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Publications de l'École française

de Rome

Nom et identité dans le monde musulman


Jacqueline Sublet

Résumé
Le nom propre arabe médiéval, par sa complexité et sa richesse, occupe une place d'exception dans le monde méditerranéen.
Au IXe siècle de l'ère chrétienne, le système anthroponymique arabe est déjà élaboré. Historiens et biographes consacrent à la
collecte des noms et à l'analyse de leurs composantes une littérature spécifique qui, au XIIIe siècle, connaît un essor
considérable.
Avec ses éléments de natures diverses, hérités ou acquis, le nom des transmetteurs du savoir dont l'identité est enregistrée
dans les sources s'accroît jusqu'à la mort et apparaît sous la plume du biographe comme un nom posthume et une histoire de
vie, étroitement lié au dâr al-Islâm, les «terres d'Islam» dont il reflète l'étendue et l'évolution. Il fait fonction de preuve dans la
transmission des traditions depuis les origines de l'Islam. Mentionné en marge des manuscrits, il atteste de la lecture correcte
de textes écrits. Le nom du prince a une structure différente : tourné vers la naissance, fixé lors de l'accès au pouvoir, il n'a pas
cette vocation à recenser un univers.
À l'intérieur des noms, certains éléments ont pour rôle d'occulter les autres et de les préserver : ce «jeu des identités»
représente l'un des aspects de l'histoire sociale du monde musulman médiéval.

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Sublet Jacqueline. Nom et identité dans le monde musulman. In: L’anthroponymie document de l’histoire sociale des mondes
méditerranéens médiévaux. Actes du colloque international organisé par l'École française de Rome avec le concours du GDR
955 du C.N.R.S. «Genèse médiévale de l'anthroponymie moderne» (Rome, 6-8 octobre 1994) Rome : École Française de
Rome, 1996. pp. 97-108. (Publications de l'École française de Rome, 226);

http://www.persee.fr/doc/efr_0223-5099_1996_act_226_1_5079

Document généré le 17/06/2016


JACQUELINE SUBLET

NOM ET IDENTITÉ DANS LE MONDE MUSULMAN

Deux anecdotes illustrent la façon de nommer dans le Proche-


Orient arabe médiéval : le premier exemple est emprunté à
l'historien et biographe Khalîl ibn Aybak al-Safadî1, auteur de plusieurs
dictionnaires biographiques : «Un pèlerin dans la foule à la Mekke
entend appeler : Abu 1-Faraj. Il se dit : je me nomme Abu 1-Faraj,
mais c'est un nom (kunya)2 répandu, et il ne répond pas. Second
appel : Abu 1-Faraj al-Mu'âfâ fils de (ibn) Zakariyyâ. Il se dit : c'est
bien mon nom mais le doute subsiste. On insiste : Abu 1-Faraj al-
Mu'âfâ ibn Zakariyyâ de Nahrawân (an-Nahrawânî). Cette fois-ci, il
se présente. On lui dit : mais es-tu bien Nahrawânî, (originaire de/en
relation avec le lieu appelé Nahrawân) de Nahrawân ash-sharq (à
l'est)? Ah non, je suis de Nahrawân al-gharb (à l'ouest). Ce n'est donc
pas lui qu'on cherche. Il s'étonne, cependant, de cette homonymie
qui porte sur quatre éléments de son nom. L'autre exemple est la
relation d'un cauchemar onomastique : «Le calife abbasside al-
Mansûr3 rêve qu'il est à la Mekke, devant la porte de la Kaaba
ouverte. Un homme en sort et appelle : 'Abd Allah fils de {ibn)
Muhammad. Or al-Mansûr et son frère porte le même nom (ism) :
Abd Allah et ils ont le même père qui se nomme Muhammad, ils se
lèvent tous les deux. Mais l'homme ajoute : Ibn al-Hârithiyya. Al-
Hârithiyya est le nom de la mère d'al-Mansûr, son frère est d'une
autre mère, c'est bien de lui qu'il s'agit. Il tente en vain de saisir un
drapeau. L'homme recommence à appeler : Abd Allah, un oncle de
ce nom se présente mais cette fois-ci al-Mansûr est le plus rapide, il
saisit le drapeau qui lui assure le pouvoir, à lui et à sa descendance».

1 Théoricien de l'histoire et biographe mort à Damas en 764/1362 auteur,


notamment, des dictionnaires biographiques tels al-Wâfî bil-wafayât ou A 'yân al- 'asr
ainsi que d'un répertoire des aveugles célèbres (Nakt al-himyân); sur cette
anecdote, voir Al-Wâfî, éd. H. Ritter, Wiesbaden, 1962, I, p. 35 et F. Malti-Douglas,
The interrelationship of onomastic elements : ism, dîn-names and kunya in the
ninth Century AH, dans Cahiers d'onomastique arabe, 1981, Paris, 1982, p. 27-55.
2 Dans le texte : une kunya, voir la définition de cet élément plus loin, et
J. Sublet, Le voile du nom. Essai sur le nom propre arabe, Paris, 1991, p. 39-70.
3 BayhaqI, al-Mahâsin wal-masâwî, éd. F. Schwally, Giessen, 1900-1902,
p. 345, texte repris par G. von Grunebaum et R. Caillois, Le rêve dans les
sociétés humaines.
98 JACQUELINE SUBLET

Le nom propre arabe médiéval, par sa complexité et sa richesse,


occupe une place d'exception dans le monde méditerranéen. Au IXe
siècle de l'ère chrétienne, le système anthroponymique arabe est
déjà élaboré. Historiens et biographes consacrent à la collecte des
noms et à l'analyse de chacun des éléments qui les composent une
littérature spécifique qui, au XIIIe siècle, sous domination mame-
louke, connaît un essor considérable.
Dans les premiers temps de l'Islam, c'est la science des
généalogies qui était développée. Elle avait concerné tout d'abord les
ancêtres des grandes tribus d'Arabie que célébraient les poètes, puis
l'identité des descendants du Prophète Muhammad et de sa famille.
Cette science des généalogies se trouva aussi liée à une notion
d'intérêt4 spéculatif puisque ceux qui pouvaient apporter la preuve
de leur appartenance à la lignée du Prophète étaient susceptibles de
recevoir une pension. De la même façon, on recensait les membres
de certains groupes sociaux pour les recruter dans les armées et en
faire des combattants rétribués. Plusieurs études sont consacrées à
la façon dont les princes se sont appuyés sur les descendants du
Prophète (achrâf) pour gouverner et, à différents moments de l'histoire,
on éprouva les conséquences de cette démarche car le fait d'être
exclu d'une liste généalogique menait certains à former une armée
de combattants rebelles avec les conséquences politiques que cela
entraîna5. Le métier de généalogiste se développa sous le califat
d'Abû Bakr, plus encore sous le règne de son successeur Umar. La
fonction du généalogiste diffère de celle du biographe, dont il sera
principalement question ici, car le biographe établit l'identité
d'individus qui ont non seulement une généalogie mais un ensemble de
divers noms, éléments hérités ou acquis au cours de leur vie.
Les personnages, qu'ils soient lettrés, hommes de science ou
marchands, dont les noms figurent dans l'abondante littérature
biographique arabe médiévale, ont en commun d'avoir contribué à la
transmission du savoir et d'en être les garants. Le nom de ces
transmetteurs est un récit de vie : il contient différents éléments hérités et
acquis, ainsi que la mention de leur itinéraire spirituel et
géographique; il est étroitement lié au dâr al-islâm, la terre d'Islam dont il
reflète l'étendue et l'évolution. Ce nom s'accroît jusqu'à la mort du
personnage, quand le biographe le met par écrit et en devient ainsi

4 Bosworth, The book of curious and entertaining information (The lata' if


alma ârif of Tha alibi), Edimbourg, 1968, p. 22-23; Dagorn, La geste d'Ismaël
d'après l'onomastique et la tradition arabes, Genève-Paris, 1981, p. 33-105.
5 J. Aubin, La guerre au Kirman en l'an Mil, dans Studia Ironica, VIII/2, Paris,
1979, p. 213-221; P. Crone, Slaves on horses. The evolution of the islamic polity,
Cambridge, 1980, p. 30 et suiv.; J. Sublet, op. cit., p. 21-23.
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l'auteur. À l'intérieur des noms de chacun, certains éléments ont


pour rôle d'occulter les autres et de les préserver : ce «jeu des
identités» représente l'un des aspects de l'histoire sociale du monde
musulman médiéval. Les textes comme les noms de leurs
transmetteurs furent véhiculés à la fois par voie orale et écrite, deux modes
de transmission étroitement liés, où la notion de rythme joue un rôle
particulièrement important.
On considérera à part le nom des princes qui figurent le plus
souvent aussi dans les sources biographiques, dans la mesure où il a
une structure et un rôle différents. Tourné vers la naissance, fixé dès
l'accession au pouvoir, on verra que le nom des princes n'a pas,
comme celui des lettrés, vocation à recenser un univers.
Deux arguments ont concouru à encourager la mise par écrit
des informations biographiques. D'une part, les Musulmans ont le
devoir de ne rien laisser perdre de ce qui s'est passé dans les tout
débuts de l'islam, de transmettre les traditions venues du Prophète
et des Compagnons. Ces traditions ont une importance toute
particulière car elles servent de base à l'élaboration des principes du droit
et de l'ensemble des lois régissant la société musulmane. D'autre
part, le fait qu'en arabe on n'écrit généralement pas les voyelles rend
la récitation orale et la lecture plus fiables que l'écriture quand il
s'agit de garantir l'authenticité des traditions venues des origines de
l'Islam. La transmission orale s'applique également aux textes
profanes qui étaient lus devant témoins, récités, entendus et transmis.
La transmission des traditions et des textes en général6 se fait
selon diverses modalités codifiées - on en compte huit - entre
autres : audition (le maître est présent et récite ou lit, le disciple
écoute et retient par cœur), lecture ou récitation (c'est le maître qui
écoute le disciple ou un tiers lire ou réciter, et il compare avec ce
qu'il connaît par cœur ou avec le texte qu'il a sous les yeux), remise
en mains propres d'un texte écrit (le maître donne au disciple un
texte original ou dont la copie a été vérifiée par lui, le disciple le lit
devant lui, ou bien le disciple remet un texte au maître qui le lit et le
disciple écoute), licence de transmettre (licence qu'un transmetteur
reconnu accorde à plusieurs personnes assemblées devant lesquelles
il lit un texte. Si toutefois le transmetteur a confiance en un disciple,
il peut lui donner licence de transmettre l'ensemble des textes qu'il a
reçus sans toutefois les avoir tous lus devant le disciple). Pour les
traditions venues du Prophète et de ses Compagnons, on a une suc-

6 Parmi les ouvrages récents sur la transmission, voir J. Berkey, The


Transmission of Knowledge in Medieval Cairo. A Social History of Islamic Education,
Princeton, 1992, 237 p. ; H. Elboudrari (éd.), Modes de transmission de la culture
religieuse en Islam, I.F.A.O. (Institut français d'archéologie orientale), Le Caire,
1993, 286 p.
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cession - en principe ininterrompue - de noms qui constituent les


chaînes de transmetteurs (isnâd), qui sont indissociables du texte
qu'elles authentifient : le texte ainsi que les chaînes sont transmis en
même temps. Il s'agit d'une suite de noms reliés par des termes qui
disent la nature de la transmission : par exemple «Un tel a reçu cette
tradition d'Un tel qui la tenait d'Un tel» (rawâ fulân 'an fulân 'an
fulân) ou bien «Un tel m'a transmis cette tradition qu'il tenait de tel
transmetteur» (haddathanî fulân 'an fulân).
Les œuvres profanes manuscrites sont assorties d'une chaîne de
garants (riwâya) que l'on peut traduire par «recension». Le titre des
ouvrages est accompagné de la mention «d'après la recension de Tel
qui la tenait d'Un tel», écrite sur la page de titre des manuscrits et
parfois reprise quand l'ouvrage est imprimé. Dans les manuscrits,
les pages de titre, les pages blanches en fin d'ouvrage, ou encore les
marges7 offrent un espace où se trouvent ce qu'on appelle «certificat
d'audition» et «licence de transmettre» (samâ' et ijâza), dont le texte
est rédigé suivant des schémas établis, par exemple : «j'ai entendu ce
texte lu par Un tel qui l'avait lui-même reçu de son maître qui le
tenait de l'auteur de l'ouvrage».
L'importance accordée à la transmission explique le fait que
l'identité des transmetteurs, personnages essentiels dans la vie
intellectuelle médiévale, doit être clairement établie pour qu'ils soient
considérés comme fiables, dignes de foi, et en mesure d'authentifier
les textes qu'ils véhiculent. Les noms des transmetteurs sont écrits
en abrégé dans les chaînes et la fonction des répertoires de
biographies est de fournir les noms complets et l'identité des
transmetteurs.
Si les acteurs de la transmission sont relativement peu
nombreux dans les premiers temps de l'Islam - et le souvenir de leurs
actes et de leur conduite exemplaire n'en est que plus précieux - on
compte par milliers les lettrés qui font œuvre pie en s'inscrivant par
la suite dans le grand courant de la transmission du savoir. On peut
estimer à cent mille le nombre de ceux dont on a conservé l'identité
et qui ont vécu dans les dix premiers siècles de l'hégire. Les
répertoires biographiques sont classés alphabétiquement,
chronologiquement ou géographiquement, par noms de métiers, par appartenance
à une école de pensée, ou encore ils sont regroupés suivant
différents critères (particularité physique : recueil des noms des aveugles
célèbres, ou, entre autres critères, homonymie : on a par exemple un
recueil de «tous les poètes qui se sont appelés Muhammad»). Ces

7 J. Sublet, Les marges des manuscrits arabes, espace de la transmission


orale, dans Le livre au Moyen Age, Paris, 1988, p. 109-111.
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répertoires sont complétés par d'autres, tels les ouvrages de lecture


des noms avec leurs vocalisations possibles, les répertoires
d'homographes ou les dictionnaires toponymiques vocalises eux-aussi.
Il faut rappeler brièvement quels sont les éléments qui
composent un nom propre arabe médiéval, éléments hérités et
attribués à la naissance ou encore acquis au cours de la vie :
Hérités et attribués à la naissance :
- le ism, nom personnel reçu à la naissance et les noms
personnels des ancêtres mâles;
- la kunya composée avec Abu pour les hommes, Umm pour
les femmes peut être donnée à la naissance ou acquise; Abu et Umm
signifient «père et mère», et aussi : «possesseur de, qui a», ou de la
mentions d'une qualité : Abu 1-Fadâ'il (qui a des mérites) est une
sorte de surnom tandis que Umm al-Banîn, littéralement «mère de
nombreux fils» est un surnom propiciatoire donné à une fille à sa
naissance. On a dit que certaines kunya sont automatiquement
attribuées à un enfant en même temps que son nom personnel (ism)8;
- pour les hommes seulement : le laqab, sorte de surnom à
résonance religieuse, composé avec ad-dîn signifiant «la religion
musulmane». Pourquoi peuvent-ils être attribués dès la naissance?
ils «vont avec» le nom personnel {ism), ils en sont les échos sonores,
de sens ou d'allitération, ils peuvent aussi être hérités, du grand-père
en particulier, et attribués aussi en même temps que le ism)
- la ou les nisba (noms de relation avec terminaison f);
indiquant l'origine ethnique, tribale, géograhique du personnage;
- enfin certains surnoms de natures diverses, des noms de
métiers devenus surnoms, peuvent être hérités ou donnés dès la
naissance.
Acquis au cours de la vie :
- certaines kunya, par exemple celle que reçoit un père après
la naissance d'un enfant : Abu et Umm sont alors suivis du nom d'un
fils : Abu Muhammad, signifiera littéralement «père de
Muhammad», Umm Ismâ'îl : «mère d'Ismâ'îl». Dans cette même
catégories entre la kunya donnée à un esclave affranchi par son
maître qui se voit attribuer «la liberté, une kunya et de l'argent»;
- divers surnoms de formes diverses;
- des nisba (noms de relation) témoignent des séjours faits
par le personnage dans divers lieux (pays, régions, villes) mais à la
condition que ces lieux fassent partie du dâr al-islâm (on ne peut pas
en effet, on le verra plus longuement, adjoindre à son nom les noms
composés avec les lieux situés hors du territoire sous loi musul-

8 Sur ces noms voir J. Sublet, Le voile..., notamment p. 42-46.


102 JACQUELINE SUBLET

mane); d'autres nisba portant témoignage de la relation du


personnage avec une autre personne (un maître par exemple), avec un
événement ou un objet. Parmi ces noms de relation on compte ceux qui
indiquent l'option religieuse, l'appartenance à une école religieuse
de l'Islam orthodoxe (le madhhab), ou à une branche de l'Islam
hétérodoxe, (l'appartenance au chi'isme par exemple);
- enfin, noms du ou des métiers exercés.

L'attribution à un enfant dès sa naissance de trois éléments


(ism-laqab-kunya) qui peuvent être allitérants, mais ne le sont pas
toujours bien sûr, a aussi l'avantage de donner à l'individu, au
départ, une identité minimale, dans ce contexte du nom propre
médiéval, et de lui permettre ainsi d'être interpellé, on y reviendra,
par son laqab ou par sa kunya (puisqu'on préfère ces deux éléments
au ism reçu à la naissance, considéré comme vulnérable, ayant
comme dans plusieurs civilisations une portée magique). Kunya et
laqab ont pour fonction de protéger en quelque sorte l'individu, en
particulier le laqab composé avec ad-dîn par exemple : Nûr ad-dîn,
littéralement «Lumière de la Religion», dîn signifie «la religion
musulmane» un nom qui ne doit en principe pas subir d'outrage. Ou
la kunya dont le Prophète a pu dire «Hâtez-vous de donner une
kunya à vos enfants de peur qu'on ne leur inflige des surnoms
affreux». Dans certains cas, l'allitération, la «relation d'écho», est
particulièrement remarquable dans la mesure où trois éléments du
nom sont formés à partir de la même racine : Abd al-'Azîz Ίζζ
ad-dîn Abu 1-Ίζζ (racine zz), Sâlih Salâh ad-Dîn Abu s-Salâh
(racine slh), ou 'Alî Alâ' ad-Dîn Abu l-'Alâ' (racine ly).
Le nom propre de personne est susceptible d'être enregistré sous
trois formes selon les contextes : une forme complète, avec tous ses
éléments dans les répertoires biographiques, une forme abrégée
dans le courant des chaînes de transmission, dans les chroniques et
dans les textes littéraires notamment, enfin, la forme d'interpellation
dont on a le témoignage dans des textes de natures diverses :

1. Le nom avec tous ses éléments : les composantes du nom


s'ordonnent sous la plume du biographe, à la mort du personnage, et
le nom est à la fois récit de vie et identité posthume. Le biographe
est l'auteur du nom dont le personnage lui-même n'a pas eu
connaissance. Il s'agit d'une identité qu'on pourrait dire «relative» ou
encore «identité de miroir» car en effet, si le personnage meurt au
cours d'un voyage, prenons l'exemple d'un damascain qui va à
Bagdad, s'il meurt à Bagdad, on dira dans les sources «le Damascain
Untel est mort à Bagdad en telle année» tandis que s'il est retourné
dans sa ville d'origine le biographe incorporera sans les éléments de
son nom àl-Baghdâdî «le Bagdadien» qui témoignera du voyage qu'il
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a accompli. On peut dire que le nom est interrompu par la mort,


qu'il reflète le passé immédiat du personnage.
Dans les sources biographiques, ce nom posthume et complet
est accompagné d'une notice biographique dans laquelle sont
précisées les dates de mort, parfois de naissance, et surtout la mention
des voyages en quête de savoir, ce qui permet de justifier la
rencontre avec tel ou tel savant et l'authenticité de la transmission d'un
texte. Le nom lui-même est libellé selon un ordre séquentiel : ism,
nasab, kunya, laqab, nisba. Ceci représente non seulement une façon
pratique de classer, mais lu à haute voix ou récité, le nom s'insère
dans une structure qui facilite la mémorisation par son schéma
constant et par son rythme. Autre façon de donner un rythme de
lecture, la généalogie {nasab) est dédoublée : le ism est suivi du ism des
ancêtres : Ahmad b. Muhammad b. Ahmad b.Ismâîl, puis on a une
généalogie parallèle composée, elle, de la succession des laqab :
Charaf ad-dîn ibn Tâj ad-dîn ibn Sirâj ad-dîn ibn Nûr ad-dîn, ce qui
signifie qu'Ahmad Charaf ad-dîn est fils de Muhammad Tâj ad-dîn,
lui-même fils d'Ahmad Sirâj ad-Dîn fils d'Ismâ'îl Nûr ad-Dîn, deux
lectures ou récitations rythmées du nom.
Ism, kunya et laqab sont accompagnés, on l'a dit, d'un certain
nombre de nisba, adjectifs de relation avec terminaison î qui
représentent des éléments vivaces (en cours jusqu'à nos jours) du nom
propre (une nisba est souvent utilisée pour nommer, pour identifier,
beaucoup sont devenues des noms de famille). Certaines marquent
l'origine tribale ou géographique, ou sont construites à partir des
noms de lieux où le personnage a habité. Le fait d'avoir séjourné
dans une ville permet d'ajouter à son nom un élément
supplémentaire : celui qui séjourne à Damas s'appellera désormais «al-
Dimachqî» (le Damascain). Mais le voyageur au Moyen Âge ne
pourra pas incorporer à son nom des noms de relation formés à
partir des noms de lieux situés hors du dâr al-islâm. Si un savant par
exemple, (les savants sont par définition de grands voyageurs en
quête de savoir, l'une des traditions venues des premiers temps de
l'Islam (un hadîth) les plus connus, est : «utlub al- 'Um wa-law bil-
Sîn» (Va en quête de savoir, va même jusqu'en Chine). Si donc un
savant quitte le dâr al-islâm il n'ajoutera pas à son identité
d'éléments nouveaux. C'est pourquoi on peut dire que l'identité du
musulman au Moyen Âge incorpore l'étendue de l'aire de l'islam et
qu'en lisant, en récitant, en se remémorant les noms, les identités de
ceux qui sont enregistrés dans les répertoires, c'est la géographie du
dâr al-islâm que le lettré se remet en mémoire inlassablement,
comme il en énumérerait les titres de gloire. On peut rappeler ici le
cas d'Ibn Battouta qui avait franchi les frontières du dâr al-islâm et
qui en avait ressenti un grand malaise, allant jusqu'à
l'évanouissement.
104 JACQUELINE SUBLET

Si donc dans ce nom, les éléments qui donnent une identité


apparaissent ordonnés suivant un esprit de système
particulièrement remarquable (on pense aux immenses répertoires rédigés à la
période mamelouke) et un ordre relativement constant d'une source
à l'autre, il est des accidents qui viennent perturber cette belle
ordonnance. L'origine en est l'existence de lacunes qui sont
susceptibles d'entraver le déroulement de la lecture, de la récitation et de la
mise par écrit. Quelques exemples de ces accidents :
- le nom du père manque : on peut alors user d'une figure de
style qui consiste à déduire le nom du père de celui du fils : tel Sâlih
devient Sâlih ibn Abî Sâlih (Sâlih fils du père de Sâlih). Si, d'autre
part, le personnage est né de père inconnu, on peut (il s'agit de cas
rares et qui restent à étudier) donner à ce père un nom de monnaie :
Dìnàr ou Dirham, qui feront fonction de ism et qui seront repris par
les générations suivantes comme des ism «ordinaires».
- on ne connaît pas le ism du personnage ni sa kunya ou son
laqab qui pourraient servir de substitut : on a l'exemple d'un
personnage titulaire de notice qui est enregistré alphabétiquement à la
lettre fa sous le nom de : Fulân, qui signifie «un tel» (c'est : Fulân
ibn Hubayra).
Dans les deux cas, le rythme du nom est respecté, la lecture, la
récitation sont préservées, la mémoire peut jouer son rôle.

Autre cas particulier, le libellé du nom des femmes à propos


duquel on peut faire deux observations : d'une part, dans le contexte
de l'Islam médiéval, les femmes n'ont pas de laqab composé avec
ad-dîn et d'autre part leur généalogie est, sauf exceptions, patrili-
néaire.
L'absence de laqab composé avec ad-dîn est fait d'une femme, ou
d'une fillette : car on trouve dans les rares volumes consacrés aux
biographies des femmes une proportion relativement élevée de
biographies de filles : il s'agit des enfants des auteurs et de leurs amis,
morts jeunes et dont on veut garder mémoire, elles peuvent figurer
dans ces recueils de biographie de savants car elles ont
généralement assisté à des séances de transmission, soit dans le ventre de
leur mère soit en compagnie des adultes et ce mode de transmission
est considéré comme valable. Cette femme, cette fillette, aura
souvent plusieurs noms de substitution, un ou deux, qui servent à la
nommer sans qu'on ait à utiliser le ism reçu à la naissance. Ces
substituts sont des noms de bon augure : Mubâraka («bénie»), Sa'îda
(«heureuse, fortunée») par exemple, qui ont la même fonction que le
laqab composé avec ad-dîn : protéger le ism.
Cet éventail de noms est, première singularité par rapport aux
noms masculins, donné par le biographe à la suite du ism, en début
de généalogie, et il est suivi des noms des ancêtres mâles. La femme
NOM ET IDENTITÉ DANS LE MONDE MUSULMAN 105

sera dès lors identifiée par le biographe comme : Fâtima wa tud'â


(et on l'appelle) Mubâraka wa-tusammâ (et on la nomme) Sa'îda
hint (fille de) Muhammad b.Ahmad b.Yahyâ. Si la femme n'a pas de
kunya, la notice se poursuit au masculin, avec l'énumération des
noms de relation : al-Husayn? al-Tabarî al-Makki. Mais si la femme
a une kunya, par exemple : Umm al-Banîn, la mention des nisba ne
se fait pas au masculin mais au féminin : Umm al-Banîn al-Husay-
niyya at-Tabarryya al-Makkiyya. Une remarque qui a son importance
car l'absence d'un schéma fixe, d'un rythme reconnu, pourrait, s'il
en était besoin, donner une preuve de plus du fait que les noms des
femmes étaient rarement mis par écrit, et enregistrés dans les
mémoires.
2. Le nom sous sa forme abrégée : on verra tout d'abord les
noms des savants et des personnages susceptibles d'être identifiés
dans les sources. On considérera à part les noms des princes. Le
nom du savant apparaît, dans les sources, soit dans une chaîne de
transmission soit dans le courant d'un texte, dans une chronique par
exemple. Dans une chaîne de transmission, on l'a dit, les termes qui
servent à caractériser le mode de transmission (rawâ, haddatha,
qâla, etc.) lient l'énoncé des noms abrégés et ceux-ci sont aisément
repérables. Dans un texte littéraire ou une chronique la langue arabe
ignorant l'usage de la majuscule qui, dans d'autres langues, permet
de reconnaître aisément un nom propre, et d'autre part le lecteur
étant aussi un auditeur puisqu'il a affaire à la transmission orale,
devra être capable de repérer le nom propre à l'oreille. Ce nom
propre pourra se signaler au lecteur et à l'auditeur de plusieurs
façon : d'une part la kunya vient souvent en premier dans le libellé
ou l'énoncé du nom, avec le mot Abu qui «casse» la phrase, ou bien
avec la présence d'un glacis d'adjectifs (laudatifs voire dépréciatifs)
précédent la kunya ou les autres éléments. Écho et allitération qui
auront aussi pour fonction d'alerter sur la présence d'un nom
propre, puisqu'on n'a pas recours à la majuscule, de la même façon
que le rythme d'un texte donne à connaître qu'il est en prose rimée
(en sa/') : on le lit alors différemment, avec une attention en éveil.
On reviendra sur ce phénomène d'allitération.
3. La forme de l'interpellation : on a dit que la magie contenue
dans le nom, plus spécialement quand ce nom est prononcé à haute
voix a conduit, à la période classique, à protéger le ism. Il est
cependant des ism qui suffisent à identifier : les démons par exemple.
Leurs noms ont une double portée : ils sont surtout inhabituels par
leur sonorité (je pense aux deux démons presqu'homonymes Sîghûb
(avec la lettre sîn) et Sîghûb (avec la lettre emphatique sâd) parfois
par le nombre de leur syllabes et l'incongruité de leur vocalisation. Il
est recommandé de répéter ces noms, tant pour leur étrange
sonorité que pour la portée de la valeur numérique de leurs lettres qui
106 JACQUELINE SUBLET

peut porter chance ou jeter un sort. Le beau livre de Doutté sur


Magie et religion9 consacre plusieurs pages au sujet.
Quelques exemples encore sur la valeur du nom utilisé en
interpellation : d'après les traditions, le Prophète recommandait à ses
Compagnons de lui envoyer des messagers qui aient «un beau visage
et un beau nom»10, ou encore «donner à ses esclaves des noms de
bon augure (tels que Sa'îd, qui signifie «fortuné») permet de les
prononcer et de les entendre souvent»11. Mais dans la vie courante, c'est
le laqab composé avec ad-dîn, ou la kunya qui servent à identifier.
Les laqab sont en nombre limité, les kunya aussi. On peut donc dire
que plus celui que l'on veut identifier est proche et plus le nom que
l'on utilise pour l'identifier est banal, moins il est personnalisé.
En ce qui concerne le nom des princes, dont on a dit qu'ils
n'étaient pas «tournés vers la mort» mais «tournés vers la
naissance», on a un libellé à part pour ces noms qui ont pour
particularité d'être écrits sur des supports divers, sur des surfaces réduites
comme les monnaies ou les poids en verre, répétés sur les
monuments et les façades, mais aussi proclamés, criés, invoqués au cours
de diverses cérémonies et dans le prône du vendredi. Ces titulatures
ont donc une sonorité, là encore un rythme, qui permet de les
repérer immédiatement.
La titulature est la partie la plus connue de leur nom12, qu'elle
occulte et rend parfois inutile, sauf s'il s'agit de faire la preuve d'une
généalogie dynastique. Cette titulature doit permettre de les rec-
connaître, de marquer une différence, une distance qui les sépare de
leurs sujets, de les rattacher à une dynastie, de s'imposer par une
sonorité - puisque ces titres sont faits pour être entendus et
immédiatement identifiés - plus que par un sens ou une signification. Il
s'agit là d'une identité à l'envers en quelque sorte, non qu'elle
définisse un personnage important mais que chacun sache dans l'instant
qu'il a affaire au prince. Il s'agit plus d'être identifié dans l'immédiat
que d'avoir une identité. On peut ajouter que, contrairement à celle

9 E. Doutté, La société musulmane du Maghrib. Magie et religion en Afrique


du Nord, Alger 1908, rééd. Paris, 1984.
10 Kister, Call yourselves by graceful names, dans Society and Religion from
Jahiliyya to Islam, Variorum Reprints, Londres, 1990, texte n° XII, [p. 3-25 + 1-8].
11 Ibn Mangli, trad. F. Viré, De la chasse. Commerce des grands de ce monde
avec les bêtes sauvages des déserts et des ondes, Paris, 1984.
12 Voir notamment les études de C. E. Bos worth sur le sujet, avec l'article
«Lakab» dans l'Encyclopédie de l'Islam, 2e édition, Leyde, 1986, t. V, p. 622-635; le
répertoire des dynasties : The islamic dynasties, Edimbourg (Islamic Surveys, 5),
1967 (nouvelle édition en cours) et l'article The titulature of the early Ghaznevids,
dans Oriens, XV, Leyde, 1962, p. 210-233, rééd. dans The Medieval History of Iran,
Afghanistan and Central Asia, Variorum Reprints, Londres, 1977, texte n° X
[p. 210-233].
NOM ET IDENTITÉ DANS LE MONDE MUSULMAN 107

des lettrés, l'identité des princes ne consiste pas en une chaîne


d'éléments acquis tout au long de l'existence, mais d'un ensemble de
composantes qui cesse de s'accroître au moment où le prince accède
au pouvoir, avec deux cas de figure. S'il s'agit d'un pouvoir
héréditaire, la généalogie est proclamée (l'exemple de la restauration du
califat abbasside par le souverain mamelouk est bien connu : le
calife qui avait été chassé de Bagdad et s'était réfugié auprès des
Bédouins du désert arrive au Caire. Son identité et sa généalogie
sont authentifiées par des témoins et sont proclamées. Avec la
mention des ancêtres, on a celle du nom reçu à la naissance accompagné
le cas échéant d'un laqab composé avec ad-dîn {ad-dîn signifiant
alors «le pouvoir spirituel» aussi bien que «la foi musulmane»,
parfois le même pour tous les membres de la dynastie, ou bien choisi
dans un éventail restreint), et la mention d'une titulature, et le nom
est fixé.
Comment étaient choisis les noms de règne de ceux qui
accédaient au pouvoir? On peut se référer au témoignage, souvent cité,
d'as-Sûlî, historien officiel de la dynastie abbasside qui, en 322/934
est sollicité pour trouver un nom de règne au nouveau calife qui
vient d'accéder au pouvoir à Bagdad. As-Sûlî, qui est alors malade et
enfermé chez lui, est sollicité par un messager de la cour. Il envoie
une liste de noms et conseille par écrit au souverain de choisir le
non de : al-Murtadî billâh. Certain que le calife va suivre son conseil,
il s'empresse de composer un poème à la gloire de la dynastie,
poème qui a une rime en dî , comme Murtadî. Mais il est déçu car le
messager apporte bientôt la réponse du prince qui ne veut pas de
Murtadî (parce que ce nom a été choisi jadis par un Abbasside qui
finalement n'a pas accédé au pouvoir). Le calife préfère : al-Râdî
billâh. L'historien poète accepte. La rime en dî lui convient et il le
modifie quelque peu pour y insérer le nom d'ar-Râdî. Mais il n'y
parvient pas aisément et, au premier vers, il remplace «al-Murtadî» par
«Abu l-'Abbâs», la kunya du prince. Même nombre de pieds,
appellation un peu familière, mais en sa qualité de poète il peut se
permettre d'appeler le prince par sa kunya. Pour l'anecdote, on peut
ajouter qu'as-Sûlî reçoit une gratification de dix mille dirhems pour
avoir choisi ce nom de règne, mais que sept ans plus tard, ayant
fourni à un autre souverain de la même dynastie une liste de trente
noms, parmi lesquels le prince choisit «al-Muttaqî», il ne fut jamais
payé pour ce service.
L'exemple le plus fameux d'une décadence des titulatures est
représenté par la dynastie Bouyide (Buwayhide) qui adopta des
titres si redondants, composés avec ad-dîn (pouvoir spirituel) et ad-
dawla (pouvoir temporel) pour revendiquer à la fois ce double
pouvoir spirituel et temporel. Ces titres occupent plusieurs lignes dans
les textes et ne reflètent plus l'identité des princes mais leur avidité
108 JACQUELINE SUBLET

de pouvoir. Ils furent la risée des poètes et l'un d'eux se para du titre
de Jirâb ad-dawla qui sonne comme un nom de prince et qui signifie
«le fourre-tout de la dynastie, du pouvoir temporel». Un exemple
pris chez les califes Abbassides d'Egypte dont on a déjà parlé : la
dynastie qui fut installée au Caire à l'initiative du sultan mamelouk
Baybars à parti de 659/1261 et qui est investie du pouvoir spirituel
porte une titulature composée de l'article al- suivi d'un qualificatif
ou d'un participe, lui-même suivi de billâh, alâ Allah ou bi'amr(i)
llâh (ex. : al-Mustansir billâh : «qui prend appui sur Dieu»). Les
sultans mamelouks qui représentent le pouvoir temporel et qui
concèdent le pouvoir spirituel aux califes abbassides par lesquels ils
reçoivent l'investiture, ont adopté le même schéma de titre que leurs
prédécesseurs de la dynastie ayyoubide : al-Malik («le prince») suivi
d'un adjectif ou d'un participe, par exemple : Al-Malik al-Zâhir
(littéralement «le Prince magnifique») Baybars.
S'il s'agit de dynasties d'esclaves comme celle des Mamelouks,
sans généalogie, là encore on se tourne vers les témoignages de la
naissance et des débuts de la vie : le ism, le nom turc sous lequel un
esclave a été importé, (ce nom qui a une thématique qui renvoie à la
thématique des récits de batailles : le fer, les lumières éclatantes, les
astres, les animaux sauvages, les chiffres et les nombres qui
impressionnent), suivi du nom de relation au marchand qui a acheté
l'esclave et qui l'a importé en Egypte, puis du nom du ou des maîtres
successifs qui ont assuré son éducation de mamelouk, un laqab
composé avec ad-dîn choisi parmi les cinq portés par la dynastie,
avec une préférence pour Sayf ad-dîn («le sabre, l'épée de la religion,
de la foi, du pouvoir spirituel»).
Le cas des esclaves mamelouks devenus princes donne bien
l'exemple de noms singuliers : esclaves achetés enfants, importés
sans généalogie, les Mamelouks ont donc un ism d'origine, turc ou
kiptchaq : Baybars, Qutuz, Aybak entre autres. Ils le font suivre d'un
nom de père fictif : ibn Abd Allah (littéralement : «fils de l'esclave
Dieu») et de plusieurs noms de relation {nisba) qui témoignent de
leurs attaches, d'une part avec le marchand qui les a importés et
dont ils prennent le nom, et d'autre part de leurs maîtres mamelouks
dont ils adoptent aussi le nom. Un surnom à résonance religieuse
{laqab composé avec ad-dîn) choisi dans un éventail restreint
complète ce libellé qui représente un cas extrême puisqu'il a le
rythme d'un nom musulman médiéval sans en avoir le contenu.

Jacqueline Sublet

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