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L'INTERFERENCE

LINGUISTIQUE

Par
Mansour Benchehida
Cité 160 log. –université
B2 n°18 27000 MOSTAGANEM
e-mail : mansour_benchehida@yahoo.fr
1997
L'interférence linguistique
2

"Le passage d'une langue à une autre ne consiste pas en


une simple transposition verbale, que pourrait à la
rigueur effectuer une machine, mais implique une
manière différente de voir et de sentir…."
A.ROCHE
(Etude des langues vivantes)
L'interférence linguistique
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SOMMAIRE

AVANT PROPOS

INTRODUCTION :
Une distribution de langues : la diglossie ................................................ 12
1° PARTIE :
LA PHONETIQUE ..................................................................................... 16
Interférences phoniques ........................................................................ 16
L’ECRITURE :............................................................................................ 17
1° L’alphabet :.......................................................................................... 18
a)Les consonnes:................................................................................... 18
b) Les voyelles:..................................................................................... 18
c) Les voyelles nasales :........................................................................ 19
2° PARTIE :
VOCABULAIRE ET TOURNURES: ........................................................ 20
1°Emprunts et interférences lexicales: ..................................................... 20
2°.Interférence d'ordre générique :........................................................... 21
3°.Le nombre :.......................................................................................... 22
a)la paire: .............................................................................................. 22
c)Nombre au-delà de dix : .................................................................... 22
4°.Interférences d'ordre sémantiques: ...................................................... 22
a)Généralités: ........................................................................................ 22
b)Vocabulaire: ...................................................................................... 23
IV. Les tournures :.................................................................................... 24
a)Le temps et lieu :................................................................................ 24
b)L'activité humaine : ........................................................................... 25
3° PARTIE :
LA SYNTAXE: ........................................................................................... 26
1.Le nom: ................................................................................................. 26
2.L'article: ................................................................................................ 26
3.L'adjectif : ............................................................................................. 26
a)Possessif: ........................................................................................... 26
b)D'ethnie ou d'origine:......................................................................... 27
c)Comparatif et superlatif: .................................................................... 27
d)Indéfini : ............................................................................................ 27
e)Numéral : ........................................................................................... 27
L'interférence linguistique
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4.La préposition : ..................................................................................... 28


Interférences grammaticales: ................................................................ 28
5.Le verbe :............................................................................................... 29
a)Modes et temps :................................................................................ 29
b)La forme pronominale : ..................................................................... 30
c)Tournures impersonnelles :................................................................ 31
6.L'adverbe :............................................................................................. 31
7.Le pronom personnel : .......................................................................... 31
8.Le pronom relatif : ................................................................................ 32
Emprunt et variation: ............................................................................ 32
4° PARTIE :
LA PHRASE: .............................................................................................. 34
1)Problème de la ponctuation : ................................................................ 34
2)Le dialogue : (discours rapporté):......................................................... 34
3)La forme négative : ............................................................................... 34
4)Le style direct et indirect : .................................................................... 35
CONCLUSION :
Acquisition du langage et apprentissage des langues: ............................. 36
Typologie du fonctionnement bilingue: ................................................... 37
La diglossie: ............................................................................................. 39
Idéologie et apprentissage:....................................................................... 41
ANNEXE:
Tablau comparatif des phonèmes:............................................................ 44
Exemple d’exercice:................................................................................. 45
L'interférence linguistique
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AVANT PROPOS

En 1978 l’enseignant que j'étais, dérouté par des fautes dont il n'arrivait
pas à cerner le pourquoi et le comment, découvrit l'interférence au détour
d'une phrase inoubliable et qu'il fallut décrypter par son auteur, l'enfant. Si
pour l'enseignant "au village, des hommes assis se promènent" ne voulait rien
dire, pour l'apprenant, elle était pertinente, sans problème.

Depuis, les interférences m'ont accompagné tout le temps. A les guetter


dans les copies maladroites et dans les envolées littéraires, j'ai appris qu'elles
étaient substance du langage en ce sens qu'elles étaient la perversion de la
norme, l'étincelle poétique, la saveur communicative. De Rachid Mimouni
répétant "l'Histoire est rancunière" à la phrase bizarre de mon élève, ces actes
s'inscrivent à l'autel de la communication dans le temple de l'humanité. Donc
les interférences sont les manifestations d'un homme qui tente d'expliquer ce
qu'il est à son prochain qui, lui, imagine, selon son vécu, plus qu'il n'entend,
objectivement, le message.

Mon souci initial, dresser un répertoire aussi exhaustif que possible, que
je finis par découvrir chimère, une liste de recettes que j'énumérais ex cathedra
à mes collègues, fut phagocyté au fil des données théoriques que je ne cessais
de consulter. Bientôt je dus me rendre à l'évidence : l'intérêt dépassait la seule
dialectique scolaire pour se déployer dans l'acte de communication
proprement dit.
L'interférence linguistique
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Dans le présent travail, une ébauche théorique accompagne un corpus


puisé dans une pratique enseignante d'un quotidien algérien. Cet ajout tente de
cerner le phénomène dans un discours universitaire qui se veut informatif et
éclairant le phénomène pour le lecteur.

L'étude est basée sur un corpus scolaire avec les limites que cela
suppose. Divisée en quatre parties comprenant les écarts les plus courants, elle
se pose, à titre indicatif, pour des collègues face aux besoins de l'urgence de la
classe dans une Ecole Algérienne qui se cherche frénétiquement. Souvent dans
la précipitation, en faisant l'économie douteuse d'une réflexion approfondie et
d'un dialogue serein.
L'interférence linguistique
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INTRODUCTION :

L’observation courante montre que tout apprenant d'une langue


étrangère, à un moment ou à un autre et de manière plus ou moins marquée,
parle l’une des deux langues, la maternelle ou la seconde, voire toutes les
deux, avec quelques particularités. Généralement, c’est le cas de la langue
qu’il connaît le moins bien et qu’il pratique le moins fréquemment. Ces
particularités ne ressemblent à aucune autre observée dans l’usage courant de
cette langue par les gens dont elle est la première et la seule langue, d'où la
difficulté à trouver solution pédagogique dans les manuels d'usage. Ces
particularités apparaissent souvent dans l'immédiat d'un acte de parole,, à
travers un aspect du phénomène, l'accent. On dit, par exemple, que tel
enseigné parle avec un accent kabyle lorsqu'on reconnaît dans son discours
des traits qu’on suppose venir du tamazigh. L'élève qui apprend une nouvelle
langue perd difficilement son accent premier à cause de la prégnance des
schèmes intonatoires acquis, mais aussi parce que sa prononciation traduit des
aspects de son identité.

L’hypothèse d’un processus de chevauchement signifie que cette


contagion ne se fait pas au hasard mais dans un ordre qui est commandé par
les modes d’organisation des deux langues en présence et par leurs structures.
L’emploi de deux langues par un même individu aboutit à la présence,
dans un système linguistique donné, d’unités, de modalités d’agencement ou
de fonctionnement propres à un autre système. C’est ce type d’interaction que
l’on appelle interférence linguistique . Au niveau phonétique, par exemple,
L'interférence linguistique
8
un élève unilingue arabe entend parler le français qu’il essaie de reproduire
oralement. La réception par la voie auditive et l’émission par la voie orale sont
ainsi mises en jeu. L’interférence repose sur l’infrastructure
psychophysiologique de la parole et s’explique fondamentalement par ce
double défilé où ce qui est entendu (par le biais d'un processus de tentative de
décodage), le français, n’est pas exactement ce qui a été prononcé mais
seulement ce que l’apprenant arabophone en distingue (pourcentage de
réussite du décodage), et où la langue reproduite, le français, ne l’est
qu’imparfaitement, avec les moyens linguistiques propres à l’emploi de
l'arabe.
Dans ce cas oral et dans les cas de l'écrit, ce qui apparaît au profane
comme une imperfection, le linguiste l’étudie comme un résultat de
l’interférence de l’emploi d’un système linguistique dans l’emploi d’un autre
système. L’analyse des deux systèmes en contact permet de dégager le type
d’organisation qui fixe le statut fonctionnel de l’unité ou du mode
d’agencement interférant, dans sa langue d’origine comme dans sa langue
d’accueil. Il est alors possible d’expliquer, voire de prévoir les transformations
que peut subir l’élément interférant en passant d’une langue à l’autre, et les
transformations éventuellement subies par le système d’accueil, le code de la
langue française, du fait de la présence implicite de structures arabisantes.

La notion d’interférence recouvre ainsi des processus divers auxquels le


linguiste applique la grille d’une double articulation d’unités1. Les « mots »
que chacun sait reconnaître sont composés d’une ou de plusieurs unités de
première articulation, les monèmes. Ainsi, dans «mangeons», on reconnaît

1
Cf. André MARTINET: la double articulation
L'interférence linguistique
9
deux monèmes dont les fonctions ne sont pas les mêmes, mange(r) - et -ons ,
unités minimales définies par leur sens (le signifié) et leur forme (le
signifiant). L’interférence va opérer selon des modalités complexes par
rapport à ces unités et à leurs différentes fonctions. La forme vocale des
monèmes s’articule à son tour en unités plus petites, appelées phonèmes. Dans
un monème comme /table/, chacun des phonèmes est distinct de tous les
autres et il suffit d’en changer un seul pour obtenir un monème différent,
/cable/ par exemple. Si les unités de première articulation constituent un
inventaire illimité où la fonction principale de chacune est significative, les
unités de seconde articulation sont en nombre limité, une trentaine pour le
français, leur fonction principale étant distinctive1. Elles constituent un
système compact qui offre une forte résistance à l’interférence, tandis que les
unités de première articulation, organisées de manière plus complexe mais
également plus lâche, offrent à l’interférence un terrain plus favorable.

Ces interférences se manifestent dans une situation linguistique


caractérisée par un "contact" entre deux langues. L’introduction, vers 1950, de
la notion de contact et de langues en contact dans le domaine de la linguistique
a manifesté la tendance à étudier les bilinguismes du point de vue de la
linguistique moderne, par contraste avec celui de la linguistique traditionnelle,
science historique préoccupée surtout de l’étude des changements endogènes à
une langue, à l'intérieur du système d'une langue donnée. Dans cette
perspective comparatiste, l’influence qu’une langue peut avoir sur une autre,
avant tout par les emprunts que celle-ci lui fait, est l’objet d’une étude, au fur
et à mesure de "fautes" que l’on répertorie et dont on s’efforce de déduire des

1
cf.Annexe : Etude comparative des phonèmes arabes et fraçais
L'interférence linguistique
10
stratégies d'apprentissage, à partir d'un répertoire constamment actualisé à
partir des difficultés rencontrées par nos enseignés.

Parler de contact revient à mettre l’accent sur le processus même du


contact et sur son explication. C’est affirmer que ce processus doit s’observer
dans le fonctionnement même de l’activité linguistique, puisque c’est là que se
situe le moment du contact. Dès lors, le lieu de contact ne peut être autre que
le locuteur. C'est à dire l'apprenant dont l'école algérienne a la charge dans une
situation linguistique arabe oral- arabe écrit- français et dans certains cas
tamazigh.

Il y a lieu de préciser que l'emploi du mot « langue » intervient dans un


classement sociolinguistique selon des critères bien définis. En effet, l’analyse
permet bien de distinguer une structure linguistique d’une autre, mais non de
mener un examen suffisant de la différenciation linguistique qui se présente
plus souvent comme un continuum que comme une succession d’unités
discrètes. Il faut donc faire intervenir le cadre et les conditions d’utilisation
des différents parlers (nombre et position sociale des usagers, rapport au
pouvoir politique), mais sans tomber dans la classification courante qui
identifie frontières politiques et frontières linguistiques, car les communautés
linguistiques survivent longtemps aux conditions politiques qui les ont
instaurées.

Le contact interlinguistique présuppose que chaque système en présence


est distingué sans ambiguïté tant par les locuteurs qui l’emploient que par les
linguistes qui le décrivent comme une entité aux limites précises. Un tel
modèle est largement redevable au type d’objet que définissent les théories
L'interférence linguistique
11
scientifiques : ici l’objet structural de la linguistique moderne ; il est
également étayé par la définition de certaines langues comme objet
constitutionnel, donc juridique, avec le normativisme que cela entraîne (c’est
le cas pour le français et pour l'arabe classique). Par contre dans notre corpus
on est tenu de rendre compte des stéréotypes des locuteurs à propos de leurs
propres parlers (l'arabe serait une langue, le parler algérien non).: dans les
circonstances qui sont les nôtres, la langue, le dialectal algérien par exemple,
s'inscrit, dans le meilleur des cas, comme un système à bords flous. Son
imbrication constante, aléatoire et multiforme avec la langue supposée norme
figé et posée en modèle vis-à-vis de la langue objet d'apprentissage, le
français, engendre d'autres problématiques dont l'incontournable alternance
des langues arabe parlé, arabe classique, amazigh et français.

La linguistique générale fait de ces termes une


utilisation dépourvue de tout jugement de valeur. Elle
affirme, au contraire, l’égalité absolue de tous les
idiomes quant à leur nature propre. C’est que l’emploi
strictement linguistique du terme « langue », dégagé de
toute connotation sociologique, se réfère aux systèmes
linguistiques en eux-mêmes, aux structures des idiomes.1
Face à la situation qui nous intéresse, la question que se pose un
linguiste est la suivante : que se passe-t-il au niveau de la langue, en tant que
système, quand les langues, arabe parlé, arabe classique, amazigh et français,
sont employées par un même individu ou par un groupe ?

1
CD ENCYCLOPEDIA UNIVERSALIS
L'interférence linguistique
12

On est en présence d'un processus intersystémique.


Notons que dans le cas de figure étudié, le principe du déterminisme
structural a été hérité historiquement, dans des conditions sociales extrêmes,
(colonialisme...). Des locuteurs de langue arabe ou amazigh se sont trouvés
contraints à employer une langue qui n’était alors celle d’aucun d’entre eux.
L'emploi de l'une ou de l'autre des langues s'inscrit parfois dans un schéma
diglossique.

Une distribution de langues : la diglossie


Le modèle de la distribution le plus simple est celui de la diglossie : la
répartition des langues se fait entre deux langues ou deux variétés d’une même
langue : l’une écrite et presque exclusivement réservée aux fonctions sociales
liées à l’écriture – littérature, enseignement, certaines cérémonies formelles –,
l’autre non écrite, employée couramment dans la vie quotidienne par
l’ensemble de la population. C'est le cas de l’arabe dit classique en face des
différentes variétés d’arabe parlé. On est alors en présence d'une diglossie qui
peut alors constituer une étape transitoire entre deux états d’unilinguisme.

Ce qui revient à admettre de facto l'interférence entre ces deux codes


qui interfèrent à leur tour avec le français appris à l'école et relayé par un petit
écran domestique qui grâce à la parabole devient un vecteur francophone
captivant, envahissant, présentant un choix de loisirs qui vont dans le sens des
désirs des jeunes
L'interférence linguistique
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Chaque locuteur dispose d’un répertoire premier qui comprend la


langue propre à sa région, la langue de ses débuts dans l’apprentissage de la
parole, la langue courante des usages quotidiens, langue qui ne coïncide pas
nécessairement avec un répertoire de langues secondes qui remplissent les
fonctions d’intégration locales (communication, école, administration,…),
nationale, religieuse, etc.

L’alternance de langues ou code-switching que l'on peut illustrer par le


biais du schéma de Garett1 est une pratique central d'un langage interférentiel.
Considérée parfois comme une aberration commise par des locuteurs
incapables de maintenir séparées leurs différentes langues, l’alternance est
aujourd’hui traitée parfois comme une stratégie communicative. Ce cas de
figure peut se rencontrer chez nous.
Ex Ana nakhdem sans pitié
(je travaille beaucoup et sérieusement)
Il ne s’agit plus alors d’éléments empruntés par ignorance du terme
adéquat ou comme le seraient des citations, mais du fonctionnement d’un
répertoire partagé au sein d’un groupe ou d’une communauté. Dans un tel
répertoire, il n’y a pas de phrase complète, et parfois même pas une
proposition ou un syntagme autonome qui puisse être attribué à une seule des
langues. Les connotations de chacune des langues peuvent ainsi être cumulées
et, de surcroît, l’alternance donne lieu à un contraste lui-même porteur de
signification.

1
T.BEVER et M.F.GARETT La psychologie du langage : Introduction à la psycholinguistique et à la
grammaire générative Ed. Mac Graw Hill, New York 1974 (traduction)
L'interférence linguistique
14

L’alternance se produit généralement à une limite fonctionnelle : à la fin


d’une proposition, d’une expression, à l’intérieur de celle-ci ; elle peut
également intervenir à des places où l’agencement de la proposition ne la
laisse pas prévoir. La théorisation de tels processus reste hypothétique : on
préconise une grammaire qui inclut, à un certain niveau d’abstraction, des
schèmes communs aux langues en présence, ou bien on admet que toute
alternance est d’abord un procédé pragmatique à but communicatif, qu’elle
viole ou non les règles fonctionnelles de l’une ou l’autre langue, qu’elle soit
ou non accompagnée d’hésitations, de répétitions ou d’autres disjonctions
propres au langage parlé.

De nombreux processus d’affaiblissement ou de perte des distinctions


entre systèmes peuvent être décrits dans toute situation sociale limite où un
locuteur, ou bien un groupe de locuteurs, est placé dans des circonstances
étrangères telles que ses repères langagiers et culturels d’origine ne
s’appliquent plus. Certaines de ces situations sont éphémères : les
transformations que l’on observe restent alors généralement sans lendemain.
Sur le plan descriptif, elles peuvent cependant être mises en rapport avec des
transformations analogues, durables celles-ci, qui aboutissent à la formation
de langues nouvelles dans des conditions de bouleversement de la vie.
Migration massive vers les villes. Ce phénomène impressionnat en Algérie
peut le lieu d'un parler. L'exemple qui nous interpelle immédiatement est la
"langue-codée" développée à coup d'interférences d'origines diverses,
L'interférence linguistique
15

d'agencements perverties sciemment que l'on rencontre chez les jeunes de


quartiers défavorisés ou même à la télévision dans le discours du comique
"Mustapha" que ces jeunes adulent.

Nonobstant, notre propos se veut d'abord pédagogique et comportera


quatre parties comprenant les "fautes" les plus usuelles d'après un corpus
constitué sur le terrain, à partir des copies d'élèves. Nous nous proposons
essentiellement et à titre indicatif d'aider nos collègues confrontés à ces a-
normalités dans l'exercice quotidien de leur mission d'enseignement. Les
écarts relevés sont précédés ou suivis par des réflexions théoriques qui parfois
semblent s'éparpiller tellement le phénomène n'est que symptôme de multiples
données psychologiques, sociologiques, politiques.
L'interférence linguistique
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1° PARTIE :

LA PHONETIQUE
Interférences phoniques
L’étude contrastive des systèmes en contact montre que les inventaires de
leurs phonèmes1 ne coïncident pas et permet, dans une très large mesure, de
prévoir les comportements de l’apprenant. L’absence de phonèmes
équivalents est une première cause d’interférences, mais ce n’est pas la seule.
Un même phonème peut, en effet, avoir des qualités fort différentes, ainsi /r/
arabe et /r/ français. De plus, ils peuvent différer largement par leur statut
fonctionnel.
En règle générale, si, pour un phonème donné, dans un contexte donné,
un trait est toujours présent ou toujours absent dans deux langues différentes,
on peut prévoir qu’un bilingue suivra des normes unilingues. Si, par contre, le
trait se présente dans sa langue dominante comme une variante libre et qu’il
est, selon les cas, présent ou absent dans sa seconde langue, l’interférence se
produit irrégulièrement. Il en est ainsi pour la production de la sonorité
consonantique quand un arabophone s’exprime en français.

Une autre cause d’interférence phonologique réside dans le fait que,


même lorsque deux langues en contact partagent certains phonèmes, ces
derniers peuvent obéir à des modèles de distribution différents.

1
cf en annexe: les phonèmes arabes / français
L'interférence linguistique
17

Par exemple, /a/ et /l/ sont des phonèmes français et arabe, mais la série
initiale /al-/ ne se présente pas souvent en français (dont cent quarante deux
mots d'origine arabe1).

Les traits prosodiques donnent lieu à des interférences qui obéissent à


des processus similaires. Par exemple, en français, l’unité d’accentuation est le
mot ou le groupe de mots dont la dernière syllabe porte un accent d’intensité.
En arabe, par contre, l’unité d’accentuation n’est pas le groupe rythmique,
mais le lexème dont chaque phonème reçoit l’accent sauf dans la plupart des
cas la dernière syllabe (qui est muette lorsque elle marque le féminin).
L’interférence de l’accentuation de l’arabe sur celle du français se manifeste
par la tentative de l’accent tonique sur chaque syllabe sauf la dernière qui est
escamotée. ou encore celle de l’absence d’une différenciation phonologique :
le même enfant prononcera « banc » et « bond » avec le même son appliquant
ainsi au français le système phonologique de l'arabe où l’opposition entre le
"an" et le "on" est absente.

L’ECRITURE :
En arabe, on écrit de droite à gauche et en conséquence, la progression
d’un texte dans un livre ou un cahier se fait dans le même sens :
Le réflexe d’un arabophone serait de commencer à écrire sur une feuille
double à la page 4

1
in CD ROM AXIS encyclopédie
L'interférence linguistique
18

D’inverser les lettres au sein même des mots :


J’ai pirs = j’ai pris ;
se pormener = se promener
En arabe il n’y a pas de lettres majuscules ; on rencontre alors ali,
alger ; ou des majuscules n’importe où :
elle Lave le cOu

1° L’alphabet :
a)Les consonnes:
"P", "V"et "Y" n'existent pas en arabe, elles se manifestent par une confusion
entre "p" et « b » ou "v" et "f":
se bromener, se promener
le bofre, le pauvre
le foleur, le voleur
les facances, les vacances
le fassement, le pansement
b) Les voyelles
Certains sons de voyelles n’existent pas en arabe :
le "o", le "u", le "eu"
pouis au lieu de puis ;
loui au lieu de lui…..
diminouer au lieu de diminuer ;
le bireau,
il distribi,
L'interférence linguistique
19

Confusion tenace entre "de" et "deux", "ce" et "ceux",….


Une confusion entre "e" et "é" se traduit par une confusion beaucoup plus
grave et plus tenace entre le participe passé ("é") et l’imparfait ("ait", "aient")
Hier l’équipe joué

c) Les voyelles nasales :


Avec les sons nasales, les voyelles nasales n’existent pas en arabe ; cela est
rendu par une confusion totale et persistante entre "on" et "en": Blond et blanc
Compagne et campagne
Allant et allons
"Les femmes en bourraient les couffins" devient
Les femmes ont bourré les couffins
L'élève écrit
La cage dont laquelle on a enfermé l'oiseau
Ses connaissances grammaticales sont peut-être insuffisantes mais
l'origine de la faute est d'ordre phonétique ; notre élève "n'entend pas" la
différence entre "dans" et "dont"
L'interférence linguistique
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2° PARTIE :

VOCABULAIRE ET TOURNURES

1°Emprunts et interférences lexicales


Le changement permanent qui affecte le lexique d’une langue est en
partie dû à l’importation de termes nouveaux, empruntés à d’autres langues.
Comparativement aux autres unités de la langue, les unités lexicales passent
facilement d’une langue à une autre. Un contact réduit y suffit, une publicité
par exemple. Toute langue présente des « lacunes » lexicales que des
emprunts peuvent venir remplir1.

L’interférence détermine, dans le domaine du lexique, deux grandes


catégories de transfert :
l’emprunt (loanword ), qui fait passer un mot tiré d’une langue dans l’usage
d’une autre (ex. etelfaza, la télévision ), et le calque (loanshift ), qui soit
introduit le mot étranger sous une forme traduite, utilisant généralement deux
ou plusieurs mots de la langue d’accueil (ex. "échec et mat" de cheikh mat, le
roi est mort ), soit met en correspondance l’emploi d’un emprunt avec un
signifiant de la langue d’accueil – par exemple il faut aider
l'ithem.(l'orphelin). Le terme d’emprunt est employé sans acceptation
rigoureuse : il désigne à la fois l’acte d’emprunter et l’élément emprunté,
même après son intégration.

1
cf. L'espace métaphorique dans L'Honneur de la tribu de R. Mimouni,BENCHEHIDA Mansour DEA,
UPN Villetaneuse, Dir SARI/BONN
L'interférence linguistique
21

En réalité, chaque emprunt pourrait être traité comme


un indicateur des processus structuraux du contact mais
aussi de l’histoire de la langue et de ses emplois.1
Dans tout inventaire d’emprunts, certains types d’unités se trouvent plus
souvent représentés que d’autres, les noms occupant sans doute la première
place et les affixes grammaticaux susceptibles de flexion, la dernière. D’où la
question du rapport à établir entre la structure de la langue et la résistance aux
importations. La réponse n’est pas simple. Le plus souvent, la résistance ou la
perméabilité aux importations lexicales dépend des facteurs socio-culturels
bien plus que de facteurs proprement linguistiques.

2°.Interférence d'ordre générique :


Sont féminins en arabe les noms qui se terminent par le son "a" en français ou
même en arabe:
Exemples rencontrés : La village
La jardin
La commissariat
La Canada,…..
Et vice-versa Le lune
Le patrie
Le mosquée
Le clef,…..

1
CD ROM Encyclopédia universalis
L'interférence linguistique
22

3°.Le nombre :
a)la paire:
Certains noms contenant l'idée de paire sont au singulier en arabe:
Il porte un soulier noir,
Un long vêtement couvre son pied
b)Les collectifs:
Certains mots, collectifs arabes, sont rendus au singulier en français:
Il a le cheveu noir….
c)Nombre au-delà de dix :
Après un nombre supérieur à dix, le substantif est au singulier:
Quatorze chevals……

4°.Interférences d'ordre sémantiques:


a)Généralités:
Qui contient, être composé de = en elle, en eux, en elle,…
La maison en elle trois chambres

Après une interrogation négative, confusion au sens de oui = non


Question :"As-tu apporté ton cahier?"
Réponse : "Oui monsieur."
Ce qui veut dire : "oui monsieur, vous dites vrai, je n'ai pas apporté mon
cahier"
A la même question, la réponse non veut dire :
"non monsieur, vous n'avez pas raison, je l'ai apporté".
L'interférence linguistique
23

Parmi = dans : Je passe dans les gens


Deuxième = aussi = également
On dit : le mur m'a heurté = j'ai heurté le mur
Le mur m'a frappé

b)Vocabulaire:
Rue = route = chemin = voie.
On avait construit une rue au milieu du désert
Amener = apporter
Apporte ton père
Obtenir = prendre
j'ai pris huit sur vingt
Détruire = briser = casser :
La maison est cassée
Il a cassé le mur
Confusion entre "prêter" et "emprunter"
Sahara = désert
Le sahara du Mexique
Il est plus grand que moi (plus âgé)
Il est plus petit que moi (moins âgé)
Mon ami lit au Technicum 1°novembre
(faire ses études)
L'amour propre (veut dire affection sans arrière pensée)
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IV. Les tournures :


Ces interférences sémantiques ne se limitent pas au mot isolé, elles
s'étendent aux expressions de la langue, aux tournures, à l'idiome. Elles
représentent alors des calques, des transpositions souvent incompréhensibles
et très difficiles à corriger.
Il pleut la pluie

Il fait un téléphone
Le temps est beau
(au lieu de il fait beau)
L'idée "entendre dire" est exprimée par "entendre" seulement :
J'ai entendu que le maître est absent

Il n'y a pas de vouvoiement en arabe d'où une alternance aléatoire dans le


discours de "tu" et de "vous" en s'adressant à une même personne.

a)Le temps et lieu :


Hier = il partira la veille
Demain = le lendemain
Le soleil monte (se lève)
L'après-midi = le soir (c'est la nuit dès qu'il fait sombre alors qu'en français
c'est le soir jusqu'à ce que l'on se couche.
On exprime le mot jour devant les noms des jours de la semaine:
Le jour du mardi
L'interférence linguistique
25

b)L'activité humaine :
Sortir dehors
Entrer dedans ou entrer dans
"Prendre = tenir = obtenir" : J'ai pris l'examen
"Machine = train" : La machine arrive dans la gare
"Véhicule =petite voiture = karoussa" :
Les marchands de légumes et leurs carrosses
Taxi = automobile:
Le directeur est arrivé par son taxi
Traverser = couper : Je coupe la route
Se laver la figure = laver sa figure ce qui donne :
Je me lave ma figure
Infirmière = el fermlia d'où une confusion:
"la fermière" au lieu de "l'infirmière"
Assis = ne faisant rien = sans travail
Au village, les hommes assis se promènent
L'interférence linguistique
26

3° PARTIE :

LA SYNTAXE
L’interférence est d'ordre syntaxique lorsque, par exemple, un enfant écrira :
« Ecrit Ali son exercice » (appliquant ainsi à l’énoncé français l’ordre
syntaxique arabe qui place le verbe en début de proposition).

1.Le nom:
La majuscule est inconnue en arabe, les apprenants oublient fréquemment la
majuscule en début de phrase ou de nom propre.

2.L'article :
Les difficultés se manifestent surtout là où le français omet l'article :
Il est un médecin
Beaucoup des maisons
Et devant les parties du corps :
Je me suis cassé ma jambe
J'ai cassé mon bras

3.L'adjectif :

a)Possessif :
En arabe le genre de l'adjectif possessif dépend de la personne qui possède
l'objet et non pas du genre de l'objet possédé:
Il a perdu son stylo
Elle a perdu sa stylo
L'interférence linguistique
27

b)D'ethnie ou d'origine
se terminant par le son "i" au masculin singulier :
arbi, tourki, kbaïli… alors qu'en français beaucoup de pays se terminent
par le même son "i" : Turquie, Russie, Tunisie,…
Le paysan était kabili, tourki, etc."
c)Comparatif et superlatif :
On rencontre: Il était habile comme son frère
Il était l'habile dans les hommes
Il était grand que moi
d)Indéfini :
L'adjectif "tout" est invariable :
Tout les hommes
Tout la ville
Vous tout

e)Numéral :
Contrairement à l'écriture des lettres et des mots, les chiffres s'écrivent
de gauche à droite, mais on énonce les unités avant les dizaines :
On dit "Trois milles et cent et quatre et cinquante
(3 145 pour écrire 3 154)
Le même phénomène d'inversion donne lieu à des confusions dans les
dates de naissance ou les numéros de téléphone:
80/12/9 pour 9/12/80
39 29 21 pour 21 29 39
L'interférence linguistique
28

4.La préposition :
D'innombrables fautes sont à relever :
J'étends une natte dans le sol (sur)
Une lettre a été envoyée de son grand-père (par)
Il met sa bicyclette au mur (contre)

Notons enfin que la distinction entre la préposition "pour" et la conjonction


"pour que", qui ont une forme unique en arabe, ne paraît pas être très nette
chez nos élèves :
Je travaille pour mes parents vivent mieux
(pour que)

Interférences grammaticales
Plus généralement qualifiées de transferts grammaticaux, de telles
interférences se produisent lorsque des modalités d’ordre, d’accord, de
sélection ou de modification automatique propres à une langue sont appliquées
à des segments d’une autre langue. Il arrive, de plus, que les modalités
grammaticales obligatoires dans la langue d’accueil ne soient pas appliquées
aux unités empruntées. Contrairement aux interférences lexicales qui peuvent
infléchir l’histoire d’une langue, les interférences grammaticales ne semblent
pas affecter en profondeur leur langue d’accueil.

Il est facile de donner des exemples d’interférences syntaxiques : ainsi


lorsqu’un petit Algérien applique l’ordre syntaxique de la proposition arabe. Il
est également facile de donner des exemples d’interférences imputables aux
différences entre les formes d’accord. En français, l’adjectif possessif
L'interférence linguistique
29

s’accorde en genre avec le sujet («il a perdu son stylo, elle a perdu son
stylo »). Le bilingue arabe-français sera donc tenté de dire « elle a perdu sa
stylo ».

De manière plus générale, la sélection automatique des variantes


marquées, dans les conjugaisons, les déclinaisons, etc., est le terrain
d’interférences nombreuses, par omission le plus souvent. Mais de tels écarts
grammaticaux sont, en réalité, rarement source d’incompréhension. Le
manque de vocabulaire et la prononciation d’un locuteur arabophone
représentent généralement un handicap plus important.

5.Le verbe :
Le verbe être n'existe pas :
Il m'a dit que ma mère malade

On remarquera de nombreuse fautes dans le choix des auxiliaires dans


les temps composés :
J'ai venu Je suis marché…
a)Modes et temps :
C'est dans le domaine des modes et des temps que nous trouvons les
fautes les plus graves et les plus fréquentes :
J'ai entendu le bruit de l'autobus qui passe
Je ne suis pas venu hier en classe parce que je suis malade
L'auto que je voyais passer roule vite
L'interférence linguistique
30

Ces fautes se font au niveau de la distinction élémentaire :


présent – futur – passé qui ne coïncident pas avec l'accompli et inaccompli de
l'arabe.
En arabe, il y a l'accompli qui exprime le passé,
L'inaccompli qui exprime le présent et le futur,
L'impératif
L'infinitif en tant que tel n'existe pas, on le rend par le présent :
Il commença il travaille
pour "il commença à travailler"

Tous les collègues ont remarqué l'emploi incorrect du mode et des


temps après la conjonction "si".
L'élève dira : Si je serai riche, j'achèterais….
Le premier verbe au futur s'inscrit en faute alors que la norme n'est qu'un
illogisme de la langue française .

Puisqu'en arabe dialectal, l'emploi de l'accompli est le plus fréquent et le


plus facile, l'élève a tendance à employer le passé à tort et à travers, à le
préférer au présent de narration.

b)La forme pronominale :


Le pronom pronominal se traduit par un mot (âme, personne)
Se tuer = tuer son âme
L'interférence linguistique
31

c)Tournures impersonnelles :
Il pleut la pluie
Il tombe la neige

6.L'adverbe :
Les règles qui déterminent la place de l'adverbe ne sont pas les mêmes
dans les deux langues :
Toujours il travaille
pour dire "il travaille toujours"
Confusion entre "trop", "très", et "assez"
C'est très trop
pour dire "c'est trop"
Elle est très grande pour passer sous la porte (trop)

7.Le pronom personnel :


Le pronom personnel sujet existe en arabe, mais généralement il est
omis, sauf s'il sert à renforcer le sujet (moi, je travaille). Ainsi l'élève oublie
parfois le sujet dans les phrases complexes :
Ali raconte que la nuit fait des cauchemars (omission de il)
Confusion entre "tu" et "vous" : Tu as perdu votre cartable
Les pronoms personnels compléments n'existent pas sous forme isolée
mais sont affixés à un verbe ou à une préposition (littéralement : je vois-le; je
demande à lui). Ces pronoms sont selon la fonction, le genre et le nombre
mais ne varient pas selon la fonction. Voici la source d'une série de fautes que
nous rencontrons quotidiennement :
L'interférence linguistique
32

Je le dis Je la dis (pour une femme)


J'ai lui dit Je les parle (leur)
Face à "on", les élèves réalisent mal le signifié pluriel et le signifiant singulier
:
On chantent
Autres difficultés :
Charef, il mange
Nous sortons du village pour aller se promener

8.Le pronom relatif :


Le pronom relatif français ne trouve pas son équivalent en arabe. Très
souvent l'élève ne sait pas faire son choix parmi les pronoms relatifs français.
Il doit réfléchir pour distinguer la fonction sujet de "qui" et la fonction
complément d'objet direct de "que". Qui devient un "relatif passe-partout" et
se confond avec "qu'ils" ou "qu'il":
Le film que je l'ai vu il est beau
La mosquée qu'ils ont parlé d'elle
"L'argent est un métal qu'on fabrique avec lui des bijoux
"Les livres que j'ai besoin d'eux

En outre, l'élève saisit mal la personne que représente le pronom relatif :


C'est moi qui a trouvé ce livre

Emprunt et variation
Une première distinction s’impose entre l’interférence dans
l’immédiateté du discours et ses résultats dans l’histoire de la langue.
L'interférence linguistique
33

C'est l'exemple de toutes les variations qui s'incrustent dans le parler ou


disparaissent au bout d'un moment. Ce qui apparut à une époque antérieure
comme une interférence est devenu partie intégrante du français (oued,
matraque,…) ou de l'arabe (reskala, kaoualisse,…) et ne justifie plus cette
appellation.

L’emprunt n’est qu’une des nombreuses modalités de l’interférence


particulièrement facile à identifier, à cause de l’évidente intrusion qu’il
représente. Dans d’autres cas, il n’y a pas à proprement parler d’intrusion.
L'interférence linguistique
34

4° PARTIE :

LA PHRASE

1)Problème de la ponctuation :
L'élève "sent" mal la phrase entière, surtout si elle est complexe.Il lit mal les
groupes fonctionnels intercalés (virgules)

2)Le dialogue : (discours rapporté)


Dire = déclarer = répondre = questionner :
Il dit, il me dit, il lui dit …inlassablement répétés dans le dialogue pour
remplacer les deux points, les traits, les guillemets.

3)La forme négative :


La forme négative en français est obtenue par des particules doubles
(ne…pas, ne….plus, etc.); en arabe par une particule unique.
Dans les copies, on constate souvent l'omission de ne :
J'ai pas d'argent
Ou une mauvaise disposition des particules aux temps composés du
verbe:
Je n'ai été jamais puni
L'interférence linguistique
35

4)Le style direct et indirect :


L'élève n'a pas l'habitude de la ponctuation française si importante dans
l'expression écrite du style direct. Il lui arrive de l'omettre totalement :
Je dis mon ami est venu
L'élève m'a dit je suis malade
ou pire L'élève a dit je suis malade
L'interférence linguistique
36

CONCLUSION

Parler, c’est aussi signifier une identité, participer à des mouvements


sociaux (que ce soit ou non de manière délibérée), aux processus qui
transforment les langues ainsi que les rapports entre elles et ceux qui les
parlent.
Face aux problèmes que nous posent nos élèves, tenant compte de la
négociation continuelle qu'entretient l'enseigné avec deux, trois, voire les
quatre codes qui font son environnement, puisque aucune solution
systématique n'existe, il est indispensable d'évoquer les processus
d'apprentissage des langues :

Acquisition du langage et apprentissage des langues


Il est généralement admis aujourd’hui que la manière dont un enfant apprend à
parler dans une situation linguistique complexe ne diffère pas
fondamentalement de celle qui se réalise dans une situation unilingue, en
particulier en termes quantitatifs de comparaison (acquisition du vocabulaire,
acquisition des schèmes syntaxiques, etc.). D’un point de vue qualitatif, on est
conduit à pondérer la notion de complexité : tout réseau langagier est
complexe par les variétés, les registres, l’ensemble des nuances que la
socialisation requiert et qui sont à la fois les révélateurs de formations sociales
et leurs supports identificatoires. L’affectation de tels indicateurs à deux ou
L'interférence linguistique
37

plusieurs langues, plutôt qu’à une seule, peut éventuellement faciliter, chez
l’enfant, leur discrimination et leur apprentissage. Plus fondamentalement,
cependant, l’enfant découvrira, par son engagement même dans le maniement
du langage et dans les discours, quelle est sa place dans l’ordre des alliances et
de la parenté.

Typologie du fonctionnement bilingue


Un certain nombre d’observations empiriques concordent pour suggérer
l’hypothèse de deux catégories de bilingues.
Les uns ont appris leurs deux langues en référence à un même ensemble
sémio-culturel, les autres en référence à deux ensembles différents. Cette
hypothèse a trouvé l’appui d’une théorie psycholinguistique, la théorie de la
médiation sémantique. Aux deux catégories de bilingues évoquées, elle fait
correspondre deux types de fonctionnement intrapsychique.

Dans le premier, le type ou le système composé, deux ensembles de


signes linguistiques appartenant à deux langues différentes, ont en commun un
même ensemble de processus de médiation sémantique, ce qui est le cas dans
la situation qui nous intéresse puisque l'intrication entre arabe parlé, arabe
écrit et amazigh crée des zones floues même si l'on considère que l'opposition
avec la langue française est nette, ce qui, sur le terrain, est loin d'être le cas.
L'interférence linguistique
38

Alors que dans le second, le type ou système coordonné, elles (les


langues en présence) correspondent chacune à un ensemble médiateur
particulier. Grossièrement, cette typologie repose sur le postulat selon lequel
deux unités linguistiques porte / bab , reliées à la même expérience perceptive,
ont les mêmes potentialités sémantiques, deux unités école / medrassa , reliées
à des expériences différentes, ont des potentialités différentes.

Le système composé caractériserait le bilinguisme de l’enfant qui


grandit dans un milieu où les deux langues sont parlées par les mêmes
personnes et dans les mêmes situations de manière interchangeable. La
méthode indirecte d’enseignement de la seconde langue, par l’intermédiaire de
la première à laquelle on se réfère par traduction, aboutit également à un type
composé de bilinguisme. Les virtualités d’interférence y sont élevées. Il est
question alors de chevauchement, de perméabilité ou de bilinguisme
perméable , le système médiateur unique entraînant une contagion entre le
fonctionnement des deux langues, qui se répercuterait également au niveau de
la phonologie, de la syntaxe et du lexique. Au contraire, dans le cas du
bilinguisme coordonné, la séparation des deux systèmes sémantiques
faciliterait le maintien séparé du fonctionnement des deux systèmes
linguistiques. Il est question alors de bilinguisme étanche . Ce système
caractériserait le bilinguisme de l’enfant qui parle une langue dans sa famille
et une autre à l’école, dans des conditions qui rendent difficile, voire
impossible, de les mettre en correspondance.
L'interférence linguistique
39

La typologie composé/coordonné a fait l’objet de diverses études, sans


que la question ne soit tranchée de façon décisive. Elle prête le flan à la
critique par sa définition étroitement référentielle de la signification, que l’on
sait aujourd’hui devoir décrire en termes de contexte, comme par son
ignorance des théories récentes de la mémoire du langage qui font une place
importante à l’autonomie psychique du signifiant. Enfin, elle ne permet
d'expliquer les processus grâce auxquels le bilingue réussit des transitions
aussi immédiates et fréquentes que celles du discours alterné.
Le corpus que nous avons analysé auparavant nous ramène
immanquablement vers une relation diglossique.

La diglossie
La notion de diglossie, comme nous l'avons vu en introduction, met
l’accent sur le fait que, dans une société donnée, deux variétés d’une même
langue ou deux langues distinctes remplissent des fonctions sociales et
institutionnelles différenciées, généralement complémentaires. Malgré cette
complémentarité de fait, la différence des fonctions remplies par chaque
langue – l’une connaissant, par exemple, une valorisation socio-économique
plus importante, l’autre une expansion populaire plus forte – aboutit, dans la
plupart des cas, à affecter les deux systèmes en présence de valeurs positives
ou négatives.
L'interférence linguistique
40

Les langues deviennent alors l’objet d’enjeux politiques, économiques,


culturels, voire religieux, en même temps qu’elles apparaissent comme le
symbole de ces enjeux.

Avec le développement, depuis les années 1960, de la sociolinguistique


(sociologie du langage et linguistique sociale), les études des processus de
contact du seul point de vue du système des langues ont trouvé des
compléments nécessaires et ont souvent permis un dépassement dans la prise
en compte des fonctions sociales et psychologiques du langage : les langues
servent la communication mais également la signification et la connaissance,
les discours auxquels elles fournissent leur matériau font fonction de lien
social.

Le rapport au langage engage celui qui parle dans la communication –


c’est le critère généralement adopté en linguistique –, il l’engage aussi en tant
que sujet qui ne saurait énoncer sans que se signifie son état de parlant. Par-
delà les variantes du type de situation uni-, bi- ou plurilingue, la spécificité
humaine est alors en cause et nous interroge dans la formation d'éventuelles
névroses.

Plus généralement, les processus d’identification établissent la liaison


entre les modalités de l’assujettissement singulier de chacun et l’ensemble des
objectifs collectifs qui lui sont proposés.
L'interférence linguistique
41

La soumission, en matière d’emploi des langues, est bien loin de ne


résulter que d’un rapport de forces. Toute langue nous trahit quelque part,
mais le bilingue est en mesure de construire un fantasme qui le met à l’abri de
cette trahison : une langue existe, celle qui est perdue, ou délaissée, ou
opprimée, qui donnerait de lui la véritable équation. La perte qui, face à la
langue, impose sa marque à tout être parlant peut être rationalisée par lui
comme le résultat d’un clivage entre deux ensembles, linguistiques, culturels,
généralement politiquement scindés.

L’ordre d’apprentissage des langues, l’âge où elles sont acquises,


l’étendue de la connaissance éventuelle de la langue écrite sont généralement
déterminés chez chacun par la société à laquelle il appartient. La répartition de
l’emploi des langues en présence, entraîne une mise en hiérarchie, mais aussi
des jugements qui affectent leurs pratiques.

Idéologie et apprentissage
Une langue peut faire naître chez ceux qui la parlent des sentiments de
fidélité comparables aux sentiments qu’évoque l’idée de patrie ou celle de
nation. Ils conçoivent leur langue comme une totalité, en opposition avec les
autres langues, et lui accordent une position élevée dans une échelle des
valeurs, une position qui demande à être « défendue ». La langue devient un
symbole et une cause. A cet égard, la forme écrite peut apparaître comme
L'interférence linguistique
42

particulièrement précieuse. Cette représentation idéale d'une langue et les


retentissements émotionnels qu’elle peut provoquer caractérisent notre
situation.
Les pays en voie de développement tendent à s’en tenir à ce type de
conduite. Il est certain que les situations d’assimilation politique sensibilisent
les groupes à ce qui fait leur originalité et en particulier aux qualités propres
de leur langue, qui peut alors devenir le symbole et de l’appartenance au
groupe et de l’intégrité de celui-ci. Mais il ne suffit pas, comme on a tendance
à le croire, qu’une langue soit reconnue et enseignée pour être pratiquée. Il ne
suffit pas non plus de normaliser la pratique d’une langue, comme c'est le cas
chez nous, de prendre des mesures nationales qui privilégient ceux qui la
parlent pour que soit remis en question un rapport de forces aussi irrésistible
que celui de l'économie libre qui obéit à d'autres impératifs.
L'interférence linguistique
43

ANNEXE

Extrait de "Comparaison entre les unités phonétiques de l'arabe et du


français" BENCHEHIDA Mansour, UFC-Université de Mostaganem, Juin
1993:
Les différences:
Le français est une langue vocalitique alors que l'arabe est comme nous
l'avons vu une langue consonantique.
Le français est traduit par trente-six (36) sons
dix-neuf (19) voyelles
et dix-sept (17) consonnes

L'arabe se parle à travers vingt-sept (27) consonnes vocalisées


Les voyelles sont
Trois (3) voyelles courtes
Trois (3) voyelles longues
Trois (3) voyelles doubles nasalisées

Six (6) sons français à double graphèmes n'existent pas en arabe


Six (6) sons français à simple graphie n'existent pas en arabe

Un (1) son à double graphie en français se retrouve en simple graphie en


arabe : ch = ∫ =

Treize (13) sons arabes n'existent pas en français

En arabe, il n'y a pas de phonème rendu par deux graphies différentes ou


double (couplé)
Tablau comparatif des phonèmes:

13 sons français 13 sons arabes


n'existent pas en arabe n'existent pas en français

allo Feu
grand Grand
pole Blond
pierre Mer
unité Frein
vélo Brun
peigne
Exemple d’exercice:

Cette batterie de questions vise à mettre en évidence les interférences


linguistiques les plus courantes chez des élèves arabophones.

1.Une bibliothèque vend des livres VRAI - FAUX

2.Observez: Il fume beaucoup, c’est un fumeur


Il travaille beaucoup, c’est un ....................
Il ment souvent, c’est un ........................

3.Mettez une croix devant le mot juste:


Une rivière desséchée est une rivière dessalée
désablée
à sec

4.Remplacez « 1 » par « un » ou par « une »


1.........commissariat
1.........tablier
1.........chemin
1.........cimetière

5.On dit une classe : des classes


un cheval : quatorze .................
un muezzin : des .......................

6.Barrez l’adjectif faux :


Mon frère a quatre ans de plus que moi,
il est plus petit - grand - âgé que moi

7.Barrez les mots qui ne sont pas des synonymes de « visage »


virage - tirage - mine - cirage - figure - tapage
L'interférence linguistique
46

8.Laissez seulement l'antonyme court


loin ≠ petit
près

9.Reliez chaque homonyme avec la phrase correspondante :


Remplis d’eau ce saut
Cet enfant est sot
Cette grenouille fait un seau

10.Barrez le verbe impropre


Tu dois apporter - amener le radiateur

11.Soulignez l’adjectif juste :


Ce chemin se perd à l’horizon, il est grand, long, rond.

12.Il y a la note 10 sur le devoir de Mourad.


Mourad a pris, obtenu, attraper la moyenne.

13.Barrez l’adjectif impropre:


Un café lourd
Un café fort

14.Reliez les synonymes


achever illuminer
gravir finir
éclairer monter

15.Mettez une croix devant les phrases contenant un mot au sens figuré :
Ce fruit est amer au goût.
Cet homme rit jaune
C’est un avocat marron

16.Complétez par « son » »sang » ou « sans »:


L’élève est venu..............cartable
Mon père a oublié............parapluie
La victime a perdu beaucoup de..............
L'interférence linguistique
47

17.Mettez « et » ou « est » :
Le gardien ...... parti ....l’école .......vide.

18.Mettez à la forme interrogative:


Ali a mangé des oranges.

19.Ecrivez les adverbes de


vertical :................., attentif....................,
vaillant.......................

20.Encadrez le mot qui n’est pas de la même famille:


bain - baignoire - baignade - baie - se baigner

21.Dites combien il y a de propositions dans :


« Ali joue bien et vite, il dribble, feinte et tire en une fraction de seconde. »

22.Mettez à la voix passive :


Les élèves font des exercices.
On voit de beaux magasins.

OooooOOOooooo

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