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CHRONIQUE
DE L’ARCHÉOLOGIE WALLONNE
CHRONIQUE DE L'ARCHÉOLOGIE WALLONNE
La revue annuelle CHRONIQUE DE L'ARCHÉOLOGIE WALLONNE est une publication du
DÉPARTEMENT DU PATRIMOINE (SPW-Éditions/DGO4).

Service public de Wallonie


Direction générale opérationnelle de l'aménagement du territoire, du logement, du patrimoine et de l'énergie
Département du patrimoine
Pierre Paquet, Inspecteur général f.f.
Rue des Brigades d'Irlande, 1
B-5100 Jambes

COMITÉ DE RÉDACTION
Gaëlle Dumont (Département du patrimoine, Direction de l'archéologie) avec la collaboration d'Hélène Remy

COORDINATION ÉDITORIALE
Liliane Henderickx (Département du patrimoine)

COORDINATION GRAPHIQUE ET MISE EN PAGE


Fabien Cornélusse (Département du patrimoine, Direction de l'archéologie)

ÉDITEUR RESPONSABLE
Pierre Paquet, Inspecteur général f.f. (Département du patrimoine)

VENTE ET DIFFUSION
Institut du Patrimoine wallon – Service Publications
Rue du Lombard, 79 – B-5000 Namur - T. : +32(0)81 23 07 03 – F. : +32(0)81 23 18 90
publication@idpw.be – www.idpw.be
Possibilité également d'acquérir les ouvrages à la boutique de I'IPW : Résidence du Grand Cortil, place des Célestines, 21
(derrière I'hôtel Ibis), B-5000 Namur – ouverture du lundi au vendredi de 9h à 12h.
Pour tout renseignement complémentaire : +32(0)81 65 41 54

IMPRESSION
Bietlot, Gilly

CONCEPTION GRAPHIQUE
Fabien Cornélusse, avec la collaboration de Ken Dethier et Aude Van Driessche (Département du patrimoine, Direction
de l'archéologie)

COUVERTURE
Binche/Buvrinnes : le moteur droit du Messerschmitt Bf 110 G après nettoyage (photo N. Clinaz).

Tous droits réservés pour tous pays.


D/2016/13063/12
ISBN 978-2-930711-31-7
CHRONIQUE
DE L'ARCHÉOLOGIE WALLONNE
24
-
2016

Service public de Wallonie


Direction générale opérationnelle de l'aménagement du territoire,
du logement, du patrimoine et de l'énergie
Département du patrimoine
Direction de l'archéologie
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DIRECTION DE L'ARCHÉOLOGIE
Directeur f.f. : Alain Guillot-Pingue
Rue des Brigades d'Irlande, 1
B-5100 Jambes
Secrétariat :
T. : +32(0)81 33 24 75 – F. : +32(0)81 33 24 79
E-mail : darc.dpat.dgo4@spw.wallonie.be

Les adresses des Services de l'archéologie des Directions extérieures sont :

Direction du Brabant wallon


Responsable : Didier Willems
Rue de Nivelles, 88
B-1300 Wavre
T. : +32(0)10 23 12 07 – F. : +32(0)10 23 11 84
E-mail : didier.willems@spw.wallonie.be

Direction du Hainaut I
Responsable : Martine Soumoy
Place du Béguinage, 16
B-7000 Mons
T. : +32(0)65 32 80 94 – F. : +32(0)65 32 80 22
E-mail : martine.soumoy@spw.wallonie.be

Direction de Liège I
Responsable : Jean-Marc Léotard
Avenue des Tilleuls, 62
B-4000 Liège
T. : +32(0)4 229 97 11 – F. : +32(0)4 229 97 59
E-mail : jeanmarc.leotard@spw.wallonie.be

Direction du Luxembourg
Responsable : Denis Henrotay
Rue des Martyrs, 22
B-6700 Arlon
T. : +32(0)63 23 05 43 – F. : +32(0)63 23 05 45
E-mail : denis.henrotay@spw.wallonie.be

Direction de Namur
Responsable : Christian Frébutte
Route Merveilleuse, 23
B-5000 Namur
T. : +32(0)81 25 02 70 – F. : +32(0)81 25 02 71
E-mail : christian.frebutte@spw.wallonie.be
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Le volume présente les activités 2015 en Wallonie

FLANDRE BRUXELLES-
CAPITALE

Brabant wallon

WALLONIE
Hainaut

Namur
Liège

Luxembourg

0 50 km

Les articles sont à envoyer au :


Comité de rédaction de la Chronique de l'Archéologie wallonne
Gaëlle Dumont
Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant wallon
Rue de Nivelles, 88, B-1300 Wavre
T. : +32(0)10 23 12 02 – F. : +32(0)10 23 11 84
E-mail : gaelle.dumont@spw.wallonie.be
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Avant-propos
Chère Lectrice, cher Lecteur,

Bienvenue dans la Chronique de l'Archéologie wallonne, année 2015 !

Comme vous allez le lire, les activités de la Direction de l'archéologie et des Services de
l'archéologie des Directions extérieures de la DGO4 ont été nombreuses et de grand intérêt au
cours de l'année 2015, que ce soit en matière d'archéologie préventive, d'études, de valorisation du
patrimoine archéologique et de publications.

Le nombre et la valeur des articles de cette Chronique de l'Archéologie wallonne, activités de 2015,
témoignent de la qualité de nos chercheurs.

Les partenaires institutionnels et associatifs ont aussi contribué à compléter la recherche, à nourrir
la connaissance, à révéler la diversité et la richesse du patrimoine archéologique de la Wallonie.

Outre les activités scientifiques, développées dans le présent ouvrage, ce sont aussi des
préoccupations administratives et de sensibilisation qui caractérisent l'archéologie au Service
public de Wallonie. Ces trois orientations majeures sont renforcées par un maximum de partenariats
transversaux et d'interdisciplinarité.

L'année 2015 s'est caractérisée par la poursuite de nombreux dossiers emblématiques :


– la décision de remplacer le workflow actuel des permis d'urbanisme par un nouvel outil portant
le nom de GesPer (Gestion des permis) ;
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–  le dossier d'opération archéologique (DOA) réunissant toutes les données administratives,


techniques et scientifiques est maintenant entré dans les mœurs ;
– le zonage archéologique (ZA) a été redéfini, aussi bien du point de vue de sa forme que de sa
portée administrative ;
– l'inventaire des sites archéologiques, processus continu, évolue vers une gestion et une lecture
électroniques, autorisant dans le futur une appropriation de cette connaissance territoriale par le
citoyen ;
– la révision du décret relatif à l'archéologie dans le cadre de la mise en œuvre d'un nouveau Code
du Patrimoine a été rigoureusement examinée dans le respect des délais imposés ;
– le projet d'un fonds budgétaire, évoqué dans la Déclaration de politique régionale, a été soumis
au Gouvernement. Ledit fonds serait alloué à l'archéologie préventive en autorisant la perception
d'une contribution financière des aménageurs ;
– la base de données des chantiers archéologiques est à jour ;
–  le Centre de Conservation des Collections (C³), provisoirement situé à Saint-Servais, est
opérationnel et s'est enrichi d'une base de données aboutie et performante ;
– la question du diagnostic non intrusif a fait de grands progrès grâce à l'acquisition et la mise en
œuvre d'un LIDAR (radar laser) et d'un drone aérien photographique. Les résultats encourageants
devraient être sublimés lorsque ces deux technologies seront fusionnées, par l'usage d'un drone
LIDAR ;
– le projet d'opération archéologique « Grognon II » a été lancé, dans le cadre d'un triple projet
FEDER de rénovation de cette place emblématique, accompagné de la création d'un parking
souterrain.

Je vous souhaite une bonne lecture !


Jambes, le 10 octobre 2016
Alain Guillot-Pingue
Directeur f.f.
Brabant wallon

Nivelles, vue générale vers l'ouest de la fouille sur le site de l'église Saint-Jacques (photo F. Heller,
Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
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Beauvechain
L'Écluse
Nodebais
Jodoigne
La Hulpe Grez-Doiceau
Waterloo Rixensart
Énines
Bierghes Dion-Valmont Orp-Jauche
Rebecq Tubize Braine-l'Alleud Ottignies Chaumont-Gistoux Jauche
Ottignies-
Louvain-la-Neuve

Nivelles

Villers-la-Ville
Marbais

Carte administrative des communes de la province du Brabant wallon visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée

Éditorial
Qui dit Chronique, dit recueil de faits historiques, rapportés dans l'ordre de leur succession ou ensemble des nouvelles
qui circulent ou encore article […] qui traite régulièrement d'un thème particulier (Le Petit Robert, 1996). En repre-
nant ces trois définitions dans le sens inverse, celle de l'archéologie wallonne concerne effectivement un sujet précis,
celui d'une discipline et de ses résultats dans une sphère géographique déterminée. Quant aux informations qui sont
divulguées, autant qu'elles le soient par les personnes à la source plutôt qu'à travers la presse uniquement. Enfin, si
l'ouvrage est bien un recueil (à conserver jalousement !), il concerne des témoins physiques de l'histoire avant tout
locale, présentés sur base d'une ligne du temps, classés selon les périodes auxquelles ils appartiennent et non… la
succession des actions sur terrain.
Fort heureusement pour les archéologues, et le public de surcroît, si elle privilégie les opérations d'une année en
particulier, la Chronique de l'Archéologie wallonne intègre également des interventions menées antérieurement. Les
raisons en sont multiples mais les deux principales sont le « saute-chantiers » (passage rapide d'une fouille à une
autre) et le temps imparti pour l'exploitation des données dans la foulée de la clôture des opérations. Le Brabant
wallon ne déroge pas à ce constat ; quelques opérations anciennes parfois reléguées dans un tiroir, comme celle de
l'église Saint-Jacques à Nivelles, ou menées dans un autre cadre refont surface au plus grand soulagement de tous,
public, aménageur, communauté scientifique, administration et équipes archéologiques (même si certaines se résu-
ment à un seul individu) bien évidemment.
Nous référant à la première formulation reprise ci-desssus, tout en respectant scrupuleusement la notion de faits
historiques et non de faits, actions, sous-entendu opérations sur terrain, nous constatons que les sujets abordés pour
la province brabançonne dans la présente publication concernent essentiellement des sites occupés dans la durée,
avec ou sans interruption, dans les centres anciens de communes telles que Jodoigne, La Hulpe et Nivelles, mais égale-
ment dans des contextes ruraux comme à Beauvechain, Chaumont-Gistoux, Tubize et Orp-Jauche ou des complexes
abbatiaux, a fortiori dans l'un des sites phares qu'est celui de Villers-la-Ville. Ceux ayant trait à une période unique
sont moins nombreux, citons le champ de bataille entourant la ferme d'Hougoumont à Braine-l'Alleud.
Aussi limitée soit-elle, une intervention peut apporter son lot de surprises ou tout au moins des données complé-
tant assurément celles acquises ou susceptibles d'être exploitées dans le cadre d'un projet ; tel fut le cas au moins à
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Chronique de l’Archéologie wallonne

Inventaire de pierres suite à l'effondrement des arcades de la pharmacie à l'abbaye de Villers-la-Ville (2013).

Beauvechain/L'Écluse (rue de la Cabourse, avec une occupation protohistorique de même qu'un parcellaire médiéval
et quatre sépultures modernes, trois animales et une autre qui pose question), à Jodoigne (Institut de la Providence,
l'enceinte), La Hulpe (église Saint-Nicolas) et Nivelles (habitation particulière à la rue de Mons, extension de l'Insti-
tut du Sacré-Cœur, mise au jour non seulement de l'église Saint-Jacques mais aussi d'un fossé qui lui est antérieur).
Un rien de terrain est un tout archéologique ; il y a toujours une explication. En effet, si certains suivis et évaluations
se sont révélés négatifs par absence de structures archéologiques, les stratigraphies analysées ont par contre pu appor-
ter des réponses, des confirmations, et/ou procurer des indices pédologiques utiles pour de futures interventions,
comme à Orp-Jauche/Énines (rue Bois des Fossés, proche du site Michelsberg du « Chêne au Raux »), Waterloo
(ancien site du contrôle technique) ou Ottignies – Louvain-la-Neuve (rue de la Baraque).
Signalons que, grâce à une sensibilisation le plus en amont possible, les aménageurs acceptent peu à peu une
implication dans les opérations archéologiques, se traduisant généralement par une prise en charge financière des
terrassements ainsi que par un accès plus aisé et mieux programmé aux parcelles ; tel fut le cas pour un chantier à
Tubize (lotissement au hameau de Stéhou). Certes cette démarche constitue une participation très partielle dans les
coûts des opérations archéologiques mais elle contribue à la mise en place d'un principe d'aménageur-payeur.
Dans le cadre de restaurations ou affectations de biens, comme à Beauvechain (cure de Nodebais), Jodoigne (section
de l'enceinte urbaine à l'Institut de la Providence) et Nivelles (hôtel Rifflart à la rue de Soignies), des échanges antici-
patifs ont été tout aussi profitables.
Il est cependant regrettable que, tout en étant prévenus, certains aménageurs peinent, même in extremis, à avertir les
archéologues ; les terrassements entrepris sur l'ancien site du contrôle technique de Waterloo en sont un triste exemple.
Bien que s'intéressant au passé, l'archéologie ne demeure toutefois pas à la traîne lorsque les nouvelles techniques/
technologies font preuve d'une évidente efficacité. Ainsi, l'usage du scanner 3D fut d'emblée envisagé pour le relevé
des arcades de l'abbaye de Villers-la-Ville, détruites accidentellement, et à Jodoigne où une section de l'enceinte
urbaine fut dégagée suite à des démolitions.
La prospection géophysique est également une alternative à l'évaluation classique, mécanique et intrusive, faisant
usage d'engins de terrassement, pour apprécier un potentiel archéologique. Les enregistrements opérés à Braine-
l'Alleud aux abords de la ferme d'Hougoumont ont ainsi permis à l'équipe internationale, dans laquelle était intégré
le Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4 / Département du patrimoine), de
déterminer au mieux les zones à exploiter, les secteurs dans lesquels des sondages devaient être ouverts. Signalons
qu'une autre option a également été adoptée sur ce site, à savoir l'usage d'un détecteur à métaux, dans les limites
strictes du cadre légal (CWATUP, art. 244).
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Brabant wallon

Si pour un site militaire comme celui du champ de bataille de Waterloo, la combinaison des divers résultats auto-
rise parfois une révision partielle des faits, parfois contradictoires, relatés dans la littérature, des vérifications peuvent
également être utiles pour d'autres chantiers ou thèmes de recherche. Ainsi, trois fosses observées sur un site proto-
historique mis au jour en 2012-2013 à Grez-Doiceau/Gastuche avaient été interprétées comme des trous d'obus. Or,
l'étude du matériel recueilli lors des fouilles dans d'autres structures sema le doute… Et si ces structures étaient des
témoins d'une extraction de minerai de fer ? Un retour sur chantier s'avéra porteur.
En marge des missions menées par la Direction de l'archéologie, des études du bâti sont parfois réalisées sur demande
de la Direction de la restauration afin de mieux comprendre un bien (son évolution, ses caractéristiques, ses faiblesses…)
et valider des options retenues tant techniques qu'esthétiques ; le château de Merode à Rixensart dont le portique de
l'aile septentrionale fut étudié par une équipe des Musées royaux d'Art et d'Histoire en est un exemple.
Enfin, le scientifique est parfois amené à dépasser largement les résultats bruts de terrain en se posant des ques-
tions finalement élémentaires tels le pourquoi et le comment. Une fois n'est pas coutume d'emprunter ce chemin, ce
champ d'analyses, pour un édifice « inédit » du 12e siècle mis au jour à Villers-la-Ville au début de l'année 2014, sur
la colline surplombant le cœur de l'abbaye. Qu'est-ce qui a motivé, guidé, le choix de son implantation ?
Pour clôturer cet éditorial, je dirais que les publications, comme la Chronique, sont un vecteur non négligeable
pour toucher le public mais d'autres moyens peuvent être mis à profit. Pour preuve, à Tubize (lotissement à Stéhou),
les autorités communales ont souhaité que les acquis scientifiques soient diffusés auprès des riverains et des citoyens
à travers un parcours archéologique (panneaux). Si la presse prend le dessus, souvent lors d'ouvertures de chantiers
majeurs ou de découvertes, jouant sur le sensationnel et l'information de proximité, elle peut parfois engendrer des
incompréhensions ou déclencher des situations délicates. Pour la ferme d'Hougoumont par exemple, les médias ont
largement contribué à une (dés)information relative au corps du soldat, découvert en 2012 au terme d'une évalua-
tion, et à son devenir ; lors de la réception organisée pour l'inauguration du site restauré, tout en manifestant son
intérêt pour les recherches en cours, le prince de Galles fit remarquer en aparté qu'il avait eu écho des débats entou-
rant le squelette et sa présentation controversée au public dans une vitrine du mémorial.
Une fois de plus mes remerciements s'adressent à tous mes collègues, tant en Brabant wallon qu'au sein de la Direc-
tion de l'archéologie et du Département du patrimoine dans son ensemble, de la Direction de la géomatique, ainsi
qu'à tous les prestataires extérieurs, partenaires scientifiques ou bénévoles, professionnels, stagiaires ou passionnés,
administrations régionales et communales, responsables politiques, aménageurs, architectes… qui ont accepté de
nous aider, de collaborer et de prendre nos desiderata en considération, dans un esprit de complémentarité, de
gestion raisonnée des intérêts et de respect mutuel.
Didier Willems

Braine-l'Alleud, ferme d'Hougoumont : visite de la presse sur le chantier ouvert dans le cadre du projet Waterloo Uncovered auquel
participe le Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant wallon.
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Moyen Âge Brabant wallon

MOYEN ÂGE
Nivelles/Nivelles : rue de Mons,
ancienne église du Grand Saint-Jacques

Frédéric Heller et Aude Van Driessche l'église à l'aide d'une pelle mécanique. Nous avons


alors pu en faire le relevé précis à la station totale, les
Suite à une demande de permis d'urbanisme, le Service seuls plans connus jusqu'alors ne s'accordant ni sur sa
de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant forme, ni sur ses dimensions.
wallon (DGO4  / Département du patrimoine) est Lors de la phase de décaissement, d'autres structures
intervenu à Nivelles de décembre 2007 à janvier 2008. sont apparues dont un très large fossé passant sous
Prévenue par l'entrepreneur de la découverte d'osse- l'église.
ments humains (parc. cad.  : Nivelles, 2e  Div., Sect.  D,
no 374S), la police fédérale y dépêcha une équipe d'en- L'église
quêteurs et un médecin légiste. Ce dernier a déterminé
sur place qu'il s'agissait des restes probables de plusieurs Attestée dans le courant du 13e siècle, l'église du Grand
enfants et de deux adultes, qu'ils dataient de plus de Saint-Jacques révèle deux phases de construction.
trente ans et que leur étude était donc du ressort du La première phase consiste en une petite église au
Service de l'archéologie du Service public de Wallonie. chœur à chevet plat (22,34  m  × 18,30  m), orientée
Nous sommes alors descendus sur les lieux et avons est/ouest avec un décalage de 20° vers le nord. Elle
confirmé les conclusions du médecin légiste. Une comportait dans son angle sud-ouest une tour carrée
rapide recherche dans nos dossiers et dans les archives de 6,50 m de côté, s'appuyant d'une part sur les maçon-
a montré que nous nous trouvions sur le site de l'église neries de l'église plus épaisses dans cet angle (1,50 m
disparue du Grand Saint-Jacques. d'épaisseur), d'autre part sur un pilier massif (2,73 m ×
La fouille de sauvetage a été menée en adéquation 2,50 m ; 1) qui formait l'angle opposé de cette tour.
avec le planning des constructeurs et à l'aide d'engins Les murs ouest et nord de l'église (2 et 3), conservés
mécaniques alloués par leurs soins. Elle s'est déroulée en élévation sur plus de 2 m, ne présentent aucune trace
en trois phases, la première concernant la fouille de d'ouverture ni de baie condamnée, l'entrée probable de
l'église proprement dite, la seconde le décaissement l'édifice se situerait dans le prolongement de la tour
de toute la parcelle jusqu'aux niveaux des fonds de (4), donnant accès au collatéral sud de l'église.
coffre et la troisième les relevés et prélèvements post- La nef centrale, de plan trapu (10,70  m  × 7,20  m),
excavation. prolonge le chœur à chevet plat (6,70 m × 7,20 m) d'à
Nous avons d'abord dégagé le mètre et demi de peine une fois et demie sa longueur. Elle est flanquée au
remblais de destruction qui recouvrait les restes de nord et au sud de deux collatéraux larges de 5 m, dont
elle est séparée par deux colonnes massives au nord, le
pilier de la tour et une colonne semblable au sud.
L'église est agrandie dans une seconde phase  : les
murs des collatéraux côté chœur sont arasés, comme
te-G
ertru
de l'indique la présence de trois sépultures recoupant
Sain
leurs fondations, et reconstruits au niveau du mur
lace
Gra
nd-P oriental du chœur d'origine. Le chevet plat du chœur
est remplacé par un chevet à trois pans (5), l'agrandis-
M
on
s
sant de 4 m et empiétant sur un ancien pavement exté-
de
Ru
e
rieur contemporain de la première phase de l'église.
Une petite pièce, probablement une sacristie, lui est
adjointe au nord-est.
Contrairement à la plupart des édifices religieux,
l'église du Grand Saint-Jacques, installée au sein d'un
tissu urbain déjà serré dans le courant du 13e siècle, a
dû se contenter des parcelles encore disponibles, ce qui
Le site de l'église disparue du Grand Saint-Jacques : localisation explique en partie son orientation et ses dimensions
de la parcelle dans le centre ancien de Nivelles.
particulières.
14

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

Phase 1
sont retrouvées à l'emplacement du mur
3 N
détruit du collatéral nord et dans l'angle
a
sud-ouest du chœur.
F162
Nous avons considéré une tombe
5
F197 F146 (F191) comme fondatrice de par son
F191 emplacement quasiment au centre de
Phase 2
2 l'entrée du chœur et parce qu'elle est
1 creusée dans le limon orange naturel
et non dans le remblai de construc-
tion comme la majorité des inhuma-
4
tions. Le fait qu'elle soit recoupée par
b
d'autres sépultures atteste aussi son
antériorité.
Quelques rares sépultures se trouvent
à l'extérieur, dans la partie méridionale,
Maçonnerie de part et d'autre de l'entrée.
Emplacement de la tour
Contrairement aux idées couramment
Fosse
Sépulture
admises pour les tombes médiévales
Zone d’inhumation c chrétiennes, certains défunts sont, ici,
Fossé reconstitué encore enterrés avec des offrandes : des
Fond du fossé dégagé en fouille 0 10 m monnaies retrouvées autour du corps,
a, b et c Coupes dans le fossé
voire sur une épaule ou encore dans une
probable bourse serrée dans la main
Nivelles, église du Grand Saint-Jacques : plan général.
(sous la fesse gauche).

Les sépultures Le fossé

Toutes les fosses à ossements humains ont été considé- Un large fossé évasé à fond plat, flanqué à l'est d'une
rées comme des tombes, qu'il s'agisse de restes in situ levée de terre (c), a été dégagé sous le mur oriental de
ou clairement rassemblés dans une fosse secondaire. l'église. Il a été reconnu sur une longueur de 45 m et
Ce ne sont pas moins de 184 sépultures à inhumation présente un changement d'orientation : la partie méri-
qui ont été fouillées dans et autour de l'édifice. dionale suit une orientation sud-est à nord-ouest sur
Toutes les sépultures sont orientées selon un axe 25 m et vire ensuite vers le nord pour les 20 m suivants.
parallèle aux murs gouttereaux de l'édifice. Le corps Nous n'avons pu le suivre plus avant car il continue
est placé en décubitus dorsal, la tête à l'ouest, les pieds hors de l'emprise des travaux au nord et sous la rue de
à l'est, les bras le long du corps, voire croisés sur le Mons au sud.
bas-ventre ou encore repliés croisés sur la poitrine, les Son profil présente une pente d'équilibre, ce qui
mains sur les épaules. Seules deux sépultures à l'exté- permet d'éviter qu'il ne se comble naturellement. Sa
rieur de l'église présentent une orientation différente : largeur, pour sa partie la plus profonde située à l'est, est
sud-ouest/nord-est, tête vers le sud-ouest. de 7,80 m pour une profondeur maximum conservée
Le défunt est inhumé soit en pleine terre soit dans de 2,14 m ; sa largeur totale avoisine les 9,80 m si l'on
un cercueil. Dans le premier cas, il est enveloppé dans prend en compte une partie moins profonde située sur
un linceul, comme l'indique l'emplacement d'épingles son flanc occidental.
en alliage cuivreux retrouvées sur et autour du corps. Les dimensions du fossé le situent plus dans
Dans le second cas, seuls sont conservés les clous en la catégorie d'un fossé défensif que d'un simple
fer d'assemblage du cercueil et parfois des restes de fossé de limite d'emprise. Ceci étant, comme nous
bois. n'avons reconnu qu'une longueur équivalente à
Les sépultures sont concentrées principalement quatre fois sa largeur,  il est prématuré de vouloir
dans la nef centrale et dans le chœur. Celles qui le relier au complexe de l'abbaye Sainte-Gertrude.
recoupent les murs disparus ou qui occupent les Tout au plus pouvons-nous dire qu'il a ici un axe
nouveaux espaces montrent une continuité dans les quasiment nord/sud et se dirige vers la Thisnes qui
inhumations au gré des transformations de l'église. coule en contrebas au nord. En outre, le parcellaire
Cependant, aucune ne se trouve dans l'extension en semble en avoir partiellement fossilisé le tracé vers
abside du chœur. Deux tombes d'individus juvéniles le nord.
15

Moyen Âge Brabant wallon

ouest est

1m

niveau de sol de l’église

a b c d e f g

Profil du fossé restitué à partir des coupes : a. Sol en place ; b. Couches d'humus ; c. Levée de terre ; d. Comblement du fossé original ;
e. Dépôts laminés attestant la présence d'eau ; f. Comblement du fossé secondaire ; g. Interfaces de creusement.

Deux creusements (g) sont visibles dans les coupes provenant d'échantillons à courte durée de vie telles les
du grand fossé  : le premier, large et évasé, entaille le graines de sureau, il est plus probable que ce dernier
limon orange en place (a) ; le deuxième, plus étroit, le remplissage, mis en place alors que le fossé est encore
recoupe après une phase de dépôts de ruissellement utilisé, date d'entre 992 et 1156.
(e). Enfin, une couche d'humus épaisse (b) vient sceller L'église quant à elle est construite après le nivel-
l'ensemble. Toute cette séquence est ensuite recoupée lement du fossé défensif. Son chœur recoupe une
par le mur sud de fondation de la tour d'angle de l'église fosse (F162) contenant des tessons de céramique du
du Grand Saint-Jacques et par son mur pignon ouest. 11e  siècle, et recouvre une fosse (F146) contenant de
la céramique des 12e-13e siècles. Enfin, sous la nef se
Les datations trouve une dernière fosse contenant des vases globu-
laires du 13e siècle.
La couche de fond du fossé (d) a livré deux tessons En ce qui concerne les sépultures, deux d'entre elles
de céramique  : un de faïence bleue (probablement ont été choisies pour une datation au 14C. Elles ont été
intrusif) et un autre de bouteille en céramique grise sélectionnées par rapport à leur emplacement et/ou
à fond épais et lèvre de Huy, datée de la transition recoupement et déterminées comme étant parmi les
Mérovingien-Carolingien (7e-8e  siècles de notre ère  ; sépultures les plus anciennes de l'église.
communication personnelle de Sylvie de Longueville). La tombe F197, située au nord dans la nef, à l'entrée
S'il est évident que ce tesson, rejeté dans un fossé après du chœur, a été datée d'entre 1273 et 1397 AD (cali-
son utilisation, ne donne au mieux qu'un terminus post brée, 95,4 % de probabilité). La sépulture F191, placée
quem pour la datation de celui-ci au 8e siècle, il est clair dans l'entrée du chœur, au centre, remonte entre 1257
également que l'on ne peut dater un remplissage sur et 1394 AD (calibrée, à 95,4 % de probabilité) avec un
base d'un seul tesson. pic à 1257-1324 AD (calibrée, à 62,9 % de probabilité),
La première couche de remplissage du recreuse- ce qui renforce l'hypothèse d'une tombe fondatrice.
ment du fossé (f) a fait l'objet de deux prélèvements,
effectués dans le fond au centre de celui-ci. Les prélè- Conclusion
vements ont été tamisés et deux échantillons choisis
pour datation au 14C  : il s'agit de graines de sureau Les fouilles de sauvetage effectuées sur le site de la rue
(NIV8RMONSF250-prel #1b) et d'un os de faune de Mons ont permis de mettre au jour une des églises
(NIVRMONSF250-prel #1). disparues de Nivelles, celle dédiée à saint Jacques le
Les graines de sureau donnent une fourchette de Majeur, saint patron de Compostelle. Étape wallonne
992-1156  AD (calibrée, 95,4  % de probabilité) tandis sur la Via Gallia Belgica du pèlerinage de Saint-
que la datation faite sur os de faune dans cette même Jacques-de-Compostelle, attestée dès le 13e siècle, elle
couche et au même niveau donne, elle, 896-1138 AD avait complètement disparu au début du 19e siècle, sauf
(calibrée, 95,4  % de probabilité) mais surtout pour une dernière chapelle qui fut détruite au début du
940-1138  AD (calibrée, 87,8  % de probabilité). En siècle dernier. Elle était le cœur de la paroisse du même
conclusion, comme nous favorisons les datations nom et une des onze églises de Nivelles.
16

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

Construite sur une parcelle de petites dimensions, Villers-la-Ville/Villers-la-Ville : l'ancienne


sa forme et son orientation reflètent le tissu urbain de abbaye, à propos d'un bâtiment inédit du
l'époque plus que l'adhérence à un style ou des propor-
12e siècle
tions canoniques, son entrée latérale, ses dimensions
trapues et épaisses la rapprochant plus des édifices
romans que de ses contemporains. Éric De Waele, Olivier Collette
Elle s'implante dans sa partie occidentale sur un et Didier Willems
léger creux, bande de terre cultivée depuis au moins
un siècle qui a pris la place d'un large fossé et d'une Lors des Journées d'Archéologie en Wallonie qui se
levée de terre devenus obsolètes. sont tenues à Rochefort du 18 au 20 novembre 2015,
Ce large fossé muni sur son flanc oriental d'une nous avons présenté une cave découverte sur le site de
simple levée de terre et partiellement rempli d'eau, l'ancienne abbaye de Villers-en-Brabant, à la pointe
a connu au moins un recreusement. Si la période de nord de la colline de la ferme (De Waele et al., 2015b).
son creusement originel n'est pas certaine, il resta en La communication portait sur la description de la cave,
service jusqu'au 11e siècle. sur la chronologie du bâtiment qui s'élevait par-dessus
La levée recouvrait à son tour une terre de culture –  dont la construction remonte à l'abbaye Villers  II
épaisse, qui atteste une utilisation prolongée d'un siècle (1147-1197) – et sur la position stratégique de ce bâti-
au moins. Sous celle-ci apparaissent plusieurs fosses. ment. Puis, dans le précédent numéro de la Chronique
La céramique locale ou d'importation qui y fut décou- de l'Archéologie wallonne (De  Waele et al., 2015a),
verte nous situe au 6e siècle. nous avons quelque peu développé la description de
D'autres traces éparses nous indiquent que l'occu- la cave en examinant entre autres sa technique de
pation des lieux ne débute pas à la période mérovin- construction ainsi que la descente de cave construite
gienne mais, comme l'atteste la présence de sigillée, en hors-œuvre ; dans la conclusion de cet article, nous
remonte jusqu'à la période romaine. avons souligné l'importance de la découverte pour la
Afin de poursuivre une politique de mise en valeur connaissance des premières décennies de l'abbaye.
des vestiges archéologiques découverts au sein de la Ensuite, au colloque «  Archaeologia Mediaevalis  »
ville de Nivelles, et tout comme les tracés des murs du qui s'est tenu à Bruxelles les 10 et 11  mars  2016,
rempart ont été matérialisés par un marquage au sol après avoir très brièvement rappelé les principales
rue du Géant et rue de Namur, le conseil communal a caractéristiques matérielles de la cave, nous avons
adopté le 20 octobre 2008 le nom de rue Saint-Jacques fait la démarche d'aller davantage au-delà du fait
pour une venelle qui passe devant l'emplacement du archéologique, en développant d'abord l'interprétation
chœur de l'église disparue, et relie les rues de Mons et du bâtiment disparu, en examinant ensuite dans la
Seutin. mesure du possible, au-delà de l'interprétation du
Nos remerciements vont à Olivier  Vrielynck bâtiment, la situation économique et géopolitique,
(Direction de l'archéologie), qui a offert son aide et la géomorphologie et le réseau routier de la région à
ses compétences lors de la fouille. Nous remercions l'époque de l'abbaye Villers II. Cette conférence a été
également le pédologue Kai  Fechner qui nous a publiée sous forme de résumé dans le tome 39 de la
permis de comprendre les types de sols rencontrés et chronique d'Archaeologia Mediaevalis (De Waele,
nous a aidés à isoler les restes de l'ancienne levée de Collette & Willems, 2016).
terre. Nous tenons enfin à remercier chaleureusement La présente étude reprend l'exposé de cette deuxième
Marie  Herman, Fanny  Martin et Frédéric  Broes qui communication en y ajoutant quelques précisions ou
nous ont secondés durant toute la fouille, ont bravé le réflexions supplémentaires. L'objet n'est plus le bâti-
froid polaire et rendu ce sauvetage possible. ment en tant que tel, mais bien les hommes qui ont
choisi son lieu d'implantation, l'ont construit puis
l'ont occupé, et au-delà, l'utilisation qu'ils en ont faite
et le rôle qu'ils lui ont attribué, dans un environne-
ment particulier, pour servir des objectifs précis à un
moment donné de l'histoire de l'abbaye.

Le fait archéologique : une cave

Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure


du Brabant wallon (DGO4  / Département du patri-
moine) a réalisé une fouille de sauvetage de janvier
17

Moyen Âge Brabant wallon

La cave, vestige d'un bâtiment érigé vers le milieu du 12e siècle sur la colline de la ferme. Au second plan, le pignon sud du réfectoire
de l'abbaye Villers III (1197-1796). Vue vers le nord.

à mars 2014 durant les travaux d'aménagement d'un la conservation de nombreux produits. D'une manière
chemin piétonnier dans le flanc oriental de la colline générale on peut dire que la présence d'une cave fait
de la ferme (De Waele et al., 2015a). Une cave orien- suite à un choix, planifié en fonction de besoins spéci-
tée en long nord/sud, dotée au nord d'une imposante fiques.
descente de cave en hors-œuvre, a pu être partielle- En forme de rectangle très allongé (cave tunnel), la
ment fouillée. L'examen du remblai de comblement cave de la colline de la ferme offrait une superficie
indique que la cave est restée ouverte un certain temps intérieure de 35  m2 (8,95 m  × 3,95 m). Le sol était
après son abandon et qu'elle a servi de dépotoir. en terre battue. Aucun aménagement intérieur parti-
On ne soupçonnait pas la présence d'un bâtiment en culier n'a été observé, si ce n'est un muret d'empat-
cet endroit car cette localisation ne s'inscrit pas dans le tement au pied du long mur oriental, non liaisonné
paysage bâti de l'abbaye Villers III (1197-1796) dont les avec celui-ci, qui servait peut-être au rangement de
ruines se visitent aujourd'hui. certaines marchandises. Aucune trace de mobilier en
place – grands pots à provision par exemple – n'a été
Au-delà du fait archéologique : relevée.
l'interprétation du bâtiment qui s'élevait Un mur, supportant le plancher du rez-de-
au-dessus de la cave chaussée, divisait la cave dans sa longueur en deux
espaces inégaux ; son extrémité nord, distante de
La fonction, le rôle et l'utilisation du bâtiment qui s'éle- 1,40  m de la marche inférieure de la descente de
vait au-dessus de la cave peuvent se déduire à partir cave, ménageait un couloir de distribution à l'en-
de la descente de cave, de la chronologie haute et de la trée et sa position décentrée, davantage proche du
localisation du bâtiment. mur ouest de la cave (distance : 1,10 m), facilitait la
manutention de produits encombrants vers l'espace
La cave : présence, caractères et aménagements oriental.
Pour conclure, il apparaît bien que les constructeurs
Comme espace d'entreposage souterrain, une cave jugèrent indispensable de pouvoir disposer d'une cave,
garantit de bonnes conditions de fraîcheur, d'hygromé- et ce malgré le surcroît des travaux et le surcoût des
trie et de température, voire d'obscurité, nécessaires à matériaux.
18

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

La descente de cave : élément signifiant de la cave l'abbaye définitive Villers III (1197-1796). C'est l'abbé
Charles (1197-1209) qui planifia le développement de
La descente de cave est sans doute l'un des éléments les Villers II en Villers III et mit en chantier la construc-
plus signifiants qui permettent de cerner au mieux la tion de plusieurs bâtiments de la future grande abbaye
fonction voire l'importance de la cave. Presque monu- (Coomans, 2000, p.  42, 59, 61-62, 100-103, 216, 292,
mentale, entièrement construite en hors-œuvre, possé- 382, 545, 548-549 et 583).
dant des marches confortables et débouchant sur une
porte large et haute, elle nous renseigne sur l'utilisation La localisation stratégique du bâtiment : un choix 
de la cave mais aussi – en partie du moins – sur celle du
bâtiment. En effet, elle permettait une communication La localisation est le quatrième et dernier des facteurs
aisée avec l'extérieur, un va-et-vient direct sans passer que nous avons distingués en vue d'interpréter le
par l'intérieur du bâtiment, une utilisation fréquente et bâtiment. En effet, le choix délibéré de son emplace-
régulière, ainsi que la manutention de marchandises de ment sur la colline de la ferme contribue largement à
grand gabarit. déterminer quels furent sa fonction, son utilisation et
Située à l'extérieur du bâtiment, cette descente de surtout son rôle dans le contexte géopolitique local à
cave conférait à la cave une destination bien entendu l'époque de Villers II.
différente de celle d'une cave desservie par un esca- Il est manifeste que le bâtiment bénéficiait d'une
lier intérieur. En relation directe et spécifique avec implantation éminemment stratégique  : se trouvant
des activités extérieures, la cave de notre bâtiment hors zones inondables, il était situé en bas de versant
constituait une unité architecturale à part entière. On d'un promontoire terminant une avancée de plateau,
peut donc supposer que sa fonction de stockage devait ce qui permettait à ses occupants d'être rapidement
participer d'une économie plus large que
celle du simple cadre domestique. En
d'autres termes, les marchandises entre-
posées n'étaient sans doute pas réser-
vées à l'usage exclusif des occupants du
bâtiment, mais ceux-ci en assuraient très
probablement la garde et la gestion. En
outre, il est vraisemblable que d'autres
locaux du bâtiment étaient destinés au
stockage.

La chronologie haute du bâtiment :


construction vers 1150, au début de
l'abbaye Villers II (1147-1197)

La chronologie du bâtiment est un autre


facteur susceptible de nous éclairer sur
sa fonction car elle permet de le placer
dans une phase de l'existence évolutive
de l'abbaye, chaque phase possédant ses
caractéristiques propres en matière de
typologie, de fonction, d'implantation,
etc., du bâti.
Deux datations 14C permettent de faire
remonter sa construction aux environs
de 1150 et son abandon au plus tard vers
1410 (De Waele et al., 2015a).
La construction du bâtiment sur cave
remonte par conséquent à Villers  II
(1147-1197), l'abbaye méconnue, dite L'implantation stratégique du bâtiment qui s'élevait au-dessus de la cave : en hau-
de transition, mais en réalité fondatrice teur, à proximité d'un carrefour routier, d'une rivière, d'un gué ou d'un pont
(De Waele, 2014), qui prit véritablement et d'un moulin seigneurial (dessin A. Van Driessche, Serv. archéologie, Dir. ext.
Brabant wallon).
possession du site et se développa dans
19

Moyen Âge Brabant wallon

de la région, et ce en vue de reconfigurer, dans la


mesure du possible, la situation générale à l'époque
de la fondation de l'abbaye Villers  II. Une lutte pour
le pouvoir à l'échelle locale transparaît clairement à
l'arrière-plan de l'analyse  : durant toute la deuxième
moitié du 12e  siècle, les moines venus de Clairvaux
s'efforceront d'imposer leur présence aux autochtones.
Ils y parviendront comme chacun sait.
Tant les sources écrites que les sources archéolo-
giques nous éclairent sur l'économie et la géopoli-
tique de la région à l'époque de Villers II (1147-1197)
mais aussi –  en toute logique  – des quelques décen-
Localisation du bâtiment sur la colline de la ferme. Vue depuis nies qui ont précédé. En ce qui concerne les sources
le haut de la colline.
écrites, nous retiendrons un document de 1153  :
l'acte de confirmation des possessions de l'abbaye
à pied d'œuvre en fond de vallée tout en bénéficiant par l'évêque de Liège (Despy, 1957  ; Goffaux, 1987).
d'une vue étendue  ; plus précisément, il surplom- Quant aux sources archéologiques, nous évoquerons
bait de près non seulement la rivière Thyle, mais brièvement les résultats des fouilles réalisées au pied
aussi le gué ou le pont qui la franchissait ainsi que du pignon nord du grand moulin, d'une part (Heller
le carrefour de deux routes, l'une orientée est/ouest, & De  Waele, 2004), et de celles conduites sur le site
reliant entre autres Gembloux et Nivelles, et l'autre, de la porte de la ferme, d'autre part (De Waele, 2014 ;
d'axe sud/nord, se trouvant en fond de vallée (De De Waele & Heller, 2014a ; 2014b ; De Waele, Heller &
Waele & Heller, 2014a  ; 2014b  ; De  Waele, Heller & Van Driessche, 2013 ; 2015).
Van Driessche, 2015) ; enfin, sa position en hauteur
lui conférait un avantage défensif. Économie et géopolitique : les sources écrites
On peut donc affirmer que le bâtiment bénéficiait
d'une situation telle qu'il a pu servir de poste d'obser- D'une richesse informative exceptionnelle, l'acte de
vation et de contrôle du passage routier et peut-être confirmation des possessions de l'abbaye par l'évêque
fluvial  ; dans tous les cas, ses occupants voulaient à de Liège en 1153 est exploité ici de manière inédite
la fois voir, et être vus. Mais plus encore, l'interpréta- en ce qui concerne la situation économique et géopo-
tion que l'on peut faire de son emplacement concerne litique locale avant l'abbaye Villers II ainsi que les
jusqu'à la configuration spatiale même de l'abbaye conditions de la naissance de celle-ci. On trouvera
Villers II : si le bâtiment était positionné directement ci-dessous un extrait choisi de l'acte (correspondant à
au sud de la route Gembloux-Nivelles, c'est que vrai- un peu moins de la moitié de sa longueur) : […] nous
semblablement celle-ci n'était pas encore intégrée estimons digne d'appuyer de notre épiscopale autorité,
dans le domaine abbatial dont elle constituait, par les possessions de l'Église sainte Marie à Villers et de
conséquent, la limite nord. La localisation stratégique les confirmer par ordonnance. […] Il est en effet juste
du bâtiment aurait donc bien une signification dans que les débuts délicats d'une nouvelle plantation soient
le processus géopolitique de l'installation de l'abbaye favorisés de l'appui d'une bénédiction paternelle. Que
Villers II. par conséquent, aucune personne, ecclésiastique ou
Il apparaît donc que les moines n'ont pas pu occuper laïque, ne se permette d'envahir témérairement ou de
d'entrée de jeu l'ensemble du site tel qu'il sera constitué perturber, en molestant injustement ce lieu, les biens
plus tard et tel que nous le connaissons aujourd'hui. et possessions des frères qui y servent Dieu. Parmi ces
Cela signifie que toute la zone s'étendant au nord de la choses, nous désignons expressément la partie de l'alleu
route est/ouest – cette zone même où sera construite de Villers que Gauthier de Marbais, avec l'accord de son
l'abbaye Villers  III proprement dite  – ne faisait vrai- épouse, le don de sa mère Judith ayant précédé, a confé-
semblablement pas partie de l'abbaye Villers II. ré à la dite Église pour le salut de son âme et de celle
de ses prédécesseurs, c'est-à-dire tout ce que, en eaux,
Au-delà de l'interprétation du bâtiment : la région à bois, champs, prairies et pâturages, est connu apparte-
l'époque de l'abbaye Villers II (1147-1197) nir à sa seigneurie depuis Tebersart jusqu'au domaine
de Villers et depuis le même sart jusqu'à Chevelipont
Au-delà de l'interprétation du bâtiment, nous analy- de chaque côté de la rivière Thyle et suivant la limite,
sons ci-dessous le paysage économique et géopoli- sur sa partie gauche, de la route de Mellery. En plus,
tique, le cadre géomorphologique et le réseau routier nous confirmons à la susdite Église et aux frères qui y
20

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

servent Dieu, ce qu'Anselme de Hunefe et Engelbert de


Schooten possédaient par héritage dans le même alleu
de Villers, dans le domaine et autour, à l'exception du
moulin qu'Adélard de Mellery tenait en bénéfice. Ceci
a été remis par une légitime donation et déjà assigné
aux dits frères. […] (trad. : Goffaux, 1987, p. 88).
Cette charte livre des informations tant factuelles
que déductives. Nous ne discuterons pas ici des rensei-
gnements qui y sont fournis quant à la localisation du
domaine abbatial de Villers II.
Les faits renseignés sont les suivants :
–  l'évêque appuie les possessions de la nouvelle Localisation du bâtiment sur la colline de la ferme. Au premier
abbaye et les confirme par ordonnance ; plan, la route venant de Mellery (route Gembloux-Nivelles).
À gauche, le grand moulin abbatial. Vue depuis l'est.
–  il déclare que les débuts de la «  nouvelle planta-
tion » sont « délicats » ;
–  il menace ceux qui envahiraient les possessions, – un moulin se trouvait sur le site avant l'arrivée
imprécation qu'il réitère sous forme d'anathème à la des moines mais, en 1153, le seigneur de Mellery, son
fin de la charte ; propriétaire, n'a pas encore accepté de le céder  ; cela
– les possessions sont localisées et décrites ; signifie que ce dernier a toujours accès à son moulin
– l'abbaye Villers II est établie sur les deux rives de dans la vallée et que, par conséquent, l'importante
la rivière Thyle et celle-ci est franchie par « la route de route est/ouest, venant de Mellery, toujours ouverte en
Mellery » (Gembloux-Nivelles) ; 1153, n'est pas encore englobée dans la grande clôture
– le moulin du seigneur de Mellery est exclu de la abbatiale ;
confirmation : il ne fait pas (encore) partie des posses- – puisque la route ne fait pas (encore) partie de l'ab-
sions de la nouvelle abbaye. Signalons que le village baye, les moines prennent le parti d'ériger un bâtiment
de Mellery se situe sur le plateau à l'est de l'abbaye, à à proximité immédiate, sur une position élevée ; il ne
2,5 km à vol d'oiseau. semble pas y avoir d'autre explication à la présence
De ces données factuelles, on peut déduire ce qui du bâtiment sur la colline de la ferme, sinon celle
suit : – complémentaire et corollaire – de marquer la limite
–  l'existence même de cette charte prouve que les nord du domaine de Villers II ;
moines ont eu besoin de l'appui des puissants pour – d'après l'acte, l'abbaye occupe les deux rives de
s'installer à Villers ; « la rivière appelée Thyle » et, d'autre part, Adélard
– s'il est nécessaire de (faire) proclamer la légitimité de  Mellery exploite sur place un moulin. Or, ces
des possessions territoriales dès les premières années deux informations sont incompatibles : comment en
de l'abbaye, c'est que cette légitimité est controversée, effet concilier l'implantation de Villers  II des deux
ou qu'elle le fut ; côtés de la rivière avec l'exploitation du moulin par
– s'il est nécessaire que l'évêque profère des impré- le seigneur de Mellery, celui-ci ne pouvant évidem-
cations à l'encontre de ceux qui pourraient envahir ou ment pas se permettre de ne pas avoir le contrôle
malmener « les biens et possessions » de l'abbaye, c'est sur la rivière, tant en amont qu'en aval ? Comment
que de telles actions ont eu lieu et pourraient encore imaginer d'autre part que les moines occupent
avoir lieu ; le terrain et vivent sur place sans avoir accès à la
– il en ressort que ces « biens et possessions » font rivière  ? En somme, le texte laisse entendre une
l'objet de contestations ou suscitent des différends ; cohabitation quasi physique –  une situation en
–  l'environnement est décrit comme un paysage l'occurrence difficilement concevable  –, à moins
agricole diversifié et structuré sur la base de ses de supposer que la précision «  de chaque côté
composantes nécessaires  :  «  eaux, bois, champs, prés de la rivière appelée Thyle  » ne soit –  en 1153  –
et pâturages » ; l'expression du dessein des moines plutôt que celle
– tel que décrit et au vu de la date de 1153, cet envi- de la réalité. La cohabitation durant cette deuxième
ronnement remonte à une époque antérieure à l'arri- moitié du 12e  siècle devint sans doute conflictuelle
vée de moines ; mais la charte, bien entendu, n'en dit mot. Il reste
– les moines se sont trouvés confrontés à un ordre cependant que nous connaissons le dénouement de
économique et politique en place, dans un territoire la confrontation : les moines s'emparèrent du moulin
déjà organisé, ce qui explique que les « débuts » sont du seigneur de Mellery et par la suite, en construi-
« délicats » ; sirent un autre au même emplacement ;
21

Moyen Âge Brabant wallon

–  la configuration paysagère locale comprend une lés d'un châtelet qui contrôlait la route sud/nord déjà
rivière (sous le contrôle du seigneur de Mellery  ?), évoquée plus haut et que cet ouvrage fortifié avait
un moulin avec ses bâtiments annexes (appartenant lui-même été bâti sur une route plus ancienne encore
au seigneur de Mellery), ainsi qu'une route de liaison (De  Waele, Heller & Van  Driessche, 2015). Cela
directe avec Mellery ; signifie que, dès 1147, un tronçon de cette route de
–  pour conclure, le fond de vallée (route, moulin vallée fut annexé par les moines et, plus globalement,
et rivière) ne leur appartenant pas encore, les moines que l'abbaye fut implantée en un lieu déjà occupé et
érigent le bâtiment sur la colline pour servir leur aménagé, qui possédait par conséquent sa propre
dessein d'appropriation du site : tout en surveillant de histoire.
près les activités dans la vallée, ils manifestent ainsi
clairement leur intention de s'établir définitivement et Géomorphologie et réseau routier
d'agrandir leur domaine.
L'abbaye se situe en bordure septentrionale des bas-
Économie et géopolitique : les sources archéologiques plateaux de Moyenne Belgique, au début des vallonne-
ments de la Dyle formant la transition vers les plaines
Des fouilles de sauvetage menées en 2003 au pied du de Flandre. On remarquera que le village de Villers, de
pignon nord du grand moulin ont révélé la présence fondation plus ancienne que l'abbaye, est implanté en
de structures plus anciennes, notamment un bâtiment amont de celle-ci, aux premières incisions des vallon-
dont le sol était constitué de dalles de schiste ainsi nements ; il occupe en outre une position intéressante
qu'une aire de circulation extérieure également dallée sur la rivière Thyle puisqu'il s'est développé autour de
(Heller & De Waele, 2004). Rappelons que la construc- deux passages à gué, l'un permettant de franchir la
tion du moulin abbatial remonterait aux années 1197- rivière, l'autre l'un de ses affluents. Rappelons, d'autre
1200 (selon Coomans, 2000, p. 501). part, que Villers se trouvait aux confins de deux terri-
Des fouilles conduites en 2011 et 2012 à la porte toires politiques, dans une enclave du comté de Namur
de la ferme, à moins de 150  m au sud de la cave, en duché de Brabant (Coomans, 2000, p. 64-68 ; Despy,
ont livré les vestiges d'un bâtiment à pans de bois 1957, p. 12-14).
pouvant être identifié avec la porterie
de l'abbaye Villers II (De Waele, Heller
& Van  Driessche, 2013  ; De  Waele &
Heller, 2014a  ; 2014b). Cette porterie
primitive était établie sur le tronçon
d'enceinte qui barrait complètement la
vallée d'est en ouest. Aucune trace de
cette première enceinte n'a été retrou-
vée, mais elle consistait vraisemblable-
ment en une palissade en bois simple-
ment percée d'une porte ; la muraille en
pierre, visible encore aujourd'hui, fut
construite plus tard sur le même tracé.
Il semble bien que le bâtiment de cette
porterie et celui sur cave de la colline
participaient d'un même programme
d'occupation spatiale et d'aménage-
ment du site de Villers  II  : situés tous
deux sur la rive gauche de la rivière et
en lien direct avec la colline de la ferme,
ils étaient implantés l'un à l'extrémité
sud du site, l'autre à son extrémité
nord. D'autre part, les fouilles à la porte
de la ferme apportèrent la preuve d'une Restitution du croisement de la route est/ouest (Gembloux-Nivelles) avec la
occupation pré-abbatiale du site. Elles route sud/nord de la vallée de la Thyle, avant l'implantation de l'abbaye (fond :
révélèrent en effet que la porterie de Relief de la Wallonie – Modèle numérique de Terrain [MNT] 2013-2014 [http://
l'abbaye Villers II – le bâtiment à pans geoportail.wallonie.be, mise à jour 17 février 2015], infographie A. Van Driessche,
Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
de bois – fut édifiée sur les restes nive-
22

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

Les forêts se rencontraient principalement au nord 1153 peut être considéré comme une attestation pour
de Villers, car au sud les terres fertiles des plateaux ainsi dire officielle des « débuts délicats de la nouvelle
limoneux étaient majoritairement défrichées. Un plantation » – pour reprendre les termes de l'acte – qui
massif forestier continu recouvrait vraisemblable- furent sans nul doute engendrés par une vive opposi-
ment les vallonnements de la Dyle, les reliefs accusés tion autochtone.
et les sols sableux étant peu propices aux cultures. Sur le plan de la configuration spatiale de Villers II,
L'abbaye s'est installée à la lisière de ce massif forestier le bâtiment sur cave apporte très opportunément des
dont elle pouvait tirer parti des multiples ressources : informations complémentaires à la découverte de
exploitation du bois de chauffage, de menuiserie et de la porterie de cette abbaye provisoire à la porte de la
construction, apiculture, écobuage, écorçage, panage, ferme. Si la porte, en bord de rivière, sur la route de la
etc. vallée, perçait une palissade en bois au sud et marquait
Deux routes se croisaient sur le site même de la l'entrée dans le domaine abbatial, le bâtiment sur la
future abbaye  : la principale reliait Gembloux et colline, quant à lui, correspondait à sa limite extrême
Nivelles suivant un axe est/ouest transversal aux au nord.
vallées, la seconde longeait la Thyle en fond de vallée, Le bâtiment sur la colline de la ferme se trouvait en
participant à la liaison entre les bas-plateaux et les un endroit surprenant par rapport au site abbatial tel
territoires du nord. La route est/ouest franchissait que nous le connaissons aujourd'hui. En fait, plutôt que
primitivement la Thyle à hauteur d'un détour de la de s'y inscrire, il se situe à sa périphérie, en un point
rivière, à l'endroit où celle-ci recevait le ruisseau des élevé, alors que l'abbaye s'est développée dans le fond
Affligés  ; c'est l'accumulation des matériaux char- de vallée. À cet égard, il constitue un élément matériel,
riés par le ruisseau en fond de vallée qui a favorisé révélateur sur le terrain, du processus d'appropriation
le passage à gué. L'extension de l'abbaye au nord de progressive du futur site abbatial, qui fut lent mais
la route est/ouest –  sous l'abbé Charles (1197-1209) planifié. Les moines ont dû patienter, faire preuve de
comme nous l'avons rappelé plus haut, mais peut-être détermination et recourir à la persuasion divine – dans
déjà vers la fin de la période Villers II (1147-1197) – la charte de 1153, l'évêque de Liège profère des impré-
eut pour résultat qu'un tronçon de la voie passa dans cations à l'encontre de ceux qui s'opposeraient au projet
le domaine abbatial et fut par conséquent soustrait d'installation de l'abbaye  – avant de pouvoir s'établir
au réseau viaire régional, ce qui obligea à contourner définitivement et largement. En d'autres termes, il est
l'abbaye par le nord ou par le sud. Quant à la route très vraisemblable que le bâtiment n'aurait pas eu d'uti-
sud/nord, comme nous l'avons précisé ci-dessus, elle lité – et n'aurait donc pas été construit – si, dès 1147,
fut amputée d'un tronçon dès la création de l'abbaye les moines avaient pu d'emblée s'approprier le tronçon
Villers  II (De  Waele & Heller, 2014b  ; De  Waele, qu'ils convoitaient de la route est/ouest et développer
Heller & Van Driessche, 2013 ; 2015), ce qui obligea à dès ce moment le domaine abbatial au nord de cet axe
contourner celle-ci par l'ouest ou par l'est. routier.
Ce n'est que 50  ans plus tard, sous l'abbatiat de
Conclusion Charles (1197-1209), que débuteront les travaux d'édi-
fication de Villers  III, l'abbaye définitive en pierre,
Le bâtiment inédit sur la colline de la ferme contribue directement au nord de la route est/ouest. Si ce délai
de manière significative à la connaissance de Villers II paraît démesuré – surtout au regard du pouvoir consi-
(1147-1197), abbaye dont rien ne subsiste en élévation dérable dont jouissait Bernard de Clairvaux – c'est que
et dont la localisation même sur le site reste approxi- l'enjeu était un territoire déjà organisé et structuré sur
mative (Coomans, 2000, p.  61-68  ; De  Waele, 2014). les plans de l'économie, de la politique et du réseau
Cette abbaye méconnue est dite à tort « de transition » des communications. De ce qui précède, il ressort
car, en réalité, elle est celle-là même qui rendit possible en outre que, contrairement à l'opinion encore trop
l'établissement du monastère sur le site ; c'est elle qui souvent répandue, les moines ne sont pas arrivés au
correspond véritablement à la période de gestation milieu de nulle part en s'établissant à Villers. Il est vrai,
de la future grande abbaye, période durant laquelle se en revanche, que leur institution, novatrice et d'une
joua de manière décisive le destin de celle-ci. redoutable efficacité, contribua notablement au déve-
La durée de 50  ans –  inhabituellement longue  – loppement et au progrès en général.
qu'on attribue à l'abbaye Villers  II évoque ouverte-
ment les difficultés que rencontrèrent les Cisterciens Bibliographie
dans leur projet d'une fondation à Villers. À cet égard, ■■ Coomans  T., 2000. L'abbaye de Villers-en-Brabant,
l'acte de confirmation des possessions abbatiales en Bruxelles-Cîteaux (Studia et Documenta, XI).
23

Moyen Âge Brabant wallon

■■ Despy  G., 1957. La fondation de l'abbaye de Villers (1146),


Archives, Bibliothèques et Musées de Belgique, 28, p. 3-17.
■■ De Waele É., 2014. Villers-la-Ville/Villers-la-Ville : le moine
Jean de Soignies (1494-apr. 1568), chroniqueur et archéologue,
et l'abbaye Villers  II (1147-1197), Chronique de l'Archéologie
wallonne, 22, p. 44-59.
■■ De Waele É., Collette O. & Willems D., 2016. Abbaye de
Villers-en-Brabant : entre plaine et plateau,… À propos d'un
bâtiment inédit du xiie siècle (Brab. Wal.), Archaeologia Mediae-
valis, 39, p. 69-72.
■■ De Waele É. & Heller F., 2014a. L'abbaye de Villers-la-Ville :
découvertes à la porte de la ferme (Bt wallon), Archaeologia
Mediaevalis, 37, p. 73-77.
■■ De Waele  É. & Heller  F., 2014b. Villers-la-Ville/Villers-
la-Ville  : l'ancienne abbaye, dernière campagne de fouilles
aux abords de la porte de la ferme, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 22, p. 40-44.
■■ De  Waele É., Heller F. & Van  Driessche  A., 2013. Des
bâtiments à pans de bois dans l'ancienne abbaye de Villers-la-
Ville, La Lettre du Patrimoine, 30, p. 19-20.
■■ De Waele É., Heller F. & Van Driessche A., 2015. Villers-
la-Ville : découverte d'une route et d'un ouvrage fortifié anté-
rieurs à l'abbaye, La Lettre du Patrimoine, 38, p. 8-9.
■■ De Waele É., Willems D., Collette O., Van Hove M.-L.,
Van  Nieuwenhove  B., Timmermans J., Challe  S. &
Fesler  R., 2015a. Villers-la-Ville/Villers-la-Ville  : ancienne
abbaye, un bâtiment insoupçonné sur la colline de la ferme,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 22-27.
■■ De  Waele  É., Willems  D., Van  Nieuwenhove  B.,
Timmermans  J., Van  Hove  M.-L., Collette  O.,
Challe S. & Fesler R., 2015b. Abbaye de Villers-en-Brabant  :
un bâtiment insoupçonné sur la colline de la ferme. In  :
Frébutte C. (coord.), Pré-actes des Journées d'Archéologie en
Wallonie, Rochefort 2015, Namur, Service public de Wallonie
(Rapports, Archéologie, 1), p. 91-92.
■■ Goffaux A.-F., 1987. La fondation de l'abbaye de Villers : une
copie inédite de la reconnaissance par l'évêque de Liège de la
donation du seigneur de Marbais dans les archives paroissiales
de Tilly, Revue d'Histoire religieuse du Brabant wallon, 1,
p. 85-89.
■■ Heller F. & De  Waele  É., 2004. Villers-la-Ville/Villers-la-
Ville : installation d'une station d'épuration pour l'ancien moulin
abbatial, Chronique de l'Archéologie wallonne, 12, p. 30-32.
24

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

TEMPS MODERNES
Nivelles/Nivelles : rue de Mons, analyse
limitée autour et dans un immeuble du
16e siècle en transformation

Didier Willems à l'arrière, disposées en carré et entourant une cour


intérieure ; en outre, la propriété était prolongée vers
Malgré les dégâts occasionnés par les multiples le sud par un espace jardin d'une superficie similaire à
conflits, incendies et autres remaniements urba- celle du logis. Quelques décennies plus tard, les relevés
nistiques, l'intra-muros de Nivelles a conservé des de P.-C. Popp trahissent la division du bien, apparte-
témoins de son histoire, architecturale en particulier. nant à Mme Virginie Minne, négociante à Nivelles, en
La demande de régularisation  et de transformation deux habitations distinctes (parc. cad. : 1041a et 1041b).
introduite par M.  Steve  Marits pour son immeuble Une question se pose  : la partie reprise actuellement
situé en bordure de la rue de Mons (parc. cad.  : sous le no  29 était-elle déjà convertie en commerce
Nivelles,  2e  Div., Sect.  D, nos  1040h et 1041g  ; coord. comme ce fut assurément le cas au 20e siècle ?
Lambert  : 146673  est/142840  nord) a permis de se Avant la Seconde Guerre mondiale, le no  29 (no  37
pencher sur l'une de ces anciennes demeures, modeste à l'époque) accueillait un commerce  ; en témoignent
en apparence et non liée à des faits marquants, tels les remaniements des baies du rez-de-chaussée de la
brasseries, commerces notables ou autres, mais révé- devanture ainsi qu'une ancienne photographie prise
lant encore des caractéristiques originelles et modifi- par Paul Froment au lendemain du bombardement de
cations dues à des changements de propriétaires et/ 1940. En outre, la toiture commune était dotée d'une
ou d'affectations. lucarne à bâtière  ; elle se situait au niveau du no  27
Interpellé par un courrier stipulant l'intérêt patri- (no 35 à l'époque) (Froment, Hanse & Liénard, 1996).
monial porté à son projet, le propriétaire prit contact Avant d'envahir la Belgique, la force aérienne alle-
avec le Service de l'archéologie de la Direction exté- mande bombarda plusieurs points stratégiques et
rieure du Brabant wallon (DGO4  / Département centres urbains, parmi lesquels Nivelles. L'édifice
du patrimoine)  ; de commun accord, la visite fut abordé dans la présente notice fut épargné de justesse
programmée à la suite des démolitions prévues. Lors de ce désastre, contrairement à tous ceux situés en
de celle-ci, en date du 25  février 2015, les travaux amont, vers la collégiale, l'îlot situé en face, compris
dans la demeure sise au no 27 étaient en cours ; ceux entre les rues de Mons et Seutin, la Grand-Place et la
de l'habitation voisine étaient déjà clôturés. Malheu- rue Marlet, qui ne furent qu'une étendue de ruines.
reusement, seule une approche superficielle a pu être Actuellement, dans le cœur de la cité aclote
menée, consistant en des relevés photographiques. reconstruit, le bâtiment qui inclut les deux habitations
Conscient de la valeur de son bien, le propriétaire fait figure de limite, architecturale avant tout.
avait déjà pris quelques précautions pour le préserver Fin des années 1980, la demeure sise au no  27
au mieux tout en l'adaptant aux souhaits, pour ne pas accueillit une sandwicherie-petite restauration.
dire aux exigences, en termes de confort actuel.
Quelques observations
Ce que les archives nous apprennent
À l'extérieur
L'édifice est daté par ancrages de 1571. Érigé en bordure
de voirie, il participe à une enfilade d'habitations La façade septentrionale de l'immeuble, celle donnant
qui limite au nord le quartier dit du «  petit Saint- sur la voirie, est constituée d'un soubassement, d'en-
Jacques  ». Jusqu'en 1813, lui faisait d'ailleurs face cadrements de baies, de trous de boulin et de pierres
l'église Saint-Jacques, démolie pour construire habi- d'angle en petit granit/calcaire carbonifère  ; la pierre
tations et commerces. À cette époque, la demeure «  blanche  », calcaire lédien ou type calcaire gréseux
semble toujours être occupée dans son espace initial ; de Gobertange, a également été employée pour les
en effet, un seul numéro de parcelle lui est attribué. En piédroits chaînés et/ou harpés des quatre fenêtres de
analysant un autre plan cadastral du premier tiers du l'étage, originellement à meneaux. L'ensemble de l'élé-
19e siècle (Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non vation est en briques, y compris les arcs surbaissés
daté), il apparaît que le bâti était doté d'annexes érigées surmontant la porte du no 29 et les baies de l'étage.
25

Temps modernes Brabant wallon

À l'intérieur

À l'intérieur de l'habitation sise au no 27,


l'enlèvement du plafonnage mural fut
partiel. Les briques les plus anciennes
utilisées sont similaires à celles employées
en façade, liées au mortier de chaux  ;
les assises sont régulières. Au moins
deux ouvertures à linteau en bois ont
été observées au rez-de-chaussée, l'une
dans la façade arrière et l'autre dans le
mur de séparation avec la maison no 29,
érigé sous la poutre médiane ; au vu des
caractéristiques des briques utilisées,
la première ouverture semble avoir été
Nivelles : vue générale côté voirie des façades des deux habitations sises aux rebouchée plus récemment.
nos 27 (à gauche) et 29 (à droite), rue de Mons.
Comme mentionné plus haut, les
poutres, en chêne, sont probablement
Si le registre supérieur a majoritairement conservé d'origine. Les chevrons transversaux ont été réalisés
son allure d'antan, l'inférieur a par contre subi dans la même essence ; certains ont pu être remplacés
plusieurs remaniements. Probablement le plus ancien au cours des siècles. Quant au plancher, il s'agit de
directement visible est le percement d'une porte et larges planches en pitchpin (très en vogue dès le
d'une fenêtre du côté du no  27, au 18e ou au début 19e siècle), pin sylvestre ou sapin, ayant soutenu un sol
du 19e siècle  ; la haute fenêtre traverse le ressaut du probablement carrelé.
soubassement. Notons qu'aucune des deux baies ne Si l'immeuble a été scindé en deux demeures, l'espace
présente un arc de décharge en sa partie sommitale. sous toiture a par contre été préservé dans sa totalité.
Par la suite, le rez-de-chaussée du no 29 fut transformé Ce choix délibéré met nettement en évidence une pièce
pour la création d'une vitrine commerciale, traitement architecturale quasi intacte qu'est la haute charpente,
ayant pu inclure l'usage de matériaux de remploi  ; en chêne, totalement chevillée. Elle est composée de
abstraction faite des touches récentes, la taille des trois fermes reposant sur les poutres séparant l'étage
pierres est clairement distincte de celle des précitées et du grenier. Un entrait sépare ce volume sous toiture
des fenêtres de l'étage. en deux niveaux habitables. Dans la partie supérieure
Enfin, les six tirants alignés verticalement en deux de chaque ferme, un faux-entrait supporte à la fois le
rangées de trois, auxquels s'ajoute un septième pris poinçon de ferme, dans lesquels les deux arbalétriers
dans le pignon occidental, témoigneraient d'une s'emboîtent, et une longue sous-faîtière. Chaque cadre,
absence  de modifications des structures portantes en délimité par les poutres faîtière et sous-faîtière ainsi que
bois, voire de la charpente elle-même, à l'exception les poinçons, accueille une décharge en croix de saint
d'adaptations ou réparations. André. Pour rappel, un assemblage comparable avait
Si on évoque la taille des pierres, observer celles-ci été observé au 24, rue des Choraux à Nivelles (Willems,
afin d'y déceler des marques peut s'avérer bien utile. 2015) ; les deux maisons se différencient cependant par
Bien que les signes lapidaires n'ont pu être identi- le fait que la sous-faîtière dans ce second cas ne reposait
fiés avec certitude car très usés, un sablage en étant pas sur le faux-entrait mais en était surélevée.
probablement en partie la cause, un recoupement avec Actuellement, la toiture est percée de quatre lucarnes
l'étude de J.-L. Van Belle (1994) permet de confirmer à bâtière dans le pan septentrional et de fenêtres de toit
quelques suppositions. Ainsi, ceux observés sur le dans le pan méridional.
soubassement et les pierres d'angle de la demeure du
no 27 sont attribuables à la famille Nopère (no 1079), Que conclure ?
originaire d'Arquennes (seconde moitié 15 -fin e

17e  siècle). Par contre, les deux repérés au no  29, De toute évidence, l'édifice «  double  » a subi des
également sur le soubassement, appartiennent à deux modifications esthétiques, volumétriques et fonction-
ateliers différents : l'un (n  659) n'a pas d'attributaire et
o
nelles à travers le temps, incluant réparations, restaura-
l'autre, localisé sur une pierre en bordure de la maison tions, récupérations et transformations.
voisine, est trop effacé (également Nopère mais moel- Les composants architecturaux majeurs étant préser-
lon renversé ?). vés, une étude a posteriori peut toujours être menée ;
26

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

seules les faces des murs plafonnés ou recouverts de cement européen FSE/FEDER-Région wallonne. Le
plaques de plâtre, isolantes ou autres empêcheront projet inclut notamment un nouveau cheminement,
toute analyse. débutant non de l'accès originel qu'est la porte de
Faute de pouvoir mobiliser des compétences Bruxelles mais du moulin. Le parcours dirige les visi-
adéquates dans les temps impartis pour ce type d'in- teurs vers le cœur de l'abbaye en les faisant transiter
tervention, il est regrettable que les quelques données par la colline, le jardin dit « des infirmes », la pharma-
collectées n'alimentent que l'Inventaire du patrimoine cie et ce qui fut l'infirmerie.
culturel immobilier de Wallonie (en cours pour Le franchissement de la voirie régionale reliant
Nivelles) et ne participent pas, du moins dans l'immé- Genappe à Gembloux, qui coupe le site, s'effectue doré-
diat, à un approfondissement de la connaissance des navant par une passerelle en bois créée entre les arcades
évolutions des architectures individuelles mais égale- de la pharmacie. En date du 22  octobre 2013, cette
ment des contextes urbanistiques, artistiques et autres dernière n'était pas encore posée ; fort heureusement
dans lesquels elles ont évolué. car un camion heurta les arcades dans l'après-midi
Même si l'intervention ne consista qu'en une visite de (parc. cad. : Villers-la-Ville, 1re Div., non cadastré , voirie
courtoisie et un reportage photographique, le Service N275 ; coord. Lambert : 161335 est/142191 nord).
de l'archéologie tient à remercier M. Steve Marits pour Fallait-il s'en attrister, rester de marbre et se conten-
son accueil, son écoute et surtout pour avoir autorisé ter de tirer les derniers clichés de ce patrimoine ou
la prise de clichés. aller de l'avant et mettre rapidement à profit toutes les
compétences disponibles pour collecter un maximum
Bibliographie de données pouvant assurer une reconstruction à
■■ Froment P., Hanse A. & Liénard J.-C., 1996. La collégiale l'identique ? Les représentants de l'IPW et du Dépar-
Sainte-Gertrude de Nivelles hier et aujourd'hui, Rif tout dju, tement du patrimoine, le Service de l'archéologie de la
383, s.p. Direction extérieure du Brabant wallon en particulier,
■■ R. de Mons, 1974. R. de Mons. Nos  27-29. In  : Province de n'ont pas hésité à agir.
Brabant. Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine
monumental de la Belgique, 2), p. 397. Contexte historique
■■ Van Belle J.-L., 1994. Nouveau dictionnaire des signes lapi-
daires – Belgique et Nord de la France, Louvain-la-Neuve, Artel. Comme le précise un cartouche armorié («  Fideliter
■■ Willems D., 2015. Nivelles/Nivelles  : déception partielle à et Suaviter Anno 1784 »), apposé en guise de linteau
la rue des Choraux, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, sur la fenêtre centrale de la façade orientale, la phar-
p. 28-29. macie fut érigée durant le dernier quart du 18e siècle,
sous le court abbatiat de Dom Léonard Pirmez (1782-
Sources 1784). De cet édifice ne subsistent que quatre murs en
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879), briques, dont les façades, orientées à l'est et à l'ouest,
plan parcellaire de la commune de Nivelles. chacune percée de trois grandes baies quadrangulaires
■■ Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non daté (peut-être et reposant sur trois arcades en pierre bleue. Elle est le
entre 1810-1815 et 1830) et non signé (Musée archéologique de dernier aménagement majeur sur le site avant l'expul-
Nivelles). sion des moines en décembre 1796.

Contexte de l'incident

En s'engageant sous la pharmacie, un camion de l'en-


Villers-la-Ville/Villers-la-Ville : treprise Suez-Sita percuta les arcades de la façade occi-
des arcades malmenées à la pharmacie dentale et s'encastra dans celles de l'orientale, provo-
de l'abbaye quant leur effondrement.
Cet incident est en réalité le second de même type ; le
précédant se déroula en matinée du 8 novembre 1974, un
Didier Willems, Marie-Laure Van Hove accident de roulage qui détériora la façade occidentale. À
et Aude Van Driessche l'époque, la Régie des Bâtiments, propriétaire du site, fit
appel au Service de Topographie et de Photogrammétrie
Dans le cadre du schéma de développement touris- du Ministère des Travaux publics pour dresser des plans
tique du site de l'abbaye de Villers-la-Ville, l'Institut du et coupes les plus complets possible ; grâce à ces données
Patrimoine wallon (IPW) lança un chantier de restau- et aux archives, une restauration put être lancée par la
ration/réhabilitation dès 2013 et ce grâce à un cofinan- suite (Pharmacie, s.d., p. 9).
27

Temps modernes Brabant wallon

fiques : Faro/Trimble Scene (v. 5.1) pour


l'assemblage et les traitements initiaux
des données, Screened Poisson Surface
Reconstruction (v. 8.0) pour le maillage
(transformation des nuages de points en
surfaces continues) et PointCab pour les
vues orthogonales en nuage de points
(vues sur fond noir).
Au lendemain de cette intervention,
le Service de l'archéologie se chargea de
trier les multiples pierres chues, laissées
momentanément en place ou démontées,
afin d'en établir, sur base d'une nomen-
clature souhaitée par Sébastien  Mainil,
ingénieur-architecte à l'IPW, un inven-
taire le plus exhaustif possible.
Villers-la-Ville : vue générale de la façade orientale de la pharmacie, dans laquelle Concomitamment, une recherche à
s'est encastré le camion conteneur (22 octobre 2013).
travers les archives disponibles fut menée
pour collecter un maximum de données
Sauvetage et inventaire exploitables.

Les lieux devant être sécurisés, une mobilisation fut Conséquences et perspectives
rapidement lancée. Pour l'IPW, maître d'ouvrage, les
actes devaient répondre à un triple objectif, à savoir D'emblée, le projet de la passerelle fut modifié en vue
le démontage des parties instables, une dépose suivie d'une sécurisation accrue pour les visiteurs, contraints
d'une numérotation et d'un stockage des pierres de de pénétrer dans le site de l'abbaye par la pharmacie.
même qu'une consolidation des vestiges afin de main- Les résultats de l'intervention archéologique et des
tenir un état sanitaire correct, pré-requis pour une recherches complémentaires obtenus à ce jour consti-
reconstruction éventuelle (Mainil, 2013, p. 3). tuent une base technique solide pouvant appuyer
La Direction de l'archéologie prit part à ces interven- et justifier une réédification à l'identique. Toutefois,
tions de sauvetage. Ainsi, deux jours après l'incident, les si cette option paraît évidente, le doute subsiste, les
relevés des deux façades furent réalisés en recourant à travaux n'ayant toujours pas été entamés. Dans le cas
l'usage d'un scanner 3D, un Trimble TX5 à décalage de où cette tâche était exécutée, elle devrait immanqua-
phase (phaseshift) permettant une précision de mesure blement s'accompagner d'une signalétique routière
moyenne de l'ordre de 1 mm théorique jusqu'à 20 m suffisante, très en amont du bien, et encourager les
et 2 mm environ au-delà. Les résultats furent exploités démarches en vue d'un contournement acceptable
dans la foulée avec des logiciels informatiques spéci- pour le charroi volumineux.

Relevés au scanner de la façade orientale de la pharmacie Relevés au scanner de la façade occidentale de la pharmacie
( J.-N. Anslijn, Dir. archéologie). (J.-N. Anslijn, Dir. archéologie).
28

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Remerciements

L'intervention de sauvetage n'aurait pu être menée


dans ces circonstances quelque peu particulières
sans une mobilisation au sein du Département du
patrimoine ni la collaboration de l'IPW, représentée par
Annick Mahin et Sébastien Mainil, et de l'asbl Abbaye
de Villers-la-Ville en la personne de Michel Dubuisson.

Avec la collaboration de Jean-Noël Anslijn (Direction


de l'archéologie).

Sources
■■ Abbaye de Villers-la-Ville, l'ancienne pharmacie, plans et
élévations exécutés en décembre 1975 par photogrammétrie
terrestre par le Ministère des Travaux publics.
■■ Mainil S., 2013. Abbaye de Villers-la-Ville, arcades de la phar-
macie, fiche d'état sanitaire, Institut du Patrimoine wallon.
■■ Pharmacie, s.d. La pharmacie de l'abbaye de Villers-la-Ville,
rapport anonyme.
29

Époque contemporaine Brabant wallon

ÉPOQUE CONTEMPORAINE
Braine-l'Alleud/Braine-l'Alleud : fouilles
sur le domaine d'Hougoumont dans le
cadre du projet Waterloo Uncovered

Dominique Bosquet, Tony Pollard, de destruction par l'érosion agricole, particulièrement


Philippe De Smedt, Mark Evans, Stuart Eve, active sur un relief contrasté tel que celui-ci, de même
Charles Foinette, Marc Van Meirvenne que par la pratique illégale de la détection des métaux,
et Alasdair White difficile à maîtriser sur les quelque 615  ha classés du
champ de bataille.
Introduction Après une campagne de prospections géophysiques
menée début avril 2015, une campagne de fouille
En prévision du bicentenaire de la bataille de Waterloo, test de 4 jours à été programmée la dernière semaine
de nombreux aménagements ont été entrepris sur du même mois suivie, fin juillet, par 2  semaines de
le site et furent l'occasion de mener des fouilles fouilles plus approfondies. Dans un contexte d'époque
préventives à divers endroits du champ de bataille récente et abondamment documenté, l'archéologie
(Bosquet et al., 2015  ; Willems, 2015). Par ailleurs, doit permettre d'objectiver les données historiques
le regain d'attention porté à cette épisode majeur de parfois contradictoires, partielles ou de parti pris dans
l'histoire européenne a été mis a profit pour initier un la description des évènements ayant abouti à la victoire
programme de recherches archéologiques mené par des Alliés le 18 juin 1815.
une équipe internationale composée d'archéologues du
Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Le domaine d'Hougoumont
Brabant wallon (DGO4 / Département du patrimoine),
des universités de Gand, Glasgow et Dundee et Les premières recherches se sont concentrées autour
du programme Operation Nightingale. Ce dernier de la ferme d'Hougoumont qui a joué un rôle majeur
consiste à réhabiliter, par la pratique de l'archéologie, dans la défaite des Français, ces derniers s'étant
des vétérans de l'armée anglaise ayant participé aux acharnés à essayer de la prendre tout au long de la
conflits afghan et irakien. Les recherches menées par journée, sans succès. Le domaine cadenassant le
l'équipe de Waterloo Uncovered s'avèrent d'autant plus flanc droit de Wellington, sa prise aurait en effet
importantes que le champ de bataille est bien menacé pu permettre aux troupes de Napoléon de prendre

Le domaine d'Hougoumont à la fin du 18e siècle (a) et en 1815 (b). 1. Ferme-château ; 2. Jardin ; 3. Verger ; 4. Potager ; 5. Verger et
potager nord ; 6. Bois ; 7. Jardin extérieur ; 8. Killing zone. Éléments reportés sur : a. Extrait de la carte de Ferraris, Braine la Leud,
pl. 78 (© Bibliothèque royale de Belgique) ; b. Extrait de la carte de Craan (reproduite avec la permission de S. Eve).

5
3
4 1 2
7
8

a b
30

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

à revers les lignes alliées, avec pour


conséquence possible une autre issue à
la bataille. Les combats autour d'Hou-
Jardin
goumont ont été rythmés d'incessantes Tr 27

allées et venues des troupes françaises


et alliées sur un terrain structuré par
divers éléments paysagers. Aujourd'hui Tr 30
Tr 23
disparus, ils sont diversement représen-
r sud
tés sur les cartes anciennes et ont joué
Mu
un rôle majeur dans la dynamique des
combats : le bois (6) et un grand jardin
(7) au sud, le jardin à la française (2) et Tr 16

le verger (3) à l'est, le chemin au nord et Killing zone


le potager (4) à l'ouest. 10 m
Tr 15
Questions posées

Comment plusieurs milliers de Français


ont-ils été incapables de prendre une
Balles alliées
ferme défendue par 1 500 Alliés proté- Balles françaises Bois
gés par un mur de brique de 2 m de haut
à peine demeure une question pendante Domaine d'Hougoumont : répartition des balles de mousquet alliées et françaises
de part et d'autre du mur d'enceinte (bord sud du jardin).
pour bien des historiens. Une partie au
moins de la réponse réside dans la confi-
guration des lieux qui, selon les documents consul- les plus significatives afin de procéder à l'ouverture
tés, varie parfois significativement. Chemins, fossés, de sondages, seuls à même de contrôler la nature
bois, vergers et haies (une haie en particulier, située (naturelle ou anthropique) et l'âge des faits mis en
entre le bois et le mur sud du domaine, semble avoir évidence. En 6 jours à peine ont ainsi été prospectés
joué un rôle décisif) sont autant d'éléments qu'il faut une partie de l'ancien bois (6), le jardin (2), le verger
essayer d'identifier en caractérisant l'emplacement (3), la killing zone (8), le potager et le petit verger (5)
exact, l'étendue et la configuration. au nord du jardin. Une trentaine d'anomalies géophy-
Une autre problématique guidant les recherches est siques ont alors été sélectionnées pour faire l'objet de
la localisation des charniers et des bûchers aménagés sondages test (avril 2015) et de fouilles (juillet 2015).
et entretenus dans les jours qui ont suivi la bataille La détection des métaux est, quant à elle, une
pour éliminer les corps et les débris humains. Ces méthode incontournable de l'archéologie des champs
opérations sont illustrées sur certaines gravures de bataille (Scott & Mc Featers, 2011 ; Pollard, 2009).
d'époque qui les situent à proximité des portails nord Elle permet, en peu de temps et sur de grandes
et sud, mais il est probable que de tels fosses et foyers surfaces, de spatialiser tous les déchets métalliques
existent ailleurs autour de la ferme, là où gisaient le liés aux combats et aux mouvements de troupes  :
plus de cadavres. munitions bien sûr, mais aussi débris d'armes, pièces
d'uniformes, éléments de harnachement, accessoires
Méthodes divers… Une série d'axes parallèles, espacés de 5  m
les uns des autres, ont été implantés sur le terrain
Plusieurs campagnes de prospections géophysiques, et systématiquement prospectés, couvrant la partie
couvrant 15  ha à ce jour, ont été menées entre avril accessible de l'ancien bois, la killing zone, le jardin
et septembre 2015 par l'unité Orbit de l'Université et le verger. Plus de 1  000  objets ont été relevés en
de Gand. Deux techniques ont été utilisées de façon coordonnées, extraits du sol et inventoriés avant trai-
conjointe : l'induction électro-magnétique (EMI) et la tement et analyse.
magnétométrie. L'intérêt majeur de ces méthodes est
qu'elles permettent de repérer les anomalies présentes Résultats préliminaires
dans le sol sans ouvrir celui-ci et ce à un rythme de 3
à 4 ha par jour (De Smedt & Van Meirvenne, 2014). Les résultats obtenus après 14  jours de terrain
Les relevés étant géoréférencés, il est ensuite possible seulement sont encourageants, les gains en termes
de cibler très précisément sur le terrain les anomalies de méthodologie étant, en particulier, substantiels.
31

Époque contemporaine Brabant wallon

Il n'est pas inutile de rappeler ici que, dans la illustration de ce que l'archéologie peut apporter aux
mesure où il s'agit de relever les traces d'un récits et aux mythes – le mot n'est pas trop fort – qui
évènement ayant duré une journée –  fait pour le relatent les combats pour la prise d'Hougoumont.
moins inhabituel en archéologie  –, les méthodes
jouent un rôle capital et doivent être en permanence Conclusion et perspectives
adaptées en fonction de ce qui est – ou n'est pas –
découvert. Ont ainsi été vérifiés la nature et l'âge En 14  jours à peine de recherches sur le terrain, les
de plusieurs anomalies caractérisées par une forte objectifs principaux sont atteints  : la validité des
susceptibilité magnétique, paramètre qui indique enregistrements géophysiques est confirmée, de
la présence probable d'éléments brûlés et/ou de même que la persistance possible, dans la réparti-
terre cuite, soit autant de bûchers potentiels. Les tion des déchets métalliques issus de la bataille, de
sondages ont révélé des fours à briques et des amas configurations spatiales significatives. À ce jour
de matériaux de construction très probablement liés cependant, aucun charnier n'a encore été mis au jour
à l'édification et à l'entretien du château, sans lien malgré la découverte de grands creusements qui, en
direct avec la bataille. Leur découverte confirme fouille, se sont avérés liés à l'extraction de sable et
néanmoins l'efficacité des méthodes géophysiques, de grès. La mise en évidence des charniers reste un
qui permettent d'ouvrir rapidement des « fenêtres » axe majeur des recherches, de même que la poursuite
sur des structures archéologiques qui, autrement, des prospections métalliques dans la killing zone et le
n'auraient été mises au jour que lors d'une jardin, là où, de façon de plus en plus évidente, s'est
évaluation systématique sur toute la superficie du en grande partie jouée la défaite française à Hougou-
domaine. Par ailleurs, les données enregistrées en mont, épisode majeur de la victoire alliée à Waterloo.
conductivité électrique ont permis de repérer de Plus de détails et le rapport complet des campagnes
façon tout à fait précise le fossé qui formait la limite d'avril et de juillet 2015 sont disponibles sur le site
orientale du verger. Ce fossé, repéré par sondage, est www.waterloouncovered.com.
un élément capital des combats ayant eu lieu dans
et autour du verger. Mentionné dans certains récits, Bibliographie
il ne figure de façon précise sur aucun plan ni carte ■■ Bosquet D., Yernaux G., Fossion A & Vanbrabant  Y.,
et il est probable qu'une partie des très nombreuses 2015. Le soldat de Waterloo. Enquête archéologique au cœur du
victimes tombées à cet endroit y aient été ensevelies. conflit, Namur, Service public de Wallonie, 22 p.
Des fouilles approfondies devront y être menées. ■■ Pollard T. (éd.), 2009. Culloden. The History and Archaeology
À ce jour, c'est la détection des métaux qui a donné of the Last Clan Battle, Barnsley, Pen and Sword Military.
les résultats les plus spectaculaires, en particulier ■■ Scott D.D. & McFeaters A.P., 2011. The Archaeology of
lors du suivi systématique des ouvertures de Historic Battlefields: A History and Theoretical Development
tranchées. Il est en effet apparu que, dans la killing in Conflict Archaeology, Journal of Archaeological Research, 19,
zone et dans le jardin en particulier, où la détection p. 103-132.
des métaux avait peu très donné préalablement, ■■ Willems D., 2015. Braine-l'Alleud/Braine-l'Alleud : inves-
une grande quantité de munitions pouvait encore tigations archéologiques à l'emplacement de l'ancien château
être retrouvée, mais après l'enlèvement de la couche d'Hougoumont, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23,
arable sur 10 à 15 cm. À la lecture des coupes réali- p. 32-35.
sées, il semble en effet que ces deux secteurs ont
été soumis à au moins quelques épisodes de labour Sources
après la bataille, perturbations ayant entraîné les ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
objets originellement dispersés en surface à une Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Braine la Leud, pl. 78.
trentaine de centimètres de profondeur. C'est ainsi ■■ Craan W.B., Plan of the Battle of Waterloo or Mount St. John,
que, pour la première fois et à l'encontre des récits reduced from the large Plan of the same Battle, 1816.
historiques, des balles tirées par les Français ont été ■■ De Smedt P. & Van Meirvenne M., 2014. Geophysical Soil
trouvées dans le jardin, à quelques mètres du pied Survey Waterloo: EMI Survey, rapport inédit, Research group
du mur d'enceinte. Il semble que les assaillants aient soil spatial inventory techniques (ORBit), Department of Soil
eu la possibilité de prendre appui sur le mur pour Management, Ghent University.
faire feu sur les Anglais retranchés à l'intérieur. La
présence d'une balle anglaise tirée dans l'enceinte
permet même d'évoquer un possible franchissement
de ce mur par des soldats français, mais ceci reste à
confirmer. Quoi qu'il en soit, on a ici la meilleure
32

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : fouille de 2015  ; Briers et al., 2015). Étant donné le caractère


contrôle sur le site protohistorique de exceptionnel de ce type de vestiges en Belgique, il a été
décidé de vérifier la nature exacte des trois fosses par
Gastuche
une fouille approfondie, qui fait l'objet de cette notice.
Pour rappel, l'emprise du lotissement de la Régie
Dominique Bosquet et Véronique Moulaert foncière du Brabant wallon, en cours de construction
au moment de l'intervention, est située en rive droite
Introduction de la Dyle et couvre le bas d'un petit vallon orienté
sud-ouest/nord-est, au tracé légèrement courbe, avec
La fouille a été menée sur trois fosses relevées au croi- un talweg bien marqué. La zone fouillée correspond
sement de la rue Joseph  Decooman et de la rue des au point culminant du terrain, situé au sud-est à 75 m
Thils (coord. Lambert  72  : 170124  est/158120  nord). d'altitude. La fouille, réalisée grâce aux moyens tech-
Lors de l'évaluation archéologique de 2012-2013, niques mis à disposition par l'entrepreneur (Frateur-
celles-ci avaient été interprétées comme des trous Mavoirie sprl) a concerné une zone de 70 m² et s'est
d'obus modernes (Bosquet, 2014) et n'avaient de ce déroulée les 28 et 29 octobre 2015.
fait pas été fouillées en 2014 (Bosquet et al., 2015  ;
Briers et al., 2015). Les analyses réalisées sur le matériel Méthode
archéologique exhumé dans les autres structures ont
cependant permis mettre en doute cette interprétation Deux fenêtres ont été ouvertes à l'aide d'une pelle méca-
et de proposer une autre hypothèse, ces fosses pouvant nique, dégageant les fosses en question. Celles-ci sont
être protohistoriques et liées à l'extraction de minerai apparues juste sous la couche de terre arable. Après la
de fer sous forme de goethite en croûtes (Bosquet et al., pose des axes de coupe, les fosses ont été topographiées
et ouvertes en quadrants, à la truelle dans
un premier temps, puis à la bêche.
no 101E

RL Résultats

Les trois fosses présentent les mêmes


caractéristiques  : forme circulaire et
remplissage supérieur de couleur grise
70 mm
contenant des fragments métalliques
pris dans une épaisse gangue de rouille
ainsi que des petites baguettes longi-
lignes d'un métal cuivreux. Dans les trois
cas, ce remblai gris coiffe une fosse plus
a b
vaste, dont le bord, assez difficile à perce-
voir, est caractérisé notamment par des
phénomènes de compression. On note
également des traces de stagnation et de
ruissellement d'eau à la base du remblai
gris et un fin dépôt noirâtre irrégulier
qui témoigne de la présence de matière
organique, probablement issue d'un
léger couvert végétal ayant poussé sur les
parois.
Une tête d'obus a été trouvée dans l'une
de ces fosses, confirmant sans ambiguïté
l'interprétation proposée à l'issue de la
c campagne d'évaluation. L'objet décou-
d vert est une fusée percutante anglaise
Fusée percutante anglaise n   101E (a) portant l'inscription   RL  pour Royal
o (graze fuse), dispositif servant de détona-
Laboratory (b), vue du pas de vis (c) et tête d'une fusée no  101 pour com- teur aux obus. Plus précisément, il s'agit
paraison (d, source : http://www.passioncompassion1418.com/decouvertes/ ici du modèle no 101E, mis en circulation
fusees_collection_gb.html).
entre 1916 et 1953, date de son retrait
33

Époque contemporaine Brabant wallon

des stocks de l'armée. Notamment fabriqué par le


Royal Laboratory, comme c'est le cas de l'exemplaire
découvert qui porte l'inscription RL, il était monté sur
différents types d'obus utilisés comme munitions pour
divers canons et obusiers (http://www.passioncom-
passion1418.com/decouvertes/fusees_collection_
gb.html, consulté le 17  mai 2016). Des détonateurs
comparables sont régulièrement trouvés et décrits par
les amateurs intéressés par les deux dernières guerres.

Bibliographie
■■ Bosquet D., 2014. Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : évaluation
préventive à Gastuche, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, Château de Rixensart  : façade côté jardin de l'aile nord,
© MRAH, 2015.
p. 49-51.
■■ Bosquet D., Briers T., De Staercke O., Collette  O.,
Goemaere É., Goovaerts T., Hanut F., Leduc T. & Preiss S., site par arrêté du 20  novembre 1972. En 1993, il est
2015. Les arts du feu dans le site La Tène de «  Gastuche  » reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie.
à Grez-Doiceau (Brabant wallon)  : premières analyses et Les éléments construits ont fait l'objet d'un enregis-
interprétations, Lunula. Archaeologica protohistorica, XXIII, trement systématique graphique et photographique.
p. 125-136.
Parallèlement, divers fonds d'archives tels que les
■■ Briers T., Bosquet D., De Staercke O., Collette O., archives du Cadastre du Brabant (Bruxelles), les
Goemaere É., Goovaerts T., Hanut F., Leduc T. & Preiss S.,
archives de la famille de Merode (Rixensart) ou encore
2015. Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : le site La Tène de Gastuche,
les archives de la Commission royale des Monuments,
résultats des fouilles et premières analyses, Chronique de l'Ar-
chéologie wallonne, 23, p. 15-21.
Sites et Fouilles (Liège) ont été consultés.
Le château de Rixensart forme un quadrilatère
autour d'une cour plus ou moins trapézoïdale, aux
angles flanqués chacun d'une tourelle octogonale. On
accède à la cour par une tour-porche aménagée au
Rixensart/Rixensart : étude préalable à la centre de l'aile méridionale. Celle-ci est précédée d'une
restauration du portique de l'aile nord du avant-cour partiellement bordée par des communs et,
château à l'ouest, par l'ancienne chapelle castrale, aujourd'hui
paroissiale. D'origine médiévale assurée, le château
est complètement reconstruit au 17e siècle, au profit
Patrice Gautier, Élisabeth Bruyns d'une nouvelle demeure, destinée à la plaisance et
et Antoine Baudry à la chasse (pour plus d'informations sur le château
de Rixensart  : Berckmans, 1977  ; Château, 1974  ;
Introduction Zecchinon, 1995). L'aile septentrionale est bâtie en
1631. Ensuite, le château est agrandi, de manière à
En 2015, le portique, logé contre le mur-gouttereau former un quadrilatère (aile ouest millésimée de 1648)
nord de l'aile septentrionale du château de Rixensart
(parc. cad. : Rixensart, 1re Div., Sect. G, no 69 ; coord.
Lambert : 161820  est/156144  nord), a fait l'objet
d'une étude archéologique (Musées royaux d'Art et
d'Histoire) couplée à une étude documentaire et d'un
dépouillement des sources archivistiques (Association
pour l'Étude du Bâti) préalablement à sa restauration
(Gautier, Baudry & Bruyns, 2015). La mission, finan-
cée à 95 % par la Direction de la restauration (DGO4 /
Département du patrimoine), a permis de documenter
la construction et l'évolution du portique – aujourd'hui
en ruine – afin d'orienter le maître d'ouvrage (famille
de Merode) et le maître d'œuvre (Atelier 20) dans les
choix de restauration. Le château a été classé comme Château de Rixensart  : portique adossé à l'aile nord,
© MRAH, 2015.
monument par arrêté royal du 15 mai 1964 et comme
34

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

avec l'ajout de galerie au rez-de-chaussée et couloir à de la structure étaient probablement légèrement plus
l'étage (millésimés de 1660 et 1662) le long des ailes bas lors de sa construction qu'ils ne le sont aujourd'hui.
orientale et méridionale (Marcolungo, 2004, p. 76). Aucun sondage n'a été exécuté pour retrouver ces
niveaux.
Le portique d'origine Les archives n'ont pas livré de mention explicite de
la construction du portique. Toutefois, les mentions
Le portique s'organise en trois travées. Huit piliers suivantes pourraient y faire référence,  l'une en 1852,
(UC 05 à UC 12), dont quatre engagés (UC 05 à UC 08) l'autre en 1831 :
contre la façade nord de l'aile nord du bâtiment (millé- – Memoire des ouvrages de marechal fait et livré pour
simée de 1631, UC  33), supportaient trois coupoles le service de Monsieur Compte Felix de Merode reco-
surbaissées, base d'une plateforme de 8,28  m de mancé le 3 9bre 1852 par moi F Pigeolet.15 7bre avoir
longueur pour 2,72 m de largeur. À hauteur du premier mis un neuf resort à cerure de la chambre de balcon et
étage, une baie à croisée de la façade a été transformée racomodé la cerure (archives de la famille de Merode à
en porte, permettant l'accès à cette plateforme domi- Rixensart, caisse contenant des photocopies de docu-
nant les jardins. Chaque travée se compose d'arcades ments d'archives, 1er lot-2e lot, 1re partie).
en plein cintre construites en briques  (UC  34, UC – Monsieur Bosquet, en vous écrivant hier pour le
35 et UC 36) entre les piliers et renforcés d'un tirant jet d'eau, j'ai omis de vous marquer la quantité de
métallique. Les piliers sont posés sur une base en grès zinc nécessaire pour la couverture du balcon. […]
ferrugineux et supportent un chapiteau façonné dans Le balcon comprend 300  pieds carrés… (archives de
le même matériau. Les niveaux de circulation au pied la famille de Merode à Rixensart. Lettre du 15  mai
1831, caisse contenant des photocopies
de documents d'archives, 1er  lot-2e  lot,
Briques
Petit granit 1re partie).
Grès lédiens
Grès ferrugineux Cette mention d'un «  balcon  » de
Vide
Végétation
Nord 300 pieds carrés de 1831 se réfère-t-elle
au portique de l'aile nord du château  ?
L'emprise au sol de la construction
31
(8,28 m de longueur × 2,72 m) présente
16 16 16
un rapport d'environ 1 sur 3. Sans
34 35
36
33 17
16
connaître la référence de la mesure en
24 vigueur à l'époque de sa construction, cet
édifice pourrait donc avoir des dimen-
33
33 sions de 30 pieds de long pour 10 pieds
de large, pour atteindre une superficie
06 05
04 de 300 pieds carrés. Le pied de Bruxelles
12
27
11
33 ou de Nivelles valant respectivement
03
27,575 cm et 27,7 cm, le « balcon » cité en
33
14
Alt : 64 cm
33
1831 mesure d'après ces valeurs 8,27  m
30 13
10 01
09 de longueur × 2,75 m de largeur en pieds
de Bruxelles et 8,31  m de longueur ×
Alt : 0 cm

2,77  m de largeur en pieds de Nivelles


(Doursther, 1840, p.  405  : Bruxelles  :
08 07
15 04
06 05 27,575 cm ; p. 413 : Nivelles en Belgique :
27,7  cm ou 27,709  cm  ; p.  418  : Wavre
20 03 02 en Belgique : 28,53 cm). La mention de
23 13
balcon en 1831 fait donc plus que vrai-
Alt : 2,075 m Alt : 64 cm
semblablement référence au portique de
14
10 01 09 l'aile nord.
27
12 11
Dès sa construction, le portique
Alt : 0 cm
sera recouvert d'une peinture blanche
(UC 17).
0 5m

Élévation nord et plan du portique de l'aile nord. Les chiffres renvoient aux Cet état est illustré notamment par
UC (unités de construction). En médaillon, plan du château (Atelier 20, 2011), la lithographie de J.-B.  Jobard –  artiste
© MRAH, 2015.
établi à Bruxelles dès 1817 et décédé en
35

Époque contemporaine Brabant wallon

Troisième état (entre-deux-guerres)

Sur les photographies de 1944 conservées à l'Insti-


tut royal du Patrimoine artistique (clichés A070104
et A070105), le portique a acquis une physionomie
très différente, encore en grande partie perceptible
aujourd'hui.
La plateforme inférieure a été détruite et a fait place
à un escalier en pierre de deux volées droites (UC 01
et 03) séparées par des repos (UC  02 et 20), installé
dans les deux travées occidentales du portique, sous les
trois « coupoles ». Cet escalier relie le jardin au rez-de-
Château de Rixensart, lithographie de J.-B.  Jobard (1792- chaussée du château. La travée orientale du portique
†1861), vers 1820-1830 (collection privée).
a été murée (UC  30) de manière à créer un petit sas
d'entrée, éclairé par deux fenêtres (dont UC  24), au
1861 –, sur laquelle le portique est dépouillé d'escalier devant du château.
et de tous les niveaux intermédiaires qu'on lui connaît La première volée (UC  01) se compose de quatre
actuellement. marches droites en grès ferrugineux (larg. 2,10 m), tail-
N'apparaissant pas sur les croquis d'arpentage du lées au ciseau ou à la boucharde. La première marche
cadastre, ce petit appendice néoclassique en saillie de la est néanmoins plus large que ses consœurs (larg.
façade du château du 17e siècle n'est pas évident à dater 2,70 m) et est adoucie. Cette première volée est encla-
précisément. La mention de 1831 et la lithographie de vée entre deux piliers du portique (UC 09 et UC 10).
J.-B. Jobard (1792 – †1861), datée vers 1820-1830, en La seconde volée (UC  03), quant à elle, se compose
donnent un terminus ante quem précis. de neuf marches droites en petit granit (larg. 1,94 m),
Elle est plus que probablement à dater des premières taillées au ciseau. Parfois, une ciselure d'environ 5 cm
décennies du 19e  siècle (avant 1831). Dans ce cas, sa borde l'une des arêtes des blocs. Cette seconde volée
construction est à mettre à l'actif du comte Philippe est enclavée entre deux murs maçonnés (UC  14 et
Félix Balthazar de Merode, né en 1791 à Maastricht, UC 15), composés de briques cassées et/ou possédant
décédé en 1857 à Bruxelles, homme d'état et écrivain des gabarits hétérogènes. Les murs sont eux-mêmes
qui réalisa de nombreux travaux au château de installés entre les piliers médians du portique (UC 06,
Rixensart, ou de ses parents, propriétaires du château UC 07, UC 10 et UC 11) avec lesquels ils ne sont pas
depuis 1804. Cependant, il n'est pas à exclure que le liaisonnés. Une main courante en fer garnit cette
portique ait été construit quelques années plus tôt volée. Contre un des piliers engagés (UC 06), l'escalier
– voire à la fin du 18e siècle (Zecchinon, 1995, p. 83 ; recoupe une fenêtre (UC 04), utilisant des pierres en
Merckx, 1994, p. 5) par le comte Balthazar Philippe de récupération comme encadrement, s'ouvrant sur les
Merode-Montfort (1735 – †1816). sous-sols voûtés de l'aile nord du château.
Les deux repos rectangulaires (UC 02 et UC 20) sont
Deuxième état (vers 1900) revêtus de dalles carrées en pierre d'environ 35-36 cm
de côté, décalées à chaque rangée d'une demi-dalle. Le
Plusieurs cartes postales imprimées du début du premier repos (UC 02) se clôture à l'ouest par un mur
20e siècle, montrant un portique entièrement couvert en briques (UC 13), localisé entre les piliers occiden-
de lierre, indiquent que ce dernier a été transformé (fin taux du portique avec lesquels il n'est pas liaisonné.
du 19e siècle-début du 20e siècle ?). Le portique est alors Le second repos (UC 20) sert de sol à une petite pièce
pourvu d'un nouveau  niveau de circulation intermé- voûtée, ouverte à l'ouest par une porte en plein cintre en
diaire, sous forme d'une plateforme inférieure posée bois à ferrures (UC 23), et éclairée au nord et à l'est par
pratiquement à hauteur du rez-de-chaussée de l'aile des baies cintrées (dont UC 24) protégées par un grillage
nord du château. Il est accessible depuis les jardins, à en fer forgé. Ces deux dernières sont garnies de vitraux
l'est, par un nouvel escalier en pierre d'une dizaine de dont les verres blancs sont disposés en losange. Sous cette
marches construit contre le mur-gouttereau nord de pièce se situe un petit réduit couronné par un entrevous
cette même aile (UC 33). La plateforme intermédiaire en briques reposant sur des solives métalliques. Ce réduit
et la plateforme supérieure sont pourvues de garde- est accessible à l'est par une porte en bois, dont les ferrures
corps en fer forgé (UC  31). Le portique sera repeint sont stylistiquement proches de celles de la porte UC 23.
en couleur rouge brique. La plupart de ces éléments ne Il est éclairé au nord par un petit jour aux encadrements
subsistent plus aujourd'hui. de pierre blanche et piédroits chanfreinés (UC 27).
36

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

1. État d’origine (?) 2. État vers1900

3. État entre-deux-guerres 4. État 2015

0 5m

Château de Rixensart : évolution du portique de l'aile nord, © MRAH, 2015.

L'escalier actuel du portique, le réduit et la petite Bibliographie


pièce voûtée ont été érigés entre-deux-guerres, une ■■ Berckmans O., 1977. Rixensart. In : Genicot L.-F. (dir.), Le
période durant laquelle le propriétaire du château grand livre des châteaux de Belgique, vol.  2, Châteaux de plai-
fait aménager les jardins et reconstruire la chapelle. sance : manoirs, demeures classiques et résidences d'été, Bruxelles,
Notons que lors de ces opérations, de nombreux maté- p. 216-119.
riaux ont été réemployés  : tel est le cas des briques ■■ Château, 1974. Rixensart. Château. In : Province de Brabant.
composant la plupart des murs (UC  03, UC  14, Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine monumental
UC 15 et UC 30) et peut-être aussi celui des marches de la Belgique,2), p. 481-484.
de l'escalier (UC 01 et UC 03). Les travaux de trans- ■■ Doursther H., 1840. Dictionnaire universel des poids et
formation du portique sont à attribuer au prince Paul mesures anciens et modernes, contenant des tables des monnaies
Ghislain Félix de  Merode (1882 – †1943), établi au de tous les pays, Bruxelles.
château de Rixensart avec sa famille vers 1920. C'est ■■ Marcolungo D., 2004. Rixensart. Le château des Princes de
lui qui entreprit de grands travaux de restauration du Merode. In : Deveseleer J. (dir.), Le patrimoine exceptionnel de
château et de ses jardins (Merckx, 1994, p. 3). Wallonie, Namur, p. 75-78.
Les deux travées occidentales de la structure se sont ■■ Merckx B., 1994. Le château de Rixensart. Évolution archi-
effondrées à la fin des années 1990. Aujourd'hui, seules tecturale, fascicule bilingue édité à l'occasion des Journées du
Patrimoine, s.l., 15 p.
la travée orientale et sa couverture sont conservées.
Suite à l'effondrement des deux coupoles occi- ■■ Zecchinon A., 1995. Le château de Rixensart  : histoire et
architecture, Namur (Carnets du Patrimoine, 13), 32 p.
dentales du portique, la trace d'un enduit rouge
(UC  16), rehaussé de lignes blanches reproduisant
un appareil de fausses briques avec une alternance Sources
de tas de boutisses et panneresses, a été mis au jour. ■■ Gautier P., Baudry A. & Bruyns É., 2015. La terrasse monu-
Ces restes d'enduits posés directement sur la façade mentale du château de Rixensart. Documentation historique et
de château (UC 33) pourraient en constituer le revê- archéologique à l'attention des Maîtres d'œuvre et d'ouvrage,
tement primitif et dater du 17e siècle – pour rappel rapport inédit, MRAH, Bruxelles, 57 p.
l'aile nord du château est millésimée par ancre de
1631.
37

Toutes périodes Brabant wallon

TOUTES PÉRIODES
Beauvechain/L'Écluse : une opération
archéologique à la rue de la Cabourse

Frédéric Heller et Aude Van Driessche

Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure du


Brabant wallon (DGO4 / Département du patrimoine)
est intervenu au no 7 de la rue de la Cabourse (coord.
Lambert  72  : 182384  est/162544  nord) afin d'y effec-
tuer un suivi archéologique suite à l'introduction d'une
demande de permis d'urbanisme pour la construction
d'une maison. À notre arrivée, nous avons constaté que
les travaux avaient débuté un mois avant la date de mise
en œuvre légale. Les fondations étaient déjà entamées et
une partie des murs de soubassement construits.
Malgré les traces de chenilles couvrant l'intérieur de
l'habitation, nous avons pu nous rendre compte que le
décapage préalable n'avait apparemment pas recoupé
de structures archéologiques. Une vérification dans les Extrait de la carte de Charlot (1743) montrant le découpage
tas de déblais conclut également à l'absence de matériel des parcelles autour de la ferme des Perlets en 22
(© Archives générales du Royaume, Bruxelles, Familles de
archéologique.
l'Escaille, T 053 – 75A).
Outre ces fondations, trois tranchées de 50 m de long
et 2 m de large pour 1,20 m de profondeur devaient être
creusées à la pelle mécanique à l'arrière de la maison interfluve entre deux vallées : l'une au nord, le «  Fond
pour déposer les tuyaux du système de géothermie. Les des Béguines  », comblée de sédiments, n'est plus que
terrassements des trois tranchées étaient prévus pour marécages. L'autre, au sud, abrite le cours du Schoorbroek
être réalisés dans la journée, ce qui nous a permis d'en qui traverse le village de L'Écluse d'ouest en est.
assurer le suivi archéologique. Le substrat géologique constitué de sables du Bruxel-
lien est ceinturé au nord, à l'est et au sud par des allu-
Le site vions. Celles-ci sont mal drainées, probablement à
horizons réduits, et les sols de l'interfluve bien drainés
La parcelle se situe en contrebas du plateau de Beauvechain, (Olivier Collette, communication personnelle). Un dépôt
sur une légère éminence (alt.  84  m) à l'extrémité d'un de colluvions épais de 0,50 à 0,65 m a progressivement
recouvert les niveaux anciens sur l'ensemble du terrain.
Contiguë à la parcelle, la ferme des Perlets affiche sur
sa façade la date de 1629. On la retrouve en vue cava-
lière sur une carte aquarellée de 1743 (no 22).

Le suivi

La première des trois tranchées du système de géother-


mie a livré les traces d'un probable petit fossé aligné
sud-ouest/nord-est, et mis en évidence un colluvion-
nement important sur le site. La deuxième, à 6 m à l'est
en parallèle, n'a livré qu'un chablis.
La troisième tranchée, située 4  m à l'est de la
deuxième, a entamé le bord de deux fosses. Une troi-
sième fosse (F03) est apparue dans l'axe de la tranchée,
Localisation du site sur fond cadastral : 1. La zone fouillée ; sous un niveau de colluvions. Elle contenait des osse-
2. L'emprise de la maison ; 3. La ferme des Perlets.
ments en place.
38

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Nous avons alors fait dévier la tranchée vers l'est des structures isolées ou se recoupant, montrant ici
dans l'espoir que la pose des conduites soit terminée le trois périodes distinctes allant de la Protohistoire
même jour, mais d'autres fosses sont directement appa- aux Temps modernes. Au fond de la structure F03 se
rues, ce qui a motivé l'arrêt du chantier de géothermie. distinguait un trou de poteau. Son niveau d'apparition
Le grutier a ensuite effectué un décapage de 5 m de correspondait en coupe à l'interface entre deux paquets
large sur 30 m de long dans l'axe d'implantation de la de colluvions. Un décapage à ce niveau a permis la
dernière tranchée au niveau d'apparition des struc- mise au jour de la tombe F36, attestant ici d'au moins
tures archéologiques. deux phases d'occupation.

Les structures Les trous de poteaux

Trente-six structures ont été mises au jour, toutes de type Le site n'a livré que quatre trous de poteaux, à fond
fossoyé (trous de poteau, fossés, fosses et sépultures). plat et d'un diamètre variant entre 0,25 m et 0,32 m,
Le premier décapage sous les colluvions a dégagé profonds de 0,10 m à 0,17 m. Ils ne font pas partie d'une

L'Écluse : plan des tranchées et vues zénithales des fosses sépulcrales.


39

Toutes périodes Brabant wallon

structure directement identifiable et appartiennent à pelle en fer, pot en grès et autre sabot en caoutchouc.
des horizons stratigraphiques différents. Le contre-quadrant n'a pas été vidé.
Trois fosses sépulcrales (F03, F05 et F07/F22) conte-
Les fossés nant des ossements de faune en connexion anatomique
ont été mises au jour sous le niveau de colluvions le
Deux fossés de dimensions similaires ont été identi- plus récent.
fiés : le fossé F10, large de 0,53 m et profond de 0,30 m, La fosse F03, de petites dimensions, a livré les restes
aligné selon un axe sud-ouest/nord-est  ; l'autre, F21, d'un jeune suidé, à savoir la partie gauche de la cage
aligné sud-est/nord-ouest, perpendiculairement à thoracique, les deux humérus et une partie de la
l'axe de F10, venait se perdre dans une structure aux colonne vertébrale. Le squelette était déposé en décu-
contours flous, F16, pouvant correspondre à une série bitus latéral, tête à l'ouest, pattes vers le nord. L'absence
de chablis contigus. Ces deux fossés présentaient un d'autres os tel le pelvis atteste le dépôt d'une carcasse
profil en U et à fond plat et avaient conservé des traces partielle dans la fosse.
de passage d'eau. Il s'agit probablement ici d'un vestige La fosse F05 recelait les restes de deux animaux.
de parcellaire. L'un, un suidé, n'était représenté que par une partie
du bassin, la colonne et quelques côtes. Il était déposé
Les fosses en décubitus latéral, pattes vers le sud et bassin à l'est.
5 à 10  cm en-dessous se trouvait un équidé juvénile
Une première structure, F04, n'a pas livré de maté- complet, déposé en décubitus latéral, tête à l'ouest,
riel ; elle présentait néanmoins une forte précipitation jambes vers le sud, soit dans la même position que le
d'oxydes de fer sous la fosse attestant de la décompo- cochon.
sition de matière organique dans celle-ci. La structure La fosse F07/F22 contenait deux squelettes. Comme
F06, contenant de la vaisselle en tôle émaillée blanche, elle était fortement érodée (il ne restait qu'environ
n'a quant à elle pas été fouillée. 9 cm d'épaisseur), il était impossible de distinguer s'il
Les fosses dont la fonction a pu être identifiée sont s'agissait d'une fosse unique abritant deux corps ou
de trois types : fosse d'extraction de limon, fosse de de deux fosses successives se recoupant l'une l'autre.
rejet et fosse sépulcrale. La structure F07, au nord, comprenait un grand
La grande fosse d'extraction de limon F19 mesurait canidé complet déposé en flexion forcée, tête au nord
6 m de long pour 1,20 m de large sur une profondeur et regardant vers l'est. Les pattes étaient repliées les
de 0,90 m. Sa coupe montrait des traces de piétinement unes sur les autres à l'est. La colonne vertébrale venait
au fond, attestant une probable utilisation secondaire contre le bord de fosse à l'ouest et au sud. La fosse
pour gâcher du torchis. Son comblement en boulettes F22 la jouxtant au sud contenait un suidé juvénile
indiquait un rebouchage anthropique et les effondre- complet déposé en décubitus latéral, tête à l'est, pattes
ments de parois visibles au milieu de celui-ci, un temps vers le nord.
de latence à ciel ouvert avant son comblement défini- La fosse F36 était quant à elle différente de
tif. Cette fosse recoupait le fossé F21. Peu de matériel toutes les inhumations d'animaux. Visible lors du
identifiable y a été trouvé : quelques tessons permettent second décapage comme une trace foncée de forme
néanmoins de la raccrocher aux Temps modernes. trapézoïdale d'une longueur de 1,46 m, elle était large
La fosse F09, d'un diamètre de 2,50 m, était conser- de 0,51 m au nord, de 0,58 m au sud, et profonde de
vée sur une hauteur de 0,45  m. Son remplissage fort 0,20  m. Un liseré de bois partiellement décomposé
chargé en oxydes de manganèse et de fer dans sa partie était clairement visible sur ses côtés oriental et septen-
inférieure indiquait une utilisation comme fosse de trional.
rejet de matières organiques qui est restée ouverte aux La fouille a permis de dégager les restes d'un
intempéries. Elle contenait de la céramique non tour- couvercle en bois de 0,60 m de long pour 0,26 m mini-
née de type protohistorique dont un tesson décoré de mum de large. Il présentait un pendage vers l'intérieur
cannelures. Le fossé F21 la recoupait dans sa partie de l'est vers l'ouest. Si le creusement était visible à l'est
orientale. et à l'ouest, la caisse avait été déposée presque contre
La fosse F35, bien que non fouillée car partiellement les parois nord et sud. De rares côtes peu épaisses,
hors emprise, présentait une apparence similaire en pouvant appartenir à un nouveau-né, ont été retrouvées
surface. dans le remplissage. Rien n'assure néanmoins qu'elles
Une fosse de rejet d'un autre type, F8, mesurait aient fait partie du contenu de la caisse. Un objet en fer
1,10  m de long et 1,20  m de large et était profonde avait été déposé sur la planche de fond de celle-ci dans
de 0,28 m. Elle contenait des restes de couverture en l'angle sud-ouest. Au milieu, posé sur le fond en bois,
ardoise scellant une couche de coquilles de moules, un fragment de tissu à trame simple a été conservé.
40

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Aucune trace de traverses n'a été observée sous le fond Sources


de la caisse. ■■ Recueil de cartes figuratives dressées par le géomètre Charlot,
L'absence d'ossements in situ à l'intérieur de F36 pour les deux seigneurs de l'Écluse  : Louis-Richard d'Awans et
nous a laissés perplexes au vu de l'état de conservation Claude-Joseph Le  Franc, de ladite seigneurie, 1743 (Archives
du bois et du tissu. Néanmoins, la forme trapézoïdale, générales du Royaume, Famille de l'Escaille, T 053 – 75 A).
les dimensions, les espaces laissés de part et d'autre du
contenant en bois et la présence de tissu à trame simple
à l'intérieur autorisent à penser que nous sommes bien
ici en présence d'un cercueil et des restes d'un linceul. Beauvechain/Nodebais : découvertes au
S'il est rare de trouver des sépultures hors cimetière au presbytère pendant sa « cure »
Moyen Âge comme aux Temps modernes, ce n'est pas
inenvisageable.
Didier Willems
Conclusion
La cure de Nodebais (parc. cad.  : Beauvechain,
Les investigations archéologiques du site de la rue de 4e  Div., Sect.  A, nos  260a et 261a  ; coord. Lambert  :
la Cabourse ont permis de mettre en lumière les traces 175702  est/162517  nord) est inscrite comme monu-
d'une occupation protohistorique et du Moyen  Âge ment dans l'Inventaire du patrimoine culturel immo-
ou des Temps modernes sur une plage bordant la rive bilier de Wallonie (Streel, s.d.).
nord du Schoorbroek, en contre-haut de celui-ci. Une Acquise récemment par un avocat (P. Struyven) pour
séquence chronologique a pu être dégagée grâce aux en faire sa demeure familiale principale, elle devait être
recoupements des structures entre elles. Une stratigra- assainie, restaurée et adaptée aux exigences de confort
phie, même si limitée à deux niveaux d'occupation, a actuel  ; propriétaire, architecte et corps de métiers
également été mise en évidence (chose rare en archéo- impliqués ont tous œuvré dans cet esprit.
logie rurale). Si l'histoire de ce bien, situé rue de l'Étang, est
Outre la fosse F09 qui nous indique une occupation partiellement connue, tout ce qui précéda son édifica-
du lieu dès l'époque protohistorique, les restes de fossés tion constitue une inconnue. L'exécution de terrasse-
de parcellaire nous renseignent sur la structuration du ments était une opportunité à saisir dans le cadre de la
paysage au Moyen  Âge. Les sépultures, quant à elles, demande d'un permis d'urbanisme.
amènent un éclairage sur la vie d'une exploitation agri- Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure
cole que l'on pourrait rattacher aux Temps modernes. du Brabant wallon (DGO4  / Département du patri-
Si l'ensemble de l'occupation n'a pas été dégagé moine) n'a malheureusement pas été interpellé dès le
ni fouillé faute de temps et de moyens, les résultats lancement des restaurations du corps de logis ni lors
de cette intervention archéologique montrent que du creusement de la piscine, mais il est intervenu les
les opérations de grande envergure ne sont pas les 7 et 8 juillet 2015 suite aux terrassements exécutés en
seules à pouvoir déboucher sur des découvertes bordure des bâtiments, à l'arrière du chartil/hangar à
intéressantes. carrosses en particulier.
Nous tenons ici à remercier chaleureusement
le propriétaire, M.  Claeys, pour son soutien et Contexte historico-architectural du site
sa compréhension tout au long des opérations
archéologiques, nos collègues Marie-Laure Van Hove, Le territoire de Nodebais aurait été occupé de manière
Heydan  Rossini, Julien  Devos et Vincent  Humé constante depuis le Moyen Âge  ; l'abbaye d'Hastière-
(Service de l'archéologie de la Direction extérieure Waulsort y détiendrait des biens terriers au milieu du
du Brabant wallon), ainsi que Jean-Christophe Sainte 12e siècle (Tarlier & Wauters, 1872, p. 158-159).
pour les relevés topographiques. Un tout grand merci La cure antérieure à celle abordée ici s'élevait sur un
à une archéologue du cru, Véronique  Moulaert, terrain proche du cimetière  ; détruite et arasée, elle
qui nous a apporté son aide sur chantier et mis aurait cédé la place à un verger. Comme le père abbé
à disposition sa cuisine pendant les jours de refusait toute intervention financière pour la construc-
canicule. Merci enfin à la famille Moureau-Daniel, tion d'un nouvel édifice, c'est le prêtre Liévin-Guillaume
propriétaires de la ferme des Perlets, pour leur Vander Eycken, originaire de Beauvechain et en charge
soutien logistique et leur intérêt, et à Brel  Galvez de la paroisse, qui acheta une parcelle proche et se fit bâtir
et Étienne  Hudon, deux étudiants canadiens qui un logis. Celui-ci, inachevé à la mort de son propriétaire,
ont pu à travers ce site découvrir une page de la aurait été parachevé par l'abbé Nicolas Falcq (Tarlier &
Protohistoire belge. Wauters, 1872, p. 161), décédé le 30 mai 1703.
41

Toutes périodes Brabant wallon

Sous des allures « classiques » du 18e siècle, le noyau plus profond a été exécuté afin d'accueillir le coffrage
du presbytère actuel de Nodebais aurait donc été érigé de fondation ; la profondeur atteinte par celui-ci était
à la fin du siècle précédent, vers 1695. Selon une date d'environ 1,20 m sous le seuil du passage vers le jardin,
apposée sur une poutre de l'étage, des travaux majeurs, situé au sud-est.
financés par l'abbaye d'Hastière, auraient été entrepris Le dégagement des fondations du chartil n'a été
dès 1772, comme en témoignent les fenêtres du rez- que partiel, sur environ 25  cm  ; l'usage de briques
de-chaussée, le rehaussement du niveau supérieur de fragmentaires est indéniable. L'élévation en tant que
la demeure (Nodebais, 1974) ainsi que l'escalier inté- telle de la façade présente des briques de gabarits
rieur. Enfin, près d'un siècle plus tard, une clôture fut différents (22  × 10  × 5/5,5  cm et 23  ×  11  × 5,5  cm),
construite pendant la prêtrise d'Emmanuel  Wynants incluant quelques exemples plus orangés et d'une taille
(1855-1876) (Streel, s.d.). légèrement supérieure (24 × 12 × 5,5 cm). Bien que ces
Selon la carte de Ferraris, la cure et ses annexes briques aient été disposées en lignes alternées boutisse-
formaient un U ouvert vers le nord-est, en direction panneresse, de nombreux « écarts » ont été observés.
de l'église Sainte-Waudru, légèrement décalée vers le Le vestige le plus ancien est une structure maçon-
nord (au demeurant, rebâtie au 19e siècle suivant une née quadrangulaire, parallèle à la façade du chartil.
orientation nord-ouest/sud-est). Elle fut construite à l'aide de briques de dimensions
Comme en témoignerait le plan cadastral de similaires à celles utilisées pour l'élévation de ce
P.-C. Popp, si aile complète il y eut au sud-est du pres- dernier (de 22 et 23 cm), disposées en boutisse et liées
bytère, elle aurait été démolie au plus tard durant le au mortier de chaux de teinte crème. Ses dimensions
troisième quart du 19e  siècle  ; il n'en resterait que le internes sont de l'ordre de 1,10  m sur 1,38  m. Les
petit édicule, toujours en élévation actuellement, abri- assises de la face occidentale sont imbriquées dans les
tant un four à pain. parois latérales mais de manière alternée  ; en outre,
un débordement équivalent à une largeur de brique
Structures mises au jour

La tranchée ouverte de manière continue tout le long


de la façade occidentale du chartil/hangar à carrosses a
permis de mettre au jour les fondations du bâtiment mais
également d'autres structures construites modernes,
préservées en sous-sol, à savoir deux anciennes citernes
(ou chambres de visite et/ou puits perdus) abandonnées
et comblées ainsi qu'un réseau d'évacuation récent,
devenu obsolète car trop endommagé.
La longueur du terrassement atteignait 13,90  m  ;
quant à sa largeur, elle oscillait autour des 2,05 m avec
un extrême à 2,50 m. Les profondeurs étaient elles de
l'ordre de 35 à 50 cm suivant le relief et les déblais accu-
mulés afin d'obtenir un niveau de fond plus ou moins
horizontal. En limite ouest de cette aire, un creusement

Vue générale vers le sud-est des structures révélées par


les terrassements à l'arrière du chartil/hangar à carrosses :
Nodebais : vue générale du chartil/hangar à carrosses du notamment une citerne (ou puits perdu) comblée et une
presbytère à l'arrière duquel des vestiges ont été mis au jour. évacuation en grès posée ultérieurement.
42

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

a été observé au-delà de la paroi méridionale. Cette En guise de conclusion


particularité de même qu'un débordement interne
sur 3 cm de trois briques posées en boutisse posent Les quelques structures mises au jour sont loin d'être
question quant à leur raison d'être  : dislocation ou exceptionnelles mais elles participent d'une part à la
reliquat d'un dispositif annexe comme un accès ou connaissance des abords de la propriété depuis sa créa-
un trop-plein ? Ladite paroi méridionale présente une tion à la fin du 17e siècle et d'autre part à une prise en
perturbation, témoignant d'une réparation ou d'un considération de l'ensemble des vestiges. Certes, il faut
rebouchage. Aucune présence d'indice concernant la pouvoir faire la part des choses : accorder de l'impor-
couverture n'a été constatée. tance au bâti sans négliger pour autant les « annexes »,
Abandonnée, cette structure fut partiellement qui ont eu leur raison d'être.
démontée ou démolie et comblée de terre, d'argile, Parallèlement, cette attention supplémentaire à
de nodules de mortier, de débris de briques, de frag- l'égard de tout indice en sous-sol ou en élévation a
ments d'ardoises ainsi que de quelques fragments de renforcé la confiance du propriétaire quant à ses choix,
céramique (dont un de cruche en grès) et de goulots incluant notamment le respect de son bien tout en
de bouteilles. Par la suite, elle fut recoupée par la pose tentant de l'adapter aux exigences contemporaines.
d'une évacuation en grès qui partait du chartil, en À travers cet article, mes remerciements s'adressent
passant à travers la fondation où une plaque en plomb en particulier au propriétaire, M. Paul Struyven pour
la protégeait. Dans sa première section, elle consiste la confiance accordée de même que pour l'attention
en l'assemblage de deux tuyaux de 1,06 m de long, en et l'intérêt portés à son bien, et à l'un de mes
terre cuite rouge rosé, couverts d'une glaçure externe collaborateurs-opérateurs, Vincent  Humé, pour son
brun violacé. L'extrémité qui s'emboîte est dotée de aide efficace.
5  anneaux/cannelures  ; l'autre section est longue de
9 cm, évasée sur 3 cm et plate sur 6 cm. Les diamètres Bibliographie
sont de 10 cm pour l'interne et 14 cm pour l'externe. ■■ Nodebais, 1974. Nodebais. Cure. In  : Province de Brabant.
Étrangement, ces deux tuyaux sont assemblés inverse- Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine monumental
ment au sens de la pente qu'ils suivent (10 cm d'est en de la Belgique, 2), p. 411-412.
ouest sur une longueur de 1,80 m). ■■ Streel B., s.d. Beauvechain (Nodebais). Presbytère (http://
Au-delà, le réseau se poursuit avec au moins un spw.wallonie.be/dgo4/site_ipic/index.php/pdf/fiche/25005-
tuyau aux caractéristiques différentes, dont seule la tête INV-0053-02, consulté le 26 août 2016).
a été dégagée. En terre cuite rouge orangé, il présente ■■ Tarlier J. & Wauters A., 1872. La Belgique ancienne et
un diamètre d'ouverture de 23 cm, au bord renforcé ; la moderne. Géographie et histoire des communes belges. Province
buse en tant que telle présente une épaisseur de 8 mm de Brabant. Canton de Jodoigne, Bruxelles, A. Decq, p. 156-161.
et est recouverte sur sa face interne d'une glaçure
quasi noire. L'emboîtement avec la section en amont Sources
a nécessité l'usage d'un mortier de chaux et de petits ■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
fragments de briques pour colmater. plan parcellaire de la commune de Nodebais.
La seconde structure, également quadrangulaire, ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
est manifestement plus récente mais également Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Hougarde, pl. 112.
devenue désuète puisque condamnée et comblé avec
de la terre, des déchets de briques (quelques-unes
entières, de 23 cm × 11 cm), des fragments de tuiles
et d'autres détritus. Ses dimensions internes sont Chaumont-Gistoux/Dion-Valmont :
de l'ordre de 1,02  m sur 1,33  m pour une hauteur évaluation et suivis sur le site de la villa de
conservée sur au moins 30 cm ; ses parois, en moel-
Brocsous à Dion-le-Mont
lons, briques et carrelages fragmentaires, voire éclats
d'ardoises, liés au mortier de chaux de teinte ocre
à jaune, sont d'une épaisseur proche des 20  cm et Frédéric Heller
enduites d'un «  cimentage  » épais de 1,5  cm, de
teinte crème grisée, recouvert d'une couche blan- En 2015, ce ne sont pas moins de quatre opérations
châtre (chaux hydraulique  ?). Ce sont là les seules archéologiques qui ont eu lieu dans l'emprise présu-
données enregistrées car aucun dégagement fin ni mée du site de la villa romaine de Brocsous : il s'agit
relevé précis n'ont été entrepris en raison du temps de deux suivis, d'une découverte fortuite et d'une
imparti et du caractère clairement contemporain des évaluation archéologique préalable à des travaux de
vestiges. construction.
43

Toutes périodes Brabant wallon

Une fouille réalisée en 2003 avait révélé un bâtiment parc. cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 79d ;
sur solin de fondation en pierre, des structures arti- coord. Lambert 72  : 170232  est/ 154214  nord) a fait
sanales liées à la métallurgie appartenant probable- l'objet d'une évaluation à 38 %, consistant en deux
ment à la pars rustica d'une villa et une mare datant tranchées parallèles, suite à l'introduction d'une
des 2e-3e siècles de notre ère (D. Preud'homme, notes demande de permis d'urbanisme pour la construction
inédites). Un suivi archéologique en 2012 avait révélé d'une habitation sur caves. Situé en bas de versant, le
la présence d'une petite cave construite en petits terrain est recouvert d'un épais dépôt de colluvions
moellons cubiques de grès calcaire  ; d'une longueur attestant d'une forte érosion du relief environnant,
de 4,55 m et large de 3,55 m, elle était conservée sur érosion déjà supposée lors de la fouille de la petite cave
0,55 m de haut (Willems & Van Driessche, 2014). située en contre-haut au sud. Aucun vestige archéolo-
Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure gique n'y a été découvert.
du Brabant wallon (DGO4  / Département du patri- Cette série d'investigations ponctuelles, même si de
moine) est intervenu au 25, rue de Brocsous (parc. faible ampleur à chaque fois, donnent des informations
cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 108d4 ; au sujet de l'archéologie du paysage de la villa de
coord. Lambert 72 : 170200 est/154095 nord) du 25 Brocsous : ce sont plusieurs zones de la villa qui
au 31 mars afin d'y effectuer un suivi archéologique peuvent maintenant être considérées comme vides à
suite à la demande de permis d'urbanisme introduite l'époque de son occupation, à savoir la fin du 2e et le
pour la démolition d'une terrasse et la construction début du 3e siècle de notre ère.
d'une véranda.
La parcelle est située sur l'emprise du site de la villa : la Bibliographie
fouille de 2003 a eu lieu sur la parcelle voisine au nord, ■■ Willems D. & Van Driessche A., 2014. Chaumont-Gistoux/
et celle de 2012 sur la colline en contre-haut au sud- Dion-Valmont : renaissance d'une cave romaine à la rue de
ouest (coord. Lambert 72  : 170028  est/154053  nord). Brocsous, à Dion-le-Mont, Chronique de l'Archéologie wallonne,
Le suivi des travaux a permis de déterminer in fine que 21, p. 11-13.
nous étions sur l'extrémité méridionale de la fouille
extensive de 2003.
Lors de prospections pédestres effectuées à l'occasion
du suivi archéologique dans le petit vallon situé en vis- Jodoigne/Jodoigne : voile temporairement
à-vis, en contrebas de la cave, force nous fut de consta- levé sur une section des remparts de la ville
ter la présence d'une piscine à peine construite (surface
± 50 m²) à l'arrière du no 39 de la rue de Brocsous (parc.
cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 108s3 ; coord. Didier Willems
Lambert 72 : 170046 est/ 153996 nord). Une discussion
cordiale avec les propriétaires s'ensuivit, ceux-ci nous Confronté d'une part à l'accroissement de la fréquen-
assurèrent n'avoir rien vu apparaître lors du creusement. tation scolaire et d'autre part à des installations deve-
On peut dès lors raisonnablement imaginer qu'aucune nant peu à peu vétustes, l'Institut de la Providence,
structure maçonnée ne se trouvait ici. établi au no 23 de la rue du Sergent Sortet, a introduit
Alors que nous nous rendions sur place en octobre une demande de permis pour abattre d'anciennes
2015 pour préparer un chantier dans la rue de annexes et bâtir de nouveaux édifices (parc. cad.  :
Louvranges, nous avons constaté qu'une piscine devait Jodoigne, 4e  Div., Sect.  G, no  11k  ; coord. Lambert  :
être creusée le jour même sur une parcelle à l'angle 185389 est/157333 nord).
des rues de Brocsous et de Louvranges (parc. cad.  : Le site étant positionné sur le tracé de l'enceinte
Chaumont-Gistoux, 4e  Div., Sect.  C, no  93e2  ; coord. urbaine, le Service de l'archéologie de la Direction
Lambert 72 : 170283 est/ 154209 nord). Nous y avons extérieure du Brabant wallon (DGO4  / Département
effectué le suivi des creusements : une étroite tranchée du patrimoine) a interpellé la direction de l'institution
menant d'une annexe vers l'emplacement de la piscine a afin de pouvoir suivre les travaux de démolition. Très
révélé les vestiges d'un petit appentis moderne disparu ; rapidement, un accord fut établi, des réunions se sont
la fosse pour la piscine, profonde de 1,60 m, n'a livré que enchaînées et l'intervention a pu être menée.
des remblais récents et autres colluvions et ce jusqu'à
10  cm du niveau de fond de coffre (vu l'absence de Contexte historique du site
vestiges, nous avons décidé de ne pas descendre plus bas
afin d'éviter toute déstabilisation de la future piscine). En 1184, Henri  Ier, duc de Brabant, prit la terre de
Enfin, une longue parcelle dans le quart nord-est Jodoigne, détenue par le comte Gilles de Duras, et
du site de la villa de Brocsous (rue de Louvranges, 7 ; l'intégra dans ses États (Hanon de Louvet, 1941, p. 73).
44

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

les sœurs de la Providence le rachetèrent en 1920 à


la famille Mévis (Hanon de Louvet, 1941, p. 297). En
1963, l'ensemble du site passa aux sœurs de l'Union du
Sacré-Cœur (Meuwissen, 1999).
La dernière tour et la courtine associée sont classées
depuis le 7  juillet 1976 (Beauvechain, 2006, p.  245  ;
Streel, s.d.).
Les démolitions entreprises en avril 2014, pour
«  transformation et construction de vestiaires dans
un bâtiment scolaire  » révélèrent la face externe du
prolongement nord de la section de l'enceinte urbaine
évoquée ci-dessus. Préservée jusqu'à ce jour car ayant
Jodoigne : vue générale de la face externe du rempart vers servi d'appui pour des bâtiments, elle interpella tant les
le sud  ; la seule tour préservée, classée depuis 1976, se autorités académiques que la Ville et le Département
distingue à l'arrière plan.
du patrimoine du Service public de Wallonie quant à
son devenir propre mais également celui de l'ensemble
Suite à cette prise de possession, l'espace urbain se auquel elle appartient.
serait développé au nord de la petite bourgade exis- Ce qui délimitait encore le centre-ville à la fin du
tante, constituée autour de l'église Saint-Médard 18e  siècle et commençait à devenir un souvenir dans
(Hanon de Louvet, 1941, p.  192  ; De Meester, 2012- la seconde moitié du suivant se rappelle à la mémoire
2014, § Moyen Âge). Si l'édification de remparts à la collective en ce début du 21e siècle.
fin du 12e siècle est incertaine, elle semble par contre
indéniable au début du 13e  siècle (Hanon de Louvet, Options opérationnelles choisies et
1941, p. 76-78). résultats
Le système défensif mis en place était doté d'un fossé
profond à l'est et de trois portes (Tarlier & Wauters, Si un relevé pierre à pierre avait pu être réalisé, il
1872, p.  10  ; Hanon de Louvet, 1941, p.  191 et ss.). est certain que l'analyse de la section des remparts
Redressée en 1646, cette enceinte connut plusieurs dénudée aurait été beaucoup plus fine mais, faute de
dégradations durant la seconde moitié du 18e  siècle pouvoir libérer une petite équipe pour effectuer les
avec la destruction de tours qui devaient être au enregistrements au moment opportun, le choix de
nombre de huit ou neuf (Hanon de Louvet, 1941, recourir directement aux nouvelles technologies a été
p. 205). Sa dégradation se poursuivit jusqu'à son arase- adopté. Ainsi, dans la foulée des destructions menées
ment plus que partiel vers 1821 ; l'avant-dernière tour dans le cadre du permis délivré, un premier relevé au
fut démolie en 1901 (Hanon de Louvet, 1941, p. 207 et scanner fut réalisé le 15 mai. Cette tâche concernait la
ss. ; Jodoigne, 1974, p. 228). face occidentale de la section des remparts, au revers
De nos jours subsiste une section de ce système de de la tour conservée, côté crèche communale et aire de
défense à l'est de la rue du Sergent Sortet (Jodoigne, stationnement (parc. cad. : Jodoigne, 4e Div., Sect. G,
1974, p. 228), entre la crèche communale Les Lutins et nos 54l et 55c/pie) ; elle fut exécutée sur un peu plus de
l'Institut de la Providence. Elle consiste en une cour- 17 m de long.
tine d'un peu plus de 80  m de long, aisément visible L'appareil employé fut un modèle Trimble TX5, à
depuis les aires publiques de stationnement situées à décalage de phase (phaseshift), caractérisé par une
l'entrée de la voirie ; elle inclut la seule tour préservée. portée maximale de 120  m avec une précision de
Originellement, elle aboutissait, vers le sud, à la porte mesure moyenne de 1 mm théorique jusqu'à 20 m et
orientale de la ville, dite «  de Crétimont  », donnant
accès à la cité par la rue Saint-Jean. Au 19e  siècle s'y
adossait le couvent des Sœurs grises. Elle était bordée
de jardins privés et communaux  ; les demeures
s'élevaient majoritairement le long de la rue Neuve,
actuelle rue du Sergent Sortet, parmi lesquelles figure
l'ancienne propriété du bailli, P.-H.  Mary, acquise en
1843 par L.-J.-C. Baguet, curé de Saint-Médard, pour
y installer l'école des sœurs de la Providence (Streel,
s.d.). À l'arrière de la parcelle qui la jouxtait au nord Redressement et assemblage des photographies, septembre-
décembre 2015 (J.-N. Anslijn, Dir. archéologie).
s'élevait le château dit « G(h)obert », érigé dès 1792 ;
45

Toutes périodes Brabant wallon

2 mm environ au-delà. L'assemblage et les traitements hie par la nature (parc. cad. : Jodoigne, 4e Div., Sect. G,
initiaux des données ont pu être exécutés grâce au nos 11k, 4a et 6g) ; elle est également mentionnée dans
logiciel Faro/Trimble Scene (v.  5.1). Pour l'étape du l'Inventaire du patrimoine culturel immobilier (Beau-
maillage, consistant en la transformation du nuage vechain, 2006, p.  250  ; Streel, s.d.). La vigilance y est
de points en surface continue, un second programme également de rigueur afin de ne pas perdre ces témoins.
a été exploité, à savoir Screened Poisson Surface
Reconstruction (v. 8.0). Enfin, pour le traitement des Enseignement de cette expérience
vues orthogonales en nuage de points (vues sur fond
noir), nous avons pu bénéficier du logiciel PointCab. Bien qu'il soit regrettable qu'une étude minutieuse de
Par la suite, le 14 septembre 2015 plus exactement, cette élévation n'ait pu être menée, un enregistrement
une série de clichés photographiques a été prise afin minimal a été assuré grâce à l'apport de la photogra-
de réaliser un assemblage informatique, palliant phie et de l'informatique ; certes, elles ne remplaceront
partiellement à l'impossibilité de mener une pas pleinement l'œil et le raisonnement humains mais
approche minutieuse sur le site. Sachant que ladite elles permettent d'obtenir des résultats satisfaisants
section des remparts n'allait pas être détruite mais et largement fiables quant au rendu et aux données
maintenue en l'état, voire restaurée, mais cachée par métriques.
les nouveaux bâtiments, cet enregistrement fut jugé Indépendamment de cet aspect purement technique,
satisfaisant tout au moins pour constituer d'une les attentions de la direction de l'institution scolaire, de
part une archive et d'autre part un support primaire l'architecte et des autorités communales ont été attirées
d'étude. Le traitement des clichés a été réalisé avec sur ce patrimoine qui ne demande qu'à être préservé
le logiciel VisualSFM. Quant aux maillages, ils ont et valorisé.
également été produits avec Screened Poisson Surface L'intervention, aussi courte fut-elle, a pu bénéficier de
Reconstruction (v. 8.0). l'appui de nos collègues Florence Noirhomme (Direc-
La couverture photographique s'étendit sur une tion de la restauration) et Vincent Léonard (Service des
longueur d'environ 16  m, comprise entre l'édicule Monuments et Sites) ainsi que de la compréhension du
préservé dans le cadre du projet et la « brisure » (angle) pouvoir organisateur de l'institution scolaire, en parti-
observée à quelque 5,30 m de la limite méridionale de culier de sa directrice Madame Véronique Lacroix, et
la propriété, et une hauteur comprise entre environ 3,70 de l'architecte Jean-Christophe Mathen.
et 4,10 m, correspondant à l'élévation telle que dégagée. Avec la collaboration de Jean-Noël  Anslijn (Direc-
L'élévation se caractérise par un usage majoritaire de tion de l'archéologie).
moellons en grès et quartzite liés au mortier de chaux
ainsi qu'un registre inférieur présentant un fruit. Ledit Bibliographie
registre a clairement été remanié puisqu'il est partiel- ■■ Beauvechain, 2006. Beauvechain, Incourt et Jodoigne,
lement surmonté d'assises de briques aux gabarits Sprimont, Direction générale de l'Aménagement du territoire,
récents, cimentées. Le point «  de rupture  », l'angle du Logement et du Patrimoine (Patrimoine architectural et
obtus, clairement lisible dans le cadastre, a subi un territoires de Wallonie), p. 217-255.
renforcement consistant en un contrefort en briques et ■■ De Meester R., 2012-2014. Histoire (http://www.jodoigne.
une réfection partielle du parement, à l'aide du même be/culture/histoire, consulté le 26 août 2016).
matériau. Les multiples remaniements et rejointoie- ■■ Hanon de Louvet R., 1941 [1996]. Histoire de la Ville
ments au mortier de teinte jaunâtre (très sableux  ?) de Jodoigne, Beauvechain, Nauwelaerts, 2  vol. (réimpression
ou grisâtre correspondent à des modifications et anastatique).
constructions d'annexes entreprises lors d'extensions ■■ Jodoigne, 1974. Jodoigne. In  : Province de Brabant.
de l'établissement scolaire  ; à celles-ci appartiennent Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine monumental
indéniablement les cavités témoins de la pose de de la Belgique, 2), p. 228-266.
poutrelles pour des toitures et plateformes. ■■ Meuwissen E., 1999. Jodoigne. Ravalement de façade pour le
Cachée durant de longues décennies, cette face château Ghobert. Rénovation providentielle pour immeuble de
de l'enceinte urbaine sera à nouveau soustraite aux lumière, Le Soir, 19 octobre 1999, p. 22.
regards car les infrastructures modernes s'y adosse- ■■ Streel B., s.d. Jodoigne (Jodoigne). École (Institut des Sœurs
ront ; cela étant, des réfections (à la chaux ?) devraient de la Providence) (http://spw.wallonie.be/dgo4/site_ipic/index.
php/pdf/fiche/25048-INV-0161-02, consulté le 26 août 2016).
être apportées au préalable et des vides devraient être
créés à l'arrière des espaces à construire. ■■ Tarlier J. & Wauters A., 1872. La Belgique ancienne et
Enfin, plus au nord, toujours dans la propriété de moderne. Géographie et histoire des communes belges. Province
de Brabant. Canton de Jodoigne, Bruxelles, A. Decq, p. 1-34.
l'Institut et au-delà, une section des remparts est
conservée sur plus de 60 m mais laissée en l'état, enva-
46

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

La Hulpe/La Hulpe : ce que le sous-sol Cadre patrimonial


de l'église Saint-Nicolas a dévoilé
L'édifice religieux est en style roman et de type rural ;
sa fondation remonterait au début du 13e  siècle et
Didier Willems et Geneviève Yernaux émanerait d'une décision du duc Henri Ier de Brabant
(La  Hulpe, 1974, p.  271). Au moins depuis le début
Classée depuis 1936, l'église paroissiale Saint-Nicolas du 16e  siècle, il connut nombre de modifications et
de La Hulpe constitue un édifice de référence sur le adjonctions. Ainsi, le chœur fut doté de cinq pans,
plan patrimonial (parc. cad. : La Hulpe, 1re Div., Sect. B, en style gothique  ; ensuite, un haut portail de type
no  223a  ; coord. Lambert  : 158600 est/157880 nord). Louis  XV fut aménagé dans la tour en 1751, accen-
Bien que ce statut la préserve de toute intervention tuant de la sorte l'axe d'entrée  ; la nef originelle à
technique maladroite, elle peut toutefois bénéficier cinq travées fut flanquée de collatéraux plus larges
de commodités modernes, éclairages et chauffage par en 1835-1836 (Tarlier & Wauters, 1863, p.  72) par
exemple, notamment en raison de sa fonction de lieu A.  Moreau, architecte provincial. Enfin, d'ultimes
de culte principal. agrandissements et une rénovation générale furent
Limité à l'ouest par la rue de l'Église et à l'est par confiés dès 1905-1906 à l'architecte J.  Caluwaers  ;
celle du saint protecteur, le monument domine le côté ils se concrétisèrent par l'adjonction de collatéraux
nord de la place Albert  Ier. Si son évolution architec- supplémentaires, en style néo-gothique, qui élar-
turale est globalement connue, par exemple le passage girent davantage l'espace dévolu aux fidèles, et de
progressif d'un plan allongé vers un quadrilatère quasi deux sacristies (La Hulpe, 1974 ; Streel, 2010). Dans
carré, les « détails » échappent. Heureusement, grâce à son courrier appuyant une demande de classement
des opérations, même de courte durée, il est possible pour la tour, la nef centrale et le chœur, E. Dhuicque
de recueillir des données complémentaires, parfois (1935) précise qu'entre 1905 et 1909, l'agrandisse-
inédites, conformes ou contradictoires par rapport aux ment de l'église fut réalisé en détruisant les bas-côtés
acquis. où rien d'ancien ne subsistait, & en les remplaçant par
un double bas-côté avec épine de colonnes centrale. La
disposition initiale de la nef fut rétablie, la tour déba-
rassée des ses annexes, le chœur dégagé, remis dans son
premier état & pourvu de sacristie et magasin appro-
priés. Notons que la désaffectation en 1895 du cime-
tière ceinturant l'église aurait manifestement facilité
l'extension dudit édifice (Arcq, Boudart & Pirard-
Schoutteten, p. 88).

Contexte de l'intervention

Au cours des terrassements entrepris dans le bâtiment


pour la pose d'un nouveau système de chauffage devant
remplacer le dispositif en briques créé en 1910, des
indices liés au passé architectural du bien ont été dévoi-
lés. Face à ces découvertes « semi-fortuites », étant donné
la connaissance partielle du site à travers les archives, le
vice-président du Cercle d'Histoire contacta le Service
de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant
wallon (DGO4 / Département du patrimoine) le mardi
3  novembre 2015. Comme le chantier était suspendu
suite à la clôture de l'ouverture des tranchées, l'opéra-
tion fut menée deux jours plus tard, suite à une décision
prise de commun accord. L'équipe et le laps de temps à
consacrer étant réduits, les descriptions sous forme de
notes et l'enregistrement manuel de données métriques,
La Hulpe, église Saint-Nicolas : vue générale de la nef et des incluant des altitudes relatives, ainsi que les croquis ont
deux collatéraux méridionaux. On y distingue le tracé des été privilégiés ; à défaut, un relevé à la station totale était
plusieurs tranchées.
toujours réalisable a posteriori.
47

Toutes périodes Brabant wallon

Le jeudi 12  novembre, des ossements furent exhu- Si ces ouvertures sont limitées spatialement, elles
més lors du placement d'un des composants du chauf- ont néanmoins permis de révéler plusieurs structures
fage dans une des fosses. construites et multiples couches de remblais, principa-
lement en T1, dans la tranchée reliant T1 à T2 et en T3.
Résultats de l'intervention sur terrain En T1, il s'agit d'une fondation axée est/ouest, réali-
sée à l'aide de moellons en grès calcaire, probablement
Sept fosses ont été creusées dans l'église, à savoir deux récupérés, certains à peine équarris, à peine liés avec un
dans les collatéraux extrêmes, en limite orientale mortier de teinte jaunâtre (très sableux ?) et entre lesquels
(T1 et T3), deux dans les premiers collatéraux (T2 et sont bloqués des fragments de briques. Conservée sur au
T4), deux à l'ouest de la nef centrale (T5 et T6) et la moins 0,50 m de haut et d'une largeur estimée à environ
dernière dans le chœur (T7). Devant accueillir des 0,85 m, elle sert à asseoir un soubassement en matériau
modules de propagation de chaleur, elles présentent similaire, des blocs en pierre mais équarris sur la face
des dimensions oscillant autour des 2,10-2,15 m pour externe, érigés en retrait d'une vingtaine de centimètres.
la longueur, de  1,10  m pour la largeur et de 0,85  m Préservé sur une assise, soit l'équivalent de 0,12 à 0,15 m
pour la profondeur (la surface du béton coulé en chape de haut, et une largeur d'environ 0,70  m, ce dernier
était à -0,82  m par rapport au niveau de circulation soutient manifestement l'alignement des colonnes cylin-
actuel). En outre, elles sont reliées entre elles par des driques séparant les deux collatéraux méridionaux. En
tranchées étroites (environ 0,33  m, équivalant aux bordure septentrionale fut observé un comblement d'en-
dimensions des dalles de pierre constituant la couver- viron 15 cm de large, parallèle aux maçonneries préci-
ture de sol) et peu profondes (également une trentaine tées, contenant notamment du mortier réduit en poudre
de centimètres) ou par des chenaux en briques de l'an- et de petits fragments de briques  ; de prime abord, il
cien dispositif dans lesquels seront posés les tuyaux du pourrait correspondre à un rebouchage de la tranchée de
réseau ; deux des chambres de visite (CV1 et CV2) du fondation, creusée elle-même dans un remblai, mélange
système antérieur sont également mises à profit. de limon, sable jaune, nodules de chaux et éclats de

T3

T4

T7
T5

CV2 CV1

T6

T2

T1

0 10 m

La Hulpe, église Saint-Nicolas : plan général avec implantation des fosses (T1-T7) et chambres de visite (CV1-CV2) ainsi que des
limites de structures mises au jour. Seules T7 et CV1 sont positionnées approximativement (infographie A.  Van  Driessche, Serv.
archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
48

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

briques. Du côté méridional par contre, il semble y avoir On dénombre :


eu des terrassements d'envergure. – un crâne quasi complet, fort altéré au niveau du basi-
Le soubassement ayant été arasé, il fut recouvert par occipital et du sphénoïde, auquel manque un fragment
de multiples remblais successifs, à l'exception toute- de l'arcade zygomatique gauche. Il est de morphologie
fois des points de pose des colonnes des collatéraux. plutôt masculine et l'âge au décès a été estimé d'après le
L'ensemble de ces comblements est recouvert par un degré de synostose des sutures crâniennes aux alentours
lit de sable puis de mortier (de chaux ?) qui maintient de 55 ans (± 15 ans) (Masset, 1982). Une pièce métal-
et stabilise le dallage actuel en pierres. lique (peut-être un clou) était accolée sur le frontal droit
En limite nord apparut le registre inférieur en briques du à proximité du bregma (jonction entre la suture sagit-
mur occidental de la sacristie, accueillant un maître-autel tale, séparant le pariétal droit du gauche, et la suture
dans une large niche quadrangulaire aménagée à cet effet. coronale, entre le frontal et les pariétaux). On observe
Dans la tranchée menant de T1 à T2, à quelque la présence de caractères discrets (non pathologiques,
0,90 m de la fondation évoquée ci-dessus, fut dégagée juste des indicateurs de la grande variabilité des indivi-
une maçonnerie exclusivement de moellons en pierre dus), d'une suture métopique et d'os surnuméraires (un
« blanche » légèrement équarris pour les faces visibles sur la coronale droite, un petit à gauche et un petit à
et liés au mortier de chaux. Imposante par sa largeur, droite sur la suture lambdoïde). Sur le maxillaire, perte
estimée à près de 1,25 m, elle dut être la fondation d'un post mortem de la plupart des dents encore en place au
mur porteur. La limite supérieure de sa démolition décès  de cet individu ; il ne subsiste que la deuxième
se situe à 7 cm sous le sol actuel de la nef. Contre les incisive et une partie de la canine gauche. Perte de neuf
assises inférieures de sa face septentrionale, buterait dents in vivo ; l'os est toujours en cours de restructura-
une couche de limon contenant de la chaux  ; par- tion pour les trois molaires droites témoignant que celle-
dessus et sur le niveau d'arasement furent épandues de ci s'est produite peu de temps avant le décès. De plus,
fines couches de remblai hétérogènes incluant limon cet individu a souffert d'un abcès au niveau de la racine
sableux, petits fragments de briques (dim. originelles : de la canine gauche. Les alvéoles dentaires présentent
14,5 × 6,5 × 3,5 cm), etc. Tant ces dépôts que la partie une atteinte parodontale de stade  2, ce qui n'est pas
sommitale de la fondation précitée sont condamnés exceptionnel pour l'âge estimé au décès. La maladie
par les lits de mortiers et de sable jaune comparables à parodontale (ou parodontopathie) regroupe toutes les
ceux mentionnés dans le paragraphe précédent. atteintes des tissus de soutien de la dent, c'est-à-dire la
La tranchée T3 n'a quant à elle rien révélé de détermi- gencive, l'os alvéolaire, le ligament alvéolaire et la racine.
nant ou de neuf pour la connaissance des phases majeures Les atteintes peuvent aller jusqu'au déchaussement ou à
de l'église. Toutefois, l'épais dépôt limoneux de teinte la perte de la dent. Sur de l'os sec, cette maladie est cotée
brun moyen, incluant entre autres matières des nodules comme suit : « 0 » lorsqu'aucune atteinte n'est observée,
de mortier de chaux et de petits fragments de briques, «  1  »  lorsque le bord de l'alvéole est vascularisé, «  2  »
est manifestement similaire à ce qui fut observé en T1. avec l'apparition de crénelures sur le bord de l'alvéole,
Comme constaté dans cette tranchée et le chenal associé, « 3 » au déchaussement marqué de la dent ;
l'ensemble est recouvert successivement par des limons – une mandibule incomplète à laquelle manquent
remaniés, un épandage de briques fragmentaires et un lit les branches montantes  ; seules trois dents usées sont
de sable avant la pose du dallage sur une couche de mortier. conservées, à savoir la deuxième incisive, la canine et
Outre la mise au jour de ces structures construites la première prémolaire droite. Elle présente des traits
et remblais associés, c'est la découverte d'ossements
humains qui a également surpris. Ils ont été collectés
par les opérateurs de l'entreprise adjudicataire lors de
la pose d'un bloc chauffage, dans l'angle oriental de la
tranchée T4, près du muret septentrional du chenal de
ventilation créé en 1910.
Profitant d'un contrat d'étude anthropologique en
cours, une analyse rapide a été effectuée en mai 2016.

Résultats de l'étude anthropologique

Chaque ossement a été interprété individuellement car


rien d'un point de vue anatomique ne permettait une Vue antérieure des trois tibias récoltés, au milieu le
corrélation de manière absolue. Tous les spécimens tibia pathologique présente des déformations axiale et
volumétrique du tiers distal.
appartenaient manifestement à des individus adultes.
49

Toutes périodes Brabant wallon

masculins, les dents sont altérées et moyennement usées ; crâne et la mandibule semblent provenir du même
l'hypoplasie n'est pas cotable et il n'y a aucune trace de individu (probablement un homme adulte d'environ
tartre. L'individu a perdu six dents in vivo, probable- 55 ans), la fibula ne semble pas s'articuler avec le tibia
ment d'abord les molaires gauches ensuite les droites ; droit présent. Et, bien qu'il soit tentant d'attribuer à un
– un fragment de coxal gauche (une partie de l'ilion même individu les tibias gauche (le non pathologique)
et du pubis). L'os est très altéré. Sur base des fragments et droit, car ils présentent des  empreintes d'enthèses
conservés, il s'agit probablement d'un homme. Consi- (zones d'insertions dans l'os d'un tendon, d'un liga-
dérant la morphologie pré-auriculaire, il devait être âgé ment ou d'une aponévrose musculaire) qui semblent
de plus de 40 ans au décès, et d'après de la morphologie similaires et qu'ils paraissent de même taille, cette
pubienne, il devait avoir entre 27 et 66 ans ; hypothèse doit être testée car lesdits ossements n'ont
– un tibia gauche pour lequel le quart distal du pas les mêmes altérations taphonomiques.
corps est manquant. On peut juste noter que les zones
d'insertions du muscle soléaire et des fibres du liga- Épilogue
ment collatéral tibial (ligament qui sert de tuteur aux
mouvements de flexion et d'extension) sont un peu Limitée, l'intervention au cœur de l'église a néanmoins
développées  ; il ne s'agit pas d'une pathologie mais permis de confirmer le maintien de structures
peut-être des séquelles d'une activité physique (impos- anciennes en sous-sol, d'en compléter la connais-
sible à identifier sur un seul os sans pouvoir observer sance, basée exclusivement sur des archives écrites et
le squelette dans son ensemble) ; graphiques, et de dresser un canevas de l'évolution
– un tibia droit complet, taphonomiquement moins spatiale de l'édifice religieux.
altéré que les autres. Il appartenait à un individu dont la
stature devait atteindre environ 170 cm. Comme pour le
gauche décrit ci-dessus, les zones d'insertions du muscle
soléaire et du ligament collatéral sont plus marquées ;
– un fragment de tibia gauche, pour lequel la partie
proximale du corps avec l'articulation proximale est
manquante. Pathologique, il montre une déforma-
tion volumétrique, plus importante au niveau du tiers
distal du corps, et axiale. La déformation axiale semble
témoigner d'une fracture qui a pu s'accompagner d'une
infection. Le cal osseux n'est plus perceptible ;
– une fibula droite quasi complète (l'articulation
proximale est fragmentaire). Elle présente une défor-
mation volumétrique de la moitié inférieure du corps,
déformation qui ne semble pas relever d'une fracture,
mais qui pourrait avoir été causée par une infection ;
– un humérus gauche auquel il manque l'articulation
distale ; pas de pathologie observée, hormis une légère
atteinte arthrosique sur l'articulation présente ;
– un humérus gauche dont il ne reste que le quart
distal du corps avec également une légère atteinte
arthrosique sur l'articulation conservée.

Synthèse des observations


anthropologiques

En résumé, l'ensemble de ces restes provient d'au


moins deux individus adultes sur base des tibias et des
humérus, voire trois si l'on tient compte de l'aspect et
des altérations taphonomiques de certains os.
Tenant compte de la seule analyse en laboratoire, en
l'absence de connexions articulaires et de photogra-
phies du contexte de prélèvement, il n'est pas possible La Hulpe, église Saint-Nicolas : fondation du mur gouttereau
(façade) du collatéral méridional originel (?).
d'associer de manière indubitable les ossements. Si le
50

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Les caractéristiques des structures mises au jour Sources


autorisent à proposer des interprétations. Ainsi, le ■■ Dhuicque E., 1935. Rapport sur la proposition de classement
vestige le plus ancien serait la maçonnerie en pierres de la tour, de la nef haute et du chœur de l'église Saint-Nicolas
épaisse de 1,25  m (tranchée entre T1 et T2)  ; elle à La Hulpe, Bruxelles, 26 juillet 1935 (archives Direction de la
appartiendrait au collatéral méridional de l'église protection).
« originelle » et serait plus précisément une section de ■■ Masset C., 1982. Estimation de l'âge au décès par les sutures
la fondation du mur gouttereau de la façade externe de crâniennes, Thèse de doctorat inédite, Université de Paris VII.
l'édifice. Suivraient chronologiquement l'autre fonda-
tion et le reliquat de soubassement qu'elle supporte
(T1), édifiés pour élargir le collatéral dans les années
1830, de même que les remblais associés ayant servi Nivelles/Nivelles : le site de l'hôtel
à stabiliser l'aire de circulation interne contempo- Rifflart sauvé de la démolition ?
raine, non repérée. Trois quarts de siècle plus tard,
le soubassement précité fut arasé jusqu'à l'assise infé-
rieure afin de poser les colonnes séparant le collatéral Didier Willems
antérieur de celui nouvellement créé. Les couches de
briques… observées dans les registres supérieurs des Propriété de la Régie des Bâtiments, l'ancien siège du
stratigraphies datent manifestement de ces derniers Tribunal de Commerce, localisé au no 21 de la rue de
travaux d'envergure menés au début du 20e  siècle, Soignies (parc. cad. : Nivelles, 2e Div., Sect. D, no 276c ;
plus que probablement facilités par la désaffectation coord. Lambert  : 146578  est/142929  nord), était à
du cimetière paroissial qui entourait l'église en 1895. l'abandon depuis plusieurs années et, faute d'un projet
Enfin, si on évoque l'aire d'inhumations, les osse- porteur, fut inscrit sur le marché de l'immobilier à la
ments collectés dans la nef, plus exactement dans fin de l'année 2015.
le premier collatéral septentrional (T4), près d'une Cette procédure n'a pu passer inaperçue car le bien
colonne de séparation, ne sont manifestement plus n'est autre que l'hôtel Rifflart, du nom d'un marquis
en place. Vu leur nombre et le lieu de découverte, ils qui en fit l'acquisition au 18e siècle, propriété épargnée
proviendraient d'une ou plusieurs tombes d'adultes du bombardement de mai 1940 et présentant encore
perturbée(s) lors des extensions opérées au 19e siècle des caractéristiques architecturales dignes d'intérêt.
ou pendant le chantier ouvert vers 1906 au plus tard Le devenir de ce site fut à maintes reprises source de
(terminus ante quem). débats entre mandataires politiques ; la presse ne s'est
À travers la présente notice, nous tenons à remer- d'ailleurs pas privée de relayer les inquiétudes.
cier M.  Jacques  Stasser (vice-président du Cercle Avant même que le nouvel acquéreur ne soit connu,
d'Histoire de La  Hulpe), M.  Thibaut  Boudart (licen- contact fut pris par le Service de l'archéologie de la
cié en Histoire), M.  l'abbé Vincent  della  Faille et Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4  /
M.  Michel  Abts (sacristain) pour l'intérêt qu'ils ont Département du patrimoine) avec l'instance fédérale
marqué, leur collaboration spontanée et l'accueil, pour visiter les lieux et déterminer les éléments à préser-
pendant et après l'intervention, ainsi que leur humeur ver autant que possible, sujet à amener délicatement sur
bien bénéfique. la table des négociations. Une visite complète par deux
Avec la collaboration d'Aude Van Driessche. collègues du Département du patrimoine et un agent
du Service de l'archéologie fut programmée le mardi
Bibliographie 20 octobre 2015 dans le but de coupler les intérêts, l'In-
■■ Arcq G., Boudart T. & Pirard-Schoutteten J., 2005. ventaire du patrimoine culturel immobilier d'une part,
La Hulpe, mémoire d'images, La  Hulpe, Cercle d'Histoire de dont la mise à jour est en cours, et l'archéologie (du bâti
La Hulpe. a priori) d'autre part pour un éventuel suivi des travaux
■■ La Hulpe, 1974. La Hulpe. In  : Province de Brabant. Arron- urbanistiques qu'envisagerait le futur propriétaire.
dissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine monumental de la À ce stade, il est opportun de préciser que les informations
Belgique, 2), p. 271-272. exposées dans la présente notice sont des observations et
■■ Streel B., 2010. Église paroissiale (Église Saint-Nicolas) non une description exhaustive de l'ensemble architectural.
(http://spw.wallonie.be/dgo4/site_ipic/index.php/pdf/
fiche/25050-INV-0002-02, consulté le 29 août 2016). Approche historique
■■ Tarlier J. & Wauters A., 1863. La Belgique ancienne et
moderne. Géographie et histoire des communes belges. Province Actuellement coincé entre les rue de Soignies, de
de Brabant. Canton de Wavre, Bruxelles, A. Decq, p. 60-73. Marlet et Seutin, le site aurait accueilli dès le 17e siècle
un bâtiment. Celui-ci, vendu aux Carmes en 1678,
51

Toutes périodes Brabant wallon

devint quelques années plus tard la propriété d'Adrien-


Léopold-Joseph de Rifflart (de Lalieux, s.d., t. 1, p. 111),
marquis d'Ittre (Nivelles, 1684  – en Espagne, 1755),
noble affublé de titres qui se distingua notamment
en Galice d'où était originaire son épouse (Stroobant,
1844, p. 394-395). Au décès de celui-ci en 1755, sa fille
Marie-Victoire hérita des biens, dont probablement
ceux dans l'intra-muros de Nivelles.
Vers 1813, la propriété devint la demeure de l'avo-
cat C.  Lagasse-Lamooninary  ; elle le resta durant
une vingtaine d'années. Par après, le Commissariat
d'arrondissement s'y installa et, ultérieurement, un
pensionnat de demoiselles, que dirigeait A.  Algrain, Nivelles : vue générale du site de l'hôtel Rifflart depuis la rue
de Soignies.
l'investit. Acquis ensuite par M.  Broquet, président
du Tribunal, les bâtiments auraient été la résidence
du bourgmestre Émile de Lalieux à la fin du 19e siècle mondiale. La limite orientale de l'immeuble semble
et intégrés au patrimoine de la famille Bosquet. avoir été recoupée, amputée de son pignon originel.
Passant à nouveau entre d'autres mains, le site abrita Lors de la visite, il est apparu que le bâtiment qui le
le Lycée royal, qui le dénatura quelque peu par des jouxte à l'est, dont la façade fut reconstruite, cache une
transformations (de Lalieux, s.d., t. 1, p. 111), puis le charpente très ancienne et un sol carrelé sur plancher
Tribunal de Commerce avant d'être définitivement dans les combles. Ces éléments architecturaux sont
abandonné au début du 21e siècle. manifestement associés à un reliquat de structure
Malgré un projet de rénovation et d'extension déposé en bois visible dans la façade côté cour, vestige dans
en 2011 (Chambre provinciale, s.d., §  5B. Travaux à lequel s'imbrique ou contre lequel bute un mur de
des biens d'intérêt patrimonial), le bien a été mis en prime abord du 17e siècle, voire de la fin du 16e siècle,
vente en septembre 2015. Au moins deux acquéreurs composé d'un soubassement en pierre, souligné par un
potentiels se sont manifestés, l'un souhaitant tout raser, ressaut en matériau similaire, supportant une élévation
l'autre n'excluant pas un maintien du bien mais dans en briques. Ce noyau originel, partiellement conservé
des limites techniques et financières supportables. au cours des siècles, servit d'appui pour les édifices
Finalement, c'est le second qui a emporté le marché. construits ultérieurement en limite orientale de la cour.
Détenteur de l'ancien Lycée sis rue Seutin, pour Dans la façade arrière (méridionale) de l'immeuble,
lequel il avait déjà introduit une demande de permis par conséquent côté cour, subsistent au-dessus de l'arc
d'urbanisme, il souhaite revoir son projet afin de la porte cochère un cartouche « J. de Maclot 1626 »
d'associer les deux sites et créer une résidence-services (en place  ?) et, en décalé vers l'ouest, au moins deux
plus adaptée à la configuration des lieux. motifs en briques (émaillées ?) de teinte foncée, figu-
rant pour l'un une croix (ou un X) et pour l'autre un
Observations lors de la visite pictogramme énigmatique (comme un profil de char-
rette sans timon). Le sommet de ladite façade est souli-
Le complexe se compose de deux édifices principaux, gné par une frise redentée.
l'un situé en bordure de la rue de Soignies et l'autre Au-delà de cette aile à front de rue, un second
à l'arrière, perpendiculaire au précité et relié par une ensemble se déploie dans la propriété. Clairement
extension tardive. remanié au 18e siècle, comme en témoignent sa façade
Le bâtiment à front de voirie présente encore un orientale et le majestueux escalier intérieur tournant,
pignon séculaire (17e siècle ?) dans lequel s'encastrent il conserve encore des spécificités de l'édifice anté-
deux façades dont la septentrionale fut remaniée rieur observables dans la façade occidentale. Certes
durant le troisième quart du 18e  siècle, dans un style subtilement, s'y distingue une discordance entre les
Louis  XV. La charpente est moderne et en sapin  ; deux rangées superposées de cinq fenêtres aména-
les pans de toitures ont été modifiés. À l'origine gées vers le sud et les autres (vers le nord), auxquelles
probablement très pentus, à coyaux, débordants et s'ajoute la porte. La première section, vers le sud, est
butant contre les faces internes des pignons, ils sont caractérisée par des soubassements plus hauts, des
actuellement droits et suivent une pente plus douce. Le meneaux (dont il ne reste que des indices dans les
perron qui devait doter la porte principale fut ôté ; sur piédroits), des arcs de décharge à deux assises pour
base d'archives photographiques anciennes, on peut les baies et l'usage de ressauts en pierre blanche (type
conclure qu'il dut l'être bien avant la Seconde Guerre Gobertange) pour souligner l'horizontalité, produi-
52

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Nivelles, hôtel Rifflart : vue générale de la façade occidentale Escalier conservé dans l'édifice moderne construit entre les
de l'édifice érigé en retrait, dans la propriété. deux bâtiments anciens afin d'y créer une jonction couverte.

sant de surcroît un effet de superposition de registres. sont posés verticalement, leurs aisseliers étant de gaba-
La seconde section, vers le nord, est plus modeste car rits clairement supérieurs à ceux utilisés à l'opposé. La
singularisée par un soubassement moins élevé, un façade orientale de l'édifice se situant bien au-delà, la
usage plus intense de la brique et un seul bandeau, charpente présente une structure « allégée » car partiel-
en petit granit (« pierre bleue »), à travers les fenêtres lement dépouillée d'arbalétriers supérieurs par exemple.
de l'étage. Quant à la porte, son encadrement en petit En raison de la modification de ladite façade, il est
granit présente une taille simple, sans décor sculpté probable que cette anomalie soit le résultat d'un travail
mais offrant un linteau courbe que souligne le tympan en sous-œuvre, d'une adaptation du pan de toiture.
de la porte. Enfin, l'édifice reliant les deux bâtiments, érigé
La démarcation entre les deux sections du bâtiment, tardivement, est doté d'une cheminée à manteau en
de prime abord unitaires et contemporaines, est souli- bois et rideau/tablier en fonte, et d'un escalier en chêne
gnée en extérieur par une cheminée qui marque la tournant droit et à paliers, très particulier et origi-
limite entre la haute charpente en chêne couvrant la nal. Ses balustres à section circulaire rappellent celles
partie méridionale de l'édifice et l'extension récente en de modèles du 18e siècle, mais plus élancés. Aucune
sapin, dotée au demeurant de baies de toiture. recherche n'ayant été engagée à son sujet, il pourrait,
La singularité majeure de l'ancienne charpente est son sans aucune certitude, dater de la fin du 19e siècle.
asymétrie, native ou postérieure, observable entre les
premiers et seconds faux-entraits. Chaque second faux- Perspectives
entrait est fiché dans deux arbalétriers et soutenu par des
aisseliers chevillés ; il sert d'assise au poinçon de fermette Depuis l'acquisition du bien par un privé, vu la richesse
et aux arbalétriers supérieurs qui le bloquent. Les poin- architecturale du site, même si elle se cantonne aux
çons et les liens qui y sont maintenus soutiennent la seules façades et aux escaliers des deux édifices ainsi
faîtière. L'asymétrie se marque en particulier par les qu'à la charpente principale du corps arrière, des
arbalétriers et les aisseliers associés ; à l'ouest, les arba- démarches sont menées avec le bureau d'architecture
létriers suivent la pente de toiture tandis qu'à l'est ils en charge du futur projet, afin d'envisager un maintien
53

Toutes périodes Brabant wallon

maximal mais raisonnable du patrimoine au sein de la temps, cette institution fut dénommée «  Maison des
résidence-services qui devrait y être implantée. 12 Apôtres  » (1787) et «  Maison du Champ retiré  »
Une approche plus approfondie, sous forme d'une (19e siècle), dont un porche subsiste toujours rue des
étude du bâti, a été suggérée pour compléter les Brasseurs, identifiable par un cartouche représentant
descriptions collectées à ce jour. le Christ portant sa croix placé au-dessus d'un écu
millésimé de 1738 (Osterrieth, Horbach & Triquet,
Remerciements 2007, p. 53 ; Osterrieth, 2010, p. 29).
Un document daté de 1366 précise que la rue
La requête introduite auprès de la Régie des Bâtiments Coquerne est la ruwelle qui vaut del graigne de le Keri-
a porté ses fruits grâce à M. Laurent Schoder, expert teit en le Kokierne. Ladite graigne (grange) se dressait à
technique, et M. Jacques Van  Belle, architecte- gauche en montant la voirie depuis la rue du Wichet.
conseiller, chef du service Wallonie région ouest. Au-delà, mais au 16e  siècle, s'élevait une maison
La reconnaissance du Service de l'archéologie détenue par l'abbaye de Floreffe en 1533 (Osterrieth,
s'adresse également à Mmes Bernadette  Streel et Horbach & Triquet, 2007, p. 45). En outre, une halle
Caroline  d'Ursel, collègues en charge de l'Inventaire aurait été érigée à l'angle des actuelles rues Coquerne
du patrimoine culturel immobilier (Département du et des Brasseurs durant la seconde moitié du 14e siècle
patrimoine, Direction extérieure du Brabant wallon), (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, p. 36 et 43).
de même qu'à M. Olivier Dorchy, membre du bureau De nos jours, quelques façades d'habitations
d'architecture DDV à Nivelles. sises à la rue des Brasseurs témoignent encore d'un
passé brassicole remontant au moins au milieu du
Bibliographie 15e  siècle. S'y côtoyaient plusieurs établissements
■■ Chambre provinciale, s.d. Chambre provinciale du Brabant dont la brassine installée dans la cour du keriteit,
wallon. Rapport d'activité 2011, s.l., Commission royale des maison hospital, comme en témoignerait une archive
Monuments, Sites et Fouilles. de 1621 (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007,
■■ de Lalieux É., s.d. (1780-1800). Mémorial de la vie nivelloise, p. 86-88).
2 tomes, Nivelles. Si, selon la carte de Ferraris, des édifices existaient
■■ Stroobant C., 1844. Notice historique et généalogique sur encore durant la seconde moitié du 18e  siècle sur la
les seigneurs d'Ittre et de Thibermont, Annales de l'Académie parcelle touchée par le projet urbanistique à l'origine
d'Archéologie de Belgique, II, Anvers, p. 367-409. de l'intervention archéologique, l'espace fut clairement
libéré de toute construction quelques décennies plus
tard comme l'illustre un plan dressé au début du
19e siècle (Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non
Nivelles/Nivelles : vestiges dévoilés par daté).
les travaux d'extension de l'Institut du En 1810, une institution scolaire pour enfants
Sacré-Cœur pauvres fut créée à proximité par une communauté
religieuse, fondée par l'abbé F.-J.  Delfosse (Gouy-lez-
Piéton, 1769  – Hoegaarden, 1848). Les bienfaitrices
Didier Willems et Christophe Leduc occupaient trois habitations, dont deux se situaient
près de l'église Saint-Nicolas (Vanderwauwen, s.d.).
Pour répondre à un accroissement de la population Sept années plus tard, la Maison des 12 Apôtres ainsi
scolaire, l'Institut du Sacré-Cœur a envisagé des modi- que les hôpitaux Saint-Nicolas et du Saint-Sépulchre
fications et extensions de ses installations le long de furent regroupés pour devenir l'hôpital général, installé
la rue Coquerne (parc. cad. : Nivelles, 2e Div., Sect. D, dans l'ancien couvent des Récollets jusqu'en 1870 avant
no  932b ; coord. Lambert  : 146828  est/142771  nord). un transfert vers le site actuel près du boulevard de la
Comme redouté, ce projet allait révéler des vestiges liés Batterie.
à l'histoire médiévale tardive et moderne du quartier En 1835, la communauté fut reconnue par l'autorité
dit du « petit Saint-Jacques ». ecclésiastique et dénommée Congrégation des Sœurs
de l'Union du Sacré-Cœur. Durant la seconde moitié
Historique du site à travers les sources du 19e  siècle, leur implantation, déjà étendue vers la
littéraires et cartographiques rue des Juifs, se développa davantage en accueillant
notamment un internat près de la rue Saint-Jean
Selon les archives consultées à ce jour, en 1225 est (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, p. 67). À cette
attestée la présence d'un keriteit, maison hospital de époque, Charles  Demulder (1820-1863), brasseur à
Dieu et de xii  apostels condist le Charité. Au fil du Nivelles depuis 1845 et conseiller communal entre
54

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

1851 et 1857 (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, La future infrastructure n'étant pas dotée de caves
p.  90), possédait une propriété très vaste s'étendant mais l'importante dénivellation de la voirie devant être
sur approximativement la moitié de la superficie de compensée, des remblais furent maintenus en contre-
l'îlot, compris entre la place Saint-Nicolas et les rues bas et d'autres recoupés en partie haute. Le niveau
des Brasseurs, Saint-Jean, des Juifs ainsi que Coquerne. horizontal défini de la sorte constitua le niveau de fond
Les deux grandes parcelles situées en bordure de cette de coffre supérieur. Une tranchée de fondation fut
dernière étaient manifestement deux jardins. Les également creusée le long de la voirie pour accueillir
édifices formant l'angle avec les rues des Brasseurs et les bases du mur de soutènement et le soubassement
du Wichet furent convertis en habitats, les brasseries de la façade méridionale (côté rue).
ayant fermé leurs portes.
Fin avril 1879, un dénommé Coquelet ou Cognelet, Résultats de l'intervention archéologique
résidant à Villers-la-Ville, racheta les bâtiments de
la Maison du Champ retiré (Osterrieth, Horbach & Descriptions des structures apparues au sol
Triquet, 2007, p. 53-54).
En mars 1913, suite au décès de M.  E.  Demulder, Les vestiges sont essentiellement des structures
les sœurs signèrent un bail de neuf ans pour bénéfi- construites et des remblais. Abstraction faite des
cier d'un grand jardin bordant la rue Coquerne et perturbations et remaniements récents, il s'agit de
contigu à leur établissement. Son acquisition en avril fondations et soubassements de murs porteurs.
1922 auprès de la fille héritière ainsi que celle d'un Le plus ancien identifié lors de l'intervention serait
second jardin proche et de deux demeures sises à la une fondation, large d'au moins 0,65  m et longue de
rue des Brasseurs permirent aux sœurs d'aménager plus de 0,90  m, située en limite de voirie. Réalisée à
des espaces supplémentaires (Osterrieth, Horbach & l'aide de moellons calcaires liés au mortier de chaux,
Triquet, 2007, p. 68). elle servit d'assise à un soubassement sur lequel dut
En 1931, la Maison du Champ retiré fut démo- reposer une élévation de bâtisse, et assurément dès
lie pour ériger un nouvel édifice et, huit années plus le 19e  siècle, le mur de propriété. Axé ouest/est, ledit
tard, les demeures voisines devinrent propriétés des soubassement présente un changement d'orientation
sœurs ; après la Seconde Guerre mondiale, elles éten-
dirent leurs infrastructures vers le nord. En 1953, le
site fut recoupé en surface par la création de l'avenue
Jeuniaux, les deux parties étant jointes par un tunnel
(Vanderwauwen, s.d.).
Le départ des sœurs n'a pas mis un terme à l'établis-
sement, au contraire  ; la fréquentation augmentant,
des aménagements furent entrepris sur l'ensemble du
site et ce jusqu'au milieu de l'année 2015.

Contexte de l'intervention

La première phase des travaux, engagée le 22 juin 2015,


concernait la création d'un bâtiment en bordure de la
rue Coquerne.
En raison d'une situation dans l'intra-muros
et d'une documentation peu abondante pour ce
secteur de la cité, le Service de l'archéologie de la
Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4  /
Département du patrimoine) souhaitait mener un
suivi des terrassements. Ceux-ci ayant révélé des
indices archéologiques, une intervention fut menée
dès le 8  juillet 2015 et ce cinq jours durant. Vu
les délais et moyens impartis, la tâche fut limitée
à un dégagement partiel des structures visibles en
l'état, au nettoyage d'une coupe de même qu'à des
descriptions et à une séance de relevés à la station Vue générale des structures mises au jour en bordure de la
rue Coquerne et du pignon dégagé de la maison sise au no 5.
totale.
55

Toutes périodes Brabant wallon

circulation associé n'a été clairement identifié.


Le mur dégagé à l'est est moins large (0,36  m) et
appareillé quasi exclusivement avec des briques liées au
mortier de chaux, pour la plupart fragmentaires dans
le registre inférieur  ; des moellons en pierre calcaire
récupérés ont également été employés. Sa largeur est
plus importante que celle du mur occidental  ; bien
que constante, de l'ordre de 0,69 à 0,73 m, elle s'accroît
quelque peu (jusqu'à environ 0,80  m) en extrémité
méridionale et ce sur 1,13  m de long. La longueur
totale de cette maçonnerie atteint également au moins
une dizaine de mètres.
Nivelles : vue des longues maçonneries parallèles érigées Un remblai terreux séparait les deux maçonneries ;
perpendiculairement à la rue Coquerne, dans le haut de la il contenait quelques briques, de rares moellons et des
propriété. À l'arrière plan, l'édifice érigé au début des années nodules de mortier.
1930 et restauré dès 1946.
Au pied du pignon oriental de la maison sise au no 5
de la rue Coquerne, une fondation imposante a été mise
quasi en son milieu et s'oriente davantage vers le sud-est. au jour. Comme les deux longues structures parallèles
Contre les faces septentrionales de ces maçonneries décrites précédemment, elle butait contre ou servait
bute un remblai terreux, qui recouvre d'ailleurs partiel- d'appui au mur de propriété jouxtant la voirie ; elle filait
lement l'ancienne fondation  ; cette couche rapportée également vers le nord-est. Toutefois, cette maçonnerie
fut recoupée par un radier, construit perpendiculaire- s'en distingue par les matériaux utilisés, sa longueur et
ment aux maçonneries précitées. son niveau d'édification. En effet, ce sont des moellons
À proximité orientale de la rupture d'axe du en pierre calcaire à peine équarris et des briques frag-
soubassement évoqué ci-dessus, deux murs furent mentaires (de teinte orangée à bordeaux) assemblés au
érigés. Parallèles et distants d'environ 1,80  m, ils mortier de chaux (teinte crème à rosé) qui ont été privi-
s'appuient contre les fondations en pierre du mur légiés. Conservée sur sa largeur originelle, soit 0,97 m
délimitant la propriété au sud, en bordure de la rue à la base et 0,55 m au niveau de l'arasement, et sur une
Coquerne, et filent en léger biais vers le nord-est. Bien hauteur d'environ 0,95 m, elle fut dégagée sur près de
que similaires de prime abord, tant par les matériaux 2,60 m de long. Son extrémité septentrionale, préservée,
que les axes, ces maçonneries comportent quelques correspondrait peut-être à un retour orienté vers l'ouest
particularités pouvant trahir des modifications volu- sur lequel reposerait l'extension de la maison voisine.
métriques ou l'appartenance à deux édifices distincts, Bien que la présente structure ne s'imbrique pas dans
probablement érigés l'un après l'autre. le long radier bordant la voirie, contrairement aux deux
Ainsi, le mur situé à l'ouest se compose d'un radier longs murs dégagés à l'est, une association (imbrication,
de fondation et d'un soubassement. Le radier, d'une butée, appui) avec l'élévation qui y reposait n'est pas à
largeur estimée à 0,63  m et d'une hauteur de 0,39 à exclure ; si tel est le cas, sa longueur initiale oscillerait
0,45  m, est constitué de briques fragmentaires ainsi autour de 3,70 m. Ce qui apparaît clair par contre, c'est
que de moellons en pierre calcaire et en petit granit le fait qu'elle ait été construite sur un remblai terreux
(communément dénommé « pierre bleue ») noyés dans d'au moins 0,90  m d'épaisseur incluant des fragments
du mortier de chaux. Quant au soubassement, épais de matériaux (briques, ardoises et tuiles plates), de
de 0,54 m, conservé sur une hauteur de 0,42 m et une même que quelques rares coquilles (huîtres et moules),
longueur d'au moins 10 m, il fut réalisé à l'aide de maté- des ossements animaux et des débris de céramiques, le
riaux mixtes, à savoir des pierres taillées en petit granit tout recouvert, du moins à l'est, d'un dépôt moins épais
(récupérées) sur une section de la face orientale et des (0,27 m) de terres noires intégrant du mortier, de petits
briques (dim. : 21 × 10 × 6 cm) bien appareillés, liées moellons, du verre…
au mortier de chaux de teinte ocre, pour le reste. Ces
caractéristiques et le débordement du radier vers l'est Description du pignon de la maison sise au no 5
autorisent à supposer que l'intérieur de l'espace auquel
appartiendrait cette maçonnerie (bâtiment ou cour) Étrangement, le pignon oriental de la maison portant
se déployait vers l'ouest. Un remblai épais de plus ou le no  5 paraît être imbriqué dans les soubassements
moins 0,36 m, incluant un fragment de jatte en faïence, en moellons et le mur de façade mais uniquement à
et des couches successives de condamnation ont été partir de l'étage soit à environ 2,30  m au-dessus de
observés à proximité immédiate mais aucun niveau de l'aire actuelle de circulation publique ; entre les deux
56

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

téristiques trahissent une fabrication pouvant remon-


ter au 16e  siècle, elles n'excluent toutefois pas une
récupération de matériaux.
Deux baies dotaient cette élévation : l'une à l'étage,
rebouchée, et l'autre au niveau du grenier, juste sous
la pointe de toiture ; la seconde a pu être percée tardi-
vement. Leurs linteaux et seuils sont en petit granit
taillé ; la fenêtre supérieure, plus grande, est surmontée
d'un arc de décharge.
Par la suite, le pignon fut rehaussé, probablement
dans le cadre d'une extension du corps de logis.
Progressivement, elle s'étendit vers le nord sur plus
de 4,30  m et vers l'est sur près de 1,60  m à la base.
La partie inférieure de cet agrandissement n'est pas
imbriquée dans le pignon originel mais buterait contre
lui, en formant un angle extérieur aigu. Autant la
section méridionale fut érigée à l'aide de briques aux
dimensions variées, autant son retour oriental est
constitué essentiellement de moellons à peine équar-
ris  ; quelques briques bien cuites, de teinte bordeaux
(dim. : 21 × 9 × 5,5 cm) ont également été employées.
Ce retour était percé d'une baie haute de 0,85 m et large
de 0,64  m, pour une profondeur d'au moins 0,15  m.
Ses linteau (dim. : 0,89 m, en deux parties de 0,64 et
0,22 × 0,085 × au moins 0,15 m) et seuil (dim. : 0,72 ? ×
0,14 × au moins 0,14 m) en petit granit maintenaient
Nivelles : vue rapprochée du pignon oriental de la maison trois barreaux métalliques de section quadrangulaire
bordant le site et des structures dégagées à proximité.
(2 cm de côté), placés verticalement. Elle fut condam-
née par une maçonnerie dans les deux tiers supérieurs
extrêmes, une limite franche, comme retravaillée, ainsi que par l'encastrement d'une structure moderne
est observable. Cette particularité pourrait être la et le placage de béton.
conséquence d'un remaniement de la façade (dim. Les élévations en briques que ces bases supportent
des briques  : 20/22  × 10/11  × 5,5  cm), associé ou ont été érigées en retrait vers l'intérieur, ce qui rédui-
non à l'édification du mur de clôture des jardins qui sit les dimensions externes à 1,43  m pour l'un et au
devinrent propriété de l'Institut. moins 4,10 m pour l'autre. Sur la section méridionale,
L'allure du pignon originel est toujours visible. D'une la réduction consiste en un plat  ; du côté oriental,
longueur supérieure à 3,60 m, il est de type à épis et cette différence est soulignée par une double assise
était probablement débordant, doté de consoles à la de briques posées sur chant et de biais, probablement
base des deux pans comme en témoignerait la pierre réalisée pour évacuer les eaux ruisselantes (dim.  :
enchâssée à la jonction avec la façade côté voirie. La pente proche de 45° et large de 0,35 m). Les maçonne-
trace d'une plate-forme démolie, dont la partie sommi- ries furent réalisées à l'aide de mortiers à la chaux mais
tale correspondait à la mi-hauteur de l'étage de l'habi- les rejointoiements et réfections récentes l'ont été avec
tation, constitue une limite entre ce qui fut préservé en usage d'un mortier au ciment.
l'état depuis quelques décennies dans la partie basse, La fondation en moellons mise au jour près du
avec utilisation d'un mortier de chaux de teinte crème pignon et l'épais remblai sur lequel elle reposait
claire, et le registre supérieur, jusqu'au faîte de toiture furent recoupés par une tranchée, ouverte dans le but
moderne, remanié notamment comme l'attestent d'enduire ledit pignon et son extension d'un mortier
divers rejointoiements récents au ciment. d'étanchéité au ciment. Les pierres posées contre ce
Bien que les textures et nuances des briques soient pignon et sur la rigole aménagée dans le bas devaient
variables, allant d'une structure friable à très cuite et probablement garantir un drainage suffisant.
d'une teinte très orangée à rougeâtre sombre voire Plus proche de nous dans le temps, les divers aména-
gris-mauve, les gabarits semblent eux réguliers avec gements commandités par l'institution scolaire ont
des dimensions nettement supérieures à celles de la largement perturbé les quelques témoins d'occupa-
façade (dim.  : 26  × 12,5/13  × 5,5  cm)  ; si ces carac- tions antérieures dans ce secteur.
57

Toutes périodes Brabant wallon

Quelles conclusions tirer de cette Remerciements


intervention ?
Cette intervention, aussi courte fut-elle, n'aurait pu
En confrontant la répartition des vestiges révélés par être menée sans Vincent Humé, opérateur au sein du
les terrassements et les quelques archives disponibles, Service de l'archéologie et coéquipier durant l'interven-
il apparaît clairement que les structures majeures tion. Qu'il en soit remercié ainsi que Martine Soumoy,
décrites dans la présente notice sont toutes d'époque responsable du Service de l'archéologie de la Direc-
moderne. En outre, à l'exception de cette maçonne- tion extérieure du Hainaut 1, qui a accepté que notre
rie à peine dégagée en bordure immédiate de la rue collègue Christophe Leduc, technicien au sein de son
Coquerne, ayant pu servir d'assise pour un mur de équipe, apporte son aide pour les relevés de terrain.
propriété et d'appui pour les deux longs murs porteurs Notre reconnaissance s'adresse également
perpendiculaires, les faits mis au jour incluent des à M.  Francy  Glineur, architecte à Souvret, et
matériaux recyclés, récupérés, tels des moellons en M. Yannick Cimino, conducteur de chantier auprès de
petit granit. Dès lors, les vestiges se situeraient chro- l'entreprise Theret et Fils s.a., pour leur compréhension.
nologiquement entre le 16e siècle au plus tôt et la fin
du 18e  siècle, la carte de Ferraris illustrant du bâti Bibliographie
dans ce secteur, notamment un édifice érigé en long ■■ Osterrieth M., 2010. Le patrimoine de Nivelles, Namur
et axé sud-ouest/nord-est. Quant à une attribution (Carnets du Patrimoine, 74).
structurelle, il est tentant de les associer à la grange de ■■ Osterrieth M., Horbach R. & Triquet A., 2007. Le Petit-
la Maison hospital de Dieu et de xii apostels condist le Saint-Jacques hier et aujourd'hui, Nivelles, Nouvelles Imprime-
Charité ou la demeure de l'abbaye de Floreffe, sinon ries Havaux.
les deux. Si tel est le cas, au regard de leurs caracté- ■■ Vanderwauwen E., s.d. Institut du Sacré-Cœur. Son
ristiques, dont les longueurs, les pignons devaient être origine – Son histoire – Son avenir, Nivelles (http://www.
situés au sud, jouxtant la rue Coquerne, et au nord. iscnivelles.be/v3/?page_id=54, consulté le 4  octobre 2016).
Que ces maçonneries aient appartenu à des bâtisses et/
ou des limites de propriétés, l'espace qui les sépare est Sources
interpellant  ; il peut s'agir d'une venelle, un accès tel ■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
que celui qui semble avoir existé entre le pignon occi- plan parcellaire de la commune de Nivelles.
dental de la maison en contrebas et la demeure qui la ■■ Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non daté (peut-être
précédait en montant la rue (Cadastre de l'intra-muros entre 1810-1815 et 1830) et non signé (Musée archéologique de
de Nivelles, non daté). Toutefois, est également plau- Nivelles).
sible l'emprise d'une extension vers l'est ; cette modi- ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
fication a pu engendrer un rehaussement du ou des Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Nivelles, pl. 79.
niveaux de circulation. Une troisième éventualité peut
être que l'un des deux murs soit le vestige d'une limite
de propriété ; rappelons à ce sujet la rupture d'orienta-
tion du mur longeant la voirie d'une part et l'inscrip- Orp-Jauche/Énines : suivi négatif sur le
tion dans les plans cadastraux du 19e siècle d'un tracé site néolithique du « Chêne au Raux »
prenant naissance en ce point et filant vers le nord-est,
suivant un axe similaire à celui de ces deux structures,
d'autre part. Dominique Bosquet
En ce qui concerne la maison sise au no 5, son exten-
sion au début du 19e  siècle devait correspondre à un Le suivi a été effectué le 14  septembre 2015 rue Bois
souhait d'agrandir l'espace habitable, le bien ne portant des Fossés, en face du no  43 (coord. Lambert  72  :
qu'une seule référence sur le plan cadastral non daté. 189648  est/153698  nord). Il a été occasionné par la
Quelques décennies plus tard par contre, la propriété construction d'une maison unifamiliale sans caves,
semble avoir été scindée, comme le suggèrerait le plan mais avec vides ventilés, citerne d'eau de pluie et
cadastral établi par P.-C.  Popp, mais le propriétaire chambre siphon pour les eaux usées par la société
était le même pour l'ensemble, à savoir un certain Maisons Compère, pour le compte de M.  E.  Chaves
Jean-Baptiste Decorte, marchand de grain à Nivelles. de  Sousa et Mme  E.  Joiris. Les terrassements ont
Enfin, les extensions et remaniements commandités couvert environ 120 m² sur une parcelle de 788 m².
par l'institution scolaire le long de la rue Coquerne, La zone touchée par les travaux est contiguë au site
surtout depuis le dernier quart du 20e siècle, ont large- Michelsberg bien connu du « Chêne au Raux » (Néoli-
ment gommé une part du patrimoine qui subsistait. thique moyen, vers 4500 av. notre ère). Celui-ci a fait
58

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

l'objet de trois campagnes de fouilles entre 1994 et à Jauche. Les deux carrières dont il est question ici ont
1996 (Burnez-Lanotte, Lasserre & Van Assche, 1994 ; été découvertes à la suite d'un effondrement de terrain
1995  ; Burnez-Lanotte et al., 1996-1997), mais cette (2015) dans un jardin privé rue de Folx-les-Caves
période de la Préhistoire reste très peu documentée (parc. cad. : Orp-Jauche, 2e Div., Sect. B, no 261 ; coord.
en fouille en Belgique, d'où la nécessité de ne prendre Lambert  72 : 191485  est/152196  nord). Elles ne sont
aucun risque quant à la destruction de vestiges, fût-ce actuellement plus accessibles, la zone effondrée ayant
sur une surface aussi faible que celle des travaux ayant été rebouchée.
fait l'objet de ce suivi. Le trou formé par l'effondrement, dans lequel le
La découverture réalisée a fait apparaître un horizon contenu d'un étang s'est entièrement déversé, présentait
Bt holocène bien conservé et le sondage réalisé pour une section d'environ 3 × 3 m et était profond de 6 m
implanter les citernes montre une épaisseur de lœss jusqu'au sommet du cône d'éboulis. Le réseau de gale-
de 2  m, reposant sur un cailloutis tertiaire criblé de ries accessible correspond à deux carrières différentes
galets de silex, situation classique en Brabant wallon. qui se recoupent (coupe B-B'), chacune étant munie
Le taux d'érosion n'a pas pu être évalué, mais il est très d'un unique puits d'accès. Les deux puits, distants l'un
probablement dans la moyenne de ce qui s'observe sur de l'autre de 15  m, sont colmatés de limons argileux
les terrains agricoles de Hesbaye, soit autour de 60 cm. bruns. Ces marnières ont une profondeur d'exploita-
Du point de vue de la conservation des vestiges, le tion légèrement différente : le sol de la carrière la plus
potentiel archéologique de la zone est donc réel, mais petite, probablement la plus ancienne, est environ 1 m
aucun fait archéologique n'a été mis au jour, ce qui plus bas que celui de la seconde carrière. Les galeries
est peu surprenant vu la faible surface touchée par les de la petite carrière sont également moins hautes et
terrassements. moins larges.
Le puits d'entrée de la carrière  1 fait 1,05  m de
Bibliographie diamètre. Il débouche au milieu d'une galerie longue
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M., Clarys  B., d'environ 12 m, orientée nord-ouest/sud-est. Un cône
Van Assche M., Doutrelepont J. & Havard C., 1996-1997. d'éboulis constitué de craie, de blocs de silex et de
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg, limon argileux se trouve à la base du puits. Des plaques
Chronique de l'Archéologie wallonne, 4-5, p. 5-6. de craie se sont détachées du plafond localement. La
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M. & Van Assche M., 1994. galerie principale présente quatre courtes galeries
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg, secondaires, disposées symétriquement de part et
Chronique de l'Archéologie wallonne, 2, p. 6-8. d'autre du puits d'accès. La hauteur des galeries varie
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M. & Van Assche M., 1995. de 2,5 à 2,7 m et leur largeur de 1,6 à 2 m. La craie a
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 3, p. 6-7.

Puits d’entrée
carrière 1

Orp-Jauche/Jauche : découverte de deux Puits d’entrée


B’

marnières
carrière 2
B

A
Olivier Vrielynck, Luc Funcken
et Frédéric Van Dijck Effondrement
2015
A’

La région d'Orp-Jauche est connue pour ses marnières


souterraines qui sont régulièrement à l'origine d'effon-
drements de terrain. Hormis celles, particulièrement
grandes, de Folx-les-Caves, peu de ces carrières sont A A’

connues et accessibles. La plupart du temps, les effon-


drements sont rebouchés sans que soit fait le relevé des
galeries éventuellement mises au jour. Seule exception, 0 5m
B B’

une carrière située sous un champ à la sortie de Jauche


en direction de Folx-les-Caves et découverte en 2011
(Vrielynck et al., 2013). L'aménagement de son puits Jauche : plan schématique des deux marnières et coupes
A-A' et B-B' réalisées dans l'axe des galeries.
d'entrée en fait actuellement la seule carrière accessible
59

Toutes périodes Brabant wallon

été creusée à l'aide d'un outil présentant un tranchant Ottignies-Louvain-la-Neuve/Ottignies :


large de 1,5  cm. Hors cône d'éboulis, une couche de évaluation négative rue de la Baraque à
boue d'au moins 10 cm d'épaisseur recouvre le sol des
Louvain-la-Neuve 
galeries.
C'est au niveau de la plus courte de ses galeries
secondaires que cette marnière a été recoupée par Dominique Bosquet
une seconde carrière plus vaste. Celle-ci a une orga-
nisation différente de la première, moins régulière. Cette évaluation fait suite à l'intervention préventive
Les galeries y sont plus larges et hautes. Le puits réalisée en 2014 sur le chantier de la future gare
d'entrée présente un diamètre de 1,2 m. Il débouche RER (Timmermans, Van  Nieuwenhove & Bosquet,
sur une galerie longue de 23 m, qui possède la même 2015), sur une petite surface destinée à recevoir
orientation que la galerie principale de la première d'importants remblais, située entre le chantier en
carrière. Cette galerie est entièrement colmatée vers cours et la rue de la Baraque (coord.  Lambert  72  :
le nord. Un sondage manuel semble indiquer qu'elle 167852,9  est/151363,7  nord). L'investigation a été
se termine à 4 m du puits. Au sud, la galerie présente réalisée à la demande de l'entrepreneur (Valens) qui a
trois embranchements vers l'est et le sud-est, longs mis ses moyens techniques à la disposition du Service
respectivement de 12  m, 5  m et 4,3  m. Enfin, une de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant
dernière galerie, parallèle à la première et longue de wallon (DGO4  / Département du patrimoine) durant
6,7  m, relie les deux premiers embranchements. Le une journée. Rappelons que l'intervention archéologique
développement total de cette seconde carrière atteint précédente fut menée sur une zone en grande partie
52 m. Les galeries sont larges de 2 m à 3,85 m et leur détruite par les travaux et ce malgré les dispositions
hauteur atteint par endroits 3,7  m. Des traces de inscrites dans le permis d'urbanisme (Timmermans,
pioche sont visibles sur les parois. Une petite niche est Van Nieuwenhove & Bosquet, 2015, p. 55).
présente dans le premier embranchement, à environ La parcelle, d'une superficie de 3 000 m², correspond
1,2 m du sol (larg. 1 cm, prof. 10 cm, haut. 30 cm). au bas d'un versant exposé au nord-ouest, en pente
La pratique du marnage des champs remonte à assez prononcée et occupé par une pâture au moment
l'époque romaine, s'est généralisée au 17e  siècle et a de l'évaluation.
perduré jusque dans la première moitié du 20e siècle Celle-ci a consisté en l'ouverture de trois tranchées
(Dudouble & Verlut, 2002  ; Préfecture de l'Eure, parallèles, qui se sont révélées négatives.
s.d.). La datation des carrières découvertes à Jauche
est difficile à établir. Aucun objet contemporain de Bibliographie
l'exploitation n'a été découvert. La présence de deux ■■ Timmermans J., Van Nieuwenhove B. & Bosquet D., 2015.
marnières non contemporaines qui se recoupent Ottignies-Louvain-la-Neuve/Louvain-la-Neuve : évaluation à
témoigne peut-être d'un mode d'exploitation plus l'emplacement du parking RER, Chronique de l'Archéologie
simple (et plus prudent) à une période plus ancienne. wallonne, 23, p. 55-56.

Bibliographie
■■ Dudouble A. & Verlut R., 2002. Les marnières, s.l.,
AREHN, éd. Résonnance, 4 p. (www.arehn.asso.fr/publications/ Rebecq/Bierghes : suivi négatif lors de
cpa/cpa22.pdf, consulté le 5 octobre 2015). la création d'une pelouse de dispersion
■■ Préfecture de l'Eure, s.d. Gestion et prévention des risques dans le cimetière paroissial
liés aux cavités souterraines dans l'Eure, s.l. (http://www.eure.
gouv.fr/content/download/2375/15761, consulté le 5  octobre
2015). Didier Willems
■■ Vrielynck O., Delaby S., Funcken L. & Van Dijck F., 2013.
Orp-Jauche/Jauche : la carrière souterraine de « Renau-Fossé », À Rebecq, et plus précisément sur la localité de Bier-
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 40-41. ghes, se dresse le long de la chaussée d'Enghien une
petite église paroissiale dédiée à saint Martin. Les
parcelles la jouxtant au nord accueillent le cimetière et
la morgue (parc. cad. : Rebecq, 2e Div., Sect. B, nos 12,
13b et 14e ; coord. Lambert : 134105 est/154598 nord).
Les incinérations étant de moins en moins marginales,
l'Administration communale prit la décision de démolir la
morgue pour la remplacer par une pelouse de dispersion.
60

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Contexte historico-patrimonial d'eau il y avait, elle n'avait pas encore été touchée. De
prime abord, les niveaux atteints suffisaient pour réali-
Bien que l'église soit un ensemble architectural de style ser le projet. Aucun vestige ancien n'a été observé.
classique, érigé en moellons, briques et pierres bleues, Les opérateurs de l'entreprise n'étaient plus sur place
daté assurément du troisième quart du 18e  siècle pour fournir de plus amples informations. Pour la
comme la cure qui lui est associée, édifiée elle en 1763 documentation du Service, un petit reportage photo-
selon un millésime (Bierghes, 1974), rien n'exclut une graphique a été effectué dans et autour du cimetière.
antériorité. En effet, l'édifice religieux est doté d'un À travers cette très courte notice, que soient remerciés
portail de style Louis XVI et abrite du mobilier ainsi M.  Tony  Piron, de l'Administration communale de
que des pierres tombales des 16e-17e siècles. En outre, Rebecq, de même que M. Jean-Pierre Jouret, patron de
il était jadis lié à l'abbaye de Saint-Denis en Brocque- la société B Construct sprl.
roie qui y jouissait d'un droit de collation depuis 1222.
Incluse dans le doyenné de Hal, diocèse de Cambrai, Bibliographie
la paroisse fut rattachée à l'archevêché de Malines ■■ Bierghes, 1974. Bierghes. Égl. paroiss. St-Martin. In : Province
après le Concordat en 1801 (Evrard, 1994, p. 168-169). de Brabant. Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine
Signalons qu'au 19e  siècle, la commune de Bierghes monumental de la Belgique, 2), p. 42-43.
était intégrée au canton de Hal, arrondissement de ■■ Evrard L., 1994. Répertoire des églises du Brabant wallon,
Bruxelles (Recueil, 1823) ; elle n'en fut détachée qu'en Lasne, éd. de l'A.R.C.
1962. Lors de la fusion des communes de 1977, elle fut ■■ Recueil, 1823. Recueil des lois et actes généraux du gouver-
associée à Rebecq. nement, en vigueur dans le Royaume des Pays-Bas, 3e  série, 6,
Enfin, pour ne pas confondre ce lieu de culte avec Bruxelles.
celui de Quenast, lui aussi dévolu à saint Martin, il
fut également placé sous le patronage de saint Pierre
(Evrard, 1994, p. 168).
Tubize/Tubize : occupations
L'intervention et son résultat protohistorique, romaine et médiévales à
Stéhou
Un membre de l'équipe du Service de l'archéologie de
la Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4  /
Département du patrimoine) s'est rendu sur place le Dominique Bosquet, Olivia De Staercke,
mercredi 7 janvier 2015 en début d'après-midi. La base Véronique Moulaert et Marie-Laure Van Hove
des murs de la morgue avait été maintenue et la dalle
de fond n'avait pas été perturbée. En outre, des tâches Introduction
ponctuelles de maçonnerie avaient été effectuées très
récemment, voire le matin même. Le site a été découvert lors d'une évaluation menée
Selon les informations recueillies au préalable, le par le Service de l'archéologie de la Direction
sous-sol sous et autour de la morgue était déjà perturbé extérieure du Brabant wallon (DGO4 / Département
par la présence d'une citerne à eau de pluie. Si réserve du patrimoine) préalablement à la construction d'un
lotissement de 25  ha par la société Evillas (Bosquet
et al., 2015). Il se situe non loin du hameau de Stéhou,
entre la chaussée de Mons, la rue de Stimbert et la
ligne SNCB 96 Bruxelles-Quévy. Partiellement
financée par l'aménageur, la fouille extensive d'une
zone riche en vestiges est menée en collaboration
avec l'asbl Recherches et Prospections archéologiques
(RPA). Elle a débuté en février 2015 et se terminera
en avril 2016.
Les occupations sont implantées sur le bord oriental
d'une large crête qui domine le ruisseau de Cœurcq
coulant à l'est, tandis que 750  m à l'ouest de la crête
coule la Senne. Le point le plus haut culmine au milieu
de l'emprise à 82,5 m d'altitude et le plus bas corres-
Cimetière paroissial de Bierghes : vue générale de l'ancienne pond au bord oriental du futur lotissement, situé à une
morgue démolie.
altitude de 60 m.
61

Toutes périodes Brabant wallon

Vers la chaussée de Mons

F130

F95

Bat. 1
F95

Limite de la fouille
Faits non datés
F95

Fosse La Tène
F 95
Période romaine
13e-14e siècles
Bat. 2
14e-15e siècles

Fouilles en cours 2016

10 m

Tubize, Stéhou : plan des fouilles.

L'évaluation a couvert 15 ha sur les 25 ha du projet à la chaussée de Mons. Il s'agit de fosses et de trous
immobilier, les 10 ha restants étant occupés par d'im- de poteaux. Pour ces derniers aucun plan ne se
portants impétrants ou n'étant pas menacés de destruc- distingue de façon évidente actuellement. Les coupes
tion. Les faits mis en évidence lors du diagnostic se effectuées montrent des poteaux porteurs assez
concentraient essentiellement sur une zone de 1,5 ha –  voire très  – imposants, dont certains sont inclinés.
dont 9  000  m² directement menacés de destruction Ces faits présentaient tous d'épaisses lentilles de
par le lotissement. En conséquence, quatre décapages compression et contenaient, pour certains, du matériel
extensifs couvrant 8  467  m² au total ont été réalisés, détritique, notamment de la céramique située entre le
mettant au jour 345 faits anthropiques : fossés, fosses, 1er et le 2e siècle de notre ère (F. Hanut, Direction de
trous de poteau et fondations en pierres d'au moins l'archéologie, communication personnelle). Aucun des
deux bâtiments. Dans l'état actuel d'avancement de la fossés présents sur la frange ouest de la fouille n'a pu
fouille et à l'exception d'une fosse protohistorique, les être daté de façon sûre jusqu'ici, mais il est possible que
vestiges datés concernent les périodes romaine (1er et certains puissent être attribués à la période romaine
2e  siècles de notre ère) et médiévale (entre les 13e et également, de même que d'autres fosses.
15e siècles), mais une majorité de structures en creux ne
sont pas encore datées de façon fiable. La chronologie La période médiévale
ne pourra être précisée qu'à l'issue des travaux de post-
fouille, en cours actuellement. La plus grande partie des faits mis au jour peut être
Rappelons enfin qu'aucun site archéologique n'était attribuée à cette période, notamment deux bâtiments
connu à cet endroit (Bosquet et al., 2015). (Bât. 1 et Bât. 2), un chemin dirigé en droite ligne vers
la chaussée de Mons (F130) et un vaste dépôt détri-
La période romaine tique (F95).
Le fait F95, dont le contour est diffus et très sinueux,
À ce stade de l'investigation, les faits romains semblent couvre au minimum 300 m². En coupe, sa profondeur
se concentrer essentiellement sur une bande de 30 à est de 40 cm à 50 cm autour du bâtiment 1 et diminue
40  m de large à l'ouest de la fouille, parallèlement graduellement au fur et à mesure qu'on s'en éloigne.
62

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

de schiste soigneusement appareillées à


sec, sans tranchée de fondation. L'édifice
étant construit dans la pente, une petite
terrasse horizontale a été aménagée préa-
lablement au montage des murs. Ceux-ci
dessinent un plan rectangulaire de 2,5 m
sur 4,3  m délimitant un espace interne
exigu d'à peine 6,5  m². La fonction de
cette construction est encore indéter-
minée, mais on pense au soubassement
Sondage d'un four ou d'une petite porcherie, les
Berme non fouillée deux installations pouvant éventuelle-
ment coexister (Fock et al., 2008, p. 143).
2m Une série de prélèvements ont été effec-
tués sur le niveau de circulation à l'inté-
Tubize, Stéhou : relevé pierre à pierre du bâtiment 1 (14e-15e siècles).
rieur du bâtiment, qui se présente sous
la forme d'une surface indurée couverte
Le remplissage est constitué d'une couche unique de d'une croûte d'oxyde de fer. Les analyses micromor-
couleur grisâtre, due en partie à la présence de cendre phologiques et des phosphates à venir devraient
et de charbon de bois, et contenant de la céramique, apporter des éléments d'interprétation de la fonction
des matériaux de construction (ardoise, brique/tuiles de cet édifice.
en fragments, petits blocs de calcaire), de rares objets La céramique associée à F95, aux bâtiments 1 et 2 et
métalliques et quelques ossements. Ce matériel est au chemin F130 permet de les situer de façon prélimi-
distribué de façon aléatoire au sein de F95, avec des naire entre la fin du 14e siècle et le début du 15e siècle
zones riches en matériel et d'autres qui n'en livrent pas. (S. Challe, Direction de l'archéologie, communication
En l'absence de toute trace de creusement, cette unité personnelle).
détritique correspondrait à une micro-dépression Une série de fosses, découvertes pour la plupart
naturelle comblée progressivement par les rebuts liés lors de sondages effectués dans F95, correspond à une
aux activités menées dans Bât. 1 qui en occupe le centre. occupation antérieure aux vestiges des 14e-15e siècles.
Ce bâtiment est constitué d'une série d'alignements Ces faits ont été relevés en plan mais n'ont pas pu être
et d'amas de dalles de schiste, ces derniers étant fouillés. En effet, le niveau du fond de coffre ayant été
vraisemblablement liés à des effondrements. Le plan atteint en maints endroits, il n'était pas possible de
est malaisé à définir, soit qu'il s'agisse d'un bâtiment vider l'entièreté de F95 sans hypothéquer gravement
comprenant plusieurs pièces, soit de plusieurs la stabilité du terrain. Seuls quelques sondages en
bâtiments contigus. Les parties correspondant à des long ont été ouverts, occasionnant la découverte
fondations en place sont conservées sur une ou deux d'une partie seulement de l'occupation antérieure.
assises, appareillées à sec et sans tranchées de fondation. Fort heureusement des récipients de céramique, assez
Le bâtiment 2, mieux préservé, est constitué d'assises complets pour certains, on été recueillis au niveau
d'une quarantaine de centimètres de hauteur en dalles du décapage, permettant de situer cette première
occupation médiévale aux 13e-14e  siècles (S. Challe,
communication personnelle).

Conclusion

La présence sur le site de Stéhou de vestiges romains,


qui s'ajoutent à plusieurs sites de cette période sur le
territoire de Tubize à proximité de la chaussée de Mons
(Dewert, Fourny & Van Assche, 1990-1991), étaye
l'idée d'une origine romaine de cette voie. Quand aux
vestiges médiévaux, ils sont très probablement à mettre
en lien avec le fief seigneurial de Renarbus, qui relevait
de l'abbesse de Nivelles et dont les détenteurs sont
connus depuis le début du 13e  siècle (De  Brabanter,
Le bâtiment 2 en cours de fouille.
1998  ; Hoebanx, 1952). Les études et analyses à
63

Toutes périodes Brabant wallon

mener sur le matériel et les prélèvements issus des


fouilles permettront ainsi un apport non négligeable
de données neuves sur l'histoire ancienne de cette
commune et, plus largement, de l'ouest du Brabant Cou
pe 1
wallon. À la demande de la commune, ces acquis
devraient être mis en valeur dans le cadre d'un petit
parcours archéologique qui serait aménagé à l'entrée

renu
Terv
du lotissement et que le promoteur, la société Evillas, a

e de
Chaussée de Bruxelles

u ssé
accepté de financer.

Ch a
Cou
pe 2

Bibliographie
■ Bosquet D., Delporte L., Van Hove M.-L. & Lozet S., 20 m
2015. Tubize/Tubize : évaluation positive à proximité de Stéhou,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 56-59. Waterloo : emplacement des deux coupes observées par
■ De Brabanter C., 1998. La seigneurie de Renarbus, Tubize rapport à l'emprise du projet immobilier (trait en gras)
reporté sur l'orthophotoplan (2012-2013).
et son passé, 12.
■ Dewert J.-P., Fourny M. & Van Assche M., 1990-1991.
Découverte d'une bouteille en verre gallo-romaine à Braine- lorsque la majeure partie de l'emprise, soit 120 000 m²,
le-Comte au lieu-dit «  Favarge  » (Ht.), Vie archéologique, 36, avait déjà été terrassée jusqu'à grande profondeur. Il a
p. 44-51. cependant été possible de relever deux coupes visibles
■ Fock H., Remy H., Goffioul C. & Bosquet D., 2008. Les sur les talus nord (coupe 1) et sud (coupe 2) de l'ex-
traverses du temps. Archéologie et TGV. Catalogue d'exposition, cavation. Après un nettoyage rapide, les deux profils
Namur, Service public de Wallonie, 161 p. ont fait l'objet d'un enregistrement photographique et
■ Hoebanx J.J., 1952. L'abbaye de Nivelles des origines au d'une description succincte.
xive siècle, Bruxelles, Académie royale de Belgique (Classe des
Lettres et des Sciences morales et politiques, Mémoires in-8°, La coupe 1
46/4).

Haute de 2,3 m et large de 1,2 m, elle présente quatre


unités. La base de la coupe pourrait correspondre à un
horizon illuvial du Bt holocène, surmonté d'une unité
Waterloo/Waterloo : fortement bioturbée, avec taches blanches et rouille de
suivi archéologique sur le site de l'ancien dégradation due aux racines, au-dessus de laquelle on
contrôle technique observe une unité plus claire, vestige possible de l'hori-
zon éluvial du Bt  holocène. La moitié supérieure du
profil est composée d'une terre noire riche en matière
Dominique Bosquet et Marie-Laure Van Hove organique, contenant des fragments de briques et/
ou tuiles, des charbons de bois et des petits tessons
Introduction d'allure moderne. Cette unité est interprétée comme
un humus d'origine anthropique (terre de jardin, pota-
La construction, par le groupe Trevi, du complexe Les gers, champs…).
Jardins des Vallons, entre les chaussées de Bruxelles et
de Tervuren (emplacement de l'ancien contrôle tech- La coupe 2
nique ; coord. Lambert 72 : 152415 est/154818 nord)
a été l'occasion, pour le Service de l'archéologie de Trois unités principales sont visibles, sur une hauteur
la Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4  / de 6 m et une largeur de 25 m. À la base du profil on
Département du patrimoine), de réaliser un suivi observe une unité sableuse litée, qui correspond très
archéologique les 5 et 7  mai 2015. Le terrain touché probablement à la couverture tertiaire présente à
correspond à un fond de vallon partiellement urba- maints endroits en Brabant wallon. Elle est surmon-
nisé, occupé par une friche arborée et des jardins tée d'une unité lœssique, sorte de dune dans laquelle
situés à l'arrière des habitations. L'emprise empiète sur se sont développés quatre gleys (sols hydromorphes),
le centre ancien de Waterloo tel qu'il apparaît sur la au-dessus desquels s'observe le Bt holocène. Ce dernier
carte de Ferraris, mais aucun site n'est connu à l'em- semble ici très bien conservé, dans la mesure où l'hori-
placement du projet immobilier. Averti après le début zon éluvial, érodé dans la grande majorité des sites, est
des travaux, le Service de l'archéologie est intervenu ici encore visible.
64

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Conclusion

Malgré l'absence de vestiges archéologiques, l'enregis-


trement, même rapide, de coupes telles que celles-ci
représente un intérêt certain dans le cadre d'une poli-
tique d'archéologie préventive. Il permet en effet, en
divers points de la province, de recueillir des données
pédologiques qui conditionnent la présence et le degré
de préservation des sites à une échelle locale. Dans le
cas présent, il semble que le Bt holocène soit très bien
conservé à faible profondeur dans le fond de vallon.
Un humus, potentiellement ancien, est également
présent. La zone devra ainsi faire l'objet d'une surveil-
lance accrue lors de son urbanisation future.

Sources
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Braine la Leud, pl. 78.
Hainaut

Monitoring des minières du Silex's (site de « Petit-Spiennes ») par les ingénieurs du SPW (photo
M. Woodbury, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).
67

Mouscron

Enghien Petit-Enghien
Ghislenghien

Ath

Antoing
Soignies
Hollain Maubray Belœil
Brunehaut Quevaucamps
Laplaigne Brye
Lesdain
Saint-Amand
Baudour
Gouy-lez-Piéton
Saint-Ghislain Fleurus
Morlanwelz Courcelles
Montrœul-sur-Haine Saint-Symphorien
Hensies Binche Morlanwelz-Mariemont
Aiseau-
Buvrinnes Presles
Genly
Quévy Presles
Honnelles
Quévy-
Roisin le-Grand

Carte administrative des communes de la province du Hainaut visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée

Éditorial
Comme il est difficile de faire plus avec moins, et même avec encore moins ! Bien sûr l'archéologie est un métier de
passionnés qui ne ménagent pas leurs efforts face aux menaces de destruction de vestiges. Mais pour creuser, dessi-
ner, étudier, il faut des équipes et des moyens en nombre suffisant. Or, on déplore de façon générale une baisse des
effectifs valides. Des chantiers pourtant planifiés ne sont pas réalisés faute de personnel ou sont effectués par trois ou
quatre agents, voire deux. Des choix de dossiers sont faits, la solidarité s'organise entre provinces, des fouilles et des
études sont confiées à des institutions mais le constat est là.
L'archéologie a un coût, c'est le prix de la connaissance de l'histoire de nos sociétés. Nous sommes fiers que la nôtre
puisse encore la financer et nous espérons que cela puisse se poursuivre, mais pour combien de temps et de quelle
manière ? Il semble plus aisé aujourd'hui de justifier la défense de l'environnement, bien que l'on puisse, au moins
partiellement, recréer des biotopes et des espaces de vie, au contraire des vestiges disparus…
Certes, une législation permet théoriquement de protéger le patrimoine archéologique mais là aussi, la vigilance
s'impose puisque le CoDT qui remplacera le défunt CWATUP pourrait laisser moins de marge de manœuvre encore
à l'administration. Le zonage préparé laborieusement doit aider les archéologues mais ces derniers sont toujours
dans l'attente de modalités pratiques pour qu'il soit efficient.
Bref, il importe de rester motivés et inventifs pour affronter l'avenir, d'autant qu'une réorganisation des institutions
de gestion du patrimoine est en gestation.
Malgré ces inquiétudes, il ne manque pas de motifs de se réjouir ; le site de Spiennes accueille enfin un centre d'inter-
prétation après des années d'attente et de préparation. L'administration a largement participé à la réalisation du Silex's
en apportant sa collaboration à la Ville de Mons, tout en poursuivant la fouille du puits contenant les restes humains.
68

Chronique de l'Archéologie
l’Archéologie wallonne

Site archéologique de « La Taille Marie » à Aiseau-Presles en cours de fouille (© CReA-Patrimoine/ULB).

Des chantiers ont fourni d'autres résultats remarquables comme à Ath, Quévy, Soignies ou Aiseau-Presles. Un
vaste village d'environ 1 ha, daté du Néolithique ancien, constitue les vestiges des premiers habitats de la ville d'Ath.
Un peu plus loin, les archéologues ont dégagé des éléments de fortification datant probablement du premier quart
du 18e siècle.
À Soignies, dans la Grande Carrière Wincqz où le Centre des Métiers de la Pierre verra bientôt le jour, le Service
de l'archéologie a assuré la surveillance des travaux et a eu ainsi l'occasion unique de relever scientifiquement les
vestiges d'une industrie. Trois mois de fouille à Quévy ont permis de cerner une occupation rurale continue du 8e au
20e siècle. À Aiseau-Presles, l'exploration exhaustive du site gallo-romain de « La Taille-Marie » s'est enrichie en 2015
d'un atelier lié au travail du fer, sans doute l'atelier de production des socs d'araire.
Autre découverte liée à l'artisanat à Enghien avec une nouvelle charbonnière qui alimente la recherche sur les
structures à combustion, longtemps restées énigmatiques.
Outre celles d'Ath et de Quévy, plusieurs fouilles ont livré des données relatives à l'habitat, comme à Pont-à-Celles/
Luttre, à Mons ou à Mouscron. Enfin, grâce à des chercheurs passionnés, de nombreux artefacts, essentiellement
préhistoriques et gallo-romains pour cette année 2015, ont été récoltés et surtout étudiés.
Pour compléter l'information, on ajoutera les chiffres de l'archéologie préventive en Hainaut, soit 13  suivis,
5 évaluations et 9 fouilles, avec une superficie totale évaluée de 22 ha sur 14 communes.
Au risque de se répéter, il est inconcevable de conclure autrement que par des félicitations et des remerciements à
tous les acteurs et défenseurs du patrimoine archéologique.
Nous souhaitons aussi une heureuse retraite à notre collègue Alain Joly qui nous accompagne avec une efficacité et
une bonne humeur jamais démenties depuis 1993, au début de l'opération TGV.

Suivis réalisés à :


Aiseau-Presles/Aiseau ;
Ath/Ath : Athénée ;
Ath/Ath : Esplanade ;
Ath/Irchonwelz ;
69

Hainaut

Comines-Warneton/Warneton : cimetière ;
Courcelles/Gouy-les-Piéton : église Saint-Martin ;
Enghien/Petit-Enghien ;
Fleurus/Brye : chaussée Brunehaut ;
Mons/Mons : rue Cronque ;
Mouscron/Mouscron : château ;
Tournai/Tournai : rue des Maux.

Évaluations réalisées à :


Ath/Ath : rue de la Sucrerie ;
Ath/Ah : rue des Haleurs ;
Frameries/Frameries : zoning du Crachet ;
Quévy/Quévy-le-Grand : couvent ;
Saint-Ghislain/Baudour : Douvrain.

Martine Soumoy

Fouille en cours de la grande scierie de l'ancienne Grande Carrière Wincqz à Soignies (photo N. Authom, Serv. archéologie, Dir. ext.
Hainaut 1).
71

Préhistoire Hainaut

PRÉHISTOIRE
Antoing/Maubray : matériel lithique au
lieu-dit « Polissart »

Marianne Delcourt-Vlaeminck
et Christian Fourmeaux

Lors de prospections au lieu-dit «  Polissart  »,


C. Fourmeaux a récolté une dizaine de fragments
de haches, ainsi que deux éclats, attribuables au
Néolithique.
Parmi tous les objets permettant de visualiser une
coupe transversale, on ne trouve qu'un seul fragment
proximal de section lenticulaire, à bords convergents
polis et talon arrondi. Cinq parties mésiales sont à
bords équarris suite à un facettage de ceux-ci allant
parfois jusqu'à un très net aplatissement, comme c'est
le cas de la pièce inv. 17544 mais surtout de l'exem-
plaire inv. 17545 où le méplat atteint une largeur de
7,5  mm. Les quatre autres fragments mésiaux, ne
présentant pas l'amorce d'un bord, ne permettent
pas de savoir si l'outil à l'origine était de section Tableau présentant les fragments de haches polies avec leurs
caractéristiques.
lenticulaire ou à bords équarris. Apparemment, c'est
ce dernier type (hache à bords équarris, aplatis par
polissage) qui prédomine à « Polissart ».

Fragments mésiaux polis (inv. 17544 et 17545). Dessin P. Bastien.


72

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

Brunehaut/Hollain : récoltes 2015 gris, de section triangulaire à étroite nervure dorsale,


négatif d'un enlèvement antérieur. Les bords ébréchés
conservent le reliquat d'une retouche courte abrupte.
Marianne Delcourt-Vlaeminck, Le sixième (inv. 17528), en matériau local, est une
Christian Fourmeaux et Philippe Soleil partie proximale de lame épaisse ayant conservé un
bulbe saillant et quelques retouches ventrales abruptes
De récentes prospections à Hollain entre la Pierre sur le bord droit.
Brunehaut et l'ancienne ligne de chemin de fer, sur un Le groupe des percuteurs comprend trois éléments,
secteur que les chercheurs nomment « Le champ aux dont deux confectionnés sur fragments de haches.
poignards », ont à nouveau livré du matériel en silex. De la première (inv. 17558), relativement épaisse,
Le site a fourni plusieurs fragments de poignards et subsistent deux restes de bords facettés, les flancs ayant
de lames. Trois sont en silex pressignien. Le premier servi à la production d'éclats ; l'objet, en silex gris genre
est un fragment distal de section trapézoïdale apla- Spiennes, porte des traces de percussion à la périphérie,
tie (inv.  17526  ; 1). La pièce, aux bords ébréchés, tout comme le deuxième fragment de hache en forme
se termine par une pointe robuste, acérée, aména- de palet circulaire, en matériau local (inv. 17559). Le
gée par retouches semi-abruptes  ; le silex brun clair troisième élément (inv.  17531) en silex local est de
(code Munsell 10YR  6/3), mal silicifié, est de texture forme globulaire ; nucleus à éclats laminaires au départ,
grenue et révèle à la loupe binoculaire un gel interne il a servi de percuteur.
de type packstone. Le second (inv. 17524) est un frag- Un « percuteur » globuleux (inv. 17532 ; 3) présente
ment mésial sur lame de section triangulaire aux bords des traces d'usure sur son sommet arrondi, raison pour
aménagés par longue retouche abrupte à gauche, semi- laquelle nous l'avons considéré comme molette.
abrupte et plus courte à droite, suggérant une possible Le site a également livré un fragment de nucleus
réutilisation comme couteau/racloir (code Munsell pyramidal en silex local (inv. 17560), dont le sommet
10YR 4/3). Le troisième (inv. 17527) est un fragment conserve une plage corticale mince et quelques néga-
mésial sur lame de section trapézoïdale épaisse, ayant tifs d'enlèvement d'éclats.
subi l'action du feu (code Munsell 2.5YR  3/2)  ; deux Nous avons considéré comme ciseau probable une
négatifs d'éclats d'épannelage sur le pan droit plaident pièce de section lenticulaire (inv. 17530) dont la surface
pour une origine pressignienne. Un quatrième frag- a été fortement endommagée par un feu intense ; ne
ment (inv.  17525) est une partie proximale sur lame subsiste que la partie active au mince fil subrectiligne
robuste de section triangulaire, aux bords ébréchés, abrasé par polissage et aux angles arrondis.
ayant conservé son bulbe de percussion. Le matériau À cet ensemble s'ajoute un bec épais sur grand éclat
assez lisse, ponctué de micro-dépressions rondes et triangulaire en silex régional foncé présentant des
contenant des débris végétaux, pourrait être d'origine retouches abruptes sur les bords (inv. 17561).
tertiaire (code Munsell 10YR  7/3). Un cinquième Comme lors des récoltes précédentes, on remarque
(inv. 17529 ; 2) est une partie mésiale de lame en silex le nombre important de poignards-lames puisque sur

Hollain : 1. Fragment de poignard en Grand-Pressigny (inv. 17526) ; 2. Fragment de lame (inv. 17529) ; 3. Molette en silex (inv. 17532).
Dessins P. Bastien.
73

Préhistoire Hainaut

12 pièces, la moitié appartient à cette catégorie ; la présence révélés particulièrement riches en pièces originaires de
d'outils de qualité importés du Grand-Pressigny et peut- Touraine.
être du Bassin parisien permet de rapporter ces éléments à Au Néolithique, les ateliers pressigniens ont fabri-
la période comprise entre 2800 et 2400 avant notre ère, soit qué deux sortes de lames selon le type de nucleus
au Néolithique final. Les percuteurs sur haches et nucleus utilisé pour leur obtention. Le modèle le plus ancien
confirment l'existence d'un travail artisanal, la molette (nucleus à crête antéro-latérale), attesté vers 3000
évoquant la mouture. Il est certain que cette partie du site, avant notre ère, a fourni de belles lames, moins
en bordure du plateau surplombant la vallée de l'Escaut, longues toutefois que celles réalisées à partir des
n'a été que peu prospectée depuis plus de cent ans, la célèbres « livres de beurre » que l'on situe entre 2800
majeure partie des recherches ayant surtout eu lieu de part et 2400 av. J.-C.
et d'autre de la route Hollain-Bléharies. Quand on ne dispose que de fragments mésiaux, il
n'est guère facile de savoir à quelle phase les rattacher.
Lorsque, par chance, on découvre des parties proxi-
males intactes, il est possible de déterminer le type de
Brunehaut/Laplaigne : preuve de nucleus de départ.
l'exportation de grandes lames Tel est le cas de la pièce récoltée au lieu-dit
pressigniennes «  Baraque  » lors de prospections effectuées par
C.  Fourmeaux et P.  Soleil. Il s'agit d'un fragment
proximal de poignard de section trapézoïdale, ayant
Marianne Delcourt-Vlaeminck, conservé une partie de son talon dièdre piqueté d'ori-
Christian Fourmeaux et Philippe Soleil gine, ce qui permet de le classer dans la catégorie
des longs poignards obtenus à partir d'une « livre de
La présence en Tournaisis de silex du Grand-Pressigny beurre ».
exporté d'Indre-et-Loire (France) au Néolithique est La pièce à l'aspect truité, confectionnée dans un
connue chez nous depuis plus de cent ans et il est certain silex brun orangé (code Munsell 10YR 5/4), présente
que la découverte en Touraine de deux gros dépôts de à sa surface de petits points scintillants (quartz détri-
grandes lames brutes de plus de 30 cm de long aura fait tique). Comme en témoigne la retouche irrégulière
rêver plus d'un prospecteur de notre région. des bords, elle a subi divers réaffûtages qui ont modifié
Ce matériau secondaire de belle qualité, de teinte sa longueur et réduit sa largeur. Dans notre région, ce
le plus souvent « vieux cire », a été exploité à flanc de matériau, sans doute jugé très précieux, a été réamé-
coteaux en Touraine. Une fois mis en forme dans les nagé à outrance, tout comme ce fut le cas des lames
ateliers locaux, il a été diffusé jusque dans le nord des et poignards en silex tertiaire du Bassin parisien,
Pays-Bas et de l'Allemagne sous forme de longues concurrent et contemporain du Grand-Pressigny.
lames et de poignards. Les sites belges et français
du groupe Deûle-Escaut (Néolithique final) se sont

Brunehaut/Lesdain : objet poli en silex

Marianne Delcourt-Vlaeminck et Philippe Soleil

Lors de prospections sur une parcelle à Lesdain (parc.


cad.  : Brunehaut, 5e  Div., Sect.  A, no  340), P.  Soleil a
récolté un objet poli en silex brun clair et brun foncé à
grain fin (Musée d'Archéologie de Tournai, inv. 17543).
Long. : 67,2 mm, larg. : 24,9 mm, ép. : 17,9 mm, larg. au
talon : 12,2 mm. Code Munsell : brun foncé 7.5YR 3/2,
brun gris 7.5YR 6/2.
La pièce est de section ovalaire dissymétrique. Toute
sa surface a été régularisée par abrasion. Les bords
convergent doucement vers la partie proximale  : l'un
rectiligne, l'autre convexe et aplati par polissage sur
Laplaigne : fragment proximal de lame en silex du Grand- une largeur de 4,8 mm au tiers distal. La partie supé-
Pressigny. Dessin P. Bastien. rieure des faces et la portion de bord aplati ont fait l'ob-
74

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

coord. Lambert 2008  : 662894  est/634271  nord). Ce


dernier a fourni la majeure partie du mobilier lithique
issu des secteurs prospectés.
Lors des premières études du matériel lithique
(Desterbecq & Tromme, 2010), nous avons remar-
qué, dans le secteur  12, plusieurs périodes d'occu-
pations préhistoriques. Nous avons ensuite constaté
que le territoire de ces occupations s'étendait un peu
vers le nord-ouest –  secteur  15 (Desterbecq, 2014),
même si la proportion d'objets collectés y était moins
importante. Nous avons également établi un lien
avec les secteurs 1 (zones 1 et 2 à plus forte concen-
tration d'objets) et 8 situés au sud-est du secteur 12.
Lesdain : objet poli en silex.
Nous avons dès lors conclu que le secteur 12 était la
partie centrale d'un territoire fréquenté du Mésoli-
jet d'un « surpolissage » intense conférant à l'objet un thique au Néolithique final dont les secteurs  15 et
éclat brillant et une douceur extrême. Le reste de l'outil 1 représentaient respectivement la périphérie nord
est plus mat, l'abrasion longitudinale moins intense sur et la limite sud. En effet, si le Néolithique moyen
les faces laissant subsister quelques plages légèrement caractérisait principalement l'industrie lithique
rugueuses au tiers proximal. (outils sur lame large de type minier, armature
Le surpolissage a entraîné un amincissement de foliacée et pièces polies), quelques objets relevaient
l'objet en direction de la fracture transversale distale néanmoins du Néolithique récent/final (fragment
montrant que la partie active devait s'y trouver. Au vu de lame en silex pressignien, armature à pédoncule
de l'épaisseur et de l'émoussé de la partie proximale, et ailerons récurrents, armature sur bord de hache
nous pensons qu'il convient de considérer l'outil polie). Nous avons également constaté une occupa-
comme une petite hache dont ne subsiste que le talon tion au Néolithique ancien repérée notamment par
aux angles adoucis par polissage et au fil subrectiligne des nuclei caractéristiques de l'industrie rubanée,
abrasé. c'est-à-dire à plage corticale réservée (en silex de
type Hesbaye). Quelques autres pièces corroboraient
une occupation à cette époque, dont notamment
une armature de flèche asymétrique à base oblique
Fleurus/Saint-Amand : un site préhistorique, retouchée, une armature sur lame et un grattoir sur
synthèse et dernières prospections lame à troncature. Mélangée au fonds d'artefacts
néolithiques, nous avons distingué aussi une indus-
trie se caractérisant par la petite taille de l'outillage,
Daniel Desterbecq par l'utilisation plus importante des troncatures et
par la matière première principale de ces supports,
Synthèse des prospections précédentes à savoir un silex brun et translucide de type Obourg.
Cette industrie d'aspect mésolithique ne fournissait
L'histoire des découvertes en archéologie préhistorique cependant aucun triangle, à l'exception d'une petite
dans l'entité de Fleurus s'est résumée, pendant près d'un armature et d'un seul trapèze. D'autres objets dans
siècle, à des prospections réalisées en 1915 (Debaille, le même silex étaient, par leurs dimensions réduites,
1921). Elles ont mis au jour deux sites préhistoriques : de facture mésolithique (armature atypique à base
l'un à Fleurus (ville) et l'autre à Lambusart, dans la retouchée, micrograttoir pygmée, microdenticulé
même commune. Fort de ces informations, nous avons sur petit éclat, microburin sur lamelle, microperçoir
entrepris, en 1997, des prospections pédestres qui se sur éclat). Nous avons conclu que le Mésolithique
sont étalées jusqu'en 2013. Elles se sont déroulées prin- à Saint-Amand était repérable par son industrie
cipalement à Saint-Amand et à Brye, autres localités microlithique non géométrique et par le choix de sa
fleurusiennes, et nous ont permis de récolter du maté- matière première de base. Son cadre chronocultu-
riel lithique préhistorique. Le village de Saint-Amand rel précis était plus délicat à définir et ne semblait
fut celui où les artefacts recueillis se sont avérés les plus pas correspondre à un stade récent/final. À défaut,
abondants, en particulier un champ de 4 ha, en assez nous l'avons imputé à un stade plus ancien. Enfin,
forte déclivité vers le sud-est, désigné secteur 12 (parc. quelques artefacts furent attribués au Paléolithique,
cad. : Fleurus, 7e Div., Sect. D., nos 2F³, 2H³, 2I³ et 2N³ ; du fait de la présence  d'une forte patine blanche à
75

Préhistoire Hainaut

retouchée (objet 5), toutes deux en silex


de type Spiennes. Un grattoir caréné et
encoché sur lame épaisse (objet 6), dans
le même type de silex, s'inscrit raisonna-
blement dans ce contexte. C'est le second
outil du genre sur le site.
La majorité des nuclei à lames (8 sur
11) sont en silex de type Hesbaye à plage
corticale réservée, ce sont des artefacts
typiques du Rubané. Un beau grattoir
qui a pour support un nucleus résiduel à
lames en silex de type Hesbaye (objet 7)
pourrait, dès lors, être attribuable au
Néolithique ancien. Un nucleus à éclat à
plage corticale réservée (objet 8), dans le
même silex, relève certainement du même
contexte culturel. Remarquons qu'aucun
nucleus à lames en silex de type Spiennes,
excepté un fragment, n'a été retrouvé
Secteurs prospectés du site de Saint-Amand (dessin M. Quercig, FAW).
dans ce secteur.
Quelques pièces paraissent de facture
jaunâtre, lustrée, rarement attestée sur le site. Trois mésolithique : la première est un fragment proximo-
éclats se retrouvaient dans le secteur 1 et un grand mésial de lamelle retouchée en silex de type Spiennes
éclat épais dans le secteur 8. (objet  9), la deuxième est une lamelle fine en silex
Par la suite, durant l'année 2014, nous avons réalisé brun de type Obourg (objet  10), la troisième est un
de nouvelles prospections dans le secteur 12 unique- flanc d'avivage de nucleus à lamelles en silex gris de
ment (Desterbecq, 2015). Il résulte de l'analyse du type Obourg (objet 11) et la quatrième est un micro-
matériel récolté que les traces les plus anciennes grattoir caréné dans le même type de silex (objet 12).
attribuables au Paléolithique supérieur étaient peu Enfin, une lame robuste, assez courte, à très
nombreuses et semblaient concentrées en bas de forte patine blanc-jaune (objet  13), complète les
pente, que les outils relevant du Mésolithique étaient quelques artefacts à patine semblable ramassés en
les plus abondants en ce lieu, par rapport aux autres bas de pente. Ces objets rares pourraient relever du
terres prospectées et, finalement, que les occupa- Paléolithique.
tions néolithiques se succédaient mais étaient mieux
représentées aux périodes moyennes et récentes, peu Commentaire final
d'artefacts étant attribuables à la période finale.
Le nombre d'artefacts recueillis lors de ces prospec-
Nouvelles prospections tions pédestres s'étalant sur une vingtaine d'années,
dans les quatre  secteurs mentionnés, s'élève à 458  :
Durant l'hiver 2015-2016, nous avons entamé une 67 % de ceux-ci proviennent du secteur 12, 21 % du
nouvelle série de prospections dans le secteur  12 secteur 1, 9 % du secteur 15 et 3 % du petit secteur 8.
et en bordure du secteur  15. Les artefacts recueillis Le secteur  12 occupe assurément une position
(87  objets) soutiennent les observations précédentes. centrale dans cet espace de dispersion du matériel
En effet, le Néolithique récent/final se voit confirmé lithique. Plus précisément, la majeure partie du maté-
par la présence d'une armature de flèche à ailerons riel provient d'une zone de quelques dizaines d'ares,
et pédoncule peu dégagés (objet  1). Par contre, deux à mi-pente, à proximité du bosquet du château-
armatures de flèche, l'une tranchante et l'autre amyg- ferme (la moitié ouest des parcelles nos  2H³ et 2I³).
daloïde (objets  2 et 3), relèveraient plutôt du Néoli- Quelques artefacts suggèrent les traces d'un Paléoli-
thique moyen. Jusqu'à cette dernière prospection, on thique indéterminé (parcelle no 2N³) mais elles sont
dénombrait sur le site 11 lames (généralement de type incertaines. Le Mésolithique est repérable par son
minier) et fragments de lame en silex de type Spiennes industrie microlithique non géométrique et le choix
(sur un total de 19), ce qui confirmait une fréquentation de sa matière première. Les objets néolithiques sont
du site au Néolithique moyen. À ce dernier décompte, largement représentés et plus spécifiquement ceux
se sont ajoutées une lame fine (objet  4) et une autre du Néolithique moyen. Ceux relevant du Néolithique
76

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

ancien sont surtout identifiables par les nuclei à Obourg Saint-Macaire. Pas de cortex (L. : 23 ; l. : 20 ;
plage corticale en silex de type Hesbaye, tandis que ép. : 9 mm). Inv. B12/2016/1145.
les traces d'un Néolithique récent/final apparaissent 13. Lame épaisse, esquillée accidentellement. Très forte
plus marginales. patine blanc-jaune, silex indéterminé. Traces de rouille
(L. : 42 ; l. : 17 ; ép. : 10 mm). Inv. B12/2016/1158.
Descriptif des objets cités
Bibliographie
1. Armature de flèche sur éclat fin, ailerons et pédon- ■■ Debaille E., 1921. Les Néolithiques sur les rives de la Sambre,
cule peu dégagés. Retouches directes et abruptes. Silex Documents et Rapports de la Société royale paléontologique
de type Spiennes. Pas de cortex (L. : 29 ; l. : 23 ; ép. : et archéologique de l'Arrondissement judiciaire de Charleroi,
5 mm). Inv. B12/2016/1095. XXXVI, p. 83-92, pl. I-IX.
2. Armature de flèche tranchante sur éclat fin. Courtes ■■ Desterbecq  D., 2014. Les sites préhistoriques de
retouches directes semi-abruptes sur le bord gauche. Saint-Amand et de Brye (Fleurus, Hainaut). Prospections
Silex de type Spiennes. Cortex conservé à ± 25 % (L. : complémentaires et synthèse, Vie archéologique, 73, p. 5-36.
24 ; l. : 18 ; ép. : 5 mm). Inv. B12/2016/1121. ■■ Desterbecq D., 2015. Occupations préhistoriques au lieu-dit
3. Armature de flèche amygdaloïde sur éclat fin. Silex Trois-Fontaines à Saint-Amand (Fleurus, Hainaut), Vie archéo-
patiné. Pas de cortex (L.  : 24  ; l.  : 22  ; ép.  : 4 mm). logique, 74, p. 9-22.
Inv. B15/2016/1127. ■■ Desterbecq D. & Tromme F., 2010. Nouvelles découvertes
4. Lame fine, talon lisse. Silex de type Spiennes. Pas de préhistoriques de surface, Saint-Amand (Fleurus, Hainaut), Vie
cortex (L. : 47 ; l. : 18 ; ép. : 6 mm). Inv. B12/2016/1087. archéologique, 69, p. 33-49.
5. Lame fine retouchée sur le bord droit, talon puncti-
forme. Une encoche par retouche directe suivie d'une
autre par retouche inverse, puis courtes retouches
continues, inverses et semi- abruptes jusqu'à l'extrémité Mons/Spiennes : conservation préventive
distale. Silex de type Spiennes. Pas de cortex (L. : 65 ; l. : des minières néolithiques en 2014
22 ; ép. : 7 mm). Inv. B15/2015/1129.
6. Grattoir simple, caréné, à enlèvements longs sur
support lamellaire épais. Front esquillé. Retouches Nancy Verstraelen
inverses sur bord gauche formant une encoche large.
Silex de type Spiennes. Cortex conservé à moins En 2014, la dynamique climatique des minières de
de 25 % (L. : 73 ; l. : 32 ; ép. : 19 mm). Inv. B12/2015/1081. «  Petit-Spiennes  » se définit toujours par un état dit
7. Grattoir simple sur nucleus résiduel à lames. Front « au repos ». La construction de la structure muséale
convexe sur bord gauche. Retouches continues, directes, et les aménagements du site en vue de son accessibi-
abruptes et subparallèles. Grand enlèvement accidentel lité au public se terminent peu à peu. Le monitoring
sur la face inférieure. Silex de type Hesbaye. Pas de installé va permettre d'évaluer l'impact de ces diffé-
cortex (L. : 79 ; l. : 41 ; ép. : 20 mm). Inv. B12/2011/1072. rents aménagements sur le fonctionnement interne de
8. Nucleus pyramidal à éclats, à débitage unipolaire. la minière et leurs répercussions sur la conservation du
Plage corticale réservée. Silex de type Hesbaye. Cortex bien avant son ouverture.
conservé à ±  50  % (L.  : 41  ; l.  : 55  ; ép.  : 44 mm).
Inv. B12/2016/1137. Données thermo-hygrométriques
9. Fragment proximo-mésial de lamelle retouchée, extérieures
talon lisse. Deux encoches par retouches directes sur
le bord droit et une encoche par retouche inverse sur le Le 1er  avril 2014, un enregistreur est installé sur la
bord gauche. Silex de type Spiennes. Pas de cortex (L. : superstructure muséale, en façade nord, position
28 ; l. : 10 ; ép. : 5 mm). Inv. B12/2016/1090. idéale pour enregistrer les variations du climat
10. Lamelle fine, talon lisse. Extrémité distale esquillée. extérieur. La période étudiée s'étend d'avril à
Silex à grain fin, brun, translucide de type Obourg. Pas octobre de la même année. L'analyse statistique de
de cortex (L. : 33 ; l. : 10 ; ép. : 6 mm). Inv. B12/2016/1092. ces données ne peut être réalisée faute de données
11. Flanc d'avivage de nucleus à lamelles, à débitage suffisantes. Mais en parallèle, les résultats des relevés
bipolaire. Talon lisse. Silex gris, à grain fin de type effectués par l'IRM à la station d'Uccle démontrent
Obourg. Cortex conservé à ± 50 % (L. : 50 ; l. : 15 ; ép. : que la température annuelle est l'une des plus élevées
9 mm). Inv. B12/2016/1110. depuis 1833. La tendance générale s'oriente égale-
12. Micrograttoir caréné, sur éclat épais. Retouches ment vers une augmentation progressive de la tempé-
directes lamellaires. Front esquillé. Silex gris de type rature annuelle moyenne.
77

Préhistoire Hainaut

Les séquences thermo-hygrométriques extérieures climatique extérieure caractérisée par un réchauffe-


sont contrastées en relation avec les variations ther- ment thermique estival et un refroidissement hivernal.
miques diurnes, nocturnes et saisonnières. Néan- Celui-ci demeure néanmoins minime puisqu'il est de
moins, ces fluctuations n'ont que d'infimes impacts sur l'ordre du dixième de degrés.
le microclimat de la minière du « Camp-à-Cayaux » en
étroite relation avec la configuration de la cavité. Pour Le site de « Petit-Spiennes »
le site de «  Petit-Spiennes  », si l'influence des varia-
tions quotidiennes se faisait quelque peu sentir avant Précédemment, le site s'apparentait à « un piège à air
2013, en 2014 la situation a sensiblement évolué avec froid » ou « piège thermique » qui se caractérisait par
la construction de l'espace muséal et le remplacement deux saisons souterraines au comportement dyna-
des bouchons des puits d'accès. L'étanchéisation des mique divergent. Les mouvements d'air liés aux phéno-
ouvertures a largement diminué les échanges avec l'ex- mènes de convection sont lents et ne sont possibles
térieur et permis une certaine stabilisation du climat que lorsque la température extérieure est inférieure à
de la cavité, ce qui n'est malheureusement pas sans celle de la cavité. Depuis 2013, la situation a nettement
répercussions sur la préservation du site. évolué, consécutivement à la construction d'un espace
muséal au-dessus des minières. Si ce dernier va tempo-
Le site du « Camp-à-Cayaux » riser l'impact des fluctuations thermo-hygrométriques
extérieures, ce qui a priori est assez bénéfique, il va
Luc Funcken (DGO1, Direction de la Géotechnique) également avoir d'autres répercussions sur le dyna-
installe une sonde thermique de type Mini Troll à l'in- mique climatique interne. Dès la fermeture physique
térieur des minières le 3 février 2012. Les mesures sont de la superstructure avec les parois en polycarbonate,
enregistrées selon un pas de temps de 120  minutes, les échanges dynamiques avec l'extérieur se modi-
soit 2 heures. Elles sont complètes et la période étudiée fient considérablement et deviennent indirects. Cette
s'étend donc du 1er  janvier au 31  décembre 2014. Le modification va générer une diminution significative
recul dont nous disposons actuellement par rapport du renouvellement de l'air de la minière en relation
aux données relatives à la température interne de avec la température ambiante de l'espace muséal et
la minière permet de mieux comprendre son fonc- ce particulièrement en période estivale. Durant trois
tionnement depuis les interventions menées en quarts de l'année, aucun phénomène de convection
2012 consistant à en étanchéifier l'accès. Au-delà du n'est possible en raison de la température supérieure
gradient thermique positif révélé précédemment et du musée. Ces mouvements ne débutent qu'au début
de sa permanence, on peut observer un léger phéno- de l'hiver et perdurent jusqu'en mars 2015. Durant la
mène annuel cyclique en étroite relation avec l'onde saison chaude, aucune ventilation naturelle n'est physi-
quement possible. Ce faible renouvel-
lement d'air va avoir des conséquences
importantes sur les taux de radon et de
CO2. Pour ce dernier, les normes sont
extrêmement strictes et risquent d'en-
traîner des complications dans le cadre
de l'ouverture au public du site.
Les données annuelles de la température
et de l'humidité relative permettent d'ap-
préhender l'évolution du comportement
dynamique des minières  ; la mise en
parallèle des relevés enregistrés en 2013
par rapport à ceux de 2014 confirme une
importante stabilisation des paramètres
qui s'accompagne d'une augmentation
sensible et graduelle de la température.
La moyenne annuelle en 2014 s'élève à
10,83°  C contre 10,01°  C en 2013 tandis
que le minimum et le maximum ther-
miques sont respectivement de 2,9°  C
Vue de l'espace muséal construit au dessus des minières néolithiques de « Petit- et de 12,1°  C (contre 7,3°  C et 12,1°  C
Spiennes ».
en 2013) pour une étendue de 9,2° C. La
78

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

moyenne annuelle de l'hygrométrie s'élève à 97,76  %


pour un minimum de 80 % et un maximum de 98,5 %.
Les pics positifs enregistrés sur le graphe annuel sont en
relation directe avec l'ouverture de la trappe, la présence
de visiteurs à l'intérieur de la cavité et/ou la manipula-
tion de l'appareil de mesure. Pendant la saison estivale,
l'impact des ouvertures et des différentes visites est peu
perceptible, par contre en saison froide, on note systéma-
tiquement une diminution de la température. Le temps
de retour à la normale est relativement rapide. Les pics
négatifs observés dans le courant des mois de novembre
et de décembre doivent être mis en relation avec les tests
relatifs aux mesures des concentrations en radon. À Détail de la zone archéologique destinée à être visible à l'in-
térieur du musée.
cette occasion, le puits d'accès demeure ouvert d'abord
ponctuellement une partie de la journée puis en continu
jusqu'à la fin du test. Les températures basses extérieures Le nombre restreint de données ne permet pas une
s'infiltrent alors par convection à l'intérieur de la analyse statistique, néanmoins plusieurs constations
minière. Ces dernières sont insuffisantes et susceptibles intéressantes peuvent d'ores et déjà être présentées.
de générer des dommages complémentaires au site. Les Le climat de l'espace muséal est fortement influencé
minima enregistrés à cette occasion (2,9° C) sont dange- par le climat extérieur en raison notamment des maté-
reusement bas non seulement en raison du risque de gel riaux utilisés pour édifier le bâtiment (polycarbonate
de l'eau contenue dans la craie mais également en raison pour les parois extérieures, métal, béton…) ainsi que par
des taux hygrométriques insuffisants. Les variations sa configuration générale. On observe une grande insta-
du contenu en eau de l'atmosphère sont néfastes pour bilité des paramètres thermo-hygrométriques particu-
les parois déjà fortement fragilisées. Le substrat loca- lièrement en période estivale. Les écarts quotidiens sont
lement fissuré subit des contraintes et des tensions de systématiquement supérieurs à 1°  C et régulièrement
nature à perturber la stabilité et la cohésion des parois. proches et supérieurs à 7°-8° C. Toutefois, la structure
La moyenne annuelle des écarts thermiques quotidiens muséale atténue légèrement les variations extérieures et
est de 0,12° C avec un minimum de 0° C et un maximum un amortissement général est constaté. Les minima et les
de 1,9° C. Si les valeurs enregistrées au niveau de l'humi- maxima quotidiens subissent un phénomène identique.
dité relative doivent être considérées avec prudence en On constate dès la mi-août un déphasage par rapport à
raison du type d'appareil de mesure, les données ther- l'onde thermique externe. Les températures de l'espace
miques peuvent être jugées fiables. Les écarts quotidiens muséal sont alors relativement proches des maxima
sont globalement inférieurs aux consignes maximales diurnes tandis que le soir, la température emmagasinée
formulées pour la préservation des biens patrimoniaux, en journée s'élimine difficilement.
excepté en décembre. En parallèle, les résultats annuels La température ambiante demeure généralement
calculés pour l'enregistreur positionné au fond de la supérieure aux conditions climatiques externes tandis
cavité révèlent une inertie thermo-hygrométrique supé- que les conditions d'ensoleillement génèrent de
rieure, une étendue thermique annuelle inférieure tandis brusques modifications et ce en relation avec le faible
que la moyenne annuelle des températures et les minima pouvoir isolant des parois. Si, en hiver, elles contri-
sont plus élévés. buent à conserver des températures positives et donc à
limiter les risques de gel de l'espace muséal, il apparaît
L'espace archéologique qu'en été cet aménagement exacerbe les températures
et diminue ponctuellement l'humidité ambiante. D'une
Une zone de fouille est mise en évidence dans la zone manière générale, on constate que l'hygrométrie est
centrale de l'espace muséal. On peut y observer un supérieure aux valeurs enregistrées à l'extérieur. Cet
atelier de taille et la partie sommitale d'un ancien puits apport complémentaire d'eau provient du sous-sol,
comblé ainsi qu'un fossé ancien creusé sous Louis XIV humide et en contact direct avec la nappe phréatique
et ensuite remblayé. Durant les travaux, cette zone est sous-jacente. L'eau remonte par capillarité et s'évapore
entièrement bâchée et les couvertures ne seront enle- à l'intérieur de l'espace muséal. Si cette ambiance semble
vées que préalablement à l'ouverture du site au public a priori favorable à la préservation des dépôts archéolo-
en avril 2015. En mai 2014, on installe alors deux giques et sédimentaires, il apparaît qu'en relation avec
appareils de mesure supplémentaires, l'un dans l'es- une température élevée et un apport de rayonnements
pace muséal et l'autre dans le sas d'accès de la minière. solaires important dans le domaine du spectre visible
79

Préhistoire Hainaut

des développements biologiques sont à craindre. tion significative des taux en été tandis qu'en hiver une
En journée, la température ambiante du sas est baisse sensible des concentrations est enregistrée grâce
généralement supérieure à celle de l'espace muséal en à la réactivation de la ventilation naturelle. Les mesures
raison des contingences spécifiques de cette structure ponctuelles effectuées au niveau du CO2 dans le courant
destinée à indiquer au loin son emplacement. En effet, de l'année 2014 sont en hausse. Il est dès lors conseillé
l'excroissance architecturale réalisée en polycarbonate d'acquérir un enregistreur pour mesurer en continu les
génère un échauffement thermique en relation avec concentrations afin de s'assurer qu'elles restent sous les
son insolation directe. Peu isolante, et particulière- limites sanitaires définies par les organismes compétents.
ment bien exposée dans un environnement ouvert et
dégagé, la fine paroi transparente accentue donc les Conclusion
effets thermiques solaires. Dès que le soleil se lève,
la température augmente rapidement tandis qu'en La construction de l'infrastructure muséale au droit des
soirée, un phénomène inverse est constaté. L'intensité minières contribue fortement à en modifier le fonction-
du phénomène est supérieure à celui mis en évidence nement. Au-delà des avantages qu'elle présente comme
dans l'espace muséal caractérisé par son inertie supé- la limitation des infiltrations pluviales notamment,
rieure rendue possible par ses dimensions. En effet, un elle réduit le renouvellement de l'air de la minière, la
volume d'air restreint se réchauffe et se refroidit plus ventilation naturelle n'étant possible que lorsque la
rapidement qu'un plus grand volume. Ces premiers température de l'espace muséal est inférieure à celle de
résultats confirment que les conditions d'ambiance la minière. Ce phénomène va avoir des répercussions
ne sont pas appropriées à la préservation de dépôts directes sur les concentrations en radon et en CO2 qui
archéologiques et sédimentaires. Les températures risquent de nécessiter des mesures complémentaires
élevées en association avec une hygrométrie insuffi- comme un renouvellement forcé de l'atmosphère. Il
sante vont générer d'importants phénomènes d'évapo- apparaît néanmoins que la ventilation de la minière, si
ration de l'eau contenue dans les dépôts. Ces derniers elle s'avère nécessaire, doit se faire dans des conditions
vont rapidement s'assécher, se fissurer en entraînant strictes définies par les différents spécialistes. L'air de
une accumulation de sels néfastes en surface qui vont l'espace muséal ne peut en aucun cas être insufflé tel
générer à leur tour des dégradations complémentaires quel. Un traitement préalable doit lui être appliqué afin
comme des amas de cristaux, un voile blanchâtre et de le débarrasser dans un premier temps des impure-
un effritement des couches. De plus, l'ensoleillement tés (spores, pollens, moisissures…) et dans un second
direct de certaines portions du sol va accentuer l'assè- temps, d'atteindre les valeurs thermo-hygrométriques
chement, tandis qu'en parallèle l'apport de lumière va similaires à celles enregistrées en sous-sol.
générer des développements biologiques importants et
problématiques non seulement pour leur nettoyage et/
ou leur éradication mais aussi en raison des dégâts qui
peuvent être causés par les réseaux racinaires. Mons/Spiennes : fouille 2015 du puits
d'extraction de silex ST 6 à « Petit-
Radon et CO2
Spiennes »
De 2011 à 2014, plusieurs campagnes de mesure sont
menées pour assurer la surveillance des concentrations Hélène Collet, Philippe Lavachery,
en radon. Une modification des taux s'observe entre Stéphane Pirson, Michel Toussaint, Lyse Unger
2013 et 2014 que ce soit pour les mesures effectuées au et Michel Woodbury
fond ou pour celles effectuées à l'entrée de la minière.
Les concentrations sont multipliées par un facteur de 4 Introduction
à 5. Cette modification correspond non pas au rempla-
cement des bouchons des différents puits mais bien Le puits ST  6 (parc. cad.  : Mons, 19e  Div., Sect.  B.,
à la pose et à la fermeture de la structure muséale. Il no  393c  ; coord. Lambert  : 122504,5440  est/
semble qu'avant cette intervention, les phénomènes de 123288,7462 nord) appartient à un ensemble de puits
convection aient été suffisants pour maintenir des taux fouillés dans la zone minière de «  Petit-Spiennes  »
inférieurs à 3  000  Bq/m³. Le radon s'évacuait par les depuis 1997 grâce à des subventions accordées
interstices laissés autour des différents puits. La mise par le Service public de Wallonie, d'abord à l'asbl
sous cloche des minières a limité les phénomènes de Recherches et Prospections archéologiques, puis à
convection aux périodes froides soit entre novembre l'asbl Société de Recherche préhistorique en Hainaut.
et février-mars. On observe également une augmenta- Ces recherches se sont déroulées sans interruption
80

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

jusqu'en août 2004 (Collet, 2003 ; Collet & Woodbury,


2000), date à laquelle l'intervention archéologique a
été interrompue. Les fouilles du puits ST 6 ont repris
en 2014 sous la direction de Philippe Lavachery pour
la Société de Recherche préhistorique en Hainaut et
d'Hélène Collet et Michel Woodbury pour le Service de
l'archéologie de la Direction extérieure du Hainaut 1
(DGO4 / Département du patrimoine). Elles se sont
déroulées d'avril à décembre 2014 (Lavachery et
al., 2015). Une nouvelle campagne de fouille a été
réalisée de mai à novembre 2015 par les deux mêmes
organismes. Elle a bénéficié pour ce faire du concours
Ossements humains trouvés en connexion dans le puits ST 6.
de Maxime Beltran, Marie Bucik, Arthur Chandelle,
Sophie  Duchêne, Marie  Gillard, Thimothée  Libois
et Marine  Michel, étudiants en archéologie issus a pu quant à elle être observée en direction du sud et de
des universités de Louvain, Gand, Namur, Liège et l'ouest. Les murs de l'exploitation sont situés respective-
Bruxelles. De septembre à novembre, la fouille a pu ment à 4,2 m et 3,6 m de distance. La fouille des remblais
compter sur le renfort de Carolina Cabrero, étudiante crayeux a livré, comme en 2014, uniquement des outils
à l'université d'Oviedo (Espagne) dans le cadre du miniers en silex. Il s'agit de pics de taille bifaciale.
programme ERASMUS+. Les fouilles sont amenées à Cinquante pics et fragments ont été dénombrés.
se poursuivre en 2016. Durant cette campagne, l'empreinte qui avait été
observée en 2014 a été fouillée. Cette investigation a
La campagne de 2014 renforcé son interprétation comme négatif d'un bois
disparu. Sa localisation à la base du puits d'accès
Au cours des fouilles menées en 2014 (Lavachery et al., permet d'émettre l'hypothèse qu'il puisse s'agir d'un
2015), la totalité du puits d'extraction ST 6 avait pu être dispositif lié à la descente et à la remontée des mineurs.
investiguée entre 4,4 m et 7,2 m de profondeur. À 6 m Les recherches se sont concentrées sur le dégagement
de profondeur et jusqu'à la base du puits d'accès, située des ossements humains. Au terme de cette campagne,
à 7 m, la morphologie initiale de celui-ci est devenue ce sont 180 os et fragments osseux qui ont été recueil-
apparente, montrant une structure cylindrique de 1 m lis. Ils sont localisés de manière préférentielle dans
de diamètre. À partir de 7 m de profondeur, l'évasement le quart sud-ouest de l'exploitation et sont dissémi-
de la structure laissait pressentir le développement du nés entre 5,4  m et 7,4  m de profondeur. Quelques
niveau d'exploitation du silex. Les fouilles de 2014 n'ont os en connexion ont été découverts. Il s'agit de trois
permis ni de rencontrer le radier de la minière, ni de vertèbres lombaires en connexion avec le sacrum ainsi
déterminer la surface de l'exploitation. Le sondage que d'un fragment d'os coxal. Quelques os éloignés de
mené jusqu'à 8,4 m de profondeur dans un secteur du cette concentration ont également été découverts dans
puits n'a pas atteint le sol en place. Le mur de l'exploi- le quart nord-ouest entre 7,2 m et 7,9 m de profondeur.
tation a été touché dans une seule direction, au nord, à Comme cela avait été noté précédemment, l'absence
3,4 m de distance par rapport au centre du puits. Cette de doublon et la présence de nombreux éléments de
campagne a été marquée par la découverte d'ossements main et de pied laissent présumer qu'il s'agit d'un
humains dans la cheminée du puits d'accès et dans des corps complet introduit dans le puits au cours de
sédiments limoneux surmontant les niveaux d'exploita- son comblement. Le mode d'introduction (rejet d'un
tion. L'examen des restes humains a été pris en charge cadavre, sépulture effondrée ou accident) reste encore
dès la phase de terrain par un anthropologue afin de à préciser. Comme en 2014, les observations relatives
réaliser le maximum d'observations in situ. Une trace aux ossements humains ont été effectuées in situ par
longiligne longue de 1,2  m et de 10  cm de diamètre un anthropologue. Les recherches ont aussi bénéfi-
présente dans le comblement de la base de la cheminée cié d'un suivi stratigraphique régulier de la part d'un
a été identifiée lors de la fouille. géologue de la Direction de l'archéologie.

Les fouilles de 2015 Perspectives

Les fouilles menées en 2015 n'ont pas encore permis d'at- La Ville de Mons, propriétaire du terrain, a autorisé la
teindre le radier de la minière malgré un sondage prati- poursuite des recherches en 2016, et nous l'en remer-
qué jusqu'à 9 m de profondeur. Son extension maximale cions. Celles-ci se concentreront, en priorité, sur le
81

Préhistoire Hainaut

dégagement des dépôts livrant des ossements humains. forme biconvexe trapézoïdale, ainsi qu'une section
Des sondages destinés à cerner l'extension dans les ovalaire et un talon étroit, se terminant en pointe.
trois dimensions de la minière ST  6 sont également Les bords présentent un méplat. L'outil présente une
programmés. parfaite symétrie bifaciale et bilatérale. Le polissage
de la hache a fait l'objet de beaucoup d'attention et
Bibliographie de soin. L'aspect de ce dernier est doux au toucher,
■■ Collet H., 2003. Mons/Spiennes  : fouille dans la parcelle il devait concerner pratiquement toute la surface de
393c de « Petit-Spiennes », Chronique de l'Archéologie wallonne, l'outil. Seules quelques petites plages inférieures à
11, p. 39-40. 1 cm² n'ont pas été polies. Les facettes de polissage
■■ Collet H. & Woodbury M., 2000. Mons/Spiennes : fouille mesurent 10  mm de large dans la partie mésiale et
de puits d'extraction de silex à Petit-Spiennes, Chronique de s'amincissent vers le talon. La fracture en partie
l'Archéologie wallonne, 8, p. 30-31. mésiale est typique d'un accident dû à l'utilisation
■■ Lavachery P., Collet H., Toussaint M. & Woodbury M., de l'outil. L'onde de choc dégagée par le coup qui a
2015. Mons/Spiennes : fouille du puits d'extraction ST  6 à brisé la hache est visible au travers de l'ondulation
«  Petit-Spiennes  », Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, et des négatifs d'éclats présents en zone mésiale. Un
p. 88-90. enlèvement burinant au niveau du talon est peut-
être également lié à l'utilisation. Le coup à l'origine
de l'éclat a été donné sur la pointe du talon et l'éclat
a suivi le méplat gauche, jusqu'à rebrousser à 80 mm
■■Quévy/Genly : découverte d'un fragment de distance. Il n'est pas impossible qu'il soit une
de hache polie en silex de Spiennes conséquence de la technique d'emmanchement de
la hache. Complète, la pièce devait probablement
atteindre les 200-230  mm de long et présenter une
Philippe Lavachery, Hélène Collet, forme triangulaire (bords rectilignes, base étroite
Amandyne Rosart et Lodewijk De Lens voire pointue associé à une plus grande largeur au
tranchant), une morphologie typique de la produc-
Au cours de l'hiver 2004, l'un de nous (L.  De  L.) tion des minières de Spiennes.
a découvert un important fragment de hache Cette trouvaille est loin d'être isolée dans la
polie en silex au lieu-dit «  Champs des Plognes  », région. En effet, depuis des décennies, d'autres
bordant la rue Léonce  Spinette à Genly, à 11  km haches en silex ont été ramassées en surface dans les
au sud de Mons et à 7  km au sud-est de Spiennes environs des minières de Spiennes où elles étaient
(localisation approximative  : parc. cad.  : Quévy, produites en masse au Néolithique moyen, récent
1re  Div., Sect.  A, no  231b  ; coord. Lambert  1972  : et final, entre 4350 et 2200  av. J.-C. (Collet, 2012).
117626 est/118570 nord). La pièce a été trouvée en Ainsi des haches polies, complètes ou fragmen-
surface, lors d'une inspection pédestre, quelques taires, partiellement ou entièrement polies, sont
semaines après avoir drainé le champ sur 1  m de signalées à Hautrage (Dufrasnes, 2006b  ; 2006c), à
profondeur. Il n'est pas possible de préciser si elle a Sirault (Dufrasnes, 2009), à Villerot (Dufrasnes,
été remontée lors du drainage ou non, mais l'objet 2011), au Rœulx (Collet, Doumont & Rosart, 2014a),
présente des traces de rouille typiques de contacts à Obourg (Collet, Doumont & Rosart, 2014c), à
répétés avec les engins agricoles qui suggèrent un Harchies (Parent, 1999), à Pommerœul (Dufrasnes
long séjour proche de la surface. La pièce est conser- 1995 ; 2006a). Des haches taillées abandonnées avant
vée dans la collection de l'inventeur. d'être polies ont été découvertes à Gottignies (Collet,
Bien que la hache offre un aspect patiné, on peut Doumont & Rosart, 2014b), à Frameries (De Braeke-
observer qu'elle a été façonnée dans un silex mat, leer & Van Assche, 2001) et à Hautrage (Dufrasnes
moyennement grenu,  passant du gris clair en partie & Ballez, 2007). D'autres pièces sont connues mais
mésiale à un gris un peu plus foncé près du talon n'ont pas encore fait l'objet de publications. La
(pouvant correspondre à la transition entre le cœur plupart de ces haches, dont la matière première est
du silex gris clair et la zone sous-corticale plus foncée souvent décrite comme un silex de type Spiennes,
dans le silex de Spiennes). Il s'agit probablement d'un illustrent probablement la diffusion des productions
silex de type Spiennes. des minières dans les environs immédiats mais on
Le fragment découvert  consiste en les deux tiers sait qu'elles ont été exportées beaucoup plus loin
basal d'une hache polie. La pièce mesure 155 mm de encore (Bostyn & Collet, 2011).
longueur, 55  mm de largeur et 34  mm d'épaisseur,
pour un poids de 303  g. Le fragment possède une
82

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

Quévy-le-Petit : fragment de hache polie.

Bibliographie ■■ Collet H., Doumont P. & Rosart A., 2014c. Mons/Mons :


■■ Bostyn F. & Collet H., 2011. Diffusion du silex de Spiennes découverte d'une hache polie de grandes dimensions en silex à
et du silex bartonien du bassin parisien dans le nord de la France Obourg, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, p. 66.
et en Belgique de la fin du 5e millénaire au début du 4e millé- ■■ De Braekeleer R. & Van Assche M., 2001. Frameries/
naire BC : une première approche. In : Bostyn F., Martial E. Frameries et Mons/Mons  : deux haches taillées, Chronique de
& Praud  I. (dir.), Le Néolithique du nord de la France dans l'Archéologie wallonne, 9, p. 34-35.
son contexte européen. Habitat et économie aux 4e et 3e millé- ■■ Dufrasnes J., 1995. Bernissart/Pommerœul  : hache polie,
naires avant notre ère. Actes du 29e Colloque interrégional sur le Chronique de l'Archéologie wallonne, 3, p. 18.
Néolithique. Villeneuve-d'Ascq, 2-3 octobre 2009, Amiens (Revue
■■ Dufrasnes J., 2006a. Bernissart/Pommerœul  : fragment de
archéologique de Picardie, no spécial, 28), p. 331-347.
hache polie en silex, Chronique de l'Archéologie wallonne, 13, p. 42.
■■ Collet H., 2012. La production des haches à Spiennes : un
■■ Dufrasnes J., 2006b. Saint-Ghislain/Hautrage : ciseau en silex
état de la question. In : de Labriffe P.-A. & Thirault É. (dir.),
partiellement poli, Chronique de l'Archéologie wallonne, 13, p. 50.
Produire des haches au Néolithique. De la matière première à
l'abandon. Actes de la table ronde de Saint-Germain-en-Laye, 16 ■■ Dufrasnes J., 2006c. Saint-Ghislain/Hautrage : hache polie,
et 17 mars 2007. Musée d'Archéologie nationale, Paris (Séances Chronique de l'Archéologie wallonne, 13, p. 50.
de la Société préhistorique française, 1), p. 137-146. ■■ Dufrasnes J., 2009. Saint-Ghislain/Sirault  : talon de hache
■■ Collet H., Doumont P. & Rosart A., 2014 . Le Roeulx/Le
a polie en silex au lieu-dit « Les Bruyères », Chronique de l'Archéo-
Roeulx : découverte d'une hache polie en silex de Spiennes au logie wallonne, 16, p. 36.
lieu-dit « Bois de la Noire Haine », Chronique de l'Archéologie ■■ Dufrasnes J., 2011. Saint-Ghislain/Villerot : hachette en
wallonne, 21, p. 64. silex, Chronique de l'Archéologie wallonne, 18, p. 52.
■■ Collet H., Doumont P. & Rosart A., 2014b. Le Roeulx/Le ■■ Dufrasnes J. & Ballez O., 2007. Saint-Ghislain/Hautrage :
Roeulx : découverte d'une hache taillée en silex de Spiennes à hache en silex, Chronique de l'Archéologie wallonne, 14, p. 48-49.
Gottignies, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, p. 65-66. ■■ Parent S., 1999. Bernissart  : fragment de hache polie à
Harchies, Chronique de l'Archéologie wallonne, 7, p. 24.
83

Protohistoire Hainaut

PROTOHISTOIRE
Mons/Saint-Symphorien : signalement d'une
pointe de flèche (Bronze final)

Alain Guillaume

Le site internet de l'agence flamande consacrée au patri-


moine immobilier (Agentschap Onroerend Erfgoed)
permet à tout un chacun de signaler une découverte
archéologique. C'est par ce biais que M. K. Welvaarts
a déclaré la trouvaille d'un artefact métallique ayant
eu lieu le 30  octobre 2015 dans un champ situé à
Saint-Symphorien (parc. cad. : Mons, 14e Div., Sect. B,
no 490t2 ; coord. Lambert 72 : 125009 est/124865 nord).
Les photos disponibles indiquent qu'il s'agit d'une
armature de trait en alliage cuivreux. Elle a visiblement
été découpée dans de la tôle assez épaisse et se caracté-
rise par la présence d'une languette destinée à la fixa-
tion sur la hampe (haut. : 37 mm ; larg. : 22 mm ; poids :
2,83  g). Plusieurs autres exemplaires sont connus en
Belgique, notamment à Rochefort/Han-sur-Lesse « Le
Trou de Han » (7 pièces) et sur les travaux de l'Escaut
à Audenarde/Melden (1  pièce), à Termonde/Schoo-
naarde (1 pièce) et à Wichelen/ Schellebelle (4 pièces).
En l'absence de précisions sur les circonstances de la
découverte, il est difficile de proposer une attribution
chrono-culturelle pour la pièce de Saint-Symphorien
mais le type est répandu au Bronze final (Warmenbol,
1995, p. 44-46 et pl. IV ; 2005, p. 125 et 131, fig. 4).

Remerciements
Pointe de flèche du Bronze final découverte à Saint-Symphorien
Nos remerciements vont tout particulièrement (photo K. Welvaarts).
à K.  Welvaarts, à I.  Jansen, à W.  Leclercq et à
E. Warmenbol.

Bibliographie
■■ Warmenbol  E., 1995. L'arc bandé et le lit de la Lesse. Les
pointes de flèche en bronze de Han-sur-Lesse, Amphora, 77,
p. 32-64.
■■ Warmenbol E., 2005. Instruments de la mort. Les pointes de
flèche du Bronze final de la grotte de Han (Namur, Belgique).
In : Mordant C. & Depierre G. (dir.), Les pratiques funéraires
à l'âge du Bronze en France. Actes de la Table ronde de Sens-
en-Bourgogne (Yonne), 10-12  juin 1998, Paris (Documents
préhistoriques, 19), p. 119-139.
84

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

ÉPOQUE ROMAINE
Ath/Ghislenghien : datation
archéomagnétique de deux fours à chaux

Souad Ech-Chakrouni, Jozef Hus


et Véronique Danese

La découverte d'un four à chaux lors de fouilles archéo-


logiques n'est pas exceptionnelle. En effet, la chaux
était utilisée en Europe comme matériau de construc-
tion (ciment ou mortier) dès l'époque romaine et Projection à égale surface des directions individuelles de l'ai-
mantation stable de tous les spécimens analysés.
comme un fertilisant des sols depuis le Moyen Âge. Les
fours à chaux peuvent être construits avec des blocs de
calcaire, de l'argile ou du limon, des briques et même Les fours de Ghislenghien, conservés de manière
avec des blocs de basalte dans les régions volcaniques. inégale, étaient aménagés dans le substrat limono-
Les fours à chaux sont souvent difficiles à dater pour argileux. La chambre de chauffe, de forme tronconique,
cause d'absence d'artefacts en relation directe avec la était surmontée d'un laboratoire de forme cylindrique.
production de la chaux. La distinction entre ces deux espaces était matérialisée
En 2014, l'asbl Recherches et Prospections archéolo- par une banquette qui rayonnait autour du four, depuis
giques (RPA) a été mandatée par le Service de l'archéo- le sommet de l'alandier, et dont la largeur était irrégu-
logie de la Direction extérieure du Hainaut 1 (DGO4 / lière. La chambre de chauffe possédait, en son centre,
Département du patrimoine) afin de mener des fouilles un fond ovale et plat dans le cas du four F 666 et en
préventives dans un terrain agricole à l'ouest du croi- déclivité vers le sud pour le four F 678. Dans les deux
sement du chemin de Skippes et de la chaussée de cas, ces cendriers contenaient une importante couche
Bruxelles. Des vestiges romains sont essentiellement loca- de charbon de bois témoignant de la dernière four-
lisés dans le quart nord-ouest de la zone des fouilles. Ils née. Les fours étaient alimentés en combustible via un
comportent une trentaine de fosses, trois fours à chaux et alandier situé dans l'axe de la chambre de chauffe. Le
deux tombes tibéro-augustéennes (Danese et al., 2015). laboratoire du four F 678 présentait un état de conser-
Deux des trois fours à chaux, F  666 (code archéo- vation remarquable, les parois atteignant une hauteur
magnétique GHIA02) et F  678 (code archéomagné- de 1,40 m. Le limon encaissant constitue les parois du
tique GHIA03), distants seulement d'une dizaine de four, sans ajout d'un parement de moellons  ; il a été
mètres, ont fait l'objet de prélèvements par la section altéré par les fortes températures atteintes lors des cuis-
Magnétisme environnemental du Centre de Physique sons. Les parois présentaient un degré de combustion
du Globe de Dourbes (Institut royal météorologique) qui variait d'une rubéfaction meuble de teinte rouge
en vue d'obtenir une datation archéomagnétique. Le (ép. : 0,10 m à 0,50 m) à des zones indurées orangées
troisième four isolé à 20 m vers l'est et construit hors- (ép. : 0 à 0,14 m) et pouvant atteindre bien souvent un
sol n'a pas été échantillonné. aspect vitrifié de teinte bleutée semblable à de la pierre
(ép. : parfois jusqu'à 0,10 m).
Des blocs de terre cuite ont été enrobés de plâtre et
orientés avec précision sur le terrain par rapport au
plan horizontal local et par rapport au nord géogra-
phique, puis découpés en laboratoire en cubes de 4 cm
de côté, appelés spécimens ci-après, tout en gardant la
direction repère.
La direction du champ magnétique ambiant enregis-
trée au cours du dernier refroidissement des fours par
des oxydes de fer contenus dans ces terres cuites, sous
forme d'une aimantation rémanente, a été mesurée
pour chaque spécimen (64  spécimens pour GHIA02
et 55 pour GHIA03) dans un magnétomètre cryo-
Le four F 678.
génique 2G à trois axes. L'aimantation rémanente
85

Époque romaine Hainaut

Après élimination des directions


individuelles aberrantes, la direction
moyenne de l'aimantation caractéris-
tique stable ChRM des terres cuites des
échantillons a été obtenue pour chaque
four en appliquant la statistique de
Fisher (Fisher, Lewis & Embleton, 1987).
Direction moyenne de l'aimantation rémanente caractéristique ChRM et inter-
L'écart angulaire entre les directions
valles d'âges possibles à 95 % de confiance des fours. N/n : nombre d'échantil- individuelles et la direction moyenne de
lons/nombre de spécimens ; Dm : déclinaison moyenne en degrés ; Im : inclinaison l'aimantation caractéristique des terres
moyenne en degrés ; K : facteur de concentration ; α95 : rayon du cercle de confiance cuites des échantillons est inférieur à 8°
centré sur la direction moyenne calculée en degrés. pour GHIA02 et 10° pour GHIA03. Le
facteur de concentration K qui est une
caractéristique (ChRM) stable de tous les spécimens, mesure de la dispersion des directions individuelles
qui est une thermorémanence, a été déterminée après autour de la direction moyenne est de 618 pour
désaimantation par étapes en appliquant successive- GHIA02 et de 945 pour GHIA03. L'angle de confiance
ment des champs alternatifs de 15, 20 et 25 mT. α95 qui exprime la fiabilité de la direction moyenne à
La projection à égale surface des directions indivi- un niveau de probabilité de 95 % est petit pour les deux
duelles de l'aimantation stable des spécimens analysés fours  ; ceci signifie que les directions individuelles
montre que, malgré une dispersion de quelques direc- de l'aimantation sont groupées dans un cône à demi-
tions des échantillons de GHIA02 (5  aberrantes), un ouverture respectivement de 1° pour GHIA02 et 0,9°
regroupement des directions individuelles de l'aiman- pour GHIA03.
tation stable caractéristique est visible. Pour GHIA03, Deux intervalles d'âges possibles ont été obtenus pour
il y a un regroupement net des directions individuelles chacune des deux structures à un niveau de probabilité
de tous les spécimens.

Courbes de l'inclinaison et de la déclinaison pour les trois Courbes de l'inclinaison et de la déclinaison pour les trois
derniers millénaires en France (marge d'erreur en gras) derniers millénaires en France (marge d'erreur en gras)
et datation archéomagnétique du four F 666. Densité de et datation archéomagnétique du four F 678. Densité de
probabilité des âges possibles sur base de l'inclinaison I et probabilité des âges possibles sur base de l'inclinaison I et
de la déclinaison D séparément et combinées. de la déclinaison D séparément et combinées.
86

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

de 95 %, en se référant aux courbes de référence de la C'est durant la phase d'abandon que l'objet subit le plus
variation séculaire de la direction du champ géomagné- de transformations qui vont profondément modifier
tique dans le passé en France, réduites à un seul endroit ses propriétés en fonction du milieu et non du temps
central, Paris (Gallet, Genevey & Le Goff, 2002). passé. Ces phénomènes sont chimiques mais aussi
Les valeurs de l'inclinaison moyenne (62,25° et mécaniques et modifient la cohésion du matériau. La
62,19°) et celles de la déclinaison moyenne (-0,96° phase culturelle se caractérise par l'épreuve de l'exhu-
et -1,96°) obtenues respectivement pour les fours mation, l'objet devant passer à un milieu atmosphé-
GHIA02 et GHIA03, relocalisées à Paris avec les rique auquel il devra s'acclimater, mais aussi par des
erreurs (lignes horizontales pointillées), sont compa- phases de traitements qui lui feront également subir
rées avec la courbe de référence. Les distributions de la des transformations. Ces phases critiques doivent être
densité de probabilité des âges possibles sont données gérées et accompagnées dès la découverte (Païn, 2015,
pour l'inclinaison et la déclinaison séparément et p. 20-23). L'état de dégradation, les niveaux d'altération
combinées. Les rectangles représentent les intervalles inégaux, la compréhension et parfois l'identification de
d'âges possibles à 95 % de confiance. l'objet, sa finalité, étude ou exposition, sont autant de
problématiques spécifiques à la matière. Même si de
Conclusion grands principes et méthodes peuvent se dégager selon
la nature de l'objet et la période traitée, nous sommes
Les intervalles d'âges possibles obtenus pour les confrontés au côté aléatoire de l'état de conservation
deux fours à chaux GHIA02 et GHIA03 indiquent et jamais à l'abri de bonnes mais surtout de mauvaises
que la dernière cuisson date de l'époque romaine. La surprises. Ce fut malheureusement le cas pour les
similitude des directions des rémanences enregistrées tombes de Ghislenghien III.
dans les fours et les dates archéomagnétiques obtenues Cette fouille réalisée en 2014 sur la future zone
suggèrent que les deux structures examinées étaient d'activité économique (Danese & Hanut, 2014 ; 2015)
probablement contemporaines. a mis au jour deux tombes comprenant un nombre
important d'objets en fer, en alliage de cuivre et de la
Bibliographie céramique. Vu la qualité des tombes et leur caractère
■■ Fisher  N.I, Lewis  T. & Embleton B.J.J., 1987. Statistical exceptionnel, il a été décidé de traiter ce matériel en
analysis of spherical data, Cambridge, Cambridge University priorité au sein du Service public de Wallonie, cela
Press. afin de limiter autant que possible les dégradations
■■ Gallet Y., Genevey A. & Le Goff M., 2002. Three millennia inévitables survenant après la mise au jour des objets
of directional variations of the Earth's magnetic field in west- et entraînant par conséquent du travail supplémen-
ern Europe as revealed by archaeological artifacts, Physics of the taire, comme ce fut malheureusement le cas pour
Earth and Planetary Interiors, 131, p. 81-89. d'autres anciens dossiers complexes. Vu la quantité
■■ Danese V., Authom N., Deforce K., Hanut F. & Pigière F., de travail, le traitement des pièces n'a pu se faire au
2015. Ath/Ghislenghien : les vestiges romains mis au jour lors sein même du SPW et a dû faire l'objet d'un marché
des évaluations de 2013 et 2014 dans l'extension est de Ghislen- de service pour «  étude, dessin et manipulation des
ghien III, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 106-110.
alliages de cuivre  », attribué à l'asbl Recherches et
Prospections archéologiques (RPA) et exécuté par
une archéologue-restauratrice. Malgré la mise en
œuvre rapide de toutes les démarches administra-
Ath/Ghislenghien : la problématique de
tives, un inévitable délai d'un an a été nécessaire entre
la conservation-restauration du matériel la fouille et le début de la restauration.
archéologique métallique. Le cas des
alliages de cuivre de deux tombes augusto- L'évaluation et le travail
tibériennes
En présence d'objets en alliage de cuivre d'époque
romaine, on peut s'attendre raisonnablement à du
Muriel Van Buylaere matériel de bonne qualité, relativement bien conservé
et stable. C'est le cas d'objets similaires contemporains
En archéologie, l'approche de la conservation- trouvés notamment en Angleterre et dans le nord-ouest
restauration des biens se pose différemment que dans de la Gaule. Dès la fouille, les objets ont montré leur
les collections muséales. Le mobilier archéologique fragilité. Ils ont nécessité la mise en œuvre de précau-
connaît plusieurs phases au cours de sa vie  : «  phase tions particulières sur chantier, comme le prélèvement
utile  », «  phase d'abandon  » et «  phase culturelle  ». en motte systématique avec renfort de bande plâtrée,
87

Époque romaine Hainaut

Principaux objets de la tombe 1 (F650) après restauration. De gauche à droite : patère, œnochoé, bol à filtre, passoire et puisard,
marmite avec couvercle (photo R. Gilles, Dir. archéologie).

ou encore la réalisation de contenants spécifiques. produit en présence d'agents extérieurs, entre autres
Les prélèvements en motte demandent une interven- l'oxygène, l'eau ou des bactéries. C'est pour ralentir,
tion rapide en laboratoire pour éviter leur éclatement voire stopper cette dégradation que des mesures de
au cours du séchage, endommageant les objets. Au conservation préventive doivent être prises pour assu-
moment de l'évaluation du travail, les prélèvements ne rer le maintien de l'objet dans un milieu stable.
présentent qu'un dégagement partiel des objets accom- La maladie du bronze, forme particulière de corro-
pagnés de quelques remarques sur leur état notées sur sion active des alliages de cuivre archéologiques
chantier par les archéologues. Dans ces conditions, le qui peut mener à la disparition de l'objet, a aussi été
diagnostic ne peut être que très superficiel, fondé sur détectée sur l'œnochoé et sur la patère associée. Cette
les quelques éléments apparents, et l'estimation se fait forme de corrosion s'est manifestée surtout sur le
sur base de suppositions et des expériences antérieures, revers de ces objets qui présente un aspect de surface
constituant une prise de risque pour le restaurateur pustuleux. Elle demande des traitements spécifiques,
indépendant. avec notamment l'immersion des pièces dans de
Au fur et à mesure de l'avancement du travail, nous longs bains de déchloruration. À cause de la fragilité
avons constaté un très mauvais état de conservation du matériel due à tous les problèmes évoqués précé-
de tous les objets. En plus d'être très fragmentés, ils demment, le degré de nettoyage initialement demandé
présentaient toutes les étapes de la minéralisation du a été revu avec la réalisation d'un avenant au marché
métal, du cœur métallique à la disparition complète de service initial, et c'est finalement une intervention
de certaines zones. La marmite de la tombe 1 (F650) complète qui a été effectuée : nettoyage approfondi,
les réunissait toutes. Rappelons ici la définition de la remise en place de tous les fragments pour éviter les
corrosion métallique  : la corrosion est l'ensemble des pertes et compléter les profils, doublage et comblement
processus physico-chimiques qui s'établissent entre le pour consolider et stabiliser l'objet, indispensable
métal et le milieu à partir de la surface du métal et qui pour assurer la pérennité de ce matériel. Des conte-
provoque le retour du métal à un état minéral, proche nants adaptés ont été directement réalisés au Centre
de celui du minerai, plus stable. La corrosion est un de Conservation et d'Étude (CCE) du SPW à Saint-
phénomène spontané et irréversible (Bertolon & Relier, Servais selon les normes en vigueur et en collaboration
1990, p.  171). Cet état de retour à l'état minéral se avec le personnel du CCE. Une attention particulière a
88

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

également été portée sur le prélèvement en zones des esquilles osseuses ont été découverts concentrés sous
sédiments, dans le but de mener une campagne d'ana- le couvercle, autant dans le remplissage que sur le fond
lyse et d'identification. de la marmite. Un noyau a également été retrouvé dans
le creux de la carène.
Le matériel La passoire et le puisard (cola), très fins, minéra-
lisés à cœur et imbriqués l'un dans l'autre, n'ont pu
La tombe  1 (F650) renfermait le plus grand nombre être dissociés. Ils présentaient des cassures multiples
d'objets en alliage de cuivre. aux manches. Des racines se sont insinuées dans les
L'œnochoé est la pièce la mieux conservé, elle perforations du filtre de la passoire et dans le puisard,
comporte quelques pertes sur sa panse. Découverte découpant le fond en de multiples petits fragments
couchée, la face non lessivée présente une très belle devant être consolidés et fixés en place. Les perfora-
patine. L'anse est détachée, mais parfaitement reposi- tions du filtre de la passoire forment un décor. Le bord
tionnable grâce aux négatifs de soudure sur la panse et de la passoire a partiellement disparu et les sédiments
à l'ajustement parfait du col et de l'attache de l'anse. Le ont été conservés entre les deux bords restants, faisant
tout conserve encore un cœur métallique. ainsi office de renfort.
La patère ou bassin à manche (trulleum), qui présente La tombe contenait également deux paires de fibules
une très belle patine, a révélé un décor gravé au centre «  à queue de paon  » ayant perdu l'extrémité de leurs
de la face interne, très bien préservé malgré l'attaque pieds. Minéralisées à cœur, sans plus aucune cohésion,
de surface constatée au revers. Le manche et sa termi- elles n'ont pu être dégagées que grâce à une consolida-
naison en tête de bélier très fragiles sont minéralisés tion intensive et la conservation en place des matières
à cœur avec des risques de pertes de surface. La tête organiques présentes entre les paires de fibules, faisant
comporte encore une matière brune très dure, peut- aussi office de soutien. Elles restent malheureusement
être le reste du noyau de la fonte (Pernot, 1998). extrêmement fines et fragiles, difficilement manipu-
Le bol à filtre (Stainer bowl) présente un filtre décoré, lables.
déchiré et déformé. Sous le couvercle ont été décou- La tombe  1 comportait encore un anneau, deux
verts deux éléments triangulaires en plomb acco- petits boutons, un micro-fragment non identifié, laissé
lés à la paroi au ras du bord. Ce sont sans doute les en motte vu sa grande détérioration, et un élément de
supports du couvercle. Le filtre et le couvercle ont dû charnière.
être redressés et en partie comblés. Le bec verseur en La tombe 2 (F673) a livré trois fibules à ressort et un
forme de tête de canidé est très fragile et présente des disque en alliage cuivreux associé aux ossements inci-
perforations dues à la corrosion. Sur le bol, des traces nérés du défunt, le tout prélevé en motte. En accord
de cuprite accompagnées de pellicules argentées et de avec l'archéologue et l'anthropologue, le dégagement
résidus poussiéreux noirs rappellent des produits de des os a été effectué par la restauratrice, privilégiant
corrosion de l'étain. les objets plutôt que les ossements. Cependant, une
La marmite et son couvercle furent les éléments les attention très particulière a été portée sur le prélève-
plus complexes techniquement. En plus de leur grande ment des fragments osseux. Un relevé spatial et photo-
inégalité de conservation, les deux éléments étaient très graphique couche par couche a été effectué. Le disque
fragmentaires et déformés. Le couvercle se présentait plat de plus ou moins 10  cm de diamètre pourrait
en trois parties de conservation inégale avec des micro- être un miroir sans manche. Une bordure décorative
fragments. Un doublage complet et des comblements est présente sur une face. L'autre face, sans bordure,
ont été nécessaires pour pouvoir le reconstituer. Il était présente une patine bleu-noir. Des ossements étaient
muni d'un anneau de préhension en fer. Le dégagement accolés au disque avec pour conséquence la migration
fin a montré des restes fibreux de part et d'autre de cet des oxydes de cuivre sur les os. Il a été difficile dès lors
anneau. La marmite est écrasée sur un côté, rendant de séparer les éléments, avec comme conséquence la
l'accès à la surface interne difficile, et les nombreuses perte de micro-fragments sur le bord du disque.
cassures et perforations ont nécessité un doublage de
toute la face interne. Le fond de la marmite et le revers Conclusion
du couvercle présentaient une couche exceptionnelle-
ment épaisse d'oxydes de cuivre de ±  5  mm se déli- Dans l'ensemble, le travail fut long et minutieux
tant en plaques et révélant une surface partiellement mais scientifiquement concluant. Le rendu esthé-
patinée. Ce phénomène pose question quant à son tique est malheureusement décevant de par l'état de
origine. Provient-il des conditions d'enfouissement  ? conservation des objets. Tout au long du processus de
D'une utilisation particulière  ? D'un contenu spécial restauration, un dialogue permanent entretenu entre
lors de l'inhumation  ? Des fragments de clous et des la restauratrice, les archéologues et les membres du
89

Époque romaine Hainaut

CCE a permis de répondre à nombre de questions de ■■ Pernot M., 1998. Archéométallurgie de la transformation
part et d'autre, faisant de ce dossier une expérience des alliages à base de cuivre. In  : L'innovation technique au
très enrichissante pour chacun. L'expérience d'ar- Moyen Âge. Actes du VIe  Congrès international d'archéologie
chéologue associée à celle de la restauration présente médiévale (1-5 octobre 1996, Dijon – Mont Beuvray – Chenôve –
Le Creusot – Montbard), Caen (Actes des congrès de la Société
tout son intérêt car elle implique une compréhension
d'archéologie médiévale, 6), p. 123-133.
des besoins de chacun avec un langage commun.
Une restauratrice extérieure au SPW à participé aux
fouilles, conseillant les archéologues et aidant à la mise
en place de mesures préventives. Malheureusement,
elle n'a pas suivi les objets tout au long du processus Enghien/Petit-Enghien : une structure à
menant à leur restauration complète, ce qui lui aurait combustion du type « charbonnière »
permis une vision globale au gré des différentes phases.
Une intervention rapide est la clé d'un résultat opti-
mal. Même si dans le cadre de cette fouille, tous les Nicolas Authom
moyens ont été mis en œuvre rapidement, le délai d'un
an a tout de même causé des dommages. Ce problème La création d'une station de biométhanisation a été
est aujourd'hui activement pris en compte et le traite- l'occasion d'une surveillance archéologique aux abords
ment prioritaire des tombes de Ghislenghien en est la de la ferme du château de Warelles (parc. cad. : Enghien,
première application. 3e  Div., Sect.  C, nos  109c et 100a  ; coord. Lambert  :
L'enjeu dans le futur sera la conservation préventive 128386  est/151910  nord), seigneurie implantée au
de ces objets car même restaurés, il restera toujours 18e  siècle sur le territoire de Petit-Enghien (R.  Noir
des principes actifs au cœur de la matière tant qu'elle Mouchon, 1997). De nombreux sites, prospectés et/
n'est pas complètement minéralisée. En cas d'absence ou fouillés préalablement aux travaux de la LGV et
de conditions stables la corrosion reprendra que ce mentionnés à l'inventaire du patrimoine archéolo-
soit pour les objets en alliages ou encore plus s'il s'agit gique, ont également motivé cette intervention.
d'objets ferreux. Une surface de plus de 1 000 m2 a été décapée : hormis
Beaucoup de questions restent encore en suspens, un remblai moderne condamnant une dépression
comme les compositions chimiques, l'origine de la naturelle, a été mise au jour, à 0,60  m sous la surface
couche d'oxydes de la marmite… Nous espérons que les actuelle, une fosse à rejet cendreux. Partiellement hors
analyses prévues pourront y répondre. Des recherches emprise, elle est de plan rectangulaire (2,36 m × 0,90 m
peuvent également être entamées quant aux raisons de à 0,96  m) et conservée sur une profondeur de 0,08  m
la détérioration particulière des objets de ce site, tant à 0,26 m. Le fond est plat et recouvert d'une charge de
sur les alliages cuivreux, le fer ou encore la céramique. charbon de bois dont l'épaisseur est irrégulière (0,03 m
à 0,15 m). Celle-ci est surmontée de manière inégale par
Bibliographie un mélange de limon lessivé gris clair, de limon brun-
■■ Bertolon R. & Relier C., 1990. Les métaux archéologiques. jaune et de quelques éléments de terre rubéfiée. L'action
In : Berducou M.-C. (coord.), La conservation en archéologie : du feu n'a pratiquement pas marqué le sol encaissant, à
méthodes et pratique de la conservation-restauration des vestiges l'exception d'un court tronçon (0,60  cm) le long de la
archéologiques, Paris, p. 164-221. paroi sud (épaisseur de rubéfaction max. : 2 cm) et une
■■ Danese V. & Hanut F., 2014. Ath/Ghislenghien  : deux petite zone irrégulière dans la moitié nord. Aucun arte-
sépultures privilégiées d'époque augusto-tibérienne au cœur fact n'a été trouvé dans le remplissage supérieur, ni dans
du territoire nervien, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, la couche de charbon de bois dont une grande partie a
p. 110-116. été prélevée en vue d'analyses ultérieures.
■■ Danese V. & Hanut F., 2015. Découverte de deux sépultures Les recherches sur ce type de structures, il y a peu
privilégiées d'époque augusto-tibérienne au cœur du territoire encore énigmatiques (Bosquet & Livingstone  Smith,
nervien (Ath/Ghislenghien), Bulletin du Cercle royal d'Histoire
1995 ; Remy & Soumoy, 1996, p. 56) ou parfois abusi-
et d'Archéologie d'Ath et de la Région, 13, 238, p. 109-127.
vement interprétées comme funéraires, ont évolué ces
■■ Païn S., 2015. Manuel de gestion du mobilier archéologique. dernières années. Les fouilles menées entre autres à
Méthodologie et pratiques, Paris (Documents d'archéologie
Ghislenghien (Danese, 2014 ; 2015), Emblem (Deforce,
française, 109).
Marinova & Dalle, 2015, p. 75-79) ou Zoersel (Deforce
et al., 2013) ont permis d'observer de nombreuses
structures aux caractéristiques semblables, interprétées
comme des charbonnières. Le plan de ces dernières
évolue depuis une forme rectangulaire lors de la période
90

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

La charbonnière et son comblement avant fouille.

romaine et le Haut Moyen Âge à une forme circulaire Bibliographie


par la suite, schéma classique des aires de faulde. Elles ■■ Bosquet D. & Livingstone Smith A., 1995. Enghien/
se caractérisent par l'absence de tout matériel archéolo- Petit-Enghien  : structures énigmatiques dans un contexte
gique et de restes osseux. À Ghislenghien, cent structures d'occupation romaine le long de la rue Neuve, Chronique de
de combustion dévolues à la production de charbon de l'Archéologie wallonne, 3, p. 42-43.
bois suggèrent vraisemblablement une production à ■■ Danese V., 2014. Ath/Ghislenghien et Lessines/Ollignies.
grande échelle durant le Haut-Empire. Un «  champ  » de fosses romaines, Chronique de l'Archéologie
Dans l'exemple isolé de Petit-Enghien, les analyses wallonne, 22, p. 101-103.
anthracologiques permettront des comparaisons avec ■■ Danese V., 2015. Des fosses de charbonniers romaines dans
les autres sites de production quant aux combustibles la zone d'activité économique d'Ath/Ghislenghien IV, Signa, 4,
utilisés et une datation 14C offrira peut-être une four- p. 47-51.
chette chronologique intéressante pour associer, ou ■■ Deforce  K., Boeren  I., Adriaenssens  S., Bastiaens  J.,
pas, cette découverte aux vestiges étudiés non loin, De Keersmaeker L., Haneca K., Tys D. & Vandekerkhove K.,
rue Neuve à Petit-Enghien, lors des opérations TGV 2013. Selective woodland exploitation for charcoal production.
A detailed analysis of charcoal kiln remains (ca. 1300-1900 AD)
(Bosquet & Livingstone  Smith, 1995, p.  43). Deux
from Zoersel (northern Belgium), Journal of Archaeological
échantillons issus d'une structure (ustrinum  ?) y ont
Science, 40, p. 681-689.
bénéficié à l'époque d'une datation 14C dont le résul-
■■ Deforce K., Marinova E. & Dalle S., 2015. Vijf Romeinse
tat retenu est 170 av. J.-C. à 60 apr. J.-C. L'absence de
houtskoolbranderskuilen in Emblem (Ranst, prov. Antwerpen),
matériel archéologique et la proximité de nécropoles Signa, 4, p. 75-79.
(Frébutte, 1995  ; Frébutte & Hanut, 2014, p.  94-95  ;
■■ Frébutte C., 1995. Enghien/Petit-Enghien : nécropole gallo-
Moisin, 1953) avaient embarrassé les auteurs pour romaine, Chronique de l'Archéologie wallonne, 3, p. 41-42
interpréter ces foyers. Les similitudes entre la dizaine de
■■ Frébutte C. & Hanut F., 2014. La nécropole d'Enghien/
ces structures énigmatiques et celle trouvée à proximité
Petit-Enghien (province de Hainaut). In  : Hanut  F. &
de la ferme du château de Warelles sont incontestables, Henrotay  D. (dir.), «  Du bûcher à la tombe  ». Les nécropoles
et nous espérons que les prochaines études sur les char- gallo-romaines à incinération en Wallonie, Namur, p. 94-97.
bons confirmeront ces analogies et le rapprochement ■■ Moisin P., 1953. Nécropole romaine à Petit-Enghien, Archéo-
entre les deux sites. Un nouveau centre de production logie. Chronique, 2, p. 445-446 (= L'Antiquité classique, 22).
charbonnière pourrait se dessiner, au sein d'une région
densément occupée au Haut-Empire (habitat, nécro-
pole, four de potier, voie de communication).
91

Époque romaine Hainaut

■■ R. Noir Mouchon, 1997. R.  Noir Mouchon, nos  14-15. La surveillance couvrait un tracé de voirie de
Château de Warelles. In : Province de Hainaut. Arrondissement 2  200  m de long, depuis la ferme Chassart jusqu'au
de Soignies, Liège (Le Patrimoine monumental de la Belgique, lieu-dit « Phillipebourg » ; les sondages étaient implan-
231), p. 352-356. tés à mi-chemin entre l'agglomération de Liberchies
■■ Remy H. & Soumoy M., 1996. Chronologie des occupations (à 8,5  km au sud-ouest) et la bourgade de Baudecet/
et bilan archéologique. In : Remy H. & Soumoy M. (dir.), Sur la Sauvenière (à 13 km au nord-est). La voirie, depuis la
voie de l'histoire. Archéologie et TGV, Namur (Études et Docu- ferme Chassart jusqu'au croisement avec la rue Sart
ments, Fouilles, 2), p. 53-56.
Maletto, est conservée sous la forme d'un chemin
de terre carrossable  ; au-delà, et jusqu'au croisement
avec la RN93, toute trace de chemin a disparu sous les
terres agricoles. Enfin, après la nationale, le chemin
Fleurus/Brye et Villers-la-Ville/Marbais : n'est plus carrossable mais son tracé est matérialisé
analyse stratigraphique de la chaussée par un talus de végétation marquant la limite parcel-
romaine Bavay-Cologne laire  où subsistent, çà et là, quelques vestiges d'une
voirie moderne comme des panneaux de circulation et
du bitume.
Nicolas Authom et Olivier Collette Deux sondages perpendiculaires à la chaussée ont
particulièrement retenu l'attention  : le premier  (S1)
La voie antique Bavay-Cologne (sur le sujet, entre pour le bon état de conservation des niveaux anciens
autres : Bailleux & Graff, 1993 ; Brulet, 2008, p. 55-80 ; du chemin et la pédogénèse des sols sur lesquels la voie
Corbiau, 1997 ; 2014, p. 4-10 ; Corbiau & Bausier, 2015 ; a été implantée, le second  (S2) pour sa stratigraphie
Deramaix, 2006 ; De Waele & Soumoy-Goffart, 1988, tout à fait différente alors qu'il n'est éloigné que de
p. 114-121 ; Jurion-de Waha, 1984, p. 60-64) marque la 500 m du premier sondage.
frontière des territoires de Brye et de Marbais (Villers-
la-Ville, Brabant wallon). À cet endroit, la pose d'une Sondage S1
conduite d'eau commanditée par la Société wallonne
des Eaux a permis au Service de l'archéologie de la Le sondage est long de 10  m pour une profondeur
Direction extérieure du Hainaut  1 (DGO4  / Dépar- moyenne de 2,20  m sous la surface actuelle, avec un
tement du patrimoine) d'assurer une surveillance des approfondissement ponctuel jusqu'à 3  m au niveau
travaux et de bénéficier du creusement de sondages, de l'ancienne canalisation. Aucune information perti-
réalisés par la société TEGEC, en vue de retrouver une nente n'a pu être dégagée en plan, le sondage, effectué
ancienne conduite d'eau déjà présente sous le chemin en paliers, n'excédant pas plus de 1 m de large. Le profil
actuel. L'opération et certains sondages destinés présente une interruption côté nord (0,80 m de large)
uniquement au volet archéologique étaient intégrés au causée par la pose de l'ancienne conduite d'eau.
cahier des charges de l'entreprise, offrant une collabo- Le sol encaissant est un limon argileux jaune à glosses
ration aisée entre les différents intervenants. de décoloration et fentes de retrait (a) surmonté d'un
niveau brun limoneux (Bdark) (b) ; ces horizons d'élu-
viation ont été recouverts d'un fin dépôt de ruisselle-
ment silteux. Sur celui-ci, un épais remblai limoneux

Localisation du tracé de chaussée étudié sur la carte IGN,


avec implantation des sondages  S1 et S2 (infographie Vue d'ensemble du sondage S1 avec à l'avant-plan, la coupe
C. Tesch, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1). et à l'arrière, la végétation qui recouvre la chaussée.
92

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

Coupe de la chaussée au niveau du sondage S1 (infographie C. Tesch, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).

homogène à fins constituants (c) semble avoir été un niveau de circulation cohérent. Une succession de
artificiellement apposé  ; son profil rectiligne et plat recharges (ép. : ± 30 cm) ont été apportées au-dessus
suggère une mise à niveau de la surface du sol. Les de ce niveau, composées de limons sableux mêlés à des
dimensions restreintes du sondage ne permettent pas cailloux, des galets et rythmées par de fines couches de
d'identifier ce remblai comme une phase préparatoire sables oxydés (j). Enfin, est apposé un dernier niveau
à l'installation de l'assiette de la voirie. Aucune couche dont la composition est proche des autres recharges
humifère n'a été observée ni de bioturbations typiques mais l'aspect plus hétérogène ne présente pas une
d'un horizon de surface ; le contact très irrégulier avec organisation stratifiée et la charge en galets et pierres
la couche inférieure peut résulter d'un arrachage de est bien moins importante  (k). S'y retrouvent encore
surface. Au-dessus de ce remblai se trouve un limon
homogène, gris clair, marqué d'un réseau de fines frac-
tures horizontales, soulignées d'oxydes de fer, et reliées
entre elles par d'autres fractures perpendiculaires (d).
Ce limon lessivé et remanié pourrait avoir été appor-
té par ruissellement durant un laps de temps assez
long, vu son épaisseur (jusqu'à 0,60 m). Après dépôt,
cette couche a subi des compressions nombreuses et
répétées (traces de circulation  ?) qui ont provoqué
l'apparition d'une structure «  feuilletée  ». L'étude de
ces deux strates a fait l'objet d'observations en lames
minces.
Un radier de pierres forme l'assise de la voirie  ; il
s'agit d'un mélange de grès, de calcaires, de phyllades
et quartzophyllades, de tailles et formes irrégulières,
liés entre eux par une argile brunâtre  (e). Au-dessus,
sont appliquées deux couches successives de sable
limoneux : un sable gris, dense, recouvrant les pierres
(f), surmonté d'un sable jaune, à la texture plus hété-
rogène  (g). L'épaisseur de la couche de sable jaune,
plus importante au nord, tend à s'affiner vers le sud où
elle vient buter contre une grosse pierre  (h). Celle-ci
marque l'extrémité de l'aménagement et est interprétée
comme une bordure destinée à maintenir le radier et le
sable. Couvrant cette assise, une couche compacte de
cailloux schisteux et schisto-phylladeux est mélangée
à un limon cohérent non carbonaté (i). Des gisements
de ce type de schiste sont connus à Villers-la-Ville. La
bordure est recouverte par cette strate dont la surface Détail de la bordure et des différentes charges formant la
voirie.
plane et légèrement bombée semble correspondre à
93

Époque romaine Hainaut

quelques liserés de sables oxydés.


À l'exception d'un léger débordement, cette succes-
sion de couches suit l'alignement initial dicté par la
bordure au sud. Côté nord, au-delà de la tranchée
pour la canalisation, la stratigraphie est complètement
chamboulée et ne s'observe qu'une masse compacte
où toutes les composantes des différents niveaux sont
mélangées (l).
Plus haut, une longue couche irrégulière (L. : 5,90 m),
relativement plane, interrompue en son centre, se
compose d'une terre brun foncé, à base caillouteuse,
avec des fragments de briques et de chaux  (m). La
partie sud de cette strate est désaxée par rapport à
Le fossé de traçage axial.
l'alignement et repose au sein d'un amas de limons
comportant des inclusions  (briques). Enfin, la partie
supérieure de la coupe est dominée par l'humus  (n) repose sur une couche d'argile brune dure et compacte
où gisent des alignements de briques, des poches de qui épouse le profil du sol encaissant. Cette charge cail-
bitume et des recharges de cailloux. louteuse ne correspond pas à un niveau de circulation
Aucun fossé adjacent à la voirie n'a été observé, soit mais semble avoir stabilisé le creusement pour recevoir
se trouvant hors emprise soit étant absent. Notons l'assise de la voie. Sous cette strate, deux enfoncements,
toutefois, à l'extrémité sud du profil, deux enfonce- espacés de 0,80 m, sont creusés dans le limon en place.
ments (l. : 10 cm ; prof. : ± 20 cm), en forme de cuvette, Si le premier, observé côté nord, est peu marqué (prof.
observés dans le sédiment limoneux gris clair  (o et au centre : 12 cm) avec un profil en U assimilable à une
p). Ils marquent une interruption du réseau de litages ornière, le second est beaucoup plus profond (30 cm au
brun argileux et se caractérisent par une oxydation centre par rapport au niveau de galets) avec un profil
importante. Vu leur espacement, large de  0,60  m, il en V. Il est pratiquement situé au centre de l'axe de la
pourrait s'agir d'ornières, leur profil et leur dimension voirie et correspond vraisemblablement au sillon de
rejetant toute interprétation comme fossé. traçage axial (Brulet, 2008, p. 68-69), particularité déjà
observée sous la chaussée à Villers-Perwin (De Waele
Sondage S2 & Soumoy-Goffart, 1988, p. 119). Ce fossé est comblé
par une pierre et un limon gris très compact avec
Ce sondage est localisé à quelques mètres au sud-ouest quelques liserés d'oxydation.
du croisement entre la chaussée romaine et la rue Sart Le reste de la coupe offre une séquence de six couches
Maletto. L'actuel chemin agricole a été coupé transver- de remblais limoneux et limono-argileux superposés
salement sur 6,40 m de long, jusqu'à une profondeur qui ont petit à petit colmaté la dépression naturelle et
de  2,20  m. Dans ce cas-ci, aucun aménagement fait remonter le chemin à la surface actuelle. Certains
construit n'est conservé, le profil révèle une large de ces niveaux sont chargés en fragments de briques,
cuvette avec des parois obliques et un fond relative- d'autres affectés par des réseaux de fractures dues
ment plat sur  3  m de long. Un fin dallage de galets à la compression  ; enfin les couches supérieures  (à
partir de 80  cm de profondeur et jusqu'à la surface)
comprennent des poches de bitume.
L'encaissement du chemin à cet endroit peut s'expli-
quer par sa position culminante. Un creusement initial
probablement anthropique devait faciliter le fran-
chissement du « col ». Par la suite, l'encaissement du
chemin a été facilité par le passage des convois et les
ruissellements.

Chronologie et conclusion

Aucun mobilier n'a pu être mis en relation avec les


différentes unités stratigraphiques observées, à l'excep-
Vue d'ensemble du sondage S2 avec à l'avant, la charge de tion des couches supérieures où la présence d'éléments
galets.
modernes, comme les briques et le bitume, identifie
94

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

clairement l'époque de construction. ■■ Corbiau  M.-H.,  2014. Les voies romaines à travers nos
Toutefois, certains indices issus des sondages régions. In  : Coquelet  C.  (dir.), L'archéologie en Wallonie.
témoignent d'aménagements déjà observés, lors de L'époque romaine. Voies de communication, établissements
fouilles plus anciennes, sur d'autres tronçons de la ruraux et agglomérations, Namur (Carnets du Patrimoine, 113),
chaussée ; tronçons qui, eux, sont avérés antiques par p. 4-10.
le matériel archéologique qui y est associé. C'est le cas ■■ Corbiau  M.-H. & Bausier  K.,  2015. Les voies de commu-
du fossé de traçage axial, repéré dans le sondage  S2. nications en pays nervien. In  : Bausier  K. & Beirnaert-
Mary  V.  (dir.), Rome en pays nervien. Retour sur notre passé
Tout porte à croire qu'il est le prolongement du fossé
antique, Ath – Bavay, p. 88-96.
no 35, fouillé à Villers-Perwin, dont l'analyse stratigra-
phique a confirmé un comblement antérieur au règne ■■ Deramaix  I.,  2006. Binche, Waudrez. Chaussée romaine,
constructions riveraines et nécropole. Rapport de fouilles menées
de Domitien. Si les remblais supérieurs ne peuvent être
lors d'aménagements modernes, Namur (Études et Documents,
attribués chronologiquement, le fossé de traçage laisse Archéologie, 11).
peu de doute quant à son caractère antique. Il est le
■■ De Waele É. & Soumoy-Goffart M., 1988. Villers-Perwin :
préalable à la construction de la voirie, axe figé dans le
la chaussée romaine Bavay-Cologne. In  : Activités  86 à 87 du
paysage à l'époque augustéenne. S.O.S. Fouilles, 5, p. 114-121.
Dans le cas du sondage S1, la mise en œuvre de la
■■ Jurion-de Waha  F.,  1984. Coupe dans la chaussée Bavai-
voirie correspond au modèle antique : une bordure, un Cologne à Gouy-lez-Piéton. In  : Activités  81 à 83 du S.O.S.
radier de pierre, les charges de sable et galets et un revê- Fouilles, 3, p. 60-64.
tement supérieur (Anderson et al., 2003, p. 175-184) ;
bien sûr, les composantes utilisées sont adaptées, selon
la région, aux matières premières disponibles.
L'information récoltée quant aux dimensions de la
chaussée est, elle, tronquée et ne peut être comparée Hensies/Hensies : habitat du Haut-Empire
avec d'autres sites étudiés. Dans le cas du sondage S1, à « La Neuville », estampille sur sigillée
des travaux modernes ont détruit une partie des infor- non répertoriée et petit matériel divers
mations et, dans le sondage S2, les vestiges construits
ont été érodés par les passages et les éléments naturels,
avant de laisser la place à un chemin creux, petit à petit Jean Dufrasnes et Éric Leblois
remblayé.
Les futures analyses menées sur les sédiments sous- En 1986, des prospections menées par l'un des auteurs
jacents à la chaussée révèleront l'environnement préa- (J.D.) permirent de repérer les vestiges d'une construc-
lable à la pose de la chaussée et la présence ou pas tion d'époque romaine au lieu-dit «  La Neuville  »
d'activés humaines antérieures sur ce plateau. (parc. cad. : Hensies, 1re Div., Sect. A, nos 204c et 206g).
Enfin, il est intéressant de signaler que pour ces Connu depuis le milieu du 19e siècle, ce site figure sur
deux sondages, le tracé actuel (soit toujours visible, différentes cartes archéologiques (Van Bastelaer, 1880 ;
soit matérialisé par la végétation) n'a pratiquement pas de Loë & de Munck, 1890).
dévié de son axe au cours des siècles, si ce n'est un élar- Outre quelques petits objets métalliques et un sigle
gissement ponctuel  (m) rapidement abandonné sous sur sigillée, trois fragments de meules tournantes en
un remblai et les terres de culture. «  arkose  » de Macquenoise furent aussi découverts
lors de ces recherches (De  Braekeleer, Dufrasnes &
Bibliographie Houbion, 1989, p. 160-163, pl. VI-VIII, photos 12-13.
■■ Anderson T.J., Agustoni C., Duvauchelle A., Serneels V. Détermination du matériau par Paul  Picavet). Un
& Castella D., 2003. Des artisans à la campagne. Carrière de sesterce fruste valut au site d'être enregistré au Cabinet
meules, forge et voie gallo-romaines à Châbles  (FR), Fribourg des Médailles de Bruxelles sous le numéro 7381001.
(Archéologie fribourgeoise, 19).
■■ Bailleux G. & Graff Y., 1993. Trente ans de fouilles à Liber- Alliage cuivreux
chies, Romana Contact, sans no.
■■ Brulet R. (dir.), 2008. Les Romains en Wallonie, Bruxelles. – Tête d'une fibule à ressort protégé (5). Le raccord
■■ Corbiau  M.-H.,  1997. La chaussée romaine Bavay- de l'arc à l'étui, courbe, et les cannelures la rattachent
Tongres, un patrimoine monumental remarquable. In  : au groupe  4, type  4, variante  1 ou 2 d'Émilie Riha
Corbiau M.-H. (dir.), Le patrimoine archéologique de Wallonie, (1994 : 1er siècle). Dim. : 1,8 × 1,4 x 0,8 cm. Les fibules
Namur, p. 274-276. à ressort protégé ne se rencontrent pratiquement pas
dans cette zone du fond de la vallée de la Haine, les
traces d'occupation datant du 1er siècle sont d'ailleurs
95

Époque romaine Hainaut

représente 20,3 % des bagues en argent (Guiraud, 1989,


p. 197-198 et p. 203). Dim. : 2,1 × 0,4 cm.
– Clef à révolution à poignée trilobée dégradée (1). Le
canon possède une extrémité femelle. Panneton ruiné.
Type peu courant en raison de ses proportions et de sa
facture grossière. Dim. : 7,1 × 2,2 × 0,7 cm.
– Fragment du bord, déformé, d'un récipient de type
indéterminé (8). Lèvre externe présentant une section
triangulaire. Dim. : 5,8 × 3 × 1 cm.
– Clou à tête globuleuse (2). Dim. : 2,2 × 1 cm.

Plomb

– Petite plaquette percée (7). Dim. : 2,3 × 2,2 × 0,3 cm.


– Plomb de réparation de poterie (6). Dim. : 2,5 × 2 ×
1,1 cm.

Pierre

– Pierre dont la forme, plus ou moins discoïde, semble


obtenue par piquetage (non illustrée). La face supé-
rieure est légèrement concave tandis que celle infé-
rieure, bombée, mais sans méplat, présente des traces
d'usure atteignant pratiquement le stade du polissage.
Dim. : 7,2 × 4,1 cm. Ce type d'artefact, souvent associé
à l'artisanat du métal, suscite un intérêt nouveau. Un
article décrit et analyse six polissoirs découverts lors
de prospections effectuées à Sirault par Serge  Parent
(Thiébaux et al., 2014). Ceux-ci présentent des facettes
Hensies, « La Neuville » : 1. Clef ; 2. Clou ; 3. Fibule à ressort ; dues à leur usage, ce qui n'est pas le cas pour la pierre
4. Bague ; 5. Fibule à ressort protégé ; 6. Plomb de réparation de décrite ici. Aussi, il s'agit vraisemblablement d'un
poterie ; 7. Plaquette en plomb ; 8. Récipient en alliage cuivreux.
broyon utilisé conjointement avec un mortier.

peu nombreuses. Ainsi, un unique exemplaire apparaît Céramique


parmi les cent six fibules trouvées lors de prospec-
tions effectuées sur les déblais du canal à Pommerœul – Coupelle Drag. 33 en terre sigillée du Centre de la
(Dufrasnes, 1994, no 20 ; 1999 ; 2001) ; les sites Hensies I Gaule dont le bord est conservé à 10 % (diam. bord :
et II n'en livrèrent également qu'un unique spécimen ca  27,5  cm ; haut.  : 4,6  cm). Estampille GRACCIM
parmi les trente-six broches répertoriées (Dufrasnes & au-dessus d'un petit cercle. Sigle non répertorié attri-
Leblois, 2009, no 77). buable au potier Gracchus iv (Lezoux, ca 155-195) ; il
– Fragment d'une fibule à ressort initialement à quatre pourrait en fait correspondre à celui, douteux, imputé
spires et corde interne (3). Une incision longitudinale
bordée de points orne l'arc à profil arrondi. Le pied,
formant un angle accusé avec l'arc et se terminant
généralement par un bouton aplati rapporté, manque.
Dim. : 3,3 × 1,3 × 1,1 cm. Type bien représenté dans
la basse vallée de la Haine. Époque flavienne-début du
3e siècle.
– Bague (4). Bien que très oxydée, sa forme hexago-
nale se laisse encore deviner et la rattache au groupe 9a
d'Hélène  Guiraud. Ces anneaux  se retrouvent dans
toutes les régions, surtout dans le nord-est, et on les
trouve en particulier s'ils sont modestes dans les vici, les Estampille GRACCIM sur une coupelle Drag.  33 en terre
sigillée du Centre de la Gaule.
zones rurales, les forts du limes. Au 3e  siècle, ce type
96

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

sans certitude à Gracchus iii, homonyme du Sud de la Hensies/Montrœul-sur-Haine : vestiges


Gaule (Hartley & Dickinson, 2009, p. 219). d'une construction d'époque gallo-
– Fragment du bord d'un plat à paroi concave Blicquy 5
romaine au « Coron Franoé »
(De Laet & Thoen, 1969) en céramique à vernis rouge
pompéien originaire des Rues-des-Vignes. Ces réci-
pients ont été produits en abondance durant la seconde Jean Dufrasnes et Éric Leblois
moitié du 2e siècle et au 3e siècle (Deru, 2005, p. 474).
Au fil des prospections effectuées ces dernières décen-
Bibliographie nies, le nord du territoire de Montrœul-sur-Haine
■■ De Braekeleer R., Dufrasnes J. & Houbion F., 1989. révèle les nombreuses traces d'occupations gallo-
Découverte de meules antiques dans la région de Belœil, Coup romaines qu'il recèle. Il semble désormais difficile de le
d'œil sur Belœil, 5, 37, p. 142-186. dissocier du vicus de Pommerœul (nous employons ici
■■ De Laet S.J. & Thoen H., 1969. Études sur la céramique de la le terme « vicus » dans le sens « d'agglomération », sans
nécropole gallo-romaine de Blicquy. IV. La céramique « à enduit préjuger de son véritable statut à l'époque romaine).
rouge-pompéien », Helinium, IX, p. 28-38. De celui-ci, on ne conservait, jusqu'ici, que la vision,
■■ de Loë A. & de Munck É., 1890. Essai d'une carte préhisto- forcément tronquée, laissée par les découvertes specta-
rique et protohistorique des environs de Mons, Annales de la culaires effectuées lors du creusement du canal à grand
Société d'Archéologie de Bruxelles, 4, p. 403-429. gabarit (1975) et les fouilles, partielles, qui s'ensui-
■■ Deru X., 2005. Les productions de l'atelier de potiers des virent. L'ancien canal Mons-Condé (1807), l'autoroute
«  Quatre Bornes  » aux Rues-des-Vignes (Nord). In  : Société Mons-Valenciennes (1972) et le cours de la Haine cana-
française d'Étude de la Céramique antique en Gaule. Actes du lisée contribuent à dissocier, tout à fait artificiellement,
Congrès de Blois, Marseille, p. 469-478. les deux zones d'occupations antiques. Par certains
■■ Dufrasnes J., 1994. Fibules gallo-romaines découvertes dans caractères, celle repérée à Montrœul-sur-Haine consti-
les déblais du canal à Pommerœul, Amphora, 76, p. 3-40. tue, pour le moins, une sorte de toute proche banlieue
■■ Dufrasnes J., 1999. Quelques objets, datant de la Préhistoire sud du site portuaire, banlieue avec peut-être, comme
à la période moderne, découverts dans les déblais du canal de nous le verrons, une part de ce que sa vision moderne
Pommerœul, Vie archéologique, 52, p. 29-59.
comprend et y associe. Dans cette optique, ses franges
■■ Dufrasnes J., 2001. Petit matériel d'époques diverses, mis au débordant sur les communes d'Hensies et d'Hautrage
jour à l'occasion du creusement d'un canal à Pommerœul (Ht) pourraient y être incluses, car elles aussi conservent le
en 1975, Vie archéologique, 55-56, p. 27-48.
souvenir de nombreux établissements gallo-romains ;
■■ Dufrasnes J. & Leblois É., 2009. Hensies (Hainaut)  : le mais tout cela demeure encore une histoire à écrire en
matériel métallique et la céramique recueillis en surface de deux
détail.
établissements gallo-romains, Vie archéologique, 68, p. 5-53.
À Montrœul-sur-Haine, les vestiges de constructions
■■ Guiraud H., 1989. Bagues et anneaux à l'époque romaine en
repérés sont chaque fois peu étendus et, contrairement
Gaule, Gallia, 46, p. 173-211.
à la zone portuaire, ils ne trahissent aucune véritable
■■ Hartley B.R. & Dickinson B.M., 2009. Names on trace de richesse matérielle, même si quatre dépôts
Terra Sigillata. An Index of Makers' Stamps & Signatures on
monétaires furent exhumés dans la localité en 1846
Gallo-Roman Terra Sigillata (Samian Ware). Volume 4 (F to
(Thirion, 1967, p.  124-125). Situés en bordure nord-
KLUMI), London (Bulletin of the Institute of Classical Studies,
Supplement 102-04). ouest d'un marécage, ils semblent correspondre aux
habitats de paysans tirant vraisemblablement quelque
■■ Riha É., 1994. Die römischen Fibeln aus Augst und Kaiser-
augst. Die Neufunde seit 1975, Augst (Forschungen in Augst, 18).
profit de cette zone humide. Des artisans, aux indus-
tries génératrices de nuisances, s'y installèrent aussi,
■■ Thiébaux A., Ansieau C., Henrich P. & Goemaere É.,
des scories de fer provenant d'une forge ayant été
2014. Saint-Ghislain/Sirault : les polissoirs romains découverts
en 1998, indices d'une forge spécialisée  ?, Chronique de découvertes mêlées à des fragments de tegulae (parc.
l'Archéologie wallonne, 21, p. 91-96. cad.  : Hensies, 2e  Div., Sect.  A, extrémité nord des
■■ Van Bastelaer D.-A., 1880. Les tombes gauloises de la nos 272b et 272c ; Dufrasnes, 1994, p. 21).
France et les tombes germaniques de la Belgique antérieures Le site particulier dont il sera ici question n'échappe
à l'invasion romaine. Une tombe germanique découverte et pas à ce constat général. Il s'étend juste au nord du
méconnue en 1851 à Bernissart, Annales du Cercle archéologique «  Coron Franoé  », à quelques mètres à peine au
de Mons, 16, p. 551-576. sud-ouest du cours actuel de la Haine, sur une surface
d'environ 50  a (parc. cad.  : Hensies, 2e  Div., Sect.  A,
zone de jonction des nos 335d, 335f et 338d). Le maté-
riel qui y a été ramassé (céramique, monnaies et petits
objets métalliques) témoigne d'une occupation qui
97

Époque romaine Hainaut

remonte au moins à la fin du 1er siècle ou au début du 4. Faustine la Jeune, Rome, 161-175.


siècle suivant et qui perdure probablement au 3e siècle. A. ]AVSTINA/AVGVS[. Buste de l'impératrice drapé
Quelques vestiges d'autres époques s'y remarquent à droite.
également. R. Cybèle assise à droite sur un trône, flanquée de deux
lions, et tenant un tambour sur ses genoux.
Matériel lithique Sesterce.
5. Empereur indéterminé, Rome, 2e siècle.
Fragment mésial d'une lame minière en silex. Un bord A. Buste lauré d'un empereur à droite.
présente une retouche directe marginale. Légère patine R. Personnage féminin debout à gauche tenant une
brunâtre à l'exception d'une extrémité, cassée récemment, lance, ou un sceptre, et une patère. S/C.
dont la tranche laisse apparaître un silex gris moyen légè- Sesterce.
rement graineux. L. : 4 cm ; l. : 2,3 cm ; ép. : 0,9 cm (1). 6. Sesterce fruste.
7 à 10.  Monnaies frustes du Haut-Empire en alliage
cuivreux. Diam. respectifs : 26, 22, 22 et 19 mm.

Petits objets métalliques

– Fragment d'une applique de harnais en alliage


cuivreux aux bords incurvés. Revers creux sur lequel
subsiste un rivet de fixation. L. : 1,6 cm ; l. : 1,7 cm ;
ép. (y compris le rivet) : 0,8 cm (2). Époque romaine
(Fauduet, 1992, no 685).
– Petit disque en plomb, dont les deux faces sont plates.
Pion ou poids non officiel à usage domestique. Diam. :
2 cm ; ép. : 0,5 cm ; poids : 14,52 g (3). Époque indé-
Hensies, « Coron Franoé » : 1. Fragment d'une lame minière ; terminée.
2.  Fragment d'une applique  ; 3.  Petit disque en plomb  ; – Fragment d'un crochet de suspension d'un fourreau
4.  Fragment d'un crochet de suspension d'un fourreau d'épée ou de baïonnette (4). De nombreux exemplaires
d'arme blanche (fin 17e-19e siècle).
sont connus en Belgique et en France. Fin 17e-19e siècle.
Les plus anciens, en laiton, se fixaient au moyen d'une
Monnaies petite plaque trapézoïdale insérée entre le cuir et le
bois du fourreau  ; les plus modernes, de forme un
1. Domitien, Rome, 81-96. peu différente, étaient rivetés ou soudés sur la chape.
A.  ]SDOMITAVGGER[. Buste lauré de l'empereur à Ces objets furent parfois assimilés à des crochets de
droite. simpulum (voir à ce sujet Dufrasnes, 2004, no  13,
R.  Minerve debout à gauche, tenant une lance de p. 21-22 ; Dufrasnes, 2014).
la main gauche et un foudre de la main droite, un
bouclier à ses pieds. Céramique
Denier (fragment).
2.  Faustine Mère, sous Antonin-le-Pieux, Rome, – Terre sigillée  : coupe moulée Drag.  37 (Sud de la
ca 141-146. Gaule, Domitien-Trajan), assiette Drag. 31 (Centre de
A. DIVA/FAVSTINA. Buste drapé de l'impératrice à la Gaule, 2e siècle), récipient indéterminé (Argonne).
droite. – Fragments de plusieurs dolia de grand module en
R. AVG/VSTA. Cérès debout à gauche, tenant une pâte à dégraissant grossier d'argilite. L'un d'eux à lèvre
torche de la main droite et soutenant son pallium de plate horizontale ornée de trois sillons concentriques
la gauche. type Gose 358. Quelques fragments de panse ornés de
Denier. groupes de deux cordons.
3. Faustine la Jeune, Rome, 161-175. – Mortier type Tongeren  350 en pâte de la région de
A. ]FAVS[ ]I[ ]/AV] [STA. Buste de l'impératrice drapé Bavay-Famars (Vanvinckeroye, 1991).
à droite. – Amphore à huile de Bétique Dressel  20, amphore
R. IVNON] [/REGINAE. Junon debout à gauche régionale Gauloise  13 (ou cruche-amphore) en pâte
tenant un sceptre de la main gauche et une patère dans septentrionale  et surface extérieure couverte d'un
la main droite, un paon à ses pieds. S/C. engobe beige.
Sesterce. – Cruches ou cruches-amphores en pâte scaldienne,
98

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

■■ Thirion M., 1967. Les trésors monétaires gaulois et romains


trouvés en Belgique, Bruxelles (Travaux du Cercle d'Études
numismatiques, 3).
■■ Vanvinckeroye W., 1991. Gallo-Romains aardewerk van
Tongeren, Hasselt (Publicaties van het Provinciaal Gallo-
Romeins Museum, 44).

Hensies/Montrœul-sur-Haine : vestiges
gallo-romains du Haut- et du Bas-Empire
recueillis au lieu-dit « La Préelle »

Hensies, « Coron Franoé » : fragment d'une coupe moulée Jean Dufrasnes et Éric Leblois
Drag. 37 en terre sigillée du Sud de la Gaule.

En mars 1991, l'un de nous (J.D.) a repéré des vestiges


en pâte septentrionale, en pâte de la région de Bavay- gallo-romains sur un champ localisé au sud-ouest
Famars (à lèvre pendante et ouverture évasée) et en de Montrœul-sur-Haine, au lieu-dit «  La Préelle  », à
pâte savonneuse. quelque 800  m à l'est de la chaussée Bavay-Blicquy
– Fragments de nombreux récipients en céramique (parc. cad.  : Hensies, 2e  Div., Sect.  B, no  506  ; coord.
commune sombre, certains en pâte scaldienne, d'autres Lambert  : 102650  est/124250  nord). Régulièrement
en pâte septentrionale. On y reconnaît des jattes NerJ2, prospecté depuis sa découverte, ce site a déjà fait
des bols carénés NerJ5 et, peut-être, un poêlon NerJ9, l'objet d'un bref signalement (Dufrasnes, 2000), mais
des marmites NerM1, NerM2 (proches d'exemplaires une imprécision concernant sa localisation et quelques
connus à Bavay durant la première moitié du 2e siècle découvertes effectuées depuis lors nous incitent à y
et durant la première moitié du 3e  siècle), NerM6 et consacrer une nouvelle notice.
NerM8 (Blondiau, Clotuche & Loridant, 2001). Cette occupation, probablement un habitat, se
– L'un ou l'autre tesson en céramique modelée. remarque essentiellement par la présence de frag-
Des fragments relativement nombreux de récipients ments de tegulae et d'imbrices répartis sur une surface
post-médiévaux en terre cuite rouge glaçurée y ont relativement vaste. Divers artefacts dignes d'intérêt y
également été ramassés. L'un d'eux était couvert d'une ont cependant été ramassés. Si la plupart sont attri-
glaçure verte sur engobe blanc. buables au Haut-Empire (du milieu du 1er  siècle au
3e  siècle), quelques-uns attestent que les lieux ont
Bibliographie également été occupés durant le 4e  siècle, ce qui est
■■ Blondiau L., Clotuche R. & Loridant F., 2001. Mise en relativement rare dans la région.
évidence de répertoires de céramiques communes sombres
dans la partie méridionale de la cité des Nerviens : l'apport des Vestiges du Haut-Empire
fouilles récentes. In : Société française d'Étude de la Céramique
antique en Gaule. Actes du Congrès de Lille-Bavay, Marseille, Les monnaies
p. 41-64.
■■ Dufrasnes J., 1994. Fibules gallo-romaines découvertes dans 1. Hadrien, Rome, 117-138.
les déblais du canal à Pommerœul, Amphora, 76, p. 3-40. A. ]IANVS/HADRIA[. Buste couronné de l'empereur
■■ Dufrasnes J., 2004. Traces d'un atelier de bronzier à droite.
d'époque romaine au lieu-dit Cocriamont à Blandain (Ht), Vie R. Fortune assise à gauche, tenant corne d'abondance
archéologique, 61, p. 7-37.
et gouvernail.
■■ Dufrasnes J., 2014. Ath/Meslin-l'Évêque : rectification Sesterce. 6. C.756 (RIC, 551a ; BMC, 1130).
à propos d'un crochet gallo-romain orné de coquillages et de 2. Faustine la Jeune, Rome, ca 161-175.
vulves, Chronique de l'Archéologie wallonne, 22, p. 121-122.
A. Buste féminin à droite coiffé d'un chignon.
■■ Fauduet I., 1992. Musée d'Évreux. Collections archéologiques. R. Junon debout à gauche, tenant une patère et un
Bronzes gallo-romains. Instrumentum, Évreux.
sceptre, un paon à ses pieds.
■■ Gose E., 1950. Gefäβtypen der römischen Keramik im Rhein- Dupondius. 11. C 123 (RIC, 1647 ; BMC, 983).
land, Köln (Beihefte der Bonner Jahrbücher, 1).
99

Époque romaine Hainaut

Les petits objets en alliage cuivreux type Tongeren  352 (le plus répandu au 3e  siècle  ;
Vanvinckeroye, 1991) ;
Deux fragments de fibules à charnière en étui furent –  dolia, généralement en pâte septentrionale, mais
découverts. aussi en pâte à dégraissant grossier ;
–  Le premier (1) s'intègre au groupe  23d4a de – commune sombre : assiette NerA6 (seconde moitié
Jacques Philippe (2000, no 412 : ca 50-80/90 apr. J.-C.). du 2e siècle à Bavay), marmites NerM1, NerM2 (proches
Ce modèle est connu à Augst dans des contextes plus d'exemplaires mis au jour à Bavay et à Étroeung dans
tardifs (Riha, 1979, no  924  ; 1994, no  2416, p.  114, des contextes de la première moitié du 3e  siècle) et
variante 5.7.7). L.  : 3,4  cm. À l'échelle régionale, un NerM6, jattes NPicJ4 et NPicJ22b (Blondiau, Clotuche
fragment semblable provient de Tertre (Dufrasnes & Loridant, 2001 ; Collectif céramique-ABG, 2010) ;
& Leblois, 2010) et une fibule appartenant au même –  pot à provisions à lèvre plate et horizontale et pot à
groupe fut trouvée sur le site de la villa de Meslin- provisions à lèvre évasée (Brulet, Dewert & Vilvorder, 2001,
l'Évêque (Dufrasnes, 1993, pl. II, no 1). p. 292 : principalement dans des contextes du 3e siècle) ;
– Le second (2) correspond au type Riha 5.5.5 (1979, –  fragment de la panse d'un récipient en céramique
no  754, fibule exhumée dans un contexte daté de la modelée.
période 70-250 apr. J.-C.). À Augst toujours, les autres
fibules de ce groupe sont principalement attribuées à Vestiges du Bas-Empire
la seconde moitié du 1er  siècle apr.  J.-C. (Riha, 1994,
p. 109, tableau typo-chronologique). L. : 3,8 cm. Les monnaies
Mentionnons aussi une fiche de passe-guide présen-
tant une section rectangulaire (3). L.  : 4,4  cm. De 1. Constantin II (330-332), Constance II (330-335) ou
tels fragments sont notamment connus à Hensies Constant (334-335).
(Dufrasnes & Leblois, 2009, Hensies I, nos 32-34) et à A. Buste lauré d'un empereur à droite.
Sirault (Dufrasnes, 2005, fig. 2, no 5). R. Deux soldats encadrant deux étendards.
Diam. : 15 mm.
2. Monnaie indéterminée du 4e  siècle (peut-être une
imitation ?).
A. Buste d'un empereur à droite (lauré ou perlé ?).
R. Personnage à gauche vêtu d'une tunique courte. Le
bras droit s'appuie sur une lance.
Diam. : 22 mm.

La céramique

Hensies, « La Préelle » : petits objets en alliage cuivreux : 1 et – Deux fragments de récipients en terre sigillée d'Ar-
2. Fragments de fibules ; 3. Fiche de passe-guide ; 4. Languette gonne ornés d'un décor imprimé à la molette. Il s'agit de
indéterminée.

La céramique

– Terre sigillée du Centre de la Gaule (assiettes Bet 15/


Drag.  36, Bet  43 avec rosette à six pétales et Bet  55)
et d'Argonne (tasses Drag.  33, Drag.  40 et Drag.  46,
mortiers Drag. 45) ;
–  terra nigra champenoise (assiette Deru  A39, hori-
zons IV à VI, ca 15/20 à 85/90) et savonneuse (assiette
Deru A42) ;
– céramique à vernis rouge pompéien : plats Blicquy 5
originaires des Rues-des-Vignes (De  Laet & Thoen,
1969) ;
– cruches en pâte scaldienne ;
–  amphore à huile de Bétique Dressel  20  ; amphore Hensies, « La Préelle » : fragment d'une coupe hémisphérique
régionale Gauloise 13 ; en terre sigillée ornée d'un décor à la molette (U.C.  58).
Argonne, 4e siècle.
–  mortier de Bavay/Famars à lèvre en crochet
100

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

deux coupes hémisphériques Chenet 320, la première ■■ De Laet S.J. & Thoen H., 1969. Études sur la céramique de la
associée à la molette U.C.  58, attestée à Avocourt  3 nécropole gallo-romaine de Blicquy. IV. La céramique « à enduit
et aux Allieux, la seconde à une autre molette trop rouge-pompéien », Helinium, IX, p. 28-38.
usée pour être identifiée en toute certitude (peut-être ■■ Deru X., 1996. La céramique belge dans le nord de la Gaule.
U.C. 108, attestée à Avocourt 3, aux Allieux et à Châtel- Caractérisation, chronologie, phénomènes culturels et écono-
Chéhéry, groupe Hübener 5, ca 340-430). miques, Louvain-la-Neuve (Publications d'Histoire de l'Art et
d'Archéologie de l'Université catholique de Louvain, 89).

Autres vestiges ■■ Dufrasnes J., 1993. La villa gallo-romaine de Preuscamps à


Meslin-l'Évêque. Contribution à la connaissance du site, Coup
d'œil sur Belœil, 8, 54, p. 44-61.
– Un fragment distal d'une lame néolithique retouchée
(non illustré). ■■ Dufrasnes J., 2000. Hensies  : vestiges d'une construction
gallo-romaine au lieu-dit « La Préelle », Chronique de l'Archéo-
–  Une languette en alliage cuivreux dont l'extrémité
logie wallonne, 8, p. 45.
repliée forme une charnière pourvue d'un axe égale-
■■ Dufrasnes J., 2005. Petit matériel métallique gallo-romain
ment en alliage cuivreux (4). Une face est décorée de
et fibule monétiforme carolingienne provenant du Champ des
deux sillons longitudinaux et le repli est orné de deux
Mansarts à Sirault (Hainaut), Vie archéologique, 63, p. 22-29.
traits parallèles transversaux. L.  : 4,8  cm. Des pièces
■■ Dufrasnes J., 2012. Prospections sur quatre sites ruraux,
similaires sont reprises dans le corpus des objets mili-
d'époques médiévale et post-médiévale, du Hainaut occidental,
taires d'époque romaine (Unz & Deschler-Erb, 1997,
Vie archéologique, 71, p. 59-108.
pl.  64, plus particulièrement les nos  1844, 1845, 1853
■■ Dufrasnes J. & Leblois É., 2009. Hensies (Hainaut)  : le
et 1854  ; Bishop, 1998, fig.  27, no  331). Cependant,
matériel métallique et la céramique recueillis en surface de deux
ici, aucune trace d'un moyen de fixation n'appa- établissements gallo-romains, Vie archéologique, 68, p. 5-53.
raît  ; il pourrait s'agir d'un élément post-médiéval
■■ Dufrasnes J. & Leblois É., 2010. Saint-Ghislain/Tertre : un
dont la fonction demeure indéterminée, tel un autre fragment de fibule d'époque romaine, Chronique de l'Archéologie
exemplaire découvert aussi à Montrœul-sur-Haine wallonne, 17, p. 63-64.
(Dufrasnes, 2012, fig. 9, no 67).
■■ Hübener W., 1968. Eine Studie zur spätrömischen Rädchensi-
gillata (Argonnensigillata), Bonner Jahrbücher, 168, p. 241-298.
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raugst. Die Neufunde seit 1975, Augst (Forschungen in Augst,
évidence de répertoires de céramiques communes sombres
18).
dans la partie méridionale de la cité des Nerviens : l'apport des
fouilles récentes. In : Société française d'Étude de la Céramique ■■ Unz C. & Deschler-Erb E., 1997. Katalog der Militaria aus
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chies IV. Vicus gallo-romain. Travail de rivière, Louvain-la-
Neuve (Publications d'Histoire de l'Art et d'Archéologie de
l'Université catholique de Louvain, 101).
■■ Chenet G., 1941. La céramique gallo-romaine d'Argonne du
ive siècle et la terre sigillée décorée à la molette, Mâcon (Fouilles
et Documents d'Archéologie antique en France, 1).
■■ Collectif céramique-ABG, 2010. Mise en évidence d'un
faciès céramique dans le nord-ouest de la Belgique romaine.
In : Société française d'Étude de la Céramique antique en Gaule,
Actes du Congrès de Chelles, Marseille, p. 207-224.
101

Époque romaine Hainaut

Honnelles/Roisin : fragments de bronze de la face figurée (ép. de la plaque variable entre 0,1 et
figurant un putto et applique à buste de 0,15 cm). Le second fragment, de taille plus modeste
(2,2 × 1,8 × 0,5 cm), porte la représentation d'une main
Silène
droite refermée sur un objet à l'extrémité circulaire.
Découvert à quelques mètres du premier et présen-
Jean Dufrasnes tant les mêmes caractéristiques, il appartient au même
objet mais, en raison de la taille de la main, pas au
C'est lors de prospections, effectuées par l'auteur le même personnage. L'identité de celui figurant sur le
6 janvier 1990 que furent découverts les bronzes figu- plus grand fragment ne fait aucun doute : il s'agit d'un
rés dont il sera ici question. Ils gisaient en surface putto, omniprésent dans le répertoire des arts décora-
d'un champ jonché de fragments de tegulae au lieu- tifs de l'époque romaine. Il pourrait s'intégrer au décor
dit «  Boutinier  » ou encore «  Trente Saules  » (parc. bachique d'un vase, tels ceux découverts ancienne-
cad. : Honnelles, 1re Div., Sect. B, zone sud du no 458w). ment à Bois-et-Borsu I et à Tongres (Faider-Feytmans,
Ces recherches permirent aussi la récolte de douze 1979, I-II, nos 347 et 374. H. respectives : 8,4 et 9,5 cm ;
monnaies, dont la plus ancienne est un Rameau D et den Boesterd, 1956, nos 310 et 311. H. respectives : 6,3
la plus récente un follis Urbs Roma des années 330-335 et 8,7 cm. 2e siècle). Cependant, la hauteur que devait
(van  Heesch, 1998, p.  285-286). De fouilles ancien- avoir le personnage (estimée à plus ou moins 7  cm)
nement pratiquées sur le site proviennent également et l'absence apparente de courbure du fragment, tant
deux appliques figurant la tête de Méduse, une poignée dans le plan horizontal que vertical, s'accordent assez
métroaque et une applique au Silène sur laquelle nous mal avec cette hypothèse. D'autre part, la paroi interne
reviendrons ci-après (De  Pauw & Hublard, 1903, de ces vases est égale, comme cela a pu être observé
p. 22-24, pl. III, nos 2-5 ; Faider-Feytmans, 1979, I-II, sur ceux précités exposés aux Musées royaux d'Art
nos 166, 170-171 et 185). et d'Histoire de Bruxelles. La découverte d'appliques
1.  Fragments de tôle en bronze coulé. Sur le plus à buste de Silène sur le site inciterait à penser qu'il
grand (5,6 × 4,3 × 0,6 cm) apparaît une bonne partie pourrait s'agir d'une plaque décorative de coffret.
d'un corps nu et potelé, légèrement tourné vers la Cependant, les quelques exemplaires rencontrés dans
droite. La tête, le bras et le pied droits ainsi qu'une la littérature consultée sont tous réalisés en mince tôle
partie de la jambe gauche manquent. Les pectoraux de bronze estampée et non coulée (par ex.  : Faider-
sont saillants, un sillon légèrement oblique, peut-être Feytmans, 1979, nos  215-216 et 225  ; Fauduet, 1992,
accidentel, se situe à hauteur de l'estomac et le triangle nos 113-119, 121-124 et 130a).
pubien, surmonté par le pli formé par le ventre, s'ex- 2. Cheville à buste de Silène. Deux oreilles de cheval
hibe en relief sans pour autant que soient représentés et de petites cornes encadrent le crâne chauve. Le nez
les organes génitaux. Le bras gauche s'écarte du corps est épaté et une imposante barbe comporte six tresses
et la main, à peine esquissée, tient ou s'appuie sur un étagées sur deux rangs. Le fleuron supportant le buste,
objet indéterminé. La jambe droite, portée en avant, contrairement à d'autres exemplaires, mais comme sur
suggère la marche. Le revers creux épouse les reliefs l'applique au Silène découverte anciennement sur le
site (De  Pauw & Hublard, 1903, p.  215, pl.  III, no  4  ;
de Loë, 1937, p. 168-169 ; Faider-Feytmans, 1979, I-II,
no 166), se réduit à un bord étroit en relief sur lequel de
simples encoches marquent la séparation des pétales.
Un tenon perforé de section rectangulaire, venu de
coulée, équipe le revers plat. H. : 3,8 cm ; l. : 2,8 cm ;
ép. y compris le tenon : 3 cm (exposé à l'Espace gallo-
romain d'Ath).
Ce type d'applique, à buste enté sur un fleuron à trois
pétales, se rencontre fréquemment en Belgique et dans
le nord de la France (Faider-Feytmans, 1979, I, p. 21).
Dans certains cas, deux rivets à tête discoïde assuraient
leur fixation sur du cuir (par ex. : Doyen, 1987, fig. 4 ;
Dufrasnes, 2004, no  50). Sur une poignée de Taviers,
un robuste tenon, exceptionnellement en fer, remplace
les rivets (Doyen, 1987, fig.  3). En ce qui concerne
Fragments de bronze représentant le corps d'un putto et une l'applique découverte anciennement au « Boutinier »,
main.
Germaine Faider-Feytmans signale simplement un
102

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

représenter Bacchus (Faider-Feytmans, 1979, I-II,


nos 55-56). Le Recueil des bronzes de Bavai n'en signale
que quatre dont une incertaine (Faider-Feytmans, 1957,
nos  41-44). Bacchus fait partie des divinités les moins
représentées par les artisans, même dans les régions où
d'autres témoignages prouvent qu'il a connu une grande
faveur. Essayer de comprendre ces particularités du
répertoire des bronziers, c'est, entre autres s'interroger
sur la fonction profane ou religieuse, que l'utilisateur
attribue à ces objets. C'est aussi tenter de percevoir,
à travers les objets mêmes, qui sont ces utilisateurs
(Manfrini-Aragno, 1987, p.  178-179). L'auteur note
encore : Bacchus est présent dans la plupart des laraires
pompéiens, mais jamais sous la forme d'une statuette
de bronze. Cette carence pour la cité campanienne a
été relevée par S.  Adamo-Muscettola, qui observe que
le dieu est représenté, dans les laraires, en peinture ou
par l'intermédiaire de l'un de ses acolytes. Si les peintres
ne craignaient pas de représenter Dionysos, il faut
croire que c'est avec l'accord de leur clientèle et que
l'absence de ses images de bronze est imputable aux
bronziers eux-mêmes. Pour découvrir l'origine de cette
répugnance, il faudrait peut-être rechercher les traces
d'une possible immixtion de la légende dionysiaque, en
Cheville dont la tête est constituée d'un buste de Silène.
ses manifestations les plus redoutables, dans l'univers
mental si particulier des «  maîtres du feu  » que sont
revers plat sans mentionner aucun système d'attache. les bronziers. De par la science de ces démiurges,
Quant à la cheville décrite ici, elle devait sans doute s'apparentant à celle des forgerons, cet univers devait
assurer la fixation, avec celle trouvée auparavant, d'une être tout pétri des mythes liés à la transformation des
plaque de serrure de porte, de coffre ou de coffret minerais en métaux (Éliade, 1977, p. 65 et passim).
(comme à Bavay  : Faider-Feytmans, 1957, no  213).
Certaines appliques au Silène au revers creux ne possé- Bibliographie
dant qu'un pivot sommital au revers, portant parfois ■■ de Loë A., 1937. Musées royaux d'Art et d'Histoire à Bruxelles.
des traces d'usure, devaient masquer des entrées de Belgique ancienne. Catalogue descriptif et raisonné. III.  La
serrure (Faider-Feytmans, 1979, I, p. 38 ; Doyen, 1987, période romaine, Bruxelles.
fig. 1-2). ■■ den Boesterd M.H.P., 1956. The bronze vessels in the
Plutôt que simples éléments purement décoratifs, ces Rijksmuseum G.M. Kam at Nijmegen, Leiden (Description of
symboles dionysiaques agissaient à des fins protectrices the collections in the Rijksmuseum G.M. Kam at Nijmegen, V).
en tant que mandataires du dieu lui-même. Les ■■ De Pauw L.-F. & Hublard É., 1903. Notice sur les antiquités
bronziers semblent leur déléguer ses pouvoirs. Au préhistoriques, belgo-romaines et franques découvertes dans la
sein de l'aire géographique ici concernée, la Belgique région Angre-Roisin  ; accompagnée d'une carte préhistorique
et le nord de la France, Bacchus-Dionysos, comme en et protohistorique, Annales du Cercle archéologique de Mons, 32,
p. 195-230, pl. I-V.
d'autres régions de l'Empire, n'apparaît que rarement
sur des objets utilitaires en bronze de la vie courante. ■■ Doyen J.-M., 1987. Bronzes figurés inédits de la région
Néanmoins, exceptionnellement, son buste peut orner mosane : les bustes de Silène, Amphora, 49, p. 5-10.
une applique à tenon, comme celle datée de la fin ■■ Dufrasnes J., 2004. Blandain, le petit matériel d'époque
du 1er  siècle, conservée au Musée archéologique de gallo-romaine récolté en prospection sur le site de « La Noire
Terre  » à Blandain, Bulletin de la Société tournaisienne de
Strasbourg (http://www.musees.strasbourg.eu/index.
Géologie, Préhistoire et Archéologie, IX, 3, p. 45-87.
php?page=l-epoque-gallo-romaine  ; site consulté le
■■ Éliade M., 1977. Forgerons et alchimistes, Paris, Flammarion
4 février 2016). Ses représentations se cantonnent
(Champs. Idées et Recherches, 12).
à quelques pièces purement décoratives telles des
statuettes. Ainsi, malgré les nombreux symboles ■■ Faider-Feytmans G., 1957. Recueil des bronzes de Bavai,
Paris (Gallia, suppl. 8).
bachiques répertoriés dans Les bronzes romains
de Belgique, seules deux statuettes «  pourraient  »
103

Époque romaine Hainaut

■■ Faider-Feytmans G., 1979. Les bronzes romains de Belgique, observée sur 5 m de longueur. La pièce centrale consiste
II vol., Bruxelles – Mainz am Rhein. en un local de 6 × 11 m intra-muros, occupant toute la
■■ Fauduet I., 1992. Musée d'Évreux. Collections archéologiques. largeur de l'édifice sans subdivision interne.
Bronzes gallo-romains. Instrumentum, Évreux. À l'ouest du diverticule et très proche du secteur J,
■■ van Heesch J., 1998. De muntcirculatie tijdens de Romeinse un puits maçonné a été découvert, fort bien conservé
tijd in het noordwesten van Gallia Belgica. De civitates van de jusqu'à la base de la couche arable. Il est construit en
Nerviërs en de Menapiërs (ca. 50 v.c.-450 n.c.), Brussel (Mono- larges blocs de grès siliceux formant un cylindre de
grafie van nationale archeologie, 11). 1,20 m de diamètre. Il a été vidé jusqu'à 1,50 m sous la
surface du sol. Son remblai de terre brunâtre contenait
Sources peu de matériel.
■■ Manfrini-Aragno I., 1987. Bacchus dans les bronzes De nombreuses fosses comblées ont été découvertes
hellénistiques et romains. Les artisans et leur répertoire, Thèse et explorées dans ces deux tranchées de fouilles. Cinq
présentée à la Faculté des lettres de l'Université de Lausanne d'entre elles s'inscrivent dans l'aire du bâtiment. La
pour obtenir le grade de docteur ès lettres. plus grande de celles-ci, de forme ovoïde de 3  m de
diamètre, était profonde de 1,50 m et contenait de la
céramique du 1er siècle.
Entre le diverticule et le bâtiment, une vaste fosse
Pont-à-Celles/Luttre : campagne de arrondie de 3,50 m de diamètre comblée de débris de
fouilles 2015 de Pro Geminiaco au vicus construction en bois et torchis atteignait la profondeur
des Bons-Villers à Liberchies de 2,15 m. L'abondante céramique qu'elle contenait est
datable de la première moitié du 1er siècle apr. J.-C. Au
sud du bâtiment, trois autres fosses encore ont fourni
Jean-Claude Demanet, Fabienne Vilvorder, de la céramique du 1er siècle apr. J.-C.
Xavier Sollas, Éric Lurquin, Pascal Vergauts Une centaine de petits objets en alliage de cuivre ou
et Willy Bayot en fer ont été récoltés de même que soixante et une
monnaies, dont beaucoup sont mal conservées. Il s'agit
En juillet et août 2015 la campagne de fouilles de Pro de monnaies gauloises et des trois premiers siècles de
Geminiaco à Liberchies a permis d'achever l'explora- notre ère. Parmi la céramique, il faut relever un encrier
tion du secteur L, entamée en 2013 et 2014, jouxtant intact en terre sigillée issue d'un atelier argonnais.
à l'ouest le secteur  J publié dans le volume Liber-
chies  VI (Demanet & Vilvorder, 2015). Comme les Bibliographie
deux années antérieures, deux tranchées parallèles de ■■ Demanet J.-C., Lurquin É., Bayot W., Sollas X., Clavel P.
5 × 25 m, séparées par une berme de 1 m de large, ont & Vergauts  P., 2015. Pont-à-Celles/Luttre : campagne de
été ouvertes à 1 m au sud des tranchées précédentes et fouilles 2014 de Pro Geminiaco au vicus des Bons-Villers à
parallèles à celles-ci, orientées à 45° par rapport à l'axe Liberchies, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 118-119.
de la voie antique. ■■ Demanet J.-C. & Vilvorder F., 2015. Liberchies  VI. Vicus
Un nouveau segment du diverticule qui sépare les gallo-romain. Zone d'habitat dans le quartier ouest. Fouilles de
deux secteurs a été mis au jour dans la partie ouest de Pro Geminiaco (1995-2007), Louvain-la-Neuve (Collection
ces deux tranchées, portant à 40 m la longueur dégagée d'archéologie Joseph Mertens, XVI).
de ce diverticule perpendiculaire à la chaussée antique
et d'une largeur solidement empierrée en moyenne de
5 m.
À l'est du diverticule et à 7  m au sud du bâtiment
découvert les deux années précédentes (bâtiment  L  ;
Demanet et al., 2015), un nouveau bâtiment à fonda-
tions de pierre a été partiellement dégagé. Il forme un
quadrilatère de 8,50 m de large et de plus de 9 m de long,
dont les fondations sont en général bien conservées.
Divisé en deux parties par un mur de refend, seul le local
ouest a été complètement dégagé : ses mesures internes
sont de 3,60 × 6,70 m. Vers l'est, un second local large de
6,70 m se poursuivait au-delà des tranchées de fouilles.
Passant sous le mur ouest de ce bâtiment, la trace de la
fondation arrachée d'une construction antérieure a été
104

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

ÉPOQUE CONTEMPORAINE
Binche/Buvrinnes : fouille de la zone de
chute d'un Messerschmitt Bf 110 G

Nicolas Clinaz Tout d'abord, au nord de la dépression et à faible


profondeur, a été mis au jour un dépôt de munitions, en
Durant le mois d'août  2015, une fouille archéolo- vrac, constitué d'obus, explosifs et incendiaires (pour
gique a été entreprise dans le bois des Communes les Allemands, la dénomination «  obus  » commence
(parc. cad.  : Binche, 5e  Div., Sect.  C, no  22a2  ; coord. à partir d'un calibre de 2 cm) et de douilles en acier,
Lambert  : 137205  est/118240  nord). Cette opération très oxydées, ainsi que des douilles de balles de calibre
faisait l'objet d'une autorisation de fouille octroyée par 7,92 mm. La plupart des munitions avaient éclaté sous
la Direction de l'archéologie (DGO4 / Département du la chaleur d'un incendie. Cet ensemble n'est pas cohé-
patrimoine), en date du 13/04/2015, pour une période rent, issu à la fois de mitrailleuses et de canons, et leur
d'avril à septembre 2015. La fouille avait pour ambition regroupement localisé semble volontaire (résultat du
l'exhumation de l'épave d'un avion militaire allemand travail mené par l'unité allemande de récupération ?).
(ou ce qu'il en reste) tombé au cours de la Seconde Ensuite, à 1,80  m de profondeur, ressortait l'arrière
Guerre mondiale. d'un canon Mauser MG 151/20. Son tube était envelop-
Cette chute d'avion n'est enregistrée dans aucune pé dans un manchon pare-flamme, équipement stan-
archive militaire (Verlustmeldung – rapport de perte) dard sur le Bf 110 G. L'arme était entourée de cendres
ou civile (source communale). A priori, il s'agit d'une et des restes d'obus éclatés lors de l'incendie. Le tube du
perte matérielle n'ayant entraîné aucun décès au sein canon était plié à 45°, à hauteur de l'absorbeur de recul
de l'équipage. La destruction, en grande partie, des de la culasse. Une seule arme de ce type a été retrou-
archives allemandes a empêché de retrouver un quel- vée alors que le Bf 110 G est équipé d'une paire de ces
conque document rapportant ce fait de guerre. Seuls canons, positionnés en dessous du nez de l'avion.
deux témoins, contemporains mais indirects de l'évé- Enfin, au centre de la dépression, à 3,60  m de
nement, ont été interrogés en 2004  : ils confirment profondeur, a été dégagé le moteur droit de l'avion.
qu'un avion allemand est tombé de nuit (à 23h38 très Malgré la violence de l'impact, attestée par la
précisément selon l'un d'eux) durant l'occupation. profondeur d'enfouissement, ce dernier présente
Des prospections de surface ont permis de repérer une un état de conservation remarquable. Pourtant,
dépression artificielle d'environ 2  m de diamètre  ; des selon sa position, il s'agit du premier élément à
débris métalliques jonchaient encore le sol. Leur analyse avoir percuté le sol, absorbant une grande partie
a confirmé qu'ils provenaient d'un avion de chasse alle- de l'énergie de l'impact. Il reposait sur son flanc
mand type Messerschmitt  Bf 110  G, bimoteur multi- droit. Les culbuteurs de soupapes semblent toujours
place. L'étude de la zone d'impact au magnétomètre fonctionnels et la plupart des accessoires sont encore
a révélé trois masses ferreuses distinctes dont la plus présents (pompe à injection Bosch, filtre et pompe à
importante suggérait la présence d'un des deux moteurs. carburant, compresseur, etc.). Le moteur a été extirpé
prudemment grâce à une excavatrice car sa masse
avoisine les 700  kg. Le couvercle du carter présente
un marquage peint « 605 B » qui identifie le moteur
comme un Daimler-Benz  DB  605  B  1. Ce type de
moteur propulse le Bf 110 G. À l'intérieur du carter,
étonnement, se trouve encore la graisse d'origine
qui lubrifie l'embiellage, resté en excellent état. Le
moyeu d'hélice et le réducteur sont normalement
solidarisés au moteur par un carter en magnésium
qui a été dissout par l'humidité du sol. Le réservoir
d'huile, en fer à cheval, a été retrouvé écrasé entre la
plaque de blindage frontale et le moteur. Les pales
d'hélice, absentes, ont été arrachées du moyeu lors
La dépression observée dans les bois, lors de la prospection de l'impact. À proximité du moteur se trouvait un
de surface.
indicateur de pas d'hélice, en excellent état. Bien que
105

Époque contemporaine Hainaut

Interprétation des vestiges 

Le seul élément concret est la date qui figure sur le


moteur : 8.2.44. Cette information offre une fourchette
chronologique comprise entre le 8 février 1944 et début
septembre 1944 (libération) pour estimer une datation
de la chute de l'avion. Malheureusement, les archives
de la Luftwaffe pour l'année 1944 ont largement été
détruites et les pertes matérielles ne semblent pas avoir
été consignées. Buvrinnes et la région du Centre n'ap-
paraissent dans aucun document susceptible de relier
cette chute à une quelconque perte de la Luftwaffe.
Le moteur droit du Messerschmitt Bf 110 G après nettoyage.
Le seul numéro de moteur ne peut également aider à
l'identification de l'appareil. En effet, les moteurs étant
le cadran ressemble à s'y méprendre à une horloge, fort sollicités en combat, leur durée de vie était limitée
il s'agit du réglage de pas d'hélice, selon le système et leur remplacement récurrent, ce qui rend impossible
horaire, procédé typiquement allemand. Les aiguilles toute traçabilité. L'identification de ce Bf  110  G reste
indiquent  10h00,  ce qui confirme le fonctionnement donc inconnue à ce jour, tout comme les raisons qui
normal du moteur avant la chute de l'avion. Non loin ont conduit le Bergungskommando à investir autant
du moteur se trouvaient deux lests rectangulaires dont d'ardeur dans la récupération de cette épave d'avion,
la fonction et la position sur l'avion sont inconnues. À paradoxalement, alors que l'équipage a survécu et que
la même profondeur, au nord de la dépression, l'argile le début de la fin s'annonçait pour les Allemands.
présentait une teinte foncée d'où émanait une forte Avec la collaboration de Nicolas Authom.
odeur d'hydrocarbure. Plus profondément, la tache
s'estompe et l'odeur finit par disparaître. Aucune Remerciements
masse ferreuse n'y a été repérée au magnétomètre
mais la zone d'impact du moteur gauche peut Les Villes de Binche, Merbes-le-Château et Lobbes,
vraisemblablement y être restituée. Un séparateur le Département Nature et Forêt (Cantonnement de
d'écume en fonte d'aluminium y a été retrouvé  ; il Mons) de la DGO3, le Département du patrimoine
devait faire partie du moteur gauche. Il est intéressant de la DGO4 (Direction de l'archéologie, Service de
de signaler que cette pièce présente une oxydation l'archéologie de la Direction extérieure du Hainaut 1),
beaucoup plus prononcée que l'équivalent du moteur Mme Martine Soumoy, M. Laurent Renard, M. Jean-
droit. L'incendie du moteur gauche serait-il la cause Paul Beaucamp et son grutier, M. Alain Marcq et enfin,
de la chute de l'avion ? les bénévoles.
La position des débris permet de restituer le schéma
de la chute de l'avion : il s'est écrasé en oblique, l'aile et
le moteur droit frappant le sol en premier, ce dernier
allant s'enfouir très profondément. Le moteur gauche Morlanwelz/Morlanwelz-Mariemont :
s'est quant à lui, sans doute, moins enfoncé mais son découverte d'un abri anti-aérien
carburant a percolé dans le sol, entraînant la coloration
du sédiment en profondeur.
Les travaux entrepris par l'unité de récupération Marie Demelenne et Pierre-Philippe Sartieaux
allemande (Bergungskommando) semblent avoir été
efficaces puisque 90 % de l'épave ont été enlevés. Les En novembre 2014 un vaste chantier d'aménagement
pièces laissées in situ étaient sans doute trop lourdes de l'espace public autour du domaine de Mariemont
et profondément enfouies pour être récupérées. Le débutait sur le site du carrefour de l'ancienne gare de
moteur droit a littéralement été séparé du bâti lors Mariemont. Ce chantier, conduit dans le cadre d'un
de l'impact et aucun élément adjacent (radiateurs, projet FEDER 2007-2013 déposé par la Commune de
capots, train d'atterrissage) n'a été retrouvé à proxi- Morlanwelz, a permis la mise au jour d'un abri anti-
mité. Les ailes arrachées sont logiquement restées en aérien.
surface. Nous ne relevons aucun débris du fuselage, de Il était situé aux abords de la voie de chemin de
l'habitacle, ni d'effet personnel ou de restes humains. fer actuel, entre celle-ci et l'entrée sud du domaine.
L'équipage indemne (et resté anonyme) a évacué en Le local était autrefois contigu à l'ancienne gare de
parachute l'appareil en perdition. Mariemont, démolie dans la seconde moitié des
106

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

première chicane, était encore visible. Des plafonniers


en dôme de verre, quelques lattes de bois provenant
probablement des bancs, des gaines métalliques pour
les câbles électriques jonchaient le sol. Enfin, un livre
très abîmé et quelques boîtes de conserve ont été lais-
sés à l'abandon.
Un appel à témoins organisé dans l'entité à la suite
de la découverte a permis de rapporter cet abri à
la Deuxième Guerre mondiale, plusieurs riverains
témoignant de sa construction, de son utilisation ou de
visites avant sa condamnation, dans les années 1950.
L'un de ces témoins rapporte également avoir
fréquenté deux autres locaux semblables dans la
Morlanwelz-Mariemont : vue intérieure de l'abri anti-aérien.
commune de Morlanwelz. Les sites mentionnés seront
l'objet d'une surveillance accrue lors d'éventuels futurs
années 1970. Long au total de 25,37  m et large de travaux dans leurs environs.
4,73 m, l'abri présentait une hauteur de 2,61 m. Son D'autres abris anti-aériens mis au jour en
plan était particulier : il était formé de trois couloirs Hainaut, l'un à Gosselies (Soumoy, 2012) et l'autre
de 7  m de long, dont celui du centre était décalé, à Roux (Soumoy & Sartieaux, 2014), témoignent
décrivant ainsi une chicane. À chaque extrémité, des du souci, durant la Seconde Guerre mondiale,
blochets en bois figés dans les parois témoignaient d'organiser une défense passive grâce à l'aménage-
de l'emplacement de deux portes. Chacune d'elles ment d'abris destinés aux civils. Si celui découvert
donnait accès à un petit sas quadrangulaire et à un à Mariemont présente des aménagements proches
escalier, grossièrement muré. Au sol, une grille de de ceux retrouvés à Gosselies, son parement inté-
45  cm sur 45  cm parfaitement centrée fermait un rieur constitué de tôle ondulée le distingue des
aménagement cylindrique de 83  cm de diamètre et deux autres abris.
d'une profondeur d'environ 80 cm. Cette excavation L'abri de Mariemont a été complètement enregistré
peut être interprétée comme un faux-puits. avant sa démolition, indispensable à la poursuite des
Les parois d'une épaisseur de 25 cm étaient en béton travaux.
armé recouvert d'un parement en tôle ondulée  très
oxydée. Les parois verticales étaient interrompues par Remerciements
un soubassement oblique (ca. 30°) en béton.
Des cornières métalliques étaient régulièrement Qu'il nous soit permis de remercier Monsieur
fichées dans le soubassement oblique. Une latte de André Biaumet, Madame Janine Brogniez-Philippart,
bois vissée sur ces cornières soutenait probablement le docteur Jacques Bruart, Monsieur René D'Hollander,
plusieurs planches de bois, formant ainsi des bancs Monsieur Willy Drofiak, Monsieur Godin et Monsieur
courant le long des murs. Didier Selvais pour leurs précieux témoignages.
Des éléments d'aménagement intérieur et quelques
objets usuels ont été retrouvés dans cet abri. Le cadre Bibliographie
de fixation d'un tableau électrique, placé à l'entrée de la ■■ Soumoy M., 2012. Charleroi/Gosselies  : mise au jour d'un
abri anti-aérien, Chronique de l'Archéologie wallonne, 19,
p. 91-92.
■■ Soumoy M. & Sartieaux P.-P., 2014. Charleroi/Roux  : un
abri anti-aérien sous la place Albert Ier, Chronique de l'Archéolo-
gie wallonne, 22, p. 123.

Vue axonométrique de l'abri anti-aérien.


107

Époque contemporaine Hainaut

Morlanwelz/Morlanwelz-Mariemont : relative à l'ouvrage, avec pour objectif prioritaire de


documenter le monument et d'identifier sur le terrain
étude préalable à la restauration du mur puis de localiser en plan la chronologie, au moins rela-
de clôture du domaine de Mariemont tive, des différentes portions.
La méthodologie retenue est de confronter l'étude
Marie Demelenne, Gilles Docquier des sources composées des publications antérieures
et Corinne Gysbergh (Van  den  Eynde, 1989  ; Recchia, 2002  ; Marré-Muls
et al., 2004  ; Quairiaux, Platiau & Bouilliez, 2005), de
Situé à cheval sur les communes de Morlanwelz et l'iconographie, des archives du Musée, du cadastre et
de Manage, dans la région du Centre, le domaine de des services publics avec des observations de terrain, se
Mariemont se présente aujourd'hui sous la forme d'un traduisant par la description analytique du mur sur tout
magnifique parc de plus de 40 ha. son périmètre (descriptions sur fiche des briques, des
Le mur d'enceinte du domaine, long de plus de couvre-murs, des types de drainage, des pieds de mur,
2 400 m (linéaire hors ouvertures), remonte pour ses des liants… et croquis métrés à l'échelle 1/100, complétés
parties les plus anciennes encore visibles au 19e siècle. par un enregistrement photographique systématique).
En 2012, il a subi des dégradations importantes, en Les limites anciennes se dessinent dès l'acquisition par
particulier l'effondrement spectaculaire d'un pan complet, Nicolas Warocqué, en 1813, de la demeure de l'ancien
long de plus de 10 m, dans sa partie méridionale. surintendant du domaine royal et impérial et, en 1829,
Un important chantier de conservation-restauration des bois de Mariemont pour le compte des charbonnages,
a été programmé pour le printemps 2013. En prévi- dont il se réserve le quinzième (Recchia, 2002, p. 204).
sion de celui-ci, une étude sanitaire a été réalisée en L'établissement des limites du domaine telles qu'on
septembre 2012 par la société Spherco. Le Musée royal les connaît aujourd'hui sont le fruit des décisions
de Mariemont s'est chargé de compléter celle-ci par successives des différents patriarches de la famille,
une double contribution historique et archéologique génération après génération, jusqu'à Raoul Warocqué.

Plan du parc de Mariemont indiquant les différents agrandissements fonciers au cours du 19e siècle (datés) et les tronçons déduits de
l'observation de terrain (A-T). D'après Plan du Parc de Mariemont appartenant à Monsieur R. Warocqué, 1906 (infographie J. Periaux,
Musée royal de Mariemont).
108

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

Le legs du domaine à l'État belge, à la mort de ce limites de 1840 et de 1870 (tronçon B).
dernier en 1917, a définitivement scellé le tracé du mur Après cette date et en particulier depuis le décès de
d'enceinte. Raoul  Warocqué, les limites foncières n'ont plus été
En comparant le Plan du parc de Mariemont appar- modifiées.
tenant à Monsieur R.  Warocqué (1906), présentant la Cependant, limite foncière ne signifie pas nécessai-
succession des phases d'agrandissement du domaine, à rement enclavement physique par un mur de clôture.
celui qui résulte de l'observation des portions d'enceinte, Une palissade, qui existait déjà en 1794 d'après les
on obtient une sorte de « patchwork » dont les différents archives du Département de Jemappes, a pu persister
tracés devraient refléter les étapes d'appropriation. durant le premier tiers du 19e  siècle et être ensuite
S'appuyant sur ce plan, une première hypothèse remplacée par un mur ou une clôture, à la faveur d'un
s'organise comme suit. premier ou d'un second agrandissement et de l'édifica-
1.  Un premier mur de briques aurait pu être érigé tion des conciergeries par exemple.
vers 1830, à l'acquisition de la propriété par Nico- Par ailleurs, il faut aussi compter sur les inévitables
las Warocqué. Cette portion (correspondant aux tron- phases de réparation qu'a dû connaître le mur, dont
çons R, S et T sur le plan) se distribuerait dans la partie certaines sont renseignées, quoique de manière laco-
orientale du parc, partant de l'entrée principale (drève) nique. Les archives de la Direction de la restauration
vers la gauche, face à la grille, et se terminant dans les (DGO4 / Département du patrimoine) conservent une
environs de l'actuel centre pour réfugiés (à l'emplace- demande adressée en 1945 par Germaine Faider, alors
ment des anciens bureaux des charbonnages de Marie- conservatrice du Musée, au Ministère des Travaux
mont, remplacés ensuite en clinique spécialisée dans publics de faire réparer le mur du parc de Mariemont
le traitement des maladies du travail minier, avant de qui s'écroule en trois endroits, entre les bureaux des
connaître son affectation actuelle). Charbonnages et la Drève dite de Mariemont.
2. À la faveur des travaux de construction des pavil- Le traitement des données recueillies sur le terrain
lons d'entrée vers 1840 (la grille ayant été fournie en doit permettre d'évaluer et, le cas échéant, corriger les
1839 et la drève percée en 1843), une partie du mur de cinq étapes théoriquement définies par cette première
clôture aurait été érigée, partant vers la droite de l'en- hypothèse.
trée principale et tournant vers le nord (tronçon A). C'est surtout au niveau de l'appareil, du format et du
3. Une troisième portion (tronçons C-G) aurait été type de briques (moulées main ou mécaniques) qu'ap-
aménagée vers 1870. Elle comprend aujourd'hui une paraissent des indications stratigraphiques.
partie extra-muros très escarpée et des enclavements Un autre élément intéressant à mettre en lumière est
correspondant à des habitations privées, leurs dépen- le système de drainage, les deux types principaux étant
dances et leurs jardins. le cylindrique en terre cuite ou la simple ouverture
4. La partie méridionale du parc était propriété des d'une brique sur champ.
Warocqué dès la deuxième moitié du 19e  siècle, en Quant aux couvre-murs, il est délicat de les utiliser
bonne entente avec la Société des charbonnages. Les comme marqueur chronologique. Les portions de mur
parcelles relèvent presque équitablement de l'un et ont manifestement été l'objet de campagnes de recou-
l'autre propriétaire, suivant la technique du damier, vrement indépendantes des élévations, dans le cadre
encore observée de nos jours dans le cas de proprié- d'autres réparations, voire même en-dehors de celles-ci.
tés agricoles par exemple. Si l'un des deux ayants Cela est également valable pour les pieds de mur,
droit décide de modifier une parcelle, l'autre, dont la qui consistent essentiellement en un enduit au ciment,
propriété est contiguë, en est immédiatement averti. dont la liaison avec l'élévation n'est pas assurée : l'enduit
Cette technique permet de verrouiller l'affectation du a pu être appliqué (bien) après l'élévation. Les joints
foncier sans devoir en assumer la totalité des charges. sont également difficiles à interpréter, considérant les
Le dernier descendant, Raoul  Warocqué (1870- campagnes de rejointoyage qui ont immanquable-
1917), annexe et enclave cette zone (tronçons H-Q) ment jalonné la vie du mur depuis son élévation. Les
comprenant les ruines du 18e siècle dans le parc privé mortiers de blocage sont généralement difficilement
familial en 1893. Pour ce faire, il détourne deux voiries accessibles, à quelques exceptions près.
communales, l'une nord/sud, montant de la gare de Un découpage par tronçons a été effectué sur plan en
Mariemont vers La  Hestre, qui sera remplacée par fonction des caractéristiques les plus pertinentes pour
l'actuelle chaussée de Mariemont, et l'autre est/ouest, les distinguer, puis superposé aux portions historiques
située perpendiculairement à l'axe de la cour d'hon- déduites des recherches préalables. L'interprétation
neur et cheminant derrière l'orangerie du 18e siècle. de cette superposition n'est pas aisée. Elle touche à la
5.  La dernière étape d'appropriation du domaine fois aux limites de notre première hypothèse (limite
remonte à 1899 et permet de faire la liaison entre les foncière n'est pas nécessairement limite physique et
109

Époque contemporaine Hainaut

le lot des inévitables réparations qu'a dû subir le mur ment, dont celles de 1870. Cela n'est pas impossible
depuis sa [ses] création[s]), dont il a déjà été ques- naturellement, mais l'aspect logique de la démarche ne
tion. Cela tient aussi à l'examen certes détaillé mais ne suffit pas à la démontrer.
portant que sur le parement et non sur les fondations Les tronçons  O (22  × 6  × 11  cm) et Q (23  × 6  ×
ou le blocage des maçonneries, qui limite l'observation 11 cm) peuvent participer ensemble du même projet,
d'éventuelles connexions stratigraphiques souterraines se situant dans la zone d'extension, donc datée de 1893
ou au sein de la maçonnerie. également.
Malgré ces contraintes, il est néanmoins possible Par ailleurs, on peut émettre sans trop de risque l'hy-
d'établir quelques grands axes d'interprétation. pothèse que la zone datée des agrandissements de 1899
En premier lieu, on peut remarquer l'importance du n'a pas dû être enclavée avant cette date.
tronçon A, homogène, et se distinguant nettement par Par contre, il n'est actuellement pas possible de dater
ses caractéristiques intrinsèques des autres parties. Sa les tronçons R et T. Sont-ils le fruit d'un enclavement
haute taille, le soin apporté à sa construction, la qualité consécutif aux tout premiers investissements privés de
des matériaux mis en œuvre (couvre-mur en pierre 1830 ou de périodes ultérieures ?
bleue, rosaces en fonte à valeur décorative, badigeon ou Pour répondre à ces questions, plusieurs axes de
enduit blanc) correspond bien, dans son programme, recherche pourraient être poursuivis.
au souci manifeste d'ostentation qui a dû présider à D'une part, on peut pointer l'approfondissement des
l'aménagement de la drève, la commande de la grille et recherches dans les archives de la famille Warocqué,
l'élévation des deux pavillons d'entrée encadrant celle- singulièrement les comptes, afin de détecter des
ci. Selon cette interprétation, le tronçon A remonterait dépenses liées à l'élévation ou la réparation de ces
dès lors à 1839 ou aux années qui ont directement maçonneries.
suivi. La confrontation avec la portion « après 1832 » D'autre part, des fouilles menées à la faveur de
du plan de 1906, qui en reprend les mêmes limites, travaux de voirie ou même de campagnes de sondages
conforte cette hypothèse. ponctuels à effectuer sur le tracé du mur, y compris
En second lieu, il faut distinguer les tronçons appareillés à l'intérieur de l'enceinte, pourraient permettre de
en briques mécaniques des tronçons en briques moulées trouver d'autres indices susceptibles d'éclairer les
main. L'utilisation de la brique mécanique est générale- connexions entre tronçons. Ces connexions invisibles
ment associée au 20e siècle, voire à la deuxième moitié de en surface sont peut-être encore perceptibles en sous-
celui-ci. Ce sont donc à des campagnes de réparation qu'il sol  ou dans les blocages. Elles pourraient d'ailleurs
faut rapporter les tronçons C, C', D, E, J, M, P et S. être établies ou confirmées via l'étude des matériaux
Il faut aussi exclure le tronçon H, en briques de récu- (appareils et liants).
pération, qui ne semble pas, par sa facture, participer L'état des lieux a permis de sécuriser l'intervention
d'un projet ancien mais bien plutôt d'un aménagement sur le plan patrimonial. Le monument a été précisé-
récent (liant au ciment). ment enregistré dans son état avant restauration.
Le cortège des portions présumées du 19e  siècle se Comme l'ensemble du domaine, l'aménagement
compose donc comme suit : A, B (partie basse), F, G, du mur correspond à un projet, celui des Warocqué,
I, K, L, O, Q, R et T. Il compte 1 630,75 m et représente qui a évolué au fil du temps et des chefs de famille.
donc 68 % de l'ensemble de l'enceinte. Il est le reflet non seulement de l'extension d'une
Est-ce à dire que près de 70  % du mur de clôture propriété, d'un souci d'appropriation du territoire
se trouve dans sa situation initiale, c'est-à-dire celle raisonné et ostentatoire, mais aussi de la personnalité
élevée sous l'impulsion des différents représentants de de chacun d'eux, surtout, naturellement, de celle de
la famille Warocqué suivant les étapes décrites au sein Raoul Warocqué. C'est grâce à ce dernier que le parc
de notre première hypothèse ? privé devenu public a conquis près de la moitié du
Considérant les différents formats de briques territoire qu'on lui connaît aujourd'hui et ses joyaux
moulées main mis en œuvre, il faut se méfier d'une parmi les plus prestigieux, les vestiges du palais de
interprétation trop rapide allant dans ce sens. Repre- Charles de Lorraine.
nant ces formats, il n'est possible d'assembler théori- Les campagnes de réparation ont permis de mainte-
quement que les tronçons K, L et F (21 × 10 × 6,5 cm). nir le domaine clos en suivant le tracé tel que légué par
Cependant, comme il a déjà été dit, sans connexion Raoul  Warocqué. Les restaurations à venir pourront
stratigraphique entre eux, cette version doit être mise continuer dans ce sens. Elles seront d'autant plus fortes et
sous réserve pour le moment. cohérentes qu'elles pourront s'appuyer désormais sur la
Elle reviendrait en effet à dire que la fermeture du reconnaissance de l'enceinte en tant que témoin historique
parc consécutive au remaniement du domaine privé et archéologique de première importance pour la compré-
en 1893 aurait inclus des portions acquises précédem- hension et la conservation du domaine de Mariemont.
110

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

Bibliographie
■■ Marré-Muls A.-M., Quairiaux  Y., Cokelberghs  J.-P.
&. Vassart  M., 2004. Promenades vertes dans l'entité de
Morlanwelz, Jumet.
■■ Quairiaux Y., Platiau R. &. Bouilliez A., 2005. Marie-
mont côté jardins, Morlanwelz (Monographies du Musée royal
de Mariemont, 13).
■■ Recchia L., 2002. Mariemont au xixe  siècle  : le jardin
paysager de la famille Warocqué. In : Baudoux-Rousseau L. &
Giry-Deloison C. (dir.), 2002. Le jardin dans les anciens Pays-
Bas, Arras, p. 203-217.
■■ Van den Eynde M., 1989. La vie quotidienne de grands bour-
geois au xixe siècle. Les Warocqué, Morlanwelz.
Soignies : l'intérieur de la grande scierie.

Sources
■■ Lettre de Germaine Faider au Ministère des Travaux publics, à l'initiative des aménageurs, qui permettra de les
Archives MRM DGATLP, Direction de la restauration, Beez, présenter au public lors d'évènements futurs.
200104-13-4-Parc. La dalle de béton a permis une conservation remar-
■■ Plan du parc de Mariemont appartenant à Monsieur R. quable du sous-sol du bâtiment et les vestiges ont été
Warocqué. Plan indiquant les différents agrandissements dressé à dégagés sans trop d'entrave. L'opération archéologique
l'échelle de 1250, 11 juin 1906, architecte O. Dessart, Archives du était appuyée par une source historique détaillée décri-
Musée royal de Mariemont. vant le fonctionnement d'une autre scierie de pierre,
■■ Préfecture du Département de Jemappes, 1793-1814, Archives également propriété de Monsieur P.J.  Wincqz, l'usine
de l'État à Mons, BE-A0524 / AEM.10.024. des Trois Planches. Cette source offre des mesures
précises, une description des éléments constitutifs de
la machinerie et de son mode de fonctionnement, ce
qui s'avère être un apport bien utile dans le cas de la
Soignies/Soignies : le Centre des Métiers grande scierie où tous les éléments hors-sol ont prati-
de la Pierre. Sous le béton, les pierres de quement disparu.
la grande scierie Installées dans les angles de la moitié nord de l'édi-
fice, deux paires d'armures de scierie se font face  ; il
s'agit de bâtis en fonte qui soutiennent le châssis porte-
Nicolas Authom lames. Leur plan et leur élaboration générale sont iden-
tiques mais chaque armure a connu des évolutions, des
En janvier 2015, une opération archéologique a été réparations et modifications qui traduisent son histoire
menée dans l'ancienne Grande Carrière Wincqz et son adaptation à la matière première à débiter.
(parc. cad. : Soignies, 1re Div., Sect. B, no 801h ; coord. Chacune se compose à ses extrémités de quatre socles
Lambert  : 129388  est/139591  nord) où le Centre des de fonte, fixés dans la pierre, sur lesquels s'appuient
Métiers de la Pierre verra bientôt le jour. L'intervention les colonnes formant le bâti. Entre ces colonnes est
était localisée dans la grande scierie qui hébergera le posé un dallage de grandes pierres bleues ; une pente
futur atelier des tailleurs de pierre. Ce bâtiment, millé- est créée afin d'évacuer vers des caniveaux extérieurs
simé de 1843, est doté d'une imposante cheminée qui l'eau et le sable utilisés lors du sciage. De part et d'autre
trahit déjà le recours à la machine à vapeur. du dallage et longeant les socles de fonte se trouve le
La mission a consisté en la surveillance du démon- négatif des rails qui permettaient le déplacement des
tage de la dalle de béton, posée dans le bâtiment au chariots supportant les blocs de pierre : depuis la zone
cours des années 1980, lorsqu'il servait d'entrepôt. d'extraction, les chariots pénètrent dans les armures
S'en est suivi le dégagement des vestiges industriels via les baies en arc qui rythment les pignons du bâti-
conservés sous celle-ci, leur enregistrement et le relevé ment. Il y a trois ouvertures par côté, deux de tailles
complet des structures. Ce travail a également offert identiques vers les armures et une troisième plus large :
aux auteurs de projet les informations nécessaires des négatifs de rails y ont aussi été observés mais pas
quant aux endroits privilégiés pour la pose des futures de trace d'armure à cet endroit. Cette voie servait-elle
gaines techniques avant le recouvrement définitif des à acheminer les matériaux nécessaires au fonctionne-
vestiges et la pose du nouveau béton de sol. Une zone ment de la scierie (sable), ou encore le combustible
de vestiges sera recouverte d'une surface modulable, destiné à la machine à vapeur ?
111

Époque contemporaine Hainaut

Un demi-cylindre en briques recoupé, en arrière-plan, par un


Détail d'une armure de scierie. mur plus récent.

Au centre du bâtiment, entre les armures, l'espace Une autre découverte, qui reste assez énigmatique
est occupé par la machinerie proprement dite mais au moment de la rédaction de ces lignes, occupe
les différents arbres, bielles, poulies et manivelles pratiquement un quart de la surface du bâtiment  :
qui se trouvaient hors-sol n'ont pratiquement laissé ce sont deux demi-cylindres parallèles et espacés de
aucun vestige. Par ailleurs, cette zone a été fortement 1,60 m, longs de 10 m pour un diamètre d'ouverture
remaniée, une grande citerne en béton y a été creu- de 1 m, construits en briques sur chant avec des parois
sée, des vannes, des tuyaux et quelques caniveaux élevées en briques réfractaires. Chacun débouche,
ont été installés dans de solides massifs de briques. à la base du pignon est du bâtiment, sur une sorte
Une importante cavité, assez étroite, suggère qu'une de chambre rectangulaire beaucoup plus profonde
roue d'un diamètre important (±  2  m) y était en qui se prolonge hors de la scierie. Des vestiges d'arcs
fonction, sans doute maintenue dans les élévations voûtés, observés dans le pignon, sont sans doute le
en briques qui l'enserrent, où a été observé un témoin de la couverture de ces chambres. À la diffé-
aménagement creux qui devait accueillir un axe de rence des demi-cylindres, l'action du feu se distingue
rotation. Cette roue intrigue et il n'est pas possible clairement sur les briques des deux chambres, ce qui
à l'heure actuelle de savoir si elle fait partie d'un suppose l'emplacement de foyers, peut-être destinés
mécanisme hydraulique antérieur à l'utilisation de à alimenter des chaudières placées dans ces sortes de
la vapeur (on sait que ce type d'énergie a été utilisé berceaux en briques.
dans l'usine des Trois Planches) ou si, activée par Enfin, un puits, se trouvant entre les deux armures
une courroie ou une bielle, elle fait partie du moteur situées côté est, a été exploré par Olivier  Vrielynck
à vapeur. (Direction de l'archéologie) et Luc  Funcken (Direc-
tion de la Géotechnique). D'une section carrée,
étroite en surface (0,95 m de côté), le conduit du puits
aboutit à 4 m de profondeur sur une voûte en briques
(4,20  m  ×  3,60  m) qui surmonte une cavité, taillée
dans la roche, profonde de 18,50 m. L'usage de ce puits
est antérieur à la scierie et il faut vraisemblablement
l'associer au front de carrière qui jouxte le bâtiment au
nord-est, servant peut-être à l'exhaure. La construc-
tion des armures de scierie au-dessus de cette cavité,
auxquelles peuvent être associés les vestiges d'une
probable pompe à eau, en connexion par une galerie
avec le puits, suggère que dans un second temps, le
puits a servi de réserve d'eau dont il ne faut rappeler la
nécessité dans le processus de sciage de la pierre.
L'emplacement présumé de la roue avec à l'arrière l'aména- Ces quelques lignes résument bien peu les
gement pour fixer l'axe de rotation.
nombreuses surprises qui ont accompagné la fouille
112

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

Soignies, grande scierie : exploration du puits.

du sous-sol de la grande scierie. Si les sources écrites


permettent de restituer le schéma de fonctionnement
et les activités en surface, le sol regorge de bien des
zones d'ombre. En effet, de nombreuses structures,
ouvertures, canalisations se développent sous le bâti-
ment et se prolongent hors de celui-ci. Les prochaines
étapes de réaménagement du site seront l'occasion
d'autres surveillances et fouilles archéologiques qui
permettront de compléter les données et répondre à
certaines questions.
113

Toutes périodes Hainaut

TOUTES PÉRIODES
Aiseau-Presles/Presles : le site
archéologique de « La Taille Marie »,
campagne de fouille 2015

Nicolas Paridaens de mètres, est liée à des phénomènes d'érosion et


de ruissellements dont la formation remonte à l'Âge
Introduction du Bronze. En effet, la phase la plus ancienne de ce
vallon est caractérisée par un paléochenal ayant livré
Pour la cinquième année consécutive, une campagne du mobilier protohistorique (Paridaens & Leclercq,
de fouilles a été menée durant l'été 2015 au lieu- 2016). Un réseau de drainage en pierre a été mis au
dit  «  La Taille Marie  » (parc. cad.  : Aiseau-Presles, jour dans la partie septentrionale du secteur  H. Il
2e Div., Sect. B, no 13M2 ; coord. Lambert 72 au niveau complète les découvertes réalisées en 2014, et pour
du temple : 164665 est/121148 nord). Ces recherches, lesquelles nous avions envisagé une datation pouvant
financées par le Service public de Wallonie et la remonter à l'époque romaine, du moins pour l'une
Faculté de Philosophie et Lettres de l'Université des structures (F48). Les observations stratigra-
libre de Bruxelles, avaient pour objectifs de finaliser phiques de 2015 permettent de réfuter cette datation
la fouille du secteur occidental du sanctuaire haute. Une attribution aux Temps modernes semble
(secteur  H) et d'évaluer le reste de la parcelle plus vraisemblable, lors du défrichement et de la
(tranchées d'évaluation I à N) afin d'estimer l'emprise mise en culture de la parcelle au tournant des 18e et
générale du site archéologique. On peut maintenant 19e siècles, même si on ne peut exclure que ce réseau
considérer que le site gallo-romain de «  La Taille remonte au Moyen Âge.
Marie » a été exploré de manière exhaustive. Deux fosses gallo-romaines ont été découvertes dans
ce secteur. La première, F54, est une petite structure
Le secteur occidental de plan irrégulier et peu profonde, à mettre en rela-
tion avec les autres fosses détritiques découvertes plus
Les secteurs E et H correspondent à une zone marquée à l'est dans le vallon. La seconde, F47, située dans
par un très faible vallon, orienté sud-ouest/nord-est, l'angle nord-est du secteur H, avait déjà été partielle-
en partie dégagé en 2014 (Paridaens et al., 2015). ment dégagée en 2014. Cette grande fosse sub-rectan-
Cette dépression, aujourd'hui large d'une trentaine gulaire, interprétée comme une fosse d'extraction de
limon, a livré de nombreux fragments
de céramique permettant de dater son
comblement durant la seconde moitié du
2e siècle.
Des traces d'activités métallurgiques se
concentrent (secteurs  H et I) au sein du
vallon formant la bordure occidentale
du sanctuaire. À l'époque romaine, suite
aux dépôts successifs de colluvions, ce
vallon est caractérisé par un encaissement
nettement moins marqué qu'à l'Âge du
Bronze mais très ouvert (environ 12  m
de large). L'atelier semble toutefois avoir
tiré profit de cette topographie, les foyers
étant installés côte à côte sur le versant
méridional du vallon et l'aire de rejet se
situant quant à elle en vis-à-vis des foyers,
sur l'autre versant. Quatre foyers (F57,
F58, F59 et F60) ont été jusqu'à présent
« La Taille Marie » : plan cadastral avec les secteurs fouillés de 2011 à 2014 (A à dégagés mais la présence de structures
G, en gris clair) et en 2015 (H à N, en gris foncé), © CReA-Patrimoine / ULB.
supplémentaires à l'ouest est envisageable
114

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

eu égard à l'étendue de la zone de rejets. Les foyers surtout de scories de réduction semble donc impliquer
présentent un plan allongé, légèrement piriforme. Leur une réduction du minerai sur place, l'exploitation en
creusement, à fond plat et parois verticales, mesure en matière première est quant à elle aussi envisageable
moyenne 0,70 sur 0,90 m de large, pour une vingtaine de à l'échelle locale puisque du minerai est largement
centimètres de profondeur. Le gueulard est aménagé en disponible, sous diverses formes, dans la région. On
plan incliné. Les parois des structures sont caractérisées ne peut s'empêcher de mettre en relation cette activité
par le limon en place rubéfié sur quelques centimètres de métallurgie avec la présence au sein de l'aire sacrée
d'épaisseur. Cette rubéfaction ne débute en général de plusieurs centaines de socs d'araire miniatures en
qu'à quelques centimètres du fond de la structure. Le fer et dont la grande majorité a été enfouie aux 2e et
comblement est composé de limon gris-noir fortement 3e  siècles. Le caractère unique de ces objets religieux
chargé en fragments de charbon de bois et comportant avait déjà permis de supposer qu'ils étaient fabriqués
quelques fragments de parois rubéfiées. Différents au sein du sanctuaire, voire dans un environnement
indices, comme la présence d'un culot ferreux au sein immédiat. La production d'objets sacrés en métal au
de l'une de structures, nous incitent à associer ces foyers niveau même des sanctuaires demeure exceptionnelle-
à la chaîne opératoire du travail du fer, plus particuliè- ment documentée par l'archéologie.
rement aux étapes de post-réduction, comme l'épura-
tion ou le forgeage. Cette hypothèse est évidemment Les dépôts F64 et F65
renforcée par l'aire de rejet découverte à proximité.
Cette aire de rejet est située à quelques mètres des Deux fosses présentant des similarités ont été décou-
quatre foyers, sur l'autre versant du petit vallon. Il s'agit vertes dans la tranchée d'évaluation  L. Elles ont été
d'un niveau de remblai d'une dizaine de centimètres creusées face au temple, à 36 m au sud de cet édifice.
d'épaisseur s'étendant, à ce stade des recherches, sur une La forte érosion du terrain à cet endroit explique que
zone d'une quinzaine de mètres de diamètre, puisque les structures ne sont que faiblement conservées.
lors de l'évaluation, cette couche a encore été repérée Distantes de 2,60 m, elles semblent avoir été creusées
dans la tranchée I, 9 m plus à l'ouest. Ce niveau (US183) selon une logique commune, les côtés s'alignant de
est caractérisé par un sédiment limoneux brun foncé, façon parallèle. La fosse F64 présente un plan carré
compact, riche en scories de fer, fragments de tuiles, bien marqué, de 1,10 m de côté. Le creusement, à fond
tessons de céramique et de verre et a été daté, de façon plat, est conservé sur 12 cm. Le comblement est consti-
préliminaire, des 2e et 3e siècles de notre ère. 1 075 scories tué de limon brun-gris clair mélangé, correspondant
de tous types ont été découvertes : scories de réduction, au sédiment d'origine redéposé. Dans la partie nord-
culots ferreux, culots argilo-sableux, scories internes, ouest de la fosse étaient rassemblés quelques fragments
scories de forge… Quelques battitures ont également été de céramique ainsi qu'un amas de sédiments calcinés
observées. 68 polissoirs, aiguisoirs et pierres à aiguiser de 10  ×  20  cm de côté. Le mobilier comprend un
proviennent également de ce secteur. L'association de fond de marmite altéré par le feu, un fond de gobelet
ces polissoirs et aiguisoirs avec les nombreuses scories à dépressions en céramique métallescente d'Argonne
de fer permet de rattacher ces objets au travail du fer ainsi qu'un fond de récipient en pâte rosâtre (cruche ?).
(Paridaens & Darchambeau, 2016). On pensera plus Ces récipients datent cet ensemble du 3e siècle. Étant
précisément aux étapes de polissage et d'abrasion du donné qu'il s'agit exclusivement de fonds de récipients
métal après sa mise en forme par martelage ou encore à et vu l'érosion de la structure, il est possible que les
l'affutage d'outils à tranchants. vases aient été complets lors de leur dépôt.
Sur base du mobilier et des structures découverts en La fosse F65 présente un contour moins net, vague-
2015, différentes phases de production du fer semblent ment quadrangulaire, de 1,10  m de côté. Le fond du
attestées : l'opération de réduction semble avérée par creusement est également plat, conservé sur 8 cm. Le
la présence de très nombreuses scories internes et comblement est constitué de limon brun foncé chargé
externes de réduction bien qu'aucune structure ne de particules végétales calcinées. L'aspect homogène
peut néanmoins, à ce stade de la fouille, être rattachée à ainsi que la présence de petites pierres, fragments de
cette phase. Les opérations de post-réduction (cinglage tuiles et tessons épars de céramique permettent d'in-
ou épuration) sont aussi illustrées, avec quelques culots terpréter ce remblai comme du limon humifère. Un
ferreux et culots argilo-sableux. Les petits foyers piri- dépôt charbonneux de 10 × 30 cm, une passoire et un
formes pourraient, avec prudence, être aussi rattachés poêlon en céramique, encore empilés au moment de
à cette étape. Enfin, les activités de forgeage et de façon- leur découverte, étaient concentrés dans la partie sud
nage sont représentées par quelques battitures et scories de la fosse. Ces deux récipients imitent de la vaisselle
de forge ainsi que par les très nombreux polissoirs et métallique bien connue, généralement en alliage de
aiguisoirs. Si la présence d'un atelier de métallurgie et cuivre. Dans l'Antiquité, la passoire et la casserole en
115

Toutes périodes Hainaut

métal, qui s'emboîtaient, constituent deux accessoires terpréter ces structures comme des tombes  : fosses
liés à la préparation du vin, l'un pour puiser les breu- carrées à fond plat, amas cendreux, zones vides, pots
vages, l'autre pour filtrer les aromates qu'on y avait fait complets, présence d'un service lié au vin, sont autant
macérer. Nos exemplaires imitent parfaitement leurs de caractéristiques que l'on retrouve dans les tombes
équivalents en métal, types Künzl ND30 et ND31, en à incinération. La présence d'une tombe à proximité,
usage surtout au 3e siècle apr. J.-C. Même si les poêlons bien qu'hypothétique, renforce encore quelque peu
et passoires sont bien attestés en céramique, ce type cette théorie. Toutefois, l'absence de toute esquille
d'imitation semble inédit. On peut penser que ces osseuse est évidemment problématique, bien que des
objets ont été fabriqués à dessein, comme offrande à fosses à cendres, dépourvues de ce type de matériau,
faible coût en vue d'un usage religieux. se rencontrent aussi au sein des nécropoles à inciné-
Lors des sondages menés durant l'hiver 1987-1988 ration. En outre, la présence de tombes à proximité
par Jean  Gabriel et l'Office de Recherches archéolo- directe d'un sanctuaire n'est pas attestée ailleurs. En
giques (O.R.A.), une tombe semble avoir été décou- revanche, les dépôts de vaisselle métallique, ici imitée
verte. Les notes de fouilles du 19  décembre 1987 en terre cuite, sont quant à eux omniprésents dans
renseignent un sondage de 1 m² où furent découverts les sanctuaires. D'autres fosses destinées à recevoir
un  grand gobelet à dépressions, écrasé et, dans le les restes de cérémonies religieuses ou les offrandes
gobelet, quelques ossements calcinés. D'autres notes réservées aux dieux ont évidemment été découvertes
réfèrent à la nécropole sud. D'après le plan des fouil- au sein du sanctuaire (Paridaens & Darchambeau,
leurs, ce sondage du 19  décembre se situe à proxi- 2014). En définitive, il pourrait s'agir de dépôts votifs
mité directe des fosses F64 et F65 et il s'agit très situés en périphérie du sanctuaire, bien qu'une nature
probablement d'un des cinq sondages repérés lors funéraire ne soit pas complètement à exclure.
de nos recherches, en 2015, quelques mètres à l'est
de ces dernières. Dès lors, comment interpréter cet Conclusion : « La Taille Marie »,
ensemble de découvertes ? Les deux fosses F64 et F65 un sanctuaire de villa
présentent des caractéristiques communes  : orienta-
tion, forme, dimensions et comblement. La présence Les fouilles réalisées de 2011 à 2015 ont permis de
de poches cendreuses et de vases complets groupés, circonscrire l'extension générale du sanctuaire de « La
voire empilés, indique que nous sommes en présence Taille Marie », installé de manière judicieuse sur une
de dépôts mais certains indices permettraient d'in- petite proéminence dominant tout le vallon d'Aiseau.

Plan général du site de « La Taille Marie », toutes époques confondues, © CReA-Patrimoine / ULB.
116

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Dépourvu de mur d'enceinte, il est toutefois limité Avec la collaboration d'Antoine  Darchambeau,
de manière naturelle, à l'est par la rupture de pente Stéphane  Genvier, Claude  Jacques, Fanny  Martin,
marquant la vallée de la Biesme, au nord par un talus Charlotte Van Eetvelde & Olivier Van Eyck.
et à l'ouest par un petit vallon. Si le temple est de taille
moyenne, avec 12,50  m de côté, l'aire sacrée, dont la Remerciements
surface a été aménagée à partir du 2e siècle, s'étend sur
minimum 20 a, avec un bâtiment annexe sur poteaux. L'équipe de fouille, constituée de chercheurs du
Un secteur artisanal s'organise par ailleurs aux 2e et CReA-Patrimoine (A.  Darchambeau, F.  Martin),
3e siècles dans le vallon occidental, où un atelier lié au de collaborateurs bénévoles (C.  Angeli, C.  Dawant,
travail du fer a été découvert. Certains indices laissent C. Delaere, S. Genvier, G. Gilbert, S. Guarella, E. Hodeige,
penser qu'il pourrait s'agir de l'atelier de production C. Jacques, R. Nicolas, O. Van Eyck) et d'étudiants de
des socs d'araire votifs découverts dans le sanctuaire. l'ULB (A. Dieu, L. Dikenda, T. Coussement, C. Deprez,
Quoi qu'il en soit, les structures ainsi que le mobilier D.  Ebertitan, C.  Fortemps, L.  Kervyn, A.  Lecomte,
qui leur est associé ouvrent d'intéressantes perspec- J. Malvoz, N. Petit, E. Vanderhaeghe, C. Van Eetvelde) ;
tives, tant pour la caractérisation des étapes de produc- la Société royale d'Archéologie de Bruxelles
tion du fer dans nos régions que dans la manufacture (F. Legat) ; les propriétaires et exploitants des parcelles
d'objets religieux. fouillées (C.  et J.  d'Oultremont, E.  de  Dorlodot et la
Les niveaux précoces, concentrés à l'emplacement Société de Gestion de la Sambre s.a.)  ; J.  Plumier,
du temple, mettent aussi en lumière l'organisation d'un A. Guillot- Pingue, M. Soumoy et C. Frébutte (SPW /
site religieux de la cité des Tongres au tout début de DGO4) pour l'octroi des subsides et le suivi de projet ;
l'Empire, soit à une période demeurant mal connue. La J. Pierard et sa famille pour leur aide logistique et leur
reprise programmée des fouilles dès 2016 au niveau de disponibilité ; L. Nonne, C. Dawant et E. Bouyer pour
la villa, dégagée une première fois en 1875, permettra les restaurations de mobilier ; N. Bloch et A. Stoll pour
de mettre en parallèle l'évolution du sanctuaire avec les dessins de mobilier et infographies  ; W.  Leclercq
cette dernière. pour l'expertise du mobilier protohistorique ; la Ville
En conclusion, les fouilles auront permis de et le Musée archéologique de Namur, dépositaires
dégager de manière exhaustive un sanctuaire de des collections  ; l'asbl des Œuvres paroissiales de
villa et donc vraisemblablement de nature privée. Farciennes ainsi que tous les collègues et étudiants
Ce type de lieu de culte, lié à de grands domaines ayant participé aux travaux de post-fouille.
ruraux et parfois qualifié de «  rural  », demeure
peu connu archéologiquement. Cette interpréta- Bibliographie
tion repose évidemment sur la présence d'une villa ■■ Künzl E. (dir.), 1993. Die Alamannenbeute aus dem Rhein
associée dans les environs proches, alors que, bien bei Neupotz. Plünderungsgut aus dem römischen Gallien, Mainz
souvent, l'emprise des fouilles est limitée soit au (Monographien Römisch-Germanisches Zentralmuseum
sanctuaire, soit à la villa. Dans la cité des Tongres, Mainz. Forschungsintitut für Vor- und Frühgeschichte, 34).
on en connaît par exemple à Matagne-la-Petite, ■■ Paridaens N. & Darchambeau A., 2014. Le sanctuaire
Gemechenne, Anthée mais il devait en exister bien gallo-romain de « La Taille Marie » à Aiseau-Presles (Ht). Troi-
d'autres. Si la gestion de ces chapelles et l'organisa- sième campagne de fouilles (2013), Signa, 3, p. 133-139.
tion des cultes qui s'y pratiquent incombaient aux ■■ Paridaens N. & Darchambeau A., 2016. Le site archéo-
propriétaires du domaine, des sources littéraires logique de «  La Taille Marie  » à Aiseau-Presles. Rapport des
indiquent que certains de ces sanctuaires étaient fouilles 2015, Signa, 5, p. 115-125.
communautaires et fortement fréquentés. À Aiseau- ■■ Paridaens N., Darchambeau A., Genvier S., Martin F. &
Presles, le nombre d'offrandes, notamment les Venant N., 2015. Le sanctuaire de « La Taille Marie » à Aiseau-
centaines de socs d'araire déposés autour du temple, Presles. Campagne de fouilles 2014, Signa, 4, p. 207-215.
laissent également penser que le culte n'était pas ■■ Paridaens N. & Leclercq W., 2016. Mobilier céramique de
exclusivement réservé aux habitants du domaine. l'âge du Bronze issu d'un paléochenal à Aiseau-Presles – «  La
Taille Marie  » (Ht., Bel.), Lunula. Archaeologia protohistorica,
La nature originale des offrandes renvoie peut-être
XXIV, p. 97-100.
à une divinité locale, dont les fonctions spécifiques
ont pu attirer des pèlerins, membres d'une famille
ou d'une communauté en lien avec la villa. On
notera encore la longévité de ces rites, que nous
serions évidemment tentés de mettre en lien avec la
fertilité, durant toute l'existence du sanctuaire, du
1er siècle avant notre ère jusqu'au 4e siècle apr. J.-C.
117

Toutes périodes Hainaut

Ath/Ath : fouilles préventives sur le site Tous ces murs s'appuient sur un mur plus ancien
de l'ancienne sucrerie dégagé sur une vaste superficie en 2015. Celui-ci est
doté d'une face parementée avec un léger fruit au nord.
Il descend à plus de 3,5 m de profondeur, sans que sa
Isabelle Deramaix, Adrien Dupont base n'ait pu être atteinte. Il pourrait correspondre à la
et Pierre-Philippe Sartieaux limite de l'ancien fossé maintenu ouvert après la démo-
lition des ouvrages externes de la fortification hollan-
En 2009, lors de l'assainissement du site de l'ancienne daise en 1852 (Ducastelle, 1984) avant le creusement
sucrerie d'Ath, un mur imposant a été relevé par le du canal Ath-Blaton entre 1864 et 1865.
Service de l'archéologie de la Direction extérieure Dans le deuxième secteur, au sud-ouest du site,
du Hainaut  1 (DGO4  / Département du patrimoine) un massif quadrangulaire et un mur associé ont été
(Deramaix & Dupont, 2011). Les parcelles (Ath, dégagés. Ces constructions témoignent d'une activité
1re Div., Sect. B, nos 811F102, 811C103, 811B103) se situent industrielle relativement récente mais non identifiée.
dans l'extra-muros de la cité médiévale et ont été occu- Le troisième secteur a livré deux ensembles de
pées de la fin du 17e siècle jusqu'au 19e siècle par des vestiges : d'une part, ceux d'une place d'armes rentrante
ouvrages militaires externes (Deramaix, Dupont & avec réduit et, d'autre part, une construction posté-
Sartieaux, 2015  ; à paraître  ; Dugnoille & de  Waha, rieure de type industriel, vraisemblablement un silo à
1983). Le projet de construction de sept immeubles betteraves.
à appartements à cet endroit nécessitait donc de La place d'armes semble correspondre à l'emplace-
nouvelles investigations archéologiques. Celles-ci ont ment de celle édifiée sous les dirigeants autrichiens
été entreprises en janvier et février 2015 par le même après 1720 (Dugnoille, 1984, p. 27-29). Le gabarit, la
service qu'en 2009. Elles ont débuté par une évaluation taille des pierres et l'appareil des maçonneries corres-
des terrains sous forme de longues tranchées réparties pondent à cette période. Démoli partiellement en
tous les 10 m. Trois secteurs ont fait l'objet de vastes 1745 (Dugnoille & de Waha, 1983, p. 189), cet ouvrage
décapages. aurait été récupéré par les Hollandais lors du redres-
Le premier secteur se trouve dans la partie septen- sement de la place forte entre 1816 et 1825 (Dugnoille
trionale du site, près du mur exhumé en 2009. Ce mur & de Waha, 1983, p. 186-189 ; Godet, 1973). En effet,
a d'abord été interprété comme pouvant appartenir à la des traces de reconstructions sont assez perceptibles
fortification hollandaise (Deramaix & Dupont, 2011), sur les vestiges notamment des réfections en brique
mais les découvertes réalisées en 2015 montrent qu'il et la présence de pierres taillées à la boucharde ou à la
s'agit d'un mur de clôture de la sucrerie. Il aurait été pointe, encadrées d'une ciselure, technique propre au
agencé entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle. 19e siècle. L'analyse des rapports des travaux mensuels
Il est associé non seulement à une plateforme destinée conservés montre une interruption des travaux entre
à la grue à vapeur, déjà relevée en 2009, mais aussi à 1818 et 1825 qui pourrait correspondre à la mise au
deux autres murs parallèles observés au sein de la jour des vestiges autrichiens par les Hollandais et à
parcelle. Ces aménagements sont reliés entre eux par la réintégration de ces fondations dans une nouvelle
des tirants qui en outre traversent le mur de clôture. Ils construction. En outre cette hypothèse est étayée
ont été réalisés vraisemblablement vers 1922 lors d'une par une modification des plans de la place d'armes
réorganisation des raccordements ferroviaires (Dera- dès 1825 (Deramaix, Dupont & Sartieaux, 2015  ; à
maix & Dupont, 2011). paraître).

Vue du mur de limite du fossé aménagé après le démantè-


lement de la fortification hollandaise en 1852. Vue du probable silo à betteraves.
118

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Ath, ancienne sucrerie : vue aérienne de la place d'armes prise depuis le sud-est : 1. Tronçon occidental ; 2. Tronçon oriental encore
voûté transformé en citerne ; 3. Annexe donnant accès du réduit vers le fossé ; 4. Nouvel accès vers le fossé.

La place d'armes se compose des deux fossés du à l'intersection des deux segments et un caniveau en
réduit disposés en angle de 140°. Ces fossés sont limités brique s'y déverse.
sur chaque segment par deux murs parallèles. Le tron- Au nord-ouest, une construction industrielle s'est
çon occidental (1) a été dégagé sur toute sa longueur, appuyée contre l'un des murs externes de la place
soit 42 m. L'autre (2) a été observé sur près de 18 m. d'armes. Incomplète, elle mesure au moins 12  m de
Du côté septentrional les murs des fossés sont renfor- long sur 2,80 m de large. Elle est réalisée en brique. Les
cés par des piliers disposés tous les 5,20 m. Leur socle, murs des longs côtés sont disposés à 45° contre les sédi-
réalisé en pierre calcaire, est chaîné au mur. La partie ments encaissants. Plusieurs murs successifs forment
supérieure présente le départ de deux arcs de décharge des cloisons. La forme en entonnoir de cette structure
façonnés en brique. Cette partie en brique appartient à évoque celle de silos à betteraves que l'on trouvait
la phase d'occupation hollandaise. au 19e  siècle (Blachette & Zoéga, 1826, p.  152-157  ;
L'accès du réduit vers le fossé se fait par une construc- Dureau, 1886, p. 379 ; Figuier, 1873-1877, p. 93).
tion annexe (3) comprenant un couloir. Ce passage
est bordé d'une petite pièce ayant vraisemblablement Bibliographie
servi de magasin à poudre. Une grande partie de ces ■■ Blachette L.-J. & Zoéga F.S., 1826. Manuel du fabricant de
aménagements semblent dater de l'époque hollandaise sucre et du raffineur ou Essai sur les différens moyens d'extraire le
comme en témoignent l'usage massif de la brique et les sucre et de le raffiner, Paris.
remarquables pierres de taille qui forment les chaînes ■■ Deramaix I. & Dupont A., 2011. Ath/Ath  : vestiges des
des piédroits des baies. fortifications hollandaises sur le site de l'ancienne sucrerie,
Après l'arasement des fortifications hollandaises, les Chronique de l'Archéologie wallonne, 18, p. 72-73.
fondations de la place d'armes ont encore été utilisées. ■■ Deramaix  I., Dupont  A. & Sartieaux  P.-P., 2015. Ath  :
Une voûte en brique en plein cintre a été agencée sur fouilles préventives sur le site de l'ancienne sucrerie. In  :
les deux segments de fossés. Seul le tronçon oriental a L'Archéologie en Hainaut occidental 2009-2015, catalogue
conservé aujourd'hui cette couverture (2). Un nouveau d'exposition, Ath (Amicale des Archéologues du Hainaut
occidental, XIX), p. 170-174.
couloir d'accès (4) assez étroit a été ajouté au sud-ouest
du tronçon occidental du fossé. Lors de l'activité de la
sucrerie le segment oriental du fossé a été transformé
en citerne. Un mur est venu condamner l'ouverture
119

Toutes périodes Hainaut

■■ Deramaix  I., Dupont  A. & Sartieaux  P.-P., à paraître.


L'archéologie et la revitalisation urbaine. L'ancienne sucrerie à
Ath : des fortifications au site résidentiel du 21e siècle. In : Patri-
moines. Mélanges d'histoire et d'archéologie offerts à Jean-Pierre
Ducastelle, Ath.
■■ Ducastelle J.-P., 1984. Le démantèlement des fortifications
et l'aménagement urbanistique d'Ath (1852-1896). In  :
Les enceintes urbaines en Hainaut, les fortifications d'Ath,
supplément au catalogue général, Ath, Cercle royal d'Histoire et
d'Archéologie d'Ath et de la Région et Musées athois, p. 55-97.
■■ Dugnoille J., 1984. La destinée des fortifications de Vauban
à Ath 1674-1803. In : Les enceintes urbaines en Hainaut, les forti-
fications d'Ath, supplément au catalogue général, Ath, Cercle
royal d'Histoire et d'Archéologie d'Ath et de la Région et Musées
athois, p. 15-54. Ath, site des Haleurs : vue générale d'une des zones en cours
■■ Dugnoille J. & de  Waha M., 1983. Ath. In  : Les enceintes de fouille.
urbaines en Hainaut, catalogue d'exposition, Bruxelles, Crédit
Communal, p. 183-198.
de bâtiments est rendue difficile. On dénombre
■■ Dureau G., 1886. Traité de la culture de la betterave à sucre, toutefois l'emplacement d'au moins deux habitats.
Paris (2e édition).
Près de 150  structures appartenant à cette période
■■ Figuier L., s.d. (1873-1877). L'industrie du sucre. In  : Les ont été recensées. Un premier examen du matériel
merveilles de l'industrie ou description des principales indus- attribue l'occupation au groupe de Blicquy. Cepen-
tries modernes, 2. II. Industries chimiques : le sucre, le papier, les
dant quelques structures semblent livrer du matériel
papiers peints, les cuirs et les peaux, le caoutchouc et la gutta-
percha, la teinture, Paris, p. 1-148.
davantage rubané. Le secteur contenant ces fosses sera
exploré en 2016.
■■ Godet J., 1973. Fortifications et bâtiments militaires créés à
Le site, toujours en cours de fouille lors de la rédac-
Ath sous le régime hollandais (1815-1830), Bulletin du Cercle
d'Histoire et d'Archéologie d'Ath et de la Région, 36, p. 188-293. tion de cette notice, est donc déjà très prometteur.
Pour la vallée de la Dendre, il s'agira du plus grand
village de cette période étudié dans la région (Hauzeur,
2009, p.  130). En outre, il constitue le premier gise-
ment établi le long du bras oriental du cours d'eau
Ath/Ath : fouilles préventives sur le site (Constantin & Burnez-Lanotte, 2008). Tout comme le
des Haleurs site d'Irchonwelz « Trau al Cauche » (Demarez, Dera-
maix & Wegria, 1992), l'occupation se situe à 150 m du
ruisseau, sur un léger plateau.
Isabelle Deramaix, Dolores Ingels Outre cette implantation néolithique importante,
et Olivier Collette des fosses d'époques romaine et médiévale ont été
repérées. De même l'ancien chemin menant d'Ath à
Dans le cadre du vaste projet immobilier des Haleurs Chièvres a été identifié ainsi que d'autres voies péri-
(parc. cad. : Ath, 1re Div., Sect. C, nos 221C, 221B, 242X, phériques. Ces indices laissent supposer une relative
238K, 242D2, 241G, 268F, 242Z, 269G, 242 et 238G), des continuité d'occupation depuis la période néoli-
fouilles préventives ont été entamées en mai 2015 par thique. Ces observations sont fondamentales pour
le Service de l'archéologie de la Direction extérieure la compréhension du développement la cité athoise.
du Hainaut 1 (DGO4 / Département du patrimoine). En effet, les recherches en cours se trouvent à peine
Les recherches se sont concentrées sur les secteurs à 500  m du bourg primitif de la commune, appelé
devant être aménagés en 2016 afin de ne pas entraver « Vieux Ath », où une église était dédiée à saint Julien
le bon déroulement des futurs travaux. La superficie de Brioude dont le culte s'est développé à l'époque
explorée par des sondages systématiques (longues mérovingienne. L'autel de l'église est connu dès 1076
tranchées réparties tous les 10  m) couvre un peu (Dupont, 2009) ; cependant le toponyme « Ath » est
plus de 3 ha soit plus d'un tiers de la surface globale d'origine celte, antérieur à la romanisation. La pour-
impactée. suite des fouilles sur les autres parcelles du projet,
Un vaste site daté du Néolithique ancien a ainsi été situées en direction de cet endroit, pourrait donc
repéré. Il s'étend sur environ 1 ha, mais seulement 65 % livrer de nombreuses informations sur les origines
de cette surface ont été fouillés en 2015. L'érosion est de la ville.
relativement importante par endroits et l'identification Avec la collaboration d'Adrien Dupont
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Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Bibliographie fracturée. Il a été réalisé après le bris de la pièce car sa


■■ Constantin C. & Burnez-Lanotte L., 2008. La mission forme n'a pas été affectée par la fracture. En outre, son
archéologique du ministère des affaires étrangères français en axe est oblique à l'allongement de la pierre (B) alors
Hainaut et en moyenne Belgique  : bilans et perspectives. In  : que, s'il avait été percé lorsque la pièce était complète,
Burnez-Lanotte  L., Ilett  M. & Allard  P. (dir.), Fin des il aurait été perpendiculaire à celle-ci pour réduire
traditions danubiennes dans le Néolithique du bassin parisien et l'espace à traverser. Le trou de suspension, parfaite-
de la Belgique (5100-4700 av. J.-C.), Paris (Mémoire de la Société ment circulaire, mesure environ 3 mm dans sa partie la
préhistorique française, XLIV), p. 35-56.
plus étroite. Il a sans doute servi à passer un lien pour
■■ Demarez L., Deramaix I. & Wegria M., 1992. Nouvelle suspendre l'objet à la ceinture ou le pendre autour du
découverte blicquyenne en Hainaut occidental, Notae Praehis-
cou. On n'y relève cependant aucun émoussé, échan-
toricae, 11, p. 103-110.
crure ou sillon attestant de l'usage prolongé d'une
■■ Dupont A., 2009. Ath-Chièvres-Lessines. In  : Mariage  F.
attache. Cela suggère que l'objet a été peu utilisé, voire
(coord.), Desmaele B. & Cauchies J.-M. (dir.), Les institutions
pas du tout, après son percement ; l'essentiel des traces
publiques régionales et locales en Hainaut et Tournai/Tournaisis
sous l'Ancien Régime, Bruxelles, Archives générales du Royaume
d'usure, décrites ci-après, seraient antérieures au trou
(Miscellanea Archivistica, Studia, 119), p. 293-306. de suspension.
Les quatre faces convergent faiblement vers l'extré-
■■ Hauzeur A., 2009. Céramique et périodisation  : essai de
sériation du corpus blicquien de la culture Blicquy/Ville- mité conservée dont la largeur n'est plus que de 1,1 cm.
neuve-Saint-Germain. In  : Burnez-Lanotte  L., Ilett  M. & Cette dernière comporte quatre petites facettes d'usure
Allard P. (dir.), Fin des traditions danubiennes dans le Néoli- de forme triangulaire, planes ou légèrement convexes,
thique du bassin parisien et de la Belgique (5100-4700 av. J.-C.), conférant ainsi une forme pyramidale à l'extrémité
Paris (Mémoire de la Société préhistorique française, XLIV), de l'objet. La pointe de la «  pyramide  » est convexe
p. 129-142. et fortement émoussée. Des entailles transversales
sont visibles sur une des arêtes de la pierre (A). Dans
son ensemble, l'outil reste, toutefois, peu utilisé. Des
marques fraîches à la surface de l'objet témoignent de
Belœil/Quevaucamps : pierre à aiguiser dégâts liés aux activités agricoles récentes.
médiévale ? La forme de cette pierre ainsi que les quelques
traces d'usure repérées sur la pointe et les arêtes nous
conduisent à l'identifier comme une pierre à aiguiser.
Jean Dufrasnes, Éric Goemaere, Serge Parent De petites facettes, comme pour l'objet de Quevau-
et Aurélie Thiébaux camps, sont très fréquemment retrouvées sur les
parties distales et proximales des aiguisoirs indiquant
Dans Un siècle de découvertes archéologiques dans l'en- un usage actif de la pierre, sans doute «  frottée  » et
tité de Belœil, l'un des auteurs (Parent, 1995) signalait «  pressée  » sur la lame. Le but de ces actions reste,
la récolte d'artefacts lithiques au « Bois de la Berlière » pour le moment, encore incertain. Il peut éventuelle-
à Stambruges. L'inventeur attribuait certaines pièces ment s'agir de régulariser le fil de la lame en forçant les
au Mésolithique, d'autres au Néolithique, à l'Âge du «  accrocs métalliques  », qui peuvent survenir lors de
Bronze voire à l'Âge du Fer. l'utilisation du tranchant, à s'aligner sur un même axe.
En réalité, le gisement n'est pas situé sur le territoire De par ses dimensions réduites, cet objet était sans
de la commune de Stambruges mais bien sur celui de doute dédié à l'aiguisage de petits tranchants. Le bris de
Quevaucamps. Il s'étend sur une bande de terrain d'en- l'objet n'a pas induit son rejet, soulignant ainsi sa valeur
viron 500 m de long sur 200 de large, orientée d'ouest aux yeux de son utilisateur. Cette tendance à prolon-
en est juste au nord d'un bosquet. Parmi le matériel ger l'emploi de pierres à aiguiser après leur cassure se
trouvé sur les parcelles contigües à ce dernier (Belœil, rencontre régulièrement à la période romaine. Cette
4e Div., Quevaucamps, Sect. C, nos 541a, 609b et 610b) importance accordée à certains aiguisoirs est peut-être
figurait un objet en pierre, non illustré dans la notice liée à la qualité et/ou à la rareté du matériau ou bien au
précitée, semblable à une pendeloque. Soumis peu caractère symbolique très fort que peut revêtir ce type
après sa découverte à Léonce Demarez, il fut supposé d'objet (Mitchell, 1985).
en schiste et daté d'une période allant du Bronze final à L'aiguisoir est réalisé dans un microquartzite vert
l'Âge du fer (Parent, 1995, p. 64, no 3). clair sans schistosité apparente et à paillettes de micas.
Cet artefact est un fragment de l'extrémité d'un objet La couleur verte est due à la présence de microphyllites
parallélépipédique à section carrée mesurant 6,1 cm de de chlorite. La structure quartzitique et la paragenèse
long et 1,3 à 1,4 cm de côté (poids : 20 g). Un perce- muscovite-chlorite place ce matériau dans le groupe
ment biconique est présent au niveau de l'extrémité des roches métamorphiques (faciès schistes verts).
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Toutes périodes Hainaut

Pierre à aiguiser découverte à Quevaucamps au « Bois de la Berlière ». A. Entailles ; B. Axe du trou de suspension.

La datation de cet objet reste problématique car soient plus limitées, les observations et descriptions
hormis les pierres à aiguiser gallo-romaines, désormais que nous avons recensées incitent à ne pas attribuer
mieux connues par des travaux récemment publiés la pierre du «  Bois de Berlières  » à cette époque. Il
(Thiébaux, Herbosch & Goemaere, 2012  ; Thiébaux est, en l'état actuel des connaissances, très difficile de
& Goemaere, 2013 ; Thiébaux et al., 2016), les autres trancher entre Âge du Bronze et période médiévale sur
périodes n'ont pas fait l'objet d'études exhaustives en base de critères morphologiques. Pourtant, certains
Belgique et dans les régions limitrophes. Toutefois, la détails comme la légère convergence des quatre faces
forme parallélépipédique de l'aiguisoir de Quevau- vers l'extrémité ainsi que son usure pyramidale sont
camps, ses dimensions et son percement biconique des traits uniquement repérés, pour l'instant, sur des
sont des caractéristiques communes aux aiguisoirs de aiguisoirs médiévaux.
l'Âge du Bronze comme du Moyen Âge décrits dans Les études publiées (déjà anciennes et sans illus-
la littérature non belge (Cordier, 1964 ; Gomez, 1976 ; trations photographiques) sur les pierres à aiguiser
Pautreau & Cassen, 1975  ; Kars, 1983  ; Aubourg & de l'Âge du Bronze provenant du centre de la France
Josset, 2003 ; Resi, 1990). On peut également exclure indiquent l'emploi de schistes, de schistes métamor-
l'époque romaine parce que les trous de suspension phiques ainsi que de « roches verdâtres » mais en l'ab-
sont (très) rares à cette période, que les formes qui sence d'analyse approfondie et de matériel de compa-
dominent pour nos régions sont cylindriques et que raison dans nos collections de référence, il est difficile
ce type de roche n'a pas été utilisé pour les pierres à de tirer des conclusions définitives. L'utilisation de
aiguiser gallo-romaines du nord de la Gaule. Bien roches métamorphiques est attestée sur de nombreux
que nos connaissances des aiguisoirs de l'Âge du Fer sites médiévaux dans le nord de l'Europe (Dorestad
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Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

aux Pays-Bas, Haithabu au Danemark…) où deux ■■ Thiébaux A., Feller M., Duchêne B. & Goemaere É.,
types de schistes ont été utilisés, l'un est de couleur gris 2016 (accepté). Roman whetstone production in northern Gaul
clair et l'autre de couleur gris foncé. Ils proviennent de (Belgium and northern France), Journal of Lithic Studies.
formations calédoniennes du sud-ouest de la Norvège. ■■ Thiébaux A. & Goemaere É., 2013. Étude des pierres à
Le schiste gris clair était extrait de carrières de la région aiguiser provenant de cinq sites gallo-romains des Vallées des
d'Eidsborg (comté de Telemark, Norvège) exploitées Eaux-Vives (sud-ouest de la province de Namur, Belgique),
Archéo-Situla, 32-33, p. 69-79.
pour le façonnage de pierres à aiguiser  jusque dans
les années 1950 (Resi, 1990  ; Hansen, 2011). D'un ■■ Thiébaux A., Herbosch A. & Goemaere É., 2012. Un atelier
gallo-romain de pierres à aiguiser découvert à Buizingen (Hal,
point de vue macroscopique, ces matériaux diffèrent
Belgique) : reconstitution des étapes de fabrication et détermi-
par leur couleur de l'aiguisoir de Quevaucamps. Une
nation des origines géologiques et géographiques du matériau,
origine scandinave serait a priori à exclure. D'autres Revue du Nord, 94 (398), p. 143-158.
travaux sont donc encore nécessaires pour identifier,
caractériser et distinguer les matériaux utilisés aux
différentes périodes pour la fabrication de pierres à
aiguiser. C'est seulement à ce moment que nous aurons Courcelles/Gouy-lez-Piéton : sondage au
peut-être assez d'éléments pour nous prononcer sur la
pied de la tour de l'église Saint-Martin
datation de la pierre à aiguiser découverte au « Bois de
la Berlière ».
S'il reste donc beaucoup à faire, les premières études Nicolas Authom
menées sur les pierres à aiguiser de la période romaine
sont déjà révélatrices du potentiel de ces outils Dans le cadre d'un certificat patrimoine visant la
modestes. Les informations qu'ils nous livrent sur la restauration de l'église Saint-Martin (parc. cad.  :
diffusion des produits et l'économie ainsi que sur la vie Courcelles, 5e Div., Sect. B, no 1001b ; coord. Lambert :
quotidienne ne doivent plus être négligées. 147134  est/130627  nord), le groupe Monument (sa
filiale Monument Vandekerckhove NV) a commandité
Bibliographie un sondage au pied de la tour occidentale de l'édifice
■■ Aubourg V. & Josset D., 2003. Le site du promontoire du afin d'en diagnostiquer l'état sanitaire. Le Service de
château de Blois du viiie au xie s. (Loir-et-Cher). Seconde partie : l'archéologie de la Direction extérieure du Hainaut  1
le mobilier non céramique, Revue archéologique du Centre de la (DGO4 / Département du patrimoine) a apporté son
France, 42, p. 169-216. expertise quant à la direction du terrassement et au
■■ Cordier G., 1964. Aiguisoirs de l'âge du Bronze provenant traitement des vestiges.
de la Touraine, Revue archéologique du Centre de la France, 3/1, Une imposante fondation, large de 1,60 m, a partielle-
p. 49-53. ment été dégagée au sud de la tour ; elle longe parallèle-
■■ Gomez J., 1976. Quelques aiguisoirs protohistoriques du ment cette dernière, à seulement 0,46 m. La fondation a
centre-ouest de la France. Éléments de datation, Revue archéo- été observée, depuis le mur occidental de la nef, sur une
logique du Centre de la France, 15/3-4, p. 261-265. longueur de 2,90 m avant de marquer un coude à angle
■■ Hansen S.C.J., 2011. The Icelandic whetstone material. An droit vers le nord et de revenir sous la tour. Côté ouest,
overview of recent research, Archaeologia Islandica, 9, p. 65-76. elle se perd hors emprise du sondage. Elle atteint plus de
■■ Kars H., 1983. Early-Medieval Dorestad, an archaeo-pe- 2 m de profondeur (mesure exacte impossible à relever
trological study. Part  V. The whetstones and the touchstones,
Berichten van de Rijksdienst voor het Oudheidkundig Bodemon-
derzoek, 33, p. 1-37.
■■ Mitchell S.A., 1985. The whetstone as symbol of authority
in old English and old Norse, Scandinavian Studies, 57, p. 1-31.
■■ Parent S., 1995. Prospections archéologiques sur le territoire
de Stambruges (1980-1994). In : Un siècle de découvertes archéo-
logiques dans l'entité de Belœil, Belœil (Association pour la
sauvegarde du Patrimoine de Belœil, Documents, 2), p. 59-65.
■■ Pautreau J.-P. & Cassen S., 1975. Aiguisoirs inédits de l'âge
du Bronze dans le Centre-Ouest, Revue archéologique du Centre
de la France, 14/1-2, p. 63-67.
■■ Resi H.G., 1990. Die Wetz- und Schleifsteine aus Haithabu,
Neumünster (Berichte über die Ausgrabungen in Haithabu, 28).
La fondation dégagée au pied de la tour de l'église Saint-Martin.
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Toutes périodes Hainaut

vu l'étroitesse et la profondeur du sondage). La mise en à Léon  Losseau, célèbre avocat et érudit montois.
œuvre est soignée : sur les deux faces est monté un pare- Dans le cadre de Mons 2015, la Province de Hainaut,
ment, maintenu par un blocage central de pierres et de propriétaire de l'ensemble dénommé « site Losseau »,
mortier à base de chaux et sable jaune. Le soin apporté souhaitait y installer le futur Centre d'interprétation de
à la construction pourrait suggérer une élévation plutôt la littérature. Les sept interventions limitées du Service
qu'une fondation. Un débord de quelques centimètres, de l'archéologie se sont étalées entre novembre 2014 et
à 0,44  m de profondeur par rapport à la tête du mur mars 2015, date limite pour l'inauguration.
conservée, pourrait marquer le passage entre fondation Diverses découvertes fortuites de structures
et élévation. Mais à l'exception du débord, aucune diffé- anciennes (citerne, caves, évacuation, puits, fonda-
rence ne s'observe dans le mode de construction de ces tions…) ont amené l'architecte, gestionnaire du projet,
deux niveaux. Quelques traces de rubéfaction ont été à prévenir les agents du patrimoine et de l'archéologie.
relevées au niveau du parement côté sud où les pierres Plusieurs visites, espacées en fonction des découvertes
et le mortier sont rougis. et des possibilités de circulation sur le chantier, ont
Entre cette fondation et le mur sud de la tour se trouve permis d'observer de nombreux détails sans toutefois
un béton à base de mortier beige et moins chargé en avoir les moyens de réaliser les relevés étant donné la
sable ; sa surface est plane. Ce béton se prolonge sous rapidité d'exécution des travaux. Les diverses descrip-
le mur sud de la tour qui semble élevé sur celui-ci ; il tions présentées ci-après se suivent sans avoir nécessai-
peut s'agir d'un niveau de sol, aménagé à l'intérieur de rement de lien entre elles.
l'espace délimité par le mur de fondation. Une fissure Une première visite du bâtiment, alors que les murs
importante a été observée dans la fondation du mur étaient complètement dégarnis, a permis l'observation
sud de la tour, à  2  m de l'angle ouest, à l'endroit où des vestiges de baies et de décalages dans les murs et
la fondation découverte fait retour sous ce mur. Un les niveaux de sol des étages. Bien que l'ensemble ait
examen général de l'édifice montre qu'une partie de la déjà été très fort remanié au cours du temps, il s'avérait
façade de la tour a légèrement basculé vers l'ouest. Ce évident qu'il s'agissait de plusieurs anciennes maisons
déplacement pourrait trouver une explication dans le rassemblées en une seule rendue uniforme par la
sous-sol dont la densité est irrégulière vu la présence façade placée dans le dernier tiers du 18e  siècle. À
des vestiges d'un édifice plus ancien. l'arrière, l'espace d'une ruelle était parfaitement visible
L'église Saint-Martin, remontant au 16e  siècle, a été dans l'enchevêtrement des bâtiments.
remaniée et agrandie au 18e siècle, avant une restauration Lors d'un creusement profond en sous-œuvre, ont été
en 1926 (Égl. paroiss. St-Martin, 1994, p. 211). La tour mis au jour une vanne, probablement du 19e siècle, et
actuelle, hors œuvre, aurait été installée au 17e siècle. Le un réseau d'évacuation constitué entre autres d'un bac
mur de fondation retrouvé pourrait vraisemblablement en briques liées au mortier gris et aux parois internes
appartenir à l'église primitive du 16e siècle ou bien à un revêtues de céramique blanche avec estampille anglaise
édifice plus ancien encore inconnu. (encore non déterminée). Partiellement sous cette
installation se trouve le cuvelage en briques (liées au
Bibliographie mortier de chaux) d'un puits circulaire dont le diamètre
■■ Égl. paroiss. St-Martin, 1994. Égl. paroiss. St-Martin. In  : interne avoisine 50 cm. Creusé dans le sol en place, il
Province de Hainaut. Arrondissement de Charleroi, Liège (Le est comblé de restes de démolition  ; vu la profondeur
Patrimoine monumental de la Belgique, 20), p. 211-212. atteinte, aucun prélèvement n'a pu être réalisé et il
n'a pas été vidé. Sa partie supérieure de même que sa
hauteur d'origine resteront toujours inconnues.
À la même profondeur que le puits et à l'aplomb
Mons/Mons : rue de Nimy, suivis d'une fondation de cave plus récente, se trouve un
archéologiques au « site Losseau » alignement de briques liées au mortier de chaux,
conservé sur une seule assise longue de 60 cm et posé
directement sur le sol en place. Entre ces deux vestiges
Cécile Ansieau anciens se trouve un remblai mélangé de sol en place et
de fragments de briques rouges et de mortier.
Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure En divers endroits, plusieurs caves ont été touchées
du Hainaut 1 (DGO4 / Département du patrimoine) est par la rénovation, dont l'une voûtée en briques du
intervenu dans le cadre de travaux de rénovation d'un 16e siècle (?) a été coupée en deux dans le sens de la
imposant bâtiment situé à la rue de Nimy, nos  39-41, longueur. Ses fondations encore visibles sont peu
jouxtant la maison classée de style Art nouveau (objet profondes et reposent directement sur le sol en place.
d'une restauration simultanée) ayant appartenu Son niveau de circulation est constitué de deux assises
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Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

de briques superposées (soit 16 cm) recouvertes d'une la présence d'une baie dans le pignon de la maison
couche de béton. Les fondations des murs porteurs Losseau, obturée puis divisée en deux par la construc-
descendent 30  cm plus bas que le niveau de sol en tion d'un mur dans le bâtiment qui nous occupe.
place. Les briques sont liées au mortier de chaux de Dans la partie nord du bâtiment à front de rue, le
teinte beige contenant des éléments végétaux. bois de charpente est surtout issu de la récupération et
Entre deux caves situées à l'extérieur de la zone décrite, en mauvais état sanitaire, tandis que du côté sud (côté
le sol en place apparaît quasi dès la surface et jusqu'à maison Losseau) la charpente avec les assemblages
plus de 2 m de profondeur ; cette information revêt une croisés semble d'origine, par contre sa base ouest a été
certaine importance tant les constructions sont denses modifiée par l'agrandissement du bâtiment de ce côté.
en intra-muros, rendant la restitution de la topographie La ville de Mons figure sur plusieurs plans rassem-
originelle bien compliquée. blés pour les campagnes de Louis  XIV  ; ils apportent
Une fois sa voûte percée, une ancienne citerne exté- des renseignements fiables, relatifs aux aménagements
rieure devenue accessible a pu être observée  (long. défensifs et militaires ou encore sur la fonction religieuse
interne 5,80 cm, larg. 3,60 m au bas de la voûte, haut. des parcelles  : église ou présence de congrégations.
2,60 m) : elle est constituée entièrement de briques régu- L'un d'eux daté de 1693, plus détaillé, est généralement
lières (22 × 10 × 5,5 cm) liées au mortier de chaux de utilisé pour apporter l'information recherchée (Recueil
teinte brun-beige contenant des fragments de briques des plans des places du Royaume, 1693) ; l'îlot qui nous
et des charbons de bois de tailles différentes. Elle est occupe est renseigné uniquement comme zone d'habi-
installée dans le sol en place composé de lits de sable tat et ne présente aucun détail particulier. L'enchevê-
et de fines couches d'argile (?). La voûte est constituée trement des murs, des charpentes et leurs orientations
d'une brique de long ou de deux demi-briques. L'enduit variées, le décalage entre les niveaux et la présence de
qui couvre les parois intérieures est un mortier de teinte ruelles plaident en faveur de cette interprétation.
beige, cependant, la couleur de surface est noire partout. Les indices d'agrandissement et de modifications de
L'enlèvement du niveau de sol d'une des pièces située même que du rassemblement de plusieurs modules de
à l'arrière a mis au jour une épaisse fondation (entre 80 base sont nombreux, cependant il aurait fallu procéder à
et 95 cm) dont l'orientation est différente de l'orienta- une étude d'archéologie du bâti plus poussée pour arri-
tion générale des bâtiments. Les parements de la fonda- ver à des conclusions pertinentes sur l'évolution de cet
tion, conservés sur 35-40 cm de haut, sont composés en ensemble.
tuffeau de Ciply avec quelques blocs de grès à la base La procédure de certificat de patrimoine ne
tandis que le blocage contient des briques. Elle est orien- s'appliquait pas à cette imposante bâtisse datée à
tée est/ouest et se trouve très reculée dans la parcelle, l'inventaire uniquement d'après sa façade unifor-
loin du front de rue où aucune trace n'a été perçue. Elle misée au 18e  siècle  ; le Service de l'archéologie
est assisée sur le niveau de sable vert (sol en place) ; tout n'aura pas pu tirer parti de toutes les informations
a été excavé autour d'elle et aucune stratigraphie n'est encore disponibles sur les habitations antérieures
visible dans les parois sous les autres fondations. Au qui la composaient  ; la synthèse finale de toutes les
nord-ouest de cette fondation, une couche organique observations archéologiques et réflexions n'a encore
(de décomposition de bois ?) est observée sur le sable pu aboutir à un plan complet. Toutefois, l'appel tardif
en place ; il est peu probable qu'il s'agisse d'un plancher mais efficace de Madame Daphné  David, architecte
en lien avec cette construction car il se situe plus bas en charge de ce dossier, aura permis de percevoir une
que la fondation ancienne et celle des murs de la pièce fois de plus la quantité de vestiges encore présents
(17e siècle) ; la fondation relevée est recoupée par celles tant dans les sous-sols que dans les élévations et char-
des murs de la pièce qui l'entourent et est donc antérieure pentes des édifices montois. Nous tenons vivement à
(15e-16e siècles ?). Aucun matériel archéologique n'a été la remercier, de même que le Service technique des
mis au jour à cette occasion. Peut-être correspond-elle à bâtiments de la Province de Hainaut dont elle dépend
un mur de soutènement ancien de cette partie haute de pour sa démarche constructive et qui aura permis de
la rue de Nimy ? mettre au jour de nombreux éléments aujourd'hui
Au rez-de-chaussée, le parement intérieur du couloir disparus ou occultés par la rénovation.
(qui correspond au pignon originel de la maison
Losseau) est réalisé en moellons équarris de grès de Sources
facture médiévale, indiquant la présence probable d'une ■■ Recueil des plans des places du Royaume, divisées en provinces,
ruelle à cet endroit. faits en l'an 1693, no  32, plan de Mons (Paris, Bibliothèque
À l'occasion d'une autre visite sur place, alors que la nationale de France, département Cartes et Plans, GE DD-4585
charpente et les étages étaient accessibles, de nombreuses [1, RES]  ; http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b5967727j/f113.
observations ont été réalisées portant par exemple sur item.r=Mons,%201693, consulté le 13 septembre 2016).
125

Toutes périodes Hainaut

Mouscron/Mouscron : château des dimensions atypiques pour le site (24 × 11 × 4,5 cm).
Comtes, suivi du réaménagement de la Le dégagement de la structure a livré quelques indices
basse-cour céramiques évoquant les productions du 17e  siècle.
Bien que le plan et les dimensions de cet élément
rappellent les structures de puits connues sur d'autres
Marceline Denis sites, sa mise en œuvre, légère et incomplète, semble
écarter de facto cette fonction. Une vocation plus
Le château des Comtes a déjà fait par le passé l'objet décorative n'est sans doute pas à exclure.
de nombreuses opérations préventives et de suivis Diverses fosses, massifs de fondation isolés, sections
s'attardant sur le logis et ses remparts (parc. cad.  : de canalisation maçonnées et aménagements de rigoles
Mouscron, 6e Div., Sect. A, nos 572l, 572m et 572h). En recueillant les eaux de ruissellement ont été perçus sur
2015, le projet de réaménagement de la basse-cour fut le flanc ouest de la basse-cour. L'absence de matériel
l'occasion de poursuivre les recherches menées depuis archéologique associé à ces structures empêche toute-
2002. L'intervention archéologique s'est uniquement fois tout essai de datation. Le suivi des décapages a néan-
concentrée sur le suivi des décapages opérés par le moins révélé des fondations plus explicites fermant
soumissionnaire des travaux. l'espace de la basse-cour sur son flanc nord-est. Cette
La basse-cour se développe à l'est du château sur annexe, exclusivement réalisée en briques et mortier
une surface de près de 2 000 m². Elle est encadrée par de chaux, était équipée d'une citerne extérieure. L'ana-
un portail d'entrée, deux ailes de bâtiments agricoles lyse des fondations a révélé plusieurs phases d'agran-
réhabilités, les douves et un large accès menant au dissement de l'édifice ainsi que des modifications de
logis du château. Cette configuration en fait le prolon- ses espaces internes. Des aménagements à fonction
gement naturel de l'espace dévolu au logis comtal. La indéterminée et probablement contemporains des
cour de plan rectangulaire est actuellement libre de précédents ont également été révélés dans l'angle sud-
tout aménagement. Le suivi des travaux de rénovation ouest de la basse-cour. Leur lien avec les édifices à
permettra toutefois de relever de nombreux indices vocation agricole toujours présents sur le site n'a pu
modifiant cette perspective. être établi avec certitude.
L'opération a pu mettre en évidence la nature très
largement remaniée de la terrasse dédiée à la basse- Bibliographie
cour. Le décapage de toute la surface a fait apparaître ■■ Dasseleer S., Dosogne M. & Deramaix I., 2003. Mous-
l'apport successif de substrat anthropique révélant du cron/Mouscron : étude archéologique au château des Comtes,
matériel couvrant une ample fourchette chronologique Chronique de l'Archéologie wallonne, 11, p. 75-77.
comprise entre le 15e et le 19e siècle. Cette observation
n'est pas en contradiction avec les sources historiques
mentionnant explicitement l'existence d'une basse-
cour dès 1431 (Dasseleer, Dosogne & Deramaix, 2003). Quévy/Quévy-le-Grand : fouille d'un
Un fossé de 3,20  m de large fut observé sur une établissement rural
section de 5,50  m sur la moitié est de la basse-cour.
Il est implanté suivant un axe nord-est/sud-ouest
dans les substrats anthropiques constituant le socle Véronique Danese, Olivia De Staercke
de la basse-cour. Son tracé est régulier et sa largeur et Benjamin Van Nieuwenhove
relativement constante. L'environnement immédiat
de ce fossé est fortement marqué par des épisodes de De mi-mai à octobre 2015, une nouvelle saison
réduction et d'oxydation successifs, témoignant d'une de fouille s'est déroulée à Quévy-le-Grand, sur les
présence d'eau discontinue. L'implantation de ce fossé parcelles comprises entre les rues des Sœurs, du Culot
réduit considérablement l'emprise de la basse-cour et de la Fontaine (parc. cad. : Quévy, 2e Div., Sect. C,
telle qu'on la connaît actuellement. Le comblement nos  560C, 562D, 564M, 559G et 558C  ; coord. Lambert  :
supérieur de ce fossé, vraisemblablement lié à la phase 120255  est/116871 nord). Les recherches, comman-
d'abandon de la structure, a révélé la présence de maté- ditées par le Service de l'archéologie de la Direction
riel céramique correspondant à des productions s'éta- extérieure du Hainaut  1 (DGO4  / Département du
lant des 14e-15e siècles au 17e siècle. patrimoine), ont été réalisées par une équipe d'ar-
Face au corps de logis du château, un dispositif chéologues, de techniciens de fouilles et d'opérateurs
circulaire de 2,20  m de diamètre a été identifié au de l'asbl Recherches et Prospections archéologiques
sein de remblais anthropiques. Sa mise en œuvre est (RPA), secondée par des opérateurs du Service de
caractérisée par l'emploi d'un seul rang de briques de l'archéologie.
126

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

le Service de l'archéologie programme une dernière


campagne de fouille sur le second secteur en 2016-2017.
À ce jour, aucune des interventions n'a fait l'objet
d'un travail de post-fouilles. Cette notice n'offre donc
qu'un premier aperçu des résultats des fouilles de 2015
et du potentiel particulièrement riche que recèle le site.
Les plans, dates et interprétations proposés doivent de
ce fait être compris comme des hypothèses de travail,
susceptibles de révisions.

Époque médiévale : les premières traces


d'occupation
Le site de Quévy-le-Grand en cours de fouille. Photomon-
tage dressé sur base de prises de vues réalisées par drone
Parmi les vestiges pouvant être datés, le plus ancien
par P.-M. Warnier (Direction de la géomatique) et retravaillé remonte à la fin du 7e-milieu du 8e siècle. Cette datation
par B. Van Nieuwenhove (RPA). est estimée sur base de l'observation de certains tessons
nettoyés et non sur une étude de tout le mobilier
Rappelons qu'en juin et juillet 2012, une évaluation (commentaire oral de Sylvie de Longueville, Direction
avait été réalisée par cette même asbl. Dès les premières de l'archéologie). Il s'agit d'un petit four de potier de
tranchées, la présence d'un château médiéval et d'un bâti- plan circulaire de 1 m de diamètre, à massif central, dont
ment lié à l'artisanat du métal avait été repérée (respec- le comblement contenait un grand nombre de tessons
tivement sur les zones 2 et 1 de 2012 ; Lecomte, 2014). de céramique. Ces derniers, actuellement en cours
Vu la richesse des résultats, l'évaluation n'avait pas été de nettoyage et de recollage, appartiennent à des pots
poursuivie, mais une première campagne de fouille a été entiers dont certains sont déformés par une cuisson mal
programmée entre les mois de juillet et décembre 2012. menée. Il peut s'agir soit de rebuts provenant de diverses
Les fouilles de 2015 ont eu pour objectif d'investiguer cuissons, soit de la dernière fournée qui suite à un acci-
deux secteurs non fouillés en 2012. Le premier, une dent de chauffe s'est effondrée sur le fond.
bande de 20 m × 100 m le long de la rue du Culot, avait Divers autres vestiges peuvent également être
été évalué mais non fouillé (zone 1 de 2015). Le second attribués au Haut Moyen Âge  : des trous de poteaux
secteur, une bande de 50 m × 100 m le long de la rue des formant des alignements et/ou des plans de bâtiments
Sœurs, n'avait été ni évalué ni fouillé (zone 2 de 2015). en bois sur poteaux dressés ainsi que quelques tron-
Vu leurs étendues respectives, le nombre de structures çons de fossés pour lesquels les données sont trop
mises au jour et la complexité des horizons stratigra- partielles pour proposer une quelconque organisation
phiques concernés, l'étude est demeurée inachevée et spatiale. Ces vestiges illustrent la fixation du premier
habitat documenté dans le centre villa-
geois de Quévy-le-Grand. Cependant,
en l'absence de matériel archéologique
datant, seuls quelques rares liens strati-
graphiques permettent de les associer à
cette phase d'occupation. Pour rappel,
parmi les vestiges découverts en 2012,
une vingtaine de vestiges en creux
remontent aussi à cette période.
D'autres structures mises au jour en
2012 appartiennent à une occupation
médiévale s'étendant du 10e au 15e  siècle.
Certaines sont liées à l'exploitation du
minerai de fer, d'autres au château carré
à tours d'angle circulaires. En 2015, de
nombreuses structures excavées telles que
des silos et des fonds de cabanes ont four-
ni du matériel céramique datant de cette
Quévy-le-Grand : implantation des tranchées d'évaluation de 2012 et des zones même période. Les silos, d'un diamètre
de fouilles de 2015.
variant entre 1,5 à quasi 3  m, sont tous
127

Toutes périodes Hainaut

Les diverses étapes de la fouille du four.

conservés sur plus de 1 m de d'épaisseur et présentent beige clair à jaune pâle. Les moellons sont essentiel-
un comblement multiple. Le fond de cabane le mieux lement en grès quartzites locaux de teinte bordeaux,
préservé mesure 1,90 m sur 1,40 m et 60 cm de hauteur. gris, blanchâtre et brun et plus rarement en calcaire
Il est orienté nord-nord-est/sud-sud-ouest et possède importé ou en silex. La détermination des phases de
un fond plan, des parois verticales, des poteaux d'angle construction n'a donc pu se faire que via l'observa-
et un plancher. Deux terres cuites presque entières tion de l'appareillage et des différentes coutures entre
et datant du 15e  siècle ont été mises au jour dans son les maçonneries.
remblai. Le logis se situe au sud-est et les autres bâtiments
Pour ces diverses époques (7e-15e  siècles), la docu- autour de la cour ont été identifiés comme ayant servi
mentation archéologique n'est encore que partielle. à la stabulation. Le bâtiment 5, l'abreuvoir et les accès
Une part importante de la superficie fouillée en 2015 complètent les éléments du plan.
est encore occupée par des vestiges maçonnés plus
récents, ce qui justifie en partie la saison archéolo- Le bâtiment 1
gique 2016-2017. Celle-ci permettra le démontage des
structures maçonnées en vue d'accéder aux vestiges Au sud-ouest de la cour, il subsiste la fondation d'un des
antérieurs au 16e  siècle et de les étudier. Elle devrait murs gouttereaux du bâtiment  1, orienté est-sud-est/
contribuer à conclure pour ces époques. ouest-nord-ouest. Elle mesure 19,5 m de long sur 60 cm
de large et a été construite en fosse. Seuls le creusement
Des Temps modernes à nos jours : une de la tranchée et parfois une à deux assises de la fonda-
exploitation agricole tion ont été conservés.

Aux époques moderne et contemporaine (16e- La grange


19e siècles) remonte l'essentiel des vestiges mis au jour
en 2015 : une très grande ferme organisée autour d'une Le bâtiment situé au nord-ouest de la cour, orienté
cour trapézoïdale, fermée sur ses quatre côtés par des nord-est/sud-ouest, est une grange construite sur un
bâtiments agricoles, d'habitat et des murs de clôtures. module allongé, qui dans son état initial mesurait
Quatre grands bâtiments et un cinquième de moindre 24,5  m de long sur 10,5  m de large. Les fondations
dimension sont apparus, fortement dérasés : le bâti- des murs gouttereaux ont une épaisseur allant de 70 à
ment  1, la grange, l'étable, le logis et le bâtiment  5. 90 cm et présentent, sur une longueur de quelque 3 m
À l'exception de certains petits espaces, les niveaux à l'extrémité orientale, un important épaississement.
de circulation ont disparu et la quantité relativement Les murs pignons sont épais de 1,20 à 1,30  m, celui
faible de matériaux de construction présents dans les au nord-est étant en outre beaucoup plus profondé-
décombres laisse à penser qu'ils ont dû faire l'objet ment fondé que les autres. Ces détails architecturaux
d'une récupération. Sauf mention contraire aucun peuvent s'expliquer par la déclivité importante du sol
des bâtiments n'a conservé d'élévation ; l'absence des encaissant vers l'est.
seuils et piédroits ne permet pas de déterminer avec En dépit de l'apparente robustesse des murs, une
précision l'emplacement des divers baies et passages. faiblesse du gouttereau nord a été compensée par la
Pour l'ensemble des vestiges et les diverses époques construction de deux contreforts de 80 cm de large et
rencontrées, le mode de construction s'avère extrê- minimum 70 cm de profondeur.
mement stable tant en termes de matériaux que de La grange est subdivisée, dans sa partie nord, en
mise en œuvre. Tous les bâtiments sont édifiés entiè- quatre travées de 5 m de large par des murets garde-
rement ou partiellement en moellons grossièrement grains longs de 4 m et larges de 70 cm. De nombreuses
équarris liés au mortier de chaux, de teinte variant de autres traces d'installations internes ont été repérées :
128

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Postérieurement, un passage charretier


a été construit le long du mur gouttereau
sud. Un mur, de la longueur de la grange et
large de 60 cm, permet un passage de 4 m
de large. Ce dernier devait être couvert
soit par un appentis, soit par le toit de la
grange. Il devait mener à un chemin situé
au nord-est de la ferme. Un mur étroit, en
moellons, a été construit dans le prolon-
gement du mur du passage charretier. Il
a été repéré sur 25 m de long et il conti-
nue au-delà de la zone de fouille. Ce mur
marquait peut-être l'emplacement d'un
chemin d'accès. Le second portail de la
grange devait permettre l'accès au sud-
ouest, à la cour et au chartil.

L'étable

Le bâtiment rectangulaire situé le long


du coté est de la cour, de 16 m de long
et 8  m de large, est interprété comme
étable. Les murs mesurent entre 60 à
70 cm de large. Le niveau de circulation
Plan schématique des principaux vestiges maçonnés datant des 16e-20e siècles.
n'a pas été conservé et le seul aména-
gement interne découvert est une
cloisons en moellons, en briques ou encore en maté- canalisation qui en traverse les murs gouttereaux. Le
riaux périssables. D'après les divers recoupements stra- fond et la couverture de celle-ci sont formés de dalles
tigraphiques, on en déduit que les aménagements sur plates, des moellons constituant les parois latérales.
poteaux sont antérieurs à ceux construits en briques. Ce canal devait permettre l'écoulement des eaux de
La grange est prolongée par une annexe accolée au la cour vers l'est, suivant ainsi la déclivité du terrain.
pignon sud-ouest, constituant certainement un chartil Une seconde canalisation longe à l'extérieur le mur
mesurant 7 m de large sur au minimum 8,5 m de long. pignon nord-ouest, construit en moellons et briques.
La construction de ce dernier est alignée sur le mur
gouttereau nord de la grange, ce qui libère un espace Le logis
entre le chartil et la cour et donc le long du mur pignon
ouest de la grange. L'identification repose notamment Le bâtiment fermant le côté sud-est de la cour est le
sur la présence d'au moins deux grandes baies, repo- logis, dont la partie mise au jour se développe sur
sant sur des piliers, ouvertes sur la cour de la ferme. Ces 27  m de long et 17  m de profondeur. Il se compose
baies ont été bouchées par des maçonneries en briques. de minimum dix pièces rectangulaires et dessine un
Le chartil, dont le niveau de circulation semble être en plan plutôt irrégulier résultant de plusieurs phases de
terre battue, présente des traces de trous de poteau construction. Le noyau primitif de 14 m sur 6,5 m est
et de sablière basse indiquant la présence d'une cloi- un alignement de trois pièces, dont deux cavées. Il s'est
son qui devait diviser l'espace en deux. Une fosse de vu adjoindre au fil du temps au moins sept autres pièces,
travail en béton, de 3,70 m de long sur 1 m de large et dont une seule vers le nord-est et toutes les autres vers
profonde de 80 cm, y a été aménagée récemment ; trois l'ouest et le sud. La très grande quantité de tessons de
marches y donnent un accès aisé. tuiles en terre cuite retrouvée dans le comblement des
La grange appartient certainement au type long à caves ne laisse pas de doute sur le type de couverture
passage latéral. En effet, les installations initiales de celle- de l'habitation. De même, le nombre impressionnant
ci, en moellons, laissaient un espace libre le long du mur de fragments de carreaux en terre cuite et celui, nette-
gouttereau sud, interprété comme un couloir charretier. ment moindre, en pierre bleue nous informent sur les
De plus, la construction du chartil, en retrait de la cour, différents types de revêtements de sols repérés dans le
libère dans le pignon ouest de la grange une largeur suffi- corps de logis. Divers canaux d'évacuation des eaux
sante pour confirmer l'aménagement d'un tel passage. ont été identifiés entre les caves et l'abreuvoir.
129

Toutes périodes Hainaut

La cour centrale et les chemins d'accès au sud-ouest de l'abreuvoir, à l'arrière du logis. Repéré
sur 16 m de long et sur 4 m de large, ce bief conserve
La cour centrale est de plan trapézoïdal mesurant de nombreux vestiges de poteaux et de branchages.
40 m × 33 m × 27 m × 27 m. Deux puits de 1,5 m de L'eau était maintenue dans le réservoir grâce à la vanne
diamètre ont été repérés dans l'angle sud de la cour. aménagée dans le mur nord-est. Le système d'alimen-
Distants de 8 m, ils sont proches du logis et présentent tation et d'évacuation des eaux explique certains détails
un cuvelage maçonné, pour l'un en moellons, pour architecturaux de l'abreuvoir, comme la reconstruc-
l'autre en briques. tion du mur sud-ouest dégradé par la poussée des eaux
Le niveau de circulation de la cour est partiellement ou encore les imposants massifs encadrant la vanne,
empierré, aménagement qui semble avoir été exclusi- destinés à canaliser les eaux sortantes et à renforcer le
vement construit ou alors seulement conservé dans la mur soumis à la pression des eaux.
moitié sud-est. Il n'est pas plan et présente un profil en Le comblement de l'abreuvoir a livré un très grand
légère cuvette. Le long du logis, un espace de 3 à 5 m de nombre de fragments de mobilier  : vaisselle en céra-
large, aménagé avec plus de soin, se caractérise par la mique et verre, couvert en métal, objets en fer, semelles
mise en œuvre soit de briques posées à plat, soit de pavés en cuir, etc.
disposés sur des surfaces quadrangulaires de gros blocs
équarris. La zone nord-nord-est possède également un Le bâtiment 5
sol particulièrement bien soigné. Elle marque le passage
entre la cour à proprement parler et le portail principal Au sud-ouest du logis, au-delà du bief, se localise le
de la ferme. Établi entre la grange et l'étable, celui-ci y bâtiment  5, constitué de trois pièces et d'une petite
forme un angle tronqué ; il présente un seuil constitué annexe. Le volume principal quadrangulaire de 6 m de
de grandes dalles taillées. De là, un chemin pavé de 3 côté est flanqué de deux petites pièces, dont une semi-
à 4 m de large, observé sur 20 m de long, s'éloigne de enterrée. L'une mesure 4,3 m sur 2,3 m et l'autre 3,3 m
la ferme en direction du nord-nord-est. Ce chemin a sur 2,6 m. Cet ensemble est construit en moellons et le
été partiellement aménagé sur le dérasement du mur revêtement de sol conservé dans l'une des petites pièces
en moellons qui prolongeait le passage charretier. Dans est constitué de briques posées à plat. Ces dernières
l'angle est-sud-est de la cour, un autre passage ouvert sur sont couvertes d'une couche de charbon de bois dont
1,5 m de large donne accès à un second chemin empierré la présence pourrait indiquer une fonction de cave à
se dirigeant vers le sud-est. Formé d'un pas d'âne large charbon. Cependant, l'emplacement dans le bief, soit
de 3 m et long de 13 m, il mène à un abreuvoir creusé dans une zone très humide, n'y serait pas favorable.
en contrebas des bâtiments du logis ; ses trois premiers Au nord-est du volume principal, une très petite
mètres ne sont pas conservés. La dernière marche est annexe a été construite en briques, matériau qui la
caractérisée par un empierrement assez fruste, contras- distingue des trois autres pièces. De 3,3 m sur 1,6 m,
tant avec le pavage soigné du reste du chemin. Ce détail elle est orientée nord-ouest/sud-est et présente un
semble indiquer que cette marche était sous eau et donc petit aménagement interne peu solide en briques, base
que son revêtement de sol était non visible. probable d'un petit établi.

L'abreuvoir Les fosses d'enfouissement d'animaux

Deux murs parallèles sont positionnés de part De très nombreuses fosses d'enfouissement pour
et d'autre des deux pas d'ânes inférieurs. À leurs animaux ont été creusées tout autour des bâtiments
extrémités sud-est, les murs s'écartent l'un de l'autre évoqués. D'époques diverses et de dimensions très
en deux courbes opposées et s'ouvrent sur un espace variables, elles contiennent des squelettes soit partiels
quasi ovoïde de 10 m sur 6,5 m, orienté nord-est/ soit entiers, souvent en connexion, de chevaux, brebis
sud-ouest, formant l'abreuvoir. Le mur nord-est de ou chèvres et de chiens. L'une d'elles sort du lot : elle
cet espace se compose de deux segments courbes dont mesure 3 m sur 11 m et contient de nombreux sque-
les têtes élargies en de puissants massifs maçonnés lettes en connexion mêlés à de la chaux. Cet enfouisse-
encadrent une baie de 50 cm de large, fermée par une ment collectif est sûrement le résultat d'une épidémie
vanne en bois. Au sud-est et au sud-ouest, les murs ayant ravagé le cheptel.
mesurent 40 cm de large. Le second, long de 4 m, est
percé en son centre d'une baie de 46 cm de large. L'état Bilan et perspectives
de ce mur semble résulter d'un réaménagement. Le
sol de l'abreuvoir consiste en un empierrement assez Actuellement, l'équipe archéologique ne dispose que de
grossier. L'amenée d'eau se fait grâce à un bief, situé peu d'informations historiques sur Quévy-le-Grand,
130

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Bibliographie
■■ Lecomte A., 2014. Quévy/Quévy-le-Grand : un site médié-
val à la rue du Culot, château et activité artisanale. Campagne
de fouilles 2012, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21,
p. 102-105.

Sources
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
plan parcellaire de Quévy-le-Grand.
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Havay, pl. 55B.

Saint-Ghislain/Baudour : sondages
Quévy-le-Grand : photogrammétrie de l'une des fosses
préalables à l'extension du temple
contenant le squelette d'un jeune cheval. protestant de Douvrain

si ce n'est la carte de Ferraris (1771-1778) et le plan Hélène Collet, Philippe Lavachery,


cadastral de Popp (1842-1879). Tous deux montrent, Jean-Philippe Collin, Anne Hauzeur,
en bordure de la rue des Sœurs, un complexe de bâti- Michel Woodbury, Lyse Unger,
ments organisés en carré, s'étirant du coin de la rue au Carolina Cabrero et Amandyne Rosart
petit cours d'eau qui traverse le terrain. D'après la carte
de Ferraris, le reste des parcelles concernées par l'in- Introduction
tervention archéologique de 2015 ont été aménagées
en potagers encadrés de haies, à la fin du 18e  siècle. Une intervention archéologique a été conduite du 5
Les vestiges maçonnés découverts lors des fouilles de au 8  octobre 2015 par le Service public de Wallonie
2015 correspondent assez bien à ceux visibles sur le en collaboration avec la Société de Recherche préhis-
plan Popp. Les cinq bâtiments et leurs annexes, la cour torique en Hainaut préalablement à l'extension du
centrale et le portail y sont bien visibles, mais aucune temple protestant, situé à l'angle de la rue du Temple et
des cartes n'indique l'existence de l'abreuvoir et des de la rue des Juifs (parc. cad.  : Saint-Ghislain, 2e  Div.,
deux chemins. Par contre, toutes deux montrent la Baudour, Sect.  B, nos  874r et 873h  ; coord. Lambert  :
présence d'un bâtiment dans l'angle nord-ouest de la 112833 est/129283 nord). Cette opération a été rendue
zone de fouille, qui n'a pu être sondé en 2015. En effet, possible grâce à la conclusion d'un protocole d'accord
une maison y est encore en élévation et étant donné entre le Service de l'archéologie de la Direction exté-
son état de dégradation avancé, il avait été décidé pour rieure du Hainaut  1 (DGO4  / Département du patri-
des questions de sécurité de ne pas travailler dans son moine), l'asbl Les Amis de l'Église protestante de
voisinage. Baudour, propriétaire des parcelles et maître d'ouvrage,
Ces quelques mois de fouilles, répartis sur les et Michel Gras, maître d'œuvre du projet. La réalisation
années 2012 et 2015, ont permis la découverte d'un de sondages sur une emprise de 2 800 m² était motivée
établissement rural d'une grande ancienneté et par le potentiel archéologique des deux parcelles. En
caractérisé par une longue occupation. Son origine effet, diverses haches taillées et à l'état d'ébauche ont été
remonte au moins à l'époque médiévale et perdure recueillies durant la première moitié du 20e siècle dans ce
jusqu'aux époques modernes. Cependant, les vestiges secteur par, entre autres, Clovis Piérard, Jean Houzeau
étant très nombreux et répartis sur une vaste éten- de  Lehaie et André  Delwarte. Elles sont conservées
due, il serait nécessaire de continuer la fouille de dans différents musées dont l'ancien musée du Cente-
certains secteurs explorés en 2015. Rares en effet sont naire à Mons et l'Institut royal des Sciences naturelles
les occasions d'appréhender une surface si vaste, au de Belgique. Leur examen a révélé la présence d'assez
cœur d'un noyau villageois et sur un site présentant nombreux artefacts en silex de type Ghlin (Leblois,
une telle continuité d'occupation. Le site de Quévy 2000 ; Collin, à paraître). Jean Houzeau de Lehaie décrit
pourrait s'avérer être un exemple de référence pour la présence d'une couche de déchets de taille livrant des
la compréhension de la dynamique rurale ancienne, ébauches d'outils et d'armes sous une couche de 50 à
encore trop peu documentée. 75 cm de sable en différents points situés aux alentours
131

Toutes périodes Hainaut

de l'église et du temple protestant. Il conclut à la présence atelier de taille) n'a été mise au jour. Les silex taillés
d'ateliers de taille du silex néolithiques comparables à et non taillés présents sur la totalité de la parcelle ont
ceux du « Camp-à-Cayaux » de Spiennes. Fin 1922, des été recueillis dans la couche de colluvions, au contact
sondages menés à l'arrêt du tram à Douvrain-Temple des sables immédiatement sous-jacents et dans les
livrent des artefacts en silex, tantôt épars tantôt plus structures archéologiques postérieures au Néoli-
concentrés, sur toute l'épaisseur des sables soit 1,2  m thique. L'assemblage est donc en position secondaire
à 1,5  m. Ceux-ci reposent directement sur le Crétacé et ne peut être considéré comme totalement homo-
(Houzeau  de Lehaie, 1922-1923). Entre 1936 et 1939, gène. Le sondage profond creusé jusqu'à 2,5  m de
des sondages ne dépassant pas 1,5  m de profondeur, profondeur n'a pas permis d'atteindre le Crétacé et
réalisés dans des jardins avoisinant le temple protestant n'a pas montré de banc de silex en place. Il a révélé
et le long de la rue Louis Caty, ont livré des ébauches de un substrat sableux extrêmement instable peu propice
hache et des outils sur éclat (Lefrancq, 1973). Des pros- au creusement de structures profondes. Les matières
pections pédestres réalisées en 2011 ont fourni quelques premières présentes sur le site comprennent par ordre
indices supplémentaires. Au cours de celles-ci, des d'importance du silex de type Ghlin, caractérisé par
déchets de taille, dont d'assez nombreux exemplaires un support en forme de plaquette, un cortex usé, une
en silex de type Ghlin, ont été collectés dans une prairie matrice grise à gris foncé mate présentant un litage et
située face au cimetière entre les rues du Temple, Louis des vermiculures caractéristiques, résultat de bioturba-
Caty et Pasteur Grégoire. Deux ébauches de hache en tions (156  pièces), des silex remaniés dans les sables
silex de type Ghlin ont été ramassées dans les déblais de thanétiens (37  pièces) et du silex turonien, au cortex
la construction d'une maison située au no 40 de la rue scoriacé et à la matrice foncée chargée de spicules
du Temple. d'éponges (37  pièces). Quelques artefacts en silex de
Ces découvertes successives laissaient donc espérer Villerot ou Obourg, à la matrice noire, fine et extrême-
la présence d'ateliers de taille et d'éventuelles structures ment homogène, sont identifiables. Par contre, aucune
d'extraction du silex en liaison avec ce type de vestiges. pièce en silex de type Spiennes n'a été identifiée. Il
La forte proportion de silex de type Ghlin renforçait s'agit pourtant d'une matière largement utilisée et
l'intérêt archéologique de cette intervention. En effet, diffusée dès le Néolithique moyen, au niveau régional
jusqu'à aujourd'hui on ne connaît pas la provenance mais également en dehors du Bassin de Mons (Bostyn
exacte de cette matière première utilisée abondam- & Collet, 2011). Près de 60 % des silex rencontrés sont
ment à partir du Néolithique ancien. taillés. Ce pourcentage varie fortement en fonction
de la matière première. Ainsi si la majorité des silex
L'intervention turoniens et la plupart des silex thanétiens sont bruts,

Quatre tranchées de sondage couvrant


l'ensemble de l'emprise ont été réalisées.
Leur orientation a été déterminée par des
contraintes d'accès au terrain et d'étroi-
tesse des parcelles. Leur profondeur était
limitée à 60  cm. La fouille à hauteur
des plots pouvait quant à elle atteindre
1,3  m de profondeur. Un sondage
profond réalisé en dehors de la zone
constructible a également été réalisé à la
pelle mécanique. Dix-huit structures ont
été repérées, relevées et photographiées
avant rebouchage. La totalité du silex
rencontré lors du creusement des
tranchées, qu'il soit taillé ou non, a été
collecté.

Résultats de l'intervention

Aucune structure archéologique attri-


buable au Néolithique et à la production
Baudour : plan des structures reconnues dans les tranchées de sondage.
d'outils en silex (puits d'extraction et
132

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Baudour : vue en plan du chemin à hauteur de la tranchée T1.

à l'inverse la majorité des silex de type Ghlin (environ du site (ST01, ST07, ST11, ST12, ST13, ST14, ST21 et
75 %) sont taillés. Les exemplaires non taillés en silex ST22). Les autres sont antérieures à cette couche de
de type Ghlin sont des fragments de plaquettes dont colluvions (ST02, ST04, ST06, ST09, ST15, ST16, ST17,
quelques-unes présentent un cortex verdi, mais sans ST18, ST19 et ST24). Parmi celles-ci, seul le fossé ST19
développement d'une zone sous-corticale brun orangé a livré quelques fragments de céramique datant des 17e
typique des silex thanétiens. La présence de fragments et 18e  siècles (identification par Cécile  Ansieau). Les
non taillés en silex de type Ghlin renforce l'hypothèse éléments céramiques hors structures découverts sur la
d'une origine locale pour ce matériau, même si l'em- parcelle sont datables des périodes s'échelonnant du
placement des affleurements reste à découvrir. Typolo- 16e au 18e siècle (identification par Cécile Ansieau et
giquement, un unique outil, un perçoir, a été collecté. Marceline Denis). La fosse ST18 a livré des moellons
Le reste des artefacts relève d'activités de taille et de de silex liés par du mortier. Il est à noter que la matière
débitage. La plupart des éclats et nucléus illustrent première est de type Ghlin et corrobore une probable
un débitage sur plaquettes avec production d'éclats origine locale de ce matériau.
et d'éclats laminaires. Quelques pièces diagnostiques
indiquent la production de pièces bifaciales (ébauches Bibliographie
et éclats de façonnage) ainsi que le débitage de lames ■■ Bostyn F. & Collet H., 2011. Diffusion du silex de Spiennes
(nucléus à lames, tablette d'avivage et lames). Alors et du silex Bartonien du Bassin parisien dans le Nord de la
que la production bifaciale daterait a priori au plus France et en Belgique de la fin du 5e  millénaire au début du
tôt du Néolithique moyen, la production laminaire 4e  millénaire BC  : une première approche. In  : Bostyn  F.,
pourrait, quant à elle, remonter au Néolithique ancien Martial  E. & Praud  I. (dir.), Le Néolithique du Nord de la
sous réserve d'une étude technologique plus poussée France dans son contexte européen : habitat et économie aux 4e et
3e millénaires avant notre ère. Actes du 29e colloque interrégional
du mobilier.
sur le Néolithique. Villeneuve-d'Ascq, 2-3 octobre 2009, Amiens
Dix-huit structures archéologiques postérieures au
(Revue archéologique de Picardie, n° spécial 28), p. 331-347.
Néolithique ont été identifiées. Il s'agit d'un chemin, de
■■ Collin J.-P., à paraître. Mining for a week or for centuries:
deux fossés et de fosses détritiques. Le chemin (ST09,
variable aims of flint extraction sites in the Mons Basin within
ST20, ST23 et ST24) large de 4 m présente une succes- the lithic economy of the Neolithic (Province of Hainaut,
sion d'ornières. Il est parallèle à la voirie actuelle de Belgium), Journal of Lithic Studies.
la rue du Temple et pourrait correspondre à l'Ancien ■■ Houzeau de Lehaie J., 1922-1923. Note préliminaire sur
Grand Chemin d'Hautrage qui doublait le Grand les ateliers de l'industrie néolithique spiennienne à Baudour
Chemin de Mons à Condé (Leblois, 1997). À l'excep- (Douvrain), Bulletin des Naturalistes de Mons et du Borinage, 5,
tion de la ST19, les structures n'ont pas livré d'élé- p. 20-23.
ments permettant de les dater. Stratigraphiquement,
plusieurs sont récentes. Elles sont postérieures à la
couche de colluvions présente sur la majeure partie
133

Toutes périodes Hainaut

■■ Leblois É., 1997. Témoins de la Préhistoire et de la Période


tions a été menée le 9 mars 2015, lors de l'enlèvement
gallo-romaine à Baudour. Bilan de 150  années de découvertes
archéologiques. Catalogue de l'exposition organisée à Baudour du de cette construction par le propriétaire.
13 au 17 septembre 1997, Saint-Ghislain, 38 p.
■■ Leblois É., 2000. Bilan de cent cinquante années de décou-
Le contexte historique
vertes archéologiques à Baudour. Première partie  : fouilles,
découvertes fortuites et prospections, Annales du Cercle La place Reine Astrid est de création relativement
d'Histoire et d'Archéologie de Saint-Ghislain et de la Région, 8, récente puisqu'elle a été réalisée en 1822. Elle s'appelait
p. 127-242. alors place du Parc car elle bordait le parc commu-
■■ Lefrancq M., 1973. Douvrain – Exploitation de silex. In  : nal. Elle a été agrandie considérablement en 1837
Archéologie de la Région de Mons. Le bassin de la Haine de avec le percement de la rue d'Espinoy. Les bâtisses
la Préhistoire au Mérovingien. Catalogue d'exposition, 1er au construites à cette époque sont de style néo-classique
30 septembre 1973, Mons, Maison de la Culture, p. 58-59. et sont l'œuvre des architectes B. Renard, A. Decraene
et Allard-Pecquereau. Au nord-ouest se trouve la salle
des concerts dessinée par B. Renard en 1822 (Bozière,
1864, p. 176 ; Pl. Reine Astrid, 1978). De ce côté s'éle-
Tournai/Tournai : sondages vaient jadis la halle des Consaux, ancien hôtel de ville,
archéologiques à l'arrière de l'ancien et la tour des Six qui servait de dépôt aux archives
communales (Bozière, 1864, p. 299). La première a été
garage Delune, place Reine Astrid
bâtie vers 1234-1237 et fut démolie en 1818 (Bozière,
1864, p. 299 et 303). Selon A.-F.-J. Bozière, la tour des
Isabelle Deramaix Six serait plus ancienne et aurait déjà été détruite lors
du sac de la ville par les Normands. Reconstruite à
Deux interventions archéologiques ont été menées plusieurs reprises, elle s'appuierait sur une tour appar-
par le Service de l'archéologie de la Direction exté- tenant à ce qu'il appelle la « seconde enceinte » de la ville
rieure du Hainaut 1 (DGO4 / Département du patri- (Bozière, 1864, p. 307-308), fortification qui depuis a
moine) sur le site de l'ancien garage Delune (parc. été reconsidérée comme la première enceinte commu-
cad.  :  Tournai, 1re  Div., Sect.  G, no  496e2  ; coord. nale, érigée entre 1187 et 1202 (Deramaix, Dury &
Lambert  : 80569  est/144219  nord), l'une en 2014, Sartieaux, 2002 ; Dury & Nazet, 1983, p. 223-238). Un
l'autre en 2015. Elles avaient le même objectif : repérer sondage effectué en 1943, au coin de la rue Garnier et
le tracé de la première enceinte communale au sein de de la place Reine Astrid, semble confirmer la présence
la parcelle afin que le bureau d'architecture puisse inté- de ce rempart sous les fondations de la tour des Six
grer au mieux ces vestiges dans le futur projet d'amé- (Amand, 1986, p. 171).
nagement. L'ancien établissement comprenait des Le passage de la première enceinte communale dans
bureaux et show-room en façade et un vaste hangar à ce quartier est bien illustré sur les plans anciens de la
l'arrière. C'est au sein de cet entrepôt qu'ont été réalisés ville connus aux 16e et 17e siècles (J. de Deventer, vers
les sondages, après démontage par le propriétaire de 1550  : Atlas des villes, 1884-1924  ; Le  Poivre, 1585-
la charpente métallique qui présentait des risques en 1622  ; G.  Bodenehr, 17e  siècle  : Thomas & Nazet,
termes de sécurité et santé. 1995, p.  88-89, 90-91, 146-147  ; Blaeu, 1574, réédité
Une longue tranchée de 1,60 m de large a été réalisée par Braun & Hogenberg en 1649, collection privée
sur quasi toute la longueur du site. Son extrémité nord- M.-A.  Jacques). Sur ces archives, le tracé du rempart
ouest se situe au niveau de caves anciennes déjà décou- aboutit à l'extrémité sud-est de la halle des Consaux,
vertes sur le site par les propriétaires et appartenant forme un angle à cet endroit pour longer ce bâtiment
à des demeures connues du 19e siècle. Sa profondeur au sud et se poursuit en ligne droite dans la parcelle qui
moyenne varie entre 1,20 m et 1,50 m. Ce sondage a été nous concerne. Sur ce tronçon, il est jalonné de tours
interrompu sur environ 3,50 m suite au passage d'une et bordé d'un fossé parfois inondé. Il ceinture une zone
conduite d'évacuation d'eau. Un décapage plus large peu bâtie où figure une chapelle : la chapelle Saint-Éloi,
a été effectué dans le secteur où des murs semblaient aujourd'hui partiellement conservée dans l'emprise du
correspondre aux vestiges recherchés. Un sondage site étudié. D'origine carolingienne cet édifice a été
profond au sud-est des murs F 006 et F 008 a permis reconstruit une première fois au 13e siècle puis en 1725
d'atteindre la base de ces maçonneries. Ces premiers (Bozière, 1864, p. 182 ; Jacques & Stocman, 2013).
travaux ont été effectués du 28 au 31 juillet 2014. Sur le plan en relief de 1701 (Vercauteren, 1965), la
La zone de décapage était contigüe à une fosse liée à première enceinte communale semble ne plus figu-
l'activité du garage. Les murs mis au jour se dirigeant rer et aucun bâtiment n'est installé sur la parcelle qui
sous cet aménagement, une seconde phase d'investiga- nous occupe hormis la chapelle. Les plans postérieurs
134

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Tournai, place Reine Astrid : plan général des vestiges (infographie P.-P. Sartieaux, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).
135

Toutes périodes Hainaut

(Grand Atlas, 2009, carte 21B ; plan de Tournai en 1863 0,85 m de large et est conservé en fondation sur 1 m de
dans Bozière, 1864, pl.  I) n'offrent pas de précisions haut. Il est percé d'un caniveau dont la couverture et le
sur la nature de l'occupation de la parcelle. Il s'agit sol sont formés de grandes dalles en pierre de Tournai.
souvent d'un pâté de couleur qui laisse supposer qu'elle Ce caniveau se poursuit vers le sud-est où il plonge à
est entièrement bâtie. Par contre sur les cadastres du 45° vers un faux-puits qui n'a pu être dégagé suite au
19e siècle (plan de P.-C. Popp, notamment), la moitié passage en oblique de l'égout encore en usage. Il est
méridionale est exempte de constructions, l'autre est encadré à cet endroit de dalles en pierre irrégulières et
clairement occupée par des édifices dont l'accès se fait non cimentées. Ses parois sont réalisées en brique.
via la rue Saint-Martin. Parmi ceux-ci figure l'hôtel de Entre les murs F  001 et F  003 se trouve une vaste
Saint-Génois réalisé pour Nicolas-François de Saint- fosse quadrangulaire (F  005) de 3  m de long sur au
Génois par le père de l'architecte B.  Renard. Cette moins 1,50 m de large. Recoupée dans la tranchée, elle
maison de maître a été rachetée en 1839 par le baron de a juste été repérée, mais pas fouillée. Elle s'enfonce à
Rasse, bourgmestre et sénateur (Bozière, 1864, p. 182). plus de 1 m de profondeur. Son remplissage est prin-
Selon Soil  de  Moriamé (1895, p.  43), la construction cipalement constitué de limons gris-brun panachés de
remonterait au 17e siècle avec façade et avant-cour de boulettes jaunes qui dessinent un remplissage concen-
style Louis XVI. Vendu en 1947, cet immeuble dispa- trique.
raît avant 1951 au profit entre autres du garage Delune Un troisième mur (F 006) a été mis au jour au sud-
(Benoît Dochy, communication personnelle). est du mur F 001. Il se situe à 7,50 m de ce dernier. Sur
le profil nord-est de la tranchée (profil 2), on observe
Les résultats des interventions que ce mur s'installe au nord-ouest contre des strates
(US  024 à US  027) offrant un pendage de 45° nord-
Dans la tranchée réalisée en 2014 s'observe au nord- ouest/sud-est. De plus, il est en fondation de ce côté et
ouest une cave dont subsistent les départs de la voûte est doté d'un parement soigné à l'opposé. Ces observa-
en brique (US 007) et la paroi sud-est (US 006). Cette tions laissent à penser que ce mur retient des terres en
dernière, en brique (25  × 11,5  × 5 cm), s'appuie sur bordure d'un fossé. De plus le remplissage collé contre
un mur en fondation (F  003) constitué de moellons le parement soigné correspond assez bien aux rejets de
et rares briques liés par un mortier à base de chaux. destruction du mur lors de son abandon (US 022).
Large de 0,50  m, celui-ci est doté au sud-est d'une Le mur F  006 est arasé à 1,20  m de profondeur. À
excroissance arrondie. Sa base n'a pas été atteinte à ce niveau, il ne mesure que 0,50 m de large. Il offre un
1,30  m de profondeur. À 9  m de ce mur se situe un léger fruit du côté parementé. Il est suivi sur 4,50 m de
second disposé parallèlement et exclusivement réalisé long et s'interrompt au sud-ouest sans retour perpen-
en pierre (moellons bruts et équarris) cimentée par un diculaire. Il est réalisé en calcaire de Tournai cimenté
mortier blanchâtre à base de chaux (F 001). Il mesure par un mortier crème à base de chaux. L'appareil,

Profil 2 (infographie P.-P. Sartieaux, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).


136

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

de gabarit moyen, est réglé au sud-est. De ce côté, il d'un parement supplémentaire qui renforce le rempart
présente deux ressauts successifs de 0,20 m d'épaisseur sur sa face externe (Amand, 1986 ; Deramaix, Dury &
et d'une trentaine de centimètres de haut constitués Sartieaux, 2002). Cela sous-entend dès lors que le mur
d'assises irrégulières de moellons de petit gabarit déli- primitif a aujourd'hui disparu et que sa base était plus
mités à l'extrémité sud-ouest par un bloc équarri. haute puisqu'elle n'est pas perceptible dans le profil 2.
L'extrémité du mur F  006 est perturbée par le Ce qui est cohérent par rapport aux observations réali-
passage de buses en grès. Cette perturbation ne permet sées sur le site des Douze  Césars. À nouveau, à cette
pas d'appréhender le lien précis qu'il entretient avec le hypothèse s'oppose la faible largeur de la maçonnerie
mur F  008 qui débute à cet endroit. Ce dernier mur du mur F  006, puisque les dimensions relevées pour
est conservé sur près de 1 m de haut avant d'être arasé ces aménagements atteignent au moins 0,80 m. Enfin,
quasi à sa base sous la fosse de garage. Il présente dans il est aussi difficile de comprendre l'interruption du
sa partie supérieure quelques assises qui semblent mur à cet endroit.
parementées en appareil irrégulier du côté sud-est, Les autres murs (F  008, F  009, F  013 et F  014)
alors qu'il est surtout en fondation. Il tend à s'évaser témoignent clairement de constructions domes-
vers la base, de ce fait, il mesure 0,60 m à son point le tiques et non plus défensives. Peu d'indices matériels
plus haut d'arasement et 0,80  m à son niveau le plus permettent actuellement de les dater. Ils sont antérieurs
bas. Il est réalisé principalement en pierre calcaire de au 19e  siècle car ils ne figurent pas sur les premiers
Tournai associée à quelques briques liées par mortier cadastres réalisés à cette période. Ils pourraient être
beige à base de chaux. postérieurs au 17e siècle, car, avant cette date, les plans
À 9,65  m de son extrémité nord-est, le mur F  008 anciens de la ville montrent toujours la première
est chaîné avec un autre, perpendiculaire, de même enceinte communale bordée de son fossé. Néanmoins,
constitution et arasé au même niveau (F 009). Celui-ci cette supposition doit être toute relative, car les fouilles
s'appuie contre le mur F 012, situé à la limite d'emprise menées à l'ancien hôpital Saint-Georges ont mis en
de la fouille. Ce dernier semble en fondation, consti- évidence le manque de fiabilité de ces documents en
tué de pierres liées par un mortier blanchâtre à base ce qui concerne la représentation de cette fortification
de chaux. (Deramaix, 2013).
Contre le mur F  009, et dans l'axe du mur F  008,
s'installe le mur F 014. Il est réalisé en pierre calcaire
de Tournai associée à de rares briques cimentées par
un mortier beige à base de chaux. Il mesure entre 0,55
et 0,60  m de large. Il semble servir d'appui au mur
F 013. Ce dernier est réalisé principalement en brique
(24  × 11,5  × 5,5  cm) avec de gros blocs équarris. Il
dispose d'une baie de 0,60  m de large, délimitée par
deux piédroits en brique encadrant un seuil en pierre
calcaire (US 043). La face sud-est de ce mur est renfor-
cée par un parement en brique (24 × 11,5 × 5,5 cm) de
la largeur d'une brique (US 045 et US 046). Ces aména-
gements sont à la limite d'emprise de la propriété et
Tournai, place Reine Astrid : vue générale des fouilles.
sont perturbés par les fondations du mur qui clôt la
parcelle.
Conclusion
Interprétations générales
Les sondages réalisés à l'arrière de l'ancien garage Delune
Les murs F  001 et F  003 appartiennent à l'hôtel de à Tournai n'ont pas livré de vestiges concrets pouvant
Saint-Génois identifiable sur les cadastres du 19e siècle. être attribués à la première enceinte communale. Tout
La position stratigraphique du mur F 006 et sa face au plus le mur F 006 pourrait être un réaménagement
parementée semblent indiquer qu'il limite le fossé sur le tracé de celle-ci vu son parement soigné qui borde
périphérique à l'enceinte. Toutefois, sa faible épaisseur vraisemblablement l'ancien fossé défensif.
pose question et ne semble pas correspondre à un mur Les autres vestiges mis au jour conduisent à davan-
de courtine. En effet, les vestiges connus de la première tage de questions sur la pérennité de cette fortification
enceinte livrent à leur base des largeurs comprises dans ce quartier au cours des siècles qui ont suivi son
entre 1,20 m et 1,50 m. Il pourrait s'agir, comme sur abandon. Les limites de la fouille actuelle ne permettent
les sites du Marché au Jambon et des Douze  Césars, pas d'aller plus loin dans les interprétations.
137

Toutes périodes Hainaut

Ces premières interventions archéologiques devront ■■ Le Poivre P., 1585-1622. Recueil de plans de villes et de
être suivies d'une fouille préventive sur l'ensemble du châteaux, de fortifications et de batailles, de cartes topographiques
site lors de la demande de permis d'urbanisme, ce qui et géographiques, se rapportant aux règnes de Charles-Quint, de
permettra peut-être de mieux comprendre les vestiges Philippe II et d'Albert et Isabelle, s.l., pl. 46 (Description du siege
de la ville de Tournay, 1582).
déjà exhumés.
Avec la collaboration de Benoît Dochy

Bibliographie
■■ Amand M., 1986. Les enceintes médiévales de Tournai  :
documents inédits. In : Autour de la ville en Hainaut. Mélanges
d'archéologie et d'histoire urbaines offerts à Jean  Dugnoille et à
René Sansen à l'occasion du 75e anniversaire du C.R.H.A.A.,
Ath (Études et Documents du Cercle royal d'Histoire et d'Ar-
chéologie d'Ath et de la Région et musées athois, VII), p. 161-174.
■■ Atlas des villes, 1884-1924. Atlas des villes de la Belgique au
xvie siècle. Plans du géographe Jacques de Deventer exécutés sur
les ordres de Charles-Quint et de Philippe II, reproduction fac-
similé exécutée à l'Institut national de Géographie, Bruxelles.
■■ Bozière A.-F.-J., 1864 [1976]. Tournai ancien et moderne,
Bruxelles (réimpression anastatique).
■■ Deramaix I., 2013. Tournai/Tournai : fouilles préventives sur
le site de l'ancien hôpital Saint-Georges, Chronique de l'Archéo-
logie wallonne, 20, p. 130-132.
■■ Deramaix I., Dury C. & Sartieaux P., 2002. Fouilles
préventives à l'îlot des Douze Césars à Tournai. Un nouveau
regard sur la première enceinte communale. In  : Sixième
Congrès de l'Association des cercles francophones d'Histoire et
d'Archéologie de Belgique et LIIIe  Congrès de la Fédération des
cercles d'Archéologie et d'Histoire de Belgique. Congrès de Mons.
25, 26 et 27 août 2000. Actes. II, Mons, p. 131-141.
■■ Dury C. & Nazet J., 1983. Tournai. In  : Les enceintes
urbaines en Hainaut, Bruxelles, Crédit communal de Belgique,
p. 223-254.
■■ Grand Atlas, 2009. Le grand atlas de Ferraris. Le premier atlas
de la Belgique. 1777. Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens et
de la Principauté de Liège, Bruxelles.
■■ Jacques M.-A. & Stocman R., 2013. Deux chapelles jumelles
de haute antiquité à la rue Saint-Martin  : Saint-Éloi et Saint-
Pierre, Bulletin Pasquier Grenier, 114, p. 3-8.
■■ Pl. Reine Astrid, 1978. Pl. Reine Astrid. In  : Province de
Hainaut. Arrondissement de Tournai (T-W). Arrondissement de
Mouscron, tome 2 (A-T), Liège (Le Patrimoine monumental de
la Belgique, 62), p. 735-736.
■■ Soil de Moriamé E.-J., 1895. Tournai archéologique en 1895,
Tournai, Casterman.
■■ Thomas F. & Nazet J. (dir.), 1995. Tournai. Une ville, un fleuve
(xvie-xviie siècle), Bruxelles, Crédit communal de Belgique.
■■ Vercauteren F., 1965. Plans en relief de villes belges levés
par des ingénieurs militaires français, xviie-xixe siècle. Tournai,
Bruxelles, Pro Civitate (Collection Histoire, série in- 4o, 1).

Sources
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
développement de la ville de Tournay (intra muros).
Liège

Herstal/Milmort  : cave gallo-romaine (photo S.  de  Bernardy de  Sigoyer, Serv. archéologie,
Dir. ext. Liège 1).
139

Juprelle Hermalle-sous-Argenteau
Oupeye
Milmort
Herstal Welkenraedt
Rocourt
Jupille- Soumagne
sur-Meuse
Ayeneux
Mons-lez-Liège
Olne Verviers
Soiron
Pepinster
Villers-le-Bouillet
Amay Esneux
Theux
Huy

Vierset-Barse
Anthisnes

Terwagne
Malmedy
Clavier La Gleize
Ferrières Stavelot
Vieuxville Stoumont

Carte administrative des communes de la province de Liège visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée

Éditorial
Ce qui interpelle cette fois n'est pas le lot de découvertes, certes parfois très significatives et qui donnent de l'attrait à
cette cuvée, mais la consistance en croissance continue de l'apport du monde associatif qui porte un regard attentif
sur le destin de notre patrimoine archéologique. Ces attentions de veilleur sont d'autant plus pertinentes qu'elles
émanent de fins et expérimentés connaisseurs d'un terroir et d'autant plus efficaces qu'elles s'initient dans l'immé-
diateté, grâce à la proximité physique des protagonistes. De la plus petite à la plus grande, ce genre de démarche est
à louer ; chacune des informations enrichit nos inventaires cartographiés et plus généralement le corpus de notre
histoire régionale.
D'un point de vue méthodologique, nous retiendrons aussi le travail de réexamen de la coupe de Rocourt, site
éponyme du sol préhistorique bien connu. Outre que cette analyse vise à donner un souffle nouveau dans notre
connaissance de ces enregistrements sédimentaires et dans celle de la chronologie de l'occupation préhistorique, le
travail contribue également à documenter toute une partie du plateau liégeois, localisée au sud du site classé, dans
la perspective de pouvoir anticiper les travaux d'infrastructure envisagés dans ce secteur. Ce n'est plus seulement un
seul profil qui retiendra notre attention mais le secteur dans lequel nos spécialistes auront diagnostiqué et localisé les
horizons porteurs de connaissance.
Les débats avec nos collègues géologues et pédologues se poursuivront également à propos des énigmatiques
«  puits  » de Herstal/Milmort. Les archéologues pensent y voir le résultat d'actions anthropiques, du creusement
au comblement ; les spécialistes des sciences de la terre y discernent plutôt le résultat d'évènements de dissolution
du substrat crayeux. Le débat est d'autant plus animé que ces puits côtoient intimement l'habitat gallo-romain ; se
clora-t-il au terme de l'examen des carottes de sédiments prélevées dans leur comblement, la recherche dans ces
profondeurs « abyssales » (aux environs de 15 m de profondeur) s'étant révélée impossible à mener. Pour autant qu'il
s'agisse de structures anthropiques, l'enjeu consiste à savoir à quelle époque a débuté ou s'est prolongée l'exploitation
des ressources souterraines hesbignonnes.
Jean-Marc Léotard
140

Chronique de l’Archéologie wallonne

Herstal/Milmort : tête de puits jouxtant la cave gallo-romaine (photo S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
141

Préhistoire Liège

PRÉHISTOIRE
Ferrières/Vieuxville : datation
radiocarbone d'une calvaria humaine au
Trou du Renard/Grotte Geneviève

Michel Toussaint, Olivier Vrielynck


et Benoît Wéry

Le laboratoire de datation 14C de l'Institut royal du


Patrimoine artistique (IRPA) vient de réaliser la date
radiocarbone par AMS d'une calvaria (crâne sans
face ni mandibule) humaine découverte dans une
grotte située à Logne, sur la rive droite de la Lembrée,
un petit affluent de rive droite de l'Ourthe. La cavité
s'ouvre au sud-ouest, juste en face du versant nord
du château médiéval de Logne (parc. cad. : Ferrières,
2e  Div., Vieuxville, Sect.  A, no  995t2  ; coord. Lambert
2008 : 732870 est/621330 nord ; altitude : 155 m). Elle
se présente sous la forme d'un couloir sub-horizontal
atteignant une cinquantaine de mètres de longueur
qui se développe dans le calcaire dévonien (étage
frasnien) du synclinorium de Dinant, à l'extrémité est
de la Calestienne. Ce massif calcaire est traversé par
l'Ourthe et la Lembrée qui l'incisent profondément.
L'encaissement progressif de la vallée de l'Ourthe a été
suivi par celui de l'hydrologie karstique, d'où la situa-
tion perchée de la cavité 25 m au-dessus du niveau de
la rivière.
Cette grotte est essentiellement connue sous deux
noms, « Trou du Renard » et « Grotte Geneviève ». Le
premier est d'usage dans les milieux spéléologiques.
On le trouve entre autres dans divers ouvrages
(Anciaux, 1950, p.  297) et atlas (Dubois, 1981  ;
De Broyer et al., 1996) relatifs aux cavités karstiques.
Le second est attesté par la tradition orale. Il est
notamment utilisé dans les documents touristiques
locaux, par exemple sur le panneau d'informations
situé au bord de la route que surplombe la grotte. Il

Entrée du Trou du Renard/Grotte Geneviève (photo J. Éloy, Plan du Trou du Renard/Grotte Geneviève (modifié, d'après
AWEM). Dubois, 1981).
142

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

évoquerait le nom d'une femme pauvre, mise au ban de la glabelle ni des arcades sourcilières. La face et la
de la communauté villageoise, qui aurait trouvé refuge mandibule manquent ; aucune dent n'a été récoltée.
dans la grotte. Cette histoire en rappelle une autre, Le fossile est large, avec 15,2 cm de dimension maxi-
celle de Gertrude  Frankignoul, une mendiante aussi male (Martin  8). Sa longueur (Martin  1) ne peut être
appelée Mère Gaieté, qui aurait habité une cabane mesurée avec précision mais est estimée à quelque 18 cm.
édifiée à l'entrée de la cavité en 1807 (Fanon, 1965). Le La hauteur de la calotte (basion-bregma, Martin 17) est
docteur Bovy (1839) parle également de cette masure de 13,2 cm. Le profil médian du sommet du crâne, tant
adossée à une grotte sur le toit de laquelle broutait une dans la partie arrière du frontal que sur l'essentiel de la
chèvre, tandis que Jérôme  Pimpurniaux (1856-1858) suture sagittale, est en légère pente. La mastoïde droite,
indique la présence d'une pauvre famille habitant la la seule conservée, atteint le plan des deux condyles
cabane construite à l'entrée d'une grotte. On pouvait occipitaux ; elle est assez robuste. La capacité crânienne
encore observer, il y une vingtaine d'années, les calculée à partir de la première formule du tableau 1 de
fondations maintenant en grande partie disparues de Olivier et al. (1978) est de 1 550 cm3.
ce qui semblait être un mur fermant le porche d'entrée. Le sujet était un adulte, ni très jeune, ni sénile. Sur
On notera qu'une dernière appellation, tout aussi base du degré de fermeture des cinq sites du système
anecdotique, a parfois été utilisée : « Trou des Nutons » antéro-latéral de Meindl et Lovejoy (1985 ; niveaux de
(Cosyn, s.d.) – un de plus – qui désigne plutôt un trou fermeture 2 à 3 sur le crâne de Logne), le sujet corres-
fréquenté par des Nutons (Fanon, 1965). pond à un âge moyen de 52 ans avec une variation de
L'échantillon daté, un petit fragment de frontal, a 33 à 76 ans. Par rapport aux sept sites du système de la
été soumis au laboratoire en 2015. Le résultat est de voûte, l'âge moyen serait de 49 ans, avec un intervalle
4080 ± 31 BP, soit entre 2860 et 2490 BP en date cali- de variation de 30 à 71 ans.
brée à deux sigmas (RICH-22897, FE/VXV/GEN 01). Le sexe du défunt est plus délicat à estimer dans la
Une telle datation situe le crâne au Néolithique final. mesure où seul l'os coxal, ici absent, peut fournir une
Le fossile a été découvert tout au fond de la cavité, au diagnose réellement fiable. Sur le crâne, la largeur
début des années 2010, par des jeunes qui tentaient de bizygomatique (Martin  45) manque mais dépassait
désobstruer le conduit. Il a été remis en 2014 au musée clairement 142  mm  ; en utilisant notamment cette
du château fort de Logne par un résident néerlando- valeur minimale, diverses équations discriminantes
phone de Vieuxville, M. Wolter Ten Bokkel Huinink, permettent d'émettre l'hypothèse d'un sujet masculin
qui l'avait lui-même reçu. Aucun contexte stratigra- (Defrise-Gussenhoven, 1966 ; Henke, 1973 ; Leguebe
phique n'a été noté lors de la trouvaille. & Albert, 1981, fonction totale à trois variables).
La calvaria, qui a reçu des coups récents engendrant Entre son utilisation à la fin du Néolithique attestée
des manques, comprend encore l'os occipital complet, par le crâne daté au radiocarbone et les occupations
donc la base du crâne avec le trou occipital et les condyles modernes représentées par les personnes qui ont résidé
occipitaux, le temporal droit complet, le pariétal droit à l'entrée du site, la grotte a connu d'autres phases d'oc-
complet, l'essentiel du pariétal gauche, la grande aile cupation. Ainsi quelques tessons de poterie récoltés
du sphénoïde droit, l'écaille du frontal mais pas la zone sous le porche d'entrée semblent indiquer une occu-
pation du lieu entre le Bas Moyen Âge et
le 17e  siècle (détermination par Sophie
Challe, Direction de l'archéologie).
Le Trou du Renard/Grotte Geneviève
est loin d'être le seul site du bassin de
l'Ourthe à avoir livré des sépultures et
des ossements humains isolés du Néoli-
thique. En effet, rien qu'entre Hotton,
où elle quitte l'Ardenne pour entrer en
Calestienne, et le confluent de l'Amblève
à Comblain-au-Pont, la vallée a livré
plusieurs dizaines de sépultures en milieu
karstique, le plus souvent plurielles, ainsi
que deux allées couvertes. D'autres sépul-
tures ont en outre été trouvées plus en
aval, entre Comblain-au-Pont et Liège.
En matière d'attribution culturelle, le
Calibration de la datation du crâne du Trou du Renard/Grotte Geneviève.
Trou de la Heid relève de la fin du Néoli-
143

Préhistoire Liège

Le crâne du Trou du Renard/Grotte Geneviève : a. Vue latérale droite ; b. Vue antérieure (photos J. Éloy, AWEM).

thique moyen de type Michelsberg, avec des pointes ■■ Bovy J.P.P., 1839. Huitième promenade. Bords de l'Amblève
en silex et de la céramique caractéristique (Toussaint et de l'Ourthe. In : Promenades historiques dans le Pays de Liège,
& Becker, 1994). Les ossements humains de la grotte II, Liège, p. 123-124.
de la Brouette à My ont fourni deux datations assez ■■ Cosyn M., s.d. La vallée de l'Ourthe, Bruxelles, Guides Cosyn.
similaires mais sans matériel archéologique corres- ■■ De Broyer C., Thys G., Fairon J., Michel G. & Vrolix M.,
pondant (Moreau, Groenen & Otte, 2013). Les autres 1996. Atlas du karst wallon. Province de Liège. Inventaire carto-
sépultures datées au radiocarbone correspondent au graphique et descriptif des sites karstiques et des rivières souter-
Néolithique récent/final. Dans la vallée de la Lembrée raines de Wallonie, 3 vol., s.l., Commission wallonne d'Étude et
où s'ouvre le Trou du Renard/Grotte Geneviève, c'est de Protection des sites souterrains.
ainsi le cas du Trou de la PJ, à Ferrières (Toussaint, ■■ Defrise-Gussenhoven E., 1966. A Masculinity-Feminity
Masy & Léotard,1994). C'est aussi celui de la grotte de Scale Based on a Discriminant Function, Acta Genetica et Statis-
tica Medica, 16, p. 198-208.
La Préalle II, à Heyd (Toussaint, 2002), comme d'ail-
leurs des deux allées couvertes sépulcrales de Wéris ■■ Dubois J., 1981. Cavités karstiques de la province de Liège  :
inventaire des phénomènes karstiques pénétrables tels que  :
(Toussaint, Frébutte & Hubert, 2009).
abîme, abri, caverne, chantoir, faille, grotte, puits et trou, 2 vol.,
Les vicissitudes de la calvaria du Trou du Renard/
Liège (Mémoires de la Société wallonne de Palethnologie, 2).
Grotte Geneviève soulignent une fois encore l'impor-
■■ Fanon M., 1965. Contes et légendes de chez nous, Vieuxville-
tance des menaces que court le patrimoine archéolo-
Sy-Logne, Syndicat d'initiative, 14 p.
gique du karst wallon, soumis à de multiples pressions,
■■ Henke W., 1973. Zur Methode der diskriminanzanalytischen
dues notamment à des désobstructions spéléologiques,
Geschlechtspazität und Hirnschädelwölbung im Genus Homo,
à des activités de carrières et à des collectionneurs sans
Homo, 15, p. 218-224.
guère d'éthique patrimoniale. De tels risques sont
■■ Leguebe A. & Albert A., 1981. Détermination du sexe
souvent sous-estimés, car se déroulant dans des zones
des crânes au moyen de l'analyse discriminante logistique,
peu accessibles et guère fréquentées. Pourtant, si on Zeitschrift für Morphologie und Anthropologie, 72, p. 172-179.
n'y prend pas assez garde, c'est tout un pan du passé
■■ Meindl R.S. & Lovejoy C.O., 1985. Ectocranial Suture
régional qui risque de s'effacer dans le silence des bois
Closure: A Revised Method for the Determination of Skeletal
et des falaises. Age at Death Based on the Lateral-Anterior Sutures, American
Signalons, pour terminer, que la calvaria du Trou Journal of Physical Anthropology, 68, p. 57-66.
du Renard/Grotte Geneviève est conservée dans les ■■ Moreau L., Groenen M. & Otte M., 2013. Ferrières/
collections du musée du château fort de Logne. My  : campagne de fouille 2011 dans la grotte de la Brouette,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 137-140.
Bibliographie ■■ Olivier G., Aaron C., Fully G. & Tissier G., 1978. New
■■ Anciaux F., 1950. Explorons nos cavernes, Dinant, éditions du Estimation of Stature and Cranial Capacity in Modern Man,
Guide de la Nature, 315 p. Journal of Human Evolution, 7, p. 513-518.
144

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

■■ Pimpurniaux J., 1856-1858 [1981]. Guide du voyageur en constitue toujours, à l'heure actuelle, le marqueur du
Ardenne ou Excursions d'un touriste belge en Belgique, Bruxelles dernier interglaciaire (Eemien) et du Début glaciaire
(réimpression anastatique). weischsélien en contexte lœssique (Haesaerts et
■■ Toussaint M., 2002. Durbuy/Heyd  : positionnement al., 2016). Immédiatement au-dessus du «  Sol de
chronologique de l'ossuaire de La Préalle II par AMS, Chronique Rocourt  », Gullentops (1954) décrit la présence d'un
de l'Archéologie wallonne, 10, p. 176-179. épais limon humifère, connu aujourd'hui comme
■■ Toussaint M. & Becker A., 1994. Une sépulture du «  Complexe humifère de Remicourt  » (Haesaerts,
Michelsberg : le trou de la Heid à Comblain-au-Pont (province Mestdagh & Bosquet, 1997). Dans ce limon humifère,
de Liège, Belgique), Bulletin de la Société préhistorique française, il mentionne en outre la présence d'un téphra à ensta-
91 (1), p. 77-84.
tite (Gullentops, 1954), rebaptisé par la suite « Téphra
■■ Toussaint M., Frébutte C. & Hubert F. (dir.), 2009. de Rocourt  » (Juvigné, 1977  ; Pouclet, Juvigné &
Le «  champ mégalithique de Wéris  ». Fouilles de 1979 à 2001.
Pirson, 2008). La sablière Gritten constitue donc le site
Volume 2. Rapports de fouilles, Namur (Études et Documents,
éponyme du Pédocomplexe de Rocourt et du Téphra
Archéologie, 15), 320 p.
de Rocourt.
■■ Toussaint M., Masy P. & Léotard J.-M., 1994. La sépulture
La présence de matériel archéologique dans la sablière,
collective du trou de la PJ à Ferrières (prov. de Liège) : note
préliminaire, Notae Praehistoricae, 14, p. 195-199.
notamment un éclat Levallois, est mentionnée pour la
première fois en 1911 lors d'une visite du site par Victor
Commont, le célèbre naturaliste de la région d'Amiens
(Lohest & Fraipont, 1911-1912). Après Commont,
quelques découvertes ponctuelles furent également
Liège/Rocourt : étude stratigraphique réalisées (Haesaerts, Di  Modica & Pirson, 2011), mais
de la coupe de lœss du site classé de la c'est en février 1977 qu'une concentration d'artefacts
sablière Gritten lithiques fut identifiée et fouillée par l'Institut royal
des Sciences naturelles de Belgique (Haesaerts, 1978  ;
Otte, Boëda & Haesaerts, 1990 ; Haesaerts, Di Modica
Stéphane Pirson, Paul Spagna, & Pirson, 2011). Plusieurs centaines d'artefacts répar-
Dominique Bosquet, Simon Delvoie, tis sur une trentaine de mètres carrés furent ainsi mis
Kévin Di Modica, Paul Haesaerts, au jour au sommet du Pédocomplexe de Rocourt, dans
Étienne Juvigné et Pierre van der Sloot un équivalent de l'«  Horizon blanchi de Momalle  »
défini à Remicourt à la fin des années 1990 (Haesaerts,
Introduction Mestdagh & Bosquet, 1997  ; 1999). Cet horizon est
rattaché à un épisode froid de la fin du Début glaciaire
La sablière Gritten, située sur l'interfluve Meuse- weichsélien  ; le matériel pourrait donc se positionner
Geer à Rocourt, a été en activité jusqu'en 1986. Elle dans le SIM 5b, vers 87 000 ans, ou dans le SIM 5a, vers
exploitait les sables oligocènes accessibles sous une 80 000 ans (Haesaerts, Di Modica & Pirson, 2011 ; Pirson
couverture lœssique d'épaisseur variable (parc. cad.  : & Di  Modica, 2011). L'intérêt principal de ce matériel
Liège, 29e Div., Rocourt, Sect. A, nos 154A, 192H, 192S, lithique est qu'il a été un des premiers à permettre la
192T, 198B et 225L). L'importance scientifique du site, reconnaissance d'une industrie laminaire en contexte du
de renommée internationale, réside à la fois dans Paléolithique moyen (Haesaerts, 1978  ; Otte, Boëda &
son intérêt pour la géologie du Quaternaire et pour Haesaerts, 1990 ; Haesaerts, Di Modica & Pirson, 2011).
l'archéologie préhistorique. Ces différents aspects
ont récemment fait l'objet d'une synthèse (Haesaerts,
Di Modica & Pirson, 2011). Ils sont résumés ci-après.
L'intérêt géologique du site date des travaux que
F. Gullentops y effectua dans le cadre de sa thèse. Cet
auteur y reconnut trois générations de lœss, respec-
tivement attribuées au Hennuyen, au Hesbayen et au
Brabantien, séparées par deux paléosols  : le «  Sol de
Rocourt » et le « Sol de Kesselt » (Gullentops, 1954).
Le concept du «  Sol de Kesselt  » a depuis été aban-
donné (Haesaerts et al., 1981 ; Haesaerts, Di Modica
& Pirson, 2011  ; Juvigné et al., 1996). Par contre, le
« Sol de Rocourt », rebaptisé depuis « Pédocomplexe
Rocourt, sablière Gritten : vue générale du secteur étudié.
de Rocourt  » (Pirson, 2007  ; Haesaerts et al., 2016),
145

Préhistoire Liège

Rocourt, sablière Gritten : log stratigraphique relevée en 2015. Unités lithostratigraphiques (Haesaerts, Pirson & Meijs, 2011) : les
Membres de Brabant, de Hesbaye, de Vellereille et de Warneton (Warn.) appartiennent à la Formation de Gembloux ; le Membre
du Hainaut appartient à la Formation de Veldwezelt. Principaux horizons repères (Haesaerts et al., 2016) : HLN : Horizon à langues
de Nagelbeek ; TE : Téphra d'Eltville ; TR : Téphra de Rocourt ; GT : gley de toundra ; Ki-A : Sol de Kincamp A ; CHR : Complexe
humifère de Remicourt ; HBM : Horizon blanchi de Momalle ; VSG-B : Sol de Villers-Saint-Ghislain B ; Harm. : Sol d'Harmignies.
Symboles graphiques  : 1.  Horizon humifère  ; 2.  Krotovine  ; 3.  Horizon Bt d'un sol lessivé  ; 4.  Horizon légèrement plus foncé  ;
5. Lœss ; 6. Sable ; 7. Limon blanc (Horizon blanchi de Momalle) ; 8. Galets ; 9. Taches d'hydroxydes de fer ; 10. Glosse (langue de
déferrification) ; 11. Coin de glace.
146

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

Dès la fin de l'exploitation de la sablière en 1986, – comparaison de la stratigraphie observée avec les
son remblaiement fut entamé (communication orale données connues. En particulier, confrontation avec la
C.  Gritten). Le 13  février 2001, une portion de la position du matériel archéologique, connue d'après les
coupe de Rocourt fut classée comme site par arrêté travaux de P. Haesaerts (IRSNB).
ministériel, ce qui eut pour effet d'interrompre le La seconde intervention consiste à évaluer le
remblaiement. L'intervention, objet de cette notice, potentiel archéologique du site (extension du gise-
répond à la volonté du propriétaire de terminer le ment archéologique). Pour ce faire, des sondages
remblayage de la carrière pour une remise en culture à la tarière manuelle sont envisagés sur le plateau
de la parcelle concernée (parc. cad.  : Liège, 29e  Div., afin de déterminer le pendage du Complexe humi-
Rocourt, Sect.  A, no  198B). Dans les années précé- fère de Remicourt (CHR), horizon caractéristique
dentes, le maintien d'un accès à la coupe se justifiait immédiatement sus-jacent au matériel archéo-
dans la mesure où celle-ci servait de stratotype pour logique fouillé dans les années 1970 et servant de
le Pédocomplexe de Rocourt. Toutefois, depuis 2007, repère aisément identifiable en sondage. Les essais
une nouvelle coupe de référence a été identifiée dans de pénétration statique contribueront également à
la carrière CBR de Romont, à Eben-Emael. Elle est la localisation du Pédocomplexe de Rocourt et du
beaucoup plus complète que celle de Rocourt, notam- Complexe humifère de Remicourt. Des travaux
ment pour la partie englobant le pédocomplexe. Cette récents (Delvoie et al., 2016a  ; 2016b) ont en effet
nouvelle coupe a été proposée comme nouveau strato- montré le potentiel de cette méthode pour localiser
type du Téphra de Rocourt (Juvigné et al., 2008) mais ces deux marqueurs stratigraphiques qui présentent
également comme stratotype pour la séquence des un grand intérêt pour l'archéologie préhistorique
lœss de Moyenne Belgique (Haesaerts, Pirson & Meijs, étant donné qu'ils concentrent la plupart des sites
2011). Dès lors, le remblayage était envisageable, dans du Paléolithique moyen en contexte lœssique en
la mesure où il permettra une meilleure protection du Belgique et en France (Locht & Depaepe, 2011  ;
site archéologique. Locht et al., 2015 ; Pirson & Di Modica, 2011 ; Di
Modica et al., 2016). De plus, cette méthode pour-
Objectifs de l'intervention rait contribuer à affiner le zonage archéologique de
la Wallonie (Landenne, 2011) pour cette période en
Deux interventions complémentaires sont prévues contexte lœssique.
avant le remblayage de l'ancienne carrière.
La première concerne l'enregistrement détaillé de Premiers résultats et perspectives
la stratigraphie de ce site majeur pour la géologie du
Quaternaire et la préhistoire du nord-ouest européen. En 2015, seule l'intervention concernant l'enregistre-
Dans le détail, il s'agit d'entreprendre les opérations ment stratigraphique a été entamée. Le choix du secteur
suivantes : à étudier s'est fait le 31 août 2015 en concertation avec
– nettoyage minutieux d'une portion représentative P. Haesaerts (IRSNB) et É. Juvigné (ULg), sur base de
de la séquence stratigraphique ; leurs travaux antérieurs dans la carrière  ; la proximité
– relevé détaillé de la stratigraphie afin d'identifier avec la zone fouillée dans les années 1970 a notamment
la succession des processus dépositionnels et post- été privilégiée. Par la suite, quatre journées de terrain
dépositionnels et de reconstituer la géométrie des dépôts ; ont été consacrées au nettoyage détaillé des coupes.
– relevé photographique complet et en haute résolu- La séquence stratigraphique étudiée comprend
tion de la coupe ; environ 8  m de dépôts du Quaternaire, reposant
– relevé photogrammétrique afin de valoriser la coupe sur un peu moins de 4  m de sables oligocènes, ces
d'un point de vue à la fois scientifique et pédagogique ; derniers ayant été atteints principalement à la tarière.
– relevé topographique précis de la zone étudiée ; Les principales unités stratigraphiques observées
– prélèvements divers (notamment granulométrie, sont présentées sur le log qui, pour l'essentiel, est
minéraux denses des lœss, recherche des téphras, comparable aux enregistrements stratigraphiques
micromorphologie et susceptibilité magnétique) ; précédents, en particulier aux relevés détaillés de
– mesures géotechniques de résistance à la péné- P. Haesaerts (Haesaerts, 1978 ; Haesaerts, Di Modica
tration, à la fois directement sur la coupe à l'aide d'un & Pirson, 2011  ; Haesaerts et al., 2016). Parmi les
pénétromètre de poche (collaboration avec S. Delvoie différences, signalons une plus grande complexité
et le Laboratoire de Géotechnologie de l'ULg) et sur identifiée au sein du Pédocomplexe de Rocourt,
le plateau situé en arrière de la coupe par des essais offrant une belle opportunité de tenter un position-
de pénétration statique (Cone Penetration Test, CPT ; nement chronostratigraphique plus précis du maté-
Delvoie et al., 2016a ; 2016b) ; riel archéologique.
147

Préhistoire Liège

À ce stade, deux fragments de silex ont été mis au ■■ Gullentops F., 1954. Contributions à la chronologie du
jour lors du nettoyage des coupes, mais aucun ne peut Pléistocène et des formes du relief en Belgique, Mémoires de
être considéré comme artefact indiscutable. Ceci n'est l'Institut géologique de l'Université de Louvain, 18, p. 125-252.
pas étonnant compte tenu de la faible densité de maté- ■■ Haesaerts P., 1978. Contexte stratigraphique de quelques
riel qui caractérise la plupart des gisements de plein air gisements paléolithiques de plein air de Moyenne Belgique,
du Paléolithique moyen. Bulletin de la Société royale belge d'Anthropologie et de Préhis-
toire, 89, p. 115-133.
La poursuite des travaux en 2016 permettra de
compléter les relevés stratigraphiques, de réaliser les ■■ Haesaerts P., Di Modica K. & Pirson S., 2011. Le gise-
relevés photographique et photogrammétrique détail- ment paléolithique de la Sablière Gritten à Rocourt (province
de Liège). In  : Toussaint  M., Di  Modica  K. & Pirson  S.
lés, ainsi que d'entreprendre les divers prélèvements
(éd.), Le Paléolithique moyen en Belgique. Mélanges Margue-
envisagés. Les mesures au pénétromètre de poche rite Ulrix-Closset, Liège (Bulletin de la Société royale belge
seront également effectuées sur les coupes. d'Études géologiques et archéologiques Les Chercheurs de la
Dans la foulée, les sondages à la tarière manuelle Wallonie, hors-série 4 ; Études et Recherches archéologiques de
seront réalisés sur le plateau, afin de cartographier le l'Université de Liège, 128), p. 359-374.
Complexe humifère de Remicourt et le Pédocomplexe ■■ Haesaerts P., Juvigné É., Kuyl O., Mucher H. &
de Rocourt, et ainsi l'extension potentielle du gisement Roebroeks W., 1981. Compte rendu de l'excursion du 13 juin
archéologique. Parallèlement à ces sondages, les essais 1981, en Hesbaye et au Limbourg néerlandais, consacrée à la
de pénétration statique seront mis en œuvre. Ces essais chronostratigraphie des lœss du Pléistocène supérieur, Annales
géotechniques permettront notamment de confirmer de la Société géologique de Belgique, 104, p. 223-240.
le potentiel de cette méthode, démontré récemment à ■■ Haesaerts P., Mestdagh H. & Bosquet D., 1997. La
Romont (Delvoie et al., 2016b) et Remicourt (Delvoie et séquence lœssique de Remicourt (Hesbaye, Belgique), Notae
al., 2016a), pour identifier le Pédocomplexe de Rocourt Praehistoricae, 17, p. 45-52.
ailleurs dans le domaine lœssique de la Moyenne ■■ Haesaerts P., Mestdagh H. & Bosquet D., 1999. The
Belgique. sequence of Remicourt (Hesbaye, Belgium): new insights on the
pedo- and chronostratigraphy of the Rocourt Soil, Geologica
Remerciements Belgica, 2, p. 5-27.
■■ Haesaerts P., Spagna P., Damblon F., Gerasimenko N.
Les auteurs souhaitent remercier le Consortium & Pirson S., 2016. The Upper Pleistocene loess-palaeosol
sequence of Middle Belgium, Quaternary International (http://
Gritten, propriétaires de la carrière, et en particulier le
dx.doi.org/10.1016/j.quaint.2016.02.012).
Dr Christian Gritten, ainsi que Monsieur Joseph Pâque,
■■ Juvigné É., 1977. Zone de dispersion et âge des poussières
pour l'accès au site et le soutien logistique. Merci
volcaniques du tuf de Rocourt, Annales de la Société géologique
également à Vincent Ancion (Service de l'archéologie de
de Belgique, 100, p. 13-22.
la Direction extérieure de Liège 1, DGO4, Département
■■ Juvigné É., Haesaerts P., Mestdagh H., Pissart A. &
du patrimoine) pour les relevés topographiques, ainsi
Balescu S., 1996. Révision du stratotype lœssique de Kesselt
qu'à Dimitri Preud'homme (Direction de la protection
(Limbourg, Belgique), Comptes rendus de l'Académie des
du patrimoine, DGO4, Département du patrimoine) Sciences de Paris, 323, p. 801-807.
pour la gestion administrative du dossier.
■■ Juvigné É., Tallier E., Haesaerts P. & Pirson S., 2008.
Un nouveau stratotype du Téphra de Rocourt dans la carrière
Bibliographie de Romont (Eben/Bassenge, Belgique), Quaternaire, 19,
■■ Delvoie S., Boulvain F., Charlier R. & Collin F., 2016a. p. 133-139.
Detailed characterization of the Late Pleistocene loess sequence ■■ Landenne A.-S., 2011. L'inventaire des sites archéologiques et
stratigraphy of Remicourt (Hesbaye Region, Belgium) with le zonage archéologique en Wallonie. Connaître, protéger, gérer,
cone penetration tests, Geologica Belgica. Namur, Département du Patrimoine, 12  p. (http://dgo4.spw.
■■ Delvoie S., Pirson S., Charlier R. & Collin F., 2016b. wallonie.be/DGATLP/DGATLP/Pages/Patrimoine/Dwnld/
Étude de la séquence stratigraphique des lœss de la carrière de Inventaire_sites_archeologiques.pdf).
Romont (Eben-Emael, Belgique) par une campagne géotech- ■■ Locht J.-L. & Depaepe P., 2011. Regards sur le Paléolithique
nique, Notae Praehistoricae, 36, p. 5-21. moyen de France septentrionale et de Belgique. In  :
■■ Di Modica K., Toussaint M., Abrams G. & Pirson S., Toussaint M., Di Modica K. & Pirson S. (éd.), Le Paléolithique
2016. The Middle Palaeolithic from Belgium: Chronostra- moyen en Belgique. Mélanges Marguerite Ulrix-Closset, Liège
tigraphy, territorial management and culture on a mosaic of (Bulletin de la Société royale belge d'Études géologiques et
contrasting environments, Quaternary International (http:// archéologiques Les Chercheurs de la Wallonie, hors-série 4  ;
dx.doi.org/10.1016/j.quaint.2015.12.072). Études et Recherches archéologiques de l'Université de Liège,
128), p. 229-237.
148

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

■■ Locht J.-L., Hérisson D., Goval É., Cliquet D., Huet B., connue en Belgique qui contient des dépôts datant de
Coutard S., Antoine P. & Feray P., 2015 (sous presse). cette période ; il peut donc potentiellement fournir
Timescales, space and culture during the Middle Palaeolithic in des données importantes concernant la présence et
northwestern France, Quaternary International (http://dx.doi. la disparition des Néandertaliens dans cette région,
org/10.1016/j.quaint.2015.07.053).
l'arrivée des premiers hommes modernes et leurs
■■ Lohest M. & Fraipont C., 1911-1912. Découverte de silex réponses respectives aux oscillations climatiques. Sur
taillés dans le limon Hesbayen de Liège et de l'importance de
la terrasse, cette période transitionnelle concerne la
cette découverte au point de vue de l'origine des limons et des
séquence allant de l'unité  17 (Moustérien récent) à
classifications qu'on y a établies, Annales de la Société géologique
de Belgique, 39, B125-B130.
l'unité 15 (Aurignacien).
Les analyses de la faune issue des unités 17 à 15 sont
■■ Otte M., Boëda É. & Haesaerts P., 1990. Rocourt : indus-
en cours. D'autre analyses caractérisent les couches
trie laminaire archaïque, Helinium, XXIX/1, p. 3-13.
d'un point de vue géologique, les processus déposi-
■■ Pirson S. & Di Modica K., 2011. Position chronostrati-
tionnels et les contextes de sédimentation des unités
graphique des productions lithiques du Paléolithique ancien
en Belgique : un état de la question. In  : Toussaint  M.,
dans lesquelles se trouvent les ensembles archéolo-
Di  Modica  K. & Pirson  S. (éd.), Le Paléolithique moyen giques. La séquence est en cours de datation par AMS
en Belgique. Mélanges Marguerite Ulrix-Closset, Liège et par luminescence. Les analyses lithiques abordent
(Bulletin de la Société royale belge d'Études géologiques et l'exploitation des matières premières, la structure des
archéologiques Les Chercheurs de la Wallonie, hors-série 4 ; ensembles, leur technologie, y compris la production
Études et Recherches archéologiques de l'Université de Liège, des outils.
128), p. 105-148. Nous présentons ici les résultats préliminaires de
■■ Pouclet A., Juvigné É. & Pirson S., 2008. The Rocourt l'analyse des ensembles lithiques moustériens des
Tephra, a widespread 90-74 ka stratigraphic marker in Belgium, couches  17a et 17b, fouillées en 2015. Nous abor-
Quaternary Research, 70, p. 105-120. dons également brièvement d'autres analyses en
cours.
Sources
■■ Haesaerts P., Pirson S. & Meijs E., 2011. New proposal for Séquence géologique des unités 17 à 15
the Quaternary lithostratigraphic units (Belgium). Aeolian sedi-
ments, Liège, National Commission for Stratigraphy, Subcom- Nous pouvons décrire brièvement les trois unités, de
mission Quaternary (http://www2.ulg.ac.be/geolsed/GB/SCQ. bas en haut :
htm). – unité 17 : comme noté par Pirson (1999 ; Pirson &
■■ Pirson S., 2007. Contribution à l'étude des dépôts d'entrée de Collin, 2005), l'unité  17 comprend plusieurs couches
grotte en Belgique au Pléistocène supérieur. Stratigraphie, sédi- formées sous des conditions sédimentaires variées :
mentologie et paléoenvironnement, Thèse de doctorat inédite, 17c.2  : zone localisée riche en charbons de bois,
Université de Liège (Faculté des Sciences), 2  vol., 435  p. et
interprétée comme un foyer ;
5 annexes.
17c.1  : blocs de dolomite décimétriques présents
dans le profil M5/4 sur le limon brun de l'unité 18 ;
17c : limon brun sans fraction grossière ;
17b : limon sableux gris-brun avec graviers émoussés
Modave/Modave : le Moustérien récent de 2 à 4  cm et des blocs de dolomite de 5 à 10  cm.
du Trou Al'Wesse, l'unité 17 Ensemble moustérien ;
17a  : limon sableux brun clair  ; fraction grossière
mineure comprenant des fragments de dolomite
Rebecca Miller, Pierre Noiret, John Stewart, subanguleux entre 2 et 10 cm. Ensemble moustérien ;
Keith Wilkinson et Yann Waersegers – unité 16 : fouillée par demi-carrés du M10 à M6,
et dans la colonne M4-L4, cette unité se révèle plus
Introduction complexe que considérée auparavant et contient
plusieurs couches mises en place selon différents
Le Trou Al'Wesse se situe sur la rive gauche du Hoyoux, processus ;
un affluent de la Meuse, près du lieu-dit «  Petit- – unité 15  : cette unité contient dix couches, dont
Modave  ». L'objectif des fouilles actuelles est d'éluci- 15.8-BE, 15.9 et 15.4/5 qui contiennent du matériel
der le contexte climatique et environnemental ainsi attribuable à l'Aurignacien.
que la chronologie des occupations humaines durant
la transition du Paléolithique moyen au Paléolithique
supérieur. Ce site est, actuellement, la seule grotte
149

Préhistoire Liège

Structure des ensembles lithiques Matières premières lithiques


moustériens
Une gamme variée de matières premières lithiques a
L'analyse de la structure générale des ensembles lithiques été exploitée durant le Moustérien au Trou Al'Wesse
moustériens a été réalisée durant l'automne 2015 par (voir Di Modica, Collin & Pirson, 2005 pour une
R. Miller et Y. Waersegers (Miller et al., 2015). Les caté- étude de la collection des années 1990). Notre analyse
gories (1 à 7) ont été définies pour différencier les grandes préliminaire a permis l'identification de plusieurs
classes d'artefacts produits lors des différentes phases types, dont les remontages pourraient éventuellement
de la chaîne opératoire (préparation des nucléus, débi- permettre le regroupement. Ces types comprennent
tage des supports, production de l'outillage, ravivage) plusieurs variantes de silex, du phtanite, du quartzite
ayant eu lieu sur place. La plupart du matériel lithique et du grès bruxellien (grès lustré). Les types les plus
provient d'une zone comprenant les sous-carrés  L6D communs sont les types 1 et 7 (les deux provenant du
et M6A-D (n  = 673), ainsi que de la couche  17a dans plateau de Hesbaye lato sensu) comptant ensemble
la colonne L4B-M4A (n  = 21) et dans les sous-carrés pour 74 % du matériel lithique, suivis par les types 13
M9C-D (n = 8) et M10C-D (n = 20). La fouille des sous- (un silex translucide beige de bonne qualité d'origine
carrés  M6A-B a été réalisée en 2005 avant la distinc- encore inconnue) et 5 (phtanite de bonne qualité)
tion entre les couches  ; ce matériel est indiqué dans correspondant ensemble à 12 % du matériel. Les autres
les tableaux comme «  couche  17  ». Alors que les rares types ne dépassent pas 2 %.
nucléus (type 2) sont tous épuisés, d'abondants produits Des régions d'origine des matières premières
secondaires de préparation des nucléus (type  6) et de peuvent être proposées pour certains de ces types.
débitage (type  4), et des produits intentionnels, retou- Quelques artefacts portent du néocortex, indiquant
chés ou non, indiquent une activité intense de débitage un approvisionnement sous forme de galets, probable-
sur place. La gamme de dimensions des objets, allant ment à partir d'anciennes terrasses de la Meuse, à un
de petits déchets de taille récupérés par tamisage à l'eau minimum de 20 km au nord du site. Les types 1 et 7
jusqu'à de grands éclats, et le manque d'altération sur les sont considérés comme des variantes du silex prove-
bords et les arêtes des pièces suggèrent qu'il n'y a eu que nant du plateau de la Hesbaye, terme général faisant
peu de déplacement ou de tri par transport, bien qu'un référence au silex des formations crétacées rencontrées
certain degré de mouvement soit probable. L'outillage à travers la Belgique de Mons (à l'ouest) jusque Maas-
compte 15 pièces, en majorité des éclats retouchés, ainsi tricht (à l'est), en passant par le plateau de la Hesbaye.
qu'un denticulé et un racloir sur éclats Levallois, et une Pourtant l'utilisation de ce terme est imprécise et n'in-
encoche. De plus, il y a 10 éclats Levallois non retouchés. dique pas de localités géographiques spécifiques pour
ce(s) type(s) de silex. Une estimation de
la distance d'origine pour les types  1 et
7 pourrait être de minimum 20-25  km
(affleurements accessibles dans la vallée
de la Mehaigne, au nord de la Meuse)
et de maximum 50-60  km (jusqu'à la
région de Maastricht). La source du
type  13, un silex de très bonne qualité,
Trou Al'Wesse, unité 17, Moustérien. Structure générale des ensembles lithiques n'est pas encore déterminée, mais sa
(fouilles 2005 et 2015). proportion dans les ensembles (7,7  %,
comparé à 32-42  % pour les types  1 et
7) suggère que la région d'approvision-
nement est plus éloignée. Du phtanite
(type 5) est représenté par un grand éclat
retouché, des produits de débitage et un
nucléus épuisé. Sa source est connue : à
environ 60  km à l'ouest, dans la région
d'Ottignies-Mousty. Du grès bruxellien
ou grès lustré (type 10) est identifié par
deux éclats assez grands et quatre éclats
de débitage ; sa provenance se situe dans
la région de Landen, à environ 45 km au
Trou Al'Wesse, unité 17, Moustérien. Fréquences des outils et des produits de débitage.
nord. Il faut noter que des petits cassons
150

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

échantillons ont été obtenus pour les


unités  19 à 12, en particulier les unités
les plus anciennes (19 à 17). En parallèle
à la datation OSL, une série de datations
AMS sera réalisée sur les restes osseux
et/ou les dents dont les coordonnées ont
été enregistrées sur place à proximité des
échantillons OSL.

Analyses fauniques

Les objectifs des analyses fauniques au


Trou Al'Wesse sont de contribuer à une
description de l'environnement du site
(et de la vallée du Hoyoux plus générale-
ment), d'identifier la gamme des espèces
chassées (ou pêchées) et de proposer une
interprétation des activités liées à la chasse
et au traitement des carcasses sur place.
L'analyse des ensembles fauniques,
Trou Al'Wesse, unité  17. Exemples des types de matières premières lithiques
les plus communes. 1-2. Type 1, silex de « Hesbaye », grain moyen (M6.61 et complétée après chaque campagne de
M6.15)  ; 3.  Type  7, silex de «  Hesbaye  », grain fin (M6.14)  ; 4.  Type  13, silex fouilles, consiste en plusieurs choses :
translucide beige, grain fin (M6.105) ; 5. Type 5, phtanite (M6.80) ; 6. Type 15, identification des espèces et éléments
silex brun jaunâtre bandé, grain fin (M6.102). anatomiques, description anatomique et
approche taphonomique. Cette dernière
opère les distinctions suivantes  : altéra-
tions naturelles dues au contexte dépo-
sitionnel et aux processus post-déposi-
tionnels, altérations dues à l'action des
animaux (allant des traces de carnivores
et de rongeurs aux traces laissées par la
Trou Al'Wesse, unité  17, Moustérien. Description préliminaire des types des digestion d'hyènes) et traces laissées par
matières premières lithiques les plus communes.
les activités anthropiques (dépeçage,
boucherie, cuisson au feu, fabrication
de chert sont communs dans les couches  17a et 17b, des outils osseux, etc.).
mais ne montrent aucun indice de débitage. Les bords Depuis quelques années, en collaboration avec
et les arêtes de la majorité des artefacts taillés ne sont plusieurs laboratoires, des échantillons de différentes
pas altérés (arrondis ou concassés). espèces fauniques sont prélevés pour l'analyse de l'ADN
ancien. Certaines espèces fournissent des informations
Datations relatives aux changements climatiques, surtout durant
le Pléistocène récent ; d'autres ont été sélectionnées
Une partie du projet, financée par la Leakey pour aborder la question de la domestication durant
Foundation, inclut la datation par luminescence le Néolithique, et pour ces problématiques, 12 espèces
de la séquence pléistocène, par Johannes  van sont aujourd'hui en cours d'étude : lemming à collier
der  Plicht (Leiden University, NL), Tony  Reimann et (Dicrostonyx torquatus) (Brace et al., 2012), lemming
Christina Ankjærgaard (Wageningen University, NL). des toundras (Lemmus lemmus), campagnol terrestre
En août 2015, une série d'échantillons de sédiments (Arvicola terrestris) (Brace et al., 2016), cerf élaphe
a été récoltée et des dosimètres ont été installés  ; ils (Cervus elaphus) (Meiri et al., 2013), renne (Rangifer
seront enlevés durant l'été 2016. Ceci permettra, tarandus), ours (Ursus sp.), cheval (Equus sp.), lagopède
si le contexte est favorable, la datation des couches des saules (Lagopus sp.) (Lagerholm et al., à paraître),
pléistocènes les plus anciennes au Trou Al'Wesse. Pour lièvre (Lepus timidus) (Smith et al., à paraître), canidé
évaluer le contexte, trois endroits ont été sélectionnés (loup et chien) (Canis sp.), aurochs/bovin domestiqué
pour la calibration du site parmi les couches alluviales (Bos primigenius), sanglier/cochon domestiqué (Sus
récentes (mésolithiques  et postmédiévales). Onze sp.).
151

Préhistoire Liège

Analyses géologiques spéciaux pour la Recherche), Bournemouth University,


University of Winchester et le Service public de Wallonie
L'étude géologique fait partie du projet, dont les objec- (subvention no 13/19227). Nous remercions Vivaqua, le
tifs seront atteints par la confrontation et l'intégration propriétaire de la réserve naturelle dans laquelle le site se
des données obtenues par la géologie, l'identification trouve, pour son aide continuelle.
des espèces fauniques, l'étude taphonomique de la
faune (indices d'activité des carnivores, altérations Bibliographie
anthropiques, altérations naturelles), les datations, ■■ Brace S., Palkopoulou E., Dalén L., Lister A., Miller R.,
la répartition spatiale en coordonnées 3D liées à la Otte  M., Germonpré  M., Blockley  S., Stewart  J. &
séquence stratigraphique (des ensembles en géné- Barnes  I., 2012. Serial population extinctions in a small
ral, ainsi que des remontages lithiques), l'étude de la mammal indicate Late Pleistocene ecosystem instability,
structure et de la répartition du matériel archéologique Proceedings of the National Academy of Sciences of the United
(lithique, céramique, foyers, etc.). Les objectifs princi- States of America, 109, 50, p. 20532-20536.
paux sont : l'identification des différentes unités et des ■■ Brace S., Ruddy M., Miller R., Schreve D.C., Stewart J.R.
couches stratigraphiques, la description détaillée des & Barnes  I., 2016. The colonization history of British water
vole (Arvicola amphibius [Linnaeus, 1758]): origins and devel-
couches (composition, structure, altérations, géomé-
opment of the Celtic fringe, Proceedings of the Royal Society B.
trie), l'identification des processus dépositionnels et
Biological Sciences, 283 (1829), DOI : 10.1098/rspb.2016.0130.
post-dépositionnels et l'origine des sédiments consti-
■■ Di Modica K., Collin F. & Pirson S., 2005. Problématique
tuant les dépôts, ainsi que l'interprétation du contexte
du Moustérien et approche préliminaire de l'industrie lithique
dépositionnel, l'interprétation de la dynamique au Trou Al'Wesse (Petit-Modave, comm. de Modave, prov. de
géométrique des dépôts, la mise en correspondance Liège), Notae Praehistoricae, 25, p. 49-59.
de la séquence sur la terrasse et dans la grotte, l'iden-
■■ Lagerholm  V.K., Sandoval-Castellanos  E.,
tification du contexte stratigraphique des ensembles Vaniscotte  A., Potapova  O., Tomek  T., Bocheński  Z.M.,
archéologiques et la chronostratigraphie des fluctua- Shepherd  P.J., Barton  N., Van  Dyck  M.-C., Miller  R.,
tions climatiques et environnementales. Höglund J., Yoccoz N.G., Dalén L. & Stewart J.R., à paraître.
Plusieurs analyses géologiques ont déjà été Range shifts or extinction? Ancient DNA and distribution
réalisées ou sont en cours. Chaque campagne de modelling reveal past and future responses to climate warming
fouille fournit des données complétant ces analyses  ; in cold-adapted birds. Proceedings of the Royal Society B.
les interprétations restent au stade d'hypothèses Biological Sciences.
préliminaires. La structure générale de la séquence ■■ Meiri  M., Lister  A.M., Higham  T.F.G., Stewart  J.R.,
stratigraphique est établie, mais sujette pourtant à des Straus  L.G., Obermaier  H., González Morales  M.R.,
précisions à venir. Les études et analyses géologiques Marín-Arroyo  A.B. & Barnes  I., 2013. Late-glacial
recolonization and phylogeography of European red deer
comprennent la lecture stratigraphique sur terrain avec
(Cervus elaphus L.), Molecular Ecology, 22 (18), p. 4711-4722.
relevés et photographie des profils, la granulométrie,
■■ Miller R., Stewart J., Knul M., Waersegers Y., Noiret P.
la lithologie des dépôts, la susceptibilité magnétique,
& Wilkinson K., 2015. The Middle to Upper Paleolithic transi-
la perte au feu (« PAF » ou « LOI », loss on ignition),
tion at Trou Al'Wesse: A preliminary overview of stratigraphic
l'analyse des phosphates, la décomposition des units 17 to 15, Notae Praehistoricae, 35, p. 25-34.
échantillons par digestion acide, la micromorphologie,
■■ Pirson  S., 1999. Étude sédimentologique préliminaire au
le géoradar (pour évaluer les dépôts non fouillés dans
Trou Al'Wesse (Modave, Belgique), Bulletin de la Société royale
la grotte : détection de la roche-mère et évaluation de belge d'Études géologiques et archéologiques Les Chercheurs de la
l'épaisseur des dépôts et de la structure de la grotte), Wallonie, XXXIX, p. 115-177.
le balayage laser 3D pour enregistrer la structure de ■■ Pirson S. & Collin F., 2005. Contribution à la stratigraphie
la grotte visible, le géoradar sur la terrasse et dans la du Trou Al'Wesse à Petit-Modave (comm. de Modave, prov. de
plaine alluviale (pour évaluer la géométrie de la roche- Liège), Notae Praehistoricae, 25, p. 39-47.
mère et l'épaisseur des dépôts alluviaux), le carottage ■■ Smith  S., Sandoval-Castellanos  E., Lagerholm  V.K.,
sur la plaine alluviale et l'analyse malacologique dans Napierala  H., Sablin  M., Fladerer  F., Germonpré  M.,
l'unité 15 pour préciser le(s) processus de mise en place Miller  R., Wojtal  P., Stewart  J. & Dalén  L., à paraître.
des concrétions de carbonates. Non-receding hare lines: genetic continuity since the Late
Pleistocene in European Lepus timidus, Biological Journal of the
Remerciements Linnean Society.

La campagne de fouilles 2015 et les analyses ont été


soutenues par une bourse de la Leakey Foundation
(Spring Grantees 2015), par l'Université de Liège (Fonds
152

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

Pepinster/Soiron : haches polies poli et 2 haches polies : une entière et un gros fragment
« Aux Trois Journaux » réutilisé en nucleus.
La hache entière est façonnée dans un silex gris sable
clair à moyen très homogène et sans traces de rouille.
Francis Polrot Les bords convergent vers le talon, épais et en biais.
Un bord est naturellement arrondi et droit, entière-
Un champ labouré (parc. cad.  : Pepinster, 3e  Div., ment en cortex légèrement poli. L'autre bord, fin et
Sect.  A, no  486a  ; coord. Lambert moyennes  : arrondi, est partiel en raison d'un manque accidentel
249635  est/142070  nord) que nous avons déjà et d'un enfoncement en cortex. Le tranchant, convexe
parcouru (Polrot, 2014) a reçu notre visite en juin et arrondi, est très abîmé. Dimensions : (80,5) × 53,7 ×
2015. Nous y avons glané une bonne centaine de silex 26,5 mm.
dont une dizaine d'éclats retouchés ou utilisés ainsi Le gros fragment de hache est façonné dans un silex
que 3 grattoirs, 4 éclats polis, 1 fragment mésial d'objet en partie comparable à celui de la hache précédente,
en partie plus gris avec quelques points de rouille.
C'est un fragment longitudinal sans tranchant ni talon.
Le bord converge vers la partie la plus épaisse de la
pièce qui se termine sur un gros accident transversal.
Le bord est plat, étroit et bordé de deux fines bandes
polies qui donnent un arrondi cannelé à l'ensemble
du bord. La pièce est polie soigneusement. Elle a été
utilisée en nucleus avec un bord d'attaque unique dans
le sens de l'épaisseur : débitage de toutes petites pièces.
Dimensions : (69) × (35,5) × (26,7) mm.
Le fragment mésial poli est en silex gris foncé marqué
de petits fossiles et d'une tache de cortex. Il se présente
comme étant un fragment d'une grande et large lame
mais les deux bords, abattus, ont ensuite été bien polis
Soiron : hache polie. au point de faire disparaître une bonne partie de l'abat-
tage. Dimensions : (23) × 36,5 × 9,5 mm.

Bibliographie
■■ Polrot F., 2014. Pepinster/Pepinster et Soiron  : récolte de
matériel archéologique aux alentours du lieu-dit « Croix Maga »,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 22, p. 156-158.

Gros fragment de hache polie. Vue en long et vue du bord


Fragment mésial poli. de débitage.
153

Préhistoire Liège

Theux/Theux : hache polie à « Turon »,


chemin du Chivrou

Francis Polrot et Benoît Pelzer

Deux parcelles (parc. cad.  : Theux, 1re  Div., Sect.  D,


nos  1104A et 1100D  ; coord. Lambert moyennes  :
252450  est/134520  nord) déjà parcourues (Polrot &
Pelzer, 2015) ont reçu notre visite en juin 2015. Nous y
avons glané 52 silex dans la concentration ouest et 21
dans la concentration est. Cette dernière nous donna
un grattoir unguiforme et la partie arrière d'une hache
très partiellement polie.
Cette hache est façonnée dans un silex patiné,
gris clair et marqué de traces de rouille. Les bords
convergent vers le talon, qui bien que partiellement
manquant semble avoir été étroit et arrondi. Un bord
manque : une lame semble avoir été tirée de la hache
(utilisation partielle en nucleus  ?). L'autre bord, poli,
est très fin. Le poli n'est que peu visible sur cette pièce,
non pas par éclatements ultérieurs à sa finition mais
par le peu de travail de polissage dont elle a été l'objet.
Dimensions : (61,5) × (41,5) × (21) mm.

Bibliographie
■■ Polrot F. & Pelzer B., 2015. Theux/Theux : ramassages de
silex à « Turon », chemin du Chivrou, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 23, p. 172-173.

Theux : hache polie.


154

Chronique de l'Archéologie wallonne Protohistoire

PROTOHISTOIRE
Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau :
conservation de dépôts funéraires
provenant d'un champ d'urnes

Nancy Verstraelen froid extérieur qui s'infiltre à l'intérieur de la glacière.


Ces flux permettent de diminuer les concentrations
Le programme de conservation préventive mis en de ce gaz radioactif.
place pour les dépôts issus de la nécropole de type
champ d'urnes mise au jour sur le site du Trilogiport Conclusion
(Marchal et  al., 2012  ; 2013) se poursuit depuis leur
extraction mécanique en 2012. Stockés dans une Les conditions de conservation sont, après quelques
glacière gracieusement mise à disposition par la Ville remaniements et interventions, appropriées et satis-
de Liège, les dépôts sont dans un parfait état de préser- faisantes pour assurer la préservation des dépôts sur
vation. Les conditions de conservation sont idéales le long terme. Néanmoins, le lieu d'entreposage mis
aussi bien pour les paramètres climatiques que pour actuellement à disposition pourrait être retiré au SPW
la luminosité et le renouvellement de l'air faibles, ce en vue d'être aménagé et ce, dans un futur plus ou
qui contribue à limiter les phénomènes d'évaporation moins proche. Près de la moitié des dépôts funéraires
dommageables pour les dépôts. ont déjà été étudiés. Il importe à présent qu'une solu-
tion soit définitivement trouvée afin de finaliser leur
Définition de la dynamique climatique étude dont les premiers résultats plus que prometteurs
devraient suffire à nous encourager dans cette voie.
Les conditions climatiques de la glacière sont enre-
gistrées selon un pas de temps de 10 minutes à l'aide Bibliographie
d'un data logger de la marque Hanwell. Les résultats ■■ Marchal  J.-P., Collette  O., Goffioul  C., Neuray  B.,
sont sensiblement identiques à ceux des années précé- Pirson  S., Spagna  P., Toussaint  M., van der Sloot  P. &
dentes. On observe un faible gradient de la tempéra- Verstraelen  N., 2012. Fouille de prévention d'un champ
ture. En 2015, on enregistre des valeurs situées entre d'urnes à Hermalle-sous-Argenteau (Oupeye, province de
8,7°  C et 16,2°  C pour une étendue de 7,5°  C tandis Liège) : note préliminaire, Lunula. Archaeologia protohistorica,
qu'en 2014, les températures se situaient entre 9,3° C XX, p. 65-69.
et 16,1° C pour une étendue annuelle de 6,8° C. L'onde ■■ Marchal  J.-P., Collette  O., Goffioul  C., Neuray  B.,
thermique suit les tendances climatiques extérieures Pirson  S., Spagna  P., Toussaint  M., van der Sloot  P. &
Verstraelen  N., 2013. Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau  :
caractérisées par une phase croissante et décroissante.
fouille de prévention d'un champ d'urnes, Chronique de
La moyenne annuelle de la température s'élève à
l'Archéologie wallonne, 20, p. 145-147.
12,18° C tandis que pour l'humidité relative, on obtient
98,5 %. Les valeurs cibles doivent se situer entre 5 et
15°  C pour la température tandis que pour l'humi-
dité relative, elles s'échelonnent entre 95 % et 100 %.
Les taux de conformité par rapport à ces plages sont
de 83,8 % pour la température en raison du réchauf-
fement estival et de 100 % pour l'humidité relative. Il
est à noter que les valeurs hygrométriques sont proba-
blement faussées en raison de la saturation ponctuelle
du capteur de la sonde d'humidité. Celui-ci, inadapté
aux conditions extrêmes, sera remplacé par un modèle
plus adéquat en mars 2016.
Les concentrations de radon mesurées suivent les
tendances annuelles mises en avant les années précé-
dentes soit entre 852 et 1716  Bq/m³. Les résultats
les plus faibles se situent invariablement en hiver en
raison des phénomènes de convection de l'air plus
155

Époque romaine Liège

ÉPOQUE ROMAINE
Amay/Amay : découverte d'un sabot de
pieu provenant du pont romain

Léon Dardenne, Gianni Gava, Raymond Polis sabot ont été assemblées par forgeage et martelage sur
et Jacques Witvrouw une culasse pyramidale de 10 cm de hauteur pour une
section quadrangulaire de 5 × 7 cm.
Dans le courant du mois de janvier 2015, une tran- La typologie du sabot métallique découvert en 2015
chée de pose d'un câble téléphonique a été ouverte correspond à celle des sabots des autres ponts romains
sur la rive gauche de la Meuse. Au niveau de la culée du nord-ouest de l'Europe et plus spécifiquement à celle
du pont actuel (parc. non cadastrée ; coord. Lambert : de la majorité des sabots (une vingtaine) provenant
218255 est/137508 nord), ces travaux, réalisés à faible des fondations du pont romain d'Amay : certains ont
profondeur (60 cm), ont mis au jour un sabot de pieu. été découverts encore en place dans le lit de la Meuse
Celui-ci se trouvait manifestement en contexte secon- alors que d'autres proviennent des graviers issus des
daire : les rampes d'accès du pont sont en effet consti- dragages successifs du lit du fleuve (Witvrouw, 2005,
tuées pour l'essentiel de graviers puisés dans le lit du p.  131  ; Witvrouw et al., 2005, p.  89-105). C'est à ce
fleuve. dernier groupe qu'appartient l'exemplaire présenté ici.
Il s'agit d'un sabot complet en fer forgé, d'une hauteur Il a été remis au Musée communal d'Amay.
de 46,5 cm et d'un poids de 9,3 kg. Il a subi une défor-
mation importante lors des travaux de dragages (arra- Bibliographie
chement des pieux en bois de chêne par des dragues à ■■ Witvrouw J., 2005. Le pont romain d'Amay. Synthèse. In :
godets, alors que les sabots restaient en place dans les Witvrouw J. & Gava G. (dir.), Le pont romain et le franchis-
graviers alluvionnaires). sement de la Meuse à Amay. Archéologie et histoire, Bulletin du
De forme pyramidale, le sabot est muni de quatre Cercle archéologique Hesbaye-Condroz, XXIX, p. 129-134.
branches pratiquement symétriques (longueur ■■ Witvrouw J., Gava G., Lehance H. & Polis R., 2005. Le pont
moyenne  : 48  cm, largeur moyenne  : 5,75  cm, épais- romain d'Amay. Le matériel archéologique. In : Witvrouw J. &
seur moyenne  : 1,3  cm). Leurs extrémités sont recti- Gava G. (dir.), Le pont romain et le franchissement de la Meuse
lignes, chacune étant percée d'un trou de forme carrée à Amay. Archéologie et histoire, Bulletin du Cercle archéologique
Hesbaye-Condroz, XXIX, p. 89-117.
(1,5 cm de côté). Ces trous servaient à fixer le sabot à
l'extrémité d'un pieu au moyen de quatre clous dont un
seul est resté en place (tête aplatie, longueur conser-
vée : 11 cm, section : 0,9 × 0,9 cm). Les branches du
Herstal/Milmort : fouille d'un établissement
le long de la chaussée Brunehaut

Sophie de Bernardy de Sigoyer,


Catherine Coquelet, Claire Goffioul
et Jean-Philippe Marchal

Contexte des découvertes

Les travaux d'extension des entrepôts de la société


Prologis dans le parc industriel des Hauts-Sarts (parc.
cad. : Herstal, 6e Div., Sect. A, no 559E2 ; coord. Lambert :
235256 est/153389 nord) sont à l'origine d'une opéra-
tion préventive réalisée par le Service de l'archéologie
de la Direction extérieure de Liège 1 (DGO4 / Dépar-
tement du patrimoine) de janvier à juillet 2015.
Ce secteur du parc industriel avait déjà fait l'objet
Amay : sabot de pieu romain (face et profil).
d'investigations en 2001 sur la parcelle attenante au
156

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

premiers vallonnements des terrasses


de la Meuse. Le terrain suit un pendage
d'est en ouest en partant d'une légère
crête dominante à la cote 180. Le réseau
hydrographique aux alentours est très
peu fourni. Le sous-sol est principa-
lement constitué par la craie crétacée
issue de la dissolution d'anciennes
formations crayeuses et généralement
surmontée d'argile à silex. À la lisière
du plateau se sont installés des dépôts
fluviatiles oligocènes composés de
sables fins, d'argile et de galets. Le sol
recèle des limons moyennement épais
recouverts suivant un axe nord/sud par
des colluvions. Des indices d'érosion se
marquent principalement sur la section
Herstal, Hauts-Sarts : localisation du site fouillé en 2015 et des fouilles antérieures occidentale du site.
sur l'orthophotoplan 2013-2014. A.  Fouille de 2001  ; B.  Fouille de 2004  ;
C. Évaluation d'août 2015 ( J.-P. Marchal) ; D. Chaussée Brunehaut ; E. Évaluation Méthode de fouille
de 2014 et fouille de janvier à juillet 2015 (infographie F.  Giraldo  Martin et
S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
Le décapage extensif a été entrepris
suivant le phasage établi par l'exploitant
nord dans le cadre de la construction des entrepôts afin de libérer progressivement le terrain et permettre
précités (A). Cette opération avait mis en évidence l'avancement des travaux de construction. L'emprise
une occupation constituée de structures fossoyées de fouille occupe environ un tiers de la surface évaluée.
et de nombreux négatifs de poteau témoignant de la Un découpage a été défini en trois secteurs par les
présence de constructions en matériaux périssables. aménageurs et un délai de deux mois a été attribué
Un premier examen céramologique semble rattacher pour la fouille de chacun d'eux. Ces échéances nous
ces installations à la période du Bas-Empire (Michèle ont conduits à ouvrir toutes les grandes structures
Gustin, inédit). fossoyées à l'aide de la pelle mécanique. Les faits de
L'évaluation archéologique succédant à cette taille plus restreinte ont été fouillés manuellement et
première exploration a débuté en octobre 2014 sur la en quadrants.
parcelle située au sud des entrepôts actuels (Marchal et
al., 2015). La surface globale du terrain de 36 330 m² Les vestiges
(E), traversé par l'actuelle chaussée Brunehaut (D), a
été sondée en tranchées continues espacées de 15  m. Un examen préliminaire et partiel de la céramique
Le terrain situé au sud de cette route est perturbé par réalisé par Frédéric Hanut (Direction de l'archéologie)
des activités récentes et n'a livré aucun vestige archéo- dévoile la présence de trois phases chronologiques sur
logique. Le décapage extensif s'est donc limité au nord ce site. La Protohistoire (Bronze final) est illustrée par
de celle-ci. quelques négatifs de poteaux et une fosse. Ils coïncident
avec une occupation datée du Bronze final au Premier
Topographie, géologie et pédologie du site Âge du Fer, observée en 2004 lors de l'évaluation d'un
terrain (B) situé au sud-est de la parcelle (Loicq &
L'occupation mise au jour est vraisemblablement Marchal, 2006). La principale occupation s'étend entre
liée à la proximité de la voie reliant la capitale de le 2e siècle et le 3e siècle. Enfin le comblement de deux
la cité des Tongres à la Meuse avant d'atteindre en structures fossoyées se rattache à la seconde moitié du
rive droite l'agglomération de Jupille-sur-Meuse. 4e siècle.
Bien qu'aucun recoupement stratigraphique n'ait
été établi, il est communément admis que la chaus- Les vestiges linéaires
sée Brunehaut suit approximativement le tracé de
la voie antique. Les vestiges découverts se trouvent Le site comporte des marqueurs spatiaux tels que deux
à une distance de 13  km de Tongres, en bordure fossés (FO1-FO2) et une palissade  (P). Le fossé FO1
des plateaux limoneux de Hesbaye à proximité des délimite le site à l'est et semble revêtir les fonctions
157

Époque romaine Liège

FOUILLE DE 2001

CH

P
F3
F8 F230
F4 FE
FE
F7

A
F27 FE
F32
F43

C
FO2 B FE
FE
F40

FE

FE ?
F187

OR

Chaussée Brunehaut D
FE FO1
FE
OR
FE

F212
FE FE

CH = chemin à assise en silex


FE = fosse d’extraction OR FE

FO = fossé FE
OR = ornières
P = palissade
0 10 m
= structure de combustion

Hauts-Sarts : plan général des vestiges (infographie F. Giraldo Martin et S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).

d'enclos et de drain. Il a été repéré sur une longueur À une distance comprise entre 85 m et 95 m à l'ouest
de 103 m, suivant une orientation nord-est/sud-ouest. figure un second fossé FO2. Sa morphologie, qui
Il présente une largeur variant de 1,8 m à 2,3 m pour correspond à la fonction d'enclos, est confirmée par
une profondeur comprise entre 0,7 m et 1 m. Le fossé des critères liés à l'organisation de l'espace. Il s'inter-
est implanté sur de grandes structures fossoyées attri- rompt pour l'aménagement d'un passage de 3,4 m de
buées à des activités d'extraction (FE). Il accuse un profil large. La section sud du fossé, appréhendée sur une
en cuvette. Le remplissage inférieur du creusement se longueur de 24,5 m, se perd au-delà. La section nord
caractérise par son caractère hydromorphe illustrant la longue de 17,5 m est visible jusqu'à la limite d'emprise
circulation et la stagnation saisonnière des eaux. Des du site. La structure est très arasée principalement
traces de curage et de recreusement attestent de son dans la partie nord, ce qui pourrait expliquer qu'elle
entretien. Deux excroissances excavées de la bordure n'ait pas été repérée dans la parcelle attenante lors de
occidentale du fossé pourraient être assimilées à des la fouille de 2001. Le profil montre un fond plat et irré-
points d'eau saisonniers  : leurs profils en pente douce gulier par endroits. L'envergure du fossé oscille entre
façonnent des rampes d'accès. Un comblement progres- 1 m et 30 cm, du sud vers le nord. Un second creuse-
sif par colmatage naturel suit l'abandon du fossé. ment oblong se juxtapose à la portion sud du fossé ; ses
158

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

dimensions sont de 65 cm de large pour une longueur consiste en une margelle haute de 50  cm. Elle est
de 11 m. Le comblement ces aménagements n'a livré construite en trois assises régulières de moellons posés
aucun élément de datation. à sec, surmontées d'un aménagement de rognons de
Un autre type d'équipement divise la partie nord- silex plus irrégulier. L'ensemble est parachevé par
ouest du site. Il pourrait s'agir d'une palissade (P) qui une assise de réglage formée de carreaux de tuiles
suit un axe divergent de celui du fossé FO2. La clôture fragmentaires. Sous cette maçonnerie le creusement
repérée jusqu'à la limite nord de l'emprise sur une se prolonge sous la forme d'un cylindre régulier. Un
longueur de 30 m est constituée d'un alignement de six dépôt très organique sans doute issu de la décompo-
poteaux massifs profondément ancrés. Cette palissade sition d'un cuvelage en bois ou d'un clayonnage en
trouve son pendant parallèle dans la parcelle fouillée matière végétale est présent le long des parois sur une
en 2001 à une distance de 54 m. faible épaisseur, soit 1  cm. Ce chemisage atteint une
Les vestiges d'une voie de circulation (CH) ont été épaisseur de plus de 10 cm sur le fond de la structure.
dégagés à la lisière nord-ouest du terrain. Elle est Le remplissage inférieur est une épaisse couche incor-
constituée d'une assise de 3,6  m de large mêlant des porant divers déversements de limon lessivé, incluant
éclats et des rognons de silex et est bordée sur un seul des rejets de tuile, de rognons de silex, de galets et de
côté par des moellons de silex. Elle a été suivie sur une morceaux épars de charbon de bois. Elle est recouverte
distance de 24 m au-delà de laquelle le terrain n'était par des dépôts stratifiés alternant avec des sédiments
plus accessible. Cet empierrement est associé à des lessivés et humifères. Le comblement sommital corres-
traces d'ornières linéaires (OR) repérées au sud-est pond au remblaiement de la structure après démoli-
du site. Ces deux éléments paraissent suivre la même tion de la partie maçonnée. L'ouverture de la structure
orientation. à l'aide de la pelle mécanique a permis d'observer la
Outre ces éléments de partition de l'espace, l'occu- coupe dans son entièreté et d'y effectuer des prélève-
pation a révélé la présence de thermes, d'une cave, ments destinés à être analysés par l'Institut royal des
de structures de stockage fossoyées, de bâtiments sur Sciences naturelles de Belgique afin d'établir son usage
poteaux, de structures de combustion aux fonctions avec certitude. Le matériel céramique issu des deux
diverses et de larges fosses. L'interprétation fonction- fosses se rattache à la seconde moitié du 2e siècle.
nelle du site et des activités qui y ont été pratiquées est Une cave maçonnée, F8, est implantée à 10  m de
rendue complexe par cette diversité des installations et distance de ces deux structures. Les dimensions
leur distribution spatiale. internes du cellier sont de 2,7  m sur 2,9  m soit une
superficie 7,8  m². Les maçonneries, préservées en
Les structures de stockage élévation sur 1,75 m, sont composées d'une alternance
d'assises régulières de moellons, probablement du
Deux structures de stockage fossoyées sont installées grès carbonifère, et de lits de briques. Les murs sont
dans la section nord-ouest du site. La première, F3, dépourvus de fondation. Deux niches en ogive ont été
présente un plan quadrangulaire de 1,5 m sur 1,4 m. percées dans le mur sud. Les parties centrale et supé-
Son profil montre des parois irrégulières jusqu'à rieure du mur sud-est sont interrompues par l'aména-
50  cm de profondeur. Sous ce niveau elles évoluent gement d'un soupirail. L'accès externe à la structure est
verticalement jusqu'à une profondeur de 1,14  m. Un établi au nord-est. Le remblai reposant sur le fond de la
liseré de matière organique en décomposition souligne cave est constitué de limon incluant une forte charge de
les parois rectilignes s'évasant très légèrement vers le tuiles et de terre cuite, ainsi que de gros fragments de
bas. Le fond est incurvé sous un niveau qui pourrait charbon de bois et des nodules de mortier à la chaux.
correspondre à un plancher en bois décomposé. Le Les remplissages postérieurs recèlent de nombreux
remplissage inférieur de la fosse est une alternance de matériaux de construction tels que des blocs de grès
dépôts de sédiments lessivés et de dépôts organiques en équarris, des tuiles, des fragments de torchis et d'en-
ordonnance complexe alors que les dépôts sommitaux duit peint. La céramique recueillie dans le remblai de
correspondent à des rejets détritiques. Deux trous de la cave est datée entre la première moitié du 3e siècle et
poteau, distants de 5,5 m, sont situés de part et d'autre le troisième quart du 3e siècle. Les murs et le sol non
de la fosse laissant présumer un système de couverture aménagé du cellier portent les traces d'un incendie qui
à cet agencement. a ravagé l'édifice.
La seconde structure, F4, de forme circulaire, s'en- La cave a pris place sur une structure excavée en
fonce à 4  m de profondeur. Ses dimensions affichent matériaux périssables. Deux calages de poteaux et des
un diamètre externe de 2 m pour un diamètre interne fosses de tailles variables sont partiellement recoupés
de 1,45  m. Ce puits-silo a d'abord été dégagé sur par les murs du cellier. Leurs comblements ont livré des
une moitié de sa circonférence. La partie supérieure fragments de torchis et d'enduit à couverte peinte, des
159

Époque romaine Liège

clous, des restes fauniques et de la céramique datée entre ment arasés jusqu'à leurs fondations, celles-ci étant
la seconde moitié du 2e  siècle et le premier quart du malheureusement toutes évidées à l'exception de
3e siècle. L'abandon de cette installation serait contem- quelques lambeaux. La construction de plan rectan-
poraine de celle des structures de stockage F3 et F4. gulaire suit une orientation générale nord/sud. Elle
est divisée en trois zones aux fonctions différentes. La
Les thermes partie sud correspond à la zone de service non publique
où l'on peut imaginer l'aménagement d'un praefurnium
Au sud-est du fossé FO2 se trouve un petit édifice (a) ; ce local communique avec la zone chauffée. De la
thermal, F27. Les murs du bâtiment sont complète- zone centrale ne subsiste qu'un vestige de la chambre
de chaleur marqué de neuf empreintes de pilette (c).
La hauteur de cette chambre sur laquelle reposaient les
dalles de la suspensura devait être comprise entre 60 et
80 cm. Cette chambre de chaleur s'étend sous les deux
absides qui étaient chauffées. La zone nord du bâtiment
non chauffé intègre également une abside. Cette partie
du bâtiment est la plus préservée, elle a conservé une
e couche de rognons de silex posés à sec servant de prépa-
ration à une fondation maçonnée. Aucun élément ne
permet de déduire les caractéristiques de l'élévation,
vraisemblablement construite en dur. Les sections
centrale et nord constituent les zones publiques des
thermes où se succédaient en partant du centre le calda-
rium (b), suivi du tepidarium (d) puis du frigidarium (e).
Ce plan linéaire, bien orienté, place les pièces chaudes
d au sud. Des matériaux de construction en terre cuite
c tels que des fragments de tubuli et des plaques à croi-
sillons incisés ont été découverts lors de la fouille des
tranchées de fondation. Les rares éléments du corpus
mobilier placent l'abandon de cet aménagement à la fin
du 3e siècle tout comme la cave F8.
b Les structures sur poteaux

Le site comporte des vestiges d'édifices construits en


matériaux périssables.
Un premier bâtiment  A est implanté à l'ouest du
fossé FO2. Ses proportions sont de 10,5 m de long pour
a une largeur de 7,5 m. Il est fondé sur neuf poteaux dont
le diamètre varie entre 10 cm et 46 cm. Leurs profils,
conservés entre 2 cm et 28 cm, manifestent un arase-
ment beaucoup plus marqué sur le long côté nord-
ouest. La fonction de l'édifice n'a pu être reconnue. Son
orientation semble suivre celle du fossé FO2.
Au sud-ouest des thermes, onze négatifs de poteau
esquissent le plan d'un petit bâtiment B rectangulaire
de 6  m sur 3  m. Il comporte deux nefs et une divi-
sion interne en quatre travées. La proximité de cette
construction avec les installations balnéaires pourrait
évoquer un lieu de stockage pour le bois de chauffe.
Mais leurs orientations divergentes ne plaident pas en
0 5m ce sens. Trois gros poteaux supplémentaires subsistent
à l'ouest de ce bâtiment.
Hauts-Sarts : plan des thermes (infographie F. Giraldo Martin, Dans la partie orientale du site, un bâtiment  C de
Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
13,5  m sur 6,5  m est révélé par la présence de vingt
160

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

superstructure sont de 11  m sur 6,5  m.


Sept supports en marquent le pourtour
et deux poteaux participent à une
subdivision interne. Leurs diamètres
varient de 27  cm à 40  cm et leurs
profondeurs de 3 cm à 54 cm.

Les structures de combustion

Plusieurs secteurs répartis sur toute


l'emprise de fouille sont dévolus à des
infrastructures de combustion. De simples
fours ou foyers sans doute culinaires se
présentent comme des surfaces rubéfiées
circulaires ou ovales. Ces structures
de petites dimensions ont un diamètre
compris entre 0,5 m et 1 m. Quatre d'entre
elles ont été découvertes près de la limite
nord-ouest du site, huit autres sont établies
au sud-est du fossé FO2.
Une batterie de onze fours a été
dégagée dans la portion orientale
0 5m
du site. Leurs superstructures sont
difficiles à reconnaître  ; l'arasement des
Hauts-Sarts  : plan et coupes des poteaux du bâtiment  C (infographie parois ne permet pas de conjecturer
F. Giraldo Martin et S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
l'existence d'un dôme en argile ou en
torchis. Ces fours stéréotypés arborent
négatifs de poteau. Il occupe une surface au sol de 87 m² des dimensions de 0,6 m à 0,75 m de large pour une
environ. Ces supports arborent des diamètres compris longueur de 0,8 m à 1 m. Leurs profils dévoilent une
entre 12 cm et 25 cm, pour une profondeur conservée forme de cuvette, parfois munie d'un fond plat ou
variant de 5 cm à 22 cm. Les phénomènes de compres- d'une inclinaison marquée vers l'embouchure. Huit
sion observés ne traduisent pas une charge importante autres structures du même type, isolées ou groupées
sur les piliers. Cette structure présente un plan rectan- par deux, ont été détectées. Les comblements de toutes
gulaire mononef à entraits composé de cinq travées. Les les aires de combustion ont fait l'objet de prélèvements
murs latéraux alignent respectivement dix supports au systématiques en vue d'identifier leur usage. Les
nord-ouest et huit supports au sud-est. La cloison nord- interprétations avancées sont soit celles de fours
ouest est renforcée par trois couples de poteau alors domestiques soit pour certains d'entre eux de fours
qu'un seul couple a été détecté au sud-est. Le pignon métallurgiques. Cette dernière interprétation est due à
nord-est comporte un poteau faîtier unique. En vis-à- la présence dans le comblement des fosses avoisinantes
vis se trouvent deux creusements dont un poteau légè- de scories argilo-sableuses, correspondant à un travail
rement rentrant dans l'espace interne du bâtiment  ; il de finition ou de réparation dans la forge.
pourrait participer au pignon sud-ouest ou à un support Deux aménagements plus structurés ont pu être
interne. La fonction de l'édifice est peut-être à mettre en identifiés. Le four F187 est établi en bordure d'un
relation avec la présence à l'est de celui-ci d'un probable épais remblai d'épandage qui semble avoir été apporté
foyer de forge très arasé et de petites fosses dont le pour niveler toute la partie est du site marquée par
comblement inclut des résidus de paléométallurgie se une rupture de pente. La base de cette structure est
rapportant à des travaux de réparation d'objets en fer construite avec des fragments de tuiles assemblés. Ses
ainsi que des fragments de creuset. Il faut souligner que proportions sont de 1,25 m sur 1,05 m. L'embouchure
dans cette zone a été dégagé un cerclage en fer apparte- s'ouvre au nord-ouest et sa superstructure a totalement
nant à une roue ou à un tonneau. disparu.
Au sud de l'occupation, un édifice sur poteaux  D Un second petit four (F212) est installé dans la zone
paraît englober deux installations spécifiques, un ponctuée par des fosses d'extraction. Il est constitué
four et une structure excavée ayant conservé la d'une paroi circulaire dont le diamètre interne est de
trace d'un plancher de bois. Les dimensions de cette 1 m. Celle-ci est édifiée avec de petites dalles de grès et
161

Époque romaine Liège

des fragments de tuile. La base du four est aménagée avons opté pour des forages mécaniques. Ils se sont
avec un dépôt d'argile brune incorporant des frag- concentrés dans la partie du site qui n'était pas encore
ments de silex et des scories, surmonté par une couche investie par la construction de l'entrepôt.
de chaux épaisse de 2 cm. Son embouchure, aménagée Ces carottages visaient à établir quelle était la nature
à l'est, se déverse dans sa fosse cendrier installée dans du matériau exploité. Un premier carottage dans le sol
le comblement sommital d'une fosse d'extraction. Le en place a confirmé la présence de la craie à 13  m de
matériel céramique prélevé dans les rejets du cendrier profondeur. Le second, effectué dans le puits d'extraction
place l'utilisation du four dans le courant de la première F32, a atteint le fond de celui-ci à 13,4 m au contact avec
moitié du 2e siècle. la craie. Des fragments de ce matériau avaient d'ailleurs
La structure de combustion F43 est également été observés en position de remblai dans cette même
établie à la lisière d'une fosse d'extraction. Elle se fosse. Le troisième carottage dans le puits F40 fut poussé
caractérise par un canal de chauffe central pénétrant à sa limite technique à une profondeur de 16,8 m sans
dans une chambre de chaleur rectangulaire de 2,9  m atteindre le fond du creusement. Ces éléments semblent
sur 1,4 m. Le canal est long de 2,85 m pour une largeur démontrer une volonté d'accéder à la craie, ce que l'ana-
de 1,2 m au niveau du foyer et de 0,7 m à l'extrémité lyse détaillée des carottes de forage devra confirmer. La
de la chambre de séchage. Celle-ci est située au même céramique découverte dans les comblements supérieurs
niveau que le foyer mesurant 1,1  m sur 0,9  m. Les de certains de ces puits couvre essentiellement la fin du
dimensions hors tout de cet aménagement sont de 2e siècle et le début du 3e siècle.
3,8 m sur 2,9 m. Il suit une orientation sud-est/nord- L'occupation du site s'est prolongée jusqu'au
ouest. Le plan de cette structure est identifié à celui 4e siècle, comme le suggère le mobilier archéologique
d'un séchoir. Son remblai a livré quelques fragments renfermé dans deux structures fossoyées, F230 et F7.
de tuiles qui ont pu servir de matériau de construction. Cette dernière contenait outre de la céramique de
La structure est creusée dans le sol en place. L'amorce nombreux matériaux de construction et des éléments
d'une voûte aménagée à l'emplacement du canal de architectoniques tels des fragments de fûts de colonnes
chauffe est perceptible. Des blocs de limon portant des en pierre blanche.
traces de rubéfaction correspondent à l'effondrement L'évaluation archéologique d'une seconde parcelle
de ses parois. Des prélèvements ont été effectués afin (C) située à l'est du secteur évoqué ci-dessus s'est
de préciser la fonction de cet aménagement que la terminée en août 2015. Elle s'est révélée négative, ce
présence d'installations de stockage sur le site pourrait qui signifie la fin des opérations archéologiques dans
corroborer. cette partie de la zone d'activité économique des
Hauts-Sarts.
Les excavations
Bibliographie
Des dizaines de fosses aux dimensions et profon- ■■ Marchal J.-P., Coquelet C., de Bernardy de Sigoyer S. &
deurs variables ont été mises au jour. Leurs fonctions Goffioul C., 2015. Herstal/Milmort : évaluation archéologique
primaires n'ont généralement pas été reconnues. S'en dans le parc industriel des Hauts-Sarts, parcelle Prologis,
distinguent de grandes structures fossoyées au profil Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 184-185.
conique. Certaines de ces excavations semblent reliées ■■ Loicq S. & Marchal J.-P., 2006. Herstal/Milmort : sondages
entre elles par des couloirs d'accès. Deux hypothèses d'évaluation dans le parc industriel, Chronique de l'Archéologie
se confrontent sur la présence de ces puits  : soit une wallonne, 13, p. 109-111.
origine naturelle due à la dissolution du substrat
crayeux en place suivi d'un comblement partiellement
anthropique, soit l'exploitation de ressources souter-
raines par l'homme. Cette dernière hypothèse a été Liège/Jupille-sur-Meuse : sondages
privilégiée ; la fonction des fosses a d'abord été rappro- archéologiques dans le parc de l'Institut
chée de l'extraction d'argile suite à la présence de ce Notre-Dame
substrat détectée lors de sondages à la tarière dans la
zone nord-est du site. L'observation des courbes de
niveau et du profil topographique du terrain montrent Catherine Coquelet
des inflexions et des ruptures de pente qui ne parais-
saient pas naturelles. Elles ont été mises en relation L'Institut Notre-Dame, dont les infrastructures
avec l'hypothèse de travaux d'extraction. occupent tout un quartier de Jupille, apparaît comme
Ces excavations ont fait l'objet de fouille jusqu'à 2 m l'un des secteurs clés pour aborder l'histoire tardo-
de profondeur. Ne pouvant en atteindre le fond, nous médiévale de cette commune. Il conserve en ses bâti-
162

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

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e

0 50 m

Jupille-sur-Meuse : localisation des sondages archéologiques dans la propriété de l'Institut Notre-Dame, fouille préventive (S1 et S2)
et suivi de chantier (S3) (infographie D. Mattiuz, FCJW. Sources : Creative Architecture et CadGIS).

ments la tour Charlemagne, héritière présumée du ont pu être ouverts jusqu'au sol en place, rencontré
château de Jupille. Ce monument, daté au plus tôt du à une profondeur de 0,80 à 1  m. L'objectif de cette
16e  siècle (Capelle, 1980), pourrait en effet succéder première intervention était de vérifier l'état du dépôt
à un ensemble plus ancien, puisque les rues cernant archéologique dans cette zone encore inexplorée du
le quartier de l'Institut mentionnent son existence de cœur historique de la ville. Les vestiges, mis au jour
façon explicite dès le début du 15e siècle (Jacquemotte à 0,50  m de profondeur seulement, se rattachent
& Lejeune, 1907 : rues du Castel, Derrière le Château). uniquement au passé antique de Jupille. Ils illustrent
Pour cette raison, les divers travaux projetés dans cette la densité du bâti romain en périphérie sud de cette
propriété (parc. cad. : Liège, 20e Div., Sect. C, no 688v) agglomération fondée au 1er  siècle de notre ère et
ont donné lieu à une intervention archéologique menée abandonnée vraisemblablement dès le 3e siècle.
entre le 1er  décembre 2014 et le 30  mars 2015 par le La stratigraphie conduit à subdiviser les structures
Service de l'archéologie de la Direction extérieure de en trois états archéologiques compris dans la fourchette
Liège 1 (DGO4 / Département du patrimoine). Celle-ci chronologique précitée. L'état le plus ancien (état  1)
a débuté par une petite fouille préventive préalablement est caractérisé par la présence d'un sol en galets et en
à la construction d'une extension contre l'aile culturelle moellons de grès bruts et de quelques fosses creusées
de l'Institut (S1 et S2) et s'est prolongée par un suivi de dans le sol en place. L'une d'entre elles, peu profonde
chantier dans le cadre du réaménagement de l'accès et de plan rectangulaire, est bordée de deux petites
extérieur nord-est de l'aile rénovée (S3). accumulations de moellons de grès houiller, peut-être
La zone menacée par l'extension correspond à un les vestiges des supports d'un habitat sur poteaux, dont
espace d'environ 150  m2 s'étendant entre le bâtiment l'espace de vie serait partiellement enterré. Ces vestiges
scolaire et le mur d'enceinte séparant le parc arboré s'ordonnent en fonction de la voirie empierrée de l'état
de la rue Derrière le Château. Malgré l'exiguïté du suivant, suggérant l'existence d'une voie de circulation
terrain, deux sondages totalisant une surface de 60 m2 en terre dès cette première période.
163

Époque romaine Liège

État 1 S1 et de galets de silex sur le sol en place préalablement


décaissé sur une vingtaine de centimètres et sur toute
S2 la largeur de voie. L'ensemble est recouvert par une
couche de gravillons et de petits galets de silex servant
de surface de roulement. L'épaisseur totale de la voirie
est de 0,30 m maximum et son emprise est estimée à
79,11 79,25 2,70  m. Aux abords de la rue empierrée prend place
un nouveau bâtiment en matériaux périssables élevé
sur sablières, partiellement dégagé en partie sud du
sondage. Les tranchées, larges de 0,20 m et profondes
de 0,05 m, dessinent le plan d'au moins quatre petits
locaux rectangulaires juxtaposés. Leurs murs reposent
État 2 sur des fondations légères constituées d'un alignement
79,30
de moellons de grès houiller posés à sec. Associés à
ces vestiges d'habitat, des rejets d'une activité de forge
Voirie antique 79,24 témoignent de la présence toute proche d'un atelier
79,04
métallurgique. Les deux petites plaques de scories
bordant plus particulièrement la façade avant du bâti-
ment ont en effet livré plusieurs culots de forge de type
scorie grise dense, indices d'un travail d'élaboration
79,46 d'objets en fer.
Le dernier état archéologique (état  3) correspond
à l'édification d'un habitat sur solins. À cette occa-
Habitat sion, le bâtiment en matériaux légers sur sablières est
sur sablières
détruit ; ses vestiges arasés sont recouverts d'un sol de
État 3 circulation en galets bordant le nouvel édifice dont
Habitat l'angle a été dégagé dans le sondage  S1. Son mur de
sur solins façade, suivi sur une longueur de 1,80 m, forme retour
Voirie antique
79,43
79,24 à angle droit et se prolonge sur au moins 4  m. L'état
79,04 de conservation des murs se limite à leur fondation en
79,49
tranchée, constituée de blocs de grès houiller montés à
sec et disposés en hérisson. De l'organisation interne
du bâtiment est préservé un mur de refend, délimitant
une pièce côté rue. Elle possédait un sol en dur, dont
seule subsiste la préparation constituée de moellons
bruts de grès houiller. L'ensemble est directement
recouvert, à l'époque moderne, par une couche de
0 1m sédiments humifères d'une épaisseur de 0,50 m maxi-
mum, servant de niveau de circulation au parc actuel.
Quant au suivi de chantier lié aux terrassements
Épandage riche en charbon de bois effectués à l'extrémité nord-est de l'aile  rénovée, côté
Culot de forge
Épandage de scories rue Charlemagne, son objectif était de réunir quelques
É informations sur l'environnement de la tour Charle-
Moellon de grès houiller/fragment de terre cuite magne. La démarche s'inscrivait dans le prolongement
Galet de silex
de l'étude numismatique, historique et archéologique
Jupille-sur-Meuse : succession des occupations du Haut- du dépôt monétaire provenant de l'une des dépendances
Empire romain en trois états archéologiques dans les du château, localisée à l'arrière de l'école Saint-Amand-
sondages S1 et S2 (infographie D. Mattiuz, FCJW).
et-Saint-Pierre-Fourier (Coquelet, Coura & Van Laere,
2015 ; Coquelet & Gustin, 2010). Le suivi prescrit dans
Au cours de la phase suivante (état  2), la première le cadre des travaux de réaménagement de l'accès s'est
occupation disparaît sous le dépôt d'une couche révélé malheureusement négatif, l'espace dégagé se
argilo-limoneuse stérile, de couleur jaune, de 0,20  m cantonnant au remplissage des tranchées de fondation
d'épaisseur. L'aménagement de la rue se caractérise par de l'aile bâtie en 1885 par les sœurs de la congrégation
le dépôt de blocs de grès houiller de taille très variable Notre-Dame contre la tour Charlemagne.
164

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

Bibliographie sement. Lors de notre passage sur les lieux, ces débris
■■ C[apelle] C., 1980. Tour Charlemagne. In  : Province de occupaient la largeur de la tranchée (1,5  m) sur une
Liège. Arrondissement de Liège. Tome 2 (L-V), Liège (Le Patri- longueur de 23 m. Ils s'étendent vraisemblablement au
moine monumental de la Belgique, 8²), p. 465. nord et au sud de la future voirie.
■■ Coquelet C., Coura G. & Van Laere R., 2015. Un dépôt Quelques tessons romains ont aussi été relevés (frag-
monétaire de la fin du 15e siècle à Jupille-sur-Meuse (Liège). In : ments de fond de vase en sigillée d'Argonne, de mortier à
Frébutte  C. (coord.), Pré-actes des Journées d'Archéologie en lèvre en collerette, de pot à bord rentrant, etc.). La nature
Wallonie, Rochefort 2015, Namur, Service public de Wallonie de cette occupation d'époque romaine est actuellement
(Rapports, Archéologie, 1), p. 135-137. indéterminée mais elle est sans doute à mettre en
■■ Coquelet C. & Gustin M., 2010. Liège/Jupille-sur-Meuse : relation avec d'autres vestiges romains, attribués à une
fouilles préventives menées à l'école Saint-Amand, campagne implantation de type relais (2) et à une petite nécropole
2008, Chronique de l'Archéologie wallonne, 17, p. 138-140.
(3), découverts il y a quelques années dans le zoning
■■ Jacquemotte E. & Lejeune J., 1907. Glossaire toponymique industriel voisin et le long de la rue Le  Marais (Gava
de la commune de Jupille, Liège. & Dardenne, 1991-1992  ;  Marchal & Gustin, 1999  ;
Marchal & Loicq, 2003). Les vestiges romains découverts
dans le zoning industriel se répartissent de part et d'autre
d'une voie romaine empierrée (1 ; Marchal, 2001) dont le
Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : prolongement passe très probablement à 150 m au sud-
sud-est des vestiges découverts en 2015.
occupation romaine rue de Vinalmont
Bibliographie
Gianni Gava ■■ Gava G. & Dardenne L., 1991-1992. Villers-le-Bouillet  :
trace d'occupation romaine, Bulletin du Cercle archéologique
En février 2015, l'entreprise Thomas & Piron a débuté Hesbaye-Condroz, XXII, p. 145-148.
l'implantation d'un nouveau lotissement résiden- ■■ Marchal J.-P., 2001. Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet  :
tiel à Villers-le-Bouillet, rue de Vinalmont (entre les voie romaine rue de la Métallurgie, Chronique de l'Archéologie
nos  2 et 4) à proximité de la ferme de la Croix (parc. wallonne, 9, p. 114.
cad.  : 1re  Div., Sect.  A, no  244y  ; coord. Lambert  : ■■ Marchal J.-P. & Gustin M., 1999. Voie romaine et occupa-
212961 est/141121 nord). tion riveraine à Villers-le-Bouillet. Rapport préliminaire, Bulle-
Le creusement des tranchées d'égouttage a fait tin de la Société royale belge d'Études géologiques et archéologiques
apparaître un niveau de tuiles romaines (gros frag- Les Chercheurs de la Wallonie, XXXIX, p. 83-101.
ments jusqu'à un quart de tegula) à une profondeur ■■ Marchal J.-P. & Loicq S., 2003. Villers-le-Bouillet/Villers-
de 1,2  m sous le niveau du sol actuel (soit au niveau le-Bouillet  : nécropole romaine et occupation protohistorique
de la semelle de fondation de l'égout). Cette couche rue Le Marais, Chronique de l'Archéologie wallonne, 11,
p. 141-142. 
archéologique (4) se situe à l'extrémité nord du lotis-

Villers-le-Bouillet : vestiges d'occupation romaine: 1. Route ; 2. Emplacements des


fouilles menées par le Service de l'archéologie de la Direction extérieure de Liège 1
(DGO4 / Département du patrimoine) en 2000-2003 ; 3. Intervention du CAHC
en 1990 ; 4. Vestiges découverts en 2015 ; 5. Rue Le Marais ; 6. Rue de Vinalmont.
165

Moyen Âge Liège

MOYEN ÂGE
Modave/Vierset-Barse : la motte castrale
de Vieux-Barse, un premier bilan de la
campagne de fouilles 2015

Yorick Lucon indéterminée avec un appareil identique à celui de la


structure 1. Malgré un dégagement effectué sur plus de
Découverte fortuitement en 2014 suite à l'exploration 2 m de profondeur en partant du sommet actuel des
des versants de la vallée du Hoyoux, la motte castrale murs, nous n'avons pas été en mesure de découvrir la
de Vieux-Barse est longtemps passée inaperçue, aussi base de cette ouverture, le coup de sabre visible à la
bien dans la littérature scientifique que dans le paysage jointure des structures  1 et 2 semblant se poursuivre
local. Cette relative discrétion ne l'a malheureusement sans interruption. Enfin, la structure 3 consiste en un
pas empêchée de faire l'objet d'au moins deux pillages conduit rectiligne qui traverse la structure  1 de part
ayant laissé des stigmates encore visibles dans le relief en part. Son ouverture dans le parement interne du
du site. Plusieurs segments de murs maçonnés étaient mur ouest se trouve à une profondeur de 2,60 m sous
ainsi apparents et ont contribué à mieux cerner la le sommet du mur, est irrégulière et n'excède pas une
nature des vestiges avant toute intervention. vingtaine de centimètres de diamètre. À l'exception de
Lors de sa découverte, le site se présentait sous la deux pitons de fer intrusifs – sans doute placés là par
forme d'une importante levée de terre d'environ 9 m de le pilleur  –, d'une base d'anse en céramique et d'une
haut, cernée de trois fossés partiellement taillés dans la
roche du plateau en bordure duquel elle fut construite.
Un espace dégagé, pris entre le flanc ouest de la motte
et le début du versant de la vallée, fut identifié comme
une potentielle basse-cour, en apparence dénuée de
toute structure maçonnée. Pour sa part, le sommet du
site était occupé par deux constructions bien distinctes.
La première – quadrangulaire – prenait place dans la
moitié nord (bâtiment 1), tandis que la seconde, dotée
de limites beaucoup plus floues, était implantée dans la
moitié sud (bâtiment 2).
Suite au nettoyage initial du site – fortement envahi
par la végétation – l'ampleur insoupçonnée d'un pillage
nous a rapidement contraint à revoir l'implantation de
la zone de fouilles. Celle-ci s'est finalement articulée
autour de l'angle nord-ouest du bâtiment 1. Après cette
première étape préparatoire, un relevé topographique
partiel a été réalisé, relevé encore incomplet à ce jour
compte tenu de l'importance de la surface à traiter.
Les structures mises au jour sont au nombre de trois.
La structure 1 est un mur à parement interne et externe
en pierres calcaires maçonnées à la chaux. Son comble-
ment est composé de pierres calcaires plus grossières,
mêlées d'une importante quantité de mortier. L'épais-
seur de cette construction est de 1,70 m en moyenne
dans sa section ouest (c'est-à-dire côté basse-cour) et
de 2,20 m pour son retour exposé au nord. C'est dans
cette dernière partie que se trouvait aménagée une
ouverture dont une limite se situe hors de la zone de
fouilles, rendant son identification et son rôle incer- Vierset-Barse : relevé en plan de la zone de fouilles (angle
tains. Elle fut par la suite colmatée au moyen d'un nord-ouest du bâtiment 1), ainsi que de l'emplacement des
céramiques diagnostiques.
nouveau mur (structure 2), bâti à une époque encore
166

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

petite quantité de sédiments repoussés à l'entrée lors enfouie. Dans ce contexte, la possibilité qu'une pièce en
du comblement de la fouille clandestine, cette struc- sous-sol existe encore et ait été comblée par les ébou-
ture était vide. lis n'est pas à exclure. Malheureusement, l'absence de
Abstraction faite des perturbations engendrées par le moyens alloués à ce programme de recherche ne nous
pillage du site, la stratigraphie s'est révélée particulière- permettra pas d'investiguer plus avant dans des condi-
ment simple. Elle ne se résume en effet qu'à une couche tions satisfaisantes. Nous espérons donc qu'une évolu-
d'effondrement rapide (UF [5] : matrice ouverte de blocs tion favorable de la situation nous offrira la possibilité
calcaires composant jadis les murs de la structure, mêlés de poursuivre ce travail prometteur.
à du mortier de chaux pulvérisé), elle-même située sous
une couche de dégradation de surface (UF  [4]). Cette Remerciements
dernière est le résultat du processus naturel de lave-
ment des éboulis par les précipitations, entraînant la L'auteur tient à exprimer sa profonde gratitude aux
disparition de la majeure partie du mortier de chaux, différents membres du Cercle archéologique Hesbaye-
les interstices entres les pierres ont ensuite été progressi- Condroz ayant pris part au travail de terrain, à savoir
vement comblés par l'humus résultant de la dégradation mesdames Françoise  Bolland et Amandine  Schaus,
du couvert végétal. Ces deux unités prennent princi- ainsi que messieurs Emmanuel Delye, Robert Désert,
palement appui sur l'UF [1] (parement interne du mur Philippe Franquinet et André Jaminon.
ouest, structure 1), l'UF [3] (parement interne du mur
nord, structure 1) et enfin l'UF [7] (parement interne du
mur de fermeture, structure 2).
Le matériel découvert se compose avant tout de très Soumagne/Ayeneux : vestiges en bois
nombreux fragments osseux, tous d'origine animale. rue Pont Al'Plantche
On en dénombre 881, pour un poids total de 1 553 g.
Ces pièces dépassent rarement les quelques centi-
mètres de long et présentent de nombreuses traces Claire Goffioul, Olivier Collette,
à leur surface, indiquant clairement qu'il s'agit d'élé- Sarah Crémer et Pascale Fraiture
ments intrusifs apportés par des animaux opportu-
nistes et se servant des nombreuses cavités préser- Une évaluation archéologique a été menée préalable-
vées dans les couches d'effondrement (UF  [4] et [5]) ment à la création d'un lotissement rue Pont Al'Plantche,
comme abris. Les tessons, bien que présents en faible entre le château de Wégimont et le ruisseau de la Magne.
quantité (29  pièces), n'en comportent pas moins L'endroit, au toponyme évocateur, pouvait suggérer un
quelques éléments diagnostiques (CM01 à CM07, dont point de passage pour franchir le cours d'eau.
des éléments de préhension, des fonds et des bords)
ainsi qu'une caractéristique intéressante : presque tous
sont maculés de mortier de chaux qui adhère forte-
ment à leur surface. Ce fait nous laisse penser qu'ils
ont été inclus dans le comblement des murs lors de
l'édification de la structure, nous offrant un terminus
post quem. Les bords –  identifiés comme étant des
bandeaux d'Andenne – nous permettent d'avancer une
proposition de datation pour la seconde moitié du 11e
ou la première moitié du 12e  siècle. Cette estimation
demande cependant à être confirmée par le biais d'une
analyse approfondie menée par un céramologue, ainsi
que par le recoupement avec d'autres sources. Elle
demeure pour l'heure une hypothèse de travail.
Quoique cette seule campagne de fouilles soulève
autant de questions qu'elle n'apporte de réponses, nous
pouvons affirmer être en présence d'un site remar-
quable et probablement unique en Belgique à l'aune
de nos connaissances actuelles. Les murs, admirable-
ment préservés et plongeant à une grande profondeur Soumagne/Ayeneux, Pont Al'Plantche  : plan général
– probablement pour rejoindre le sol en place – laissent (infographie F.  Giraldo-Martin et C.  Régimont, Serv.
archéologie, Dir. ext. Liège 1).
présager de l'existence d'une importante structure
167

Moyen Âge Liège

NORD SUD
200 m

195 m
colluvions limoneuses

190 m terrasse
chenaux latéraux ?
185 m schistes et grès houillers La Magne
argile homogène
180 m ? ?
argile à silex

0m 125 m 250 m accumulation caillouteuse 500 m

Soumagne/Ayeneux, Pont Al'plantche : profil topographique observé sur le versant nord de la vallée de la Magne.

L'opération s'est déroulée en septembre 2012 sur moins une portion d'aménagement de berge a été
un terrain de 3,45 ha menant à la plaine de la Magne observée. L'assemblage fragile de fines planches, de
(coord. Lambert : 246493 est/144941 nord). L'explora- 25  cm de long sur 10  cm de hauteur et épaisses de
tion en tranchées continues a livré des données géo- 1 cm, clouées à des piquets d'à peine 4 cm de section et
pédologiques intéressantes, permettant d'identifier les de 20 à 30 cm de hauteur, suggère un effondrement in
principaux dépôts présents au sein de la plaine allu- situ de l'ouvrage.
viale de la Magne. Un éventail des types de bois a été prélevé en vue
Le terrain occupe le fond de la vallée de la Magne et d'une expertise dendrochronologique. Les pièces, frag-
son versant septentrional. Son extrémité nord corres- mentées pour la plupart, ont été recueillies à l'aide d'une
pond à la transition avec le plateau de Wégimont. pelle mécanique en trois niveaux successifs d'une ving-
Le substrat géologique est constitué par les terrains taine de centimètres. Il s'agit, pour le niveau 1, d'une
schisto-gréseux du Groupe Houiller. Le versant branche type tenon (un fragment en aulne et un autre
concerné est en pente relativement douce et transite en hêtre), d'une planche travaillée en chêne présentant
par un talus avec la plaine alluviale. Les tranchées un trou et une rainure le long d'une rive (?), d'un pieu
d'évaluation au nord du terrain ont mis en évidence en aulne, d'une planche fine en hêtre, d'une autre plus
des dépôts colluviaux limoneux interrompus à la épaisse en aulne et d'un piquet en noisetier  ; pour le
rupture de pente par des pointements du substrat niveau  2, d'une planche travaillée d'une essence non
schisto-gréseux. Une petite terrasse, située 3  m
au-dessus de la plaine alluviale et conservée sur une
vingtaine de mètres de large, laisse affleurer une
argile blanchâtre affectée par un réseau polygonal
recouverte par endroit de plaquages colluviaux. La
plaine alluviale qui débute vers la cote +182,5 m est
particulièrement plane. Elle contient des alluvions
argileuses blanchâtres homogènes en surface
devenant caillouteuses vers 1,2  m de profondeur.
Une accumulation de cailloux grossiers se rencontre
à environ 2 m sous la surface actuelle. Les alluvions
sont parcourues par une frange d'oxydation vers
25 cm de profondeur puis, vers 60 cm de profondeur,
prennent des teintes grisâtres typiques de conditions
hydromorphes. Des cailloux de silex et des blocs épars
de grès se rencontrent régulièrement en surface. Des
concentrations sinueuses de cailloux au sein des allu-
vions argileuses sont interprétées comme les traces de
probables anciens chenaux.
Un sondage profond à proximité de la Magne a
mis en évidence la présence d'un paléochenal sous
les dépôts d'argile homogène. Vu les conditions d'ob-
servation difficiles, seuls les niveaux supérieurs du
paléochenal ont été observés ; ils sont constitués de lits Soumagne/Ayeneux, Pont Al'Plantche  : fragment
caillouteux et ont une charge organique importante. d'aménagement de berge en cours de dégagement
De nombreuses pièces de bois y ont été découvertes, (infographie F.  Giraldo-Martin, Serv. archéologie, Dir. ext.
Liège 1).
sans ordre apparent pour la plupart d'entre elles. Au
168

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

identifiée, d'une branche non travaillée en aulne (deux chapitre (Lambotte & Neuray, 2007). À partir de là,
fragments), d'un grand tronc et d'un pieu tous deux il paraissait évident que les quelques trous de pieux
en tilleul ; enfin, pour le niveau 3, d'un bois travaillé relevés à l'entour appartenaient à l'oratoire Saint-
en chêne. Martin dans lequel Remacle avait d'abord été enterré
L'examen dendrochronologique mené sur les selon les premiers témoignages (10e siècle).
vestiges s'est avéré intéressant. Sur les onze  pièces Les vestiges d'un bâtiment très arasé, mis au
de bois expertisées, deux  fragments de planches du jour dans le transept sud de l'église ottonienne,
niveau 1 ont été retenus pour étude ; l'un est en chêne, ont ensuite été attribués à la première abbatiale  :
l'autre en hêtre. Ce dernier n'a pas donné de résultats la partition particulière de l'édifice permettait d'y
suffisamment crédibles à la datation. Quant à l'échan- reconnaître d'ouest en est, une nef centrale bordée
tillon en chêne, il a été daté avec certitude : il provient de bas-côtés, un transept non saillant et un sanc-
d'un arbre abattu entre 1265 et 1285. Ce résultat situe tuaire à abside. Au nord-est, des structures frag-
le comblement supérieur du paléochenal au plus tôt à mentaires dessinant de petites cellules furent ratta-
la fin du 13e siècle. chées aux premiers bâtiments conventuels, tandis
L'intervention archéologique rue Pont Al'Plantche qu'à l'ouest un petit édifice quadrangulaire abritant
a permis de reconnaître les divers éléments structu- plusieurs sépultures et des structures très arasées,
rants de la plaine alluviale de la Magne, la présence de accompagnées d'un abondant matériel verrier,
paléochenaux aux berges parfois aménagées et qui ont furent interprétés respectivement comme chapelle
conservé des éléments de bois dont certains remontent funéraire et aire d'activité artisanale (Lambotte &
à la fin du 13e siècle. Neuray, 2009).
Les bâtiments attribués à la seconde phase, soit
la reconstruction du monastère au 10e  siècle après
le passage des Vikings, incluaient une deuxième
Stavelot/Stavelot : nouvelle chronologie abbatiale construite directement au nord de la
des bâtiments monastiques du Haut précédente – composée d'une longue nef, d'un sanc-
Moyen Âge et découverte d'un tuaire à abside et d'une tour occidentale –, le réamé-
nagement de la première abbatiale en grande « salle »
sarcophage mérovingien
accolée à la nouvelle église et la construction d'un
vaste cloître avec lavabo au sud.
Brigitte Neuray
La nouvelle interprétation de la
En préparation à la publication des recherches archéo- chronologie
logiques entreprises sur le site de l'ancienne abbaye de
Stavelot, un workshop a été organisé en octobre 2014, La révision de la chronologie de l'ensemble des sépul-
sur le thème « Archéologie et histoire, de la fondation tures des premiers siècles a rapidement démontré
à Odilon », soit du milieu du 7e à la fin du 10e siècle. À que toutes les inhumations situées à l'intérieur de
cette occasion, archéologues et historiens rassemblés la chapelle dite funéraire avaient été creusées après
se sont penchés sur la problématique des premiers l'incendie de celle-ci, événement stratigraphiquement
bâtiments religieux de Stavelot. rattaché à l'incursion des Vikings en 881. Ce bâtiment
n'avait donc pas une vocation sépulcrale et ce n'est
La chronologie proposée avant 2014 qu'après l'incendie qu'il accueillit au moins six sépul-
tures, entre la fin du 9e et le début du 11e  siècle. Par
L'interprétation soutenue jusqu'ici reposait sur la ailleurs, l'examen des vestiges attribués à la première
découverte, au centre de la salle du chapitre du abbatiale a également permis d'identifier la trace d'un
cloître ottonien, d'un sarcophage enterré (T302), premier sanctuaire à chevet plat, sous le mur d'abside
vide d'ossements, identifié à la sépulture primitive du aujourd'hui rattaché à la transformation de ce bâti-
fondateur, Remacle (mort entre 671 et 679), sur base ment au 10e siècle.
de plusieurs arguments : les témoignages historiques Lors du workshop d'octobre 2014, l'interprétation
relativement récents –  milieu du 17e  siècle pour le générale de la chronologie proposée a soulevé plusieurs
plus ancien  – (Pascaud, 2000, p.  30), le désaxement objections. L'identification du sarcophage au tombeau
singulier des bâtiments claustraux dès le 10e  siècle, primitif de Remacle a d'abord été remise en cause
supposé induit par l'orientation de ce sarcophage, et pour trois raisons : l'absence de sépultures ad sanctos
surtout la concentration de sépultures dans la gale- antérieures au cloître ottonien, le manque de traces
rie orientale du cloître ottonien, qui longe la salle du claires de bâtiments autour du tombeau du fonda-
169

Moyen Âge Liège

bâtiments actuels
abbatiale et conventuels du 11e siècle
abbatiale et conventuels du 10e siècle
abbatiale et conventuels du 8e siècle

T302

0 20 m

Stavelot : phasage haut-médiéval tel que publié dans Lambotte & Neuray, 2009.

bâtiments actuels
11e siècle
10e siècle
7e- 9e siècle
7e siècle
08
T3

07
T3

06
T3

01
T3

02
T3

0 20 m

Nouvelle proposition de chronologie dans le cadre des recherches récentes.


170

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

teur et enfin l'éloignement relatif de celui-ci vis-à-vis ensemble, elles témoignent d'un décor de qualité
des églises successives. Par ailleurs, la typologie de la ornant le sanctuaire primitif, démonté au début du
première abbatiale a été jugée anachronique pour la fin 10e  siècle, et confirment donc la préexistence d'une
du 7e siècle : la définition du plan en nefs et transept première église, dotée d'un sanctuaire à chevet plat,
mais aussi l'étroitesse des bas-côtés posaient en effet qui remonterait, selon les sources historiques, à la fin
question. Enfin, la deuxième abbatiale présente un du 7e siècle.
plan qui est apparu, a contrario, archaïque au 10e siècle Cette nouvelle interprétation de la chronologie et de
et sa disproportion vis-à-vis de l'ampleur du cloître la fonction des bâtiments nécessitait quelques études
contemporain a également été soulignée. complémentaires. Une série de datations 14C des sépul-
Sur base de ces différentes remarques, une nouvelle tures situées dans l'espace de la chapelle funéraire, de
interprétation de la chronologie des vestiges est celles enfouies sous le sol non perturbé de la première
aujourd'hui proposée  ; sans entrer dans les détails abbatiale au nord et de cinq d'entre elles, recoupées
qui seront développés dans la publication, il convient par ce dernier bâtiment, n'apportent pas de preuves
cependant de signaler que le réexamen des obser- formelles mais soutiennent cette nouvelle hypothèse.
vations archéologiques et les études complémen- Les résultats complets de ces datations 14C seront
taires effectuées depuis ce workshop confirment cette présentés dans la publication en cours de préparation.
nouvelle proposition.
Le bâtiment identifié auparavant à la première Le sarcophage mérovingien
abbatiale est en réalité un édifice religieux à vocation
funéraire. La présence de caveaux, maçonnés mani- Dans le cadre des travaux complémentaires également,
festement en même temps que le mur auquel ils sont une sépulture en caveau, signalée dans les carnets
adossés, ainsi que de plusieurs sépultures dans le « bas- de fouille de 1999, méritait un réexamen ciblé en
côté » nord, permet de soutenir cette hypothèse. Son raison de sa position : située à peu près au centre de
plan évoque plutôt un édifice de type memoria, qui la chapelle funéraire, mais mal documentée, elle était
peut être rapproché de l'oratoire Saint-Martin signalé clairement antérieure au réaménagement de l'édi-
par les textes à partir du 10e siècle. La découverte réali- fice au 10e  siècle. Un sondage ponctuel est entrepris
sée en mai 2015 et détaillée ci-dessous renforce égale- en mai  2015 afin de préciser son emplacement et
ment cette nouvelle interprétation. compléter les informations disponibles. Les vestiges de
Quant à l'abbatiale dont la construction était aupa- ce qui avait d'abord été interprété comme un caveau
ravant attribuée au 10e  siècle, plusieurs éléments sont mis au jour  : une grande pierre horizontale,
permettent de remonter sa datation.  L'excellente partiellement englobée dans un mur de chaînage de
conservation du mortier de sol en connexion avec l'abbatiale du 11e siècle, constitue une partie du fond ;
des fragments d'enduit mural, clairement datés du une dalle verticale taillée fait office de paroi au sud ; les
10e siècle, et l'absence de traces de remaniement de cet vestiges d'un muret de pierres sèches limitent le caveau
édifice concouraient à son attribution chronologique à l'est. Quelques ossements en désordre sont récoltés
première. Il est néanmoins certain que le sol contem- à cette occasion. Deux grandes dalles recouvraient ces
porain de la salle à abside au sud a été posé à un niveau éléments jusqu'en 1999.
plus bas que le sol primitif de la chapelle funéraire,
arasant visiblement les vestiges de ce premier bâti-
ment. Si cette disposition a été appliquée à l'abbatiale
au nord, il est possible que ces travaux aient effacé tout
indice d'occupation antérieure. Cet abaissement du sol
au 10e siècle trouve certainement son origine dans la
volonté d'uniformiser les niveaux de circulation entre
le nouveau cloître au sud et les bâtiments cultuels au
nord. Un deuxième argument provient de la mise au
jour d'une quarantaine de tesselles de mosaïques à la
feuille d'or dans une couche de remblai de démoli-
tion, bien datée par le matériel associé, du début du
10e  siècle. Cette découverte, hors bâtiment construit,
peut être mise en relation avec une autre concentration
des mêmes mosaïques retrouvée le long du parement
intérieur des fondations de l'abside de l'abbatiale du
Les vestiges du sarcophage (T306) mis au jour en mai 2015.
10e  siècle, dans un contexte relativement perturbé  :
171

Moyen Âge Liège

p.  262-264). Les dimensions de ce dernier élément


correspondent à nouveau avec celles du sarcophage/
couvercle de l'abbé Audon (T301). Or, l'extrémité
orientale de la cuve découverte en mai  2015 (T306)
n'a pas été retrouvée. On peut donc envisager à titre
d'hypothèse que les trois éléments (T306, T301 et ajout
0 1m oriental T308) fassent partie d'un même ensemble.
Ce double témoignage de réutilisation/recyclage de
Superposition des relevés des éléments conservés des sarcophages, tels qu'il apparaît pour les sépultures des
sarcophages T306 (à gauche, en grisé), T308 (à droite, en abbés Audon et Poppon, peut paraître étonnant pour
grisé : contour à la base, hachures : contour au sommet) et une abbaye de l'importance de Stavelot ; tout comme le
T301 (pointillés).
nombre relativement limité (5) de sarcophages mis au
jour sur le site, il reflète sans doute la difficulté d'ache-
La poursuite du dégagement montre que la dalle verti- miner ces lourdes et fragiles pièces à cet endroit isolé
cale taillée est en réalité un fragment de paroi de sarco- des principales voies de communication navigables.
phage dont la base est toujours en place. Le démontage D'un point de vue chronologique, les données sont
du chaînage du 11e  siècle et l'enlèvement de la pierre les suivantes  : le sarcophage découvert (T306) a été
interprétée comme fond du caveau en 1999 révèlent les détruit ou accidentellement brisé, puis un caveau ou
contours du sarcophage (T306) : bien qu'il soit fragmen- coffre funéraire a été aménagé sur ses vestiges arasés,
taire, plus de la moitié de son périmètre occidental est avant la reconstruction d'une salle à abside à cet endroit
préservé mais son extrémité orientale est absente. au milieu du 10e siècle. Le rapprochement de la cuve
Taillé dans un calcaire oolithique vacuolaire de type T306 avec le sarcophage/couvercle T301 tend à situer
Savonnières identifié par Laure-Anne  Finoulst, ses l'abandon de la sépulture T306 avant la mort de l'abbé
dimensions correspondent exactement à celles d'un Audon en 836. Sa situation privilégiée au centre du
autre sarcophage, réalisé dans le même matériau et plus ancien bâtiment religieux, à vocation funéraire,
mis au jour à Stavelot en 1980 par le cercle archéolo- incite à l'attribuer à la sépulture primitive du fonda-
gique local (Stifkens, 1981). Celui-ci (T301) était situé teur, Remacle, mort entre 671 et 679. Deux sources
à l'intérieur de l'abbatiale ottonienne du 11e  siècle, historiques des 10e et 11e  siècles situent l'inhumation
contre le gouttereau sud, et contenait notamment primitive de l'abbé dans l'oratoire Saint-Martin et
une inscription sur lame de plomb permettant le transfert de sa sépulture dans l'abbatiale –  en 685
d'identifier le défunt, l'abbé Audon mort en 836. La selon les historiens – par l'un de ses successeurs, l'abbé
faible hauteur de la cuve, la présence de liserés sur les Goduin (Pascaud, 2013, p. 17-18). On peut émettre à
parois latérales et le profil arrondi du dos ont amené titre d'hypothèse que le fragment de cuve mis au jour
Laure-Anne Finoulst, dans le cadre de son doctorat, à (T306) constitue le vestige de la sépulture primitive de
proposer de l'identifier à un couvercle de sarcophage. Remacle, transférée dans l'abbatiale 15 ans à peine après
Elle a également noté des traces de retaille à l'inté- son décès ; l'état de la cuve et son abandon pourraient
rieur, laissant supposer une adaptation de celui-ci aux résulter de manipulations malheureuses lors de cette
mesures du défunt et renforçant l'hypothèse d'une opération de transfert. La situation d'un autre sarco-
réutilisation (Finoulst, 2012, vol. 1, p. 83 et 156-157). phage découvert au 19e  siècle (T307) concorde avec
Ces observations, étayées par la concordance parfaite cette hypothèse (Cumont, 1898)  : retrouvé au centre
des dimensions des deux éléments, semblent indiquer de l'église nord, devant le sanctuaire et contourné par
que le « sarcophage » d'Audon (T301) serait en réalité les fondations de l'abbatiale ottonienne du 11e  siècle,
le couvercle de la cuve fragmentaire (T306) mise au il pourrait correspondre à la seconde sépulture du
jour au printemps 2015. patron de l'abbaye, après son transfert en 685. Ces
Un autre sarcophage (T308) mérite également d'être nouvelles hypothèses remettent en cause l'interpré-
évoqué. Découvert au centre de la crypte ottonienne à la tation antérieure du sarcophage englobé et maçonné
fin du 19e siècle, il a contenu les restes de l'abbé Poppon, dans le sol de la salle capitulaire ottonienne (T302),
le promoteur de la grande abbatiale ottonienne du que des sources historiques relativement récentes (17e-
11e siècle (Cumont, 1898 ; Legrand, 1942, p. 42-43). Ce 18e  siècles) identifiaient à la sépulture primitive du
sarcophage comporte plusieurs éléments : un couvercle fondateur. Les résultats des dernières investigations
en calcaire Bathonien ou Jurassique supérieur, une nécessiteront une réévaluation de cette analyse.
cuve en calcaire Bajocien, proche du type Jaumont, qui Une relecture des sources historiques est dès à présent
est allongée au niveau des pieds par un fragment de entreprise afin d'éclairer tant cette dernière découverte
cuve en pierre de Savonnières (Finoulst, 2012, vol. 2, que les nouvelles interprétations de l'organisation de
172

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

l'abbaye, avec l'espoir qu'elles puissent apporter leur lonnant entre le 7e et la première moitié du 11e siècle
contribution à la reconstitution du monastère haut- au plus tard (Henrard, 2012 ; Henrard, de Longueville
médiéval. & Hanut, 2014).
Outre les vestiges habituellement mis au jour pour
Bibliographie  un habitat rural de cette période (silos, fosses, fossés,
■■ Cumont G., 1898. Fouilles faites dans l'ancienne abbaye de empreintes de poteaux, foyers et cabanes excavées), la
Stavelot pendant l'année 1896, Annales de la Société d'Archéolo- fouille a livré une vingtaine d'inhumations en bordure
gie de Bruxelles, XII, p. 331-336. septentrionale de l'occupation.
■■ Lambotte B. & Neuray B., 2007. Abbaye de Stavelot. Le L'espace funéraire apparaît en partie tronqué par
tombeau de Remacle. In : Actes des VIIe Congrès de l'Association l'érosion. La répartition des tombes est assez ramassée
des cercles francophones d'Histoire et d'Archéologie de Belgique et montre l'utilisation de deux normes d'orientation
et LIVe  Congrès de la Fédération des cercles d'Archéologie et successives. Aucun mobilier ou dépôt funéraire n'est
d'Histoire de Belgique, Louvain-la-Neuve, 26-28 août 2004, associé aux inhumations. Trois datations radiomé-
vol. 2, s.l., p. 581-591.
triques réalisées sur squelettes (F157, F139 et F160)
■■ Lambotte B. & Neuray B., 2009. Stavelot/Stavelot : ancienne indiquent une durée d'utilisation longue du champ
abbaye, vestiges du milieu du viie siècle jusqu'à 881, Chronique
funéraire, contemporaine de l'occupation du site,
de l'Archéologie wallonne, 16, p. 121-125.
probablement à partir de la charnière des 7e et 8e siècles.
■■ Legrand W., 1942. Notes sur le culte de saint Poppon, abbé de Une description générale des sépultures de Villers-
Stavelot, Chronique archéologique du Pays de Liège, 33, p. 34-48.
le-Bouillet a été effectuée par Geneviève  Yernaux et
■■ Pascaud C., 2000. Données historiques relatives à la Agnès Malevez-Schmitz à partir de leurs observations
construction de l'abbaye de Stavelot, particulièrement à la
de terrain (Henrard et al., 2010). Cet article complète
sépulture de saint Remacle. In : Léotard J.-M. (dir.), Quatrième
ces informations sur base des analyses anthropo-
journée d'archéologie en Province de Liège (Liège, 1999), Liège,
p. 149-153.
logiques en laboratoire.
■■ Pascaud C., 2013. L'abbaye de Stavelot. Volume  1. Histoire
et représentations des édifices, Namur (Études et Documents,
Matériel ostéologique et méthodologie
Archéologie, 25).
Le corpus du site de Villers-le-Bouillet est composé
■■ Stifkens J., 1981. Fouilles à l'abbatiale de Stavelot (Lg),
Archaeologia Mediaevalis, 4, p. 37. de vingt tombes individuelles dont quatorze ont fait
l'objet d'une analyse anthropologique en laboratoire.
Sources Les individus déposés dans les six autres sépultures
■■ Finoulst L.-A., 2012. Les sarcophages du haut Moyen Âge n'ont pas été prélevés en raison de leur très mauvais
en Gaule du Nord. Production, diffusion, typo-chronologie et état de conservation. Il ne s'agit pas de la totalité
interprétations, Thèse de doctorat inédite, Université libre de de la population, car l'érosion a détruit une partie
Bruxelles, Bruxelles. de la nécropole. Outre ces sépultures primaires
individuelles, deux cas particuliers, F159 et F160,
correspondent à des dépôts de réduction de corps
contenant plusieurs individus.
Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : Globalement, les squelettes sont dans un état de
étude anthropologique des individus conservation médiocre, ce qui a souvent empêché la
découverts sur le site « A Lohincou » détermination du sexe et de la stature des individus.
L'analyse de l'âge au décès des enfants est
fondée sur l'observation de la maturation dentaire
Aubrée Godefroid et Denis Henrard (Moorrees, Fanning & Hunt, 1963) ou osseuse ainsi
que sur la mesure des os longs (Scheuer & Black,
Entre 2008 et 2010, le Service de l'archéologie de la 2000). À partir de vingt ans, l'observation de l'état
Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  / Départe- de fusion de la crête iliaque (l'aile du bassin), ainsi
ment du patrimoine) a mené la fouille extensive d'une que la fusion du côté sternal de la clavicule (Owings-
occupation du Haut Moyen Âge dans le parc indus- Webb & Suchey, 1985 ; Kreitner et al., 1998), permet
triel de Villers-le-Bouillet, au lieu-dit « A Lohincou » d'affiner l'âge jusqu'à trente ans. À partir de cet âge,
(coord. Lambert  : 213980 est/141750 nord  ; parc. ces points d'ossification sont complètement soudés,
cad.  : Villers-le-Bouillet, 1re  Div., Sect.  A, no  549h). rendant délicate l'évaluation de l'âge au décès.
Toutes campagnes confondues, le décapage méca- L'analyse de la surface pré-auriculaire du coxal
nique d'une superficie de 2,65  ha a révélé quelque (c'est-à-dire la zone qui relie le coxal au sacrum)
652 faits archéologiques pour une occupation s'éche- est alors effectuée pour préciser l'âge au décès des
173

Moyen Âge Liège

F198
F165
F157
F139
(GrA-43609)
(GrA-43605)
1220 ± 30 BP
1105 ± 30 BP
692 - 887 AD (2σ)
885 - 998 AD (2σ)
Les restes osseux constituent une
F141
F142 F160 (GrA-43613) 1290 ± 30 BP 663 -775 AD (2σ) source directe d'information sur l'état
F140
de santé d'un individu ou d'une popu-
F199 lation parce qu'ils permettent de rele-
F164 ver la présence des marqueurs de stress
biologique, des pathologies osseuses
F163

F159 F136 et des indicateurs d'hygiène bucco-


F160
F137
F161 dentaire. Les marqueurs de stress
F135 observés sont les hypoplasies linéaires
F138 F109 de l'émail dentaire (des anomalies dans
la minéralisation de l'émail dentaire),
O
F139
F93
les cribra orbitalia (porosité du plafond
de l'orbite) et l'hyperostose poreuse
S

F108 1
F157 F162
(porosité de la voûte crânienne).
N
E

0 1m 2
Les pathologies osseuses identifiées
Villers-le-Bouillet : plan du groupe funéraire de « A Lohincou » identifiant les deux sont les enthésopathies (c'est-à-dire
normes d'orientations (1 et 2) et tableau des datations radiométriques réalisées des ossifications d'insertion liga-
sur squelettes (dessin et infographie F. Giraldo Martin, Serv. Archéologie, Dir. mentaires), les réactions périostées
ext. Liège 1).
(réactions de la corticale de l'os) et
l'arthrose. L'hygiène bucco-dentaire
des individus peut être appréhendée
par plusieurs indicateurs  : les lésions
carieuses, le tartre, l'usure dentaire et
la parodontopathie (déchaussement
dentaire).

Position des corps et modes


d'inhumation

Les défunts sont tous déposés sur le dos.


Sur dix sujets on observe que le membre
supérieur droit est en extension dans
cinq cas et en flexion dans cinq autres
cas. Quant au membre supérieur gauche,
il est en extension chez quatre individus
et en flexion chez deux individus. Huit
défunts ont la main droite posée sur
le bassin ou le fémur. Du côté gauche,
la position de la main n'est visible que
chez deux individus qui l'ont également
placée sur le bassin. Les membres infé-
rieurs sont généralement en extension
Tableau récapitulatif des données anthropologiques.
sauf dans un cas où ils sont fléchis. Les
tibias sont parallèles dans huit cas et dans
individus (Schmitt, 2005). un cas les genoux sont joints.
La détermination du sexe a été réalisée via l'analyse Dans neuf cas, l'inhumation a été pratiquée en espace
des os coxaux des individus matures. Deux méthodes vide. Parmi ces sujets, deux sont également déposés en
ont été employées  : la diagnose sexuelle probabiliste contenant souple. Dans un cas, le coffrage en pierre est
ou « DSP » (Murail et al., 2005) qui est une méthode en partie préservé. Des dépôts en pleine terre avec ou
morphométrique et la méthode basée sur la morpho- sans contenant souple sont attestés. La présence d'une
logie de l'os coxal (Bruzek, 2002). ou deux pierres de calage au niveau de la tête se vérifie
La stature des individus est estimée d'après la dans trois cas. Enfin, l'espace de décomposition des
méthode de Cleuvenot & Houët (1993), les mesures corps n'a pu être déterminé, faute d'indices suffisants,
réalisées sont celles de Martin (Brauër, 1988). dans trois cas.
174

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

Analyses biologiques

Parmi les quatorze individus pris en compte à « Lohin-


cou », huit sont matures et six sont immatures. Toute-
fois, toutes les catégories d'âge ne sont pas représentées
dans cet échantillon. En effet, aucun périnatal et aucun
enfant de moins de 4 ans ne se trouve dans les vestiges
conservés. Parmi les sujets immatures, deux enfants de
moins de 10 ans sont attestés. Les quatre autres sujets
sont des adolescents ou des jeunes adultes et ont entre
13 et 19  ans. Parmi les adultes, deux sujets sont des
jeunes adultes entre 20-29  ans, quatre individus sont
âgés de plus de 30  ans et un sujet a plus de 20  ans.
L'échantillon présente donc huit individus de moins
de 30 ans. Villers-le-Bouillet : vue des sépultures secondaires F160 et
F159 en cours de fouille.
Sur les quatorze tombes recensées, six appartiennent
à des individus immatures pour lesquels la détermina-
tion du sexe est délicate. Le sexe de quatre individus Il ne semble pas y avoir eu de sélection des ossements.
a pu être déterminé d'après l'analyse des os coxaux. Il En effet, les os longs sont représentés, ainsi que les arti-
s'agit de deux femmes et de deux hommes. En outre, culations labiles, les dents, les côtes, les vertèbres, les os
la sépulture secondaire F159 a révélé cinq os du bassin coxaux. Il s'agissait à l'origine d'une sépulture primaire
dont un os coxal droit attribué à une femme. individuelle dont la fosse sépulcrale anthropomorphe
L'état de santé des individus de « A Lohincou » est a été réutilisée comme espace de dépôt secondaire. En
globalement bon avec peu de pathologies observées. effet, sous l'amas d'ossements, deux fibulas matures
Peu de marqueurs de stress sont avérés à l'exception ont été découvertes en place.
des hypoplasies, généralement légères, qui apparaissent Le dépôt d'ossements F160 contient des restes de
sur cinq individus. Cela signifie que ces sujets ont crâne, de mandibule, d'ulna, d'humérus, de fémur et
subi un stress biologique pendant l'enfance, lors de la de tibia. Le nombre minimum d'individus est estimé à
croissance de la dent. Les individus de « A Lohincou » trois. Il y a au moins deux sujets matures et un individu
témoignent, lorsque les observations sont possibles, immature. Les ossements sont déposés dans une fosse
d'une hygiène bucco-dentaire généralement médiocre, qui n'est pas anthropomorphe. Un alignement des
comme l'atteste une forte présence de tartre, de lésions restes osseux est visible ce qui signifierait la présence
carieuses et d'usure. Deux individus (F137 et F139) de contraintes, peut-être de contenants en matière
sont atteints de plusieurs pathologies osseuses en lien périssable. Contrairement à F160, un choix s'est opéré
avec l'âge au décès. En effet, F137 présente de l'arthrose dans la sélection des ossements : seuls des fragments
au niveau des mains et des vertèbres thoraciques, des d'os longs et de crâne ont été prélevés.
enthésopathies au niveau des articulations et une La fosse sépulcrale de F160 recoupe la sépulture
perte des deuxièmes et troisièmes molaires inférieures F139, datée par radiocarbone entre la fin du 9e siècle
droites de son vivant. À l'instar de F137, l'individu et le 10e  siècle apr.  J.-C. La datation précoce obtenue
F139 présente des enthésopathies sur le talon ainsi que sur l'un des individus de F160, entre la seconde moitié
de la parodontopathie et de l'arthrose. Ces éléments du 7e siècle et le troisième quart du 8e siècle, indique
suggèrent qu'il s'agit d'individus plus âgés. donc la réintégration de dépouilles au sein de l'espace
funéraire plusieurs générations après leurs décès.
Cas particuliers : F159 et F160
Conclusion
Les dépôts funéraires F159 et F160 sont des sépultures
secondaires, car la décomposition des corps s'est réali- Parmi les sujets inhumés à «  Lohincou  » se trouvent
sée à un autre endroit que le dépôt. Ces deux fosses, au moins deux hommes, deux femmes et quatre sujets
situées l'une à côté de l'autre, contiennent les restes matures de sexe indéterminé. Sur les quatorze indivi-
osseux de plusieurs individus. dus étudiés, huit sont des adultes et six sont des sujets
Le dépôt F159 est un amas d'ossements où un immatures (quatre adolescents ou jeunes adultes et
nombre minimum de quatre individus sont représen- deux enfants de moins de 10 ans). Il ne semble pas y
tés, à savoir un enfant (entre 5 ½ et 10 ans) et trois indi- avoir eu une sélection des inhumés en fonction de l'âge
vidus parmi lesquels se trouve un adolescent probable. et du sexe. Toutefois, on note l'absence des jeunes indi-
175

Moyen Âge Liège

vidus de moins de 5 ans, sans bien pouvoir, dans ce cas, ■■ Bruzek  J., 2002. A Method for Visual Determination of
mesurer le poids respectif d'un recrutement exclusif Sex Using the Human Hip Bone, American Journal of Physical
ou de la conservation différentielle des ossements. Il Anthropology, 117, p. 157-168.
ne paraît pas y avoir eu de recrutement particulier des ■■ Cleuvenot E. & Houët F., 1993. Proposition de nouvelles
individus en fonction des deux normes d'orientation équations d'estimation de la stature applicables pour un sexe
des tombes. indéterminé et basée sur les échantillons de Trotter et Gleser,
Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, n.s.,
De manière générale, les défunts reposent sur le dos,
5, p. 245-255.
les mains posées sur le bassin et les membres inférieurs
en extension. Dans seulement un cas, les membres ■■ Henrard  D., 2012. Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet  :
occupation antique et du Haut Moyen Âge «  A Lohincou  »,
inférieurs sont fléchis.
Chronique de l'Archéologie wallonne, 19, p. 175-179.
Il existe différents modes d'inhumation : inhumation
■■ Henrard D., de Longueville S. & Hanut F., 2014. Villers-
en espace vide (neuf individus) dont deux corps dépo-
le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : première approche de la pério-
sés dans un contenant souple, inhumation en pleine
disation de l'occupation du Haut Moyen Âge « A Lohincou »,
terre dans deux cas dont un avec un contenant souple. Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, p. 185-191.
Pour trois sujets, l'espace de décomposition des corps
■■ Henrard  D., Marchal  J.-P., Yernaux  G. &
est indéterminé. Il ne semble pas y avoir eu non plus Malevez-Schmitz A., 2010. Villers-le-Bouillet/Fize-Fontaine :
de sélection des inhumés selon le type de contenant. l'occupation du Haut Moyen Âge de « Lohincou ». Deuxième
Les deux zones de réductions sont particulièrement campagne de fouilles, Chronique de l'Archéologie wallonne, 17,
intéressantes parce qu'elles attestent d'une gestion p. 118-122.
particulière des personnes décédées depuis longtemps. ■■ Kreitner  K.F., Scheden  L., Riepert  T., Nafe  B. &
En outre, ces deux fosses sont très différentes l'une de Thelen M., 1998. Bone age determination based on the study
l'autre. En effet, l'une témoigne peut-être du respect de of the medial extremity of the clavicle, European Radiology, 8,
l'intégrité individuelle des défunts, avec une sélection p. 1116-1122.
des ossements et un rangement de ces restes, tandis que ■■ Moorrees  C.F.A., Fanning  E.A. & Hunt  E.E., 1963. Age
l'autre apparaît plus désorganisée, toutes les parties du variation of formation stages for ten permanent teeth, Journal
corps étant présentes sans sélection des ossements qui of Dental Research, 42 (6), p. 1490-1502.
ne sont pas rangés. ■■ Murail P., Bruzek J., Houët F. & Cunha E., 2005. DSP: A
Les individus présentent un état de santé globale- Tool for probabilistic sex diagnosis using worldwide variability
ment bon, à l'exception de l'hygiène bucco-dentaire in hip-bone measurements, Bulletins et Mémoires de la Société
et des hypoplasies linéaires de l'émail dentaire. Seuls d'Anthropologie de Paris, 17 (3-4), p. 167-176.
deux individus sont atteints de pathologies plus ■■ Owings-Webb P.A. & Suchey J.M., 1985. Epiphyseal Union
remarquables. D'autres sujets présentent des lésions of the Anterior Iliac Crest and Medial Clavicle in a Modern
pathologiques âge-dépendantes signifiant qu'il s'agit Multiracial Sample of American Males and Females, American
Journal of Physical Anthropology, 68, p. 457-466.
de sujets plus âgés.
Enfin, le site de « A Lohincou » est le témoin d'une ■■ Pecqueur  L., 2003. Des morts chez les vivants  : les
inhumations dans les habitats ruraux du Haut Moyen Âge en
utilisation de longue durée d'un espace funéraire en
Île-de-France, Archéologie médiévale, 33, p. 1-31.
lien avec l'habitat ainsi que de la volonté de regroupe-
ment de défunts (tombes superposées non simultanées ■■ Peytremann É., 2003. Archéologie de l'habitat rural dans le
nord de la France du ive au xiie siècle, Saint-Germain-en-Laye
et zones de réduction). Il renseigne sur le traitement et
(Mémoires de l'Association française d'Archéologie mérovin-
la gestion des restes funéraire des personnes décédées,
gienne, 13).
dont certaines depuis plusieurs générations. Les inhu-
■■ Scheuer L. & Black S., 2000. Developmental juvenile osteo-
mations en habitat du Haut Moyen Âge constituent un
logy, USA, Academic Press.
phénomène de mieux en mieux reconnu, qui s'impose
■■ Schmitt  A., 2005. Une nouvelle méthode pour estimer
comme une catégorie à part entière des pratiques funé-
l'âge au décès des adultes à partir de la surface sacro-pelvienne
raires de cette époque (Peytremann, 2003, p. 303-310 ; iliaque, Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de
Pecqueur, 2003). Elles illustrent le rapprochement du Paris, 17, p. 1-2.
pôle funéraire vers l'habitat, mais en dehors d'un enca-
drement paroissial exclusif.

Bibliographie
■■ Bräuer  G., 1988. Osteometrie. In : Knußmann  R. (éd.),
Anthropologie. Handbuch der verleichenden Biologie des
Menschen, Band I, Stuttgart, p. 132-160.
176

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

TEMPS MODERNES
Clavier/Terwagne : découverte d'un four
à chaux artisanal

Gianni Gava, Robert Désert, André Jaminon, male de 4,08 m. Ces trois éléments offrent des murs
Jean-Claude Marchal, Raymond Polis, parementés et sont disposés suivant un axe principal
Michel Eubelen, André Martin, orienté sud-ouest/nord-est (60° par rapport au nord
Noureddine Assojaa et Jacques Witvrouw magnétique).
Le four proprement dit est conservé sur une hauteur
En mars 2015, M.  J.  Smidt, agriculteur à Seny, de 1,3 m. Sa chambre de chauffe (2) est de plan ovalaire,
décide de mettre en culture une parcelle boisée son grand axe correspondant à celui de l'ensemble de
(parc. cad. : Clavier, 6e  Div., Sect.  C, no  59B ; coord. l'installation. En élévation ses parois sont évasées,
Lambert : 220253 est/ 126901 nord) dont il est proprié- formant un entonnoir dont le diamètre passe de 0,8 ×
taire. Cette parcelle prend place dans l'angle sud-est 1,04 m au niveau de la sole à 1,10 × 1,25 m à la limite
formé par le croisement de la RN63 et de la rue du Tige supérieure de la maçonnerie conservée. Le parement
de Fraiture. interne (chemise), dégradé par endroits, est consti-
Ces travaux attirèrent notre attention en raison tué de blocs de grès liés au mortier de chaux. Avec le
de leur contexte. Le tracé actuel de la rue du Tige de blocage (3) qui s'appuie directement sur le substrat
Fraiture reprend en effet celui d'un Grand Chemin calcaire, la maçonnerie atteint une épaisseur de 0,8 m.
(royal) de Marche à Liège mentionné sur la carte de Du côté interne, le mortier est rubéfié sur une épais-
Ferraris (1771-1778).  En outre, la parcelle concernée seur de 20 à 30 cm. Le fond de la chambre de chauffe
est située à 300 m au nord du site du « Rôpa », centre est plat, formé de grosses dalles de grès dont la surface
médiéval (comprenant la tour de Terwagne, la chapelle supérieure semble avoir été lissée par des raclages répé-
Saint-Jean Rappart et le cimetière), où des fouilles tés (sans doute liés aux opérations de défournement).
ont été pratiquées il y a quelques années par le Cercle Lors de sa découverte, la cuve du foyer était entière-
historique et culturel de Terwagne (Polis & Witvrouw, ment comblée de pierres, provenant de l'élévation du
1999). four, et de déchets de mortier rubéfié.
Lors de notre première visite sur les lieux, le dessou- Au niveau de la sole, de part et d'autre de la base
chage était terminé et le sol déjà nivelé à la pelle méca- du four, deux ouvertures (ouvreaux ou alandiers) y
nique. Une construction hors sol y avait manifeste- donnent accès à partir des deux couloirs de défour-
ment été rasée : des débris de maçonnerie jonchaient nement. D'une largeur de 0,67 m, leur hauteur maxi-
la surface du terrain autour d'une zone de matériaux male est limitée à 0,4 m. Trois blocs de grès équarris
rubéfiés. Ces vestiges sont implantés sur le rebord encadrent les deux orifices, la face inférieure des
ouest du Tige de Fraiture, en pente vers le vallon du linteaux étant légèrement cintrée.
Ru de Bonne, en un lieu où la roche calcaire est affleu- Le couloir d'accès sud-ouest (4) est formé de deux
rante. murs de soutènement divergents. Ses matériaux sont
Le Cercle archéologique Hesbaye-Condroz prit liés au mortier de chaux sur une épaisseur moyenne de
contact avec la Direction de l'archéologie (DGO4  / 40 cm (au sud) à 60 cm (au nord). Conservés sur une
Département du patrimoine) en vue d'organiser hauteur de 1,10 m, leurs parements sont formés de moel-
une intervention avant la destruction complète du lons de calcaire sommairement équarris mais disposés
site, envisagée par le propriétaire. Une autorisation en assises horizontales sur une longueur de 2 m. Du côté
lui fut accordée pour entreprendre un relevé des de la chambre de chauffe, les parements se rejoignent en
vestiges encore conservés sous la supervision arc de cercle. À ce niveau, l'ancrage des moellons dans les
d'Olivier Vrielynck (Direction de l'archéologie). maçonneries latérales implique l'existence d'une struc-
Ces vestiges se sont rapidement révélés être les ture voûtée, non conservée, destinée à asseoir la partie
fondations d'un four à chaux implanté à flanc de du four en élévation au-dessus de l'embrasure d'enfour-
colline, dans le banc de calcaire affleurant (1), en nement. Au point de contact avec le four, l'écart entre
profitant sans doute d'un creux naturel. L'instal- les parements du couloir d'accès est de 1 m, alors qu'à
lation comprend deux couloirs d'accès (4 et 6) qui l'ouverture vers le vallon il atteint 1,8 m. À son extrémité,
encadrent la chambre de chauffe du four (2). L'en- le mur nord présente en outre un retour à angle droit
semble mesure 5,6 m de long pour une largeur maxi- (5 ; longueur : 1,9 m) avec chaînage d'angle, permettant
177

Temps modernes Liège

rapidement, à environ 1 m de l'ouverture


de l'alandier. Au-delà, la roche calcaire a
été sommairement taillée en délimitant
une simple cuvette, sans véritable rampe
d'accès. L'embrasure qui, comme dans le
couloir d'accès nord-ouest, devait néces-
sairement être voûtée, ne laissait que bien
peu de place pour le service. Il semble
s'agir ici d'un accès secondaire, creusé
dans la pente naturelle et dont la fonction
principale pouvait être celle d'une prise
d'air destinée à améliorer le tirage et la
combustion du contenu du four.
Sur le plan stratigraphique, une couche
de chaux dont l'épaisseur n'excède pas
5  cm recouvrait la surface des dallages
ainsi que le substrat rocheux de la
rampe d'accès nord-ouest. Ce niveau
était surmonté d'une épaisse couche
d'éboulis de maçonnerie (épaisseur  :
environ 60  cm), elle-même recouverte
par une couche de terre noire cendreuse
(épaisseur : environ 30 cm).
Les structures découvertes ont
fait l'objet d'un relevé complet par
scanner  3D (C), grâce à l'intervention
de Jean-Noël  Anslijn (Direction de
l'archéologie).
Le matériel archéologique retrouvé,
très limité et peu typique, ne permet
Terwagne, four à chaux. A. Plan : 1. Substrat calcaire ; 2. Chambre de chauffe ; pas de datation précise. Néanmoins tout
3. Blocage des maçonneries ; 4. Couloir d'accès sud-ouest ; 5. Retour à angle porte à croire que ce four date d'une
droit ; 6. Couloir d'accès nord-est ; B. Relevé des maçonneries sud ; C. Profil époque assez récente (18e ou 19e siècle).
transversal relevé au scanner 3D (J.-N. Anslijn, Dir. archéologie).
La carte de Ferraris (1771-1778) et
surtout la carte de Vander Maelen (1846-
de refermer la cavité creusée dans le substrat. Le sol du 1854) mentionnent de nombreux fours à chaux dans
couloir, situé au même niveau que la sole du four, est les campagnes environnantes. Le four décrit ici n'est
formé de dalles de calcaire posées à plat. Elles occupent cependant mentionné sur aucun document ancien.
toute la largeur du couloir mais s'interrompent à 1,7 m Le four à chaux de Terwagne est un four simple, à
de l'alandier. Au-delà, le sol de circulation, qui est en calcination périodique et à flamme longue (combus-
léger pendage vers le four, n'est plus formé que par le tible ligneux) selon la classification proposée par
substrat rocheux égalisé sur une longueur de 2,5  m. Adam & Varène (1982). La chaux produite dans ce type
Il rejoint alors la pente naturelle qui redescend vers le d'installation, éloignée des lieux habités, était très vrai-
vallon. Ce couloir sud-ouest, orienté vers le secteur des semblablement utilisée autant pour amender les terres
vents dominants, constitue le seul véritable accès au four, de culture que pour être intégrée dans les mortiers
permettant à la fois d'en alimenter le foyer en combus- d'édifices en construction. Dans nos régions, l'activité
tible et d'en évacuer la production vers le vallon. artisanale des chaufourniers est toutefois assez mal
Du côté opposé, le couloir d'accès nord-est (6) offre connue et le fonctionnement technique précis des fours
des structures maçonnées symétriques, de dimensions à chaux l'est tout autant : pour les périodes médiévale
comparables en plan et en élévation. Seuls les retours et moderne, très peu d'études archéologiques leur ont
d'angles sont un peu différents : ils sont ici présents bila- été consacrées.
téralement, mais sur une plus courte longueur (1 m au Une présentation plus exhaustive de ce four à chaux
nord et 0,5 m au sud). Le dallage qui prolonge de ce côté est prévue dans un prochain Bulletin du Cercle archéo-
la sole du foyer est plus irrégulier et s'interrompt assez logique Hesbaye-Condroz.
178

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Bibliographie dans les habitats, où ils peuvent remplir des fonctions


■■ Adam J.-P. & Varène P., 1982. Fours à chaux artisanaux dans variées (cuisson des aliments, séchage, etc.). Certains
le bassin méditerranéen. In  : Histoire des techniques et sources ont été mis au jour dans des forges, mais leur rôle dans
documentaires. Méthodes d'approche et expérimentation en la chaîne opératoire de la post-réduction du fer n'est
région méditerranéenne. Actes du colloque du G.I.S., Aix-en- pas encore établi de façon précise. La cémentation est
Provence, 21-23  octobre 1982, Aix-en-Provence (Université l'une des hypothèses avancées, notamment par l'étude
d'Aix-en-Provence, Cahier du G.I.S., 7), p. 87-100. menée sur l'atelier découvert sur le site de la cité judi-
■■ Polis N. & Witvrouw J., 1996-1999. Rapport sur la caire à Bordeaux (Fabre & Coustures, 2005, p.  314).
campagne de nettoyage du site du Rôpa à Terwagne, Bulletin du Dans le cas présent, les données recueillies demeurent
Cercle archéologique Hesbaye-Condroz, XII, p. 123-126.
insuffisantes pour préciser la chronologie, le cadre dans
lequel il a été aménagé et par conséquent sa fonction.
Sources Ces deux structures disparaissent ensuite sous un
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de remblai argilo-limoneux de teinte jaune, épais d'au
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Marchin, pl. 1544. moins 0,30 m, dont une fine strate constituée de déchets
■■ Carte topographique de la Belgique dressée sous la direction de rubéfiés, de nodules de mortier jaune et de charbon de
P. Vander Maelen, 1846-1854, Pailhe, pl. 1415. bois souligne l'accumulation en deux couches succes-
sives. Ce nivellement marque le début de la phase  II
d'occupation et l'aménagement, vraisemblablement au
17e siècle, d'un bâtiment dont seul un mur a été dégagé.
Juprelle/Juprelle : installations de chauffe Cette maçonnerie correspond peut-être au mur gout-
à la ferme de l'Abbaye tereau occidental de l'aile méridionale de la ferme,
reprise sur la carte de Ferraris (1771-1778). Deux
fourneaux en briques disposés en batterie et ouverts à
Catherine Coquelet l'est sont élevés contre ce mur. Du fourneau 1, presque
totalement détruit, ne subsiste qu'une fosse de travail
Entre le 22 et le 28 juillet 2015, le Service de l'archéo- au profil évasé et aux parois rubéfiées. Deux piédroits
logie de la Direction extérieure de Liège 1 (DGO4 / montés à l'aide de briques liées au mortier jaune s'ap-
Département du patrimoine) a procédé à une petite puient sur les parois inclinées de la fosse de travail et
fouille dans la ferme de l'Abbaye située rue de l'Église marquent l'entrée de la chambre de chauffe à l'est, large
(parc. cad. : Juprelle, 1re Div., Sect. A, no 414e). Cette de 0,30  m. Le fourneau  2 comporte également une
ferme, dont l'existence est attestée dès le début du fosse de travail au profil en entonnoir ouvrant vers l'est
14e siècle, figure parmi les plus anciennes possessions comme le fourneau 1. La chambre de chauffe, dont le
de l'hospice de Cornillon établi au pied du mont
Cornillon à Liège (Dumont, 2012, notice 574). L'in-
tervention fait suite à la découverte fortuite de struc-
tures archéologiques au cours des travaux de réno-
vation intérieure menés dans le fournil de la ferme
par une association de bénévoles. Cette annexe, voisi-
nant un puits dont la construction n'est pas datée, a
été reconvertie en forge avant d'être abandonnée
définitivement.
Les vestiges archéologiques antérieurs à la
construction du fournil, qui figure sur la carte de
P. Vander Maelen (1846-1854), se répartissent en quatre
phases d'occupation. La plus ancienne (I) a laissé sur
le sol en place deux structures isolées et non datées :
un foyer et une fosse. Le foyer se présente comme un
creusement rectangulaire à fond plat, orienté nord/
sud, mesurant 1,73 m de long et 0,42 m de large. Ses
parois sont rubéfiées et conservent une teinte rouge
cerise, de même que le fond, induré sous l'action de
la chaleur. Dans la partie sud, une fine couche de rési-
dus de charbon de bois se concentre en surface. Les Juprelle : localisation cadastrale des bâtiments de la ferme de
l'Abbaye (infographie D. Mattiuz, FCJW. Source : CadGIS).
foyers de ce type se rencontrent dès la période romaine
179

Temps modernes Liège

Sol fragments de briques surcuites, des


nodules d'argile rubéfiée et de charbon
de bois, auxquels se trouvent mêlés des
fragments de mortier jaune et blanc. Ce
Four à pain remblai témoigne des transformations
apportées aux installations originelles
lors de la phase  III. Le mur occidental
du bâtiment abritant la batterie de foyers
est en effet partiellement détruit par la
construction d'un nouveau fourneau  3,
récupérant la chambre de chauffe de l'an-
cien fourneau 1. Un sol en briques et en
Fourneau 2
blocs de pierre calcaire fondé sur un lit
Fourneau 4
de mortier jaune à nodules de chaux de
0,03 m d'épaisseur est aménagé au sud. À
l'issue de ces travaux, le fourneau 3 forme
Fourneau 3
peut-être avec le fourneau 2 un nouveau
couple, car ce dernier, non remanié, a pu
Fourneau 1
être éventuellement maintenu en activité.
Édifié également en briques, le
Foyer
fourneau  3 se distingue cependant par
la forme rectangulaire de sa chambre de
Préparation
de sol chauffe, dont l'entrée se situe à l'ouest.
L'ancienne fosse de travail du fourneau 1
est comblée et l'entrée bouchée ensuite
par une maçonnerie. Les parois et le fond
Fosse
Sol de la chambre de chauffe présentent un
aspect pulvérulent et sont uniformément
noircis sous l'action d'un feu intense.
La sole, dont un lambeau subsiste sur
le piédroit sud, est formée de briques
Phase I
posées de champ. Celles-ci semblent
Phase II
avoir partiellement recuit et leur surface
Puits
Phase III grisée conserve une empreinte courbe,
0 1m
Phase IV suggérant que le fourneau  3 a servi,
comme le fourneau  2, à chauffer une
Plan général des structures modernes mises au jour dans le fournil de la ferme de cuve de 1,30 m de diamètre environ.
l'Abbaye (infographie D. Mattiuz, FCJW).
Toutes ces structures sont ensuite
arasées au cours de la phase IV, au profit
sol n'a pas été aménagé, est intégralement préservée et de la construction d'un quatrième fourneau en briques
présente un plan en forme de goutte. Elle est englobée à l'ouest, entraînant la condamnation de la bouche du
dans un massif maçonné de forme arrondie, élevé en fourneau 3 à l'aide de blocs de pierre calcaire, de blocs
briques liées au mortier jaune. Se dessine au sommet de tuffeau et de briques liées au mortier jaune. Orienté
l'amorce de la sole, constituée probablement d'une cette fois nord/sud, le fourneau 4 possède une fosse de
voûte surbaissée, comme le suggèrent quelques rangées travail rectangulaire en briques, une chambre de chauffe
de briques disposées en encorbellement au-dessus des rectangulaire également et pourvue d'un sol en briques.
piédroits de la chambre de chauffe. La sole est établie Le parement courbe des murs de la chambre de chauffe
à hauteur du niveau de circulation en terre autour suggère de nouveau la présence d'une cuve reposant sur
des fourneaux et présente en périphérie supérieure l'extrados de la voûte supportant la sole. Sa surface était
un ressaut de briques délimitant un espace circulaire, par ailleurs recouverte de scories issues du travail du fer.
suggérant qu'elle supportait une cuve cylindrique de Enfin, un sondage pratiqué au droit de la façade nord
1,15 m de diamètre environ. du fournil a révélé la présence d'un sol aménagé à l'aide
Aux abords de ces installations s'étend une couche de blocs et de moellons de pierre calcaire, probablement
stratifiée, composée de rejets rubéfiés tels des contemporain de ce dernier fourneau.
180

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

■■ Diderot D. & d'Alembert J., 1763. Recueil de planches, sur


les sciences, les arts libéraux, et les arts méchaniques, avec leur
explication. Seconde livraison. Première partie, Paris.
■■ Dumont B., 2012. Guide des fonds et collections des Archives
de l'État à Liège, Bruxelles, Archives générales du Royaume
(Guides, 79).
■■ Fabre J.-M. & Coustures M.-P., 2005. La recherche sur la
sidérurgie antique en France. Chronique bibliographique 1985-
2004, Pallas, 67, p. 293-325.
■■ Hankart R., 1968. Les biens de l'hospice de Cornillon du
xiie siècle à la fin de l'ancien Régime, Bulletin de l'Institut archéo-
logique liégeois, LXXXI, p. 1-71.
■■ Van de Venne A., 2008. Poken en stoken, brouwen en koken:
Les fourneaux en briques découverts au cours des travaux archeologie en geschiedenis van 100 ambachtelijke ovens, Amster-
de rénovation menés dans le fournil de la ferme de l'Abbaye dam (Archeologische Werkgemeenschap voor Nederland, 4).
(cliché D. Mattiuz, FCJW).

L'agencement des structures des points de vue Sources


spatial et technique suggère la pérennisation probable ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
d'une même activité. De tels fourneaux, construits Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Tongres, pl. 169.
partiellement en fosse, se retrouvent notamment dans ■■ Carte topographique de la Belgique dressée sous la direction de
les brasseries médiévales et modernes, comme celle P. Vander Maelen, 1846-1854, Glons, 144.
du couvent des Capucins à Liège (Bauwens & Coura,
2002). Ils se rattacheraient à la série de foyers classés
parmi les types  4 et 6 définis par A.  Van  de  Venne
(2008, p. 82-84, fig. 40). Ceux-ci se caractérisent par Stoumont/La Gleize : étude archéologique
une chambre de chauffe rectangulaire au sein d'un de la ferme « Li vi gbomont » à Exbomont
massif de maçonnerie de forme variable et sont pour-
vus d'une fosse de travail. Ces  fourneaux jouent un
rôle central dans la chaîne opératoire de la production Nancy Verstraelen
de la bière, pour l'étape du brassage du malt. Ils font
partie d'une plus vaste infrastructure intégrant notam- La commune de La  Gleize compte une dizaine de
ment des fours à malter, une cuve matière, etc. Ils ne hameaux implantés sur le versant sud de la vallée du
fonctionnent donc pas de façon isolée et doivent s'ap- Roannay  ; parmi eux, Exbomont se situe sur le haut
puyer par ailleurs sur la proximité d'un point d'eau, tel du versant. L'accès à l'unique rue où se succèdent les
un puits (Diderot & d'Alembert, 1763). habitations familiales anciennes et récentes s'effectue
Le recensement des biens de l'hospice de Cornillon au départ d'une route rectiligne récente. Le parcellaire
nous apprend que cette institution disposait de bâtiments a néanmoins gardé les traces de l'ancienne voie pentue
parmi lesquels sont citées en 1345 la «  moitié d'une permettant d'atteindre initialement le hameau.
maison jadis brasserie au pont d'Amercœur » et en 1395 et Si le village de La  Gleize semble exister dès le
1396 deux autres « maisons et brasserie » (Hankart, 1968, 12e siècle, en tant que dépendance de l'abbaye et de la
p. 24). Parmi les compétences mentionnées à propos du principauté de Stavelot, les constructions rurales en
receveur de Cornillon, il est fait mention également en pan-de-bois de ce hameau ne semblent pas remonter
1542 de l'approvisionnement d'une brasserie en houille au-delà du 18e siècle (Closon-Remy, 1985). Il apparaît
(Hankart, 1968, p. 29 et 41) et parmi les possessions néanmoins que le toponyme d'Exbomont est probable-
de l'hospice, d'une houblonnière aux 16e et 17e  siècles ment plus ancien.
(Hankart, 1968, p. 28). Aucune des informations conser- La carte levée à la fin du 18e  siècle à l'initiative
vées ne peut être cependant explicitement rattachée aux du comte de Ferraris révèle l'existence d'au moins
installations découvertes dans la ferme de l'Abbaye. quatre exploitations. Le village est alors orthographié
«  Hecbeaumont  ». Classée par arrêté royal en 1992,
Bibliographie l'ancienne ferme en pan-de-bois «  Li vi gbomont  » a
■■ Bauwens C. & Coura G., 2002. Liège/Liège : étude archéo- fait l'objet d'une intervention du Service de l'archéo-
logique préalable à la restauration de l'ancienne brasserie du logie de la Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  /
couvent des Capucins, Chronique de l'Archéologie wallonne, 10, Département du patrimoine). Cette étude archéolo-
p. 137-139. gique du bâti s'inscrit dans le cadre d'une procédure
181

Temps modernes Liège

La Gleize, « Li vi gbomont » : vue générale de la façade avant


et restitution hypothétique de l'auvent. Vue générale du pignon sud-ouest.

de certificat de patrimoine préalable à la restauration chronologie, la date plus précisément proposée est
globale. L'état de conservation précaire du bâtiment de 1749. De même, les portes intérieures sont dans
nécessite de lourdes interventions pour en assurer la leur ensemble authentiques, excepté celles donnant
stabilité et la mise hors eau. Des aménagements récents vers l'étable ainsi que la porte extérieure du logis. Ce
dont notamment le remplacement des hourdis initiale- dernier se compose de trois pièces en enfilade : la pièce
ment en torchis par de la brique ou des blocs de béton de devant (vestige ancestral de l'auvent primitif pétri-
alourdissent considérablement les charges supportées fié) et le couloir d'accès à la cuisine, la cuisine et la belle
par les pièces de bois dont certaines, vermoulues et pièce faisant également office de chambre à coucher.
déformées, sont fortement fragilisées. L'accès à la cave s'effectue au départ de la cuisine sous
Des infiltrations d'eau récentes et l'exposition des l'escalier menant à l'étage. En pierre, il permet l'accès
parements aux intempéries causent des dommages à cet espace souterrain couvert d'une voûte en berceau
complémentaires aux boiseries et clayonnages origi- maçonnée en grès. L'étage est accessible par un escalier
naux. L'état de délabrement actuel de certaines pièces à vis en bois cloisonné et fermé en partie basse d'une
de bois nécessite d'importantes interventions (greffes porte. Deux pièces y sont initialement aménagées ainsi
ou remplacements) qui feront disparaître des informa- que des combles, plateforme entièrement ouverte et
tions capitales relatives à la disposition et à l'organisa- accessible au départ d'une probable échelle de meunier.
tion originelles de cet édifice rural. La persistance de Ce bâtiment n'est ni approfondi ni élargi, il conserve
nombreuses marques d'assemblage nécessite un relevé ses dimensions et son organisation interne initiales
précis. De même, des mortaises et chevilles surnumé- ainsi que ses parois originales en pan-de-bois.
raires témoignent de démontages et/ou réemplois qui Certaines pièces, probablement fortement détériorées,
doivent impérativement faire l'objet d'un enregistre- ont néanmoins été remplacées tandis qu'une partie des
ment scientifique. L'objectif de cette étude est de défi- hourdis ont été pétrifiés à l'aide de briques ou de blocs
nir l'état du bâtiment dans sa forme primitive tout en de béton. Le soubassement se compose d'un solin de
précisant les divers aménagements opérés au cours des pierre de grès de faible hauteur originellement maçon-
siècles suivant sa construction. né à l'argile pour isoler les pièces de bois de l'humidité
L'implantation de la ferme en pan-de-bois en long, ascensionnelle. Certaines portions ont été largement
perpendiculairement sur le versant sud du Roannay, reprises en sous-œuvre tandis que les sablières ou
est parfaitement traditionnelle. Le pignon du logis soles posées directement sur ce soubassement ont été
regarde le sud-est tandis que le pignon nord-ouest et partiellement ou totalement remplacées.
la façade arrière sont battus par les vents dominants. Les pignons, refends et gouttereaux sont conçus
La morphologie est commune pour la région : il s'agit comme une suite de poteaux montant de fond  repo-
d'une maison-bloc ardennaise à trois parçons succes- sant sur une sablière basse, supportant les pannes, et
sifs : le logis, l'étable et la grange (Genicot et al., 1996, dont l'écartement est assuré par des entretoises et des
p. 45). liens. De nombreuses pièces de bois ont conservé leur
Le linteau de la porte d'accès au logis principal marque d'assemblage et de pose réalisées au ciseau.
porte un millésime « anno 1750 ». Une datation par Ces dernières, indispensables, permettent de replacer
la dendrochronologie a néanmoins été commandée précisément chaque pièce dans le pan-de-bois lors
à l'Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA). du montage. Lorsqu'elles sont absentes, le système de
Les résultats de ces investigations confirment cette comptage mis en place permet dans certains cas de
182

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

parement à l'origine aveugle : l'une pour


Pièce de bois originale

Baie originale

Torchis la pièce de devant et l'autre pour l'étable.


Une porte de service est initialement
Moellons

Pièce de bois restituée (phase 1)

Baie (phase 2) prévue à l'arrière du deuxième parçon.


0
Chaume
1m
Le pignon du logis est ajouré de diffé-
rentes ouvertures originales, certaines
modifiées et d'autres ajoutées qui aident
à l'éclairage des différentes pièces à
?

vivre du rez-de-chaussée et des deux


?

autres niveaux. Deux baies jumelées


disposées de part et d'autre d'un poteau
arT
II eév

éclairent les deux pièces principales du


rez-de-chaussée. Si les ouvertures de la
cuisine respectent leurs dimensions et
Proposition de restitution de l'état original du bâtiment, façade avant et pignon
leur implantation initiales, ce n'est pas
sud-ouest (infographie N.  Verstraelen, L.  Bruzzese et J.-F.  Lemaire, Serv. le cas de la chambre dont les fenêtres
archéologie, Dir. ext. Liège 1). sont surélevées et agrandies. Ces inter-
Pièce de bois originale
ventions n'ont malheureusement pu
Baie originale être datées précisément. Avant le dépla-
cement et l'agrandissement des baies
Chaume

Torchis
Moellons
de la chambre, une feuillure confirme
Pièce de bois restituée (phase 1)

0 1m
qu'une ouverture complémentaire avait
été aménagée sur base du niveau primi-
tif, dans le dernier panneau, le long de
l'entretoise. Trois ouvertures éclairaient
alors cette pièce. La baie de la pièce de
?

? devant, si elle fut primitivement prévue,


est actuellement déplacée. Elle se situait
entre l'entretoise et le poteau, lui-même
légèrement décalé. Les vestiges des
mortaises et chevilles permettent de
replacer celui-ci fidèlement. Les deux
Proposition de restitution de l'état original du bâtiment, façade arrière et baies de l'étage ont toutes deux été diffé-
pignon nord-est (infographie N. Verstraelen, L. Bruzzese et J.-F. Lemaire, Serv. remment agrandies du côté opposé au
archéologie, Dir. ext. Liège 1).
poteau. Les traces d'encastrement des
tenons, les mortaises et les chevilles
les restituer. Ce système utilise les chiffres romains permettent facilement d'en restituer l'état original.
contractés et comporte des marques de latéralisa- L'ouïe des combles ne fait pas partie du programme
tion ou de localisation. Chaque ferme porte un signe architectural initial.
distinctif du sud au nord. Les poteaux montant de Le pignon de la grange est très peu modifié dans sa
fond sont numérotés en partie basse à l'aide de chiffres structure et les pièces de bois originales démontées
romains allant de I à IIII du sud au nord. Ensuite, au peuvent facilement être restituées. Exposé aux vents
sein de chaque ferme, chaque pièce de bois porte une dominants, il devait probablement être bardé. Une
marque de latéralisation systématiquement répétée à haie d'arbres est plantée le long de cette structure afin
la jonction des poteaux verticaux. Un signe distinctif d'en assurer complémentairement la protection.
permet de différencier les pièces de bois du parçon Le gouttereau nord est partiellement remanié, les
domestique et les deux autres, et ce tant pour la façade pièces de bois du deuxième parçon ont entièrement
avant que pour la façade arrière. Les marques de pose été remplacées en 2005-2006  ; fort heureusement,
sont situées sur les faces sud des deux premières travées les photos prises lors du démontage permettent
et sur les faces nord des deux dernières. d'en observer l'organisation originelle complémen-
La façade avant est percée d'autant d'accès qu'il y a tairement aux relevés archéologiques. Une suite de
de parçons : une porte jumelée pour le logis et l'étable panneaux rectangulaires aveugles ferme l'arrière du
ainsi qu'une grande porte de grange à linteau droit. bâtiment, tandis qu'une porte est initialement prévue
Deux fenêtres postérieures percent actuellement ce au niveau de l'espace destiné au bétail. On observe
183

Temps modernes Liège

un léger décalage entre la première travée correspon- aménagé en façade avant, du moins en partie. Les
dant au logis et les deux dernières. La présence de vestiges des aisseliers supportant un débordement
cette porte est atypique dans le corpus des bâtiments de toit sont parfaitement décelables sur le gouttereau
préservés dans la région, elle correspond généralement sud. Un espace de travail ou de remisage couvert et
à un aménagement ultérieur. Son intégration dans le à l'abri des intempéries est ainsi prévu dès l'origine
programme architectural initial résulte plus du bon pour pallier au moins partiellement à la pétrification
sens finalement que de l'originalité. de l'auvent primitif. Cette solution est envisagée pour
La volumétrie générale de cet édifice rural s'appa- de nombreuses fermes de la région de Stoumont et de
rente à un parallélépipède rectangle couvert d'un La Gleize.
toit pentu asymétrique qui associe plusieurs niveaux L'organisation spatiale de cette ferme ardennaise
d'occupation pour le logis. Il s'agit d'une propriété se situe donc dans la phase finale de l'évolution du
rurale modeste à trois parçons, le logis compte au programme architectural primitif des édifices ruraux
rez-de-chaussée trois pièces en enfilade et deux à deux parçons plus auvent. L'intégration de l'espace
pièces à l'étage en sus du grenier. Le faîte du toit est initialement dévolu aux activités extérieures offre de
axé sur la cheminée et l'agrandissement de l'espace nombreux avantages en termes de surface d'occu-
domestique s'effectue vers l'avant, et non vers l'arrière pation. Le relèvement des façades nécessaire à cette
comme c'est généralement le cas, sauf précisément assimilation et la typologie du mode de couverture
dans la région de Stoumont où la première solution en usage dans la région rendent également possible
est souvent préférée. l'aménagement des combles dont l'accès par un esca-
Le déséquilibre observé dans les pignons résulte lier de bois est initialement prévu. L'auvent est englobé
de l'absorption de l'auvent primitif commun à la dans l'enclave domestique comme une extension de la
plupart des édifices ruraux, qui comptent à l'origine cuisine, tandis que les superficies dévolues au bétail et
deux pièces en enfilade pour le logis. C'est la récupé- au stockage se voient pareillement étendues. Mais dans
ration de cet espace initialement ouvert en véritable cette région, la perte de l'auvent primitif est compensée
pièce d'habitation qui génère un léger rehaussement par une alternative intéressante qui consiste à prolon-
des façades et un décalage vers l'arrière des pièces ger la toiture vers l'avant. Le débordement court le long
principales. Cette évolution entraîne une asymétrie d'une partie ou de la totalité de la façade. Cette option
du volume global de l'édifice qui paraît dès lors plus qui se rencontre essentiellement dans la région du
massif et trapu que les formes bâties primitives (deux Roannay n'est rendue possible que consécutivement
pièces en enfilade sans auvent). La toiture se compose au rehaussement de la façade avant. Cet aménagement
d'une bâtière à deux longs versants asymétriques dont participe également à la protection des parements
l'inclinaison est proche de 40°. Cette dernière suggère extérieurs.
une toiture originale de chaume remplacée en partie De nombreux éléments confirment les réminiscences
par des tuiles et des ardoises artificielles (Eternit). d'un programme architectural primitif et ancien du
L'inclinaison de ces toitures végétales, indispensable et logis à deux pièces plus auvent dont on trouve dans
relativement importante pour en assurer l'étanchéité, cette ferme du 18e siècle une version adaptée et abou-
dégage un espace suffisant pour permettre l'aménage- tie. L'évolution s'effectue dans le sens d'une rentabi-
ment et l'occupation d'un deuxième niveau au-dessus lisation maximale des espaces disponibles en surface
du logis accessible par un escalier de type hélicoïdal mais aussi en hauteur tout en conservant les traditions
encagé. anciennes de cette région rurale largement orientée
En réalité, le programme architectural initial type vers l'élevage.
de la ferme à auvent n'est nullement revu, il est tout
simplement conservé et adapté à moindres frais en Bibliographie
pétrifiant et fermant simplement les pans correspon- ■■ [Closon-] R[emy] M.-A., 1985. Exbomont. In : Province de
dants à l'auvent comme autant d'extensions des trois Liège. Arrondissement de Verviers (S-W), Liège (Le Patrimoine
parçons. Le canevas initial probablement ancien et monumental de la Belgique, 124), p. 1403-1404.
largement éprouvé par des générations de menuisiers ■■ Genicot L.-F., Butil P., De Jonghe S., Lozet B. & Weber P.,
se voit finalement très peu modifié. En effet, mis à part 1996. Le patrimoine rural de Wallonie. La maison paysanne.
le cloisonnement d'un couloir d'accès direct de l'exté- 1. Des modèles aux réalités, Namur.
rieur vers la cuisine, cette adaptation n'entraîne que
le hourdage des panneaux des refends et des pignons Sources
correspondants. ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Dans ce cas précis, il n'est nullement question Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Stavelo, pl. 215.
d'abandonner pour autant l'espace utile et protégé
184

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Verviers/Verviers : la maison Lambrette De plan rectangulaire (d'environ 13  m × 10,5  m), la


maison est divisée sur toute sa hauteur par un mur
de refend qui inclut un escalier à vis en son centre.
Catherine Bauwens Une structure médiane et perpendiculaire à ce refend
se développe à l'ouest sur les trois premiers niveaux.
La maison Lambrette est classée depuis 1970. C'est Les baies originelles, plus nombreuses qu'aujourd'hui,
dans le cadre des études préalables à la délivrance portent dans leur partie supérieure des chanfreins qui
d'un certificat de patrimoine en vue de sa restaura- donnent un éclairage optimal aux pièces.
tion qu'une étude archéologique a été entreprise par D'imposantes consoles aux décors variés, souvent
le Service de l'archéologie de la Direction extérieure doubles, soutiennent les poutres sous plancher. Elles
de Liège  1 (DGO4  / Département du patrimoine). sont façonnées dans la même grume que le poteau qui
L'édifice se dresse rue des Raines (parc. cad. : Verviers, les porte. Un seul conduit de cheminée primitif a été
1re Div., Sect. A, no 95l), dans une large artère située à identifié. Aux deux premiers niveaux, le contre-cœur
proximité et en contrebas du noyau primitif de la cité du foyer est encadré de piédroits calcaires qui dispo-
(Rensonnet, 1975-1976). saient d'armoires murales dites « boîtes à sel ».
Couverte d'une toiture en bâtière, la maison L'observation et la compréhension du système de
Lambrette est érigée entièrement en pan-de-bois sur marques d'assemblage utilisé par le charpentier ont
un soubassement calcaire. Avant les décapages exten- permis non seulement de reconnaître et d'identifier les
sifs des structures, une étude des enduits et décors a éléments primitifs mais également d'appréhender la
été réalisée par Emmanuelle Job de l'Institut royal du manière, le sens et les étapes de construction de l'édifice.
Patrimoine artistique (IRPA). Elle n'a mis en évidence Certains assemblages indiquent la fin des emboîtements
aucun décor primitif particulier mais bien plusieurs des modules qui forment l'ensemble de la bâtisse.
campagnes d'ornementations plus tardives (Job, 2016). La maison Lambrette fait partie d'une construction
Une étude dendrochronologique de l'édifice, également en série, David Houbrechts l'avait déjà mentionné dans
réalisée par l'IRPA (Fraiture, Cremer & Maggi, 2015), sa thèse (Houbrechts, 2008, p. 72). La façade arrière de
a non seulement confirmé la datation réalisée en 1994 la maison voisine lui semble effectivement contempo-
dans la charpente par Patrick Hoffsummer, mais a aussi raine. Les entures à sifflet désabouté qui prolongent les
permis de dater différentes phases de transformations. poutres dans la maison voisine et les traces de plusieurs
L'analyse archéologique de l'édifice a révélé les passages primitifs mises au jour lors des décapages du
structures primitives (datées de 1637-1638), les pignon mitoyen confirment que la maison Lambrette
ouvertures, la circulation interne et les volumes initiaux. et sa voisine ne forment en réalité qu'une seule bâtisse
chauffée par une cheminée commune. Elle comptait
plus de 23 m de façade, 13 m de profondeur et se déve-
loppait sur cinq niveaux hors cave.
Cette vaste construction était-elle uniquement dévo-
lue à l'habitation ou servait-elle aussi d'atelier ou de
manufacture pour le travail de la laine ?
Plusieurs indices tendent à prouver que de part et
d'autre de la structure interne principale de la maison
Lambrette la bâtisse était affectée à des activités
différentes. En effet, le côté est se trouve isolé par la
structure interne principale qui ne disposait d'aucun
passage hormis ceux de la cage d'escalier. De plus, l'ab-
sence de foyer et le traitement moins soigné des struc-
tures côté est laissent à penser que cette partie n'était
pas destinée à l'habitation. Dans le grenier, les traces,
certes non primitives, de la présence d'un tire-balle de
ce côté (ouverture abritant un treuil appelé tire-balle
dans la région car il servait à hisser des ballots de laine)
ne laissent pas beaucoup de doute quant à la fonction
d'atelier réservée à cette partie de la bâtisse.
Au fond de la parcelle et donnant sur une rue paral-
lèle se dresse un petit édifice de deux niveaux construit
Façade de la maison Lambrette.
lui aussi en pan-de-bois sur un haut soubassement
185

Temps modernes Liège

Au 18e  siècle, celle-ci semble avoir été


la propriété et la demeure de François
Franquinet, richissime marchand-drapier
qui fut également bourgmestre de la
ville (Bertholet, 1980). Avant la famille
Franquinet, à la fin du 17e siècle, il semble
que la propriété appartenait à Jean Pirotte.
L'étude encore partielle de la maison
Lambrette semble d'ores et déjà permettre
de considérer l'existence de vastes manu-
factures de drap dès la première moitié du
17e siècle à Verviers, témoins des débuts de
la prospérité de la cité et de son accession
au rang de « Bonne Ville » de la principauté
de Liège le 4 décembre 1651.

Bibliographie
■■ Bertholet P., 1980. L'étonnante fortune du
marchand-drapier verviétois François Franquinet
(°  5-9-1671 †  21-9-1754), Bulletin de la Société
verviétoise d'Archéologie et d'Histoire, LXI,
p. 137-173.
■■ Houbrechts D., 2008. Le logis en pan-de-bois
dans les villes du bassin de la Meuse moyenne
(1450-1650), Liège (Dossier de la Commission
royale des Monuments, Sites et Fouilles, 12).
■■ Rensonnet P.-J., 1975-1976. La rue
des Raines à Verviers. Un bel ensemble
architectural, Bulletin de la Commission royale
des Monuments et des Sites, 5, p. 81-113.

Sources
■■ Fraiture P., Cremer S. & Maggi C., 2015.
Rapport d'analyse dendrochronologique. Verviers,
Maison Lambrette, IRPA-KIK, rapport inédit, 62 p.
Mur de refend qui inclut un escalier à vis en son centre (relevés et infographie ■■ Job E., 2016. Maison Lambrette  : étude des
B. Raskin, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
finitions décoratives intérieures, IRPA-KIK,
rapport inédit, 80 p.
en pierre. Une porte cochère y est présente dès l'ori-
gine. La mise en œuvre et les marques de charpente
des pan-de-bois sont similaires à ceux rencontrés à la
maison Lambrette. Appartenant à la même propriété
encore au 19e siècle, ce bâtiment servait probablement
de dépendance à la bâtisse principale. Voué à une
démolition prochaine, il fait également l'objet d'une
analyse archéologique. D'autres bâtisses de la rue, qui
sont aujourd'hui divisées en plusieurs propriétés, ont
le même gabarit que la maison Lambrette et sa voisine.
L'analyse archéologique de cette maison et de ses
dépendances est en voie d'achèvement. Elle doit encore
être reliée aux données récoltées plus globalement dans
le quartier et être associée aux recherches historiques
actuellement en cours. Le nom Lambrette est celui
de l'occupant d'une partie de la maison au 19e  siècle.
186

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

TOUTES PÉRIODES
Anthisnes/Anthisnes : alimentation
d'origine animale et coq de combat,
l'apport des restes fauniques du
Moyen Âge et de l'époque moderne

Quentin Goffette, Nancy Verstraelen les 16e-17e  siècles, les ossements récoltés à vue sont
et Wim Wouters un peu plus nombreux. Ils proviennent d'une couche
détritique datée vers 1500-1550 qui comble partiel-
Introduction lement la structure en creux (silo  ?) ainsi que d'une
couche de destruction mise au jour dans les annexes
Des fouilles préventives puis une étude archéologique de la Brassine.
ont été menées dans le cadre du réaménagement du Étant donné le très faible assemblage archéozoolo-
bâtiment dit de la Brassine à Anthisnes en 2008 et gique disponible, les interprétations seront limitées
2009 (Verstraelen, 2010 ; 2011). Ce bâtiment annexe au et à prendre avec les précautions d'usage. De manière
donjon médiéval révèle l'existence de structures beau- générale, le porc et le mouton sont mieux représentés
coup plus anciennes et préalables à son réaménagement que le bœuf, ce qui reflète soit des choix alimentaires,
en brassine en 1642, sous l'instigation de Godefroid soit des stratégies de boucherie (élimination des os de
d'Anthisnes. Peu abondant, le matériel archéologique bœuf lors du découpage primaire) ou d'évacuation
découvert sur le site est daté du 14e au 19e siècle. Celui- des déchets. Parmi les bœufs et caprinés, on note que
ci comprenait 54 restes fauniques récoltés à vue dans des individus d'âge avancé ont été consommés aux
le bâtiment principal de la Brassine (NR = 33) et dans 14e-15e siècles alors qu'aux 16e-17e siècles, ces derniers
ses annexes (NR  = 21). Par ailleurs, des échantillons sont absents. Le mouton a été identifié dans un niveau
de sédiments destinés aux analyses botaniques et du 16e siècle. Chez le porc, on note une nette prédilec-
archéozoologiques ont été prélevés dans une structure tion pour la consommation de côtes et ce au cours des
en creux de nature indéterminée mais dont la fonction différentes périodes considérées.
semble avoir été la conservation de denrées céréalières Des restes de poule ont été retrouvés dans les niveaux
avant son comblement autour de 1550. Leur tamisage des 14e-15e et 16e-17e siècles tandis que des ossements
en laboratoire a livré 493 fragments fauniques. d'oie apparaissent aux 16e-17e  siècles. L'analyse des
L'étude des restes animaux visait à documenter l'ali- refus de tamis de cette période a également permis la
mentation et le mode de vie des habitants au cours récolte de restes de pigeon, de poissons et de quelques
du temps. Le nombre particulièrement peu élevé de coquilles d'œufs, ainsi que de nombreux restes intru-
macrorestes récoltés lors de la fouille limite consi- sifs qui ne seront pas détaillés ici.
dérablement les interprétations. Toutefois, certains Parmi les quelques restes retrouvés sous le plancher
éléments peuvent être mis en avant. du premier niveau de la chambre jouxtant la belle
pièce du donjon, les ossements de bœuf et de porc
L'alimentation au cours du temps proviennent d'animaux juvéniles qui, malgré leur jeune
âge, présentent déjà une taille importante. Or, d'après
Les espèces consommées comprennent les mammi- l'analyse archéologique, ce matériel peut se situer dans
fères classiques de la triade domestique  que sont le une fourchette chronologique qui s'étend du 17e au
bœuf (Bos primigenius f.  taurus), le mouton (Ovis 20e siècle. Néanmoins, l'aspect très frais de l'ensemble
ammon f.  aries) et le porc (Sus scrofa f.  domestica). des restes combiné à la grande taille des jeunes porcs et
S'y ajoutent la poule (Gallus gallus f. domestica), l'oie bœufs consommés suggèrent davantage une datation
(Anser anser  ? f.  domestica) et le pigeon (Columba récente.
sp.)  ainsi que des poissons de la famille des carpes
(Cyprinidae). Un coq de combat du 16e siècle
Au sein des trois périodes chronologiques présentées
ci-dessous, déchets de boucherie et de table semblent Un tarsométatarse de coq a été découvert au sein de
se côtoyer. Les restes alimentaires les plus anciens sont la structure en creux. Cet os de la patte sur lequel
datés des 14e-15e  siècles et proviennent d'une couche s'articulent les doigts était porteur d'un ergot, ce
de remblai située dans les annexes de la Brassine. Pour qui indique qu'il a appartenu à un mâle. Cet ergot
187

Toutes périodes Liège

Bibliographie
■■ Cocker M., Tipling D., Elphick  J. & Fanshawe  J., 2013.
Birds and people, London.
■■ Reeves A.C., 1998. Pleasures and pastimes in Medieval
England, New York.
■■ Serjeantson D., 2009. Birds, Cambridge.
■■ Thys S. & Van Neer W., 2010. Bird remains from Late
Medieval and Postmedieval sites in Brussels, Belgium. In  :
Prummel  W., Zeiler  J.T. & Brinkhuizen  D.C. (dir.), Birds
in Archaeology. Proceedings of the 6th meeting of the ICAZ bird
working group in Groningen (23.8 – 27.8.2008), Groningen,
p. 71-86.
■■ Verstraelen N., 2010. Anthisnes/Anthisnes : étude archéo-
logique du bâtiment dit de la Brassine à l'Avouerie, Chronique
de l'Archéologie wallonne, 17, p. 128-132.
■■ Verstraelen N., 2011. Anthisnes/Anthisnes : étude
archéologique du bâtiment dit de la « Brassine » à l'Avouerie,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 18, p. 153-156.

Engis/Hermalle-sous-Huy : campagne
de fouilles 2015 sur le site du
« Thier d'Olne »

Jacques Witvrouw, Gianni Gava,


Robert Désert, Richard Bit, André Jaminon
Anthisnes, la Brassine : tarsométatarse de coq dont l'ergot et Jean-Claude Marchal
a été éliminé. A. Os complet ; B. Détail de la découpe (vers
1500-1550).
La campagne de fouilles 2015 a permis d'entamer
l'étude de la grande cour trapézoïdale située au centre
présente la particularité d'avoir été éliminé, proba- de l'installation domaniale carolingienne du «  Thier
blement par sciage, du vivant de l'animal comme d'Olne » au 9e siècle (parc. cad. : Engis, 4e Div., Sect. A,
l'indique la cicatrisation de la surface de l'os. no  183P  ; coord. Lambert  : 218666  est/137978  nord).
Une telle ablation est généralement pratiquée Cette vaste cour carolingienne (1  475  m2) est bordée
sur les coqs de combat (Serjeantson, 2009  ; Thys par quatre grands édifices aux murs maçonnés mis
& Van  Neer, 2010). L'ergot naturellement présent au jour lors des campagnes de fouilles précédentes
est enlevé et remplacé par un appendice artificiel, (Witvrouw et al., 2013).
souvent métallique. Cette manœuvre peut avoir L'objectif des campagnes 2015-2016 était de réaliser
différentes finalités. En infligeant plus de dégâts à une fouille extensive de ce vaste espace central pour
l'adversaire, l'ergot artificiel rend les combats plus en saisir l'aménagement et, si possible, y découvrir des
sanglants et spectaculaires (Cocker et al., 2013) traces d'activités qui y auraient été pratiquées. Dès la
ou plus court, ce qui permet alors de multiplier les campagne 2015, un profil complet de la cour intérieure
joutes. Dans le cas de combats non létaux, il peut a pu être relevé.
également entraîner des blessures plus propres et Directement sous la couche d'humus on trouve des
faciles à cicatriser (Thys & Van Neer, 2010). L'issue amas de pierres et de galets, sous la forme de tas affais-
de ces duels était toutefois généralement la mort sés. Déposés par charretées, ces matériaux proviennent
de l'un des deux adversaires. Ce type d'affronte- manifestement d'un épierrage de zones de cultures
ments était courant au Bas Moyen Âge et à l'époque voisines (sans doute situées sur le sommet de la colline).
moderne  (Reeves, 1998, fide Thys & Van  Neer, Aujourd'hui encore ces amas de pierres restent bien
2010). La Brassine a-t-elle été le théâtre de combats visibles dans le micro-relief de la zone de fouille. Ces
de coqs ou est-on ici en présence d'un « champion » structures semblent dater d'une époque récente durant
élevé par le propriétaire des lieux ? laquelle le plateau sommital du « Thier d'Olne » était mis
188

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

en culture (jusqu'en 1950). Le matériel retrouvé dans archéologique Ardenne-Condroz ont mené diligem-
ces amas de pierres confirme cette datation d'époque ment la fouille de la sépulture, sous la supervision du
contemporaine (19e et 20e siècles). Service de l'archéologie.
En stratigraphie, une mince couche de terre noire Le chemin de La Haze marquait la délimitation entre
sépare la couche supérieure d'un niveau moyen Esneux et Sprimont avant un remembrement territorial
formant une aire empierrée d'époque carolingienne en 1879 (Simonis, 1894, p. 162). Il a gardé la forme d'un
(9e  siècle). Cet empierrement n'est pas présent sur chemin creux reliant le noyau villageois de Fontin à la
l'ensemble de la surface étudiée : il s'agit de l'aména- voie ancienne dénommée Grande Chevée, qui chemine
gement d'une aire de circulation liée à l'utilisation d'un sur un tige condruzien. Le hameau de Fontin n'a pas,
bâtiment situé à l'est de la cour, à proximité duquel à notre connaissance, fait l'objet d'une enquête histo-
l'épaisseur de la couche de pierres est plus importante. rique de type monographique. La localité est mention-
Cette aire de circulation a fourni un peu de matériel née dans le polyptique dit « de 1280 » de la cathédrale
carolingien, notamment de la céramique et quelques Saint-Lambert de Liège (Grandgagnage, 1859, p. 23).
dizaines de clous forgés (typologie identique) destinés Ce document, conservé aux Archives de l'État à Liège,
à la fixation de bardeaux (Witvrouw et al., 2014). recense les revenus du chapitre de la cathédrale à
Enfin, sous ce niveau empierré carolingien on trouve partir de sources hétérogènes  ; il est principalement
une couche de terre brunâtre correspondant à un compilé autour de l'année 1280, puis complété et reco-
ancien sol naturel. Par endroits cette couche brune est pié à l'aube du 14e  siècle (Wilkin, 2007). Fontin est
traversée par quelques structures (trous de poteau ou également cité pour l'année 1313 dans Le livre des fiefs
petites fosses) dont la disposition n'évoque aucun plan de l'église de Liège sous Adolphe de la Marck (Poncelet,
particulier. Creusées jusque dans le substrat d'argile 1898, p. 133). L'église de l'Immaculée Conception, sise
graveleux sous-jacent, elles ont livré un peu de maté- au centre du hameau, n'acquiert les droits paroissiaux
riel céramique protohistorique. qu'à partir de 1842 (Brassine, 1904, p.  304). Elle est
entièrement reconstruite en 1854. Sa devancière est
Bibliographie mentionnée en 1558 sous le vocable de Notre-Dame
■■ Witvrouw J., Gava G., Désert R., Bit R., Marchal J.-C. comme dépendante d'Esneux et à la collation du
& Hens  J.-L., 2013. Engis/Hermalle-sous-Huy  : campagne de seigneur d'Avionpuits (Simonis, 1894, p.  297-298).
fouille 2011 sur le site carolingien du « Thier d'Olne », Chronique Notons que cette chapelle ne paraît pas spécifiquement
de l'Archéologie wallonne, 20, p. 159-160. signalée sur la carte de Ferraris (1771-1778).
■■ Witvrouw J., Gava G., Désert R., Bit R., Marchal J.-C., Le site avait été reconnu dès 1978, lorsque
Bricteux  D. & Jaminon  J., 2014. Engis/Hermalle-sous-Huy  : M. Demeyer avait découvert une quinzaine de tombes
campagne de fouilles 2013 sur le site du «  Thier d'Olne  », lors de la construction de sa maison et de son chemin
Chronique de l'Archéologie wallonne, 22, p. 194-195. d'accès. Il avait alors soigneusement dégagé les tombes
et pris la peine d'en prendre quelques photographies.
Selon les renseignements recueillis auprès du décou-
vreur (Eubelen, 1996), il apparaît que les inhumations
Esneux/Esneux : découvertes fortuites étaient régulièrement espacées et orientées selon la
d'inhumations à Fontin, chemin de pente principale du terrain, globalement est/ouest.
La Haze Leurs parois, creusées dans le schiste, étaient paremen-

Denis Henrard, Sophie de Bernardy de Sigoyer,


Michel Eubelen et André Martin

Le 31 juillet 2014, le Service de l'archéologie de la


Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  / Départe-
ment du patrimoine) a été alerté par le Cercle archéo-
logique Ardenne-Condroz de la découverte d'une
sépulture à Fontin, au lieu-dit « Champs de Fawes »,
lors de la construction d'un appentis au pignon sud
de la maison sise chemin de La Haze, 7 (parc. cad.  :
Esneux, 1re  Div., Sect.  F, no  101a  ; coord. Lambert  :
236599  est/135825  nord). Avec l'accord du proprié-
Le site en 1978 (collection particulière de M. Demeyer).
taire du terrain, M. Demeyer, les membres du Cercle
189

Toutes périodes Liège

tées à l'aide de murets de blocs de grès posés à sec ou Le champ funéraire du chemin de La Haze se situe
d'un coffrage de dalles de psammite posées sur champ. une centaine de mètres au sud-ouest de Fontin. Il ne
Certaines tombes conservaient encore une couver- semble pas s'étendre en direction de l'église du hameau
ture de larges dalles en grès micacé. Les squelettes car, selon M.  Demeyer, la construction de la maison
étaient généralement dans un état de conservation très avoisinant la sienne n'a pas mis au jour de nouvelles
médiocre et aucun mobilier d'accompagnement funé- sépultures. Même si aucun élément objectif ne nous
raire n'a été remarqué lors de la découverte. permet de dater ces sépultures, leur mode de construc-
La tombe dernièrement dégagée répond aux mêmes tion, l'absence apparente de mobilier funéraire associé
caractéristiques que celles découvertes en 1978. Elle ainsi que leur situation en dehors d'un cimetière consa-
prend la forme d'un caisson de 200  cm × 60  cm, cré par l'église nous rendent enclins à les attribuer à
maçonné à sec à l'aide d'un appareillage de blocs une période comprise entre la fin du Haut Moyen Âge
de grès grossièrement équarris ou de fragments de et le Moyen Âge central.
dalle de grès micacé et conservé sur six à sept assises La collaboration bénévole des membres du Cercle
de hauteur. Le squelette n'était conservé que sous archéologique Ardenne-Condroz nous rappelle que
la forme de traces de décomposition organique au l'implication des archéologues amateurs a contribué à
niveau du chevet occidental de la sépulture, région faire vivre l'archéologie bien avant la monopolisation
dans laquelle une dent a été prélevée. Un élément en de la gestion du patrimoine par des agents profession-
fer corrodé d'une longueur de 21 cm (couteau ?) a été nels attachés à l'Aménagement du Territoire…
retrouvé à droite du bassin de la dépouille. L'absence
de tout dispositif de couverture de la tombe, ainsi que Bibliographie
la présence d'un épais amoncellement de blocs de grès ■■ Brassine J., 1904. Les paroisses de l'ancien concile de Saint-
et de fragments de dalles de grès micacé surmontant le Remacle à Liège, Liège.
pied de la tombe, laissent penser que la sépulture a été ■■ Eubelen M., 1996. L'ancienne nécropole, Le Vieil Esneux.
perturbée (pillage ?). Cet amoncellement était pris dans Archéo-Contact, 24, p. 41.
une matrice humifère et incorporait quelques restes ■■ Grandgagnage C., 1859. Vocabulaire des anciens noms de
fauniques, ainsi qu'un col de céramique typique du lieux de la Belgique orientale, Liège.
début des productions médiévales dites « d'Andenne ». ■■ Poncelet É., 1898. Le livre des fiefs de l'église de Liège sous
Adolphe de la Marck, Bruxelles.
■■ Simonis C., 1894. La seigneurie et comté d'Esneux, Bulletin
de l'Institut archéologique liégeois, 24, p. 161-384.
■■ Wilkin A., 2007. Datation et analyse du contexte de rédaction
du Polyptyque dit de 1280 de la cathédrale Saint-Lambert de
Liège, Bulletin de la Commission royale d'Histoire, 173, p. 15-45.

Sources
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Forest, pl. 192.

Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne :
découverte de deux carrières
souterraines à Hollogne-aux-Pierres

Olivier Vrielynck, Serge Delaby, Luc Funcken


et Frédéric Van Dijck

Le creusement d'un bassin d'orage dans le cadre du


développement d'une ZAE autour de l'aéroport de
Liège a recoupé deux petites carrières souterraines de
craie. Le site se localise au sud de l'autoroute E42, le
long de la rue de Bierset (parc. cad. : Grâce-Hollogne,
Esneux : la tombe découverte en 2014.
2e Div., Sect. C, no 432p). À la demande de la SOWAER,
190

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

F
set
Rue de Bier
Carrière nord
poche de
Hauteurs : dissolution
E (sable)
A : 3,3 m
B : 2,3 m
C:4m D
Carrière nord D : 2,3 m
E : 3,5 m Effondrement du plafond
F : 3,5 m sur env. 1 m d’épaisseur
(craie)
B
Plafond effondré
(2015)

Section
Anciens puits d’accès C
Carrière sud (comblés)
3 4
1
Effondrements
A
5

2 N

Carrière sud

0 10 m
Sondage
0 2m Poche de dissolution
(sables, limons)

Plan général du bassin d'orage avec l'emplacement des


carrières souterraines et des effondrements (1 à 5). Plans des carrières nord et sud.

auteur de projet, le Service public de Wallonie (DGO1, bassin d'orage. Le puits d'accès d'origine à cette
Direction de la géotechnique et DGO4, Direction de carrière, entièrement comblé, se trouve à 3  m
l'archéologie) est intervenu afin de faire le relevé de ces de là, dans le talus également (coord. Lambert  :
carrières et d'identifier la présence éventuelle d'autres 227630  est/148294  nord, alt.  = 176  m). La carrière
exploitations sur le site. totalise 40  m de développement, pour un volume
La craie au sein de laquelle ces carrières ont été creu- estimé à 250 m3. Le sol des galeries est à 6,6 m sous la
sées est blanchâtre à crème, ponctuée de grain foncé et surface de décapage, soit près de 10 m sous la surface
de quelques fossiles (bélemnites, térébratules). Elle est du sol originelle.
cohérente, mais cassante et fortement fracturée. Des Le puits d'accès, cylindrique (diam : env. 1 m), était
petits blocs de silex noir ont été observés sur les parois comblé d'un sédiment brun très meuble contenant des
des carrières souterraines. De nombreuses racines fragments de briques et de bois non décomposé. Au
d'altération sont présentes sur le site. Notons que d'an- pied du puits, deux galeries prennent des directions
ciennes carrières souterraines de phosphate se trouvent opposées suivant un axe nord-est/sud-ouest. La gale-
à proximité immédiate au nord du bassin d'orage. rie sud-ouest (A), rectiligne, est longue de 9,5  m. La
galerie nord-est (F) oblique vers l'est après 11 m, et se
La carrière nord termine à 14,5 m du puits. Ce changement de direction
par les carriers est probablement dû à la présence d'une
Début avril 2015, une pelle mécanique a recoupé grosse poche de sables et de limons, qui s'est en partie
le toit d'une galerie au niveau du talus nord du effondrée dans la galerie. À 3  m du pied du puits, la
galerie nord-est présente deux couloirs
transversaux (E-D  ; B-C) rectilignes
longs de 6 et 8,5 m. Toutes les galeries se
terminent sur fronts de taille. La hauteur
sous plafond varie de 2,3 m à 3,3 m (voire
4 m sous une partie de voûte effondrée)
pour une largeur de 1,3  m à 2  m. La
section des galeries est globalement
semi-elliptique, avec un plafond voûté
ou plat. Le sol de la galerie était visible en
Grâce-Hollogne : vue générale du site.
de nombreux endroits. Des traces de pics
191

Toutes périodes Liège

Carrière sud, ancien puits d'accès comblé.

pale continue ensuite sur quelques mètres jusqu'à une


importante poche de sables et de limons. Les galeries
sont larges de 80 cm à 1 m et ont un profil de section
rectangulaire ou trapézoïdale. Leur hauteur d'origine
n'est pas connue, le sol des galeries n'étant visible nulle
part. Elles étaient accessibles sur 1,4  m de hauteur
maximum. Les plafonds sont plats et correspondent
à des surfaces de fracturation naturelle de la craie.
Quelques coups de pics y sont visibles. Le plafond de la
galerie latérale sud s'est effondré sur 70 cm de hauteur,
jusqu'à une nouvelle interface de fracturation.
Carrière nord, vue du front de taille sud-ouest.

Plusieurs effondrements
sont présentes sur toutes les parois. De la suie se trouve
sur la paroi sud de la galerie principale entre le puits Après la découverte de ces deux carrières plusieurs
d'accès et les galeries latérales. effondrements se sont produits sur le site à la suite
d'orages violents au mois d'août (1 à 5). Les effon-
La carrière sud drements 1 à 4 sont de section subcirculaire parfois
tronquée par un décollement plus récent de roche.
Suite à la découverte de la première carrière, une étude L'effondrement 5, long de 8,5 m, correspond vraisem-
géophysique par radar a été réalisée à la demande de blablement à l'axe d'une galerie de la carrière sud non
la SOWAER par l'entreprise Calcis. Celle-ci a mis en accessible lors du relevé effectué quelques mois plus tôt.
évidence la présence d'un vide souterrain 50 m au sud- Le fond de chacun de ces effondrements est obstrué de
est de la carrière précédente. La société travaillant sur blocs de craie. Dans l'effondrement 1, profond de 5 m,
le site, Viabuild, a effectué le 30 avril un sondage à la une petite faille très ancienne (±  syn-sédimentaire),
pelle mécanique qui a traversé le plafond d'une galerie. sub-verticale et orientée sud-est/nord-ouest, décale de
Il s'agit d'une carrière plus petite dont la profon- 20 cm un niveau de silex.
deur devait également atteindre environ 10  m à Les effondrements  1 à 4 semblent correspondre à
l'origine (coord. Lambert  : 227660  est/148256  nord, des racines d'altération de la craie à l'origine comblées
alt.  = 172  m). Le développement des galeries, en de sables/limons et de résidus de dissolution. Aucune
grande partie comblées lors de notre visite, est d'une trace de pic n'a été observée, qui identifierait ces puits
douzaine de mètres. Le toit des galeries se trouvait à comme d'anciens accès à des carrières souterraines.
4  m-4,5  m sous la surface de décapage provisoire du Le fait que ces poches se soient vidées de leur contenu
bassin d'orage. Le puits d'accès, cylindrique (diam  : s'explique probablement par la présence sous-jacente
env. 1 m), est entièrement comblé de sédiments hété- de galeries souterraines. Les effondrements seraient
rogènes jaunes et bruns. À environ 1 m de la base du consécutifs à des infiltrations massives d'eau, peut-être
puits, la galerie principale s'ouvre sur deux courtes facilitées par les vibrations des machines de chantier.
galeries transversales, longues de 2,8  m, en partie Ces hypothétiques galeries ne sont pas forcément des
comblées par des blocs de craie et des sédiments sablo- carrières de craie. Nous nous trouvons en effet au sein
limoneux déposés par décantation. La galerie princi- de la concession minière de Gosson-Kessales, non loin
192

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

de puits de mines connus. Des galeries d'exploitation ont une utilité qui n'a pas encore pu être précisée
de houille beaucoup plus profondes que les carrières aujourd'hui (Gémis, 2014).
de craie sont ainsi peut-être à l'origine de l'apparition En 2014, ce qui apparaissait, au nord-ouest de
de ces vides. l'habitation, comme les fondations de deux murs
À la demande de la Sowaer, une dernière inspection construits à angle droit ne sont, en réalité, que des
a été effectuée sur le site en septembre 2015. Celle-ci remblais contemporains, sans doute, de la destruction
a mis en évidence la présence de fissures ouvertes du bâtiment (Gémis, 2015). Cette masse de morceaux
centimétriques à décimétriques, avec traces de de grès micacé, de silex et de mortier de sable cachait
phénomènes d'érosion et de dissolution, témoignant ce qui peut être interprété comme un chemin d'accès
de l'existence d'infiltrations d'eau importantes dans la composé également de djètes posées sur un mortier
craie. de sable et délimité par de longues pierres de grès. Ce
passage, d'une largeur de 2,80 m, a été dégagé sur une
longueur de 1,80  m. Sa destination est impossible à
définir dans l'état actuel de nos recherches.
Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne : le site De part et d'autre de ce chemin, vers le nord et le
de l'« ancien château » de Hollogne-aux- sud, on distingue clairement des couches de mortier
de chaux dont l'épaisseur varie entre 2 et 15 cm. Dans
Pierres
sa partie méridionale, cette étendue de mortier vient
buter contre le mur F10 précédemment identifié
Philippe Gémis (Gémis, 2014, p. 196).
Le futur devrait nous permettre de découvrir d'autres
La prairie fouillée, depuis 2000, par une équipe de béné- éléments de ce bâtiment mais aussi de préciser la fonc-
voles de l'asbl Les Chercheurs de la Wallonie, recèle, tion des structures découvertes en 2015.
selon un historien local (Jeunehomme, 1912, p. 32), les
restes de l'ancien château de Hollogne-aux-Pierres. Bibliographie
Ce site est situé à 300 m au sud-est de l'aérogare de ■■ Gémis P., 2014. Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne : le site de
Liège Airport, à proximité de la rue de Bierset, de l'actuel l'«  ancien château  » de Hollogne-aux-Pierres, Chronique de
château et de la ferme de M. Philippe Lucas, propriétaire l'Archéologie wallonne, 22, p. 195-197.
des lieux (parc. cad. : Grâce-Hollogne, 2e Div., Sect. C, ■■ Gémis P., 2015. Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne : le site de
no 314k ; coord. Lambert : 227820 est/148245 nord). l'«  ancien château  » de Hollogne-aux-Pierres, Chronique de
En 2015, les recherches se sont poursuivies au nord l'Archéologie wallonne, 23, p. 212-213.
du bâtiment mis au jour les années précédentes. Pour ■■ Genicot L.-F., Butil P., De Jonghe S., Lozet B. & Weber P.,
rappel, le plan de cette bâtisse n'est pas sans évoquer 1996. Le patrimoine rural de Wallonie. La maison paysanne.
une habitation tripartite traditionnelle telle qu'elle était 1. Des modèles aux réalités, Namur.
construite en Hesbaye avant le 19e  siècle (Genicot et ■■ Jeunehomme L., 1912. Hollogne-aux-Pierres. Contribution à
al., 1996, p. 99-106). Ces trois pièces sont disposées les son histoire, Liège.
unes à côté des autres, selon un axe nord-ouest/sud-
est. De part et d'autre d'une cuisine d'une superficie
de 49  m² dotée d'un âtre en djètes et d'un carrelage
de dalles de calcaire, deux autres pièces, plus petites, Grâce-Hollogne/Mons-lez-Liège :
intervention dans la zone aéroportuaire
de Bierset, campagne 2015

Claire Goffioul, Jean-Philippe Marchal,


Olivier Collette et Sophie de Bernardy de Sigoyer

En mars 2015, le Service de l'archéologie de la Direc-


tion extérieure de Liège  1 (DGO4  / Département du
patrimoine) a poursuivi ses recherches préalablement
à l'extension de la zone aéroportuaire de Bierset, au
Hollogne-aux-Pierres : chemin d'accès composé de djètes sud de l'autoroute  E42 (Goffioul & Marchal, 2015).
posées sur un mortier de sable et délimité par de longues Cette année, l'intervention se localise au sud-ouest des
pierres de grès.
fouilles archéologiques menées en 2001 et 2002 (Loicq
193

Toutes périodes Liège

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0 100 m

1
2
3
4
0 25 m

Zone aéroportuaire de Bierset, campagne 2015, plan de localisation des vestiges : 1. Néolithique ancien ; 2. Âge du Fer ; 3. Temps
modernes ; 4. Époque indéterminée (infographie F. Giraldo Martin, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
194

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

& Marchal, 2002 ; Marchal & Loicq, 2003), entre la rue Rubané moyen de Hesbaye (I. Jadin, communication
Diérain Patar et le chemin de Fexhe (coord. Lambert : personnelle) et donc dans une phase plus ancienne
226812 est/147781 nord). que celle identifiée dans les zones voisines lors des
À l'instar des zones fouillées antérieurement, le campagnes de fouilles 2001 et 2014.
terrain se positionne à la transition entre le plateau Les vestiges les plus récents sont modernes et
hesbignon et les premiers vallonnements de la vallée consistent en un chemin bordé de deux  enclos
mosane. Du reste, son relief originel reste difficile quadrangulaires, peut-être des aires de parcage de petit
à appréhender actuellement car entouré de terrains bétail, et de quelques fosses et/ou aires d'épandage.
remodelés ; les voiries encerclant le secteur ainsi que La grande majorité des vestiges témoigne d'un
la proximité immédiate des infrastructures autorou- habitat de l'Âge du Fer qui semble s'organiser
tières et aéroportuaires empêchent toute perspective. suivant un axe sud-ouest/nord-est. En l'état actuel
Vers le sud, des sablières ont encore entaillé le substrat des recherches, seuls quelques bâtiments sur 4, 6 ou
sur plusieurs mètres d'épaisseur. Sur base des courbes 9  poteaux ont été d'emblée reconnus côté nord-est.
de niveau des cartes du Dépôt de la Guerre (19e siècle) Du reste, la profusion de trous de poteau, aux gaba-
une reconstitution du relief naturel montre que les rits variés, esquisse les plans de plusieurs générations
terrains se situent à l'arrière de petites avancées du de bâtiments aux plans plus ou moins complexes
plateau orientées nord-ouest/sud-est et dominant les sans que l'on puisse pour l'instant en proposer clai-
vallonnements de la Meuse. Ces terrains participent à rement une illustration. Les fosses mises au jour ont
une topographie relativement calme jusqu'à la rupture une vocation essentiellement d'ensilage. Une grande
de pente annonçant les vallonnements. fosse, de plus de 6 m de côté, semble avoir joué le rôle
Dans la zone de recherche de cette année, la présence de carrière d'extraction de limon pour la plupart des
du substrat sableux à faible profondeur empêche l'esti- bâtiments. Au sein d'une concentration de trous de
mation d'un taux d'érosion sur base d'observations poteau, une fosse semble porter les indices de fabri-
pédologiques. cation de torchis tandis que d'autres structures ont
Dans un premier temps, une évaluation par sondages servi, dans un second temps, de dépotoir domestique.
mécaniques, continus et espacés de 15 m, a été réalisée En bordure d'emprise, la moitié inférieure d'une fosse
sur toute la superficie, soit un peu plus de 7  ha. Elle a été comblée avec de nombreux fragments de céra-
a d'emblée mis en évidence des vestiges des périodes miques et de volumineux blocs de terre brûlée appar-
néolithique, protohistorique et moderne. En fonction tenant probablement à un four.
du planning des aménageurs, quatre zones prioritaires Les tessons de céramique sont nombreux et
ont été identifiées dont deux ont fait l'objet de fouilles fragmentés et leur restauration est en cours. Sur
en 2015, l'une de 3 700 m² côté sud-est (zone 1) livrant base d'un premier survol du matériel, la céramique
essentiellement les traces d'un habitat de l'Âge du Fer, découverte dans les fosses et certains trous de poteaux
et l'autre de 3  200  m² côté nord-ouest de l'emprise semble homogène et est attribuable à la période finale
(zone 3) où quelques fosses protohistoriques côtoient du Hallstatt.
un tronçon de fossé.  L'intervention archéologique
dans les deux autres zones (zones 2 et 4) est program- La zone nord-ouest (zone 3)
mée en 2016.
Les lambeaux d'un tronçon de fossé ont été repérés
La zone sud-est (zone 1) sur une soixantaine de mètres de long suivant un
axe sud-ouest/nord-est, parallèle à l'actuel chemin
Plus de 300  trous de poteaux et une quarantaine de de Fexhe. D'une largeur moyenne proche du mètre
fosses ont été recensés dans cette zone. Ils sont attri- et généralement conservé sur une petite vingtaine
buables à trois périodes principales  : le Néolithique de centimètres, il accuse un profil en cuvette. Par
ancien, l'Âge du Fer et les Temps modernes. endroits, il présente un profil plus vaste avec un fond
Les traces les plus anciennes sont attribuables à la irrégulier ménageant des cuvettes plus profondes
période rubanée. Quelques silos et fosses d'extrac- pouvant atteindre 0,45 m de profondeur et dessinant
tion de limon ont été mis en évidence. Leur comble- des fosses parallèles au tronçon principal en surface
ment présente des rejets détritiques témoignant d'une de décapage. Avec un pendage général d'une cinquan-
présence domestique à proximité. Aucun plan de taine de centimètres du sud-ouest vers le nord-est,
maison rubanée n'a pour l'instant été identifié. Une un remplissage typique d'un fossé de drainage et une
première approche du matériel céramique renseigne dynamique de comblement du nord-ouest au sud-est,
l'absence de décor au peigne, ce qui semblerait indi- l'ensemble marque la trace d'un fossé protégeant de
quer que l'on se situe probablement à la période du l'écoulement des eaux la zone située au sud-est. Dans
195

Toutes périodes Liège

l'attente d'une analyse par datation 14C, aucune attri- Herstal/Herstal : sépultures
bution chronologique ne peut être proposée pour mérovingiennes, tombe de cervidé et
l'instant mais le type de comblement, compact et
traces d'occupation d'époque romaine au
homogène, suggère un aménagement ancien, au plus
tard médiéval.
lieu-dit « Sous-la-Chapelle »
À l'amorce de ce fossé vers le sud-ouest, plusieurs
fosses comportant des rejets domestiques accom- Denis Henrard, Patricia Gillet
pagnent quelques trous de poteaux de petit gaba- et Fabienne Pigière
rit. Les quelques fragments de céramique récoltés
semblent attribuables à la phase finale de la période Dans le courant des mois de mars et avril 2015, le
de Hallstatt. Service de l'archéologie de la Direction extérieure
de Liège  1 (DGO4  / Département du patrimoine) a
Conclusion mené une fouille préventive rue Jean Lamoureux, au
lieu-dit « Sous-la-Chapelle », dans le centre urbain de
La campagne de fouilles de 2015 a permis de dégager Herstal (parc. cad. : Herstal, 3e Div., Sect. E, no 920k).
des éléments appartenant à un habitat du Hallstatt L'intervention s'est inscrite dans le cadre d'un proto-
final exceptionnellement bien conservé pour la cole d'accord avec la Société régionale du Logement de
Hesbaye. Les divers bâtiments successifs de la zone 1 Herstal, en préalable à la construction d'un immeuble
doivent désormais être repérés distinctement mais à appartements. Elle fut essentiellement motivée par la
attestent d'ores et déjà d'une occupation intensive découverte, au début du 20e siècle, de tombes mérovin-
à cette période. La zone  3 pourrait en outre giennes sur une parcelle avoisinante.
participer aux aménagements de cet habitat, avec
un fossé de drainage protégeant les infrastructures Le contexte archéologique
situées plus en aval. L'ensemble témoignerait d'une
occupation rurale hallstattienne de grande envergure Le centre de Herstal occupe une terrasse basse de la
surplombant la vallée de la Meuse et dont les limites rive gauche de la Meuse, à environ 8 m de dénivelé de la
conservées pourraient atteindre plus de 1  ha. La plaine alluviale. Il est traversé par un ruisseau dévalant
zone intermédiaire entre les deux  secteurs fouillés du plateau hesbignon, le Patar, actuellement canalisé
cette année devrait être investiguée dans les années à sous la rue Faurieux. Le site se trouve au croisement
venir, ce qui permettrait de compléter les recherches de deux voies antiques importantes, approximative-
actuelles. ment localisées au sein du tissu urbain moderne. La
première provient de Tongres et débouche dans la
Bibliographie
Rue
Fau
■ Goffioul C. & Marchal J.-P., 2015. Grâce-Hollogne/ rieu
x
4*
Grâce-Hollogne  : intervention dans la zone aéroportuaire de
Bierset, campagne 2014, Chronique de l'Archéologie wallonne,
23, p. 210-212.
■ Loicq  S. & Marchal  J.-P., 2002. Grâce-Hollogne/Grâce-
Hollogne  : fouilles préventives à hauteur de l'accès no  3 à Rue Je
an Lam
Hollogne-aux-Pierres, Chronique de l'Archéologie wallonne, 10, oureu
x

p. 158-160. 3*
Ru
■ Marchal J.-P. & Loicq S., 2003. Grâce-Hollogne/Grâce- e
en
Gr
an
Hollogne  : fouilles préventives à hauteur de l'accès no  3 à de
Fo
xh
Hollogne-aux-Pierres, Chronique de l'Archéologie wallonne, 11, all
e

p. 125-128. *1
ux
yo
Ho
e
Sources 2
Ru 0 100 m

*
■ Carte topographique de la Belgique. Dépôt de la Guerre, 1831-
Herstal : emprise de l'intervention (en noir) et environnement
1878.
archéologique au sein du parcellaire. 1.  Caveau funéraire
du Haut-Empire au lieu-dit «  La Barrière  »  ; 2.  Tombes
à inhumation de la fin du Bas-Empire  ; 3.  Tombes
mérovingiennes découvertes entre 1910 et 1938 ; 4. Chapelle
Saint-Lambert (infographie C.  Régimont, Serv. archéologie,
Dir. ext. Liège 1).
196

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

vallée mosane à partir du plateau de Foxhalle, avant pente naturelle, orientée sud-ouest/nord-est. L'altitude
de traverser la Meuse en vis-à-vis de l'agglomération du terrain avant l'intervention est de 67,35 m en fond
romaine de Jupille ; la seconde longe la rive gauche de de parcelle, 67 m au centre et 66,40 m en bordure de la
la Meuse en direction de Maastricht (Henrard, 2013). rue Jean Lamoureux.
Ce carrefour important constitue probablement Une tranchée de fouille en forme de L couvrant
un noyau de peuplement depuis l'époque romaine  : une superficie d'environ 170 m² a été ouverte par des
des remblais de construction gallo-romains ont été moyens mécaniques jusqu'à une profondeur moyenne
signalés à plusieurs reprises rue Hoyoux (Collart- de 50  cm. Dans le bras nord de la tranchée affleure
Sacré, 1930, p. 333), tandis que le caveau funéraire d'un le substrat géologique composé d'un limon jaunâtre
tumulus richement doté, datant de la seconde moitié à passes sableuses oxydées qui pourrait appartenir
du 2e siècle apr. J.-C., a été retrouvé en 1901 au lieu-dit au cycle de colluvions d'âge pléistocène observé lors
« La Barrière » (1 ; Renard, 1901 ; Amand & Mariën, des fouilles de la chapelle Saint-Lambert en 2011
1976), dans l'environnement direct du débouché de la (Henrard, 2013). Cet encaissant naturel apparaît au
voie romaine sur la plaine alluviale mosane, tradition- décapage largement entaillé par des fosses d'époque
nellement localisé rue en Grande Foxhalle. moderne, au remplissage noirâtre à large fraction
Le même secteur a livré quelques inhumations de gravelo-houilleuse.
la fin du Bas-Empire (2), décrites dans l'urgence par Le bras sud de la tranchée de fouille montre, lui,
l'Institut archéologique liégeois à l'occasion de travaux un net décaissement en direction de la rue Jean
d'agrandissement de la gare ferroviaire de Herstal en Lamoureux. Ce dernier atteint 150 cm de profondeur
1904 (Renard, 1904 ; Dasnoy, 1972). en bordure de la voirie et apparaît progressivement
Entre 1910 et 1914, l'Institut archéologique liégeois nivelé par des remblais de terrassement d'époque
découvre une dizaine d'inhumations d'époque moderne. L'évaluation n'y est donc pas probante en
mérovingienne dans les jardins des maisons situées à ce qui concerne le développement de la nécropole
l'angle des rue Hoyoux et Jean Lamoureux (3), au lieu- mérovingienne.
dit « Sous-la-Chapelle » (Servais, 1910 ; 1914 ; Delheid La fouille exhaustive du bras nord de la tranchée a
& Servais, 1912). En 1938, le musée de Herstal entre- livré cinq sépultures mérovingiennes, une tombe de
prend une fouille sur le même terrain, ce qui engendre cervidé ainsi qu'une fosse contenant des rejets d'occu-
la découverte de sept inhumations mérovingiennes pation du Haut-Empire.
supplémentaires. Cette dernière intervention n'est pas Notre intervention n'offrant qu'un échantillon peu
publiée mais le musée de Herstal en conserve la docu- représentatif du champ funéraire et au regard du peu
mentation de fouille.
Enfin, une église dédiée à saint
Lambert serait établie dès le début du
8e  siècle en bordure du Patar (4), à
quelque 200 m au nord de la nécropole
mérovingienne de « Sous-la-Chapelle ». 239046.532 m est
151067.861 m nord

Selon la  Vita Landiberti episcopi Traiec- F04 F01

tensis vetustissima (Krusch, 1913), cette


église est fondée entre 716 et 727 (Joris,
1973, p.  397) à la suite d'un miracle
F09
produit lors du transfert de la dépouille F03

de l'évêque Lambert de Maastricht vers F08

Liège. Durant l'année 2011, le Service 0 2m

de l'archéologie a pu fouiller les fonda-


tions d'un édifice antérieur à la phase de 1
F06
2
construction de style roman de l'église 3
F05

Saint-Lambert (Henrard, 2013). 4


5

Méthodologie de l'intervention 6
7
et contexte stratigraphique
239056.809 m est
151059.911 m nord

Plan de la fouille de 2015. 1.  Fosses modernes  ; 2.  Fosse du Haut-Empire  ;


La parcelle investiguée a connu un 3. Sépultures ; 4. Matériaux lithiques et terre cuite ; 5. Mobilier d'accompagnement
important décaissement afin d'établir un funéraire  ; 6.  Ossements  ; 7.  Perturbation par creusement (infographie
J.-F. Lemaire et C. Régimont, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
bâtiment industriel de plain-pied dans la
197

Toutes périodes Liège

de moyens disponibles en matière d'anthropologie, trouvait un pendentif polyédrique de boucle d'oreille


nous avons fait le choix de ne pas recourir à des obser- en or avec grenats ou verroterie montés en bâte. Au
vations anthropologiques de terrain. Les restes osseux niveau de la poitrine, gisaient, dissociées l'une de
humains ont cependant été prélevés en vue d'éven- l'autre, une platine de petite fibule discoïde en alliage
tuelles analyses ultérieures. Le mobilier métallique est cuivreux et son applique en or. Cette dernière est déco-
encore en cours de restauration. rée de filigranes et sertie d'un cabochon central, ainsi
que de motifs aviformes de grenats ou de verroterie
Les sépultures mérovingiennes montés en bâte. Enfin, huit perles en verre opaque
(monochrome et polychrome) ont été retrouvées au
Le niveau d'enfouissement des sépultures oscille entre chevet de la tombe, principalement dans la région
66  m et 66,50  m d'altitude. Elles sont implantées cervicale de la défunte.
dans la pente naturelle du terrain, selon une norme Sur base d'une approche typochronologique du
d'orientation sud-ouest/nord-est, de manière homo- matériel  associé (Legoux, Périn & Vallet, 2006), la
gène par rapport aux sépultures découvertes au début constitution du lot mobilier de l'inhumation F01 peut
du 20e  siècle dans les jardins en vis-à-vis de la rue être prudemment datée entre la fin du 6e et la première
Jean Lamoureux. moitié du 7e siècle apr. J.-C.
La sépulture F01 est recoupée en son centre par une La sépulture F03 apparaît perturbée par des fosses
fosse moderne. Sa fosse sépulcrale conserve quelques modernes. Le squelette est très mal conservé, seules
pierres d'encadrement (blocs de grès grossièrement trois dents ont été prélevées. Le mobilier d'accompa-
équarris ou galets) ayant servi à l'aménagement de la gnement funéraire indique un personnage de genre
tombe. Le squelette est très mal conservé, seules cinq féminin. Il est constitué d'une trentaine de perles en
dents ont pu en être prélevées. Bien que le mobilier verre opaque monochrome, retrouvées dans la région
d'accompagnement paraisse lacunaire et parfois en cervicale de la défunte, constituant un probable collier.
position secondaire, sa qualité indique clairement un Les perles peuvent être d'une teinte rouge, bleue ou
individu de genre féminin et au statut privilégié. Deux blanchâtre, mais les petites perles jaunes sphériques
vases biconiques en céramique tournée rouge, à carène prédominent largement. Outre le collier de perles,
basse et à surface brute étaient déposés aux pieds de la une petite masse ferreuse a été prélevée au niveau du
défunte. L'un d'eux est percé à la base, probable trace bassin.
d'une mutilation volontaire. Au chevet de la tombe se La sépulture F05 est partiellement perturbée par des
fosses modernes. Son squelette est relativement bien
conservé. Le défunt semble d'âge mature, tandis que
le mobilier d'accompagnement indique un individu de
genre masculin. Un petit scramasaxe à dos courbe et à
deux rainures (lame : 33 cm ; soie : 14 cm) se trouvait
à gauche du bassin. La soie de l'arme porte les traces
de trois rivets et conserve un cerclage (de fourreau ?)
en fer au niveau de la garde. Un petit couteau (lame :
16 cm ; soie : 8 cm) était déposé sur le scramasaxe. Deux
plaques-boucles en fer étaient disposées de part et
d'autre du bassin. Celle portée à droite, mieux conser-
vée, peut en l'état être décrite comme quadrangulaire
et à quatre bossettes d'angle. Elle porte des décora-
tions en damasquinure monochrome sous la forme de
motifs d'entrelacs ou de vanneries en échelle. Enfin,
une pince à épiler en alliage cuivreux est présente sous
l'avant-bras droit du défunt.
Sur base d'une approche typochronologique du
mobilier funéraire associé (Legoux, Périn & Vallet,
2006), l'inhumation F05 peut être globalement datée
dans le courant du 7e siècle apr. J.-C.
La sépulture F06 est contiguë à la sépulture F05, sans
qu'une relation stratigraphique objective ne puisse être
Applique de la fibule discoïde et pendentif polyèdre en or de déterminée entre les deux. Le squelette de F06 est rela-
la tombe F01.
tivement bien conservé. Une dalle de grès participant
198

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

à l'aménagement de la tombe a éventuellement provo- céramique). En tenant compte de l'arasement du fond


qué le déplacement du membre inférieur gauche de la de la parcelle par rapport à la surface originelle, la
dépouille, ce qui pourrait indiquer une décomposition structure F04 doit correspondre à un décaissement
en espace vide. Aucun mobilier d'accompagnement n'a assez profond, dont le creusement apparaît légère-
été retrouvé associé à cette sépulture. ment à contrepente du terrain naturel.
La sépulture F08 consiste en une large fosse sépul- Le matériel céramique récolté dans le comblement
crale quadrangulaire d'environ 255 × 140 cm de côté. de la structure (NMI : 5) indique le Haut-Empire,
La présence d'un cercueil ou d'un coffre funéraire avec notamment un profil complet de mortier à
d'environ 70  cm de large, au centre de la fosse, est bec verseur à pâte beige, dont la surface interne est
clairement indiquée par des traces de décomposition couverte de grains de quartz, et qui porte l'estampille
organique. Le squelette est en bon état de conservation BRARIATUS. Ce potier exporte à partir la région de
et l'individu inhumé paraît d'âge mature. La partie Bavay dans le courant du 2e siècle apr. J.-C. (Delmaire,
inférieure de la sépulture montre une fosse de pillage 1972).
qui a provoqué un soulèvement marqué du membre
inférieur gauche de la dépouille. L'essentiel du mobi- Une tombe de cervidé du Haut-Empire
lier prélevé provient de cette fosse de pillage qui incor-
pore, outre une charge anthropique intrusive (parti- Une tombe animale, F09, a été retrouvée en position
cules de terre brûlée, éclats de grès, galets et restes adjacente à la sépulture privilégiée F01. La relation
fauniques), le reliquat du mobilier d'accompagnement stratigraphique entre F01 et F09 est incertaine mais les
de la tombe. Ce dernier consiste en des particules deux inhumations ne sont pas concomitantes car leurs
éparses d'objets en alliage ferreux ou cuivreux, ainsi fosses d'enfouissement sont bien distinctes et opérées
qu'en fragments d'un profil complet de vase biconique à des niveaux différents.
à carène médiane, à pâte fine beige et surface grisâtre, L'analyse archéozoologique a permis d'identifier
dont la panse supérieure est décorée sur six registres le squelette partiel d'un cerf élaphe (Cervus elaphus)
à l'aide d'une molette aux motifs composites (casiers, âgé d'environ 2  ans et demi, comme l'indique l'état
croix de saint André, épis). d'épiphysation des ossements (Habermehl, 1985).
Enfin, notons que l'espace compris entre les Une grande partie du corps de l'animal était représen-
tombes F01, F06 et F08 comporte une charge erra- tée en connexion anatomique : la colonne vertébrale,
tique composée de blocs de grès, de fragments de la cage thoracique, le membre antérieur gauche, la
matériaux en terre cuite, de restes osseux humains ceinture pelvienne et les deux membres postérieurs.
et fauniques ainsi que de quelques tessons d'allure Ces os ne présentent aucune trace de manipulation
médiévale. Cette couche, qui surmonte le substrat ou de prélèvement de matière première. La dépo-
limono-sableux jaunâtre sans interface de creuse- sition dans la fosse sépulcrale semble contrainte.
ment bien discernable, est manifestement remaniée L'animal est installé dans une fosse étroite aux
et pourrait incorporer les reliquats d'une ou plusieurs contours quadrangulaires  ; il repose sur le flanc
tombes perturbées. Il n'a pas été possible, malgré une droit, les membres postérieurs fortement fléchis. Le
fouille méticuleuse, d'en discerner l'interface de mise
en place, que ce soit en plan ou en coupe.

Traces d'occupation romaine

La structure en creux F04 est partiellement appré-


hendée en plan dans l'angle sud-ouest de l'emprise
de fouille à partir d'une altitude moyenne d'arase-
ment de 66,65  m. Elle apparaît clairement recoupée
par la sépulture F03. L'interface de creusement de
F04 a été suivie en pente douce vers l'ouest jusqu'à
une profondeur d'une quarantaine de centimètres au
niveau de la paroi ouest de l'emprise de fouille. La
base de la structure est soulignée par un épandage de
matériaux hétéroclites de petits calibres et en posi-
tion de remblai (galets, éclats de grès, fragment de
tegulae, particules de terre brûlée et de charbon de
Herstal : la tombe de cervidé F09.
bois ainsi que quelques restes osseux ou tessons de
199

Toutes périodes Liège

remplissage de comblement de la sépulture, un limon occupe une position particulièrement complexe


brunâtre légèrement sableux, se différencie très peu dans nos sociétés. La documentation historique, tout
de l'encaissant naturel. comme des expériences d'élevage moderne, soulignent
La partie antérieure de la tombe F09 a subi une à l'envi le statut potentiellement domesticable de cette
importante perturbation par creusement. Le sédiment espèce, dont la « sauvagerie » semble bien sciemment
de la zone perturbée est de même nature que la partie cultivée, au besoin dans des parcs à gibier ou des
intacte de la tombe. Il incorpore quelques fragments ménageries… Le statut sauvage du cerf, prioritaire-
de tegulae en terre cuite et des blocs de grès équar- ment réservé à la chasse, apparaît comme un choix
ris en position de remblai. Ces derniers portent des culturel délibéré (Vigne, 1993). L'appropriation spora-
reliquats de mortier de pose à forte teneur en chaux dique de spécimens par la capture ou par l'élevage est
et proviennent certainement du démantèlement d'un pourtant bien attestée depuis l'époque romaine, et ce
bâtiment environnant. La partie perturbée de la tombe à des fins de chasse « à l'appelant » durant le rut, pour
F09 contenait également les restes épars et lacunaires l'attelage d'apparat ou tout simplement pour l'agré-
des dépouilles d'au moins deux chiens, quelques restes ment (Poplin, 1996).
fauniques liés à l'alimentation, ainsi qu'un fragment En ce qui concerne la documentation archéolo-
crânien de cerf élaphe pourvu de la base de sa ramure, gique, outre leur appropriation par la chasse ou la
sciée au niveau du merrain inférieur. Ce fragment récolte de leurs bois pour la manufacture d'instru-
porte des traces de mâchonnements, probablement ments, quelques découvertes montrent également
laissées par un canidé. Son appartenance à l'individu l'enterrement précautionneux de cervidés ayant visi-
inhumé dans F09 ne peut être certifiée. blement intégré la sphère domestique ou cultuelle
Aucun mobilier n'a été retrouvé associé à F09 mais (Lepetz, 2009, p.  150-156  ; Putelat, 2013, p.  431  ;
une datation radiométrique a été réalisée à partir Poplin, 1996). À titre d'exemple, mentionnons le site
d'une des côtes de l'animal. Les résultats de l'analyse de Nogent-sur-Seine (Haute-Marne), daté du Haut-
attribuent sans conteste l'inhumation du cerf au Haut- Empire, qui a livré les sépultures isolées de quatre
Empire avec une datation, après calibration à 2σ, entre cerfs. Les ramures de ces animaux avaient été muti-
80 et 240 apr. J.-C. (RICH 22910 : 1849 ± 28 BP). lées par sciage et deux d'entre eux portaient encore les
vestiges d'un système de harnachement à la bouche
Discussion (Poplin, 1996).

Au regard des sources historiques, Herstal s'avère Bibliographie


incontestablement une place importante à partir ■■ Amand M. & Mariën M.-E., 1976. La tombe de Herstal,
de la fin de l'époque mérovingienne. Le palatium Bruxelles (Inventaria Archaeologica, Belgique, 2).
carolingien, mentionné pour la première fois en ■■ Collart-Sacré A., 1930. La libre seigneurie de Herstal. Son
723, devient une des résidences privilégiées de histoire, ses monuments, ses rues et ses lieux-dits, tome II, Liège.
Charlemagne durant la première partie de son règne ■■ Dasnoy A., 1972. Herstal au Bas-Empire. In : Herstal avant
(770-784) et garde une fonction de résidence royale l'an Mil. Exposition, maison de Lovinfosse, 11 mars-9 avril 1972,
jusqu'au début du 10e  siècle. Bien qu'aucune trace Herstal, p. 53-58.
matérielle n'en ait été mise au jour, la recherche ■■ Delheid J. & Servais J., 1912. Découverte d'un cimetière
actuelle localise traditionnellement ce palais autour franc à Herstal (2e  article), Bulletin de l'Institut archéologique
de l'église paroissiale Notre-Dame de la Licour. liégeois, 42, p. 133-138.
Dans ce contexte particulier, la nécropole de « Sous- ■■ Delmaire R., 1972. Les mortiers de Pont-sur-Sambre et
la-Chapelle  », fréquentée par une élite locale dans l'atelier de Brariatus. Contribution à l'étude de la céramique
le courant du 7e  siècle apr.  J.-C. et avoisinant la bavaisienne, Septentrion, 2, p. 46-64.
chapelle Saint-Lambert fondée au début du 8e siècle, ■■ Habermehl K.-H., 1985. Alterbestimmung bei Wild- und
constitue un nouveau point de repère dans la genèse Pelztieren, Berlin-Hamburg, Verlag Paul Parey.
du développement de Herstal comme place centrale ■■ Henrard D., 2013. Herstal/Herstal  : suivi archéologique
dans le courant du Haut Moyen Âge. et fouilles préventives autour de la chapelle Saint-Lambert,
La tombe de cerf F09 est certainement à mettre en Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 181-185.
relation avec une occupation avoisinante du Haut- ■■ Joris A., 1973. Le palais carolingien d'Herstal, Le Moyen Âge,
Empire, dont la fosse de rejets détritiques F04 consti- 79, p. 385-420.
tue également un faible écho. Cette découverte revêt ■■ Krusch B. (éd.), 1913. Vita Landiberti episcopi Traiectensis
un caractère exceptionnel qui questionne de manière vetustissima. In : Passiones vitaeque sanctorum aevi merovingici,
stimulante nos représentations culturelles du sauvage IV, Hanovre-Leipzig (Monumenta Germaniae Historica, Scrip-
et du domestique. En effet, le cerf est un animal qui torum rerum Merovingicarum, VI), p. 353-384.
200

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

■■ Legoux R., Périn P. & Vallet F., 2006. Chronologie normali- de Huy ; un appel à projets a été diffusé en juin 2013.
sée du mobilier funéraire mérovingien entre Manche et Lorraine, L'IPW a appuyé le propriétaire pour la valorisation
Saint-Germain-en-Laye (Bulletin de liaison de l'Association du bien et accompagne le nouvel acquéreur. L'étude
française d'Archéologie mérovingienne, hors-série). préalable des vestiges archéologiques conservés en
■■ Lepetz S., 2009. La chasse en Gaule romaine. In : Trinquier J. & élévation faisait partie de cette valorisation. Cette
Vendries C. (éd.), Chasses antiques. Pratiques et représentations étude avait pour but d'analyser des structures bâties
dans le monde gréco-romain (iiie  s.  av.-ive  s.  apr.  J.-C.). Actes
anciennes peu modifiées par les transformations des
du colloque international de Rennes, Université Rennes  II,
années 1980-1988 et 1989-2000, afin de conserver un
20-21 septembre 2007, Rennes, p. 139-157.
rapport documentaire sur l'ensemble architectural et
■■ Poplin F., 1996. Les cerfs harnachés de Nogent-sur-Seine et le
de donner des indications à l'auteur de projet chargé
statut du cerf antique, Comptes rendus des séances de l'Académie
de la future restauration du bien. Elle s'appuie sur des
des Inscriptions et Belles-Lettres, 140/1, p. 393-421.
données croisées de dossiers précédents : le mémoire
■■ Putelat O., 2013. Les restes animaux en contexte funéraire
de licence d'A. Orban (1978), des articles concernant
dans l'Alsace du premier Moyen Âge et ses marges géogra-
phiques, Anthropozoologica, 43, p. 409-445.
les fouilles et travaux menés par l'asbl Jeunesse du
Patrimoine architectural/Fondation Roi Baudouin
■■ Renard L., 1901. Découverte d'antiquités romaines à Herstal,
Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, 29, p. 167-232.
(1983-1984), et des renseignements très précieux,
consignés sur le vif par J.-L.  Javaux mandaté par
■■ Renard L., 1904. Découverte d'un cimetière franc à Herstal,
l'administration du patrimoine de la Région wallonne
Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, 34, p. 456.
au moment de la consolidation/restauration des bâti-
■■ Servais J., 1910. Découverte d'un cimetière franc à Herstal,
ments entre 1986 et 1990.
Bulletin de l'Institut archéologique liégeois, 40, p. 35-40.
Le contexte médiéval dans lequel s'insère la Maison
■■ Servais J., 1914. Nouvelles découvertes dans le cimetière
près la Tour est remarquablement bien conservé.
franc de Herstal, Chronique archéologique du Pays de Liège, 9,
p. 25-27.
Située à l'angle de la rue des Frères Mineurs et de la
rue de la Cloche, elle est dominée au nord-est par le
■■ Vigne J.-D., 1993. Domestication ou appropriation pour la
tracé des remparts médiévaux. L'église Saint-Mengold
chasse : histoire d'un choix socioculturel depuis le Néolithique.
L'exemple des cerfs (Cervus). In  : Audoin-Rouzeau  F. & la jouxte à l'ouest et un peu plus loin est établie la
Desse J. (dir.), 1993. Exploitation des animaux sauvages à travers maison Nokin (12e  siècle). Le couvent des Frères
le temps. Actes des rencontres internationales d'archéologie et Mineurs (13e siècle) est situé au nord-est. Au-dessus
d'histoire, XIII, Antibes, 15.10.1992-17.10.1992, Juan-les-Pins, de la rue de la Cloche s'établissait le beffroi, disparu.
p. 202-220. Une cave datée du 12e  siècle a été découverte sous la
terrasse A à la fin des années 1980 (Borremans et al.,
1989).

Huy/Huy : la Maison près la Tour, un îlot Problématique


de maisons médiévales sous un même
toit La reconnaissance de l'aspect médiéval de la Maison
près la Tour est établie depuis la fin du 19e siècle ou
le début du 20e siècle. Les auteurs de cette époque
Virginie Boulez ont surtout pointé la façade tournée vers la rue de
la Cloche, ses grandes baies ogivales et ses fenêtres
Le complexe de bâtiments dénommé « Maison près la à meneaux, témoignant des prémices du gothique
Tour » (parc. cad. : Huy, 1re Div., Sect. B, nos 343h et 342t) civil à Huy (Orban, 1987, p.  53). La mise en valeur
est situé dans le quartier «  Derrière Saint-Mengold  » de cette période a prédominé dans l'étude réalisée
qui se développe à flanc de colline, sur une pente rela- par A.  Orban et a servi de canevas pour les auteurs
tivement escarpée où affleure le poudingue. de projets (P.  Collard et P.  Herman) chargés de
La Maison près la Tour fait partie des biens repris sur la restauration à la fin des années 1980. Mais une
la liste de sauvegarde de l'Institut du Patrimoine wallon approche plus détaillée, amorcée par J.-L. Javaux lors
(IPW). Elle était propriété de la Ville de Huy depuis des travaux de restauration, permet d'entrevoir un
1949, année pendant laquelle l'ensemble architectural complexe antérieur de bâtisses et cours imbriquées
a été classé en tant que monument. Elle est inhabitée les unes dans les autres.
depuis cette époque, mais certains locaux ont été mis à La priorité donnée aux caractéristiques gothiques
disposition pour des artistes en 2010. a conduit les architectes mandatés par la Ville de Huy
La Maison près la Tour et les parcelles adjacentes (1986-1988-1989) –  dont l'objectif de consolider l'en-
(toutes classées) ont été mises en vente par la Ville semble avant qu'il ne tombe en ruine était bien évidem-
201

Toutes périodes Liège

et M.12, et des traces d'arcade intégrée


5m dans le M.13 en témoignent. L'espace est
escaliers (en place ou en ruine) divisé par un refend (F.258). Une porte
zones à ciel ouvert d'accès cintrée (F.7), dont l'encadrement
en tuffeau est toujours visible de l'autre
Terrasse C côté du mur, donnait accès à la Z.2. Le
+7,40 m M.4 conserve une grande arcade cintrée
+ 4,50 m (F.86) qui pourrait être une ancienne
Terrasse B
porte d'accès vers la rue de la Cloche.
Le premier étage a des travées ryth-
Z.10 + 4,30 m mées par des arcades, dont au moins
trois sont conservées. J.-L.  Javaux a
M.1
effectué un sondage sous l'arc F.17, et
M.3

0,0 m M.9Z.1 s'est aperçu que l'arcade était (partielle-


Z.9
- 3,70 m
ment ?) aveugle. Une console en calcaire
M.6 M.16
0,0 m réceptionne les arcs F.15 et F.16.
Z.5
Le deuxième étage est supporté par des
M.10
M.17

Terrasse A Z.2
M.7

- 3,70 m sommiers, deux ancrages sont conservés


Z.4
au-dessus des arcades. Une baie (F.259)
rue de la Cloche

Z.8 M.12
s'ouvrait dans le M.4 à ce niveau.
M.4

F.14
N
Z.6
- 2,80 m - 3,80 m J.-L. Javaux a repéré les limites et évalué
M.13

Z.3
Z.7 la profondeur d'une fosse d'aisance
M.8

M.15
M.14 installée à l'aplomb des M.12 et F.258.
rue des Frère
s Mineurs
Cette structure est toujours intacte et n'a
pas fait l'objet de fouilles.
Huy, Maison près la Tour : découpage des espaces et organisation des terrasses Le développement d'un bâtiment à
sur le plan terrier.
l'angle des rues de la Cloche et des Frères
Mineurs et qui comportait au moins
ment louable  – à oblitérer radicalement deux faces trois niveaux est avéré. Une problématique intéres-
intérieures qui fourmillaient de traces médiévales (M.12, sante vient s'ajouter à ces observations et compliquer
M.1). La lecture des entités originelles est donc fortement l'interprétation  : les arcades et la console, ainsi que
compromise, les propositions de phasage qui suivent les trous de boulins pour supporter un étage, appa-
restent très hypothétiques, surtout en ce qui concerne raissent également sur l'autre face du M.12, exacte-
la période ante 14e  siècle, et induisent la nécessité de ment au même endroit. Ce type de traces n'apparaît
croiser les informations recueillies antérieurement à la sur aucun des murs en élévation conservés au sud de
restauration et aux analyses contemporaines. M.12 et la partie inférieure de ce mur vers Z.2 n'était
La Maison près la Tour se décompose en plan et pas voûtée.
élévation en six volumes différenciés par leurs dimen- Le développement d'une ou plusieurs entités
sions et leurs niveaux de circulations (Z.1, Z.2, Z.3, contemporaines de la STR.5A de part et d'autre du
Z.4, Z.5 et Z.6). La zone ouverte située au nord-ouest M.1, en Z.1 et Z.10, restera une équation à plusieurs
servant aujourd'hui de parking est Z.7. inconnues (STR.3A). Les maçonneries originelles
Les cours ouvertes adjacentes, délimitées par des des M.1 et M.3, constituées de grès, de calcaire et
murets et les jardins en terrasses (A, B et C), sont les de poudingue, ne sont visibles que sur une hauteur
espaces Z.8, Z.9 et Z.10. de 1,20 m. L'amorce d'une retombée de voûte taillée
à même la roche est peut-être la seule trace d'un
Le complexe primitif (12e ?-13e siècle) voûtement primitif dans Z.1 (F.238). En partie
supérieure, la face nord du M.1 a pu être observée
La STR.5A s'établit entre les M.12, M.14 et M.4, avant restauration : plusieurs baies à encadrement
intégrant une partie du M.13. Elle couvre la Z.7 et en tuffeau s'ouvraient à différents niveaux vers un
s'ancre dans le socle rocheux en poudingue. L'intérieur espace intérieur qui se développait au niveau de
de cette bâtisse s'établissait sur au moins trois niveaux. Z.10. La pointe du pignon originel du M.1 conser-
Le rez-de-chaussée était voûté. Des amorces de vait des traces de la structuration originelle de
retombées de voûtes à l'arrière du mur de soutènement l'espace – notamment des conduits de cheminée –
(F.14) (Javaux, 1986) et dans le coin formé par les M.4 dans Z.10.
202

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Huy, Maison près la Tour : le complexe primitif. Développement des STR.5A (plan et élévation) et STR.3A.

Le complexe du 13e siècle : une cour établie à l'aplomb de cette dernière, s'ouvrant sur un
intérieure entre plusieurs bâtiments deuxième niveau. Des trous de boulin marquent plus
haut le troisième niveau. Le M.17 a été très perturbé
Les STR.5B et STR.3B sont reliées par une cour par les phases postérieures, il reste très peu de maçon-
ouverte (STR.2A) qui couvre le périmètre de Z.2. Les nerie intacte. Un trou de boulin conservé dans le coin
murs délimitant cette cour, M.10, M.16 et M.17, sont sud pourrait être lié à cette structuration.
contemporains entre eux. J.-L.  Javaux a pu constater L'hypothèse actuelle est d'envisager un groupe de
l'appui du M.17 contre le M.12 lors du chantier de bâtiments (STR.5B, STR.3B, une structure du côté
restauration. oriental du M.17  ?) s'ouvrant dans une cour inté-
Au niveau du M.16, une porte d'accès (F.232) occupe rieure (STR.2A) séparée de la rue de la Cloche par
le coin occidental de la cour. Une baie (F.108) est une clôture (M.10). Il est possible qu'un système
203

Toutes périodes Liège

Les entités autour de la cour STR.2A (ante 1300).

d'escaliers et de galeries adossés aux M.12 et M.16 cheminée. Des carreaux en terre cuite glaçurée de
permette la circulation entre les entités, mais les 3,5  cm de côté ont été découverts ponctuellement
preuves de ces aménagements n'ont pas (encore) par A. Orban dans la moitié nord de la STR.2B, dont
été découvertes. Si cette hypothèse se confirme, des ils constituaient le revêtement de sol. Des corbeaux
comparaisons pourraient s'établir avec une maison en calcaire soutiennent des lambourdes chanfrei-
rue Briçonnet à Tours ou avec l'îlot de bâtisses situé nées. Celles-ci supportaient à leur tour des solives,
rue de la Vieille à Montpellier (Esquieu & Pesez, datées par dendrochronologie de 1305-1315 par
1998). Cet ensemble de cinq maisons médiévales P.  Hoffsummer (1989, p.  127-131). On accédait à
des 13e-14e siècles est installé au croisement de deux la STR.3C par une porte à encadrement mouluré
rues, les entités bâties sont rassemblées autour d'une en calcaire (F.106). Une petite baie à encadrement
cour centrale de laquelle partent les escaliers permet- simple (F.107) la surmonte, elle permettait de faire
tant d'accéder aux différentes galeries surplombant entrer la lumière dans un espace situé dans la Z.1,
la cour. peut-être une cage d'escalier ?
Le premier étage se présente de la même manière
Un nouveau bâtiment au début du que la pièce au rez-de-chaussée, en plus luxueux.
14e siècle Trois baies ogivales équipées de coussièges s'ouvrent
dans le M.10. Une cheminée est montée à l'aplomb
L'une des principales modifications au début du de celle repérée au rez-de-chaussée. Une deuxième
14e siècle est l'aménagement de la STR.2 (Z.2) en une niche mitrée (F.130) borde la cheminée au nord. Il
entité bâtie avec tous les équipements nécessaires à s'agit d'une armoire murale équipée de planchettes,
l'habitat. Les nouvelles maçonneries qui s'élèvent ou qui a été dégagée en son temps par A.  Orban. Les
les ragréages qui servent à implanter des ouvertures corbeaux qui soutiennent les lambourdes étaient
sont caractérisés par un moellonage relativement moulurés  ; les lambourdes étaient peintes (Javaux,
régulier en grès et poudingue et un mortier où la chaux 1986). Une porte d'accès (F.129) s'ouvre dans le
est prédominante. coin occidental, elle est surmontée d'un petit jour
Le rez-de-chaussée est de plain-pied avec les deux (F.257), à l'instar de la porte du rez-de-chaussée. Une
entités précédentes. Il est éclairé par trois baies à autre porte (F.132) permet d'accéder à une annexe
meneaux s'ouvrant dans le M.10. Une quatrième « fantôme » située à l'arrière du M.17, oblitérée par
baie (F.164) s'ouvre dans le M.16, au même niveau. les annexes du 17e siècle.
Nous n'en avons dégagé que les contours supérieurs La STR.3 (Z.1 et Z.10) est modifiée à cette époque.
et observé que son ébrasement a une largeur iden- Les niveaux de circulation situés au-dessus de la cave
tique à celles s'ouvrant dans le M.10. Une chemi- voûtée sont en décalage par rapport aux niveaux que
née s'établit contre le M.17, les bases en calcaire nous venons de décrire, à l'instar des niveaux obser-
moulurées des deux piédroits sont toujours en vés pour la STR.2 (Z.2). Un système d'escaliers avec
place. Une niche mitrée encadrée par des petits paliers adaptés devait remédier aux différences de
blocs de tuffeau (F.163) est implantée à droite de la dénivellations.
204

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

M.10 (face intérieure) M.10 (face extérieure)

5m M.1
M.3

M.9
STR.3C
M.16 F.106
fantôme
M.17

M.10
annexe

STR.2B
Rue de la Cloche

7 M.12
M.4
M.13

? STR.5C
M.8

M.16

M.14

Rue des Frè res Mineurs

M.12
M.4

élévations du
14e siècle
5m

M.16 (face nord) M.17 (face ouest)

F.257

F.130

M.16
F.129 F.132
M.12

ANNEXE F.107
M.17

FANTÔME
remblais
du 17e siècle

F.164

F.106 F.163
M.10

Le logis aménagé au 14e siècle (STR.2B).

Résumé des principales transformations entièrement réaffecté pour l'usage de table de prêts. Les
de la Maison près la Tour (16e-début du travaux vont radicalement modifier l'aspect intérieur de
20e siècle) la STR.2 (Z.2). La surface d'occupation de l'espace du
premier étage est doublée et permet une correspondance
Aux 15e et 16e  siècles apparaissent pour la première avec les niveaux de circulation de la STR.3 (Z.1 et Z.10)
fois des noms de propriétaires de la Maison près la grâce à de nouveaux planchers. À la fin du 16e-début du
Tour. Hypothéquée en faveur des Grands Malades, 17e siècle, les voûtes de la pièce orientale de l'ancien espace
elle a appartenu à Robert de Gambes, personnage STR.5 (Z.7 et Z.3) sont éliminées et un mur de soutène-
influent à Huy et Liège et décédé au début du 16e siècle ment vient s'appuyer contre la base du M.12 (F.14). Dans
(Orban, 1987). le même temps ou bien peu après cette transformation,
Le bien est acheté en 1566 par Vincent Audace, noble l'annexe délimitée à l'ouest par le M.13 est créée.
d'origine lombarde et prêteur sur gages. Il ne résidera D'importants travaux d'embellissement sont vrai-
jamais dans la Maison près la Tour, le complexe sera semblablement entamés par Nicolas Kinet, maître
205

Toutes périodes Liège

«  massuyer  » des Grands Malades, qui gère le bien à annexes, une nouvelle restauration est en marche.
partir de 1612 suite à la saisie du bâtiment due à un La complexité et la richesse patrimoniale de la
important retard de paiement de la rente. Ses enfants Maison près la Tour se manifestent d'emblée par le
poursuivent le chantier qui s'achève probablement vers haut mur visible depuis la rue des Frères Mineurs, dont
1653, comme l'atteste le chronogramme apposé sur le le parement a été épargné par la restauration de 1988-
linteau de la porte d'entrée dans la cour Z.8. La STR.3 1990, mais ce n'est que la pointe de l'iceberg…
(Z.1) est réaménagée des caves aux combles : les éléva- La période ante 14e siècle se décline en interrogations
tions au-dessus de l'ancienne cave sont entièrement et hypothèses. Les gisements archéologiques les plus
reconstruites. Les nouvelles maçonneries sont montées évidents sont irrémédiablement perdus. Des complé-
en petits moellons de calcaire équarris, à l'appareil ments d'information pourraient néanmoins être four-
régulier. Les travaux sur les bâtisses sont intimement nis par l'analyse des parements de murs servant d'appui
liés aux rehaussements des niveaux extérieurs  : des à l'annexe septentrionale, par les relevés pierre à pierre
cours en Z.8, Z.9 et Z.10 structurent en terrasses les des faces des M.16 et M.17 qui sont à présent dégagés,
dénivellations du terrain et donnent un nouvel accès et par des recherches en archive.
aux annexes adossées au M.17, toujours en place Mise en lumière il y a trente ans par J.-L. Javaux et
aujourd'hui, et à la STR.3, qui ne s'étend plus que sur la A. Orban, la Maison près la Tour est un site exception-
Z.1 à cette époque, depuis l'extérieur. nel, promis à une reconversion respectueuse et rece-
Le puits qui a été découvert dans le coin nord de la lant encore de nombreuses découvertes, auxquelles
cour Z.8 (communication personnelle de M. Dandoy, nous espérons être associés.
2013) appartient vraisemblablement à cette période.
Un état des lieux fait la description du bien en 1750 Bibliographie
(Orban, 1987, p. 60-61). Ce texte est très difficile à inter- ■■ Borremans  R., Dandoy  M., Ernens  L., Sondron  P. &
préter : les bâtisses de la Maison près la Tour sont dans Willems  J., 1989. Une cave du douzième siècle au quartier
un état avancé d'abandon. Il en ressort un patchwork Saint-Mengold à Huy, Vie archéologique, 32, p. 101-128.
d'espaces aux appellations diverses – certains visible- ■■ de Waha F. & M., 1987. L'aspect archéologique des fouilles.
ment inhabités depuis plusieurs années – qui dessine In : Au cœur de Huy. Pour la renaissance d'un patrimoine archi-
en filigrane le morcellement entre différents loca- tectural, Huy, p. 62-63.
taires. Une chose est sûre  : le texte fait état de deux ■■ Esquieu Y. & Pesez J.-M. (dir.), 1998. Cent maisons médié-
portes d'accès à rue. La première donne sur une cour vales en France (du xiie au milieu du xvie siècle) : un corpus et
(Z.8) avec un puits, la seconde donne dans un espace une esquisse, Paris, CNRS (Monographie du CRA, 20).
« souterrain », s'agirait-il de la partie excavée et voûtée ■■ Fondation Roi Baudouin, 1987. La Maison près la Tour.
de la pièce occidentale de la STR.5 (Z.7) ? In : Au cœur de Huy. Pour la renaissance d'un patrimoine archi-
Jean-Michel Laruelle hérite d'un bien en très piteux tectural, Huy, p. 51-52.
état. Il fait abattre la vétuste STR.5 (Z.7) et la trans- ■■ Martiny V.-G., 1987. Les jeunes et la sauvegarde du patri-
forme une cour clôturée. Le M.12 va être pourvu de moine architectural hutois. In : Au cœur de Huy. Pour la renais-
jours, en relation avec la structuration interne de la sance d'un patrimoine architectural, Huy, p. 61-62.
STR.2 (Z.2). Jean-Michel  Laruelle, bourgmestre de ■■ Orban A., 1987. Analyse archéologique et recherches histo-
Huy (1760-1761), réside dans la maison jusqu'à son riques. In : Au cœur de Huy. Pour la renaissance d'un patrimoine
architectural, Huy, p. 53-60.
décès en 1775.
Par la suite, la Maison près la Tour sera vendue
successivement aux familles Hock, Pirotte, Vincent Sources
et Legrand. Une opération de morcellement des ■■ Boulez V. 2014. La Maison près la Tour à Huy. Étude archéo-
espaces, effectuée en une phase ou en plusieurs logique, Institut du Patrimoine wallon, rapport inédit.
étapes, va radicalement modifier l'aspect intérieur de ■■ Hoffsummer  P., 1989. L'évolution des toits à deux versants
la STR.2 (Z.2) et des annexes. Une maisonnette est dans le bassin mosan : l'apport de la dendrochronologie (xie-
appuyée au M.12. Toutes ces pièces s'agglomèrent xixe siècle), 3 vol., thèse de doctorat inédite, Université de Liège.
en espaces locatifs distincts, suivant des circulations ■■ Javaux J.-L., 1986. Maison près la Tour à Huy. Essai de chrono-
adaptées. Le nombre de cheminées va tripler pendant logie, rapport inédit, 3 p. et croquis.
cette période. ■■ Orban A., 1978. La Maison près la Tour à Huy. Un exemple
d'architecture civile urbaine du xiiie siècle. Analyse archéologique.
Perspectives Essai de reconstitution et de datation du bâtiment primitif. Étude
de son évolution, mémoire de licence en Archéologie et Histoire
Le bien a été acquis en 2015 par l'architecte Pascal Dumont de l'Art, Université de Liège, inédit.
qui réaffectera l'ensemble bâti en salle de concert avec
206

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Huy/Huy : rue Sainte-Catherine, le Le niveau du sol ayant monté progressivement d'à


captage de la fontaine le bassinia et sa peu près 1 m sur l'ensemble du terrain au cours des
activités industrielles, un des objectifs de l'interven-
conduite d'adduction installés dans un
tion était de dégager la tourelle d'escalier menant
quartier médiéval extra-muros au puits de captage (ensemble classé en 2013). Nous
espérions repérer d'éventuelles traces d'aménagement
Catherine Péters afin de documenter le projet de mise en valeur du petit
monument dans son nouvel environnement. Il fallait
Du 25 juin au 30 octobre 2015, le Service de l'archéo- aussi connaître la position de la conduite d'adduction
logie de la Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  / toujours active et enfouie dans la parcelle (site archéo-
Département du patrimoine) a mené une fouille de logique classé en 2013) afin de prévoir les mesures
prévention dans une friche industrielle de la vallée du nécessaires à la poursuite de sa fonction.
Hoyoux, dominée par la colline de la Sarte. Ces travaux Ces travaux complètent l'étude archéologique du
ont été réalisés avant la construction de commerces et bassinia entamée en 2009 sur la Grand-Place (Péters,
d'une maison de repos sur une parcelle située entre la 2011). Entre 2010 et 2014, plusieurs études préalables
rue Sainte-Catherine et la ruelle Chantelière, dans le à la restauration des parties métalliques de la fontaine
quartier sud de la ville (parc. cad. : Huy, 1re Div., Sect. A, ont été réalisées, en collaboration avec le groupe de
n 1120 ; coord. Lambert : 211865 est /133690 nord).
o m 
recherche sur les laitons mosans (dont D.  Bougarit,
C'est la première intervention que nous avons pu N. Thomas et F. Urban). En 2013, une seconde fouille
effectuer à l'extérieur des murs de protection érigés lors a été opérée rue des Tanneurs et a permis l'obser-
de l'expansion urbaine de la fin du 13 ou du 14  siècle
e e
vation du chenal d'adduction sur une trentaine de
dans la partie la plus encaissée de la vallée du Hoyoux. mètres (Péters, 2014). En 2014, des recherches ciblées
Selon l'historien André  Joris, une fontaine Sainte- dans les archives de la ville du 15e au 18e siècle ont été
Catherine est mentionnée en 1359 dans cette paroisse réalisées en collaboration avec l'ULB (C. Deligne, unité
citée pour la première fois en 1298. Des maisons s'y de recherche «  Bru-cités. Urbanisation et sociétés  »).
élèvent et un atelier d'émailleur existait peut-être Seuls les résultats provisoires de nos travaux de 2015
au 12e  siècle au sud du terrain exploré (Joris, 1959, sont résumés ici.
p.  172). Au 14   siècle, le quartier est réparti en fiefs
e
Le monument du captage s'est avéré plus complexe
comprenant maisons et courtils, jardins et vignes de que ce que nous en connaissions par le relevé effectué
faibles superficies (Joris, 1959, p. 301). En 1407, selon en 2011 en vue du classement. Pour rappel, un puits
un acte du Conseil connu par une copie du 18  siècle, e
voûté de plan carré (F54), construit en bel appareil de
la famille Poncelet  cède à la ville un puits situé dans calcaire, est accessible par la tourelle d'escalier (F1)
son courtil de Sainte-Catherine en échange d'une qui lui est liée du côté est. Un regard est aménagé dans
prébende. Le but clairement énoncé est de construire, la voûte (F7), fermé par une épaisse dalle de calcaire
clôturer et entretenir le système d'alimentation de la sertie de deux anneaux de fer. Un sol dallé est partiel-
fontaine du marché (Fréson, 1881). lement conservé à ce niveau. D'après la technique de
taille du calcaire, Frans  Doperé situe
la construction de la tourelle dans la
première moitié du 15e siècle, comme le
socle primitif de la fontaine mis au jour
en 2009 sur la Grand-Place. Un deuxième
puits voûté (F52) a été dégagé, il jouxte
le premier au nord-ouest. Il est en grès
et sa maçonnerie est moins soignée.
Un regard (F150) permet d'y accéder et
d'apercevoir le chenal d'adduction qui
passe du premier au second à travers
les parois. Aujourd'hui, ce chenal n'est
plus immergé en permanence dans la
nappe phréatique. Le puits no  2 a pu
être construit assez tôt après le captage
proprement dit, peut-être pour servir
Vue de la tourelle et des puits dégagés en 2015. L'accès à la tourelle d'escalier est de trop-plein en cas de brusque montée
provisoirement condamné et sera pourvu d'une porte ou d'une grille.
des eaux et/ou de chambre de visite. Un
207

Toutes périodes Liège

F53

puits F52
no 3

F54 F55
F150
puits
no 2

F99
F7 F1
tourelle

puits
no 1
F56

F82
ine
er
ux

th
yo

Ca
Ho

sondage 2
e-

F120
int
Sa
e
Ru

sondage 1
Ruelle Chan
telière

captage
0 2m

0 10 m

Plan des structures du captage (relevé et infographie F. Taildeman, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).

troisième puits carré (F53) plus étroit et non voûté Les sondages réalisés autour du petit monu-
est construit dans l'alignement des deux autres ; nous ment ont révélé les vestiges d'un bâtiment médié-
n'avons pu déterminer ni sa datation ni sa fonction. val (F55, F56, F82, F120), sans doute abandonné
Aucune trace d'aménagement du sol n'est conservée avant la construction du puits no 1 et de la tourelle.
au niveau du seuil d'accès à la tourelle et les maçonne- Cette probable habitation se dressait le long de la
ries ont été endommagées à l'arrière de celle-ci, autour ruelle Chantelière longeant le pied de la colline. Le
du puits, notamment par une maison des Temps dégagement de ses fondations a permis de constater
modernes détruite dans la seconde moitié du 19e siècle. que le substrat médiéval, daté par un sol contenant un
Il est impossible de reconstituer l'environnement peu de matériel, est formé d'une épaisse accumulation
immédiat du monument avant le premier rehausse- d'éboulis de bas de pente, graviers et cailloux de grès
ment du sol. schisteux alternant avec de minces dépôts argileux.
208

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

L'inclinaison du terrain et l'instabilité du sous-sol


ont nécessité un ancrage profond des maçonneries
arrière du bâtiment et l'apport de remblais lors de la
construction du puits et de la tourelle d'escalier au
début du 15e siècle.
Une importante transformation du système de b
captage, réalisée au 17e ou au 18e siècle, avait déjà été
repérée en 2011. En effet, suite à la baisse du niveau
de la nappe, un second chenal d'adduction a été
installé 1,50 m plus bas ; son embouchure est visible
à travers l'eau claire du premier puits. Cette opéra- b
tion a nécessité l'approfondissement des deux puits
voûtés par une maçonnerie en brique, de plan carré
et plus étroit. Le relevé de l'intérieur du puits no 2 n'a
pas encore été effectué, mais l'aménagement est bien
visible, pratiqué à l'aplomb du regard ouvert dans la a
voûte. Peut-être simultanément, une autre interven-
tion relevée en 2011 dans le premier puits a consisté b
en l'ajout en sous-œuvre d'un chenal voûté en brique
(F99) à travers la fondation de l'escalier pour amener
de l'eau provenant de la colline. Il s'agit probablement
d'une source, car elle s'écoule même par temps sec.
L'extrados de cette canalisation a été dégagé à l'est de b
la tourelle.
Le départ du tuyau de plomb conduisant l'eau par
gravité jusqu'à la fontaine est immergé en permanence
au fond du premier puits approfondi. On suppose
qu'il est protégé dès sa sortie du système de captage
par un chenal ou caniveau de pierre, comme nous
avons pu l'observer en 2013 rue des Tanneurs. Dans le
sondage 1, sa tranchée d'installation a été découverte b
dans l'axe des puits. Son comblement a subi au moins
un surcreusement à partir d'un sol supérieur à celui de
l'installation, peut-être lorsque le système de captage
a été approfondi. Afin de ne pas les fragiliser, nous
n'avons dégagé ni le chenal ni le tuyau situés dans la
nappe phréatique. Ils se trouveraient 2,50 m à 3 m sous
le sol actuel, selon les sondages pratiqués à la tarière
par Olivier Collette (Direction de l'archéologie). Ceci b
est une observation indirecte et reste évidemment
hypothétique.
Des prélèvements de sédiments dans les couches
accumulées durant le Moyen Âge et aux Temps
modernes ont été effectués dans une des parois du
sondage, à l'extérieur de la tranchée du chenal. Ils
devraient permettre de réaliser une étude des pollens
et macro-restes afin de caractériser, dans la mesure
du possible, l'environnement du site, l'utilisation du 0 5m
terrain et les cultures qui y furent pratiquées, selon les
époques (Mona Court-Picon et Sidonie Preiss, Institut
royal des Sciences naturelles de Belgique). Plan du sondage  2. La tranchée du chenal d'adduction (a)
Dans le sondage  2 réalisé près de la rue Sainte- recoupe les structures d'habitat médiéval où six cellules
Catherine la pose de la conduite (a) a recoupé des semblent se dessiner (b) (relevé et infographie F. Taildeman,
Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
vestiges de maisons médiévales (b). Un élargissement
209

Toutes périodes Liège

localisés dans l'enceinte urbaine. L'ar-


rière des parcelles n'a pas été fouillé, ni
le front des bâtiments ; la poursuite des
opérations dépendra de l'évolution du
chantier de construction et des moyens
disponibles.
Ce quartier proche de l'entrée sud de
la ville a donc été habité pendant environ
deux siècles, aux 12e, 13e et 14e siècles. De
petites constructions, comportant une
pièce de vie unique et parfois une annexe
utilitaire à l'arrière, étaient alignées le
long du chemin bordant un bras du
Hoyoux. Un courtil leur était peut-être
associé. Cette extension de l'habitat
extra-muros à une période économi-
quement florissante alors que l'espace
Vue de la tranchée du chenal d'adduction partiellement vidée (a) entre les intérieur de la ville n'est pas totalement
structures d'habitat médiéval (b), bases de murs et sols, qu'elle a recoupées.
occupé peut en partie s'expliquer par
l'attraction de la rivière, utilisée depuis le
de la fouille et un simple nettoyage ont permis de Haut Moyen Âge pour bien des activités, qu'elles soient
déceler six espaces dessinés par des vestiges de murs domestiques, artisanales ou agricoles. La pratique
parallèles, correspondant peut-être à autant de petits d'activités particulières n'est pas attestée dans l'état
bâtiments alignés sur la voie médiévale qui longeait actuel de l'étude. Espérons que l'examen du matériel
la rivière et menait aux portes de la ville. Par manque et l'analyse des sédiments prélevés nous en disent plus.
de temps, seule la partie la plus menacée de la zone Après la destruction de ces maisons fréquemment
décapée a été fouillée jusqu'au substrat géologique. inondées, la plus grande partie du terrain est restée
Les bâtiments n'ont ni cave ni sol pavé, paraissent non bâtie, certainement livrée à l'agriculture jusqu'au
constitués d'une pièce avec foyer et de ce qui semble début de la période industrielle dans la seconde moitié
être un entrepôt ou une annexe à l'arrière. Les murs du 19e siècle.
très étroits sont construits en bois et torchis, soit sur Concernant le système de captage, la campagne de
une sablière basse, soit sur un simple alignement cette année a privilégié la fouille ; l'examen et le relevé
de pierres, parfois remplacé par un petit soubasse- de l'intérieur des deux premiers puits, ainsi que le déga-
ment maçonné au mortier. Ces solins, consolidés et gement du troisième, devraient être réalisés en 2016,
reconstruits à plusieurs reprises, s'entassent les uns probablement dans le cadre du certificat de patrimoine
sur les autres  ; parallèlement, les sols intérieurs en préalable à sa restauration.
terre battue sont rehaussés, soit par dépôts de limon
de crue, soit par apports volontaires d'argile destinés Bibliographie
à restaurer le sol. Les foyers reconstruits à plusieurs ■■ Fréson J., 1881. La fontaine de la Grande Place à Huy, Annales
reprises sont installés sur une fosse comblée d'argile du Cercle hutois des Sciences et Beaux-Arts, IV, p. 183-186.
et de nombreux tessons de céramique, parfois entou- ■■ Joris A., 1959. La ville de Huy au Moyen Âge. Des origines à la
rée de petites pierres dressées. Les sols d'épaisseur fin du xive siècle, Paris, Les Belles Lettres.
inégale et noircis par le charbon ont fait l'objet de ■■ Péters C., 2011. Huy/Huy : étude archéologique préalable à la
prélèvements pour analyses. Les céramiques situent restauration de la fontaine du marché dite li bassinia, Chronique
l'occupation des petites maisons au 13e  siècle et de l'Archéologie wallonne, 18, p. 156-159.
jusqu'à la fin du siècle suivant, mais la trace d'une ■■ Péters C., 2013. Huy/Huy  : premier relevé à la source
occupation fort arasée située au début du 12e siècle a du bassinia, fontaine médiévale, et petit coup d'œil sur son
été repérée au sommet du substrat géologique. Celui- chenal d'adduction, Chronique de l'Archéologie wallonne, 20,
ci est marqué par le battement de la nappe, constitué p. 164-167.
d'argile délavée, d'horizons formés d'accumulations ■■ Péters C., 2014. Huy/Huy  : fouille de prévention sur le
d'oxydes, et contenant des traces plus ou moins site de la conduite d'adduction du bassinia, rue des Tanneurs,
importantes de travertin apporté par la rivière. Chronique de l'Archéologie wallonne, 22, p. 200-202.
À première vue, ce quartier est assez pauvre si l'on
compare les vestiges découverts ici à ceux des sites
210

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Huy/Huy : suivi des travaux de rénovation Ce quartier de la ville est mal caractérisé pour les
du « Quadrilatère », rue Delloye-Mathieu. périodes anciennes  ; proche du portus et du marché
médiéval (5) il se trouve néanmoins, jusqu'à la fin
Traces d'habitations de la fin du Moyen Âge
du 12e siècle, en dehors de l'espace urbain développé
et des Temps modernes auprès du pôle religieux au confluent de la Meuse et du
Hoyoux. Il est inclus dans la grande enceinte de la ville
Catherine Péters depuis le 13e siècle.
Les données historiques nous renseignent sur l'oc-
En mai et juin 2015, le Service de l'archéologie de la cupation du terrain aux Temps modernes. Créés vers
Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  / Départe- 1615, le couvent des Augustins (1) et l'établissement
ment du patrimoine) a effectué un suivi de chantier des Jésuites (2) se faisaient face de part et d'autre de
avec deux interventions d'un jour lors des terrasse- la rue Rioul, aujourd'hui rue des Augustins (Dubois,
ments réalisés entre les bâtiments de l'ancien Athénée 1910, p.  344). Le premier était orienté vers la Meuse
royal de Huy en cours de transformation (parc. cad. : tandis que les possessions des Jésuites occupaient le
Huy, 1   Div., Sect.  B, n   183 ; coord. Lambert  :
re o s 
bas de la colline et le vaste terrain qui nous concerne,
212000  est/134712  nord). Le «  Quadrilatère  » est alors planté de vignes. L'ordre des Jésuites disparaît
encadré par les rues des Augustins, de la Résistance, en 1773 et les Augustins annexent leurs possessions
Delloye-Mathieu et l'avenue Chapelle. La comparai- qu'ils occuperont jusqu'en 1798 (Dubois, 1910, p. 30).
son avec le plan cadastral primitif de 1823 montre En 1800, la municipalité décide de créer un cimetière
que plusieurs ruelles sinueuses ont été redressées et dans le vignoble du couvent. Il est abandonné en 1834
élargies lors de la construction de nouveaux établisse- (Dubois, 1910, p.  84) mais est toujours indiqué sur
ments scolaires sur la majeure partie de l'îlot à la fin le plan cadastral publié par P.-C. Popp au milieu du
du 19e siècle. 19e siècle.
Une école secondaire est installée dans
les anciens locaux des Jésuites dès 1805.
Ils sont ravagés par un incendie en 1886 et
plusieurs bâtiments scolaires sont recons-
truits sur l'ensemble de ce terrain en forte
pente. Dans la partie haute, le long de l'ac-
tuelle rue de la Résistance, l'Athénée royal
de Huy (4) a occupé jusqu'en 1986 le vaste
complexe concerné par les travaux actuels.
En 1992, le parking public du Quadrila-
tère (3) est installé en contrebas, sur toute
la largeur du terrain, sans fouilles préa-
lables. À cet endroit, le dégagement d'une
« citerne » voûtée en 1986, le ramassage de
matériel du Haut Moyen Âge et la destruc-
tion de pierres tombales en 1992 ont fait
l'objet d'un signalement par les membres
de l'asbl Archéologie hutoise (Dandoy,
Sondron & Willems, 1996-1997).
Dans le projet introduit pour la
demande de permis d'urbanisme en
2013, seules les façades des bâtiments
à rue sont conservées. La configura-
tion des lieux nous fait renoncer à une
opération d'archéologie préventive dans
les cours de l'établissement. D'une part,
une pelleteuse ne peut y accéder avant
Localisation des latrines découvertes sur un extrait du plan cadastral de la ville les démolitions, d'autre part, pour la
(2014). 1. Emplacement du couvent des Augustins vers 1615 ; 2. Emplacement construction des cours, la pente du
des bâtiments des Jésuites vers 1615 ; 3. Parking du Quadrilatère construit en terrain a été nivelée horizontalement
1992 ; 4. Ancien Athénée royal de Huy ; 5. Situation du marché médiéval.
par rapport à la rue la plus haute. Les
211

Toutes périodes Liège

archéologique et d'échantillons du dépôt d'utilisation,


sédiment argileux à forte teneur en matière organique,
ont été effectués pour tenter de dater ces structures,
à l'évidence des latrines dont la dernière utilisation
remonte aux 15e et 16e  siècles, d'après la typologie
des céramiques et verres issus du remplissage. Les
bâtiments qui leur étaient associés devaient se trouver à
l'emplacement de ceux de l'Athénée, le long des rues, et
n'ont pas pu être repérés. Un dépôt médiéval fortement
perturbé a été recoupé par les latrines, il a livré quelques
tessons et petits pavés en céramique des 13e et 14e siècles.
Ce dépôt médiéval repose directement sur un limon
argileux jaune, très dense, qui paraît naturel.
Comme lors de la plupart des suivis de travaux,
nous n'avons pu que ramasser un peu de matériel, sans
effectuer de fouille. Dans le cadre de la réalisation d'un
tel projet d'urbanisation à caractère privé, où l'aspect
économique est prépondérant, il est très difficile de
prévoir et d'imposer un arrêt de chantier pour plani-
fier une opération d'archéologie préventive. En effet,
les terrassements pour les fondations se déroulent dans
la foulée des démolitions dont nous ne connaissons
Vestige de latrines (abandon fin 15e-début 16e siècle) dans le jamais la date réelle d'exécution. Il nous fut impos-
contexte général des travaux.
sible de cerner l'importance de l'occupation médiévale
décelée et de repérer la présence de structures du Haut
traces archéologiques éventuelles se trouvent sous un Moyen Âge qui, comme l'ont écrit nos prédécesseurs
remblai pouvant atteindre plusieurs mètres d'épais- en 1992, sont peut-être toujours présentes sous les
seur et, de ce fait, ne sont peut-être pas totalement nouvelles fondations.
menacées par la construction du nouveau parking.
Dans ces circonstances, nous avons prévu un suivi des Bibliographie
terrassements en équipe restreinte et passé un accord ■■ Dandoy M., Sondron P. & Willems J., 1996-1997. Huy  :
avec le maître de l'ouvrage. observations archéologiques à l'emplacement du couvent des
L'entreprise nous a appelés une première fois lors Augustins, Chronique de l'Archéologie wallonne, 4-5, p. 115-116.
de la découverte de quelques squelettes installés ■■ Dubois R., 1910. Les rues de Huy, Annales du Cercle hutois
dans un dépôt de limon noir hétérogène, mélange de des Sciences et des Beaux-Arts, XVII.
terres de jardin et de déchets de destruction conte-
nant un matériel récent. Ils appartenaient, comme Sources
les fosses ossuaires repérées par la suite, au cimetière ■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
du 19e  siècle, très bouleversé par les constructions plan parcellaire de Huy.
postérieures à son abandon. Après que nous ayons ■■ Plan cadastral primitif de Huy (1823), Sect. B.
renoncé à l'étude de ces sépultures, l'entreprise s'est
accordée avec les autorités communales pour installer
les ossements au cimetière de la Buissière.
Les fosses de sépultures ont entamé deux structures Liège/Liège : conservation préventive et
enfouies d'allure médiévale. Celles-ci sont voûtées,
curative des vestiges de l'Archéoforum
de plan rectangulaire (1,40  m  × 2,20  m et 4,80  m  ×
2,20  m), constituées de maçonneries de petits blocs
et claveaux de grès liés au mortier de sable jaune et de Nancy Verstraelen
chaux. Le sommet de la plus petite des deux a été dégagé
dans la mesure du possible afin de la topographier Depuis plus de dix ans déjà, l'Archéoforum accueille
et la photographier. La position de la plus grande au un public averti et intéressé. Le monitoring, dont
pied de la façade étançonnée et de remblais instables nous avons de nombreuses fois relaté les résultats,
la rendait inaccessible. Les comblements ont été nous aide à comprendre les mécanismes à l'origine
vidés mécaniquement. Des prélèvements de matériel des détériorations visibles et moins visibles sur les
212

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

vestiges. Les installations climatiques figurent parmi interlocuteurs concernés soulignent le manque de
les causes de nombreux dysfonctionnements, mais soutien et de guidance pour les choix qui doivent
pas uniquement. L'impact de la configuration géné- être posés. En ce sens, le SPW peut apporter son aide
rale des lieux est largement sous-estimé et certains et son soutien dans les différents processus décision-
aménagements muséographiques complexifient la nels et l'aboutissement favorable des projets de mise
prise en charge conservatoire de cet important site en valeur. Tout en restant bien conscient qu'il s'agit
archéologique. Le contexte économique actuel ne le plus souvent de trouver un compromis et non une
favorise pas la remédiation des différents problèmes solution unique et définitive en regard de la multi-
rencontrés. De même, la fréquentation ne permet pas tude des paramètres qui doivent être pris en consi-
de justifier les budgets indispensables pour modifier dération.
la climatisation existante et réviser l'isolation de la
dalle, ce qui permettrait d'améliorer l'état des dépôts
sédimentaires qui souffrent d'un assèchement avancé.
Si les altérations sont importantes et ne cessent de Liège/Liège : conservation préventive
s'aggraver, la situation du site s'est quelque peu, toutes et curative des vestiges des anciens
proportions gardées, stabilisée. L'analyse des données bâtiments claustraux de l'abbaye Saint-
et leur mise en corrélation révèlent annuellement et
invariablement les mêmes phénomènes récurrents et
Jacques en 2014 et 2015
une dynamique climatique similaire, puisqu'aucune
modification n'est apportée au fonctionnement de Nancy Verstraelen
la centrale. La plupart des variations sont liées aux
modifications du climat extérieur et aux interven- Le suivi conservatoire des vestiges des bâtiments de
tions d'entretien des installations climatiques, plus la place Émile Dupont instauré depuis 2002 permet
particulièrement l'humidificateur. Pour cette raison, de comprendre le fonctionnement du site au travers
je ne m'attarderai pas plus avant dans la présentation des différentes mesures réalisées par l'intermédiaire
des résultats du monitoring. du monitoring. La mise en corrélation des résul-
Il me semble important à présent de tirer les leçons tats permet d'ajuster les mesures conservatoires
et les enseignements de ce dossier complexe afin que et de guider les choix relatifs aux interventions de
cette situation ne puisse se reproduire ailleurs. maintenance des bâtiments dans le cadre strict de
Le public étant de plus en plus sensible au patri- nos compétences. S'il est un fait bien établi que la
moine et aux valeurs intrinsèques des vestiges du pérennité d'un immeuble nécessite un entretien et
passé peu à peu mis au jour lors de découvertes des travaux réguliers, il apparaît que le suivi réalisé
fortuites ou non, dans les centres urbains anciens ou est à présent devenu insuffisant pour prévenir les
les campagnes notamment, les projets de valorisation dommages. Des interventions de grande enver-
et d'accessibilité suscitent légitimement un grand gure doivent être menées sans délai afin d'assurer la
intérêt. Néanmoins, il importe de bien mesurer les préservation des structures fragiles que le bâtiment
enjeux conservatoires, économiques, sociaux… classé recèle. L'enveloppe architecturale au sens large
avant de s'engager dans cette palpitante aventure. du terme, soit les charpentes, couvertures, structures
Les expériences menées dans d'autres contextes et porteuses, châssis et maçonneries, s'est considérable-
d'autres lieux même très différents, destinés à être ment détériorée ces dernières années au point que
aménagés et rendus accessibles au public, révèlent la gestion préventive du bien est devenue impos-
avec une régularité étonnante les mêmes hésita- sible. Les gouttières et les corniches sont dans un tel
tions, méconnaissances et tâtonnements qui abou- état que des fuites sont continuellement à craindre,
tissent irrémédiablement à des situations difficiles constatation qui vaut également pour les couvertures
ou précaires qui auraient très souvent largement pu de toitures et les fenêtres de toit maintes fois rafis-
être évitées. Faut-il rappeler l'importance des études tolées. La problématique serait moins délicate si les
préalables et de la mise en place d'un groupe de structures porteuses étaient en bon état ; on pourrait
scientifiques pluridisciplinaires autour des théma- dès lors fractionner les interventions en fonction des
tiques phares que sont la climatologie, l'hydrogéolo- budgets annuels disponibles en procédant graduel-
gie, la géologie, la physique, la chimie et la biologie lement au remplacement des châssis, gouttières ou
notamment  ? De la nécessité également de tenir corniches notamment.
compte des résultats et des conclusions des diffé- En 2013, la DGT2 (SPW) procède à la réalisation
rentes études même si ces dernières impliquent des de divers travaux dont le remplacement à l'identique
modifications par rapport au projet initial ? Tous les des corniches et gouttières des façades avant du no 10,
213

Toutes périodes Liège

le démontage du conduit de cheminée du no 9 et son ceux du théâtre, de l'étude du notaire et du salon bleu.
remplacement par un modèle galvanisé, des répara- Ce constat d'état met en avant l'existence de moisis-
tions du revêtement bitumeux de la terrasse ainsi que sures sur certaines portions de la grisaille attribuée à
le masticage et la remise en peinture des façades et des l'école de Lambert Lombard ainsi que sur la plinthe
châssis à rue ; cependant en 2014 et 2015, elle refuse fort heureusement non touchées par les infiltrations
d'intervenir à nouveau vu l'ampleur des travaux qui pluviales. Ces développements (petites taches noires
doivent impérativement être entrepris sur la façade, et grises) résultent des conditions climatiques inap-
côté jardin cette fois. propriées de l'espace combinées à la multitude des
En effet, de nombreuses fuites sont çà et là consta- souches biologiques subsistant dans ce type de bâti-
tées. L'une d'entre elles va largement endommager les ment ancien. En effet, l'hygrométrie y est relative-
peintures murales du 16e siècle conservées au premier ment importante tout au long de l'année tandis que
niveau du no 10. Les structures en bois concomitantes la température est stable mais relativement fraîche.
et les maçonneries seront également atteintes. Ces Cette ambiance est ponctuellement propice aux déve-
infiltrations d'eau génèrent non seulement des efflo- loppements mycologiques.
rescences suite à la cristallisation des sels en surface Ce constat et la mise en évidence de moisissures
lorsque l'eau s'évapore mais également des développe- noires et de champignons sur les structures touchées
ments biologiques problématiques. par les fuites d'eau vont initier une demande pour
Les décors peints touchés par la fuite d'eau ont des analyses complémentaires. Le Service de l'archéo-
été consolidés et traités par Marie-Hélène  Ghisdal logie de la Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  /
afin de stabiliser leur état. À cette occasion et suite Département du patrimoine) sollicite en 2015 l'avis
à l'apparition de nouvelles dégradations dans le d'un mycologue afin de définir la nature des dévelop-
salon bleu notamment, un bilan de l'état de préser- pements et les traitements curatifs ou interventions à
vation de l'ensemble des décors et des propositions envisager pour stopper ces agents altéragènes. D'une
de traitement a également été commandé. Malgré manière générale, l'éradication du développement
les nombreuses campagnes de consolidation déjà biologique requiert simplement la suppression de la
consenties depuis 2002, il apparaît que les altérations cause de ce dernier. La réparation des fuites suffit donc
réapparaissent ponctuellement pour certains décors à stabiliser la situation, un traitement biocide n'est pas
et beaucoup plus sérieusement pour d'autres comme jugé nécessaire.

Détail de l'état de la paroi avant et après les consolidations réalisées sur les panneaux nord du salon bleu (photos M.-H. Ghisdal).
214

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Détail du facing de protection appliqué sur l'ensemble des


panneaux septentrionaux du salon bleu (photo M.-H. Ghisdal).

Ensuite, les différents décors peints et enduits


pour lesquels des altérations sont constatées, seront
consolidés par une équipe de restaurateurs de peintures
murales sous la direction de Marie-Hélène  Ghisdal
(Linda Van Dijck, Hannelore Standaert, Heidi Persoon
et Célia Deroanne) dans le courant de l'année 2015.
Le salon bleu se compose d'une succession de
12  panneaux peints ornés de scènes mythologiques
et de motifs antiques, datés de la fin du 18e siècle. La
conservation des différents panneaux diverge de l'un Détail des altérations visibles sur les encadrements des
à l'autre mais aucune dégradation complémentaire panneaux ouest du salon bleu, avant et après le fixage de la
couche picturale (photos M.-H. Ghisdal).
n'est mise en avant pour les panneaux méridionaux
dont l'état en 2013 était particulièrement préoccu-
pant  : graves soulèvements, écaillages, craquelures, ments des portes mais aussi sur d'autres panneaux, le
lacunes, efflorescences salines... Consolidés puis long d'anciennes fissures antérieurement stabilisées.
stabilisés à l'aide d'un facing de protection appliqué Les décors conservés dans l'étude du notaire sont
avec un adhésif, ces décors ne présentent aucun concernés par deux types d'altération, des agents
dommage supplémentaire. La protection mise en biologiques mentionnés plus haut traités à l'aide d'al-
place contribue grandement à la stabilisation des cool éthylique pur et des problèmes de décohésion
parois après les différentes interventions de consoli- de la couche picturale et de l'enduit mis en avant au
dation. Il est alors décidé, après les différents traite- niveau des plinthes et des décors en stuc essentielle-
ments de surface pour stabiliser les écaillages et les ment.
soulèvements des panneaux méridionaux, orientaux Ces interventions menées à plusieurs reprises
et septentrionaux mais aussi des encadrements, depuis la mise à nu des décors sont interpellantes
d'appliquer un papier de chanvre maintenu avec un et doivent initier une réflexion globale sur l'ave-
adhésif à base de tylose MH300 sur l'ensemble pour nir de ce bâtiment et des structures archéologiques
assurer durablement la préservation des décors avant exceptionnelles qu'il recèle. Stabiliser ou consoli-
l'aménagement du site. Les différentes manipulations der une structure sans neutraliser ni l'origine ni les
(repeints, vernis…), l'hétérogénéité des supports et causes des altérations est certes louable, néanmoins
les conditions d'ambiance inappropriées génèrent force est de constater que c'est généralement peu
des tensions en surface mais aussi en profondeur qu'il rentable et discutable. Un des principes fondamen-
faut impérativement limiter. Comme nos moyens taux de la conservation préventive est de prévenir et
d'action sur les conditions d'ambiance sont inexis- non d'intervenir. Dans un même temps, la maîtrise
tants ou pratiquement, une alternative ou protection de l'ouvrage ne nous appartient pas, elle ne fait pas
durable est envisagée. partie de nos prérogatives, mais il importe pour la
Le petit théâtre figure également parmi les pièces où survie du bien d'éclaircir la situation administrative
des interventions de plus grande ampleur sont néces- et d'entamer les travaux de rénovation et de restaura-
saires notamment sur le mur de scène, les encadre- tion indispensables.
215

Toutes périodes Liège

Sources par son étroitesse (réduite au déambulatoire) mais


■■ Ghisdal M.-H., 2009. Ancienne Abbaye Saint-Jacques à Liège. aussi par ses voûtes élancées en pierre tendre, directe-
Consolidation des décors peints. Rapport de restauration, inédit. ment coiffées d'une charpente.
■■ Ghisdal M.-H., 2016. Ancienne Abbaye Saint-Jacques. Place Au cours du suivi archéologique, mené par le Service
E. Dupont, 9-10 à Liège. Rapport de traitement, inédit. de l'archéologie de la Direction extérieure de Liège  1
(DGO4 / Département du patrimoine), des découvertes
intéressantes ont été réalisées, révélant la richesse et la
complexité de l'évolution de la reconstruction du cloître
Liège/Liège : suivi archéologique dans le dès la fin du Moyen Âge. Dans la précédente Chro-
cloître de la cathédrale Saint-Paul nique (Bolle, 2015), nous avions épinglé les données
marquantes glanées au cours des premiers mois de
chantier. Depuis, notre recherche a été nourrie par les
Caroline Bolle analyses de plusieurs spécialistes mais aussi par les obser-
vations du maître d'œuvre et des artisans chargés de la
En 2014-2015, l'aile orientale et l'articulation sud-est du restauration. Cette approche interdisciplinaire a ainsi
cloître de la cathédrale Saint-Paul ont fait l'objet d'une permis d'affiner les connaissances. Les analyses dendro-
campagne de restauration et de réhabilitation, dirigée chronologiques, confiées à l'Institut royal du Patrimoine
par les architectes Aloys Beguin et Brigitte Massart. Il artistique (Fraiture & Maggi, 2015) complètent celles
s'agissait de la seconde phase d'un projet d'aménage- menées autrefois par le laboratoire de l'ULg (Eeckhout,
ment du musée dans les bâtiments claustraux, classés 2005) et livrent les dates des principales campagnes de
patrimoine exceptionnel de Wallonie. travaux. L'étude de la taille des pierres bleues, réalisée
Tapi au sud de l'église, le cloître est composé de trois avec la collaboration de Frans Doperé, a quant à elle
corps de bâtiment de hauteurs semblables mais de permis d'appréhender l'évolution des techniques de
largeurs distinctes, arrimés à l'extrémité de la nef et taille et des différentes phases de chantiers.
au transept. Les façades, érigées en calcaire de Meuse
finement taillé, présentent des compositions contras- Les découvertes
tées  : la façade occidentale, quasi aveugle, borde la
place Saint-Paul tandis que la façade méridionale, Les vestiges les plus anciens, conservés en élévation,
généreusement ajourée de baies à linteaux parés d'une sont principalement identifiés dans les murs bordant le
accolade, se dresse le long de la ruelle Bonne-Fortune. préau, dans les ailes est et sud. Si on ne tient pas compte des
Ces deux élévations sont percées chacune d'un portail pierres de remplage, reconstruites au début du 20e siècle,
menant au déambulatoire. Malgré leurs largeurs et de plusieurs restaurations ponctuelles relativement
différentes, les ailes est et sud sont assez semblables récentes (19e-20e siècles), il s'agit d'un ensemble homogène
et comportent deux niveaux de vie sous combles. La réalisé en pierres calcaires : le calcaire de Meuse, dense et
galerie orientale, relativement étroite, est composée de gris bleuté, est utilisé en partie basse et dans l'arc des baies
onze travées voûtées de croisées d'ogives tandis que la tandis que le calcaire lorrain, tendre et de teinte ocre, est
galerie méridionale, plus haute et plus large, se déve- choisi pour façonner les parties supérieures, notamment
loppe sur huit travées, couvertes de voûtes en étoiles le départ des arcs et les chapiteaux délicatement sculptés.
et filets. La troisième aile se démarque des deux autres, Les traces d'outils sur la pierre bleue indiquent que

La cathédrale Saint-Paul : l'aile orientale, vue depuis le jardin La galerie de l'aile méridionale, vue depuis son extrémité
du cloître, avant les travaux de 2014. orientale en 2014.
216

Chronique de l’Archéologie wallonne Toutes périodes

également très instructive  : nous consta-


tons sa totale autonomie par rapport à
l'aile méridionale et une morphologie
singulière. En effet, les fermes ne disposent
pas d'entrait au premier niveau et sont
posées sur blochets. Ceux-ci reposent
sur un ensemble de poteaux et liens/
aisseliers accolés aux murs gouttereaux.
Les marques de charpentiers renseignent
une progression de montage du sud vers
le nord, en plusieurs séquences distinctes,
mais les analyses dendrochronologiques
révèlent la contemporanéité des éléments
de cette structure  et précisent la date
d'abattage durant l'automne-hiver 1516-
1517 (Eeckhout, 2005).
Au terme de ces recherches, nous
concluons à une évolution de chantier
d'est en ouest,  en cette fin du Moyen
Âge, ce qui est corroboré par les sources
écrites  : le cloître aurait été recons-
truit dès la fin de la première moitié du
15e  siècle. Daniel de  Blochem, chanoine
Cathédrale Saint-Paul : vue en plan des combles du cloître avec report des et chroniqueur, aurait posé la première
marques et des datations (infographie J.-F. Lemaire, Serv. archéologie, Dir. ext. pierre de l'aile orientale le 6  juin 1445.
Liège 1, sur la base d'un plan fourni par les architectes A. Beguin et B. Massart).
Les travaux auraient progressé vers le sud,
puis vers l'ouest. Sur une des clés de voûte
la broche a été utilisée en face de parement tandis que de cette troisième aile étaient d'ailleurs représentées les
le ciseau a été choisi pour réaliser la fine ciselure péri- armoiries du chanoine Henri de Hemricourt, décédé en
phérique (env. 10  mm). Notons que les traces de cet 1534, tandis que celles du portail occidental permettent
outil ont également été relevées sur plusieurs pierres d'identifier son commanditaire, Corneille de Berghes,
du porche méridional et sur le portail gothique asso- prince-évêque de Liège de 1538-1544 (Forgeur, 1969).
cié. Les caractéristiques particulières de cette taille Dans le courant du 16e siècle, les ailes est et sud font
permettent d'attribuer ces travaux à la fin du Moyen également l'objet de deux importantes campagnes de
Âge (Doperé, 2006). Dans l'aile occidentale, cette taille travaux.
est également observée sur les parements de façades, Dans un premier temps, les voûtes et les murs du
dans la maçonnerie d'allège bordant le jardin ainsi que fond des galeries sont reconstruits  ; l'aile méridio-
sur le parement du fond de la galerie. Sur ce dernier nale est dotée de nouvelles façades, ajourées de baies
sont relevées plusieurs marques en chiffres romains à linteaux en accolade, que l'on peut toujours admi-
(de I à V) renseignant probablement la hauteur des rer en façade sud et déceler en façade nord  : une de
pierres –  le même chiffre étant observé sur les blocs ces fenêtres, à simple jour, est conservée à l'extrémité
d'une même assise. Signalons encore que le millésime occidentale du premier étage ; une seconde, identique,
«  1525  », accompagné de l'inscription «  IXD  »  (?) et est cachée par l'aile orientale, nous y reviendrons. Si le
de la marque « IIIII », est gravé sur une pierre dans la calcaire de Meuse reste largement employé pour façon-
5  travée depuis le sud.
e
ner les faces visibles des élévations, la brique fait son
Au-dessus de l'appui des fenêtres du mur du cloître apparition : elle est choisie pour réaliser les voûtains du
et sur les pilastres inscrits dans le mur du fond de cette déambulatoire et les parements intérieurs. Le tuffeau
galerie occidentale, on assiste à un changement d'outil : remplace quant à lui le calcaire lorrain : une disconti-
le ciseau y est systématiquement et exclusivement utilisé. nuité, dans le choix des matériaux mais aussi dans le
La broche aurait donc été délaissée au profit du ciseau, ce tracé, est perceptible au niveau du départ de plusieurs
qui concorde avec les conclusions de Frans Doperé – à arcs doubleaux, suggérant que le profil de l'arc primitif
savoir qu'à Liège, le ciseau supplante les autres outils dès était peut-être plus élancé.
la fin du 15e siècle-début du 16e siècle (Doperé, 2006). La taille des pierres bleues est quant à elle exclusi-
L'analyse de la charpente surplombant cet ensemble est vement réalisée au ciseau. La typologie des baies à
217

Toutes périodes Liège

avec la qualité d'exécution du reste de la


façade. Nous postulons que cette zone
était destinée à être cachée au moment de
sa mise en œuvre en 1532-1533. À cette
époque, l'extrémité sud de l'aile orien-
tale était donc composée d'une galerie,
surmontée d'une toiture à un versant,
adossée à un volume plus élevé et plus
vaste se développant à l'est. La composi-
tion de l'aile orientale, vue du jardin du
cloître, devait donc apparaître comme un
peu hybride.
C'est peut-être ce constat qui a
poussé les chanoines à entreprendre
une nouvelle campagne de travaux
Portion de la façade de l'aile sud, cachée par l'aile orientale avec mise en évidence du dans cette aile orientale, probablement
négatif de la toiture couvrant autrefois la galerie orientale (photograhie G. Focant, afin d'harmoniser l'ensemble. Si l'on
Dép. patrimoine ; infographie J.-F. Lemaire, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
se fie à la typologie quasi identique des
baies à linteau en accolade de la façade
linteau en accolade permet d'attribuer cette phase à la occidentale rehaussée, ces travaux auraient été réalisés
première moitié du 16e  siècle, ce que ne dément pas au 16e siècle, peu de temps après les précédents. À
la datation dendrochronologique, situant l'abattage moins que d'anciennes baies n'aient été utilisées, plus
du chêne en 1532-1533 (Fraiture & Maggi, 2015). tard, en remploi  ? L'étude de la charpente couvrant
Cette charpente est conçue de manière relativement l'ensemble de l'aile orientale était donc incontournable
autonome  : une liaison minimaliste est assurée avec pour élucider ce point. L'arrimage maladroit de
le comble occidental tandis que l'extrémité orientale cette structure aux combles de l'aile sud confirme sa
est totalement libre  : aucune articulation avec l'aile postériorité  ; l'analyse dendrochronologique livre
orientale n'était donc prévue au niveau des combles. avec précision la date d'abattage des bois : 1553-1554d
Les marques gravées dans le chêne renseignent un (Fraiture & Maggi, 2015). Les marques de charpentiers
montage d'ouest en est. Fait singulier est la logique de indiquent que la charpente de l'aile orientale a été
numérotation par travées et pas par éléments structu- posée du sud vers le nord : la pose de la première ferme,
rels (par fermes), comme c'est généralement le cas : le accolée à l'aile sud, a d'ailleurs nécessité la découpe de
même chiffre est donc relevé sur les faces placées en la corniche en tuffeau couronnant la portion de façade
vis-à-vis de deux fermes distinctes. Notons aussi l'utili- abandonnée ainsi que le cordon-larmier.
sation de symboles, nombreux et variés, pour désigner Ainsi, alors qu'au 15e siècle le cloître est reconstruit
les différentes pièces de charpente. Enfin, deux séries d'est en ouest, on constate une reconstruction dans le
distinctes de marquages reflètent non pas deux phases sens inverse au siècle suivant.
de chantier –  l'ensemble étant contemporain  – mais Au 18e  siècle, les pierres de remplage des fenêtres
bien deux entités distinctes, probablement séparées par du déambulatoire auraient été déposées. Les
une maçonnerie, une cloison… aujourd'hui disparue. transformations marquantes suivantes auront lieu aux
D'autres structures latentes ou masquées ont également 19e et 20e siècles, suite au changement de statut de la
été mises en évidence lors nos recherches : une portion collégiale en cathédrale et, enfin, à la volonté de créer
de l'ancienne façade nord de l'aile méridionale, cachée un musée au sein des bâtiments claustraux.
par l'aile orientale, a ainsi été mise au jour ; le parement Le suivi de ce chantier permet donc d'affiner la
en calcaire de Meuse taillé est ajouré d'une fenêtre à connaissance de ce patrimoine remarquable, trop peu
linteau en accolade d'un seul jour et doté d'un cordon- étudié jusqu'ici. Néanmoins, il est nécessaire de pour-
larmier arasé formant autrefois appui. L'ensemble est suivre les recherches. Le démarrage prochain d'un
couronné d'une corniche en tuffeau, elle aussi ravalée. vaste chantier à la cathédrale Saint-Paul augure de
Sous la fenêtre mise au jour, apparaît le négatif d'une nouvelles découvertes !
toiture à un versant surplombant la galerie orientale du
cloître. Elle formait probablement appentis à un volume Bibliographie
plus élevé se développant à l'est : en effet, à gauche de la ■ Bolle C., 2015. Liège/Liège  : suivi archéologique dans les
baie découverte le parement est réalisé en moellons de ailes orientale et méridionale du cloître de la cathédrale Saint-
grès houiller grossièrement mis en œuvre, contrastant Paul, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 224-225.
218

Chronique de l’Archéologie wallonne Toutes périodes

■ Doperé F., 2006. Apport de l'analyse des techniques de taille


des pierres dans l'étude des chantiers de châteaux médiévaux
mosans : la chronologie de la taille des pierres pour les pierres
calcaires. In  : Mélanges d'archéologie médiévale. Liber amico-
rum en hommage à André Matthys, Les Cahiers de l'Urbanisme,
hors-série, septembre 2006, p. 60-77.
■ Forgeur R., 1969. La construction de la collégiale Saint-
Paul aux temps romans et gothiques, Bulletin de la Commission
royale des Monuments et Sites, 18, p. 155-204.

Sources
■ Eeckhout J., 2005. Analyse dendrochronologique de l'aile
ouest du cloître de la cathédrale Saint-Paul à Liège, laboratoire de «  Vue de la ville de Malmendÿ et son abbaie  », détail du
Dendrochronologie de l'Université de Liège/Centre européen dessin préparatoire de Remacle Le Loup (extrait de Délices,
d'Archéométrie, rapport inédit no 676. 1903, p. 214).

■ Fraiture P. & Maggi C., 2015. Rapport d'analyse dendro-


chronologique : Cloître de la cathédrale Saint‐Paul (Rue Bonne‐ troupes françaises en 1689. La voirie et les jardins
Fortune 6, 4000 Liège), ailes sud et est, Institut royal du Patri- situés devant les maisons de maître bâties au début
moine artistique, rapport inédit P588. du 20e siècle directement en face des édifices religieux
sont également affectés par les travaux.
L'option est prise d'assurer un suivi et non une
évaluation préalable en raison, d'une part, du projet
Malmedy/Malmedy : suivi des travaux de ne portant atteinte au site que de façon limitée et,
la place du Châtelet et de ses abords d'autre part, de la profondeur des vestiges mis au
jour lors des campagnes précédentes (Léotard, 1993 ;
Neuray, 2004  ; Lambotte, 2004). Le site est en effet
Nancy Verstraelen fortement remblayé et nivelé à l'est et a priori au sud.
Les premiers coups de pelle destinés à l'implantation
En avril 2015 débutent les travaux d'aménagements de la nouvelle voirie mettent au jour plusieurs caves
de la place du Châtelet. Le sous-sol de ce site emblé- voûtées maçonnées en pierre reliées par des tunnels
matique classé en 1974 recèle les vestiges des abbayes plus récents. Ces constructions ont été topographiées
qui s'y sont succédé dès la fondation initiale par avant leur comblement pour des raisons de stabilité,
Remacle, moine évangélisateur venu de Solignac vers la nouvelle route prenant appui directement au droit
650, probablement peu avant de fonder l'abbaye de de ces dernières. Leur implantation correspond exac-
Stavelot. Les aménagements concernent le pourtour tement aux deux bâtiments occidentaux mis au jour
de l'abbatiale et l'abbaye du 18e siècle en grande partie sur une carte de la ville de Malmedy levée en 1829
reconstruites après un incendie suite au passage des (Christophe, 1979, p.  8-9). Sur ce document, trois
édifices oblongs sont en effet représentés le long de
la voirie. Ils ont probablement été détruits lors de la
construction de la villa Lang en 1901 et de la villa
Steinsel en 1897 par Jules  Steinbach pour ses deux
filles, mais il semble que leurs caves voûtées aient été
volontairement conservées, complétées par d'autres
et finalement rendues accessibles au départ de ces
deux habitations prestigieuses pour l'époque.
Les zones investiguées devant l'abbaye révèlent la
permanence de nombreuses structures parfois juste
sous le revêtement actuel mais aussi plus profondé-
ment enfouies. Plusieurs maçonneries imposantes
d'époques différentes, légèrement désorientées par
rapport aux bâtiments actuels, sont découvertes. Ces
Détail d'un plan de la ville de Malmedy. Échelle de 1: 5 000, relevés topographiques effectués lors d'un suivi, dans le
dessiné par Felix Dehez, conducteur géomètre, 1829 (extrait cadre strict des tranchées ouvertes pour le placement
de Christophe, 1979, p. 8-9, © Malmedy-Folklore).
d'impétrants, n'autorisent aucune hypothèse. Tout au
219

Toutes périodes Liège

ABBAYE

ABBATIALE

CAVE
CAVE CAVE

Limite des sondages


VILLA STEINSEL VILLA LANG
Restitution hypothétique
Maçonneries mises au jour
0 10 m Pavement

Malmedy : plan des structures mises au jour dans le cadre du suivi (topographie V. Ancion, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).

plus pouvons-nous suggérer que les deux angles de Modave/Vierset-Barse : campagne de


bâtiments qui semblent se dessiner se rapprochent fouille 2015 sur le site du « Rocher du
de la disposition des édifices illustrés sur un dessin Vieux-Château » à Pont-de-Bonne
préparatoire réalisé dans le cadre de la publication
des Délices du Pays de Liège (Délices, 1903, p. 214). La
gravure qui sera finalement publiée en 1743 illustrera Emmanuel Delye, Yorick Lucon,
quant à elle plus vraisemblablement la vision du projet Françoise Bolland, Amandine Schaus
pour le site alors en cours d'aménagement. et Robert Désert

Bibliographie Durant cette année 2015, nos recherches se sont


■ Christophe R., 1979. Malmedy, ses rues, ses lieux-dits portées vers l'extrémité occidentale du site afin de
(1re partie), Folklore Stavelot-Malmedy-St. Vith, XLIII, p. 5-54. vérifier l'architecture d'un court tronçon de rempart
■ Délices, 1743. Les délices du Païs de Liége, ou Description érigé en bordure de versant. Il contrôlait un sentier
géographique, topographique et chorographique des monumens tortueux qui descend de l'éperon vers la rivière située
sacrés et profanes de cet évêché-principauté et de ses limites, tome 70  m plus bas, et dont le tracé est toujours visible
troisième, première partie, Liège, Everard Kints, p. 214-218. actuellement. Le rempart – globalement orienté nord/
■ Délices, 1903. Les délices du pays de Liège. Fac-simile des sud – n'est pas parfaitement rectiligne et présente en
dessins complémentaires et restés inédits de Remacle Le  Loup, son centre une inflexion vers l'ouest qui épouse la
Liège (Société des Bibliophiles liégeois, 5). limite du plateau. Si son extrémité septentrionale est
■ Lambotte B., 2004. Malmedy/Malmedy  : l'espace des située en bordure de falaise, son extrémité méridionale
conventuels de l'abbaye, campagnes de fouilles depuis 2001, est par contre plus difficile à cerner car son tracé se
Chronique de l'Archéologie wallonne, 12, p. 157-160. perd dans une zone relativement dégagée et accessible
■ Léotard J.-M., 1993. Malmedy  : ancienne abbatiale, depuis le sentier. Le rempart présentait un affaissement
Chronique de l'Archéologie wallonne, 1, p. 68. important au niveau de son inflexion, ce qui pouvait
■ Neuray B., 2004, Malmedy/Malmedy : étude archéologique présager l'emplacement d'une porte. C'est donc à cet
du bâti des ailes septentrionale et orientale des conventuels du endroit que nous avons implanté notre nouvelle zone
xviiie siècle de l'abbaye, Chronique de l'Archéologie wallonne, 12, de fouille d'une superficie de 51  m². Sous la couche
p. 155-157.
humifère sont très vite apparus les restes de plusieurs
murs construits au moyen de gros blocs de calcaire liés
au mortier de chaux. L'ensemble de ces murs dessine
220

Chronique de l’Archéologie wallonne Toutes périodes

le plan presque complet d'une poterne associée à des jour une ferme du début du Moyen Âge ainsi qu'un
parements interne et externe. La poterne, dont l'axe est aménagement rural datant de la période moderne
en oblique par rapport aux parements, a connu deux (Goffioul, Fock & Preud'homme, 2001  ; Goffioul &
phases de construction (le doublement des murs du Schartz, 2001). Plus récemment, des éléments en bois
couloir en atteste). La porte a finalement été rebouchée remontant à la fin du 13e siècle ont été mis au jour dans
par un épais mur de pierres calcaires maçonnées à la un paléochenal de la plaine alluviale de la Magne (cf.
chaux. Sa largeur est de 2,35 m pour une profondeur notice supra).
de 4,23  m. Le matériel archéologique associé à cette L'intervention archéologique s'est effectuée en
construction est essentiellement composé de tessons deux phases successives. Dans un premier temps, des
de céramique pré-Andenne, dont certains présentent sondages d'évaluation, espacés de 15 m, ont été réalisés
un décor de peinture rouge ferrugineuse, et de petits en respectant le sens des pentes. Deux concentrations
clous en fer. Les niveaux situés sous ce rempart caro- limitées de vestiges ont été repérées. Dans un second
lingien ont à peine été entamés lors de la fouille, mais temps, l'ampleur restreinte des découvertes ainsi que
la découverte d'une fiche en fer –  similaire dans sa les impératifs liés aux délais d'exécution des travaux
forme et dans sa position à celles retrouvées dans le du lotissement ont engendré la fouille des struc-
murus gallicus composant le barrage oriental du site – tures archéologiques dans la foulée de l'évaluation.
nous permet d'avancer l'hypothèse que cette fortifica- L'ensemble de l'opération a été menée dans le courant
tion carolingienne aurait également été construite sur du mois de septembre 2012 et a duré 7 jours ouvrables.
les vestiges éboulés d'un rempart datant de La Tène Dans le secteur 1, une fosse et deux trous de poteaux
finale, tel qu'il le fut démontré dans la zone 5 (Delye, à semblent s'aligner sur le flanc nord-ouest d'un tronçon
paraître ; Delye & Schaus, 2012). de fossé. Ce dernier, de 1,50 m à 2 m de largeur, s'im-
plante parallèlement à la rupture de pente et suit un axe
Bibliographie nord-est/sud-ouest. Il est conservé sur à peine 0,20 m
■ Delye E. (dir.), à paraître. Les fortifications celtique et de profondeur et accuse un profil en large cuvette. La
carolingienne du Rocher du Vieux-Château à Pont-de-Bonne fosse, de plan ovalaire de 6 m de long sur 3 m de large,
(Modave, Belgique), Bulletin du Cercle archéologique Hesbaye- dessine également une large cuvette de 0,20 m d'épais-
Condroz, XXXII. seur. Les deux trous de poteaux, de plan ovalaire de
■ Delye E. & Schaus A., 2012. La porte du murus gallicus de 0,70 m de long sur 0,50 m de large, s'enfoncent à des
Pont-de-Bonne (Modave, prov. de Liège, Belgique), Lunula.
Archaeologia Protohistorica, XX, p. 179-187. Ru
eH
otto
n

Secteur 2
Olne/Olne : vestiges divers, chemin du
Pré Lilas

Claire Goffioul

Préalablement aux travaux d'aménagement d'un


Lilas

lotissement initié par la société Lotinvest, une inter-


P ré

vention archéologique a été réalisée chemin du Pré


du

Secteur 1
Lilas sur une superficie de 3,9  ha (coord. Lambert  :
in
m

e
Ch
244862 est/145172 nord).
L'emprise concernée occupe le flanc sud-ouest du
plateau abritant le village d'Ayeneux et est traversée
par la tête d'un petit vallon aveugle. Malgré ce relief
relativement accidenté, l'endroit présente un bon
potentiel d'occupation puisque situé majoritairement
en position dominante, jouxtant une voie ancienne et
voisin du village d'Ayeneux, centre ancien reconnu aux 0 50 m
périodes médiévales et modernes. À l'est du village, en
bordure du même plateau, les fouilles menées préala- Olne, chemin du Pré Lilas  : plan général (infographie
F. Giraldo-Martin, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
blement à la construction de la LGV avaient mis au
221

Toutes périodes Liège

profondeurs respectives de 0,20 m et 0,40 m. Sous leur logistique multimodale du Trilogiport. Les études
fond plat, un phénomène annexe de compression de géologique et paléoenvironnementale concomitantes
0,20 m de large situe probablement l'emplacement du aux opérations archéologiques visent notamment à
poteau. L'ensemble de ces vestiges, mal conservés, était mieux appréhender les modalités de développement
comblé par un sédiment homogène gris comportant de l'occupation humaine – du Mésolithique à l'époque
quelques fragments de charbons de bois et de terres mérovingienne – dans ce tronçon de la vallée mosane
brûlées. Ce type de comblement, assez compact, est et à mesurer le degré de conservation des dépôts
généralement attribuable aux périodes anciennes mais archéologiques, dans un environnement soumis à une
aucun matériel archéologique datable n'a été retrouvé activité fluviatile intense (van  der  Sloot et al., 2013  ;
et aucun échantillon de charbon de bois ne s'est révélé 2014).
assez fiable pour une analyse par datation 14C. Menacés par le projet de construction d'immeubles
Le secteur 2 renfermait essentiellement un réseau de à appartements, ces terrains couvrent une superficie
caniveaux modernes reliant les maisons situées plus d'un peu plus de 2,2  ha et jouxtent à l'est et au nord
en amont, rue Hotton, à l'égouttage occupant le fond des parcelles occupées par les infrastructures de la
du vallon vers le sud. Quelques cuvettes de fosses et plateforme portuaire. Dans cette partie du Trilogiport
trous de poteau erratiques, tous datés de la période (zones  15A, 15B et 15C), les vestiges archéologiques
moderne, se dispersent sans ordre apparent. de plusieurs occupations ont été mis en évidence. Les
L'intervention limitée chemin du Pré Lilas vient plus anciens sont attribués au Mésolithique (zone 15B)
alimenter notre connaissance aux abords du centre et à différentes phases du Néolithique (zones  15A,
ancien d'Ayeneux et témoigne aussi de vestiges anté- 15B et 15C). Ces occupations sont matérialisées par
rieurs à la période moderne. des artefacts lithiques et, pour le Néolithique, par des
structures «  en creux  » (van  der  Sloot et al., 2013  ;
Bibliographie
■ Goffioul C., Fock H. & Preud'homme D., 2001. Soumagne/ S2

Ayeneux  : occupation moderne sur le secteur  I, Chronique de S4


158k

l'Archéologie wallonne, 9, p. 132-133. S3

S1

■ Goffioul C. & Schartz É., 2001. Soumagne/Ayeneux : une


Zone 6 156m
ferme médiévale sur le secteur  II, Chronique de l'Archéologie
Rue Préixhe
wallonne, 9, p. 123-124.

Zone 15B 156i

Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau :
aide

495d
observations archéologiques et
La Meuse
Delw
Rue

géologiques effectuées rues Préixhe et Zone 15C

Delwaide, complétant les découvertes


faites au Trilogiport
Zone 15A

Catherine Coquelet, Pierre van der Sloot,


Stéphane Pirson et Paul Spagna

Du 15 au 30 juin 2015, le Service de l'archéologie de


la Direction extérieure de Liège  1 (DGO4  / Dépar- Zone 15E Zone 15D

tement du patrimoine) a entrepris une évaluation


archéologique sur quatre parcelles situées rue Préixhe
et rue Delwaide, en rive gauche de la Meuse (parc.
cad. : Oupeye, 3e Div., Sect. A, nos 156i, 156m, 158k et 0 100 m

495d). Cette opération, menée en collaboration avec


Localisation des parcelles cadastrales explorées en 2015,
la Direction de l'archéologie (DGO4  / Département en marge des découvertes effectuées dans l'emprise du
du patrimoine) et l'Institut royal des Sciences natu- Trilogiport (zones 15A à 15C). Les traits noirs gras continus
relles de Belgique, s'inscrit dans le prolongement et discontinus matérialisent l'emprise approximative de la
des recherches pluridisciplinaires conduites depuis nécropole romaine. Les ronds noirs marquent l'emplacement
des sondages à la tarière manuelle S1 à S4.
2010 à l'occasion de l'aménagement de la plateforme
222

Chronique de l’Archéologie wallonne Toutes périodes

SE NO
S1 S3 S4 S2

0,0 0,0 0,0 0,0


LH LH LH LH

1,0 LS 1,0 1,0 1,0

LLS L + LS L + LS L + LS + LLS

2,0 S 2,0 2,0 2,0


?
A?

3,0 3,0 3,0 3,0

? A A

GMs A
4,0 4,0 4,0 4,0

?
GMs ?
?
5,0 5,0 5,0
GM ?
GMs + GM
GM

Galets Sable argileux Limon sableux Argile Bariolage

Sable Limon Limon argileux Sol de culture Macrorestes végétaux

Transect sud-est/nord-ouest au niveau de la parcelle 158k réalisé sur la base des sondages à la tarière manuelle S1 à S4.

2014). Dans la zone  15B, les vestiges préhistoriques des sondages à la tarière numérotés S1 à S4 recoupe et
sont souvent amalgamés et ont en outre été partiel- documente la berge méridionale de la dépression du
lement remaniés à l'époque romaine, à l'occasion du Préhy, dont la base est marquée par le toit des galets
développement d'une nécropole à caractère rural au et des sables de l'unité GM, attribuée au Weischselien
Haut-Empire (Coquelet & Marchal, 2015). (van  der  Sloot et al., 2014). Étant donné la méthode
Les parcelles 156i, 156m et 495d ont été évaluées par employée (sondages à la tarière manuelle), la descrip-
l'entremise de tranchées de découverture superficielle tion détaillée des lithofaciès et la corrélation avec les
continues. Six sondages profonds y ont également été unités décrites précédemment en sondages profonds
pratiqués à la pelleteuse, permettant de suivre vers l'est présentent des limites. Une particularité de ce secteur
l'extension et la géométrie des unités sédimentaires tient à la présence d'une unité sableuse entre les galets
décrites précédemment (van der Sloot et al., 2014). En de l'unité  GM et l'argile de l'unité  A  ; cette unité est
revanche, l'intervention sur la parcelle 158k s'est limitée interprétée ici comme un faciès sableux sommital de
à dix carottages à la tarière manuelle. Cette opération l'unité  GM (GMs). À ce stade de la recherche, cette
a permis de documenter la géométrie des corps sédi- unité (GMs) n'est différentiable de l'unité  S –  plus
mentaires au nord de la zone 15B, à moindre coût et récente – que lorsqu'elle est observée sous l'argile bleu-
en perturbant le moins possible la structure du terrain tée de l'unité A. Il est cependant possible que du sable
non destiné à la réalisation d'ouvrages souterrains. défini ailleurs comme appartenant à l'unité  S, non
Dans les parcelles 156m, 156i et 495d, la succession recouvert par cette argile (A), soit en réalité également
lithostratigraphique est la suivante (du bas vers le attribuable à l'unité GMs.
haut)  : des galets de Meuse (GM), un peu de sable Sous des limons de débordement attribués à l'Holo-
(S), des limons à lentilles sableuses (LLS), des limons cène et des sédiments limono-sableux attribués au
sableux (LS), des limons (L) et des limons humifères Dryas récent (van  der  Sloot et al., 2014), le comble-
(LH). Le sommet du toit des galets de Meuse (GM) ment de la dépression enregistre la présence d'une
offre une allure irrégulière qui se traduit par la présence argile bleutée  ; cette dernière rappelle l'argile précé-
de creux et de bosses  ; il apparaît à une profondeur demment recoupée plus à l'ouest (van der Sloot et al.,
oscillant entre -1,40 m et -1,85 m. 2014), laquelle surmonte des dépôts très organiques
Dans la parcelle 158k, les profondeurs atteintes attribués au Bølling ou à l'Allerød. Des analyses paly-
–  consécutives au blocage de la tarière  – sont plus nologiques sont prévues pour vérifier ces hypothèses
importantes ; elles sont comprises entre -2,5 m et -3 m chronostratigraphiques.
le long de la rue Préixhe et entre - 4,5 m et -5,5 m vers Du point de vue archéologique, l'évaluation effectuée
le centre et l'ouest de la parcelle. Le transect composé en 2015 s'est révélée négative en ce qui concerne les
223

Toutes périodes Liège

occupations préhistoriques. Les limites orientale de et la partie de la ZAE déjà aménagée en bordure de
l'occupation mésolithique et septentrionale de l'occu- la nouvelle rue de l'Économie (parc. cad.  : 1re  Div.,
pation du Néolithique ancien (de type rubané), respec- Sect. C, nos 51b, 62a, 71, 72g, 72p, 130b, 130c, 131, 132a,
tivement identifiées dans les zones  15B et 15A/15C 133 et 137 ; coord. Lambert : 264522 est/150143 nord).
dans le cadre du projet du Trilogiport, semblent donc L'implantation des tranchées continues était subor-
avoir été atteintes. donnée à la présence de haies et d'arbres marquant
Pour ce qui est des vestiges romains, l'évaluation a l'ancienne subdivision parcellaire, à celle d'une réserve
permis de préciser leur étendue vers l'est, soit vers la de terre arable laissée sur place par le chantier d'amé-
rive actuelle de la Meuse (parcelles 156m et 156i). Six nagement de la ZAE, ainsi qu'à la présence d'une végé-
structures fortement érodées et presque toutes isolées tation dense voire arborescente dépassant 3 m de haut,
les unes des autres peuvent être mises en relation avec qui n'a pu être défrichée complètement. En consé-
la nécropole du Haut-Empire. La première est un foyer quence, seuls 5,5 % de la surface ont pu être examinés.
se signalant par une aire circulaire rougie à même le La plupart des traces anthropiques mises au jour
sol, indurée sur 5 cm de profondeur. Deux épandages correspondent à l'installation des très nombreux
de matériaux rubéfiés et deux fosses peu profondes drains qui parcourent les sols fortement gleyifiés sur
contiennent des nodules d'argile rubéfiée, ainsi que substrat schisto-gréseux. Le versant est aussi parsemé
des fragments et des particules de charbon de bois  ; d'épandages circonscrits de scories coulées, toujours
ces dernières pourraient être interprétées comme des de faible épaisseur et associés à un matériel céramique
fosses à cendres. Enfin, un petit creusement contenant ou verre moderne. Les concentrations apparues le long
un ossement associé à du mobilier céramique frag- du bord occidental de la parcelle no  71 doivent être
mentaire pourrait témoigner d'un dépôt isolé, à l'écart reliées aux amas de scories de réduction observées en
des tombes. 2010 dans la parcelle voisine no 139a ; elles renforcent
l'hypothèse d'un établissement implanté au bout du
Bibliographie chemin figurant sur les cartes dressées à partir du
■■ Coquelet C. & Marchal J.-P., 2015. Oupeye/Hermalle- milieu du 19e siècle.
sous-Argenteau : une nécropole d'époque romaine en bord de Seuls les sondages ouverts à l'extrémité septentrio-
Meuse, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 185-188. nale des parcelles nos 130b et 72p ont livré un sol limo-
■■ van der Sloot P., Court-Picon M., Deforce K., neux relativement épais et bien drainé. Il renfermait
Goffette  Q., Marchal J.-P., Pirson S. & Spagna P., 2014. un vaste remblai qui mêlait aux habituelles scories,
Occupations mésolithiques et néolithiques sur le site du Trilo- faïences et verres modernes aussi des débris de roches
giport, à Hermalle-sous-Argenteau (Oupeye, B). Résultats préli- et de silex d'altération, ainsi qu'une hache polie à tran-
minaires, Notae Praehistoricae, 34, p. 65-95. chant asymétrique attribuée au Néolithique ancien
■■ van der Sloot P., Court-Picon M., Goffette Q. & (Rubané).
Spagna P., 2013. Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau : évaluation
archéologique et étude géologique du lieu-dit « Au Buisson »,
Bibliographie
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 200-204.
■■ Fock H. & Collette O., 2013. Baelen/Baelen et
Welkenraedt/Welkenraedt : ZAE East Belgium Park, Chronique
de l'Archéologie wallonne, 20, p. 170-174.

Welkenraedt/Welkenraedt : nouvelle Sources


évaluation dans la ZAE East Belgium Park ■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-
1879), Province de Liège, Arrondissement de Verviers, Canton
de Limbourg, plan parcellaire de la commune de Baelen-lez-
Heike Fock Limbourg.
■■ Carte du Dépôt de la Guerre et Topographie, 1872.
La campagne d'évaluation conduite en août 2015 ■■ Carte topographique de la Belgique dressée sous la direction de
complète l'intervention réalisée durant l'hiver 2010- P. Vander Maelen, 1850-1854, Eupen, 157.
2011 (Fock & Collette, 2013) et clôt les recherches
archéologiques menées dans le cadre de l'extension
de la zone d'activité économique East Belgium Park
sur le territoire de la commune de Welkenraedt. Le
terrain évalué occupe la partie haute du versant nord
de la vallée du ruisseau de Baelen et le plateau adjacent.
Il s'étend sur 8,094 ha, entre le chemin des Alouettes
Luxembourg

Neufchâteau/Hamipré : fouille d'une sépulture à Namoussart.


225

Hotton

Bovigny
Marche-en-Famenne
Gouvy

Neufchâteau
Hamipré

Léglise

Habay-la-Vieille

Dampicourt
Rouvroy

Carte administrative des communes de la province du Luxembourg visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée

Éditorial
L'activité d'un Service de l'archéologie est extrêmement variable d'une année à l'autre. Ainsi, pour celui du
Luxembourg, au très grand chantier mené dans le uicus gallo-romain d'Arlon en 2013 et 2014 ont succédé les longues
phases de travail post-fouille et plusieurs opérations préventives en milieu rural.
Les sondages liés à l'extension d'une zone d'activité économique ou à la construction d'une exploitation agricole
ont amené leur lot de découvertes remontant à la transition des deux Âges du Fer. Le site funéraire de Gouvy/Bovigny
« Hastape » complète celui qui a été exploré à quelques centaines de mètres de là à Halconreux. Les tombelles pour
certaines déjà fouillées anciennement ont toutefois révélé de nouvelles informations quant aux aménagements de la
nécropole ou aux inhumations comme à Namoussart à Neufchâteau/Hamipré.
Le suivi de terrassement de la nouvelle salle de sport de l'Athénée royal d'Arlon a permis de mieux cerner
l'emprise de la nécropole antique du Hochgericht. Toujours pour l'époque romaine, un important lot de
céramique découvert il y a une cinquantaine d'années à proximité de cette zone funéraire a fait l'objet d'une
étude. L'objectif de cette recherche était de comparer ce matériel avec celui issu des fours de potiers mis au
jour en 2014 (Henrotay, 2015). La structure d'un de ces trois fours a été prélevée pour pouvoir être exposée au
public. Elle est actuellement mise à l'abri dans un local de la Province de Luxembourg. En outre pour l'époque
médiévale et à Marche-en-Famenne cette fois, une brasserie a fait l'objet d'une découverte fortuite déclenchant
ainsi un petit sauvetage. Cette opération complète utilement les informations existantes concernant le couvent
des Carmes établi en les lieux.
226

Chronique de l’Archéologie wallonne

Arlon, rue de la Semois : prélèvement du four de potier datant du 3e siècle de notre ère.

Le milieu associatif est également présent dans le paysage archéologique luxembourgeois. La villa gallo-romaine de
Mageroy à Habay et le château de Montquintin à Rouvroy ont fait l'objet de recherches et travaux durant l'été 2015.
Signalons encore la collaboration de spéléologues amateurs avec notre Service au Trou du Trio à Hotton. Il s'agissait
de vérifier la présence éventuelle de sépultures humaines dans une petite galerie découverte par le Spéléo Club de
Belgique.

Bibliographie
■ Henrotay D., 2015. Arlon/Arlon : découverte d'habitations et de fours de potiers du 3e siècle en bordure de la rue de la Semois,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 248-250.

Denis Henrotay
227

Protohistoire Luxembourg

PROTOHISTOIRE
Gouvy/Bovigny : fouille de la nécropole
celtique à tombelles de « Fosse del
Haye » à Halconreux

Christelle Draily, Sylvain Fetter Trois tertres ont été repérés au moment des sondages.
et Nicolas Meunier Les tertres ont été fouillés en quadrants incomplets suite
aux tranchées ouvertes lors de la phase des sondages. Les
Suite à l'extension de la zone d'activité économique coupes stratigraphiques, réalisées en 2014 lors de l'éva-
Gouvy-Pôle Ardennes Bois par l'intercommunale luation et lors de la fouille en 2015, ont mis en évidence
Idelux à Halconreux, des sondages ont été entrepris une fine couche de maximum 26 à 32  cm d'épaisseur,
fin 2014 (Draily, 2015b) et ont révélé la présence de située sous l'humus, qui pourrait correspondre au sédi-
tombelles inédites au lieu-dit « Fosse del Haye » (parc. ment apporté pour l'édification des tertres.
cad. : Gouvy, 3e Div., Bovigny, Sect. E, no 1760A3). Les La plus grande tombelle (T1) a livré 3 tombes paral-
fouilles ont eu lieu au printemps 2015. lèles orientées nord-ouest/sud-est, toutes creusées
Cette petite nécropole se situe à environ 500  m de dans le sol en place. La tombe la plus à l'est n'a pas pu
celle d'«  Hastape  » (Draily, 2015a  ; 2016  ; Draily & être appréhendée dans son entièreté et n'a rien livré.
Vrielynck, 2012). Toutes deux sont distantes de 500 m La tombe centrale (277 × 113  cm) a livré une céra-
de la nécropole de « Les Cmounes » ou « Chimonti » mique au nord-ouest et, vers le centre, deux fragments
(Cahen-Delhaye, 1974) ; elles appartiennent au groupe ferreux très corrodés et un objet en bois. La troisième
septentrional des tombelles ardennaises tel que défini tombe (240 × 98  cm) a livré un fragment en alliage
par A.  Cahen-Delhaye (1998), situé vers le début du cuivreux au centre et deux vases côte à côte à l'extré-
Second Âge du Fer. mité nord-ouest, une grande céramique carénée et un
Cette nécropole inédite nous permet de compléter les petit récipient. Des petites fosses qui pourraient être
connaissances de l'occupation du territoire à Halconreux. des trous de poteaux semblent entourer l'ensemble
de ces sépultures. Il s'agit de l'unique tombelle du
groupe septentrional à avoir livré 3  tombes. Notons
qu'à « Hastape » la tombelle 27, fouillée en 2009, avait
livré 2 tombes parallèles creusées également dans le
sol en place.
La deuxième tombelle (T2) recouvrait 1 sépulture
de 232 × 103 cm, orientée sud-ouest/nord-est. Aucun
vestige archéologique n'y était conservé. Quelques
petites fosses (trous de poteau ?) ont été mises au jour
au nord-ouest de celle-ci.

Situation sur la carte IGN des sites d'« Hastape », de « Fosse


del Haye  » et «  Chimonti  » ou «  Les Cmounes  » près
d'Halconreux (infographie D.  Bossicard, Serv. archéologie, « Fosse del Haye » : les deux vases de la tombe ouest de la
Dir. ext. Luxembourg). tombelle T1.
228

Chronique de l'Archéologie wallonne Protohistoire

« Fosse del Haye » : plan de la nécropole (infographie S. Leduc et D. Bossicard, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg).

Enfin, la troisième tombelle (T3), très peu visible, tombe est exceptionnelle dans le groupe septentrional.
recouvrait 1 petite fosse à incinération ovalaire d'envi- Deuxièmement, le dépôt de céramiques attribuables à
ron 93 × 60 cm, orientée sud-ouest/nord-est. La tombe la fin du Premier Âge du Fer, aussi bien à « Hastape »
était fortement perturbée par des terriers et contenait qu'à « Fosse del Haye », permet de reculer l'occupation
un vase en morceaux décoré d'incisions et quelques celte du nord de l'Ardenne. Nous aurions donc deux
fragments d'ossements blanchis par le feu. nécropoles situées à moins de 500  m l'une de l'autre
L'attribution chronologique plus précise de ces occupées dès la fin de la période de Hallstatt et, au
sépultures sera confirmée par l'étude des céramiques moins pour l'une, durant le début de la période laté-
après restauration de celles-ci. Cependant, il semble nienne. Enfin, un élément nouveau est apparu pour la
déjà qu'au moins une des céramiques de la nécropole connaissance du groupe septentrional de l'Ardenne,
de «  Fosse del Haye  » (tombelle  T1, tombe ouest) l'existence de plus d'une tombe sous le même tertre
présente des caractéristiques de la période de Hallstatt aussi bien à «  Hastape  » (2  tombes) qu'à «  Fosse del
(Frédéric  Hanut, Direction de l'archéologie, commu- Haye » (3 tombes).
nication personnelle). Cette intervention, comme celle d'« Hastape », nous
Certaines données récoltées à « Hastape » et « Fosse montre à nouveau que ce patrimoine est menacé, les
del Haye  » nuancent donc nos connaissances des tombelles disparaissant du paysage suite à l'activité
usages funéraires celtes en Ardenne. Premièrement, agricole ou au déboisement. Or, seule une petite partie
la présence de deux céramiques dans une même d'entre elles ont été explorées.
229

Protohistoire Luxembourg

Bibliographie devaient se situer. Deux structures, 34 et 35, ont été


■■ Cahen-Delhaye A., 1974. Quatre tombelles à bûcher de découvertes et correspondent très probablement aux
La Tène à Bovigny, Bruxelles (Archaeologia Belgica, 155). tertres 6 et 8 d'E. Rahir (Draily 2015 ; 2016).
■■ Cahen-Delhaye A., 1998. Les rites funéraires laténiens La structure  35 est composée d'une fosse charbon-
en Ardenne belge. In : Leman-Delerive G. (dir.), Les Celtes : neuse assez étendue dont la limite n'était pas visible, seule
rites funéraires en Gaule du Nord entre le vie et le ier siècle avant la présence des charbons permettait d'en circonscrire le
Jésus-Christ. Recherches récentes en Wallonie, Namur (Études et périmètre. Leur densité était plus importante à l'ouest et à
Documents, Fouilles, 4), p. 15-30. l'est. À l'ouest de cette fosse et en partie sous celle-ci, une
■■ Draily C., 2015a. Fouilles en 2015 de trois nécropoles de la fosse ovalaire au contour flou (270 × 140 × 25 cm) était
fin du premier âge du Fer et du début du deuxième âge du Fer creusée plus profondément. L'ensemble de cette struc-
en province de Luxembourg (Gouvy et Neufchâteau), Bulletin ture correspond vraisemblablement à un remaniement
de l'Institut archéologique du Luxembourg, 1-4, p. 20-32.
dû à une fouille ancienne. La partie profonde, ovalaire, ne
■■ Draily C., 2015b. Gouvy/Bovigny : nouvelle nécropole celte semble pas devoir être interprétée comme une sépulture
à Halconreux, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 243. au vu de sa forme et de son profil irréguliers.
■■ Draily C., 2016. Fouilles en 2015 de deux nécropoles de À environ 4 m au sud de cette zone charbonneuse,
la fin du premier âge du Fer et du début du deuxième âge du une petite structure en fosse a été mise au jour, il s'agit
Fer en province de Luxembourg  : «  Hastape  » et «  Fosse del
sans doute d'un foyer. Elle est constituée unique-
Haye  » (Halconreux, Gouvy, Belgique), Lunula. Archaeologia
ment de charbon de bois et de deux pierres d'origine
protohistorica, XXIV, p. 141-147.
locale. Le fond est plat et le sol légèrement rubéfié par
■■ Draily C. & Vrielynck O., 2012. La nécropole celtique
endroits. Au nord, trois  petites fosses qui pourraient
à tombelles de Courtil «  Hastape  » (commune de Gouvy,
prov. de Luxembourg, Belgique)  : fouilles 2009-2010, Lunula.
être des trous de poteau ont été repérées.
Archaeologia protohistorica, XX, p. 137-145. La structure  34 est constituée d'une tombe intacte
associée à une petite fosse au sud-ouest (trou de
poteau ?). La fosse d'inhumation est orientée est/ouest
et plus large à l'ouest qu'à l'est (266 × 100/74 cm). Une
céramique était déposée à l'extrémité ouest. Au milieu
Gouvy/Bovigny : suite et fin de la fouille de la tombe, un petit pot couché était situé à 5 cm d'une
de la nécropole celtique à tombelles lame en fer, courbe et large, probablement une lame de
d'« Hastape » à Courtil rasoir. Deux tessons de céramique ont été découverts
dans le remplissage.
Le tertre 6 d'E. Rahir recouvrait vraisemblablement
Christelle Draily la tombe 34 et le tertre 8, la structure 35. Comme nous
avions déjà pu le constater lors des fouilles de 2009-
La nécropole d'«  Hastape  » était connue grâce au
rapport de 1928 d'E. Rahir repris dans une publication
d'A.  Cahen-Delhaye (1987). Dix-sept tertres avaient
été repérés et représentés sur le croquis d'E. Rahir. En
2009-2010, suite au projet d'établissement de la zone
d'activité économique Gouvy-Pôle Ardennes Bois par
l'intercommunale Idelux, le Service de l'archéologie
de la Direction extérieure du Luxembourg (DGO4  /
Département du patrimoine) a fouillé quatorze tertres
de cette nécropole (Draily & Vrielynck, 2011 ; 2012).
Une des tombelles n'a jamais été retrouvée et les
deux dernières se situaient dans la parcelle adjacente
(Gouvy, 3e  Div., Sect.  E, no  2144M2  ; cadastre 2009)
qui n'a été acquise qu'en 2015 par Idelux. Suite aux
cultures, les tertres de ces deux tombelles avaient
déjà complètement disparu en 2009. Ni le scan 3D
réalisé par Adrien Remacle, ni le Modèle numérique
de Terrain (MNT) de la Wallonie n'ont permis de les Localisation des tombelles d'« Hastape » d'après le schéma
déceler. Nous basant sur le croquis d'E. Rahir, nous d'E. Rahir (1928) et suite aux fouilles du SPW en 2009, 2010
avons donc ouvert à la pelle mécanique, en juin 2015, et 2015 (infographie D. Bossicard, Serv. archéologie, Dir. ext.
Luxembourg).
une zone de 1 340 m2 dans laquelle ces deux tombelles
230

Chronique de l'Archéologie wallonne Protohistoire

Nécropole d'« Hastape », fouilles 2009-2010-2015 (infographie D. Bossicard et S. Leduc, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg).

2010, la numérotation sur le schéma d'E. Rahir ne Ces interventions nous ont à nouveau montré que
concorde pas avec la numérotation de sa description ce patrimoine est menacé  : beaucoup de tombelles
des sépultures. En effet, ce dernier décrit la tombelle 6 repérées autrefois ont été érodées par l'agriculture
comme contenant des fragments de poteries, d'assez ou détruites lors d'aménagements divers et ne sont
gros morceaux de charbons à tous les niveaux et des plus visibles aujourd'hui. Or, seule une petite partie
traces d'ossements incinérés mais très décomposés. Or, d'entre elles ont été explorées. Outre une source de
c'est dans la structure 35 que nous avons mis au jour connaissance scientifique, ce sont des témoins de
des charbons de bois remaniés en quantité impor- notre passé qui disparaissent peu à peu du paysage
tante. Dans la tombelle 8, E. Rahir n'a par contre rien et mériteraient d'être protégés.
trouvé et est donc sans doute une nouvelle fois passé
à côté de la tombe. Or, c'est à l'emplacement probable Bibliographie
du tertre 6 que nous avons retrouvé la tombe intacte ■■ Cahen-Delhaye A., 1983. Contribution à la chronologie des
(structure 34). tombelles ardennaises (Belgique), Helinium, 23, p. 237-256.
Chronologiquement, les céramiques du groupe ■■ Cahen-Delhaye A., 1987. La nécropole celtique à tombelles
nord, dont près de la moitié proviennent du site de Bovigny-Courtil, Bulletin des Musées royaux d'Art et
d'«  Hastape  », couvrent principalement la fin du d'Histoire, 58, 2, p. 37-58.
6e et le 5e  siècle (Cahen-Delhaye, 1983). L'étude ■■ Draily C., 2015. Fouilles en 2015 de trois nécropoles de la fin
par O.  Vrielynck de la céramique découverte en du premier âge du Fer et du début du deuxième âge du Fer en
2009-2010 tend à reculer le début de l'utilisation province de Luxembourg (Gouvy et Neufchâteau), Bulletin de
du cimetière à la fin du Premier Âge du Fer au vu l'Institut archéologique du Luxembourg, 1-4, p. 20-32.
du récipient de la tombelle  20 et des comparai- ■■ Draily C., 2016. Fouilles en 2015 de deux nécropoles de
sons avec l'Hunsrück-Eifel Kultur (Allemagne). la fin du premier âge du Fer et du début du deuxième âge du
En attente de restauration, les récipients en terre Fer en province de Luxembourg  : «  Hastape  » et «  Fosse del
cuite découverts en 2015 ne sont pas encore datés. Haye  » (Halconreux, Gouvy, Belgique), Lunula. Archaeologia
protohistorica, XXIV, p. 141-147.
La lame de rasoir, la première découverte dans les
tombelles ardennaises, pourrait par contre être ■■ Draily C. & Vrielynck O., 2011. Gouvy/Bovigny : nouvelles
fouilles de la nécropole celtique à tombelles, Chronique de
attribuée à la fin du Premier Âge du Fer (à confir-
l'Archéologie wallonne, 18, p. 182-183.
mer après restauration).
231

Protohistoire Luxembourg

■■ Draily C. & Vrielynck O., 2012. La nécropole celtique


à tombelles de Courtil «  Hastape  » (commune de Gouvy,
prov. de Luxembourg, Belgique)  : fouilles 2009-2010, Lunula.
Archaeologia protohistorica, XX, p. 137-145.
■■ Rahir E., 1928. Bovigny. Fouilles de tombelles de l'âge du Fer,
en 1928. In : Vingt-cinq années de recherches, de restaurations et
de reconstitutions, Bruxelles, Musées royaux du Cinquantenaire,
p. 265-266.

Léglise/Léglise : sondages d'évaluation

Christelle Draily, Nicolas Meunier


et Sylvie Leduc

Suite au projet d'aménagement d'une zone d'activité


économique par l'intercommunale Idélux, 11,5 ha ont
été sondés (parc. cad. : Léglise, 1re Div., Sect. D, nos 440b,
437a, 434d, 435b, 413a, 411d, 454b  et 452c et partie des
nos  410b, 447h, 431g  et 431f ). Un seul sondage a livré
un fragment de fond et début de panse de récipient en
céramique commune de l'Âge du Fer (conservé sur une
hauteur d'environ 5 cm). Sa surface interne est noire, la Namoussart  : zones ouvertes et localisation des tombes
(infographie S. Leduc, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg).
surface externe est brun-rouge, éclaboussée. Ce tesson,
trouvé à une profondeur d'environ 85  cm sous le sol
actuel, est isolé et hors contexte ; aucune structure n'a Dans la tombelle 3 avait été mise au jour une tombe à
été repérée malgré l'élargissement du sondage. char. La tombelle 4 avait été ouverte sur près de trois
quarts de sa superficie et sondée dans le dernier quart.
Elle avait livré une tombe féminine avec bijoux dans sa
partie nord-est.
Neufchâteau/Hamipré : tombelles du Étant donné les résultats obtenus lors de la fouille de
Second Âge du Fer sur le site « Au- la nécropole d'« Hastape » (Draily & Vrielynck, 2011 ;
cf. notice supra) également fouillée anciennement, il
Dessus du Fond de Ligne » à Namoussart
était pertinent d'entreprendre de nouvelles fouilles
dans ces tombelles, d'autant plus qu'aucun relevé
Christelle Draily précis n'avait alors été effectué.
Les fouilles de 2015 ont permis de faire les décou-
Suite au projet d'extension d'un poulailler industriel à vertes suivantes (Draily, 2015)  : dans la tombelle 2,
Namoussart (parc. cad. : Neufchâteau, 4e Div., Sect. C, nous avons retrouvé la trace d'une ancienne tranchée
nos  767h4 et 767g4) au lieu-dit «  Au-dessus du Fond de de fouille et de la sépulture féminine publiée antérieu-
Ligne  », en accord avec les propriétaires du terrain, rement, que nous avons ainsi pu localiser exactement
messieurs Huberty père et fils, le Service de l'archéologie et orienter. Dans la tombelle 3, la tranchée de fouille
de la Direction extérieure du Luxembourg (DGO4  / de la tombe à char fouillée anciennement était bien
Département du patrimoine) a entrepris en juillet-août visible. Nous y avons en outre découvert une seconde
2015 la fouille de quatre  tombelles dont trois avaient sépulture à inhumation, creusée dans le sol en place,
été explorées entre 1957 et 1964 (C.A.F., 1960 ; Cahen- orientée sud-ouest/nord-est et contenant des restes de
Delhaye & Geubel, 1976  ; Lefort, 1960). Cette nécro- bois et une boucle en métal.
pole appartient au groupe méridional des tombelles La tombelle 20 n'ayant fait l'objet d'aucune publica-
ardennaises tel que défini par A. Cahen-Delhaye (1998), tion était, pensions-nous, intacte. Cependant, elle n'a
situé vers le début du Second Âge du Fer jusque, parfois, livré aucun vestige, si ce n'est la trace d'une tombe,
le 3e ou même le début du 2e siècle av. J.-C. remplie de sédiment hétérogène humifère. Il semble-
Les tombelles 2, 3 et 4 ont été fouillées en 1958. La rait donc que cette tombelle ait également été explorée
tombelle 2 contenait une tombe féminine avec bijoux. dans le passé.
232

Chronique de l'Archéologie wallonne Protohistoire

Enfin, alors que nous hésitions à ouvrir la tombelle 4


qui avait déjà été fouillée sur trois quarts de sa superfi-
cie en 1958, nous avons décidé d'en explorer une moitié
dont le quatrième quart qui n'avait été que sondé à
l'époque. Une tombe intacte, creusée très profondément
dans le sol en place, a été découverte (350 ×  94  cm,
306 × 42 cm au fond). Il s'agit d'une tombe féminine
contenant un torque torsadé en alliage cuivreux, un ou
deux bracelet(s) torsadé(s) fragmenté(s), une fibule,
un crochet de ceinture, l'émail d'une dent et un dépôt
jaune à la place du corps sur le fond de la fosse.
Cette fouille, comme celle d'« Hastape », nous incite à
prendre en considération les nécropoles anciennement
fouillées qui peuvent encore livrer des informations
inédites. Les différentes fosses d'inhumation explo-
rées par les amateurs ont par ailleurs pu être localisées
dans l'espace et dessinées. Les informations sur l'érec-
tion des tertres sont malheureusement fort lacunaires
cette fois-ci, les travaux antérieurs ne nous ayant pas
permis de reconstituer la position et le volume exacts
des tertres. Les objets archéologiques sont en attente
de restauration.

Bibliographie
■■ C.A.F., 1960. La nécropole celtique de Namoussart, Les cahiers
chestrolais, 1, p. 4-8.
■■ Cahen-Delhaye A., 1998. Les rites funéraires laténiens en
Ardenne belge. In : Leman-Delerive G. (dir.), Les Celtes : rites
funéraires en Gaule du Nord entre le vie et le ier siècle avant Jésus-
Christ. Recherches récentes en Wallonie, Namur (Études et Docu-
ments, Fouilles, 4), p. 15-30.
■■ Cahen-Delhaye A. & Geubel A., 1976. Tombelles de La
Tène à Hamipré, Namoussart, Bruxelles (Archaeologia Belgica,
189).
■■ Draily C., 2015. Fouilles en 2015 de trois nécropoles de la fin
du premier âge du Fer et du début du deuxième âge du Fer en
province de Luxembourg (Gouvy et Neufchâteau), Bulletin de
l'Institut archéologique du Luxembourg, 1-4, p. 20-32.
■■ Draily C. & Vrielynck O., 2011. Gouvy/Bovigny : nouvelles
fouilles de la nécropole celtique à tombelles, Chronique de
l'Archéologie wallonne, 18, p. 182-183.
■■ Lefort M., 1960. La nécropole celtique de Namoussart,
Les cahiers chestrolais, 2, p. 5-8.
233

Époque romaine Luxembourg

ÉPOQUE ROMAINE
Arlon/Arlon : suivi d'un terrassement à
l'emplacement de l'ancien cimetière gallo-
romain du Hochgericht

Denis Henrotay est illustré de quelques photographies et croquis relatifs


aux marques de potier relevées sur les céramiques. Sur
Repéré en 1906 lors de l'exploitation d'une sablière, le une des photographies collée en regard de la tombe 34,
cimetière gallo-romain du Hochgericht a été d'abord on peut identifier un gobelet métallescent du type
exploré par le capitaine Dohet de 1907 à 1909 et Niederbieber  33. Cet objet intact et attribuable sans
ensuite par le capitaine Kinsbergen de 1909 à 1911. aucun doute au 3e  siècle relativise la datation haute et
La collection du premier a été acquise par les Musées la succession généralement admise des trois nécropoles
royaux d'Art et d'Histoire à Bruxelles, celle du second découvertes à Arlon. Le cimetière aurait été utilisé bien
a été léguée au Musée archéologique à Arlon en 1964 plus longtemps que durant le 1er siècle.
(Lefèbvre, 1964). Le matériel contenu dans les tombes En 1924, la nécropole est définitivement détruite lors
à incinération remonte pour les plus anciennes au de l'édification d'une nouvelle École normale devenue
début de notre ère. Certaines auraient été construites au depuis l'Athénée royal d'Arlon. L'ensemble du terrain
moyen de quatre tuiles recouvertes par une cinquième est nivelé par des engins mécaniques. Une soixantaine
formant ainsi un loculus. Les 163  sépultures mises au de céramiques est récupérée par l'Institut archéologique
jour par le capitaine Dohet ne sont pas documentées. grâce à l'action d'un surveillant de chantier. En début
Aucune information n'est disponible concernant le plan d'année 2015, la demande de permis d'urbanisme visant
de la nécropole. Toutefois un petit carnet recense un la construction d'une nouvelle salle de sport dans l'en-
inventaire sommaire des objets découverts dans chaque ceinte de l'école a retenu notre attention. Une surveil-
sépulture de la soixantaine de tombes fouillées par lance des premiers travaux a été demandée puisque des
Kinsbergen. Le document conservé dans les archives de terrassements devaient être réalisés au pied d'un long
l'Institut archéologique du Luxembourg (inv.  03/119) cordon de terre réputé être formé par les déblais évacués
lors de la construction de l'École normale. Quelques
mètres de la butte ont été excavés pratiquant ainsi
une coupe dans celle-ci. Il est rapidement apparu qu'il
ne s'agissait en rien d'un tas de déblais mais bien des
vestiges de l'imposant plateau qui dominait de plusieurs
mètres la rive sud de la Semois. Les couches de sable en
place étaient bien visibles. Cette observation a permis
de comprendre la nature du relief qui ceinture l'école
actuelle. La langue de terre se superpose parfaitement

Superposition du cadastre actuel (2013) sur le cadastre


primitif du 19e  siècle (1846). En gris foncé, les vestiges du
plateau sur lequel était installée la nécropole (infographie Bague clé découverte dans les remblais de nivellement de
D. Bossicard, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg). l'ancien cimetière (photo G. Biordi).
234

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

avec le cadastre primitif délimitant ainsi la zone affectée


à la zone funéraire durant l'Antiquité. La présence de
sépultures épargnées par les anciens travaux est tout à
fait envisageable.
Hormis quelques fragments de céramique, seule la
découverte hors contexte d'une bague clé en alliage
cuivreux est à signaler. Celle-ci est complètement écra-
sée, déformée par les chenilles des anciens engins de
terrassement. Ce type d'objet est en usage durant les 2e
et 3e siècles. Ces quelques débris issus de la nécropole
confirment son utilisation durant tout le Haut-Empire.

Bibliographie
■ Dubois C., 1946. Orolaunum, bibliographie et documents
sur l'Arlon romain, Annales de l'Institut archéologique du
Luxembourg, LXXVII, p. 3-70.
■ Lefèbvre L., 1964. Acquisitions, Bulletin trimestriel de
l'Institut archéologique du Luxembourg, 40, 3-4, p. 71-72.

Sources
■ Cadastre primitif d'Arlon, 1846.

Habay/Habay-la-Vieille : la campagne de
fouilles 2015 à Mageroy Villa de Mageroy : plan de la zone fouillée du bâtiment I.

Jean-François Baltus et Benoît Halbardier du moins pour sa partie fouillée au sud. La pièce 2 (2),
destinée au stockage, pourrait avoir eu la fonction de
Le site de la villa gallo-romaine de Mageroy fait l'ob- grange. De nombreuses pierres de soutien (3) dissémi-
jet de fouilles programmées menées depuis 1984 par nées sur la surface de la pièce ont permis de conclure
l'asbl Arc-Hab (Groupe d'Archéologie de Habay). à la présence d'un plancher (vide ventilé). Deux portes
Ces recherches sont possibles grâce aux soutiens de formant un passage charretier et perçant les murs gout-
la Direction de l'archéologie (DGO4  / Département tereau ouest et de refend (4 et 5), avaient été mises au
du patrimoine), de la Province du Luxembourg, de jour lors de la campagne de 1997. Elles étaient chacune
la commune de Habay et de sponsors privés. Elles délimitées côté sud par un gros bloc de grès calcaire
ont révélé une vaste exploitation agricole occupée du jaune. Côté nord, les pierres étaient manquantes mais
milieu du 1er siècle à la toute fin du 4e siècle de notre leur emplacement était encore bien visible.
ère avec notamment un corps de logis, une cour rési- Le bâtiment a été occupé du milieu du 2e  siècle
dentielle, un bassin, quatre bâtiments annexes et une au milieu du 3e  siècle apr.  J.-C. Les campagnes
enceinte murée sur trois côtés (Zeippen, 2004). 2013 et 2014 avaient mis au jour un bon quart sud
La campagne de fouille 2015 s'est portée sur la suite du bâtiment ainsi que les abords directs (sud, est et
de la fouille du bâtiment annexe I (sud-est de la cour ouest) de celui-ci (Baltus, Halbardier & Casterman,
agricole). 2014 ; Baltus, Casterman & Halbardier, 2014 ; 2015).
Ce bâtiment de 25,6 m (nord/sud) sur 17,2 m (est/ En 2015, c'est une portion de 13 m (nord/sud) sur
ouest), partagé en deux sur sa largeur (pièces 1 et 2), 17 m (est/ouest) au nord des zones fouillées en 2013 et
a fait l'objet de sondages et fouilles limitées à la fin 2014 qui a été investiguée, mettant au jour le bâtiment
des années 1980 et dans les années 1990 (Valentiny, sur les trois quarts de sa surface.
1989  ; Halbardier, 1994  ; Halbardier & Gratia, 1999)
et, dernièrement, de fouilles plus extensives en 2013 et La pièce 1
2014 (Baltus, Halbardier & Casterman, 2014 ; Baltus,
Casterman & Halbardier, 2014 ; 2015). Au printemps 2015, la fouille minutieuse d'un foyer
La pièce 1 (1) avait la fonction d'atelier métallurgique, (Foyer 2 repéré en 2014, 6) a permis de révéler un
235

Époque romaine Luxembourg

Plan général de la villa avec la zone fouillée durant la campagne 2015. En pointillés à l'est : indication des trois zones prospectées au
géo-radar (cf. notice infra), © CRAN – Arc-Hab.
236

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

peut-être une distinction dans les fonctions de chaque


partie. Au nord des portes 4 et 5, où le sol d'argile n'est
pas présent, le niveau de circulation est composé d'un
remblai de limon sableux jaune comblant la différence
de niveau par rapport à la couche d'argile.
Il n'a pas été mis au jour de nouvelle structure,
contrairement aux saisons passées où des fosses et
deux foyers avaient été découverts.

La pièce 2

En 2015, le mur gouttereau oriental a été dégagé  ;


une troisième porte (7), parfaitement alignée avec
Foyer (6) mis au jour dans la pièce 1.
les portes 4 et 5, a ainsi été mise au jour. Un bloc de
grès calcaire jaune, conservé du côté sud cette fois-ci,
matériel céramique conséquent (cruches, pot à provi- marque l'entrée. Ces trois portes étaient encadrées
sion, mortiers, amphore) mais pas de déchets liés à la par de grosses pierres de grès calcaire jaune (trois des
métallurgie hormis quelques battitures. Ces fragments six  pierres sont aujourd'hui manquantes, apparem-
de céramique étaient mêlés aux déchets de tuiles, sans ment récupérées à la fin de l'occupation du bâtiment).
doute dès la création du foyer, le tout se retrouvant clos La découverte de cette troisième porte perçant le mur
par une couche d'argile rubéfiée. L'étude céramique est suggère la structuration de l'espace dans ce bâti-
montre une utilisation de ce foyer durant la première ment. Elle matérialise l'une des entrées principales du
moitié du 3e siècle. Les battitures récoltées démontrent domaine. Disposées toutes les trois dans le même axe,
le rôle de ce foyer dans le processus de transformation ces portes permettaient de traverser le bâtiment de
du fer, sans doute lié à un travail de forge assez léger part en part. La présence de ce passage nous pousse à
(clouterie ?). investiguer plus à l'est pour voir vers quoi il mène.
La fouille de la pièce 1 s'est ensuite poursuivie vers le Le mur gouttereau oriental s'est effondré vers l'inté-
nord. Les niveaux de circulation dans la pièce 1 n'étaient rieur du bâtiment au nord de la porte orientale (7)
recouverts que par une mince couche de terre arable, ainsi que dans le passage charretier, alors qu'il s'est
soit par endroits d'une épaisseur de moins de 0,15 m effondré vers l'extérieur au sud de celle-ci. En certains
entre les niveaux modernes et les couches archéolo- endroits, les moellons de parement (moyen et gros
giques, ce qui a malheureusement facilité les perturba- calibres) ont été découverts sur chant, plantés dans le
tions. Alors que plus au sud, l'effondrement du mur de sol après l'effondrement. Ils surmontent les niveaux de
refend vers l'ouest avait permis de sceller les vestiges, la destruction de la toiture.
fouille a révélé des niveaux moins homogènes. Sous la En dessous de ces éboulis (côté est de la pièce  2)
couche arable, une couche présentant des ardoises (de et sous la terre arable (côté ouest), l'effondrement
trois formats différents : 0,27 m, 0,345 m et 0,39 m de de la toiture du bâtiment, matérialisé par une multi-
côté) et assez bien de matériel a été assimilée à la phase tude d'ardoises, a clos les niveaux de circulation de la
d'abandon/destruction. Sous celle-ci, nous retrouvons
la couche limoneuse brune d'occupation se mêlant
parfois avec la couche supérieure ; au nord du passage
charretier  une couche d'occupation limono-sableuse
jaune-brun de moins de 0,10  m d'épaisseur prenait
place, contenant un matériel assez fragmentaire (en
cours d'étude).
L'observation des sols de cette pièce permet de distin-
guer deux parties distinctes, l'une au nord et l'autre au
sud du passage entre les deux portes (4 et 5). Au sud,
le niveau de sol est constitué d'une argile plastique
déjà observée en 2013 et 2014 et permettant de niveler
la pièce. C'est sur ce sol d'argile qu'ont été retrouvés
les structures et le matériel liés à la métallurgie. Cette
couche argileuse montre une séparation nette entre La zone fouillée du bâtiment I, dans l'axe des portes 4, 5 et 7
(vue vers l'ouest).
la partie sud et la partie nord de la pièce, indiquant
237

Époque romaine Luxembourg

pièce 2. Cette couche dense a livré des ardoises de deux tuiles, argile rubéfiée) d'un foyer lié à la métallurgie
formats (0,27 m et 0,39 m de côté). du fer. Il faut encore déterminer à quelle phase est liée
La couche d'occupation (où prenait donc place un cette activité et en préciser la nature.
plancher) a révélé un abondant matériel céramique et En 2014, un drain orienté sud-est/nord-ouest et
métallique (notamment céramique sigillée et engo- recoupé par la construction du bâtiment I avait été
bée, cruches, céramique commune claire, fragment fouillé au coin sud-est de l'édifice à la jonction avec
d'hipposandale), récolté surtout  dans la partie nord le mur de clôture de la cour agricole. En 2015, son
de la pièce. En effet, la partie sud fouillée lors de la tracé (11) a pu être suivi à l'intérieur de la pièce  2
campagne 2013 avait révélé un matériel très pauvre et du bâtiment  I. Il y bifurque légèrement vers le sud
très fragmentaire. L'étude de la céramique (toujours après 6  m, avant d'atteindre le mur de refend qui
en cours) met en évidence une occupation de la fin du l'interrompt. Des fragments de grès vert mal conser-
2e à la première moitié du 3e siècle. Le niveau de sol de vé révèlent un canal en grès couvert par de grosses
la pièce est composé d'un important remblai limono- dalles de schiste.
sableux compensant la différence naturelle de niveau Au sud-ouest du bâtiment, une étroite tranchée (0,14
dans le bâtiment. à 0,16  m de large) ouverte dans le prolongement du
Le sol présente en deux endroits de petits amas de mur pignon sud a été décelée (12). Elle indiquerait une
fragments de tuiles, assimilables à des foyers (8 et 9). structure appuyée sur le bâtiment ou dans son aligne-
Comme cela avait été constaté en 2013 (Foyers 3 et 4), ment. Deux trous de poteau liés à cette tranchée ont
ceux-ci, simplement posés sur le sol, ne présentent pas également été fouillés. La poursuite de la fouille vers
de traces de combustion et pourraient être liés à une l'ouest nous apportera plus d'informations. L'embran-
phase précoce ou tardive de l'utilisation de la pièce 2 chement de deux drains (13) a également été mis au
(en tout cas non contemporaine du niveau sur plan- jour dans cette zone, compliquant quelque peu les
cher). Le premier (8) est situé à 1 m à l'est du mur de interprétations.
refend et à 2,20  m de la limite de tranchée nord, le Les fouilles de l'année 2016 se porteront sur la fin du
second (9) est coupé par la banquette de limite nord de bâtiment côté nord et ses abords. La fouille exhaustive
tranchée, à 3 m à l'est du mur de refend. permettra la distinction des différentes occupations
Cette fois encore, de nombreux blocs de grès vert et fonctions du bâtiment I. Des prélèvements dans la
(parfois fort dégradés ; 3) disposés sur le sol ont été pièce 2 (macrorestes) nous permettront peut-être de
mis au jour. On en dénombre une quarantaine de plus déterminer ce qui y était stocké.
(dont trois avaient déjà été mis au jour en 1997), ainsi
que quelques moellons de schiste. Comme constaté Bibliographie
en 2013, ils suivent des alignements nord/sud et est/ ■■ Baltus  J.-F., Casterman  F. & Halbardier  B., 2014. Villa
ouest bien que certains aient pu être déplacés ou gallo-romaine de Mageroy : aperçu des campagnes 2012 et 2013,
soient manquants. Nous comptabilisons un total de Signa, 3, p. 5-9.
sept alignements nord/sud et de onze alignements est/ ■■ Baltus J.-F., Casterman F. & Halbardier B., 2015. Habay/
ouest pour la surface actuellement dégagée. Ces blocs Habay-la-Vieille  : la campagne de fouille 2014 à Mageroy,
sont le plus souvent placés à des intervalles de 1,80 m Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 252-255.
à 2  m l'un de l'autre. Moins présents du côté ouest, ■■ Baltus J.-F., Halbardier B. & Casterman F., 2014. Habay/
une multitude de ceux-ci occupe la partie est le long Habay-la-Vieille : deux figurines de divinités dans un bâtiment
du mur gouttereau, suggérant peut-être différentes annexe de la villa de Mageroy, Chronique de l'Archéologie
phases. Dans l'axe des portes, c'est un alignement est/ wallonne, 22, p. 215-217.
ouest de quatre schistes qui est bien visible (10). Placés ■■ Halbardier B. (dir.), 1994. Rapport 1993, ARC-HAB, 28,
chacun à un intervalle de 2,30 m-2,50 m, leur fonction p. 11-12.
reste à déterminer (liée au plancher ?). ■■ Halbardier B. & Gratia H., 1999. Première partie  : le
Une couche sombre, présentant de nombreux frag- rapport 1998. Le bâtiment secondaire 2 (à l'est), ARC-HAB, 34,
ments de charbon de bois et une multitude de scories, p. 2-4, fig. 2-3.
se répandait entre les grès verts le long du mur gout- ■■ Valentiny M., 1989. Avril 89 – Sondage complémentaire
tereau est, au nord de la porte  (7). Cette couche ne dans la terrasse située à l'E. du bâtiment, ARC-HAB, 9, p. 2-3.
semble pas antérieure au niveau de grès verts et ne peut
fonctionner avec le plancher. La surface sous-jacente Sources
était par endroits rubéfiée et les scories nous indiquent ■■ Zeippen L., 2004. La villa gallo-romaine de Mageroy à Habay-
la présence d'une activité métallurgique dans les envi- la-Vieille (Habay) : descriptif de la villa. Études pluridisciplinaires,
rons proches (sans doute dans la partie encore non mémoire de licence, Université catholique de Louvain (UCL),
fouillée). Cette couche s'apparente aux rejets (charbon, Louvain-la-Neuve, 227 p.
238

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

Habay/Habay-la-Vieille : les premières


prospections géoradar à Mageroy

Sébastien Lambot, François Casterman


et Benoît Halbardier

Introduction

Le site de la villa gallo-romaine de Mageroy fait


l'objet de fouilles programmées menées depuis 1984
par l'asbl Arc-Hab (cf. notice supra). Cette dernière
a, depuis de nombreuses années, marqué un intérêt
S. Lambot menant la prospection sur le site de Mageroy.
pour des techniques de prospection faisant interve-
nir de nouvelles technologies. Elle a ainsi collaboré
avec l'asbl Argephy afin de procéder à des analyses de du milieu. Le GPR est utilisé dans une grande gamme
résistivité apparente. Plusieurs campagnes réalisées d'applications, incluant l'ingénierie géotechnique pour,
dans le courant des années 2000 (Fesler, 2001 ; 2007 ; par exemple, détecter des conduites ou inspecter les
2009  ; 2010a  ; 2010b) avaient notamment permis de routes, l'ingénierie agricole, la géologie, l'archéologie,
repérer le bâtiment annexe nord-ouest (bâtiment V) les applications militaires, etc. La majeure partie des
et d'en savoir plus sur le plan du bâtiment nord-est applications GPR consistent en l'imagerie structu-
(bâtiment  II) qui avait déjà été repéré par sondages relle du milieu. Les recherches scientifiques actuelles
à la fin des années 1980. D'autres anomalies ont étendent les possibilités du GPR, en permettant l'esti-
également pu être observées à l'intérieur mais aussi à mation des propriétés physiques du milieu, ce qui
l'extérieur de la cour agricole. est notamment le sujet du Ground Penetrating Radar
Un ancien fouilleur de Mageroy toujours actif au sein Research Centre de l'UCL (http://sites.uclouvain.be/
de l'asbl, Julien Minet, a fait sa thèse de doctorat sur la gprlouvain/), notamment pour cartographier l'humi-
cartographie de l'humidité de surface du sol par géora- dité du sol. À Mageroy, le GPR a été utilisé pour imager
dar (Minet, 2011), sous la supervision du professeur à haute résolution le sol afin de détecter des objets
Sébastien Lambot, à l'Université catholique de Louvain archéologiques au sens large.
(UCL). Sur son conseil, l'asbl Arc-Hab a décidé de faire L'équipement radar qui a été utilisé est le GPR
appel à S. Lambot afin d'appliquer la technique géora- GSSI SIR-20 contrôlé par ordinateur avec un affichage
dar à l'archéologie et, en l'occurrence, au site de Mage- des images en temps réel. Afin d'obtenir une image-
roy. Au mois de mai 2015, nous avons donc procédé rie à haute résolution sur environ 2 m de profondeur,
à une campagne de prospection radar étalée sur deux une antenne radar large bande avec une fréquence
journées (Lambot & Casterman, 2016). Trois zones centrale de 400  MHz a été utilisée. Les profils radar,
contigües ont été prospectées. Celles-ci se trouvent au d'une longueur de 50 m, ont été acquis parallèlement
nord-est du corps de logis, de part et d'autre du mur tous les 25 cm, sur une largeur de 25 m, résultant en
d'enceinte est. Elles englobent également l'emprise du trois  zones  × 100  profils, couvrant une surface totale
bâtiment II (cf. plan notice supra). de 37,5  a. Les profils ont été enregistrés avec une
densité spatiale de 100 scans par mètre. Ce type d'ac-
La technologie géoradar ou Ground quisition permet une imagerie et une analyse 3D des
Penetrating Radar (GPR) : fonctionnement données radar, ce qui est notamment utile pour repé-
et applications rer des structures horizontales et discriminer les objets
locaux (par ex. pierres) d'objets plus étendus (par ex.
Le GPR fonctionne en transmettant des ondes élec- murs, conduites). Les distances le long des profils ont
tromagnétiques dans le sol et en mesurant les échos été mesurées avec précision à l'aide d'un odomètre
produits par les contrastes rencontrés. Ceux-ci peuvent connecté à la roue contrôlant l'acquisition des données
provenir d'interfaces pédologiques ou d'objets. La radar. L'erreur de positionnement horizontal est esti-
profondeur d'imagerie radar dépend de la fréquence mée comme étant inférieure à 50 cm pour les condi-
utilisée : plus la fréquence est basse, plus la profondeur tions de mesures sur le site. La position des profils a été
de pénétration des ondes est grande, mais moins bonne repérée à l'aide de deux rubans posés sur le sol, entre
est la résolution. Le choix de la fréquence est donc un les jalons délimitant les zones (référencement local) et
compromis qui dépend notamment des conditions d'une ficelle tendue entre les extrémités des profils.
239

Époque romaine Luxembourg

Avant visualisation, les données radar ont été Résultats et premières interprétations
traitées afin d'améliorer l'imagerie et de mettre
en évidence les objets potentiels recherchés. En La zone se trouvant complètement à l'extérieur de
effet, le signal a été amplifié avec la profondeur l'enceinte n'a pas révélé d'anomalies et n'est pas reprise
par divergence sphérique et pertes électriques dans les images et commentaires suivants. Les deux
car les ondes radar s'atténuent au fur et à mesure autres zones ont été fusionnées afin d'obtenir une vue
qu'elles s'éloignent de la surface. Ensuite, des filtres intégrée de la partie d'intérêt. Une vidéo surprenante
passe-bande spectraux spatial et temporel ont été a pu être réalisée en faisant défiler chaque coupe dans
appliqués afin d'améliorer le rapport signal sur bruit le plan horizontal, obtenues millimètre par millimètre,
et d'éliminer une série d'artéfacts comme certaines depuis la surface du sol jusqu'à une profondeur de
réflexions internes dans les antennes. Finalement, le 2  m. Cela nous permet ainsi de déterminer à quelle
temps de propagation des ondes, qui est la grandeur profondeur les vestiges se situent. L'entièreté de la
mesurée par le radar, a été converti en profondeur vidéo peut être visualisée sur le site suivant  : http://
en supposant une certaine permittivité du sol. En sites.uclouvain.be/gprlouvain/mageroy.html.
effet, la permittivité du milieu définit la vitesse de À une profondeur de 0,38 m (A), le rectangle formé
propagation des ondes (la vitesse de la lumière dans par les lignes foncées (x  = 32-60, y  = 3-7) constitue
l'air). Finalement, les données radar ont été agrégées en fait la partie avant du bâtiment annexe II. Au nord
en une matrice 3D, ce qui a permis une visualisation de ce bâtiment, on peut apercevoir un petit arc de
des échos par plans horizontaux en fonction de la cercle (x = 28, y = 5). Lors du visionnage de la vidéo,
profondeur estimée. Cette visualisation est particu- on remarque qu'il s'agit en fait d'un cercle quasiment
lièrement adaptée en archéologie, car elle permet de complet. La forme et la taille de cette trace nous font
mettre en évidence des objets structurés spatiale- penser à un four, peut-être de potier. Trois fours à
ment (linéaires, circulaires, etc.), souvent d'origine chaux gallo-romains ont été mis au jour sur le site,
anthropique. mais encore aucun four de ce type. Il s'agit ici d'une
hypothèse et la fouille prochaine nous
permettra de déterminer avec exactitude
la nature et la fonction de ce fait.
À environ 0,64 m de profondeur (B),
on aperçoit au sud plusieurs lignes
foncées se détachant du fond. La ligne
orientée nord/sud (x = 60-100, y = 18)
correspond au mur d'enceinte de la
villa, côté est, et dont le tracé s'arrête à la
jonction avec le bâtiment annexe II. On
observe également un réseau de lignes
en branches au sud-ouest (entre x = 90-
100, y = 12). Il s'agit ici de drains. Une
partie du réseau avait déjà été décou-
verte en 1997 (Halbardier & Gratia,
1998), en aval, et figure sur le plan (cf.
notice supra) à quelques mètres de la
zone prospectée. Les drains repérés ici
sont l'origine de ce réseau. Ils filent vers
le sud-ouest, vers les thermes du corps
de logis de la villa.
Toujours au sud du bâtiment, nous
pouvons observer deux drains qui sortent
de l'image aux points x = 65 et x = 83, se
dirigeant également vers l'ouest et le sud-
ouest. Ils se rejoignent au point x = 62, y =
15 pour ne former qu'un drain qui débute
au niveau du mur d'enceinte, tout proche
Amplitude du signal radar correspondant à une profondeur approximative de du bâtiment annexe. D'autres drains sont
0,38 m (A), 0,64 m (B) et 0,77 m (C) sur la zone étudiée.
peut-être présents dans cette zone.
240

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

Dans la partie supérieure de l'image radar (x = 30, le nord et la Rulles. Aux abords du bâtiment  II, côté
y = 22), juste au coin extérieur nord-est du bâtiment, nord surtout mais aussi à l'est en dehors de l'enceinte,
on observe une tache imposante de forme presque plusieurs anomalies sont apparues sans que l'on puisse
circulaire et d'environ 4 m de diamètre à son extension les identifier avec précision, comme ce fut le cas pour
maximale. La vidéo montre que son sommet apparaît les drains, au sud du bâtiment  II. Ainsi, des fouilles
à environ 0,44 m de profondeur et s'étend au fur et à devront compléter ces prospections pour apporter les
mesure que l'on s'enfonce pour disparaître à environ réponses aux nombreuses interrogations, mais grâce à
0,85  m sous la surface du sol. Dans l'état actuel des la technique géoradar les archéologues savent désor-
connaissances, il est très difficile d'avancer une inter- mais à quel endroit leur attention doit davantage se
prétation, que seule une fouille pourra préciser. porter. Non seulement la prospection géoradar nous
À une profondeur approximative de 0,77  m (C), permet d'affiner nos connaissances et de découvrir
nous pouvons apercevoir clairement le plan du de nouveaux faits mais aussi de déterminer à environ
bâtiment annexe  II. Ses dimensions sont d'environ quelle profondeur les archéologues vont mettre au jour
28 m sur 17 m, il est donc un peu plus long que le bâti- ces vestiges. Cela permettra une meilleure préparation
ment I se trouvant une cinquantaine de mètres plus au et planification des prochaines campagnes de fouilles.
sud et en cours de fouille. Il est divisé principalement L'asbl Arc-Hab tient à remercier vivement Sébas-
en deux parties  : une première pièce à l'avant, plutôt tien Lambot et son assistante, Hélène Maerschalk, de
étroite, ponctuée à chaque extrémité (nord et sud) par même que Julien Minet pour leur travail. Elle entend
une petite pièce carrée ; une seconde pièce à l'arrière, poursuivre la collaboration afin d'élargir les zones
bien plus vaste et occupant le reste de la surface de prospectées et d'élaborer ainsi une large cartographie
la bâtisse. De nombreuses taches ont été observées à souterraine du site de Mageroy. C'est pourquoi une
l'intérieur de ce bâtiment mais il est impossible de les seconde campagne de prospections géoradar sera
identifier avec précision. Il peut simplement s'agir de effectuée au printemps 2016 avec le soutien du fonds
parties de murs effondrés après l'abandon du site à la Robert Beaujean de la Fondation Roi Baudouin.
fin du 4e siècle de notre ère.
Dans le coin nord-ouest de la coupe apparaît une Bibliographie
sorte de vague. La vidéo dévoile que celle-ci se dirige ■■ Fesler R., 2010a. Mesure de la résistivité apparente par la
vers l'est au fur et à mesure que la profondeur augmente. méthode pôle-pôle, ARC-HAB, 40, p. 11-12.
Elle pourrait correspondre à une couche pédologique ■■ Halbardier B. & Gratia H., 1998. Rapport 1997, ARC-
contrastée, peut-être plus riche en argile, qui freine HAB, 32, p. 9-10.
l'infiltration de l'eau et crée donc une nappe perchée ■■ Lambot S. & Casterman F., 2016. Propections géoradar,
temporaire qui produit une réflexion radar significa- une première à Mageroy, ARC-HAB, 45, p. 30-35.
tive. Cette réflexion peut aussi être simplement due à
un changement de texture brusque du sol. Sources
Nous avons présenté ici les principales traces mises ■■ Fesler R., 2001. Habay-la-Vieille. Villa Mageroy. ARGEPHY
en évidence par le radar. D'autres éléments intéressants 2001, rapport inédit, 4 p.
ont été repérés mais l'incertitude à propos de ceux-ci ■■ Fesler R., 2007. Habay-la-Vieille. Villa Mageroy. Tumulus
est trop grande que pour les aborder à ce stade. Nous Dolizy. ARGEPHY 2007, rapport inédit, 10 p.
devrons patienter encore un peu jusqu'à la fouille de ■■ Fesler R., 2009. Habay-la-Vieille. Villa Mageroy. ARGEPHY
cette zone… 2009, rapport inédit, 6 p.
■■ Fesler R., 2010b. Habay-la-Vieille. Villa Mageroy. ARGEPHY
Conclusion 2010, rapport inédit, 5 p.
■■ Minet J., 2011. High-resolution soil moisture mapping by
Les résultats des prospections géoradar menées à a proximal ground penetrating radar: a numerical,  laboratory
Mageroy se sont révélés très intéressants et profitables and field evaluation, Thèse de Doctorat, Université catholique
à plusieurs égards. La situation et les dimensions du de Louvain (UCL), Earth and Life Institute, Faculty of Agro-
bâtiment II et du mur d'enceinte étaient déjà connues nomical, Environmental and Biological Engineering, Louvain-
mais les prospections ont permis, d'une part, d'établir la-Neuve.
un plan bien plus précis des pièces intérieures de ce
bâtiment et, d'autre part, de confirmer que le mur d'en-
ceinte ne se prolonge pas au-delà de l'édifice. De plus,
on ne remarque aucun mur démarrant de l'extrémité
nord du bâtiment et fermant la cour côté nord. La cour
agricole se prolonge peut-être encore davantage vers
241

Temps modernes Luxembourg

TEMPS MODERNES
Marche-en-Famenne/Marche-en-Famenne :
découverte fortuite d'une brasserie dans
le quartier de l'ancien couvent des Carmes

Nicolas Meunier que le bâtiment dit « logis du Supérieur », daté de 1699


par ses ancrages. Une photographie de l'Institut royal
L'opération archéologique menée à Marche-en- du Patrimoine artistique (cliché  M150390) datée du
Famenne par le Service de l'archéologie de la Direction début du 20e siècle et attribuée erronément à la maison
extérieure du Luxembourg (DGO4 / Département du Jadot, toujours visible rue du Commerce, montre la
patrimoine) fait suite à la découverte fortuite de struc- brasserie, dont le style des fenêtres indique un rema-
tures au cours d'une opération de terrassement sur un niement au milieu du 18e siècle. Elle sera démolie dans
terrain privé anciennement bâti (parc. cad. : Marche- les années 1960 (Papeleux, 1980). C'est ce bâtiment qui
en-Famenne, 1re Div., Sect. A, no  403k/2) sis le long du a été découvert lors des recherches.
boulevard du Midi, en contrebas de la levée de terre Les fouilles ont permis de reconnaître les vestiges
interne à l'enceinte urbaine médiévale. L'intervention, d'une construction de plan incomplet relevant de deux
qui s'est déroulée du 24 au 30 mars 2015, a révélé un phases d'aménagement. La première phase est caractéri-
bâtiment faisant partie du couvent des Carmes. sée par un espace rectangulaire (10,80 m × 7,5 m extra-
En 1473, une communauté de Carmes s'installe dans muros), délimité par un mur (F01.007) au parement
la ville de Marche-en-Famenne et édifie un premier irrégulier épais de 0,60  m, orienté nord-ouest/sud-est,
couvent à l'extrême fin du 15e siècle. Suite à l'incendie et constitué de pierres calcaires liées par un mortier à
du quartier et de l'ensemble des bâtiments du couvent base de chaux et contenant des nodules d'argile. Les
en 1615, les Carmes reconstruisent de nouvelles struc- murs sud-est (F01.001  ; 6,5  m) et nord-est (F01.005  ;
tures conventuelles à partir de 1619, ainsi qu'une bras- 10,80  m) présentent une mise en œuvre similaire. Un
serie, signalée sur un plan terrier daté de 1688 (Gob, mur (F01.017), d'une largeur de 0,80 m, localisé contre
1988). Il semble qu'elle soit déjà en activité en 1662, l'angle est du bâtiment et appréhendé sur une longueur
date d'un octroi aux religieux de l'usage d'une fontaine d'un peu plus de 1 m, signale une pièce en façade. Le
pour son fonctionnement (Bourguignon, 1935). Du décapage de la partie sud de la parcelle a montré un
complexe des Carmes, qui comprenait une église, un massif (F01.012) construit en pierres calcaires liées
cloître et plusieurs bâtiments, il ne reste actuellement par un mortier jaune, contre lequel s'accole un mur

Vue de la brasserie au début du 20e siècle (cliché M150390), © KIK-IRPA, Bruxelles.


242

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Marche-en-Famenne : plan de fouille général. Les faits soulignés sont ceux cités dans le texte (infographie S. Leduc et D. Bossicard,
Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg).

(F01.010) d'environ 0,40  m de largeur. Son ampleur lui-même doublé sur sa face externe par un mur de
n'a pas pu être appréhendée dans sa totalité de par la pierres calcaires épais de 1  m (F01.008), liées par un
présence d'un remblai moderne qui le recoupe dans sa mortier jaune à base de chaux. Les vestiges d'un four-
partie méridionale. Deux poutres en réemploi (F01.011) neau de brasserie ont été mis en évidence sur ce niveau
ont été découvertes contre un mur localisé à l'angle de sol, par la présence d'importantes traces de chauffe
sud de la fouille. Leur usage n'a pas été élucidé. (F01.014). Cette structure en forme d'ampoule d'un
Un niveau de sol a été observé à l'intérieur du bâti- diamètre d'au moins 1,50  m, pourvue d'une embou-
ment. Il témoigne d'une phase de réaménagement. Il chure allongée, est recoupée par les fondations du
recouvre en partie le premier mur sud-ouest, qui sera pignon de la maison moderne voisine. À proximité,
243

Temps modernes Luxembourg

Fourneaux de brasserie illustrés dans l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert (1751, pl. II, fig. 2).

un puits de forme circulaire (F01.006), d'un diamètre


de 1  m, a également été découvert. Il est accolé à la
face interne du mur nord-est lors de la seconde étape
d'aménagement. Son comblement, investigué sur une
vingtaine de centimètres, a révélé un matériel récent.
Le mur F01.004 localisé à l'est de la parcelle, accolé
à l'angle sud de la brasserie, constitue une partie de
la façade d'un bâtiment dont la fonction reste incon-
nue, représenté sur le cadastre primitif ainsi que sur le
cliché de l'IRPA.
L'intervention s'est réduite à un dégagement limité
et à un relevé topographique des structures. L'urgence
de l'opération n'a pas permis de mener plus avant les
recherches, mais l'existence d'une cave semble attestée
sous l'espace central. Le matériel céramique recueilli
témoigne d'une occupation depuis la seconde moitié
du 17e siècle jusqu'au 20e siècle.

Bibliographie
■■ Bourguignon H., 1935. Marche-en-Famenne, Annales de
l'Institut archéologique du Luxembourg, LXVI.
■■ Diderot D. & D'Alembert J. (dir.), 1751. Brasserie. In  :
Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts
et des métiers, tome 2, Paris, p.  400-406, pl.  II, fig.  2 (https://
fr.wikisource.org/wiki/L%E2%80%99Encyclop%C3%A9die/1re_
%C3%A9dition/BRASSERIE et http://planches.eu/planche_jpg_
orig.php?nom=BRASSERIE&nr=2, consultés le 3 mars 2016).
■■ Gob A., 1988. Fouilles à la «  Brasserie des Carmes  » à
Marche-en-Famenne. In  : Activités 86 à 87 du S.O.S. Fouilles,
V, p. 257-264.
■■ Papeleux J., 1980. Le couvent des Carmes à Marche-en-
Famenne. In : Marche-en-Famenne, son passé et son avenir. Cata-
logue de l'exposition tenue à Marche, 20 septembre-12  octobre
1980, Bruxelles, p. 87-89.

Sources
■■ Cadastre primitif, Marche-en-Famenne, 1841, 1re  Div.,
Marche-en-Famenne, Sect. A, parc. no 403.
244

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

TOUTES PÉRIODES
Hotton/Hotton : sondages au Trou du
Trio

Christelle Draily, Michel Toussaint, Dans les déblais de l'excavation ont été ramassés


Grégory Abrams, Daniel Vanden Bosch, quelques ossements dont un fragment a été identifié
André Vanden Bosch, Kevin Brams comme provenant d'une fibula humaine (identifica-
et Emmanuel François tion M.T.). Le Spéléo Club (D.V.B. et A.V.B) a alors
collaboré activement avec le Service de l'archéologie
Le Trou du Trio est situé sur une propriété communale lors du tamisage des déblais et des sondages réalisés
de Jalhay et dans une zone Natura  2000 (parc. cad.  : dans un petit conduit latéral de la grotte ainsi que sur la
Hotton, 1re  Div., Sect.  B, no  1306A  ; coord. Lambert  : terrasse située devant la cavité. Aucun autre ossement
229057  est/107391  nord). Le 15  août 2014, trois humain ni objet archéologique n'a été mis au jour.
membres du Spéléo Club de Belgique (dont D.V.B et De nombreux ossements animaux ont par contre été
A.V.B.) y ont entrepris des travaux d'excavation. Le découverts et identifiés (G.A.). L'assemblage est domi-
Département de la Nature et des Forêts de la DGO3 né par les léporidés, principalement du lapin (Orycto-
(représenté par K.B. et E.F.) est intervenu pour régu- lagus ciniculus) mais aussi quelques restes de lièvres
lariser ces recherches et a contacté le Service de (Lepus sp.). Dans les déblais provenant de la grotte ont
l'archéologie de la Direction extérieure du Luxembourg été identifiés des restes de blaireaux (Meles meles), de
(DGO4 / Département du patrimoine). Le Spéléo Club batraciens et d'oiseaux ainsi que des restes de caprinés
de Belgique a alors reçu l'autorisation de la commune (Ovis aries/Capra hircus). Sur la terrasse, quelques
de Jalhay de poursuivre ses travaux, avec l'accord et restes de chat (Felis catus), de caprinés (Ovis aries/
sous la surveillance du Service de l'archéologie et du Capra hircus) et un reste de ce qui semble être un petit
Département de la Nature et des Forêts. cervidé subadulte (Capreolus capreolus  ?). Certains

Hotton : fouille des déblais devant le Trou du Trio.


245

Toutes périodes Luxembourg

ossements portent des traces d'action des carnivores. des ruines, ainsi qu'à divers travaux subséquents
Aucun ne présente une apparence fossile. de consolidation et reconstitution de maçonneries
Le 23  juillet 2015, un puits d'une profondeur de fragilisées ou effondrées. Ainsi en fut-il dans le corps
3,8 m a été ouvert (T3) par le Spéléo Club de Belgique de logis central et dans les ailes sises au sud-ouest et au
à quelques mètres au nord de l'entrée du Trou du Trio. nord-est de la cour centrale, soit dans l'aile gauche et
Il mène directement dans une petite salle sous-jacente dans l'aile droite (la façade à cour et la tour est), ainsi
(dite « salle de la jonction »). Aucun matériel archéolo- que du côté de la muraille d'enceinte septentrionale.
gique n'y a été mis au jour.
On déplore l'activité clandestine d'une personne Les fouilles
inconnue qui vient creuser sur le site en l'absence des
divers intéressés. Cela est d'autant plus regrettable que C'est avant tout l'octroi d'une autorisation de fouilles
la collaboration entre les services du SPW et le Spéléo qui a opportunément permis de reprendre l'étude
Club de Belgique se passe dans d'excellentes condi- archéologique, interrompue en 1998, permettant ainsi
tions. Rappelons que toute fouille doit faire l'objet d'une de poursuivre l'archéologie du bâti et les quelques
demande d'autorisation auprès du SPW (CWATUP, sondages auxquels s'est limitée l'association dans cet
Livre III, Titre IV, Chapitre III, art. 237 à 241). intervalle de temps. Rappelons ensuite que le plan
orthogonal tardif qui persiste durant les 18e et 19e siècles
est attribué pour le moment aux transformations
apportées à la forteresse par le dernier seigneur du
Rouvroy/Dampicourt : fouilles et lieu, Mgr Jean-Nicolas de Hontheim (Culot, 1999), Ce
restauration du château de Montquintin. plan, toujours d'actualité, s'est vu doté d'une numéro-
Campagne 2015 tation spécifique, et c'est sur celui-ci que sont reportés
les structures et éléments observés au cours des inter-
ventions.
Didier Culot, Jérôme Parmentier et Vivien Thiry
Le corps de logis central
Du 3 au 15 août 2015, une trentaine de volontaires
bénévoles ont rejoint le traditionnel chantier de restau- Les participants, supervisés par les archéologues de
ration mené par l'asbl À Montquintin. Ceux-ci, comme l'association, ont procédé à des sondages ou des fouilles
chaque année depuis déjà 20 ans, ont procédé à l'étude dans les pièces L.1, L.2, L.3, L.7 et L.12.
En extrémité sud, la fouille approfondie du réduit en
quart-de-rond L.1, formé dans l'angle de la courtine
sud-ouest et de l'aile gauche du château, permet de
conclure à la présence d'une cage d'escalier et non d'une
tourelle, comme supposé antérieurement, puisque la
fondation se limite à un enrochement sommaire.
Selon les observations effectuées en hauteur et dans
les fondations, cette cage d'escalier, en connexion
avec la porte d'étage de l'aile gauche, fut creusée
dans l'épaisseur de la courtine sud-ouest et du mur
séparant les deux bâtiments, avant la réalisation du
plan orthogonal tardif. Désaffectée ou modifiée, elle
fut ensuite ravalée dans ce dernier plan qui subsiste
aujourd'hui. D'autres substructions qui, bien que
désaxées, servent néanmoins de fondations à ce
plan tardif, témoignent d'un agencement antérieur
dans le corps central. S'y ajoutent, en connexion, des
éléments de sol en pierre, ainsi que, sous le sol de L.3
(identifié comme cuisine dans l'état tardif), la surface
d'une strate formée de pierres mises de champ. Vu
l'étroitesse de la zone de fouilles, ces éléments ne
peuvent donner lieu à aucune hypothèse avant d'être
reliés entre eux dans un plan général, qui se constitue
La forteresse de Montquintin : plan général des vestiges.
progressivement.
246

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Le château de Montquintin : plan de répartition des interventions sur le plan orthogonal tardif.

En L.7 (ancien hall d'entrée du 18e  siècle), le


flanc intérieur de la courtine nord-ouest, sondé en
profondeur, a révélé de nombreux éléments intéressants
qui devront être mis en relation avec des substructions
apparues en 2006 lors d'un sondage superficiel au droit
de celle-ci, mais à l'extérieur de la courtine nord-ouest.
En principal est apparu un segment de substruction
fort massive (0,73  m d'épaisseur) perpendiculaire à
la courtine nord-ouest et soigneusement appareillé,
dont le ressaut de fondation va s'ancrer profondément
(±  4  m) dans le sous-sol. Une première hypothèse
pourrait l'interpréter comme appartenant à l'ancien
logis-maître (15e-16e  siècle) dont des indices sont
encore discernables sous la forme de fenêtres bouchées
sur la courtine nord-ouest du château.
Dans l'angle ainsi formé par ce massif et la courtine
nord-ouest, l'enlèvement de la couche de débris super-
ficiels (19e siècle) a montré un enrochement épais lié de
chaux, recouvrant une importante dalle de pierre percée
d'un petit orifice circulaire bouché. Celle-ci était affais-
Courtine nord-ouest : fenêtre désaffectée du 16e siècle.
sée sur sa moitié, révélant un réduit maçonné de petites
247

Toutes périodes Luxembourg

dimensions (larg. 0,8 m ; long. 0,95 m ; prof. 1,4 m). Sans


nul doute s'agit-il ici d'une ancienne fosse septique (dépo-
toir désigné Dép.  4). Le tamisage fin du remblai orga-
nique offre de nombreux et minuscules fragments (petits
ossements, céramique, verrerie). À la base, l'amorce
d'un conduit aménagé orienté vers le hall (larg. 0,3 m ;
haut. 0,4 m) pose question et n'a pas livré de matériel.
Un important cruchon de terre cuite rouge à anse,
trop large pour passer par l'orifice d'entrée, se trouvait
curieusement parmi les résidus. Les couches n'étant pas
différenciées, on ne peut qu'en déduire que soit l'objet
a glissé à l'intérieur lors de l'affaissement de la dalle de
couverture, soit il fut oublié là lors de la construction
de la fosse. Sa forme très commune se retrouve aussi
bien à l'époque romaine qu'au 14e  siècle (Bourgeau,
1987) ou au 17e  siècle (D'Anna et al., 2003, p.  240).
Cependant, la stratigraphie générale de cette zone
l'oriente plutôt du 16e au 17e siècle. Parmi le matériel
connexe, deux tessons de grès sont assez déterminants
pour appuyer cette datation. Un premier fragment
épigraphié appartient vraisemblablement à un pichet
à panse cylindrique (ou « pichet à balustre »). Il s'agit
très probablement d'un fragment de la frise racontant
la vie de Suzanne dans sa version signée de Ian Emens,
Ement Pesch et Engel Kran et datée de 1584 ou 1585.
L'inscription complète est : DIT*IS*D]IE*SC[HONE*
HEISTORIA*VAN*SVISANNA*INT*KORTE*EIT*G
ESCHNEIDEN*I*E*84*E*P*E*K (Kohnemann,1982,
p. 217 ; Reineking-von Bock, 1986, p. 271). Le second
tesson est un grès probablement du Westerwald (17e-
18e  siècle). L'analyse des fragments osseux devrait
permettre de préciser cette datation.
Entre les pièces L.7 et L.9 –  l'affectation de cette
dernière, contiguë au nord à L.7, n'est pas encore
déterminée (salon ?) –, et parallèlement au segment de
substruction massive évoqué ci-dessus, la même tran-
chée de fouille a dévoilé un important mur de refend,
non lié à la courtine nord-ouest, et que soutient un arc
maçonné, soit de décharge, soit d'une voûte de cave
Cruchon trouvé dans le dépotoir 4 (Dép. 4).
fermée s'étendant en première hypothèse sous toute
la surface du local L.9. Le développement de cet arc
est comparable à celui de la cave de l'aile droite du été constaté au cours de précédentes campagnes de
château et pourrait être à mettre en relation avec elle. déblaiement et de restauration des caves.
Sous réserve de recherches ultérieures, cette cave serait La dernière couche de destruction (incendie de
alors à dater de la même époque (17e siècle) et fut sans 1869) a livré, comme ailleurs, du matériel ordinaire
doute comblée lors des réaménagements ultérieurs. composé de tessons de faïences, pierres rougies, verre
Une inspection plus poussée à l'intérieur de ce volume à vitre, petites ferrures, éléments de stucs moulurés
n'a pas pu être réalisée, faute de temps. assez modestes, ainsi que les fragments d'un appui de
Enfin, en L.12, pièce au nord du corps de logis fenêtre ou de cheminée en marbre Sainte-Anne gris
central en connexion avec l'aile droite du château, la (cinq fragments).
fouille successive à un sondage superficiel a permis de La couche suivante montre, sous forme de charbon
révéler que les fondations de cette aile se prolongeaient de bois, les restes incendiés d'un plancher semblable
vers l'ouest, à l'intérieur du corps de logis. Le raccour- à celui découvert dans l'aile droite lors d'un sondage
cissement tardif (18e-19e siècle) de cette aile avait déjà réalisé en 2006. Il est formé de solives (larg. 9  cm)
248

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

écartées de 40 cm, sur lequel étaient posées des voliges mesurage des jambages récoltés dans les décombres a
(larg. 14  cm  ; ép. 3 cm) orientées est/ouest. Appa- permis d'identifier les piédroits manquant aux fenêtres
raissent également les éléments d'un dallage de pierre, qui ont été prélevés en vue de leur prochaine remise en
dont l'un, formant un seuil de porte, faisait communi- place. Dans cette perspective également, des coffrages
quer le fond de l'aile droite et le corps central. ont été confectionnés pour les arrière-linteaux en béton
C'est la fondation du mur de refend entre les pièces destinés à stabiliser l'ensemble. Ces interventions sont
L.8 et L.12 de l'état orthogonal tardif qui attire plus réalisées dans le cadre du «  Théâtre de Pierres  », un
particulièrement l'attention, en ce qu'elle semble venir espace de spectacle en plein air qui sera doté de trois
recouper un mur du logis s'inscrivant dans l'axe du plateaux de scène et de deux passerelles amovibles,
fond originel de l'aile droite. Ceci accréditerait l'hypo- reliant différents secteurs du château (cour principale,
thèse émise lors d'un sondage réalisé en 2014 en L.8, aile gauche, courtines sud-est et nord-ouest et tour
sur la présence d'une façade du logis antérieure et en ouest). L'ensemble fait aussi l'objet d'une projection 3D
recul de l'actuelle millésimée 1803 par Jean-Jacques qui doit être finalisée.
de  Hontheim, neveu et successeur de Jean-Nicolas
de  Hontheim. Ceci indiquerait que la transformation Dans l'aile gauche
du château en trois corps, contrairement à l'opinion
communément admise (Culot, 2010, p. 138 et ss.), est Le réduit G.2, constituant l'ancien fournil, a été mesuré
d'une période juste antérieure aux dernières transfor- et préparé en vue de l'installation d'un coffrage cintré
mations majeures du château et serait à reculer plutôt pour la reconstitution de la voûte dont l'appui est
au 17e  siècle qu'au 18e  siècle. L'ensemble confirmerait toujours visible contre la courtine sud-ouest joux-
le plan du château repris sur les cartes de Villeneuve tant le noyau résiduel de la tour sud. Dans le réduit
(1700) et de Ferraris (bien que relevé entre 1771 et 1778, contigu G.3, le démontage des maçonneries fragilisées
son plan de Montquintin intègre des détails manifeste- a révélé une excavation hémisphérique originellement
ment antérieurs), où les trois bâtiments apparaissent de creusée à mi-hauteur dans la courtine sud-ouest, et
profondeurs semblables, alors que le corps central signé dont la destination n'a pas été établie. Elle était recou-
par de Hontheim est aujourd'hui bien plus vaste que les verte d'un enduit noirci qui pourrait l'identifier à un
ailes ; le matériel probant est malheureusement absent four ou une petite forge, encore qu'aucun autre indice
de cette zone. Ce sondage doit cependant être poursuivi, –  pas même un conduit de cheminée  – ne confirme
de même qu'à l'extrémité sud du corps de logis, afin cette hypothèse. Enfin, la restauration des jambages de
de confirmer ou non la présence de cette façade et la la porte communicant au corps central (G.4 premier
contemporanéité de l'aile droite avec ces substructions. étage) s'est poursuivie, et la consolidation du mur de
façade à cour menée à bonne fin.
L'enceinte extérieure 
Dans l'aile droite
Le programme de fouilles prévoyait également des
recherches dans les tours, les terrasses d'artillerie et L'attention s'est portée sur la consolidation d'une partie
les abords immédiats du château, en vue de préciser, intérieure de la courtine nord-est et de la façade à cour
entre autres, le tracé de l'enceinte extérieure (côtés (D.1). Celle-ci a été démontée et remontée à l'iden-
sud et ouest) qui est toujours présent sur les anciens tique. À la reconstitution de la baie de grange, entamée
plans cadastraux de 1807, 1822 et 1843 (Culot, 2010, depuis quatre ans, ne manque désormais plus que le
p. 120-123). cintre (D.2). Dans la tour est adjacente a été réalisée
Là non plus, malheureusement, la nécessité de procé- l'étude des traces résiduelles qui a permis de débuter la
der simultanément à divers travaux de consolidation reconstitution de l'accès à l'étage avec la mise en place
dans l'aile gauche et dans l'aile droite et la modestie des du seuil et des premiers piédroits de la porte.
moyens à notre disposition n'ont pas permis d'implan-
ter d'autres sondages. Autres zones et perspectives

Travaux de restauration Enfin, en limite est de la cour centrale, a débuté le


déblaiement et la restauration du mur de clôture en
Quant à la maintenance des murs, outre l'entretien vue du repositionnement des grilles.
général du site (élagage, déblaiements, débroussail- La zone des remparts septentrionaux n'a pas requis
lages), elle s'est essentiellement portée sur la façade d'autre attention qu'un débroussaillage régulier et un
principale du corps central et dans les deux ailes nettoyage soigné. Toutefois, le coffrage de la voûte de
gauche et droite. Pour la première, un tri attentif et un la cave-lavoir est achevé et la restauration pourra être
249

Toutes périodes Luxembourg

Esquisse 3D du projet de restauration (photo © Léopold Culot, faculté d'Architecture, Université de Liège, 2015).

prochainement finalisée, au moyen des pierres qui ont Sources


été triées. ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Tous ces travaux se poursuivront dans la prochaine Joseph-Johann-Franz, Comte de Ferraris, Saint-Mard, pl. 183.
campagne, programmée du 1 au 13 août 2016. Infor- ■■ Plan cadastral primitif de la commune de Dampicourt,
mations sur le projet et les chantiers de restauration : Section B, Montquintin, 1re feuille, 1843 (Archives générales du
www.montquintin.be. Royaume).
Merci à Sophie Challe et Frédéric Hanut (Direction de ■■ Plan des environs de Montmédy, Villeneuve, 1700 (Vincennes,
l'archéologie) pour leur aimable contribution. Service historique de l'Armée de Terre, A8S, Montmédy, N7).
■■ Plan parcellaire de la commune de Dampicourt, période
Bibliographie hollandaise, Section  B. Montquintin, 1re  feuille, 1er  mai 1822,
■■ Bourgeau L., 1987. La production de céramique médiévale cadastre du Luxembourg (Archives de l'État à Arlon).
dans la région de Dourdan (Essonne). In  : Chapelot  J., ■■ Plan par masse de culture de la commune de Montquintin, juin
Galinié H. & Pilet-Lemière J. (dir.), La céramique (ve-xixe s.). 1807, cadastre du Luxembourg (Archives de l'État à Arlon).
Fabrication – Commercialisation – Utilisation. Actes du premier
congrès international d'archéologie médiévale (Paris, 4-6 octobre
1985), Caen (Actes des congrès de la Société d'archéologie
médiévale, 1), p. 77-86.
■■ Culot D., 1999. Rouvroy/Dampicourt  : poursuite des
travaux de conservation des ruines du château de Montquintin,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 7, p. 145-147.
■■ Culot D., 2010. 1995-2010 : quinze années de restauration
au Château de Montquintin, Le Pays gaumais, 62-63, p. 113-146.
■■ D'Anna  A., Desbat  A., Garcia  D., Schmitt  A. &
Verhaeghe  F., 2003. La céramique. La poterie du Néolithique
aux Temps modernes, Paris, Errance.
■■ Kohnemann M., 1982. Auflagen auf Raerener Steinzeug: ein
Bildwerk, Raeren.
■■ Reineking-von Bock G. (éd.), 1986. Steinzeug, Köln (Kata-
loge des Kunstgewerbemuseums Köln, IV), 3e édition.
Namur
Vue partielle de la fouille du quartier Saint-Médard à Dinant. À gauche, en élévation, les arcades
séparant la nef du bas-côté occidental de l'église médiévale Saint-Médard. En arrière-plan, la
Meuse et la collégiale Notre-Dame.
251

Gembloux

Bossière
Landenne

Balâtre Sclayn

Jemeppe-sur-Sambre Andenne
Haillot
Moustier-sur-Sambre

Évelette

Flostoy
Havelange

Yvoir
Houx

Morialmé

Florennes

Han-sur-Lesse

Dourbes
Nismes

Carte administrative des communes de la province de Namur visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée

Éditorial
L'activité archéologique 2015 en province de Namur se compose, d'une part, d'activités menées par le monde asso-
ciatif et/ou des institutions universitaires et, d'autre part, des missions assumées par le Service de l'archéologie de la
Direction extérieure de Namur (DGO4 / Département du patrimoine).
La première catégorie comprend des fouilles de programme, des travaux de maintenance et de consolidation de
ruines et des expositions.
À Andenne/Sclayn, l'examen de la grotte Scladina par l'asbl Archéologie andennaise s'enrichit d'année en année
grâce à l'affinement des interprétations, les projets pluridisciplinaires dédiés à l'étude des Néandertaliens et le déve-
loppement de technologies d'enregistrement de pointe. En 2015, l'asbl a obtenu une autorisation de fouille supplé-
mentaire pour la grotte voisine de la Faucille qui abriterait une sépulture collective du Néolithique final ; outre l'étude
anthropologique du site, la démarche vise également à mettre au point une méthode de fouille et d'enregistrement
rapide adaptée à ce type de dépôt funéraire et transposable à des contextes d'archéologie préventive. On le voit,
la lisière entre recherche fondamentale et recherche appliquée s'étiole et devient extrêmement théorique… voire
virtuelle !
Depuis 11  ans, l'asbl Forges Saint-Roch, associée au CReA-Patrimoine de l'ULB, concentre son énergie sur la
fortification laténienne du « Plateau des Cinques » à Viroinval/Olloy-sur-Viroin et Dourbes. En 2015, elle a poursuivi
l'examen du dispositif d'entrée et des deux fossés externes du rempart oriental. Comme pour les fossés du rempart
occidental, le remblayage de ces derniers a livré des restes humains avec des traces de découpe probable. Ces résultats
et le caractère exhaustif des recherches amènent progressivement l'occupation du « Plateau des Cinques » à devenir
une référence de la Protohistoire européenne.
252

Chronique de l'Archéologie wallonne

Le site médiéval et des Temps modernes de Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre.

En 2012, le Centre de Recherches archéologiques fluviales obtenait une autorisation de fouille subaquatique dans
le plan d'eau extérieur du « Trou de Han » à Rochefort/Han-sur-Lesse. Parmi les principaux objectifs visés figurait
une meilleure compréhension stratigraphique des occupations, en particulier celle(s) emblématique(s) de l'Âge du
Bronze final. Pour l'heure, l'apport des plongeurs éclaire utilement des périodes d'utilisation des lieux méconnues ou
dédaignées puisqu'elles se rapportent aux Temps modernes et à l'essor touristique des 19e et 20e siècles.
Avec la villa de «  Lizée  » à Havelange/Flostoy, le Service de Jeunesse archeolo-J complète son programme de
recherches sur le monde rural et son évolution en Condroz namurois. Quoique victime d'explorations hasardeuses
entre 1975 et 1982, l'établissement révèle encore un potentiel intéressant par son état de conservation et par le
phasage de son occupation. Le même organisme a obtenu une autorisation de fouille, pour les saisons 2015 à 2018,
sur un tronçon de voie supposée gallo-romaine à Ohey.
L'Antiquité tardive est représentée par le décapage de 166 m2 supplémentaires aux abords des sépultures du « Petit-
Tiène » ou « Tienne del Baticulle » à Viroinval/Nismes. Cette extension, dirigée par le Cedarc/Musée du Malgré-
Tout, n'a pas apporté de nouvelles découvertes.
Le Bas Moyen Âge et les Temps modernes sont concernés par les recherches du Service de Jeunesse archeolo-J
dédiées au village déserté d'Haltinne à Gesves et les sondages de la société Archéoverde dans les jardins du château
de Freÿr à Hastière/Waulsort.
L'asbl Malagne la Gallo-romaine et la Maison du Patrimoine médiéval mosan bénéficient de subsides régionaux
pour veiller à la maintenance de vestiges et la supervision de travaux de restauration et de consolidation. Respon-
sabilités dont elles ont continué à s'acquitter en 2015, l'une pour la villa de Malagne à Rochefort, l'autre pour la
fortification de Crèvecœur à Bouvignes-sur-Meuse (Dinant) et la forteresse de Poilvache à Yvoir.
Pour terminer la liste des activités des institutions partenaires en province de Namur, il convient de souligner l'inau-
guration du Centre du visiteur de la citadelle de Namur et la tenue de diverses expositions de grande qualité scientifique.
Ces réalisations participent activement à valoriser la fonction de l'archéologie « dans la cité » car elles nouent des liens de
proximité entre le public et l'archéologie, proposent des outils pédagogiques de première main et constituent des centres
d'attrait touristique indéniable. Ainsi, le Musée de la Haute Meuse préhistorique à Godinne a-t-il conçu « Méso… Vous
avez dit Mésolithique ? ». La Maison du Patrimoine médiéval mosan a mis en évidence le thème de l'enfance dans le
cadre de l'exposition « Né quelque part, hier et aujourd'hui » et a accueilli « Archéologie en Condroz. Deux millé-
naires de vie dans nos campagnes », un événement produit par le Service de Jeunesse archeolo-J. Quant au Musée du
Malgré-Tout à Treignes, il a offert ses cimaises à la Protohistoire avec les « Bronziers au bord du lac. Trésors cachés du
Laténium » et aux « Chiens et chats dans la Préhistoire et l'Antiquité » ; l'une de ses créations, « Le Passé comme si vous
y étiez ? Benoît Clarys : 25 ans d'illustration », a été hébergée au Centre archéologique de la grotte Scladina.
L'activité du Service de l'archéologie demeure extrêmement diversifiée et importante en cette année : analyse de
centaines de demandes de permis d'urbanisme, accompagnement de certificats de patrimoine, opérations de terrain,
253

Namur

gestion de la documentation de fouille et des artefacts, médiation aux travers d'événements multiples, communica-
tions scientifiques…, sans omettre les réponses aux sollicitations des citoyens, de pouvoirs communaux, d'aména-
geurs, de bureaux d'étude ou d'asbl.
Les résultats scientifiques et patrimoniaux engrangés par la cinquantaine d'interventions préventives sont à la
hauteur de l'engagement du personnel. Nous citerons à titre d'exemples la découverte d'églises médiévales à Jemeppe-
sur-Sambre/Balâtre, la mise au jour d'un four de potier à Andenne, l'étude d'un îlot de l'ancien quartier Saint-Médard
à Dinant, la localisation de la première porte de Bordial, ouvrage fortifié de l'enceinte médiévale de Namur, le déga-
gement de plusieurs niveaux stratigraphiques de l'église Saint-Sauveur à Gembloux dont ne subsiste en élévation que
le clocher devenu beffroi, ou encore des fours de briquetier des Temps modernes associés au site castral d'Andenne/
Landenne…
Les catégories de ces opérations se distinguent comme suit :
– 5 fouilles préventives en milieu urbain à Andenne (rue Wilgot, quai de Brouckère), Dinant (avenue des Combat-
tants), Gembloux (ruelle Thirion), Namur (rue Bord de l'Eau) ;
– 4 fouilles préventives en milieu rural à Andenne/Landenne (rue de l'Église Saint-Remy), Havelange/Miécret (rue
de la Fagne), Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre (rue du Trou) et Namur/Suarlée (zone d'activité économique Ecolys) ;
– 1 opération d'archéologie du bâti dans le corps de logis de la Vieille Ferme à Yvoir/Godinne ;
– 7 opérations de sondages diagnostics à Andenne/Landenne (rue de l'Église Saint-Remy), Gembloux/Bossière
(rue d'Hermoye), Namur/Bouge (rue de la Poteresse), Namur/Champion (rue de Fernelmont), Namur/Suarlée (zone
d'activité économique Ecolys), Ohey/Haillot (route de Huy) et Rochefort (abbaye Notre-Dame de Saint-Remy) ;
– 26 suivis et surveillances de terrassements/aménagements divers à Andenne (quai de Brouckère, rue Frère-
Orban), Andenne/Landenne (rue de l'Église Saint-Remy), Assesse (rue du Chien courant), Ciney (Cour Monseu),
Ciney/Pessoux (route d'Ocquier), Dinant (place Albert), Florennes/Morialmé (rue Fort Jaco), Gembloux (parc
d'Épinal), Gembloux/Corroy-le-Château (église Saint-Lambert), Gembloux/Ernage (chaussée romaine), Jemeppe-
sur-Sambre/Moustier-sur-Sambre (rue d'Ordin), Namur/Daussoulx (rue de la Converterie), Namur (avenue Jean Ier,
citadelle [5  suivis], rue de Bruxelles, rue Saintraint), Namur/Temploux (ruelle Jean-Pierre), Ohey/Évelette (rue
Abbé Matagne), Ohey/Haillot (rue Stocus), Ohey/Perwez (rue Grand Vivier) et Somme-Leuze/Chardeneux (rue de
Chardeneux) ;
– 2 opérations de prospection géophysique à Andenne (quai de Brouckère) et Namur (église Notre-Dame), en
collaboration avec l'asbl Argephy ;
– 6 découvertes fortuites à Andenne/Sclayn (ancien presbytère), Dinant/Bouvignes-sur-Meuse (fortification de
Crèvecœur), Dinant/Furfooz (Trou Rosette), Namur (académie des Beaux-Arts, rue du Lombard) et Rochefort (rue
de la Calestienne).
Comme suggéré plus haut, le domaine de la médiation n'a pas été oublié avec l'ouverture au public de chantiers de
fouille comme celui du quartier Saint-Médard à Dinant le 28 juin 2015 ou l'organisation d'expositions telles celles
intitulées « Découvertes archéologiques sur le site de l'hôtel de ville de Gembloux » à l'Administration communale de
Gembloux et « Sous les prés, la villa. 250 ans d'histoire gallo-romaine à Anthée » au Musée archéologique de Namur
(en collaboration avec la commune d'Onhaye, le Musée archéologique de Namur, la Société archéologique de Namur
et le Cercle d'histoire locale du grand Onhaye). Le Service a également coordonné, avec la cellule Events de la DGO4,
les Journées d'Archéologie en Wallonie qui se sont déroulées à Rochefort du 18 au 20 novembre 2015.
Il nous reste toutefois un regret amer : malgré quelque 31 publications et 13 communications à l'attention du milieu
scientifique, et la participation à plusieurs groupes d'études (« Les campements militaires et bivouacs du Moyen Âge et
des Temps modernes », « La maison vernaculaire », « La métallurgie du cuivre et de ses alliages au Moyen Âge en pays
mosan »), nous devons encore déplorer l'état léthargique de nombreuses études et monographies au sein de notre équipe.
Cette situation résulte des difficultés opérationnelles préjudiciables à une hiérarchisation sereine des priorités. Ces
choix peuvent être critiqués par certains experts peu au fait des réalités contraignantes d'une gestion globale, de la
réduction devenue progressivement catastrophique des effectifs, ainsi que de la multiplication et de la complexifica-
tion des tâches administratives et logistiques.
L'existence de l'archéologie préventive est en jeu. Sa justification inclut bien entendu l'enregistrement méthodique
d'un patrimoine voué à la destruction mais aussi l'exploitation scientifique des données de terrain et leur publica-
tion dans des délais « raisonnables ». L'affectation des archéologues du Service public de Wallonie à ces recherches
implique une réelle disponibilité professionnelle et donc l'allègement de leurs charges actuelles. Une politique de
recrutement adaptée apporterait la solution idéale à cette problématique tout en garantissant le maintien des missions
patrimoniales de service public.
Christian Frébutte
255

Préhistoire Namur

PRÉHISTOIRE
Andenne/Sclayn : DigiArt, un projet
européen pour la grotte Scladina
 
Dominique Bonjean, Grégory Abrams actuellement. Le public aura accès au produit fini
et Kévin Di Modica de plusieurs façons. La première version, en réalité
virtuelle, sera disponible sur internet et également
Au début du mois de février 2015, l'équipe des archéo- diffusée au moyen d'un oculus rift installé dans un
logues de la grotte Scladina a eu la chance de voir musée partenaire. La seconde version, en réalité
sa candidature retenue pour participer à un projet augmentée cette fois, sera exploitée pendant les visites
européen s'inscrivant dans le cadre du programme de la grotte Scladina, via la manipulation de tablettes
Horizon 2020 de l'Union européenne. Sous le nom numériques.
DigiArt. The Internet Of Historical Things And Building La création de ce jeu vidéo n'est qu'une facette d'un
New 3D Cultural Worlds, ce projet a pour objectif projet qui se veut, au départ, beaucoup plus large.
la création d'outils de numérisation et de mise en DigiArt a l'ambition de devenir un outil de valorisa-
valeur du patrimoine historique et archéologique tion du patrimoine destiné aux archéologues et aux
par l'utilisation des drones et de diverses technolo- conservateurs de musées. Actuellement, la virtuali-
gies optiques. Concrètement pour Scladina, il s'agit sation du matériel et des sites archéologiques est au
de modéliser, par photogrammétrie et scanners, la cœur des préoccupations des archéologues. Pendant
grotte et les vestiges majeurs qui en ont été exhumés les interventions sur le terrain, l'enregistrement rapide
et d'animer le tout en créant une visite virtuelle du et fiable de l'information est capital puisque les délais
site qui fonctionnera à la manière d'un jeu vidéo « à d'exécution sont souvent très courts. En parallèle, les
la première personne ». Les visiteurs évolueront dans conservateurs sont également concernés : les réserves
le site en observant les phases de fouille successives de leurs musées débordent d'objets qui ne peuvent
enregistrées depuis la découverte de Scladina en 1971 pas être présentés au grand public faute de place ou
jusqu'à la démarche multidisciplinaire qui est menée d'infrastructures adaptées.
Ces dix dernières années ont vu le
développement d'outils numériques
de plus en plus performants offrant un
éventail de possibilités qui s'étend de
l'inventorisation des objets à leur acqui-
sition et leur impression en 3D. Mais
ces nouvelles technologies sont souvent
jugées complexes et hermétiques et
découragent, voire effrayent, leurs utili-
sateurs potentiels.
Le projet DigiArt s'est donné pour
mission de pallier cette difficulté en
proposant une gamme d'outils numériques
simples qui permettront de valoriser le
patrimoine culturel en créant un véritable
«  Internet des vestiges archéologiques  ».
Le projet a reçu un financement de l'Union
européenne de 2,3 millions d'euros. Dirigé
par l'Université John Moore de Liverpool,
le consortium qui compose DigiArt
regroupe sept partenaires issus des
sphères académique, privée et muséale  :
Modèle 3D de la colline, réalisé par Pix4D, abritant le porche de la grotte Saint- l'Université John Moore de Liverpool
Paul (en haut à gauche), la salle d'accueil de Scladina et la terrasse couverte de (Grande-Bretagne), le Centre pour la
Sous-Saint-Paul.
Recherche et la Technologie Hellas (Grèce),
256

Chronique de l'Archéologie wallonne Préhistoire

le Centre national de la Recherche scientifique (France), Le produit final sera un modèle 3D de la colline
le site archéologique d'Aigai (Grèce), les sociétés Pix4D s'étendant du centre archéologique jusqu'à l'entrée
(Suisse) et Vulcan UAV (Grande-Bretagne) ainsi que le des grottes. À l'intérieur de Scladina, les informati-
Centre archéologique de la grotte Scladina (Belgique). ciens auront reconstitué le remplissage sédimentaire
Les trois partenaires culturels sélectionnés par jusqu'au plafond et le visiteur observera le retrait virtuel
DigiArt ont des caractéristiques bien différenciées et des dépôts au rythme des grandes étapes de la fouille
complémentaires. D'une part, la section d'anthropo- archéologique. Au fur et à mesure de leur progres-
logie de l'Université John Moore conserve plusieurs sion souterraine, ils seront interpellés par des icônes
centaines de squelettes humains médiévaux mais ne introduisant des focus sur les vestiges exhumés les
possède pas d'espace d'exposition. D'autre part, les plus significatifs : les fossiles de l'Enfant de Sclayn, des
sites archéologiques de Scladina et d'Aigai soumettent artefacts en silex et en os provenant de la couche 5. En
les ingénieurs à des contraintes spécifiques : Scladina complément, plusieurs séquences vidéo sont prévues.
est un site exigu, sombre et humide  ; le site palatial Certaines illustreront la fabrication des artefacts et
d'Aigai couvre une surface de plus de 1 ha doré par le leur mode d'utilisation présumé. D'autres mettront en
soleil des régions méditerranéennes. scène les chercheurs qui, sous la forme d'interviews,
Après la modélisation des sites vient celle des vestiges. offriront aux visiteurs un bilan des connaissances sur
Par la combinaison de la photogrammétrie et des le gisement et les découvertes majeures qui y furent
scans, les objets entreront aussi dans le monde virtuel. faites.
Ainsi, toute personne connectée à internet pourra Pour suivre l'évolution du projet  : http://digiart-
visiter virtuellement un musée et manipuler certains project.eu/
vestiges, en trouver d'autres par comparaison ailleurs
dans le musée, mais aussi dans ses réserves ou encore
dans celles d'un autre musée partenaire du projet. Il en
résultera un « Internet des objets historiques » où les
objets seront accessibles à tout moment au départ des
appareils connectés. Le projet ambitionne de présenter
l'ensemble des vestiges dans leur contexte via un envi-
ronnement immersif en réalité virtuelle ou augmentée.
Dans le cas de Scladina, les visiteurs découvriront les
vestiges à l'endroit où ils ont été retrouvés, les mani-
puleront pour les observer sur toutes leurs facettes, les
agrandiront pour faire apparaître des détails (traces
d'usures, fractures).
Pour Scladina, les travaux ont véritablement débuté
le 9 novembre 2015. En deux journées sur le terrain,
deux photographes de la firme Pix4D ont pris près de
6 000 clichés dans les trois grottes Scladina, Saint-Paul
et Sous-Saint-Paul ainsi que sur la portion de colline
abritant les trois porches. Une équipe de l'Univer-
sité John Moore de Liverpool a pris le relais, scannant
les trois grottes à l'aide d'un LIDAR et enregistrant
plusieurs séquences vidéo au départ d'un drone. L'ap-
pareil a été conçu pour l'occasion, dessiné et imprimé
en 3D, combinant une petite taille permettant une
circulation aisée dans la grotte et ses cheminées et
quatre moteurs suffisamment puissants pour donner
à l'engin une bonne stabilité pendant la prise de vue.
Les grottes avaient été préparées en conséquence par
le retrait de certaines passerelles de circulation et de
tous les dispositifs liés à la fouille (échafaudages, fils
à plomb du carroyage), afin de réduire le travail de
« nettoyage » des clichés photographiques et des scans
par les informaticiens qui ne doivent conserver que la
paroi rocheuse de la grotte et les bermes de sédiment.
257

Époque romaine Namur

ÉPOQUE ROMAINE
Florennes/Morialmé : découverte d'une
tombe à incinération gallo-romaine

Élise Delaunois et Pierre-Hugues Tilmant

En 2014, la demande de permis pour la construction


d'un important lotissement rue Fort Jaco à Morialmé
(parc. cad. : Florennes, 8e Div., Sect. B, nos 891F et 899E)
avait amené le Service de l'archéologie de la Direction
extérieure de Namur (DGO4 / Département du patri-
moine) à prescrire un diagnostic préalable aux travaux.
Les parcelles concernées se trouvaient en effet à proxi-
mité immédiate d'une nécropole gallo-romaine des 2e
et 3e siècles partiellement fouillée dans les années 1980
(De Waele, 1986).
La construction du projet a été lancée en octobre
2015, sans que l'entrepreneur n'en ait averti le Service
de l'archéologie. Faute de temps, seul un suivi des
terrassements de la future voirie d'accès aux logements
a pu être réalisé cette année.
C'est à cette occasion qu'une tombe à incinération
Le caisson de la tombe à incinération.
gallo-romaine a été localisée dans la partie nord-ouest
du terrain. Il s'agit d'une sépulture en caisson paral-
lélépipédique, réalisée avec quatre tegulae posées sur Cette découverte permet toutefois d'évaluer l'éten-
chant. La structure mesure 55  cm sur 35  cm pour due de la nécropole. Une grande partie de celle-ci est
30  cm de profondeur et a été creusée dans le sol en directement menacée par la construction prochaine
place. Cette tombe a malheureusement été pillée à une des immeubles. Au vu de ces résultats, de nouvelles
époque inconnue  : son remplissage n'a livré aucun négociations avec l'aménageur devraient permettre
matériel et l'un des angles du caisson a été abîmé. l'exécution de fouilles préventives début 2016.
Avec la collaboration technique de C.  Vilain et
S. Pirard.

Bibliographie
■■ De Waele É., 1986. Morialmé : une nécropole gallo-romaine.
In : Activités 84 à 85 du S.O.S. Fouilles, 4, p. 29-44.

Havelange/Flostoy : la villa gallo-romaine


de « Lizée »

Sophie Lefert

Le Service de Jeunesse archeolo-J a poursuivi en 2015


ses recherches sur le site de la villa gallo-romaine de
«  Lizée  ». L'extrémité occidentale du logis et les bains
Morialmé : localisation des vestiges découverts dans les avaient déjà été partiellement dégagés en 2014  ; les
années 1980 et en 2015 (infographie S. Pirard et É. Delaunois, investigations ont continué dans ce secteur mais se sont
Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).
également étendues à toute la partie centrale du logis.
258

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

frigidarium (f) s'ouvrant sur une petite


piscine froide. Le caldarium a des dimen-
sions de 6,10 m sur 2,45 m. Des coutures
témoignent de deux modifications. Une
exèdre large de 1,50 m présente du côté
occidental a été totalement arrachée
et le mur rebouché  ; elle devait abriter
une baignoire ou un labrum. Une autre
ouverture a été vraisemblablement obtu-
rée au niveau du mur septentrional.
Le frigidarium de 2,70  m sur 2,50  m
présente un sol en béton de tuileau très
partiellement conservé. Ce sol est au
même niveau qu'une canalisation formée
de deux imbrices encastrées dans le mur,
dans l'angle sud-ouest de la pièce. Le
Plan provisoire du logis de la villa de « Lizée », partiellement restitué sur base du frigidarium s'ouvre du côté occidental
plan de fouilles de D. Materne : A. Bains ; B. Four de potier ; C. Secteur central sur une baignoire particulièrement bien
(© archeolo-J).
préservée de 2,45  m de côté. Ses parois
et son sol sont d'abord recouverts de
Le logis est construit sur une épaisse couche de limon tegulae récupérées. Une réfection, probablement due
gris-beige. D'abord interprété comme colluvions (Lefert, à un problème d'étanchéité, relève ce niveau de sol.
2015), ce remblai est vraisemblablement d'origine Le deuxième niveau de sol est constitué de dalles en
anthropique, sa surface ayant livré de rares tessons qu'un terre cuite disposées sur une épaisse couche de béton
premier examen situe au 1  siècle apr. J.-C. Ce remblai
er
de tuileau très compact. Dans l'angle nord-est, un
résulte sans doute d'une modification du relief préalable escalier formé de tegulae permet l'accès au bassin. Le
à la construction du premier logis en maçonnerie. long du mur méridional se trouve l'évacuation sous la
Il s'agit d'un petit logis classique à salle centrale de forme d'un trou carré dans une dalle ; la canalisation
près de 40 m de long pourvu de deux galeries de façade en plomb traversant le mur est encore conservée.
reliant deux pièces d'angle. À ce logis vient s'ajouter, La salle occidentale du logis est probablement en
dans une seconde phase de construction, un petit partie à ciel ouvert. S'y installent en effet à une date
ensemble thermal. Les murs de ce logis sont en grande indéterminée la chambre de chauffe du caldarium (p)
partie conservés en élévation et plusieurs niveaux de mais aussi un four de potier (B). Ces deux structures
sol ont été repérés. fortement rubéfiées ont fait l'objet de prélèvements en
Les bains viennent compléter le logis du côté occi- 2015 en vue de datation par archéomagnétisme.
dental (A). Ils ont un plan classique en enfilade avec au Tout comme les bains, la partie occidentale du logis
nord un petit caldarium (c) sur hypocauste et au sud un avait déjà été dégagée lors de fouilles inédites réalisées
par D. Materne de 1975 à 1982. Dans ce
secteur, quasi toute la stratigraphie du
site a été perdue. Les remblais d'époque
romaine ont été presque entièrement
enlevés, seul le remblai beige  précoce
sur lequel vient s'installer le premier
logis en maçonnerie est conservé.
Le secteur central du logis (C) n'avait
été que très partiellement dégagé lors
des fouilles anciennes  ; il s'avère donc
particulièrement intéressant. À ce jour,
la salle centrale, deux salles occiden-
tales et la galerie méridionale ont été
dégagées. Dans ce secteur est présent
un premier niveau de sol formé par le
Vue aérienne de l'ouverture en 2014 avec à l'ouest les bains : p. Salle de chauffe ; remblai beige antérieur au logis et situé
c. Caldarium ; f. Frigidarium avec à gauche sa baignoire (© Moers Balloïde).
à hauteur du ressaut de fondation. Il est
259

Époque romaine Namur

Namur/Namur : étude archéozoologique


du site de la rue des Bouchers

Fabienne Pigière et Michel Siebrand

Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure


de Namur (DGO4  / Département du patrimoine)
a mené une fouille préventive, en 2009, à la rue des
Bouchers, au pied de l'ancienne Halle al'chair, l'ac-
tuel musée archéologique (Hanut & Siebrand, 2010  ;
Vue générale de l'ouverture en 2015, prise vers le sud-ouest, Siebrand et al., 2011). Le site est localisé sur la rive
avec à l'avant plan la salle centrale et les fosses empierrées gauche de la Sambre, à quelques dizaines de mètres
tardives (© archeolo-J).
des berges actuelles, non loin de la confluence avec
la Meuse. L'intervention archéologique a permis de
aménagé au moins partiellement à l'aide de cailloutis. mettre au jour des niveaux d'occupation remontant
Un foyer est installé sur ce premier sol dans la salle au Haut-Empire romain, au Second Moyen Âge et aux
nord-ouest et la salle sud-ouest présente une couche Temps modernes. La présente notice se focalise sur
charbonneuse à ce niveau. la période romaine qui a livré l'essentiel des vestiges
Le sol est ensuite fortement rehaussé dans tout ce fauniques. Deux phases ont été distinguées au sein de
secteur. Dans les salles occidentales, le niveau de sol celle-ci. La première (10-30 apr. J-C.) correspond à un
tardif est matérialisé par quelques lambeaux disconti- horizon de circulation. La seconde (30/40-70 apr. J.-C)
nus d'un béton de sol en tuileau très arasé et par un voit la construction d'un bâtiment que jouxtent deux
four domestique rectangulaire formé de fragments de empierrements superposés. Les couches préparatoires
tegulae. La grande salle centrale n'a été que superficiel- à l'aménagement du plus ancien empierrement et les
lement appréhendée en 2015, elle présente également niveaux de recharge de celui-ci contenaient une grande
au moins un relèvement du niveau de sol. Son comble- quantité d'ossements animaux.
ment supérieur a livré plusieurs scories de bronze et L'essentiel des vestiges osseux mis au jour appar-
des traces rubéfiées pouvant correspondre aux vestiges tiennent au groupe des déchets de consommation au
d'un petit four circulaire. Les deux foyers de la salle sens large (sensu Gautier, 1987), c'est-à-dire les osse-
nord-ouest ont fait l'objet de prélèvements archéoma- ments rejetés lors de la découpe bouchère, pendant la
gnétiques en vue de datation. préparation des aliments, et ceux qui arrivent sur la
Les niveaux de sol tardifs du secteur central du logis table des consommateurs.
sont ensuite recoupés par cinq grandes fosses carrées
empierrées qui devaient supporter des poteaux massifs. La consommation de produits
Alignés sur la faîtière, ces supports témoignent d'une animaux aux phases pré-flaviennes
réfection importante de la toiture. Ces cinq supports
sont complétés par des contreforts le long des murs, au Les niveaux de la phase  1 ne contenaient que peu de
moins au niveau des salles occidentales. restes fauniques. Il s'agissait uniquement de déchets
La dernière phase du site consiste en plusieurs fosses de consommation provenant de la triade (bœuf, porc
de récupération de murs. Cette récupération est irré- et caprinés). Au sein de la phase 2 on peut distinguer
gulière et non systématique. un premier lot provenant de la couche sous le premier
Dans les années à venir, les recherches se poursui- empierrement et un second ensemble mis au jour sur le
vront vers l'est afin de dégager la suite du logis. Une second empierrement. Les assemblages de déchets de
fouille en extensif est prévue afin de cerner l'étendue consommation se composent principalement d'osse-
et l'organisation générale de ce logis. L'établissement ments d'animaux de la triade. Sous le premier empier-
d'une chronologie complète permettra en outre de rement, le bœuf domine largement avec 56 % des restes,
cerner les conditions d'implantation, de développe- suivi par le porc (29 %) et les caprinés (15 %). Sur le
ment et d'abandon de la villa de « Lizée ». second empierrement, la fréquence du bœuf est plus
élevée encore (68 %), tandis que le porc ne représente
Bibliographie que 20 % des restes et les caprinés 12 %. Lorsque l'on
■■ Lefert S., 2015. Havelange/Flostoy : la villa gallo-romaine de envisage l'apport en viande des espèces au moyen du
« Lizée », Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 271-273. poids de restes, le bœuf apparaît comme le principal
fournisseur de protéines animales au sein des différents
260

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

Une comparaison peut être faite avec


un important assemblage faunique
contemporain provenant du vicus de
Liberchies (Pigière, 2015b). Le bœuf
y est également prépondérant au sein
des déchets de consommation, mais
dans des proportions moindres par
rapport à Namur (42  %), tandis que
le porc (29  %) et les caprinés (29 %)
jouent un rôle plus important dans
l'approvisionnement en viande. Les
résultats des deux sites s'inscrivent
dans la tendance générale connue pour
les agglomérations de la zone centrale
de la cité des Tongres au Haut-Empire,
où l'approvisionnement en protéines
Site de la rue des Bouchers, vue vers le sud. 1. Sondage stratigraphique oriental animales repose principalement sur
contenant les principaux vestiges osseux ; 2. Premier empierrement pré-flavien le bœuf (Pigière, 2015a). Les données
(30/40-70 apr. J.-C.) ; 3. Emprise de l'angle sud-est du bâtiment pré-flavien.
collectées précédemment à Namur, sur
les sites de l'hospice Saint-Gilles, de la
assemblages. Confirmant la tendance apparue lors du place Marché aux Légumes et de la rue d'Harscamp,
comptage en nombre de restes, la contribution du porc à indiquent également que le bœuf est le principal
l'alimentation carnée est plus importante dans l'assem- pourvoyeur en viande dans l'agglomération du
blage sous le premier empierrement (18 %) que dans la Haut-Empire (Pigière, 2015a). À la période clau-
couche sur le second empierrement (8 %). Les données dienne, tant à Namur qu'à Liberchies, le bœuf est
sur l'âge des animaux au moment de l'abattage, basées principalement élevé afin de produire de la viande et
sur l'état d'épiphysation des os, sont peu nombreuses ; seule une faible proportion des grands bovins sont
elles ont été considérées globalement pour la phase 2. des animaux réformés du travail et/ou de la produc-
Sur la base de l'échantillon disponible, on constate tion de lait. Plus tard au Haut-Empire, la consom-
que les bœufs ont principalement été abattus à un âge mation va davantage porter sur des animaux âgés,
compris entre 2-3 ans et 3 ½-4 ans. Il s'agit d'animaux dont l'élevage répond prioritairement à un besoin
qui ont atteint l'âge de la maturité pondérale et dont de bête de travail (Pigière, 2015a).
l'élevage visait la production de viande principalement.
Un petit nombre d'individus maintenus en vie au-delà Conclusion
des 3 ½-4 ans sont des animaux réformés du travail et/
ou de la production de lait. Pour le porc, l'échantillon, Les découvertes archéozoologiques de la rue des
quoique réduit, indique que les animaux ont été princi- Bouchers ont permis d'approcher l'alimentation
palement abattus à un âge compris entre 1 an et 2-2 ½ carnée durant l'époque claudienne, qui est encore peu
ans. Les âges d'abattage des caprinés n'ont pas pu être documentée dans l'agglomération. Elles indiquent
examinés, faute de matériel en suffisance. La volaille ne que l'approvisionnement en viande repose principa-
comprend que la poule et la faune sauvage est représen- lement sur le bœuf dès cette haute époque. Si le bœuf
tée par un unique vestige, attribué au sanglier. reste le principal pourvoyeur de protéines animales
tout au long du Haut-Empire, les changements qui
apparaissent dans les courbes d'abattage reflètent
une évolution dans les finalités de son élevage. La
même tendance a été mise en évidence dans le vicus
de Liberchies, où à la période romaine précoce on
consomme principalement des bœufs élevés dans le
but de produire de la viande, et qui sont abattus au
moment de leur plus grande rentabilité bouchère. La
consommation évolue ensuite, portant majoritaire-
ment sur des bœufs réformés du travail, ce qui peut
Fréquences relatives des animaux de la triade à la phase 2 refléter une nouvelle orientation dans les productions
(30/40-70 apr. J.-C.) sur le site de la rue des Bouchers.
agro-pastorales régionales.
261

Époque romaine Namur

Bibliographie
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ArchaeoZoologia, 1, 2, p. 47-52.
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la Céramique antique en Gaule. Actes du Congrès de Chelles,
Marseille, p. 637-650.
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civitas Tungrorum. In : Roymans N., Derks T. & Hiddink H.A.,
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phery, Amsterdam, Amsterdam University Press (Amsterdam
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Vilvorder F., 2015. Liberchies  VI. Vicus gallo-romain. Zone
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2007), Louvain-la-Neuve (Collection d'archéologie Joseph
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■■ Siebrand  M., Collette  O., Fossion  A., Hanut  F. &
Challe  S., 2011. Namur/Namur : archéologie préventive à la
rue des Bouchers. Découvertes 2009, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 18, p. 254-258.

La tombe T1 de la nécropole du « Tienne del Baticulle ». Le


bassin en alliage cuivreux et le peigne en os dégagés par un
Viroinval/Nismes : la nécropole tardo- détectoriste y ont été repositionnés.

romaine du « Tienne del Baticulle »


coupelle en alliage cuivreux (no 44), une bouteille à panse
bombée en verre (no 42) et un gobelet apode conique en
Laureline Cattelain, Pierre Cattelain verre (no 41) dont les formes sont typiques de la fin du
et Olivier Vrielynck 4e  siècle (Arveiller-Dulong & Arveiller, 1985  ; Isings,
1957). Enfin, une petite monnaie en argent provient de
Le site du « Tienne del Baticulle » se localise à l'ouest du la bouche. Il s'agit d'une imitation (rare) d'une silique
village de Nismes, le paysage y est vallonné et caractérisé d'Honorius (395-423 ; Lauwers, 2015). L'existence d'un
par de nombreux affleurements calcaires. Il a été mis au cercueil peut être déduite par la présence d'une trentaine
jour en mars 2012 par un détectoriste, et la première inter- de clous. Les récipients sont tous plus hauts que le fond
vention archéologique s'est déroulée trois mois plus tard, de la fosse, ce qui permet de supposer qu'ils étaient posés
du 9 au 17 juillet, sous la direction du Cedarc (Treignes) à l'origine sur un plancher disparu.
et de la Direction de l'archéologie (DGO4 / Département La deuxième tombe (T2) a été en grande partie
du patrimoine). La surface décapée couvrait 120 m2 et détruite par les labours : il ne reste que quelques osse-
deux sépultures, creusées dans le schiste et orientées ments du squelette et des clous, attestant de la présence
sud-sud-ouest/nord-nord-est, ont été mises au jour d'un cercueil. À la gauche du défunt se trouvait un
(Cattelain & Vrielynck, 2014  ; Cattelain, Cattelain & dépôt funéraire dont ne subsistent que quelques
Vrielynck, 2015). La première tombe (T1), féminine, tessons, quatre fonds de récipients et une offrande
est datée de la première moitié du 5e siècle apr. J.-C. Le alimentaire. Parmi eux sont identifiables : un fond de
mobilier funéraire se compose de deux bracelets, l'un en vase en céramique commune sombre, la partie infé-
argent, l'autre en alliage cuivreux, de trois petits anneaux rieure d'une petite cruche en céramique de l'Eifel, un
torsadés en argent, probablement des ornements de petit bol apode Isings 96 en verre (no 108) et une fiole
coiffures, d'un petit anneau en argent, d'un peigne en en verre (en cours de restauration). L'offrande alimen-
os et de six récipients déposés aux pieds et à droite de taire se composait d'os de porcelet et de poulet.
la défunte : une bouteille en céramique (no  45), une La fouille de 2014 a été effectuée par le Cedarc sur
coupe hémisphérique Chenet 320 décorée à la molette 50 m2 et s'est déroulée du 18 août au 19 septembre. La
(type 25) en sigillée du Bas-Empire d'Argonne (no 43), tombe T3, datée de la fin du 4e siècle apr. J.-C., contenait
un bassin à rebord perlé sur pied en alliage cuivreux, une le squelette d'un individu masculin qui avait entre 28 et
262

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque romaine

d'une tasse à marli en sigillée du Bas-Empire d'Argonne


(no 167 ; Brulet, Vilvorder & Delage, 2010). Cette dernière
présente une pâte moins bien cuite que les autres céra-
miques en sigillée du site et se rapproche très fortement
du type 314 de Chenet, bien que plus bombée. Cette tasse
contenait par ailleurs un pied en céramique commune.
La campagne 2015 qui s'est déroulée du 22  juin au
22 juillet sous la direction du Cedarc a permis de décaper
182 m2 et de mettre au jour deux rigoles en forme de L,
tournées vers le bas de la pente. Il semble que ce disposi-
tif permette d'orienter les eaux pluviales en les éloignant
des tombes à inhumation. S'agit-il alors d'une pratique
saisonnière ? Il n'est toutefois pas impossible que ces
rigoles aient été réalisées après le creusement des tombes.
Elles ont livré de nombreux tessons de céramique à
dégraissant calcite, ainsi que de la sigillée du Bas-Empire
d'Argonne et des clous de chaussure. Un trou subcircu-
laire ouvert dans le schiste comporte un enduit d'hématite
de couleur rouge intense. Il s'agit d'une structure anthro-
pique dont la fonction reste inconnue : elle contenait un
tesson et deux petits fragments de fer indéterminés... En
contrebas, une fosse à plan trapézoïdal, qui renfermait
des clous, des clous de chaussure, trois tessons, un frag-
Céramiques et verreries des tombes T1 à T4.
ment d'os et du charbon de bois, a été dégagée. Il pourrait
s'agir d'une fosse sépulcrale non terminée. Mais, en ce
35 ans au moment de son décès. Un important matériel cas, les travaux de creusement n'ont pas été arrêtés pour
l'accompagnait  : cinq monnaies (dont un nummus de des raisons liées à la nature du matériau, celui-ci étant
Constantin  II de 328/9 et quatre aes  4 dont les plus facile à creuser par abattage-arrachage de fragments de
récents datent de 388-402), trois dés en os, une hache schiste en suivant les plans et surfaces naturelles de débi-
en fer, des éléments de décoration d'une ceinture et tage. L'espacement très faible des surfaces est certaine-
une boucle en alliage cuivreux, un couteau à lame de ment responsable de l'absence de traces d'outils.
fer, un stylet (?) en fer, une grande cruche à col trilobé L'extension du site ne semble pas se poursuivre à l'est
Chenet  348 en sigillée du Bas-Empire d'Argonne, une ni au sud. Aucun matériel n'est apparu en prospection
coupelle en verre à pied (no  129) et un haut gobelet dans cette zone, alors que les tombes ne sont pas creu-
tulipiforme sur piédestal en verre (no  130), deux bols sées profondément. La campagne 2016 sera donc effec-
Chenet 320 dont les décors sont illisibles en sigillée du tuée vers l'ouest.
Bas-Empire d'Argonne (nos 125 et 127), deux assiettes en Le matériel des tombes se rapproche de celui
céramique de l'Eifel (nos 131 et 132) et une petite cruche découvert à Vireux-Molhain (dép. des Ardennes) dans
Brulet  H6 (Brulet, 1990) également en céramique de des tombes de foederatii datées de la fin du 4e et de la
l'Eifel (no  136). La ceinture à plaque-boucle présente première moitié du 5e siècle, où un ceinturon de type
une boucle décorée de deux animaux affrontés et un proche a été mis au jour, ainsi que de nombreuses
type de gravures qui la font correspondre au type A de céramiques et verreries (Lemant, 1985). À Vireux-
Böhme (2008). Ce type de ceinture apparaît vers 365 et Molhain, les espacements entre les groupes de tombes
est, selon Böhme, toujours trouvé dans des tombes liées excèdent parfois 20 m, ce qui est encourageant pour les
à des sites militaires (55 % dans des cimetières associés campagnes futures. Les nécropoles de Furfooz (Dasnoy,
à des fortifications de hauteur). Selon lui, ces ceintures 1969) et d'Éprave (Dasnoy, 1967) ont livré un matériel
seraient en relation avec le service militaire de troupes comparable et sont, comme à Vireux-Molhain, liées à
d'origine germanique et ne seraient pas portées par des un site de hauteur fortifié.
civils. Souvent trouvées en association avec des armes,
elles sont connues jusqu'au 5e siècle. Remerciements
Une quatrième tombe (T4) a été découverte entre les
tombes T1 et T3. Elle contenait un individu probablement Nous remercions le propriétaire du terrain, M. Chomis,
de sexe masculin, âgé de 20 à 24 ans, accompagné de clous l'agriculteur-exploitant, M.  Van  de  Walle, l'équipe de
de cercueil et de nombreux clous de chaussure, ainsi que fouilles : C. Bellier, V. Brancart, A.-L. Brière, B. Carlier,
263

Époque romaine Namur

Plaque-boucle et garniture de ceinture de la tombe T3 (DAO M. Baumann).

C.  Carlier, A.  Collart, S.  Collignon, G.  Cristallo, ■■ Böhme H.W., 2008. Gallische Höhensiedlungen und germanische
L.  Dekoster, D.  de  Negri, H.  Garitte, I.  Goffin, Söldner im 4./5.  Jahrhundert. In : Steuer  H. & Bierbrauer  V.
M.  Horevoets, C.  Lauwers, O.  Lauwers, A.  Leblon, (éd.), Höhensiedlungen zwischen Antike und Mittelalter von den
N. Nicolas, J. Parmentier, A. Pierlot, C. Pion, C. Robert, Ardennen bis zur Adria, Berlin (Ergänzungsbände zum Reallexikon
der germanischen Altertumskunde, 58), p. 71-103.
C.  Robinson, J.  Robinson, L.  Semal, D.  Stennier,
J.  Thévenin, J.-C.  Thiry, O.  Touzé, T.  Van  Acker, ■■ Brulet R., 1990. La Gaule septentrionale au Bas-Empire :
occupation du sol et défense du territoire dans l'arrière-pays du
C. Van Der Steen, D. Vanhulle.
Limes aux ive et ve siècles, Trier (Trierer Zeitschrift. Beihefte, 11).
Nous remercions aussi J.-N.  Anslijn (Direction
de l'archéologie) pour les relevés topographiques, ■■ Brulet R., Vilvorder F. & Delage R., 2010. La céramique
romaine en Gaule du Nord. Dictionnaire des céramiques : la vais-
H. Doutrelepont pour l'étude botanique, K. Di Modica
selle à large diffusion, Turnhout.
(Archéologie andennaise) pour le traitement des
■■ Cattelain L., Cattelain P. & Vrielynck O., 2015. Le site
images 3D, S.  Genvier (Cedarc) pour la restauration
funéraire du «  Tienne del Baticulle  » à Nismes (Viroinval) :
et l'identification des monnaies, É. Goemaere (IRSNB)
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l'étude archéozoologique, C.  Polet (IRSNB) pour ■■ Cattelain P. & Vrielynck O., 2014. Viroinval/Nismes  :
l'étude anthropologique, F.  Vilvorder (CRAN) pour tombes tardo-antiques au « Tienne del Baticulle », Chronique de
son aide dans l'identification des pâtes céramiques, l'Archéologie wallonne, 21, p. 257-259.
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cuivreux, C.  Cappucci (Direction de l'archéologie) ive siècle et la terre sigillée décorée à la molette, Mâcon (Fouilles
et M.  Van  Buylaere (RPA) pour la restauration des et Documents d'Archéologie antique en France, 1).
verres, et V. Rousseau et C. Cools (atelier SiO2) pour la ■■ Dasnoy A., 1967. Le cimetière situé Devant-le-Mont à Éprave
restauration des céramiques, sans oublier les techniciens (ve-vie  siècles), Annales de la Société archéologique de Namur,
du Cedarc, A.  Sellekaerts, M.  Vanhorenbeek et 54, p. 61-108.
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S.  Wenzel pour toute la documentation fournie et Société archéologique de Namur, 55, p. 121-194.
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Germanisches Zentralmuseum. Forschungsinstitut für Vor-
und Frühgeschichte, Monographien, 7).
264

Chronique de l'Archéologie wallonne Moyen Âge

MOYEN ÂGE
Andenne/Andenne : mise au jour d'un
four à Andenelle

Carole Hardy, Sophie Challe,


Sylvie de Longueville et Élise Delaunois

En septembre 2015, la s.a. H2R a réalisé ses terrasse-


ments préalables à la construction d'un immeuble de
logements avec parking souterrain le long du quai de
Brouckère à Andenelle (parc. cad. : Andenne, 1re Div.,
Sect.  B, nos  51m et 52k). Cette zone avait fait l'objet à
l'automne 2013 d'une fouille extensive par le Service
de l'archéologie de la Direction extérieure de Namur
(DGO4  / Département du patrimoine) (Delaunois
et al., 2014). Depuis lors, les plans du bâtiment ont été
modifiés et son emprise a été élargie.
Ainsi, dans la partie occidentale du site, non loin de
l'emplacement des deux fours de potiers découverts
lors de la campagne de 2013, un nouveau four a été
repéré dans le profil des travaux de 2015. Le mobilier
céramique qui comble la structure de chauffe date
son abandon dans le courant du 14e  siècle. Pour des
raisons de sécurité liées au chantier de construction
tout proche, il a été décidé de postposer le dégagement
complet et méthodique de ce four actuellement non
menacé.
Il faut noter également la découverte de vestiges de
parois cuites en place dans la zone nord-ouest du site.
Malheureusement, détruits d'une part par les terras-
sements récents et d'autre part par la construction du
Logis andennais (parc. cad. : Andenne, 1re Div., Sect. B,
no 51p), il n'en reste pratiquement rien et leur fonction
ne peut être déterminée.

Bibliographie
■■ Delaunois É., Hardy C., Frébutte C., Challe  S. &
de Longueville S., 2014. Andenne/Andenne : fouilles préven-
tives le long du quai de Brouckère à Andenelle, Chronique de
l'Archéologie wallonne, 22, p. 260-263.
265

Temps modernes Namur

TEMPS MODERNES
Andenne/Landenne : sondages à
proximité de l'ancien château

Carole Hardy, Élise Delaunois,


Souad Ech-Chakrouni et Jozef Hus

Un projet de construction de trois hangars agricoles et


de deux maisons dans les parcelles situées à proximité
immédiate de la ferme et des vestiges de l'ancien
château, rue de l'église Saint-Remy (parc. cad.  :
Andenne, 10e  Div., Sect.  B, nos  303a/pie, 304, 293a/pie,
305/pie et 2952/pie), a conduit le Service de l'archéologie
de la Direction extérieure de Namur (DGO4  /
Département du patrimoine) à y réaliser des sondages
diagnostics de la fin février à la mi-mars 2015. Vue du château de l'Andenne, gravure de Remacle Leloup
Après avoir été le siège d'une seigneurie namuroise (Délices, 1740). Source  : http://www.bibliotheca-andana.
be/?p=26663.
appartenant à la famille de Landenne au 14e siècle, le site
est devenu propriété des Warilsoux en 1443 et jusqu'au
17e siècle. Ceux-ci y bâtirent un château, visible sur une laire à celui représenté dans les albums de Croÿ, avec une
représentation de Landenne au début du 17e siècle dans élévation en briques. Détruit au milieu du 20e siècle, il
les albums de Croÿ (Duvosquel, 1987). Après la paix n'en reste aujourd'hui que le soubassement en pierres
d'Utrecht en 1713, le château et la basse-cour ont fait l'ob- et une partie de l'étang. Les bâtiments agricoles, datant
jet d'une restauration. Le site est représenté dans cet état principalement des 16e et 17e siècles (Javaux, 1988), sont
sur une gravure de Remacle Leloup (Délices, 1740) : le quant à eux toujours en élévation.
château se situe alors au milieu d'un étang, entre la ferme Les sondages ont permis de repérer en plusieurs
à l'est et une zone de vergers à l'ouest. Cette configuration endroits, dans ces parcelles directement voisines du
apparaît également sur la carte de Ferraris (1771-1778). château et de l'étang, les vestiges de deux longs murs en
Plusieurs photographies du château, prises dans la pierres d'une largeur de 0,60 m ceinturant la parcelle au
première moitié du 20e siècle, montrent un édifice simi- sud (F01) et à l'ouest (F07). Une petite tour circulaire
(F08) d'un diamètre interne de 2,50  m,
plutôt ostentatoire que défensive, est venue
s'accoler à leur intersection sud-ouest.
La maçonnerie occidentale s'oriente vers
les vestiges d'un mur de clôture toujours
en élévation situé plus au nord sur une
parcelle voisine. Bien que le mobilier
archéologique manque pour dater la
construction de ces maçonneries, elles
correspondent au mur visible sur la carte
de Ferraris et sur la gravure de Remacle
Leloup : le mur qui y est représenté, avec
sa tourelle, semble clôturer le verger du
château. À défaut d'une date précise, nous
pouvons raisonnablement penser que la
destruction du mur serait liée à la trans-
formation de cette zone en espace agricole.
D'ailleurs, une portion de la maçonnerie
sud a été détruite il y a seulement 30 ou
Plan général de l'intervention (infographie et relevés S. Pirard & C. Hardy, Serv. 40  ans par les agriculteurs (communica-
archéologie, Dir. ext. Namur).
tion de M. Libois, propriétaire).
266

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Une autre maçonnerie (F18), plus ancienne et non temps, pas pu être fouillé.
visible sur les représentations du site au 18e  siècle, a été Ces fours, dits « en meule », sont typiques des milieux
repérée dans certains sondages. Elle est orientée selon un ruraux. Élevés à proximité du chantier à approvisionner,
axe nord-est/sud-ouest et croise le mur F01 dont la base ils présentent des avantages économiques et pratiques liés
a été construite sur ses vestiges. Elle n'a pu être ni entière- au transport et sont capables de produire des dizaines,
ment dégagée, ni datée, et sa fonction nous échappe encore. voire des centaines de milliers de briques, nécessaires à la
Deux fours à briques ont été mis au jour à l'extrémité construction d'un bâtiment (Thuillier, 2010).
nord-est de la zone de fouille, non loin de l'étang. Juste à côté du four F05, au nord, le limon naturel a été
Malheureusement, suite à des contraintes de stabi- chauffé sur une surface d'au minimum 3 m sur 1,10 m
lité liées au projet d'aménagement, ils n'ont pu être que (F17). Probablement en lien avec le four, il est actuel-
partiellement dégagés. Ainsi, seule la partie nord du lement impossible d'expliquer la fonction de cette aire.
four F05 a pu être fouillée. D'une largeur de 2,80 m pour À l'extrémité orientale de la fouille, une fosse de forme
une longueur minimale de 5,90 m, ce four était proba- irrégulière (F02), d'environ 4,50 m de diamètre, contenait
blement de forme rectangulaire. Mis au jour à 1,20 m de de nombreux fragments de terre cuite. Le remblai de cette
profondeur, sous une épaisse couche de sédiment homo- fosse était fort similaire à celui des fours F05 et F21, mais
gène, sans doute issue de réaménagements des berges de les contraintes liées au projet ne nous ont pas permis de
l'étang (communication de C. Frébutte), il est constitué fouiller cette structure et nous ne pouvons dire s'il s'agit
de deux canaux de chauffe parallèles creusés dans le d'une structure de cuisson ou d'une fosse à déchets.
limon naturel et séparés de 1,40 m par une surface légè- Des prospections géophysiques ont été réalisées sous
rement chauffée. Larges d'environ 0,25 m et profonds de la conduite de R. Fesler (Argephy asbl) et M. Siebrand
0,20 m, ces canaux présentent une légère pente ascen- (Service de l'archéologie de la Direction extérieure de
dante vers le nord. Leur fond était encore rempli du Namur) après la campagne de fouille. Malheureuse-
combustible (charbon de bois ou houille ?) utilisé pour ment, les résultats de ces prospections n'ont pas permis
produire la chaleur nécessaire à la cuisson. Des briques de compléter le plan de fouille.
non cuites encore en place et entourées de combustible La datation obtenue par archéomagnétisme pour la
ont été découvertes le long des côtés nord et est du four. dernière mise à feu du four F05, légèrement postérieure
Leur calibre de 23 cm de longueur pour une épaisseur à la représentation du château sur les albums de Croÿ,
de 5,5 cm correspond à celui des quelques rares briques semble remettre en doute la thèse de la fabrication de
cuites abandonnées dans les remblais. Les briques à briques pour la construction du château. Auraient-
cuire étaient posées de chant, pour faciliter la circulation elles alors été façonnées pour un réaménagement de
de la chaleur, et empilées au-dessus des canaux, parfois l'édifice, pour la construction d'un autre bâtiment,
sur plusieurs mètres de hauteur, en alternant couches etc.  ? Une étude plus approfondie du château et une
de briques et fines couches de combustible (Thuillier, évaluation précise de l'étendue des fours permettront
2010). D'après les résultats de l'analyse archéomagné- d'assurer ou non le lien entre le château et les fours.
tique, la dernière mise à feu du four doit être située (avec
une probabilité de 95 %) entre 1627 et 1695. L'extrémité Bibliographie
ouest de ce four a été légèrement recoupée par le creu- ■■ Délices, 1740. Les délices du Païs de Liége, ou Description
sement d'un drain. En ce qui concerne le four F21, seule historique, géographique, topographique et chorographique des
sa partie sud, de forme rectangulaire, a été dégagée sur monumens sacrés et profanes de cet évêché-principauté et de la
une longueur de 5 m. D'une largeur de 2,60 m, ce four a comté de Namur, tome second, première partie, Liège, Everard
été creusé jusque dans la roche en place et n'a, faute de Kints, p. 93-95.
■■ Duvosquel J.-M. (éd.), 1987. Pl. 171. Landenne. In : Comté de
Namur II. Bailliages de Bouvignes, Fleurus, Viesville et Wasseiges,
Bruxelles, Crédit communal de Belgique (Albums de Croÿ, XV).
■■ Javaux J.-L., 1988. Landenne. Ferme du Château. In : Province
de Namur. Arrondissement de Namur, compléments, 2e édition,
Liège (Le Patrimoine monumental de la Belgique, 5), p. 23-34.
■■ Thuillier F., 2010. La cuisson des briques en meule  : un
procédé artisanal oublié, Archéologia, 474, février 2010, p. 50-58.

Sources
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Noville le Bois, pl. 135
Landenne : le four à briques F05.
et Andenne, pl. 136.
267

Temps modernes Namur

Namur/Namur : découverte d'une


cheminée du 16e siècle à l'académie des
Beaux-Arts, ancien Mont-de-Piété

Sophie Jurdant et Michel Siebrand

Durant les mois de juin et juillet 2015, le Service de


l'archéologie de la Direction extérieure de Namur
(DGO4  / Département du patrimoine) est intervenu
au no 20 de la rue du Lombard pour relever, étudier et
démonter le contre-cœur d'une cheminée du 16e siècle,
située dans une pièce au sud-ouest de la porte d'entrée
principale de l'académie. Cette cheminée avait été
miraculeusement conservée dans le mur mitoyen
avec le no 18. Elle avait été, en effet, protégée pendant
plusieurs siècles par la présence d'un escalier qui a dû
être démonté pour les besoins de la troisième phase Vue d'ensemble de la cheminée (photo O.  Gilgean, Serv.
archéologie, Dir. ext. Namur).
de restauration du bâtiment (Siebrand, 2015). La
cheminée a dû être démontée également car elle se
trouvait à l'emplacement d'une porte prévue par le L'analyse iconographique permet d'identifier six
projet de rénovation du bâtiment. thèmes appartenant à l'héraldique, aux scènes de la
Bible, aux vies de saints et à la mythologie. Le thème
Rue du Lombard dominant, repris sur près de la moitié des briques,
représente une aigle éployée bicéphale accompa-
n0 18 gnée de la devise «  PLUS OULTRE  », adoptée par
Charles Quint au début du 16e  siècle. Le second
n0 20 thème, facilement identifiable, illustre la conversion
de saint Hubert : un personnage auréolé et agenouillé
faisant face à un cerf portant une croix entre ses bois
et sortant de la végétation. On y retrouve un cheval,
richement harnaché, et deux chiens, faisant réfé-
rence au contexte de la chasse. Le troisième thème,
à la composition très élaborée, figure l'Annoncia-
tion. On y voit une silhouette féminine agenouillée
face à un personnage ailé. Entre les deux figures se
0 5m trouvent un pupitre supportant un livre et un vase
à deux anses contenant une fleur. La colombe et les
Localisation de la cheminée, au rez-de-chaussée du no 20 de rayons solaires occupent le registre supérieur, tandis
la rue du Lombard.

De forme ogivale, le fond de cheminée, dont les


piédroits, le manteau et le sommet avaient disparu,
mesurait à sa base 1,60  m de long pour une hauteur
de 1,50  m. L'arc en tiers-point avait été construit au
moyen de briques panneresses et boutisses (22 × 11 ×
4,5/5 cm), tandis que le contre-cœur était légèrement
incurvé et composé de 119 briques réfractaires posées
sur chant (15 × 9/10 × 8,5/9 cm).
Les briques mises au jour ont toutes été prélevées car
elles possèdent, pour la plupart, un décor en relief figuré
et encadré d'une bordure de 2 cm d'épaisseur. Leur état
de conservation est, par contre, variable : le relief pouvait Brique illustrant la conversion de saint Hubert (photo
O. Gilgean, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).
être intact, fragmentaire, arasé voire illisible.
268

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Bibliographie
■■ Siebrand M., 2015. Namur/Namur : troisième suivi archéo-
logique à l'académie des Beaux-Arts, ancien Mont-de-Piété,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 315-316.

Yvoir/Godinne : un logis antérieur à la


Vieille Ferme

Marie Verbeek, Christophe Maggi


Brique illustrant le thème biblique de l'Annonciation (photo et Pascale Fraiture
O. Gilgean, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).

La Vieille Ferme (parc. cad. : Yvoir, 4e Div., Sect. A,


qu'un quadrillage évoque un carrelage. Le quatrième no  18f  ; coord. Lambert  : 185467  est/115519  nord)
thème montre une scène d'affrontement entre deux fait partie d'un petit complexe du bord de Meuse
hommes avec armes et boucliers. Il pourrait s'agir comprenant également une résidence aristocratique
d'une scène biblique ou mythologique (combat de et une chapelle dédiée à saint Pierre. L'ensemble
satyres ?). Le cinquième type de représentation est classé comme monument et comme site (arrêté
évoquerait l'épisode biblique de Judith décapitant du 02/12/1959). Le château est principalement daté
Holopherne. Sous une tente d'allure orientale, une du 16e  siècle, avec quelques remaniements plus
silhouette féminine faisait face à un personnage tardifs. La ferme à cour, dans laquelle les bâtiments
étendu sur un lit. Toutefois, l'état de conservation sont disposés en ordre dispersé, est entièrement
médiocre des briques ne nous permet pas de certifier reconstruite au 17e  siècle. La seigneurie, liée à la
cette identification. Enfin, le sixième sujet présente prévôté de Poilvache, est acquise en 1512 par la
un couple assis dans un environnement végétal, sans famille de Maillen. Elle passe au 17e siècle aux Waha,
que l'on puisse conclure s'il s'agit d'une scène de puis aux d'Orjo.
genre ou biblique. Le site est archéologiquement très mal connu,
De manière générale, la qualité et la finesse du modelé notamment dans ses développements anciens. À la
et des décors laissent supposer que la production de ces faveur des travaux de restauration du corps de logis,
briques a été l'œuvre d'un graveur. Ce dernier se serait le Service de l'archéologie de la Direction extérieure
fortement inspiré de l'Antiquité au vu des nombreux de Namur (DGO4 / Département du patrimoine) a pu
détails visibles notamment dans le rendu des figures et enregistrer plusieurs informations sur l'édifice. L'inter-
des vêtements. vention de quelques jours au printemps et à l'été 2015 a
Quant à la distribution des briques, il apparaît que permis d'une part d'identifier une phase antérieure du
celles-ci avaient été posées sans programme iconogra- corps de logis, et d'autre part de caractériser et dater le
phique bien défini voire même rapidement comme bâtiment actuel.
en témoignent certains exemplaires posés tête-bêche.
Toutefois, on a constaté que la majorité des briques à Avant le bâtiment
l'aigle bicéphale se concentrait dans le tiers supérieur
de la cheminée. On en retrouve dans le rang inférieur Un sondage profond et à l'emprise très limitée
ainsi que quelques-unes disséminées parmi les autres pratiqué dans une des pièces a révélé une occupa-
thématiques. tion médiévale caractérisée par un niveau de sol en
La quantité et la qualité des briques réfractaires à terre battue surmonté d'une couche résultant d'un
décor moulé retrouvées à l'académie des Beaux-Arts abandon par incendie. L'épaisseur importante de
en font un matériel qui mériterait d'être exploité la couche de torchis brûlé autorise à restituer à cet
davantage. Il serait intéressant de pouvoir le compa- endroit un bâtiment en bois et torchis. Malheureu-
rer avec celui conservé dans des bâtiments histo- sement, du fait de la conservation nécessaire (pour
riques de la même période et dans les réserves d'ins- mise en valeur) des niveaux de sol du logis posté-
titutions muséales, notamment namuroises. rieur, il n'a pas été possible d'investiguer plus avant
En collaboration avec Julien Saint-Jean. pour en restituer le plan. L'absence de mobilier
archéologique ne permet pas non plus de dater cette
occupation.
269

Temps modernes Namur

sol devait se trouver au moins 1 m sous le niveau actuel


du plancher. Il est difficile savoir s'il s'agit d'un niveau
de combles (le mur conservé serait alors le mur-pignon
de l'édifice) ou un étage de vie.
La disposition intérieure comprend quatre pièces,
séparées par des murs de refend eux aussi relativement
étroits. La dévolution des pièces peut être en partie
déterminée par le type de revêtement de sol qu'elles
arborent.
Deux grandes pièces sans doute très démonstratives,
à l'ouest, reçoivent un sol de briques sur chant pour
l'une (A) et un pavement très soigneux de djètes assem-
blées en carrés pour l'autre (C). Ce dernier revêtement,
Couche d'incendie antérieure au logis carré.
fréquent pour les soles de cheminées dans la région,
s'étend ici sur toute la surface de la pièce. La disposi-
Un logis de plan carré tion des djètes dans les carrés dessine un motif régu-
lier, alternant des diagonales et des perpendiculaires.
Par-dessus ces niveaux d'abandon est construit un Quelques carrés offrent décor unique et particulier. La
volume de plan carré d'un peu plus de 10 m de côté. Le pièce dallée de briques disposées en épi est établie sur
mur ouest est conservé en élévation sur deux niveaux ; une cave voûtée de pierres, bien conservée également.
les autres murs ont été observés en fondation, à l'ex- Un accès extérieur à cette cave, aujourd'hui bouché,
ception du mur sud, qui se trouve sans doute sous la était ménagé à l'extrémité nord-ouest.
façade actuelle. Les niveaux de sol ont également été Au sud-est, une seconde cave au berceau orienté nord/
mis au jour, sous un épais remblai correspondant à la sud est surmontée d'une pièce de belles dimensions
construction de l'actuel bâtiment. Deux de ses caves (B). Son niveau de sol n'a pas été conservé, il s'agissait
peuvent aussi être associées à la construction anté- peut-être d'un plancher. L'angle nord-est, du côté du
rieure. château, semble être occupé par les circulations : on y
La fondation des murs extérieurs est relativement trouve sans doute déjà un accès aux caves et peut-être
étroite (36 à 40  cm). Les parements sont irréguliers un couloir (D). Un sol dallé de grandes pierres calcaires
et le mortier sableux. Il est possible qu'une partie de polies est équipé, dans l'angle nord-est, d'un bac en
l'élévation ait été en pans-de-bois. À l'ouest, le mur en pierre bleue qui assure la récolte et l'évacuation de l'eau
élévation en représente peut-être le pignon. C'est un sale vers l'extérieur par un conduit traversant le mur.
mur en calcaire mosan, très partiellement conservé, Cet aménagement autorise à y restituer une pièce de
mais identifié sur au moins 6 m de hauteur. Une petite travail domestique (arrière-cuisine  ?). Les cheminées
fenêtre, localisée à hauteur du plancher actuel de n'ont pas pu être repérées, puisque les emplacements
l'étage, autorise à restituer un étage dont le niveau de présumés en sont occupés par des cheminées plus
tardives qui n'ont pu être démontées.
D'après la disposition intérieure du logis et notam-
ment des circulations, on est tenté de restituer sa façade
A principale au nord, vers le château. C'est aussi de ce
D

C B

0 5m

Plan schématique du corps de logis de la Vieille Ferme, d'après


le plan levé par le bureau d'architecture Atelier Nord. En gris
foncé : le logis carré. A. Pièce dallée de briques, cave voûtée
en berceau (cuisine ?) ; B. Pièce cavée, planchéiée ; C. Pièce
au sol de djètes ; D. Couloir et pièce dallée de pierre bleue. Le sol sur djètes.
270

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

et de deux à l'est. Le gouttereau sud, façade principale


actuelle en pierres et briques, est entièrement rebâti sur les
fondations de l'ancien mur. Le gouttereau nord, recons-
truit en calcaire et grès, est avancé de quelques dizaines
de centimètres. Le mur ouest est conservé en élévation et
joue alors le rôle d'un mur de refend. L'ensemble forme
un volume rectangulaire barlong de deux niveaux sur
caves, couvert d'une toiture en bâtière à croupes dans
laquelle prennent place deux niveaux de combles.
Globalement, les aménagements intérieurs d'origine
ont été conservés jusqu'à aujourd'hui. On se trouve en
présence d'un double corps, avec un couloir central
comprenant aussi la cage d'escalier, desservant une
grande pièce à l'est et deux pièces en enfilade à l'ouest. À
l'extrême ouest, une travée supplémentaire ajoute deux
pièces dans la longueur. La même disposition se retrouve
à l'étage, à l'exception de l'espace oriental, qui est divisé
en deux pièces, chacune avec sa cheminée. Quelques
refends sont plus récents : par exemple celui qui ménage
dans une des pièces ouest un couloir permettant un
accès séparé vers les pièces du fond du volume.
Les accès et percements ont été peu modifiés égale-
ment, comme le signale une excellente étude du bâti
menée par P. Scherer (1987) préalablement aux travaux
de 1987, qui reprend les éléments alors visibles.
La porte principale ouvre au sud et est encadrée de
chaque côté de trois travées de fenêtres à croisées. La
Le sol en calcaire avec bac de récolte des eaux.
porte latérale ouest est plus tardive et remplace une
fenêtre à meneau tandis que la grande pièce orientale
côté-là que, sur la carte de Ferraris, apparaît une cour est à l'origine aveugle au nord et à l'est. La façade nord
entourée de bâtiments, aujourd'hui disparue. Peut-être est moins percée : des petites fenêtres assurent l'éclai-
faut-il imaginer que la rue actuelle, qui sépare les deux rage dans l'escalier et des fenêtres à traverses ouvrent
entités en sinuant, n'a isolé les deux ensembles que l'étage de la pièce nord-est (sinon aveugle) et les deux
tardivement ? On ignore en tout cas tout de la disposi- niveaux de la pièce nord centrale. Les matériaux
tion des bâtiments annexes contemporains de ce corps observés sur cette façade nord dénotent une utilisation
de logis. massive d'éléments de remploi, provenant sans doute
En l'absence de mobilier archéologique mis au jour en partie de l'édifice antérieur.
dans la stratigraphie, l'archéologie ne permet malheu- Les cheminées d'origine sont conservées, à l'excep-
reusement pas de dater la construction de ce logis. De tion de celle de la grande pièce orientale, qui est entiè-
manière générale, les sols (et surtout soles) sur djètes rement reconstruite.
sont des éléments en attente d'une typologie plus fine
qui permettrait de les dater.
Une couche d'abandon comprenant une grande
quantité de torchis brûlé et de restes de bois calciné
recouvre le sol en djètes. Elle semble indiquer un
incendie (en tout cas partiel) de la maison.

Le logis du 17e siècle

Au 17e  siècle, d'importants travaux sont consentis


pour toute la ferme, puisque la grande majorité
des constructions en élévation conservées jusqu'à
aujourd'hui datent de cette époque.
Façade sud du corps de logis.
Le corps de logis est plus grand d'une travée à l'ouest
271

Temps modernes Namur

Le niveau de sol a été rehaussé d'environ 30 cm par d'arbres jeunes à croissance rapide, plus résistants à la
l'apport d'un remblai très meuble, sableux et chargé de flexion, les menuisiers privilégiant l'emploi de chênes
matériaux de construction. plusieurs fois centenaires, à croissance lente et au fil
La charpente, dans combles à surcroît, est de type à rectiligne, qui donnent un bois tendre, facile à débiter
fermes et pannes avec arbalétriers de chambrée canton- en planches et beaucoup moins sujet aux déformations.
nés dans un portique (Hoffsumer, 1999, p.  101-102). C'est vraisemblablement la famille Maillen qui
Elle est constituée de quatre fermes complètes, numé- entame les travaux de rénovation de la ferme au
rotées de I à IIII (d'est en ouest), sur leur face orientale. 17e siècle, comme en atteste le millésime de 1623 posé
Une contremarque oblique indique la latéralisation sur la façade du porche d'entrée, aux armes de cette
côté nord. Les fermes superposent deux portiques famille. Mais la datation obtenue sur les boiseries du
trapézoïdaux et une fermette. Les portiques sont corps de logis atteste que pour ce volume en tout cas,
formés de chevrons-arbalétriers assemblés par des la réalisation est plus tardive, et que les travaux ne sont
entraits. Le portique inférieur est doublé sur chaque pas achevés avant 1687, époque où la ferme est passée
versant par une jambe de force assemblée à un blochet aux mains des d'Orjo. C'est donc sans doute à cette
soutenant le pied du chevron-arbalétrier. Une fermette famille que l'on doit les travaux de reconstruction du
à poinçon maintenue par deux liens de fermette corps de logis de la Vieille Ferme.
supporte la panne faîtière. Les pannes des versants sont
insérées à devers dans les arbalétriers. Les fermes sont Bibliographie
contreventées par des liens. ■■ Hoffsummer P., 1999. Les charpentes de toitures en Wallo-
Quatre demi-fermes assurent la couverture des nie  : typologie et dendrochronologie (xie-xixe siècle), 2e  édition,
croupes à l'approche des pignons. Leur numérotation Namur (Études et Documents, Monuments et Sites, 1).
est spécifique, en « λ ».
Un portique composé presque exclusivement de bois Sources
de remploi semble avoir été ajouté a posteriori entre les ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
fermes III et IIII pour soutenir un plancher. Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, St Gérard, pl. 117.
L'analyse dendrochronologique a permis de déter- ■■ Scherer P., 1987. Logis de la Vieille ferme de Godinne. Édifice
miner les dates d'abattage des arbres. Elle désigne classé par A.R. du 02.12.1959. Analyse architecturale préalable à
trois campagnes d'abattage pour les pièces de char- l'aménagement intérieur, rapport inédit à destination du Minis-
penterie : une campagne en hiver 1685-1686 (fermes tère de la Communauté française.
principales), une autre en hiver 1686 (demi-fermes)
et la dernière au printemps 1687 (sommiers des plan-
chers). Il est difficile d'associer ces dates à différentes
phases du chantier : on imagine mal les sommiers être Yvoir/Yvoir : suivi du chantier de
posés après la charpente. Dans tous les cas, il semble restauration du corps de logis de la ferme
donc que plusieurs campagnes d'abattage ont permis de Champalle
de réunir le bois suffisant pour la charpenterie de tout
l'édifice.
Les planchers ont également pu être datés par Marie Verbeek, Sarah Crémer, Pascale Fraiture
dendrochronologie. Ils sont relativement uniformes : ce et Axelle Oger
sont de larges planches de chêne à feuillure à mi-bois
et clouées (clous en fer forgé). Certaines portions ont La ferme de Champalle (av. de Champalle, 3  ; parc.
subi des réparations en planches de résineux. Le cerne le cad.  : Yvoir, 1re  Div., Sect.  C, no  118f ) se trouve à la
plus tardif mesuré date de 1663 mais aucun aubier n'est frange supérieure de la plaine alluviale de la Meuse,
conservé. Si on tient compte de l'aubier minimum que là où cette plaine remonte légèrement avant de venir
devaient contenir ces arbres (4  cernes), l'abattage eut s'échouer au pied des rochers que surmontent les
lieu après 1667. Le plancher étant placé sec, au contraire plaines calcaires qui font la renommée naturelle des
des bois de charpente, on peut légitimement penser que lieux. Inaccessible depuis des décennies du fait du
l'ensemble a été construit dans une même phase. protectionnisme des propriétaires successifs, elle a été
D'un point de vue purement dendro-typologique, largement protégée d'aménagements trop intrusifs.
la différence entre les arbres utilisés dans les pièces C'est une ferme à cour déployant, en ordre dispersé
de charpenterie et ceux dont sont issues les planches sous forme d'un quadrilatère irrégulier, un corps de
du second œuvre reflète indubitablement l'emploi de logis, une grange, des étables, une remise et d'autres
chênes provenant d'écologies forestières distinctes. annexes agricoles. On accède à la cour pavée centrale
On constate ainsi un choix délibéré des charpentiers par un passage charretier.
272

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

blocs calcaires et adossé à la falaise. Les articulations


architecturales sont soulignées de harpes de blocs de
grandes dimensions, parfois même très imposants
(linteaux). La charpente est conservée et le bâtiment
est actuellement recouvert d'une bâtière d'ardoise.
Visiblement, il était liaisonné au nord-ouest avec un
autre volume, peut-être d'un seul niveau. En témoigne
la présence uniquement au niveau supérieur de l'angle
harpé. En outre, les blocs énormes de la jambe harpée
du piédroit de la porte du bel étage se prolongent
au-delà de l'angle du bâtiment ancien. On imagine
donc que ces blocs assuraient la liaison entre le volume
Ferme de Champalle : vue du corps de logis dans son état du corps de logis et un autre (annexe ?). Cette annexe
actuel.
pourrait prendre place soit dans le prolongement de
l'édifice, soit en retour d'angle.
La ferme a été récemment acquise par un collectif Le volume est à l'origine structuré en trois niveaux :
de propriétaires qui souhaite y aménager six logements sur un soubassement presque aveugle et voûté vient
familiaux, en commençant par le corps de logis. C'est le bel étage, surmonté de combles. Un refend central
pourquoi le Service de l'archéologie de la Direction divise chaque niveau en deux pièces de trois travées
extérieure de Namur (DGO4 / Département du patri- étroites. Au niveau inférieur, les deux grandes pièces
moine) a résolu d'y pratiquer plusieurs campagnes de voûtées servent vraisemblablement de celliers. De
relevés et d'étude du bâti (en 2013 et 2014) au fil des rares meurtrières les éclairent aujourd'hui, mais
travaux de rénovation. aucune ne semble d'origine. Au bel étage, le mur de
Aucune trace appartenant au dispositif primitif n'a refend est garni d'une cheminée à double-cœur. Dans
été observée, alors que l'ancienneté de la ferme est les combles, une paroi en pan-de-bois désigne la divi-
attestée historiquement : cette grosse bouverie isolée, sion centrale de l'espace, alors que, de part et d'autre,
peut-être liée au départ à la prévôté de Poilvache, fait deux fermes similaires scandent les travées.
partie du domaine des comtes de Namur dès 1355 La façade reflète cette division interne : les deux corps
(Bultot-Verleysen, 1989). composant le volume du logis sont organisés symétri-
quement  : dans chaque pièce, une grande fenêtre à
Le corps de logis tardo-médiéval croisée est encadrée de deux petites fenêtres hautes à
appui en abat-jour assurant un éclairage zénithal.
Visiblement, le site a fait l'objet d'une importante Ce schéma est légèrement différent pour la dernière
campagne de construction à la fin du Moyen Âge, travée nord-ouest  : la porte d'entrée occupe la place
ce dont témoigne le corps de logis actuel, bâtiment d'une petite fenêtre. C'est la porte principale du volume.
le plus ancien observé en élévation. C'est un volume On y accédait par un escalier hors-œuvre accolé à
rectangulaire barlong sous bâtière, construit en la façade, aujourd'hui disparu. Seuls les désordres à

c a a b a a

0 4m

Élévation phasée du corps de logis. En blanc, construction de 1541. En gris clair, ajouts au 17e siècle. En gris foncé, ajouts des 18e et
19e siècles. Les lettres indiquent l'emplacement des éléments de charpente (relevé O. Gilgean et S. Pirard, Serv. archéologie, Dir. ext.
Namur ; infographie O. Gilgean).
273

Temps modernes Namur

la maçonnerie dus à l'arasement des marches s'y quasi au niveau du refend du bel étage. Elle est égale-
observent encore. La porte d'accès est surmontée d'un ment surmontée d'un linteau en bâtière. C'est la seule
très imposant linteau en bâtière. ouverture qui a été repérée dans ce mur gouttereau.
Un second accès est pratiqué à l'arrière, vers la Au centre du mur-pignon sud-est, une petite ouver-
falaise, au bel étage également. C'est une porte percée ture carrée éclaire le bel étage et les combles. Au nord-
ouest, ces petites fenêtres sont reportées vers la façade
principale, ce qui peut indiquer la présence contre le
gouttereau aveugle de l'escalier menant aux combles.
Les deux pièces de vie sont dotées d'aménagements
intérieurs de qualité, comme une grande niche rectan-
gulaire à feuillure refermée jadis d'un volet à côté de
la cheminée, ou une autre cachée derrière l'encoche
destinée à recevoir le vantail de la porte séparant les
deux pièces.
Le manteau en calcaire de la cheminée engagée était
composé de deux montants sculptés d'un motif dit « en
feuille de plantain » surmontés d'une tablette. Seul un
piédroit en est conservé. La hotte en briques réfrac-
taires est quant à elle très bien conservée, insérée dans
a un coffre en encorbellement, soigneusement construit
en blocs de calcaire taillés.
La charpente de l'édifice –  de type à fermes et
pannes – compte quatre fermes. Elles sont disposées,
deux par deux, de part et d'autre du refend en pan-de-
bois. Aménagée dans des combles à surcroît, chaque
ferme est constituée de la superposition de deux
portiques trapézoïdaux, raidis par des aisseliers et/
ou des jambettes. Au-dessus du second portique, une
fermette termine la structure. Une différence majeure
marque les deux portiques : les arbalétriers du portique
inférieur sont assemblés en pied à un blochet (et non à
un entrait), rendant l'espace des combles « utiles ». Les
jambettes, plus longues que celles du second portique,
relient l'arbalétrier aux poutres de plancher.
b La charpente est contreventée par un niveau de
pannes posées face aplomb au sommet du premier
portique. Des pannes faîtières et sous-faîtières, reliées
entre elles par des croix de saint André, sont assem-
blées aux poinçons des fermettes et participent au
contreventement de la structure.
La paroi à pan-de-bois, encadrant le conduit de
cheminée, est constituée de trois poteaux, reliés entre
eux par un réseau d'entretoises. Certains sont raidis
par des guettes. Le torchis est partiellement conservé.
Toutes les fermes et le pan-de-bois ont leur face d'éta-
blissement au nord-ouest. Les marques progressent du
nord-ouest au sud-est, avec une latéralisation – sous la
forme d'une langue de vipère – au sud-est.
c
0 2m L'étude dendrochronologique de la charpente a
permis de dater 13 échantillons sur les 16 prélevés. Ils
Charpentes du corps de logis. a.  Ferme du corps de logis ont livré une date similaire pour les fermes de char-
primitif ; b. Pan-de-bois central ; c. Ferme de l'annexe nord- pente et pour le pan-de-bois : les bois ont été abattus
ouest (relevé C. Dupont ; infographie O. Gilgean, Serv. ar- durant l'hiver 1541-1542. La disposition de la char-
chéologie, Dir. ext. Namur).
pente sur les maçonneries et notamment la cohérence
274

Chronique de l'Archéologie wallonne Temps modernes

Détails des aménagements intérieurs. a. Revers de la façade. Les fenêtres à croisées sont surmontées côté intérieur d'un linteau cin-
tré. Ces fenêtres ont été élargies plus tardivement, ce qui explique la difficulté de lecture en façade ; b. Cheminée et niche ; c. Revers
de la porte donnant vers l'arrière (photos O. Gilgean, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).

avec les ancrages visibles en façade autorisent à asso- au 18e  siècle qu'il faut placer la construction de la
cier charpente et maçonnerie et à proposer de dater la troisième extension du logis, vers le nord-ouest, avec
construction de l'édifice des environs de 1540. un étage ajouté au 19e  siècle. Le reste des bâtiments
autour de la cour s'échelonnent entre le 18e et la fin
Modifications postérieures du 19e siècle, mais devront faire l'objet d'observations
archéologiques au fil des travaux pour vérifier ces
Le corps de logis subit deux modifications principales assertions.
dont il est peu aisé de déterminer laquelle vient avant
l'autre. D'une part, l'escalier hors-œuvre est démoli et Bibliographie
l'arasement en est très grossièrement reparementé ; un ■■ Bultot-Verleysen A.-M., 1989. La gestion des fermes
escalier en œuvre est alors aménagé, sans doute sur base namuroises (xive-xve s.), Annales de la Société archéologique de
du passage primitif vers les caves. D'autre part, le corps Namur, 66, p. 73-95.
de logis est agrandi d'une travée vers le nord-ouest. Ce ■■ C[ortembos] T. & V[an] D[en] N[oortgaete] T., 1996.
volume est construit à l'imitation du bâtiment primitif, Av. de Champalle. No  3. Ancienne ferme de Champalle. In :
avec des corbeaux de pierre sous corniche, une fenêtre Province de Namur. Arrondissement de Dinant, Liège (Le Patri-
à croisée au bel étage et une anglée harpée beaucoup moine monumental de la Belgique, 22³), p. 1167-1169.
plus régulière que l'originale. Au rez-de-chaussée,
une porte sous arc en plein cintre donne accès aux
pièces inférieures. La charpente comprend une seule
ferme, curieusement installée contre le conduit de
cheminée du pignon. C'est un grand portique dont
les arbalétriers reçoivent les pannes assemblées ici
à devers. Des jambettes rigidifient la structure. Du
poinçon de fermette partent également faîtière et sous-
faîtière. Des liens et croix de saint André assurent le
contreventement. Aucune marque de pose n'a pu être
vue sur la charpente ; elles étaient peut-être gravées sur
la face située contre le pignon, où l'absence de recul n'a
pas permis de les voir.
Cette annexe est datée par le style de la première
moitié du 17e siècle (Cortembos & Van Den Noortgaete,
1996). L'année d'abattage de l'entrait de la charpente
a été datée par dendrochronologie de 1541-1542,
comme les bois de la charpente et du pan-de-bois
du volume d'origine, mais la contemporanéité de
l'extension semble impossible. Le bois daté provient
donc probablement d'un réemploi. C'est sans doute
275

Époque contemporaine Namur

ÉPOQUE CONTEMPORAINE
Namur/Namur : citadelle, interventions
archéologiques 2015 dans le fossé de
Terra Nova

Pierre-Hugues Tilmant À l'heure actuelle, une grande partie de l'emprise du


fossé est encombrée par des remblais divers, prove-
Plusieurs des anglées du fossé de Terra Nova étaient nant notamment de l'écroulement sporadique des
encore en cours de restauration en janvier 2015. parements, tant de l'escarpe que de la contre-escarpe.
L'installation du matériel de l'entreprise en charge Néanmoins et sous réserve de travaux de dégagement,
des travaux et le stockage des blocs calcaires à réuti- la configuration actuellement visible semble être fort
liser allaient nécessiter un terrassement sur un court proche de celle apparaissant sur les plans et élévations
tronçon du fond du fossé. Ce dernier, reconstruit sous datés de 1831 (Vincennes, S.H.A.T.) et sur deux plans
l'occupation hollandaise, ne présente pas un niveau de la brigade topographique du Génie datés de 1853
uniforme sur toute sa longueur (environ 500  m), en (Namur, Société archéologique). Il convient toutefois
raison d'une part de la déclivité naturelle du terrain et de tenir compte du remblaiement ancien de la demi-
d'autre part à la suite de son aménagement en plusieurs lune et des tronçons du fossé qui l'entouraient (A) et de
paliers afin d'obtenir la plus grande efficacité défen- la destruction de la caponnière (B) qui reliait l'extré-
sive, notamment par le biais de deux caponnières. mité sud-ouest des galeries de Boufflers (C) à la demi-
lune. Sur l'un des plans précités figurent
cinq murs qui subdivisent le fossé en six
paliers de niveaux différents, y compris
les flancs sud-ouest et sud-est de Terra
Nova  ; cette disposition est encore
en grande partie visible sur le terrain
aujourd'hui.
L'intervention archéologique a été
menée dans la zone centrale de l'emprise
du palier (D) situé au nord du bastion
no 2. Trois sondages y ont été réalisés. Ils
ont entraîné la mise au jour d'une partie
de la cunette dont le fond du fossé était
équipé. Ce dispositif de récolte des eaux
pluviales et/ou d'infiltration prend ici la
forme d'une rigole aménagée en briques,
d'une largeur interne au sommet de près
de 0,45 m et d'une profondeur interne de
0,20 m. La structure en briques présente
une largeur totale de 0,90 m à 0,95 m et
a été mise en place dans une tranchée
creusée à travers le schiste en place. Une
couche de mortier de chaux de teinte
jaune pâle recouvre les flancs externes
de la cunette. L'extrémité nord de celle-
ci est délimitée par deux moellons de
calcaire taillés dont la ciselure périphé-
rique, par sa largeur et sa régularité,
Plan général de Terra Nova. Délimitation des six paliers du fossé et emplacements confirme une construction au 19e  siècle
de la demi-lune (A), d'une des trois caponnières (B), de l'extrémité sud-ouest des d'après une analyse de F.  Doperé. La
galeries de Boufflers (C), du palier partiellement dégagé (D), du palier inférieur cunette est bouchée plus au nord par une
(E) et du dispositif d'écoulement d'eau à l'extrémité du fossé de Médiane (F).
maçonnerie  ; cette dernière est intégrée
276

Chronique de l'Archéologie wallonne Époque contemporaine

■■ Élévation développée des contrescarpes de la partie de droite


du château de Namur, 1831 (Vincennes, Service historique de
l'Armée de Terre, Art. 14, Namur, carton 2, no 5).
■■ Plan de la ville et du château de Namur, 1831 (Vincennes,
Service historique de l'Armée de Terre, Art. 14, Namur, carton 2,
no 2).

Vue de la cunette dans l'un des sondages creusés.

aux blocs qui surmontent le mur séparant le palier où


la cunette a été découverte du palier inférieur (E). À
cet emplacement devait se trouver à l'origine un dispo-
sitif d'écoulement d'eau comparable à celui actuelle-
ment visible dans le fossé de Médiane, composé d'un
grand bloc taillé présentant un profil spécifique pour
cet usage (F).
Dans l'état actuel du fossé de Terra Nova, il n'est
pas possible d'affirmer que les autres paliers dont il se
compose sont équipés d'une cunette équivalente. Des
dégagements complémentaires sont indispensables
afin de s'en assurer.

Sources
■■ Château de Namur. Élévation développée des escarpes de la
partie de droite, 1831 (Vincennes, Service historique de l'Armée
de Terre, Art. 14, Namur, carton 2, no 5).
■■ Citadelle. Front 1-2. Planchette no  1, brigade topographique
du Génie, 8 septembre 1853 (Namur, Société archéologique, pas
de no d'inv.).
■■ Citadelle. Front 2-3. Planchette no  2, brigade topographique
du Génie, 18  septembre 1853 (Namur, Société archéologique,
pas de no d'inv.).
277

Toutes périodes Namur

TOUTES PÉRIODES
Andenne/Andenne : découverte de
fosses rue Wilgot à Andenelle

Carole Hardy

Le projet de construction d'un immeuble à appar-


tements le long de la rue Wilgot, en plein cœur du
hameau d'Andenelle (parc. cad.  : Andenne, 1re  Div.,
Sect. H, nos 104x et 104v) et à environ 200 m à vol d'oi-
seau de la fouille menée le long du quai de Brouckère
en 2013 (Delaunois et al., 2014), a conduit le Service
de l'archéologie de la Direction extérieure de Namur
(DGO4  / Département du patrimoine) à mener une
intervention préventive dans cette zone archéologi-
quement sensible. Afin de laisser aux riverains un
Aménagement au fond de la fosse F06.
accès libre à leurs garages en bordure du site, le Service
a décidé d'intervenir en deux phases  : tout d'abord
la fouille de la moitié orientale de l'emprise du futur expertise par les céramologues Sophie Challe et Sylvie
bâtiment durant le mois d'août 2015, ensuite l'investi- de Longueville (Direction de l'archéologie) qui l'asso-
gation de la seconde moitié après la démolition d'une cient à la première phase de production d'Andenelle.
partie des garages. Dans le fond de cette fosse, à environ 90 cm de profon-
Au début des années 1960, R. Warginaire avait suivi deur, se trouvaient les restes de planches en bois mêlés
les travaux de construction d'un de ces garages. Ceux- à des résidus de cuivre. Ces planches étaient placées
ci n'avaient livré aucune trace de vestiges (Borremans au bord d'une sorte de goulot, petite fosse dont le fond
& Warginaire, 1966, p. 16-18). L'intervention menée en était recouvert d'une fine couche de charbon de bois.
2015 a révélé la présence de quelques fosses creusées La fonction de cet aménagement nous échappe actuel-
dans le limon naturel, à environ 30 cm sous le niveau lement. F06 est recoupée par deux autres fosses : l'une
de circulation actuel. (F07) de 1,60 m × 1,20 m × 0,90 m de dimensions est
datée par son comblement des 17e-18e siècles ; l'autre
(F10) s'étend dans son ensemble sous la moitié occi-
dentale de la zone à investiguer et n'a pas livré suffisam-
ment de mobilier pour en proposer une datation. La
fosse F02 passe quant à elle sous le garage de la parcelle
voisine à l'est et n'a donc pu être dégagée que sur
une surface restreinte, de 3 m sur 0,70 m. Les tessons
découverts dans ses remblais indiquent un contexte de
consommation du 12e au 15e siècle. Trois petites fosses
viennent compléter l'ensemble des vestiges  : F01, de
0,70 m de diamètre et d'environ 0,40 m de profondeur,
est datée par son comblement des 18e-19e siècles, F04
de 0,35 m × 0,20 m contenait des ossements (probable-
ment d'un oiseau) et F03 d'environ 0,25 m de diamètre
Vue aérienne de la zone de fouille (photo É. Delaunois). n'a, elle, pas livré de mobilier archéologique.
Un petit mur de clôture (F05) construit en pierres
Une première fosse (F06) s'étend en partie sous la calcaires et fragments de briques sur une fondation
moitié occidentale de la parcelle à investiguer. Elle en béton fermait la parcelle d'est en ouest à front de la
n'a pu être dégagée que sur une surface de 3,10  m rue Wilgot. Ce muret, conservé sur deux assises, a été
sur 2,70  m, mais elle a tout de même livré quelques démoli il y a quelques années.
petits fragments de cuivre et de nombreux tessons. Le Service de l'archéologie doit attendre la démoli-
Le mobilier céramique a fait l'objet d'une première tion de certains garages avant de pouvoir investiguer
278

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

la moitié occidentale de la zone concernée par le partie un presbytère en 1836, l'édifice avait successive-
projet. Cette future intervention permettra de dégager ment servi d'habitation, d'hôpital, d'école et de logis du
les fosses F06 et F10 sur toute leur surface et de faire maître (Van Wersch, 2002).
l'éclairage sur l'aménagement au fond de F06. En retirant le plancher de la pièce nord-est du pres-
bytère, le propriétaire a mis au jour les vestiges d'une
Bibliographie maçonnerie constituée de moellons calcaires et de rares
■■ Borremans R. & Warginaire R., 1966. La céramique briques. Mesurant 1 m sur 1 m pour ses parties les plus
d'Andenne. Recherches de 1956-1965, Rotterdam. larges, elle a été dégagée sur trois assises de hauteur.
■■ Delaunois É., Hardy C., Frébutte C., Challe  S. & L'urgence de l'intervention ne nous a pas permis d'en
de Longueville S., 2014. Andenne/Andenne : fouilles préven- apprendre davantage sur ce massif et sa fonction n'est
tives le long du quai de Brouckère à Andenelle, Chronique de actuellement pas déterminée.
l'Archéologie wallonne, 22, p. 260-263.
Bibliographie
■■ Grand-Place, 1975. Grand-Place, no  114. Presbytère. In  :
Province de Namur. Arrondissement de Namur, Liège (Le Patri-
Andenne/Sclayn : découverte fortuite moine monumental de la Belgique, 5²), p. 710-711.
d'une maçonnerie dans l'ancien presbytère ■■ Javaux J.-L. & Buchet J., 1998. L'architecture romane en
province de Namur. Inventaire raisonné, Namur, Service de la
Culture de la province de Namur (Monographies du Musée des
Carole Hardy Arts anciens du Namurois, 17).

Suite à des travaux réalisés fin juillet 2015 dans l'ancien Sources
presbytère de Sclayn (édifice classé depuis 1949), situé ■■ Van Wersch L., 2002. La Grand'Place, la collégiale et le pres-
à l'angle de la rue des Combattants et de la Grand- bytère de Sclayn au Moyen Âge, mémoire de licence, Université
Place (parc. cad. : Andenne, 8e Div., Sect. E, no 13a), le de Liège, p. 70-72 ; 111 ; 114.
propriétaire a prévenu le Service de l'archéologie de la
Direction extérieure de Namur (DGO4 / Département
du patrimoine) de la découverte d'une maçonnerie.
Celui-ci a dépêché un agent sur place afin de réaliser Dinant/Dinant : un segment de rempart
un relevé de la structure. observé place Albert Ier
Construit au 13e siècle, le bâtiment formait à l'origine
un long édifice rectangulaire avec la maison adjacente.
À la fin du 13e  siècle une petite annexe est venue se Marie Verbeek et Carole Hardy
greffer contre la façade sud. Le bâtiment fera par la
suite l'objet de plusieurs réaménagements, notamment Les travaux d'aménagement de la place Albert  Ier
l'ajout d'une aile à la petite annexe au début du 18e siècle (coord. Lambert : 188858 est/105241 nord) affectent
(Grand-Place, 1975  ; Javaux & Buchet, 1998, p.  98). assez peu le sous-sol. Les aménagements urbains de
Avant d'être divisé en deux propriétés et de devenir en surface ne nécessitent guère d'excavations profondes,
à l'exception de la pose d'impétrants, qui reprennent
place dans les tranchées antérieures. Le suivi archéo-
logique a cependant permis quelques observations.
Le sous-sol est composé presque exclusivement de
remblais récents, rapportés successivement entre
les 19e et 20e siècles lors du comblement du bras de
Meuse isolant le quartier de l'île, de l'aménagement
de la place elle-même et de la canalisation de la
Meuse.
On se trouvait là en effet auparavant en dehors de la
ville, dans une grève sans doute laissée à l'état naturel
autour de la confluence du bras de Meuse entourant le
quartier en île. La limite sud de cette zone est formée
par le rempart de l'île, identifié dans ses formes les plus
Sclayn  : vue de la maçonnerie découverte dans l'ancien récentes lors des travaux d'épuration des eaux de la
presbytère.
Meuse en 2013 (Verbeek & Hardy, 2014).
279

Toutes périodes Namur

Côté est, c'est désormais le rempart ceignant le flanc diagnostic dans une prairie située au croisement de la
mosan de la cité qui a été localisé, sur une portion rue d'Hermoye et de la rue des Forrières, à l'emplace-
de 10 m à hauteur de l'aboutissement de la rue de la ment du futur habitat groupé d'Hermoye (parc. cad. :
Barque sur la place. Son orientation nord/sud est Gembloux, 9e  Div., Sect.  B, Bossière, no  472b  ; coord.
presque parallèle à l'alignement des façades de la Lambert : 173157 est/134058 nord). Le choix d'y réali-
place, en avancée d'environ 7  m vers la Meuse. Seul ser des sondages avait été dicté suite à la découverte
le parement ouest (côté Meuse) a pu en être observé. par l'un des auteurs (D.G.), en automne 2014, de très
Il révèle une construction en moellons de calcaire nombreux fragments de tuiles et de béton rose gallo-
équarris de grandes dimensions à assises régulières, romain dans les tranchées de pose d'impétrants et les
liaisonnés au mortier de chaux jaunâtre. Ce type de déblais d'une maison construite à la rue des Forrières
construction pourrait désigner une mise en œuvre du (parc. cad. : Sect. B, no 469r2). Cette découverte venait
Bas Moyen Âge, sans doute contemporaine de la réédi- compléter celles qu'il avait faites dans et autour du
fication des murailles au tournant des 15e et 16e siècles. village lors de prospections pédestres.
Sept tranchées, orientées ouest/est et totalisant près
Bibliographie de 860  m², ont donc été implantées perpendiculaire-
■■ Verbeek M. & Hardy C. 2014. Dinant/Dinant : place Albert, ment à la rue d'Hermoye. Les résultats de cette opéra-
rue Saint-Jacques, avenue Churchill et faubourg Saint-Médard, tion ont permis d'attester la présence d'une occupa-
nouvelles informations sur le système défensif, Chronique de tion humaine inédite dans cette partie du village de
l'Archéologie wallonne, 22, p. 264-266. Bossière, s'étalant entre le 2e siècle av. J.-C. et le 6e siècle
apr.  J.-C. Le nombre de structures mises au jour a
toutefois été limité. On a pu ainsi retrouver l'angle
sud-ouest d'un petit bâtiment gallo-romain situé dans
Gembloux/Bossière : occupation la partie orientale de la tranchée longeant la rue des
laténienne, gallo-romaine et Forrières. Ce bâtiment devait avoir une longueur mini-
mérovingienne à la rue d'Hermoye male de 13,5 m et une largeur d'au moins 4 m (1). Trois
fossés parallèles, orientés nord/sud et perpendiculaires
à la pente du terrain (2, 3 et 4), ont été suivis sur une
Michel Siebrand et Didier Guiot longueur variant entre 26 m et 50 m. Ceux-ci avaient
en moyenne une largeur de 1 m pour une profondeur
Entre le 24 février et le 3  mars 2015, le Service de de 0,30 m. Leur fonction semblerait plutôt liée au drai-
l'archéologie de la Direction extérieure de Namur nage du terrain qui est fort humide en toute saison.
(DGO4  / Département du patrimoine) a effectué un Enfin, trois fosses ont été également mises au jour dans
la moitié nord de la parcelle (5, 6 et 7).
Outre ces quelques structures, le site a révélé un maté-
riel archéologique varié. Toutefois celui-ci a été essen-
res
t. B
Sec 9r2
n0 4
6 es Forr

tiellement retrouvé dans les colluvions qui recouvrent
ue d
rue d

r
les structures. Les plus anciens artefacts remontent au
’Herm

1
Second Âge du Fer, notamment une petite perle en pâte
de verre retrouvée miraculeusement dans les déblais
oye

5
des sondages. La majorité du matériel archéologique
6
7 s'étend de la fin du 1er siècle au 3e siècle apr. J.-C. On y
retrouve des tessons de sigillée, de cruches de Bavay ou
4
mosanes, de terra nigra, de dolia, de céramique mode-
2
lée, des fragments d'au moins trois meules ainsi qu'un
3
aiguisoir. Mais la majeure partie du matériel mis au jour
consistait en une grande quantité de tuiles (tegulae et
imbrices) concentrées dans la partie nord de la parcelle.
Nous ne pouvons à ce jour expliquer cette densité de
tuiles mais il est plausible qu'elles appartiendraient à un
0 20 m ou plusieurs bâtiments qui seraient situés au nord de la
rue des Forrières, comme en témoignent les prospec-
Bossière : localisation de la parcelle sondée et des structures tions pédestres et les découvertes fortuites de 2014.
(infographie S. Pirard et M. Siebrand, Serv. archéologie, Dir. Outre l'existence d'un site gallo-romain dans cette
ext. Namur).
partie du village, il faut y ajouter la présence d'un habi-
280

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Sources
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Gembloux, pl. 97.

Gembloux/Gembloux : nouvelles
données concernant l'église Saint-Sauveur
et le beffroi

Michel Siebrand et Jérôme Parmentier

La Ville de Gembloux, sous l'impulsion de


Marc  Bauvin, échevin du Patrimoine, a le projet de
mettre en valeur, dans un futur proche, le beffroi, classé
Bossière : perle de l'époque laténienne découverte par patrimoine mondial par l'Unesco depuis 2005. C'est
D. Guiot dans les déblais de fouilles.
donc dans ce cadre que le Service de l'archéologie de la
Direction extérieure de Namur (DGO4 / Département
tat mérovingien dans les alentours. En effet, l'opéra- du patrimoine) a entrepris, entre le 16  novembre
tion archéologique a également mis au jour quelques et le 22  décembre 2015, une nouvelle campagne de
tessons du 6e siècle apr. J.-C. fouilles dans le jardin du presbytère (parc. cad.  :
Nous avons aussi constaté que la parcelle n'avait pas Gembloux, 1re Div., Sect. D, no 343c ; coord. Lambert :
été mise en culture depuis plusieurs siècles, la strati- 172981 est/138945 nord).
graphie étant très succincte. Cela semble confirmer les Cette campagne a bénéficié de l'appui d'une part de
informations tirées de la carte de Ferraris (1771-1778) la Ville qui a mobilisé deux ouvriers et du matériel de
sur laquelle la parcelle sondée figure déjà comme une terrassement, et d'autre part du Cercle royal d'Art et
prairie. d'Histoire de Gembloux pour les relevés de terrain,
Au terme de cette première campagne de fouilles, l'inventaire et l'étude du matériel archéologique ainsi
malgré la faible quantité d'informations recueillies, on que pour la consultation des sources historiques.
peut conclure que les origines de Bossière sont bien Pour rappel, le beffroi de Gembloux est en fait l'an-
plus anciennes que l'on ne pouvait l'imaginer aupa- cien clocher de l'église Saint-Sauveur dont le corps
ravant. Cela implique une relecture de l'histoire du principal et le chœur ont été détruits, entre 1810 et
village. 1825, puis recouverts par le presbytère actuel et son
En collaboration avec Frédéric  Hanut, jardin.
Olivier  Vrielynck (Direction de l'archéologie), Outre l'objectif principal qui était de vérifier l'exis-
Muriel  Van  Buylaere (Recherches et Prospections tence d'éventuelles structures susceptibles d'être
archéologiques) et Steve Pirard (Service de l'archéologie valorisées, la fouille devait permettre de complé-
de la Direction extérieure de Namur). ter les données archéologiques engrangées par
L.-F.  Genicot (1964, p.  34-35) et J.  Plumier (1996),
et lors de l'étude archéologique du bâtiment en vue
de son classement en 2005 (Plumier, Berckmans &
Plumier-Torfs, 2005).
Malgré sa faible superficie (moins de 60 m2) et une
profondeur limitée à 2,90 m pour des raisons de sécu-
rité, le sondage, implanté à l'angle nord-est de la tour
(6), a révélé une série d'informations sur l'ancienne
église et le beffroi.
D'emblée, la fouille a mis au jour un remblai de
destruction, épais de plus de 3 m, résultat du démantè-
lement de l'église au 19e siècle. Elle a également permis
de constater l'absence du dernier niveau de circulation
de l'édifice religieux et la destruction des sépultures
Site en cours de fouilles, vue vers le nord-est.
sous-jacentes.
281

Toutes périodes Namur

Localisation du sondage à l'angle nord-est du beffroi : 1. Mur médiéval ; 2. Sol des 13e-14e siècles ; 3. Banquette ; 4. Pilastre ; 5. Semelle
de fondation d'une colonne ou d'un pilier ; 6. Beffroi ; 7. Mur de la chapelle nord.

Par contre, les travaux ont dégagé un long mur située à 4 m plus à l'est, est démontée et sa base enfouie
médiéval orienté ouest/est (1), d'une largeur de sous un nouveau niveau de circulation. L'arcade en
0,90  m et conservé sur 0,70  m en élévation. Celui-ci plein cintre de la tour est bouchée au moyen de briques
était contemporain de deux niveaux de sol dont le et de blocs de pierre de réemploi ; une petite porte y est
plus récent, daté des 13e-14e siècles, était composé de pratiquée pour faciliter l'accès au rez-de-chaussée de la
grandes dalles de schiste (2). Ces dernières bordaient tour. Notons que l'ensemble des matériaux du bouchage
les fondations d'une banquette appuyée contre la face devait être recouvert d'un plafonnage enduit à plusieurs
sud du mur médiéval (3). reprises de blanc et de noir dessinant une plinthe haute
Au 16e  siècle, l'église a subi de grosses de 1 m par rapport au niveau du sol. On retrouve ces
transformations dont notamment la construction de couleurs et cette «  plinthe  » sur le pilastre et le mur
la façade orientale de la tour et sa grande arcade en de la tour. Comme déjà souligné plus haut, le dernier
plein cintre. Pour ce faire, le long mur médiéval a été niveau de circulation de l'église a été détruit mais des
partiellement arasé pour servir d'appui à la tour. Un indices tendent à prouver qu'il était constitué de briques
pilastre en pierre (4), adossé également à la tour, a rouges posées sur chant. Selon les sources historiques,
été construit sur le mur médiéval. À 4  m à l'est du le pavement aurait été démonté en 1809-1810 pour
pilastre, une semelle de fondation d'une colonne ou récupérer le salpêtre qui se trouvait dans les couches
d'un pilier (5) a été construite à la fois sur le mur et sous-jacentes. Elles mentionnent aussi l'étalement
le remblai de destruction de l'église médiévale. Ce de la destruction de l'église entre 1810 et 1825, avec
remblai recelait de nombreux fragments de moulures probablement des phases d'arrêts, comme le démontre
en stuc et d'enduits peints aux motifs géométriques l'analyse stratigraphique.
et figuratifs variés. À cette époque, l'église était
dotée d'un pavement en pierre dont un lambeau a
été retrouvé sous le bouchage de la grande arcade.
Cette phase de construction voit aussi l'aménagement
d'un mur orienté nord/sud (7) qui venait s'adosser
contre la face nord du pilastre. Il n'est pas impossible
que ce mur appartienne à la chapelle figurée dans
l'iconographie ancienne, contre le mur gouttereau
nord de la nef.
Au 18e  siècle, l'église connaît de nouveaux
aménagements. Le pilastre situé au pied de la tour est
épaissi et allongé pour dépasser dans sa largeur l'emprise
Vue du sondage vers le nord.
du mur médiéval qu'il recouvre. La colonne (ou le pilier),
282

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

les ruines de la première église du village ainsi que des


sépultures appartenant à son cimetière (Delaunois &
Hardy, 2015 ; 2016). Vu l'ampleur des découvertes, il a été
décidé d'étendre la zone de fouille à l'emprise complète
du bâtiment projeté, soit environ 500 m2. L'intervention,
dont la durée a été limitée à 38 jours ouvrables, a permis
de dégager les plans de plusieurs édifices successifs et de
fouiller vingt-quatre sépultures. Les résultats de l'étude
anthropologique de ces sépultures font l'objet d'une
notice distincte (cf. infra).

Contexte géographique et historique


Fragment d'enduit peint figurant des bouts de doigts (photo
O. Gilgean, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).
Le village de Balâtre est implanté sur la rive sud de la
Ligne, un affluent de l'Orneau qui irrigue une vallée
Cette dernière campagne de fouilles a donc permis calcaire relativement encaissée. Le site se trouve dans la
d'engranger de nombreuses informations pour alimen- partie concave d'un méandre. Cette position, à la tran-
ter la réflexion du projet de mise en valeur du beffroi. sition entre le plateau et la rivière, est propice au trans-
Toutefois, celles-ci restent insuffisantes et seront port fluvial vers l'Orneau et la Sambre (O.  Collette,
complétées dans un futur proche par de nouveaux communication personnelle).
sondages dans la tour et au sud du sondage de 2015. Dès le 12e  siècle au plus tard, Balâtre est le siège
d'une seigneurie (Galliot, 1789, p. 92-93 ; Migne, 1854,
Bibliographie col.  640), dont l'ancien château-ferme (1), bâti au
■■ Genicot L.-F., 1964. Apport des fouilles récentes à l'histoire 13e siècle, est l'un des témoins.
de l'ancienne abbatiale de Gembloux, Bruxelles (Archaeologia La seigneurie comportait deux paroisses jusqu'à
Belgica, 79). la fin de l'Ancien Régime. L'une était dédiée à saint
■■ Plumier J., 1996. La fortification médiévale et l'église Martin et l'autre à sainte Aldegonde, qui fonda l'abbaye
paroissiale de Gembloux. In  : Plumier J. (dir.), Cinq années de Maubeuge au 7e  siècle. D'après la légende locale,
d'archéologie en province de Namur. 1990-1995, Namur (Études Aldegonde aurait vécu un temps en recluse dans une
et Documents, Fouilles, 3) p. 41-42. grotte située sur le versant opposé au village. Cette
■■ Plumier J., Berckmans O. & Plumier-Torfs S., 2005. cavité porte aujourd'hui encore le nom de «  Grotte
Histoire et archéologie du beffroi de Gembloux, patrimoine Sainte-Aldegonde ».
mondial (2005), Les Cahiers de l'Urbanisme, 57, p. 52-56. La première mention de la paroisse Sainte-Aldegonde
remonte à 1207 (Jacques, 1987), lorsque Nicolas de
Condé, seigneur de Balâtre, fait don de l'église au
chapitre de Saint-Aubain à Namur (Reusens, Kuyl &
Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre : les de  Ridder, 1868, p.  483). La paroisse a compté trois
vestiges médiévaux et modernes de églises successives. Le lieu de culte actuel (3), élevé au
l'église Sainte-Aldegonde centre du village en 1833, a été précédé d'une église

Élise Delaunois et Carole Hardy

En février 2015, le collège communal de Jemeppe-sur-


Sambre délivre un permis pour la construction d'une
habitation unifamiliale sur une parcelle sise rue du
Trou (parc. cad. : Jemeppe-sur-Sambre, 2e Div., Sect. A,
no  184A), à l'emplacement présumé de la première
église de Balâtre. Cette autorisation contient une clause
demandée par le Service de l'archéologie de la Direction
extérieure de Namur (DGO4 / Département du patri-
moine), à savoir la réalisation de sondages préventifs Localisation de la parcelle investiguée (en gris foncé), du châ-
et de fouilles en cas de découverte de vestiges. Cette teau-ferme (1), de l'église du « Pélémont » (2) et de l'église
actuelle (3).
évaluation a débuté le 7 avril 2015 et a rapidement révélé
283

Toutes périodes Namur

construite aux alentours de 1792, située sur l'éminence reau sud est refait. On peut associer à cette deuxième
du « Pélémont » (2). La première église se situait quant phase un sol carrelé en céramique dont les carreaux
à elle au lieu-dit « Trou de Balâtre » ; son emplacement monochromes de 5 × 5  cm forment des motifs de
approximatif est signalé par une potale du 18e  siècle. damiers. Des traces de combustion repérées sur ce
Le bâtiment est représenté sur une planche des Albums sol (carreaux surcuits, mortier brûlé) indiquent que
du duc de Croÿ (1606 ; Duvosquel, 1987) ainsi que sur l'église a subi un incendie. Du bois carbonisé a égale-
la carte de Ferraris (1771-1778). ment été retrouvé en association avec le carrelage et a
été prélevé en vue d'une datation radiocarbone.
Les vestiges Le chœur est une nouvelle fois réédifié lors d'une
deuxième vague de réfections qui se tient entre les
Le premier édifice bâti en pierre sur le site est une 13e et 16e siècles (phase 3). Ce nouveau chevet, à pans
petite église (15 m de longueur) de plan basilical dont coupés, semble s'inscrire dans la tradition gothique. Un
le chœur semi-circulaire s'appuie sur une nef unique collatéral s'appuie désormais sur le côté nord de la nef ;
(phase 1). Seules les fondations en moellons de calcaire on y accède par des arcades supportées par des piliers
subsistaient, hormis dans le chœur où une à trois assises à base carrée. La fondation de l'ancien mur gouttereau
d'élévation ont été reconnues. Le sol de circulation de est utilisée comme chaînage entre les piliers. Au sol,
ce premier bâtiment n'a pas pu être identifié ; quelques le carrelage en céramique est remplacé par un dallage
blocs de calcaire disposés à plat au niveau des fonda- de calcaire dont des pans ont été retrouvés dans la nef
tions du sanctuaire pourraient toutefois correspondre et le collatéral. Deux annexes sont également ajoutées
à un nivellement préalable à l'aménagement du sol. sur le côté sud de l'église. L'annexe orientale a servi
Une série de transformations affectent ensuite de lieu d'inhumation, il s'agissait probablement d'une
l'église entre les 11e et 13e  siècles (phase  2). La chapelle. Son édification a nécessité de modifier le mur
chronologie précise de chacune de ces modifications du chœur, ce qui se traduit par une couture et une
est encore difficile à appréhender. Il semblerait que reprise dans la maçonnerie.
le chœur soit tout d'abord reconstruit. Il présente La dernière modification du plan survient dans
désormais un chevet plat, l'une des formes les plus le courant du 16e  siècle (phase  4). Le bas-côté
fréquentes dans les églises mosanes du 11e  siècle est condamné  ; les arcades y donnant accès sont
(Genicot, 1972). Deux piliers sont également ajoutés bouchées. La maçonnerie de ce bouchage comporte
au niveau de l'arc triomphal. Une annexe est accolée des matériaux de réemploi tels des pavés ou encore un
au mur nord. Son plan est incomplet car une partie possible fragment de monument funéraire.
des maçonneries se trouvent sous la route actuelle. Il L'église reste toutefois en fonction jusqu'à la fin
pourrait s'agir d'une chapelle ou d'une sacristie, mais du 18e  siècle. Le bâtiment a certainement subi un
l'hypothèse d'un collatéral n'est pas à exclure. Enfin, nouvel incendie car des traces de rubéfaction ont à
la nef est allongée d'une travée et son mur goutte- nouveau été observées sur le dallage du sol. Celui-
ci était également recouvert d'une
couche d'ardoises brisées provenant de
l'effondrement du toit. En 1690, lors de
la bataille de Fleurus, l'église est pillée
4 et ses vases sacrés enlevés. Une série de
documents datés de 1778-1779 (Archives
de l'État à Namur) mentionnent son état
1
de délabrement avancé et ses dimensions
insuffisantes pour accueillir tous les
paroissiens. Le premier baptême dans la
nouvelle église du « Pélémont » en 1792
3 marque l'abandon définitif de l'église du
2
« Trou de Balâtre ».
5

Phase 1 Phase 2
Avant le 11e siècle 11e - 13e siècle
Matériel
0 10 m Phase 3 Phase 4
13e - 16e siècle 16e siècle
Très peu de mobilier a été récolté au
Plan général phasé des vestiges et localisation des tombes soumises à datation sein des vestiges. Les quelques tessons
radiocarbone : F067 (1), F064 (2), F059 (3), F044 (4) et F014 (5) (infographie et de céramique mis au jour sous les
relevés C. Vilain, A. Bielen et É. Delaunois, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur).
remblais de la destruction de l'édi-
284

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

Elle atteste également une occupation carolingienne et


très probablement mérovingienne du site avant l'édifi-
cation de l'église.
Les tombes F059 (3) et F064 (2) offrent des préci-
sions sur les transformations du bâtiment. Ainsi, la
chapelle sud-orientale est élevée au début ou avant
le 15e  siècle tandis que l'annexe sud-occidentale est
construite après le 14e  siècle. La sépulture F044 (4)
livre quant à elle une date récente mais incertaine. Il
s'agit probablement d'une des dernières inhumations
du site  ; on peut également émettre l'hypothèse que
la vocation funéraire du lieu s'est poursuivie quelque
Vue aérienne des vestiges.
temps après l'abandon de l'église.

fice couvrent plusieurs siècles d'occupation, du Conclusions


10e au 16e  siècle (S.  de  Longueville et S.  Challe,
communication personnelle). Trois monnaies ont été Du crépuscule de l'époque mérovingienne à l'aube
identifiées par A.  Fossion (Société archéologique de du 19e  siècle, ce ne sont pas moins de mille ans
Namur). Il s'agit d'une double mite de Guillaume II d'histoire qui sont sortis de terre au cours de ces deux
(1391-1418), d'un brûlé de Louis de Bourbon (1478- mois d'intervention à Balâtre. L'opération a mis en
1479) trouvé dans une sépulture et d'un gigot des lumière une église méconnue, à l'ancienneté insoup-
archiducs Albert et Isabelle (1615). Quelques objets çonnée et dont l'évolution du programme archi-
métalliques (clés, plombs de vitraux) et des fragments tectural reflète l'histoire de la paroisse de Balâtre-
de verre coloré sont en cours de restauration. Enfin, Sainte-Aldegonde et du monde rural médiéval.
plusieurs éléments de décor ont été découverts dans Ainsi, l'agrandissement de la nef de l'édifice primi-
les différentes couches de remblais. Il s'agit d'élé- tif est probablement à mettre en lien avec l'essor
ments d'enduit peint décorés d'un faux appareil rouge démographique et économique que connurent les
ou ocre (A.  Wilmet, communication personnelle), campagnes à partir du 11e  siècle. Les modifications
de moulures en plâtre et d'un fragment d'un pinacle ultérieures répondraient elles aussi à une demande
gothique sculpté dans une pierre tendre. des paroissiens dont le nombre s'accroît (ajout d'un
collatéral) et à une volonté des décimateurs de
Datations radiométriques moderniser l'édifice (réfection du chœur). Ce récit
n'est cependant pas exempt de malheurs : incendies,
Plusieurs sépultures en lien avec des éléments archi- pillage, délabrement progressif… jusqu'à l'abandon
tecturaux ont été échantillonnées en vue d'une data- définitif. L'église du « Trou de Balâtre » apparaît donc
tion radiométrique. Une première série de dates ont comme un élément clé dans l'histoire du village, dont
été obtenues pour cinq d'entre elles au laboratoire de les origines devraient s'éclairer encore un peu plus à
l'Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA). Deux la lumière des études post-fouilles.
échantillons (RICH-22209 et RICH-22208) ont néces- Avec la collaboration technique de Claudy Vilain et
sité une nanofiltration en raison d'un rapport carbone/ Antonin Bielen.
azote trop élevé.
La datation de la sépulture F067 (1 ; 689-881 apr. J.-C) Remerciements
est particulièrement intéressante. En effet, cette tombe
est située sous le chœur de la première église et consti- Nous tenons à remercier très chaleureusement
tue dès lors le terminus post quem de sa construction. les personnes suivantes : Christian  Frébutte pour
son suivi et ses conseils pendant et après la fouille,
Martine Soumoy et l'équipe du Service de l'archéologie
de la Direction extérieure du Hainaut 1 pour leur colla-
boration, l'équipe de terrain du Service de l'archéologie
de la Direction extérieure de Namur, Mathieu Boudin
et Marc Van Strydonck du laboratoire de datation de
l'IRPA, Marie Verbeek pour les enrichissants échanges
et enfin les riverains de Balâtre pour leur intérêt et leur
Résultats des datations radiométriques.
enthousiasme vis-à-vis des fouilles.
285

Toutes périodes Namur

Bibliographie occupé en continu du 8e au 18e siècle (cf. notice supra).


■■ Delaunois É. & Hardy C., 2015. Mise au jour des vestiges En raison des contingences liées à l'intervention
d'églises médiévales et des Temps modernes à Balâtre (Jemeppe- préventive, l'entièreté du cimetière paroissial n'a pu
sur-Sambre). In : Frébutte C. (coord.), Pré-actes des Journées être fouillée. Les vingt-quatre personnes ne repré-
d'Archéologie en Wallonie, Rochefort 2015, Namur, Service sentent donc qu'une faible proportion de la popula-
public de Wallonie (Rapports, Archéologie, 1), p. 92-94. tion inhumée sur le site. Il n'est, par conséquent, pas
■■ Delaunois É. & Hardy C., 2016. Découverte des vestiges possible d'établir de statistiques fiables en matière
de la première église de Balâtre (Jemeppe-sur-Sambre, Nr), démographique et sanitaire, comme ce serait le cas
Archaeologia Mediaevalis – Chronique/Kronieken, 39, p. 45-48. avec une population d'au moins cent personnes.
■■ Duvosquel J.-M. (éd.), 1987. Pl. 135. Balâtre. In : Comté de Malgré ces restrictions, l'analyse anthropologique
Namur II. Bailliages de Bouvignes, Fleurus, Viesville et Wasseiges, apporte des données intéressantes sur la démographie,
Bruxelles, Crédit communal de Belgique (Albums de Croÿ, XV).
les pathologies osseuses, dentaires et l'hygiène buccale
■■ Galliot C.-F.-J., 1789. Histoire générale ecclésiastique et civile ainsi que les variations humaines (traits non métriques
de la ville et province de Namur, vol. 4, Liège. et marqueurs musculo-squelettiques d'activité). L'état
■■ Genicot L.-F., 1972. Les églises mosanes du xie siècle. de préservation des squelettes est variable et relative-
I. Architecture et société, Louvain, Publications universitaires de ment contraignant pour l'étude anthropologique réali-
Louvain (Recueil de travaux d'histoire et de philologie, 4e série,
sée macroscopiquement.
48).
■■ Jacques F., 1987. Titulaires des églises et des chapelles en
Gestes funéraires
1650 dans l'ancien diocèse et la province de Namur, Annales de
la Société archéologique de Namur, 65, p. 177-225.
Le traitement funéraire appliqué aux défunts est simi-
■■ Migne J.-P. (éd.), 1854. Gesta abbatum Gemblacensium. In :
laire à ce qui est communément observé pour le Moyen
Saeculum XII. Sigeberti Gemblacensis monachi. Opera omnia,
Âge. Il s'agit d'inhumations primaires simples dans
Paris (Patrologiae cursus completus, Series secunda, CLX),
col. 595-662. un linceul et/ou dans un cercueil. Quelques recoupe-
ments et dépôts successifs sont observés. La plupart des
■■ Reusens E., Kuyl P. & de Ridder C.-B., 1868. Analectes
pour servir à l'histoire ecclésiastique de la Belgique, V, Louvain-
tombes fouillées se trouvent à l'intérieur des murs de
Bruxelles. l'église (chœur, nef et chapelles) ; seules trois sépultures
du cimetière ont été dégagées. Toutes les tombes sont
Sources orientées ouest/est, à l'exception de deux, orientées est/
■■ Balâtre-Sainte-Aldegonde. Comptes. 1655-1789 (Archives de ouest dans le chœur et qui appartenaient à des hommes.
l'État à Namur, no 1910). Une parure crânienne en alliage cuivreux constitue le
■■ Bouchat C., s.d. Balatre. Balastre, travail de recherche non seul élément du trousseau funéraire retrouvé. Tous les
publié. défunts se trouvaient en décubitus dorsal.
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Gembloux, pl. 97. Démographie

Les vingt-quatre individus mis au jour durant cette


opération sont majoritairement adultes. Le ratio
hommes-femmes est égal. Même si une prépondérance
Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre : résultats d'hommes est souvent notée à l'intérieur des églises à
de l'analyse anthropologique des cette époque, plusieurs cimetières tant ruraux qu'ur-
squelettes de l'église Sainte-Aldegonde bains présentent le même ratio (Van  Cant, 2015). La

Hélène Déom et Élise Delaunois

Introduction

Les fouilles menées par le Service de l'archéologie de


la Direction extérieure de Namur (DGO4  / Départe-
ment du patrimoine) sur le site de la première église
de Balâtre en 2015 ont permis de mettre au jour vingt-
quatre squelettes humains. Ceux-ci appartiennent
Balâtre, démographie : nombre d'individus par catégorie d'âge.
aux périodes médiévale et moderne, le site ayant été
286

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

stature moyenne des individus adultes est de 1,67 m,


soit légèrement plus grand que ce qui est connu et a été
estimé pour le Moyen Âge. Cette taille est, par contre,
plus proche de celle définie pour les Temps modernes
(Frayer, 1984 ; Polet et al., 1991 ; Van Cant, 2015).

Pathologies

Ces personnes présentent des caractéristiques


sanitaires relativement normales pour l'époque. Le
régime alimentaire, identifié d'après l'usure des dents et
les calculi (tartre), devait être composé principalement
Balâtre, crâne de F056 : vue du pariétal droit perforé.
de glucides (carbohydrates), mais aussi de protéines
et de végétaux (Brickley & Ives, 2008 ; Polet & Orban,
2001). Le taux de caries est plus élevé que celui fractures de côtes et du pied droit qui ne peuvent être
observé dans d'autres cimetières ruraux médiévaux et assurément définies comme accidentelles. Une analyse
postérieurs (Boddington, 1996 ; Van Cant, 2015). Les approfondie de la blessure crânienne permettra sans
maladies (articulaires, traumatiques, métaboliques, doute de confirmer son caractère intentionnel et, le
infectieuses), tant osseuses que dentaires, sont celles cas échéant, d'identifier le type d'arme et les modalités
communément retrouvées au Moyen Âge (Boddington, d'impact ayant causé cette perforation.
1996 ; Van Cant, 2015). Plusieurs individus étaient par
exemple atteints d'arthrite. Des déficiences en fer ou Traits non métriques
vitamine D durant l'enfance (malnutrition ou maladie)
ont notamment été reconnues à la porosité légère de Quelques traits de variation humaine ont pu être
certaines orbites ou à des lignes de stress sur l'émail de observés. Il s'agit de caractères morphologiques qui
quelques dents (hypoplasie). apparaissent de façon variable sur les ossements de
Des marqueurs de travail plutôt physique correspon- personnes vivantes selon des facteurs non patholo-
dant à la vie en milieu rural ont été remarqués chez giques tels que l'environnement, l'hérédité, l'activité
certains individus, comme le port de charges lourdes (Katzenberg & Saunders, 2008). Quelques-uns de ces
(Judd & Roberts, 1999 ; Van Cant, 2015). L'important traits au caractère potentiellement «  génétique  »
taux de traumatismes et fractures pour ce petit nombre (Hanihari & Ishida, 2001  ; Larsen, 1997  ; Waldron,
d'individus indique des accidents et/ou chutes (Lovell, 2008) ont été observés chez six défunts. Cependant,
1997). Quelques individus montrent également des les sépultures des individus présentant un ou deux de
fractures de stress au niveau des vertèbres ou du tarse ces traits ne sont pas regroupées, ni toutes placées à
(Lovell, 1997). Des traces d'infections osseuses, proba- l'intérieur de l'église. S'il y a effectivement un lien de
blement post-traumatiques, sur les os longs sont égale- parenté entre ces personnes, il est relativement éloigné
ment rencontrées. ou ne requiert pas une inhumation à proximité directe.
Un homme de 35-48  ans (F056), inhumé dans la
chapelle sud-orientale, se démarque par une perfora- Conclusions
tion ante mortem et partiellement cicatrisée du crâne
au niveau du pariétal droit. Cette blessure résulte très Ainsi, malgré l'apparente variabilité des résultats et le
probablement d'un traumatisme violent, étant donné caractère incomplet du lot mis au jour et analysé, la
sa localisation. L'homme présente également des population inhumée montre une certaine homogénéité.
Les pratiques funéraires, le ratio hommes-femmes,
les pathologies et marqueurs de travail physique sont
plutôt cohérents avec le contexte médiéval rural. La
stature estimée, le taux de caries et le taux de trauma-
tismes observés sont néanmoins plus élevés que pour
d'autres populations médiévales rurales. Des traits non
métriques suggèrent un lien de parenté entre des indivi-
dus inhumés dans des endroits distincts de la zone fouil-
lée. Des données intéressantes concernant des anomalies
anatomiques et des blessures potentiellement violentes
Balâtre, sépulture F056 : homme inhumé en décubitus dorsal.
complètent la vision, certes partielle, de la population
287

Toutes périodes Namur

inhumée à Balâtre entre les 8e et 18e siècles. Ces résultats (DGO4  / Département du patrimoine). La parcelle
sont également importants dans le cadre plus global des concernée se situait en effet dans une zone sensible, à
populations rurales médiévales car chaque détail – qu'il l'angle de la rue d'Ordin et de la place de Moustier, dans
soit plus commun ou plus intéressant  – noté sur ces le jardin d'un bâtiment du 19e siècle repris à l'inventaire
ossements participe à la reconstitution des modes de vie du patrimoine monumental (Nos 5-6, 1975).
de ces civilisations du passé. Les terrassements ont consisté au retrait d'un impor-
tant remblai moderne, qui avait surélevé le niveau
Bibliographie du jardin par rapport à celui de la rue. Aucun vestige
■■ Boddington A., 1996. Raunds Furnells. The Anglo- archéologique n'a été repéré dans ni sous ce remblai.
Saxon church and churchyard, Swindon (English Heritage,
Archaeological Report, 7). Bibliographie
■■ Brickley M. & Ives R., 2008. The Bioarchaeology of Metabolic ■■ Nos 5-6, 1975. Nos 5-6. In : Province de Namur. Arrondissement
Bone Disease, Amsterdam, Elsevier Academic Press. de Namur (A-M), Liège (Le Patrimoine monumental de la
■■ Frayer D.W., 1984. Biological and cultural change in the Belgique, 51), p. 444.
European Late Pleistocene and Early Holocene. In  : Smith  F.
& Spencer F. (éd.), The origins of modern humans, New York,
A.R. Liss, p. 211-250.
■■ Hanihari T. & Ishida H., 2001. Frequency variations of Namur/Namur : citadelle, esplanade de
discrete cranial traits in major human populations, Journal of Terra Nova. Mise au jour de plusieurs
Anatomy, 199, p. 251-725.
constructions lors du suivi de chantier
■■ Judd M.A. & Roberts C.A., 1999. Fracture Trauma in a
Medieval British Farming Village, American Journal of Physical
Anthropology, 109, p. 229-243. Pierre-Hugues Tilmant
■■ Katzenberg M.A. & Saunders S.R., 2008. Biological Anthro-
pology of the Human Skeleton, 2e éd., Hoboken, Wiley-Liss. Entre février et décembre 2015, un suivi archéolo-
■■ Larsen C., 1997. Bioarchaeology: interpreting behaviour from gique a été réalisé sur l'esplanade de Terra Nova, dans
the human skeleton, Cambridge, Cambridge University Press. le cadre de la rénovation des abords de l'ancienne
■■ Lovell N., 1997. Trauma Analysis in Paleopathology, Year- caserne construite entre 1820 et 1825. Cet espace,
book of Physical Anthropology, 40, p. 139-170. d'une superficie de près de 1 ha au sein du site fortifié,
■■ Polet C., Leguebe A., Orban R. & Lambert G., 1991. n'est pas représenté sur les vues et plans anciens, dont
Estimation de la stature de la population mérovingienne de ceux de Johan Blaeu en 1649 et Gabriel Bodenehr en
Torgny, Anthropologie et Préhistoire, 102, p. 111-123. 1692. Le plan de Nicolas Visscher en 1695 montre à
■■ Polet C. & Orban R., 2001. Les dents et les ossements cet endroit une dépression de forme circulaire avec
humains. Que mangeait-on au Moyen Âge ?, Turnhout, Brepols. au centre une surélévation du terrain. Il s'agit vrai-
■■ Van Cant M., 2015. Scrutiny of Osteological Analyses of semblablement de la mare mentionnée dans un plan
Medieval populations in Rural Flanders (Belgium), in compar- de la même période (Vincennes, S.H.A.T.). À cette
ison with North-Western European case studies, based on the époque, aucune construction en dur ne semble avoir
osteological analysis of the skeletal remains from Moorsel and
été érigée à l'emplacement de l'esplanade. Par contre,
Oosterweel, Assemblage, p. 25-40.
le plan de Sébastien de Vauban de 1703 montre à cet
■■ Waldron T., 2008. Palaeopathology, Cambridge, Cambridge endroit un projet ou de construction ou au moins
University Press (Manuals in Archaeology).
d'aménagement du terrain. Les plans de peu posté-
rieurs manquent de précision sur cette partie du site.
Par contre, en 1747, le plan de Larcher d'Aubancourt
montre bien les transformations des lieux  ; parmi
Jemeppe-sur-Sambre/Moustier-sur- celles-ci, un chemin entoure l'emprise approxima-
Sambre : suivi de chantier rue d'Ordin tive de l'esplanade, là où sera construite la caserne.
Le relief a manifestement été adapté aux nécessités
de la défense. Un peu plus à l'ouest, un parapet a été
Élise Delaunois et Nathalie Mees aménagé, apparemment afin de recevoir trois embra-
sures pour pièces d'artillerie. La schématisation sur
Au mois de novembre 2015, la construction de garages la carte de J.-J.  de  Ferraris en 1771-1778 ne permet
rue d'Ordin (parc. cad. : Jemeppe-sur-Sambre, 6e Div., pas d'appréhender objectivement l'évolution de cette
Sect.  A, no  279F) a suscité l'intervention du Service zone de la citadelle. Peu de temps après, en 1782,
de l'archéologie de la Direction extérieure de Namur Joseph II ordonnera le démantèlement et la destruc-
288

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

St. 02
de a F
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s N
Fo erra 0 10 m
T St. 01
A A A
St. 05
Mu B
rai
lles
Ancienne caserne
délimitant

St. 03
Ancien corps
de garde
G
l’esplanade C

Citadelle de Namur : plan de localisation des principales structures mises au jour sur l'esplanade de Terra Nova.

tion de cette dernière et ce n'est qu'entre 1815 et 1830 en cas d'entretien. Deux autres orifices d'où s'écoulaient
que des campagnes de reconstruction importantes des eaux pluviales ou d'infiltration se trouvent à proxi-
auront lieu. mité des limites est et ouest de la voûte. Le pignon ouest
L'espace concerné par le projet de rénovation couvre présente à son sommet une cavité d'où émerge un tuyau
en outre les surfaces situées entre le talus (St. 02) et l'an- de plomb. L'extrémité évasée de ce dernier est pourvue
cienne caserne située plus au sud. La partie de terrain d'un filtre circulaire. Ce dispositif manifestement destiné
située à l'ouest du pignon occidental de cette dernière à pomper l'eau est certainement contemporain du perce-
et au nord-est de l'ancien corps de garde a également ment oriental de la voûte. Ces aménagements ont sans
été examinée. Une citerne (St. 01) ainsi qu'un réseau de doute été décidés afin de remplacer ou de compléter
chenaux (A) qui y est en partie vraisemblablement relié, l'usage de l'orifice circulaire central.
les fondations de la prison militaire (St. 03) et celles des La datation de la citerne reste jusqu'à présent impré-
blocs sanitaires (St. 04 [B] et St. 05) ont été mis au jour. cise. Certains éléments font penser qu'elle pour-
rait être contemporaine de la caserne édifiée entre
La citerne St. 01 1820 et 1825. En effet, les deux constructions sont
presque parallèles et certains des chenaux mis au jour
L'extrados de la citerne n'a été que faiblement dégagé semblent avoir pu relier les deux édifices. Par ailleurs,
dans l'emprise des trois sondages creusés par l'entre- les surfaces dégagées de l'extrados de la voûte de la
prise en charge des travaux  ; le faîte a été mis au jour citerne présentent un aspect très proche de l'extrados
dans le sondage est à une profondeur d'environ 0,50 m. de la boulangerie souterraine de la porte de Médiane
Ces terrassements ont également permis de décou- (Tilmant, 2015a), réaménagée sous l'occupation
vrir partiellement les pignons est et ouest. L'extrémité hollandaise. On notera également les ressemblances
orientale de l'extrados a révélé d'importants dégâts  ; à des parements internes de la citerne St. 01 avec ceux
cet endroit, la voûte a été anciennement percée à son de la citerne située sous la deuxième chambrée de la
intersection avec le pignon est afin d'insérer un tuyau caserne, qui toutefois n'ont pu être examinés que très
de plomb. L'orifice a été mis à profit après élargissement partiellement. Cette hypothèse de contemporanéité
pour descendre dans la citerne. Elle ne contenait plus chronologique se heurte néanmoins à d'autres faits.
qu'un fond vaseux recouvert d'eau, sur une profondeur D'une part, l'emprise limitée des terrassements n'a pas
de 0,20  m. Les dimensions intérieures ont été relevées permis de confirmer de manière formelle la liaison
(longueur  : 24,60  m  ; largeur  : 4,98  m  ; hauteur maxi- entre la citerne et les chenaux découverts. D'autre
male  : 3,74  m). Le centre de la voûte est équipé d'un part, pourquoi la caserne aurait-elle été équipée d'une
orifice circulaire d'environ 0,60 m de diamètre et 2 m de citerne externe, vulnérable aux bombardements, alors
haut. À sa verticale, le fond de la citerne était recouvert que son sous-sol a été pourvu d'importants dispositifs
de gravats autour desquels une dizaine de seaux en métal de réserve d'eau (Tilmant, Delaunois & Hardy, 2015,
ont été observés. L'orifice était donc destiné à l'origine à p. 303) ? Par ailleurs, les ressemblances dans les tech-
puiser les eaux récoltées et à permettre l'accès à l'intérieur niques de construction entre la boulangerie précitée et
289

Toutes périodes Namur

la citerne St. 01 peuvent n'être dues qu'à une rénova- f


tion de cette dernière entre 1815 et 1830. On ne peut
donc exclure jusqu'à présent que la citerne soit anté- c d
rieure à 1820. Cette possibilité permettrait d'expliquer,
avec les réserves d'usage, une importante anomalie liée
à la construction de la caserne. Antérieurement à cette a
dernière et d'après un plan de 1756 (Namur, Archives b
de l'État), il est vraisemblable que les extrémités nord
et est des galeries de Boufflers (C) débouchaient à l'air
libre, en suivant la déclivité du terrain. La représen-
tation graphique employée pour ce plan ne permet
pas d'être absolument catégorique sur ce point. La e
galerie la plus orientale débouchait quant à elle sur le
fossé séparant Terra Nova de la deuxième enveloppe
bastionnée. Ces galeries formaient un ensemble
cohérent. Avec le remblaiement du fossé précité et
Les fondations de la prison St. 03, vue prise vers le nord.
la construction de nouvelles galeries greffées sur les
anciennes communications, travaux exécutés dès 1816
(Bragard et al., 2002, p.  49), cet ensemble aurait pu détruite en 1983. Aucune trace n'en a été retrouvée
former un réseau ininterrompu de souterrains entre la au cours du suivi archéologique des travaux. À noter
demi-lune de Terra Nova et le fossé de l'ancien château que la citadelle renfermait un autre établissement
des Comtes. Cette option nécessitait de construire la pénitentiaire, connu par un plan de la même brigade,
caserne plus au nord, d'environ 10  m à 15  m. Il est daté du 22 octobre 1855. Ce bâtiment s'élevait sur la
possible que cette solution ait été rendue inapplicable terrasse implantée sous la muraille connue sous le
par la préexistence de la citerne St.  01. Dans cette nom de « bonnet de prêtre », à l'est de la tourelle des
hypothèse, la construction de cette dernière aurait eu Guetteurs. Contre le pignon nord de la prison St. 03
lieu avant 1820. Elle ne figure en tout cas ni sur un plan a été mise au jour une chambre de visite en briques
de 1695 (Vincennes, S.H.A.T.) ni sur celui, précité, de à laquelle aboutit un chenal (f). Celui-ci collectait
1756. En l'état actuel des connaissances, seule une vraisemblablement des eaux d'infiltration provenant
recherche complémentaire en archives permettrait du talus surplombant la muraille au pied de laquelle
vraisemblablement d'éclaircir ce point. la St. 03 avait été construite.

La prison militaire (St. 03) Les blocs sanitaires St. 04 (B) et St. 05

La prison se situait à 20  m à l'ouest de la caserne, Cet ensemble est situé au nord de la prison St. 03. Il
le long d'une des murailles délimitant l'esplanade. figure sur le plan daté du 01 octobre 1958 et relatif à
Elle a vraisemblablement été construite dans la des travaux de restauration. Le bloc St. 04 (B) (2 m sur
première  moitié du 20e  siècle et abattue après 1970. 10,60 m) était implanté au pied de l'une des murailles
Elle figure et est sommairement décrite sur le plan de délimitant l'esplanade, à l'est du fossé de Terra Nova,
numérotage des bâtiments militaires (1950-1951  ?) tandis que le bloc St. 05 (7,50 m sur 9,70 m) se trou-
de la citadelle, sous le no  41 K. Un plan de situation vait à une dizaine de mètres plus au nord. Seule une
de la Caserne Terre Neuve, non daté, qualifie la prison partie des fondations de ces bâtiments ont été retrou-
de cachots. Le suivi des terrassements de cette partie vées. D'après le plan précité, le bloc St. 05, tel qu'il a été
du site a entraîné la mise au jour de ses fondations mis au jour, constitue une nouvelle version de latrines,
de briques. Le bâtiment long de 13,50  m et large de remplaçant deux bâtiments plus petits. C'est apparem-
5,90 m se composait d'un couloir (a), de 5 cellules (b), ment à l'un d'entre eux que fait référence P. Bragard en
d'une pièce à usage non défini (c) et de latrines (d). Au suggérant une construction possible en même temps
pied de la façade est a été partiellement dégagée une que les cuisines, vers 1830 (Bragard, 2012, p. 108).
canalisation de grès (e) provenant, selon toute vrai-
semblance vu son orientation, des anciennes cuisines Autres découvertes
(G). Celles-ci avaient été construites en 1830 au sud de
la prison. Elles figurent sur le plan de la brigade topo- Au pied du talus St. 02 et dans l'axe de la canalisation
graphique du Génie daté du 28 septembre 1853. Elles principale mise au jour en 2014 (Tilmant, Delaunois &
seront transformées ensuite en infirmerie, laquelle sera Hardy, 2015, p. 303), un assemblage de quatre grands
290

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

blocs calcaires taillés avec orifice d'évacuation central dimensions destinées à la construction de galeries,
a été découvert (D). Il s'agit selon toute vraisemblance casemates, contre-mines, etc., lesquelles étaient ensuite
d'un dispositif sanitaire, de type douche. Chaque bloc recouvertes d'une épaisse couche de remblais afin d'en
semble avoir constitué un bac de 1 m de côté. Contre assurer la protection en cas de bombardement.
l'un des blocs a été dégagée une chambre de visite. Les terrassements ont donné lieu à la mise au jour
Celle-ci communique avec la canalisation précitée de fragments céramiques, dispersés à travers les
qui se poursuit sous les blocs, en passant à travers le remblais modernes. Ces derniers sont consécutifs soit
talus sur le flanc nord duquel elle émerge. Plus à l'est à la reconstruction de l'esplanade et de ses abords sous
et toujours au pied du talus, trois maçonneries arasées l'occupation hollandaise (1815-1830), soit aux travaux
(E) ont été mises au jour dans une tranchée. La largeur d'aménagements réalisés depuis lors par l'armée belge
limitée de celle-ci n'a pas permis de déterminer si ces (1830-1977) ou bien encore aux travaux menés par la
maçonneries appartiennent à un seul et même bâti- Ville de Namur à partir de 1977. Parmi ces derniers
ment. Elles présentent toutes les trois comme liant figure l'apport de remblais provenant d'une commune
un mortier de chaux de teinte jaune. Aucun édifice proche. Il s'avère donc que les terrassements réalisés
n'apparaît à cet emplacement sur les plans anciens et ont fourni du matériel archéologique particulièrement
modernes consultés. perturbé et dont l'origine est douteuse. On y retrouve
Au sud, à l'est et à l'ouest de la citerne St.  01 a été des tessons d'usage civil ou militaire. Ce dernier est
partiellement dégagé un réseau dense de chenaux, par notamment illustré par un bol complet portant une
endroits très mal conservés, ainsi que deux anciennes inscription régimentaire.
chambres de visite (A). Les limites de terrassement
n'ont pas toujours permis de corréler de manière indu-
bitable ces éléments, ni même de relier ceux-ci aux
traces des descentes d'eau pluviale primitives encore
visibles dans la façade nord de l'ancienne caserne.
Certains des chenaux découverts s'écartent résolument
de la citerne St. 01 et n'ont aucun rapport avec elle. Les
parois et les fonds de la majorité des chenaux sont en
briques, avec couverture en dalles calcaire, parfois de
récupération. Une partie du réseau a été modernisée
par l'emploi de canalisations en grès.
À la demande du Service Citadelle de la Ville de
Namur, l'entreprise en charge des terrassements a
creusé un sondage au pied du talus St.  02 (F). Cette
intervention était destinée à collecter des informations Bol avec inscription régimentaire (photo O.  Gilgean, Serv.
archéologie, Dir. ext. Namur).
sur la nature du sous-sol à l'emplacement de l'un des
pylônes du futur téléphérique. Le creusement a été
réalisé jusqu'à une profondeur de 4,60 m et n'a laissé Le suivi de chantier réalisé en 2015 a permis de
apparaître que des couches de remblais de composi- compléter nos informations sur l'occupation de l'espla-
tion hétérogène. Le substrat naturel n'a pas été atteint nade de Terra Nova depuis le début du 19 e siècle mais
et aucune structure archéologique n'a été mise au jour laisse largement en suspens les périodes antérieures. Il
(Tilmant, 2015b, p. 1). Cette importante épaisseur des conviendra de poursuivre les interventions archéolo-
remblais avait déjà été constatée à l'ouest de la citerne giques préventives dans ce secteur, notamment avec la
St.  01, où elle atteignait plus de 3  m. Par contre, les mise en place des fondations des pylônes du téléphé-
terrassements réalisés au pied de la façade nord de rique envisagé.
l'ancienne caserne ont montré en deux endroits la
présence du substrat à une profondeur inférieure à Bibliographie
0,50 m. Ces différences importantes de niveau du sol ■■ Bragard P. (dir.), 2012. Namur, la citadelle hollandaise. Une
en place sont liées à des modifications volontaires du fortification mosane de Wellington à Brialmont (1814-1878),
relief de la citadelle. Le plan de Larcher d'Aubancourt Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur.
de 1747 montre un relief nettement artificiel, alternant ■■ Bragard P., Bruch  V., Chainiaux  J., Francois  D. &
zones basses et talus surélevés, et qui résulte mani- Marchal  J., 2002. La termitière de l'Europe. Les souterrains
festement d'un aménagement à but défensif. Selon de la citadelle de Namur, Namur, Les Amis de la Citadelle de
les pratiques en cours au 18e  siècle, celui-ci pouvait Namur.
consister à creuser à ciel ouvert des tranchées de vastes
291

Toutes périodes Namur

■■ Tilmant P.-H., 2015a. Namur/Namur : citadelle, examen des Namur/Namur : citadelle, interventions
salles souterraines sous la route Merveilleuse, à l'emplacement
de l'ancien fossé médiéval, Chronique de l'Archéologie wallonne,
archéologiques 2014 à la porte de
23, p. 304-306. Médiane
■■ Tilmant P.-H., Delaunois É. & Hardy  C., 2015. Namur/
Namur  : citadelle, caserne de Terra Nova. Examen d'un puits Pierre-Hugues Tilmant
et d'un réseau d'égouttage, Chronique de l'Archéologie wallonne,
23, p. 302-304.
À la fin du 17e siècle, à la suite de la construction de
Médiane (1542-1559) et de Terra Nova (1631-1675),
Sources ce qui subsistait de la deuxième enceinte médiévale
■■ Blaeu  J., Namurcum, 1649 (Namur, Société archéologique, du château comtal avait perdu toute utilité défensive.
inv. B-Pl-003-04). Le tronçon encore conservé contre la tour nord de
■■ Bodenehr G., Die Stadt, das Castel und Fort von Namur, l'enceinte fut abattu sur une distance d'environ 15 à
1692 (Namur, Société archéologique, inv. B-Pl-017-01). 20 m et le fossé comblé. À cet emplacement fut érigée
■■ Bout de plan de Namur relatif aux puits et citernes, 1695 une boulangerie souterraine construite par Menno
(Vincennes, Service historique de l'Armée de Terre, Art.  14, van Coehoorn en 1695-1698, et surmontée de casernes.
Namur, carton 1, no 10). D'après un plan de 1707 (Vincennes, S.H.A.T.), la
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) boulangerie adossée au tracé de l'enceinte se compo-
de Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Namur, pl.  116 sait de deux fours et d'une vaste salle rectangulaire. Un
(Bruxelles, Bibliothèque royale Albert Ier). passage avait été aménagé entre celle-ci et une pièce de
■■ Caserne Terre-Neuve. Plan de situation (Archives de la Ville plan carré qui débouchait sur trois casemates voûtées
de Namur, pas de no d'inv.). (Tilmant, 2015, p. 304-305). Des travaux furent réali-
■■ Citadelle. Courtine. Planchette no 4, brigade topographique du sés sous l'occupation hollandaise (1815-1830), le four
Génie, 28 septembre 1853 (Namur, Société archéologique, pas sud étant partiellement détruit et celui situé au nord
de no d'inv.). modernisé. Dans le cadre des travaux relatifs à la
■■ Citadelle. Donjon. Planchette no 6, brigade topographique du restauration et à la mise en valeur de la porte et enta-
Génie, 22 octobre 1855 (Namur, Société archéologique, pas de més en 2013, il était prévu de creuser un sondage au
no d'inv.). pied de la tour médiévale en vue de l'aménagement
■■ Larcher d'Aubancourt, Plan des ville et châteaux de Namur d'une cour anglaise. Il convenait aussi d'étanchéiser
pour servir à la conoissance des mines et de tous les souterrains l'extrados de la voûte de la boulangerie et de protéger
relatif au plan en relief, 1747 (Vincennes, Service historique de ses murs latéraux. Pour ce faire, l'extrados, déjà examiné
l'Armée de Terre, Art. 14, Namur, Tab. 95, no 17). par J.-L. Antoine en 2002, a été totalement dégagé et des
■■ Le Prestre de Vauban S., Plan du Ch(âte)au de Namur, 1703 terrassements ont été effectués sur les côtés est, ouest et
(Vincennes, Service historique de l'Armée de terre, Art.  14, sud du bâtiment souterrain. Ces travaux ont fait l'objet
Namur, carton 1, no 15b). d'un suivi archéologique et d'une fouille.
■■ Plan de numérotage. B.M. 35. Caserne de Terre-Neuve. Cita- Le sondage (1) lié à la cour anglaise avait pour objec-
delle-Namur. Plan de numérotage. Échelle 1/400, 1950-1951  ? tif de reconnaître la profondeur à laquelle se trouvait
(lieu de conservation inconnu).
le fossé de la deuxième enceinte. Le creusement réalisé
■■ Plan van de souterains van Terra Nova en de twee agter leggende jusqu'à 5,50  m de profondeur sous le niveau actuel
enveloppes alles op het casteel van Namen, 1756 (Archives de
de circulation n'a fourni aucun élément en ce sens et
l'État à Namur, Cartes et Plans, no 431).
n'a pas été poursuivi pour des raisons de sécurité. Par
■■ Restauration du complexe de latrines de la caserne Terre-Neuve contre, il a permis l'examen d'une partie du parement
à la Citadelle de Namur, 01 octobre 1958 (Archives de la Ville de
externe de la tour. Cette maçonnerie est apparue en
Namur, pas de no d'inv.).
très bon état de conservation. Elle se compose de blocs
■■ Tilmant P.-H., 2015b. Namur. Citadelle. Terra Nova. Observa-
de grès équarris, disposés en assises assez régulières
tions stratigraphiques du sondage creusé le 09 septembre 2015 au
et liés par un mortier de chaux de teinte jaune clair à
pied du talus situé face à la caserne (actuel Centre des visiteurs),
rapport inédit, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur. ocre. Le parement est pourvu d'un cordon biseauté en
calcaire taillé.
■■ Visscher N., Plan de la ville et château de Namur, 1695
(Namur, Société archéologique, inv. B-Pl-143).
Côté est, en limite de fouille, l'arrachement et le
début du parement d'une maçonnerie ont été obser-
vés (Z01.F40). Celle-ci se compose de blocs de grès
liés au mortier de chaux de teinte jaune, reposant sur
le substrat naturel (schiste altéré). La structure, d'une
épaisseur minimale de 1,30  m à 1,45  m, aurait été
292

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

terrassements. Cette maçonnerie délimitait côté est


l'enclos dans lequel avait été construit un arsenal
sous l'occupation hollandaise. Toutefois, elle n'avait
Tour nord de la pas été prévue dès l'origine, ainsi qu'en témoigne un
deuxième enceinte
1 plan de la brigade topographique du Génie daté de
1853. L'arsenal y est qualifié de Magasin d'affuts et
Z01.F21
sur son flanc oriental ne figure encore aucun mur. Le
bâtiment ne sera protégé côté est que par la suite, à en
juger par des cartes postales antérieures à la Première
Guerre mondiale. C'est au cours de celle-ci, en 1916,
que l'arsenal et le mur seront détruits.
Z01.F35 Côté sud-ouest des terrassements, les arrachements
Z01.F40 de deux autres maçonneries (Z01.F41 et Z01.F49) ont
été mis au jour. Aucun parement n'y est discernable.
Z01.F37
Les blocs les composant, en grès et/ou calcaire, sont
liés avec un mortier de chaux. Il n'a pas été possible
Z01.F30 de déterminer l'orientation que pouvaient avoir ces
constructions. Elles aussi peuvent avoir appartenu,
0 5m
sous réserve, aux casernes de la fin du 17e siècle.
Côté ouest, l'extraction d'une citerne à mazout
Z01.F41
Z01.F49 a permis de compléter les informations collectées
Z01.F18
par J.-L.  Antoine en 2002 et relatives à la deuxième
Namur, porte de Médiane  : plan général des interventions enceinte. Les vestiges de cette dernière (Z01.F30) ont
de 2014.
pu être examinés sur une longueur totale d'environ
5  m. Ils reposent directement sur le substrat naturel
orientée est/ouest. Il est dès lors possible qu'à l'ori- composé de schiste. En fonction des délais prescrits,
gine elle se soit appuyée à la deuxième enceinte. Des seul le niveau d'arasement du parement ouest et d'une
bâtiments adoptant cette configuration sont repré- partie du blocage a été mis au jour. La maçonnerie
sentés sur des plans antérieurs aux travaux précités de est formée de blocs de grès liés au mortier de chaux.
M. van Coehoorn. C'est notamment le cas sur un plan Ce dernier présente des variations de teinte entre le
de la ville et du château de Namur qu'un ingénieur espa- blocage (brun/ocre) et le parement (jaune), correspon-
gnol, Pedro Borraz, a réalisé en 1690 ou 1691 (Bragard dant sans doute à des réparations. Des traces d'expo-
et al., 2009, p. 6-7). Les édifices appuyés à la deuxième sition à la chaleur ont été observées sur quelques
enceinte sont explicitement désignés comme étant des blocs de parement. Les fouilles ont mis en évidence le
casernes. La maçonnerie mise au jour pourrait avoir recoupement de l'enceinte par une structure de cuis-
appartenu à l'une d'entre elles. Elle fut recoupée par la son de forme oblongue (3,10 m sur 3,70 m ; Z01.F35).
construction de la boulangerie. Elle correspond assurément à la sole du four sud de
Contre la maçonnerie Z01.F40 fut mis au jour l'ex- la boulangerie souterraine. Cette dernière n'était donc
trados d'une voûte (Z01.F37). Par son emplacement et pas adossée à l'enceinte comme le suggérait le plan de
son orientation, il s'agit très certainement du passage
figurant sur le plan de 1707. La voûte, d'une largeur
totale de 1,80 m, est extérieurement formée de briques
et de blocs bruts de grès et de calcaire, très sommaire-
ment liés avec un mortier de chaux de teinte majori-
tairement grise. Des traces noirâtres (incendie  ?) ont
été observées sur une partie de l'extrados. Le substrat
naturel a été recoupé par la construction du passage.
L'intérieur de celui-ci n'a pas pu être examiné. Par
contre, son débouché vers l'intérieur de la boulangerie
a été observé. Le décapage du mur est de cet espace a
en effet révélé l'existence d'une porte condamnée.
Pour assurer une étanchéité maximale de l'extrados
de la voûte de la boulangerie, la fondation du
Sole du four sud de la boulangerie souterraine.
mur Z01.F18 a été démontée dans l'emprise des
293

Toutes périodes Namur

1707. La sole se compose de briques rectangulaires, Namur/Namur : citadelle, restauration


posées à plat, provenant sans doute d'une récupéra- d'une muraille à Terra Nova. Mise au jour
tion. Fort peu d'entre elles sont en effet complètes.
d'une maçonnerie antérieure au 19e siècle ?
De la voûte qui la recouvrait ne subsistait plus qu'une
couronne de briques dont il restait par endroits au
maximum sept assises. Les trois premières étaient Pierre-Hugues Tilmant
disposées horizontalement, les quatre autres commen-
çant à présenter une pente vers l'intérieur. Au-dessus Au sud de l'ancienne caserne devenue centre des visi-
de cet espace de cuisson, la fouille a mis en évidence teurs, l'esplanade de Terra Nova est délimitée par une
l'existence d'un autre espace voûté construit en blocs muraille dont la restauration en 2015 a fait l'objet d'un
de grès liés au mortier de chaux et s'appuyant côté est suivi archéologique. À cet emplacement débouchaient à
sur l'extrémité conservée de l'enceinte médiévale. Cet l'air libre les galeries de Boufflers creusées dans la roche
espace avait vraisemblablement pour fonction d'iso- entre 1692 et 1695 (Bragard et al., 2002, p. 31 ; Bragard,
ler la chambre de cuisson des remblais recouvrant la 2012, p. 99). Sous l'occupation hollandaise, après 1824,
boulangerie souterraine. Ce type de dispositif sera la construction de la caserne nécessite la rectification de
utilisé sous l'occupation hollandaise pour le four nord. la pente naturelle du terrain, ce qui entraîne l'arasement
Côté est, à l'emplacement de l'ancienne ouverture du de l'extrémité nord des galeries. À cet endroit, afin de
four sud, a été observée une maçonnerie de briques parementer la roche désormais verticalisée, la muraille
d'apparence très grossière. Cette dernière s'appuie précitée est édifiée. Cette dernière est toutefois aména-
vers le sud à une couture architecturale verticale  qui gée de manière à laisser voir cinq issues des galeries
constitue vraisemblablement le seul vestige de l'ouver- désormais artificiellement hautes par rapport au niveau
ture précitée. Le mur Z01.F21 dont l'extrémité nord de l'esplanade. C'est entre deux d'entre elles que le
avait déjà été observée en août 2010 (Tilmant, 2013, démontage du parement et du blocage contemporains a
p. 274) a été dégagé en 2014 sur une longueur de 9 m. laissé apparaître en 2015 une maçonnerie plus ancienne.
Il se poursuit vers le sud, hors de l'emprise de fouille. Celle-ci adopte la forme d'une voûte surbaissée de
Il s'est avéré qu'il forme notamment la limite ouest de 0,25 m à 0,40 m d'épaisseur, composée de blocs équarris
l'espace consacré aux fours et qu'il s'appuyait à la tour liés au mortier de chaux. Cette maçonnerie appartient
médiévale. selon toute vraisemblance à une structure liée à l'origine
aux galeries de Boufflers. Elle ne figure pas sur le plan
Bibliographie des souterrains de 1756 (Namur, Archives de l'État).
■■ Bragard P., Bruch  V., Chainiaux  J., Douette D.,
François D. & Marchal J., 2009. Images de Namur fortifiée.
Dessins, écrits et documents rares ou inédits, Namur, Les Amis de
la Citadelle de Namur.
■■ Tilmant P.-H., 2013. Namur/Namur  : citadelle. Interven-
tions archéologiques complémentaires à la porte de Médiane,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 274-275.
■■ Tilmant P.-H., 2015. Namur/Namur  : citadelle, examen de
salles souterraines sous la route Merveilleuse, à l'emplacement
de l'ancien fossé médiéval, Chronique de l'Archéologie wallonne, Nord
23, p. 304-306.

Sources
Détail du Plan van de souterains van Terra Nova en de twee
■■ Antoine J.-L., 2004. La Porte de Médiane. Essai de synthèse
agter leggende enveloppes alles op het casteel van Namen
provisoire, document inédit. (1756) où figure la partie nord des galeries de Boufflers. En
■■ Château de Namur, 1707 (Vincennes, Service historique de trait noir discontinu, la muraille restaurée en 2015. La flèche
l'Armée de Terre, Art. 14, Namur, Tab. 94, no 12). indique la position de la maçonnerie observée au cours du
suivi archéologique (© Archives de l'État à Namur, Cartes et
■■ Citadelle. Donjon. Planchette no 3, brigade topographique du
Plans, no 431).
Génie, 4  octobre 1853 (Namur, Société archéologique, pas de
no d'inv.).
■■ Tilmant P.-H., 2010. Namur. Citadelle. Porte de Médiane. Bibliographie
Résultats du sondage creusé le 19 août 2010 au pied du parement ■■ Bragard P., Bruch  V., Chainiaux  J., Francois  D. &
externe de la tour médiévale, rapport inédit, Serv. archéologie, Marchal J., 2002. La termitière de l'Europe. Les souterrains de la
Dir. ext. Namur. citadelle de Namur, Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur.
294

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

■■ Bragard P. (dir.), 2012. Namur, la citadelle hollandaise. Une lieu de six, ce qui peut n'être dû qu'à une schématisation
fortification mosane de Wellington à Brialmont (1814-1878), de cette partie de l'œuvre. L'iconographie antérieure à
Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur. cette date et qui a pu être consultée ne présente pas d'ar-
cade : Jan de Beyer, 1741 (Bastin, 1978, p. 27) ; plan en
Sources relief de Larcher d'Aubancourt, 1747-1750 (Lille, Palais
■■ Plan van de souterains van Terra Nova en de twee agter leggende des Beaux-Arts)  ; dessin des façades nord des loge-
enveloppes alles op het casteel van Namen, 1756 (Archives de ments de certains officiers, 1764 (Bruxelles, A.G.R.)  ;
l'État à Namur, Cartes et Plans, no 431). vue du Moulin de Sambre par le Général de Howen,
1823 (Bastin, 1980, p. 78-79) ; Château de Namur, 1831
(Vincennes, S.H.A.T.). Leur absence sur ces documents
ne constitue pas cependant une preuve formelle de leur
Namur/Namur : citadelle, suivi construction après 1831. Les arcades ont pu être jugées
archéologique à la limite nord du fossé du comme des détails architecturaux de moindre impor-
château comtal tance ne justifiant pas leur représentation. Pourvu ou
non d'arcades, le mur est réputé en mauvais état en
1764 puisqu'une brèche est signalée à cette époque dans
Pierre-Hugues Tilmant le document précité. Il est possible que ce soit dans le
contexte des réparations postérieures que le système
Dans le cadre de la restauration et de la mise en valeur d'arcades ait été mis en place, dans le but de contrebu-
des murailles de la citadelle, la Ville de Namur a fait ter plus efficacement la poussée des maisons surplom-
procéder en février et mars 2013 à des investigations à bant le mur et des remblais de l'ancien fossé médiéval.
hauteur du mur qui aujourd'hui marque la limite nord L'épaisseur de ceux-ci atteint en effet plusieurs mètres.
de l'emprise de l'ancien fossé du château des comtes. Le mur de fond de certaines des arcades était apparu
Du côté extérieur, ce mur présente actuellement une en 2013 en très mauvais état par endroits, vraisembla-
succession de six arcades séparées par des piliers. Trois blement en raison d'un problème d'infiltration d'eau.
sondages ont été creusés au pied de la maçonnerie. Un Un sondage a donc été creusé en mars de la même année
radier de fondation de 1,15 m de large a été mis au jour au pied du parement sud du mur, à l'emplacement des
dans le sondage oriental, à une profondeur de 1,30  m anciennes maisons édifiées au 16e siècle et détruites en
par rapport au niveau de sol actuel. La base d'un pilier 1913 (Bragard et al., 2005, p. 83-84). Il s'agissait de véri-
ainsi partiellement dégagée repose sur ce radier. Elle fier la nature des remblais portant la terrasse aménagée
comporte une boutisse carrée de 0,30  m de section et par la suite. Il s'est avéré qu'ils se composaient de maté-
1,18 m de long. D'après l'étude de sa ciselure périphé- riaux hétérogènes, avec cavités, manifestement issus de
rique, ce bloc a été taillé dans le courant du 16e siècle mais la destruction des maisons et vraisemblablement préci-
sa récupération n'est pas exclue. D'autres blocs taillés de pités dans les caves de celles-ci.
réemploi ont d'ailleurs été observés dans le parement Au cours des démontages des parties de parement trop
externe du mur et de ses arcades. Ce dernier figure dans endommagées des murs de fond de certaines arcades,
l'iconographie ancienne, notamment sur une toile du plusieurs chenaux sont apparus, soit à la base des maçon-
peintre Émile Puttaert datée de 1864 (André, Baudson neries, soit à leur sommet ; ils présentent plusieurs tech-
& Bruch, 1982, p. 54). Une gravure de G.S. Shepherd de niques de construction. Sous réserve, les chenaux situés à
1837 (Bastin, 1980, p. 70-71) montre quatre arcades au la base peuvent avoir un rapport avec les systèmes d'éva-
cuation d'eau observés en 2014 dans les salles souterraines
situées plus au sud, sous l'actuelle route Merveilleuse et le
parking voisin (Tilmant, 2015, p. 305-306).
En décembre 2015 ont débuté les travaux de terras-
sements destinés au retrait des remblais hétérogènes
observés en mars 2013. Les caves des maisons détruites
un siècle plus tôt ont ainsi partiellement été dégagées.
Le terrassement inachevé en fin d'année a laissé appa-
raître au moins quatre espaces en sous-sol, comblés
avec des matériaux de destruction provenant du rez-
de-chaussée et de l'étage des maisons abattues. Trois
niveaux de sol ont été mis au jour ainsi qu'un chenal.
La poursuite des terrassements est programmée en
L'ensemble des arcades dégagées au cours du chantier.
2016 et fera l'objet d'un suivi archéologique.
295

Toutes périodes Namur

citadelle. L'édifice de plan trapézoïdal (15 m de long


et 9,70 m max. de large) est haut de près de 15 m et
présente une nette avancée vers le nord par rapport à
l'axe général est/ouest des remparts du site donnant sur
la Sambre. Il adopte la forme d'un massif parementé
en petit appareil calcaire et dont le volume interne
semblait comblé avec des remblais. Il est uniquement
accessible au sommet par un escalier dont le départ se
situe sur l'une des terrasses implantées en contrebas
de l'emplacement jadis occupé par le château comtal ;
cet escalier est partiellement aménagé dans l'épaisseur
de la muraille précitée et donne également accès à une
Un des niveaux de sol observés dans les caves des maisons petite pièce ayant servi sans doute de salle de garde. La
détruites.
batterie, vraisemblablement construite au 16e siècle, est
équipée de deux canonnières vers l'ouest et de deux
Bibliographie meurtrières vers l'est. Elle permet dès la seconde moitié
■■ André J., Baudson E. & Bruch V., 1982. Images de Namur, du 17e siècle de couvrir la Rampe verte, aménagée en
Namur, éditions de la Procure. 1655 (Bragard et al., 2015, p. 17) afin d'acheminer
■■ Bastin N., 1978. Vues anciennes de Namur, Namur. vers la partie du site appelée Terra Nova (1631-1675)
■■ Bastin N., 1980. Namur et le Namurois en gravures, Bruxelles. tout le matériel et l'armement nécessaires à une
garnison. C'est vraisemblablement dans ce but que
■■ Bragard  P., Bruch  V., Chainiaux  J., François  D.,
Furnémont A. & Marchal J., 2005. La citadelle de Namur en noir les deux canonnières précitées équipaient le sommet
et blanc. Histoire du monument à travers photographies et cartes de la batterie. Elles permettaient aussi sans doute de
postales, 1860-1940, Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur. contrôler le chemin qui, longeant la Sambre, aboutissait
■■ Tilmant  P.-H., 2015. Namur/Namur  : citadelle, examen de à l'une des anciennes portes de la ville.
salles souterraines sous la route Merveilleuse, à l'emplacement Les premiers travaux de terrassement réalisés fin
de l'ancien fossé médiéval, Chronique de l'Archéologie wallonne, 2014 ont abouti à la découverte, dans l'emprise des
23, p. 304-306. murs délimitant la batterie, de plusieurs maçonne-
ries antérieures à celle-ci et appartenant à différentes
Sources phases de construction.
■■ Château de Namur. Élévation du donjon suivant la ligne La phase la plus ancienne est représentée par un
ghiklm, 1831 (Vincennes, Service historique de l'Armée de vaste bâtiment qui s'appuyait au sud sur la même
Terre, Art. 14, Namur, carton 2, no 5). muraille que la batterie Sambre. Côtés est, ouest et
■■ Conseil des Finances. Fortifications de Namur, 1759-1764 nord, trois murs délimitaient l'édifice dont le plan
(Archives générales du Royaume, no 3181). devait être à l'origine rectangulaire ou trapézoïdal. Les
■■ Larcher d'Aubancourt, Plan en relief de Namur, 1747- délais d'intervention trop courts n'ont pas permis de
1750 (Lille, Palais des Beaux-Arts). le déterminer. Les maçonneries nord et ouest ont été
dégagées sur leur longueur interne totale et le mur

Namur/Namur : citadelle, suivi de


chantier et fouille préventive à la batterie
Sambre

Pierre-Hugues Tilmant

Le chantier de la batterie Sambre fait partie des projets


de restauration et de mise en valeur de la citadelle
initiés par la Ville de Namur. Il a fait l'objet d'un suivi
archéologique et d'une fouille préventive en plusieurs
phases entre octobre 2014 et mai 2015 (Tilmant, 2016).
La batterie Sambre s'élève le long de la rue des Vue générale des vestiges découverts dans la partie nord de
la batterie Sambre.
Moulins et s'appuie sur l'une des murailles de la
296

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

est repéré dans un sondage. D'après les observations selon laquelle cette dernière dissimulerait des vestiges
recueillies, ce bâtiment aurait été approximativement de la première porte de Bordial (communication orale).
long de 12 m à l'ouest et de 14,50 m à l'est ; sa largeur Les résultats des fouilles menées fin 2014-début 2015
aurait été d'environ 8 m (dimensions totales). Un fournissent plusieurs arguments en faveur de cette
quatrième mur le subdivisait en deux pièces larges de hypothèse. D'après l'iconographie ancienne (Masius,
4,20 m à 4,50 m au nord et vraisemblablement 5,40 m 1575 ; Guichardin, 1582), cette porte s'élevait le long
au sud (dimensions intérieures). Plusieurs chaînages de la Sambre, à l'emplacement du terrain le plus étroit
ont été observés entre les maçonneries mises au jour. entre la rivière et les remparts de la citadelle ; elle se
L'épaisseur maximale conservée de ces dernières est de situait ainsi en amont du pont de Sambre et à hauteur
1,50 m (côté ouest). Leur hauteur maximale dégagée du moulin implanté le long du cours d'eau. Ces carac-
est de 1,25 m. Elles présentent toutes la même tech- téristiques topographiques répondent précisément à la
nique de construction. Le parement intérieur est en situation géographique de la batterie. Par ailleurs, dans
moellons équarris de grès et calcaire ; le mortier de la représentation de Namur par le chanoine Masius, la
chaux présente une teinte jaune clair à ocre clair avec porte a la forme d'une très haute tour quadrangulaire,
des nuances orangées. L'appareillage employé présente ce qui concorde avec le plan des plus anciennes maçon-
de fortes similitudes avec celui des murs de la collé- neries découvertes et la hauteur à laquelle elles ont été
giale Saint-Pierre-au-Château, vraisemblablement mises au jour. Il faut noter aussi que la porte avait une
construite vers le milieu du 12e siècle et dont quelques fonction éminemment défensive ; elle avait été édifiée
vestiges ont été dégagés en 1996-1998 (Antoine, Bodart à la limite occidentale du bourg fortifié implanté à la
& Thiry, 2002, p. 14). Le mur ouest de la pièce nord confluence de la Sambre et de la Meuse (Plumier, 2005,
est pourvu de deux orifices dont les dimensions sont p. 453 ; Vanmechelen, 2007, p. 214). L'épaisseur des
similaires et qui ont pu faire office de trous de boulins ; maçonneries dégagées au sommet de la batterie (1,50 m
le parement présente un décrochement vertical qui au minimum) suggère précisément une telle fonction.
correspond sans doute à un niveau de plancher  : il Enfin, les dimensions globales du bâtiment découvert
est toutefois interrompu par un bloc paraissant en sont tout à fait cohérentes avec un usage en tant que
place. Un décrochement similaire a été observé dans tour-porte d'entrée de ville. En tant que tel, l'édifice
la portion du mur est dégagée dans le sondage précité. était du même type que la porte de Buley implantée
Aucun des parements externes n'a été mis au jour dans côté Meuse. En raison de la hauteur à laquelle se situent
l'emprise examinée. La fouille partielle du comblement les vestiges mis au jour, ceux-ci appartiennent certaine-
des deux pièces a livré en outre un abondant matériel ment au troisième niveau du monument.
céramique. Celui-ci date de la fin du 16e et du 17e siècle Compte tenu des différents éléments précités, on
et se caractérise par sa grande qualité. On y observe peut considérer comme certain que le bâtiment mis
notamment des fragments de pichets en grès décorés au jour dans l'emprise de la batterie Sambre constitue
provenant de Raeren et d'assiettes décorées à la barbo- les vestiges de la première porte de Bordial. Celle-ci
tine (Challe, 2015, p. 7) est citée dans un texte en 1235 (Antoine, 2002) mais
Est-il possible d'identifier le bâtiment mis au jour pourrait avoir une origine antérieure. Avec l'usage de
dans l'emprise de la batterie Sambre ? Il y a quelques nouvelles techniques de siège et la nécessité d'agran-
années, Jean-Louis Antoine avait émis l'hypothèse dir l'enceinte urbaine, elle va progressivement deve-
nir obsolète. C'est en effet vraisemblablement dans la
deuxième moitié du 14e siècle qu'apparaît à Namur
l'artillerie à poudre (Bragard, 2011, p. 71). Dès lors,
elle cède la place à une deuxième porte construite
en amont et citée notamment en 1408. Toutefois, le
premier édifice est conservé ; bien que sa valeur mili-
taire ait diminué, il pouvait encore constituer une ligne
de défense supplémentaire. Cette situation se prolonge
sans doute aux 15e et 16e siècles. Il est probable que
l'édifice ait été progressivement abandonné parce que
de moins en moins adapté par rapport aux progrès de
l'artillerie. Par ailleurs, les dégâts qu'il a pu subir au
cours des crues de la Sambre (le moulin situé à proxi-
mité immédiate est emporté en 1409 [Borgnet, 1859,
Le mur ouest de la porte médiévale sur lequel s'appuie à p. 167]) ont certainement accéléré sa désaffectation.
l'arrière-plan le mur ouest de la batterie du 16e siècle.
Sans que l'on puisse identifier avec certitude leur cause,
297

Toutes périodes Namur

d'importants dégâts ont été observés au niveau du mur partiellement arasés serviront de base, avec des orien-
nord et du mur de refend. C'est particulièrement le cas tations différentes, à de nouvelles maçonneries. Celle
pour ce dernier, partiellement éventré et présentant construite sur le côté est, orientée nord/sud et d'une
une importante déformation. longueur de 8,65 m, est majoritairement compo-
C'est vraisemblablement vers la fin du 16e siècle que sée de moellons calcaires régulièrement appareillés
ce qui subsistait de la porte primitive a été englobé reposant sur une fondation ; elle comportait deux
dans une fortification plus vaste, mieux adaptée à la ouvertures délimitées par des briques. Une couture
poliorcétique de l'époque, sous la forme d'une batte- architecturale la sépare d'une autre maçonnerie, nette-
rie d'artillerie. Cette deuxième phase de construction ment plus courte (1,65  m) et dont sont conservées
entraîne l'abandon définitif de l'ancienne porte dont plusieurs assises de moellons calcaires surmontées
les parements ou le blocage vont servir d'appui aux de cinq assises de briques. Perpendiculairement à ces
maçonneries de la batterie. Pour permettre l'accès à deux maçonneries et apparemment sans chaînage
celle-ci sera construit l'escalier précité. On notera qu'à avec celles-ci, trois gradins orientés est/ouest ont été
la citadelle, la pratique consistant à intégrer les vestiges mis au jour (longueur : 4,65 m) ; ils sont composés de
d'une fortification médiévale dans un édifice défensif briques posées à plat ou de chant. Le gradin inférieur
des Temps modernes avait déjà été employée, notam- repose sur un soubassement constitué presque exclu-
ment à la porte de Médiane. Parallèlement, le volume sivement de moellons calcaires. Sous l'occupation
interne de la porte est comblé. D'où proviennent les hollandaise (1815-1830), en une quatrième phase, les
remblais employés à cette fin ? La qualité du matériel parements externes de la batterie seront reconstruits
céramique mis au jour et la topographie des lieux four- (Bragard, 2012, p. 59). C'est vraisemblablement aussi
nissent des indications. La première porte de Bordial de cette période que date la prolongation de l'escalier
était dominée par plusieurs terrasses où différentes dans l'emprise même de la batterie, ou en tout cas sa
constructions furent érigées dès le Moyen Âge, dont reconstruction, par l'intermédiaire d'un palier qui se
la chapelle Saint-Jacques. Un peu plus au nord et à poursuit vers l'est par une volée de plusieurs marches.
l'ouest prendront successivement place par la suite les Une ultime phase est représentée par des réparations
résidences du capitaine du château, du gouverneur et ponctuelles aux murs de la batterie, notamment côté
de ses officiers. Il est vraisemblable que les terrasses ouest, pour lesquelles sont réemployés des fragments
aient été fréquemment adaptées aux nécessités mili- de monuments funéraires où figurent les dates de 1823
taires et que les travaux s'accompagnèrent de terras- et 1878.
sements. Lorsqu'il s'avéra indispensable de combler le Tous mes remerciements à Sophie Challe pour
volume de l'ancienne porte, les déblais provenant de l'examen préliminaire de la céramique et à la Ville de
ces derniers, réalisés dans un rayon fort proche, furent Namur pour son soutien logistique au cours de l'inter-
certainement mis à profit. La qualité de la céramique vention archéologique.
mise au jour s'explique assurément par le statut social
et le rang des occupants de cette partie de la citadelle Bibliographie
(Baurin, 1987, p. 77-84). ■■ Antoine J.-L., Bodart E. & Thiry B., 2002. La vie de château.
Dans une troisième phase de construction Les comtes de Namur au Moyen Âge, Namur.
(17e  siècle  ?), certains tronçons des murs médiévaux ■■ Baurin G., 1987. Les lieutenants-gouverneurs du Comté de
Namur. 1430-1773, Namur.
■■ Borgnet J., 1859. Promenades dans Namur, Namur.
■■ Bragard P., 2011. Deux petites tours d'artillerie de la fin du
xve siècle à Namur, Bulletin de la Commission royale des Monu-
ments, Sites et Fouilles, 23, p. 67-94.
■■ Bragard P. (dir.), 2012. Namur, la citadelle hollandaise. Une
fortification mosane de Wellington à Brialmont (1814-1878),
Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur.
■■ Bragard P. et al., 2015. Namur. Une citadelle européenne,
Namur, Les Amis de la Citadelle de Namur.
■■ Plumier J., 2005. Namur. La ville fortifiée au pied du
château comtal. In : Maquet J. (dir.), Le patrimoine médiéval
de Wallonie, Namur, Institut du Patrimoine wallon, p. 453-456.
■■ Tilmant P.-H., 2016. Découverte de vestiges au sommet
Le mur nord de la porte médiévale servant de base aux de la batterie Sambre de la citadelle de Namur, La Lettre du
gradins de briques postérieurs.
Patrimoine, 41, p. 11.
298

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

■■ Vanmechelen R., 2007. Namur. La Citadelle et les enceintes d'un quartier d'habitation, au caractère clairement
urbaines. In : Dejardin V. & Maquet J. (dir.), Le patrimoine urbain depuis le 12e  siècle au moins, à l'endroit de
militaire de Wallonie, Namur, Institut du Patrimoine wallon, p. la place Maurice Servais (C), alimente à nouveau le
212-220. débat en 2008 (Vanmechelen & Danese, 2010, p. 200 ;
Siebrand, 2012, p.  249-250). Les vestiges de maisons
Sources (13), munies de leurs celliers (10) et basses fosses de
■■ Antoine J.-L., 2002. Restauration de la Porte de Bordial, latrines (9), y témoignent d'un faubourg développé
document inédit. extra-muros, à l'endroit de l'ancienne rue du Four (14).
■■ Challe S., 2015. Namur. Batterie Sambre. NR 15 BS. Rapport La relecture des documents d'archives avait bien assis
première intervention, rapport inédit. quelques éléments de topographie locale, confirmant
■■ Guichardin L., Namurcum. Elegantissima ad Mosae flumen le retour de l'enceinte sur la Sambre en travers de la
civitas, Anvers, 1582 (Namur, Société archéologique, inv. B-Pl- rue des Brasseurs (5), en aval de l'ancien moulin de la
113-02). Batte et de l'actuelle place Maurice Servais, non loin de
■■ Masius A., Namurcum, preclara ad Mosae flumen civitas, ad la jonction avec la rue du Bailli (Bodart, 2004, p. 206).
vivum expressa, et operi nostro Geographico exornando, adjecta, Mais les données archéologiques faisaient jusqu'alors
cujus picturam perbenigne nobis communicavit, Reverendus ac cruellement défaut, privant la problématique de toute
eruditissimus vir D. Arnoldus Masius […], 1575. Namur, Biblio- information précise, validée par des constats de terrain.
thèque universitaire Moretus Plantin, RCA 4/003).

Namur/Namur : la Porte en Vis et la


Deuxième Enceinte urbaine révélées par
un sauvetage archéologique à la rue des
Brasseurs, nos 57-59

Raphaël Vanmechelen

La Deuxième Enceinte urbaine de Namur


en question

La question de la Deuxième Enceinte urbaine de


Namur traverse toute l'historiographie locale, depuis le
16e siècle (de Croonendael, 1584, p. 15 ; de Marne, 1754,
p. 105). Première ceinture fortifiée de la rive gauche de
la Sambre, construite à la suite de celle du portus du
confluent, elle aurait enserré le bourg développé dans
la plaine alluviale, au débouché du pont de Sambre
et autour de la chapelle Saint-Rémy. Son tracé, son
apparence matérielle et sa datation ont fait l'objet de
nombreuses hypothèses, parfois simplement nuan-
cées, parfois radicalement contradictoires. Au-delà de
certaines erreurs ou imprécisions, le parcours de ce
premier système défensif dans la trame urbaine semble
aujourd'hui globalement connu (Plumier,  2005  ;
Vanmechelen,  2007), confirmé par les découvertes
archéologiques, tant au nord, sous la place d'Armes
(Plumier, Vanmechelen & Dupont, 1997, p. 195 ; 1998,
p. 184-185), qu'à l'est, aux abords de la rue d'Harscamp
(Verbeek et al.,  2002, p.  253-254). Seule la fermeture
occidentale du tracé pose fréquemment problème.
Jules Borgnet (1859, p. 190) reconnaissait déjà que la Rue des Brasseurs, nos 57-59 : vue générale du site depuis la
Citadelle.
question est assez difficile à résoudre. La découverte
299

Toutes périodes Namur

Place M. Servais
14

C
9 9
s
Bra sseur
13 Ru e des
10 B
A 6
8
2
5

1
4
7
3

10e - début du 12e siècle


milieu du 12e - milieu du 13e siècle Sambre
fin du 13e - 14e siècle 0 10 m

Namur, plan général du quartier au Moyen Âge (10e-14e siècles), sur base des éléments enregistrés à la rue des Brasseurs (A : nos 57-
59 ; B : nos 51-55) et sous la place Maurice Servais (C). 1. Premier rempart de Sambre ; 2. Premier bâtiment-porte ? ; 3. Rempart de la
Deuxième Enceinte ; 4. Fermeture occidentale de l'enceinte ; 5. Ancienne rue en Vis ; 6. Porte en Vis : tourelle de flanquement semi-
circulaire ; 7. Fossé défensif ; 8. Maison en pierre (intra-muros) ; 9. Basses fosses de latrines d'un habitat parcellisé : faubourg développé
extra-muros ; 10. Celliers, creusés sous l'une des maisons ; 11. Troisième Enceinte : extension de la ville et du rempart ; 12. Mur et
niveau de sol : habitation bâtie sur le fossé comblé ; 13. Nouvelle maison en pierre ; 14. Rue du Four (infographie F. Cornélusse, Dir.
archéologie).

Recherches récentes de la maison voisine, un mur aux caractéristiques


similaires (4) opère un retour à angle droit en direction
Une opération de sauvetage, conduite en février de la rue. Seul son parement intérieur en avait alors été
2005 à l'emplacement d'un important immeuble en constaté, et son épaisseur reconnue sur plus de 1,10 m.
rénovation, aux nos 51-55 de la rue des Brasseurs (B), Morphologie, épaisseur et position topographique
versait une première pièce au dossier archéologique invitaient évidemment à identifier ce puissant mur à
(Vanmechelen & Verbeek,  2007). Deux remparts la fermeture occidentale de la Deuxième Enceinte. La
successifs fermaient la ville au sud, parallèlement à la perturbation de sa liaison avec la seconde courtine du
Sambre. Le premier (1), vraisemblablement ancien, a bord de Sambre empêchait par contre de l'utiliser à
été construit au haut de la berge gallo-romaine ; seuls titre de preuve formelle.
deux courts tronçons en avaient été conservés, peut- La confirmation définitive de ce tracé a finale-
être associés déjà à un bâtiment-porte (2). Le second ment été obtenue en février 2015, dans le cadre de la
rempart (3), de même orientation, repousse la rive de rénovation en profondeur de l'immeuble voisin, sis
quelque 10 m environ vers le sud. Épaisse de 1,60 m aux nos 57-59 de la rue des Brasseurs (A ; parc. cad. :
et conservée ponctuellement en élévation, la nouvelle Namur, 1re  Div., Sect.  C, no  735b). À défaut de pres-
muraille mêle blocs de grès et de calcaire grossier dans cription archéologique, c'est la découverte fortuite de
une belle maçonnerie, liée par un abondant mortier à structures et de niveaux médiévaux qui entraîne alors
la teinte gris brunâtre très caractéristique. En limite une nouvelle opération de sauvetage, menée dans des
occidentale d'emprise, sous le mur mitoyen la séparant conditions précaires et sur une durée d'une journée et
300

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

demie seulement (Vanmechelen & Vrielynck,  2015  ;


Vanmechelen,  2016). Bien qu'ils n'aient évidemment
mis à profit qu'une toute petite part du potentiel d'in-
formation de l'espace disponible, les constats et relevés
effectués, dans les délais et sans entraver le déroule-
ment du chantier, ont abouti à plusieurs conclusions
d'importance.

Porte en Vis, rempart médiéval


et fossé défensif

La maçonnerie formant la limite mitoyenne orientale


de la parcelle ne comporte en sous-sol ni couture, ni
arrachement de refends en rapport avec les caves des
immeubles démolis. Partout où les lacunes des enduits
récents permettent de l'apercevoir, elle affiche au
contraire un parement uniforme et soigné de moellons
de calcaire grossier, disposés en assises irrégulières et
liés au mortier gris-brun. Il s'agit, sans aucun doute
possible, du parement extérieur du mur constaté sous
cette même limite parcellaire en 2005 (4). Son épais-
seur peut désormais être évaluée à 1,50  m environ.
Un ressaut, saillant de quelque 10  cm à peine de la
base de l'élévation, suit le pendage général du terrain
en direction de la Sambre. La muraille a été reconnue
sur une longueur totale de 17,35  m, son élévation Tourelle de flanquement de la Porte en Vis (Deuxième
Enceinte) (photo O. Vrielynck, Dir. archéologie).
conservée sur près de 3,80 m par endroits. L'extrémité
distale du mur, vers le sud, est ponctuée par un très
gros bloc de calcaire sommairement taillé, posé à hauteur de cinq à sept assises d'élévation, se développe
la base de l'élévation  ; par-dessus, un arrachement sur un rayon de 1,40  m  ; plus haut, l'arrachement de
de maçonnerie témoigne d'un second bloc. Cette la maçonnerie en laisse apparaître le blocage intérieur,
terminaison se situe exactement dans le prolongement arasé à fleur du parement extérieur du rempart. Pareil
du rempart de Sambre, dégagé précédemment sur organe de flanquement, placé au saillant de la courtine,
la parcelle voisine. La liaison des deux courtines est le long de la rue des Brasseurs, ne peut qu'appartenir
aujourd'hui démontrée, renforcée d'une harpe en à la Porte en Vis. Cet accès fortifié au premier bourg
pierres de grand appareil. de la rive gauche est mentionné explicitement pour la
Dans l'angle nord-est de la parcelle, l'extrémité oppo- première fois en 1313 (Bodart, 2004, p. 204). L'archéo-
sée de la courtine est liée à un massif de maçonnerie sail- logie n'apporte malheureusement guère de précision
lant de plan semi-circulaire  (6), partiellement dégagé chronologique quant à sa construction –  sinon que
dans les limites de l'emprise. La base, conservée sur une l'usage des tourelles de flanquement semi-circulaires
en maçonnerie pleine se généralise à partir de la
seconde moitié du 12e siècle. Sa position topographique
est par contre désormais établie.
Les sédiments présents au pied de la courtine sont
constitués de remblais hétérogènes gris sombre,
humides et organiques  (7). Nulle part les niveaux
gallo-romains ou alto-médiévaux ne sont conservés,
emportés par un creusement de grande ampleur.
L'existence d'un fossé en eau s'impose donc en
évidence, ici comme en d'autres points du tracé. Le
Vue générale des structures  : le rempart de la Deuxième matériel céramique incorporé à son remplissage
Enceinte en mur mitoyen, auquel s'adosse un massif de sou- sommital en situerait le comblement dans le courant
tènement de cheminée plus récent (photo O. Vrielynck, Dir. du deuxième ou du troisième  quart du 13e  siècle
archéologie).
(période Andenne IIIa).
301

Toutes périodes Namur

Troisième Enceinte urbaine réalisés au niveau des caves permettent d'identifier une
habitation principale de plan rectangulaire, développé
L'abandon du fossé défensif de la Deuxième sur une longueur d'environ 8,20  m pour une largeur
Enceinte s'accompagne de l'édification d'un nouveau de 3,50  m. La paroi orientale du sous-sol, toujours
rempart  (11), qui en barre la largeur. Butant contre constituée du rempart de la Deuxième Enceinte, se voit
l'anglée du rempart antérieur, il prolonge ainsi la forti- adosser un massif de maçonnerie calcaire soigneu-
fication de la rive de Sambre vers l'amont. Établi sur les sement parementé, large de presque 3  m et épais de
remblais du fossé antérieur, il s'intègre par conséquent 0,40  m, construit sur une solide fondation. Ce redan
au développement de la Troisième Enceinte namuroise, soutenait visiblement une grande cheminée, comme
traditionnellement datée du 13e  siècle. Au-delà de c'est souvent le cas pour les logis de qualité de cette
problèmes de chronologie ou d'attribution, cette forti- période, dont les piédroits ont laissé des arrachements
fication du bord de Sambre avait été attestée précédem- au niveau du rez-de-chaussée. Les premiers dévelop-
ment, tant par l'archéologie (Plumier & Dupont, 1999) pements constatés en fond de parcelle sont-ils déjà à
que par les sources écrites (Bodart, 2000). rattacher à cette même phase de construction  ? Les
L'espace gagné intra-muros par le comblement du données à disposition ne permettront pas actuelle-
fossé est très vite colonisé par l'habitat. Un mur et un ment de trancher. Les murs y délimitent deux espaces
niveau de sol revêtu de chaux blanche relèvent d'une successifs, probablement une courette fermée d'un
première maison  (12), très arasée, établie au pied de bâtiment secondaire.
la Porte en Vis, dont elle intègre la tourelle en sous- Les deux parcelles sont ensuite réunies en un seul
sol. Peut-être s'agit-il de la maison de Denis le Prêtre, immeuble de quatre niveaux sous bâtière (Cortembos
passée alors dans le patrimoine de l'abbaye de Floreffe : & Blanpain,  1972, p.  94-95  ; R. des Brasseurs, 1998),
mentionnée dès 1292, elle est située extra portam in probablement dans le cadre des reconstructions
Vico (Bodart, 2004, p. 204-206). Un niveau d'incendie encouragées par le Magistrat namurois durant le
en fixe la destruction dans le courant du 14e siècle déjà. premier quart du 18e siècle. Au-delà des modifications
qui lui ont été apportées, la façade en brique et pierre
La parcelle et son bâti post-médiéval bleue affiche encore son style traditionnel, rythmé
de deux travées de baies, jadis à croisées (1er  étage)
Les développements ultérieurs de l'espace parcellaire et à meneaux (2e  et 3e  étages). Une fois encore, les
restent difficiles à restituer, en raison des perturbations développements de fond de parcelle, piégés dans le mur
engendrées par les caves modernes et faute d'interven- mitoyen, s'avèrent de lecture difficile. Dès l'origine,
tion archéologique préalable sur le bâti. un bâtiment arrière devait délimiter une petite cour
Un tronçon de mur maçonné au mortier gris, solide intérieure, réservée aux circulations internes, et où
et abondant, trahit une nouvelle partition longitudinale se répartissaient un puits et les escaliers d'accès aux
de l'emprise parcellaire actuelle, approximativement à étages. Reconstruit au 19e siècle, il portera la parcelle
mi-largeur. Il sépare vraisemblablement deux espaces à son extension maximale, au-delà de l'ancienne ligne
distincts : une habitation à l'est, de moindre amplitude de fortification et jusqu'au quai de halage. En termes
que la maison médiévale antérieure, et une venelle à de propriété, la parcelle ne formerait au 18e  siècle
l'ouest, dont témoigne une portion d'empierrement. qu'un seul lot avec les deux maisons voisines, à l'ouest
Dans le même axe, vers le sud, un seuil formé de (no 61 et no 63, aujourd'hui démolie). L'ensemble passe
grands blocs de pierre de taille pourrait correspondre successivement aux mains de Nicolas Melin, de Gérard
à l'emplacement d'une poterne (publique  ?), percée Collard, puis de Barthélemy Laurent. Propriétaires
au travers du rempart du 13e siècle, et ouvrant sur la d'autres maisons dans la rue, les deux derniers auraient
Sambre et ses moulins. La datation de cette séquence mis le bien en location.
reste peu précise, soit entre la fin du 14e et le 16e siècle. Remerciements à Olivier  Vrielynck et Jean-
Un long mur avec ressaut de fondation ferme ensuite Noël  Anslijn (Direction de l'archéologie) pour leur
la ruelle vers l'ouest, en limite de parcelle. Un puits, contribution sur le terrain et le relevé des structures.
au cuvelage soigné de moellons calcaires, lui est asso-
cié. Plus au sud, le parement du mur s'incurve pour Bibliographie
ménager le volume d'un escalier. Autour du 16e siècle, ■■ Bodart E., 2000. Les fortifications des rives de la Sambre
la fonction d'habitat semble dès lors avoir conquis et de la Meuse à Namur et leur influence sur la topographie
l'espace de circulation. urbaine (xiiie-xvie  siècles). In  : Plumier-Torfs  J. & S. &
C'est probablement dans le courant du 17e siècle que Duhaut  C.  (dir.), Actes de la huitième Journée d'Archéologie
la parcelle orientale est rebâtie, pérennisant un temps namuroise (Rochefort, 25 et 26 février 2000), Namur, p. 77-84.
encore la partition antérieure. Les relevés d'architecte
302

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

■■ Bodart E., 2004. La première enceinte en pierre de Namur ■■ Verbeek M., Vanmechelen R., Berckmans O., Plumier-
sur la rive gauche de la Sambre (xiie-xvie siècles), Annales de la Torfs  S., Bodart  E., Defgnée  A. & Houbrechts  D., 2002.
Société archéologique de Namur, 78, p. 195-220. Namur/Namur  : mise en défense et urbanisation d'un quar-
■■ Borgnet J., 1859. Promenades dans Namur, vol. 1, Namur. tier périphérique, rue d'Harscamp, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 10, p. 252-255.
■■ Cortembos T. & Blanpain M., 1972. Les maisons de la rue.
In : Namur. La ville ancienne et la rue des Brasseurs, un problème
d'avenir, Liège, p. 89-115.
■■ de Croonendael P., 1584 (éd. 1878-1879). Cronicque conte-
nant l'estat ancien et moderne du Pays et Conté de Namur, la Ohey/Évelette : suivi de chantier rue
vie et gestes des seigneurs, contes et marquis d'icelluy. Première
partie comprenant depuis les origines jusqu'à la mort de Philippe
Abbé Matagne
le Noble (1212), publié intégralement pour la première fois et
annotée par le Comte de Limminghe, Bruxelles.
Carole Hardy
■■ de Marne J.-B., 1754. Histoire du Comté de Namur, Liège-
Bruxelles.
Des terrassements liés à la construction de deux habi-
■■ Plumier J., 2005. Namur. La ville fortifiée au pied du château tations unifamiliales jointives rue Abbé Matagne à
comtal. In : Maquet J. (dir.), Le patrimoine médiéval de Wallo-
Évelette (parc. cad. : Ohey, 6e Div., Sect. D, nos 184f et
nie, Namur, p. 453-456.
184g) ont fait l'objet d'un suivi par le Service de l'archéo-
■■ Plumier J. & Dupont C., 1999. Namur  : tronçon de l'en-
logie de la Direction extérieure de Namur (DGO4  /
ceinte urbaine médiévale découvert rue des Brasseurs/quai de
Département du patrimoine) au début du mois de
Sambre, Chronique de l'Archéologie wallonne, 7, p. 163.
janvier 2015. Les résultats se sont révélés négatifs.
■■ Plumier J., Vanmechelen R. & Dupont C., 1997. Namur :
fouilles préventives place d'Armes, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 4-5, p. 195-196.
■■ Plumier J., Vanmechelen R. & Dupont C., 1998. Namur :
poursuite de l'opération d'archéologie préventive à la place Ohey/Haillot : suivi de chantier rue
d'Armes, Chronique de l'Archéologie wallonne, 6, p. 183-185. Stocus
■■ R. Brasseurs, 1998. R. des Brasseurs, nos 57-59. In : Province de
Namur. Arrondissement de Namur, 2e édition, Liège (Le Patri-
moine monumental de la Belgique, 5²), p. 502. Carole Hardy
■■ Siebrand M., 2012. Namur/Namur  : éléments de topogra-
phie médiévale. Découvertes 2009-2010, Chronique de l'Archéo- Lors des travaux d'agrandissement d'une habitation
logie wallonne, 19, p. 249-252. rue Stocus à Haillot (parc. cad. : Ohey, 2e Div., Sect. C,
■■ Vanmechelen R., 2007. Namur. La Citadelle et les enceintes no 85f ) et vu leur proximité avec les nombreux vestiges
urbaines. In  : Dejardin  V. & Maquet  J. (dir.), Le patrimoine découverts par les campagnes de fouilles menées par le
militaire de Wallonie, Namur, p. 212-220. Service de Jeunesse archeolo-J, le Service de l'archéo-
■■ Vanmechelen R., 2016. La Porte en Vis et la fermeture occi- logie de la Direction extérieure de Namur (DGO4  /
dentale de la Deuxième Enceinte urbaine de Namur, révélées Département du patrimoine) a effectué un suivi des
par un sauvetage archéologique aux nos  57-59 de la rue des terrassements en mars 2015. Aucun vestige archéolo-
Brasseurs (Nr), Archaeologia Mediaevalis, 39, p. 129-133. gique n'a été découvert.
■■ Vanmechelen R. & Danese V., 2010. Namur/Namur  :
archéologie préventive sous la place Maurice Servais. De la
fondation augustéenne à la disparition de la rue du Four, Chro-
nique de l'Archéologie wallonne, 17, p. 198-201. Rochefort/Han-sur-Lesse : fouilles
■■ Vanmechelen R. & Verbeek M., 2007. Namur/Namur  : subaquatiques au Trou de Han,
occupation gallo-romaine précoce, rempart(s) et habitats
médiévaux à la rue des Brasseurs, nos 51-55, Chronique de l'Ar-
campagne de 2015
chéologie wallonne, 14, p. 227-230.
■■ Vanmechelen R. & Vrielynck O., 2015. Namur, rue des Christophe Delaere, Cécile Ansieau
Brasseurs, nos  57-59  : un sauvetage archéologique révèle la et Marc Jasinski
Porte en Vis et la courtine de la Deuxième Enceinte urbaine.
In : Frébutte C. (coord.), Pré-actes des Journées d'Archéologie
La reprise des interventions subaquatiques au Trou de
en Wallonie, Rochefort 2015, Namur, Service public de Wallonie
(Rapports, Archéologie, 1), p. 140-142.
Han (2012-2014) a démontré la présence d'une strati-
graphie cohérente associée à des artefacts appartenant
aux 16e-20e siècles (Ansieau, Delaere & Jasinski, 2015).
303

Toutes périodes Namur

dites «  anciennes  »). Deuxièmement,


les premiers résultats indiquent que le
dépotoir subaquatique a été colmaté sur
place par l'effondrement de pierres de la
voûte car différentes céramiques ont pu
être reconstituées à partir de fragments
localisés parfois à plus de 5 m de distance.
Il s'agit donc également d'avoir une vision
plus représentative du secteur. Enfin,
les fouilles de 2012-2014 ont permis de
déterminer que la zone d'intervention
orientée vers la rive droite de la première
tranchée (T1) avait déjà été fouillée entre
1978 et 1983 (Ansieau, Delaere & Jasinski,
2015), alors que la partie située en amont
est a priori intacte, hypothèse qui est
corroborée par les fouilles de 2015 dans la
nouvelle tranchée (T2).
La numérotation des zones de fouilles
a été repensée afin de donner une cohé-
rence d'intervention en relation avec l'en-
tièreté du plan d'eau de ± 2 000 m2. Entre
la zone du débarcadère (secteur amont)
et les piles du pont (secteur aval), l'espace
a été subdivisé en carrés de 2 m de côté
Cette recodification des carrés de fouilles
s'est non seulement révélée nécessaire
pour l'extension de la première tranchée
en 2015, mais le sera également pour
toutes les opérations futures. Ainsi, la
Han-sur-Lesse, Trou de Han : localisation des opérations d'archéologie subaqua- codification combine des lettres suivant
tique de 2012-2014 (T1) et 2015 (T2).
l'ordre alphabétique de la rive gauche à
la rive droite et une numérotation crois-
L'identification comme dépotoir «  récent  » indique sante d'amont en aval. La tranchée de 2015 (T2) corres-
non seulement que l'histoire de l'occupation et de l'uti- pond par conséquent aux « couloirs » de 2 m de large
lisation des grottes de Han-sur-Lesse ne concerne pas nos 18 et 19, juste en amont de l'ancienne tranchée (T1)
exclusivement les périodes usuellement étudiées (Âges correspondant aux couloirs  nos  20 et 21, eux-mêmes
du Bronze et du Fer, époque gallo-romaine), mais aussi subdivisés de la rive gauche vers la rive droite par des
que l'intérêt « touristique » des grottes est antérieur à lettres tous les 2 m.
son exploitation commerciale jusqu'alors attestée dès En 2015, la zone d'intervention, soit 20  m2, s'est
la première moitié du 19e siècle. concentrée dans les carrés  D18, E18/E19, F18/F19
À l'issue des trois années de fouilles, des premiers et G18. Nous comptabilisons plus de 129  heures de
fragments de céramique ancienne (protohistorique) ont travail subaquatique dans cette nouvelle tranchée déli-
également été identifiés au fond de la tranchée de 4 m de mitée sous l'eau par deux nouveaux bouts. L'entièreté
large reliant la rive gauche aux surplombs de la rive droite de cette surface a été décapée sur 1 m de profondeur
(T1). Cette zone d'intervention devenant trop exiguë et en respectant l'inclinaison naturelle de la rivière, ce
dangereuse pour continuer à descendre dans les couches qui correspond à ±  18  m3 de sédiment fouillé. Il est
archéologiques sans provoquer l'effondrement des important de signaler qu'une berme témoin de 50 cm
coupes, une nouvelle tranchée de 4 m de large (T2) a été de largeur a été préservée entre les deux tranchées afin
implantée en 2015 directement en amont de la tranchée de faciliter l'enregistrement stratigraphique. La super-
de 2012-2014. Cette stratégie d'intervention repose sur ficie d'intervention des carrés (E19 et F19) ne repré-
différents motifs  : premièrement, l'élargissement de la sente donc que 3  m2 (2  m  × 1,5  m), tout comme les
surface de fouilles permettra à long terme d'accéder aux carrés D18 et G18 qui n'ont pas entièrement été fouil-
zones plus profondes percées à la fin de 2014 (les couches lés sur toute leur superficie.
304

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

D'un point de vue qualitatif, nous observons une


grande homogénéité entre les artefacts de 2012-2014
et ceux découverts dans la nouvelle tranchée. Non
seulement la majorité du matériel issu du dépotoir
correspond aux périodes des 17e-18e  siècles, mais il
existe également de nombreuses connexions entre les
fragments de céramique récoltés lors des différentes
campagnes. En particulier, de nouveaux fragments
appartenant à une assiette du 17e siècle avec un décor à
la barbotine rehaussée de cuivre – reconstituée à partir
de différents tessons découverts entre 2012 et 2014 –
ont été découverts en 2015 dans la nouvelle tranchée.
De nouvelles perles en bois provenant d'un chapelet
découvert précédemment ont également été mises au
jour, ainsi que de nombreux fragments de cuir. L'ana-
lyse du matériel céramique est toujours en cours, mais
les résultats préliminaires corroborent ceux de 2012-
2014 car ils indiquent une occupation et/ou une utili-
sation intensive de ce secteur à partir du 17e siècle, près
de 200 ans avant l'exploitation touristique planifiée des
grottes de Han.
Han-sur-Lesse, Trou de Han : fragments de semelles et Les campagnes archéologiques suivantes (2016
autres éléments en cuir (17e-18e siècles).
et 2017) s'attacheront à comprendre cette période
méconnue en continuant la fouille dans la deuxième
Alors que seulement 349  fragments de céramiques tranchée (T2) et in fine à faire la jonction avec la
ont été inventoriés entre 2012 et 2014 sur un secteur première tranchée (T1). Dès que la jonction aura été
de 48 m2 au sein de la première tranchée (de C20/C21 réalisée, les opérations se concentreront sur la reprise
à H20/H21), plus de 629  fragments de céramiques des fouilles interrompues en 2014 dans les couches
ont été enregistrés en 2015 sur une superficie d'inter- dites «  anciennes  », mais cette fois-ci au sein d'une
vention de 20  m2 (principalement les carrés  E18/E19 tranchée de 8 m de large.
et F18/F19). Nous comptabilisons également plus Les auteurs remercient les membres du Centre de
de 207  éléments de ferronneries et des monnaies Recherches archéologiques fluviales, très actifs pour
appartenant aux 17e-20e  siècles, 411  fragments de leur implication dans ce projet, de même que la Société
verres appartenant majoritairement à des lampes à des Grottes pour leur aide technique et logistique.
pétrole du 19e siècle et plus de 600 isolats organiques,
principalement des fragments de semelles ou autres Bibliographie
éléments en cuir et des fragments de bois dont ■■ Ansieau C., 2000. La Meuse et les voies d'eau : un patrimoine
certains possèdent des traces d'outils. D'un point de à découvrir. L'exemple de Han-sur-Lesse. In  : Plumier-
vue quantitatif, nous constatons que la concentration Torfs J. & S. & Duhaut C. (dir.), Actes de la huitième Journée
des artefacts en céramique par mètre carré est quatre d'Archéologie namuroise (Rochefort, 25 et 26  février 2000),
fois plus importante dans cette nouvelle tranchée. Namur, p. 91-94.
Cette observation montre en réalité que les secteurs ■■ Ansieau C., Delaere C. & Jasinski M., 2014. Rochefort/
de fouille de 2015 n'ont jamais été perturbés, alors que Han-sur-Lesse : reprise de la recherche subaquatique à la sortie
les couches superficielles des secteurs de fouilles de de la grotte, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, p. 288-290.
2012 à 2014 avaient été partiellement fouillées entre ■■ Ansieau C., Delaere C. & Jasinski M., 2015. Rochefort/
1978 et 1983 jusqu'au niveau des blocs d'effondrement Han-sur-Lesse : fouilles subaquatiques au Trou de Han, résultats
des campagnes 2012-2014, Chronique de l'Archéologie wallonne,
des surplombs. Cette information peut également être
23, p. 324-327.
confirmée par les relevés bathymétriques réalisés en
1998 par M. Georges et B. Huyghe (Ansieau, 2000), où
une « dépression » est observée dans la partie inférieure
de la première tranchée (T1) alors que l'inclinaison
du fond de la rivière dans la tranchée de 2015 (T2)
est différente. Celle-ci peut donc être assimilée à un
ancien secteur de fouille.
305

Toutes périodes Namur

Viroinval/Olloy-sur-Viroin et Dourbes : Lambert  : 165675  est/85175  nord) fait l'objet depuis


la fortification protohistorique du « Plateau maintenant 11 ans de campagnes de fouilles conduites
par l'asbl Forges Saint-Roch, en collaboration avec le
des Cinques », campagne de fouilles 2015
CReA-Patrimoine de l'ULB. Les fouilles s'effectuent
sous l'égide de la Direction de l'archéologie (DGO4 /
Jean-Luc Pleuger, Fanny Martin Département du patrimoine).
et Eugène Warmenbol La fortification est localisée sur un promontoire
rocheux appartenant au massif calcaire dévonien de la
Le site Calestienne, qui s'étend de sud-est en nord-ouest dans
les provinces de Namur et de Hainaut. Le promontoire
La fortification du «  Plateau des Cinques  » (parc. du « Plateau des Cinques » est entouré par une boucle
cad.  : Viroinval, 1re  Div., Sect.  A, nos  585, 584, 577m, du Viroin qui coule une septantaine de mètres plus
586p et 586l, et 8e Div., Sect. C, nos 919 et 920 ; coord. bas. Deux dispositifs de fortification rectilignes, flan-

Fortification du « Plateau des Cinques » : plan des structures laténiennes et des structures Michelsberg de la porte orientale.
306

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

qués de fossés, orientés nord/sud, parallèles et espacés présence d'un arbre sur l'extrémité de la levée de terre
d'environ 220  m, s'élèvent sur le plateau. Le rempart a empêché la fouille de ce tronçon.
oriental s'étend sur une longueur de près de 80 m et le Un potin «  au personnage marchant  » de type
rempart occidental sur 170 m. Les portes sont situées Scheers 191 a été découvert au niveau de l'interface de
en leur milieu. D'autres structures sont encore visibles creusement de l'un des poteaux de la porte (fait 7004).
dans le relief : des marchets et des cavités entourées par Sur l'avers, on peut distinguer un personnage aux
une couronne de blocs de pierre. cheveux tressés tenant un torque et une petite lance.
La plupart des structures appartiennent à la phase Le revers porte une représentation animale (un loup
finale du Second Âge du Fer, dans une fourchette se ou un ours) accompagnée d'un serpent et d'une fibule.
situant entre -200 et le changement d'ère d'après les Ce monnayage attribué aux Rèmes aurait circulé prin-
analyses radiocarbone (Warmenbol & Pleuger, 2007 ; cipalement entre 120 et 100 av. notre ère (communica-
2009  ; 2010  ; 2011  ; Pleuger & Warmenbol, 2008  ; tion personnelle J.-M. Doyen). Il s'agit du type gaulois
2012 ; 2013). le plus abondant en Calestienne après le potin «  au
rameau A ».
Le rempart oriental laténien Une tranchée ouverte en 2014 dans le rempart
a été approfondie lors de cette nouvelle campagne
La campagne 2015 a porté sur la fouille du disposi- (secteur 5 ; Pleuger, Warmenbol & Martin, 2015). Des
tif d'entrée de la porte du rempart laténien oriental niveaux de négatifs de poutraison interne y ont encore
(zone 7, secteur 6). une fois été mis au jour. Une traverse et trois longrines
On accède à cette porte en franchissant une plate- espacées de 0,42 à 1 m (T1 et L1 à L3) peuvent proba-
forme retaillée dans la roche, large d'environ 4,70  m blement être attribuées à une première phase de
et limitée de chaque côté par les extrémités du fossé construction du rempart. La fouille de ce secteur a été
(zone 7, secteurs 1 et 4). Les restes d'une structure en interrompue pour des impératifs de sécurité.
élévation sont matérialisés par la présence de trous de Des raisons de sécurité avaient également dicté
poteaux dans le couloir d'entrée. Jusqu'à présent, deux l'arrêt de la fouille du fossé (secteur  4) en 2014. Son
alignements parallèles de trous de pieux ont été déga- investigation a repris cette année après talutage des
gés (secteur 6 ; faits 7004, 7005, 7009, 7010, 7012, 7026, parties instables.
7027, 7028, 7030 et 7033). Les trous de poteaux étaient, Elle a permis la découverte d'une partie du parement
pour la plupart, taillés dans les veines de roche calcaire externe du rempart oriental, parement déjà repéré en
les plus friables, ou même dans d'anciennes structures 1979 lors de la fouille d'Amphora (Doyen & Warmenbol,
néolithiques remblayées. D'un diamètre moyen de 1981). Il est constitué de longues dalles de dimensions
0,47 m, ils présentent généralement un calage en pierres avoisinant les 0,30  m à 0,40  m sur 0,20  m posées sur
disposé autour du négatif de pieu. Les poteaux alignés la roche. Elles semblent avoir été extraites du versant
ménageaient un couloir d'environ 2,40 m de large. Le est du fossé, laissant systématiquement apparentes les
premier poteau d'un possible troisième alignement cavités d'extraction dans la paroi, puis mises en place
parallèle, situé au sud des précédents, a également été après une légère retouche. La recharge laténienne de la
mis au jour (secteur 6, fait 7036). Il définit l'emplace- deuxième phase du rempart s'est déversée dans le fossé,
ment d'un éventuel second couloir plus étroit. Mais la entraînant une partie du parement externe du rempart

Dépôt d'ossements humains et animaux, fossé oriental


Poteau laténien (fait 7005), porte orientale. (secteur 4).
307

Toutes périodes Namur

La seconde est matérialisée par une palissade déjà


sondée en 2014 (secteur  3, structure  10). Elle a été
dégagée plus avant. Elle est également attribuée à
l'occupation Michelsberg. Les datations radiocarbone
la situent dans la première  moitié du 4e millénaire
av. notre ère. Trois dates réalisées sur des échantillons
issus de ces structures font état d'une fourchette chro-
nologique située entre 3770 et 3650 av. notre ère.
Un andouiller de cervidé retrouvé au fond du fossé
lors de la dernière campagne de fouille permettra
certainement de préciser, par la comparaison des data-
Dépôt de meule, fossé oriental (secteur 4).
tions radiocarbone, la chronologie des deux structures.

jusqu'à sa première assise qui elle, est restée en place. Études en cours
À remarquer, un morceau de meule tournante et
beaucoup de fragments d'ossements animaux dont des Parallèlement aux fouilles effectuées par les Forges
dents de jeunes chevaux retrouvés dans le déversement Saint-Roch sur le terrain, l'étude des données se pour-
de la recharge. suit au CReA-Patrimoine et une synthèse est en cours
Enfin, sous ce déversement, nous avons, comme en de rédaction. La céramique des campagnes 2004 à
2014, retrouvé le substrat d'argile et de blocs calcaires 2012 été publiée et le reste est en cours d'étude (Martin,
de la première phase. Celui-ci contenait, dispersés 2013)  ; le matériel métallique et les objets en verre
sur le fond de la structure, des ossements humains, le sont étudiés. Un mémoire portant sur les ossements
crâne d'un individu jeune et une mandibule ainsi que animaux a fait l'objet d'un article (François, 2015). Un
des ossements d'animaux dont un crâne de sanglier. second mémoire portant sur les ossements humains
Le crâne humain s'est retrouvé écrasé sous l'effondre- est en voie de réalisation et les datations radiocarbone,
ment du parement de la deuxième phase. Certains os effectuées chaque année à l'Institut royal du Patrimoine
humains semblent présenter des traces de coups ou de artistique, se poursuivent.
découpe.
À ces objets s'ajoutent des éléments pouvant Bibliographie
évoquer le sacrifice d'un bouclier. Notamment un ■■ Doyen J.-M. & Warmenbol E., 1981. La fortification proto-
fragment d'orle, petite gouttière en métal cuivreux historique d'Olloy-sur-Viroin, Bruxelles (Publications du Club
garnie d'une double série d'incisions, qui garnissait archéologique Amphora, 11).
la fine tranche en bois du bouclier. Sa courbure ■■ François L., 2015. Étude archéozoologique des fouilles
prononcée suggère qu'il s'agit de la partie qui ourlait effectuées sur l'oppidum du plateau des «  Cinques  » à Olloy-
le bas ou le haut du bouclier. Un petit rivet à tête sur-Viroin (Viroinval, prov. de Namur, Belgique), Lunula.
hémisphérique creuse, d'un diamètre de 12  mm, a Archaeologia protohistorica, 23, p. 185-189.
également été retrouvé. Tout ce matériel découvert ■■ Martin F., 2013. Olloy-sur-Viroin «  Plateau des
dans le fossé (ossements humains, armement, Cinkes » : la céramique découverte lors des campagnes de
meule...), ainsi que celui déjà découvert lors de la fouille 2004-2011, Lunula. Archaeologia protohistorica, 21,
p. 161-166.
campagne de 2014, s'apparente à celui des dépôts
d'offrandes typiques des sanctuaires gaulois ■■ Pleuger J.-L. & Warmenbol E., 2008. La fortification proto-
traditionnels. Une datation radiocarbone pratiquée historique d'Olloy-sur-Viroin (province de Namur, Belgique) :
campagne de fouilles 2007, Lunula. Archaeologia protohistorica,
sur l'un des ossements posés sur le fond du fossé a
16, p. 125-127.
fourni une fourchette chronologique comprise entre
■■ Pleuger J.-L. & Warmenbol E., 2012. Viroinval/Olloy-
180 et 50 av. notre ère.
sur-Viroin  : la porte occidentale de la fortification protohisto-
rique. Campagne 2010, Chronique de l'Archéologie wallonne, 19,
La palissade et le fossé Michelsberg p. 216-219.
■■ Pleuger J.-L. & Warmenbol E., 2013. Viroinval/Olloy-sur-
La fouille a permis de mettre en évidence deux struc- Viroin et Dourbes : la porte occidentale de la fortification proto-
tures défensives. La première, matérialisée par un fossé historique du «  Plateau des Cinques  », campagne 2011, Chro-
profond, est établie sous le rempart laténien (secteur 6, nique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 250-252.
fait  7029). Le matériel lithique et céramique décou-
vert permet de l'attribuer à la culture Michelsberg du
Néolithique moyen.
308

Chronique de l'Archéologie wallonne Toutes périodes

■■ Pleuger J.-L., Warmenbol E. & Martin F., 2015. Viroinval/


Olloy-sur-Viroin et Dourbes : la fortification protohistorique du
« Plateau des Cinques », campagne 2014, Chronique de l'Archéo-
logie wallonne, 23, p. 328-330.
■■ Scheers S., 1977. Traité de numismatique celtique. 2. La
Gaule Belgique, Paris (Centre de recherches d'histoire ancienne,
Numismatique, 24 – Annales littéraires de l'Université de
Besançon, 195).
■■ Warmenbol E. & Pleuger J.-L., 2007. Viroinval/Olloy-sur-
Viroin : fouilles 2004 et 2005 sur la fortification protohistorique
du « Plateau des Cinques », Chronique de l'Archéologie wallonne,
14, p. 189-192.
■■ Warmenbol E. & Pleuger J.-L., 2009. Viroinval/Olloy-sur-
Viroin   : fouilles 2007 sur la fortification protohistorique du
«  Plateau des Cinques  », Chronique de l'Archéologie wallonne,
16, p. 197-199.
■■ Warmenbol E. & Pleuger J.-L., 2010. La fortification
protohistorique d'Olloy-sur-Viroin  : campagne de fouilles
2009 (province de Namur, Belgique), Lunula. Archaeologia
protohistorica, 18, p. 139-141.
■■ Warmenbol E. & Pleuger J.-L., 2011. Viroinval/Olloy-sur-
Viroin : la porte occidentale de la fortification protohistorique
du « Plateau des Cinques », campagne 2009, Chronique de
l'Archéologie wallonne, 18, p. 221–224.
309

Index des communes et des localités

Les renvois sont présentés selon les communes, fixées par l'A.R. du 17 septembre 1975 portant fusion de communes
et modification de leurs limites, ensuite selon les localités concernées.

Aiseau-Presles Florennes
-/Presles������������������������������������������������������������������������ 113 -/Morialmé ������������������������������������������������������������������ 257
Amay Gembloux
-/Amay�������������������������������������������������������������������������� 155 -/Bossière���������������������������������������������������������������������� 279
Andenne -/Gembloux������������������������������������������������������������������ 280
-/Andenne������������������������������������������������������������264, 277 Gouvy
-/Landenne������������������������������������������������������������������ 265 -/Bovigny��������������������������������������������������������������227, 229
-/Sclayn ����������������������������������������������������������������255, 278 Grâce-Hollogne
Anthisnes -/Grâce-Hollogne������������������������������������������������189, 192
-/Anthisnes������������������������������������������������������������������ 186 -/Mons-lez-Liège �������������������������������������������������������� 192
Antoing Grez-Doiceau
-/Maubray���������������������������������������������������������������������� 71 -/Grez-Doiceau�������������������������������������������������������������� 32
Arlon Habay
-/Arlon�������������������������������������������������������������������������� 233 -/Habay-la-Vieille������������������������������������������������234, 238
Ath Havelange
-/Ath����������������������������������������������������������������������117, 119 -/Flostoy������������������������������������������������������������������������ 257
-/Ghislenghien �������������������������������������������������������� 84, 86 Hensies
Beauvechain -/Hensies������������������������������������������������������������������������ 94
-/L'Écluse������������������������������������������������������������������������ 37 -/Montrœul-sur-Haine ������������������������������������������ 96, 98
-/Nodebais���������������������������������������������������������������������� 40 Herstal
Belœil -/Herstal������������������������������������������������������������������������ 195
-/Quevaucamps������������������������������������������������������������ 120 -/Milmort��������������������������������������������������������������������� 155
Binche Honnelles
-/Buvrinnes������������������������������������������������������������������ 104 -/Roisin ������������������������������������������������������������������������ 101
Braine-l'Alleud Hotton
-/Braine-l'Alleud������������������������������������������������������������ 29 -/Hotton������������������������������������������������������������������������ 244
Brunehaut Huy
-/Hollain ������������������������������������������������������������������������ 72 -/Huy ����������������������������������������������������������� 200, 206, 210
-/Laplaigne �������������������������������������������������������������������� 73 Jemeppe-sur-Sambre
-/Lesdain������������������������������������������������������������������������ 73 -/Balâtre����������������������������������������������������������������282, 285
Chaumont-Gistoux -/Moustier-sur-Sambre���������������������������������������������� 287
-/Dion-Valmont������������������������������������������������������������ 42 Jodoigne
Clavier -/Jodoigne���������������������������������������������������������������������� 43
-/Terwagne ������������������������������������������������������������������ 176 Juprelle
Courcelles -/Juprelle ���������������������������������������������������������������������� 178
-/Gouy-lez-Piéton ������������������������������������������������������ 122 La Hulpe
Dinant -/La Hulpe���������������������������������������������������������������������� 46
-/Dinant������������������������������������������������������������������������ 278 Léglise
Enghien -/Léglise������������������������������������������������������������������������ 231
-/Petit-Enghien�������������������������������������������������������������� 89 Liège
Engis -/Jupille-sur-Meuse ���������������������������������������������������� 161
-/Hermalle-sous-Huy�������������������������������������������������� 187 -/Liège ��������������������������������������������������������� 211, 212, 215
Esneux -/Rocourt���������������������������������������������������������������������� 144
-/Esneux������������������������������������������������������������������������ 188 Malmedy
Ferrières -/Malmedy�������������������������������������������������������������������� 218
-/Vieuxville������������������������������������������������������������������ 141 Marche-en-Famenne
Fleurus -/Marche-en-Famenne������������������������������������������������ 241
-/Brye������������������������������������������������������������������������������ 91 Modave
-/Saint-Amand�������������������������������������������������������������� 74 -/Modave���������������������������������������������������������������������� 148
310

Index des communes et des localités

-/Vierset-Barse����������������������������������������������������165, 219 Theux


Mons -/Theux�������������������������������������������������������������������������� 153
-/Mons�������������������������������������������������������������������������� 123 Tournai
-/Saint-Symphorien������������������������������������������������������ 83 -/Tournai���������������������������������������������������������������������� 133
-/Spiennes���������������������������������������������������������������� 76, 79 Tubize
Morlanwelz -/Tubize�������������������������������������������������������������������������� 60
-/Morlanwelz-Mariemont����������������������������������105, 107 Verviers
Mouscron -/Verviers���������������������������������������������������������������������� 184
-/Mouscron������������������������������������������������������������������ 125 Villers-la-Ville
Namur -/Marbais������������������������������������������������������������������������ 91
-/Namur������259, 267, 275, 287, 291, 293, 294, 295, 298 -/Villers-la-Ville������������������������������������������������������ 16, 26
Neufchâteau Villers-le-Bouillet
-/Hamipr������������������������������������������������������������������� 231 -/Villers-le-Bouillet ��������������������������������������������164, 172
Nivelles Viroinval
-/Nivelles������������������������������������������������������13, 24, 50, 53 -/Dourbes �������������������������������������������������������������������� 305
Ohey -/Nismes����������������������������������������������������������������������� 261
-/Évelette���������������������������������������������������������������������� 302 -/Olloy-sur-Viroin������������������������������������������������������ 305
-/Haillot������������������������������������������������������������������������ 302 Waterloo
Olne -/Waterloo���������������������������������������������������������������������� 63
-/Olne���������������������������������������������������������������������������� 220 Welkenraedt
Orp-Jauche -/Welkenraedt�������������������������������������������������������������� 223
-/Énines�������������������������������������������������������������������������� 57 Yvoir
-/Jauche �������������������������������������������������������������������������� 58 -/Godinne�������������������������������������������������������������������� 268
Ottignies-Louvain-la-Neuve -/Yvoir �������������������������������������������������������������������������� 271
-/Ottignies���������������������������������������������������������������������� 59
Oupeye
-/Hermalle-sous-Argenteau������������������������������154, 221
Pepinster
-/Soiron������������������������������������������������������������������������ 152
Pont-à-Celles
-/Luttre�������������������������������������������������������������������������� 103
Quévy
-/Genly���������������������������������������������������������������������������� 81
-/Quévy-le-Grand ������������������������������������������������������ 125
Rebecq
-/Bierghes ���������������������������������������������������������������������� 59
Rixensart
-/Rixensart���������������������������������������������������������������������� 33
Rochefort
-/Han-sur-Lesse ���������������������������������������������������������� 302
Rouvroy
-/Dampicourt �������������������������������������������������������������� 245
Saint-Ghislain
-/Baudour �������������������������������������������������������������������� 130
Soignies
-/Soignies���������������������������������������������������������������������� 110
Soumagne
-/Ayeneux �������������������������������������������������������������������� 166
Stavelot
-/Stavelot���������������������������������������������������������������������� 168
Stoumont
-/La Gleize�������������������������������������������������������������������� 180
311

Index des auteurs

Abrams Grégory, Centre archéologique de la grotte Scladina �������������������������������������������������������������������������������244, 255


Ansieau Cécile, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1���������������������������������������������������������������������������������������������123, 302
Assojaa Noureddine, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz�������������������������������������������������������������������������������������176
Authom Nicolas, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1 ���������������������������������������������������������������������������� 89, 91, 110, 122
Baltus Jean-François, ARC-HAB �������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������234
Baudry Antoine����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 33
Bauwens Catherine, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1�������������������������������������������������������������������������������������������������184
Bayot Willy, Pro Geminiaco �����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Bit Richard, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz�����������������������������������������������������������������������������������������������������187
Bolland Françoise, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz���������������������������������������������������������������������������������������219
Bolle Caroline, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1���������������������������������������������������������������������������������������������������������215
Bonjean Dominique, Centre archéologique de la grotte Scladina���������������������������������������������������������������������������������255
Bosquet Dominique, Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon��������������������������������������������29, 32, 57, 59, 60, 63, 144
Boulez Virginie, IPW, Centre des métiers du patrimoine ���������������������������������������������������������������������������������������������200
Brams Kevin, SPW, DGO3, Dép. de la Nature et des Forêts�������������������������������������������������������������������������������������������244
Bruyns Élisabeth��������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 33
Cabrero Carolina�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������130
Casterman François, ARC-HAB���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������238
Cattelain Laureline, Cedarc – Musée du Malgré-Tout�������������������������������������������������������������������������������������������������261
Cattelain Pierre, Cedarc – Musée du Malgré-Tout�������������������������������������������������������������������������������������������������������261
Challe Sophie, Dir. archéologie�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������264
Clinaz Nicolas�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������104
Collet Hélène, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1�����������������������������������������������������������������������������������������79, 81, 130
Collette Olivier, Dir. archéologie��������������������������������������������������������������������������������������������������������16, 91, 119, 166, 192
Collin Jean-Philippe, Université de Namur ; Université de Paris I (France)���������������������������������������������������������������130
Coquelet Catherine, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1����������������������������������������������������������������������155, 161, 178, 221
Crémer Sarah, Institut royal du Patrimoine artistique �������������������������������������������������������������������������������������������166, 271
Culot Didier, À Montquintin���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������245
Danese Véronique, Recherches et Prospections archéologiques �����������������������������������������������������������������������������84, 125
Dardenne Léon, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz���������������������������������������������������������������������������������������������155
de Bernardy de Sigoyer Sophie, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 �������������������������������������������������������� 155, 188, 192
Delaby Serge, Service de Géologie, Université de Mons�������������������������������������������������������������������������������������������������189
Delaere Christophe, CReA-Patrimoine, ULB�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������302
Delaunois Élise, Préhistomuseum de Ramioul��������������������������������������������������������������������� 257, 264, 265, 282, 285, 287
Delcourt-Vlaeminck Marianne, Société tournaisienne de Géologie, Préhistoire et Archéologie ; Musée
d'Archéologie de Tournai �������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������71, 72, 73
De Lens Lodewijk������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 81
de Longueville Sylvie, Dir. archéologie���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������264
Delvoie Simon, Service de géomécanique et géologie de l'Ingénieur, ULg �����������������������������������������������������������������144
Delye Emmanuel, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz�������������������������������������������������������������������������������������������219
Demanet Jean-Claude, Pro Geminiaco�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Demelenne Marie, Musée royal de Mariemont�������������������������������������������������������������������������������������������������������105, 107
Denis Marceline, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1���������������������������������������������������������������������������������������������������125
Déom Hélène, Tibia���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������285
Deramaix Isabelle, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1 ���������������������������������������������������������������������������� 117, 119, 133
Désert Robert, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz ������������������������������������������������������������������������������ 176, 187, 219
De Smedt Philippe, Orbit, UGent����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
De Staercke Olivia, Recherches et Prospections archéologiques���������������������������������������������������������������������������60, 125
Desterbecq Daniel����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 74
De Waele Éric������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 16
Di Modica Kévin, Centre archéologique de la grotte Scladina �����������������������������������������������������������������������������144, 255
Docquier Gilles, Musée royal de Mariemont�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������107
Draily Christelle, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg������������������������������������������������������������������227, 229, 231, 244
Dufrasnes Jean������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������94, 96, 98, 101, 120
312

Index des auteurs

Dupont Adrien, Ville d'Ath, service des Archives�����������������������������������������������������������������������������������������������������������117


Ech-Chakrouni Souad, Centre de Physique du Globe �������������������������������������������������������������������������������������������84, 265
Eubelen Michel, Cercle archéologique Ardenne-Condroz�������������������������������������������������������������������������������������176, 188
Evans Mark������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
Eve Stuart, LP Archaeology (Royaume-Uni)����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
Fetter Sylvain, Préhistomuseum de Ramioul �����������������������������������������������������������������������������������������������������������������227
Fock Heike, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 ���������������������������������������������������������������������������������������������������������������223
Foinette Charles, Coldstream Guards (Royaume-Uni)��������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
Fourmeaux Christian, Société tournaisienne de Géologie, Préhistoire et Archéologie�����������������������������������71, 72, 73
Fraiture Pascale, Institut royal du Patrimoine artistique������������������������������������������������������������������������������ 166, 268, 271
François Emmanuel, SPW, DGO3, Dép. de la Nature et des Forêts�����������������������������������������������������������������������������244
Frébutte Christian, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur�������������������������������������������������������������������������������������������������251
Funcken Luc, SPW, DGO1, Dir. Géotechnique���������������������������������������������������������������������������������������������������������58, 189
Gautier Patrice, Musées royaux d'Art et d'Histoire����������������������������������������������������������������������������������������������������������� 33
Gava Gianni, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz��������������������������������������������������������������������������155, 164, 176, 187
Gémis Philippe, Les Chercheurs de la Wallonie ���������������������������������������������������������������������������������������������������������������192
Gillet Patricia, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 ���������������������������������������������������������������������������������������������������������195
Godefroid Aubrée, Association wallonne d'Études mégalithiques�������������������������������������������������������������������������������172
Goemaere Éric, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique�������������������������������������������������������������������������������120
Goffette Quentin, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique�������������������������������������������������������������������������186
Goffioul Claire, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1������������������������������������������������������������������������������155, 166, 192, 220
Guillaume Alain, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1��������������������������������������������������������������������������������������������������� 83
Guiot Didier �������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������279
Gysbergh Corinne, Musée royal de Mariemont���������������������������������������������������������������������������������������������������������������107
Haesaerts Paul, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique�������������������������������������������������������������������������������144
Halbardier Benoît, ARC-HAB���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������234, 238
Hardy Carole, Préhistomuseum de Ramioul ������������������������������������������������������������������������� 264, 265, 277, 278, 282, 302
Hauzeur Anne, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique�������������������������������������������������������������������������������130
Heller Frédéric, Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon�������������������������������������������������������������������������������13, 37, 42
Henrard Denis, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 �������������������������������������������������������������������������������������� 172, 188, 195
Henrotay Denis, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg�������������������������������������������������������������������������������������225, 233
Hus Jozef, Centre de Physique du Globe ���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������84, 265
Ingels Dolores, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1�����������������������������������������������������������������������������������������������������119
Jaminon André, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz���������������������������������������������������������������������������������������176, 187
Jasinski Marc, Centre de Recherches archéologiques fluviales���������������������������������������������������������������������������������������302
Jurdant Sophie, Dép. patrimoine, Dir. ext. Namur���������������������������������������������������������������������������������������������������������267
Juvigné Étienne, Département de Géographie, ULg�������������������������������������������������������������������������������������������������������144
Lambot Sébastien, Earth and Life Institute, UCL�������������������������������������������������������������������������������������������������������������238
Lavachery Philippe, Société de Recherche préhistorique en Hainaut �������������������������������������������������������������79, 81, 130
Leblois Éric�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������94, 96, 98
Leduc Christophe, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1������������������������������������������������������������������������������������������������� 53
Leduc Sylvie, Serv. archéologie, Dir. ext. Luxembourg ���������������������������������������������������������������������������������������������������231
Lefert Sophie, Service de Jeunesse archeolo-J�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������257
Léotard Jean-Marc, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1�������������������������������������������������������������������������������������������������139
Lucon Yorick, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz �����������������������������������������������������������������������������������������165, 219
Lurquin Éric, Pro Geminiaco���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Maggi Christophe, Institut royal du Patrimoine artistique���������������������������������������������������������������������������������������������268
Marchal Jean-Claude, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz �������������������������������������������������������������������������176, 187
Marchal Jean-Philippe, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 ���������������������������������������������������������������������������������155, 192
Martin André, Cercle archéologique Ardenne-Condroz���������������������������������������������������������������������������������������176, 188
Martin Fanny, CReA-Patrimoine, ULB�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������305
Mees Nathalie, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur�����������������������������������������������������������������������������������������������������������287
Meunier Nicolas, Préhistomuseum de Ramioul��������������������������������������������������������������������������������������������� 227, 231, 241
Miller Rebecca, Service de Préhistoire, ULg�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������148
313

Index des auteurs

Moulaert Véronique, Recherches et Prospections archéologiques �������������������������������������������������������������������������32, 60


Neuray Brigitte, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1���������������������������������������������������������������������������������������������������������168
Noiret Pierre, Service de Préhistoire, ULg�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������148
Oger Axelle, Institut royal du Patrimoine artistique�������������������������������������������������������������������������������������������������������271
Parent Serge �������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������120
Paridaens Nicolas, CReA-Patrimoine, ULB���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������113
Parmentier Jérôme, À Montquintin ; Cercle royal d'Art et d'Histoire de Gembloux����������������������������������������245, 280
Pelzer Benoît�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������153
Péters Catherine, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1���������������������������������������������������������������������������������������������206, 210
Pigière Fabienne, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique���������������������������������������������������������������������195, 259
Pirson Stéphane, Dir. archéologie������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������ 79, 144, 221
Pleuger Jean-Luc, Forges-Saint-Roch�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������305
Polis Raymond, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz��������������������������������������������������������������������������������������155, 176
Pollard Tony, Center for Battlefield Archaeology, University of Glasgow (Royaume-Uni)��������������������������������������� 29
Polrot Francis���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������152, 153
Rosart Amandyne, Société de Recherche préhistorique en Hainaut ���������������������������������������������������������������������81, 130
Sartieaux Pierre-Philippe, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1�������������������������������������������������������������������������105, 117
Schaus Amandine, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz�����������������������������������������������������������������������������������������219
Siebrand Michel, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur ����������������������������������������������������������������������������259, 267, 279, 280
Soleil Philippe, Société tournaisienne de Géologie, Préhistoire et Archéologie�����������������������������������������������������72, 73
Sollas Xavier, Pro Geminiaco���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Soumoy Martine, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1 ��������������������������������������������������������������������������������������������������� 67
Spagna Paul, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique�����������������������������������������������������������������������������144, 221
Stewart John, Bournemouth University (Royaume-Uni) ���������������������������������������������������������������������������������������������148
Thiébaux Aurélie, Université de Liège�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������120
Thiry Vivien, À Montquintin ���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������245
Tilmant Pierre-Hugues, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur����������������������������������������257, 275, 287, 291, 293, 294, 295
Toussaint Michel�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 79, 141, 244
Unger Lyse, Société de Recherche préhistorique en Hainaut�����������������������������������������������������������������������������������79, 130
Van Buylaere Muriel, Recherches et Prospections archéologiques������������������������������������������������������������������������������� 86
Vanden Bosch André, Spéléo Club de Belgique �������������������������������������������������������������������������������������������������������������244
Vanden Bosch Daniel, Spéléo Club de Belgique�������������������������������������������������������������������������������������������������������������244
van der Sloot Pierre, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1 �������������������������������������������������������������������������������������144, 221
Van Dijck Frédéric, SPW, DGO4, Dép. de l'Aménagement du territoire et de l'Urbanisme�������������������������������58, 189
Van Driessche Aude, Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon�����������������������������������������������������������������������13, 26, 37
Van Hove Marie-Laure, Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon�������������������������������������������������������������������26, 60, 63
Vanmechelen Raphaël, Dir. archéologie���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������298
Van Meirvenne Marc, Orbit, UGent����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
Van Nieuwenhove Benjamin, Recherches et Prospections archéologiques���������������������������������������������������������������125
Verbeek Marie, Serv. archéologie, Dir. ext. Namur���������������������������������������������������������������������������������������� 268, 271, 278
Vergauts Pascal, Pro Geminiaco���������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Verstraelen Nancy, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1������������������������������������������������ 76, 154, 180, 186, 211, 212, 218
Vilvorder Fabienne, CRAN-UCL�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������103
Vrielynck Olivier, Dir. archéologie������������������������������������������������������������������������������������������������������������ 58, 141, 189, 261
Waersegers Yann, Service de Préhistoire, ULg���������������������������������������������������������������������������������������������������������������148
Warmenbol Eugène, CReA-Patrimoine, ULB�����������������������������������������������������������������������������������������������������������������305
Wéry Benoît, Musée et château fort de Logne�������������������������������������������������������������������������������������������������������������������141
White Alasdair ����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 29
Wilkinson Keith, University of Winchester (Royaume-Uni)�����������������������������������������������������������������������������������������148
Willems Didier, Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon��������������������������������������� 9, 16, 24, 26, 40, 43, 46, 50, 53, 59
Witvrouw Jacques, Cercle archéologique Hesbaye-Condroz���������������������������������������������������������������������� 155, 176, 187
Woodbury Michel, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1�����������������������������������������������������������������������������������������79, 130
Wouters Wim, Institut royal des Sciences naturelles de Belgique �������������������������������������������������������������������������������186
Yernaux Geneviève, Recherches et Prospections archéologiques����������������������������������������������������������������������������������� 46
315

Table des matières

6 Avant-propos
Alain Guillot-Pingue

Brabant wallon
9 Éditorial
Didier Willems

Moyen Âge
13 Nivelles/Nivelles : rue de Mons, ancienne église du Grand Saint-Jacques
Frédéric Heller et Aude Van Driessche
16 Villers-la-Ville/Villers-la-Ville : l'ancienne abbaye, à propos d'un bâtiment inédit du
12e siècle
Éric De Waele, Olivier Collette et Didier Willems

Temps modernes
24 Nivelles/Nivelles : rue de Mons, analyse limitée autour et dans un immeuble du 16e siècle
en transformation
Didier Willems
26 Villers-la-Ville/Villers-la-Ville : des arcades malmenées à la pharmacie de l'abbaye
Didier Willems, Marie-Laure Van Hove et Aude Van Driessche

Époque contemporaine
29 Braine-l'Alleud/Braine-l'Alleud : fouilles sur le domaine d'Hougoumont dans le cadre du
projet Waterloo Uncovered
Dominique Bosquet, Tony Pollard, Philippe De Smedt, Mark Evans, Stuart Eve, Charles Foinette,
Marc Van Meirvenne et Alasdair White
32 Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : fouille de contrôle sur le site protohistorique de Gastuche
Dominique Bosquet et Véronique Moulaert
33 Rixensart/Rixensart : étude préalable à la restauration du portique de l'aile nord du
château
Patrice Gautier, Élisabeth Bruyns et Antoine Baudry

Toutes périodes
37 Beauvechain/L'Écluse : une opération archéologique à la rue de la Cabourse
Frédéric Heller et Aude Van Driessche
40 Beauvechain/Nodebais : découvertes au presbytère pendant sa « cure »
Didier Willems
42 Chaumont-Gistoux/Dion-Valmont : évaluation et suivis sur le site de la villa de Brocsous
à Dion-le-Mont
Frédéric Heller
43 Jodoigne/Jodoigne : voile temporairement levé sur une section des remparts de la ville
Didier Willems
46 La Hulpe/La Hulpe : ce que le sous-sol de l'église Saint-Nicolas a dévoilé
Didier Willems et Geneviève Yernaux
50 Nivelles/Nivelles : le site de l'hôtel Rifflart sauvé de la démolition ?
Didier Willems
53 Nivelles/Nivelles : vestiges dévoilés par les travaux d'extension de l'Institut du Sacré-Cœur
Didier Willems et Christophe Leduc
57 Orp-Jauche/Énines : suivi négatif sur le site néolithique du « Chêne au Raux »
Dominique Bosquet
58 Orp-Jauche/Jauche : découverte de deux marnières
Olivier Vrielynck, Luc Funcken et Frédéric Van Dijck
316

Chronique de l'Archéologie wallonne

59 Ottignies-Louvain-la-Neuve/Ottignies : évaluation négative rue de la Baraque à Louvain-


la-Neuve
Dominique Bosquet
59 Rebecq/Bierghes : suivi négatif lors de la création d'une pelouse de dispersion dans le
cimetière paroissial
Didier Willems
60 Tubize/Tubize : occupations protohistorique, romaine et médiévales à Stéhou
Dominique Bosquet, Olivia De Staercke, Véronique Moulaert et Marie-Laure Van Hove
63 Waterloo/Waterloo : suivi archéologique sur le site de l'ancien contrôle technique
Dominique Bosquet et Marie-Laure Van Hove

Hainaut
67 Éditorial
Martine Soumoy

Préhistoire
71 Antoing/Maubray : matériel lithique au lieu-dit « Polissart »
Marianne Delcourt-Vlaeminck et Christian Fourmeaux
72 Brunehaut/Hollain : récoltes 2015
Marianne Delcourt-Vlaeminck, Christian Fourmeaux et Philippe Soleil
73 Brunehaut/Laplaigne : preuve de l'exportation de grandes lames pressigniennes
Marianne Delcourt-Vlaeminck, Christian Fourmeaux et Philippe Soleil
73 Brunehaut/Lesdain : objet poli en silex
Marianne Delcourt-Vlaeminck et Philippe Soleil
74 Fleurus/Saint-Amand : un site préhistorique, synthèse et dernières prospections
Daniel Desterbecq
76 Mons/Spiennes : conservation préventive des minières néolithiques en 2014
Nancy Verstraelen
79 Mons/Spiennes : fouille 2015 du puits d'extraction de silex ST 6 à « Petit-Spiennes »
Hélène Collet, Philippe Lavachery, Stéphane Pirson, Michel Toussaint, Lyse Unger et Michel Woodbury
81 Quévy/Genly : découverte d'un fragment de hache polie en silex de Spiennes
Philippe Lavachery, Hélène Collet, Amandyne Rosart et Lodewijk De Lens

Protohistoire
83 Mons/Saint-Symphorien : signalement d'une pointe de flèche (Bronze final)
Alain Guillaume

Époque romaine
84 Ath/Ghislenghien : datation archéomagnétique de deux fours à chaux
Souad Ech-Chakrouni, Jozef Hus et Véronique Danese
86 Ath/Ghislenghien : la problématique de la conservation-restauration du matériel archéo-
logique métallique. Le cas des alliages de cuivre de deux tombes augusto-tibériennes
Muriel Van Buylaere
89 Enghien/Petit-Enghien : une structure à combustion du type « charbonnière »
Nicolas Authom
91 Fleurus/Brye et Villers-la-Ville/Marbais : analyse stratigraphique de la chaussée romaine
Bavay-Cologne
Nicolas Authom et Olivier Collette
94 Hensies/Hensies : habitat du Haut-Empire à « La Neuville », estampille sur sigillée non
répertoriée et petit matériel divers
Jean Dufrasnes et Éric Leblois
96 Hensies/Montrœul-sur-Haine : vestiges d'une construction d'époque gallo-romaine au
« Coron Franoé »
Jean Dufrasnes et Éric Leblois
317

Table des matières

98 Hensies/Montrœul-sur-Haine : vestiges gallo-romains du Haut- et du Bas-Empire


recueillis au lieu-dit « La Préelle »
Jean Dufrasnes et Éric Leblois
101 Honnelles/Roisin : fragments de bronze figurant un putto et applique à buste de Silène
Jean Dufrasnes
103 Pont-à-Celles/Luttre : campagne de fouilles 2015 de Pro Geminiaco au vicus des Bons-
Villers à Liberchies
Jean-Claude Demanet, Fabienne Vilvorder, Xavier Sollas, Éric Lurquin, Pascal Vergauts et Willy Bayot

Époque contemporaine
104 Binche/Buvrinnes : fouille de la zone de chute d'un Messerschmitt Bf 110 G
Nicolas Clinaz
105 Morlanwelz/Morlanwelz-Mariemont : découverte d'un abri anti-aérien
Marie Demelenne et Pierre-Philippe Sartieaux
107 Morlanwelz/Morlanwelz-Mariemont : étude préalable à la restauration du mur de clôture
du domaine de Mariemont
Marie Demelenne, Gilles Docquier et Corinne Gysbergh
110 Soignies/Soignies : le Centre des Métiers de la Pierre. Sous le béton, les pierres de la grande
scierie
Nicolas Authom

Toutes périodes
113 Aiseau-Presles/Presles : le site archéologique de « La Taille Marie », campagne de fouille 2015
Nicolas Paridaens
117 Ath/Ath : fouilles préventives sur le site de l'ancienne sucrerie
Isabelle Deramaix, Adrien Dupont et Pierre-Philippe Sartieaux
119 Ath/Ath : fouilles préventives sur le site des Haleurs
Isabelle Deramaix, Dolores Ingels et Olivier Collette
120 Belœil/Quevaucamps : pierre à aiguiser médiévale ?
Jean Dufrasnes, Éric Goemaere, Serge Parent et Aurélie Thiébaux
122 Courcelles/Gouy-lez-Piéton : sondage au pied de la tour de l'église Saint-Martin
Nicolas Authom
123 Mons/Mons : rue de Nimy, suivis archéologiques au « site Losseau »
Cécile Ansieau
125 Mouscron/Mouscron : château des Comtes, suivi du réaménagement de la basse-cour
Marceline Denis
125 Quévy/Quévy-le-Grand : fouille d'un établissement rural
Véronique Danese, Olivia De Staercke et Benjamin Van Nieuwenhove
130 Saint-Ghislain/Baudour : sondages préalables à l'extension du temple protestant de
Douvrain
Hélène Collet, Philippe Lavachery, Jean-Philippe Collin, Anne Hauzeur, Michel Woodbury, Lyse Unger,
Carolina Cabrero et Amandyne Rosart
133 Tournai/Tournai : sondages archéologiques à l'arrière de l'ancien garage Delune, place
Reine Astrid
Isabelle Deramaix

Liège
139 Éditorial
Jean-Marc Léotard

Préhistoire
141 Ferrières/Vieuxville : datation radiocarbone d'une calvaria humaine au Trou du Renard/
Grotte Geneviève
Michel Toussaint, Olivier Vrielynck et Benoît Wéry
318

Chronique de l'Archéologie wallonne

144 Liège/Rocourt : étude stratigraphique de la coupe de lœss du site classé de la sablière Gritten
Stéphane Pirson, Paul Spagna, Dominique Bosquet, Simon Delvoie, Kévin Di Modica, Paul Haesaerts,
Étienne Juvigné et Pierre van der Sloot
148 Modave/Modave : le Moustérien récent du Trou Al'Wesse, l'unité 17
Rebecca Miller, Pierre Noiret, John Stewart, Keith Wilkinson et Yann Waersegers
152 Pepinster/Soiron : haches polies « Aux Trois Journaux »
Francis Polrot
153 Theux/Theux : hache polie à « Turon », chemin du Chivrou
Francis Polrot et Benoît Pelzer

Protohistoire
154 Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau  : conservation de dépôts funéraires provenant d'un
champ d'urnes
Nancy Verstraelen

Époque romaine
155 Amay/Amay : découverte d'un sabot de pieu provenant du pont romain
Léon Dardenne, Gianni Gava, Raymond Polis et Jacques Witvrouw
155 Herstal/Milmort : fouille d'un établissement le long de la chaussée Brunehaut
Sophie de Bernardy de Sigoyer, Catherine Coquelet, Claire Goffioul et Jean-Philippe Marchal
161 Liège/Jupille-sur-Meuse : sondages archéologiques dans le parc de l'Institut Notre-Dame
Catherine Coquelet
164 Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : occupation romaine rue de Vinalmont
Gianni Gava

Moyen Âge
165 Modave/Vierset-Barse : la motte castrale de Vieux-Barse, un premier bilan de la campagne
de fouilles 2015
Yorick Lucon
166 Soumagne/Ayeneux : vestiges en bois rue Pont Al'Plantche
Claire Goffioul, Olivier Collette, Sarah Crémer et Pascale Fraiture
168 Stavelot/Stavelot : nouvelle chronologie des bâtiments monastiques du Haut Moyen Âge et
découverte d'un sarcophage mérovingien
Brigitte Neuray
172 Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : étude anthropologique des individus découverts
sur le site « A Lohincou »
Aubrée Godefroid et Denis Henrard

Temps modernes
176 Clavier/Terwagne : découverte d'un four à chaux artisanal
Gianni Gava, Robert Désert, André Jaminon, Jean-Claude Marchal, Raymond Polis, Michel Eubelen,
André Martin, Noureddine Assojaa et Jacques Witvrouw
178 Juprelle/Juprelle : installations de chauffe à la ferme de l'Abbaye
Catherine Coquelet
180 Stoumont/La Gleize : étude archéologique de la ferme « Li vi gbomont » à Exbomont
Nancy Verstraelen
184 Verviers/Verviers : la maison Lambrette
Catherine Bauwens

Toutes périodes
186 Anthisnes/Anthisnes : alimentation d'origine animale et coq de combat, l'apport des restes
fauniques du Moyen Âge et de l'époque moderne
Quentin Goffette, Nancy Verstraelen et Wim Wouters
319

Table des matières

187 Engis/Hermalle-sous-Huy : campagne de fouilles 2015 sur le site du « Thier d'Olne »


Jacques Witvrouw, Gianni Gava, Robert Désert, Richard Bit, André Jaminon et Jean-Claude Marchal
188 Esneux/Esneux : découvertes fortuites d'inhumations à Fontin, chemin de La Haze
Denis Henrard, Sophie de Bernardy de Sigoyer, Michel Eubelen et André Martin
189 Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne : découverte de deux carrières souterraines à Hollogne-
aux-Pierres
Olivier Vrielynck, Serge Delaby, Luc Funcken et Frédéric Van Dijck
192 Grâce-Hollogne/Grâce-Hollogne : le site de l'« ancien château » de Hollogne-aux-Pierres
Philippe Gémis
192 Grâce-Hollogne/Mons-lez-Liège  : intervention dans la zone aéroportuaire de Bierset,
campagne 2015
Claire Goffioul, Jean-Philippe Marchal, Olivier Collette et Sophie de Bernardy de Sigoyer
195 Herstal/Herstal  : sépultures mérovingiennes, tombe de cervidé et traces d'occupation
d'époque romaine au lieu-dit « Sous-la-Chapelle »
Denis Henrard, Patricia Gillet et Fabienne Pigière
200 Huy/Huy : la Maison près la Tour, un îlot de maisons médiévales sous un même toit
Virginie Boulez
206 Huy/Huy : rue Sainte-Catherine, le captage de la fontaine le bassinia et sa conduite
d'adduction installés dans un quartier médiéval extra-muros
Catherine Péters
210 Huy/Huy  : suivi des travaux de rénovation du «  Quadrilatère  », rue Delloye-Mathieu.
Traces d'habitations de la fin du Moyen Âge et des Temps modernes
Catherine Péters
211 Liège/Liège : conservation préventive et curative des vestiges de l'Archéoforum
Nancy Verstraelen
212 Liège/Liège  : conservation préventive et curative des vestiges des anciens bâtiments
claustraux de l'abbaye Saint-Jacques en 2014 et 2015
Nancy Verstraelen
215 Liège/Liège : suivi archéologique dans le cloître de la cathédrale Saint-Paul
Caroline Bolle
218 Malmedy/Malmedy : suivi des travaux de la place du Châtelet et de ses abords
Nancy Verstraelen
219 Modave/Vierset-Barse  : campagne de fouille 2015 sur le site du «  Rocher du Vieux-
Château » à Pont-de-Bonne
Emmanuel Delye, Yorick Lucon, Françoise Bolland, Amandine Schaus et Robert Désert
220 Olne/Olne : vestiges divers, chemin du Pré Lilas
Claire Goffioul
221 Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau : observations archéologiques et géologiques effectuées
rues Préixhe et Delwaide, complétant les découvertes faites au Trilogiport
Catherine Coquelet, Pierre van der Sloot, Stéphane Pirson et Paul Spagna
223 Welkenraedt/Welkenraedt : nouvelle évaluation dans la ZAE East Belgium Park
Heike Fock

Luxembourg
225 Éditorial
Denis Henrotay

Protohistoire
227 Gouvy/Bovigny : fouille de la nécropole celtique à tombelles de « Fosse del Haye »
à Halconreux
Christelle Draily, Sylvain Fetter et Nicolas Meunier
229 Gouvy/Bovigny  : suite et fin de la fouille de la nécropole celtique à tombelles
d'« Hastape » à Courtil
Christelle Draily
320

Chronique de l'Archéologie wallonne

231 Léglise/Léglise : sondages d'évaluation


Christelle Draily, Nicolas Meunier et Sylvie Leduc
231 Neufchâteau/Hamipré : tombelles du Second Âge du Fer sur le site « Au-Dessus du Fond
de Ligne » à Namoussart
Christelle Draily

Époque romaine
233 Arlon/Arlon : suivi d'un terrassement à l'emplacement de l'ancien cimetière gallo-romain
du Hochgericht
Denis Henrotay
234 Habay/Habay-la-Vieille : la campagne de fouilles 2015 à Mageroy
Jean-François Baltus et Benoît Halbardier
238 Habay/Habay-la-Vieille : les premières prospections géoradar à Mageroy
Sébastien Lambot, François Casterman et Benoît Halbardier

Temps modernes
241 Marche-en-Famenne/Marche-en-Famenne : découverte fortuite d'une brasserie dans le
quartier de l'ancien couvent des Carmes
Nicolas Meunier

Toutes périodes
244 Hotton/Hotton : sondages au Trou du Trio
Christelle Draily, Michel Toussaint, Grégory Abrams, Daniel Vanden Bosch, André Vanden Bosch,
Kevin Brams et Emmanuel François
245 Rouvroy/Dampicourt : fouilles et restauration du château de Montquintin. Campagne 2015
Didier Culot, Jérôme Parmentier et Vivien Thiry

Namur
Éditorial
251
Christian Frébutte

Préhistoire
255 Andenne/Sclayn : DigiArt, un projet européen pour la grotte Scladina
Dominique Bonjean, Grégory Abrams et Kévin Di Modica

Époque romaine
257 Florennes/Morialmé : découverte d'une tombe à incinération gallo-romaine
Élise Delaunois et Pierre-Hugues Tilmant
257 Havelange/Flostoy : la villa gallo-romaine de « Lizée »
Sophie Lefert
259 Namur/Namur : étude archéozoologique du site de la rue des Bouchers
Fabienne Pigière et Michel Siebrand
261 Viroinval/Nismes : la nécropole tardo-romaine du « Tienne del Baticulle »
Laureline Cattelain, Pierre Cattelain et Olivier Vrielynck

Moyen Âge
264 Andenne/Andenne : mise au jour d'un four à Andenelle
Carole Hardy, Sophie Challe, Sylvie de Longueville et Élise Delaunois

Temps modernes
265 Andenne/Landenne : sondages à proximité de l'ancien château
Carole Hardy, Élise Delaunois, Souad Ech-Chakrouni et Jozef Hus
321

Table des matières

267 Namur/Namur : découverte d'une cheminée du 16e  siècle à l'académie des Beaux-Arts,
ancien Mont-de-Piété
Sophie Jurdant et Michel Siebrand
268 Yvoir/Godinne : un logis antérieur à la Vieille Ferme
Marie Verbeek, Christophe Maggi et Pascale Fraiture
271 Yvoir/Yvoir : suivi du chantier de restauration du corps de logis de la ferme de Champalle
Marie Verbeek, Sarah Crémer, Pascale Fraiture et Axelle Oger

Époque contemporaine
275 Namur/Namur : citadelle, interventions archéologiques 2015 dans le fossé de Terra Nova
Pierre-Hugues Tilmant

Toutes périodes
277 Andenne/Andenne : découverte de fosses rue Wilgot à Andenelle
Carole Hardy
278 Andenne/Sclayn : découverte fortuite d'une maçonnerie dans l'ancien presbytère
Carole Hardy
278 Dinant/Dinant : un segment de rempart observé place Albert Ier
Marie Verbeek et Carole Hardy
279 Gembloux/Bossière  : occupation laténienne, gallo-romaine et mérovingienne à la rue
d'Hermoye
Michel Siebrand et Didier Guiot
280 Gembloux/Gembloux : nouvelles données concernant l'église Saint-Sauveur et le beffroi
Michel Siebrand et Jérôme Parmentier
282 Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre : les vestiges médiévaux et modernes de l'église Sainte-Aldegonde
Élise Delaunois et Carole Hardy
285 Jemeppe-sur-Sambre/Balâtre  : résultats de l'analyse anthropologique des squelettes de
l'église Sainte-Aldegonde
Hélène Déom et Élise Delaunois
287 Jemeppe-sur-Sambre/Moustier-sur-Sambre : suivi de chantier rue d'Ordin
Élise Delaunois et Nathalie Mees
287 Namur/Namur : citadelle, esplanade de Terra Nova. Mise au jour de plusieurs constructions
lors du suivi de chantier
Pierre-Hugues Tilmant
291 Namur/Namur : citadelle, interventions archéologiques 2014 à la porte de Médiane
Pierre-Hugues Tilmant
293 Namur/Namur : citadelle, restauration d'une muraille à Terra Nova. Mise au jour d'une
maçonnerie antérieure au 19e siècle ?
Pierre-Hugues Tilmant
294 Namur/Namur : citadelle, suivi archéologique à la limite nord du fossé du château comtal
Pierre-Hugues Tilmant
295 Namur/Namur : citadelle, suivi de chantier et fouille préventive à la batterie Sambre
Pierre-Hugues Tilmant
298 Namur/Namur : la Porte en Vis et la Deuxième Enceinte urbaine révélées par un sauvetage
archéologique à la rue des Brasseurs, nos 57-59
Raphaël Vanmechelen
302 Ohey/Évelette : suivi de chantier rue Abbé Matagne
Carole Hardy
302 Ohey/Haillot : suivi de chantier rue Stocus
Carole Hardy
302 Rochefort/Han-sur-Lesse : fouilles subaquatiques au Trou de Han, campagne de 2015
Christophe Delaere, Cécile Ansieau et Marc Jasinski
322

Chronique de l'Archéologie wallonne

305 Viroinval/Olloy-sur-Viroin et Dourbes : la fortification protohistorique du « Plateau des


Cinques », campagne de fouilles 2015
Jean-Luc Pleuger, Fanny Martin et Eugène Warmenbol

309 Index des communes et des localités

311 Index des auteurs


Prix : 12 €
ISBN 978-2-930711-31-7 La Chronique de l’Archéologie wallonne est une revue du Département du patrimoine
de la DGO4 du Service public de Wallonie, dont la coordination rédactionelle est
assurée par la Direction de l’archéologie. Les travaux archéologiques que mènent
en Wallonie les différents partenaires sont ainsi publiés annuellement.
Un index des volumes parus se trouve sur le site internet
http://www.wallonie.be/patrimoine/caw
Le volume 24 présente les activités archéologiques menées en Wallonie en 2015.

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