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doi: 10.2143/JCS.15.0.3005421
Les diverses mentions de l’audace dans les textes gnostiques, soit en réfé-
rence au démiurge ou aux archontes, soit en référence à un éon du Plé-
rôme ou à l’un des pneumatiques, reprennent des termes grecs et coptes
divers. Cela aboutit à différentes traductions possibles de ces expressions:
«audace» (ⲧⲟⲗⲙⲁ), GrSeth, NHVII 69, 14; «audace, arrogance, esprit
hautain» (ⲟⲩⲙⲚⲧⲛⲟϭ ⲙⲉⲉⲩⲉ), TracTri, NH I 76, 19-20; «impu-
dence» (ⲧⲟⲗⲙⲁ), TemVer IX 73, 5). L’emploi du substantif grec τόλμα
ou ses correspondants coptes dans un contexte particulier concernant l’ac-
tivité démiurgique à l’origine du monde sensible permet d’établir certains
rapprochements avec des interprétations philosophiques médioplatoni-
ciennes et plotiniennes.
Dans son dernier ouvrage, The Spiritual Seed1, Einar Thomassen a
remarquablement analysé, au sujet du sens du terme, les rapports existant
entre les textes plotiniens (notamment le Traité 10, 1, 1-8) et ceux rap-
portés par Irénée de Lyon d’une part et les attestations recensées dans
le TraitéTripartited’autre part. On voudrait ici approfondir ses hypo-
thèses en apportant à la discussion des occurrences supplémentaires de
τόλμα et d’autres termes analogues, ainsi que de nouvelles analyses du
mot. Notre travail abordera d’abord les écrits de Plotin et Numénius,
ensuite les textes de la collection de Nag Hammadi, et enfin les recueils
de témoignages présentés par Irénée de Lyon dans le ContrelesHérésies
et les textes d’autres Pères de l’Église tels que Clément d’Alexandrie et
Origène.
Le premier objectif de la présente contribution est donc de compléter
le travail commencé par E. Thomassen et d’analyser les sens que revêt
cette expression dans des nouvelles mentions. Le deuxieme objectif sera
d’établir des liens entre des textes appartenant à différents courants gnos-
tiques. D’une part nous montrerons la relation étroite qui unit l’audace
démiurgique et l’ignorance de l’artisan gnostique. D’autre part, l’étude des
idées philosophiques autour du terme cherchera à montrer comment les
1
Thomassen, TheSpiritualSeed 283-291.
1. Plotin
2
Opsomer, «A Craftsman» 68.
3
Traité10, 8. Bréhier, EnnéadesV 25-26.
4
Opsomer, «A Craftsman» 69.
5
Opsomer expose des influences gnostiques et stoïciennes. Opsomer, «A Craftsman»
70.
6
οὐ γὰρ ἐξ αὑτῆς ἡ ψυχὴ τὴν τοῦ σώματος ἐδημιούργει φύσιν οὐδ᾿ ἐκ τοῦ μὴ
ὄντος, ἀλλ᾿ ἐκ σώματος ἀτάκτου καὶ ἀσχηματίστου σῶμα τεταγμένον ἀπειργάσατο
καὶ πειθήνιον (Cherniss et Helmbold, Moralia 50-51). Voir aussi Opsomer, «Demiurges»
91.
7
Opsomer, «A Craftsman» 71.
8
Opsomer, «A Craftsman» 79-89.
9
Opsomer, «A Craftsman» 89-91.
10
Baladi, LapenséedePlotin 9.
11
Harl, QuisRerum 200-201
12
«Mais elle (i.e. la matière) est tout aussi radicalement incapable (ἀδύνατος);
impuissante (ἀρρωστίᾳ) qu’elle est à demeurer dans le même état; car c’est un fleuve
impétueux et instable que la matière, elle est, en profondeur, en largeur, en longueur,
indéfinie et illimitée (ποταμὸς γὰρ ἡ ὕλη ῥοώδης καὶ ὀξύρροπος, βάθος καὶ πλάτος
καὶ μῆκος ἀόριστος καὶ ἀνήνυτος)» (des Places, Numénius 44-45). «Elle est infinie
(ἄπειρος), indéterminée (ἀόριστος), irrationnelle (ἄλογος), inconnaissable (ἄγνωστος)
et sans ordre (ἄτακτος)» (des Places, Numénius 44-45).
13
Sur l’authenticité du fragment, E. des Places considère le fragment comme faisant
partie des «témoignages» des auteurs sur les dires de Numénius (cf. des Places, Numé-
nius 10).
14
des Places, Numénius 97. Voir aussi Dillon, TheMiddlePlatonists 375, pour qui
l’Âme du Monde mauvaise se rapproche plutôt des caractéristiques du réceptacle du
Timée.
15
des Places, Numénius 97-98. Cette matière avec son vice originel, l’audace, devient
ensuite, la mère des dieux corporels et engendrés.
16
des Places, Numénius 53.
17
Opsomer, «Demiurges» 70 n. 98.
18
Baladi, LapenséedePlotin 12. Armstrong affirme les sources pythagoriciennes de
Plotin par rapport à τόλμα, Armstrong, Plotinus, 10. Par rapport à Numénius, on voudrait
seulement remarquer l’existence des relations de sens au sujet des caractéristiques et
actions de l’audace, car les rapports entre les systèmes de Plotin et Numénius ont été
traités dans les ouvrages d’Armstrong, The Architecture 7-9, Dodds, «Numenius and
Ammonius» 3-32 et encore des PlacesNuménius 23-26.
19
Traité11, 1, 7-13. Bréhier, EnnéadesV 33.
20
Traité9, 5, 27-29. Bréhier, EnnéadesVI 178.
21
Baladi, LapenséedePlotin 59.
22
Traité 11, 1, 7-16: ὂν γὰρ τέλειον τῷ μηδὲν ζητεῖν μηδὲ ἔχειν μηδὲ δεῖσθαι
οἷον ὑπερερρύη καὶ τὸ ὑπερπλῆρες αὐτοῦ πεποίηκεν ἄλλο· τὸ δὲ γενόμενον εἰς
αὐτὸ ἐπεστράφη καὶ ἐπληρώθη καὶ ἐγένετο πρὸς αὐτὸ βλέπον καὶ νοῦς οὕτως. Καὶ
ἡ μὲν πρὸς ἐκεῖνο στάσις αὐτοῦ τὸ ὂν ἐποίησεν, ἡ δὲ πρὸς αὐτὸ θέα τὸν νοῦν. Ἐπεὶ
οὖν ἔστη πρὸς αὐτό, ἵνα ἴδῃ, ὁμοῦ νοῦς γίνεται καὶ ὄν. Οὕτως οὖν ὢν οἷον ἐκεῖνος
τὰ ὅμοια ποιεῖ δύναμιν προχέας πολλήν· εἶδος δὲ καὶ τοῦτο αὐτοῦ, ὥσπερ τὸ πρὸ
αὐτοῦ πρότερον προέχεε. Καὶ αὕτη ἐκ τῆς οὐσίας ἐνέργεια ψυχὴ τοῦτο μένοντος
ἐκείνου γενομένη. (Bréhier, EnnéadesV 33-34).
23
Traité 30, 8, 32-34. Bréhier, EnnéadesIII 278.
24
Baladi, LapenséedePlotin 61.
25
Traité 10, 3, 4-17. Bréhier, EnnéadesV18.
26
Traité 10, 1, 1-8. Bréhier, EnnéadesV 15. On ne rentrera pas ici dans une interpré-
tation des rapports âme/corps/mal. Voir Baladi, LapenséedePlotin 81 et 89-98.
27
«Lorsque l’âme vient dans la plante, c’est une partie d’elle-même qui est dans
la plante; c’est sa partie la plus audacieuse (τολμηρότατον) et la plus imprudente
(ἀφρονέστατον), puisqu’elle s’est avancée jusque-là» (Traité 11, 2, 5-7; Bréhier, Ennéades
V34). N. Baladi explique cette audace comme un processus de descente de l’âme (Baladi,
LapenséedePlotin 72-73 et 78).
28
Traité 11, 2, 25-32. Plotin affirme: «[…] il n’est pas vrai qu’aucune âme, pas même
la nôtre, soit entièrement plongée dans le sensible; il y a en elle quelque chose qui reste
toujours dans l’intelligible […]». Traité6, 8, 2-3. Bréhier, Ennéades IV 225.
29
Baladi, LapenséedePlotin 79.
30
Baladi, LapenséedePlotin 117.
31
Traité 51, 9, 16-19: Διὸ καὶ νοῦς ἄλλος οὗτος, οὐ νοῦς, τολμήσας ἰδεῖν τὰ μὴ
αὑτοῦ» (Bréhier, EnnéadesI 125).
32
«Mais comme ces causes demeurent en elles-mêmes, il faut bien, si elles ont leur
reflet ailleurs, qu’il y ait là quelque chose pour leur donner place; non pas qu’elles y
viennent, toujours présente et pleine d’audace (τόλμα), comme une solliciteuse indigente,
la matière leur (i.e. aux images des êtres intelligibles) fait violence pour les saisir, mais
elle est trompée et ne les saisit pas». Traité 26, 14, 5-10. Bréhier, EnnéadesIII 115. Voir
aussi Baladi, LapenséedePlotin 100-102.
33
L’image ou le reflet de la partie inférieure de l’âme, la plus proche de la matière,
sera engagée dans la matière, «même parfois unie à une portion de la matière, à un corps
[...]», cf. Baladi, La pensée de Plotin 109. Au sujet de l’audace de l’intelligence et de
l’audace de la matière, N. Baladi établit différents degrés et même différentes entités
(Baladi, LapenséedePlotin 53, 58-59 et notamment 104).
34
Baladi, LapenséedePlotin 119.
35
Baladi, LapenséedePlotin 53.
36
Baladi, LapenséedePlotin 57.
37
Bien qu’on ne puisse pas préciser l’identité exacte des gnostiques auditeurs à l’école
de Plotin, nous suivrons l’article de M. Tardieu, «Les gnostiques dans LaViedePlotin».
2. Textes gnostiques
38
Καὶ εἰς ταὐτὸν ἄγοντες τὸν δημιουργὸν τῇ ψυχῇ καὶ τὰ αὐτὰ πάθη διδόντες,
ἅπερ καὶ τοῖς ἐν μέρει. Traité 33, 6, 61-62. Bréhier, Ennéades II 119. Voir aussi
Traité33, 7, 11-14
39
Opsomer, «A Craftsman» 96.
40
HypArch 92, 27-32. Barc,L’Hypostasedesarchontes 62-63.
41
HypArch 92, 26. Barc,L’Hypostasedesarchontes 62-63.
42
L’ÉcritsansTitre, composé aussi à la fin du IIème siècle et proche de L’Hypostase
des archontes, semble confirmer cette affirmation: «Mais lui (i.e. le grand Archonte),
dans sa sottise, dédaigna d’être mis dans son tort et il eut l’audace (ⲁϥⲧⲟⲗⲙⲁ) de dire
«‘Si quelqu’un existe avant moi, qu’il se manifeste afin que nous voyions sa lumière!’»
EcrsT 107, 34-108, 2, 1. Painchaud et Funk, L’Écrit sans Titre 170-171. Voir aussi les
commentaires à la p. 343. On trouve aussi dans le même texte une autre mention du terme,
EcrsT116, 34-117, 4: «Puis, recouvrant leurs sens, ils (i.e. les archontes) s’approchèrent
d’Adam et voyant ce sosie d’Ève près de lui, ils se hâtèrent, croyant que c’était la véritable
Ève. Et ils osèrent s’approcher d’elle. Ils la saisirent et éjaculèrent leur semence en elle.»
Painchaud,«L’Écrit sans Titre» 447.
43
Painchaud, «Le Deuxième Traité» 1114.
44
GrSeth 69, 7-19. Painchaud,LeDeuxièmeTraité70-71. Voir aussi Painchaud, «Le
Deuxième Traité» 1107-1139. Voir aussi 2Co 6, 14.
45
Voir les commentaires de Painchaud dans LeDeuxièmeTraité141-142. Le tableau
descriptif des archontes s’enrichit avec un autre terme qui montre l’essence indécente de
ceux-ci et qui les rapproche du portrait de Sophia/Prounikos d’Irénée I, 29, 4. Voir aussi
GrPuis 46,6-14, Desjardins et Roberge, «L’Entendement de Notre Grande Puissance»
919-920, Wisse et Williams, «The Concept of Our Great Power», 318-319 et Pasquier,
«Prouneikos» 57-59. Finalement on remarquera aussi que l’opposition Bien / Lumière ↔
volupté / impudicité se retrouve aussi dans Numenius, fragment 2.
46
Zost 128, 7-18. Barry et al., Zostrien 472-473. Voir aussi les commentaires des
pages 650-651.
John Turner, lie «les autres qui étaient dans la matière» aux âmes intro-
duites dans les corps et ignorantes du monde divin. L’auteur rapproche
l’audace de ces «autres» à l’audace de l’âme plotinienne et sa descente
vers le corps47.
Néanmoins, nous voyons dans ces «autres», toutes les entités (le
démiurge et ses archontes) qui sont venues à l’existence suite à l’audace
de Sophia et qui ne sont que les restes de sa passion48. De sorte que,
produits de la passion, ils sont ignorants de l’existence du Père, et c’est
cette ignorance qui les pousse à se montrer insolents envers le Plérôme
(ils font face et s’encouragent)49.
47
Barry etal.,Zostrien 650-651
48
Après la conversion de Sophia, la passion qu’a provoquée sa chute ne reste que dans
les archontes.
49
Voir Zost 81, 1-9. Barry, «Zostrien» 1301. Barry etal.,Zostrien384-387.
50
Voir aussi NH III, 14, 3. Au sujet de la traduction du terme par impétuosité, voir
note 37, 10-11 de Barc, «Livre des Secrets de Jean» 231. M. Tardieu, reprend le sens ori-
ginal du terme grec et traduit par «inclination amoureuse» (Tardieu, CodexdeBerlin 107).
51
Crum, Dict., 127b.
52
ApocJr BG 45, 14-19; NH IV 21, 13-14. Tardieu, CodexdeBerlin 118. Cf. la tra-
duction de Barc, «Livre des Secrets de Jean» 237. Voir aussi la traduction anglaise de
Waldstein et Wisse,TheApocryphonofJohn 80.
53
Il faudrait ajouter que quelques lignes plus loin, l’Archonte est qualifié d’arrogant
ou impudent (ⲡ̄ⲁⲩⲑⲁⲇⲏⲥ) ApcrJn BG 46, 1 et II, 13, 27. Barc «Livre des Secrets de
Jean» 237 et 275. Voir aussi Waldstein et Wisse,TheApocryphonofJohn 80-81.
54
Voir aussi d’Origène, Comm.Jn. XIX, VI, 35. Blanc, Origène IV 68-69.
55
TracTri 57, 8-23. Painchaud et Thomassen, «Traité tripartite» 130 et note 57, 8-23.
Voir aussiPainchaud et Thomassen,TraitéTripartite 66-67.
56
TracTri 57, 29-60, 1 et 66, 29-67, 19. Painchaud et Thomassen, «Traité Tripartite»
133 et 139. Voir aussiPainchaud et Thomassen,TraitéTripartite 74-75 et 88-91.
57
TracTri 60, 16-37. Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 66-73.
58
TracTri 74, 18-75,17. Painchaud et Thomassen, Traité Tripartite 108-111. La
volonté autonome doit agir en harmonie avec la communauté des éons; processus qui est
décrit en 74, 19-75, 17, où chaque éon rend gloire au Père en accord avec son frère qui se
trouve dans un niveau supérieur. TracTri 74, 18-75, 17. Painchaud et Thomassen,Traité
Tripartite 108-111.
59
TracTri 62, 6-63, 30. Painchaud et Thomassen, «Traité Tripartite» 130-134 et note 63,
5-28. Voir aussiPainchaud et Thomassen,TraitéTripartite 78-83. D’après E. Thomassen
le fils représente l’«extension» du Père d’où dérive la dyade, le principe de l’illimité
et du multiple et le passage de l’unité originelle à la multiplicité. «Mais, en tant qu’il est
67
TracTri 82, 25-27. Painchaud et Thomassen, Traité Tripartite 126-127 et pour la
correction du manuscrit copte voir Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 511.
68
TracTri 80, 10-83, 34. Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 120-131.
69
Painchaud et Thomassen,«Traité Tripartite» 151 n. 81, 10-25.
70
TracTri 87, 13-22. Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 138-139.
71
TracTri 90, 14-100, 19. Painchaud et Thomassen, Traité Tripartite 144-169. «Le
Logos reçut en une seule et unique fois la vision de toute chose, ce qui préexiste, ce qui
existe maintenant, et ce qui existera, puisqu’il a été chargé de l’économie de tout ce qui
existe.» TracTri 95, 17-22. Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 156-157.
72
Ἥ τε οὖν ὑπόστασις αὐτῇ ἀπὸ νοῦ ὅ τε ἐνεργεία λόγος νοῦ αὐτῇ ὁρωμένου.
Traité10, 3, 15-16. Bréhier, EnnéadesV 18.
73
Voir Traité10, 4, 21-28 et 7, 5-22.
74
«[...] οὕτω τοι καὶ αὐτὴ λόγος νοῦ καὶ ἡ πᾶσα ἐνέργεια καθ᾿ ἣν προΐεται ζωὴν
εἰς ἄλλου ὑπόστασιν· Traité10, 3, 15-16. Bréhier, EnnéadesV 18.
75
Traité10, 3, 5-17. Bréhier, EnnéadesV 18
76
TracTri 76, 24-30. Painchaud et Thomassen,TraitéTripartite 112-113.
77
Dans ces commentaires du texte, E. Thomassen affirme que: «[...] l’expression
qualifie manifestement l’acte volitif (ce que les autres systèmes appellent ἔννοια et
L’existence des liens que le terme τόλμα permet d’établir entre les
textes valentiniens et plotiniens, a été affirmée par E. Thomassen dans son
dernier ouvrage, The Spiritual Seed. L’auteur a aussi souligné dans cet
ouvrage les sources néopythagoriciennes à la base de cette terminologie:
«L’Audace, τόλμα, n’est pas une mot accidentellement choisi pour décrire
le motif de la passion de Sophia. Elle appartient à une terminologie néopy-
thagoricienne bien établie utilisée pour décrire le désir ardent de la Dyade
pour l’altérité et une existence séparée. Il est évident que l’utilisation du
terme néopythagoricien était présente à l’esprit de l’auteur valentinien
quand il l’a sélectionné, afin de caractériser la désunion implicite dans
l’entreprise de Sophia. [...] Le principal point d’intérêt pour nous ici n’est
donc pas ce que de ressemblance ou de dissemblance il peut y avoir entre
le mythe valentinien de Sophia et les vues de Plotin sur la chute de l’âme,
mais plutôt de leurs théories communes sous-jacentes, qui proviennent de
sources néopythagoriciennes partagées»78.
de là son appellation ‘audace’. Plus tard encore, Proclus (i.e. InAlcibiadem) dit que la
procession de l’être ou sa génération, doit être appelée ‘audace’ à la manière des pytha-
goriciens». Baladi, LapenséedePlotin 13-14.
79
Dillon, TheMiddlePlatonists51.
80
Dans la traduction de Ch. Froidefond on lit «Les Pythagoriciens ont même doté de
noms de dieux des nombres et de figures. [...] ‘Discorde’ et ‘Guerre’ la dyade (Ἒριν δὲ
τὴν δυάδα καὶ Πόλεμον)». Froidefond, Plutarque, Isis et Osiris 245. Néanmoins, on
aperçoit dans les notes que l’auteur indique le changement du terme Πόλεμον par le terme
Τόλμαν dans certains manuscrits.Froidefond, Plutarque, IsisetOsiris 245.
81
Voir Atkinson, Plotinus:EnneadV.1 4 et Segonds, Proclus 202, n. 1. Aussi, Arms-
trong, Plotinus 10. Néanmoins, en ce qui concerne la source directe plus ancienne (étant
donné que les dires de Phérécyde sont rapportés par un auteur postérieur, c’est-à-dire
l’affirmation de Plutarque), il faudrait prendre en compte les précisions mentionnées dans
la note précédente.
Irénée de Lyon
Cette témérité est, d’après les récits rapportés par Irénée, une passion
insensée car il était impossible pour Sagesse de comprendre la grandeur du
Père et en conséquence il se trouva dans un état de lutte d’extrême vio-
lence. Elle a failli même se dissoudre dans le Père, si elle n’avait pas été
retenue et consolidée par l’éon «Limite». Puisque, cette témérité a déjà
une existence, Sagesse doit s’en libérer avant de retourner au Plérome:
«[...] ayant fait à grand peine retour à lui-même et persuadé (i.e. l’éon
Sagesse) désormais que le Père est incompréhensible, il déposa, sous le
coup de l’admiration, son «Enthymésis» antérieure avec la passion surve-
nue en celle-ci»84. Dans les notes justificatives Alain Rousseau et Louis
Doutreleau expliquent ceci: «Le mot ἐνθύμησις (de ἐν θυμῷ) désigne
le fait de se mettre (ou d’avoir) quelque chose dans l’esprit (une pensée,
un sentiment, un désir, une tendance, une intention, un vouloir, …)»85.
Traduction qui se rapproche du sens du terme «une grandeur de pensée,
une pensée hautaine, orgueilleuse» du TraitéTripartite.
82
Voir Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon I, tome I 175-176, notes 2 et 4.
83
Adv.haer, I, 2, 2. Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon I, tome II 38-39.
84
Adv.haer, I, 2, 2. Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon I, tome II 40-41.
85
Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon I, tome I 177. Les auteurs ajoutent: «[...]
Nous voyons Sagesse «déposer» finalement ce désir malencontreux et se séparer de lui,
un peu comme on le ferait d’un vêtement: du coup, ce désir, désigné pour la première fois
sous le nom d’ἐνθύμησις (= «Pensée», «Désir», «Tendance», «Intention»...), devient
une réalité autonome [...].»Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon I, tome I 177.
86
Adv. haer, I, 4, 2 et 5, Rousseau et Doutreleau, Irénée I, tome II 66-67 et 74-75.
E. Thomassen remarque ce mythe aussi dans InterpGn 13, 16-17. Painchaud ET Tho-
massen, «Interprétation de la gnose» 1491 n. 13, 16-17.
87
Adv.haer.,ΙI, Pr 1, 26-28, Rousseau et Doutreleau, IrénéeII, tome II 24-25. Voir
aussi Adv.haer. ΙI, 1, 1-5.
88
Adv.haer.,ΙI, 2, 4-5, Rousseau et Doutreleau, IrénéeII, tome II 38-41.
89
Adv.haer., IV, 20, 1, Rousseau etal., IrénéedeLyon IV, tome II 626-627. «Que le
Fils, c’est-à-dire le Fils, fût depuis toujours avec le Père, nous l’avons amplement montré.
Mais la Sagesse, qui n’est autre que l’Esprit, était également auprès de lui avant toute
création» (Καὶ ὅτι ὁ Λόγος, τουτέστιν ὁ Υἱός, ἀεὶ τῷ Πατρὶ συμπαρῆν, διὰ πολλῶν
ἐπεδείξαμεν. Ὅτι δὲ καὶ ἡ Σοφία, ἥτις ἐστὶ τὸ Πνεῦμα, ἧν παρ᾿ αὐτῷ πρὸ πάσης
κτίσεως). Adv.haer., IV, 20, 3, 54-56, Rousseau etal., IrénéedeLyon IV, tome II 632-
633.
90
Adv.haer. IV, 20, 1, Rousseau etal., IrénéedeLyon IV, tome II 626-627.
91
Adv. haer. II, 13, 7, Rousseau et Doutreleau, Irénée de Lyon II, tome II 122-
123.
92
Adv. haer. II, 17, 2, Rousseau et Doutreleau, Irénée de Lyon II, tome II 158-
159.
93
Adv.haer. II, 17, 5-7, Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon II, tome II 162-167.
94
Irénée considère que les doctrines valentiniennes sont prises chez des philosophes
et autres auteurs classiques.Adv.haer. II, 14, 1-6, Rousseau et Doutreleau, IrénéedeLyon
II, tome II 130-139.
95
Strom. VII, II, 7, 1-2. Le Boulluec, LesStromates 54-55.
96
Strom. VII, III, 15, 1. Le Boulluec, LesStromates 72-73. Voir aussi, StromateIV,
XXIII, 151, 1
97
Crouzel et Simonetti, Origène, TraitédesPrincipes 51.
98
Crouzel et Simonetti, Origène, TraitédesPrincipes 31-32.
99
Com.Jean II, X, 70-72. Blanc, Origène, tome I 252-255.
100
Com.Jean I, XIX, 110. Blanc, Origène, tome I 116-117. Aussi I, XXXV, 255. Blanc,
Origène, tome I 186-187.
101
Com.Jean, I, XXV, 158-161 et I, XXXIV, 244. Blanc, Origène, tome I 138-139;
182-183 et Com.Jean XIII, XXXVI, 228-235, Blanc, Origène, tome III 154-159.
102
Com.Jean X, VI, 25, Blanc, Origène, tome II 398-399 et 69.
103
Com.Jean XIX, XXII, 146-147, Blanc, Origène, tome IV 134-137.
104
Com.Jean II, II, 14-19. Blanc, Origène, tome I 220-223. En ce sens voir la signi-
fication donné au terme de ὑπόστασις dans I, XXIV, 151 et XXXIV, 244; XXXIX, 292.
Blanc, Origène, tome I 134-135, 180-181, 210-211.
105
Com.Jean XIII, XXXVII, 241. Blanc, Origène, tome III 160-161.
supérieures et sa création est une chute. Car le monde est devenu maté-
riel à cause des hommes qui avaient besoin de vivre au milieu de la matière
après sa désobéissance aux commandements divins106. C’est un lieu d’af-
fliction où tombe Adam chassé du paradis et jeté dans un «monde plongé
dans la matière»107. Le monde sensible est le résultat de la chute de
l’homme mais non pas explicitement de son audace.
Conclusion
106
Com.Jean XIX, XX, 132. Blanc, Origène, tome IV 126-127.
107
«[…] ὅσω διαφέρει γυμνὸς πάσης ὕλης τοῦ ὅλου κόσμου λόγος τοῦ ἐνύλου
κόσμου […]». Com.Jean XIX, XXII, 147. Blanc, Origène, tome IV 136-137.
108
Baladi, LapenséedePlotin 61.
109
Baladi, LapenséedePlotin 116.
110
Baladi, LapenséedePlotin 117.
111
Baladi, LapenséedePlotin 118.
112
N. Baladi affirme à la fin de sa conclusion: «Il s’ensuit que dans la descente jusqu’à
la matière, il n’y a pas deux audaces, l’une faisant face à l’autre, l’audace de l’âme et
l’audace de la matière. Il n’y en aurait qu’une seule, celle de l’homme». Baladi, Lapensée
dePlotin 122-123.
Bibliographie
1. Sources
2. Études
Mariano Troiano
École Pratique des Hautes Études, Paris, France
Universidad Nacional de Cuyo, Mendoza, Argentine
mariantro@hotmail.com