) a mis en évidence le rôle
de ce paramètre et le danger de comparer un tel arrangement de fibres avec
des réseaux hexagonaux ou carrés.

Dans le tableau 11.13 nous avons rassemblé les paramètres morpholo-


giques relatifs aux fibres, mesurés sur des matériaux totalement densifiés
(p=2,4) et avant densification finale (p=2,2). Il apparaît, de plus
intéressant de comparer la fraction volumique de fibres (V (f) ~ 0,4) avec
le taux de fibres présent dans le toron. La première valeur, V (f) ~ 0,4,
est une spécification du fabricant concernant le matériau. Cette grandeur
est généralement déterminée par pesée. La fraction de surface de fibres
A (f) dans le toron a été déterminée sur une section transverse à l'axe des
À
fibres.
78 Chapitre II

t
R
f
z II
II

150 • h
M
Li
ft
100
*m

50

h
20 40 60

Fig. 11.10 Distribution radiale, N (P,r), des fibres pour un matériau


SiC-SiC 2D (R) et pour une structure simulée (M), r est le paramètre
distance au point P.

Nous avons obtenu une valeur moyenne de 62%. Puisqu'il existe une périodi-
cité selon l'axe des fibres, cette mesure permet donc de définir un taux
effectif de fibres dans le toron en gardant à l'esprit que chaque toron
agit comme un microcomposite. Nous verrons notamment dans le chapitre con-
cernant l'interprétation des résultats que les contraintes conduisant à un
fluage rupture rapide sont directement corrélées à la résistance de la
fibre par le taux effectif de fibres.

P V f) * <r(A ( f ) )
A
D (f)
m
jim
<r(D) N (f)
c

2.2 63 0.06 14.5 1.77 2.68


2.4 62 0.05 14.4 2.10 2.69

Tableau 11.13 Caractéristiques morphologiques des fibres, p : densité du


matériau A (f) fraction surfacique ; (r(A (f))
f)) : éc
écart type; D (f)
A A m
diamètre moyen ; o*(D) écart type ; N (f) nombre moyen de contacts
c
entre fibres.
Le composite SiC-SiC 2D 79
b. Résultats relatifs à la matrice et aux porosités

A chaque cycle d' infiltration CVI correspond une épaisseur de matrice


déposée d'environ 5 /im. Le nombre de cycles nécessaire pour la densifica-
tion correcte du matériau est au minimum de cinq. La matrice est donc cons-
tituée de dépôts successifs d'épaisseurs similaires. Une anisotropic parti-
culière peut être mise en évidence : il apparaît évident que la géométrie
du renfort impose une géométrie particulière à l'ensemble des couches dépo-
sées. A ce propos la morphologie mathématique (SERRA, 1982) est un outil
particulièrement adapté pour la simulation de telles structures (ABBÉ et
CHERMANT, 1989). Chaque fibre peut être assimilée, d'un point de vue géomé-
trique, à une source pour croissance de la matrice (Fig. 11.11) (ANNEXE
II). Le processus engendre une porosité résiduelle qui se situe aux deux
niveaux d'échelle déjà cités. Ce type de simulation de la morphologie de
ces matériaux est utilisé, par exemple pour modéliser les propriétés ther-
miques de ces matériaux (DORVAUX et al., 1985 ; DORVAUX et al., 1989) ou
les processus d'endommagement (OSMONT et al., 1987).

a) b)
*K
Fig. 11.11 : Structure simulée d'un matériau SiC-SiC 2D : a) matériau après
traitement thermique ; b) structure simulée.

La microporosité à 1'intérieur du toron possède une morphologie parti-


culière : on peut lui attribuer une épaisseur moyenne en utilisant le plus
grand élément structurant (COSTER et CHERMANT, 1985) que l'on peut inclure
dans la porosité d (/iP). Cette grandeur évolue en fonction de la densité du
matériau. Pour une densité de 2,4 le paramètre prend la valeur de moyenne
de 5,2 Jim, tandis que pour une densité de 2,2 on obtient une valeur moyenne
80 Chapitre II

de 7,0 Jim. Nous avons retenu ce dernier paramètre car il présente une
variation significative. La teneur surfacique, A (fiP), (i.e. le pourcentage
A
de porosités présent dans une section de toron) caractérise l'ensemble de
la microporosité dans le toron. Pour une densité de 2,4 on obtient une
valeur moyenne de 3,9 %, tandis que pour une densité de 2,2 le paramètre
vaut 4,2 % en moyenne.

A plus grande échelle, seule la teneur en macroporosités, A (MP),


A
(pour une section du matériau observée) semble être le paramètre significa-
tif pour les deux valeurs de la densité nommées précédemment. Toutes les
valeurs de ces différentes analyses sont rassemblées dans le tableau 11.14.

P A (MP)
A %
<r(A (MP)
A V P ) -, d (/iP)
1 /im

2.2 27 0.14 4.2 7.07 5.70


2.4 23 0.16 3.9 5.24 6.32

Tableau 11.14 : Caractéristiques morphologiques des pores, p : densité du


matériau ; A (MP) : fraction surfacique des macropores <r(A (MP))
A
écart type ; A (JIP) : fraction surfacique des micropores d^fiP)
A
épaisseur moyenne de la microporosité ; L (jiP) : libre parcours moyen
entre micropores.

3. Caractérisation microstructurale

L'étude de la microstructure du matériau par microscopie électronique


en transmission possède un double but : d'une part mettre en évidence les
caractéristiques microstructurales des constituants fibres, matrice et
interfaces et d'autre part étudier l'évolution de cette microstructure en
fonction de la température et du temps sous sollicitations mécaniques. Ces
observations nous seront d'une aide précieuse pour interpréter la variation
de la valeur du cisaillement interfacial en fonction de la température,
ainsi que le fluage de la fibre dans le composite.

Les échantillons de composite destinés à être observés en microscopie


électronique en transmission (JEOL 120 CX) ont été préparés de la façon
Le composite SiC-SiC 2D 81

suivante : tronçonnage précautionneux de lamelles (200 um) dans les échan-


tillons déformés ou témoins, suivi d'un amincissement mécanique jusqu'à une
épaisseur d'environ 100 fim ; des disques de 3mm de diamètre sont ensuite
découpés dans ces lamelles, puis amincis par bombardement ionique (ION
TECH., Ltd).

a. Résultats relatifs à la fibre

La diffraction électronique a révélé la présence d'une structure amor-


phe ou nanocristalline, proche de SiC-ß, pour la fibre dans le matériau
brut de fabrication. Après déformation sous vide à 1000CC, la fibre dans le
composite ne semble pas faire l'objet d'une évolution structurale impor-
tante. Sur la figure 11.12 sont présentés les différents clichés de dif-
fraction obtenus sur les fibres après déformation.

w 293K
% i>
12 73K

(m)
vSJ v 'V /

1473K 1673K

Fig. II.12 : Clichés de diffraction électronique de la fibre pour les tem-


pératures de : a) 20° C ; b) 1000° C ; c) 1200° C ; d) 1400° C.
82 Chapitre II

lOOnm
Fig. 11.13 : Image en haute résolution de microcristaux dans la fibre.

En revanche pour les températures d'essais de 1200° C et 1400° C. Une


croissance de grains, que l'on peut attribuer à SiC-ß, est observée sur ces
mêmes clichés (Fig. II.12c et d). La figure 11.13 présente à ce propos une
image haute résolution (JEOL 200 CX) dans un matériau déformé à 1200° C ;
les franges de réseau SiC-ß sont visibles dans ces domaines de SiC. Ces
derniers apparaissent comme étant plongés dans un continuum non identifié
de façon précise, mais qui semble être du carbone. Aucune orientation pré-
férentielle de ces domaines n'est observée. Par rapport à un échantillon
témoin, pour cette même température l'effet de la contrainte sur cette
recristallisation reste à préciser.

b. Résultats relatifs à 1*interphase et à la matrice

Sur la figure 11.14 sont présentés le cliché de diffraction et l'image


de 1'interphase fibre/matrice pour un échantillon déformé à 1000° C.

La nature de cette interphase peut être identifiée comme étant du car-


bone ; le renforcement de l'anneau de diffraction correspondant au carbone
permet de définir l'orientation des plans de carbone suivant des directions
parallèles à la surface de la fibre. Celui-ci correspondrait au carbone
laminaire lisse, mis en évidence par MANIETTE (1988) sur des composites
similaires.
Le composite SiC-SiC 2D 83

Fibre

Interphase

Matrice

Fig. 11.14 : Micrographie électronique en transmission de 1'interphase


fibre/matrice et cliché de diffraction correspondant.

Nos observations sont en accord avec celles de MANIETTE (1988) pour le


matériau brut de fabrication, avec absence de silice à 1*interphase. La
succession des zones observées est la suivante :

- fibre intacte,
- zone de carbone d'épaisseur moyenne de 100 nm,
- zone de petits cristaux de SiC (matrice),
- zone de cristaux colonnaires de grande taille, environ 0,3 jxm sui-
vant la plus grande longueur.

4. Caractérisâtion mécanique de l'interface

Comme nous l'avons vu précédemment, il est important de connaître les


caractéristiques mécaniques des interfaces et leurs évolutions en fonction
de la température. Pour caractériser l'évolution de la valeur du cisaille-
ment interfacial en fonction de la température, nous avons effectué des
essais de microdureté in situ sur des fibres.
84 Chapitre II

a. Méthode expérimentale

Nous avons utilisé pour ce type d'essai un microduromètre (REICHERT)


dont le principe de fonctionnement est basé sur un système compressif à
raideur constante. Après un étalonnage mécanique et optique, nous avons
testé un échantillon témoin, ainsi qu'une série d'échantillons prélevés
dans des barreaux ayant subi un essai à haute température. Ces derniers ont
été choisis parmi les barreaux pour lesquels la rupture à haute température
était intervenue en moins de dix heures. Des sections transverses de 3mm
d'épaiseur ont été découpées précautionneusement dans les barreaux en com-
posite SiC-SiC à l'aide d'une scie diamantée. Ces échantillons ont ensuite
été préparés selon les techniques métallographiques classiques.

Un mode opératoire particulier a été suivi : afin d'éviter les effets


de « voisinage » entre fibres, nous avons choisi, pour effectuer chaque
2
mesure, une fibre isolée de forme circulaire . La figure 11.15 présente
l'échantillonnage des diamètres de fibres testées par rapport à la distri-
bution mesurée expérimentalement dans le matériau par analyse d'images
(ABBE et CHERMANT, 1990a). L'indentation est réalisée au centre de la

D 0*m)

Fig. 11.15 : Distribution de taille des fibres de SiC : a) pour les essais
d'indentation ; b) dans le matériau massif.

Le comportement asymétrique en flexion à haute température du matériau,


nous a amené à sélectionner comme zone de travail la partie sollicitée en
traction (ABBE & CHERMANT, 1990a).
Le composite SiC-SiC 2D 85

fibre, la pyramide (diamant Vickers) venant en contact avec la matrice


(Fig. 11.16). Il est à noter que WEIHS et al. (1988) ont décrit l'effet
d'instabilité que peut comporter ce type d'essai à force imposée. La mise
en charge est réalisée de façon progressive jusqu'à la valeur choisie,
celle-ci étant maintenue constante pendant un temps de dix secondes.

Nous avons dans un premier temps recherché la valeur seuil de la force


pour laquelle il y avait occurrence de la mise en contact de la matrice par
le poinçon. En effet, pour cette valeur un décollement interfacial
(propagation brutale d'une fissure en mode II) se produit, ainsi qu'un
glissement de la fibre à l'interface. La mesure du cisaillement interfacial
prend dans ce cas toute sa validité pour la méthode de MARSHALL (1984).
Nous avons testé ainsi un peu plus de 100 interfaces fibre/matrice.

Fig. 11.16 : Schéma synoptique de 1'indentation d'une fibre et définition


rt?\ des paramètres mesurables et accessibles.

Dans un premier temps le dépouillement des résultats a été réalisé en


suivant la méthodologie développée par MARSHALL. Dans le cas où la fibre
n'est pas en cohésion au départ avec la matrice, la fibre est progressive-
ment enfoncée dans son logement en frottant à l'interface. Elle subit une
déformation en compression. La signification des différentes variables
introduites est illustrée sur la figure 11.16. Le déplacement de la fibre,
u, est calculé à partir de la mesure des empreintes a et b laissées par le
diamant Vickers sur la fibre et sur la matrice (0 correspond à l'angle du
diamant) :
86 Chapitre II

u = (b - a) cotg 0 (II.1)

La dureté de la fibre, H, permet de connaître à partir de la mesure de la


taille de l'empreinte, a, la valeur de la force, F, exercée sur la fibre :

F = 2 a2 H (II.2)

Le cisaillement interfacial T est alors déterminé à partir de l'expression


suivante :
1 F2
T = —?— — — (II.3)
1
41^ R3 u
f

avec : E , le module élastique de la fibre, R son rayon.

Cette équation est établie en négligeant les effets de Poisson sur le fret-
tage fibre-matrice, ainsi que les effets de contraintes résiduelles. A ce
propos, ROUBY (1988) a d'ailleurs clairement défini la validité d'une
mesure quantitative dans ce cas. Pour diminuer le coté fastidieux du trai-
tement des données, nous avons utilisé un tableur.

b. Résultats expérimentaux

Le fait le plus marquant parmi les résultats que nous avons obtenus
(ABBÉ et CHERMANT, 1990a) (Fig. 11.17) est la décroissance brutale de la
valeur de T. dans l'intervalle 1100-1200° C. D'une manière surprenante, la
valeur de la dureté de la fibre ne semble pas trop varier dans cette gamme
de températures. Toutefois, l'évolution structurale de la fibre ne nous a
pas permis de réaliser des mesures sur les échantillons soumis à des trai-
tements thermiques dont la température excédait 1200° C.

Les valeurs numériques obtenues sont rassemblées dans le tableau 11.15.


Nous avons ajouté les valeurs des contraintes à la rupture en fluage.
Le composite SiC-SiC 2D 87

o
Q.
2
h 10

273 773 1273


T(K)
Fig. 11.17 Variation du cisaillement interfacial, T , et de la contrainte
i
à la rupture, <r , à température ambiante, d'éprouvettes après fluage à
r
différentes températures, en fonction de la température, T.

T T
i r
K MPa MPa

298 21.0 320


1273 10.5 280
1373 12.6 250
1423 5.5 160
1473 2.7 110

Tableau 11.15 : Valeurs du cisaillement interfacial, T , en fonction de la


i

température, T. Sont indiquées également les valeurs de contrainte à


la rupture en fluage, <r . Les valeurs de dureté et de module d'élasti-
cité prises en considération ont été respectivement H = 25 GPa et
F
E = 200 GPa.
F

La valeur de la dureté, H, de la fibre (25 GPa) a été obtenue à partir


des empreintes réalisées sur des coupes longitudinales de fibres. Cette
valeur est en accord avec celle obtenue par L0WDEN et al. (1988b) qui est
de 22 ± 7 GPa. Toutefois, les mesures réalisées par MARSHALL (1984), ainsi
que ROUBY (1988) sur des fibres dont les axes sont perpendiculaires au plan
de section métallographique, conduisent à des valeurs plus faibles: 13 GPa
et 15 GPa.
88 Chapitre II

La valeur du module élastique, E , a été choisie dans la littérature à


200 GPa. Par comparaison avec les valeurs obtenues par FITZER (1988), cette
valeur semble élevée. Toutefois elle semble une bonne moyenne de E dans la
gamme de températures étudiée, au vu de l'évolution de ce paramètre en
fonction de la température (ainsi que du diamètre des fibres).

Ces résultats seront utilisés lors de la discussion de l'étude du


comportement en fluage de ces matériaux.
^V'-y

pSSS\

f':':'"''\

F?l

(BBJBj
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 89

CHAPITRE III : COMPORTEMENT EN FLUAGE DU COMPOSITE


SIC-SIC 2D : RESULTATS EXPERIMENTAUX

Dans ce chapitre nous allons exposer et commenter les résultats des


essais de fluage effectués sur le composite SiC-SiC 2D. Pour faciliter
l'interprétation ultérieure de ces résultats, nous avons axé notre propos
sur les variations des paramètres globaux mesurés. A cette fin, la présen-
tation du dispositif expérimental ainsi que du mode opératoire a été ren-
voyée en annexe (ANNEXE III).

Les essais de fluage ont été réalisés en flexion trois points, sous
vide, dans le domaine 1000-1450° C, sous des contraintes de 50 à 250 MPa,
avec des éprouvettes de dimensions utiles : 14 x 6 x 2,5 mm (ABBÉ et al.,
1989a ; ABBÉ et CHERMANT, 1990b). De 3 à 5 éprouvettes ont été testées à
chaque température.

L'obtention des paramètres pertinents nécessitent certains traitements


des données expérimentales de fluage. Nous présenterons donc, tout d'abord,
la méthodologie que nous avons utilisée, puis les diagrammes issus des
mesures expérimentales.

I. ANALYSE DES COURBES DE FLUAGE

Les essais de fluage en flexion ont été réalisés à température cons-


tante en appliquant soit une charge unique, soit en effectuant des incré-
ments croissants de charge sur une même éprouvette. Cette méthodologie a
été retenue pour deux raisons : d'une part pour sa facilité de mise en
oeuvre et d'autre part pour le gain de temps. En outre, l'inertie du sys-
90 Chapitre III

tème de chauffage étant importante, cette façon de procéder permet d'éviter


d'utiliser la méthode des sauts de température pour mesurer l'énergie d'ac-
tivation, tout en accédant à celle-ci par un calcul précis. De plus, comme
nous le verrons ultérieurement, certains mécanismes sont opérants dans des
domaines étroits de température, ce qui rend caduc l'utilisation de la
méthode de sauts de température.

A ce propos, des mécanismes d'endommagement seront observés dans tout


le domaine de températures et leur influence sur la méthodologie suivie
sera discutée ultérieurement dans ce chapitre.

Dans un premier temps les résultats que nous avons obtenus ont été
exprimés sous la forme de courbes présentant la déflexion de l'éprouvette
en fonction du temps (Fig. III.l).

t(h)

Fig. III.l : Variation de la déflexion, h, en fonction du temps, t, à une


température de 1200° C, pour une éprouvette soumise à une contrainte de
70 MPa.

Dans le cas où des incréments de charges sont réalisés, l'enregistre-


ment de la déformation prend une forme voisine de celle représentée sur la
figure III.2.

La déflexion de l'éprouvette a ensuite été transformée en valeur de


déformation dans le cadre de l'approximation linéaire. A ce sujet nous
serons amenés à réaliser une autre analyse dans le chapitre suivant.
n*l
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 91

;:':r\
100 T-1423K

145MPo j

50
rrsi
135MPa
120MPO
110MPa^-—

|/^
n
20 40 60 80 100 120
f'-^s t(h)
Fig. III.2 : Allure de l'évolution de la déflexion, h, en fonction du temps
par la méthode des sauts de contrainte.

La contrainte maximale de traction sur l'échantillon peut être estimée


par le même type d'analyse. Les équations de transformation sont alors les
suivantes :

3 L
<r =
2 BW

6B
e =— h
L2
/T;-^

avec : o\ la contrainte maximale,


L, la distance entre les deux appuis inférieurs,
B, la largeur de l'éprouvette,
W, l'épaisseur de l'éprouvette,
F, la charge appliquée,
e, la déformation,
h, la déflexion.

A partir de l'enregistrement de la déflexion, h, en fonction du temps, une


vitesse de déformation, e, est définie :

6B
e =
92 Chapitre III

Cette façon de procéder appelle toutefois une mise en garde. Du point


de vue du calcul de la contrainte, l'approximation linéaire effectuée pose
des problèmes à deux niveaux : le premier concerne la valeur de la con-
trainte qui évolue au cours du temps lors d'un essai de flexion (la valeur
déterminée est donc indicatrice d'un niveau, mais elle peut être erronée) ;
le second concerne la détermination de l'exposant des contraintes (ce der-
nier point fera l'objet d'une analyse détaillée dans la discussion).

Du point de vue de la vitesse de déformation, une erreur systématique


est donc commise, mais elle n'affecte que de très peu les paramètres
mesurés qui sont l'exposant des contraintes et l'énergie d'activation.

1. Détermination du stade stationnaire

Dans le premier chapitre nous avons décrit l'intérêt de connaître la


valeur de la vitesse de déformation dans le stade stationnaire (ou stade
secondaire) (Fig. 1.1) pour différentes valeurs de la contrainte appliquée.
Le problème se pose donc en terme de mesure d'une vitesse de déformation
minimale. Toutefois, cette vitesse minimale peut ne pas être constante dans
un domaine temporel important. En effet, la plupart des travaux réalisés
sur le fluage des matériaux SiC (cf. Chapitre II "la matrice") ont montré
que dans le domaine expérimental qui est le nôtre, la résistance au fluage
de ces matériaux dépend fondamentalement de la tenue mécanique des joints
de grains et/ou de la seconde phase présente. En ce qui concerne la matrice
constituant notre matériau, la très petite taille des cristaux (environ 0,3
jim) pourrait permettre des déformations importantes à des vitesses élevées,
si ce n'étaient leur forme allongée et l'orientation cristallographique
défavorable par rapport à la contrainte appliquée. Une forte contribution à
la déformation sous la forme d'endommagement doit donc être attendue,
entraînant une définition délicate du stade stationnaire au sens usuel du
terme.

A titre d'exemple nous présentons sur la figure III.3 l'enregistrement


de la déformation en fonction du temps d'une éprouvette pour une contrainte
de 70 MPa et une température de 1200° C, ainsi que la courbe de vitesse de
déformation, e, en fonction du taux de déformation, e, qui lui correspond.
L'avantage de ce dernier diagramme réside dans son caractère intrinsèque
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 93

0.05 0.10 0.15 0.20

Fig. III.3 : Evolution du taux de déformation, c(%), en fonction du temps,


t, et de la vitesse de déformation, e, en fonction du taux de déforma-
tion, e(%), à 1200° C sous 70 MPa.

(les variables introduites sont directement mesurées et la contrainte


intervient implicitement). De plus, l'établissement de ce type de dia-
gramme, représentant la vitesse de déformation en fonction du taux de
déformation, permet d'une part la détermination correcte de la vitesse de
déformation minimale et d'autre part de mettre en évidence la largeur du
domaine de fluage secondaire. Enfin, le taux de déformation limite est
alors bien défini soit en terme de fluage secondaire, soit en déformation
correspondant à la rupture. Notamment l'occurrence d'une vitesse de défor-
mation minimale à un taux de déformation fixe permet de valider le concept
d'équivalence temps-température permettant la prédiction des durées de vie.

2. Description phénoménologique

Lorsque les valeurs minimales des vitesses de déformation sont déter-


minées, ces résultats peuvent s'exprimer sous la forme de la loi de NORTON
(équation simplifiée de la loi de DORN présentée au Chapitre I, équation
1.1) :
r- Q i
a
e = A <r exp (III.1)
RT
s

-1
avec e , la vitesse de déformation dans le stade stationnaire (s ),
s
A, une constante dépendant de la structure du matériau,
<r, la contrainte appliquée (MPa),
94 Chapitre III

n, l'exposant des contraintes,


Q , l'énergie d'activation apparente (J.mole" ),
T, la température absolue (K),
R, la constante des gaz parfaits (8,31 J.mole- K. ~ ).

La sensibilité à la contrainte s'exprime alors par l'exposant des con-


traintes n :

3 Log e
n = s
d Log <r

et l'énergie d'activation, Q , à partir du tracé du diagramme d'ARRHENIUS,


représentant la vitesse de déformation minimale en fonction de l'inverse de
la température absolue pour une contrainte constante :

d Log e
2
RT
% - 3 T <r,n

II. RESULTATS EXPERIMENTAUX

Avant de présenter les deux diagrammes fondamentaux - e=f(<r) et


e=f(l/T)) - qui expriment la totalité de nos résultats de fluage, un pre-
mier commentaire s'impose à propos de l'allure des courbes représentant la
déformation en fonction du temps.

1. Déformation en fonction du temps et domaine de fluage

Tout d'abord dès 1100CC une déformation en fonction du temps peut être
observée et on remarque sur ces courbes la présence d'un stade primaire
(transitoire) relativement important. Ce premier stade peut paraître a
priori surprenant dans le cas de ces matériaux. En effet, le premier stade
de fluage est souvent attribué dans le cas de métaux à des phénomènes de
durcissement, que nous ne pouvons pas retenir comme explication dans le cas
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 95
des SiC-SiC. En revanche une redistribution des contraintes au cours du
temps semble plus probable, d'autant plus que ce phénomène est observé
aussi bien dans le composite SiC-SiC que dans le cas du composite C-SiC où
les caractéristiques interfaciales sont différentes. Ce phénomène fera
l'objet d'une discussion particulière dans le chapitre suivant. Le stade
secondaire est généralement observé et il lui correspond souvent des durées
courtes (voir un simple point d'inflexion sur les courbes e=f(t)).

L'aspect le plus surprenant semble la présence d'un fluage tertiaire


et ceci quelle que soit la température d'essai du domaine expérimental : de
1100 à 1400° C. A ce propos, il semble d'ailleurs intéressant de noter qu'en
proportion ce dernier stade peut être d'une durée aussi importante que le
stade primaire. L'allure des courbes obtenues est donc proche de celle
observée usuellement sur les composites à matrice métallique par exemple
(KELLY et STREET, 1972 ; TAYA et ARSENAULT, 1989).

Sur les figures III.4 nous présentons deux courbes de fluage rupture
obtenues respectivement à des températures de 1150 et 1200° C. Le taux de
déformation à la rupture est de 0,26 % pour une contrainte de 145 MPa à
1150° C et de 0,75 % pour une contrainte de 94 MPa à 1200° C.

Fig. III.4 : Variation du taux de déformation, e(%), en fonction du temps,


t, à 1423K et à 1473K.

En réalité, le taux de déformation est plus important car les deux


courbes sont obtenues à partir d'essais comportant des incréments de con-
trainte : le taux de déformation cumulé est donc un critère de comparaison
96 Chapitre III

pertinent : celui-ci vaut 0,4 % à 1150° C et 0,5 % à 1200° C. Il semble donc


que le taux de déformation à rupture augmente avec la température et que
des valeurs identiques à rupture soient obtenues quelque soit le mode de
chargement. Ce comportement peut être interprété comme une indication sur
l'applicabilité de la loi de prévision MONKMAN-GRANT. En revanche, pour des
températures supérieures à 1200° C, il ne semble plus possible de tirer des
conclusions similaires.

Bien que le but de notre étude consiste à mettre en évidence la


séquence et la quote-part des mécanismes mis en jeu, il semble intéressant
de présenter les quelques données de fluage rupture. Sur la figure III. 5
nous avons reporté les différents temps de rupture observés pour une con-
trainte et une température données. Ce diagramme permet de délimiter la
zone de contrainte conduisant à la rupture instantanée d'une part, et
d'autre part il met en relief le fait qu'une déformation en fonction du
temps n'est observée que lorsque la contrainte est au minimum égale au
tiers de la contrainte à la rupture. Le domaine de fluage exploré est alors
représenté (Fig. III.6) et peut être comparé à la courbe présentant, les
résultats de rupture par essais de flexion 4 points sous gaz neutre, effec-
tués par le fabricant (CHOURY, 1990).

300
o O < 10mn
2
O 20h
200
• 12h
• 30h
A 40h O 1h
100 A 45h • 24mn
A
46h O 12mn
A 3.2h

n 1 i i

1273 1373 1473 1573 1673 1773


TOO

Fig. III. 5 : Variation de la contrainte appliquée, <r , en fonction de la


a
température, T, pour différents temps conduisant à la rupture.
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 97

500
o

250

273 1273
TOO
Fig. III.6 : Domaine de fluage étudié en flexion 3 points (zone hachurée)
et comparaison avec les résultats de rupture en flexion 4 points par
CHOURY (1990).

2. Influence de la température

Dans notre cas, nous observons une diminution très nette de la valeur
maximale de la contrainte admissible à partir d'une température de 1200° C.
Cette modification du comportement est également observée dans le diagramme
représentant l'évolution de la vitesse de déformation en fonction de la
contrainte (Fig. III. 7). A partir d'une température de 1150° C, la valeur

01673K
A1573K
D1473K
01423K
1E-8 V1373K

1E-9
20 50 100 200
°a (MPa)

Fig. III. 7 : Variation de la vitesse de déformation, e, en fonction de la


contrainte appliquée, <r , pour un composite SiC-SiC 2D testé en fluage
en flexion 3 points, à différentes températures.
98 Chapitre III

limite de la contrainte semble se situer autour de 110 MPa. Toutefois,


quelle que soit la valeur de la contrainte, les vitesses de déformation
sont très faibles pour toutes les températures et sont du même ordre de
grandeur. Ce dernier point nous servira d'ailleurs de valeur de comparaison
par rapport au comportement de composites céramiques à fibres courtes lors
de la discussion, et constitue déjà un indice pour la détermination des
mécanismes d'endommagement du matériau.

En particulier, dans le domaine étroit de températures 1200-1300^, le


comportement du matériau ne semble pas pouvoir être décrit par un seul type
de mécanisme. Les variations de la vitesse de déformation en fonction de la
contrainte dans ce domaine de températures peuvent être assimilées à un
comportement bi-linéaire. Ce comportement étant riche de renseignement,
celui-ci fera l'objet d'une étude particulière dans le chapitre suivant.

Avant de tracer le diagramme d'ARRHENIUS qui permet de calculer les


énergies d'activation apparentes, nous allons détailler pour chaque tempé-
rature les résultats obtenus en présentant également les observations
effectuées en microscopie électronique à balayage. A ce sujet ces dernières
ont mis en évidence deux traits caractéristiques des faciès de rupture :
une diminution des longueurs de fibres extraites ("pull-out") et une évolu-
tion de l'aspect de la surface de ces fibres, ainsi que du faciès de rup-
ture de ces dernières. Ces observations soulèvent dès à présent la question
de l'influence de la cohésion interfaciale T (que nous avons mesurée expé-
rimentalement) sur le comportement en fluage. En effet, une diminution de
T , entraîne généralement une augmentation de la longueur de fibre extraite
de la matrice.

Pour des températures inférieures à 1200° C, il est possible d'utiliser


une relation décrivant l'évolution du miroir de rupture des fibres en fonc-
tion de la contrainte appliquée pour estimer la contrainte supportée par
les fibres lors de la rupture en fluage (SAWYER et al., 1987). Cette rela-
tion nous servira pour l'interprétation des résultats.

Détaillons maintenant les résultats présentés sur la figure III.7,


pour chacune des températures d'essais.
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 99

T=1100° C

Un exposant des contraintes de 1,5 est obtenu pour les essais réalisés
à des contraintes variant de 110 à 250 MPa ; les observations en microsco-
pie électronique montrent qu'à tous les niveaux de contrainte une microfis-
suration matricielle est présente ; celle-ci est relativement localisée
dans la zone en traction ; il est par contre difficile de définir précisé-
ment une zone de fissuration pour deux raisons : i) l'échantillon observé
n'est plus sous contrainte, certaines microfissures (parmi les plus fines)
ont donc pu se refermer, devenant invisibles, ii) de plus la morphologie
particulière du matériau empêche toute corrélation directe entre la visua-
lisation en surface des fissures et une fissuration volumique ; ces der-
niers points sont d'ailleurs communs aux autres observations effectuées sur
des échantillons déformés à des températures supérieures. La valeur de
l'exposant des contraintes à cette température semble indiquer que les
mécanismes de déformation par diffusion de matière ne sont pas dominants.

T=11508C

Une légère augmentation de la valeur de l'exposant des contraintes est


observée : n~2 ; toutefois, la gamme des vitesses de déformation reste la
même ; en revanche, une diminution de la valeur des contraintes correspon-
dant aux mêmes vitesses est observée ; le même mécanisme que précédemment
semble opérer à cette température, mais avec un niveau de contrainte plus
faible ; il apparaît de plus qu'un autre type de mécanisme débute ; cette
impression sera confirmée par l'analyse du diagramme d'ARRHENIUS.

T=1200° C

Au dessous d'une valeur seuil de contrainte, o*a, de 80 MPa environ,


o
l'exposant des contraintes prend la valeur de 1,4, tandis qu'au dessus de
ce seuil une valeur de 5,6 est observée ; l'exposant des contraintes voisin
des valeurs précédentes semble indiquer que le mécanisme à basses con-
traintes serait identique à celui rencontré précédemment ; en revanche pour
les contraintes supérieures à 80 MPa, une forte sensibilité à la contrainte
est constatée ; un comportement identique est d'ailleurs observé pour une
température d'essai supérieure.
100 Chapitre III

T=1300CC

La valeur seuil est dans ce cas de 60 MPa environ ; l'exposant des


contraintes est le même que précédemment pour le domaine des contraintes
inférieures à cette valeur seuil ; toutefois, pour les contraintes supé-
rieures à ce seuil, l'exposant n prend une valeur de 3,2.

T=1400eC

Un seul comportement est décelé dans le même domaine de contraintes


que précédemment ; l'exposant des contraintes est dans ce cas voisin de
celui rencontré aux températures inférieures : n=l,7.

Le tableau III.1 résume les valeurs expérimentales obtenues.

a
n N
•c o NPa MPa

1100 1,5 - - 110-250


1150 2 - - 70-150
1200 1,4 5,6 80 50-110
1300 1,4 3,2 60 30-110
1400 1,7 — — 30-110

Tableau III.1 : Valeurs expérimentales des données de fluage pour le SiC-


SiC 2D. T : température d'essais ; n : exposant de la contrainte ; N :
second exposant de la contrainte ; <r : valeur seuil de la contrainte ;
o
er : contrainte appliquée.

D'emblée nous pouvons remarquer que plusieurs mécanismes semblent


opérer simultanément et qu'une zone de transition est observée dans le
domaine de 1150 à 1300° C. En effet l'analyse du diagramme e=f(<r ) fait res-
a
sortir successivement des basses aux hautes températures, une variation
linéaire, puis bilinéaire et enfin linéaire de la vitesse de déformation
avec la contrainte.

Une réduction des contraintes maximales supportées par le matériau est


observée dès 1200° C. Nous verrons dans le chapitre suivant que les valeurs
seuil introduites sont directement reliées à des valeurs correspondant à un
seuil d'endommagement en traction et que la contrainte de cisaillement
interfaciale mesurée permet d'expliquer ces valeurs seuil en adaptant le
modèle décrit par EVANS (1989).
Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 101
3. Energie d'activation

Le calcul des énergies d'activation mises en jeu lors du fluage a été


réalisé à partir du diagramme d'ARRHENIUS pour des températures variant de
1100 à 1400° C et pour des contraintes de 50 à 90 MPa. La forme de ces
courbes indique que l'énergie d'activation dépend à la fois de la tempéra-
ture et de la contrainte. Il est à noter que pour les faibles valeurs de la
température et de la contrainte nous avons été amenés à extrapoler l'allure
des courbes de la figure III. 7. Sur le diagramme une valeur seuil de con-
trainte est observée, à partir de laquelle apparaît une forte augmentation
de l'énergie d'activation. Deux mécanismes au moins semblent donc en
compétition.

Sur ce diagramme d'ARRHENIUS (Fig. III.8) plusieurs domaines peuvent


être mis en évidence suivant la valeur de la contrainte.

H73K1423K 1373K
T-

1E-8

1E-9 •

7.0 7.5
1
IOVTCK- )
Fig. III.8 : Tracés d'ARRHENIUS : vitesse de déformation, e, en fonction de
l'inverse de la température, 1/T, pour différentes valeurs de
contrainte appliquée.

Pour une contrainte de 50 MPa on observe une énergie relativement


constante de 170 kJ/mole dans le domaine de températures étudié. Par contre
dès que la contrainte augmente, la valeur de l'énergie d'activation
s'accroît et atteint une valeur de 300 kJ/mole. Cet effet débute d'autant
plus tôt en température que la contrainte semble élevée. En outre pour
toutes les valeurs de la contrainte supérieures à 65 MPa, une énergie d'ac-
102 Chapitre III

tivation de 40 kJ/mole est mesurée pour des températures comprises entre


1300 et 1400° C.

4. Fractographie

Sur la figure III.9 sont présentés des exemples des différents faciès
de rupture observés d'une part sur les torons les plus proches de la surfa-
ce en traction et d'autre part sur les fibres correspondant à ces mêmes
torons.

On observe un déchaussement de fibres quelle que soit la température :


la valeur moyenne, £, des longueurs de fibres extraites diminue en fonction
de la température (t > lOOfxm pour une température de 1373 K et t < 20fim
pour une température de 1673 K). Toutefois, ces observations ne concernent
que les premiers torons qui supportent à la fois la contrainte maximale et
les phénomènes de corrosion (effet de l'environnement), comme le montrent
les surfaces des fibres extraites. Sur ces dernières, on observe des
miroirs de rupture et des rivières sur les fibres à l'origine de la rupture
des torons pour des températures inférieures à 1473 K (température approxi-
mative de transition vitreuse de la fibre). Un défaut microstructural en
surface (amas de carbone?) est responsable de la rupture. Les efforts sup-
portés par une fibre qui se rompt sont répartis sur les fibres voisines ce
qui précipite la succession des ruptures. Tandis que lorsque la fibre voit
sa plasticité augmenter (T > 1473 K), les faciès de ruptures sont plus dif-
ficiles à interprêter du fait de la recristallisation de la fibre. La dimi-
nution de la longueur de déchaussement des fibres peut être attribuée à une
diminution de la valeur de la contrainte à la rupture et du module de
WEIBULL des fibres en fonction de la température et du temps (cf. Fig.
II. 2, II. 3 et II. 4), ainsi qu'à une diminution de la contrainte interfa-
ciale T . La fissuration matricielle concomitante semble relativement loca-
i

usée, mais la zone fissurée est très délicate à déterminer exactement,


même sur des éprouvettes avant rupture. On note également une évolution
avec la température, de l'aspect extérieur des fibres extraites. Par
ailleurs, quelle, que soit la température, aucune cavitation matricielle
notable n'a été mise en évidence.

La mesure de la distance moyenne entre fissures matricielles permet


Le comportement en fluage du composite SiC-SiC 2D 103

théoriquement d'évaluer également la valeur de la contrainte interfaciale.


En toute rigueur cette méthode mentionnée au Chapitre II (déterminaiton de
x, Chapitre II, IV a) peut être utilisée lors d'essais de traction sur un
composite unidirectionnel. Les valeurs que nous avons pu estimer, sur de
tels matériaux SiC-SiC, par cette méthode à partir des observations, en
microscopie électronique à balayage, d'éprouvettes déformées en flexion,
sont du même ordre de grandeur que celles mesurées par indentation (Fig.
11.17) (environ 20 MPa). Cette méthodologie reste toutefois délicate à
manipuler pour évaluer, de façon fiable, la valeur du cisaillement
interfacial.

CONCLUSION

Les résultats expérimentaux que nous venons de présenter mettent clai-


rement en évidence que plusieur mécanismes concourrent à la déformation.
Toutefois, la forme du tracé d'ARRHENIUS ne permet pas de déterminer leur
séquence. La confrontation des données du comportement thermomécanique de
la fibre nous permettra de lever en partie le doute. Néanmoins, ce dernier
diagramme laisse prévoir que les mécanismes mis en oeuvre dépendent du
niveau de contrainte. L'interprétation des résultats devra donc avoir comme
point de départ une analyse des contraintes et plus particulièrement de la
contrainte de cisaillement interfacial fibre/matrice. De plus, la connais-
sance des données de fluage de la fibre vont nous permettre dans le cha-
pitre suivant d'interpréter la transition observée à partir de 1200° C.

L'interprétation des résultats et la discussion qui s'en suit, va


s'architecturer autour de plusieurs volets :

* une première partie traitera de la zone particulière de transition


où une analyse des essais de flexion permettra de modéliser le com-
portement en traction et en compression ; toutefois cette modélisa-
tion introduira une hypothèse de loi de fluage,
* dans une seconde partie nous vérifierons le bien fondé d'une telle
hypothèse en nous attachant à la modélisation du stade transitoire ;
la confrontation des résultats obtenus par cette méthode avec les
résultats expérimentaux nous permettra en particulier de discuter de
l'occurrence du stade stationnaire,
* une troisième partie tentera de faire le lien avec une mesure de
l'évolution de 1'endommagement,
104 Chapitre III

T = 1673K T = 1673K

50/im lfim

T = 1573K T = 1573K

50fxm l^im

T = 1473K T = 1473K

50fim lfxm

T = 1373K T = 1373K

lOOjim ljim

Fig. III.9 : Faciès de rupture des torons et des fibres.


• ^ p ^ n ^ ^ j

-.." / '
; .—,—rr- ' P i .• - ^SB -
106 Chapitre III

* enfin, dans un paragraphe final nous apporterons les éléments de


synthèse entre ces différentes approches et nous définirons les
critères possibles de prédiction de la durée de vie du matériau.
107

CHAPITRE IV : DISCUSSION ET INTERPRETATION


DES RESULTATS

INTRODUCTION

La compréhension des mécanismes de fluage de matériaux composites


céramiques est importante à deux niveaux :

- d'un point de vue scientifique, car elle permet de choisir les élé-
ments pour une meilleure synergie des propriétés des constituants et
interfaces afin d'obtenir l'effet composite désiré,
- d'un point de vue économique, pour la validation du matériau compo-
site prometteur pour une utilisation structurale donnée, ou autre,
i.e. sa durée de vie en service.

La compréhension du fluage d'un matériau testé sous un effort de


flexion est aussi importante que celle de traction ou de compression, car
beaucoup de sous-structures et de composants (aubes de turbines, sorties de
tuyères . . . ) sont soumis à un effort de flexion. Si les essais de flexion
sont les plus faciles à mettre en oeuvre, ceux-ci requièrent un effort de
déconvolution si l'on désire accéder au comportement en traction et en com-
pression qui, comme nous allons le voir, nécessite une connaissance a
priori des lois de fluage. En réalité, une première approche qui consiste à
effectuer des essais de flexion permet de mettre en évidence, grâce à une
observation micro et macroscopique (avec ou sans analyse chimique couplée),
les mécanismes et donc la phénoménologie de la déformation observée. Bien
que les valeurs de contraintes calculées dans le cadre de la mécanique
linéaire soient relativement écartées de la réalité, ce type d'étude permet
dans un premier temps de définir les zones d'intérêt et de fixer les
limites du domaine température, T, temps, t, contrainte, o\
108 Chapitre IV

0*

t
—>

Chaque type de mécanisme observé, ainsi que leur domaine d* influence, peu-
vent être mis en évidence : les lois de fluage alors introduites ne sont
plus posées a priori, mais sont issues d'une observation du comportement du
matériau sous contrainte.

A partir des différents diagrammes présentés dans le chapitre précé-


dent, un certain nombre de questions se posent.

* Rappelons dans un premier temps les points saillants de nos résultats,


que nous allons étudier plus attentivement dans ce chapitre et dégageons
dans un second temps le schéma directeur de notre discussion.

• En ce qui concerne la déformation en fonction du temps et le domaine


de fluage, la vérification de 1'innocuité de la méthode des incré-
ments de contrainte doit être effectuée et plus particulièrement
l'occurrence de l'état stationnaire lors de la déformation doit être
discutée ; à ce sujet, l'étude de l'état transitoire et de l'évolu-
tion de 1 'endommagement sera l'objet de la seconde partie et de la
troisième partie de ce chapitre,
• A propos de l'influence de la contrainte (§ III.II.2), la réduction
de la valeur limite de la contrainte admissible par le matériau,
ainsi que l'apparition d'une valeur constante de celle-ci dans le
domaine de températures de 1200 à 1400° C (figures III.6 et III.7)
posent la question de savoir si cette variation doit être attribuée
à la modification des propriétés de 1'interphase (figure 11.17) ou
du renforcement (figures II. 2, II. 3 et II. 4) ; dans le même ordre
d'idées, la transition observée dans le comportement en fluage
(courbes quasi-bilinéaires) peut-elle être attribuée au même type de
phénomène ? Nous verrons que la valeur seuil de la contrainte intro-
duite lors de l'étude de cette transition (§ IV.1) dans le compor-
tement du matériau trouvera sa justification dans la confrontation
de ces valeurs avec la variation de la cohésion interfaciale mesurée
précédemment (figure 11.17) et de l'allure du diagramme d'ARRHENIUS
(figure III.8),
fSïB)

Déconvolution 109

• Ce dernier diagramme met clairement en évidence un mécanisme de base


présent surtout pour les faibles valeurs de la contrainte dans tout
le domaine de températures étudié ; ce mécanisme semble imposer
l'ordre de grandeur des vitesses de déformation ; l'énergie d'acti-
vation de 170 kJ/mole qui lui correspond est proche de la valeur
obtenue par CARTER et al. (1984a et b) : 175 kJ/mole pour le fluage
de SiC-DCPV ; ce mécanisme pourrait donc être attribué à la déforma-
tion de la matrice ; lorsque la contrainte augmente (ainsi que la
température), deux mécanismes liés séquentiellement se superposent
parallèlement à ce mécanisme de base ; la très faible énergie
d'activation du premier mécanisme supplémentaire = 40 kJ/mole semble
pouvoir être attribuée à une fissuration matricielle (cf. les 23 -
69 kJ/mole obtenus par WIEDERHORN et al. (1988) dans un cas simi-
laire), tandis que le second mécanisme supplémentaire correspondrait
à la déformation de la fibre (une énergie d'activation apparente de
300 kJ/mole mesurée semble proche de celle obtenue par BUNSELL et
al. (1988) au cours du fluage d'une fibre de nuance équivalente.

Une première analyse des résultats (diagrammes présentant l'évolution


de la vitesse de déformation en fonction de la contrainte appliquée, ainsi
que l'influence de la température (figures III.7 et III.8)) met en relief
une séquence possible de mécanismes fondamentaux qui concourrent à la
déformation ainsi que la nature de ceux-ci. Les vitesses de déformation
mesurées se situant dans le même intervalle quelles que soient les tempéra-
tures, il apparaît nettement que leur dépendance vis-à-vis de la contrainte
est directement reliée aux propriétés du renfort et de 1'interphase. En
effet, une limite de contrainte apparaît à partir de laquelle le fluage de
la fibre devient prépondérant dans la déformation. En outre, cette limite
semble diminuer en fonction de la température.

* L'analyse et la discussion de nos résultats va donc se poursuivre par :

• en premier lieu, une déconvolution de l'essai de flexion pour obte-


nir dans la zone de transition (de 1150 à 1200° C) des données de
fluage en traction et en compression ; la valeur seuil de contrainte
sera déterminée quantitativement pour les températures de 1200° C et
1300° C ; toutefois cette approche est réalisée dans l'hypothèse de
lois de fluage particulières,
110 Chapitre IV

• en second lieu, une simulation de l'état transitoire basée sur la


relaxation des contraintes lors de l'essai de flexion nous permettra
de valider cette approche et de justifier de l'occurrence d'un état
stationnaire ; ce phénomène de relaxation des contraintes à d'ail-
leurs été évoqué dans le chapitre I (Da SILVA, 1982) ; en effet dans
le cas de l'hypothèse d'une déformation du composite à x constant,
l'allongement par fluage de la fibre sous la contrainte variable <r
est compensé exactement par un retrait élastique qui entraîne une
diminution de <r ; toutefois cette diminution doit être supportée
par la matrice qui, en se déformant, relâche la contrainte qu'elle
supportait et augmente d'autant celle qui doit être supportée par la
fibre ; les figures 1.9 illustrent parfaitement ce phénomène ; une
évolution de 1'endommagement en fonction du temps est donc présente
également,
• en troisième lieu, nous testerons l'applicabilité de la mesure d'un
taux d'endommagement à l'aide de la vitesse de fluage ainsi que dif-
férents critères de prédiction de la durée de vie du matériau.

I. DEC0NV0LUTI0N

Les essais de fluage effectués en flexion nécessitent une déconvolu-


tion si l'on désire obtenir les lois de comportement en traction et en
compression. Celle-ci est rendue possible grâce à la mesure expérimen-
tale de la localisation du plan neutre. La modélisation nécessairement
introduite pour réaliser cette déconvolution est alors validée par
confrontation avec les mesures expérimentales.

1. Problématique

Les essais de flexion sont souvent adoptés pour obtenir des données
sur le comportement en fluage des matériaux. En dépit du fait que l'essai
de flexion pose de nombreux problèmes d'analyse, comme nous allons le voir
(cf.infra), son utilisation est très répandue, car cet essai reste plus
stable, plus facile à mettre en oeuvre en comparaison des essais uniaxiaux
(traction et compression). Par contre, pour ces derniers, l'état des con-
traintes est bien défini, mais ces essais uniaxiaux présentent néanmoins de
graves difficultés de réalisation pratique lors de tests avec des matériaux
céramiques. Lors d'un essai de flexion, les paramètres mesurés - la charge
appliquée, P, et la déflexion, h, sur la barre testée - sont le plus
souvent convertis en contrainte, o*, et déformation, e, en utilisant l'hypo-
Déconvolution 111

thèse d'un milieu continu homogène (TIMOSHENKO, 1947 ; MANDEL, 1966).

HOLLENBERG et al. (1971) sont les premiers à notre connaissance à


avoir présenté une analyse permettant de relier des données expérimentales
de fluage obtenues en flexion (P,h) aux variables d'état (o\e) dans l'hypo-
thèse d'un comportement identique en traction et en compression. La modéli-
sation du comportement mécanique du matériau ne peut être effectuée qu'à
partir de ces variables d'état. Cependant, de nombreux auteurs (FINNIE,
1966 ; TALTY et DIRKS, 1978 ; COHRT et al., 1981, 1984a et b ; CHEN et
CHUANG, 1987 ; CHUANG, 1988 ; CHUANG et WIEDERHORN, 1988) ont mis en exer-
gue que la méthode de changement de variables précédemment citée ne peut
s'appliquer dès lors que le matériau se comporte d'une manière différente
en traction et en compression. En effet, cette différence de comportement
se traduit par un déplacement du plan neutre en cours d'essai, ainsi qu'une
modification du champ de contraintes dans l'échantillon testé.

Le problème de la détermination des lois de comportement en


fluage en traction ïï et en compression £ à partir d'essais de flexion se
pose alors en terme d'une déconvolution de la réponse K(3",l?) obtenue en
flexion.

2. Analyses théoriques

a. Etude bibliographique

Les données de fluage étant technologiquement importantes, de nom-


breuses études ont été effectuées, dans un premier temps afin d'obtenir des
données de fluage en traction et en compression à partir d'essais de
flexion (HOLLENBERG et al., 1971 ; TALTY et DIRKS, 1978 ; ROSENFIELD et
al., 1985 ; CHEN et CHUANG, 1987 ; CHUANG, 1988 ; FETT et al., 1988). Ces
données, correspondant à des sollicitations mécaniques simples, permettent
dans un deuxième temps d'élaborer une modélisation du comportement à partir
des variables d'états.

Nous allons présenter successivement les différentes approches menées


pour résoudre ce problème. Une première approche consiste à considérer un
comportement élastique en flexion, ce qui revient à rendre équivalent le
comportement en traction et en compression dans la barre testée.
112 Chapitre IV

» FINNIE (1966) a été l'un des premiers à mettre en évidence l'invali-


dité d'une telle hypothèse dans le cas de l'étude en fluage de céramiques
monolithiques (alumines). Celui-ci a été conduit à séparer le comportement
en fluage en flexion en deux lois différentes de fluage, relatives à la
partie en traction et en compression, dont la dependence en fonction du
temps est la même :

e - <r y(t) en traction

e = j3<r y(t) en compression


c

La signification de cette description est la suivante : une vitesse de


fluage identique en compression à celle de traction est obtenue pour une
contrainte ß fois plus grande en compression qu'en traction.

A partir de l'équation de l'équilibre de forces :

I
A
<r dA = 0 (IV. 1)

cet auteur déduit une équation algébrique,8, où les paramètres géométriques


interviennent et qui relie la localisation du plan neutre,x, au quotient
compression/traction ß :

6 (ß,x) = 0 (IV.2)

M étant le moment appliqué, la répartion des contraintes est alors


déterminée en résolvant l'équation d'équilibre des moments des forces:

I A
<r(y)y dA = M (IV. 3)

cette dernière équation ne pouvant être complètement résolue que par la


connaissance de 9. Il apparaît alors évident que par un essai de fluage en
flexion, où M reste constant au cours du temps, la mesure de la déflexion,
h, ne permet pas, à elle seule, de déterminer les lois de comportement de
Déconvolution 113
î
fluage

» De même, COHRT et al. (1981) ont complété leur étude expérimentale


du fluage de nitrure de silicium (Si N ) par une analyse théorique, dans
3 4
l'hypothèse d'un même exposant des contraintes en traction et en compres-
sion pour la loi de fluage utilisée. Leur analyse rejoint celle effectuée
par FINNIE et introduit le rapport :

S = (IV.4)

dont la valeur a la même signification que le paramètre ß introduit dans


l'analyse réalisée par FINNIE. Ce rapport S est défini par ces auteurs
comme étant un coefficient multiplicateur de contrainte: une vitesse de
fluage identique en compression et en traction est obtenue si, et seulement
si, les contraintes sont dans un rapport S.

e
/ ' /

/ /
1 *
S <r

Les équations d'équilibre précédentes ont permis à ces auteurs de


déterminer la localisation du plan neutre :

h = h + h (IV.5)
c t

= sn + 1 (IV.6)
r c

En d'autres termes, il apparaît important de noter dès maintenant que,


dans cette analyse, comme dans la plupart des suivantes, les lois de com-
portement sont posées a priori pour réaliser la déconvolution des contribu-
tions de traction et de compression à partir de l'essai de flexion. La
démarche suivie est de poser les lois de comportement en fluage cherchées
comme une hypothèse de travail et de confronter les mesures expérimentales
avec les prédictions du modèle. La validité des lois de comportement choi-
sies est confirmée ou infirmée a posteriori.
114 Chapitre IV

avec : h, la hauteur de l'échantillon,


h , la distance du plan neutre à la face en compression,
c
h , la distance du plan neutre à la face en traction.

Le champ des contraintes, ainsi que celui des déformations, ne peuvent être
parfaitement déterminés que par la connaissance de la localisation du plan
neutre.

» CHUANG (1988), à partir des travaux de CORHT, a mené une étude théo-
rique importante, fondée sur l'hypothèse la plus générale de lois de fluage
en partant de l'équation simplifiée de DORN (équation III.1) :

<r n
= A t entraction (IV.7)
t <r

CT n
c en compresi (IV.8)
= A
c
o

La localisation du plan neutre ainsi que l'allure des courbes con-


trainte-vitesse de fluage correspondantes ont été déterminées en fonction
des paramètres intrinsèques du matériau modèle A , A , n , n . Dans ce cas
a- représente une contrainte de référence. Cette étude permet, à l'aide
o
d'une série d'abaques, de confronter les résultats expérimentaux avec les
différents modèles.

Toutefois, ces différentes études portent leur intérêt sur le domaine


stationnaire (fluage secondaire) des essais. L'ambiguïté demeure malgré
tout sur la validité de l'existence d'un tel domaine. En effet, la redis-
tribution de contraintes lors d'un essai de flexion peut obérer la détermi-
nation de l'état stationnaire, en augmentant la durée de l'état transitoire
(fluage primaire), comme nous le verrons dans le paragraphe suivant. Il
apparaît alors comme dangereux, pour ce type d'essai, de vouloir décrire
les courbes obtenues par une équation globale de fluage, i.e. e « t , t
étant le temps.

* FETT et al. (1988), dans le cas de l'étude expérimentale du fluage


du nitrure de silicium (Si N HP), ont réalisé une modélisation du compor-
3 4
tement de leur matériau. Ces auteurs ont été amenés, eux aussi, à intro-
duire un comportement asymétrique pour le fluage secondaire, avec un
coefficient A pour le fluage secondaire (ou À pour le fluage primaire) :
s P
Déconvolution 115

-> n . / 1 , <r > 0


e a A = (IV.9)
V s 1 a , < r < 0 ; 0 < a < l
V s s

A partir de ce modèle, dont nous venons de rappeler brièvement la philoso-


-TT^
phie, ces auteurs obtiennent un bon accord entre les courbes calculées et
les courbes expérimentales, en tenant compte des différents effets (transi-
toire et secondaire).

* Une autre approche consiste à privilégier la zone en traction en


introduisant une évolution du type endommagement, liée à la nucléation et à
la propagation de défaut au sens de GRIFFITH (1920). VENKASTESWARAN et
HASSELMAN (1984) dans le cas d'un fluage "élastique" ont introduit alors la
notion d'une modification du module élastique E dans la zone en traction
o
par création de N fissures de taille, a. Leur analyse conduit pour un essai
de flexion à un déplacement du plan neutre dans l'échantillon, soit en
coordonnées réduites :

x = - avec Ec = Eo (l+27iNa2) (IV. 10)

* • /- / - i

» Une approche plus empirique a été menée par ROSENFIELD et al. (1985)
qui ont étendu au cas du fluage leurs travaux relatifs à l'estimation des
lois d'endommagement à partir d'essais de flexion. Ces auteurs ont supposé
une déformation linéaire visco-élastique pour la partie en compression, et
introduit un paramètre d'endommagement w = <r / <r proportionnel à la con-
o
trainte pour la partie en traction (<r étant considéré comme un module
o
endommagement). La relation entre la vitesse de fluage et 1 'endommagement
s'écrit alors sous une forme proche de celle introduite par KACHANOV :
e = - (IV.ll)
A (1-w)
Le déplacement du plan neutre, induit par ce comportement asymétrique,
s'écrit dans ce cas :

x = - (IV. 12)
1 + ß
116 Chapitre IV

En revanche, cette description ne permet pas d'accéder à la loi d'évolution


de 1 ' endommagement u> , ni de justifier de l'introduction de celui-ci. Elle
permet par contre une prédiction du déplacement du plan neutre.

» En tant que synthèse de l'étude bibliographique, nous pouvons faire


ressortir les points suivants :

- la déconvolution exige de poser des lois de comportement a priori,


- un comportement asymétrique en fluage lors des essais de flexion est
relativement fréquent,
- cette asymétrie doit être caractérisée pour réaliser la déconvolu-
tion des contribution de traction et de compression, et pour valider
les lois de comportement.

En conclusion, ces analyses mettent en avant la nécessité de connaître


un ratio compression/traction quelle que soit la terminologie introduite -
0 pour FINNIE, S dans le cas de COHRT et al., a pour FETT et al. - afin de
s
réaliser la déconvolution des essais de flexion. La valeur de ce rapport
apparaît inaccessible par un essai de flexion classique. Toutefois la rela-
tion 8 dont l'existence se dégage de ces approches théoriques, nous donne
la conviction que la localisation du plan neutre est intimement liée à ce
rapport.

b. Détermination de la localisation du plan neutre

FINNIE (1966) dans le cas d'un exposant des contraintes identiques en


traction et en compression, puis TALTY et DIRKS (1978) dans le cas d'un
exposant des contraintes différent en traction et en compression, ont mis
au point une méthode expérimentale originale d'essais de flexion sur des
barres trapézoïdales leur permettant de déterminer le rapport ß (cf. supra,).
Toutefois, les méthodes proposées requièrent le test de deux échantillons
parfaitement identiques pour la détermination d'une même valeur expérimen-
tale. La mesure du plan neutre est alors déduite des deux essais de
flexion.

Expérimentalement, la localisation du plan neutre a été réalisée in


situ par CHEN et CHUANG (1987). Pour ce faire, ces auteurs ont matérialisé
Déconvolution 117

deux lignes repères sur leur matériau à l'aide d'empreintes d'indentation


Vickers réalisées avant fluage, puis mesuré la déformation après fluage en
déterminant la distance entre ces deux lignes. Le formalisme théorique
défini précédemment peut alors s'appliquer : le quotient est déduit de la
mesure de la localisation du plan neutre à l'aide de l'équation 6.

Par contre, FETT et al. (1988) n'ont pas déterminé la localisation du


plan neutre, mais directement le rapport compression/traction, A , par la
s
mesure de la distance entre deux indentations Vickers situées sur une ligne
méridienne de la tranche de l'échantillon. En revanche PINTSCHOVIUS et al.
(1989) ont déterminé sur les matériaux déformés par FETT les contraintes
résiduelles par neutrographie à l'Institut Laue Langevin et la localisation
du plan neutre. Les valeurs de A obtenues semblent dépendre du matériau :
s
ces auteurs obtiennent respectivement pour l'alumine 0,025 et pour le
nitrure de silicium 0,0034.
Malgré tout, la connaissance des lois de fluage ïï en traction et S en
compression semble nécessaire a priori pour la déconvolution. Toutefois, la
modélisation peut être introduite à partir des observations macro et micro-
scopique du matériau. Une vérification est alors effectuée par confronta-
tion des prédictions du modèle avec les observations expérimentales, afin
de valider celui-ci.

3. Etude expérimentale

A partir des résultats globaux présentés dans le chapitre précédent,


notre attention s'est portée plus particulièrement sur les courbes bimo-
dales obtenues pour les températures 1200 et 1300° C (cf figure III.7). En
effet, l'étude de la transition, observée nettement à ces températures,
semblait prometteuse.

Notre étude expérimentale débute par la modélisation du comportement


en fluage lors des essais de flexion. Cette première partie concerne la
production d'abaques qui nous servirons à confronter la modélisation aux
résultats expérimentaux.
118 Chapitre IV

Ensuite, nous décrirons dans une seconde partie, la mesure expérimen-


tale du plan neutre et les résultats ainsi obtenus.

Enfin, la pertinence de la modélisation sera discutée dans une der-


nière partie, dans laquelle les résultats de la deconvolution seront
rassemblés.

a. Fondements théoriques de la modélisation

Notre approche phénoménologique repose sur une analyse effectuée par


l'équipe de WIEDERHORN et CHUANG au NTIS à Gaithersburg (WIEDERHORN et al.,
1988 ; CHUANG et WIEDERHORN, 1988) sur un matériau composite Si-SiC dont
p
les particules de carbure de silicium avaient une taille moyenne de 2 à 5
um et la fraction volumique de silicium de 0,33. Reprenons les principaux
points de leur approche qui sera la nôtre :

• un comportement asymétrique : pour obtenir une vitesse de fluage


donnée, il faut approximativement exercer une contrainte en com-
pression 10 fois supérieure à celle nécessaire en traction,
• un comportement bimodal en fluage dû à l'existence de la formation
d'un endommagement à partir d'un certain seuil de contrainte, phéno-
mène qui se traduit par une augmentation de l'exposant des con-
traintes à partir de ce seuil.

Dans le cadre de notre étude les lois constitutives du fluage peuvent


être écrites en séparant les deux comportements fondamentaux :

en traction n
e = e avec <r < <r (IV.13)
cr
l °J
f * )N

e = e avec <r > c (IV.14)


<r
l °J

en compression
e = Xe V <r (IV. 15)
Déconvolution 119
En prenant comme base l'hypothèse de BERNOUILLI, i.e. la distribution
des vitesses de fluage est linéaire selon l'épaisseur, W, de l'échantillon,
cette hypothèse est vérifiée expérimentalement (cf.infra), ainsi que par de
nombreux auteurs (par exemple CHUANG et al., 1987). De plus la déflexion
totale de la barre est supposée être petite comparativement à l'épaisseur,
W, de la barre. Cette analyse conduit à un déplacement du plan neutre
(défini par e=0) qui est représenté sur la figure IV.1.

W/2
<- e = 0

W/2

Fig. IV. 1 : Déplacement du plan neutre lors d'un essai de flexion sur une
éprouvette d'épaisseur W.

A l'état stationnaire, trois zones se sont développées selon


l'épaisseur, W, de l'échantillon:

- une zone en compression de taille xW,


- une zone en traction de taille (t+z)W, comprenant :
. une zone intacte tW,
. une zone endommagée zW.

La signification de ces différentes variables introduites est illustrée sur


la figure IV.2 suivant:
B

xW

W tW

zW

Fig. IV. 2 : Coupe transversale au centre d'une éprouvette de flexion avec


mise en évidence des zones en compression (xW) et en traction intacte
(tW) ou endommagée (zW).
120 Chapitre IV

La distribution des vitesses de déformation est alors linéaire ; la


valeur e représente le seuil à partir duquel, 1'endommagement intervient.
o
La distribution des contraintes peut aussi être représentée, o* correspon-
o
dant alors à e .
o

Les plans neutres des contraintes et des déformations coïncident dans


le cas du fluage stationnaire (cf.§ suivant). Le plan neutre est alors bien
défini et situé à une distance xW de la surface qui est en compression. Les
variables x, t, z, étant sans dimension .nous avons l'égalité suivante:

x + t + z = 1 (IV.16)

Les données fondamentales de l'essai de flexion sont la courbure (et sa


dérivée temporelle) K et le moment de flexion M. . Dans le cadre de notre
étude nous avons préféré manipuler les variables réduites associées, k et
2
M. La coordonnée, y, représentant un axe perpendiculaire à la surface en
3
traction, les équations de transformation s'écrivent :
ê (y)
k = (IV.17)
e
y .

M
M =
(T B W (IV.18)
o
6M
avec <r =
a
BW2
La distribution des contraintes suivant l'axe y s'exprime en coordonnées
réduites, o* = <r/<r ,par:
y n
V y € [0,x] , <r(y) = (IV.19)
At
\1
y n
V y € [0,t] , <r(y) = (IV.20)
t

Pour des raisons pratiques, les variables seront introduites en coordonnées


réduites. Ceci permet de s'affranchir des différentes tailles d'échantillons
et d'effectuer des calculs numériques plus fiables du fait que toutes les
variables sont dans l'intervalle [0,1].
3
Il faut noter que le passage en coordonnées réduites doit se faire en
gardant à l'esprit le volume minimum de matière en dessous duquel le test
perd son sens.
Déconvolution 121

1
y
N
V y e [t,l] , <r(y) = (IV.21)

avec : n < N.

La distribution des contraintes dans le matériau est alors déterminée


par les constantes X, n, N, qui sont des caractéristiques intrinsèques du
matériau. Le triplet (x,t,z) apparaît alors comme une inconnue dans les
équations décrivant cette distribution.

* Dans le cas où de fortes valeurs de moments sont appliquées, l'équa-


tion d'équilibre des forces permet d'obtenir une équation algébrique 6
(après intégration) où intervient la localisation du plan neutre, x :

8(x) = A (l-x)p - A xq - A = 0 (IV.22)


1 2 3

avec: p = 1 + 1/N ,
q = 1 + 1/n ,
A = t(q"p)/pr ,
1
. - l/n .
A = X /q,
A = (q-p)tq/pq

Pour t > 0 donné, montrons qu'il existe une unique solution, x, de 8(x)=0:

0 est une fonction polynomiale, continue et strictement monotone sur


[0,1] :

en effet, V x € [0,1] ,^< 0,
ox
de plus, 8(0) > 0 et 8(1) < 1.
Le théorème de la valeur intermédiaire nous assure l'unicité de la
solution de l'équation 8(x) = 0.
p et q n'étant pas entier, il n'existe pas de solution analytique de cette
équation. Pour résoudre celle-ci, nous avons utilisé la méthode de NEWTON-
RAPHSON programmée en PASCAL sur un micro-ordinateur.

La donnée du couple (x,t) permet alors de calculer le moment M :


122 Chapitre IV
M
M =
<r B W 2
o

2N+1 N
2n+l
n _1 N (1-x) n N
M =
2n+l At 2N+1 2n+l 2N+1

* Dans le cas où de faibles valeurs de moment sont appliquées, l'en-


dommagement intervient peu, et la localisation du plan neutre s'exprime
alors suivant une relation identique à celle obtenue par COHRT et al.
(1984 b).

x = (IV.23)
i
r i ïn+l
1 + X

Sur la figure IV. 3 nous présentons les variations de x en fonction de


l'exposant des contraintes, n, pour différentes valeurs de X.

10 9
n
Fig. IV.3: Abaque permettant de relier la localisation du plan neutre, x, à
l'exposant des contraintes, n, pour différentes valeurs du quotient X.

La relation entre le moment réduit, M, et la dérivée temporelle de la


courbure k s'exprime simplement par:

k = CM11 (IV.24)
Déconvolution 123

avec
2n+l n
n
C - X (IV.25)
2n+l 2n+l

+ \ (1-x)

Quelque soit le cas de figure, nous sommes donc à présent en mesure


d'effectuer le changement de coordonnées suivant:

e k
(T M

Les abaques de la figure IV.4 peuvent alors être obtenues. Le processus de


réalisation des abaques est illustré par l'ordinogramme représenté sur la
figure IV. 5. Ces abaques de la variation de k en fonction de M (i.e. e en
fonction de <r) représentent le fluage secondaire du matériau en tenant
compte du modèle asymétrique en traction et en compression.

Fig. IV.4 : Abaque permettant de relier la vitesse de courbure normalisée,


k, au moment appliqué normalisé, M, pour différentes valeurs du rap-
port, A (n=l,4 ; N=3,2).

En introduisant dans les équations (IV.19) (IV.20) (IV.21) la valeur


seuil du moment M

k c (IV.26)
• t • K)°

à partir de laquelle la zone en traction contient une zone endommagée, nous


obtenons :
124 Chapitre IV

k -» M

0(x)=O, NEWTON-RAFHSON

<

CD x.t.z
k,M

Fig. IV.5 : Ordinogramme simplifié pour la détermination des abaques k-M.

' f \ 1 ) -1
n n+1
M - .. 1 + X (IV.27)
° 2n+l . i
k i

Les évolutions de cette valeur seuil en fonction du coefficient des


contraintes , n, et de X sont représentées sur la figure IV.6. Nous pouvons
remarquer que M < < — et que cette valeur ne dépend que de n et X.
° 2n+l 2
Déconvolution 125

Fig. IV.6 : Abaque permettant de relier la valeur seuil du moment appliqué


normalisé, M , à la valeur de l'exposant des contraintes, n, pour dif-
o
férentes valeurs du rapport A.

b. Détermination expérimentale de la localisation du plan neutre

La méthodologie de marquage employée par CHEN et CHUANG (1987), que


nous avons rappelée dans le paragraphe précédent, ne pouvait pas s'appli-
quer à notre cas. En effet, ces auteurs réalisaient un marquage par inden-
tation ; cette méthode, appliquée à notre matériau, aurait eu tendance à
créer un endommagement néfaste en surface. Nous avons donc développé une
méthode de marquage lithographique, sur le même principe d'un repérage en
surface de l'échantillon.

a. Réalisation du marquage lithographique

La méthode développée est voisine de celle utilisée pour l'étude de la


diffusion superficielle (ABBE, 1987). Un dépôt de nitrure d'aluminium est
réalisé sur la surface polie de la tranche de l'échantillon, au travers
d'un masque. Celui-ci a pour but de créer, pendant le dépôt, deux lignes
repères (Fig. IV.7). Les dépôts ont été réalisés au laboratoire par pulvé-
risation cathodique réactive d'une cible d'aluminium dans une atmosphère
d'azote pur. L'appareillage employé était le même que celui utilisé pour
126 Chapitre IV

les travaux de thèse de Régis CARIN (1989).4 Les conditions de dépôt


étaient les suivantes: une pression d'azote de 1,3 Pa, une distance de
35 mm entre la cible d'aluminium et l'échantillon, une tension de 2kV. Ces
conditions étant réunies, l'épaisseur du dépôt obtenu est de l'ordre du
micromètre.

a) b)
Fig. IV. 7 : Schéma de principe du marquage avant (a) et après déformation
(b) ; macrographie d'une éprouvette SiC-SiC, marquée lithographique-
ment par 2 barres d'AlN.

ß. Mesure de la localisation du plan neutre et calcul du rapport A

La mesure de la localisation du plan neutre est effectuée par compa-


raison de deux clichés photographiques. Le premier cliché correspond à
l'échantillon avant fluage et le second après fluage. Le report de la dis-
tance L initiale permet de déterminer la coordonnée xW du plan neutre (xW
o

étant la distance du plan neutre à la face en compression). Afin d'utiliser


la relation (IV.23) pour le calcul du rapport X, nous avons choisi la con-
trainte appliquée, <r , telle que <r < 6 <r M ; soit par exemple à 13008C une
a a o o

contrainte appliquée <r égale à 50 MPa. Les valeurs obtenues sont rassem-
blées dans le tableau IV. 1 :

4
A ce sujet, nous tenons à remercier Mr CARIN et Mme M.N. METZNER pour
leur aide.
f~*l

Déconvolution 127

T n N A
"'TF^
K

1573 1.4 3.2 0.14


1473 1.4 5.7 0.14

Tableau IV. 1 : Valeurs des paramètres n, N et A pour des essais de fluage


réalisés à 1573 et 1473 K.

4. Résultats et validation du modèle

Dans ce paragraphe, il convient maintenant d'une part de présenter la


comparaison entre la modélisation et les résultats expérimentaux, et
d'autre part de conclure sur la pertinence de cette modélisation.

A partir des valeurs de n et N, mesurées à partir des pentes des


courbes e =f (cr ) (Fig. III. 7), et de la valeur du rapport, A, déterminée
pu s a
par la mesure de la localisation du plan neutre, nous pouvons présenter
l'allure théorique de la fonction k=f(M) pour ces valeurs particulières
(Fig. IV.8). D'un autre coté, la valeur seuil de M étant calculée par les
o
données de n et A, la valeur de cr est alors obtenue par la détermination
r ^ o
de e et de o- sur le graphique présentant les mesures expérimentales.
o ao
C^)
Enfin, les valeurs de la vitesse de déformation et de la contrainte
obtenues expérimentalement sont placées grâce à la connaissance de e et o*
o o
dans l'espace k-M à l'aide des équations de passage (IV.17) (IV.18) éta-
blies précédemment.

Pour chacunes de ces températures nous observons une bonne corrélation


entre les mesures expérimentales (points des figures IV.8) et le modèle
(courbes des figures IV.8). Les valeurs du coefficient de corrélation sont
respectivement 0.96 pour la température de 1573K et de 0.98 pour la tempé-
rature de 1473K. Les différentes valeurs sont rassemblées dans le tableau
IV.2. Les valeurs des coefficients de corrélation permettent de conclure à
la validité de la modélisation.
128 Chapitre IV

<7Q (MPa)
21 100
100.0 100.0 I I I I I I I—I

1E-7
T=1573K
| t _ f WF\

10.0 - 10.0
1E-8

IL—o co

1.0 - 1.0 r
: 1E-9

1E-9

0.1 0.1
0.1 1.0 0.1 1.0
M M ppp-.

Fig. IV.8 : Vitesse de courbure normalisée, k, en fonction du moment appli-


qué normalisé, M, pour une température de 1473K et 1573K. Les courbes
tracées correspondent au modèle et les points aux# résultats expérimen-
taux. Les correspondances d'échelles de <r et e différent pour les
PPT^

deux températures du fait des valeurs différentes de e et <r .


o o

T n N A • r
e o
o
K -1 MPa
s
1573 1.4 3.2 0.14 4.5 10' 9 36 0.96
1473 1.4 5.6 0.14 2.8 10' 9 50 0.98

Tableau IV.2 : Valeurs utilisées pour la deconvolution d'essais de flexion P"7T!j

trois points sur des éprouvettes SiC-SiC testées à 1473K et 1573K : n et


N étant les exposants de la contrainte, avec N>n ; A, le rapport des
vitesses de déformation en compression et en traction ; e : la vitesse
de déformation pour la contrainte seuil <r le coefficient de cor-
0
relation.
f^T)

II apparaît intéressant dans un second temps de valider ce modèle à


l'échelle microscopique. fsrçTF)
Déconvolution 129

En fonction de la valeur du moment de flexion M appliqué, nous


obtenons une localisation différente du plan neutre et de la zone d'endom-
magement. La modélisation permet de délimiter cette zone sur l'échantillon.
La comparaison de la zone d'endommagement réelle avec celle prédite par le
modèle est donc possible. En effet, si la localisation d u plan neutre ne
peut être mise en évidence que par l'utilisation d'une méthode particu-
lière, en revanche la zone d'endommagement doit apparaître clairement lors
d'observations en m i c r o s c o p i c

L'évolution de la situation du plan neutre, x, et de la zone d'endom-


magement, z, en fonction du moment sont reportées sur les figures IV.9. A
partir de ces abaques la délimitation de la zone endommagée peut être réa-

1.0
N T=1573K
~ 0.8
X
\
0.6 •

0.4 •

"s.
0.2
; — i 1 1__ i

0.1 0.3 0.5 0.7 0.9

Fig. IV.9 : Variation de la localisation du plan neutre, x, de la taille de


la zone en traction non endommagée, t, et endommagée, z, exprimées en
coordonnées réduites, en fonction du moment appliqué normalisé,M, pour
une température de 1473K et 1573K.

lisée sur le barreau. En prenant comme première approximation une distribu-


tion linéaire du moment de flexion entre le couteau central et l'appui, il
est possible de représenter la zone endommagée prédite par le modèle (Fig.
IV.10). Celle-ci peut être confrontée aux observations en microscopie élec-
tronique à balayage de la même zone de l'échantillon. Il ressort de ces
observations un désaccord flagrant. Toutefois ce désaccord doit être imputé
essentiellemnt à la morphologie particulière du matériau: l'observation en
surface de 1'endommagement ne peut que très difficilement rendre compte de
130 Chapitre IV

1'endommagement en volume. De plus, l'observation est effectuée sur des


échantillons qui ne sont plus sous contrainte et par conséquent certaines
microfissures ont pu se refermer.

Fig. IV.10 : Schéma représentant les différentes zones de compression et de


traction comprenant la zone endommagée sur une demie éprouvette
(n=l,4 ; N=3,2 ; A=0,14 ; a =2<r ).

CONCLUSION

La modélisation introduite semble satisfaisante. En outre, les valeurs


de contrainte seuil , <r , peuvent être comparée (cf tableau IV.2) avec les
o
valeurs de contraintes d'amorçage de la microfissuration matricielle mesu-
rées lors d'essai de traction (CHOURY, 1989) à haute température (Tableau
IV.3). La signification de cette contrainte seuil est d'ailleurs
relativement proche de celle introduite dans notre modèle.
t
T (T
O O
K MPa MPa

1573 36 ~ 40

1473 50 ~ 60

Tableau IV.3 : Comparaison des valeurs de contrainte seuil, c , à celles de


o
contrainte d'amorçage de la microfissuration matricielle en trac-
tion, o*1, obtenues par CHOURY (1989) pour des températures de 1573K
o
et 1473K.
Si ces valeurs semblent corroborer la modélisation proposée, leur nombre
est toutefois insuffisant pour confirmer l'existence d'une quelconque rela-
tion entre ces deux quantités.
Déconvolution 131

Cette déconvolution permet donc d'atteindre à partir d'essais de


flexion des informations en traction et en compression : nous avons
représenté sur la figure IV.11 les comportements de fluage en traction,
compression et flexion, à partir des résultats d'essais de flexion 3 points
à 1473K et 1573K (ABBÉ et CHERMANT, 1989b,1990c).

i 1E-7

1E-8

1E-9 1E-9

200
a (MPa) a (MPo)
Fig. IV. 11 : Variation de la vitesse de déformation, e, en fonction de la
contrainte appliquée, <r , en traction (T), compression (C) et flexion
3 points (F), pour des échantillons de SiC-SiC 2D testés à 1473K et
1573K.

De plus, cette modélisation permet de confirmer la relativement faible


influence, observée expérimentalement, de la méthode des incréments de con-
trainte sur les résultats. D'après les figures IV.9, on remarque que la
taille de la zone endommagée correspond essentiellement à un niveau de con-
trainte particulier.

Le seuil d'endommagement ainsi que la modélisation sont introduits


dans l'hypothèse de l'existence d'un état stationnaire. La question de
l'existence de cet état stationnaire se pose alors en terme d'analyse du
stade transitoire qui le précède. Après avoir vérifié la validité du modèle
dans l'hypothèse implicite de l'existence de cet état stationnaire, voyons
à présent comment justifier qu'un état stationnaire est bien atteint lors
de nos mesures expérimentales.
132 Chapitre IV

II. ETÜDE DE L'ETAT TRANSITOIRE

Notre but, dans ce paragraphe, est double : à partir de données de


fluage obtenues précédemment, nous simulons le phénomène transitoire
et plus particulièrement le phénomène de relaxation des contraintes
qui lui est associé. Puis nous discutons de l'occurrence de l'état
quasi-stationnaire à l'aide de ces simulations.

1. Problématique

Les essais de fluage sur les matériaux céramiques sont souvent réali-
sés en flexion. Au cours de ce type d'essai, un premier stade peut être
isolé sur les courbes expérimentales représentant la déformation en fonc-
tion du temps. Cette première étape correspond à un effet transitoire
débouchant sur le stade pseudo-stationnaire, pour lequel nous discuterons
les conditions de validité (cf.infra).

En outre, si la déconvolution des essais de flexion en fluage peut


être réalisée, comme nous venons de le voir dans le paragraphe précédent,
dans de nombreux cas l'obtention de l'état quasi-stationnaire demande des
semaines (si ce n'est des mois!), soit encore que cet état n'est jamais
atteint suite à une rupture prématurée de l'échantillon.

La partie transitoire observée est décrite unanimement dans la litté-


rature comme correspondant à une évolution de la répartition des con-
traintes au cours du temps, essentiellement due à l'épuisement de l'énergie
emmagasinée instantanément lors de la mise en charge de l'éprouvette.

Si ces essais sont toutefois les plus faciles à mettre en oeuvre tant
du point de vue de la préparation d'échantillons que de la procédure
d'essais, ils offrent par contre une répartition inhomogène des contraintes
dans l'échantillon, qui doit être prise en compte.

Notre but dans cette partie est de modéliser et de simuler cette évo-
lution de la répartition des contraintes dans la phase transitoire. Cette

5
Il en est de même pour les essais de traction et de compression.
Transitoire 133

analyse permettra de discuter du pseudo état stationnaire atteint lors des


essais.

2. Approche rhéologique

Pour réaliser notre modélisation, nous utilisons une approche


originale menée par COHRT et al. (1984b), effectuée dans le cadre de la
Mécanique des Milieux Continus. L'hypothèse de départ reste la relation
empirique de NORTON (équation III.1) :
n
c• = A» (T

avec: A et n des constantes dépendant du matériau et de la température.

Les valeurs de l'exposant des contraintes, n, sont prédites par des


modèles micromécaniques de fluage . De la valeur de n , dépend la répartion
des contraintes à l'intérieur du barreau de flexion. Celle-ci peut être
linéaire (n = 1) ou non linéaire (n > 1). Dans le cas du fluage station-
naire, TIMOSCHENKO (1947) a établi les équations décrivant la répartion des
contraintes dans l'état stationnaire d'un barreau d'épaisseur W en fonction
de la distance à l'axe neutre, y :

l/n
-(y) - T....
max -%£-[&}
3n (IV. 28)

Cette relation est valable tant que le comportement en traction est le


même que celui en compression et son domaine de validité est restreint au
stade stationnaire.

Afin de calculer la dépendance en temps de la redistribution des con-


traintes au cours d'un essai de fluage à charge constante, nous utiliserons
une approche rhéologique dont nous donnerons les grandes lignes dans le
paragraphe suivant.

6
A ce propos, il faut noter que l'interprétation directe à partir de la
valeur de n doit être nuancée du fait qu'il n'existe pas de relation
biunivoque entre les valeurs de n et les différents mécanismes responsables
de la déformation observée.
134 Chapitre IV

a. Fondement théorique

Dans un premier temps nous allons décrire brièvement l'analyse origi-


nale des phénomènes de relaxation des contraintes au cours du temps dans
une eprouvette soumise à un essai de flexion, analyse initiée par COHRT et
al. (1984b). Dans un second temps, nous exposerons plus en détail l'exten-
sion de cette analyse, effectuée par CHUANG et WIEDERHORN (1988) dont nous
utiliserons le principe.

Cette approche est basée sur l'hypothèse de BERNOUILLI : les sections


planes au droit de 1'eprouvette restent planes pendant la déformation de
celle-ci. Le barreau est alors divisé en un nombre infini de plans paral-
lèles selon le grand axe de 1'eprouvette. Chaque plan étant représenté par
le modèle rhéologique de MAXWELL :

<r f V V W - $(<r) -» <r

la relaxation d e s contraintes der peut être d é c r i t e comme la c o n t r i b u t i o n d e


deux composantes :
da da-
da- = — dt + — de (IV.29)
Ôt e de t

Le premier terme représente la variation de contrainte due à la rela-


xation à déformation constante, tandis que le second terme décrit la varia-
tion instantanée de contrainte issue de la variation linéaire élastique de
déformation.

La déformation de 1'eprouvette en flexion peut se décomposer fictive-


ment en deux étapes :

• sous une condition initiale de déformation fixée, la valeur de la


déformation demeurant constante, la valeur de la contrainte dans
chaque fibre est modifiée au cours du temps infinitésimal dt en
regard de la relaxation de contrainte ; cette variation de con-
trainte rend caduc l'équilibre des forces,
Transitoire 135
nnn

• ceci conduit à la seconde étape qui consiste, à la fin du temps


infinitésimal dt, en une déformation élastique instantanée ramenant
les conditions d'équilibre.
nm

La valeur de la contrainte à chaque instant, t, peut être obtenue par


simple intégration (y étant la direction de l'application de la force) :
t
•Cy.t) -J d<r
o

Voyons maintenant plus en détail le calcul de l'évolution des con-


traintes au cours du temps.

b. Principe de la méthode

Dans le cas particulier de notre étude la fonction $ du modèle rhéolo-


gique n'est autre que la fonction fluage introduite pour la déconvolution
(équations IV.13, IV.14 et IV.15). Pour tenir compte de l'aspect bimodal en
traction de cette fonction, nous nous proposons de baser notre analyse du
stade transitoire d'après les travaux menés par CHUANG et al. (1988).

La variable principale étant la contrainte, il apparaît nécessaire de


distinguer la contrainte initiale appliquée sur la face en traction, <r , de
a
sa variation en fonction du temps, <r :

<r = ±JL (IV. 30)


a
B W2
avec : M, le moment de flexion.
soit en coordonnées réduites : <r = <r/(r .
a
En posant Q = <r / <r , la fontion 9 s'écrit :
a o

e Q <r
1« o
traction • _n n
X
e Q <r
• o _n n
compression e Q (T
o

avec : n, l'exposant des contraintes,


<r , la contrainte initiale appliquée,
136 Chapitre IV

X, le rapport traction/compression,
e , la valeur seuil de la vitesse de déformation,
o
E, le module élastique,
Q, le rapport de la contrainte initiale o* et de la contrainte
a
<T .
o

Le premier terme de la variation infinitésimale de la contrainte s'exprime


à l'aide des lois de fluage sous la forme:

<r , V y ! [0,xJ

- <rn , V y ! [x^x^ xtl (IV.31)


Ao* = A

QN~" r " , V y ! [X<r+ x t , l ]

avec : t = t/t

t= (IV.32)
o E Xe Q
o

t, représente la variable temps,


t , correspond à une constante temporelle dépendant des condi-
o

tions d'essai et du matériau ; cette valeur nous permettra


d'évaluer la durée du domaine transitoire.

En ce qui concerne le second terme de la variation infinitésimale de,


il est possible d'exprimer la valeur de celui-ci à partir de l'augmentation
de la contrainte élastique Ac sur la face en traction du barreau testé en
e
flexion.

Soit x la valeur des ordonnées y, pour laquelle e=0 : le second terme


s'exprime alors par:
de
de = A<r , 0 < y <1 (IV.33)
de t 1 - x

L'équation précédente possède alors deux inconnues x , et Ao* . Afin de


résoudre en x , et A<r , nous écrivons l'équilibre des forces et des
moments dans le barreau.
i "•:•'"(

Transitoire 137

Posons:

/. x. X + X . î
<r t N-n
f « - f dy + r c dy + - <r dy (IV. 34)
X + X
•~^ (T t
x + x
<r t N-n
m = - <r y dy + r <r y dy + - <r y dy (IV. 35)
X + X
<r t

L'équilibre d e s f o r c e s et d e s m o m e n t s d a n s l'éprouvette s'exprime sous


la f o r m e suivante:

». 1
y - x.
â<r d y + f t d t = 0
1 - x e o
o e
„ 1
y - x.
A<r y d y + m t d t = 0
J J
1 - x e o
0 €

d'où après intégration

( 1 - 2x
Ac + f t dt = 0
2 (1-x ) e o
e
2 - 3x
A<r + m t dt = 0
e
6 (1-x.)

Ce système d e deux é q u a t i o n s à d e u x inconnues admet comme s o l u t i o n :

= 3m - 2f
X
e ~ 6m - 3f
(IV.36)
àcr = (6m - 2f ) t dt
e o

Enfin, la relaxation des contraintes s'exprime alors en coordonnées


réduites par:
138 Chapitre IV

<r , V y € [0,x J
A
y — X
- crn , V y € [ x ^ x ^ xfc]
d<r(y) _ j7 e (6m - 2f) +
dt 1 - X
- Q N "" g" . V y € [ x + x ,1]
r <T t
(IV.37)

Le principe du calcul de la relaxation des contraintes ayant été décrit, il


ne reste plus qu'à montrer de quelle manière nous l'avons mis en oeuvre.

3. Etude expérimentale

Un ordinogramme simplifié du processus de simulation est représenté


sur la figure IV.12. L'évolution des contraintes en fonction du temps a été
calculé sur ordinateur en programmant l'algorithme en langage PASCAL. Les
valeurs fondamentales introduites sont :

- les différents exposants des contraintes n,N,


- le quotient Q de la contrainte appliquée initiale <r , et de la con-
a
trainte seuil <r ,
o
- le rapport traction /compression A,
- l'intervalle de temps At.

Les variations de la localisation du plan neutre des déformations, x , et


des contraintes, x , sont alors déterminées.

La condition initiale imposée pour la répartition des contraintes


s'exprime sous la forme d'une distribution linéaire, soit en coordonnées
réduites:

V y € [0,1], <r(y,t=0) = 2y - 1 (IV.38)

Cette distribution est directement issue de la solution élastique, la


réponse du matériau étant supposée élastique à t=0.

Pour chaque incrément de temps, l'évolution de la distribution des


contraintes est calculée, et concomitamment la détermination de x est réa-
lisée à partir de la distribution des contraintes. En effet, cette quantité
Transitoire 139

/ \
I Début I

\ ût.n.N.X.Q \

t=0

<r(y,0)=2y-l Osysl

localisation de x

ra.f

évaluation de x ,û<r

o-(y, t+At)=o-(y, t)+û<r

CD

Fig. IV.12 : Ordinogramme simplifié du processus de simulation de la rela-


xation des contraintes.

intervient comme borne dans le calcul des intégrales IV.34 et IV.35. Enfin,
une fois l'évaluation de la quantité x effectuée, la nouvelle distribution
des contraintes est calculée à l'aide de l'expression (IV. 37) de Aa soit:

(r(y, t+At) = <r(y, t) + A<r(y) (IV.39)


140 Chapitre IV

4. Résultats et discussion

a. Résultats de la simulation

Dans un premier temps, nous avons contrôlé le bon fonctionnement du


programme pour des cas simples (n=l, n>l, N=0, A>1), dont les solutions
analytiques sont connues. Notamment le cas linéaire (n=l) semblait une
étape plus redoutable qu'il n'y paraissait à franchir. En effet,pour cette
valeur de l'exposant des contraintes, n, la distribution des contraintes
doit être immuable. Toute erreur d'arrondi ou de mauvais conditionnement du
système d'équations aurait entraîné une divergence du phénomène qui se
serait avérée rédhibitoire.

Puis dans un second temps, nous avons comparé les distributions des
contraintes produites par notre programme avec celles de la littérature :
plus particulièrement dans les cas n=2, N=0, A=0,01, correspondant à
l'étude de COHRT et al. (1984b), et n=4, N=10, A=0,2 correspondant à
l'étude de CHUANG et al. (1987). Ces différentes distributions sont
représentées sur la figure IV.13. Une première remarque peut être formulée
à partir de l'allure de ces différentes distributions: la valeur du rapport
A influence d'une manière cruciale les valeurs de contraintes extrêmes
ainsi que la durée du stade transitoire.

. -K-.
I.U
1
0.S

0.6 • ^w 1
i' X1
0.4

0.2
— n-1.4 N-3.2 1-0.14
n-2 N-0 X-1
V
nn
-3
•- n-2

-2
N-0 X-0.01

-1
» Y,
a/af

Fig. IV. 13 : Allure de la redistribution des contraintes dans une éprou-


vette de flexion pour différentes valeurs de n, N, A, et pour une même
contrainte initiale ainsi qu'un temps identique, y étant la hauteur de
l'éprouvette en coordonnées réduites.
Transitoire 141

En effet, au cours du temps, le plan neutre des contraintes repéré par


x , ainsi que le plan neutre des déformations repéré par x , convergent
vers un emplacement unique x . Une condition d'arrêt du stade transitoire
peut se formuler ainsi:

« > ° • I Xn> " X. I < *


Si la valeur initiale de la localisation du plan neutre des contraintes, x
est 0,5 , en revanche la valeur de la localisation du plan neutre des
déformations x est différente. Ceci peut être attribué en partie au fait
que le modèle exclut la composante élastique de déformation à t=0.

La valeur de la variable, x , en fonction du temps apparaît comme une


quantité intéressante puisque celle-ci est mesurable expérimentalement.

b. Comparaison avec les données expérimentales

Dans un premier temps, il convient d'évaluer la quantité t (équation


o
IV.32) pour les deux températures 1473K et 1573K, afin de pouvoir comparer
la durée de l'état transitoire observée expérimentalement avec celle pré-
dite par le modèle. Le calcul de la quantité t nécessite la connaissance
o
de la valeur du module élastique de 1*eprouvette dans la configuration
d'essai. Cette valeur nous étant inaccessible, nous avons choisi de prendre
comme valeur du module élastique celle obtenue par la SEP, soit 200 GPa.
L'approximation estimée à environ 20%, conduit à une erreur de 5 heures sur
la durée du stade transitoire, ce qui reste acceptable.
La fin du stade transitoire est observée dès 0,3t . En utilisant la
o
relation IV.32, nous obtenons les durées t du stade primaire rassemblées
p
dans le tableau IV.4.

T n N A to t
K h p
h

1573 1.4 3.2 0.14 67 ~ 20


1473 1.4 5.7 0.14 150 ~ 45

Tableau IV. 4 Durées du stade primaire, t , en fonction des paramètres


p
de fluage, pour une valeur du quotient Q de 1,5 (Q=<r /<r ).
a o
142 Chapitre IV

Nous pouvons visualiser l'influence de Q sur t en l'exprimant en


fonction du quotient de la contrainte appliquée initiale, <r , et de la con-
trainte seuil, <r . L'allure de la variation de la durée t en fonction de Q
o p
est décrite sur la figure IV.14. pour la température de 1573K.

Fig IV.14 : Evolution de la durée théorique du stade primaire, t , en fonc-


p
tion du rapport Q de la contrainte appliquée initiale <r et de la con-
a
trainte seuil <r , pour une température de 1573K.
o

Ces résultats sont tout à fait en accord avec les mesures expérimen-
tales pour lesquelles un stade secondaire est obtenu après environ 20
heures. Toutefois, si une bonne corrélation est obtenue entre les valeurs
expérimentales et les valeurs calculées pour le stade primaire dans le cas
où Q>1 , il semble en revanche plus difficile d'établir une telle corréla-
tion dans les cas où Q<1. En effet la présence d'un stade primaire n'est
pas systématiquement observée sur les courbes représentant la déformation
en fonction du temps.

CONCLUSION

Dans cette partie nous avons effectué une simulation de l'étape tran-
sitoire, afin de pouvoir discuter de la validité de nos résultats expéri-
mentaux. Pour ce faire la modélisation introduite au paragraphe précédent a
Mécanique des milieux continus endommagés 143

été adaptée. Les lois de fluage utilisées sont donc parfaitement adéquates
pour décrire cette première étape. La durée nécessaire expérimentalement
pour atteindre ce stade stationnaire est correctement prédite par le
modèle.

Néanmoins, si cette approche décrit la mise en place d'un endommage-


ment, elle ne contient pas de loi d'évolution de ce dernier et par consé-
quent elle ne peut être adaptée directement à une prédiction de la durée de
vie des matériaux.

Dans le paragraphe suivant nous nous proposons donc de tester l'appli-


cabilité d'une méthode d'investigation indirecte de 1'endommagement, basée
sur la mécanique des milieux continus endommagés, dans le but de décrire
son apparition et de quantifier son développement.

III. MECANIQUE DES MILIEUX CONTINUS ENDOMMAGES

Les deux paragraphes précédents nous ont permis d'une part de valider
une modélisation du comportement du matériau sous contrainte et
d'autre part de justifier de l'occurrence du stade stationnaire lors
de nos mesures. Toutefois ces modélisations ne permettent pas de pré-
dire une duré de vie du matériau sous contrainte. Les concepts de la
Mécanique des Milieux Continus Endommagés vont permettre de préciser
le processus d'endommagement, puis la durée de vie.

1. Problématique

Etre capable de prévoir la durée de vie de structures soumises à des


sollicitations thermomécaniques sévères (par exemple des parties chaudes de
turbines à gaz) a toujours été une préoccupation présente, aussi bien dans
l'esprit des constructeurs que dans celui des chercheurs. Pour cette raison
les bureaux d'études ont souvent recherché dans un premier temps une
relation leur permettant, a priori, de prédire la rupture sans forcément
utiliser un formalisme phénoménologique. Cette approche conduit à utiliser
des paramètres qui sont plutôt des repères de la fraction de durée de vie
que des paramètres d'endommagement: rapport du nombre de cycles actuel au
nombre de cycles conduisant à la rupture, N/N , ou encore rapport du temps
actuel au temps à rupture, t/t . Cette façon de procéder est généralement
144 Chapitre IV

valable pour une structure donnée, tandis que pour des structures complexes
une meilleure modélisation s'affirme nécessaire. Celle-ci nécessite pour ce
faire une meilleure connaissance des processus d'endommagement par fluage
(ou bien par fatigue) qui aboutissent à l'amorçage d'une fissure
macroscopique.

Deux approches complémentaires sont alors possibles pour réaliser


cette modélisation: celle du céramurgiste qui s'intéresse à la physico-
chimie du phénomène, à sa compréhension et à son explication à l'échelle
locale ; ou bien celle du mécanicien qui recherche une formulation globale
à l'aide des méthodes de calcul issues de la Mécanique des Milieux Continus
(tout en conservant à l'échelle macroscopique les caractéristiques essen-
tielles du phénomène).

Notre approche dans ce paragraphe est similaire à la seconde approche


mentionnée précédemment. Ce type d'approche est en plein essor depuis une
quinzaine d'années, notamment sous le nom de Mécanique des Milieux Continus
Endommagés (MMCE). Par endommagement, il faut comprendre l'étude et la pré-
vision de la détérioration progressive de la cohésion de la matière sous
l'action de sollicitations monotones (ou autres) conduisant à l'apparition
de fissures macroscopiques. L'endommagement peut se décomposer en deux
phases : d'une part une initiation par création de microfissures de nature
surfacique ou de microvides de nature volumique, d'autre part une micro-
propagation de ceux-ci.

2. Aspect phénoménologique de la Mécanique des Milieux Continus Endommagés

La Mécanique des Milieux Continus Endommagés suit le formalisme géné-


ral de la thermomécanique avec variables internes (LEMAITRE et CHABOCHE,
1988) en utilisant deux types d'équations:

- un premier type d'équations introduit une variable interne d'endom-


magement en tant que variable d'état indépendante(KACHANOV, 1958 ;
LECKYE et HAYHURST , 1974) ; la mesure qui lui est associée ne peut
être qu'indirecte et repose sur un concept théorique définissant la
nature de cette variable ; dans la cadre de notre étude en fluage,
nous allons utiliser le concept de contrainte effective initialement
introduit par KACHANOV pour 1'endommagement de fluage,
Mécanique des milieux continus endommagés 145

- le second type d'équations représente la loi d'évolution de l'endom-


magement sous la forme d'une équation différentielle reliant la
vitesse d'évolution du dommage en fonction de variables observables
(par exemple déformations, contraintes et température) et les varia-
bles internes dont 1'endommagement.

Nous réalisons l'application de ce formalisme au cas de l'étude en


fluage, en reprenant l'approche initiée par KACHANOV (1958)et RABOTNOV
(1969) étendue par LECKYE et HAYHURST (1974). A cet effet nous introduirons
de la même manière que ces auteurs, un paramètre d'endommagement D (ou de
continuité : * = 1-D) dont la valeur est comprise entre 0 et 1 (rupture).
La variable D est introduite comme variable interne cachée au sens de la
thermodynamique des processus irréversibles : elle peut être scalaire ou
tensorielle (LEMAITRE, 1990). Ce paramètre caractérise un comportement glo-
bal, réel et macroscopique d'un matériau au cours de sa déformation. Mais
il faut remarquer que la variation de la quantité D peut dépendre de plu-
sieurs processus physico-chimiques qui se développent simultanément au
cours de la déformation. Les contributions de ces processus sont souvent
délicates à séparer expérimentalement (ABBÉ et al. 1989a). Les relations
constitutives deviennent alors pour le premier type d'équations :

ê = f(<r,D) (IV.40)

Pour le second type d'équations, la relation d'évolution dans le temps t de


1'endommagement pendant le processus de fluage sous charge constante se met
sous la forme :

D = g(<r,D) (IV.41)

a. Concept de contrainte effective

KACHANOV (1958) a utilisé le concept d'homogénéisation (bien que 1'en-


dommagement soit non uniforme à l'échelle microscopique, celui-ci est trai-
té comme un milieu continu) pour décrire le comportement à la déformation
du matériau endommagé. La variable interne D caractérisant 1'endommagement
est introduite par le concept de contrainte effective : en traction simple
146 Chapitre IV

le matériau endommagé est caractérisé par une section résistante effective


S < S (S étant la section résistante initiale (Fig. IV.15)).

<r = <r S
S
(T =
F <r S

Fig. IV.15 : Schéma illustrant la signification du concept de contrainte


effective.

KACHANOV introduit le paramètre scalaire d'endommagement D comme la perte


de section résistante :

D = 1 - S / S (IV.42)

L'introduction d'une variable d'endommagement, représentant une densité de


discontinuité de la matière, conduit directement à la notion de contrainte
effective, c'est-à-dire la contrainte rapportée à la section qui résiste
effectivement aux efforts. En considérant D en première approximation comme
7 ~
la teneur surfacique ou volumique de cavités, la contrainte effective , <r,
se définie par la relation suivante :

0" = <r S / S
soit
(IV.43)

<r = 1 - D

La repésentation que nous proposons ici est très simplifiée. En effet la


caractérisâtion de la contrainte effective nécessite la prise en compte des
concentrations des contraintes autour des cavités, microfissures...;le sens
géométrique de la surface S est indubitable, par contre la notion physique
qui lui est associée n'est pas rigoureuse puisque la rupture est un phéno-
mène volumique et non planaire.
Mécanique des milieux continus endommagés 147

La notion de contrainte effective peut alors se résumer comme suit : une


déformation identique est obtenue soit à partir du matériau vierge en impo-
sant une contrainte, <r, effective , soit à partir du matériau endommagé en
imposant une contrainte <r.

b. Loi d'évolution de 1 'endommageaient

La loi d'évolution de 1'endommagement choisie est celle de l'endomma-


gement visco-plastique fragile modélisé par KACHANOV en 1958. Pour identi-
fier 1'endommagement, nous utilisons le couplage entre 1'endommagement et
le comportement (visco-plastique) à la déformation. L'endommagement est
supposé nul ou négligeable en fluage primaire et le fluage secondaire est
décrit par la loi de NORTON. La relation d'endommagement de fluage (équa-
tion IV.41) s'écrit alors :

D = (IV.44)
Ç(l-D)

Ç et r étant des coefficients fonction de la température et du matériau.

3. Mesure de 1'endommagement

La mesure de 1 'endommagement correspond le plus souvent à l'approche


du métallurgiste ou du céramurgiste plutôt qu'à celle du mécanicien. En
effet, mis à part le côté arbitraire de la définition physique de 1'endom-
magement, la déformation d'un matériau du point de vue métallurgique met en
jeu différents mécanismes, parmi lesquels nous pouvons citer l'amorçage, la
croissance et la coalescence de cavités apparues autour de particules de
seconde phase par exemple, mais aussi décohésion interphases (inclusion-
matrice) ... L'endommagement est défini, dans ce cas, comme l'ensemble des
phénomènes liés aux cavités, aux microfissures ..., c'est-à-dire comme la
description de l'évolution de facteurs géométriques ou physiques caracté-
ristiques. Deux méthodes permettent d'appréhender la mesure de
1'endommagement :

- les méthodes directes (essentiellement l'observation),


- les méthodes indirectes (par la mesure d'un paramètre physique).
148 C h a p i t r e IV

a. Méthodes directes

Les méthodes directes, bien que les plus anciennes, ne sont pas obso-
lètes et demeurent les plus classiques. Celles-ci consistent, par des
observations essentiellement métallographiques, à regarder directement les
cavités, fissures ..., à différentes étapes de 1 ' endommagement par l'obser-
vation de la surface polie des éprouvettes d'essai ou par des examens à
coeur (section) de ces mêmes éprouvettes ou bien encore par des observa-
tions de faciès de rupture. Par des outils tels que l'analyse d'images, il
est maintenant possible d'obtenir une description de 1'endommagement non
seulement qualitative, mais également quantitative ( par exemple une granu-
lométrie de la texture de cupules dans des aciers microcristallins
(MICHELLAND, 1990)).

Toutefois, l'image obtenue est issue d'une projection sur un plan ou


d'une intersection d'un plan et d'une structure tridimensionnelle et seul
3
un petit nombre de paramètres mesurables dans ce sous espace de R permet
de décrire une structure tridimensionnelle correctement (De HOFF et RHINES,
1968 ; RHINES, 1985,1986).

La mesure de la surface ou des volumes de cavités ou de microfis-


sures. . . constitue une évaluation expérimentale de 1'endommagement. Mais
outre son caractère incomplet, fastidieux par voie métallographique, et sa
grande difficulté pratique, cette mesure ne permet pas de déduire simple-
ment l'influence de 1'endommagement sur la résistance du matériau. Malgré
tout, cette méthode reste une étape indispensable, permettant de valider
les modèles mécaniques théoriques et leurs fondements physiques, puis-
qu'elle offre une meilleure connaissance de 1 ' endommagement et de
1'influence de la microstructure sur le comportement macroscopique.

b. Méthodes indirectes

Les méthodes indirectes consistent à mesurer l'évolution d'un para-


mètre physique influencé par 1'endommagement. Cette façon de procéder est
qualifiée d'indirecte par le fait qu'on étudie l'évolution au cours de la
déformation d'une propriété physique dont la variation est essentiellement,
Mécanique des milieux continus endommagés 149

mais pas exclusivement, gouvernée par 1'endommagement. Parmi ces méthodes


nous pouvons citer la variation de :

- densité,
- module d'élasticité,
- nombre d'informations obtenues par des méthodes ultra-sonores,
acoustiques,
- résistance électrique...

Toutefois on considère actuellement que dans le cadre des matériaux compo-


sites, il est important de rechercher le défaut individuel . En outre,
l'intégrité d'une structure dépend de l'effet combiné de multiples défauts
(surtout s'ils sont microscopiques) dans un état instable, c'est-à-dire
dans un champ de contraintes. En effet, pour un volume donné de matière, un
ensemble de micro-défauts (endommagement) peut être plus dangereux pour la
vie de la structure qu'un seul macro-défaut. Parmi les méthodes énumérées,
le contrôle non destructif (CND) s'est affirmé comme une méthodologie bien
adaptée, mais qui manque à l'heure actuelle de résolution. Toutes ces
méthodes permettent l'identification d'une zone défectueuse remplie de
micro-défauts dont les interactions, sous sollicitations thermiques, méca-
niques. .., créent un macro-défaut. Il peut alors se produire une percolation
des défauts par instabilité.

4. Interprétation des courbes de fluage rupture

Très peu d'enregistrements de fluage rupture sont à notre disposition


pour mener d'une manière approfondie cette étude. En effet il ne nous était
pas possible, dans la cadre de cette étude, de mener parallèlement une
étude de fluage rupture et de déterminer le domaine de fluage, ainsi que
les mécanismes responsables de la déformation, pour des raisons de disponi-
bilité d'appareillage (la durée cumulée des essais effectués dans le cadre
de cette étude est supérieure à 10.000 heures).

Néanmoins, de par son importance pour la compréhension de la déforma-


tion du matériau, il faut voir dans cet avant dernier paragraphe une tenta-
tive pour comprendre l'évolution de 1'endommagement du matériau dans le
stade tertiaire.
150 Chapitre IV

L'analyse des courbes de fluage rupture se fera donc dans un esprit de


validation du concept présenté par LEMAITRE et CHABOCHE (1988).

a. Mesure indirecte de 1'endommagement

Un paramètre scalaire D, que nous nommerons endommagement, peut être


défini à partir des vitesses de déformation mesurées expérimentalement. En
introduisant le concept de la contrainte effective dans la loi de NORTON,
cette loi peut s'écrire sous la forme suivante :

e = A (IV.45)
s 1-D

L'exposant des contraintes étant connu (il est déterminé dans le stade
secondaire où D«0 ), 1'endommagement D s'obtient à partir du rapport de la
o o
vitesse de déformation dans le stade secondaire e et le stade tertiaire e
s t
en utilisant la relation IV.45 d'où :
i -vl/n
e
(IV.46)
D = 1 -
E
. t,
V J

Le graphe D= f(t/t ) peut être tracé (t représentant le temps à la rup-


r r
ture). La comparaison de la loi d'évolution de D en fonction du temps est
alors possible.

Par intégration entre 0 et D de la relation introduite par KACHANOV


(équation IV.44) avec comme condition initiale D=0 à t=0, on peut exprimer
l'évolution de 1'endommagement sous une forme simple :

1 t 1r+1
D = 1- -r r
(IV.47)

avec r r+1 .0",


Mécanique des milieux continus endommagés 151

b. Interprétations des résultats

Sur la figure IV. 16 nous présentons un exemple d'évolution de l'endom-


magement déduit par l'équation IV.46 en fonction du temps, pour un enregis-
trement de fluage rupture.

Fig. IV.16 : Exemple de la variation de 1'endommagement, D, en fonction du


rapport du temps au temps à la rupture, t/t .

Il apparaît une saturation de cette valeur lorsque l'on se rapproche du


temps à la rupture. Ce phénomène est essentiellement dû à la méthodologie
employée (essais de flexion). La zone endommagée est relativement confinée
et la valeur de 1'endommagement augmente par la multiplication de microfis-
sures et l'accroissement de leur taille, mais aussi parce que la zone où ce
phénomène se produit augmente également. La loi d'évolution (équation
IV. 47) ne peut donc pas être appliquée en toute rigueur. Toutefois, elle
semble correctement rendre compte de l'accroissement de 1'endommagement. En
effet si l'on considère qu'au stade stationnaire 1'endommagement effectif
prend la valeur D , l'équation IV.46 peut être modifiée en tenant compte du
o
fait que D = D lorsque e - e . Les résultats obtenus par cette façon de
o s
procéder sont présentés sur la figure IV.17 et exprimés sous la forme 1-D =
f(l-t/t ) en coordonnées logarithmiques. La pente de régression n'est
r
autre que le rapport l/(r+l). La signification de D est à rapprocher de
o
celle de la zone endommagée zW introduit par la modélisation précédente.
152 Chapitre IV

1-t/tr

Fig. IV. 17. Exemple de corrélation entre 1-D et 1-t/t , D étant l'endomma-
r
gement et t/t le rapport du temps au temps à la rupture.
r

La prise en compte d'un endommagement non nul dans le stade stationnaire


permet une meilleure corrélation entre la modélisation du processus d'en-
dommagement et la mesure de celui-ci. Néanmoins, l'allure des courbes pré-
sentées nous permet d'affirmer qu'une loi unique d'évolution ne rend pas
compte correctement du processus d'endommagement.

IV- DISCUSSION ET SYNTHESE

Nous allons maintenant faire la synthèse générale de ces différentes


approches en l'étayant à partir i) de résultats d'expériences complémentai-
res que nous avons été amenés à réaliser, en particulier sur des composites
unidirectionnels SiC-SiC et bidirectionnels C-SiC, et ii) de données de la
littérature, dont certaines ont été détaillées dans les chapitres I et II.

Le matériau composite faisant l'objet de notre étude possède une forte


anisotropic, imposée par les directions de renforcement. Cette caractéris-
tique particulière entraîne également une anisotropic matricielle typique,
ainsi qu'une porosité dont la morphologie en est induite (cf. Chapitre
III).
Synthèse 153

A ce jour, aucun modèle décrivant la déformation en fluage de ce type


de matériau n'existe, faute peut-être de résultats expérimentaux. Connais-
sant les difficultés de modéliser la déformation des céramiques monolithi-
"^
ques en fluage, i.e. de systèmes homogènes et isotropes comparativement au
type de composites que nous étudions, il semble qu'un effort théorique
considérable, mais nécessaire, soit à entreprendre pour établir précisément
les interactions des constituants du composite. Notre travail tente de
"^ participer à cet effort par la mise en relation des différentes caractéris-
tiques du matériau.

Tout d'abord, nos essais de flexion, améliorés par une technique de


marquage de surface dont l'aspect novateur semble prometteur (CHUANG,
1990), ont permis d'évaluer des comportements intrinsèques du matériau. Une
valeur seuil de contrainte, <r , ainsi qu'un rapport, X, qui caractérise un
O

comportement différent en traction et en compression ont été mis en évi-


dence dans la première partie de ce chapitre. L'ordre de grandeur de ce
"^ rapport est comparable à celui des valeurs obtenues par différents auteurs
(CHUANG et al., 1987 ; FETT et al., 1988) sur des matériaux céramiques. Le
on gradient de densité qui existe inévitablement dans ce type de matériau,
pourrait être à l'origine de cette différence de comportement. Toutefois
cette hypothèse peut être écartée, sachant qu'une valeur plateau des pro-
priétés (notamment en compression) est généralement atteinte dans ce type
de matériau, dès que V (P) < 20% (ROSSIGNOL et al., 1987). En effet, la
faible épaisseur des éprouvettes utilisées limite la porosité interne à des
valeurs très inférieures à 20%.

De plus, le rapport X a été déterminé pour des valeurs de la con-


rm trainte appliquée pour lesquelles 1'endommagement dans la zone en traction
de l'éprouvette peut être négligé. Un comportement du type de celui proposé
_ par VENKATESVARAN et al. (1984), c.a.d. décrivant une diminution du module
élastique en traction due à la création de microfissures dans la zone en
traction, semble donc à écarter pour décrire ce phénomène.

L'explication de la différence de comportement en traction et en com-


1
'"" pression, mise en évidence expérimentalement par le marquage lithographi-
que, doit être recherchée dans les caractéristiques morphologiques particu-
nw lières du composite. En effet, dans la zone en traction, seuls les torons
154 Chapitre IV

parallèles à la contrainte appliquée participent pleinement au renforce-


ment, ceux situés perpendiculairement étant essentiellement soumis à des
efforts de décohésion fibre-matrice. NAVARRE (1990) a d'ailleurs clairement
montré dans ses travaux le caractère unidirectionnel de ce type de compo-
site soumis à une sollicitation parallèle à une direction de tissage. En
compression, il en va différemment : les torons parallèles et perpendicu-
laires participent tous deux, de façon semblable, à la déformation.

Toutefois la valeur de X ne correspond pas à un quelconque rapport des


modules d'élasticité dans les différentes configurations morphologiques du
renforcement. L'évaluation des modules élastiques du composite dans les
deux configurations ne permet pas une corrélation avec X. L'introduction de
ce paramètre s'avère nécessaire pour expliquer le comportement en fluage du
composite, mais sa détermination analytique directe à partir des caracté-
ristiques intrinsèques des constituants n'est pas évidente.

Par contre, la valeur seuil de la contrainte, <r , peut être évaluée


o
semi-quantitativement en utilisant la modélisation introduite par EVANS
(1989). En choisissant une valeur sous critique de la ténacité de la
matrice, ainsi qu'en assimilant notre composite à un matériau unidirection-
nel, la valeur de la contrainte, pour laquelle une microfissuration est
observée, peut être évaluée, selon EVANS, à partir de la relation :

r 1/3
6 V 2 (f) E E2 Ç T
V f m
cr = (IV.48)
2
o (1 - V ( f ) ) E R
L r m J

avec : <r , la contrainte seuil,


o
V (f), la fraction volumique de fibres,
E(f), le module d'élasticité des fibres,
E, le module d'élasticité du composite,
m l'énergie de déchirure par unité de surface de la matrice,
T,
la contrainte de cisaillement interfacial,
E,
m le module d'élasticité de la matrice,
R, le rayon moyen de la fibre.
fr^vr)

Synthèse 155

f'T-l
Pour estimer cette quantité, nous introduisons la valeur du cisaillement
obtenue expérimentalement (cf. Chapitre II). En tenant compte des varia-
tions des grandeurs liées aux constituants en fonction de la température,
nous obtenons une valeur seuil de <r théorique. Les valeurs obtenues sont
o
relativement plus élevées que celles observées expérimentalement, comme on
peut le remarquer d'après le tableau IV.5. Elles sont par contre du même

t
T <r théorique <r o b s e r v é e
k o n
MPa o MPa o MPa

1473 55-65 50 ~ 60

1573 40-47 36 ~ 40

Tableau IV. 5 : Valeurs de la contrainte de seuil théorique et observée, a ,


o
à 1473K et 1573K, ainsi que celles obtenues expérimentalement en trac-
tion, <r\ par CHOURY (1989).
f.':lT^

ordre de grandeur que celles obtenues expérimentalement par CHOURY (1989).


~TT>|

Si la diminution de cette valeur seuil avec la température (Fig. 11.17 et


Tableau 11.15) semble parfaitement corrélée avec la diminution de la valeur
P^ du cisaillement interfacial observé également expérimentalement, la varia-
tion de ce dernier paramètre en fonction de la température (Fig. 11.17) ne
peut être expliquée uniquement par la diminution des contraintes rési-
duelles, issues du désaccord dilatométrique. En effet, la valeur du cisail-
lement interfacial peut s'écrire sous la forme :

T = u CP + Cte (IV.49)
i ^ i
avec
(<r - <r ) (T - T)
f m e
(T =
1 1 + V 1 - V

avec : fi, le coefficient de frottement interfacial,


T , la température d'élaboration,
e
T, la température d'utilisation,
v , le coefficient de Poisson de la matrice,
m
v , le coefficient de Poisson des fibres,
f
156 Chapitre IV

Les valeurs caractéristiques nécessaires pour ce calcul sont rassemblées


dans le tableau IV.6.

E V a -6 -î
GPa 10 K

matrice (m) 350 0.18 4.6


fibre (f) 200 0.25 3.2
pyrocarbone 0,1 fim
longitudinal 30 0.40 2
radial 12 0.12 28

Tableau IV. 6 : Valeurs de différents caractéristiques des composites SiC-


SiC. E : module d'élasticité ; v : coefficient de Poisson ; a : coeffi-
fient de dilatation.

D'après l'équation (IV.49), x est une fonction linéaire de la température,


ce qui n'apparaît pas être le cas expérimentalement (Fig. 11.17).

Les observations de l'interface que nous avons effectuées en microsco-


pie électronique, n'ont pas permis de visualiser un quelconque changement
cristallographique et chimique de 1'interphase pyrocarbone. Il semblerait
que les feuillets de carbone turbostatique soient plus distordus, mais ce
point reste à confirmer.

A ce sujet, il est bon de rappeler qu'une modification des propriétés


mécaniques est observée sous air, bien avant l'apparition d'un changement
nettement visualisable en microscopie électronique (VICENS, 1990). Notam-
ment, les essais de vieillissement sous air menés au laboratoire sont tout
à fait en accord avec les phénomènes observés par FRETY et B0USSUGE (1990)
sur des matériaux SiC-SiC de même type.

L'explication de la diminution du cisaillement interfacial, responsa-


ble de la transition dans le comportement en fluage, doit donc être recher-
chée dans la modification structurale de la fibre. La recristallisation de
celle-ci, mise en évidence sur les clichés de diffraction électronique à
Synthèse 157

transmission dès 1200° C et sur les micrographies en champ noir (Fig. IV.18)
pourrait s'accompagner d'une diminution de volume suffisante pour engendrer
un changement notable dans la valeur de la contrainte résiduelle à 1'inter-
phase et concomitamment de T . L'influence de la contrainte appliquée sur
la recristallisation reste d'ailleurs à préciser.

Fig. IV.18 : Champs noirs de zones de fibres pour des eprouvettes déformées
à 1473K et 1673K, avec le cliché de diffraction correspondant, mettant
en évidence d'une part la recristallisation partielle de la fibre et
d'autre part la croissance de grains.

A ce propos, le phénomène de relaxation des contraintes et la modifi-


cation de la valeur du cisaillement interfacial pourraient être à l'origine
du stade transitoire observé. En effet, la durée de ce stade est d'environ
20 heures et correspond à la durée observée par SIMON et BUNSELL (1984)
pour que la structure de la fibre atteigne une valeur d'équilibre.
158 Chapitre IV

Toutefois, un stade primaire peut être décelé également dans le cas


d'un composite OSiC, pour lequel la fibre de carbone peut être supposée
®
beaucoup plus rigide que la fibre SiC Nicalon (Fig. IV.19). A ce sujet, le
taux de déformation dans le stade primaire semble nettement plus important
que dans le cas des composites SiC-SiC, mais la résistance au fluage à
1673K semble meilleure.

— 1
E 120 C--SiC 1673K
3x 100
«. 311MPQ
80

60

40 •
O- IBOMPa
20 r-U-o-Ö"" 0 ""

n KO i |
20 40 60 80 100 120
t(»0 t(h)
Fig. IV.19 : Variation de la déflexion, h, et du taux de déformation, e %,
en fonction du temps, t, pour des échantillons C-SiC 2D soumis à dif-
férentes contraintes, testés à 1673K.

Par contre, pour une structure unidirectionnelle SiC-SiC, aucune


déformation en fonction du temps n'a pu être enregistrée à 1673K sous des
contraintes atteignant 180 MPa.

La déformation matricielle, par fluage et microfissuration, apparaît


donc contrôler la déformation totale du composite. L'absence de déformation
dans le cas du matériau unidirectionnel semble confirmer la déformation
matricielle de la structure 2D . En effet, l'orientation cristallographique
des cristaux colonnaires de la matrice par rapport à la contrainte est plus
favorable dans le cas des matériaux 2D (Fig. IV.20). De plus la porosité
peut être également responsable de cette déformation.
pr-W,

Synthèse 159

lOOnm lOOnm

Fig. IV.20 : Micrographies obtenue en microscopie électronique à transmis-


sion des cristaux de SiC dans la matrice CVI.

L'ondulation des torons permet un angle maximum 6 de 14° entre la


ç. max
direction du renfort et la contrainte appliquée . CARTER et al. (1984a et
b), ont observé un phénomène semblable dans le cas de SiC-DCPV (cf. Chapi-
tre II), mais pour des contraintes supérieures à 110 MPa. En supposant que
le même mécanisme soit actif pour la matrice CVI, le seuil de contrainte
serait <r =(1-V (f))<r , soit o- > 44 MPa, ce qui reste élevé. Néanmoins, la
a V m a
structure de la matrice CVI contient beaucoup plus de fautes (mélange des
polytypes 3C, 4H, . . . ) que le matériau étudié par CARTER et al. Ce point
vient d'ailleurs d'être confirmé récemment par SCHAMM et al. (1990).
Le comportement de notre matériau tend à se rapprocher de celui d'un
composite unidirectionnel, notamment dans le calcul de la contrainte limite
de fluage. A ce stade final, le renforcement joue pleinement son rôle et la
contrainte maximale <r supportée par le composite s'écrit :
c
<r = V (f ) <r
c V uf

Connaissant la variation de la contrainte maximale de la fibre, o*


uf en
fonction du temps et de la température (cf. Chapitre II), il est possible

8La valeur de l'angle maximum peut être évaluée à l'aide de l'équation


A
'27ra
suivante : 6 = Arctg , avec : a, l'amplitude ; X, la période.
max \ j
160 Chapitre IV

de corréler celle-ci à <r pour chaque température (Fig. IV.21). La relation


c
<r =f (<r ) est une fonction linéaire, dont le rapport de proportionalite est
c uf
V (f). La mesure de celui-ci donne environ V (f)=0,6. Ceci n'est pas sur-
prenant puisque le taux effectif de fibres dans les torons est de 0,6 (cf.
Chapitre II.4).
Le même type de raisonnement permet d'expliquer en partie les valeurs
élevées de l'exposant des contraintes, mesuré lors de la transition entre
1473K et 1573K. Si l'on néglige la contribution de 1'endommagement, on a en
première approximation l'inégalité :

a f V (f)

S. 300
£>1273K
O
b
1373K O /

200

/ OH23K
S I
T /
1473K i 1

700 800 900 1000 1100 1200


a (MPa)

Fig. IV.21 : Variation de la contrainte maximale supportée par le compo-


site, er , en fonction de la contrainte maximale supportée par la
c
fibre, <r , pour différentes températures.

La contrainte effective responsable de la déformation en fluage de la fibre


est alors supérieure à la contrainte c et l'exposant des contraintes est
alors surestimé. Il est donc normal d'observer un exposant des contraintes
supérieur à 2.
f fjl)

Synthèse 161

Le nombre important de mécanismes responsables de la déformation sem-


ble à l'origine de la difficulté de décrire 1'endommagement par une loi
unique d'évolution, comme nous venons de le voir dans le paragraphe
précédent.

Si la valeur de 1 ' endommagement peut se déduire des niveaux de con-


traintes (PLUVINAGE et al., 1990), l'évolution de celui-ci, à contrainte
constante, à haute température, paraît pouvoir se relier à la vitesse de
déformation. Plus particulièrement, nous avons tracé, en incluant toutes
les températures, la vitesse de déformation en fonction du temps (diagramme
du type MONKMAN-GRANT) (Fig. IV. 22). Ce paramètre, ainsi que le taux de
déformation, semble donc particulièrement adapté à la prévision de la durée
de vie du matériau.

1E-7 01673K
• 1573K
A1473K
A1423K
T1373K
0


1E-8 "^-^^ A

T ^"^
A
i i

10
t(h)

Fig. IV.22 : Variation de la vitesse de déformation dans le stade station-


naire, e, en fonction du temps à la rupture, t, pour différentes tem-
pératures.

Enfin la modélisation introduite au début de ce chapitre IV permet de


rendre compte du comportement sous contrainte du matériau et notamment de
la mise en place d'une zone d'endommagement essentiellement pendant l'état
transitoire. La description de l'évolution de cet endommagement conduisant
à la rupture semble pouvoir être faite à l'aide du concept de la con-
trainte effective. Toutefois, l'influence de l'environnement sur le maté-
riau et plus particulièrement sur l'un des constituants peut être à l'ori-
162 Chapitre IV

gine d'un déplacement artificiel des domaines I, II, III présentés sur la
figure 1.3 au cours du temps. L'effet de l'environnement doit donc être
impérativement pris en compte à toutes les étapes de la modélisation du
comportement thermomécanique de ces matériaux.

l'-:'-l

fi--T-V|

f£& ' "1

PB
163

CONCLUSION

Les matériaux composites et plus particulièrement les composites à


matrice céramique constituent une avancée conceptuelle dans la science des
matériaux. Notre étude avait pour but d'étudier le comportement en fluage de
composites céramiques à fibres longues, SiC-SiC 2D. Les quelques travaux
expérimentaux publiés sur ce thème n'ont trait qu'aux composites céramiques
particulaires ou à fibres courtes ; ils nous ont néanmoins permis de mieux
cerner les problèmes liés à l'étude de la résistance en fluage des compo-
sites à fibres longues SiC-SiC 2D. Notamment, le point le plus saillant de
l'étude bibliographique était : la compréhension de la déformation du maté-
riau composite sous contrainte à haute température ne peut être achevée que
grâce à la connaissance des propriétés de chacun des constituants (surtout
de l'interface fibre/matrice) et de leurs variations en fonction du temps.

Notre travail expérimental a donc consisté à valider des lois de com-


portement à partir d'essais de fluage en flexion trois points sous vide, en
utilisant un marquage lithographique. Pour accéder aux données auxiliaires
nécessaires pour les modélisations, nous avons aussi été amenés à mettre en
oeuvre des techniques complémentaires : analyse d'images, microscopie élec-
tronique en transmission, micro-indentation.

A partir d'une méthode de déconvolution des essais de flexion, mettant


à profit le marquage de surface résistant aux hautes températures, nous
avons pu isoler des lois de comportement en traction et en compression. Nous
avons alors mené une discussion critique de la méthode de déconvolution uti-
lisée, puis vérifié l'existence du stade stationnaire à partir de la modéli-
sation du stade transitoire, et enfin tenté d'utiliser les concepts de la
Mécanique des Milieux Continus Endommagés pour atteindre l'évolution de
1'endommagement du matériau.
164 Conclusion

Le rôle prépondérant de la fibre et de l'interface dans la déformation


du matériau s'est avéré comme un leitmotiv de chacunes des approches menées:

• le fluage, dès 1373 K, et la recristallisation de la fibre, au-delà


de 1473 K, nous ont semblé être à l'origine de la variation des
niveaux de contraintes sur la fibre et l'interface durant le stade
transitoire (relaxation de contraintes),

• au dessus d'une valeur seuil de la contrainte, dont la variation a


été corrélée à nos mesures de cisaillement interfacial, x , on peut
admettre qu'il existe une zone d'endommagement durant le stade tran-
sitoire et stationnaire ; l'évolution de la valeur de celle-ci a été
modélisée à partir des lois de comportement,

• la description du stade tertiaire, et par la même de la durée de vie


du matériau, à l'aide d'un paramètre d'endommagement, D, n'a pu être
réalisée que par la prise en compte de la valeur de la zone endomma-
gée précédent le début du stade tertiaire ; toutefois, la propagation
non coplanaire des fissures dans la matrice (par la présence de la
morphologie particulière du renfort fibreux) n'a pas permis d'évaluer
quantitativement le paramètre d'endommagement, D.

L'énergie consommée par le matériau au cours de son endommagement lors


d'expériences de fluage étant très faible, comparativement à celle consommée
lors de sa rupture, il semblerait qu'il faille s'orienter vers une évalua-
tion quantitative du paramètre, D, par exemple à partir des techniques
d'analyse d'images qui tiendraient compte de la taille et de l'ouverture des
fissures. En effet, il paraît préférable pour ce type de matériau que des
lois prédictives de sa durée de vie soient établies sur des critères basés
sur des paramètres directement mesurables sur des structures fabriquées dans
ce même matériau.
f7®\

165

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f"*"l

r") 173

ANNEXE I : RAPPELS SUCCINTS D'ANALYSE D' IMAGES POUR


LE TRAITEMENT D'UN COMPOSITE A FIBRES

:^ T 1

p!!îî)
Les techniques d'analyse automatique d'images sont très bien adaptées
pour étudier les composites à fibres. Nous allons très brièvement décrire
les opérations de base de morphologie mathématique (SERRA, 1982 ; COSTER et
CHERMANT, 1985) que nous avons été amenés à utiliser.
f <;."^

Tout traitement automatique d'image nécessite cinq opérations :

'rrT

1. l'acquisition et le stockage des images en niveaux de gris (dans


notre cas il s'agit d'images provenant d'un microscope optique),
~i<|

2. le pré-traitement de ces images pour éliminer le bruit de fond et


augmenter le contraste des aspects intéressants,
[
** 3. le seuillage pour transformer les images en niveaux de gris en ima-
ges binaires (opération qui est souvent la plus délicate),
pJS) 4. la transformation (éventuelle) de ces images pour obtenir les images
sur lesquelles les mesures sont possibles (dans notre cas nous avons
utilisé les concepts de morphologie mathématique),
5. La mesure géométrique ou le dénombrement.

Dans les cas les plus simples, seules les opérations 1, 3 et 5 sont
nécessaires.
fr\"t

Ainsi nous avons pu déterminer :


r
~^)
les distributions granulométriques de fibres, de porosités (micro et
macro),
les libres parcours moyen entre porosités,
le nombre moyen de contact entre fibres,
la fonction de distribution radiale des fibres, ...
174

Parmi les algorithmes utilisés nous avons choisi de présenter celui


relatif à la séparation des fibres qui est nécessaire pour accéder aussi
bien à la distribution des fibres qu'à la fonction de distribution radiale.
Les différentes opérations suivantes sont utilisées (Figure ci-dessous) :

a) image initiale (image vidéo) présentant une coupe métallographique :


les pores sont en noir, les fibres en gris soutenu et la matrice en
gris clair,
b) même image après seuillage, choisi de sorte que seules les fibres
soient détectées,
c) utilisation de l'opération d'érosion permettant d'accéder à l'érodé
ultime (la plus petite "trace" restant de la particule après
175

érosion),
d) segmentation des particules en contact, due à l'opération c) suivie
d'un épaississement conditionnel par rapport à l'image b),
e) image finale avec élimination des particules coupant le bord de
masque.

Références

- COSTER M., CHERMANT J.L. - "Précis d'analyse d'images", Les Editions du


CNRS, 1985.
- SERRA J. - "Image analysis and mathematical morphology", Academic Press,
1982.
177

ANNEXE II : SIMULATION D'UNE STRUCTURE COMPOSITE A FIBRES

Un composite à fibres longues peut être défini à partir d'une section


plane comme un arrangement des "phases" suivantes : fibres, matrice et
porosité. Il a été jugé intéressant de pouvoir obtenir une structure mor-
phologique simulée, dans la direction perpendiculaire au plan des fibres,
qui soit aussi proche que possible de la réalité comme structure modèle
pouvant servir aux études de propagation de fissures ou de transfert ther-
mique (DORVAUX, 1985 ; DORVAUX et al., 1989).

Nous avons préféré reproduire in extenso la courte publication qui a


trait à ce sujet (ABBÉ et CHERMANT, 1989), où les deux aspects principaux
traités sont :

- le réalisme de l'assemblage des fibres par l'étude de la fonction de


distribution radiale sur des composites réels et les structures
simulées,
- la nature de l'évolution de la porosité en fonction du taux volumique
de la matrice.

Références

- ABBÉ F., CHERMANT J.L. - Acta Stereol., 1989, 8, 243.


- DORVAUX J.M. - Modélisation des conductivités thermiques dans les maté-
riaux composites. Sté Française des Thermiciens, Paris, 24 Avril 1985.
- DORVAUX J.M. , ABBÉ F., CHERMANT L., COSTER M., CHERMANT J.L. - Caractéri-
sation thermique et morphologique de composites SiC-SiC. Rapport DRET
1989, contrat 85-528.
178

ACTA STEREOL 1989; 8/2: 2 4 3 - 2 4 8


PROC ECS 5 FREIBURG I. BR. 1989
ORIGINAL SCIENTIFIC PAPER

SIMULATION OF FIBER COMPOSITE STRUCTURES

F r a n ç o i s ABBE, J e a n - L o u i s CHERMANT

LERMAT URA n ° 1 3 1 7 , I S M R a - U n i v e r s i t é
Bd du M a r é c h a l J u i n , 14 032 CAEN Cedex, FRANCE

ABSTRACT

In this paper we present a simulation based on gravity


phenomenon which allows to obtain correct simulated structures
closed to that of long fiber composite materials.

Keywords : Simulation, long fiber composites.

INTRODUCTION

Composite materials are presently undergoing a tremen-


dous scrutiny as this unified combination of distinct materials
with different properties offers good properties for high
technology requirements. That is the case for fiber reinforced
plastics (FRP), polymer matrix composites (PMC), metal matrix
composites (MMC) or ceramic matrix composites (CMC).
Although processes and properties of polymeric matrix
composites are presently well known, that is not the case for
metal or ceramic matrix composites : their development is
otherwise complex and, first of all, fabrication processes such
as squeeze casting, extrusion or chemical vapor infiltration
(CVI) might be difficult to perfectly control.
In these conditions, simulation of such materials can
be of interest both for a better knowledge of process develop-
ments and for their mechanical or thermal behaviour.
The aim of this paper is to present a method of simula-
tion of long fiber composite structures. The morphology of the
composite materials will be described and obtained simulation
will be compared to real materials morphology.
179

244 ABBE F ET AL: FIBER COMPOSITE STRUCTURES


MORPHOLOGY OF COMPOSITE MATERIALS

From planar section, composite materials can be descri-


bed as an array of three phases : the fibers, the matrix and
the pores. The morphological characteristics of each phase can
be correctly described using automatic image analysis (Coster,
Chermant, 1985). A micrograph of a such material is presented
on figure 1.

Fig. 1 . Optical micrograph of a polished section of a C-SiC


composite material (SEP origin).

Quantitative structural measurements have been done


previously (Abbé, Chermant, Coster, Gomina, Chermant, 1989)
which gave access to microstructural parameters values, such as
size distribution of C-SiC fibers or of the different types of
porosities, mean free-path in the porous phase or mean contact
number between fibers.

SIMULATION

Numerous simulation algorithms are available in the


literature, such as point processes (hard core, boolean, ..) or
partitions (Poisson, Voronoï, Johnson-Mehl,...) (Diggle, 1983).
No one leads to a correct structure simulation for long fiber
composite materials. Thus a special algorithm have been compu-
ted, using a NS 1500 automatic image analyzer (Nachet-Vision,
Evry, France). Planar sections of ceramic matrix composites are
obtained in two steps : i) bundles creation based on the gravi-
ty phenomenon, ii) matrix infiltration.

Figure 2 presents the flow chart and associated images.


180

ACTA STEREOL 1989; 8/2 245

D -

H'A

H,
Fig. 2 . Illustrated flow chart for the simulation.
181

246 ABBE F ET AL: FIBER COMPOSITE STRUCTURES


* In a first step (A), the volume fraction of fibers and
size distribution curve of commercially available fibers
are given as inputs. A set of discs is then well defined,
regarding to the box size, and each disc is dropped in
this fictive box using periodic boundary conditions to
avoid edge effects. Then from planar section, the volume
fraction is given from the surface area value.

* In a second step (B) the chemical vapor infiltration pro-


cess is crudely simulated by successive mathematical mor-
phology means (Coster, Chermant, 1985 ; Serra, 1982) like
dilation operation, until volumic matrix ratio is obtained.

RESULTS

In these conditions, the porosity evolution during the


matrix creation can be followed easily. We sought for an appro-
priate mathematical function which could describe the change in
the porosity by only one parameter (Abbé, Chermant, 1988).

For this, we selected empirically the reciprocal of the


erf complementaty function x = erfc"1(u) which is given by :
2 (*xe .2d t
u = erfc (x) = 1 Jo W

Each value of the dilation leads to a given porosity strongly


depending on the bundles morphology: same measurements on an
hexagonal and a square arrangement are presented on figure 3.

Furthermore we performed a radial distribution analysis


on both the simulated structure and the real structure (Fig.
4). Radial distribution function has been proposed by several
authors (Gomina, Chermant, Coster, 1983 ; Hanisch, Koenig,
Stoyan, 1985 ; Jeulin, 1986) to investigate such clustering. It
is based on the density of fiber centers that lie in concentric
circles around a given fiber. It can be easily obtained from
successive dilations. A good agreement is observed on figure 4
between the simulated structure from our gravity model and real
materials.

DISCUSSION AND CONCLUSION

The proposed simulation describes correctly the morpho-


logy of long fiber composite materials in the transverse fiber
section. For example on figure 5a we present a micrograph of
182

ACTA STEREOL 1989; 8/2 247

t
f:':~f;i

• f R
> Z h
it
M
11

1 150 16
At
ft

F:! ' 1
100
4/
/m
0.5
• Hexagonal
o Square 50
Wt
A Model
JA
. rt 1
0 2 4 6 h _*. 20 40 60
Fig. 3. Change in the reciprocal Fig. 4. Radial distributions,
I~r~\

complementary erf function for N 2 (P,r), of the fibers for


hexagonal, square and model our simulated model (M) and fS~)

structures as a function of the the real material (R). r is


number of dilation h. Vp and V po the distance parameter.
correspond respectively t o t h e fr-:. ;i

volume fraction of the porosity


in the material and in the mate-
rial without the matrix.

W*.
ÇT~"!"*

Fig. 5 . Structure of a CMC materials after thermal treatment


(a) and corresponding simulated structure (b).

such a composite after thermal treatment and on figure 5b the


corresponding simulated structure, using the B part of the
algorithm of figure 2 : there is effectively a very good
agreement between these micrographs (each ring corresponds to a
run of CVI).
183

248 ABBE F ET AL: FIBER COMPOSITE STRUCTURES


On one hand such simulations can give also information
on the number of chemical vapor infiltration cycles which have
to be used to obtain a structure of a given porosity.

On the other hand such simulated structures can be used


to modelize also physical properties such as mechanical or
thermal ones (Pilling, Yates, Black, Tattersall, 1979). For
example they are used, with success, to modelize the thermal
conductivity of carbon fibers in a silicon carbide matrix (Dor-
vaux, 1985 ; Dorvaux, Abbé, Chermant, Coster, Chermant, 1989).

ACKNOWLEDGEMENT

This investigation was supported by SEP Company, Le


Haillan, Saint-Médard en Jalles, France.

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Press, 1982.
185

ANNEXE III : DESCRIPTION DE L'APPAREILLAGE DE FLUAGE


ET MODE OPERATOIRE

L'appareillage utilisé pour réaliser les expériences de fluage sous


vide à hautes températures comprend :

- un dispositif de transmission de la charge et de mesure de déplace-


ment,
- une enceinte sous vide à paroi froide contenant un four à rayonne-
ment,
- une alimentation électrique pour le four, équipée d'une régulation de
température de type PID,
- un dispositif de pompage et de mesure de basses pressions.

Le dispositif de transmission de la charge se décompose en deux par-


ties : la première est constituée à l'extérieure de l'enceinte d'un bras de
levier transmettant une charge constante sur une traverse mobile. Celle-ci
coulisse le long de deux montants rectifiés de 30 mm de diamètre grâce à
deux roulements à billes en cage. Un guidage optimal est ainsi obtenu, de
même qu'une réduction des frottements. Une charge de 50g est suffisante
pour provoquer un déplacement de la traverse. Un piston en acier inoxydable
(piston supérieur) refroidi par une circulation d'eau est solidaire de la
traverse mobile (deux plaques parallèles lui sont adjointes pour permettre
l'alignement du dispositif) ; l'autre piston est solidaire du bâti (piston
inférieur) ; l'étanchéité entre le piston mobile et le four est assuré par
un soufflet métallique dont la raideur est prise en compte. La partie
intérieure se décompose en deux pistons de tungstène de 22 mm de diamètre
et environ 120 mm de long pour le piston supérieur, 80 mm de long pour
le piston inférieur. Le montage de flexion 3 points est réalisé à partir
de couteaux en carbure de titane rectifiés, d'un diamètre de 6mm ; les
186

deux couteaux inférieurs reposent dans des entailles en V usinées dans un


bloc en carbure de bore. L'écart entre les appuis est de 14 mm. Le couteau
supérieur est serti dans le piston supérieur en tungstène.

La mesure du déplacement est effectuée extérieurement à l'aide de 3


palpeurs inductifs (LVDT, Penning) placés au sommet d'un triangle equilate-
ral dont le barycentre coïncide avec l'axe de révolution des pistons. Le
système permet, par la lecture individuelle des palpeurs, de contrôler au
cours du temps l'alignement. D'ailleurs, ce dispositif nous a permis
d'optimiser l'alignement dans la zone de travail du piston supérieur.

Les hautes températures requises pour les essais de fluages sont obte-
nues grâce à l'utilisation d'un four à rayonnement ouvrant "Sésame" (VMDI)
à paroi froide, dont les resistors hémicylindriques sont en tantale. Des
écrans latéraux hémicylindriques, ainsi que des écrans supérieurs et infé-
rieurs sous forme de couronnes, en tantale, molybdène et acier inoxydable
au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la zone chaude, permettent de con-
finer la zone chaude à un volume supérieur à celui de l'éprouvette.

Les basses pressions lors des essais ont été obtenues à l'aide du
groupe de pompage suivant : une pompe primaire Edwards à double étage mise
en série avec une pompe à diffusion d'huile Edwards de 700 1/s. Une pres-
sion de 10 torr est obtenue en cours d'essai. La mesure des basses
pressions est assurée par une jauge Penning à double plasma, permettant
d'effectuer des mesures avec une précision suffisante. Au niveau de la
traverse mobile, un dispositif d'équilibrage permet la compensation de la
différence de pression.

La mesure de la température a fait l'objet d'une attention particu-


lière. La différence entre la température de l'échantillon et celle mesu-
rée par le thermocouple de régulation placé à côté de l'éprouvette a du
être prise en compte, en particulier, pour établir la durée de mise en
équilibre de l'ensemble. Toutefois, le vieillissement des thermocouples au
cours du temps n'a pu être qu'estimé (un dégagement de "SiO" engendre une
dégradation prématurée de ceux-ci). Une correction moyenne a été apportée
toutes les cinquantes heures.
187

Dispositif de fluage utilisé


188

Les conditions expérimentales étaient les suivantes :

éprouvettes : longueur 20 mm, largeur 9,5 mm, épaisseur 2,5 mm, brutes de
rectification (à la SEP) ou polies (grain 1 /LUI»),
températures : 1273K à 1723K,
temps : quelques heures à 500 heures,
contrainte : 50 à 250 MPa,
-4
vide : environ 10 Pa dans la zone chaude.
RESUME

Un composite bidirectionnel à matrice de carbure de silicium renforcée


par des fibres longues de carbure de silicium, a fait l'objet d'une étude de
comportement et résistance en fluage dans le domaine de températures 1273K -
1773K, par des essais en flexion 3 points sous vide. Un marquage lithogra-
phique de la surface d'éprouvette, supportant les hautes températures, a
permis de développer une méthodologie de deconvolution de l'essai de
flexion, donnant accès aux lois de comportement en traction et en compres-
sion dans le domaine stationnaire. Une modélisation du stade transitoire a
été effectuée conduisant à la validation de l'approche menée. La description
de l'évolution de 1'endommagement au cours du fluage semble pouvoir être
décrite par les concepts de la Mécanique des Milieux Continus Endommagés. Le
lien avec l'approche précédente consiste à introduire la valeur non nulle de
la zone endommagée au stade stationnaire obtenue lors de l'utilisation de la
méthode de deconvolution. Le seuil de contrainte, à partir duquel cette zone
endommagée apparaît, est directement corrélé aux mesures, par micro-inden-
tation, du cisaillement interfacial fibre/matrice que nous avons effectuées.
Les valeurs des paramètres morphologiques fondamentaux nécessaires aux dif-
férentes approches ont été obtenues à l'aide des techniques d'analyse
d'images. La microscopie électronique en transmission nous a apporté les
compléments d'informations dont nous avions besoin pour justifier l'inter-
prétation du comportement mécanique observé expérimentalement. Le rôle fon-
damental de l'interface et des propriétés thermomécaniques de la fibre dans
un environnement particulier (vide) ont été clairement mis en évidence.

MOTS CLEFS : Composite à matrice céramique (CMC), SiC-SiC 2D, Fibre


céramique, Interface céramique/céramique, Carbure de Silicium, Fluage,
Micro-indentation, Endommagement, Modélisations.
VU le PRESIDENT DE JURY

CAEN, le

VU le DIRECTEUR DE 1 ' U.F.R.

CAEN, le

VU et PERMIS d'IMPRIMER en référence

à la délibération du Conseil de l'Université

en date du 14 DECEMBRE 1973.

LE PRÉSIDENT :

CAEN, l e

Max ROBBA
y

11
Stress Dependency of Creep Rate °

-4
10 .

- e == 1.0 %
• . $
- „•"'"
n = 2.05 .^
g io- 5 L ' $ " '
CO 1 • -•-•""•"' â
- <£.-•"'
• * .....-•—a
• n = 2.06 ...
6 A „ - •
H- 10 |r~
<
A.....-"" „ *-
. Ä n = 2.16 _ •
• _. -*
- — "
-
< n = 3.09^ S)
£ 1C" 7 ':
© T = 1076 C
• ® ^ ^ • T = 1140 C
- A T = 1200 C
<S> T = 1348 C
-8 —i i i i
10 i

0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8


APPLIED STRESS TGPa]

The above figure plots strain rate e against applied stress cron a
log-log scale, at s = 1%. Results yielded a power-law relationship
between e and a :
£ « (jn

t>
fd i sy
Jx<P-r
vi&M i

io
Temperature Dependency of Creep Rate

-4 1350 1300 1250 1200 1150 1 100 C


10 i i i • | • • i i | i i i

e = i.o %
z^>
• ^ . Q = 275 k J / m o l
-5
° 10
m
^ • ^ Q = 285 k J / m o l

6
h- 10
< Q = 315 k J / m o

<
10 - 7
GO
• G - 0.3 GPa
o (J = 0.5 GPa
A a = 0.7 GPa
-8
10 • • ' I
0.60 0.65 0.70 0.75

1/T [1000/K]

The temperature dependence of the creep rate was analyzed at


a fixed deformation e = 1 % . The figure above indicates that for
each applied stress, the creep rate k and temperature T satisfies
Dorn-type relationship:
e = Aexp(-Q/RT)
Where A is a function of strain, applied stress, and certain
material properties, and Q is the activation energy of the creep
controlling mechanism.

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