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Ê 


       

   :
Jean Michel Gaillard, André Lespagnol, ë   
          
 , Nathan Université, 1984.
J Brémond, MM Salort,    
  , Hatier, 1986.
Marc Montoussé (direction),   
        

    ,
Bréal, 2007.

Les sociétés préindustrielles connaissent une croissance faible, de l¶ordre de 0,5% par an et
des crises profondes qui remettent en cause souvent la totalité des acquis antérieurs. A partir
de 1720, cette croissance s¶accélère dans la plupart des pays d¶Europe occidentale, pour
atteindre un rythme de 2% par an au cours du 19e siècle. Ce rythme est certes modeste par
rapport à ceux du 20e siècle mais il marque le passage à un type nouveau de croissance
continu et plus soutenu. Cette mutation économique et sociale est due à la Révolution
industrielle.
Le 19e siècle est aussi marqué par un renouvellement de la pensée économique. La pensée
libérale se démarque en effet nettement de la pensée économique du Moyen Age.

       


   


r : O  : marteau pilon

Pb : Qu¶est-ce que la 


  O 

 En quoi consiste-t-elle ? Où a-t-elle lieu ?


Quand ? En quoi est ce une « révolution » ? Quelles sont les causes et les conséquences de la
Révolution industrielle tant au niveau économique, technologique que social ? Enfin quelles
sont les étapes de l¶industrialisation ?

La Révolution industrielle est un évènement majeur qui a bouleversé les équilibres


économiques et sociaux du 19e siècle. Le point de départ peut être daté avec une relative
précision dans les années 1760 ± 1770 au Royaume-Uni. Le terme de 
 est transposé
du vocabulaire politique. Il exprime l¶idée d¶une rupture majeure, décisive. En 1760,
l¶Angleterre est encore une société pré-industrielle dont la base de l¶économie reste agricole et
rurale. Elle devient, grâce à la révolution industrielle, incontestablement « la plus grande
puissance du 19ième siècle ». Les contemporains ont eu conscience de vivre une ère de
mutations d¶une violence sans précédent.
Une conséquence contemporaine de la révolution industrielle est l¶émergence d¶une
opposition durable entre pays industrialisés riches et pays en retard, plutôt pauvres
(caractéristique majeure du monde contemporain).

  O
   
 
 O 

!    !   O O 


   

a)‘ L¶origine d¶une mutation


La « Révolution » industrielle n¶est pas la naissance de l¶industrie ni de la classe laborieuse.
En Occident, un secteur industriel autonome, distinct de l¶agriculture remonte au Moyen-
âge : il se diffuse au cours de la renaissance urbaine aux 11e ± 13e siècles, en Flandre et en
Italie du Nord, puis dans la quasi-totalité de l¶Europe occidentale aux 13e ± 14e siècles.

1
£‘   "O  # O O 
  O
 O
- Les activités de transformations séparées de l¶agriculture se localisent dans les villes
(séparation géographique ville / campagne). Le travail se divise en "     $
"  en fonction des matières à transformer (ex métiers du bois, du textile, du métal )
ou des besoins à satisfaire (alimentation, habillement, bâtiment ) A chaque sous-branche ou
stade de travail correspond un métier bien délimité avec ses producteurs spécialisés. La
production se fait en atelier coïncidant avec le domicile de l¶artisan et ne regroupant qu¶un
personnel et un outillage limités (l¶outillage se perfectionne avec la spécialisation des
métiers). La majorité des producteurs sont propriétaires de leurs moyens de production.

- Ces producteurs sont donc des   " OO qui travaillent pour la vente
sur un marché de consommation urbain et sur le plat pays », la campagne environnante. Au
niveau d¶une ville et d¶un métier, les ateliers autonomes se regroupent dans le cadre d¶une
institution professionnelle à statut semi-public appelée métier, guilde, jurande ou
   ». Cette institution contrôle et régule la petite production dans une logique de :
>‘ défense du métier contre toute concurrence externe ou interne.
>‘ Résistance à la concentration économique et à la main mise de capitalistes
>‘ Reproduction d¶un système de petits producteurs indépendants.
Ce système se maintient jusqu¶à la fin du 18e siècle. L¶artisanat peut aussi être rural.

£‘   $O 


- A partir des 16e ± 17e siècles, la production industrielle commence à émerger en Occident
dans une branche fondamentale : le textile. Cette production se développe d¶abord dans le
cadre d¶un système distinct de l¶artisanat classique : le %  O
 #"  O

#    
   $O  (terme de l¶historien américain Franklin Mendels,
1972).

- D¶une part les travailleurs, s¶ils sont toujours en majorité des    & O  
, sont
désormais des   OO : ils ne sont plus maîtres ni de leurs matières premières,
ni du produit de leur travail qu¶ils ne peuvent pas vendre sur le marché. Désormais, ils
transforment une matière première qu¶on leur donne à travailler en échange d¶un « prix de
façon » qui est en fait un quasi-salaire. D¶autre part, les artisans dépendent d¶une personne
centrale (le maître drapier par exemple ou le marchand-fabricant ou le fabricant) qui est
l¶entrepreneur, acheteur, possesseur de la matière première, distributeur du travail, contrôleur
de l¶ensemble du processus de transformation et enfin vendeur du produit fini sur le marché
pour son seul compte avec recherche de profit. Exemple à Lyon les soyeux, des fabricants qui
donnent à travailler aux tisseurs, les canuts. Ce marchand-fabriquant qui domine la production
est donc déjà un entrepreneur capitaliste car détenteur des capitaux.

- La proto-industrie se développe le plus souvent en dehors des villes pour contourner


l¶obstacle de l¶artisanat corporatif. Le travail industriel se diffuse donc O 
  '
où la main d¶œuvre est surabondante, docile et bon marché (immense réservoir humain rural).
Ce mouvement de ruralisation du travail manufacturier devient une tendance générale au 18e
siècle dans toute l¶Europe. Par exemple, la « fabrique » de toile de lin de Picardie (dans un
rayon de 10 lieues autour de Saint-Quentin) fait travailler, vers 1780, 60 000 fileuses, 6000
tisserands sous la domination de 15 à 20 marchands-fabricants urbains.

2
- Le développement de la proto-industrie a O 
    
 :
>‘ Il fait surgir à côté de la vielle bourgeoisie négociante ou bancaire, une bourgeoisie
manufacturière, nouvelle classe d¶entrepreneurs, encore marchands mais déjà
organisateurs de la production, employeurs de centaines ou de milliers d¶hommes.
>‘ Une part de plus en plus importante de la population active travaille dans ce secteur :
25% de la population active des Pays-Bas autrichiens (la Belgique actuelle) vers
1760-1780. Il s¶agit d¶un pré-prolétariat disposant d¶une certaine qualification (plus
ou moins complexe), assez dispersée (peu organisée pour sa défense).

b)‘ La croissance économique


£‘ È
È   ()*+$,,-
? 
- La croissance est l¶augmentation rapide, soutenue et de longue durée de la production réelle
par tête et les transformations correspondantes dans les caractéristiques technologiques,
démographiques et économiques d¶une société. En 1960, l¶économiste américain WW
 ( a proposé un modèle explicatif du passage à l¶ère de la croissance. Il a identifié
plusieurs phases dans l¶évolution des économies modernes :
>‘ La société traditionnelle incapable de croissance soutenue
>‘ Le take-off ou décollage : phase décisive, très courte (2 ou 3 décennies) où sous
l¶impulsion de quelques secteurs pionniers («     ») qui connaissent une
mutation technologique rapide et permettent un bond en avant de l¶économie
>‘ La croissance rapide auto-soutenue «  !  " »)

- Rostow donne ainsi l¶image d¶une mutation économique, pensée comme une 
"
, définie avant tout en termes quantitatifs. D¶autres économistes comme .
/ 0( 1 en 1963 nient l¶existence d¶une période de rupture brutale dans la croissance
(par exemple dans le cas français).

£‘ Ô     
- Croissance du PNB : !23 % pour l¶ensemble de l¶Europe entre 1800 et
1890 (mais 2,3% pour le Royaume-Uni seul) ; 4% par an pour les EU de 1840 à 1910
Croissance de la production industrielle : 2,6% par an pour le RU de 1813 à 1914 ; 3,2% pour
la Belgique ; 3,6% pour l¶Allemagne. Le produit total de l¶Europe est multiplié par 4,5 de
1800 à 1900.

- Mais la croissance n¶est pas une nouveauté du 19e siècle, elle a déjà été très importante
auparavant. La croissance « en soi » ne suffit donc pas à caractériser l¶originalité économique
du 19e siècle (même si c¶en est une composante essentielle). C¶est
 
  O

       O 

 qui constitue un fait nouveau. Ce « changement de


rythme » est surtout sensible au RU dès 1780-1800 et aux EU vers 1800-1840. L¶hypothèse
du # !! peut être en partie vérifiée mais il ne faut pas en exagérer la brutalité.

c)‘ Une rupture du système de production


£‘ 

- A la base de cette accélération de la croissance, il y a un changement radical de la manière
de produire dans l¶industrie : à l¶outil manié par l¶homme avec son savoir-faire et son énergie
musculaire se substitue peu à peu au cours du 19 e siècle, la  $ 
, mécanisme
articulé permettant la transformation de la matière première et recevant son mouvement d¶une
force motrice (moulin à eau puis machine à vapeur puis) qui utilise une énergie inanimée
(énergie hydraulique, charbon). A la fin du 19 e siècle, l¶électricité se répand lentement
comme énergie. Ce passage au machinisme (c'est-à-dire à la production mécanisée) constitue

3
une révolution technique sans précédent qui définit la spécificité fondamentale de la
Révolution industrielle.

-     O (appelée fabrique au début du 19e siècle ou !  ou   en anglais)


constitue aussi un nouveau type d¶unité de production. Elle se caractérise par la
   en un même lieu d¶un nombre important de moyens de production (machines-
outils et au moins une machine motrice centrale) ainsi que les travailleurs nécessaires à leur
mise en œuvre. C¶est le passage de la production dispersée en ateliers domestiques à la
production techniquement concentrée (passage du     au !  ). Il faut
néanmoins relativiser le degré de cette concentration technique au 19e siècle.

£‘ r 4   4


- La production se caractérise par la séparation désormais radicale entre le capital et le travail.
Autour de cette production se nouent de  4   4 :
>‘ L¶usine, les moyens de production, les matières premières sont la propriété exclusive
du ou des capitalistes qui ont fournis les fonds nécessaires à l¶investissement, de
même que le produit du travail et le profit dégagé par la vente sur le marché.
>‘ Les travailleurs n¶ont plus désormais aucun droit ou contrôle sur les moyens de
production non plus que sur le produit de leur travail : ils sont simplement vendeurs
de leur force de travail aux possesseurs du capital, contre un salaire qui est le prix du
travail sur le marché. A l¶artisan possesseur de ses moyens de production succède
donc le couple capital/travail salarié, c'est-à-dire des rapports de production
capitalistes.

- La Révolution industrielle en tant que période d¶apparition de la grande industrie est donc
bien plus qu¶une simple révolution technique (due à la croissance du machinisme) ou
économique (apparition de la grande entreprise, de la production techniquement concentrée) :
elle marque en fait une étape décisive dans la formation et la mise en place du mode de
production capitaliste par le développement de
  
  dans l¶industrie.

£‘ Ô
 '
O
' 

- La Révolution industrielle doit être perçue comme un     O O 
   qui
implique la durée (plusieurs décennies) et qui comporte des '
  O % , des
O 
' dans les diffusions entre les régions, les branches Ce processus comporte aussi
une phase de coexistence souvent durable entre les formes nouvelles de la grande industrie et
les formes proto-industrielles du travail dispersé (y compris au sein d¶une même branche). Le
mot révolution » ne désigne pas un évènement qu¶on peut dater avec précision mais une
période historique correspondant à ce processus relativement long. Certains auteurs préfèrent
parler d¶ ère industrielle » ou d¶ âge industriel ».

r : #  1 :  $ : les formes du travail industriel en 1806

0  O   % O O   


C¶est en Grande-Bretagne que le processus d¶industrialisation a commencé dans le dernier
tiers du 18e siècle.

a)‘ La révolution cotonnière


La rupture a commencé dans le textile (précisément dans le travail du coton). La révolution
cotonnière constitue la première phase de la Révolution industrielle entre 1770 et 1830.
r : O  : l¶industrie textile

4
£‘ ‰  
  
- Dès la 1e moitié du 18e siècle, le     se présente comme un secteur
dynamique à croissance rapide, entrainé par une demande pressante et multiforme due à la
fois aux qualités spécifiques de la fibre de coton (faible coût de la matière première,
robustesse, légèreté) et à un phénomène de mode incontestable : c¶est la « #
 O 
O » : une vogue pour les étoffes de coton imprimées aux coloris éclatants, d¶abord
importées des Indes par les grandes compagnies coloniales puis produites en Angleterre. Cet
appel du marché est un facteur de la croissance rapide de la jeune industrie.

- Rapidement des ' 


  O '
 (notamment en matière de main d¶œuvre)
apparaissent : seule l¶augmentation de la productivité permet de répondre à la demande. En
1733, une première innovation importante se produit : un artisan bricoleur, . 5%, invente
la « navette volante » (!  ) qui améliore sensiblement le rendement du métier à tisser
traditionnel : pièces plus larges, vitesse d¶exécution plus rapide). Le tissage des cotonnades va
prendre une croissance rapide après 1740.

£‘     


' : mécanisation de la filature et naissance du « ! 
 %
- A partir de 1750-1760, l¶expansion de l¶industrie cotonnière est menacée car la productivité
insuffisante de la filature n¶arrive plus à alimenter le tissage : il faut au moins 5 fileuses au
rouet pour un métier à tisser. Les fabricants se plaignent de la rareté et du coût croissant du fil,
et des délais de livraison qui désorganisent la production. Pour rompre ce déséquilibre une
seule issue est possible :
    
' qui permettrait d¶augmenter la
productivité.

- En 1765, un artisan à la fois tisserand et charpentier, 6' invente une machine à


filer : la «   &  » permettant à un seul ouvrier d¶actionner simultanément plusieurs
broches et de produire plusieurs fils en même temps. En 1768-1769,  O1(' , un
barbier, dépose un brevet pour un second type de machine à filer : le « " ! ». Enfin,
en 1779, un autre artisan tisserand 
Ê   met au point un 3e modèle, la «  
&  » qui réalise la synthèse des deux précédents et permet de produire un fil à la fois fin et
résistant. Sans cesse perfectionnée, la  &  sera la machine à filer type du 19e siècle.

- Cette rupture qualitative décisive se manifeste de manière éclatante : la  O  par


travailleur fait un bond en avant spectaculaire : la   &  multiplie par 10 la
productivité par rapport à un rouet traditionnel, la  &  par 100. Corrélativement le prix
de la livre de coton filé s¶effondre dans une proportion de 1 à 5 en 20 ans. La machine
d¶Arkwright, plus lourde et plus complexe exige une force motrice supérieure à la force
humaine pour la mettre en mouvement : besoin de la force hydraulique (d¶où le nom water-
frame pour la machine et de  = moulin pour l¶usine).

- Le recours à de telles machines motrices, relativement coûteuses, n¶a de sens en termes de


rentabilité que si on en utilise non pas une mais un grand nombre. L¶apparition de la machine-
outil fait surgir l¶exigence d¶une    O   %  O  O  . De grands
bâtiments en briques sont construits au fil de l¶eau (à proximité des moulins à eau) pour
accueillir les machines et la main d¶œuvre : c¶est le !   qui se développe.

5
£‘    7
- La percée technologique évoquée s¶est produite d¶abord à un stade du processus de
transformation mais vu l¶interdépendance des diverses opérations, la rupture survenue au
niveau de la filature va exercer rapidement des ## O  en amont et en aval de
la transformation du coton. Ainsi, dès la fin du 18e siècle, la mécanisation est généralisée.
Après le filage, c¶est le tissage qui est l¶objet d¶innovation : en 1785, 8OOÊ(' ,
un pasteur inventif, met au point un métier à tisser mécanique mû par la vapeur : le « " 
 ». La productivité du tissage est également multipliée par 5.

- Ainsi dans les années 1820, même si le travail manuel n¶a pas complètement disparu,
l¶industrie cotonnière anglaise est devenue une O     d¶un bout à l¶autre du
processus de production. Celle-ci se concentre dans des #" : la grande industrie
capitaliste est née. L¶industrie cotonnière se développe alors à des rythmes sans précédents :
multipliée par 30 entre 1781 et 1831. Le taux de croissance se situe à 5% par an dans cette
période avec un maximum de 6,5%. Avec de tels taux de croissance, l¶industrie cotonnière
britannique monte en puissance dans l¶économie du pays : le secteur passe de 0,5 % du revenu
national en 1770 à 8% en 1812. Malgré l¶importance des gains de productivité, les effectifs
employés par cette industrie sont multiplié par 4 en 50 ans (les ouvriers travaillant dans les
fabriques étant de plus en plus nombreux alors que l¶emploi à domicile s¶effondre).

- Orientée dès le départ vers les marchés extérieurs, l¶industrie cotonnière est marquée par une
forte croissance des 4   X 10 entre 1780 et 1800 (encore plus rapide que celle de la
production X3). Le taux d¶exportation (rapport exportation sur production totale) dépasse les
50% au début du siècle et atteint les 80% à la fin. L¶industrie cotonnière devient un secteur
décisif du commerce extérieur britannique en fournissant en 1830 la moitié des exportations
du pays (1/3 vers 1870 à cause du développement des autres secteurs industriels). La
Révolution cotonnière lance donc l¶économie britannique vers la croissance accélérée.

b)‘ La « filière lourde » : sidérurgie, machine à vapeur, chemin de fer


Simultanément, la Révolution industrielle s¶épanouit à partir d¶une 2nde filière de
transformation technologique, une « filière lourde » : la sidérurgie et les machines qui lui sont
liées.

r : O - : la machine à vapeur
r : #  2: la machine à vapeur de J Watt

£‘ Ô
 O " 
- Le point de départ de ce second processus se situe dans le charbon, c'est-à-dire les
possibilités offertes (mais aussi les problèmes) par cette  O ' 

. Dès la fin
du 17e siècle au moins, l¶Angleterre doit faire face à une crise de l¶énergie sous la forme
d¶une pénurie relative de bois (à cause des besoins croissants de la métallurgie traditionnelle
et des constructions navales). Le bois est utilisé comme énergie sous forme de charbon de
bois. La réponse à cette crise a résidé dans l¶utilisation systématique à une énergie de
substitution : le « charbon de terre » autrement dit la houille (ou charbon) abondante sur le
territoire britannique : Galles, Midlands, Lancashire, Ecosse«

- A partir du milieu du 18e siècle, le progrès de cette révolution énergétique enclenche un


ensemble de O
    $   , soit directement par introduction du
charbon comme matière première dans le processus de fusion des métaux, soit indirectement
par les progrès techniques pour l¶extraction du charbon dans les mines.

6
£‘ r    
  " 
- En 1709, un maître de forge anglais "  r"% a l¶idée de substituer le charbon de
terre préalablement grillé et transformé en 1 à un charbon de bois de plus en plus onéreux
afin de réaliser la fusion du minerai de fer dans un  # . Progressivement, le
procédé de fabrication de la fonte du coke s¶impose de 1750 à 1790 : 90% de la fonte du coke
est produite selon cette technique à cette date. Un nouveau problème se pose : comment
convertir en métal plus résistant cette masse de fonte croissante ? En 1784, 6% Ê 
apporte une réponse à ce problème en mettant au point le procédé du « OO
' », c'est-à-
dire l¶affinage de la fonte sur feu de coke dans un four. Le fer en fusion ainsi obtenu est
ensuite travaillé au laminoir entre des cylindres.

- En 1769, l¶écossais .  È, doté d¶un génie inventif reposant sur une solide culture
scientifique, invente la  & grâce au principe du condenseur. Celle-ci utilise la
pression de la vapeur comme force motrice, réalisant ainsi des gains spectaculaires de
puissance et d¶économie de combustible. La première machine à vapeur de Watt est installée
l¶année d¶après dans une mine écossaise comme pompe pour évacuer l¶eau qui s¶écoule dans
les galeries. En 1781, J Watt dépose un nouveau brevet, celui de la machine à double effet,
capable de produire un mouvement circulaire. Ce perfectionnement est décisif car désormais
la machine à vapeur peut devenir une machine motrice universelle : elle est capable
d¶entrainer ou de mettre en mouvement toute sorte de mécanismes ou de machines et donc de
se substituer au moulin à eau. Dès 1785, un filateur du Lancashire installe une machine de
Watt pour actionner des  &  . L¶avènement de la machine à vapeur couronne ainsi
tout le processus de mécanisation déjà amorcé : il fournit désormais à toutes les activités une
force motrice artificielle, indépendante du site naturel de l¶implantation industrielle, sans
limitation de puissance car utilisant un combustible abondant et transportable : le charbon.

r : O 9 : le chemin de fer

- Le O#est né dans la mine de charbon pour résoudre les problèmes d¶évacuation


de grande quantité de ce produit. Dès le 18e siècle, des rails en bois sont utilisés pour la
circulation de wagonnets dans les galeries des mines. Vers 1760, on remplace les rails en bois
par des rails en fer mais la traction est toujours animale. La mise au point de la machine à
vapeur à mouvement circulaire vient au bon moment pour fournir au transport sur rail la
machine motrice dont elle avait besoin. D¶abord utilisée comme machine fixe faisant fonction
de treuil, elle va être adaptée sur un chariot mobile circulant sur les rails : c¶est l¶invention de
la locomotive (due à l¶ingénieur anglais    vers 1810-1815). La première ligne de
chemin de fer est construite en France entre Saint-Etienne et Andrézieux en 1823 : il s¶agit
d¶un tronçon de quelques kilomètres servant à l¶évacuation du charbon de la mine vers la ville
voisine. Mais ce nouveau moyen de transport se développe vite : l¶invention de la chaudière
tubulaire par le français Marc Seguin vers 1826-1827 permet d¶accroître considérablement les
performances de la locomotive (en puissance, vitesse et consommation). En 1829, la
« Rocket » de Stephenson atteint la vitesse de 45km/h avec une charge de 20 tonnes. L¶année
d¶après est ouverte la ligne Manchester-Liverpool qui marque l¶évènement du chemin de fer
comme moyen de transport universel, caractéristique de la nouvelle ère technique et de la
civilisation mécanique qui se profile. Parallèlement l¶américain :
  adapte la machine à
vapeur pour le transport sur l¶eau : c¶est le «  ' ».

- Ces diverses inventions doivent être vues comme interdépendantes car elles sont nécessaires
les unes aux autres et constituent donc « une     » (expression de l¶historien

7
Louis Bergeron, 1978.) Les progrès techniques dans la sidérurgie et la métallurgie sont liés
aux avancées de la machine à vapeur : par exemple, c¶est elle qui permet la soufflerie de l¶air
nécessaire à la combustion dans les hauts fourneaux. C¶est aussi elle qui permet la
mécanisation du travail du métal après sa fusion en mettant en mouvement les laminoirs et le
marteau pilon inventé en 1839. De la même manière, seule la machine à vapeur rend possible
le développement à grande échelle de l¶extraction charbonnière en permettant le pompage de
l¶eau à grande profondeur et surtout pour la remontée mécanique de milliers de mineurs et de
centaines de milliers de tonnes de charbon.

£‘  ' O
O 
O O
- La généralisation des procédés de fusion de fonte au coke et l¶introduction du procédé de
puddlage permettent aux maîtres de forges de répondre enfin à la demande qui s¶élargit :
début de la mécanisation de l¶industrie textile, agriculture en transformation, commandes
d¶armement (artillerie navale et terrestre) encouragées par les guerres napoléoniennes
jusqu¶en 1815. Ainsi, la     O
  O   s¶accélère : elle est multipliée par 4
entre 1788 et 1806. Cet essor de la métallurgie s¶accompagne dès cette époque de la création
d¶une industrie moderne de constructions mécaniques : métiers à filer, à tisser, machines à
vapeur La Grande-Bretagne semble entrer dans un nouvel âge du fer ». Mais au début du
19e siècle, la sidérurgie garde un poids modeste dans le PNB : 6% en 1805, 3,6% en 1831 : ce
n¶est pas encore un secteur moteur de lµéconomie contrairement au textile car la demande
reste insuffisante.

- C¶est seulement après 1830 que commence une O4    O    de
l¶industrie lourde. Le déclic, d¶ordre économique, se situe du côté de la demande : l¶industrie
lourde trouve enfin un débouché de masse qui lui manquait : le chemin de fer. Avec le début
de l¶ère ferroviaire », l¶industrie lourde va connaître un fort développement : on parle de
boom ferroviaire » ou de  "  ». 10 000 km de voies sont construites entre 1830
et 1850. Un investissement massif de 200 M de £ provoque un flux de commandes : on a alors
besoin de milliers de km de rails, de milliers de tonnes de métal pour les ponts, les gares, les
aiguillages, de centaines de locomotives, de milliers de wagons Au paroxysme du boom
ferroviaire vers 1845-1847, 40% du fer nationale est destinée à la consommation ferroviaire.
Dans la décennie suivante, la Grande-Bretagne se lance dans l¶équipement ferroviaire du
monde : 370 000 km de voies installées en 1880. La construction de réseaux ferrés stimule
donc la demande en produits métallurgiques.

- L¶approfondissement de la mutation technique de la sidérurgie s¶effectue entre 1830 et


1875 : les procédés Bessemer en 1856 par fusion à partir de la fonte, Siemens-Martin en 1865,
permettent de fabriquer en masse un métal plus résistant : l¶acier ; à des prix compétitifs, en
faisant des gains spectaculaires de productivité et des économies de combustibles. Au RU,
l¶extraction minière est multipliée par 6 entre 1830 et 1880, la production de fonte est
multipliée par 5 entre 1830 et 1875 et enfin, l¶ascension la plus fulgurante est pour l¶acier :
multiplié par 10 entre 1860 et 1879. Le secteur d¶activité passe de 3,6% à 11,5% du PNB
entre 1830 et 1871 : elle devient alors une O   O
  .

r : O 2 : Le Creusot

- De nouveaux types de
4 O # émergent :
>‘ la  avec ses paysages de chevalets pour remonter les cages, de terrils de déblais et
dissimulés ses kilomètres de galeries souterraines. Des milliers de « gueules noires » y
travaillent : les hommes à l¶extraction, les femmes et les enfants qui poussent les

8
wagonnets. Ils vivent dans des corons, cités minières, concentrés autour des puits. La
Grande-Bretagne compte 200 000 mineurs en 1850, 500 000 vers 1880 et 1 M en
1900.
>‘    O' alignant ses batteries de hauts fourneaux (15 à 20 mètres de
haut), ses immenses ateliers rougeoyants (fours, laminoirs, marteaux-pilons) où les
ouvriers, les « métallos » s¶affairent dans une chaleur intense et des conditions de
sécurité très précaires. Certains sont peu qualifiés (chargement, manipulations
diverses), d¶autres sont très qualifiés (opérations de puddlage, laminage« ). Ils sont
unis par la dureté des conditions de travail.
>‘  
 O       avec ses machines-outils, engins de levage,
poulies, courroies de transmission où les ouvriers travaillent dans le bruit et le plus
grand désordre apparent. Ces ouvriers apparaissent comme les mieux lotis, un peu les
aristocrates » des ouvriers en regard de leur qualification et de leur niveau de salaire.
Une nouvelle géographie industrielle se met en place : les pays noirs » concentrent les
gisements houillers et à proximité des mines, les hauts fourneaux, les forges, les laminoirs et
les ateliers de construction mécanique. Paysages de cheminées en briques, de réseaux de
canaux et de voies ferrées. Autour se situent les interminables cités ouvrières.

£‘ Ô % O 


 
Årois piliers fondamentaux :
-   O ' '  
 "  qui joue un rôle majeur au cours du 19e
siècle comme source d¶énergie puis comme matière première pour la sidérurgie (coke) et
l¶industrie chimique (goudron de houille va devenir la base de la chimie organique à partir de
1850 : fabrication de colorants artificiels).
- Ô O"  
# (sous différentes formes : fonte puis acier après 1860). C¶est le
produit indispensable à la nouvelle industrie : sans lui pas de machine à vapeur, de machine-
outil ou de possibilité de développer le chemin de fer.
- Ô    
 
   &  : convertissant le charbon en énergie
mécanique, elle permet le mouvement des moyens de production : machines pour l¶industrie
textile, machines-outils des constructions mécaniques, des souffleries et des nouveaux
modes de transport.
L¶extraction charbonnière, la sidérurgie et les constructions mécaniques forment la triade de
base de la nouvelle industrie en fournissant l¶énergie, les matériaux, les machines (les biens
d¶équipements) nécessaires à toutes les autres branches. Leur épanouissement dans le second
tiers du 19e siècle marquera la maturité de la Révolution industrielle commencée un siècle
plus tôt dans l¶industrie cotonnière.

c)‘ La formation de la classe ouvrière


Parallèlement à la naissance puis à l¶essor de la Révolution industrielle, une catégorie sociale
nouvelle se forme dans les mines et les usines : la classe ouvrière. Celle-ci se développe au
rythme de la mutation économique qui en est le moteur.

r : O + : revenu d¶un ménage ouvrier en 1832

£‘  O

  
- Dans le long terme on assiste à un transfert de main d¶œuvre du secteur industriel ancien
vers le secteur moderne. Mais en fait, ce transfert a été très limité surtout pendant les
premières décennies de la Révolution industrielle. Ainsi, les premières générations d¶ouvriers
des fabriques sont composées O    4, venus d¶horizons divers, mais qui
globalement n¶appartenaient pas au monde de l¶artisanat ou de la proto-industrie.

9
- Une partie importante de la main d¶œuvre est O ' 
 (même si on ne peut pas
parler de foules de ruraux qui se précipitent dans les zones industrielles). L¶exode rural est
favorisé par l¶extension des rapports capitalistes dans les campagnes : la suppression des
terres communales entraine en effet des difficultés pour les paysans les plus pauvres. D¶autre
part, l¶assouplissement des législations rurales modifie le système d¶assistance des indigents
(ex : l¶accueil des pauvres sans travail par les paroisses n¶est plus une obligation). En même
temps, la baisse des prix agricoles à partir de 1815 augmente les difficultés économiques des
petits paysans propriétaires. L¶extension du machinisme dans les nouvelles fabriques entraine
un déclin progressif des industries rurales à domicile (notamment dans le secteur du textile).
Enfin, la pression démographique entraine une surcharge humaine dans certaines régions.
Åout cela contribue à l¶appauvrissement de la petite paysannerie salariée ou propriétaire à
partir des années 1820 en Grande-Bretagne, ce qui encourage l¶exode rural. Åous ceux qui
quittent la campagne ne rejoignent pas les usines car les villes attirent aussi pour les emplois
tertiaires qu¶elles offrent. Le phénomène est similaire en France, quoiqu¶en retard pas rapport
à la Grande-Bretagne.

- La grande industrie naissante fait aussi appel à


'  ' : une main
d¶œuvre issue de régions rurales appauvries d¶Europe. Par exemple, les Irlandais partent
travailler en Angleterre car la population de l¶île a beaucoup augmenté entre 1820 et 1840
(6,8 M à 8,5 M d¶hab.) grâce à l¶introduction de la pomme de terre qui éloigne le spectre de la
famine. De plus, les propriétaires anglais des terres irlandaises étendent leur domaine : ce qui
provoque une tension sur la demande de terres. Ainsi, vers 1844, l¶Irlande compte plus de 2 M
d¶indigents, soit près du quart de la population. La grande famine de 1846-1847 due à la
maladie de la pomme de terre provoque une forte immigration d¶Irlandais vers les zones
industrielles de l¶Ecosse, l¶Angleterre, et du Pays de Galles.

-    O '  de la période 1780-1880 explique aussi la croissance de la main


d¶œuvre. Les hommes sont plus nombreux à la campagne mais également à la ville par
croissance démographique. La France passe de 29 M d¶habitants en 1800 à 36 M en 1850
(+24%). L¶Angleterre et le Pays de Galles voient leur population augmenter de +90% entre
1800 et 1850. C¶est surtout le recul de la mortalité en Europe qui explique cette croissance
spectaculaire. Ainsi l¶industrie a trouvé un réservoir naturel de main d¶œuvre.

- Le 
O # O # est fréquent : c¶est un travail familial qui ne constitue
pas une nouveauté (c¶est le «      » qui existait déjà). Il assure une certaine
élasticité dans la production et l¶amélioration du revenu des ménages. Mais ce travail prend de
l¶ampleur entre 1780 et 1830 dans de nombreux secteurs industriels (et notamment dans
l¶industrie textile : les femmes et les jeunes filles représentent près de 70% de la main
d¶œuvre dans les filatures de lin). Dans les mines les femmes sont peu nombreuses au fond
mais très présentes en surface pour le triage du charbon : 5% du personnel des mines du Nord-
Pas-de-Calais en 1891. Il en est de même pour les enfants, à la différence que beaucoup
d¶entre eux, parfois très jeunes sont utilisés au fond : en 1867, 15% des effectifs des mines du
Nord-Pas-de-Calais sont des enfants. En effet, ils peuvent se faufiler plus facilement dans les
veines de charbon peu larges. La situation est identique en Belgique. La présence des femmes
et des enfants dans le travail industriel est une des images classiques de la « légende noire »
du 19e siècle. Elle résulte du besoin pressant de main d¶œuvre des entreprises, de la volonté
des employeurs de peser sur les salaires (par la concurrence faite aux hommes), de la volonté
de dissuader les grèves (femmes et enfants sont moins organisés syndicalement) et enfin du

10
besoin d¶amortir les fluctuations conjoncturelles en disposant d¶une main d¶œuvre facile à
licencier.

£‘ 
  O   

r : : - : règlement d¶une filature de l¶Essonne (1828)

- Le 
 O 
dû à la mutation économique présente des caractères nouveaux par
rapport au travail artisanal ou à la proto-industrie :
>‘ Åravail en usine, c'est-à-dire en grande unité de production
>‘ Séparation domicile- lieu de travail
>‘ Promiscuité et tensions issues de la concentration d¶une grande masse d¶hommes en
un même endroit.
>‘ Cadre de travail difficile à supporter (enfermement, bruit, odeurs, humidité, chaleur )

- Le travail industriel est ensuite un travail dépendant de la   qui est au centre de la
production. Dans une mine, le travail dépend de règles strictes impliquant une division des
tâches : piqueurs, boiseurs Il n¶y a donc plus guère besoin de qualification professionnelle
puisqu¶on ne demande plus aucune initiative, aucune créativité, aucune indépendance dans le
travail. D¶où un processus de déqualification de la force de travail (sauf pour les ouvriers
qualifiés de la sidérurgie ou de l¶industrie mécanique : mécaniciens, puddleurs ) Ce type de
labeur exige de suivre le rythme de la machine ou les normes d¶extraction : il faut travailler
avec régularité et continuité pendant des heures. C¶est enfin un travail soumis aux exigences
du profit car l¶entrepreneur cherche avant tout la rentabilité des capitaux. Celle-ci implique
l¶augmentation constante de la productivité. De là, résulte la double tendance :
>‘ de l¶allongement de la durée de travail (suppression de fêtes traditionnelles chaumées,
lutte contre le « Saint-Lundi » jour de la semaine marqué par un fort absentéisme)
>‘ à l¶intensification du travail, c'est-à-dire l¶augmentation de la quantité de travail
fournie par l¶ouvrier dans une unité de temps (suppression des temps morts,
intensification du rythme de travail, des cadences )

- Ceux qui avaient travaillé auparavant dans les campagnes comme ouvriers agricoles sont
habitués au rythme naturel du jour, à la période des semailles et celle des récoltes (travail
intensif) avec entre temps des moments d¶inactivité. Ils se trouvent souvent inadaptés au
travail industriel à moins de les former. Il s¶agit avant tout d¶un O ' » de quelques
jours pour habituer la main d¶œuvre aux nouvelles conditions : on apprend l¶assiduité, la
régularité, l¶obéissance Pour arriver à ses objectifs, on peut amener le travailleur à faire
volontairement ce que l¶on attend de lui donnant une stimulation : primes d¶assiduité, de
bonne conduite, promesse de promotion, salaire à la pièce (stimulants matériels). Le salaire
dépend alors de la quantité et de la qualité du travail. On peut aussi l¶imposer par la contrainte
et la discipline. La contrainte a une base juridique : c¶est l¶autorité du patron, liée à la
propriété privée qui lui confère un pouvoir de commandement incluant droit de sanction et
droit de licencier. Les personnels d¶encadrement sont les instruments de la contrainte.
Ouvriers sortis du rang, attachés par des avantages matériels, ils sont chargés de faire
respecter auprès des autres travailleurs, l¶autorité du patron. Ils peuvent infliger des amendes
destinées à réprimer les retards, l¶ivresse, les abandons de poste

r : O ; : affiche de la CGÅ revendiquant les 8 heures de travail.

11
- C¶est souvent sur le terrain des O   O 
(discipline, durée, rythme) qu¶a
commencé la résistance ouvrière. Le mouvement social de contestation a d¶abord été un refus
de la prolétarisation et des normes qu¶elle impliquait. La volonté des ouvriers de ne pas
dépendre uniquement de leur travail à l¶usine ou à la mine, de garder des revenus d¶appoint
garant d¶une certaine liberté financière et physique les a conduit à essayer de conserver le plus
longtemps possible une deuxième activité : cela les a conduits à lutter contre l¶allongement du
temps de travail. C¶est le cas par exemple, des mineurs de Carmaux étudiés par Rolande
trempé. Ces paysans-mineurs se sont battus contre les modifications du temps de travail pour
conserver la possibilité de cultiver leur lopin de terre. C¶est ainsi que de 1854 à 1870, la
majorité des conflits sociaux à Carmaux porte sur la discipline, la durée et le rythme du travail
(car les ouvriers veulent garder de la force pour cultiver leur champ). Les 4 grèves
(victorieuses) de Carmaux de 1857 à 1869 ont eu pour but de lutter contre la volonté de la
compagnie d¶allonger la durée du travail au fond.

£‘  < 
O
O 
  
- Les conditions de travail des premières générations ouvrières sont caractérisées par l¶aspect
répulsif du cadre de travail : image classique de «
 $"' » au 19e siècle où tout
l¶environnement accentue la pénibilité du travail et la précarité de la vie ouvrière. Ce sont
surtout les femmes et les enfants qui pâtissent de la vie dans l¶usine ou la mine. L¶humidité
multiplie les cas de maladie pulmonaire ; les positions dans le travail entrainent des
déformations du bassin et de la colonne vertébrale (ce qui rend les accouchements difficiles).
Le mauvais allaitement et l¶absence de soins postnatals accroissent la mortalité en bas âge. Le
rythme de travail, les stations debout prolongées, le manque de sommeil ou d¶air pur
entrainent de nombreux troubles physiques chez les enfants : blocage de leur croissance,
scolioses, cyphoses, déformations des jambes«

- Ces problèmes sont accentués par l¶augmentation de la O O 


imposée par les
entrepreneurs dans la première phase de la Révolution industrielle. Les journées atteignent 13
à 14 heures de travail. Les innovations, telles que l¶éclairage au gaz, permettent d¶échapper
aux contraintes de la lumière du jour. Il en résulte une détérioration de l¶état de la classe
ouvrière sous les efforts physiques et nerveux (temps de repos et de sommeil inférieur au
minimum physiologique requis). Il ne faut pas négliger non plus les difficultés culturelles
liées à ces conditions de vie : le temps pour les loisirs est réduit au strict minimum, ce qui
empêche toute ouverture sur un autre horizon que celui du travail quotidien. Le travail des
enfants rend la scolarisation impossible.

r : :  4 :  $ ()* ë   : les conditions de travail dans les fabriques


r : # 2 : étapes du progrès social.
r : O = : évolution des salaires en France et en Allemagne.

- Une
'
  se met en place progressivement pour réduire les abus. Une loi de 1833
interdit en Angleterre l¶emploi des enfants de moins de 9 ans et fixe à 8 heures la durée du
travail pour les enfants de 9 à 13 ans et à 12 heures pour ceux de 14 à 18 ans. Une loi en 1842
prohibe l¶emploi au fond de la mine des enfants de moins de 10 ans. Celle de 1847 fixe à 10
heures la journée de travail maximum pour les femmes et les moins de 18 ans. En France, le
décret du 2 mars 1848 fixe à 10 heures à paris et à 11 heures en province, la durée journalière
de travail. Mais la réglementation s¶applique avec beaucoup d¶élasticité, notamment en
France : le décret du 2 mars est abrogé dès août 1848. Il faudra attendre la fin du 19e siècle
pour voir se généraliser la journée de 10 heures. Louis Bergeron dans ë     
+   , souligne « le caractère implacable du travail industriel qui a pour loi

12
suprême la continuité de la production et la production du profit et que le travailleur [dans cet
optique] n¶a plus à s¶aligner sur les rythmes cosmiques ou corporels ».

- La société est donc profondément '


 et notamment devant la vie. La mort frappe
les enfants en grand nombre à cause de la mauvaise santé de leur mère et des conditions
d¶hygiène et la nourriture insuffisante. La mortalité infantile atteint 300 pour mille.
L¶espérance de vie de la classe ouvrière est nettement inférieure à celle des autres catégories
sociales et milieux professionnels. Pierre Léon dans u 
        
  , donne comme espérance de vie à Manchester au milieu du 19e siècle : 40 ans en
moyenne et 24 ans pour les mineurs (beaucoup d¶enfants meurent jeunes et font baisser
l¶espérance de vie moyenne). L¶autre fléau qui touche la classe ouvrière est celui des maladies
professionnelles : la tuberculose fait des ravages chez les femmes et les enfants des usines
textiles, des maladies des yeux touchent les mineurs, des affections parasitaires provoquent
des hémorragies. L¶accident du travail est présent quotidiennement et nourrit un sentiment
d¶insécurité, d¶incertitude du lendemain. Les accidents mortels sont fréquents surtout dans les
mines : à Carmaux, il y a chaque année entre 1856 et 1912 entre 1 et 6 accidents mortels par
an à l¶exception de 4 années sans accidents mortels.

- Mais globalement, la   O    


  sensiblement à partir de 1845 en
Grande-Bretagne et à partir de 1855 en France. Le moteur de cette amélioration est la hausse à
peu près continue du salaire nominal qui aboutit à un doublement du salaire réel sur un demi-
siècle (notamment à cause de la hausse deux fois plus faible du coût de la vie). Mais les crises
cycliques (1817-1832, 1838-1841) ont entrainé un chômage important qui a pu atteindre 25-
30% de la population active dans certains centres industriels : ainsi les salaires moyens ont-ils
alors baissé. L¶historien Jacques Rougerie montre la stagnation ou la baisse des salaires
nominaux du prolétariat ouvrier parisien entre 1820 et 1850 (avec un recul de la
consommation alimentaire de viande et de vin, une poussée du chômage en 1847 et 1848 et
une forte mortalité due au choléra en 1832 et 1849). Ainsi, c¶est l¶ouvrier qui a eu un travail
continu qui a sans doute vu son niveau de vie s¶améliorer mais les différences entre branches
sont importantes.

- L¶approche sociologique de la classe ouvrière montre une véritable   O O du


prolétariat en formation au cours du 19e siècle. Crise dont les romanciers de l¶époque comme
Emile Zola dans *   ,ë'-  ,ë .   /ü ou Victor Hugo dans ë 

' , ë  .      ü ont révélé l¶existence. Ils montrent la misère
humaine et la violence auxquels sont soumis les prolétaires : alcoolisme, prostitution,
criminalité, abandon d¶enfantsü Louis Chevalier dans sa thèse : 0   '  ,  
   /    
  , montre le lien entre l¶alcoolisme
et les conditions de travail ou l¶habitat. Le cabaret est dans les quartiers ouvriers un lieu de
défoulement mais aussi le seul lieu collectif et attrayant, loin de l¶usine et du logement
insalubre et surpeuplé. Cette démoralisation des classes laborieuses est liée à la crise urbaine
due à l¶industrialisation. Enfin, il y a aussi une crise de la cellule familiale dans les milieux
ouvriers à cause de la dissociation domicile ± lieu de travail, du salariat des femmes et des
enfants et des horaires longs de travail (et parfois décalés entre les membres de la famille).

r : : + :  $ * 1ë   2 : machine à vapeur et révolution industrielle


r : :  ;:  2 : l¶Angleterre industrielle en 1850
r 3 :  = : schéma de la mutation de la sidérurgie et du système industriel p 63.

13
Ê    O
   

a)‘ Les limites des facteurs favorables


r : O 9 : la modernisation agricole

£‘ 
 '

- Longtemps la 
 '
 a été considérée comme essentielle voire nécessaire à la
Révolution industrielle. L¶exemple anglais a servi l¶interprétation de K Marx. Il a vu dans le
mouvement des   le point de départ d¶un exode rural massif. Ce mouvement touche
des paysans, plus ou moins pauvres, propriétaires ou non de leurs terres qui émigrent vers les
villes et qui constituent « l¶armée de réserve » dont a besoin l¶industrie naissante. De plus
l¶augmentation de la productivité agricole et de la production, libère les capitaux nécessaires à
l¶investissement industriel. La production assure aussi évidemment, les besoins en nourriture
des nouvelles populations urbaines. W. Rostow, dans ë 
      

   , 1970, soutient aussi l¶idée selon laquelle la révolution agricole a été la condition
sine qua non de la croissance industrielle. Pour lui, l¶agriculture non seulement rend possible
et même favorise la révolution démographique mais aussi elle engendre les nouvelles
industries textiles et métallurgiques en leur fournissant une grande partie de leur capital et des
entrepreneurs qui vont se lancer dans les nouveaux secteurs clés de l¶économie moderne.

- Cette thèse est aujourd¶hui largement  , ainsi que la notion même de révolution
agricole. D¶abord, les mutations agricoles ne surviennent que tardivement : 1830 en Grande-
Bretagne et 1840-1850 en France (donc après le « décollage industriel »). En outre, les
enclosures ne sont pas véritablement à l¶origine de cette « armée de réserve » dont parlais K
Marx, car elles n¶ont pas véritablement engendrées un vaste et rapide transfert de main
d¶œuvre vers l¶industrie. Les progrès de l¶agriculture ont plutôt accompagné la Révolution
industrielle. Ils n¶ont pas été une condition préalable ni nécessaire à la croissance
économique. En revanche, la mutation industrielle a sensiblement accéléré la modernisation et
l¶efficacité de l¶exploitation du sol.

£‘ 
 O ' 
- La révolution démographique est également apparue à certains comme un élément
déterminant pour expliquer la Révolution industrielle. C¶est un fait qu¶il y ait une forte
croissance démographique à la fin du 18e siècle et au début du 19 e siècle : début de la
   O ' . Ainsi, producteurs et consommateurs, plus nombreux, auraient
stimulé la mutation économique : la population double en Grande-Bretagne entre 1750 et
1800, ce qui correspond à la période de forte croissance économique. La même coïncidence se
retrouve en Allemagne et aux EU dans les années 1840-1850, en Russie dans la période 1850-
1900 pendant laquelle la population doubleü Les analystes marxistes voient dans l¶essor
démographique, un élément de surpopulation des campagnes qui va fournir une main d¶œuvre
abondante et donc bon marché à l¶industrie naissante.

- Mais le lien direct entre révolution démographique et Révolution industrielle n¶est pas si
évident que les statistiques semblent le dire. Ainsi, la Grande-Bretagne n¶a pas été le pays le
plus dynamique démographiquement alors que son processus d¶industrialisation a été le plus
rapide et important d¶Europe. En plus les chronologies ne sont pas toujours concordantes et
on peut estimer que les deux phénomènes ont interagi l¶un sur l¶autre.

14
£‘ >
O  4
-   
  O 
(que K Marx appelle « l¶accumulation primitive du capital »)
aurait aussi joué un rôle non négligeable en assurant des disponibilités financières nécessaires
à l¶investissement industriel. L¶application pratique à une grande échelle des innovations
technologiques, la mise en œuvre dans les usines de machines à vapeur, la mécanisation de
l¶industrie nécessitent effectivement des financements importants. Ainsi, certains économistes
ont vu dans l¶accumulation du capital une condition sine qua non de l¶investissement et donc
de la Révolution industrielle. D¶où viennent ces capitaux ? Le capitalisme commercial qui a
précédé le capitalisme industriel a permis un transfert des profits réalisés dans le commerce et
notamment dans le commerce colonial : Liverpool et son arrière-pays a bénéficié de la traite
des esclaves. K Marx dans ë  0 affirme « ce fut la traite des nègres qui jeta les
fondements de la grandeur de Liverpool : pour cette ville orthodoxe, le trafic de chair
humaine constitua la méthode d¶accumulation primitive de capital. Celui-ci arriva suant le
sang et la boue par tous les pores ». D¶autre part, la rente foncière a donné naissance à un
appareil industriel : par exemple, en France, les grands maîtres de forges sont généralement
issus des grandes familles nobles de l¶Ancien Régime.

- Pourtant, il faut ramener à de justes proportions les profits tirés du commerce et de la traite
négrière. Le 4O # de ce commerce est estimé à seulement 7 ± 15%. On estime que la
place tenue par les profits de la traite dans l¶investissement consacré à la révolution
industrielle s¶élève à 0,11% par an. En outre, lorsqu¶elle a existé, cette accumulation du
capital agricole et commercial n¶a guère pu contribuer à l¶investissement industriel pour deux
raisons :
>‘ L¶inexistence ou l¶inefficacité de l¶appareil bancaire dont les structures ne permettent
pas d¶organiser ce transfert financier en direction de l¶industrie naissante.
>‘ L¶attrait considérable qu¶exercent d¶autres placements assurant une sécurité
incomparable : achats d¶offices, fonds publics, acquisition de terresü
Ainsi, en France, il y a un véritable désintérêt du capital commercial pour l¶investissement
industriel.

- Enfin, on peut conclure à la faiblesse des liens directs et étroits entre accumulation primitive
et Révolution industrielle en rappelant que les    nécessaires au démarrage
économique ont été très réduits. Pour l¶industrie textile, qui est la première qui se développe,
l¶apport financier initial nécessaire à la création d¶une entreprise est faible. D¶abord parce que
ces entreprises sont au début de taille très réduite et que les machines à l¶époque ne coûtent
pas très cher. Les besoins en capital fixe sont réduits du fait de l¶installation fréquente des
usines dans des locaux déjà existants (maisons particulières, fermes, hangarsü) En outre, de
nombreux entrepreneurs ont plusieurs activités, ce qui leur procure des revenus suffisants
pour investir leurs fonds propres. De la même façon, au début de la Révolution industrielle,
les profits sont très hauts : 20 à 30% (grâce aux faibles coûts des techniques et de la modicité
du capital fixe). Or, ces profits sont systématiquement réinvestis, dans le cadre d¶un
autofinancement très fréquent. L¶industrie nourrit donc son propre développement.
L¶industrie anglaise, par exemple, a financé elle-même l¶essentiel de sa mutation. Il faut
attendre l¶ère des chemins de fer et de l¶industrie lourde pour que les capitaux extérieurs
soient nécessaires. Le système bancaire doit alors s¶adapter pour répondre à ces nouveaux
besoins en termes d¶investissement. Cela se passera plusieurs décennies après le décollage
industriel.

15
£‘ >
O 4
  $  
- /4 È" dans ë4             , établit un lien entre
religion protestante et esprit d¶entreprise, entre niveau d¶instruction et développement
économique. Différents facteurs expliquent la mutation fondamentale des valeurs et des
mentalités de l¶individu en Grande-Bretagne dès le début du 18e siècle : une monarchie
constitutionnelle stable et assez démocratique, une politique gouvernementale qui reconnait le
profit individuel et le développement économique comme un objectif suprême... Ainsi, 8.
6 " "( dans ë  5
.  , pense que la Révolution industrielle est le fruit ultime
des révolutions bourgeoises qui ont juridiquement libéré l¶individu en Angleterre. Aux EU,
une éthique puritaine et un « darwinisme social » incarnés par « l¶évangile de la richesse »
constitue un élément qui peut passer pour essentiel de l¶industrialisation américaine. Profit et
religion sont donc liés : pour Rockfeller : « gagner de l¶argent est un don de Dieu comme
l¶instinct artistique, musical ou littéraire. » Déjà, auparavant, les physiocrates français
(Quesnay) ou les libéraux britanniques avec Adam Smith, les philosophes allemands avec
Kant ont glorifié l¶individualisme, le libéralisme, l¶initiative et la circulation des capitaux ;
tout cela aurait préparé l¶éclosion du capitalisme industriel.

- Si ces facteurs politiques, idéologiques ou culturels ont sans doute joué un rôle non
négligeable, il ne faut pas pour autant les considérer comme suffisants. En fait, la croissance
industrielle ne résulte pas d¶une série de modernisations sectorielles comme une succession de
phases de progrès (agriculture, démographie, commerce extérieur, capital accumulé,
technique industrielle, évolution de la penséeü) mais comme une    O  "
 qui
lie tous les progrès de façon irréversible et inter reliée (:O 0O
: ë  6  
  , 1979.) Il existe donc un faisceau convergent d¶éléments favorables à la Révolution
industrielle.

b)‘ Marché, innovation, profit : les sources de la Révolution industrielle


£‘ Ô   O 
- Le capitalisme suppose d¶abord, comme l¶a montré North dans son étude sur ë0 

      78, 92, une    O  . D¶après lui, le marché est le
moteur essentiel du changement économique. A l¶origine de la Révolution industrielle, il y a
l¶appel du marché, c'est-à-dire la croissance accélérée de la demande à partir de 1750. Cette
extension du marché s¶effectue d¶abord à l¶intérieur des pays (importance de la croissance
démographique). Mais plus qu¶à la taille du marché, il faut s¶intéresser à sa structure.
L¶Angleterre à la fin du 18e siècle offre l¶exemple d¶un marché de type nouveau : le plus
grand marché homogène du monde avec 2 caractéristiques fondamentales :
>‘ Une circulation aisée car l¶Angleterre des années 1760 ± 1800 ne connait déjà plus
les douanes intérieures qui ralentissent la circulation dans les autres pays européens
et en augmentent le coût (comme par exemple dans la France d¶Ancien Régime). Elle
dispose également d¶un bon réseau de voies de communication (3200 km de canaux
et 1800 km de routes). Les zones rurales s¶intègrent rapidement à l¶économie de
marché grâce à la qualité des voies de communication.
>‘ Une consommation de masse dont l¶origine se trouve dans la hausse constante des
revenus de larges factions de la population. Les salaires, surtout pour la main
d¶œuvre non qualifiée, ont progressé en valeur nominale de 20% à Londres et de
50% dans certaines régions comme le Lancashire. La Grande-Bretagne a le revenu
moyen le plus élevé d¶Europe au début du 19e siècle : les Anglais et les Gallois sont
les mieux alimenté d¶Europe (pain blanc, viande, produits laitiers). Le pouvoir
d¶achat en hausse se greffe sur une structure sociale plus égalitaire qu¶ailleurs, ce qui
favorise l¶augmentation de la demande globale et un début de standardisation des

16
biens de consommation. Avec la hausse des revenus disponibles, la demande de
biens de consommation augmente (chaussures en cuir, habits en laine puis en coton,
meublesü).
JP Rioux, historien, écrit que « au marché ancien où les produits de luxe sont absorbés par une
minorité de privilégiés se substitue le marché moderne de masse, géographiquement et
socialement étendu » => il existe un modèle britannique de consommation.

- Mais l¶appel du marché vient aussi de la OO 4, c'est-à-dire de la conquête


par l¶Angleterre des vastes   
4 mais aussi des marchés européens. Elle
dispose d¶une flotte de voiliers très perfectionnés, de ports bien aménagés (Londres,
Liverpool), de compagnies commerciales efficaces. L¶Etat encourage cet essor commercial
par la suppression des droits à l¶exportation. L¶Angleterre s¶assure la maitrise des débouchés
commerciaux en Europe d¶abord et surtout ensuite en Amérique, en Afrique, en Orient et en
Extrême-Orient. Le marché chinois et surtout le marché indien ouvrent aux produits
britanniques des perspectives sans précédent => véritable explosion de la demande (et
notamment des cotonnades).

£‘     # 


- Les entrepreneurs, marchands-fabricants, ont réagi en augmentant la production dans le
cadre des structures traditionnelles (par le     ). Mais rapidement, cela n¶a pas
suffi assez : le goulot d¶étranglement de la fin du 18e siècle va susciter une vague
O     
' destinée à la fois à économiser la main d¶œuvre, à réduire les
coûts et à satisfaire la demande par l¶augmentation de la production.

- L¶aiguillon du  # (qui atteint parfois des niveaux remarquables), la pression de la


demande font que les entrepreneurs ont accepté le risque de l¶innovation, de l¶aventure
technologique d¶où sortira l¶industrie cotonnière modernisée et mécanisée.
L¶expérimentation et les innovations sont désormais appliquées à une grande échelle et
provoquent à leur tour des percées technologiques en chaine, généralisant la mécanisation.

- Ê 
   : se constitue ainsi une dynamique de la croissance basée sur trois piliers :
l¶économie de marché, l¶innovation technique et la recherche du profit. La société entière est
attirée par l¶  . Plus que les capitaux ou les prix, c¶est le marché, intérieur et
extérieur, avec ses profits, ses appels, ses pressions qui devient l¶élément moteur. Jean Paul
Rioux : « Pour coordonner, pour accroitre la productivité et la rentabilité de la main d¶œuvre
et des capitaux, pour maitriser les mécanismes économiques nouveaux, un pari est nécessaire,
un saut dans l¶inconnu. L¶accumulation des forces productives nouvelles est telle que des
goulots d¶étranglement se forment. Seules les révolutions des techniques et des transports
permettront l¶envol vers le profit accru du capitalisme industriel ».

17
Ô 
  O  
  

    
 O
O 
  
r : O , : carte de l¶Europe.

a)‘ Le « modèle anglais » : réalité historique et illusion théorique


r : O  : carte RU.

£‘ ?O$0'  O# 
- La Grande-Bretagne, première nation industrielle est un point de référence obligé à cause de
l¶  et de l¶  de son développement industriel. Elle conserve cette avance
jusque dans les années 1860. Elle est le lieu d¶émergence de 90% des innovations techniques
fondamentales des 18e et 19e siècles. Sa réussite éclatante fait de la Grande-Bretagne en moins
d¶un siècle, une économie dominante à l¶échelle mondiale (comme le manifeste 4$ 
 .  de 1851). Avec 22% de la population mondiale, le Royaume-Uni consomme, vers
1860 : 27% de l¶énergie mondiale, utilise 49% du coton brut travaillé dans le monde, produit
53% du fer mondial => le RU apparait comme un modèle jalousé, redouté et admiré.

- Dès la seconde moitié du 18 e siècle, on constate une 


 O   O  O

industriel anglais de la part de chefs d¶entreprises et de responsables politiques. Ce processus
d¶imitation vise au transfert de technologie. De multiples voyages, enquêtes, stages
d¶ingénieurs ont lieu dans les régions industrielles et les entreprises britanniques : les
sidérurgistes français, De Wendel, Eugène Schneider, Georges Dufaud font le voyage en
Angleterre au début du 19e siècle. Mais c¶est aussi
  'O 
systématique qui
va permettre d¶importer par des moyens illégaux des brevets, techniques et plans de
machinesü malgré l¶interdiction par la loi anglaise de l¶exportation de machines. Enfin, on
assiste à des débauchages à prix d¶or d¶ingénieurs, inventeurs, spécialistes, ouvriers qualifiés,
mécaniciensü britanniques. Nombres de ces spécialistes dynamiques s¶établissent d¶ailleurs
à leur compte et fondent des entreprises pionnières sur le continent. Ils contribuent ainsi à la
diffusion en profondeur des innovations en Europe. Par exemple, James Jackson introduit la
fabrication de l¶acier dans la région de Saint-Etienne en 1815, John Cockerill débute la
sidérurgie moderne dans le Bassin de Liège en Belgique.

- Mais analyser l¶industrialisation de tel ou tel pays en comparaison du modèle anglais et


trouver des « bons » et des « mauvais » élèves n¶est pas une démarche très pertinente. Car les
    O O 
   ne peuvent pas être identiques sous prétexte qu¶on utilise les
mêmes procédés techniques. Les conditions internes des pays (facteurs de production,
ressources naturelles, présence de capital, de travail, configurations des marchés) entrent aussi
en ligne de compte. Les entrepreneurs locaux doivent s¶adapter aux conditions internes des
agents économiques du développement. La chronologie, le rythme, les secteurs d¶activités,
l¶articulation entre ancien et nouveau système sont forcement différents du modèle de base.
Ainsi, le développement du capitalisme industriel au 19e siècle, prend, malgré l¶influence
incontestable de la Grande-Bretagne, des « voies nationales » relativement originales vers la
civilisation industrielle. En plus, ce phénomène ne touche que deux régions du monde :
l¶Europe du Nord-Ouest (Grande-Bretagne, Belgique, France, Suisse, Allemagne, Ouest de
l¶Empire autrichien) et le Nord-Est des EU (triangle Boston-Chicago-Washington).

r : #  * : '   9* ë   : répartition de la production industrielle


mondiale vers 1870

18
£‘    O O 
  "
L¶originalité du processus d¶industrialisation britannique se manifeste par :
-‘ Son rythme : d¶abord « explosif » au démarrage (1780-1800) : schéma du # !!.
-‘ Son caractère radical c¶est à die la substitution rapide et complète des techniques et
structures nouvelles (!  ) aux anciennes : au moins dans les secteurs ± clés.
Exemple : extinction du dernier haut fourneau à bois en 1809.
-‘ Sa chronologie interne : deux phases : 1°) le textile où l¶industrie cotonnière joue le
rôle de moteur de l¶économie (1770-1830) ; 2°) industrie lourde : sidérurgie et
constructions mécaniques sont stimulées par la demande massive au niveau
ferroviaire.
-‘ Ses agents : rôle décisif d¶une multitude d¶entrepreneurs individuels venant de
l¶artisanat ou du commerce (sans rôle majeur de l¶Etat ou des banques).
-‘ Le rôle fondamental des marchés extérieurs avec l¶orientation précoce vers
l¶exportation massive aussi bien de l¶industrie textile (cotonnades) que métallurgique
ou mécanique (machines, matériel ferroviaire, construction navale)=> Le RU est eu
19e siècle «   "# !   "  » (l¶usine du monde). Son économie est déjà
profondément inséré dans l¶économie mondiale : en 1870 : les exportations
représentent 22% du revenu national.

b)‘ Le « bon élève » belge


£‘ ÔO' 
- La Belgique connait un processus d¶industrialisation très voisin du modèle anglais. Il
commence vers 1800-1810. La proto-industrie était déjà présente : textile en Flandres,
extraction de charbon et métal en Wallonie. L¶industrialisation est rapide puisque l¶essentiel
de la transformation de la structure se réalise entre 1800 et 1850. D¶après les indices pondérés
(par sa population), la Belgique apparait dès le milieu du 19e siècle à un niveau de
développement proche de celui du RU.

- Elle connait une industrialisation en deux temps : une première phase entre 1800 et 1830
voit le développement de
O    en Flandres autour de Gand (la mécanisation
de la filature commence sous l¶Empire en 1805-1810) à l¶initiative de pionnier comme Liévin
Bauwens. La mécanisation du tissage commence vers 1825 au prix de graves conséquences
sociales. La généralisation de la machine à vapeur date de 1835. La deuxième phase est celle
de l¶approfondissement de l¶industrialisation avec l¶essor de
O 
O accompagnée
de l¶extraction charbonnière en Wallonie (1e région productrice de charbon d¶Europe entre
1840 et 1850). La construction de machines, la sidérurgie se développent (1er haut fourneau à
coke en 1823 à Seraing près de Liège grâce à l¶installation du britannique John Cockerill).
Cette poussée coïncide avec la construction rapide du réseau ferroviaire qui est un stimulant
essentiel (500 km de voies ferrées construites dans les années 1830).

- Le marché extérieur joue un rôle très important. Le rôle du marché extérieur est d¶autant
plus important que la Belgique est un petit pays au marché intérieur nécessairement limité.
L¶essentiel du commerce se fait vers la France et l¶Allemagne : exportation de charbon sur le
marché français, d¶acier sur le marché allemand.

£‘    
- De simples nuances : resserrement de la chronologie, télescopage plus prononcé des deux
phases d¶industrialisation, rôle moteur plus important de l¶industrie lourde par rapport au
textile.

19
- De véritables différences :
8 joue un rôle important dans la période 1800-1830 par sa
politique protectionniste mais aussi par ses interventions plus directes (subventions,
investissements). Surtout, un rôle essentiel revient à partir de 1825-1830, à des institutions
capitalistes d¶un nouveau genre :
  " à forme de   % (Société
Générale en 1822, Banque de Belgique en 1835). Elles interviennent directement et
puissamment dans l¶industrialisation en investissant, en lançant et en finançant un grand
nombre d¶entreprises minières, métallurgiques, ferroviaires. Cette intervention directe du
capital dans l¶industrialisation (exceptionnelle dans cette première moitié du 19e siècle) est en
fait une innovation.

c)‘ Le cas français : semi-échec ou voie originale ?


r : # , :  :* ë   : l¶industrialisation française

£‘ O

'#@ 
- Au premier abord, la France présente bien, dans les deux premiers tiers du 19e siècle, tous
les signes d¶une Révolution industrielle. On assiste à une large diffusion des   
 

 : apparition dès la fin du 18 e siècle de la «   &  », la 1e machine à vapeur


de J Watt est installée en 1779 à Chaillot, le 1er haut fourneau au coke au Creusot en 1785ü Il
n¶y a jamais eu de véritable fossé technologique entre la France et le RU et ce d¶autant plus
que nombreuses innovations sont d¶origine française (métier à tisser Jacquard, chaudière
tubulaire de Séguin, gaz d¶éclairage de Lebonü La production est rapidement mécanisée et
concentrée (!   comme en Angleterre).

- La mutation commence dans le 4


. Sous l¶Empire (1800-1810), s¶amorce la
mécanisation de la filature de coton : à Paris (52 filatures, 5000 ouvriers), à Rouen et en
Haute-Normandie, dans la région lilloise et en Alsace. Cette poussée d¶industrialisation « à
l¶anglaise » gagne ensuite l¶industrie de base productrice de " O  à partir des
années 1820-1830, puis s¶accélère dans la période 1845-1865 en liaison directe avec
l¶équipement ferroviaire intensif qui met en place le réseau français. Cette poussée industrielle
s¶accompagne par l¶essor de
4   "  sur le pourtour du Massif Central
(Blanzy, Decazeville, Carmaux, les Cévennes et surtout le bassin de la Loire autour de Saint-
Etienne : la production est multipliée par 5 entre 1815 et 1847, c¶est alors le 1er lieu de
production en France). Vers 1850, c¶est le Nord qui devient la principale région productrice
de charbon : 6 M de tonnes en 1874.

- La O' se développe à partir de 1820 avec des « forges anglaises » : affinant le fer à
la houille selon la technique du puddlage et le travaillant au laminoir). Les industries se
localisent dans les vielles régions de travail des métaux du centre et de l¶est de la France
(Chatillon-sur-Seine, Lorraine) et sur les bassins charbonniers du Massif Central et du Nord
(Le Creusot, Alès, Decazeville, Denainü) Le Creusot est pionnier dans la production de fonte
par hauts fourneaux à coke mais leur nombre va se multiplier principalement dans le Nord et
en Lorraine (Hayange, Longwyü) Leur nombre passe de 41 en 1849 à 206 en 1856. L¶essor
de la construction mécanique est dû à la demande ferroviaire pour la fabrication de
locomotives et de wagons. De vastes ateliers de construction de ce matériel sont construits à
Paris (atelier des Batignolles), à Lyon (ateliers d¶Oullins), au Creusot (Schneider), à
Mulhouse, Strasbourg, Lille. Ces ateliers emploient chacun plus de 1000 ouvriers. Ils utilisent
un matériel de pointe (machines-outils, presses) et apparaissent comme les symboles de l¶âge
industriel nouveau. Des paysages industriels nouveaux comme les üpays noirs » du Massif

20
Central et du Nord donnent à voir terrils, hauts fourneaux rougeoyants, grandes usines,
ateliers de mécanique, corons ouvriersü

- Ainsi, dès le milieu du 19e siècle, la France accède au rang de    O 


majeure, autonome et commercialement compétitive (la seconde technologiquement derrière
le RU). L¶essor est le plus rapide dans les années 1840 (malgré l¶effondrement brutal de la
production des années 1848-1851). Les exportations décollent surtout après 1856 (un tiers de
la production exportée alors).

£‘  
 O

 O 

#@ 
- Les rythmes de la croissance industrielle sont plus faibles que ceux du RU : 2 à 3% par an
(nettement en dessous du rythme anglais de 3,5% par an de 1780 à 1850). De plus, il n¶y a pas
de phase courte d¶accélération brutale marquant une rupture (pas vraiment de # !! comme
proposé par Rostow).

- Malgré l¶émergence de 'O    (Dollfuss-Mieg à Mulhouse, Motte-Bossut à


Roubaix pour le textile, Wendel et Schneider pour la sidérurgie, Cail ou Koechlin pour la
métallurgie),

  
reste prédominant : en 1866 sur 4,7 M de personnes
travaillant dans l¶industrie : il y a 1,6 M de patrons et 3,1 M d¶ouvriers. De plus, malgré sa
mutation, l¶industrie ne parvient pas à imposer nettement sa prééminence au cours du siècle.
Ainsi dans la période 1850-1880, le secteur industriel ne représente encore que 34% du PNB
contre 54% pour l¶agriculture. De même, le secteur industriel n¶emploie que 31% de la
population active contre 45% pour le secteur primaire : en Angleterre, le secteur industriel
emploie 44% des actifs et le secteur primaire seulement 10%. Enfin, l¶urbanisation reste
faible : 34% de la population en 1880 (contre 70% en Angleterre).

- Ces limites de l¶industrialisation en France au 19e siècle, ont été longtemps interprétées
comme des signes d¶un $  ou comme le symptôme d¶un retard dans le
développement industriel. Le rôle excessif de l¶Etat centralisateur, le protectionnisme
étouffant, l¶incompatibilité des valeurs catholiques traditionnelles et de l¶esprit capitaliste, la
prudence des patrons qui cherchent plutôt à gérer un patrimoine qu¶à devenir des conquérants,
ont été les explications avancées pour expliquer ce retard.

£‘ Ô   O O 


  
r : O  11: intérieur de Canut

- Mais on peut y voir aussi un « style O O 
   &
 #@  ». La croissance
industrielle quoique modérée suffit sur la longue durée à faire de la France une grande
puissance industrielle à la fin du siècle. Autre particularité : les secteurs industriels moteurs
sont plus diversifiés qu¶en Angleterre : la laine, la soie, les industries agro-alimentaires, le
luxe, les industries légères de biens de consommation jouent aussi un rôle essentiel dans le
schéma français. Enfin, le système français est dualiste : l¶industrialisation s¶effectue en
combinant le développement des techniques nouvelles de production mécanisée et concentrée
et le maintien des techniques traditionnelles et du cadre de production proto-industrielle. Cette
dernière apparaissant comme complémentaire de l¶usine mécanisée. L¶usine mécanisée et
l¶atelier relativement rural se combinent dans un système original. Par exemple, dans le cas du
secteur cotonnier, les « indienneurs » mulhousiens développent d¶une part la filature
mécanisée à partir de 1802 et d¶autre part, le tissage rural du coton dans la plaine et les vallées
vosgiennes. C¶est la même chose en Haute-Normandie et dans la région lyonnaise où
l¶industrie de la soie (1e branche exportatrice française au 19e siècle). La filature se mécanise

21
assez tôt dans des entreprises moyennes, en revanche, le tissage s¶effectue dans le cadre de
structures traditionnelles, la « fabrique », c'est-à-dire de type proto-industrielle avec une
masse de d¶artisans dépendants, les canuts, travaillant à façon pour les puissants soyeux
lyonnais (maitres des capitaux et du produit fini). En 1877, il y a 60 000 métiers à tisser à
Lyon et nombre similaire dans l¶espace rural de la région lyonnaise.

r : #  : ' 9ë ë   : le développement dualiste de la sidérurgie


française

- Ce mode original d¶industrialisation apparait comme une réponse adaptée aux conditions
économiques et sociales auxquelles étaient confrontés les entrepreneurs français. Ceux-ci
recherchent le profit et donc l¶abaissement des coûts. Face au problème des capitaux d¶abord,
et à l¶insuffisance et à l¶archaïsme du système de crédit jusque dans les années 1850, le choix
du O
O
  permet de limiter les investissements lourds aux seuls secteurs où
la mécanisation est indispensable (la filature par exemple) et de reporter une partie des frais
sur les artisans ruraux. Face au problème des ressources naturelles, d¶autre part, c'est-à-dire
avant tout à l¶énergie, le choix du maintien prolongé d¶n vaste secteur textile manuel ou d¶un
secteur de sidérurgie au charbon de bois tient compte des ressources nationales disponibles :
assez peu de charbon et du bois et de l¶énergie hydraulique bon marché. Le refus du tout
charbon s¶explique aussi par une volonté d¶indépendance par rapport à l¶étranger. Enfin, face
au problème de main d¶œuvre, la France dont la population croît vite dispose de vastes
réserves de main d¶œuvre sous-employées, principalement rurales. Ainsi s¶explique le choix
logique de la dispersion à la campagne d¶une partie du travail industriel. Les entrepreneurs y
trouvent des avantages : coût plus bas d¶une main d¶œuvre semi-paysanne cherchant souvent
un revenu complémentaire, docilité plus grande d¶une main d¶œuvre isolée, inorganisée,
souvent féminine, souple d¶utilisation face aux aléas de la conjoncture (le licenciement n¶est
pas nécessaire, il suffit d¶interrompre la fourniture de travail à façon). En plus la petite
paysannerie française est très attachée à la propriété de la terre depuis la Révolution française
de 1789. Alors qu¶en Angleterre le processus des enclosures a exproprié des paysans déjà
prolétarisés et peu attachés à la terre.

- Pour finir, on peut voir dans ce système dualiste, une volonté politique de freiner la
concentration ouvrière dans les villes afin d¶éviter les    O 4
   
 qui
hantent les dirigeants des années 1815 à 1870 (Restauration puis second Empire
(soulèvements de 1830, 1848 à Paris qui renversent Charles X, puis Louis Philippe Ier, révolte
des Canuts lyonnais en 1831 et 1834). Le modèle d¶industrialisation dualiste présente pour
certains hommes politiques l¶avantage de maintenir les « barbares » potentiels largement
dispersés à la campagne, isolés et soumis au contrôle social traditionnel. C¶est d¶ailleurs après
l¶insurrection de 1831-34 à Lyon que s¶accélère l¶éclatement de la fabrique de la soie dans la
campagne environnante : simple coïncidence ? Choix économique ou choix politique ?

d)‘ La réussite allemande : protectionnisme et transferts de technologie


Bien que plus tardive, la Révolution industrielle en Allemagne se produit dans les années
1840-1860 grâce à la réalisation d¶un certain nombre de conditions qui freinaient jusqu¶à alors
le développement industriel. Il existe des régions industrielles en Allemagne depuis la fin du
17e siècle : Rhénanie-Westphalie autour d¶Aix-la-Chapelle (textile, houille, sidérurgie), Saxe
(charbon), Silésie charbon et fer). La machine à vapeur fait une apparition timide dans les
années 1820.

r : O  : usine Krupp

22
£‘  #  O
O 
  
Quatre éléments vont déclencher l¶essor industriel : la diffusion du progrès technique,
l¶accroissement de la demande, l¶augmentation des capitaux disponibles, le protectionnisme.

- La diffusion du  '    s¶est faite essentiellement grâce aux transferts de


technologie et de techniciens venus principalement de Grande-Bretagne et dans une moindre
mesure de France. Bien qu¶interdite jusqu¶en 1825, l¶émigration d¶artisans puis de techniciens
britanniques, a été un phénomène massif en Allemagne. Ainsi, des machines à vapeur et des
machines-outils sont importées d¶Angleterre, puis des modèles de machines à partir de 1842
(suppression de l¶interdiction d¶exportation). Ces transferts sont amplifiés dans leur effet
pratique sur le tissu industriel par la création en 1820 des instituts techniques de Berlin et dans
le reste de la Prusse. Le rôle de l¶Etat est à cet égard primordial car il crée cette infrastructure
éducative dans le but d¶introduire les techniques nouvelles et de les diffuser.

- L¶accroissement de la demande résulte d¶abord de la réalisation de l¶Union douanière


(A

) en 1834 sous l¶égide de la Prusse. Cette entente regroupe 25 Etats comptant 26
M d¶habitants. L¶union douanière abolit les tarifs intérieurs et unifie ce territoire vis-à-vis de
l¶extérieur en en faisant un vaste marché commun. Celui-ci continue de s¶agrandir par
adhésions successives jusqu¶en 1866. La suppression des barrières douanières donne un
incontestable coup de fouet à la consommation et donc à l¶industrie. Cette unité se trouve
confortée par le déblocage des marchés consécutifs à l¶essor des communications et
notamment des chemins de fer.

- Avant le Zollverein, le morcellement politique était un obstacle certain à la rapidité et au


faible coût des transports (taxes et droits à payer à chaque frontière intérieure. En Allemagne,
les obstacles naturels (massifs, vallées) morcellent le territoire et entravent la circulation est-
ouest. Les deux principaux axes fluviaux (Rhin et Danube) sont divergents ce qui
compartimente encore plus le pays. Mais la voie d¶eau reste le seul moyen de grande
communication. Avec la réalisation du Zollverein, la volonté de développer le O#
anime un vaste mouvement d¶opinion autour des libéraux dont l¶économiste Frédéric List.
Favorable au libéralisme à l¶intérieur dans le cadre de l¶union douanière, mais protectionniste
vis-à-vis de l¶extérieur afin de protéger l¶industrie allemande naissante, F List pense que le
chemin de fer est essentiel à la mise en valeur des territoires intégrés allemands. A partir de
1844, les lignes rayonnent à partir des grands centres urbains et l¶unification s¶amorce sous
l¶influence de la Prusse : l¶Association des chemins de fer prussiens unit toutes les
compagnies régionales sous l¶égide du Gouvernement. Dès lors, toutes les voies ont le même
écartement, les tarifs sont unifiés de même que les transits avec l¶étranger. Le réseau passe de
300 km de voies ferrées en 1841 à 2000 km en 1847, 14 000 en 1865. Ainsi la voie ferrée
apparait comme l¶élément de base de la concrétisation des objectifs économiques et
commerciaux du Zollverein. Elle modifie complètement l¶aspect de l¶Allemagne. D¶autre
part, les progrès agricoles sont perceptibles dès 1830. L¶essor rapide de l¶économie trouve
dans l¶accroissement démographique une source de gonflement de la demande. Malgré une
forte émigration et une mortalité élevée, l¶Allemagne passe de 25 à 35 M d¶habitants entre
1815 et 1845 (+38%) et à 40 M en 1870, grâce à un taux de natalité très élevé.

- La construction des chemins de fer donne un coup d¶envoi d¶une politique de drainage des
capitaux au profit du O
 O 
. Cela se traduit par l¶essor des sociétés par
actions et du crédit bancaire. Une fois passée, la crise politique et économique de 1848 qui
secoue l¶Allemagne, le mouvement repart vers 1853. Les grands secteurs industriels (mines,

23
métallurgie) et les banques voient affluer les capitaux accumulés depuis de longues années et
stérilisés par les difficultés politiques et les incertitudes économiques. L¶essor du système
bancaire assure un drainage efficace de l¶épargne vers les emplois industriels. La création de
le Banque pour le commerce et l¶industrie en 1853 à Darmstadt, lance un vaste mouvement de
création de banques d¶affaires. Ces banques allemandes mélangent les tâches de banque de
dépôt, de banque d¶affaires apporte un concours très efficace au développement industriel.
Enfin, l¶afflux de capitaux étrangers (belges, français, anglais) vient gonfler l¶investissement
industriel, à partir de 1840 dans les charbonnages.

r : #  :  $ 92* ë   : les origines de l¶industrie allemande

- En réservant à l¶industrie allemande le marché du Zollverein au détriment de la concurrence


étrangère (et notamment anglaise), le      constitue un facteur essentiel de
l¶essor industriel. Årès modéré, le tarif prussien de 1821 est adapté par le Zollverein à sa
création et il reste en vigueur jusque dans les années 1840. Le mouvement protectionniste se
dessine à partir de là pour parer la menace anglaise dans la sidérurgie et le textile. Les
récriminations contre la concurrence étrangère deviennent alors de plus en plus nombreuses. Il
en résulte de multiples manipulations du tarif douanier qui crée de nouveaux droits d¶entrée
des produits étrangers.

£‘  
O
 O 


O
- Le bassin charbonnier de la Ruhr connait un   O. La loi prussienne de 1851 qui
permet l¶octroi de concessions étendues et réduit la fiscalité encourage cet essor. 3 grands
bassins en pleine expansion fournissent l¶essentiel de la production (19 M de tonnes en 1865 ;
RU : 85 M de tonnes ; EU : 21 M de tonnes ; France : 9,4 M de tonnes ; Belgique : 8,5 M de
tonnes). A cette époque, les besoins allemands sont couverts en totalité par la production
nationale et 10% de la production est exportée. La mécanisation progresse elle aussi très
rapidement dans divers secteurs industriels (mines, métallurgie, constructions mécaniques,
textile, scieries, navigation, chemin de fer...) Les locomotives, machines-outils, machines à
tisser ou à filer, les machines agricoles sont produites en grand quantité à partir de 1860. La
Prusse et la Saxe concentrent 90% des machines à vapeur du Zollverein. Dans le textile, le
démarrage est cependant plus lent car les premiers métiers à tisser mécaniques n¶apparaissent
qu¶en 1844 pour lutter contre la concurrence britannique. Dans la métallurgie, la demande par
la consommation intérieure devient de plus en plus importante à cause des besoins en fonte et
en acier. D¶autant plus qu¶à partir de 1840, la hausse des droits de douane sur la fonte permet
de faire face à l¶invasion du fer anglais en protégeant la production nationale.

- Par rapport au RU, à la France et à la Belgique, l¶industrialisation allemande présente des


caractéristiques annonciatrices d¶une O4 ' O       qui
touchera d¶autres pays européens (Russie, Scandinavie, Italieü) et le Japon :
>‘ Essor très rapide de la production industrielle et énergétique dans tous les secteurs de
base (charbon, métallurgie, constructions mécaniques)
>‘ Emprunts massifs à la technologie aux techniciens et aux capitaux étrangers
>‘ Rôle primordial de l¶Etat dans l¶organisation de la croissance
>‘ Protectionnisme douanier
>‘ Système bancaire reposant sur de grands établissements réunissant les caractéristiques
des banques de dépôts et des banques d¶affaires
>‘ Lien étroit entre la recherche et l¶application industrielle
>‘ Åendance à la concentration
>‘ Une certaine idéologie nationaliste (stimulus de la croissance.

24
e)‘ Les premiers pas du géant américain

£‘ O

'
- Les conditions nécessaires au décollage économique ont été réunies dès les années 1820-
1840 mais elles n¶interviennent vraiment que vers 1840-1850 exacerbant les antagonismes
entre le Nord et le Sud, '       dont résultera pour partie la Guerre de
Sécession. Les travaux de R North (4    "! 78) montrent que bien avant la
machine à vapeur et le chemin de fer, une économie dynamique s¶instaure aux EU. Elle est
fondée sur les échanges intensifs entre les trois grands ensembles économiques du pays : le
Sud, royaume du coton (;   ) utilisant la main d¶œuvre servile et qui alimente en
matière première la révolution cotonnière anglaise via Liverpool. Le riz de Caroline du Sud et
le tabac de Virginie, la canne à sucre de Louisiane fournissent d¶autres denrées destinées à
l¶exportation. L¶Ouest fournit au Sud, les ressources alimentaires dont il a besoin : blé,
viande, maïs. Ces produits transitent d¶une région à l¶autre grâce aux multiples bateaux à fond
plat à vapeur qui empruntent les rivières et les fleuves jusqu¶au Nord-est. Denise Artaud et
André Kaspi ont montré dans leur u  47 la dépendance de ces régions par rapport
au Nord-Est qui connait déjà une forte croissance économique. Les financiers de Wall Street
fournissent les crédits, procurent les assurances nécessaires pour le transport des exportations
vers l¶Europe.

- Cette économie d¶échanges qui s¶instaure entre les 3 zones, dans le cadre d¶une
spécialisation régionale, va permettre au ½ O$8  d¶assurer son décollage économique. Il est
d¶abord confronté à une forte demande de produits manufacturés. Il bénéficie aussi de l¶afflux
de capitaux résultant de son rôle d¶intermédiaire. L¶afflux de moyens monétaires et de
débouchés pour les produits industriels va assurer le décollage économique du Nord-Est entre
1840 et 1850. D¶autant plus que la région jouit d¶une énergie hydraulique abondante aux
pieds des Appalaches. La Nouvelle-Angleterre, la région de New-York, la Pennsylvanie
connaissent une série de bouleversements techniques qui vont améliorer la machine à vapeur :
Evans crée une machine à vapeur à haute pression, Howe la machine à coudre (perfectionnée
par Singer), Mac Cormick la moissonneuse, Fulton le bateau à vapeurü Avant la Guerre de
Sécession, le Nord-est connait donc déjà une Révolution industrielle dont le moteur est le
textile de Nouvelle-Angleterre. Cette activité est insérée dans le commerce international avec
l¶Europe. De 1844 à 1855, le taux de croissance de l¶économie américaine est proche de 7%
par an. Ce même taux est atteint de 1874 à 1884.

£‘ r 
 
- Pourtant l¶essor de l¶économie industrielle est freiné par la domination politique
conservatrice des planteurs du Sud, fief de l¶
' . La création en 1824 du Parti
Républicain monter la volonté de la bourgeoisie industrielle du Nord-Est de modifier les
règles du jeu en s¶emparant du pouvoir politique. La Guerre de Sécession a freiné un temps
l¶industrialisation mais va créer à moyen terme les conditions de la croissance. Le ½  
' #    de 1863 donne aux entrepreneurs une monnaie adéquate et sûre, encourage les
épargnants à déposer leur argent dans les banques. L¶érection de barrières douanières protège
l¶industrie américaine de la concurrence internationale (contraires aux principes libre-
échangistes).

- Les Républicains encouragent l¶'  pour disposer d¶une main d¶œuvre abondante.
Enfin, la volonté de peupler les nouveaux territoires à l¶Ouest (u    de 1864) lance
la conquête de l¶Ouest qui se fait en partie par le chemin de fer => climat stimulant pour la

25
jeune industrie des EU. L¶extraordinaire croissance de « l¶âge doré » dans le dernier tiers du
19e siècle se déroule en parallèle à un développement industriel très important.

r : #  - : * ë     < : schéma de l¶interdépendance des 3 régions aux


EU.

0O4 
 O 


La révolution industrielle connait une  

    dans les années 1870-1880 avec une


accélération de la croissance : c¶est la O4 
 O 

 qui se diffuse dans


quasiment toute l¶Europe et surtout aux EU. L¶industrie est en effet stimulée par de nouvelles
inventions comme le moteur à explosion, de nouvelles sources d¶énergie : l¶électricité et le
pétrole ; de nouvelles industries : l¶automobile, l¶acier, la chimieü Mais l¶amélioration du
niveau de vie due à l¶industrialisation est mal perçue par les contemporains qui sont
davantage sensibles aux crises interrompant régulièrement la croissance.

a)‘ Les nouveaux visages de l¶entreprise


£‘ Des    B

r : O - : puits de pétrole de Drake


r : O 9 : cinéma des frères Lumière

- Cette nouvelle période d¶industrialisation se nourrit d¶une série O      .
A partir des années 1880 s¶amorce une deuxième révolution industrielle liée à l¶utilisation de
nouvelles sources d¶énergie (pétrole et électricité) qui conduisent à la mise en place d¶un
nouveau système technique. Le charbon continue d¶être massivement employé mais
l¶électricité plus souple d¶utilisation commence à le concurrencer sérieusement :
>‘ Dynamo inventée par le belge Gramme en 1869
>‘ Ampoule électrique par Edison en 1879
>‘ Ligne à haute tension par Desprez en 1882.
>‘ Locomotive électrique par Siemens en Allemagne en 1879
Symbole des sociétés modernes, l¶
   fascine les contemporains mais elle a aussi des
contradicteurs qui se méfient de cette innovation (peur de cette énergie nouvelle, résistances
au confort). A partir de 1900, l¶électricité change de manière irréversible la vie quotidienne et
le travail de millions de personnes en Europe de l¶ouest et aux EU.
Le 
 aussi commence à s¶imposer comme source d¶énergie grâce à des inventions qui
permettent de développer la production
>‘ Puits de pétrole par Drake aux EU en 1859.

- Grâce à cette nouvelle source d¶énergie les transports font des progrès spectaculaires :
locomotion par automobile puis par avion :
>‘ Moteur à explosion par Daimler en 1886
>‘ Pneumatique gonflable par Dunlop (RU) en 1888
>‘ Moteur à combustion par Diesel en 1892
>‘ Premier vol aérien par Wright aux EU en 1903

- De nombreux matériaux deviennent moins cher à produire grâce à des innovations majeures
comme :
>‘ Le procédé Bessemer pour la fabrication de l¶acier (mis au point en 1855 au RU)
>‘ L¶électrolyse de l¶aluminium par Héroult un français et Hall, un américain en 1886

26
La chimie se développe grâce à l¶invention de :
>‘ La dynamite par le suédois Nobel en 1867
>‘ La soie artificielle par le français Chardonnet en 1884
>‘ L¶aspirine par Bayer (All) en 1899
>‘ La première matière plastique (la bakélite) aux EU par Baekeland en 1907.
Enfin, dans le domaine de l¶image et du son, les innovations vont bouleverser le monde
culturel :
>‘ Åéléphone par Bell aux EU en 1876
>‘ Phonographe par Edison (EU) en 1877
>‘ Pellicule photographique par Eastman (EU) en 1888
>‘ Cinématographe par les frères Lumière en 1895
>‘ Åélégraphie sans fil (ÅSF) ou radio par le russe Popov, le français Branly et l¶italien
Marconi en 1895-1899
>‘ Photographie en couleurs par les frères Lumière en 1907.

- De  4   : les constructions mécaniques produisent en grandes séries la


bicyclette (inventée en 1861 par le français Michaux), l¶automobile, puis l¶avion. Fabriquée
de manière artisanale jusqu¶à la fin du 19e siècle, l¶automobile est ensuite produite en grande
série dans de vastes usines qui appliquent de nouvelles méthodes de production. L¶électricité
permet de développer l¶électroménager (fer à repasser, fours, radiateursü) l¶éclairage public
et les transports urbains. L¶industrie chimique bouleverse l¶agriculture par la production
d¶engrais, la médecine par de nouveaux médicaments. Les industries de la communication
connaissent aussi un essor remarquable.

£‘    O   


- A partir des années 1880, sous l¶effet des innovations techniques, le fonctionnement des
entreprises se modifie en profondeur. Pour réunir les capitaux exigés par un coût croissant de
l¶outillage et de la recherche se développent les   % dont le capital divisé en
actions est vendu au grand public. Les "    O 
 où sont échangées ces actions,
deviennent de plus en plus actives. Les " OO> supplantent les anciennes banques
d¶affaires en ouvrant des succursales dans toutes les grandes villes, drainant ainsi l¶épargne du
public vers l¶industrie. Ces mêmes banques jouent un rôle décisif dans la diffusion de la
monnaie fiduciaire (billets) et scripturale (chèques). Le capitalisme industriel s¶épanouit.

- L¶industrialisation provoque une       des capitaux et des entreprises.


Ce mouvement de concentration est destiné à limiter une concurrence de plus en plus vive. La
concentration est verticale (intégration) lorsqu¶une même entreprise contrôle toutes les étapes
d¶une production, elle est horizontale lorsque plusieurs entreprises d¶un même secteur
fusionnent pour n¶en former qu¶une seule. Ainsi, certaines entreprises, surtout aux EU, se
constituent en   ou en R en Allemagne : entreprise détenant une position
dominante sur un marché. D¶autres cherchent un accord entre elles pour se répartir les
marchés et éviter les baisses de prix : ce sont les cartels qui se multiplient surtout en
Allemagne. Les banques sont au centre du phénomène de concentration : leurs participations
au capital de nombreuses entreprises aboutissent à la formation de
O' : sociétés
financières détenant une part du capital de plusieurs entreprises. Le processus de
concentration est beaucoup plus poussé aux EU et en Allemagne qu¶en GB ou en France.





27
£‘ r 

 #  O O  
r 3# 9 grève chez Renault

- Une '   # O 
(OSÅ) : une nouvelle organisation du travail se
met en place. Elle est destinée à accroitre la productivité. Expérimentée d¶abord aux EU, elle
se diffuse lentement en Europe (surtout après la Première Guerre mondiale). A l¶initiative de
patrons ou d¶ingénieurs, le travail des ouvriers est décomposé et chronométré pour éliminer
les temps morts et les gaspillages. L¶ingénieur américain Frederick Åaylor est à l¶origine de
ces pratiques (que l¶on va nomme le taylorisme) : elles aboutissent à un travail de plus en plus
intense et déshumanisé : les conditions de travail sont beaucoup plus pénibles. Les
contremaîtres surveillent et minutent les ouvriers. Mais la rationalisation du travail des
ouvriers accroit fortement la productivité des entreprises. Dans les entreprises, les méthodes
du taylorisme rencontrent des résistances de la part des syndicats au début du 20e siècle.

r : O 2 : la Ford Å

- Se développe alors le 


&
  (surtout dans l¶industrie automobile aux EU). Les
taches répétitives peuvent être faites par des ouvriers peu qualifiés, les gestes inutiles sont
supprimés. Grâce au travail à la chaine mis en place en 1913 dans son entreprise de Detroit,
l¶industriel Henry Ford fabrique la première voiture en grande série à bon marché : la Ford Å.
En divisant par 4 le temps d¶assemblage de ce modèle créé en 1908, Ford en produit plus de
15 M d¶exemplaires jusqu¶en 1927. Préfigurant la société de consommation, Ford pense que
la hausse des revenus salariaux permet de développer la consommation de masse profitable au
système capitaliste. Il accorde donc des salaires plus élevés et institue la participation de ses
employés aux bénéficies de l¶entreprise et augment encore les salaires : c¶est le fordisme.

b)‘ La croissance économique


r : O + : affiche primeurs

- Les pays industrialisés connaissant une   


     entre 1880 et 1914, de leur
production et de leur richesse. Cette croissance économique de l¶ordre de 1 à 2% par an,
prolonge la tendance amorcée à la fin du 18e siècle. Les pays d¶Europe de l¶Ouest multiplient
par 3 leur produit intérieur brut par habitant (entre 1850 et 1939) alors que leur population
double entre ces deux dates. Pendant ce temps, les EU multiplient par 5 leur PIB/hab. La
modernisation de l¶agriculture étant encore très peu avancée, l¶industrialisation est le principal
moteur de cette croissance. Elle s¶appuie autant sur les marchés intérieurs que sur
l¶augmentation des exportations. De nombreux secteurs stimulent la croissance économique :
l¶urbanisation entraine de grands travaux, le chemin de fer puis l¶automobile donnent
naissance à de nombreuses acticités et ouvrent de nouveaux marchés. Les industriels
atteignent une clientèle plus large en faisant apparaitre de nouveaux besoins.

- La croissance est aussi favorisée par le O


 O  . Chemins de fer,
navires à vapeur, creusement de canaux (Suez en 1869, Panama en 1914) raccourcirent les
distances et contribuent à la formation d¶un marché mondial. Entre 1840 et 1913, les
exportations de l¶Europe sont multipliées par 17. Sur les marchés intérieurs, le développement
des grands magasins comme le Bon Marché en France et Harrod¶s en GB incitent les
consommateurs à multiplier leurs achats. D¶autant plus qu¶apparaissent les catalogues de
vente par correspondance et la publicité. Vendre devient aussi important que produire (surtout
aux EU).

28
- Le >
O
8 : avant 1914, l¶Etat intervient peu dans le fonctionnement des économies
et son action reste limitée aux fonctions de défense, de diplomatie, d¶ordre public et
d¶émission de monnaie. Mais son rôle n¶est pas nul pour autant : l¶Etat américain établit ainsi
une législation antitrust : 8     en 1890 pour maintenir la libre concurrence entre les
entreprises. Presque tous les Etats européens (sauf le RU qui reste fidèle au libre-échange)
recourent au protectionnisme (limitation de l¶entrée de produits étrangers, notamment par les
droits de douane) dans les années 1880 et 1890 afin de protéger leur production nationale.
Enfin, dans de nombreux pays, l¶Etat prend en charge les investissements les plus lourds
comme en France les travaux d¶aménagement urbain ou en Allemagne, le développement du
chemin de fer.

c)‘ Une nouvelle hiérarchie des puissances


r : O ; : carte des EU

- Les pays les plus anciennement industrialisés profitent moins que les autres de la seconde
industrialisation. A la fin du 19e siècle, le RU perd sa prééminence industrielle : les
entreprises hésitent à investir dans leur modernisation. La richesse du pays va reposer
désormais plus sur les services financiers et commerciaux que sur son industrie. La France est
rapidement distancée par l¶Allemagne (sauf pour l¶automobile et l¶aviation).

- Les années 1880 voient apparaitre de  

     . Les EU qui continuent à


accueillir des millions d¶émigrés et qui disposent d¶importants gisements de pétrole sur leur
territoire dominent la plupart des secteurs innovants : automobile, aviation, chimie, matériel
électrique, cinéma. Ils deviennent la première puissance industrielle mondiale au tournant du
siècle. L¶Allemagne avec son unification économique puis politique concurrence de plus en
plus le RU dans la sidérurgie, la chimie, les constructions mécaniques ou les chantiers navals.
Le Japon et la Russie connaissent une industrialisation rapide mais sont encore des puissances
secondaires en 1914.

Ê     O
O 
   
  
 
r : # 2: tableaux de production : p 119

a)‘ Evolution des structures de l¶économie


£‘ ‰ O  
 O
    
- On assiste à une véritable 4
  O
  O  c'est-à-dire de la production par
ouvrier. Les innovations technologiques ont joué à cet égard un rôle fondamental : exemple :
le « " ! » d¶Arkwright a multiplié la productivité par 100 par rapport au rouet. Cette
croissance de la productivité a deux conséquences essentielles : la baisse des coûts de
production et celle des prix de vente. La baisse des coûts de production a permis les taux de
profits exceptionnels réalisés par les entreprises au début de la Révolution industrielle. La
baisse des prix de vente permet un considérable élargissement des marchés intérieurs et
extérieurs. La mécanisation s¶est traduite par une croissance très forte de la production dans
des proportions jamais connues jusqu¶alors. Le taux de croissance dans les branches
mécanisées a pu atteindre 6 à 8% par an. Grâce aux secteurs pionniers qui connaissent une
forte croissance, tout le secteur industriel connaît progressivement un changement significatif
dans son rythme de croissance. Par conséquence, non seulement le produit national augmente,
rapidement mais encore le poids du secteur industriel dans ce produit national progresse.

- Lorsque surviennent des périodes de récession, les    O 

 , l¶ensemble de
l¶économie est touchée. Avant la Révolution industrielle les mauvaises récoltes étaient à

29
l¶origine des crises (flambée des prix, baisse du revenu disponible dans l¶agricultureü). Ces
crises avaient des conséquences pour l¶industrie. Désormais ce sont les crises industrielles qui
rythment les difficultés de l¶économie : surproduction, baisse des prix et des profits, perte
d¶emplois, baisse des revenus disponibles, difficultés dans l¶agricultureü L¶apparition de la
crise industrielle, de type nouveau, peut être considérée comme un symptôme de l¶entrée dans
l¶âge industriel.

£‘  #  O O##    O


  
- Sur le 
 '
, l¶impact de la mutation économique se traduit surtout par
l¶amélioration et la diversification de l¶outillage qui bénéficie du développement du
machinisme. La charrue à soc métallique qui apparait en 1830 donne la possibilité de faire des
labours plus profonds (meilleure aération du sol => meilleurs rendements). La technique de la
moisson est améliorée par l¶invention de la batteuse à vapeur, puis par la moissonneuse
inventée en 1826 par Mac Cormick aux EU. La baisse rapide du prix des machines contribue
à leur diffusion et entraine un fort accroissement de la productivité. Celle-ci augmente
également grâce à l¶utilisation des engrais chimiques (phosphates). Pour la première fois dans
l¶histoire de l¶humanité, le cercle vicieux de « l¶état stationnaire » cher à D Ricardo, se trouve
brisé grâce aux progrès de la productivité : avec moins de bras, l¶agriculture peut désormais
assurer l¶amélioration de l¶alimentation et nourrir des populations plus nombreuses.

- Dans le   O     , on assiste à l¶expansion déjà évoquée des réseaux de


communication : expansion des canaux (navigation à vapeur), construction des chemins de
ferü En France, la monarchie de Juillet (roi Louis-Philippe de 1830 à 1848) développe le
réseau des canaux du Nord et de l¶Est du pays : 10 000 km de voies navigables y compris les
grands fleuves (Seine, Rhône, Loire, Rhin). Le chemin de fer offre des avantages
économiques : plus grande rapidité des transports, baisse des coûts, transport des
marchandises facilité : ouverture de nouveaux marchés, de nouvelles zones de production :
ex : les fraises de Provence et les tomates du sud-ouest arrivent sur les marchés urbains
parisiens et lyonnais. Les réseaux ferrés quadrillent rapidement l¶Europe industrielle : très
précoces en Grande-Bretagne et en Belgique, ils arrivent plus tardivement en France sous le
Second Empire (années 1850-1860) et au début de la IIIe République (années 1870).

- La 
 "  : à ses débuts la Révolution industrielle s¶est largement nourrie elle-
même, en réinvestissant ses profits et donc par l¶autofinancement. Le système bancaire
existant fournit les capitaux à court terme, nécessaires pour les salaires ou les dividendes.
Mais à partir de 1830 en Angleterre, une ou deux décennies ailleurs en Europe, le recours à
l¶appui bancaire est plus important : investissements plus importants exigés par des
entreprises de plus grande taille dans la filière lourde par exemple. Le système de crédit est
donc obligé d¶évoluer. La méfiance envers la monnaie de papier est de règle et le système de
crédit, surtout en Europe continentale, est marqué par son adaptation aux besoins de la
paysannerie. Les capitaux disponibles, faibles, sont placés dans le foncier (médiocrité des
liquidités). Les banquiers privés font quelques opérations d¶envergure mais surtout avec les
princes et les Etats. Le système bancaire est alors dominé par la haute banque et les
marchands-banquiers (ü
   = # %), même si en Angleterre on trouve aussi des
« ' '#  », courtiers en commerce et des «  '# » qui cherchent des
disponibilités en argent liquide pour les premiers. Les évolutions arrivent après 1830 :
apparition de banques centrales comme la Banque de Prusse, prolifération de « 0 
= # » en Angleterre et en Ecosse qui drainent l¶épargne des particuliers et fournissent de
l¶argent à court terme pour les financements divers. Le système d¶escompte qui s¶organise
ainsi apparait fragile : il devient nécessaire de diffuser une plus grande quantité de monnaie

30
papier pour accroitre la vitesse de circulation de la monnaie. Il faut créer une monnaie solide
avec une unité monétaire garantie par l¶Etat et une encaisse Or et Argent. C¶est ainsi que les
banques vont pouvoir financer l¶expansion industrielle par le crédit à long terme (véritable
mobilisation de l¶épargne à l¶échelle nationale). L¶appareil bancaire s¶élargit : réforme des
banques d¶Etat et apparition de banques privées de type nouveau. La réforme de la banque
d¶Angleterre a lieu en 1844 : elle a désormais le monopole absolu de l¶émission de monnaie.
Elle se voit dotée d¶un système de séparation des activités monétaires et des activités
bancaires. Les premières sont encadrées par des règles strictes : l¶émission de la monnaie ne
peut pas excéder 14 M de livres sterling (ce qui correspond à la réserve d¶or national). Les
activités bancaires ne sont pas soumises à des règles strictes mais sont tributaires des billets
mis en circulation. Le taux d¶escompte doit réguler la demande de crédit. Cette réforme assure
la suprématie mondiale de la Livre au 19e siècle. La banque de France est créée en 1800 par le
Consul Bonaparte. Elle se consolide en créant des comptoirs qui permettent d¶améliorer la
confiance dans l¶usage des billets. Parallèlement, se développent les banques privées. En
Angleterre, la concentration de 0  = # permet un développement rapide de grands
établissements : Manchester Bank, Liverpool Bank, National Bank, Westminster Bankü Au
nombre de 744 en 1864, ces banques gèrent des capitaux considérables et mettent l¶épargne
(les dépôts) à la disposition des investisseurs grâce au gonflement dans tout le pays du nombre
d¶établissements qui en assurent la collecte. En France, la première banque en société est
fondée en 1837 par Laffitte : la Caisse générale du Commerce et de l¶Industrie. Banque de
dépôt (qui sert donc à centraliser l¶épargne) et d¶affaires (investir dans l¶industrie), elle
succombe au krach des chemins de fer en 1847. Sous le Second Empire naissent la Société
Générale de Crédit industriel et commercial (1859), le Crédit Lyonnais (1863), le Crédit
Mobilier (1852), la Société Générale pour le Développement du Commerce et de l¶Industrie
(1864), la Banque de Paris et des Pays-Bas (1869). Elles s¶emploient à collecter l¶épargne par
la multiplication des succursales afin de l¶employer au financement industriel. Il en est de
même en Autriche-Hongrie entre 1850 et 1870, en Suède, en Belgique ü où les grandes
banques financent l¶essor des chemins de fer, des mines de charbon, de la métallurgie. Ainsi
partout dans l¶Europe industrielle, se transforme le système bancaire pour répondre aux
besoins du développement économique en moyens de paiement et de financement (surtout
pour la filière lourde). Le système bancaire s¶est forgé entre 1830 et 1880. Il mobilise les
capitaux nécessaires au deuxième âge de la Révolution industrielle. En plus, les sociétés
anonymes par actions contribuent efficacement à l¶orientation de l¶épargne vers les emplois
productifs. Les actions permettent d¶élargie les activités des bourses. Dans la France du
Second Empire, les actions et surtout les obligations émises des sociétés ferroviaires sont à
l¶origine de la création d¶un marché national de valeurs mobilières.

£‘ / O#  O


 ' ' O   
- De  

  '   O 

 apparaissent : la présence de houille est déterminante


pour l¶installation des industries sidérurgiques et mécaniques. L¶essor du chemin de fer dans
ces régions accentue l¶attractivité industrielle des « pays noirs ». La Grande-Bretagne
« noire » l¶emporte sur la Grande-Bretagne « verte » : concentration croissante des hommes et
des activités. En France, le Nord-Pas-de-Calais émerge comme un pôle industriel attractif, ais
aussi la région stéphanoise, les bassins d¶Alès, de Carmaux. L¶Allemagne voit émerger la
Silésie, la Saxe, la Ruhr dont la prospérité est fondée sur le charbon, la métallurgie, le textile.
Symbole de la Révolution industrielle, ces nouvelles régions industrielles poussent au déclin
des zones d¶industries traditionnelles. Frappées de plein fouet par la concurrence des
industries nouvelles, ces régions se vident lentement.

31
- Déjà net avant 1850, le déclin de l¶Angleterre « verte » s¶accentue après 1870. L¶Est et le
Sud-Est perdent des emblavures, les propriétés se concentrent,
4 O
se poursuit. En
France, c¶est surtout après 1830 que l¶exode rural se renforce : des régions amorcent un lent
déclin de population : Normandie, Haute-Saône, Cantal, Lot-et-Garonne, Hautes et Basses
AlpesüA partir de 1871, on compte 100 000 départs par an des campagnes, 160 000 en 1881
sous le coup de la baisse des prix agricoles. Cet exode touche aussi bien les actifs (artisans,
agriculteurs) que les non-actifs, surtout les jeunes et les marginaux auxquels les campagnes ne
peuvent plus offrir d¶emplois. En Allemagne, l¶inégalité entre les régions s¶accentue avec le
déclin de la vieille sidérurgie des montagnes et du textile de Åhuringe et des Sudètes. A partir
des campagnes et des petites villes touchées par la crise de l¶artisanat partent des flux
importants de population. Ces flux ou bien émigrent à l¶étranger), ou bien s¶installent dans les
villes en pleine expansion de la Ruhr (Dortmund, Essenü)

b)‘ Urbanisation sauvage et ville-usine



£‘   "
r : #  + : '  * ë     : : évolutions de la population urbaine et
rurale.

- Årès brutale en Grande-Bretagne et en Allemagne, l¶"   est moins rapide en


France. La ville est issue du développement de la grande industrie ou confortée par celle-ci.
Elle apparait comme le centre privilégié du capitalisme industriel. En ville, se concentrent la
production, les hommes, les nœuds de communication, les capitaux, les services publics et
privés, les emplois tertiairesüIl en résulte une véritable explosion urbaine qui fait éclater les
limites juridiques et matérielles (remparts et fortifications) des cités. Les quartiers neufs et les
banlieues se répandent de façon tentaculaire dans les campagnes voisines. Londres double sa
population entre 1850 et 1880 (2 à 4 M d¶habitants). Paris atteint les 3 M d¶habitants en 1880,
Berlin croît de 87% en un siècle. Les villes-berceaux de la Révolution industrielle connaissent
les croissances les plus spectaculaires : Liverpool passe de 82 000 à 376 000 habitants entre
1801 et 1851, Manchester de 75 000 à 303 000. Les « villes-champignons » poussent en
quelques années (ex : Roubaix dans le Nord de la France).

r : #  ; : habitation ouvrière à Glasgow

- Une telle croissance ne se fait pas sans drame et la Révolution industrielle est le théâtre
d¶une véritable   " dont les symptômes frappent les contemporains. Le problème
essentiel est celui du logement : le niveau de vie en général faible, des nouvelles populations
urbaines, n¶autorise pas à payer des loyers élevés => entassement humain dans les logements
existants. Les travailleurs s¶entassent ans les îlots les plus vétustes des villes, dans les
mansardes et les caves. Ceci est décrit par Victor Hugo dans un texte : « caves de Lille, on
meurt sous vos plafonds de pierre. » Un phénomène de O#   se forme et des ghettos
concentrent les travailleurs les plus pauvres. Des villes dans la ville se constituent : « Petite
Irlande » à Manchester, « Courées » de Roubaix, « 8  » de Londres. Au début de la
Révolution industrielle, ni le patronat, ni les pouvoirs publics (Etat, municipalités), dans le
contexte de libéralisme de l¶époque, ne veulent faire face à cette augmentation des densités
urbaines. Le logement des populations se fait donc de façon anarchique : on assiste à une
urbanisation sauvage de tous les espaces disponibles (construction hâtive et désordonnée de
blocs de logements ouvriers dans les banlieues et à proximité des usines). K Marx et F Engels
décrivent « cette couche ininterrompue d¶êtres humains, étendus sur le sol, souvent 15 à 20,
quelques-uns habillés, d¶autres nus, hommes et femmes ensemble. Personne ne semblait

32
s¶intéresser à ce conglomérat de crimes, de saleté, de pestilence » (en parlant de la ville de
Glasgow).

- L¶espace occupé jusque dans ses moindres recoins, ne suffit plus à loger des foules sans
cesse plus nombreuses. Des entrepreneurs se lancent alors dans la construction de logements
pour leurs ouvriers, souvent en torchis et en plâtre, de mauvaise qualité, à des fins
spéculatives. Ces conditions de vie, l¶absence totale d¶hygiène font de ces populations
ouvrières des proies faciles pour la maladie et l¶épidémie. Naît alors dans les grands centres
urbains une double angoisse : celle de la '  et celle de
4
  
. Les
épidémies de choléra qui sévissent en Europe au cours du 19e siècle, touchent davantage les
pauvres mais n¶épargnent pas les riches et les beaux quartiers. L¶extrême misère engendre
aussi la menace sociale (révoltes des canuts à Lyon en 1831 et 1834, Révolutions de 1830 en
France et 1848 dans toute l¶Europe). Cette menace devient la hantise de ceux qui possèdent
quelque chose : la ville industrielle fait peur. Ainsi en Angleterre, est créé en 1848, le *  
= ! u  , (conseil de santé publique qui s¶occupe d¶hygiène dans les villes). Ils
incitent à construire des égouts et des canalisations d¶eau potable. Parallèlement, s¶engage
l¶effort d¶aménagement urbain qui vise à aérer la ville pour en chasser les germes, à la
décongestionner de ses densités d¶hommes pour éviter la propagation des virus. Il s¶agit aussi
de répartir vers les périphéries ces classes médicalement et socialement dangereuses. L¶œuvre
du baron Haussmann à Paris en est symbolique.

£‘ 

$ 

  

- L¶autre solution au problème est la prise en charge par le patronat minier, textile et
sidérurgique de la construction de    , voire de villes entières créées $  .
Cet urbanisme patronal apparait rapidement comme le mode de logement dominant. Il répond
à des préoccupations multiples :
>‘ La volonté de rompre avec cette lèpre sociale que constitue l¶entassement d¶êtres
humains. Préoccupation hygiéniste et volonté politique se rejoignent dans la création
de villes-usines : soigner les corps et les âmes pour assurer la santé physique des
ouvriers et la paix sociale trop souvent troublée par des épidémies ou des révoltes.
>‘ Répondre à une rude concurrence sur le marché du travail à une époque où l¶essor
industriel, la construction d¶infrastructures (chemins de fer, canaux) provoquent une
demande de main d¶œuvre sans cesse croissante. Il faut attirer et conserver celle-ci.
>‘ Le 
  est un projet politique : conception des rapports sociaux élaborée par
la bourgeoisie d¶entreprise confrontée à la misère ouvrière et aux révoltes sociales. Le
patron chrétien a la mission d¶assurer la paix et la stabilité sociale dans son usine et
dans la ville en fournissant le minimum de bien-être physique et moral à ses ouvriers.
La finalité est d¶attirer, de retenir, de sélectionner les meilleurs éléments pour en faire
des cadres fidèles et permettre la reproduction de la main d¶œuvre. En fait, il faut créer
un « homme nouveau » qui se distingue radicalement du prolétaire. Le Creusot,
Mulhouse deviennent des villes-usines où s¶exprime le paternalisme des patrons. La
Compagnie des Mines de la Grande Combe (dans le Gard) étudiée par Rolande
Årempé est l¶exemple type de l¶entreprise paternaliste. Elle crée de toute pièce une
commune nouvelle : édification aux frais de la Compagnie de logements (appelés les
« casernes »), d¶une mairie, une église, un temple protestant, une caserne pour la
brigade de gendarmerie, de magasins, d¶une cantine, une bibliothèque, des conduits
d¶eau potable, deux ponts suspendus sur le Gardon, un hôpital.

- Åoutes les entreprises rencontrent des O## 


  O   : par exemple, les
houillères du Nord-Pas-de-Calais, de Loire, des Cévennes sous le Second Empire recherchent

33
de la main d¶œuvre en permanence. Or, les entreprises souhaitent disposer d¶une main
d¶œuvre sédentaire et qualifiée. Car le problème est que la masse des travailleurs attirés par
les entreprises est très hétéroclite. Après avoir attiré, il faut sélectionner afin de ne garder que
les éléments susceptibles de répondre aux exigences du travail industriel et au désir de
tranquillité sociale qui anime la bourgeoisie d¶entreprise. Une fois opérée, la sélection doit
assurer la fixation du personnel afin de rompre avec le fléau de la mobilité qui rend la main
d¶œuvre instable. La stabilité est la condition nécessaire à l¶œuvre pédagogique du
paternalisme. L¶idéal c¶est d¶arriver à la reproduction des travailleurs par l¶hérédité : le ou les
fils succèderont au père : lignées de mineurs ou de métallos.

- Par la suite, vont se développer des éléments d¶une     


 : caisses de secours
(maladie, accident) et de retraite qui offrent à leurs adhérents une certaine sécurité du
lendemain. La stabilité de l¶emploi et du salaire se double d¶institutions destinées à permettre
aux travailleurs de réaliser des économies sur leurs rémunérations ou des les faire fructifier :
magasins vendant des denrées alimentaires à bas prix, cantines à prix réduitsü Les
économies réalisées peuvent être placées à la caisse d¶épargne de l¶entreprise qui sert un
intérêt supérieur à celui pratiqué par les banques. Cette politique est complétée par des
gratifications en nature et en argent : chauffage gratuit pour les ouvriers des houillères,
secours aux ouvriers en difficultés, primes d¶ancienneté, allocations pour familles
nombreusesü La scolarisation apporte une assistance morale : l¶éducation des enfants jusqu¶à
12 ans est prise ne charge par le patron (école professionnelle). L¶école remplit alors le rôle de
réservoir où s¶alimente et se prépare le personnel de l¶usine. Enfin, au Creusot, Schneider,
veut fournir à ses ouvriers de jolies maisons avec un jardin pour que ceux-ci s¶attachent à leur
résidence. Le jardin ouvrier occupe les loisirs du travailleur pour éviter qu¶il ne fréquente le
cabaret, lieu de débauche et de propagande politique.

- Ê 
   : se met en place au milieu du 19 siècle, un rêve social dont le paternalisme est
l¶incarnation. Ce néo-féodalisme de la bourgeoisie industrielle vise à transformer, sous
l¶autorité du chef d¶entreprise, l¶usine pour un faire une grande famille de travailleurs. Il faut
aussi transformer le prolétariat naissant en une société d¶hommes nouveaux échappant aux
maux de l¶industrialisation et de l¶urbanisation sauvage. On pourra ainsi éviter la haine de la
société (parce qu¶un peu moins injuste et insupportable) et la révolte qu¶elle peut porter en
elle.

34
- 
 C'O 
 

/% 
O 
 
"


On associe souvent Révolution industrielle et triomphe du capitalisme. Avènement du


capitalisme en tant que système de production mais de quel capitalisme s¶agit-il ? En effet, le
capitalisme du premier âge industriel possède des spécificités structurelles. L¶expression
« capitalisme libéral » est une de ces caractéristiques : elle met l¶accent sur la confrontation
des structures et du fonctionnement du système à l¶époque avec les schémas idéaux de la
doctrine économique libérale classique d¶Adam Smith à John Stuart Mill : libre entreprise
privée déployant son activité, sur un marché de pure concurrence sans entraves ni interférence
d¶un Etat confiné dans sa sphère politico-administrative, recherche du profit. On peut
s¶interroger sur ce schéma classique en privilégiant trois niveaux :
-‘ L¶entreprise : quelles dimensions ? Quelles formes ? Quelles bases sociales ?
-‘ Le marché : quel mode de fonctionnement ?
-‘ L¶Etat : quel rapport au champ économique ?

a)‘ L¶entreprise
Le capitalisme est une « économie d¶entreprises » (François Perroux) et c¶est précisément
dans la période 1780-1880 que l¶entreprise capitaliste s¶impose dans les secteurs clés de la
production industrielle. L¶entreprise capitaliste est privée : le capital est la propriété d¶une ou
de quelques personnes distinctes des travailleurs.

£‘     
- La O   O
  : les structures industrielles restent très diversifiées : il y a
une large résistance de l¶atelier artisanal, ce qui signifie le maintien d¶un tissu de dizaine de
milliers de micro-entreprises employant 1 à 5 personnes, entreprises non capitalistes, même si
elles sont sous la domination d¶un capitaliste extérieur (marchand-fabricant par exemple).
C¶est un phénomène massif en France et dans une grande partie de l¶Europe (système
dualiste). De l¶autre côté, on voit surgir très tôt des géants industriels développant bâtiments
et installations pour concentrer en un même lieu la main d¶œuvre. On les trouve surtout dans
les industries de base, les mines (9000 travailleurs chez Wendel en 1870 à Hayange, 12 000
chez Schneider au Creusot, 8000 chez Krupp à Essen en Allemagneü) Mais le textile, à une
échelle plus réduite possède aussi de grands ensembles industriels (4200 travailleurs chez
Dollfuss-Mieg à Mulhouse en 1834). En France, les 6 grandes compagnies ferroviaires à
partir de 1855-1860 comptent des milliers d¶employés, des centaines de millions de francs de
capital. Mais la norme de l¶entreprise capitaliste typique de cette époque est une entreprise
employant quelques dizaines ou quelques centaines d¶ouvriers au mieux : l¶exemple de
l¶industrie cotonnière le montre : en 1833, sur un total de 1500 entreprises, seulement 7
dépassent le millier d¶ouvriers ; la moyenne nationale par entreprises s¶élève à 136 ouvriers
(184 ouvriers en moyenne en 1870). En France, les ordres de grandeur sont comparables : la
moyenne des effectifs par entreprise dans la filature sont de 230 ouvriers en Alsace, 100 dans
le Nord, 80 en Normandie. Même dans la sidérurgie qui exige des investissements plus
importants, des moyens de production plus massifs, la taille des entreprises demeure modérée
jusque dans les années 1870 : moyenne de 218 travailleurs par entreprise en Angleterre, 50 à
250 ouvriers en France.

- Certes, la       s¶affirme dès le début de la Révolution


industrielle (passage du «      » au « !    ») mais cette concentration

35
reste limitée. Le mouvement de concentration se poursuit par croissance interne : les
entreprises les plus dynamiques réinvestissent leur profit développent leurs moyens de
production en élargissant leur effectif. La concentration s¶effectue aussi horizontalement,
c'est-à-dire au sein d¶une branche ou d¶un même stade de production) à la suite de
mouvements d¶absorption-fusion de firmes. Ainsi, dans les charbonnages se forme en 1864, la
Compagnie des mines de la Loire réunissant la majorité des mines de la région de Saint-
Etienne en un puissant ensemble fournissant ¼ de la production nationale. Enfin, il a la
concentration ou intégration verticale, c'est-à-dire la réunion dans une même entreprise des
différents stades de transformation de la matière première au produit fini. Mais globalement, il
ne faut pas exagérer le degré ni le rythme de concentration avant 1880. En effet, dans les 3
premiers quarts du 19e siècle, la concentration horizontale reste relativement faible dans la
plupart des branches.

- La  
   de l¶énorme majorité des firmes dans une production est une autre des
caractéristiques de ce premier âge industriel. Les entreprises industrielles bénéficient aussi
d¶une grande autonomie par rapport aux banques, qui fournissent certes les services financiers
(crédit commercial à court terme) mais qui n¶exercent qu¶exceptionnellement un contrôle sur
l¶industrie par une participation au capital. Donc, en résumé, l¶entreprise de la première
Révolution industrielle est de taille modérée, a tendance à la spécialisation et non à
l¶intégration, est morcelé au niveau sectoriel, et entretient des liens faibles avec les banques.

£‘ :  BO "  



- L¶entreprise capitaliste jusqu¶aux années 1860 a des formes juridiques correspondant à une
base essentiellement  

 #

.
>‘ La forme  
, c'est-à-dire absence de distinction de l¶entreprise et des biens
de l¶individu qui la possède et la dirige : c¶est le cas fréquent du patron-fondateur de la
première génération notamment dans l¶industrie légère où le capital a pu être réuni par
un seul individu.
>‘ La forme juridique de société est cependant la forme dominante de l¶entreprise
capitaliste : dès la seconde génération, un apport de capitaux plus conséquent est
requis. Cette mise en société prend différentes formes : des « sociétés de personnes »
a‘ la    

 # regroupe sous une même raison sociale des


parents ou quelques individus ou familles alliées, tous associés et responsables
de manière illimitée sur leurs biens : exemples : textile dans le Nord ou en
Alsace, banque Rothschildü
a‘ la   O 
 où l¶on distingue le ou les commandités,
gestionnaires de l¶affaire entièrement responsables sur leurs biens, et les
commanditaires, bailleurs de fonds passifs responsables seulement pour le
montant de leur apport (ce qui peut permettre un apport de capitaux extérieurs
sans perte de contrôle par l¶entrepreneur fondateur ou le noyau familial :
forme fréquente dans la sidérurgie. Cette forme peut évoluer vers la « Société
en commandite par actions qui permet d¶élargir le nombre des commanditaires
extérieurs sans pour autant mettre en cause le contrôle par le noyau dirigeant.
>‘ Les    %      où chaque actionnaire copropriétaire n¶est
responsable que pour le montant de ses actions. Forme théoriquement la plus adaptée à
l¶entreprises capitaliste, elle reste très minoritaire jusque dans les années 1870,
insignifiante même jusque dans les années 1860. En France, seulement 342 sociétés
anonymes sont créées de 1820 à 1848. Son succès n¶est net que dans des secteurs
particuliers comme les assurances (pour diviser les risques), les chemins de fer où elle
s¶impose d¶emblée comme la seule structure capable de drainer et rassembler les

36
immenses capitaux indispensables, enfin les banques après 1850 pour les
établissements de crédit de nouveau type (Crédit Mobilier, Crédit Lyonnais, Société
Généraleü) Dans l¶industrie, la Société anonyme ne perce pas avant 1870 (40
entreprises industrielles ayant cette forme en France en 1867). En effet, les dynasties
patronales ont une certaine méfiance à l¶égard de ce statut juridique (qui mettrait en
cause le contrôle de l¶entreprise par la famille fondatrice). Mais la législation des Etats
explique aussi ce phénomène : les entraves juridiques et politiques freinent le
développement des SA (quasi-interdiction en Angleterre jusqu¶en 1825). Les lois
libératrices des années 1855-1870 permettront leur création libre (loi de 1856 en
Angleterre, 1867 en France, 1869 en Allemagne).

r : #  = : * ë    '   () : répartition des sociétés françaises par
catégories juridiques.

b)‘ Le marché
Au cœur de la doctrine libérale qui s¶impose alors, se trouve le rôle central du marché comme
régulateur du système en tant que lieu de confrontation de l¶offre et de la demande où se
forment les prix. Grâce au marché, s¶effectue la sélection des entreprises les plus
compétitives. Pour les libéraux, le marché ne peut jouer ce rôle de régulateur que qu¶il s¶agit
d¶un marché libre où s¶exerce une concurrence sans entraves, entre un grand nombre de
vendeurs et un nombre élevé d¶acheteurs. De 1780 à 1870-1875, la tendance générale va
effectivement vers l¶extension des marchés et vers l¶épanouissement d¶une situation de large
concurrence

£‘ O
O   

- Il résulte de facteurs techniques comme la Révolution des transports, c'est-à-dire la mise en
place à l¶échelle nationale, puis internationale de systèmes modernes de transports. Cette
mutation des transports entraine le déblocage de régions jusque là entravées, la possibilité
technique de faire  

   O  , y compris les plus lourdes. Elle permet aussi
l¶abaissement général des coûts de transports fluviaux, maritimes et ferroviaires. Il en résulte
non seulement une accélération et un accroissement des échanges mais aussi une
intensification de la concurrence, c'est-à-dire une confrontation des entreprises au niveau d¶un
espace plus large. La formation d¶un marché concurrentiel du charbon en France vers 1840-
1860 provoque un affrontement entre les producteurs des bassins du Nord-Pas-de-Calais et
des bassins du Centre et du Sud. Il faut aussi faire face à la pénétration du charbon belge par
voie fluviale et ferroviaire dans tout le Nord-Est de la France.

- L¶invention du télégraphe par Morse en 1837 et sa diffusion permet la circulation rapide à


grande distance de l¶#   économique sur les prix, les productions, les marchés. C¶est
une condition technique indispensable au fonctionnement d¶une économie concurrentielle et
notamment à l¶essor des bourses de marchandises (Londres, Le Havre, Hambourg, New York)
où s¶établissent les cours mondiaux des matières premières.

- Le O
 O    
 et privilèges commerciaux et industriels détruit les
entraves au « laissez-faire » libéral et donc à la concurrence. Ce démantèlement se fait de
façon, tantôt brutale (comme en France pendant la Révolution française pour les manufactures
royales héritées de l¶époque mercantiliste), tantôt progressive (comme en Angleterre pour les
grandes compagnies de commerce coloniale). Le « laissez-passer », c'est-à-dire la libre
circulation des marchandises va ainsi favoriser le mouvement de libération des échanges et
achever l¶unification de l¶espace économique des Etats. Ainsi, apparaissent des espaces

37
économiques de grande dimension où les marchandises circulent librement : par exemple, les
EU d¶Amérique forment un vaste marché commun (13 Etats de départ, il y a élargissement
avec la conquête de l¶Ouest et la création de nouveaux Etats fédérés), le royaume d¶Italie
(dont l¶unité date de 1859 à 1871) constitue aussi un nouveau marché unique se substituant
aux marchés cloisonnés des sept Etats préexistants, même chose avec l¶unification allemande
menée par la Prusse et son chancelier Bismarck, achevée en 1871 (40 M de consommateurs).

- Les progrès de la  
  
 des marchandises démontrent l¶essor du libre-
échange. La source doctrinale de ce courant se trouve dans Adam Smith qui lie
développement économique, division du travail et élargissement maximal des marchés, y
compris au niveau international. David Ricardo avec sa théorie des avantages comparatifs,
fournit la justification théorique de la division internationale du travail c'est-à-dire la
spécialisation des économies comme facteur de développement économique optimal (mais à
condition de pouvoir faire circuler sans entraves les marchandises). En Angleterre, une
bataille est symbolique de ce mouvement de libération : celle des «   " », ces droits de
douanes élevés frappant le blé importé qui avaient été imposés par les propriétaires fermiers
britanniques en 1815. Les industriels accusent ces lois de maintenir un coût de la vie
artificiellement élevé qui pousse à la hausse les salaires et stérilisent les clients potentiels en
freinant les importations anglaises de produits industriels par réaction. Un groupe de pression
(lobby) animé par Richard Cobden mène une campagne d¶opinion dans le pays contre ces
lois. Il obtient du Parlement l¶abolition des   " en 1846. Pour l¶Angleterre, le pas
décisif est franchi : le marché britannique est désormais largement ouvert aux importations
étrangères, non seulement de blé mais aussi de matières premières et les produits
manufacturés. Pour les responsables britanniques, le libre-échange est une stratégie globale
qui doit instaurer une règle du jeu universelle : négociation de traités de commerce bilatéraux
abaissant réciproquement les tarifs douaniers : exemple accord franco-anglais (dit Cobden-
Chevalier du nom des négociateurs) que Napoléon III impose aux industriels français
majoritairement hostiles. Quand des territoires lointains refusent ces accords de libre-échange
pour protéger leur équilibre économique et social et leur indépendance nationale, les libéraux
n¶hésiteront pas à faire la guerre pour imposer leur politique (politique de la canonnière) :
pression navale sur l¶Egypte de Mehmet Ali en 1840, Guerre de l¶opium contre la Chine de
1839-1842, pression d¶une escadre américaine contre le Japon en 1853. La logique libre-
échangiste se développe surtout après 1875. Le rôle des Etats, dont les gouvernements sont
progressivement gagnés à la doctrine libérale, est important : ce sont eux qui mettent en place
et maintiennent le cadre concurrentiel. En France, par exemple, l¶Etat joue le rôle d¶arbitre
vis-à-vis du secteur charbonnier : il découpe et attribue les concessions minières de façon à
former un nombre important de compagnies moyennes et à lutter contre les velléités
monopolistiques de certaines compagnies comme la Compagnie d¶Anzin.

£‘ Ê    O
    
 4
  
 
- C¶est bien le marché libre qui détermine le  O  4 dans la période 1830-1880 et
non pas l¶Etat. Seuls, les tarifs ferroviaires sont déterminés selon une logique de service
public sous l¶influence de l¶Etat (sauf aux EU où se déroulent de sauvages guerres de tarifs
entre les compagnies). Ce fonctionnement concurrentiel du marché est sans nul doute un
facteur essentiel avec le progrès technologique et ses effets sur la productivité, de la baisse
générale des prix industriels.

- La détermination des prix par le marché concerne également celui d¶une marchandise très
particulière qui est la force de travail : Elle connait en effet, une fluctuation en fonction de
l¶offre et de la demande : hausse en période de conjoncture économique positive ; baisse lors

38
des crises (mise au chômage massive de milliers d¶ouvriers). Quand l¶offre de main d¶œuvre
augmente, les salaires ont tendance à baisser. Cette '
   

 des salaires
(toujours à la baisse) permet la reprise et la croissance en comprimant les coûts de production
et en restaurant les perspectives de profits pour les entrepreneurs.

c)‘ L¶Etat

£‘  8O   


- Pour la doctrine économique libérale, le fonctionnement de l¶économie et son
développement dépendent entièrement de la libre activité des agents économiques poursuivant
chacun leur D OO
. Les activités des agents sont harmonisées par une série de
«
  

 » (comme la fixation des prix par l¶offre et la demande) : une « 


 "
 » conduit ces millions d¶actes égoïstes dans le sens du développement optimal et
donc de l¶intérêt général. A partir de cette opinion qui imprègne les entrepreneurs comme les
responsables politiques, l¶Etat est considéré comme une superstructure extérieure au champ
économique, garante de l¶ordre public, de la sécurité des biens et des personnes mais dont
l¶intervention directe dans ce champ ne peut être qu¶inefficace et contre- productive. L¶Etat
doit donc avoir un rôle passif et minimum dans le développement économique.

- Pendant la Révolution industrielle, l¶Etat est plutôt


"
, c'est-à-dire en retrait du champ
économique : il est :
>‘ Non-entrepreneur, laissant le maximum de champ libre à l¶initiative privée ; Il y a très
peu d¶entreprises d¶Etat : fonction publique (poste), armement (arsenaux)
>‘ Non-régulateur : il s¶abstient de tout contrôle direct sur le fonctionnement de
l¶économie. La formation des prix et des salaires est laissée au marché.
>‘ Non-responsable de l¶activité économique, de ses rythmes, de son orientation
générale : il n¶y a pas de politiques économiques.
>‘ Il garde cependant des fonctions économiques régaliennes : fonction douanière : c¶est
lui qui fixe les règles en ce qui concerne les échanges extérieurs (même si les droits de
douanes tendent à se réduire). Fonction monétaire : l¶Etat a le pouvoir de battre
monnaie, c¶est lui qui définit l¶étalon monétaire (par référence à l¶or). Sous son
contrôle, la banque centrale émet selon des règles strictes la monnaie métallique (en or
ou en argent) toujours importante et la monnaie fiduciaire (billets de banque).

£‘ Ô8  "  


 %
- L¶Etat reste
'
, producteur de normes par la loi et le règlement. Il garantit la liberté
d¶entreprise et la libre concurrence. Il fixe les règles du jeu économique. L¶Etat libéral est
aussi un Etat gendarme chargé de surveiller le respect des lois et des règles. Il est garant de la
propriété privée, de l¶autorité patronale, de la liberté de travail (menacée par les ententes entre
ouvriers ou les grèves). Il envoie l¶armée et la police en cas de troubles (exemple contre les
Canuts lyonnais en 1831). En freinant l¶organisation ouvrière, en maintenant un marché du
travail concurrentiel, l¶Etat contribue à faire pression à la baisse sur les salaires.

-  8  aussi sur l¶économie par ses dépenses (les guerres, la conquête
colonialeü) Pour cela il effectue des prélèvements sur le Revenu national (ses recettes), il fait
des emprunts d¶Etat : la banque Rothschild a bâti sa fortune en prêtant de l¶argent aux Etats
européens, le Crédit Lyonnais a réalisé des super-profits dans des opérations d¶emprunts
destinés à payer l¶indemnité de guerre à l¶Allemagne en 1871-1873. Les impôts permettent
aussi de disposer de recettes : les impôts directs sont très modérés (surtout sur la propriété
foncière ou immobilière (impôts sur les portes et fenêtres), ils épargnent le profit des

39
entreprises et le revenu. Les impôts indirects sont plus nombreux (droits de douane, taxe sur
les boissons, monopole sur le tabac. Ce système fiscal privilégie la bourgeoisie d¶affaires.
L¶Etat dépense aussi : salaires des fonctionnaires (600 000 en France vers 1850-1860,
militaires compris), achat de matériel militaire, achat de technologie étrangère, école
publique, financement des infrastructures de transport moderneü

0‰ O 



  

a)‘ Les modifications socio-économiques

£‘   
O* 

- Influencée par l¶évolution économique, la société des pays européens se transforme au cours
du 19e siècle. La société industrielle, capitaliste et libérale est aussi " '  . En France, la
mutation opérée depuis la Révolution de 1789 permet l¶abolition des structures juridiques
d¶Ancien Régime : les groupes sociaux ne sont plus strictement définis, au plan juridique, par
leur naissance : les ordres : exemple : la noblesse constituant un ordre privilégié présent
autour du roi. Dans ce système, il est très difficile de quitter sa condition pour une autre (rêve
des bourgeois d¶accéder à une noblesse qui se ferme de plus en plus). Les ordres sont
hiérarchisés, ce qui implique des droits (les privilèges par exemple) et des devoirs différents.
Au contraire, dans le nouveau cadre juridique, la société se définit non plus comme un
ensemble de groupes mais comme un ensemble d¶individus entre lesquels est supprimée
théoriquement toute distinction ou hiérarchie. La r
    r   u   
0 du 26 août 1789 proclame dans son article 1 : « Åous les hommes naissent et
demeurent libres et égaux en droit, les distinctions ne peuvent être fondées que sur l¶utilité
commune ». Ainsi apparait une société d¶individus identiques et égaux en droit, société
libérale au sens où elle ne reconnait que des hommes libres. Elle est par conséquent une
société ouverte à toutes les formes de mobilité sociale : la richesse et le talent surpassent
désormais la naissance. La hiérarchie reste une réalité de cette société.

- L¶évolution se situe aussi au niveau de la structure socio-économique : on passe de sociétés


agraires à une  O 

 au sein de la quelle se développent les groupes


socioprofessionnels impliqués dans la production industrielle et aussi ceux qui travaillent dans
le secteur tertiaire en pleine expansion (transports, commerce, banque, services publics). Il y a
aussi une modification spatiale liée à l¶émergence de « pays noirs » industriels et urbains.
L¶exode rural et l¶urbanisation ont en effet profondément modifié la répartition de la
population dans l¶Europe industrielle.

- Cette période voit l¶apparition de  4'   4 déterminés par leur place dans
le processus économique. La bourgeoisie d¶entreprise est la nouvelle élite économique puis
politique, possédant les moyens de production et d¶échanges. Elle constitue l¶élément moteur
de la transformation économique et bénéficie du revenu le plus important : le profit des
entreprises. Parallèlement, se constitue une nouvelle classe de travailleurs manuels,
juridiquement libres mais ne possédant aucun titre de propriété sur les moyens de production.
Elle reçoit en échanges de son travail, un salaire qui sa source souvent unique de revenu.
Cette classe très modeste voire pauvre (prolétariat) forme avec la bourgeoisie d¶entreprise,
l¶ossature de cette société nouvelle. Mais celle-ci ne se réduit pas seulement à deux classes
sociales : un autre groupe très hétérogène commence à émerger au cours du 19e siècle : la
classe moyenne.

40
b)‘ De nouvelles couches sociales
£‘ " '  O  
- Charles Morazé a consacré une étude au " '   , l¶ du 19e
siècle. Il existe une certaine continuité entre la bourgeoisie d¶entreprise du 19e siècle et la
bourgeoisie et la noblesse du 18e. Les capitalistes d¶Ancien Régime sont souvent ceux de la
Révolution industrielle. Les banquiers, maitres de forges, marchands-fabricants des 17e et 18e
siècles ont fondé des dynasties d¶entrepreneurs qui vont se lancer, le moment venu, dans
l¶aventure de la mutation économique. De Wendel, De Dietrich sont des maîtres de forges
anoblis avant 1784 que l¶on va retrouver (ou leurs descendants) à la tête de grands empires
industriels au 19e siècle. Dollfuss, Mieg, Koechlin à Mulhouse ont débuté au milieu du 18e
siècle comme imprimeurs d¶Indiennes avant de devenir filateurs de coton, tisseurs ou
constructeurs de machines textiles. En Allemagne, c¶est la haute aristocratie terrienne qui
modernise la sidérurgie en Silésie. Ainsi le groupe social le mieux préparé à saisir les
opportunités offertes par le développement est sans doute celui des marchands-fabricants
(Louis Bergeron dans 0   + .) Les nouvelles bourgeoisies industrielles se
forment donc à partir de couches sociales qui possèdent un capital de départ : bourgeoisie
rurale de propriétaires terriens, bourgeoisie marchande.

- Pourtant cette continuité ne doit pas cacher le renouvellement assez profond des élites
économiques. Ainsi, de  4O 
sont des « self-made-men », des « fils de leurs
œuvre » qui se sont faits eux-mêmes. Parfois issus de classes populaires et parvenus par leur
énergie, leur audace, leurs qualités intellectuelles et un peu de chance à se hisser au rang de
chef d¶entreprises. Cela a été rendu possible par la faiblesse des capitaux à investir au début
de l¶aventure industrielle. Horatio Alger (1834-1909) publie plus de 130 romans populaires
destinés aux enfants et décrivant l¶ascension sociale vertigineuse d¶un jeune homme pauvre
en haillons devenant un magnat de l¶industrie. Aux EU, Andrew Carnegie, fondateur d¶un
trust sidérurgique et qui amasse une immense fortune est d¶origine ouvrière (fils de tisserand),
George Mortimer Pullman qui fait fortune en créant les wagons-lits est né à la campagne dans
une famille pauvre. En France, le textile offre de multiple exemple d¶ouvriers qui fondent une
entreprise : Julien Lagache à Roubaix, Georges Perrin dans les Vosges, Josué Chabert en
Ardècheü Les artisans et les employés qualifiés constituent un terreau favorable d¶où ont
germé de nouvelles dynasties industrielles : exemple Julien Åhiriez, fondateur d¶une des
grandes dynasties textiles du Nord, débute sa carrière comme contremaître dans une filature.
Arndt Krupp, un forgeron est à l¶origine de la grande dynastie sidérurgiste allemande.

- La possession au départ d¶un 


 

 
facilite l¶accession au patronat. Les
grandes écoles françaises (Ecole des Arts et métiers, Ecole centrale, Conservatoire national
des arts et métiers, HEC, Sciences-poü) apparaissent comme pourvoyeuses de talents aptes à
s¶insérer dans le monde de la bourgeoisie industrielle. Georges Dufaud en est le prototype :
polytechnicien, il lance en association avec une famille de marchands de fer parisien, le
centre sidérurgique de Fourchambault en 1834. Les ingénieurs sont nombreux à gravir les
échelons du pouvoir jusqu¶à devenir eux-mêmes patrons.

- Aux EU, les grands magnats de l¶industrie de la période 1800-1840 proviennent pour un
tiers des classes populaires, un tiers des classes moyennes et un tiers de la haute bourgeoisie.
Mais entre 1850 et 1870, ils viennent à 70% de la grande bourgeoisie, ce qui indique une nette
diminution de
    
. Après quelques décennies d¶ascension sociale fréquente, la
bourgeoisie d¶entreprise semble se replier sur elle même, se transformer en dynasties, en
castes. Le milieu patronal devient alors une véritable classe sociale de plus en plus homogène.
Les familles patronales se regroupent dans les beaux quartiers des grandes villes ou des cités

41
industrielles où elles vivent dans le luxe et le confort. Elles mettent en place des stratégies
familiales (alliances matrimoniales) pour resserrer leur liens : exemple : mariage entre les
familles Dollfuss et Mieg. Les patrons forment aussi une classe car ils partagent des valeurs
communes : culte du travail et de la famille, de la religion et de la morale. De plus, les
industriels commencent à d¶organiser au niveau professionnel pour défendre leur intérêts et
leur solidarité : Comité des Industriels de l¶Est en 1835, Comité des Forges en 1864ü Enfin,
rappelons que seule une minorité d¶entrepreneurs réussisse à fonder une dynastie car il y a
beaucoup d¶écueils à franchir.

£‘ 

- La notion même de prolétariat est discutable car la
   est marquée par une
grande diversité sociale. Le prolétariat est divisé en diverses factions correspondant aux
différentes branches de l¶économie et aux différents niveaux de qualification. Les niveaux de
qualification et de salaires s¶ajoutent à cette division en catégories du monde ouvrier :
aristocratie ouvrière pour les artisans et les industries mécaniques, manouvres dans l¶industrie
textile. La mentalité et le comportement des ouvriers diffèrent en fonction des secteurs de
travail. Composée de groupes humains venus d¶origines géographiques et sociales différentes,
la classe ouvrière est disparate. Se déplaçant facilement, souvent n¶ayant aucun lien naturel
avec la région où elle travaille, l¶ouvrier est « un oiseau de passage ». Cette mobilité gêne le
patronat confronté au manque de main d¶œuvre fiable. Cette mobilité résulte de la répulsion
affichée par les travailleurs pour certains métiers pénibles (exemple : la mine).

- Cette extrême diversité est contrecarrée par des #   O  du prolétariat : le travail
manuel salarié, la sensibilité aux idées républicaines et socialistes qui propage l¶espoir d¶un
monde nouveau et meilleur. Les mouvements sociaux (résistance aux ordres du patron,
grèvesü) leur donnent conscience d¶appartenir à un même monde qui s¶oppose à la classe
dirigeante.

£‘   
  
- La " '     (distinguée par Ernest Labrousse de la bourgeoisie active, c'est-à-
dire celle qui entreprend et travaille) est composée de personnes qui possèdent des capitaux
mais se contentent de les placer sous forme d¶investissements ou d¶actions ou d¶obligations
dans les sociétés industrielles. De ces placements, ils retirent des revenus sous forme de
rentes, intérêts, dividendes, loyers. Ces bourgeois vivent sans travailler, uniquement des
revenus tirés de leur patrimoine ; couche oisive de rentiers, elle se développe dans toute
l¶Europe et notamment en France (500 000 rentiers à la fin du siècle). Ils se différencient
radicalement des bourgeois conquérants.

r : O = : la classe moyenne

- Entre la bourgeoisie et le prolétariat se développe une   

! %, tirant son


revenu de salaires ou honoraires perçus contre un travail qui n¶est pas manuel (contrairement
au prolétariat). Elle ne vit pas non plus des profits de l¶industrie (contrairement à la
bourgeoisie d¶entreprise). Ce sont des cadres et ingénieurs, indispensables au fonctionnement
des industries modernes et des professions libérales : notaires, médecins, avocats, architectes,
journalistesü On peut y ajouter le monde des employés qui est en plein développement :
employés du commerce, des banques, vendeurs, représentants de commerce. La naissance des
grands magasins (E Zola : Au Bonheur des dames) inaugure une nouvelle forme de rapport à
la clientèle. Se développe aussi le monde de la petite boutique de détail dans les centres
urbains puis dans les campagnes : textile, habillement, alimentationü Enfin, on assiste à une

42
croissance spectaculaire des fonctionnaires (sauf en Grande-Bretagne) : armée, police, poste,
justice, ponts et chaussées, fiscalité, enseignement (64 000 enseignants en France en 1876, ils
sont 100 000 en 1892).

- Ê 
  : le développement des couches nouvelles, très diversifiées traduit
l¶augmentation rapide du secteur tertiaire. Elles contribuent à compléter un paysage social
multiforme composé de catégories anciennes et des nouvelles classes sociales issus de
l¶industrialisation : bourgeoisie d¶entreprise et prolétariat.

43
  O
  

La pensée économique moderne s¶est constituée au 19e siècle. Dès la fin du 18e siècle, Adam
Smith jette les bases du courant libéral contemporain ; avant lui, les mercantilistes avaient
déjà cherché les moyens d¶enrichir les nations et les physiocrates prônaient une forme de
libéralisme. Après la mise en place de la théorie économique libérale classique se dessine un
rejet du capitalisme par des théories hétérodoxes : le marxisme.

‘     O



%     
  %  
Le courant mercantiliste et le courant physiocrate sont les deux premiers vrais courants
économiques modernes : très différents l¶un de l¶autre, ils jouent un rôle important dans la
constitution de la pensée économique du 19e siècle. Dans le mercantilisme, l¶Etat doit
forcement intervenir dans l¶économie alors que pour les physiocrates, il existe un ordre
naturel qu¶il ne faut surtout pas perturber.

r : # *:    


:3tableau de la pensée économique

  


 

£‘ ‰  '4


- Du 16ième au 18ième siècle, des publicistes (spécialistes du droit public) et des conseillers des
princes décrivent les '
  O  "  
    pour les gouvernants des
premiers grands Etats modernes. Celle-ci consiste à attirer sur le territoire national les métaux
précieux considérés à l¶époque comme les premières de toutes les richesses et à les y
conserver. L¶Etat doit intervenir dans l¶économie pour favoriser cet enrichissement monétaire.

- La pratique mercantiliste diffère selon les pays : le  


  est espagnol : il
est « chryshédoniste », c'est-à-dire que le plaisir provient de la possession de l¶or (on peut dire
aussi : « bullioniste » : du mot anglais : '  qui signifie lingot). Ce mercantilisme
considère qu¶il faut accroitre les richesses en or grâce aux mines des colonies et surtout
l¶empêcher de quitter les frontières nationales. Mais le mercantiliste français . 0 O
critique cette conception en mettant en évidence que ce qui fait la valeur de l¶or c¶est sa
rareté. Selon le mercantilisme anglais, il faut exporter le plus possible aux prix les plus élevés
et importer le moins possible : cela permet de dégager un excédent commercial qui fait entrer
de l¶or dans le pays. Le mercantilisme anglais est donc protectionniste : exemple les 0 
" de 1773 qui interdisent toute importations de blé au RU ou plus anciennement, les actes
de navigation de Cromwell en 1651 qui interdisent toute importation acheminée par des
bateaux autres qu¶anglais. Enfin le mercantilisme français vise à développer l¶activité
manufacturière. Les importations doivent se limiter aux matières premières non disponibles
dans le pays, tandis qu¶il faut exporter des produits manufacturés à prix élevé. Le
mercantilisme français connait son apogée sous Ê
" (deuxième moitié du 17e siècle) :
c¶est le colbertisme mettant en place un protectionnisme sélectif et une politique industrielle
de création et de développement de manufactures d¶Etat (manufactures royales).

£‘   
  #@ 
- Les auteurs, classés dans l¶école  
 , n¶ont pas vraiment fait œuvre scientifique
car ils se sont limités à l¶analyse partielle des politiques économiques susceptibles de servir
les grands desseins politiques des Etats. Le mercantilisme est une réflexion économique « au
service du pouvoir » (c¶est avant tout une économie politique).

44
- .0 O (1530-1596) : penseur politique qui s¶intéresse à la vie citoyenne et cherche à
trouver des réponses aux problèmes de son temps dans deux ouvrages fondamentaux : ë
5
   $ $   
 , ë  8$ .     5
'   . Sa pensée entre en
contradiction avec la pensée dominante de l¶époque car il affirme que l¶abondance des métaux
précieux n¶est pas un facteur d¶enrichissement. Au contraire, elle provoque une augmentation
des prix et donc n¶enrichit pas réellement le pays. Ainsi, il annonce la théorie quantitative de
la monnaie. C¶est la croissance démographique qui fait la prospérité et le dynamisme des
nations. Jean Bodin a une vision humaniste de la société, de la politique et de l¶économie en
affirmant que ce n¶est pas forcement la possession matérielle qui fait la vraie richesse d¶un
pays mais plutôt le dynamisme de sa population.

-   O /    (1575-1621) : après un duel meurtrier en 1605, Antoine de
Montchrestien qui craint la justice fuit en Angleterre. Il est alors frappé par le contraste entre
la prospérité qui existe en GB et les difficultés de l¶économie française. Son ouvrage, 6


     , donne des conseils pour redresser l¶économie de la France. Il considère
que le problème vient du déficit de la balance commercial. Pour lui, la vraie richesse provient
de la quantité de biens dont une économie dispose : « ce n¶est point l¶abondance d¶or et
d¶argent la quantité de perles et de diamants qui fait les Etats riches et opulents mais c¶est
l¶accommodement des choses nécessaires à la vie ». Si les métaux précieux sont nécessaires,
c¶est parce qu¶ils sont indispensables aux échanges. Or les traités de commerce ne sont pas
équitables, ils sont défavorables, selon lui, à la France. La politique royale doit donc consister
à rétablit la balance du commerce. De plus la France dispose de beaucoup d¶atouts : une
population abondante, des terres fertiles, des sources de richesses nombreuses mais tout cela
doit être mis en valeur par l¶Etat. Il faut donc
>‘ favoriser la création de manufactures pour réduire les importations et accroitre les
exportations
>‘ renforcer la réglementation pour défavoriser les marchands étrangers (lourdes taxes,
prohibition de certains produits, pour limiter les fraudes et les défauts de fabrication
>‘ assurer l¶essor du commerce maritime car la marine est un gage de puissance et de
gloire : pour cela le roi doit créer des compagnies de commerce comme la Compagnie
des Indes orientales et mener une politique d¶expansion coloniale.
Montchrestien va influencer un peu la politique d¶Henry IV mais ces principes ne sont
réellement appliqués qu¶un demi-siècle plus tard par Jean-Baptiste Colbert.

- .$0  Ê
" (1619-1683) : contrôleur général des finances sous Louis XIV,
secrétaire d¶Etat à la maison du roi, Colbert conduit une politique industrielle et commerciale
très dynamique. Colbert est très libéral, il pense que « le commerce, universellement, consiste
en la liberté à toutes personnes d¶acheter et vendre, et en la multiplicité des acheteurs. Åout ce
qui restreint la liberté et le nombre de marchands ne peut rien valoir ». Mais il considère aussi
que l¶Etat a un rôle important :
>‘ favoriser le retour à la stabilité économique intérieure par la limite de l¶endettement
et une collecte efficace de l¶impôt.
>‘ « l¶Etat doit mener une guerre d¶argent contre tous les Etats de l¶Europe » : la
quantité monétaire en circulation en Europe étant relativement stable, tout progrès
économique national se fait au détriment des autres nations. En effet, pour qu¶un
pays s¶enrichisse, sa balance commerciale doit être excédentaire : l¶Etat doit attirer
l¶argent des autres pays et le garder.
>‘ Mise en place d¶une politique protectionniste en relevant les droits de douane afin de
protéger les nouvelles industries.

45
>‘ Création de manufactures et de compagnies de commerce pour augmenter la
production et les exportations et diminuer les importations.
>‘ Amélioration des infrastructures et stimulation des ressources nationales.

0   O


 
"
 

 %  

£‘ ' O
 %  
- Au début du 18 e siècle, la pensée mercantiliste domine encore mais un économiste et
démographe irlandais,  O Ê

 (1680-1734) commence à se démarquer de cette


pensée. Il estime que la richesse provient de la terre et du travail. Il croit aussi en un ordre
naturel qui équilibre l¶économie et les prix des produits. Même la population s¶équilibre
naturellement par migrations, mortalité, nuptialité (qui dépendent des ressources mises à
disposition). Selon lui, la répartition des activités s¶explique par le jeu des marchés et des
prix. Son ouvrage 4       

 , influence les physiocrates et
leur successeur dont Adam Smith.

- La théorie  %   à proprement parler est l¶œuvre, dans les années 1760,
d¶économistes français dont le maître, le chef de file est le docteur (médecin de Louis XV)
:@  E % (1694 ± 1774) auteur du 6' 
   . Cette doctrine économique
affranchit l¶analyse économique des préoccupations éthiques ou politiques. Son 6' 

   1758, constitue la première recherche scientifique économique. Dans ce tableau,


il décrit la circulation des biens économiques dans l¶économie française (il y représente la
circulation des flux réels et monétaires). Il pense que l¶enrichissement monétaire ne doit pas
être l¶objectif de l¶économie, seules les productions agricoles constituent de véritables
richesses. On peut parler d¶une première vision « macroéconomique » où Quesnay s¶efforce
d¶élaborer un circuit économique et de décrire la formation de ce que nous appelons
aujourd¶hui le revenu national. Par le jeu des échanges, les dépenses des uns sont les gains des
autres. Les agents économiques sont liés entre eux : la classe des agriculteurs qui est la classe
productive se distingue de deux classes stériles : la classe des propriétaires fonciers et celle
des urbains.

£‘  
 %  
- L¶' 
 est la seule activité qui permet de produire un surplus, c'est-à-dire un produit
net. L¶activité manufacturière est stérile car elle transforme les richesses mais n¶en crée pas.
La seule utilité à l¶industrie est de fournir à l¶agriculture des biens de production que les
physiocrates nomment « avances ». L¶utilisation de ces avances permet d¶augmenter les
rendements. Avec les physiocrates, la richesse devient matérielle et non plus, comme
l¶affirmaient les mercantilistes uniquement monétaires.

- Dans l¶exemple développé par Quesnay, les agriculteurs produisent l¶équivalent de 5


milliards en produits agricoles, ils conservent 2 milliards pour l¶entretien et faire les
« avances » à la terre. Ils vendent pour 3 milliards aux autres classes. Grâce à cette vente, ils
peuvent acheter aux classes stériles des produits finis qui serviront d¶avances (achat d¶outil,
engrais, semencesü) Quesnay considère que les avances peuvent être menacées par des taxes
trop lourdes qui grèvent le revenu des agriculteurs. Le manque de liberté d¶exporter des
produits est aussi une menace. Il est donc nécessaire de réduire les impôts et assurer la liberté
de l¶économie. Les physiocrates sont donc les premiers libéraux : ils considèrent que l¶Etat ne
doit pas intervenir dans l¶économie et qu¶il doit respecter les lois naturelles ou physiques qui
la guident (d¶où le nom de physiocrates). Les intérêts individuels et surtout ceux des

46
agriculteurs sont conformes à l¶intérêt général. Il faut évidemment respecter la propriété
privée. Les physiocrates sont libre-échangistes et s¶opposent donc au protectionnisme de
Colbert. Ils prônent les exportations de blé et l¶augmentation du prix des produits agricoles
afin d¶encourager les agriculteurs à accroitre leur production et donc le produit net.

- Ê 
  : cette vision nouvelle de l¶économie reste limitée. Quesnay place son analyse
au plan global. Au plan national, il considère que le produit net qui constitue l¶enrichissement
de la société, provient uniquement de l¶agriculture, activité prépondérante à l¶époque.
Mais les physiocrates sont à l¶origine de 3 avancées considérables de la pensée économique :
>‘ Ils sont les premiers libéraux
>‘ Ils sont partisans de l¶enrichissement matériel et non monétaire
>‘ Ils ont créé le premier circuit économique.

47
 
"

 
A partir de la fin du 18ième siècle, de nouveaux principes triomphes suite à l¶évolution des
mentalités, évolution elle-même indissociable des bouleversements économiques : le principe
de liberté ; la glorification du travail et la naissance d¶une classe d¶entrepreneurs.

r : # , :  
:),   
=
 8  : le courant libéral

 # O 
£‘  O
" :
- La
"O
est proclamée en 1789 et, en mars 1791, sont supprimés définitivement
les corporations (loi Le Chapelier abolit les Corporations c'est-à-dire des organisations
groupant les artisans par corps de métiers, ces organisations entraînent une restriction
d¶exercice, une limitation de l¶accès à la profession ainsi qu¶une réglementation très
minutieuse.) Des droits et des libertés sont proclamés : liberté de déplacement ; liberté de
circulation des produits ; la propriété privée, droit proclamé « inviolable et sacré » par la
Déclaration des Droits de l¶Homme et du Citoyen de 1789 => fondement de l¶individualisme
libéral.

- Le libéralisme repose sur O4  # O :


>‘ Le respect de l¶ordre naturel : l¶Etat ne doit pas intervenir dans l¶économie, point de
vue déjà présent chez les physiocrates. Les classiques (et les néo-classiques) défendent
donc aussi le libéralisme et le libre-échangisme. Ils pensent que si les conditions de la
concurrence pure et parfaite sont respectées, l¶économie atteint un optimum par
équilibre général.
>‘ Les comportements individuels s¶agrègent harmonieusement. Chaque individu, en
recherchant sont intérêt personnel, œuvrent « inintentionnellement » pour l¶intérêt
général. Ils sont des utilitaristes car ils affirment que la motivation principale de
chacun est de chercher à maximiser son utilité, c'est-à-dire son degré de satisfaction.

£‘ '
#  O

  O 
 O 
- La révolution industrielle sera préparée par une modification profonde du  O 

de civilisation ; on va assister, en effet, en partie sous l¶influence du protestantisme, à une
transformation totale de la conception que l¶homme se fait de son travail professionnel. Cette
transformation va permettre aux entrepreneurs naissants d¶échapper à l¶attraction du milieu
social aristocratique et d¶acquérir une conscience de classe avec des valeurs particulières. Le
calvinisme valorise donc le 
et l¶ 
  Dans cette conception, le travailleur
modèle devient l¶ : l¶entrepreneur apparaît aux antipodes du bourgeois,
bénéficiaire de charges vénales et de privilèges, qui vit des revenus d¶une propriété,
indépendamment du travail effectué.

0 

 
a) Les classiques anglais et français
La Révolution industrielle à partir de la fin du 18e siècle révèle un nouveau courant de pensée,
fondement de la pensée économique moderne. Les idées principales de l¶école classique sont
l¶harmonie des intérêts individuels, le respect de l¶ordre naturel et par conséquent la non-
intervention de l¶Etat dans l¶économie.

48
£‘ O );-$;* # OO
  
"
 O‘
- Les premiers travaux d¶Adam Smith sont philosophiques : il affirme que l¶homme est un
être social qui cherche d¶abord à se rendre %  et à faire approuver ses
comportements par ses proches. C¶est à partir de l¶œuvre d¶Adam Smith, 5     
         5        (1776), que se constitue la tradition libérale
classique. A Smith considère que, contrairement à ce qu¶affirment les mercantilistes, la
véritable richesse n¶est pas l¶or mais le produit que l¶on peut consommer. La richesse provient
donc de la production matérielle. Le but de l¶ouvrage est de déterminer les moyens d¶accroitre
cette production afin d¶enrichir la nation.

- Pour A Smith, il faut distinguer la 


 ' de la 
 '. La valeur en
usage résulte de l¶utilité de la marchandise et la valeur en échange exprime la faculté que
donne la possession de cette marchandise pour acheter d¶autres marchandises : la valeur en
échange représente donc le prix réel de la marchandise : « Il n¶y a rien de plus utile que l¶eau
mais elle ne peut presque rien acheter. On ne peut rien avoir en échange. Un diamant au
contraire, n¶a presque aucune valeur quant à l¶usage mais on trouvera fréquemment à
l¶échanger contre une très grande quantité d¶autres marchandises ». La valeur en échange des
marchandises provient du travail nécessaire à leur production. Lorsque quelqu¶un achète une
marchandise, il achète en réalité le travail d¶autrui. « Le travail est la mesure réelle de la
valeur échangeable de toute marchandise ». La valeur des marchandises provient donc de la
quantité de travail nécessaire pour les produire. Mais l¶unité utilisée lors de l¶achat d¶une
marchandise n¶est pas le travail, qui est pourtant la mesure réelle de la valeur, car chaque
unité de travail n¶est pas identique. On utilise donc l¶or ou l¶argent qui sont des marchandises
dont la valeur résulte de la quantité de travail nécessaire pour les extraire et pour les apporter
sur le marché. Mais, les métaux précieux ne peuvent mesurer la valeur réelle des
marchandises ; le travail est leur prix réel : « par exemple, chez un peuple de chasseurs, s¶il en
coûte habituellement deux fois plus de peine de tuer un castor que de tuer un daim,
naturellement un castor s¶échangera contre deux daims et vaudra deux daims. »

- S¶attachant à rechercher « les causes de la richesse des nations », Adam Smith identifie les
deux facteurs essentiels de la production :
 
 O 
 %  par l¶emploi
productif de l¶épargne et l¶élévation de la productivité du travail due à la O  O
.
Smith souligne ainsi les vertus de l¶épargne, l¶épargne est considérée dans la tradition
classique comme essentielle pour l¶accumulation du capital (l¶investissement) donc un facteur
de productivité. Dans le même temps, l¶exemple resté célèbre de la « manufacture
d¶épingles » montre les effets positifs de la division du travail sur la productivité même si
Smith souligne également les limites de la division du travail. La division du travail permet :
>‘ l¶accroissement de l¶habileté : « la division du travail, en réduisant la tâche de chaque
homme à une opération très simple et en faisant de cette opération la seule occupation
de sa vie, lui fait acquérir nécessairement une grande dextérité ».
>‘ de gagner du temps (l¶ouvrier ne passe pas continuellement d¶une tâche à une autre).
>‘ L¶emploi des machines.

- Autre moyen pour les nations de s¶enrichir, c¶est laisser les individus s¶enrichir, car en
œuvrant pour leur D  
, ils enrichissent la nation toute entière. Ainsi, pour
Smith, l¶harmonie sociale naît du jeu des libertés individuelles (c¶est la fameuse notion de la
«   "
 », sans doute la métaphore la plus célèbre de l¶histoire de la pensée
économique). Pour Smith, la somme des intérêts particuliers est à l¶origine de l¶intérêt
général. Il croit au nécessaire respect de l¶ordre naturel. L¶économie s¶équilibre
automatiquement et l¶Etat ne doit pas intervenir dans son fonctionnement. Le rôle de cet Etat

49
minimal se limite à trois fonctions : deux régaliennes (protéger la nation des autres nations :
c¶est le rôle de l¶armée et protéger les individus contre l¶injustice et l¶oppression : c¶est le rôle
de la police et de la justice), une tutélaire (s¶occuper des travaux nécessaires pour le
développement économique et non rentables pour le secteur privé comme le creusement des
canaux ou des ponts).

- Pour s¶enrichir, il faut aussi se procurer les produits aux meilleurs prix. Sur le marché
intérieur, cela peut être permis par la    que se livrent les différentes industries. Il
est aussi possible d¶acheter à l¶extérieur ce qui est moins cher. Smith affirme donc qu¶il faut à
la fois « laisser faire » les individus à l¶intérieur d¶un pays et « laisser passer » les
marchandises entre les nations. Smith apparaît ainsi comme le fondateur du
"
  et du

"$ ' . Le libre-échange conduit inévitablement à la spécialisation internationale


qui est fortement souhaitable d¶après A Smith car elle permet d¶optimiser les avantages de
chaque pays. Sa    O  '  "
 démontre les avantages de la division du
travail entre les nations et du libre échange : chaque pays a intérêt à se spécialiser dans les
produits pour lesquels il est le plus avantagé (ceux qui nécessitent le moins de travail pour les
produire).

- Ê 
   : l¶analyse de Smith est d¶une grande richesse : de nombreux auteurs s¶en sont
inspirés : bien sûr les Classiques, mais aussi Marx qui lui emprunte notamment sa théorie de
la valeur-travail. C¶est dans le courant libéral que l¶influence de Smith est la plus forte :
l¶utilitarisme, l¶autorégulation du marché, la théorie quantitative de la monnaieü Mais Smith
propose un libéralisme modéré : il accepte certaines interventions de l¶Etat (dans les échanges
extérieurs par exemple), il préconise le protectionnisme quand une industrie est nécessaire à la
défense du pays ou en représailles envers une nation elle-même protectionniste, il pense aussi
qu¶il faut ouvrir les frontières progressivement afin de ne pas faire disparaitre soudainement
des activités, enfin, il est partisan de l¶éducation pour les déshérités.

r : #  21 :  $ :):)) : lire Adam Smith

£‘ Å   "/
  (1766-1834) et l¶4      
 8   
  '
 , pasteur anglican devenu professeur d¶économie politique.
En 1795, dans un village au centre de l¶Angleterre, Spennhamland, les juges du Comté
décident de créer une sorte de revenu minimum, qui peut même compléter le salaire lorsque
celui-ci est insuffisant. Malthus s¶oppose à ces aides sociales dans son  ‘ ‘‘ 
‘
‘  ? ‘ qui paraît en 1798. Il y recherche les causes du phénomène de paupérisation
qui accompagne, en Angleterre, la révolution industrielle. Il pose le problème de l¶équilibre
entre le nombre des hommes et le volume de production dont ils peuvent disposer (équilibre
démo-économique). Il y explique que la pauvreté est due au manque de blé, or les lois
sociales ne « produisent » pas de blé. Pour lui, ces lois accroissent même la pauvreté car elles
encouragent la natalité. La loi de la population de Malthus rejette toute action sociale de l¶Etat
qu¶il accuse de nuire à la régulation démographique. Or, pour lui, un équilibre tend à
s¶instaurer à long terme, équilibre déterminé par la fixation du niveau de vie de la masse de la
population au minimum vital. Malthus appelle   O  
 l¶idée que
l¶augmentation de la population suit une  '  '  tous les 25 ans(1, 2, 4, 8,
16, 32, 64...), tandis que les subsistances, la nourriture croissent en  '   
(1, 2, 3, 4, 5, 6...) Ainsi, la population tendrait-elle à s¶accroître plus rapidement que les
subsistances. Les pauvres sont donc en surnombre : « un homme qui est né, s¶il ne peut
obtenir de ses parents la subsistance et si la société n¶a pas besoin de son travail, n¶a aucun

50
droit de réclamer la plus petite portion de nourriture et en fait, il est de trop au banquet de la
nature ; il n¶y a pas de couvert vacant pour lui. »

- Åoute augmentation de la production en améliorant le revenu total entraîne, selon Malthus,


un accroissement de la population tel que le niveau de vie diminue. L¶augmentation de la
mortalité et la diminution de la natalité qui s¶ensuivent ramènent le volume de la population à
un niveau compatible avec celui du volume des subsistances ( '
  O

 
  par la famine, la sous-alimentation, les épidémies, les guerres). Ce n¶est
finalement que pour une valeur du niveau de vie équivalant au minimum vital qu¶il y a
équilibre entre population et subsistances. Pour éviter les conséquences du décalage
population-subsistances et cet état de « misère extrême », Malthus recommande le célibat et
l¶abstinence à ceux qui ne peuvent nourrir une nombreuse famille, c¶est-à-dire en fait aux
classes pauvres. Il refuse la contraception qu¶il considère comme un vice mais il préconise
« la contrainte morale » : recul de l¶âge du mariage, chasteté prénuptialeü Il est nécessaire
que les pauvres adoptent volontairement cette solution : il ne faut surtout pas les encourager
par des politiques natalistes : üles lois sur les pauvres tendent manifestement à accroître la
population sans rien ajouter aux moyens de subsistances [ü] le vice est de créer un plus
grand nombre de pauvres. »

- Ê 
  : Malthus s¶est largement trompé et ses prédictions pessimistes se sont révélées
largement fausses. Il n¶a pas envisagé la diminution de la natalité induit par les changements
de mentalité dus au développement économique. Il n¶envisage pas non plus la possibilité que
la pression démographique soit un facteur d¶augmentation de la demande donc de la
production. Mais ses thèses sur la sélection naturelle de la population en font un des
précurseurs du darwinisme. Il influencera les économistes qui pensent que les aides sociales et
la redistribution encouragent l¶oisiveté et il est l¶un des premiers économistes à se rendre
compte de l¶importance de la demande comme stimulant de la production (ce qui infirme
d¶ailleurs son propre principe de population !) Dans ses /   
     
(1820), Malthus s¶oppose à JB Say en affirmant que l¶offre ne crée pas forcement la demande,
car une partie des revenus peut être épargnée (ce qui peut provoquer un recul de l¶activité
économique). Il pense aussi que la loi des débouchés est fausse car les produits de ne
s¶échangent pas uniquement contre des produits, mais beaucoup s¶échangent contre du travail.
Or, certains travaux sont improductifs (comme ceux des domestiques) alors que d¶autres sont
productifs. Par ailleurs l¶épargne est souvent trop forte : les entrepreneurs capitalistes
épargnent une partie importante des revenus qu¶ils perçoivent. Il résulte de tout cela que le
niveau de production et le niveau de la demande ne sont pas nécessairement identiques. Le
système capitaliste peut donc craindre une insuffisance de débouchés.

r : # : lire Malthus

£‘ rO  O (1772-1823)


- Economiste anglais, David Ricardopublie son œuvre majeure ë  /    
  
      > en 1817. L¶acquis théorique de l¶œuvre de Ricardo est considérable :
une    "B  O
 
 ; la thèse de
8   avec son analyse de la
répartition ; enfin, la démonstration de la supériorité du libre-échange avec la théorie des
avantages comparatifs, version théorique améliorant la théorie des avantages absolus de
Smith.

- D¶après sa    "B  O


 
, le fonctionnement du marché permet de tendre
vers un prix d¶équilibre. Ce prix, dit prix d¶équilibre, est déterminé par la valeur des biens.

51
Celle-ci est fixée par leur coût de production, c¶est-à-dire par le coût du travail incorporé dans
les produits (théorie de la valeur-travail). Reprise d¶Adam Smith, cette théorie dit que la
valeur d¶échange des marchandises dépend de la quantité de travail nécessaire pour les
produire. Ricardo affirme qu¶il faut prendre en considération le travail direct (celui qui
produit directement la marchandise) et le travail indirect (qui a été nécessaire pour produire
les outils, les machinesü) De plus, la valeur travail des marchandises s¶établit sur la base des
conditions de production les plus difficiles et il est aussi nécessaire de prendre en compte les
différentes qualifications des travailleurs. Cette théorie est qualifiée d¶objective car fondée sur
des éléments concrets, ici le coût de production (rôle de l¶offre). Elle s¶oppose à la théorie
subjective de la valeur défendue par les néoclassiques.

- Selon Ricardo,    '   


 se partagent trois sortes de revenus. Au terme de sa
démonstration, Ricardo montre que la part des profits est destinée à baisser, baisse à l¶origine
d¶une diminution de l¶investissement donc de la productivité et de la croissance économique.
Il y a donc un risque qu¶advienne un « état stationnaire » caractérisé par la croissance zéro.
Ricardo distingue trois groupes sociaux : les   
  , les 
  et les
  #   :
>‘ Les salariés vendent leur force de travail et perçoivent en contrepartie un salaire de
subsistance (« loi d¶airain » déjà formulée par Åurgot : le salaire permet tout juste de
nourrir le travailleur ainsi que sa famille). Ricardo explique qu¶un salaire inférieur est
impossible et qu¶un salaire supérieur inciterait la natalité (il reprend la loi de Malthus).
En plus un salaire supérieur augmenterait à terme l¶offre de travail et conduirait donc
par la loi du marché à une baisse des salaires. Donc, « le prix naturel du travail est le
montant du salaire permettant aux travailleurs de subsister et de perpétrer leur espèce
sans variation de leur nombre ».
>‘ Les capitalistes reçoivent un profit égal à la différence entre la valeur des
marchandises (qui dépend de la quantité de travail) et le montant des salaires versés.
>‘ Les propriétaires fonciers reçoivent une rente déterminée par l¶écart de rendement de
leur terre par rapport à celui de la terre la moins fertile (cette dernière ne donnant pas
lieu à un paiement de rente). En effet, la valeur des marchandises provenant de la
quantité de travail nécessaire pour les produire, le prix du blé dépend de la quantité de
travail mise en œuvre sur la terre la moins fertile. Les autres terres vendent le blé au
même prix, mais utilisent moins de travail ; c¶est cet écart qui est à la base de la rente
des propriétaires fonciers. Selon Ricardo, à long terme, la croissance économique
deviendra nulle. Pour faire face à l¶accroissement de la demande induit par
l¶augmentation de la population, il est nécessaire de cultiver de nouvelles terres de
moins en moins fertiles, dont les rendements seront donc décroissants. Les terres
moins fertiles nécessitant plus de travail pour les cultiver, le prix du blé augmente. Par
voie de conséquence les salaires devraient augmenter aussi (puisque l¶achat de blé est
nécessaire à la subsistance). Il en résulte que la rente foncière versée aux propriétaires
s¶accroit au détriment des profits qui diminuent. Or le profit étant la motivation
principale de la production, celle-ci tend vers un état stationnaire c'est-à-dire la
situation d¶une économie sans croissance. Pour pallier ce risque, Ricardo se prononçait
en faveur du libre-échange et de l¶abolition des lois sur les blés (   ") : en
permettant d¶importer du blé bon marché, on pouvait faire baisser le prix des
subsistances et éviter ainsi la hausse des salaires nominaux avec son corollaire la
baisse des profits.

- La supériorité du libre-échange et la théorie des '  # : Smith souligne les


vertus du libre-échange dans sa théorie des avantages absolus. Åhéorie avec une lacune

52
majeure : un pays n¶ayant que des désavantages absolus devrait tout importer (situation
impossible) et donc serait dans l¶impossibilité de participer au commerce international.
Ricardo améliore la théorie du libre-échange avec sa théorie des <   O  ' 
#  Ainsi, Ricardo affirme que le libre-échange et la spécialisation sont toujours
favorables même pour les pays les moins compétitifs. D¶après la loi des avantages
comparatifs, quelque soit la situation d¶un pays, la spécialisation et l¶échange international
procurent un gain. Les pays ont intérêt à se spécialiser dans les produits pour lesquels ils sont
les plus avantagés ou les moins désavantagés. C¶est l¶exemple célèbre qu¶il prend avec le vin
et le tissu comme produits et le Portugal et l¶Angleterre comme pays. Le Portugal est
avantagé pour les deux produits, mais il a intérêt à se spécialiser dans la production de vin car
son avantage comparatif est le plus élevé. L¶Angleterre a intérêt à se spécialiser dans la
production de tissu car c¶est pour ce produit que son désavantage comparatif est le plus faible.
Dans cet exemple, l¶échange international est un jeu à somme positive pour toutes les nations.
Pour que les deux pays gagnent à l¶échange international, il suffit que le rapport d¶échange se
situe entre le rapport des coûts de chaque pays. Le commerce extérieur ne peut être source de
déséquilibres durables car la balance des comptes extérieurs s¶équilibre automatiquement. Un
déficit de celle-ci provoque en effet, une sortie d¶or qui fait baisser les prix intérieurs et rend
donc le pays plus compétitif, d¶où une augmentation des exportations et une diminution des
importations. Au contraire, un excédent provoque une entrée d¶or qui fait augmenter les prix
intérieurs et qui nuit donc à la compétitivité.

- La théorie de Ricardo porte aussi sur


  O
8, notamment par le biais de
l¶impôt. Il faut limiter les prélèvements élevés qui sont forcement préjudiciables à l¶économie.
Ils nuisent à l¶investissement lorsqu¶ils taxent le capital et à l¶épargne lorsqu¶ils taxent le
revenu. L¶emprunt et la dette publique ne sont pas de bonnes solutions car l¶Etat devra de
toute façon mettre en place des prélèvements nouveaux pour les rembourser et payer les
intérêts (« principe ricardien d¶équivalence »).

- Ê 
  : l¶œuvre de David Ricardo a consolidé le courant libéral. Son approche a
ouvert la voie à ceux qui voulaient faire de l¶économie politique, une véritable science,
détachée de toute considération morale.

r : #  - : lire Ricardo

£‘ .$0 % );+;F=-


- 8    #@ , Jean-Baptiste Say  est l¶auteur d¶un Å ? ‘ 
 ‘  ? ‘
(1803). Say est tout d¶abord connu pour avoir montré le rôle fondamental dans le capitalisme
industriel de l¶entrepreneur auquel il confère le rôle d¶agent économique essentiel. JB Say
rompt avec la valeur-travail : il considère que c¶est l¶utilité subjective qui est la source de la
valeur. La demande dépend de l¶utilité et donc des besoins spécifiques des individus. D¶autre
part l¶offre est fonction des facteurs de production, à savoir le capital, le travail et la terre. De
plus, il se différencie de l¶école classique anglaise en ne faisant pas référence à une partition
de la société en classes. A la différence de Smith, il considère que les activités non matérielles
sont productives. Les possesseurs de chacun des trois facteurs de production reçoivent les
revenus qui leur sont dus : l¶ouvrier perçoit un salaire, le capitaliste un profit (ou l¶intérêt) et
le propriétaire terrien, une rente. Say opère une distinction entre l¶entrepreneur et ceux qui
apportent les capitaux. Le profit est la contrepartie du travail, de la capacité de jugement,
d¶organisation, d¶innovation mais aussi des risques que les µentrepreneur assume.

53
- JB Say est surtout connu pour avoir établi une
O O"   : les produits s¶échangent
contre des produits : il n¶y a pas lieu de craindre une insuffisance des débouchés : l¶offre
conduit à une distribution de salaires et de profits versés par les entreprises à hauteur de la
valeur de la production. La distribution de revenus et le réinvestissement de l¶épargne créent
une demande équivalente qui ne peut pas être insuffisante puisqu¶elle est la contrepartie de
l¶offre : ainsi l¶offre crée sa propre demande. Cela fonde une économie de l¶offre (l¶activité
économique dépend du volume de l¶offre). Cette loi conclue donc à l¶impossibilité d¶une crise
générale de surproduction. En outre, cette loi est fondée sur le principe de la neutralité de la
monnaie, l¶argent n¶étant dans le raisonnement de Say qu¶un simple intermédiaire des
échanges. Pour JB Say, il n¶y a pas de différence de nature entre une économie de troc et une
économie monétaire. En formulant la loi des débouchés, il a pour but de démontrer qu¶il ne
peut y avoir d¶excédent ou de déficit de la production globale par rapport à la dépense globale
et que les crises de surproduction sont ainsi impossibles. En effet, la valeur de la production
au moment où les biens sont offerts sur le marché est équilibrée par le revenu distribué à ceux
qui ont participé à l¶œuvre de production. Par conséquent, le revenu est égal au coût de la
production. Il y a donc une égalité nécessaire entre le pouvoir d¶achat distribué à l¶occasion
de la production et la valeur des biens offerts, en sorte que la possibilité d¶un déséquilibre
global suscité par une insuffisance du pouvoir d¶achat par rapport à l¶offre de marchandises
apparaît inconcevable.

r : # 9 : lire Say

£‘ . /

)=,+$=;-
 '  

- Dans /  
     , 1848, JS Mill apparait comme un des représentants de
l¶école libérale classique : il adhère à ses principes généraux comme l¶
  et le
« laisser-faire » mais il préconise aussi un certain réformisme social. Ainsi, il prône
l¶émancipation des femmes, la réglementation de la durée de travail, l¶aide aux pauvres et
surtout l¶instruction publique gratuite et de qualité pour tous. Seule l¶instruction peut
permettre « une association des ouvriers et des entrepreneurs » pour le bien de tous. Pour lui,
« le meilleur état pour la nature humaine est celui dans lequel personne n¶aspire à devenir plus
riche et ne craint d¶être renversé en arrière par les efforts que font les autres pour se précipiter
en avant. Je ne vois pas pourquoi il y aurait lieu de se féliciter de ce que les individus déjà
plus riches que ce qu¶il est besoin, doublent la faculté de consommer des choses qui ne leur
procurent que peu de plaisir autrement que comme signe de richesse. »

- JS Mill formule l¶équation de la   O


   (reprise plus tard par
Fischer). La quantité de monnaie multipliée par sa vitesse de circulation est égale au niveau
général des prix multiplié par le nombre de transactions. Il prolonge aussi la théorie des
avantages comparatifs de D Ricardo en précisant le prix d¶échange des biens dans les
échanges internationaux : à l¶intérieur de la fourchette des rapports de coûts comparatifs
(rapport de coûts de chaque pays), le prix des produits dépend de l¶importance de la demande
adressée pour chaque produit. Comme Ricardo, Mill pense que l¶économie va déboucher sur
un état stationnaire. Mais lui ne le craint pas et affirme au contraire que se sera le moment où
la société, n¶étant pas obsédée par la poursuite de l¶intérêt personnel, pourra se consacrer à
des plaisirs intellectuels et moraux.

b) Unité et diversité de la doctrine classique


£‘ r     
- Un certain nombre de points rapproche lesclassiques malgré une Ecole classique française
(Say) et une Ecole classique anglaise (Smith, Ricardo, Malthus, Mill). Les analyses classiques

54
se veulent scientifiques en ce sens qu¶elles s¶efforcent de formuler les relations entre les
phénomènes indépendamment de toute préoccupation éthique ou politique. Elles conduisent
au libéralisme doctrinal : défense du libre-échange, de la concurrence (suppressions des
corporations), rôle des prix comme régulateurs d¶une économie de marché, autorégulation M
équilibre, prix de marché tendant vers le prix « naturel », enfin rôle de « gendarme » de l¶Etat
(l¶intervention de l¶Etat dans la vie économique et sociale étant condamnée).

£‘  O    O 


  
- Le courant classique ne constitue pas un courant homogène. On parle d¶ailleurs des
classiques. Les principales divergences :
>‘ divergence entre une théorie objective de la valeur (valeur travail) et une théorie
subjective de la valeur (présente par exemple chez Say)
>‘ divergence sur l¶avenir de la croissance : un classique comme Ricardo est pessimiste
(état stationnaire), d¶autres comme Say sont plus optimistes
>‘ divergence sur l¶analyse macroéconomique du court terme : impossibilité d¶une crise
générale de surproduction chez Say mais au contraire réfutation de cette loi par
Malthus.

Ê 
  
L¶école classique a posé les fondements de la théorie économique moderne, elle a annoncé
Marx mais surtout l¶école néoclassique qui en constitue un prolongement et qui ne s¶en
éloigne réellement que par la définition d¶une nouvelle théorie de la valeur. C¶est
particulièrement, la loi des débouchés de JB Say qui annonce les néoclassiques par sa loi de la
valeur et sa nouvelle définition de la production : ce n¶est plus seulement la création de biens
matériels (comme le disait Smith) mais aussi les activités de services.

r : # 2 :  
:<,   
=
 8  : les néoclassiques

a)‘ Les fondateurs de l¶analyse néoclassique


£‘
 '
 
- La théorie économique classique a été renouvelée à partir de 1870 par la notion d¶

'
(conception de la microéconomie). Celle-ci est décrite simultanément en trois pays
différents par William Stanley Jevons (1835 ± 1882) en Angleterre, par Léon Walras (1834 ±
1910) en France et par Karl Menger (1840 ± 1921) en Autriche. Leurs travaux sont
approfondis par la suite par de nombreux économistes comme Alfred Marshall (1842-1924).
Les néoclassiques sont 
  : ils considèrent que toutes les actions des individus sont
motivées par la recherche de leur intérêt personnel. Pour déterminer quelles sont les
motivations des individus, les néoclassiques utilisent une méthode de raisonnement : le
marginalisme qui trouve ses racines dans la théorie de la rente foncière de D Ricardo. L¶idée
est que les agents économiques rationnels ne raisonnent pas sur des quantités globales mais
sur des quantités additionnelles.

- Ces marginalistes développent la   O 


 '
 (utilité de la dernière dose ou
utilité additionnelle) et aboutissent à une conception subjectivede la valeur. Les marginalistes
prennent pour point de départ de leur analyse économique la fonction d¶utilité. La valeur des
choses dépend pour eux, non pas de leur coût de production (conception objective de la valeur
retenue par les classiques anglais et par Karl Marx à travers le concept de valeur d¶échange),
mais de leur utilité (conception subjectivede la valeur). Selon les marginalistes, la valeur d¶un
bien lui est conférée par son consommateur. Pour eux, l¶individu rationnel recherche lors de
sa décision d¶achat la plus grande satisfaction : il cherche à maximiser l¶utilité de son

55
acquisition. L¶utilité apparaît donc comme le fondement de la valeur des biens. L¶utilité
considérée n¶est pas l¶utilité de la quantité totale possédée d¶un bien quelconque mais l¶utilité
de la dernière dose de ce bien qu¶il est possible d¶acquérir dans un monde où les ressources
économiques sont rares. L¶utilité de la dernière dose ou utilité additionnelle est aussi appelée

'
.

£‘ Ê <4O
- Les facteurs de production sont rémunérés à leur  O '
. Elle est égale au
produit qu¶une unité additionnelle de facteurs permet d¶obtenir. En effet, le producteur
rationnel embauche tant que la production du dernier salarié est supérieure au salaire qu¶il lui
verse. C'est-à-dire jusqu¶à ce que la productivité marginale (qui est décroissante) soit égale au
salaire. De la même façon, il achète de nouvelles machines tant que la productivité marginale
de celle-ci est supérieure à leur coût.

- Pour maximiser son profit, le chef d¶entreprise doit comparer ce que lui coûte chaque unité
supplémentaire (coût marginal) avec le gain qu¶elle lui procure (prix de vente). Le prix de
vente s¶impose au producteur et est stable sur courte période. Le coût marginal est une
fonction décroissante puis croissante de la quantité produite. Le producteur rationnel produit
tant que le coût marginal est inférieur au prix de vente. La quantité optimale est donc celle qui
égalise le coût marginal avec le prix de vente.

b)‘ Les grands principes néoclassiques


£‘ Ô O
  O


- Les premiers néoclassiques s¶opposent à la théorie classique de la valeur travail. È 
.  affirme que « le simple fait qu¶il y a beaucoup de choses telles que des livres, des
monnaies et des antiquitésü rares et anciennes, qui ont de grandes valeurs et que l¶on est
absolument incapable de produire actuellement, détruit la notion que la valeur dépend du
travail ». Les néoclassiques voient dans l¶utilité marginale la cause de la valeur. Ils pensent
qu¶il ne faut pas raisonner en termes d¶utilité totale ou moyenne mais en termes d¶utilité
marginale (c'est-à-dire de degré de satisfaction procuré par la dernière unité consommée).
Chaque consommateur n¶achète un produit que s¶il lui procure davantage d¶utilité que ne lui
coûte en désutilité son prix. Or, chaque unité consommée supplémentaire à une utilité
inférieure à la précédente puisque le besoin correspondant est moins impérieux : l¶utilité
marginale est donc décroissante.

- Selon   È
 , (ouvrage : 4
  
        , 1874) la valeur
provient de la rareté qu¶il définit comme l¶utilité et la quantité limitée des marchandises.
Celles-ci doivent répondre à un besoin. Or ce n¶est pas à l¶économiste de juger de ce besoin.
Ce qui est disponible en quantité illimitée (air, lumière, chaleurü) n¶a pas de valeur. Il ne sert
donc à rien de s¶approprier ce qui est illimité. L Walras ne distingue pas comme les
classiques, valeur d¶usage et valeur d¶échange. Pour lui, seule la valeur d¶échange existe mais
ses fondements sont l¶utilité et la quantité limitée. Il lève ainsi le paradoxe de l¶eau et du
dimant de Smith : l¶eau quoique très utile n¶a pas ou peu de valeur si on la trouve en quantité
illimitée (elle en aura beaucoup plus si elle devient rare comme dans un désert). Quant au
diamant, Walras refuse de dire qu¶il est peu utile, puisque tout bien, même superflu,
satisfaisant un besoin est utile. De plus, étant en quantité limitée, il a une valeur d¶échange
élevée. La valeur des marchandises est une valeur d¶échange qui se mesure en conséquence
par les prix. Le prix en question est celui qui est pratiqué lors de l¶échange, c¶est donc le prix
d¶équilibre qui permet d¶équilibrer l¶offre et la demande. L¶objectif de l¶économie politique
pure est alors d¶étudier la détermination des prix et donc d¶étudier les conditions d¶échange

56
(offre et demande). Chaque prix et donc chaque valeur dépendent « de l¶utilité maximum
obtenue par les échangeurs, de l¶égalité de la quantité demandée et de la qualité offerte de
chaque marchandise ».

- Cette théorie de Walras contient un O 4 : d¶un côté, ce dernier donne une cause unique
à la valeur des marchandises : la rareté ; et de l¶autre, il considère que le prix (mesurant la
valeur) provient des conditions d¶équilibre et donc à la fois de la demande et de l¶offre. Alfred
Marshall affirme qu¶en fait, les coûts et l¶utilité se conjuguent pour déterminer le prix
d¶équilibre. A partir de là, ce sont les prix qui donnent la valeur des biens : prix et valeur se
confondent et les théories de la valeur disparaissent au profit de la détermination des prix : en
effet, la théorie de la valeur ne fait alors plus débat. Cette analyse comporte cependant une
limite importante : en considérant isolément un marché et un prix, Marshall limite son analyse
de l¶équilibre. Cette méthode présente le grave inconvénient de ne pas permettre une
description complète de l¶ensemble du système économique.

£‘    O

"'

- Elle a été exposée en 1874 par   È


 . La théorie de l¶équilibre général étudie
l¶allocation des ressources dans le cadre d¶une économie de marché où règne la concurrence
parfaite. Elle met en lumière la manière dont les marchés et les prix assurent la coordination
des activités économiques. Se trouve ainsi formalisée l¶idée avancée en 1776 par Adam Smith
dans ë      , selon laquelle c¶est la «  "
 » des marchés qui rend
compatibles les décisions d¶innombrables agents économiques, sans que personne n¶ait à se
soucier du fonctionnement d¶ensemble du système. Ainsi, L Walras explique que si les
conditions de la concurrence pure et parfaite sont réunies, c'est-à-dire si l¶ordre naturel est
respecté, l¶économie se maintient automatiquement en équilibre. Walras veut démontrer la
possibilité d¶un équilibre général, c¶est à dire un système de prix et de quantités ± produites,
utilisées et consommées ± tel que :
>‘ chaque consommateur maximise son utilité sous sa contrainte de budget ;
>‘ chaque producteur maximise son profit sous contrainte de sa fonction de production ;
>‘ l¶offre est égale à la demande sur chaque marché.

- Les agents économiques sont vus comme des  ‘



 rationnels qui cherchent à
maximiser leurs profits, s¶ils sont producteurs et leur satisfaction s¶ils sont consommateurs. Ils
sont capables de décider en connaissance de cause et donc de prévoir les conséquences de
leurs décisions. Pour l¶individu, la rationalité suppose une conscience objective de son intérêt
et une capacité à anticiper et à juger parfaitement. La fixation des prix s¶effectue par
tâtonnements comme grâce à l¶action d¶un crieur (ou d¶un commissaire priseur) qui donne un
prix au hasard et qui compte le nombre d¶offres et de demandes correspondant à ce prix. Si
l¶offre est supérieure à la demande, un nouveau prix plus faible est proposé. Si la demande est
supérieure à l¶offre, c¶est un nouveau prix plus élevé qui sera fixé. Le processus de
tâtonnement se poursuit jusqu¶à ce que soit trouvé un prix qui permette d¶égaliser l¶offre et la
demande, les échanges s¶effectuant à ce prix d¶équilibre. L¶équilibre général n¶est pas une
situation fixe mais un état vers lequel l¶économie doit tendre dans le cadre d¶un régime
concurrentiel. C¶est un idéal en continuelle mouvance. Le déséquilibre d¶un des marchés
(biens, services, production ou monnaie) bouleverse l¶ensemble, mais la loi du marché
implique une tendance générale de retour à l¶équilibre. Walras montre que l¶équilibre général
est mathématiquement possible car il existe un système de prix qui égalise l¶offre et la
demande sur tous les micromarchés en même temps. Il existe autant d¶équations (équation
d¶offre, équation de demande, équation d¶équilibre entre l¶offre et la demande) que

57
d¶inconnues (quantités et prix) et donc le système peut avoir une solution. L¶équilibre général
est donc possible.

r : # + : lire L Walras

£‘ Ê 
   :
- Les théoriciens néoclassiques ont voulu établir la supériorité du modèle du marché sur toute
autre forme d¶organisation économique. Le modèle (ou la théorie) de la concurrence pure et
parfaite est censée confirmer la supériorité du marché.
Rappels des conditions de la concurrence pure et parfaite :
>‘ atomicité des offres et des demandes
>‘ homogénéité du produit
>‘ transparence
>‘ libre entrée dans l¶industrie
>‘ parfaite mobilité des facteurs de production
Ces conditions étant posées, la confrontation de l¶offre totale et de la demande totale relative à
un produit permet d¶en déterminer le prix, prix ayant les caractéristiques suivantes : c¶est un
prix d¶
" ; c¶est un prix d¶équilibre "
 (si, pour une cause quelconque le prix
s¶écartait de sa position d¶équilibre, il y serait nécessairement ramené par le jeu de forces
spontanées) ; c¶est un prix  du fait des conditions posées (atomicité, homogénéité,
transparence).

- Au début du 20e siècle, des auteurs comme Pareto ou Pigou vont prolonger la théorie
néoclassique en créant
  O"$D. Celle-ci définit l¶optimum, c'est-à-dire selon
Pareto, « le plus grand bien-être possible aux individus de la collectivité » et montre que dans
certains cas, l¶intervention de l¶Etat est souhaitable. Les néoclassiques proposent donc une
analyse de l¶économie basée sur les comportements des agents économiques, ils sont
fondateurs de la microéconomie.

r/   


 O
  
"

r : # ; : la rencontre de l¶offre et la demande

a)‘ Le rôle du mécanisme du prix en concurrence parfaite

- La question de la valeur, et donc de la détermination du prix, a opposé deux courants de


pensée en économie. Pour les classiques et Marx, le prix d¶un bien est déterminé par le coût
de production de ce bien, c¶est-à-dire par un élément lié à son ## (théorie objective de la
valeur). Au contraire, pour les marginalistes (néoclassiques), le prix d¶un bien est déterminé
par l¶utilité de ce bien, c¶est-à-dire par un élément lié à sa OO (théorie subjective de la
valeur). Marshall, en approfondissant les concepts d¶offre et de demande, réussira la synthèse
de ces deux théories. Il montre en effet que la demande d¶un bien est fonction de son utilité
alors que l¶offre de ce bien est fonction du coût. » À court terme (formation du prix en courte
période), c¶est la demande qui joue le rôle crucial. À long terme (formation du prix longue
période), l¶offre peut varier et influencer la formation du prix d¶équilibre.

- Chaque marché, en régime de concurrence parfaite, permet, par l¶intermédiaire du


mécanisme des prix de répondre aux questions fondamentales posées dans toute économie :
>‘ Quels biens (ou services) faut-il produire ? La loi de l¶offre et de la demande, en
assurant la flexibilité des prix (autorégulation et équilibre), permet de déduire que la
composition de l¶offre tend à s¶adapter aux variations des goûts des consommateurs.

58
Les prix sont des signaux et ils orientent la production des entreprises vers les
produits qui sont désirés par les consommateurs.
>‘ Comment produire ces biens et services ? En fonction des prix relatifs des facteurs de
production, l¶entreprise choisira la combinaison productive la moins coûteuse.
>‘ Pour qui produire ces biens et services ? Le mécanisme des prix répond à ceux qui ont
une demande solvable (qui détiennent « les bulletins de vote » monétaires). Les
agents économiques touchent une rémunération égale à la productivité marginale du
facteur de production qu¶ils détiennent et consomment des biens et des services.

$Le systèmedes prix garantit l¶##   de l¶économie. (L¶efficience c¶est l¶action efficace
qui atteint son but, quels que soient les moyens utilisés pour y parvenir ; une action ne sera
jugée efficiente que si le résultat est obtenu avec une économie de moyens, donc sur la base
d¶un calcul d¶optimisation visant à minimiser les coûts). La concurrence élimine les
entreprises mal organisées et mal gérées dont les coûts sont supérieurs au prix d¶équilibre du
marché. L¶ensemble de ces conséquences heureuses du mécanisme du marché peut être
résumé à travers la notion de  O  . Celui-ci voit en effet ses
besoins satisfaits, grâce à l¶adaptation de l¶appareil de production à ses goûts, ceci au prix le
plus bas possible.

b)‘ Les limites du modèle libérale


- L¶équilibre peut être instable : en situation de concurrence pure et parfaite, l¶équilibre est
stable. Cependant, il peut être  "
et s¶éloigner de plus en plus d¶une situation normale à
cause de :
>‘ La spéculation à la hausse sur les marchés boursiers,
>‘ Un phénomène de panique en cas de baisse,
>‘ Une     
   : théorie formalisée par le sociologue américain
Robert K Merton (mort en 2003) : un énoncé peut créer par son énonciation même les
conditions de sa réalisation. Ex : anticipation de la dégradation d¶un centre ville induit
des comportements d¶achat qui en pesant sur l¶évolution des prix du foncier, finissent
par provoquer les phénomènes annoncées en attirant des populations pauvres et
marginalisées. 2e exemple : il y a un peu d¶inflation M les ménages anticipent que
l¶inflation va se poursuivre M d¶où hausse de la demande M déséquilibre
supplémentaire et raréfaction de l¶offre : D > O M nouvelle hausse des prix.

- L¶équilibre peut être # 


: les conditions de la production sur une grande échelle
conduisent à des conditions de concurrence imparfaite où de grandes unités exercent des
effets de domination sur d¶autres plus faibles. Le prix ne résulte alors pas d¶un équilibre de
marché, avec atomicité des offreurs et des demandeurs, mais des rapports de force existant
entre des acteurs de tailles différentes.

- L¶équilibre ne correspond pas à une situation optimale pour les agents économiques :
>‘ le problème des demandes non solvables, « le mécanisme du marché ne tient compte
que des seuls besoins exprimés à travers des demandes
"
 . La souveraineté du
consommateur doit donc être entendue au sens de souveraineté du consommateur
solvable ».
>‘ le problème des " 

 # : pour certains biens, il n¶existe pas de marché. Il en


est ainsi des biens faisant l¶objet de consommation collective dont l¶offre est
indivisible (administration générale, défense, police). Les prix de ces biens se trouvent
sous la dépendance des pouvoirs publics.

59
>‘ les 4
   ##  4 , ceux-ci concernent les zones où le système des
prix cesse d¶exercer ses fonctions d¶information et d¶incitation. Les économistes
désignent par « externalité » ou « effet externe » le fait que l¶activité de production ou
de consommation d¶un agent affecte le bien-être d¶un autre sans qu¶aucun des deux
reçoive ou paye une compensation pour cet effet. Une externalité présente ainsi deux
traits caractéristiques. D¶une part, elle concerne un effet secondaire, une retombée
extérieure d¶une activité principale de production ou de consommation. D¶autre part,
l¶interaction entre l¶émetteur et le récepteur de cet effet ne s¶accompagne d¶aucune
contrepartie marchande.

- Une 
%   : le modèle de la concurrence pure et parfaite (CPP) ne prétend pas
décrire le réel mais présenter, si certaines conditions sont réunies, comment le réel devrait
évoluer. Cette prétention normative, à fort contenu idéologique selon certains, est à l¶origine
de propositions censées rapprocher la réalité de la théorie. D¶où des propositions parfois
utopiques ayant un fort contenu idéologique...

- Ê 
   : il y a nécessité de prendre en compte les nouvelles formes de la concurrence,
d¶où la théorie de la concurrence imparfaite (monopole, oligopole, concurrence
monopolistique). Enfin, le choix n¶est pas, pour les sociétés occidentales, entre deux solutions
radicalement opposées : laissez-faire absolu et planification centralisée, mais consiste à
déterminerla mesure et les modalités de l¶intervention de l¶Etat.

60
-  O 4 
BO 
 O
"
 
C¶est Karl Marx qui formule la critique la plus complète et la plus radicale du capitalisme et
du libéralisme.

r : #  :  
::,   
=
 8  : les courants socialistes

A/ Naissance des courants socialistes


a)‘ Les premières mises en cause
- :O   (1789-1846) : Economiste allemand qui passe une partie de sa vie aux EU et
remarque que malgré ses grandes ressources, ce pays ne réalise pas son take-off à cause de sa
dépendance vis-à-vis de la GB. Dans son ouvrage, 8    
     , il
reconnait que le libre-échange procure des avantages en terme de prix, mais il pense qu¶il est
nécessaire de considérer l¶industrialisation comme une nécessité économique et sociale :
celle-ci ne peut se développer sans mesures protectionnistes. Ainsi, pour développer les forces
productives, il peut être nécessaire de protéger les industries naissantes de façon à ce qu¶elles
ne soient pas étouffées par la concurrence étrangère avant d¶arriver à maturité. La protection
douanière devant permettre le développement d¶une force productive dans le futur, qui
donnera l¶indépendance industrielle du pays. La théorie de List ouvre la voie à l¶école
historique allemande et au courant institutionnaliste (fondement des stratégies
d¶industrialisation mises en œuvre dans les pays d¶industrialisation tardive.

- 6% Ê% (1793-1879) : économiste américain qui remarque la corrélation très nette
entre les périodes de renforcement du protectionnisme et celles d¶accroissement de la
prospérité nationale. Il devient un opposant farouche au libre échange, considérant qu¶il tend à
maintenir les EU dans la position de colonie anglaise.

- Ê 
  0 1 r $È  (1807-1878) : économiste français qui s¶oppose au
libéralisme qu¶il accuse d¶appauvrir les travailleurs. Dans son ouvrage, 4   
 .  .    , il pense que le travail est une marchandise périssable que le
travailleur vend au jour le jour. Il ne peut la stocker. Le contrat de travail est donc inégal car
le travailleur n¶a pas d¶autre choix que d¶accepter de travailler et cela quelque soit le salaire
offert. Il pense également que le machinisme, en diminuant la demande de travail, tend à
défavoriser les travailleurs, à créer du chômage, et à faire tendre les salaires à la baisse. En
plus les travailleurs sont victimes des crises périodiques de surproduction. Ainsi, le
capitalisme risque, selon lui, de provoquer une révolution sociale. L¶Etat doit donc intervenir
pour sauver le système. Il doit mettre en œuvre une « charité dans les lois » : politique
d¶assistance publique, d¶enseignement populaire, de couverture des travailleurs contre les
risques de crise de surproduction par exemple par la mise en place de fonds d¶assurance) :
« L¶humanité est meilleure dans l¶Etat que dans les individus, elle s¶épure parce qu¶elle
s¶élève dans cet être collectif ». Ainsi, Dupont-White s¶oppose au libéralisme car il pense
qu¶il amplifie et diffuse les crises à l¶image du vent qui se transforme en tempête en pleine
mer quand aucune barrière naturel n¶empêche sa propagation.

b)‘ Les socialistes utopiques


Les socialistes utopiques s¶opposent au système capitaliste qu¶ils jugent inhumain. Ils
proposent des sociétés basées sur la coopération et l¶entraide.

- Ê
O$6% O  %!  O $  (1760-1825) : ouvrage majeur : r
   (1822). Sa parabole annonce sa théorie : si la France perd ses 50 meilleurs

61
mathématiciens, ses 50 meilleurs chimistes, ses 50 meilleurs poètes, ses 50 meilleurs
industriels, ses 50 meilleurs banquiersü en tout 3000 personnes, le mal serait irréparable. En
revanche, si elle perd tous les princes, tous les préfets, tous les cardinaux, tous les
propriétaires, soit 30 000 personnes, le dommage causé ne serait pas grave du tout sur le long
terme. Il faut donc donner le pouvoir à ceux qui détiennent la compétence et qui sauront
orienter le pays dans le sens du progrès. Ainsi Saint-Simon pense que le progrès économique
et technique provient essentiellement de la classe industrielle : il faut lui laisser la charge
d¶administrer le pays : « la classe industrielle est la classe fondamentale et nourricière de la
société ». Le saint-simonisme marque fortement le 19e siècle : de nombreux saint-simoniens
sont célèbres par leurs actions : les frères Pèreire créent en 1852, la première banque
moderne : le Crédit mobilier. Michel Chevalier négocie le traité franco-anglais de libre-
échange signé en 1860« Le saint-simonisme devient une véritable religion célébrant le
progrès par des rites et des chants.

- Ê 
  :  (1772-1837) croit que les sociétés suivent une évolution linéaire
inexorable à plusieurs étapes : la première est l¶étape primitive : la sauvagerie. Ensuite, il y a :
le patriarcat, la barbarie, puis la civilisation et enfin l¶   . Pour arriver plus vite à
cette dernière étape, il faut créer des phalanstères : des communautés de 1800 individus dans
lesquelles les membres se complètent : il faut par exemple réunir ceux qui aiment commander
avec ceux qui aiment être dirigés. Pour cela, C Fourier détermine 810 modèles d¶individus
qu¶il suffit d¶associer savamment afin d¶atteindre l¶harmonie.

- ‰$.  ‰ O  (1809-1865) s¶oppose à la propriété : « la propriété, c¶est le vol ».


Il la considère injuste et illégitime. Selon lui, la propriété crée le paupérisme et est contraire
aux principes d¶égalité et de liberté. Il rêve d¶une société constituée de communautés locales à
taille humaine. Il pense aussi que chacun doit posséder une part du capital de l¶entreprise et
bénéficier des fruits de son travail. Il est l¶un des créateurs de la mutualité. Dans son ouvrage,

   
   = , il déclare : « rendre l¶ouvrier copropriétaire de l¶engin
industriel et participant aux bénéficies au lieu de l¶y enchainer comme un esclave, qui oserait
dire que telle ne soit pas la tendance du siècle ? »

- " ( (1771-1858) : propriétaire d¶une grande manufacture de coton en Ecosse,


pense qu¶il est nécessaire de développer l¶instruction car l¶homme est avant tout le fruit de
son éducation. Il est à l¶origine de nombreuses réalisations et a notamment transformé sa
manufacture en usine modèle avec des jardins particuliers. Il a réduit la durée du travail et
créé une école pour les enfants et des cours du soir pour les adultes.

- .$Ê 
   O   O O   O (1773-1842) : historien et économiste
suisse, disciple de Smith qui stigmatise les dysfonctionnements de l¶économie de marché qui
peuvent nuire au bonheur humain et entraver l¶essor de la richesse des nations. Dans
½. $    
      (1819), il explique que le développement
économique s¶appuie sur les inégalités entre riches et pauvres et conduit au creusement des
inégalités. Il avance que l¶offre ne crée pas la demande et donc que les crises de surproduction
sont fréquentes. La finalité de l¶économie politique étant la satisfaction du bonheur de
l¶homme, l¶intervention des pouvoirs publics est nécessaire. Le gouvernement doit « chercher
l¶ordre qui assurera au pauvre comme au riche une participation à l¶aisance, aux douceurs, au
repos de la vie. »

62
05
/4
Åhéoricien et militant socialiste allemand (1818 ± 1883), philosophe, sociologue et
économiste dont la pensée reposant sur une critique du capitalisme a profondément marqué la
scène politique et les sciences sociales aux 19ième et 20ième siècles. Ses principaux ouvrages
sont : ë 
 !       (1848) rédigé avec F Engels (1820-1895) et ë 
0 , son œuvre maîtresse (1867).

r : O = : Marx
r : #  * : L¶Internationale et la marche vers la terre promise.

a)‘ La théorie marxiste


£‘ 
    
- L¶histoire est caractérisée par la succession de modes de production, c'est-à-dire de stades
d¶évolution : le communisme primitif, l¶esclavagisme, le féodalisme, le capitalisme, le
socialisme et enfin le communisme. Le socialisme est donc une étape transitoire vers le
communisme qui correspond à une société d¶abondance, sans classes sociales ni Etat. Au sens
marxiste, le  O O  O   est donc l¶articulation des forces productives (capacité de
production d¶une économie grâce à des ressources matérielles (matières premières, machines,
entreprises) et à des ressources humaines (main d¶œuvre, savoir-faire des producteurs). Les
rapports de production, caractéristiques d¶une société à un moment donné de son histoire, sont
en définitive les rapports de propriété sur les ressources matérielles et les relations entre les
différents agents de production. De ces rapports de production naissent les rapports
d¶exploitation. La classe sociale qui ne possède que sa force de travail doit la mettre au
service de la classe qui a la propriété des moyens de production. Marx considère que le mode
de production détermine l¶ensemble des relations sociales : la base économique (qui est une
sorte d¶infrastructure) détermine une superstructure juridique, politique, sociale et culturelle
qui conditionne les hommes et leur conscience. « L¶histoire de toute société jusqu¶à nos jours,
c¶est l¶histoire de la lutte des classes. »

- Le mode de production capitaliste n¶est qu¶un moment de l¶Histoire. Les lois du capitalisme
sont    et elles caractérisent, à un moment donné, l¶état des forces productives et les
rapports de production. Marx veut démontrer que les contradictions du capitalisme le
condamnent à terme. Dans un premier temps, les rapports de production favorisent le
développement des forces productives. Puis, peu à peu, ils font obstacle à leur expansion : les
crises industrielles limitant alors la croissance économique. Il faut alors changer de mode de
production pour libérer les forces productives. Le mode de production féodal a ainsi succédé
au mode de production esclavagiste, avant de céder la place au capitalisme. Marx va se faire
le théoricien de la fin du capitalisme.

£‘  
   
 
- Årois critères permettent de définir une classe sociale, d¶après Marx :
>‘ la place de la classe sociale dans les rapports de production. Marx oppose les classes
sociales qui sont propriétaires des moyens de production et celles qui ne possèdent que
leur capacité à travailler (leur force de travail).
>‘ la conscience de classe, c'est-à-dire le sentiment d¶appartenir à un groupe ayant des
intérêts communs. Åout groupe social ne développe pas une conscience de classe.
Ainsi, Marx affirme que les paysans, repliés sur leur ferme familiale entretiennent peu
de relations entre eux : ils n¶ont pas l¶impression d¶avoir des intérêts communs. Ils
forment une classe « en soi » (ils occupent une place déterminée dans les rapports de

63
production) mais pas une classe « pour soi » (ils n¶ont pas conscience du rôle qu¶ils
pourraient jouer).
>‘ des rapports conflictuels avec d¶autres classes. Ainsi, dans le mode de production
capitaliste, les bourgeois qui possèdent les moyens de production et les prolétaires qui
ne possèdent que leur force de travail sont en lutte.

- Marx distingue plusieurs classes sociales (7, voire 8) mais toutes ces classes n¶ont le même
rôle historique. Seule l¶opposition entre les bourgeois et les prolétaires suffit à rendre compte
de la logique du système capitaliste. Le capitalisme devrait mener à une "
  

 et à l¶effacement progressif des autres classes : la plupart des individus sont amenés à
se prolétariser tandis qu¶une minorité d¶individus s¶enrichit et intègre la bourgeoisie.

£‘   4 O




- Karl Marx reprend la thèse des classiques, et notamment celle de Ricardo, la valeur d¶une
marchandise correspondant à la quantité de travail incorporé (direct et indirect) dans une
marchandise. La production marchande se définissant par l¶échange, Marx se demande sur
quelles bases s¶effectuent les échanges entre marchandises (problème de la valeur d¶une
marchandise). Pour la déterminer, Karl Marx utilise la distinction entre la 
O  ' et
la 
O  ' d¶une marchandise. Åoute marchandise possède une valeur d¶usage, une
utilité pour celui qui la détient. Elle a aussi une valeur d¶échange qui ne peut être ramenée à
l¶utilité car, selon Marx, il n¶est pas vrai qu¶une marchandise ait d¶autant plus de valeur
qu¶elle est plus utile. La valeur d¶échange du bien dépend de son coût de production. Or celui-
ci s¶apprécie d¶après la quantité de travail qui s¶y trouve incorporée. En effet, le travail étant
la seule force créative (le capital technique n¶est que du 
  

 ), toutes
les marchandises sont le résultat du facteur travail. Elles peuvent être comparées les unes aux
autres d¶après la O
 % 
  pour les réaliser.

- Or, dans la théorie marxiste, l¶utilisation du travail vivant, ce que Marx appelle la #  O

(l¶ensemble des facultés humaines dont dispose le travailleur),permet dedégager une

 $
 parce que la 
 O  ' O
 #   O 
(valeur de ce qui est produit
par le travailleur, valeur directement liée à la durée d¶utilisation de la force de travail) est
supérieure à sa 
O  ' exprimée dans le salaire (quantité de travail nécessaire à la
reproduction de la force de travail, le salaire correspondant donc à la quantité de travail
assurant le minimum de produits nécessaires à l¶entretien de l¶ouvrier et de sa famille). Si
l¶entretien journalier de la force de travail ne coûte qu¶une demi-journée de travail (sous
forme d¶un salaire équivalant à 6 heures de travail), la force de travail peut travailleur pendant
une journée entière (12 heures). L¶entrepreneur a donc tiré de la force de travail une valeur
d¶usage égale à 12 heures de travail alors qu¶il ne l¶a achetée qu¶à sa valeur d¶échange, égale
à 6 heures de travail. L¶utilisation de la force de travail par l¶entrepreneur lui a procuré un
gain de 6 heures de travail, une 
 $
. Dans le système capitaliste la plus-value est
appropriée nécessairement par l¶entrepreneur. En effet, dans ce système, l¶entrepreneur est
propriétaire de moyens de production qui nécessitent pour leur utilisation l¶achat de force de
travail.

- L¶appropriation de la plus-value conduit à une 4


  O 
 
 
. Le
degré d¶exploitation est mesurée par le 4O
 $
 : plus-value / salaire. Lemarxisme
distingue le 
  (machines, matières premières) et le 
 "
 (salaires
versées à la main d¶œuvre). Le taux de profit est l¶émanation monétaire de la plus-value. Le
profit peut être exprimé en % du capital investi. Pour Marx, le taux de profit est le rapport P /
C + V (avec P = plus-value, C= capital constant et V = capital variable). Par conséquent, le

64
rapport de production caractéristique du capitalisme est le 
 (c¶est-à-dire la relation de
subordination entre l¶entrepreneur, qui possède les moyens de production et le salarié qui n¶a
que sa force de travail pour vivre), rapport qui fait de la force de travail une  O . Au
sens marxiste, le 
 est un   
. Marx affirme : « au fond du système
capitaliste, il y a la séparation radicale du producteur d¶avec les moyens de production ». Les
prolétaires sont exploités par les capitalistes qui les rémunèrent en dessous de la valeur réelle
de leur production. Donc seul le travail est source de valeur : le profit (plus-value selon Marx)
provient d¶une ponction sur la valeur créée par le travail. Le salaire est un salaire de
subsistance, tout juste suffisant pour permettre aux ouvriers et à leur famille de survivre. La
 $    ! est conséquence de l¶exploitation : la consommation des
ouvriers est faible, compte tenu de leur salaire ; de leur côté, les capitalistes disposent, eux, de
valeurs monétaires importantes dues à l¶appropriation de la plus-value, mais ces sommes
d¶argent ne sont pas destinées principalement à l¶achat de biens de consommation mais à
l¶épargne. En plus, le capitaliste tente d¶augmenter au maximum sa plus-value. Pour cela, il
dispose de trois moyens :
>‘ Augmenter l¶intensité et la durée du travail (plus-value absolue)
>‘ Augmenter la productivité du travail (plus-value relative)
>‘ Vendre pendant un certain temps les marchandises à un prix supérieur à leur valeur
(plus-value extra).

b)‘ Une critique du capitalisme


£‘ r
 O   O 
&
 O   O 
 

L¶analyse du rôle du capital-argent dans la circulation des marchandises permet de


caractériser le mode de production capitaliste.
-‘ Schéma de la production marchande simple
/GGGGGGGGGGMGGGGGGGGGM/
M = marchandises ; A = Argent
Le producteur vend les marchandises M qu¶il a produites parce qu¶il désire acheter des biens
pour satisfaire ses besoins. Il transforme la marchandise M en argent A en la vendant sur le
marché (première étape de la circulation des marchandises ou vente), puis à l¶aide de l¶argent
obtenu il va acheter la marchandise désirée M¶ (deuxième étape de la circulation des
marchandises ou achat). L¶argent dans ce cycle n¶est qu¶un intermédiaire entre les
marchandises, la valeur détenue à la fin du cycle est restée inchangée.

-‘ Schéma de la production marchande capitaliste


GGGGGGGGGM/GGGGGGGGGM
Dans ce nouveau cycle, A¶ doit être nécessairement supérieur à A, sinon le capitaliste n¶aurait
aucun avantage à créer le cycle des marchandises. L¶argent n¶est pas simplement un
intermédiaire de la circulation des marchandises, il est un instrument d¶enrichissement. Ce
processus n¶est possible que grâce à l¶utilisation par le capitaliste d¶une marchandise
privilégiée : la force de travail. On sait qu¶elle est source de plus-value puisqu¶elle est
rémunérée suivant le nombre d¶heures de travail nécessaire pour la reproduire alors qu¶elle est
utilisée pendant une durée supérieure à ce nombre d¶heures. L¶utilisation de la force de travail
permet donc de créer une valeur supérieure (A¶) à celle qu¶elle possédait lors de son achat
(A). La différence entre les deux valeurs (A ± A¶) ou plus-value, est captée par celui qui,
détenant les moyens de production, peut utiliser la force de travail et se trouve ainsi à l¶origine
de la circulation des marchandises.

65
- Le mouvement décrit tend à se perpétuer, le capitaliste cherchant à faire fructifier son
capital-argent. Dès la fin du cycle AA¶, il recommencera un nouveau mouvement à partir du
capital A¶, obtenant une somme A¶¶ supérieure à A¶ et ainsi de suite. On constate donc une
tendance à l¶accumulation infinie du capital-argent.

£‘     O 
 
- Les entrepreneurs sont aux termes de la loi d¶accumulation du capital poussés à  O

 pour se maintenir dans la compétition capitaliste, donc à investir plus et à accumuler
toujours de plus en plus le capital technique, c¶est-à-dire le capital constant. Mais celui-ci ne
rapporte pas de surplus, de plus-value à l¶entrepreneur, seul le travail (qualifié de capital
variable) détermine une plus-value. La modification de structure du capital total (constant +
variable) par développement du seul capital constant détermine donc une baisse du taux de
profit. La compétition capitaliste pousse ainsi l¶entrepreneur à agir contre son intérêt en
l¶obligeant à mécaniser son entreprise de plus en plus.

- La mécanisation accrue provoque une tendance au >', les machines remplacent les
hommes, aggravant la sous-consommation ouvrière déjà constatée et les risques de crise qui
s¶ensuivent. La classe ouvrière se  . Dans le même temps, la contrainte de la
mécanisation et la loi tendancielle de la baisse des profits conduisent à la disparition
progressive des entrepreneurs les moins puissants qui deviennent à leur tour des prolétaires.
Le capital tend finalement à se   entre les mains d¶un très petit nombre de
capitalistes alors que les autres individus sont prolétarisés et livrés à une pauvreté croissante
(
 O  O
  ). Ces lois d¶évolution inéluctable du capitalisme
le conduisent finalement à la     qui, à son tout, entraînera la  
,
c¶est-à-dire la 
 . Celle-ci n¶aura pour objet que de dépouiller au profit de la
collectivité les derniers et très rares entrepreneurs. Elle supprimera la contradiction
fondamentale du capitalisme qui maintient un mode individualiste d¶appropriation des
moyens de production alors que la technique de production est devenue collective.

- Ê 
   : Marx rejette un capitalisme qui génère sa propre contradiction et qui conduit à
la paupérisation de la classe ouvrière et donc à l¶aggravation de la lutte des classes. Cette
paupérisation est due à l¶exploitation à outrance « d¶une armée industrielle de réserve »
composée de chômeurs assurant la flexibilité de la production. En raison même de la
paupérisation des masses de salariés, les débouchés sont faibles. Pourtant, les capitalistes pour
accroitre leur profit continuent à augmenter la production, ce qui entraine une tendance
générale à la surproduction et donc à des crises qui paupérisent encore plus les ouvriers. La
recherche de gains de productivité et la concurrence entre capitalistes augmente l¶intensité
capitalistique (pour une même production, le capitaliste utilise de plus en plus de capital et de
moins en moins de travail). Or, seul le travail est créateur de richesses et donc source de
profit. En diminuant sa part dans la composition organique du capital, le capitaliste diminue
donc son taux de profit : contradiction suprême du capitalisme. Le capitalisme doit donc
disparaitre et laisser place au socialisme qui annonce lui-même le communisme.

r : # -, : lire Marx

Ê 
  '
 : au cours du 19e siècle et au-delà, s¶opposent radicalement ces deux
courants de pensée : libéralisme et marxise. Durant le 20e siècle, la théorie économique se
renouvelle avec l¶apparition d¶un troisième courant qui accepte le capitalisme mais prône
l¶intervention de l¶Etat : le courant keynésien.

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