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SO M M Al RE
Bulletin Alfred BERL
A propos de la mort du Pape Pie XI E. LEVINAS
Autour de la « loi juive » en Hongrie L. G.
Lettre de Pologne : L'action de défense du judaïsme polonais Dr A. T.
La situation des juifs de Dantzig
En Roumanie : Les échos du discours du chancelier Hitler ISAS
La situation des juifs en Italie .
Message de I' « Alliance Israélite » à S. E. le Nonce du Pape à Paris
La question juive en Tchécoslovaquie
Le problème palestinien : La conférence de Londres
Dans la presse : Drames du racisme en Italie. — Le drame juif d'après M. Robert de
Beauplan dans la « Petite Illustration ». — Racisme et christianisme
Tableau des écoles de I' « Alliance Israélite »
BULLETIN
En vertu d'une logique transcendante, que peu d'es-
prits comprennent, il voyait dans l'Evangile une source
Pie XI et le judaïsme de vérités religieuses et morales tutélaires pour l'humanité,
Pie XI n'est plus : au deuil qui frappe toute la chré- mais aussi la confirmation et l'accomplissement des révéla-
tienté ou pour mieux dire toute l'humanité civilisée, le tions sublimes que le judaïsme et le Décalogue apportèrent
judaïsme mondial, que le Souverain Pontife défendit si noble- au monde voici quelque trois mille ans.
ment, s'associe avec ferveur. L'Alliance Israélite eût failli à Cette conception élargie de la religion unie à une inépui-
son devoir si elle n'avait apporté au glorieux disparu l'hom-
sable charité F élevait au-dessus de toutes les intolérances et
mage de sa profonde gratitude et de son immense regret. de tous les fanatismes. Son christianisme éclairé par la
Le message que nous publions plus .loin, n'est qu'une faible science lui dicta son énergique réprobation du racisme,
expression des sentiments qu'elle s'honore d'éprouver pour comme sa foi dans la justice du Créateur lui imposait de
cette illustre mémoire. comprendre Israël dans sa sollicitude universelle pour toutes
les créatures. « Nous sommes Sémites en esprit » disait-il,
Si Pie XI fut un grand parmi les plus grands papes,
et tous les véritables Chrétiens Je pensent avec lui. Quant
c'est qu'il s'avéra non seulement un savant émérite, un
.
esprit supérieur, mais aussi une grande âme, un grand aux juifs, nul doute qu'ils ne gardent le souvenir vénéré de
humain. ce Pape qui voulut justifier totalement son nom et s'affir-
mer le père affectueux de tous, l'homme bon et saint à qui
Sa foi égalait sa science, et chez lui le caractère, la rien d'humain ne saurait rester étranger.
force de volonté et l'amour des hommes surpassaient encore,
si possible, l'intelligence. Encore que les jeux cruels de la II
politique eussent attristé sa vieillesse, son destin apparaît
enviable ; il lui fut donné de réaliser avant sa fin, les admi- En Hongrie
rables virtualités que recelait sa riche et puissante person- La loi juive et la démission du président hnredy
nalité. Il eut la double gloire d'être à la fois l'interprète le
plus haut d'un dogme absolu, et le protecteur de tous les Le projet de loi juive ou plutôt antijuive, dont Paix et
faibles, de tous les opprimés ; le représentant infaillible Droit a indiqué clans ses derniers numéros les dispositions
d'une religion universelle et l'adversaire irréductible de fondamentales, est venu, après examen par les Commissions
toutes les persécutions. ,'•;,.-,>•
;.
parlementaires, à l'ordre .du jour du Parlement. En ce. mo-
PAIX ET DROIT:
qui la parole. Nous tile, dans une autre question à l'ordre du jour, celle de la
ment, c'est la Chambre basse a avons 1
mixtes, seront classés comme juifs ! Mieux encore : les des- boration de l'élément israélite lui serait, dans cet ordre dé-
cendants d'Israélites qui en 1848, sous Kossuth, ont combattu, faits, d'un rendement, utile et fécond, si la passion anti-
versé leur sang et sacrifié leur vie pour l'indépendance de la juive consentait à désarmer.
Hongrie, seront rejetés hors la cité, hors l'Etat, hors la loi, ' ,
Etrange époque où par la perversion des fausses idéolo-
alors que les petits-fils des Allemands qui à la suite de l'Au- gies et des phraséologies creuses, tous les rôles sont inter-
trichien Bach, écrasèrent l'insurrection nationale, sont habi- vertis ; où contre les bas instincts, les viles convoitises des.
;
lités aujourd'hui à devenir les. maîtres du pays et à régir masses ignorantes et fanatisées, où contre les appétits et les
;
ses destinées. haines de race camouflées en- mystiques plus ou moins désin-
:
Protestations superflues, "éloquence en pure, perte ! téressées, la plus grande autorité dogmatique qui soit au
D'ores et déjà, la cause est entendue : Israël est condamné monde se dresse comme l'ultime défenseur des libertés indi-
d'avance. Néanmoins il n'est pas seul atteint ;. celui qui a viduelles,, comme la sauvegarde des élites et connue le
mené durement le mauvais combat, tombe à la veille du suprême espoir des valeurs spirituelles qui font le prix de
triomphe. Il démissionne parce qu'il vient de faire une l'existence, à savoir, les droits de la, conscience: et de la
découverte grave, propre à le disqualifier à ses propres yeux personne humaine.
comme aux yeux de son parti. Il a repéré —: un peu tardive- III
ment pour la vraisemblance — l'exactitude d'une accusation
qu'il avait jusqu'alors énergiquement démentie, à savoir que En Tcnéco-Sl'ovaquie
dans son ascendance maternelle il compte un. huitième de
juif il peut donc plus diriger la croisade sacrée, et Le peuple qui fut ?....
sang' : ne
parti s'incline. Dans une des nouvelles; les. plus poignantes qu'il ait
son écrites (1), Kipling a raconté l'histoire d'un officier anglais,
L'opinion reste assez sceptique quant au prétendu motif porté disparu
de cette retraite, plus ou moins volontaire. De tout temps, en 1854 après une bataille livrée en Crimée..
l'aristocratie magyare s'est montrée trop fière de ses. origi- Trente En réalité cet officier a été fait prisonnier par les Russes..
ignorer les moindres particularités, à plus forte ans après, par une suite de hasards extraordinaires,,
nes pour en il reparaît à Peschaver, au mess du régiment où il était
raison, une aussi importante. Deux hypothèses sont plausi-
lieutenant, en 1854. Ses camarades parviennent à l'identifier ;;
bles : ou le président Imredy appréhendait de la part d'ad-
versaires politiques cette révélation, avec preuve à l'appui, mais il est mourant : ayant été: déporté en Sibérie par
lé caprice barbare d'un colonel russe, il
et a préféré prévenir l'attaque que la subir ; ou, ce qui trente y a passé
serait plus probable,, il a saisi un prétexte sensationnel pour années. 11 peut à peine pa.rler sa langue mater-
échapper à une crise qu'il sentait prochaine, par le fait nelle, qu'il a, oubliée. On découvre que. son corps: est zébré
d'une opposition sourde, d'abord, mais qu'il sentait grandir par le knout. Les traitements atroces dont il; a été victime
et menacer. Sûre, dans la question juive, la înajiorilé gou-
vernementale semblait prête à un prochain revirement hos- de Frmw'eh0l"w ^ /M*" Traduit par les E<*itioas du. Mercure
=3 PAIX ET DROIT
ont oblitéré sa mémoire et sa raison ; ce n'est plus un ter. Après tant de gages d'obéissance déjà concédés, Berlin
homme, mais une loque humaine : l'homme qui fui. en exige un autre, une législation antijuive, à l'image de
La nation tchèque, en proie à la brutalité raciste, celle de Nuremberg.
va-t-elle devenir aussi « le peuple qui fut » ? Il est Le peuple tchèque, diminué, abandonné de tous, osera-
permis de se poser la question. Ce n'est pas assez pour t-il, pourra-t-il résister à la pression du Moloch qui domine,
le gouvernement nazi d'avoir arraché à la Tchéco-Slc-vaquie
en attendant qu'il la dévore, l'Europe centrale ? La férocité
ses plus riches provinces, de lui avoir pris sa frontière, de méthodique du Germain raciste aura-t-elle raison de l'opi-
l'avoir amputée du quart de sa population, de l'avoir spo- niâtreté proverbiale du Tchèque ? C'est le secret de demain.
liée de ses industries les plus florissantes ; il prétend, au
mépris des plus solennels engagements, interdire de vivre L'antisémitisme auquel la Bohème slave s'était jusqu'ici
une vie indépendante aux populations tchèques qu'il n'a
montrée réfractaire, commence à s'installer sur les rives de
la Moldau, avec les excès, les injustices et les hontes dont il
pas officiellement annexées. Après les avoir dépouillées ma-
tériellement, il veut leur voler leur âme. Les Tchèques s'enor- est ooutumier : c'est une pierre de touche révélatrice de
gueillissaient d'avoir fondé un pays libre, démocrate, égali- la santé politique et morale, de la vitalité économique et
taire au point de vue politique, social et confessionnel. A cet financière des Etats. Puisse l'Etat tchèque sortir indemne
idéal le Reieh oppose le sien, le totalitarisme exclusif et la de l'épreuve et sauver l'âme nationale !
doctrine raciste. Prague se mettra au pas ou cessera d'exis- Alfred BERL.
Dans notre 'dernier article, nous annoncions que la « loi partage des terres possédées par les juifs, premier pas vers-
juive ». après de laborieuses négociations, s'est trouvée sou- une réforme agraire contre laquelle ils s'élèveraient avec
mise à la. Chambre Basse de Budapest. Un mois s'est passé énergie si elle devait être exécutée sur une vaste échelle.
depuis lors, lès événements ont marché, bien; des; boulever- Tout se passe aujourd'hui comme si le chef du nouveau
semenfe se sont produits e» Hongrie,, mais, la «, loi juive » gouvernement hongrois, qui appartient, ne l'oublions, pas à
à peu.près, intacte,, se trouve encore devant les, Chambres, où la vieille aristocratie, avait compris à quelle puissance, il ris-
elle fait l'objet d'âpres discussions.. quait de se heurter. Dams son premier discours devant le
Le; fait le plus, marquant de révolution de la politique Parlement, il a affirmé avec vigueur qu'il persévérerait d'ans
hongroise est la retentissante démission de M. Bêla Imredy, le» politique; de son prédécesseur relativement à la « loi
Président du Conseil, promoteur de la « loi juive ». Celui-ci, juive », et à la réforme agraire. Mais alors qu'il y a tout lieu
au cours d'une réunion dramatique du parti gouvernemental, de croire que M. Teleki — qui fut, il y a dix-huit ans l'insti-
déclara aux députés du parti, le 15 février-dernier, qu'ayant gateur du numerus elamus en Hongrie — se montrera effec-
découvert les origines juives de l'un de ses arrière-grands- tivement d'une grande- fermeté: en ce: qui concerne la « loi
pères maternels, et possédant par conséquent un huitième de juive », il est permis 'de se demander s'il usera de la même
sang juif dans les veines-, il ne se considérait plus comme- fermeté pour ce qui est de la réforme agraire. N'a-t-il pas
moralement autorisé à présider aux destinées d'un gouver- ajouté en termes nuancés : « Il ne s'agit pas de partages ni
nement dont la tâche la plus urgente était la réglementation de distributions gratuites comme-le prétendent certains, qui
de la question juive dans un esprit raciste. prouvent ainsi, à la* fois, leur incompréhension et leur incom-
On s'imagine la stupeur produite par cette déclaration. pétence », et qu' un vrai Hongrois ne saurait se laisser
c<
pays à voter désormais sur une liste spéciale où électeurs et nir ces preuves formelles de résidence, le gouvernement,
élus seraient exclusivement juifs. dernier juge en la matière, aurait toujours beau jeu de ré-
Aprement combattu par l'opposition, le gouvernement cuser les candidats-électeurs qui lui déplairaient.
décida enfin d'apporter certaines modifications à la loi, Cependant, Je projet de loi passa tel .quel devant la
•notamment en ce qui concernait la situation des « demi- commission plénière de la Gljambre ; le gouvernement Teleki
sang », certaines*catégories de mutilés de guerre, les conseil- le reprit à son compte, et à l'heure où nous écrivons, la dis-
lers privés de la couronne «t les professeurs à l'Université cussion bat son plein à 3a Chambre Basse. L'opposition
-d'origine juive. Cependant, tous ces adoucissements ne chan- compte présenter un certain nombre de modifications, mais
geaient rien à l'esprit raciste de la loi, et ne visaient qu'un il est douteux qu'elle puisse faire prévaloir son avis sur les
nombre d'individus assez restreint. Les juifs conseillers pri- points importants.
vés du gouvernement sont très peu nombreux, et ont chère- En attendant, la détresse du judaïsme hongrois -aug-
ment acheté leur titre ; quant aux professeurs d'Université mente sans cesse. Les suicides deviennent fréquents, et on
d'origine juive, ils ne sont que quatorze. lit de plus en plus souvent dans les rubriques nécrologiques
Sur un seul point, le gouvernement a admis l'argumen- des quotidiens cette formule éloquente : « décédé subite-
tation de l'opposition en renonçant à la liste juive:, mais ce ment ». En janvier dernier, le nombre des suicides à Buda-
ne fut pas pour améliorer cette disposition, loin de là, et les pest fut double de celui de l'année dernière pour le même
israélïtes hongrois qui, à l'annonce de cette nouvelle, mois. Devant les consulats étrangers stationnent de longues
s'étaient d'abord réjouis, durent ensuite déchanter. En effet, files d'infortunés qui, menacés de perdre tous moyens d'exis-
selon l'amendement gouvernemental, les juifs pouvaient voter tence par la « loi juive », sont contraints d'émigrer.
sur n'importe quelle liste,, comme tout autre citoyen,, mais Et, indice moins frappant peut-être mais tout aussi si-
seuls avaient droit de vote ceux qui pouvaient prouver que gnificatif, certains journaux ont renoncé à publier leur feuil-
leurs parents, tant du côté maternel .que paternel, vivaient leton quotidien pour consacrer cet emplacement à l'enseigne*
-en Hongrie, de façon permanente, depuis au moins 1S67. ment des langues étrangères...
Il va sans dire qu'outre les difficultés qu'il y aurait à four- L.-G.
qui la parole, Nous tile, dans une autre question à l'ordre du jour, celle de la
ment, c'est la Chambre basse a avons
montré la: lourde aggravation le
que nouveau texte apportait, réforme agraire, chère aux extrémistes.
adopté mois de mai il ne s'agit Il s'agirait de partager les biens immobilers possédés;
au numems clausus au :
la Chambre Haute,
plus de limiter à 20 % l'activité du judaïsme hongrois dans par les juifs. La Chambre basse et surtout
les domaines le projet de discussion constitue composée d'aristocrates qui ont contracté de .fréquentes
tous : en cours; d'en-
démarquage, presque aussi restrictif, du statut d'indi-' alliances avec les riches familles israélites, manquent
un
gnité de Nuremberg.. thousiasme pour, une mesure aussi hasardée. Quelques-uns
Si les Israélites du royaume ne. sont «pas absolument s'y ralliaient comme à un dérivatif opportun, un vaccin
déchus de la nationalité hongroise, il. s'en, faut de bien peu, salutaire contre l'envie et la haine des classes déshéritées :
et leur disqualification n'est peut-être qu'une question de les autres, plus, clairvoyants, ne pensent pas de même : ils
temps. La loi les déclare « exclus de la collectivité nationale » considèrent la confiscation des biens juifs non comme une-
et les relègue dans une zone inférieure de l'Etat. L'accès diversion profitable, mais comme, un dangereux précédent.
des services publics leur est complètement interdit ; les pro- Après la spoliation des juifs viendra: le tour des chrétiens: :
fessions libérales sont ouvertes encore à un pourcentage comme la vue du sang excite la fureur du fauve, l'appétit
infime et chaque année décroissant jusqu'à l'exclusion totale. populaire s'aiguise en mangeant.
La loi étant fondée sur le principe racial —- le toura- Imredy a perçu l'imminence de la crise et a.jugé expé-
nisme se substitue ici à l'aryanisine, — le baptême ne dient de se dérober. Son successeur, Teleki, n'est pas moins-
rachète point la tare originelle, s'il est de date trop récente. antisémite, mais- il est plus conservateur : alors que le pre-
Est juif non seulement le pur-sang, mais le demi-sang. N'est mier ou sa police ne parvenait pas à découvrir les auteurs
reconnu chrétien, que celui dont les veines ne charrient pas de l'explosion meurtrière devant la Synagogue de Budapest,
plus d'un quart de sang sémite. Quelques exceptions sont le nouveau président les a fait arrêter, dans les vingt-quatre
admises pour les services militaires éclatants, les blessures heures qui ont suivi son accession au pouvoir-. De plus, il a
graves reçues sur le champ de bataille. Mais l'héroïsme lui- prononcé et réalisé, la dissolution: du parti naziste-, s'avé-
même ne protège que ses auteurs, non leur descendance. rant ainsi -moins docile à l'agitation raciste qu'aux sugges-
L'opposition, — ce. qui reste de l'ancien libéralisme hon- irions du nationalisme conservateur des Hungaristes. Ce ii'eot
grois, — et au premier rang le comte Bethlen, qui gouverna pas que l'Etat, magyar soit aujourd'hui en état de faire
la Hongrie pendant nombre d'années —, a eu beau montrer échec à la main-mise du Reich ; sa faiblesse économique lui
les vices d'une telle loi, grosse de contradictions,, de contre- interdit actuellement cette illusion ; mais il ne lui est pas-
vérités, de conséquences iniques et funestes, où le ridicule le impossible, par la, conjonction de sérieux efforts et d'une
dispute à l'odieux. Vains efforts Par cette loi, des prélats heureuse constellation diplomatique, sinon de s'en libérer
!
très élevés, dans la hiérarchie catholique, mais issus d'unions intégralement, du moins d'en desserrer l'étreinte. La colla-
;
mixtes, seront classés comme juifs ! Mieux encore : les des- boration de l'élément Israélite lui serait, dans cet ordre de-
cendants d'Israélites qui en 1848, sousKossuth, ont combattu, faits, d'un rendement, utile et fécond, si la passion anti-
A'ersé leur sang et sacrifié leur vie pour l'indépendance dé là juive consentait à désarmer.
Hongrie, seront rejetés hors Ja cité, hors l'Etat, hors la loi, i ,
Etrange époque où par la perversion des fausses idéolo-
alors que les petits-fils des Allemands qui à la suite de l'Au-
gies et des phraséologies creuses, tous les rôles sont inter-
trichien Bach, écrasèrent l'insurrection nationale, sont habi- vertis où contre les bas instincts, les viles convoitises des
;
lités aujourd'hui à devenir les, maîtres du pays et à régir masses ignorantes et fanatisées, où contre les appétits et les
ses destinées. haines de race camouflées en mystiques plus ou moins désin-
Protestations superflues, éloquence en pure perte ! téressées, la plus grande autorité dogmatique qui soit au
"
D'ores et déjà, la: cause est entendue Israël est condamné monde se dresse comme l'ultime défenseur des, libertés indi-
•.
d'avance. Néanmoins il n'est pas seul atteint ; celui qui a viduelles,, comme la sauvegarde ides élites et comme le
mené durement le mauvais combat, tombe à la veille du suprême: espoir des valeurs spirituelles qui font le prix de
triomphe. Il démissionne parce qu'il vient de faire une l'existence, à savoir, les droits de la conscience: et de la
découverte grave, propre à Je disqualifier à ses propres yeux personne humaine.
comme aux yeux de son parti. Il a repéré — un peu tardive- III
ment pour la vraisemblance — l'exactitude d'une accusation
qu'il avait jusqu'alors énergiquement démentie, à savoir que En Tcliëco-SIovaquie
dans son ascendance maternelle il compte un huitième de
sang-juif : il ne peut donc plus diriger la croisade sacrée, et Le peup3e qui fut ?....
son parti s'incline. Dans une des nouvelles; les. plus poignantes qu'il ait
(1), Ki-plmg a raconté l'histoire d'un officier anglais
L'opinion reste assez sceptique quant au prétendu motif écrites t
Crimée'
de cette retraite, plus ou. moins volontaire. De tout temps, porte disparu en 1854 après une bataille livrée en
l'aristocratie magyare s'est montrée trop fière de ses. origi- En réalité cet officier a été fait prisonnier par les Russes
1 rente ans après, par une suite de hasards extraordinaires"
nes pour en ignorer les moindres particularités, à plus forte il reparaît à Peschaver,
raison, une aussi importante. Deux hypothèses sont plausi- au mess du régiment où il était
bles : ou le président Imredy appréhendait de la part d'ad- lieutenant, en 1854. Ses camarades parviennent à l'identifier-
versaires politiques cette révélation, avec preuve à l'appui, mais il est mourant : ayant été. déporté en Sibérie oar
et a préféré prévenir l'attaque que la subir ; ou, ce qui le caprice barbare d'un colonel russe, il v a m«*
serait plus probable,, il a saisi un prétexte sensationnel pour trente années. Il peut à peine parler sa langue mater-
échapper à une crise qu'il sentait prochaine, par le fait nelle qu'il a oubliée. On découvre que son corps est zébré
d une opposition sourde d'abord, mais qu'il sentait grandir ï^\^mLU^^mm% J^HiSe
atr00es dGnt; il;
et menacer Sûre..dans la question juive,, la majorité, gou-
vernementale semblait prête à un prochain revirement hos- de iïiS0™* qUi ^ TïaÛm Par les Edifâ0^ du- Mercure
^PAIX ET DROIT
ont oblitéré sa mémoire et sa raison ; ce n'est plus un ter. Après tant de gages d'obéissance déjà concédés, Berlin
homme, mais une loque humaine : l'homme qui fui. en exige un autre, une législation antijuive, à l'image de
La nation tchèque, en proie à la brutalité raciste, celle de Nuremberg.
va-t-eUe devenir aussi « le peuple qui fut » ? Il est Le peuple tchèque, diminué, abandonné de tous, osera-
permis de se poser la question. Ce n'est pas assez pour t-il, pourra-t-il résister à la pression du Moloch qui domine,
le gouvernement nazi d'avoir arraché à la Tchéco-Slovaquie attendant qu'il la dévore, l'Europe centrale ? La férocité
en
ses plus riches provinces, de lui avoir pris sa frontière, de méthodique du Germain raciste aura-t-elle raison de l'opi-
l'avoir amputée du quart de sa population, de l'avoir spo- niâtreté proverbiale du Tchèque ? C'est le secret de demain.
liée de ses industries les plus florissantes ; il prétend, au
L'antisémitisme auquel la Bohème slave s'était jusqu'ici
mépris des plus solennels engagements, interdire de vivre
montrée réfractaire, commence à s'installer sur les rives de
une vie indépendante aux populations tchèques qu'il n'a la Moldau, avec les excès, les injustices et les hontes dont il
pas officiellement annexées. Après les avoir dépouillées ma- est coutumier : c'est une pierre de touche révélatrice de
tériellement, il veut leur voler leur âme. Les Tchèques s'enor"
gueillissaient d'avoir fondé un pays libre, démocrate, égali- la santé politique et morale, de la vitalité économique et
taire au point de vue politique, social et confessionnel. A cet financière des Etats. Puisse l'Etat tchèque sortir indemne
idéal le Reich oppose, le sien, le totalitarisme exclusif et la de l'épreuve et sauver l'âme nationale !
doctrine raciste. Prague se mettra au pas ou cessera d'exis- Alfred BERL.
Dans notre dernier article, nous annoncions que la «• loi partage des terres possédées par lesi juifs, premier pas vers-
juive ». après de laborieuses négociations, s'est trouvée sou- une réforme agraire contre laquelle ils s'élèveraient avec
mise à la Chambre Basse de Budapest. Un mois s'est passé énergie si elle devait être exécutée sur une vaste échelle.
depuis lors, les événements ont- marché, bien des. boulever- Tout se passe aujourd'hui comme si le chef du nouveau
sements; se sont; produits en Hongrie,, mais, la «. loi juive » gouvernement hongrois, qui appartient, ne l'oublions, pas à
à peu près* intacte, se trouve encore devant les Chambres, où la vieille aristocratie, avait compris à quelle puissance il ris-
elle fait, l'objet, d'âpres discussions.. quait de se heurter. Dans son premier discours devant lé
Le fait le plus, marquant de l'évolution de la politique Parlement, il a affirmé avec vigueur qu'il persévérerait dans
hongroise est la retentissante démission de M. Bêla Imredy, la politique de son prédécesseur- relativement à là.- « loi.
Président du Conseil, promoteur de la « loi juive ». Celui-ci, juive ». et à la réforme agraire. Mais alors qu'il y a. tout lieu;
au cours d'une réunion dramatique du parti gouvernemental, de croire que M. Teleki —qui fut, il y a dix-huit ans l'insti-
déclara aux députés du parti, le 15 février dernier, qu'ayant gateur du numerus ekwsus en Hongrie — se montrera effec-
découvert les origines juives de l'un de ses arrière-grands- tivement d'une grande fermeté: en ce: qui- concerne la « loi
pères maternels, et possédant par conséquent un huitième de juive », il est permis de se demander s'il usera, de la même
sang juif d'ans les veines, il ne se considérait plus comme fermeté pour ce qui est de la réforme agraire. N'a-t-il pas
moralement autorisé à présider aux destinées d'un gouver- ajouté en termes nuancés : « Il ne s'agit pas de partages ni
nement dont la tâche la plus urgente était la réglementation de distributions gratuites comme le prétendent certains, qui
de la question juive dans un esprit raciste. prouvent' ainsi, à fe fois, leur iaiconipréhension et leur incom-
On s'imagine la stupeur produite par cette déclaration. pétence », et qu' (( un vrai Hongrois ne saurait se laisser
Les députés du parti gouvernemental proclamèrent, qu'ils prendre à de telles formules » !
s'inclinaient devant la douloureuse décision prise par le Pré- Quoi qu'il en. soit, tous ces incidents ont démontré que la-
sident du Conseil et qu'ils rendaient hommage à ses scru- question juive;en Hongrie,, discutée au milieu' du débordement
pules. Le Cabinet présenta alors sa démission au Piègent, des passions, reste étroitement liée à d'autres problèmes et
qui- dénoua, rapidement la crise en appelant au pouvoir le fournit dans la lutte politique une monnaie d'échange et des
comte Paul Teleki. Celui-ci constitua sans,tarder son gouver- prétextes; commodes-.
nement avec les membres du Cabinet précédent, auxquels Cette constatation nous conduit tout droit au- second
vint s'ajouter M. Homan, au poste de ministre des Cultes, grand événement de la. politique hongroise, lié, lui. aussi, à
précédemment .détenu par le comte Teleki lui-même. la question juive : la dissolution du Parti- national-socialiste-
Mais aussitôt le nouveau cabinet formé, les commentai- des Croix Fléchées.
res allèrent leur train, à Rudapesl.. Les lointaines origines Au lendemain de l'attentat devant la synagogue clé Bu-
juntes de l'ancien Président du Conseil étaient-elles les seules
raisons de sa démission ? dapest, qui fit de nombreux blessés, dont certains sont encore
II se trouva des, observateurs pour souligner que les aujourd'hui entre la. vie et la mort, la police entreprit une
motifs du changement de cabinet pourraient être cherchés vaste enquête. Par une curieuse coïncidence, celle-ci aboutit
ailleurs. Depuis de nombreuses années,, en effet, en matière vingt-quatre heures après le .départ de M. Imredy. Les au-
de recherches généalogiques, les Hongrois ont mis presque teurs de l'attentat furent arrêtés et l'a police réussit à obte-
autant de zèle que les Allemands. Dans la vie politique sur- nir les preuves de ce que tout le monde savait déjà, à savoir
tout, il est pratiquement indispensable aujourd'hui de con- que cet acte de terrorisme avait été commis par des nazis
naître parfaitement ses aïeux. En ce qui concerne M. Imredy hongrois appartenant à une sous-organisation secrète : îë
lui-même, ses adversaires avaient lancé déjà à plusieurs re- « Front Noir ». Le gouvernement de M. Teleki découvrit alors
prises le bruit que ses origines n'étaient pas purement aryen- que le national-socialisme hongrois menait une politique
subversive, allant à rencontre de l'ordre établi, et interdit le
nes, allégations que le Président dû Conseil avait toujours parti. Après des perquisitions, effectuées en cent vingt-cinq
repoussées, avec un luxe de documents à l'appui, et tout
récemment encore, dans un grand discours. On peut clone locaux rien qu'à Budapest, les quarante-sept chefs subalter^
s'étonner que M. Imredy n'ait découvert ce malencontreux nés du mouvement furent arrêtés.
aïeul que ces jours derniers. Cette fois-ci encore, la même question se pose : l'inter^
Ces mêmes observations mettent en lumière le fait, assez diction du parti nazi a-t-elle été réellement provoquée parla
peu connu à l'étranger, que, depuis quelques semaines, M. participation active de ses membres à l'attentat ou bien oarce
Imredy se heurtait à. une opposition d'abord sourde, puis de que les troupes « hungarisles » exigeaient des solutions"qua-
plus en plus énergique, de la part des membres de la Chambre ' lifiées d'extrémistes par le gouvernement, non seulement
Haute. Ceux-ci avaient même mis le cabinet en minorité, sur clans la question juive, mais aussi dans d'autres domaines
une question d'importance secondaire (tes cumuls d'emploi), de la vie politique ? On peut d'autant plus se le demander
huit jours avant le COUD de théâtre du 15 février. que, pour ce qui est de la question juive, les divergences
La raison de cette attitude d^dpposition aurait découlé entre les nazis et le gouvernement Teleki ne sont pas fonda-
du fait que M. Imredy, poussé par lès extrémistes, se moll- mentales puisque le gouvernemnt prend à son compte une
irait de plus en plus 'partisan d'une réforme agraire assez grande partie des revendications nazies dans le but paraît-
étendue qui ne pouvait évidemment soulever l'enthousiasme —
il — de diminuer la force d'attraction de ce mouvement.
des aristocrates et des grands propriétaires fonciers qui siè- Nous, en arrivons ainsi aux avatars subis par la
« loi
gent à la Chambre Haute et ont. par ailleurs, de nombreux juive » au cours du dernier mois. Pendant les débats à la
représentants à la. Chambre Basse. Ceux-ci auraient accepté, Commission Plémère de la, Chambre qui. eurent lieu sous le
à la rigueur, la loi juive élaborée par le gouvernement, sans gouvernement Imredy, la question fut traitée à fond et fit
plaisir d'ailleurs,, étant donné qu'ils sont fréquemment alliés 1 "objet de nombreuses, interventions pathétiques. L'une.des
à de grandes familles juives du pays. Mais ils considéraient mspositions de la loi. provoqua notamment l'indignation du
avec méfiance les perspectives qu'allait ouvrir cette loi au .judaïsme nongrois : celle- qui allait obliger les Israélites du
PAIX ET DROIT:
pays à voter désormais sur une liste spéciale où électeurs et nir ces preuves formelles de résidence, le gouvernement,
élus seraient exclusivement juifs. dernier juge en la matière, aurait toujours feeau jeu de ré-
Aprement combattu par l'opposition, le gouvernement cuser les candidats-électeurs qui lui déi^Jairaient.
décida enfin d'apporter certaines modifications à la loi, Cependant, Je projet de loi passa tel quel devant la
notamment en ce qui concernait la situation des « demi- commission piénière de la Chambre ; le gouvernement Teleki
sang », certaines*catégories de mutilés de guerre, les conseil- le reprit à son compte, et à l'heure où nous écrivons, la dis-
lers privés de la couronne et les professeurs à l'Université cussion bat son plein à la Chambre Basse. L'opposition
•d'origine juive. Cependant, tous ces adoucissements ne chan- compte présenter un certain nombre de modifications, mais
geaient rien à l'esprit raciste de la loi, et ne visaient qu'un il est douteux qu'elle puisse faire prévaloir son avis sur les
nombre d'individus assez restreint. Les juifs conseillers pri- points importants.
vés du gouvernement sont très peu nombreux, et ont chère- En attendant, la détresse du judaïsme hongrois -aug-
ment acheté leur titre ; quant aux professeurs d'Université mente sans cesse. Les suicides deviennent fréquents, et on
d'origine juive, ils ne sont que quatorze. lit de plus en plus souvent dans les rubriques nécrologiques
Sur un seul point, le gouvernement a admis l'argumen- des quotidiens cette formule éloquente : « décédé subite-
tation de l'opposition en renonçant à la liste juive., mais ce ment )). En janvier dernier, le nombre des suicides à Buda-
ne fut pas pour améliorer cette disposition, loin de là, et les pest fut double de celui de l'année dernière pour le même
israélites hongrois qui, à l'annonce de cette nouvelle, mois. Devant les consulats étrangers stationnent de longues
s'étaient d'abord réjouis, durent ensuite déchanter. En effet, files d'infortunés qui, menacés de perdre tous moyens d'exis-
selon l'amendement gouvernemental, les juifs pouvaient voter tence par la « loi juive », sont contraints d'émigrer.
sur n'importe quelle liste, comme tout autre citoyen,, mais Et, indice moins frappant peut-être mais tout aussi si-
seuls avaient droit de vote ceux qui pouvaient prouver que gnificatif, certains journaux ont renoncé à publier leur feuil-
leurs parents, tant du côté maternel que paternel, vivaient leton quotidien pour consacrer cet emplacement à renseigne-
-en Hongrie, de façon permanente, depuis au moins 1867. ment des langues étrangères...
Il va sans dire qu'outre les difficultés qu'il y aurait à four- L.-6.
par les juifs et d'en créer de nouvelles. De nombreux preneurs juifs au dehors. Il serait prématuré toutefois de
succès sont à inscrire à l'actif de ces Comités; des centaines trop compter sur cet appui, car il est toujours à redouter
de petits commerçants juifs ont été sauvés grâce à l'octroi que l'hystérie antijuive dont sont saisis les dirigeants polo-
de prêts. En effet, l'Administration municipale, espérant nais ne paralyse ce projet. Quoi qu'il en soit, cette défense
que, par manque de moyens, ils ne pourraient y donner dans le domaine économique constitue actuellement la seule
suite, leur avait ordonné de restaurer leur boutique sous arme efficace. Le judaïsme polonais ne se laissera pas briser
peine d'interdiction de continuer leur commerce. Des économiquement par la propagande antisémite, pas plus
centaines d'ateliers juifs ont été remis sur pied grâce à qu'il ne donnera suite au mot d'ordre d'une émigration for-
l'achat d'outils et de machines plus modernes. Des centaines cée. Voilà l'expérience de ce dernier mois. Puissent les anti-
de chômeurs juifs ont pu trouver des emplois dans de nou- sémites, qu'ils se nomment nationaux-démocrates ou adhé-
velles professions. Des milliers. d'ouvriers juifs ont reçu rents du parti gouvernemental, en tirer la leçon. Il y va
une préparation professionnelle grâce à laquelle ils ont pu non seulement de l'intérêt des juifs, mais encore, mais sur-
être employés dans les entreprises industrielles. Nous pour- tout, de l'intérêt supérieur du pays.
rions citer de nombreux exemples, mais ceux-là suffisent
Dr A. T.
EN ROUMANIE
Les échos du discours du chancelier Hitler
Dans l'avant-dernier numéro de ce périodique, nous Donc pour ne pas demeurer en reste, la presse
avions montré que, si plusieurs extrémistes de droite roumaine a frénétiquement applaudi, aux chefs d'accusation
étaient revenus à résipiscence, divers autres éléments per- de l'interminable harangue hitlérienne du 30 janvier. C'est,
turbateurs n'entendaient pas désarmer; que, par consé- d'ailleurs, dans le mode habituel de cette presse de consi-
quent, si certains affiliés à la Garde de fer se rendaient, dérer comme vérité première tout ce qui se dit contre
il ne fallait pas en inférer que cette dangereuse association la race sémitique, abhorrée dans le pays totalitaire aryen
fût d'ores et déjà liquidée. Elle vient, .une fois de plus, de pris comme modèle. Cependant, en Roumanie, combien peu
faire parler d'elle, et, ce qui est plus grave, c'est que des d'importance présentent le judaïsme et ses supposés malé-
.officiers de 'l'armée seraient venus renforcer son action fices en comparaison avec l'insatiable appétit de domination
en participant à un complot contre le Palais et la personne de l'Allemagne et les proportions inquiétantes que prennent
de confiance du souverain, M. Caiinesco, vice-président du à cette heure ses manoeuvres d'expansion vers le Sud-Est
Conseil. Cela n'est pas sans donner du travail aux autorités des Carpathes ! A presque tous les sujets du roi Carol,
policières, et des condamnations, allant jusqu'aux travaux Je préjugé et l'aveuglement antijuifs font perdre de vue la
forcés à perpétuité, sont journellement prononcées par les « hargne dévastatrice de l'autocratie germanique », ainsi
tribunaux militaires. que vient de s'exprimer le président Roosevelt. N'est-il pas
de toute évidence que, pas plus tard que demain, Hitler
C'est au milieu de cette effervescence des esprits se placera aux côtés de la Hongrie et appuiera ses revendi-
qu'éclata, de surcroît, Ja harangue hitlérienne devant Je cations révisionnistes ? C'est pour la Roumanie, on en
Reichstag. De ce discours, désormais historique à plusieurs conviendra, un danger national autrement plus immédiat
égards, l'opinion et la presse roumaines ont enregistré avec et plus grave que le prétendu péril juif. C'est 'cependant
complaisance et souligné avec une égale intensité deux l'ennemi européen n" 1, dénoncé dans le réquisitoire
passages : l'un relatif aux territoires hongrois perdus après empreint de. mauvaise foi et plein d'illogismes du chancelier
la défaite des puissances centrales et cédés, à la Roumanie; Hitler, qui a eu le don de retenir l'attention de la presse
l'autre, concernant les violentes accusations lancées contre .roumaine et l'a fascinée. Elle s'est empressée de propager
le judaïsme. dans les quatre coins du pays les vitupérations du chef
nazlste et son leitmotiv que les juifs sont porteurs de toutes
Il n'est pas autrement étonnant que, dans un pays sortes de germes infectieux et contagieux, qu'ils poussent
comme la Roumanie où l'antisémitisme est de bon ton et à la guerre pour satisfaire leur désir de vengeance et asseoir
pu (la France juive, de Drumont, 'constitue le livre de jeur domination sur les ruines de l'Europe, etc., etc. Ces
jchevet, le credo des sphères intellectuelles, voire de la allégations mensongères, ces imputations baroques, engen-
classe moyenne, l'approbation qu'ont trouvée les doctrines drées par le cerveau halluciné du dictateur, ont été analy-
racistes, la violence de langage, les railleries et les vitupé- sées, commentées, amplifiées par la plupart des feuilles de
rations spectaculaires du maître du III 0 Reich soit la capitale et de la province qui ont conclu que le père du
unanime. N'est-ce pas avec le même délire d'enthousiasme racisme a dit vrai et que c'est à juste raison qu'il sévit
qu'avait été accueilli, il y a un an, le programme ministériel contre le peuple parasite, pour qui, assure un publiciste
de feu Goga, dans lequel on a pu lire, entre autres, que roumain, « la guerre est une route qui conduit à l'abîme
« l'idée nationale domine tous les coeurs au
cri de : « La et ce sentiment domine dans l'esprit de tous les israé-
que
<(
Roumanie aux Roumains ! » ; que le devoir sacré de la lites du monde » (1). Citons encore ce passage du journal
nation est d'imprimer le sceau de la domination ethnique Porunca Vremii du 1er février : « Hier soir, le Fùhrer-chan-
dans tous les domaines de la vie ; que le gouvernement celier a prononcé devant le Reichstag, dans une atmosphère
réalisera la revision des droits obtenus par les éléments de délire, un discours qui fera époque. Ce discours est le
sémites qui ont envahi le pays au nombre de plusieurs plus magnifique que l'Europe ait entendu depuis plusieurs
centaines de milliers et y demeurent incrustés par désir années. Etincelant par l'esprit, impressionnant par la forme
de profit, de corruption et de fraude... » Comment les visionnaire, l'exposé de M. Hitler est superbe de courage.
adversaires roumains du judaïsme n'applaudiraient-ils pas Lavant le régime du Reich de toutes les infâmes accusations
aux allégations et aux sarcasmes de l'idole de Berchstes- que la diabolique .clique judaïco-internationale lui jette à la
gaden ? Aussi, la plupart des journaux consacrèrent-ils de .tête, l'orateur a réaffirmé qu'il se sent fier d'avoir été le
longues colonnes à excuser le « génial raciste », souli- promoteur de l'ère qui marquera la délivrance de l'Europe
gnant surtout sa prophétie selon laquelle la future guerre de la domination juive. C'est la plus impressionnante
mondiale que les juifs provoqueront aboutira à leur dispa- confession qui ait été faite depuis vingt ans. Le Fùhrer
rition de tout le continent européen. allemand commence à être compris même de ses adversaires
C'est peine inutile que d'essayer d'expliquer que les et, aussi, à être considéré comme la figure la plus gran-
israélites de Roumanie (comme aussi leurs coreligionnaires diose, comme la personnalité la plus marquante des temps
de la Pologne voisine) sont les derniers à envisager, encore modernes. »
moins à souhaiter ou à provoquer un conflit armé entre les
peuples, assurés d'avance qu'ils en seraient inévitablement En Roumanie, comme on le voit, antisémistime et
Jes premiers sacrifiés et les victimes certaines. Chacun peut nazisme sont cousins-germains, pour ne pas dire frères
constater que leur bellicisme ne va pas au delà de la bataille siamois. Leur parenté, leur convergence, leur affinité et
quotidienne à laquelle ils sont réduits à se livrer pour le leur synchronisme se complètent et s'harmonisent à l'envi.
morceau de pain qui leur est marchandé ou mesuré. Tous ISAS.
ces opprimés du sort on la claire vision que, si une guerre
.venait à surgir, ce sont eux qui en feraient les frais. C'est précédent numéro de Paix et Droit, a
pourquoi on peut affirmer seul juif de Roumanie (1) Le leader-article du
que pas un magistralement fait justice de l'absurdité et de l'illogisme de
ne pense sans angoisse et épouvante à une conflagration. cette affirmation gratuite.
PAIX ET DROIT:
L'élimination des juifs de tous les domaines de la vie dons avant l'expiration,des délais ci -dessus, à condition que
italienne, politique, sociale et professionnelle, sera sans le donataire ne soit pas de « race juive ».
doute complétée avant la fin du semestre en cours. Le boycot- .
'ments locaux de <c Gardes de Gajda », organisation fasciste tion pour les avocats juifs qui se sont déclarés comme étant
paramilitaire-, assistés dé formations d'assaut allemandes, de nationalité juive de représenter des clients juifs; 3° exclu-
sèment la panique parmi la population juive. Les passants sion définitive de tous les avocats juifs qui ont déclaré
sont molestés, les vitres des magasins juifs brisées, les appartenir à la « nation allemande ».
consommateurs juifs chassés de cafés et restaurants; non- 562 médecins juifs employés au service des assurances
juifs. sociales ont été congédiés. Les médecins juifs employés dans
Sans: qu'il y ait une- législation -antijuive à proprement les: services de santé de l'Etat slovaque ont tous reçu avis
parler,, on a déjà pris des- mesures très graA'es, qui excluent qu'ils seront licenciés à partir du tor mars.
progressivement les juifs- de l'activité- nationale-. Le mouvement d'épuration s'est étendu aussi à l'armée.
Le gouvernement, tchécoslovaque a promulgué deux ' Les,, officiers juifs ont. été invités à présenter leur demande
décrets d'une extrême importance qui intéressent plus spé- dé- mise; en disponibilité. Us auront toutefois droit à la
eiailenient les juifs naturalisés ou réfugiés. Le premier prévoit retraite réglementaire. La mise en, disponibilité d'officiers
une revision des naturalisations. Il s'applique, à tous ceux juifs dans les cadres de l'état-major général a été opérée
qui ont acquis la nationalité tchécoslovaque depuis le d'office.
lor novembre 1918; à tous ceux qui, après le 1°' janvier 4938, Les; rares professeurs juifs des écoles supérieures tchè-
avaient leur domicile dans lés régions cédées à des puis- ques ont été mis à la retraite.
sances étrangères après le 30 septembre 1938; à tous ceux Epuration également dans l'industrie du film. Les pro-
qui avaient acquis la nationalité tchécoslovaque par voie priétaires de cinémas n'acceptent plus de films produits par
(Je mariage après le lior novembre 1918. Le deuxième décret des maisons juives ou sous une direction juive. En consé-
porte spécialement sur le statut des réfugiés qu'il qualifie quence., les cinéastes juifs se voient refuser les engagements
cl' <( émigrants ». Un «; émigrant » est une personne n'ayant et, assez souvent, lès anciens contrats sont rompus, les
pas la qualité de citoyen tchécoslovaque et qui n'est ni maisons productrices préférant payer des dédits élevés
Tchèque, ni Slovaque ou Carpatho-Russe, qui ne peut pas plutôt que. de voir fermer à leur production les portes de la
-rentrer dans son pays natal et qui est sur le territoire tchéco- plupart des cinémas tchèques. Un « Office du film aryen »
slovaque. Les personnes ainsi déterminées doivent quitter vient d'être créé, à Prague pour veiller à « l'aryanisation »
la Tchécoslovaquie, sur la demande des autorités, dans un de la production cinématographique tchèque.
délai de six mois à un an. Ces deux décrets intéressent quel- A Bratislava, l'Union des artisans a décidé d'exclure
que 10.000 juifs qui avaient acquis la nationalité tchéco- tous- ses membres d'origine juive.
Le 7 février s'est ouverte à Londres, au Patois Saint- l'intérêt de tous, l'injustice doit être .réparée sans perdre davan-
Mmes, la conférence de: la « Table Bonde » qui doit décider tage de temps. Ils revendiquent, par conséquent :
1° La, reconnaissance du droit des Arabes à l'indépendance
de- la politique future à suivre en P'alsesiine. A cette confé- complète dans leur pays ;. 2° L'abandon de la tentative d'établir
rence prennent part.-une délégation britannique, une délé- un Foyer national juif » en Palestine ; 3° l'abrogation du man-
ce
gation arabe/ et une délégation juive : dat et des illégalités qui en résultent, et son remplacement par
un traité similaire à- celui- conclu entre la Grande-Bretagne et
Thèse arabe : (d'après' le- résumé officiel rédigé par la bureau l'Irak,, créant en Palestine un Etat arabe souverain ; 4° la cessa-
de la Conférence : tion, immédiate de- toute immigration juive et de toule v-enie de
La-thèse arabe se base sur le fait que la politique poursuivie terre aux juifs.
jusqu'ici en. Palestine constitue une grave injustice envers le Les Arabes sont disposés a négocier, dans un esprit conci-
peuple arabe, et que, tant que cette injustice n'aura pas été dûment liant sur les conditions dans lesquelles: les raisonnables intérêts
redressée,, il ne peut y avoir de paix en Terre sainte. La- thèse britanniques devront être sauvegardés ; à- approuve.]- les garan-
arabe contre la politique poursuivie jusqu'ici s'appuie en premier ties nécessaires pour la protection et le droit d'accès- h. tous, les
lieu sur le fait que l'indépendance., aurait été promise à maintes Lieux Saints ainsi que pour la protection des droits légitimes des
reprises au cours de la. guerre et qu'au lieu cle l'accorder on a minorités juives et autres en Palestine.
placé la Palestine sous une administration irresponsable et Thèse juive.
bureaucratique dans laquelle l'influence sioniste est.prédominante.
Secondement:, on a admis un nombre considérable 'd'immigrants Les représentants juifs reconnaissent pleinement, les difficul-
juifs étrangers par leur langue, leurs moeurs, leur morale, et leur tés auxquelles doit faire face le gouvernement de Sa Majesté et
aspect, dans une mesure telle, que les Arabes furent frustrés d;e sont bien désireux de l'aider. 31 y a toutefois pour eux des intérêts
nombreuses perspectives dans le commerce, les professions libé- vitaux a sauvegarder et des droits, auxquels ils ne peuvent renon-
rales et d'autres domaines. Troisièmement, sous la pression' sio- cer à cette heure, la plus sombre cle l'histoire juive.
niste, une législation arbitraire-fut instituée en vue-de faciliter La déclaration Balfour a reconnu les liens historiques qui
l'acquisition de terres par les juifs sans, réserves adéquates pour relient l'es juifs avec la Palestine cl clans le préambule du Mandat
la protection de la paysannerie contre la dépossession et l'éviction. la reconnaissance de ces liens et tes raisons de la reconstitution
' Les Arabes ont encore d'autres griefs'et estiment que dans 1 du foyer national a reçu une consécration internationale
10 PAIX ET DROIT
les juifs ont accompli grâce à ce qu'on a condescendu à leur
La Commission royale avait constaté et reconnu que le gou-
vernement de Sa Majesté, en publiant la déclaration Balfour, accorder. Do vastes territoires arabes sont déserts aujourd'hui
invite puissants et aux sans scrupules.
avait en vue la constitution ultérieure d'un Etat juif en Pales- — comme une aux'
tine. Cette importante déclaration excluait toute réduction des Les Arabes proclament que la Palestine est un pays arabe et
juifs à la situation d'une minorité. doit avoir un gouvernement national arabe. C'est là une revendi-
Il es inconcevable qu'après vingt ans le gouvernement bri- cation qu'on ne peut satisfaire. Les juifs forment déjà un tiers
tannique puisse vouloir chercher une nouvelle interprétation du de la population et portent le fardeau des deux tiers ou plus de
Mandat qui affecterait ces droits fondamentaux des juifs. Un tel l'activité économique et culturelle de la Palestine. Les Arabes
abandon d'une position morale ébranlerait l'Empire britannique déclarent craindre la domination juive. Les juifs ne désirent pas
jusque dans ses fondements, car cet empire est basé sur les liens avoir les Arabes sous leur domination, mais ne leur permettront
purement, moraux de la confiance mutuelle et de la foi aux pro- pas de les dominer. Les juifs ne veulent pas s'exposer au sort
messes données. des Assyriens en Irak.
La commission Woodhead a écarté ensuite les conclusions La délégation juive est profondément et sincèrement per-
principales de la commission Peel, l'idée d'un Etat juif fut aban- suadée que les juifs et les Arabes peuvent trouver un terrain
donnée et ce n'est que la restriction de l'immigration juive à un d'entente dont ils bénéficieraient tous deux. Mais ceci ne peut être
u maximum politique »
qui fut maintenue. A un moment où une le cas que sur la base du Mandat, appliqué selon la lettre et selon
détresse indicible frappe les juifs de l'Europe centrale et où la l'esprit ; une immigration juive de grande envergure conformé-
tragédie juive s'étend ailleurs encore, les portes du Foyer Natio- ment au principe de la capacité d'absorption économique ; une
nal juif furent presque entièrement fermées. On n'y laissa même politique de développement actif et des sauvegardes effectives
pas entrer des enfants et des vieillards fuyant l'enfer de l'Allema- contre le statut de minorité.
gne. En fait, la destinée de 6.000.000 de personnes était en jeu. La
plupart d'entre eux devait partir et personne ne savait leur dire Le plan britannique.
où ils devaient aller.
En ce qui concerne les relations arabo-juives, les juifs ont Chacune des deux délégations étant restée sur ses positions,
depuis toujours désiré une bonne entente entre les deux peuples la puissance mandataire leur a soumis son plan qui. est de nature
et se sont efforcés de l'amener. Il est parfaitement vrai que la à donner satisfaction aux Arabes dans une large mesure.
Palestine est un lieu saint pour les Arabes. Mais elle n'a jamais
été un centre national arabe comme l'est Damas. Une conférence judéo-arabe serait convoquée en automne
Au sujet des prétendues et promesses contradictoires » faites pour élaborer la Constitution de cet Etat. Seuls les juifs habitant
aux juifs et aux Arabes, le Gouvernement de Sa Majesté a confir- la Palestine seraient admis à se faire représenter à cette confé-
mé à maintes reprises qu'aucun conflit de ce genre n'existe en ce rence. Le gouvernement britannique continuerait à assurer le
qui concerne la Palestine occidentale, Sir Henry Mac Manon l'a gouvrnement du pays, en attendant que celui-ci devienne tout à
établi et le colonel T. E. Lawrence a relevé que le règlement de fait indépendant. La proportion des juifs et des Arabes dans
M. Churchill de 1921-1922 a accompli toutes les promesses britan- l'administration de cet Etat serait de deux contre cinq. Pendant
niques à l'égard des Arabes « selon la lettre et selon l'esprit ». toute la période de transition l'immigration, juive serait limitée et
Là où il pourrait y avoir eu des promesses contradictoires — en les ventes de terres aux juifs réduites au minimum.
Transj ordanie — ce conflit a été résolu à cent pour cent en faveur
des Arabes. La délégation juive a repoussé les propositions britan-
Les Arabes se sont trouvés, après la guerre en possession de niques comme n'offrant aucune base de négociations. La
quatre royaumes. Us ont acquis aisément un statut national délégation arabe a fait de même en déclarant qu'elles ne
indépendant, en grande partie grâce au sang et aux efforts britan-
niques. De plus^comme la Commission Royale l'a remarqué, la donnaient pas entière satisfaction aux aspirations arabes.
Déclaration Balfour a contribué à la libération des Arabes dans Voilà où en sont actuellement les travaux de la Confé-
une mesure non moindre qu'à la victoire des Alliés. Il n'est pas
déplacé de comparer ce que les Arabes ont su tirer des avantages rence. Dans ces conditions, la continuation des négociations
extraordinaires dont ils ont bénéficié sans grand'peine et ce que semble peu probable.
DANS LA PRESSE
Drames du racisme en Italie 11s'agit de la famille Ascoli, dont la presse italienne
La qualité de certaines victimes des lois racistes fait a fait pendant des générations, l'éloge jusqu'aux derniers
ressortir de façon particulièrement aiguë la bassesse de décrets racistes. Le professeur Ascoli, fondateur de plus
}a politique anlijuive. Inhumaines et lâches quand elles de trente Sanatorium, une des sommités médicales de la
s'en prennent à la collectivité juive, les lois racistes devien- péninsule est soudainement obligé de se démettre de ses
hautes fonctions.
nent révoltantes et infâmes quand elles s'appliquent à des L'Amiral Ascoli, pourvu d'un haut commandement
hommes qui ont donné le meilleur de lewr être à la patrie, dans la flotte italienne, a été également, en raison de ses
qui n'ont vécu que pour elle. Beaucoup ne peuvent survivre origines sémitiques, déchu de ses grades et fonctions.
à l'outrage fait à leur honneur et à leur conscience. Les Enfin, plus pathétique que tout est l'épisode suivant
cas de suicide de personnalités israélites des plus éminentes que tous les Florentins se rapportent avec une émotion et
sont fréquents. Souvent ils sont pathétiques. On se rappelle des commentaires faciles à imaginer.
celui de M. Formiggini, « la figure la plus représentative Le Commandant Ascoli commandait le bataillon d'un
de l'édition en Italie », qui, avant de se donner la mort, régiment d'infanterie à Florence. Pour les mêmes raisons,
avait préparé lui-même le [aire-part de son décès qui était il fut prié de quitter l'armée. On l'autorisa cependant à
ainsi conçu : « A.-F. Formiggini, maître éditeur, quitte cette réunir son bataillon dans la cour du quartier pour prendre
congé.
terre, laissant l'impérissable souvenir d'un esprit libre, Le malheureux, avec une émotion difficilement con-
profondément italien, entièrement consacré à la culture tenue, s'exprima à peu près en ces termes :
nationale. « Mes amis, mes frères d'armes,
La Tunisie Française rapporte le cas du commandant « Pour la dernière fois, je vais « obéir ».
Ascoli dans les termes suivants : « Un ordre de l'autorité supérieure exige mon départ
de l'Armée à laquelle j'ai donné spontanément ma vie tout
On mande de Florence, de source très autorisée, que entière. Aujourd'hui j'adresse un ultime adieu au drapeau
la population de la célèbre ville italienne est profondément que toujours j'ai fidèlement servi. Souvent mon sans a
émue par une des plus récentes conséquences du racisme coulé. 8
fasciste. Une des plus anciennes, une clés plus honorables « Partout, j'ai clamé ma foi en une Italie plus grande,
familles israélites de Florence se trouve brusquement plus noble, plus belle à vivre. '
atteinte en la personne de plusieurs de ses membres qui « Combien, parmi vous ont marché à mes côtés, dans
comptaient parmi les plus hautes personnalités italiennes. des campagnes récentes, où bien des nôtres ont pavé cle
PAIX ET DROIT; 11
leur existence la conquête de l'Empire italien et fasciste. la science. E'n Allemagne même, sur vingt-cinq lauréats du
Avec eux, j'ai vécu, des heures atroces-, mais combien exal- prix Nobel, huit étaient israélites.
tantes sous les; plis du; tricolore que pour la dernière l'ois, ...Enfin, la persécution contre les juifs, que l'hitlérisme
je contemple aujourd'hui. Mon bataillon, le vôtre, est trop a remise en vigueur, constitue une bien dangereuse régres-
chargé de gloire pour qu'il soit possible d'en ajouter en- sion de la civilisation. Il n'est pas admissible qu'une caté-
core. gorie de citoyens, sans avoir commis aucun délit, puisse
« Le coeur brisé, mes camarades, je vous invite à=
être rejetée du corps social par la décision souveraine d'un
tourner vos regards vers vos glorieux étendards et à. vous gouvernement ou d'un parti pour l'instant omnipotent.
recueillir en adressant un hommage de reconnaissance et C'est là une rupture du contrat qui- lie lés individus à ta
d'amour à ceux qui ont eu la grâce de mourir en com- société. Les efforts du progrès ont toujours tendu, depuis
battant. l'avènement du christianisme,, à sauvegrder l'indépendance
« Soldat avant tout, je m'incline devant la
décision morale et spirituelle des individus à l'égard de l'Etat. Si
prise par mes; chefs qui"ont. décidé mon départ. Je vous
demande — ce sera- le dernier ordre de votre Commandant on les écarte de cette voie-, on ouvre la porte à tous les
abus de pouvoir, qu'il a fallu près de deux millénaires pour
— de mourir à l'appel de la Patrie, jusqu'au dernier, en
éliminer, de la vie du monde. Autant que les individus", les
braves, en héros, comme j'aurais tant aimé le l'aire moi-
même. collectivités, de quelque nature qu'elles soient, sont inté-
« Adieu mes amis, Adieu ».
ressées à ce que ne s'instaure pas un régime d'arbitraire,
L'émotion était générale. Le -Commandant Ascoli em- dont elles risquent, elles aussi, de devenir un jour les
brassa le drapeau du régiment, s'enveloppa le visage clans victimes.
le tissu sacré et se tira un coup de revolver dans la tempe. Racisme et christianisme
Il va sans dire que les autorités fascistes firent tout Du Figaro, 9 février, « Racisme ei Christianisme »,
pour étouffer l'affaire. Mais on empêchera difficilement par M. Georges Goyau, de l'Académie française :
cinq cents témoins d'une scène aussi tragique de la répé- ...Ce qui apparaît en péril,, h l'heure présente, c'est la notion
ter, et Florence ne se prive pas de juger à leur valeur les (Uni droit qui participe en quelque mesure de l'absolu, qui par-
inhumaines, les cruelles mesures racistes. ticipe en quelque mesure de l'éternel, d'un droit effectivement
Le drame juif d'après RI. Robert de Beauplan
antérieur et supérieur aux volontés éphémères des individus
lussent-ils dictateurs. '
dans la « Petite Illustration » Pour la défense d'une telle notion, pour son affirmation sou-
La Petite Illustration a publié (4 février) un numéro veraine en lace des exagérations racistes, voici se dresser
consacré au « Drame juif ». Cette élude constitue un parallèlement, la foi romaine el, l'esprit, français ; et ces deux
-forces s unissent, se coalisent, s'enlr'aidenl, "L'homme a des
sommaire de l'histoire du destin des juifs depuis leur droits, proclame la philosophie chrétienne ; il a le droit spécia-
dispersion jusqu'aux événements les plus récents, en. parti- lement d'être placé dans des conditions propices à l'accomplis-
culier les persécutions racistes des juifs en Allemagne, en sement de son devoir, cle tous ses devoirs. Et la philosophie, du
Italie ei en Hongrie-. Il convient- de rendre hommage à cix-lmitiems siècle, malheureusement plus indifférente a l'idée
l'objectivité parfaite avec laquelle son auteur, M. Robert de devoir, redit à son tour : « L'homme a des droits 11 n'en
» —
a qu en tant que coule dans ses veines un sang allemand, riposie
de Beauplan, a traité le problème juif. la doctrine hitlérienne, car. il n'existe d'autres droiLs que ceux
Nous reproduisons quelques passages de sa conclu- de la l'ace.
sion : H, f°rmule- Peui-6li'e. vous parait flatteuse pour l'orgueil
„
collectif du peuple germanique : mais creusez-la. vous ne tar-
derez pas à constater que ces droits de la race.' c'est dans la
...L'antisémitisme ne saurait trouver sa justification volonté
clans le racisme, c'est-à-dire dans idéologie qui du Fûhrer qu'ils se condensent, et qu'en définitive ils
que une s identifient avec son caprice individuel de dictateur. » Le droit
pose en principe la possibilité de sauvegarder l'intégrité: liait du Fûhrer. Source du droit : les ordres du Fûhrer même
des races et d'assurer leur hiérarchie. Or, le racisme n'est lorsqu'ils ne revêtent pas la forme d'une loi. » C'est dans un
installé que dans un petit nombre d'Etats et il est en contra- livre de Lucien Valdor : Le Chrétien devant, le racisme que je
celte curieuse citation nazisle. Et en voici une' autre •
diction avec les idées qui, depuis la Révolution française; cueille
« La parole du Fûhrer et celle de son entourage immédiat valent
inspirent la. plupart des sociétés modernes. L'antisémitisme actuellement plus que tout droit acquis et légalement défini.
apparaît ainsi comme une expression particulière cle l'anta- Le maréchal Goering, en personne, a expressément déclaré »:
gonisme qui oppose, sur bien d'autres points encore, les « Le droit et la volonté du Fûhrer sont une même chose »
régimes totalitaires et les démocraties ; il arrive aussi droitLelaracisme, ainsi appliqué, substitue à la souveraineté du
prépondérance de l'arbitraire.
qu'en certains endroits, comme en Afrique du Nord et en utile au peuple allemand, tout ce qui lui estJustice <c
est ce qui est
nuisible est injuste. »
Alsace, il soit exploité par la propagande hitlérienne, à Et de môme que la fantaisie d'un homme devient la cause effi-
J'insu même de ceux qui le professent, à des fins politiques ciente du <t droit », cle même l'intérêt racial, et lui seul, en est
cle dissociation. la. cause finale. Car « le but essentiel de l'éducation. ' précise
l'une des propositions racistes condamnées par le Vatican, est
...Si les juifs paraissent occuper parfois une place hors d'enflammer les esprits d'un amour brillant de leur propre 'race
de proportion avec leur importance numérique, ils. ne comme du bien suprême. »
doivent pas leur situation à la faveur, mais à leur intelli- En fait, c'est au sujet du bien suprême qu'entre la pensée
gence, à leur activité et à leur faculté d'adaptation. Gela germanique, d'une part, la pensée ch.rélienne cl française.
peut émouvoir, chez les non-juifs, le légitime sentiment de d'autre pari:, le conflit s'exacerbe ; et ce conflit date de loim
...A rencontre du racisme, les deux Testaments. l'Ancien c,1
la concurrence vitale,, mais non justifier une hostilité le Nouveau, s,e retrouvent en un lumineux accord, pour souligner
systématique. la portée universelle du message révélé et l'authentique carac-
...Il faut aussi tenir compte au judaïsme de la contri- tère d'un tel message, émanation d'un Dieu extérieur à l'huma-
nité et supérieur à toutes les races qui la composent, môme à
bution qu'il a toujours apportée à 'la culture universelle, cette
race germanique qui volontiers se flatlerait d'incarner en
(clans la philosophie, la musique, la littérature, la médecine, son propre avenir les prérogatives du devenir » divin.
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