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OS CANGACEIROS NOTES EDITORIALES COMMENT PEUT-ON PENSER LIBREMENT A L’OMBRE D’UNE UNIVERSITE ? nements de décembre 1986 » ont voulu y saluerI’émergence d’une contestation nou- velle, certains croyant méme y déceler les signes avant-coureurs dune ctise sociale plus générale. Ea réalité, ce que toute la classe politique, qui ne s’y est pas trompée, a pu saluer alors, c’étaitl’appati- tion d’une nouvelle force de conservation de Ia société qui visait 4 modemniser un mensonge main- tenant vieux de deux sigcles. Il ne s'agit donc pas de déplorer les limites de I’effervescence qu’a pu parfois engendrer, 3 son corps défendant, ce mou- vement estudiantin, mais de révéler quelles sont les idées dont il « éé portcur pour les soumetire 3 la Gitique. La tiche de celle-ci consiste & clatifier, dans Ja pensée comme dans action pratique, « les élé- ments qui motivent l’alignation propre de homme ‘et qui recélent en méme temps en soi les conditions de sa suppression », Plus d’un sidele aprés lexpé rience de 1848 et dela Commune, on ne peut igno- retlla fonction pratique que remplit la démocratie comme pensée dans le monde existant, de méme qu’on ne peut plus faire abstraction, aprés 1968, du réle que jouent concr&tement les étudiants rela. tivement a cette fonction. « les révoltes qui ont suivi 68 auront contraint Vennemi a moderniser l'oppression et i rendre ainsi Je monde encore plus invivable, la misére encore plus visible. Le vieux principe de 1789 revient alors au premicr plan des préoccupations ennemics : combler le vide entre la classe dominante et les pau- ves, qui s’est dangereusement creusé ces dernié- resannées. C'est 4 quoi s’affaire une génération de réformistes aux ordres de ’Etat. Is ne peuvent évi- demment parler que le langage de Etat ct précher Je mensonge démocratique & la masse des pauvres. » (Os Cangacciros n* 2.) Depuis que ces lignes ont 6 écrites, en novembre 1985, les événements n’ont fait que confirmer 3 quel point la cause de la Démo- cratie est devenue, en lieu et place de la teligion, le terrain privilégié du réformisme, le terrain daffcontements spectaculaites entre mensonges rivaux mais solidaites. Cette cause laquelle les pau- vies sont conviés 4s’identifier constitue désormais le cheval de bataille de la bourgeoisie et des défen- B ceaucoup de ceux qui ont commenté les « évé- seurs de I’Etat pour les détourner de la question sociale. Partout dans le monde oit des pauvres sans qualité se évoltent contre leur condition, s’en pren- nent concrétement i la misére, le séformisme doit faire de celle-ci une fatalité, de l'aggravation de oppression sociale un probléme polidique. Son but estd'imposer I’Etat comme /a réponse & cette fata- lieé ;autremene dit, que les aspirations sociales des pauvtes aillent chercher leur réalisation dans I'Etat, Hors I’Etat, point de salut ! Oa avait dgja vu au Brésil en 1983-1984, of ’agitation généralisée des pauyces dans tous les secteurs de la vie sociale avait &:é détournée in extcemis dans la campagne natio. nale pour ¢ les élections directes maintenant », sui vie du établissement en grande pompe de la démocratie. On ’a yu encore en 1986 avec les sket- ches organisés en sous-main par les Américains a Haiti et aux Philippines. Dans tous ces pays, l’insw- bordination sociale n’a pas disparu pour autant : mais le spectacle démocratique aura permis oppor- tunément de canaliser le plus gros de l’agitation, Avec le measonge démocratique, la falsification des aspirations des pauvres aboutit 4 conserver incriti- qué le principe de I'Etat. C’est encore en France, patrie des droits de l'homme et du citoyen, que Vennemi travaille avec le plus d’ardeur au rajeu- nissement de ce mensonge, avec la racaille socia- liste du temps of elle était au pouvoir et plus récemment avec le mouvement étudiant ; et nul m’était mieux qualifié pour cette tache que cette catégorie de la population destinge & former le futur encadrement des pauvres. ciativees ont conservée, dans la rue et dans la pensée. Ils ont parachevé le processus de pacification sociale effectué ces dernieres années, en occupant massivement les rues au nom de la paix civile. Ily a donc au moins un élément nouveau par rapport 4.68 : aujourd’hui les étudiants n'ont plus de prétention 4 remettre en cause la société, et c'est tant mieux car cela ne pouvait étre chez eux que de Ja prétention. Mais ils n’ont aucunement abdiqué la prétention 2 jouer un réle dansla société, cen face de I’Etat. E n décembre 1986, les étudiants ont pris Pini- Depuis vingt ans, on ne pouvait ignorer ce que sont les étudiants. On ne pouvait manquer de le rappeler, tout simplement. Pourtant, méme les él ments par nature les plus hostiles au milieu écu- diane se sone monteés incapables de dénoncer en cette occasion leur réle grandissant dans la société existance. Il est donc faux de dire que la critique des étudiants a été achevée en 68. Les étudiants ont &é insuffisamment critiqués, puisqu’ils peuvent jouer leur réle et faire illusion. Ce réle n’a riqué alors qu’il ne s’était jamais mani- festé avec autant dévidence. On savait que les étu- diants constituent le milieu propice 4 toutes les illusions : le pire est quand ils parviennent ales dif- fuser autour deux, 3 les imposer dans la rue comme e 10 décembre 1986. Il fallaitcritiquer les Erudianes parce qu’ils constituent 1’élément social dont se nourric l‘esprit politique. Personne, ade rares excep- tions dont les « Lascars du LEP électronique », n'a &é capable dele faice. Le mouvement étudiant pou- vait se proclamer indépendant de toute apparte- nance politique particuliéte parce qu’il effectuait, un retour 3 ce que la politique a de plus pur, esprit civique. Avec le mouvement de décembre 1986, essence de fa politique a rejoint son concept. Dans les nations riches, oi I’existence des gens est toujours plus ou moins hantée par des réves de promotion sociale, V enseignement occupe une place énorme, qui va sans cesse en grossissant (I'ex- ministre Fabius ne faisaic.il pas ’éloge du Japon parce que 95 % des travailleurs y sont bacheliers 2). I fait miroiter l’accés possible aux places les meil- leures : combien de fils d’ouvriers, et maintenant immigtés, qui espérent se sortir de leur con tion originelle grice 4 des études couronnées de diplémes 2! Mais 4 défaut de conduice réellement Vensemble des étudiants vers de bonnes places, Vuniversité permet & tous ces jeunes de subsister en susis ; 1 eux qui sont issus des milieux les plus défavorisés, elle permet de repousser au loin la pesante réalité du travail mal payé, du chomage, voire de la prison. L’Italie de 1977 en était un exem- ple (« Les jeunes Ktaliens allaient 4 Puniversité comme leurs homologues portugais allaient avant 1974.4 V'armée », les Fossoyeurs du Vicux Monde nt 3) ;qu’on se souvienne aussi de tous ces« bour- siets » dans l’université frangaise en 1968 et aprés. L'enscignement démocratique est ainsi un lieu de passage indifférencié oii se cotoient des gens d’ori- gines diverses et qui eux-mémes ne seront pas tous appelés 4 toni les mémes rangs dans Ia hiérarchie sociale (en particulier, beaucoup s’en vont aprés un an ou deux études et deviennent des travailleurs 4 comme les autres). C’est donc un lieu qui se veut abstrait des oppositions de la société réelle. En somme, |’enseignement universitaire réalise le cipe d’égalité dont se séclame la démocratie ; il Ie séalise abstraitemene. N’importe qui, dans l’idée, doit pouvoir accéder 3 cet enseignement. Sortis de 15, les étudiants iront occuper pour la plupact les places médiocres, celles du travail intellecruel sala fig, appauvii. Is iront par exemple bosser dans la néo-culture Le courant radical de 68 avait prononcé une condamnation sans appel de I’université (« Profs, Yous nous faites vieillit »). A l'opposé, le mouve- ment de décembre 1986 entendait bien ne pis contester cette institution décrépite. Les réves de promotion des étudiants s’étaient vas subitement compromis par Mexigence du gouvernement Chi- rac de rationaliser ’enseignement, de rendee l'uni- versité rentable — en somme, de la traiter comme une vulgaire entreprise industrielle. L’idéal démo- eratique qui avait dans Puniversité son terrain délection était ainsi remis en cause, Le mouyement de décembre réagissait A une tendance qui s’affie- mait ouvertement depuis le retour au pouvoir de Ja bourgeoisie libérale. Partie d’un refus de la sélec- tion dans Vuniversité, la contestation étudiante est parvenue ensuite a engager dans une partie de la société un débat sur la légitimité d’autres projets deloi gouvernementaux, au nom d’ une conception @largie de la Démocratie. Ce que les éeudiants entendaient dés Jors abroger n’était plus simple- ment une loi particuligze, telle que le projet Deva- quet, mais Vesprit trop peu démocratique qu’il incarnait 3 leurs yeux, pour y substituer leurs pro- pres idéaux. Les étudiants sont le secteur idéaliste de la société modeme. Frustrés depuis le 16 mars, ils étaient 4 Ia cecherche d’un projet de société & opposer au « libéralisme ». L’arrivée de la droite au gouverne- ment avait cn effet marqué le retour en force du principe policier comme complément d’un retour sans fard aux régles brutales du marché. Ce choix entrainait évidemment l’abandon d’un projet de société « généreux », dont les socialistes s’étaient faits les héraules, au profit d’uné politique libérale sans frein. Il revenait aux nouveaux gestionnaires de cette politique d’imposer ouvertement ce que a gauche masquait sous le fatras du discours cecu- ménique. A I’énoncé du séalisme marchand, « la concurrence est au coeur du monde », qui voulait enforcer la sélection a ’université pour la rendre plus compétitive, les écudiants ont opposé l’idéo- logie démocrate. « On ne veut pas de sélection par le fric », disaient-ils en décembre : « la sélection ne doit pas se faire au début mais a la fin » (la droite voulait introduire la higrarchie sociale dés l’ente al’université, les étudiants voulaient seulement la repousser 4 la sortic). Tes jeunes qui font déji l’expérience de l'usine dans les LEP ont réalisé quel est l’avenis que leut offte la société hiérarchique. Le projet de réforme ne changeait rien pour eux. A I'opposé, les étu- diants luttaient pour l’intégeation. Ils exprimaicnt une réaction de nature religieuse face 4 une r€alité sociale chaque jour plus crue et sans pitié. Us réa- gissaient en fait 3 la menace latente de désintégra- tion dela société, Alors qu'il n’y a jamaiseu autant d'exclus dans la société, depuis longtemps, et que cela pose avec acuité la question sociale, les udiants veulent résoudre cet état de fait comme un pro- bléme de morale politique (aprés tout, I’égalité des chances dans l’enseignement était prévuc dans la Constitution de 1792). Deyant les caméras de FR3, un des matalteurs Wont en respect le substitu du -parquet_ Les preneurs d’otages avalent exigé la présence d'une ‘équipe oe télévision... Toute tentative de modifier le régime de l’ensei- gnement en France provoque des protestations, parce qu’on touche [4 a l'un des principaux axes Aintégration A la société — a cette partic qui se touve précisément entre Etat et le reste de la population, cette partic de la société qui a des pré- tentionsa remplir un cle. L’université, c’est la pré- tention au savoir universel, la prétention d avoir des idées pour le reste de Ia société. C’est la que s’éla- bore ce qui tient lieu de pensée dominante. Com- ment se fait-il que la plupare des éléments radicaux qui ne ratent pas une occasion, dans leurs éctits, dinsulter les universitaires pour leur creuse préten- tion au savoir, aient raté occasion, en décembre, de dénoncer leurs éléves, pour leurs prétentions plus générales ? Le réle des étudiants est bien d'avoir li parole dans la société existante, et chaque fois quills Ia prennent cela suscite aussicot Vintérée empressé et unanime des médias et des partis poli- tiques. Parce qu’ils ont le monopole de la contes- tation admibe et reconnue, les étudiants interdisent aux pauvres de prendre l'initiative dans la pensée et c'est bien 3 ce titre que nous avons toujours insuleé leurs professeurs ! Remarquons origine éminemment religicuse de l’institution universi- aire : on y enseignait d’abord la théologie (I'Uni- versité de Paris était d’ailleurs considérée au Moyen Age comme la plus grande). Mais il arrivait quand méme que certains de ses éléves deviennent des hérétiques : au conteaite, Puniversité modeme voit tous les étudiants communier fidélement dans le credo démocratique. Le discours du mouvement éudiant se voulait égalitaire (€galité dans |’enseignement) pour récla- mer l’intégration une société hiérarchique dont le principe n’était aucunement remis en cruse. On mesure lA toute l'impudence de ces gens (+ Notice mouvement se fait un point d’honneur de ne pas metire en cause le systéme socio-économique >, déclarait noblement un porte-pacole estudiantin en décembre). I n'est pas é:onnant que la seule criti que faite en décembre de leurs revendications soit venue de gens qui sont appelésa tenic les rangs infé- ricuts de la sociéeé et ne peuvent qu’en espécer la désintégration. Mais aprés la mort de Malik Ous- sekine, le mouvement Etudiant a trouvé sa vérita~ ble vocation, en se mobilisant autour des principes démocratiques (¢ On n'est pasau Chili »). Les étu- diants se sont toujours considérés comme les gar- diens privilégiés et vigilants de la démocratie, du moins de l’idée abstraite qu’ils s’en font : en der- niére issue, ilssont les gardiens de |’Etat, parce que Ja plupact d’entre eux constitueront plus tard, par leuss fonctions, Ia courroie de transmission néces. saire entre cet appareil et le reste des gens. Qui autre qu’eux pour porter, bien haut, le flambeau de esprit démocratique ? est stup6fiant de voir des éléments prétendu- ment radicaux s'éue félicités de ce que le gouver- nement ait « cédé » en retitant ses prejets sur le Code de la nationalité et les prisons privées, qui sont relatifs des conceptions divergentes du rapport de V'Etat 3 la société. Sans doute, dansles pays bureau cratiques, la moindre contestation dune loi parti- culigze peut remettre en cause l’essence du pouvoir, C’est justement leur faiblesse intrinséque. Dans les pays démocratiques, le pouvoir est par définition logue avec les représentants de la société. Les Gtudiants voulaient justement élargir ce dialogue entre I’Btat et la société re pare ticiper tout le monde. Le tetrait de ces projets de loise sirue l’intérieur de cette sphére de la démo- cratie. Au point ofi en est rendue Ia condition des immigrés comme celle des taulards, les uns comme les autres savent bicn que la question a’est pas 13. Les racistes font exactement ce qu’ils veulent dans Ce pays, et Tes prisons ne essent de se cempliecha- rant aie question est plurée que ce faux débat vise en finale 4 rajeunir I'idée de nation, que la révolte des jeunes immigrés en 1980-81 avait pratiquement remis en cause — a vrai dire, cette besogne de eéeupération avait dja com- Georges Courts, cigare dans inne main, revolver dans mencé avec Ja marche de décembre 1983, ampli- fige ensuite par des rackets mieux organisés 3 chaque mois de décembre. Il vis. moderniser I’ins ticution de la privon, que la cévolte des taulards en 1985 avait au contraire attaqué de front. Il s'agit doned' une vaste opération visant 4 couper 'herbe sous les pieds & coute critique sociale de I’Etat. Le spectacle répugnant (pacifisme, jets de fleurs sur les CRS, respect ostensible du fonctionnement de l'université, sens du eéalisme et du sérieux, rat trapage des cours, gréve 4 la japonaise, etc.) qu’ils ont livré n'a d’égal que les kermesses démocrat ques de SOS-Racisme. Tous deux, qui se sont rejoints dans la manif du 10 décembre, procédent du méme esprit : le civisme (ne les voit-on pas, depuis, s'inscrire massivement et en grande pompe ire, parle aux otages devant les caméras. sures listes Glectorales, et inciter le reste de la jeu nesse den faire autant ?!). La réussite du mouve- ment étudiant ne tient pas tant au retrait de quelques projets de loi, finalement, qu’au fait qu'il ait pu s'imposer comme une force reconnue et acceptée sous la forme d’un groupe de pression apo- litique dilué dans la société. Il constitue un aspect moderne du parti de la paix sociale au méme titre que le racket antiraciste dont c'est en grande par- tie la méme dlientéle, Les étudiants sont finalement porteurs dune certaine conception de la société Givile et de ses rapportsavec la sphere politique. Loin de s"attaquer au principe de Etat, ils protestaient seulement contre les limitations apportées pat le régime « libéral » & la réalisation de I'Etat démo- cratique. Une société fondée sur I’exploitation et la sépa- ation ne peut atteindre de cohésion intéricure qu’au moyen d’un mensonge a prétention univer- selle. La bourgeoisie libérale actuellement au pou- voir n'a aucun projet 4 avancer qui pourrait centrainer l'adhésion de tous et assurer la cohésion sociale. Elle gouverne en s’appuyant sur les valeurs traditionnelles nécessaires & la bonne marche des affaites et ne reconnait de droit qu’aux seules caté- gories sociales déja acquises au principe marchand quise trouve au centre de sa steatégic. Elle ne con- nait que les affaires et ne prétend dirien d’autre qu’a défendre le principe de la société civile sans aucune restriction. Le gouvernement actuel nes’appuyant que sur une partic de la société, il doit done aussi s’appuyer sur une police forte. Les socialistes avaient eux le souci des apparences : ils avaient fait de la séalisation de I’Etat démocratique un point central de leur programme. D’oir!’importance qu’ilsaccor- daient i la culture, spectacle de la communication 4 prétention universelle. Les socialistes prétendaient avoir« laraison du coeur », tandis que la droite dit froidement : « Les affaires, iln’y aque ga de vrai ! » « La droite a eu le grand tort de rallumer la guerre sociale », disait le cultureux Lang a la télé, au début de la gréve des cheminots : c'est-a-dire de libérer entigrement les forces du marché, de conforter les avantages des classes moyennes, de dégager les appétits dela classe bourgeoise de toute limitation, ce qui se fait nécessairement contre le reste de Ia société, es travailleurs, les chdmeurs et avec eux tous les pauvresen voied’exclusion. En réalité, elle n’a bien sir fait que poursuivre ce que les socialistes avaient commencé, ct ce a’est pas le moins écacu- rant ni le moins significatif de voir ces dernierss’étre refaits discrétement une jouvence politique dans le mouvement étudiant, Alors que des ouvriets, en différentes villes du pays, avaient saccagé les locaux du PS en 1984-1985 (4 Longwy, Saint-Nazaire, Nantes, Dunkerque, etc.), les étudiants eurent quant cux« les sympathies du président » — sans parler de tous les délégués éeudiants inscrits eux- mémes au PS, comme cette morue d'Isabelle Tho- mas, Il ya sans dire que ceux qui étaient affiliés & des sectes trotskystes ou au parti stalinien sont éga- Jement des pourticures méprisables. Bref, les éu- diantsont ressenti le risque d’explosion sociale qui commence a s’accumuler, et ils ont assumé pleine- ment leur réle en rassemblant le maximum de gens autour de I’idéal démocratique. Leur mouvement s'est arrété le 10 décembre aprés avoir fait le plein dans les tates pour occuper un vide que nousallons quant & nous nous employer 4 approfondir. LIDEAL DEMOCRATIQUE, C'EST DE LA MERDE tion de I’Btac & annexer la communication. LEtat démocratique est 3 la communication ce quel’argent est la richesse, un représentant uni- versel abstrait. Avec la démocratie se trouve consa- erée Vabsence de la communication en tant qu’activité sociale de homme : la société est gagnée par Pintésdt privé, sous l'emprise effective del’argent et de la marchandise qui deviennent le but de toute activité, La communication n’existe plus que sous Ia forme dégradée, vide de toute humanité, du débat d’intéré, la politique. Lessence de l'homme a été confisquée pat la mar- chandise, I’Etat 2 confisqué la conscience de Vhomme. « L’Etat politique parfait est, d’aprés son essence, la vie générique de l'homme par oppesi tion 4 sa vie matétielle. Toutes les suppositions di cette vie égoiste continuent 3 subsister dans la Soci civile en dehors de la sphere del’Etat, mais comme propriété de la société bourgeoise », écrivit Mare dans /a Question juive. La politique est alors le lieu oii les aspirations contrariées de l'homme trouvent leur existence ineffective. La politique achévera, pendant les deux deniers sigcles, de dépouiller Vhomme de son langage. L’Etat se chargera désor- mais de fournir une explication du monde aux indi- vidus, qui dés lors ne pourront plus se parler que par la médiation de son langage, la politique. C’est bien pourquoi a notre époque la critique de la poli- tique est la condition premiére de toute critique. Notons que les Etudiants ont un rapport incellec- tuel avecl’Brat, tandis que la bourgeoisie et lesclas- ses moyennes ont un rapport immédiacement pratique. Les premiers jugent la légitimité de I'Etat selon son concept abstrait, les secondsselon son effi- L a.démocratic n’est rien d’autre que la peéten- 7 cacité concréte & faire régner l’ordre. Dans tous les cas, Ia démocratie est Ia caution centrale d'une société sans esprit, fondée concrétement sur l’exploi- tation etl’oppression d’autrui. Le mensonge démo- ccatique est Fi pour empécher que Ia divisi existane dans cette société soit prononcée dans la pensée, publiquemene. Il est 1a pour refouler la guerre sociale. Ceux qui se félicitent du fait que le principe de démocratie direcee ait émergé parmi les écudiants en décembre, comme confirmation de sa présence sourde paitout ailleurs sont encore prisonniers de a conception politique du dialogue. Le moment oii les étudiants peuvent exercer la discussion libre- ment entre eux est aussi celui ot la possibi est anéantie dans la société. Quand les cheminots en grdve essayaient de discuter librement de leur mouvement, ils ont subi aussitét I’hostilité active des buccaucrates syadicaux. Les étudiants considé- raienc les syndicats comme leurs interlocuteurs dans Je monde du tra Georges Courts, tras menazant.devantles cameras der 3. lnvitbes tli sorvcdeeporte parolen, Les étudiants se battaient au nom de Vidéal démocratique. Peu aprés, les cheminots qui lut- ‘cnt tout simplement contre aggravation de leur condition et ont ainsi entravé la bonne marche du capitalisme frangais se sont yus quant 4 eux oppo set une fin de non-tecevoie sans ambiguité. Ils n'ont certes pas eu droit aux éloges enthousiastes des rement aux gentils étudiants de décembre 1986. Les gtévistes de la SNCF récusaient Ia fatalité de la prétendue crise. Is ont eu 3 subir, outre les manceuvres syndicales de lintérieur, les 8 Vhostilité des classes calomnies médiatiques moyennes, petits commer sibles (manifs des gérants de stations de ski a Gre- noble, provocation organisée par les militants RPR dans la gare Montpatnasse, sans parler des attaques contre les grévistes de l’EDF courant janvier). Le mouvement étudiant défendait le principe saeré de la démocratie, les droits de ’homme. Les petits commergants anti-grévisces en défendaient le prin- cipe profine, le droit de la propriété privée et du profit — le comble a été atteint quand ils ont osé criet, dans une de leurs manifestations, « Non 3 Végoisme ! » contre les grévistes | Eux, des bouti- quiers ! On aura décidémenc tout vu, tout subi dans ce pays de merde. Les étudiants agissaient selon un mensonge religieux : d’ailleurs, ces kermesses démocratiques évoquent bien ces Assemblées de Paix que |'Eglise organisait sur le parvis des cathé- rales, dans les temps troublés qui précédécent les Croisades. De la méme fagon que les chrétiens ayaient alors le sentiment de conclure un pacte col- lectif etsolennel avec Dieu, garant d’un ordre plus juste, les éudiants ont eu le sentiment d’av conclu avec I’Etat un pacte tout aussi soleanel au tom des idéaux démocratiques. Le mouvement étudiant, en rajeunissant l’esprit civiquea parachevé le ceflux momentané des as rations radicales de 68. C'est en cela que les étu- diants ont pu se réclamer aussi ouvertement partisans de Pordee établi. Dans les 70’, la cévolce des pauvress’était manifestée comme désobéissance civile, Maintenant qu’elle est contrainte au repli, les étudiants peuvent bien exhiber sans honte Vimage ravie de l’obéissance civique (il n’est d’ail- leurs pas étonnant que ce soit en France, pays 0 la désobéissance civile est restée en desa d'autres pays d’Europe, qu’ils ont pu 3 ce point I rame- ner). Leur apolitisme non seulement n’a aucune chance de « devenir critique de I politique » comme I’ont spéculé certains 4 Paris en décembre 1986, mais constitue au contraie le sauvetage de ce quill y a d’essentiel dans la politique. Le mou- vement éudiant n’a fait que rappeler l’Etatdémo- cratique 3 ses devoirs. Dans ce mouvement, c’est finalement tout le poids mort de 68, coute la part non critiquée de cette époque et de ses limites qui sont cevenus : mais aujourd’hui cette part est amenée 4 se manifester ouvertement contre l’esprit de révolte sociale de 68. Parce que les aspirations de 68 ont été refoulées dans la clandestinité sociale, les étudiants étaient enfin libres de couper joyeusement toute attache avec leurs peétentions d’alors, quand il leu fallait eépon- die @ une lame de fond qui menagait de tout , y compris leur propre le, C'est pour empécher que la séparation, qui existe de toute maniére dans la société entre ceux qui y ont un ave~ nir et ceux qui n’en ont aucun ne soit prononcée que les Gtudiants fa raménent en force avec l’esprit civique. La part la plus forte de 68 était justement que ce mouvement avait ouvert une époque de désobéissance sociale dans le monde enticr, qui pourrait bien revenir la surface un jour ou autre en France Quand ils évoquent le spectee de 68, les médias sefforcent toujours d’aceréditer rétrospectivement lefaie que cela aurait &é un mouvement d’étudiants (les ancicns chefaillons gauchistes reconvertis dans le mensonge journalistique en sont d’ailleurs spé- cialistes, on comprend pourquoi). Bien que 68 soit la référence la plus proche d’une tentative révolu- tionnaire en France, peu de gens arrivent 3 discet- ner clairement ce qui s'est alors passé. 68 a été transformé, et cela ne date pas d’hier, en souveniz- Geran. Des jeunes qui seraient alors stirement des- cendus dans la rue croient sincérement que c’était un mouvement d’étudiants, bien qu’ils méprisent ceux-ci. Jadis, quand une révolte était vaincuc, I"Etat faisat le nécessaire pour qu’on n’en parle plus et qu’on en oublie jusqu’au souvenir. A présent il ne peut s’agir d’effacer la mémoice, mais de la falsifier en donnant une forme parfaitement inco- hérente & ces événements passés, On va jusqu’a octroyer des émissions télévisées 4 d’anciens leaders officils de 68, qui racontaient déji n’importe quoi 4 époque, pour qu’ils continuent i le faire, cette foissans étre démentis par la céalité des événements immédiats. La nouvelle tentative révolutionnaire commencera 13 oi s’est artété 68, en eritiquant les obstacles alors insurmontés. Les cheminots grévis- tes ont depuis entamé une critique des syndicats, marquant effectivement un progres énorme par tap- port 268, qui plus est danse qui était resté jusque- 18 une forceresse cégétiste, nine pouvait que se réjouir de ce que la ker- O messe démocratique du jeudi 4 décembre ait €t€ finalement gachée pat les incidents, dus excitation de quelques centaines de jeunes gens, lyeéens et LEP. Mais aucun moment, conteai- rement aux fantasmes répandus par divers activis- (cs patisiens, les étudiants n’ont perdu Pinitiative. Surtout pas lors du rassemblement plus ou moins spontané du samedi 6 au soir, dansle quartier Latin, leur quartier. Ona relevé que les étudiants ont fait ce soir-li la preuve de leur esprit civique en restant sur place pour limiter la casse, non tant par action de leur SO alors inexistant que par la pression Un journalists nagias de le 8.8.0: avec I ob)#CUT de bacarnera Dried ‘pertne bene tree per Georges Courtots morale. On notera ici plusieurs choses. D’abord, que le fait de se rendre dans un tel quartier, plutdt qu’aux Halles par exemple (malgcé une tentative de notre part pour cela), montre bien en lui-méme 3 quel point les choses étaient loin détre claires dans Ia téte des gens, tant par rapport aux é:udiants que par rapport aux clichés de 68. Parle simple fait que des pauvres voulant manifester leur colére contre la police soient venusle faire dans ce quattier, dont les étudiants estimaient avoir la responsabilité, ces desniers conservaient initiative : dans la rue, dans hh pensée. De plus, les affiontements ne dépassé- rent pas, de loin, une sorte de violence symboli- que qui participe bien du souvenit-écran de 68. La meilleute preuve en est Ia présence d'une foule indécise qui pouvaitse permettie de rester Ii regar- der. On était bien loin de Ia haine qui souffle dans les rues des quartiers ang! ais les jours d’émeute, et 9 oii les badauds ne se risquent pas ! Quelqu’un a pu tids justement faice remarquer, & propos de cette soirée, que c’était bien la premiére fois qu’il voyait une « émeute » s'arrécer d’elle-méme. Lexcitation qui a entouré les événements de décembre 1986, spécialement aprés le samedi 6, tant 4 Paris que dans d’aurres villes européennes, ne peut se comprendre que comme un fait halluci- natoite social. L'amplification médiatique de la oi rée du 6 au quartier Latin ya largement contribué : Vimage du retour de 68 a ainsi fait le courdu monde en vingt-quatre heures. On peut simplement com- parer I"écho qu’ont cu les incidents relativement mineurs de ce soir-li en Europe avec 'isolement dans lequel sont restées les émeutes répétées des kids anglais, qui eux se sont atcaqués 4 l’ennemi eéel. A Francforr, le dimanche 7, quelques centaines de jeunes (sans doute les mémes qui avaient déji animé les rues 4 'automne 1985) ont semé le désordre en criant « Paris brdle, Francfort s'ennuie », Quand les kids de Tottenham se sone révoltés en octobre 1985, ils n’ont pas cencontré un tel écho et une telle complicité publique en Europe. Pourtant, leurs ennemiis étaient les mémes que ceux des kids de Franefort et de toutes les métcopoles européennes. Alors que toute révolte sociale est étouffée pat l’iso- lement, on voit partout des gens s’exciter sur des événements qui, parce qu’ils ont eu lieu 4 Paris, évoquent immédiatement l'image de Ia contesta tion. A Paris méme, l’excitation absteaite s’est con- sommée dans ces gestes qui ont perdu toute réalité par exemple, cette action dérisoire d’ouvtir la Sor- bonne le vendredi 5 au soir et de lancer un appel grandiloquent aux travailleurs, ou le fait, le lende- main soit, de consteuire des barricades en sachant trés bien qu’elles ne seront pas défendues, pour mimet une situation historique pasée. Dela méme facon, V’inflation de papier imprimé déversé dans la manif du 10 sonne faux. C’est bien le mal fran- ais, cette prétention abstraite 3 la pensée univer- selle. Dans ce pays, fe moc prend la place de la chose. Au moment méme oft régnait ce vicarme triom- phaliste, des faits éraient li qui le démentaient sans phrases. Toutes les déclarations des activistes pari- siens s’effondraient d’elles-mémes aux yeux de qui: conque s’était trouvé le mardi 9 4 La Courneuve, lors de la procession funébre encadrée par les connards de SOS-Racisme et les élus locaux (un jeune Arabe de ka cité s’@tait fait assassiner plusieurs jours avant dans un bat par ua flic en civil). L’atmos- phére qui régnait 1i ne pouvait tromper. De la méme fason, tandis qu'un million de personnes sont descendues dans|a rue contre la mort d'un étu- 10 diant, un malheureux rassemblement oublié de tous avait lieu le mardi 9 pout les victimes des incen- dies racistes du XX*. Mais tour ceci a’est qu'une conséquence extréme de organisation sociale de la « défaillance de la faculté de rencontic » et son cemplacement pat un fait hallucinatoite : la fausse conscience de la ren- contre, « illusion de la rencontre », Dans une ville comme Paris oi personne ne peut plus étre reconnu par les auties, chaque individu devient incapable de reconnaitee sa propre réalité. C’est en ce sens que Je mouvement étudiant 2 pu drainer cette foule sol taire du mercredi 10, dans laquelle se touvaient nombre de gens i la recherche de « quelque chose qu'ils avaient du mala préciser », pour teprendre les termes dune pancarte tenue par un manifestant. Ta reconnaissance entre les pauvres qui sont sor- tis de leur réserve A ce moment n’a existé que comme sentiment ephémére et impuissant, et ceux centre nous qui se trouvaient alors & Paris se sont tenus’ une attitude qui celevait du seul sentiment, de I"émotion. Dans la rue, les mots de bavardage et de rencontre étaient dans toutes les bouches, 2u moment méme oii seul 'ennemi avait I’usage de Ia patole. De la méme maniéte, parmi nous le dia- logue consteuit se révélait défaillant. Nous avons cu alors le grand tort d’alimenter 3 noe maniéce le petit marché parisien du commentaire radical, 1 nous avions su jusque-li nous abstenir de parai- tre, $i étre révolutionnaire, c'est marcherau pas de 1 eéalité, nous avons pris lun sérieux retard : non seulement nous n’avions pas initiative de la pen- sée, mais nous avions cru au contraire que Vennemi Vayait perdue ! Nous nous sommes ainsi rouvés dans une situation critique, qu’ila bien fallu criti quer. Il nous apparut capidement que cette défail- lance ne relevait pas uniquement d’une erreur appréciation des événements. Cette crise interne s'est caractérisée par un affrontement vigoureux entre deux conceptions de notre activité, Ainsi se trouvaient posés les termes du dépassement de cetce part insuffisamment critiquée qui laissait ¢ncore place l'idéalisme subjectif. L’aifaire suit son cours. Décembre 1986 a été aussi une réaction confuse au bruit de bottes qui s’amplifiaic dans Paris depuis le début de l'année (le slogan « Pasqua tertoriste » écaicun retoural’enyoyeur ! Encore fautil rappe- lee que ce flicage avait commencé bien avant, sous le ministee socialiste Joxe, celui-la méme qui avait lancé le projet discret mais redoutable de moder- nisation de la police '). Mais il ne fauc pas non plus oublier que ceux qui protestaient vertueusement contre les exces policiers étaient les mémes qui jetaient des fleurs aux CRS quelques jours avant : les Etudiants. Ces salauds veulent empécher 1a population de traiter les flics en ennemis, et ils y parviennent dans une certaine mesure — jusqu’a ce que la population les considére & leur tour comme d'autres flics. Les éudiants n’ont par exemple aucun moment contesté le plan de carte nationale dlidentité infalsifiable etinformatisable : cela aurait &é contester l’autorité de I’Etat, dans son droit exor- bitant de contrdle sur chaque individu, ce qu’on nie saurait attendre d’érudiants. A’opposé de leurs gémissements, une réaction claire fut Pattaque orga- nisée par les jeunes de La Courneuve le mardi 9 con- tre deux commissariats, en dehors de la procession funébre. Une réaction 3 /’anglaise, sans équivoque. Signalons aussi, & propos des incendies racistes du XX*, que quelques personnes ne se sont pas payées de mots et ont pris une iniciative concréce en ouvrant un grand squatt place de La Réunion, of de nom- breux rescapés ont pu se reloger sans avoir & qué- mander auprés de la maitie. oo Avec le mouvement de décembre 1986, le systéme s'est spectaculairement réconcili€ avec sa jeunesse. Notons aussi que la peétention des étu- diants a jouer le role qui est le leur se voit jusque dans leurattitude enversle reste de la jeunesse sco- larisée qu’ils avaient convige 3 les suivre. Dans la manif du 10, les €tudiants en premier, ouvrant a marche, les lycéens derriére et les LEP en queue : voila pour le prétendu esprit anti-hiérarchique que certains glandus ont cru pouvoir saluer dans ce mou- vement. Les étudiants représentent la jeunesse idéale, civilisée et dépourvue de toute haine : le contraire de cette jeunesse innomable qui n’a d’ave- nir que la prison, la poudre, les TUC, I’usine ou le bureau, et qui constitue encore le péle négatif de la société spectaculaire. C'est & cette jeunesse qu'il appartiendra tét ou tard d’enlever Vinitiative aux étudiants. Il ne s‘agissait donc pas d’étendre le mouvement estudiantin comme le voulaient les 1, Jamais "Etat n'a eatenda gouvemner ce pet parla peur hs a levtsusez piquant de vrrquele miniszre de intérieurqurafait une uti Satog sans pretend a mise en ne terorte ot laoméme un ancien temotiste | Ce pore répurnancest us ancien responsable da SAC, quia un jour declare bien haut que «conte le subverts. fue employer des moyen Solver » comme le faisaient als er amis ds SAC mati en 1981 Conte let Rabitante rebellee de La Cayolle et de aver (vit «Rapport Marsille », Or Congacerm1 a 1), Rappelons quand ame que letsovali sont fae de meme quand ib decraiene ce mine, corame en Ta 7 ance Tatesation des landais de Vicenaes ov le planicage du Rainbow Warr Lasealediffererce ent outs cr slopes, «ext que Fargua defend explatement le principe profane de Etat, one police fete dont arbitaie ‘out puisant ne saurat sulle aucune restectioa « Lademecraties atte oo commence inet de Eat», peutsl de lon pociamer Les @udians deferdaene quanta eux le principe dun dialogue avec Etat et ceux su ‘ui sexetce son auto! activistes parisiens. Au contraire, il est déja bien plaisane de voir comment les militants de SOS- Racisme se font jeter par bien des jeunes immigrés. « “$OS-Racisme, moi je m’en cague, «est cous des gros pédés !””, rage Nourredine, dix-huit ans, qui s’appuie comme cing de ses copains contre une voi- ture en ruines dans une cité qui ne l’est pas moins Deux d’entre eux piquent du nez sous leurs lunet- tes noires : héroine, héroine... “Le Pen-zobi il vient ici, nous on lui fait niquersa mére ! Ons'en fout, ‘on a tous la carte d’identité ! Tu veux qu’j'te mon- tre mon SOS ? Té, me touche pas mon pote !”” Ee il écarte sa veste sur la crosse d'un calibre. Ceux-la Abdel Karim Khali et deus otages, lor: du déart pour Vatropert. non plus on ne les fera pas partir... Si on venait les ‘emmerder, ils ne commenceront pas par les mee- tings... », rapporte un journaliste d’Actuc! dans un article sur « Les guerces de Marseille ». misme politique et la néo-culture dans l'idée démocratique pure. Leur essence est commune. Ia culture a ceci de commun avec la politique qu’elle définic la communication comme partie de Ia vie sociale, comme activité particuligre dans la société. La culture était jadis la communication des riches, elle est désormais démocratisée dans I’ersatz spectaculaire abondant. Tout comme la politique, lle établit Vllusion d’un dialogue dans un systéme social fondé sur le déchirement et la guerre de tous contre tous. La culture est censéc apporter la preuve que la société ext encore humaine. C'est la méme conception réformiste de la communication qu'on tente d’imposer au monde, qui se trouve contenue dans la culture comme dans la politique. En 68, I I n'est pas étonnant de voirse rejoindee le réfor- " le débat fut en partie confisqué par les étudiants qui I’exilérent dans la sphére de la politique et de la culture + la Sorbonne et l’Odéon. La réalité du débat ouvert alors entre les pauvres sur le monde fut condamnée & ester clandestine. Le racket néo- cultutel prit ensuite son essor, et devait prospérer tout pacticuliérement de 1981 4 1986, sous la gau- che. Il feprenait un des slogans les plus débiles de 68, « Ia culture aux travailleurs ». Il fut animé par danciens éeudiants, militants reconvertis. La culture comme sphére ot: pouvait s'exprimer une pensée critique et une recherche dun style de vie est morte, depuis plus de cinquanteans. On ne peuc plus guére parler que de néo-culture, simula- cre de communication, pseudo-style de vie. La néo- culture se veut présenter un modéle de communi- cation « plus complet » quella politique, un mode d’aménagement de la vie quotidienne qui découle aussi de cette critique superficielle de la « politi- que politicienne » — on ena vu un exemple en Ita- lic, apres la défaite du mouvement du printemps 1977, avec apparition d’un racket politico- culturel, Il suffit d’ailleurs de voir quel désert est devenu Paris, pendant que I’Etat en faisait une ville néo-culturelle a coup d’ installations comme Beau- bourg, puis le Zénith, !’Opéra de la Bastille, ete qui ont eu 3 chaque fois une influence psychogéo- graphique désastreuse sur les quartiers environnants envahis par Ia faune de gauche qui y étale son con- formisme sans aucune revenue. Mais la société eéelle n’est pas la société civile lai- que et démocratique théoriquement au-dessus de ‘argent et de tout soupgon, contrairement 3 ce qu’affirment la bourgeoisie et]’Etat, relayés en cela par les €tudiants, qui voudraient nous faite pren- dre une abstraction pour la réalité et la réalité pour une fatalité, LA VIE QUOTIDIENNE EN FRANCE EN 1987 L a société existante s’est montrée capable de digéter les révoltes modernes, d’abord parla répression et la récupération combinées, mais surtout par son propce dynamisme auquel elle pac- vient A intégeer, de gré ou de force, une part tou- jours croissante de I'énergie individuelle de chaque trayailleur. Cette société qui reste toujours fondée sur exploitation du travail est en train de trans- former le rapport du teavailleur a argent. Les épo- ques antérieures au XX° avaient vu la bourgeoisie imposer brutalement la nécessité de V'argent aux pauvres, les transformant en salariés, Ils devaient alors travailler pour assurer leur subsistance, sans autre forme de discours. Ensuite, au sortir de la 12 Seconde Guerre, on leur donna assez d'argent pour qu’ils puissent désormais connaitee la richesse dans ses formes particuliees, les marchandises. Ils se trou- vaient ainsi associés au monde de Ia richesse, du moment qu’on les sollicitait en tant que consom- mateurs, mais entretenaient toujours un rapport de paurres avec l’argent od ils perdaient leurs illusions. Le changement qui est en train de se produire est le suivant : la société prétend introduite le principe de l’activité capitaliste chez les pauvees eux-mémes. Elle se propose de les associer tout simplement 4 la richesse de l’argent, de la méme fagon qu’avee Ja démocratie elle prétend les associer au débat sur le pouvoir. I1s'agit dés lors de faire en sorte que les salar soient saisis leur tour par la fievre capitaliste, rout au moins qu’ils croieae aussi gagner de argent. Le ‘cadre est ainsi le prototype moyen de ce change- ment, puisque la nature méme de soa travail Vaméne a croire qu’il gagne de Vargent : mais il reste un salarié, c’est-d-dire un pauvre. Un pauyre con, puisqu’il se noucrie d’illusions qui le font era- vailler sans cesse plus dur. « Le capital apparait de plus en plus comme une puissance sociafe dont le cadre est le fonctionnaire »*. L’Ametican Way of Life s'impose comme modéle, non plus dans son décor mais dans son principe. Au rapport passif qu’enteetenait le consommateur des 60” avec les marchandisess’ajoute le rapport actif du travailleur motivé pour gagner de l’argent. Pour le pauvre, Pargenta toujours été une aécessité ; pour le bour- geois, l'argent a toujours été une activité. Ce qui était quelque chose de fini pour l'un était quelque chose d’infini pour I’autre. La société veut 4 pré- sent tirer un ait d’union entre les deux. Villusion spécifique engendrée pat la société du spectacle con- siste & faire apparaitre désormais l’argent comme quelque chese d’infini pout le teavailleur lui-méme. « La contrainte qui s’exerce sur le travailleur sala- 18 et la nécessité qui définie tous ses besoins dans Ja méme limite sont ainsi transfigurés dans le lan- gage de Ia société. » (Os Cangacciros n° 2.) Lidéal du capitalisme moderne serait la cadrifi- cation générale des travailleurs dans les métropo- les. Cette tendance Ia plus extréme de la société s’incarne parfaitement en France, oii les conditions les plus propices se trouvent réunies. C'est le pays du monde dont les travailleurs sont actuellement les plus productifs, les moins grévistes et les moins absentéistes (selon des statistiques récentes du BIT ou des rapports d’industriels japonais qui comp- tent y iavestir des capitau), bref les plus motivés 2 Introduction 3k scence de la palicité,)® Noyes I. Les classes moyennes y sont particuli¢re- meatimportantes, et nulle part ailleurs elles ne font monte d’une telle arrogance. On peut dite aussi que Villusion de gagnerde argent ya envahi dja beaucoup de tétes, dans toutes les catégories socia- les. En un mot, c’est un pays américanisé, oii la vie est désespérement privée d’esprit au profit du dyna- misme de la marchandise qui intégre activement les individus — 3 cette différence qu’aux USA une notable partie de la population ne participe pas 4 cette folie et ne cherche pas i s’intégrer a la société civile, ni a s'occuper de la vie politique du pays. Nulle part ailleurs, sinon au Japon, on ne voit l'ato- misation et Visolement a ce point consommés, rclayés, par une organisation technique de la soli- mde. Avec cette diffétence qu’au Japon, seule compte I'entreprise capitaliste : on ne se soucie pas de donner les appacences de l'humanité 3 la vie sociale. La France est au conteaire le pays of I’on produit et consomme les plus grosses quantité de néo-culture, et oii l'on parle le plus de « la com- munication, marché de la fin du sigele ». Dans le spectacle, la prospérité n’est plus quel- que chose de donné, et encore moins de garanti, comme c'était présenté Al’époque des divers « mira. cles économiques », de I’Italie des 60’ au Brésil des 70’. Elle ne peut plus résulter que de l’activité volontaire et soutenue de chacun, qui commande dca finir une bonne fois pour toutes avec cette résis- tance passive qui avait toujours existé dans les usi- nes et les bureaux. Désormais, I'activité frénétique du monde entraine chacun dans son mouvement, bon gré ou mal gré, Chaque individu est sommé de s’engager dans la course. On pourrait faire une ctitique dela vie quotidienne rien que sous angle de cette circulation effrénée a laquelle se raméne Vexistence des gens dans les métropoles capitalis- tes, 4 Paris, New York ou Tokyo. Gagner de l"argent est le but supréme que chacun invoque et auquel il doit impérativement cout sacrifier en vertu du principe que s'il y a beaucoup d’appelés, ily aura peu d’élus. Ne pas consentir ce sacrifice, c'est ris- quer de se retrouver exclu du circuit, autrement dit exclu dans la société, condamné a y survivre en per- pétuel état d’exclusion, Cette participation som- nambulique au rythme exponentiel dela circulation de I'argent exige en plus leffort supplémentaice de suivre l’évolution aceélérée des techniques, de sorte que le travailleur moderne doit sans cesse ggnersa place (« Nous avons vu que les frontitres entre travail et Formation tendraient s’estomper ¢ ce qui est certain, c’est que le licu de travail devra devenie encore plus qu’aujourd'hi mation »*), Le conformisme affiché des étudiants lieu de for- en décembre 1986 exprimait done fidélement la tendance générale de la société : le souci de l'ave- nit professionnel, darracher sa place dans la société au prix d’un Apre labeur, le goat de la réussice, Vintérét motivé, et par-dessus tout cette anxiété qui tonge en permanence ces petits hommes 3 'idé de ne pas y arriver. L’activité sans fin du travailleur moderne va d’ailleurs jusqu’3 commander son usute compléte : i cette différence d’avec le régime tra- ditionnel de I'usine que cette usure n'est plus subic, elle est intériorisée — les médecins appellent ga «le stress » Pour réussir 4 modifier I’attitude des pauvees envers argent, la société doit procéder une remise en valeur du travail sans précédent. Par exemple, un certain type de rapport au travail, qui s'était développé d’abord dans les services (et en particu- lier dans toutes les petites enteeprises liges ala dif- fasion des techniques nouvelles, 4 Vaudiovisuel, 3 a néo-culture) s’est ensuite progresivement étenda A Vindustrie. Ces relations dans le travail sont bases sur le consensus, ’effort yolontaire et l’esprit de compétition. Toute la haine des salariés pour leur travail, qui s'exprimait toujours d’une maniére ou d'une autre, a disparu de la relation collective 3 Ventreprise, au patron : elle 2 &té refoulée. On peut méme dire que la révolee instinctive qui ségnait dans les entreprises s'est trouvée en quelque sorte subli- mée dans l'émulation au travail, au nom de la res- ponsabilité individuelle accrue que l’employeur confiea présent a chacun de ses salariés. Ce proces- sus s'est bien stir développé avec plus de facilité dans Jes PME, mais il 2 atteint depuis quelques années toutes les grosses entreprises. Le changement d’ambiance est évident jusqque dans des boites qui avaient la réputation d’étre plutot agitées. De la sourde hostilité collective envers la direction, on est passé a la dispersion et 4 I’émiettement, au nom del’intérét personnel lui-méme identifié a la éus- site de l'entreprise. L’individualisation croissante dela société s'est ainsi accompagaée d’ un recondi- tionnement moral qui a permis de résorber Ia résis- tance spontanée au travail. L'informatisation, Vautomatisation et Ja robotisation du travail ont accentué cet éclatement, cette atomisation de cha- que travailleur dans son rapport & ses conditi d’exploitation et finalement dans son rapport 3 la nécessité du salaire, On peut noter que les chemi- nots grévistes, en refusant la nouvelle grille des res «au mérite » ont lutté aussi contie ce processus individualisation par Pargent 3. Tendonceslonrdes dans 'rolaion du rave. pat YvesLasareu. Sidentdu Groupe de static ndaseielle du Comma général du plan tur Ta difusion des techn 13 Le despotisme de V'inté&t privé engendce aussi tun paysage de I'isolement. Le pays quia fondé thé riquement le droit de la propriété privée est celui oti chacun vit désormais replié chez soi. Cela fait longtemps déja que |’idéal moyen Ie plus répandu en France se résumait dans le petit pavillon de ban- ligue que !l’on aura fait consteuire 4 crédit. La réali- sation de cet idéal a ainsi produit ces déserts pavillonnaires od régnent l’ennui et le silence en mates absolus. La France est devenue un pays aux rues désertes (¢ Une ville est faite de rencontres », piétend impudemment une éclame de la RATP $ Sortis de leur travail, les gens se réfugient dans leur cellule familiale pour n’en plus sortie ; quant 4 ceux qui se croient autorisés & eraiaer dans les rues, la police est li pour s’en occuper. Les rues sont faites pour circuler, ct seulement pour cisculer. Sans doute illen va de méme dans la plupart des autres pays curopéens. Mais la France est encore le seul pays oii des jeunes se font régulidrement assassiner parce qu'ils font du bruit, Saluons ici la saine réaction de ces adolescents, habitant malgeé eux dans une de ces résidences de la banlieue de Rouen, et qui, pour se venger de l'ambiance lugubre du lieu, entretenue pat les habitants adultes qui leur inter- Patrick Tricot sertavecun orase, te subettet Alain Duroow 4 disaient jusqu’aux jeux de ballon dans la rue, semé- feat la terreus pendant plusieurs mois en y multipliant cambriolages, dépradations, incendies de voitures et menaces de mort (assorties dextor- sion de fonds) dans des letuces signées « la Brigade de Ia haine »4, ‘Au moment of Ia séparation entre les individus est plus forte que jamais dans la société, le cont: le de I’Etat sur ces pauvres créatures atomisées se fait plus omniprésent. L’Etat est parvenu au som- met de sa toute-puissance technique — c'est le regne de Big Brother, autcement dic la céalisation du monde que Orwell décrivait par avance dans 1984. L’essor de l'informatique et son emprise sur tous les aspects de la vie montre que nous sommes soumis au régime de “isolation contrOlée. Les rava- ges commis dans les 60” par la TV sont amplifiés avec la micro-informatique qui permet 3 chacun de rester chez soi tout en ayant illusion de parler 4 quelqu’un. Rappelons que les Minitel ont été d’abord distribués gratuitement par les PTT ; cela n’est pas sans analogie avec d'autres pays comme la Pologne, oi s’il faut faire la queue pour se pro- curer de la nourriture, par contre toutes les famil- les polonaises sont pourvues depuis longtemps d’un poste TY afin qu’elles puissent recevoir les discours officiels. Avec la distcibution gratuite des Minitel, il s’agit pour I’Etat francais d’assurer 3 chacun de ses administeés sa petite branlerte télématique. Tout aspect de la vie se trouve placé, d'une maniéte oud’une autre, sous contrdle. Que ce soit pour louer un appartement ou obtenir une « aide sociale », individu est tenu de fournir une quan- tité innombrable de justificatifs. Il vit en fait dans la position d’avoir & tout instant & justifier sa pro- pre existence, aux yeux de ceux qui disposent du pouvoir social et plus couramment encore aux yeux de la police. Celui qui n’est pas répertorié sur un fichier n’existe done pas, méme s'il ade l’argent. IL n’a pas d’cxistence civile recensée, il n’est done rien, La mise en place de Ia nouvelle carte natio- nale d'identité, avec un répertoire informatisé des 4. « Pour commencer année en beaut. la Brigade de a hain vous fe, avechaive. ce feud arfice et yout sauhate une ann: de tere. de baine de chavs. Pour 1987, elle sige lereaix pr et simple de pte: aleve st quechegee risen cous stars de parton bt de thaae. Le paiement d'unimpéc reedudoonaite d'un peuple de gas ‘he ec des lcencies de a petrohimic. Pout ce fie, vous tous deporte, ‘ous vure belted lees, une emeleppeconteantcing mile francs en que, le 2baei detec delat Now rsmassetensvoscantabutions2 alte rok lutienae inteeaatiorale le sit qui nous par, «ited n'imperte quel jour, Sicelaes fat voas tee jamats protégé de rout cambriolage, Novs fous attquetonsa d atts parillos Sinan os eros exploser une ma sonauphsticen guise d'utime avertisement. puisnous paseronsaux en ements aux tortures et 3 extermination dans a oi la bone humest des Armes sence. Pos, at le sons des indiateus ches eax, poldtaes de ous les pays unser vous argent bijou, ares empreintes digitales, signifie un bond spectaculaire dans ce fichage (notons ailleurs que ce plan n’a pu se mettre en place qu’avec la caution démocra- tique des salopes de la Commission nationale «Informatique et Liberté », qui ont en particulier donné leur aval 3 cette mise en fiches sans précé- dene des empreintes digitales : on voit bien la ratio- nalité ultime du discours démocrate dans cette tarufferie). Jamais I’Etat n’avait 3 ce point ouver- tement prétendu 3 ce que rien ni personne ne puisse lui échapper. Les réves de I’Etat sont nos cauche- mars. Cette prétention au contréle absolu, que Etat prétend exercer au nom de la société et de tous ceux qui sont acquis 4 son principe, ne ren- contre ici pas fa moindre velleite de protestation. Mémeen RFA, pays jusqu’ici soumis 4 un quadril- lage complet dans la grande tradition du militarisme prussien, on voit surgic un vaste mouvement de révolte contre aceroissement du contrdle étatique. Le projet de carte d’identité informatisée y suscite dé une vague de refus, & tel point qu’en certai- nes provinces les élus de gauche ont été obligés, sous Ih pression des gens, A annoneer qu’ils refusaient de la délivrer. Plus encore, le recensement — qui acompagne nécessairement la mise en place de ce dispositif — provoque une révolte générale : des agents recenseurs sont agressés, et & deux reprises en mai la ville de Berlin a été le théétre de violen- tes émeutes sur cette question. En particulier une tentative de perquisition au siége d’une association qui lutte contre le recensement, dans le quartier de Kreuzberg, a provoqué une vigoureuse riposte des habitants : flies blessés par dizaines, banques et supermarchés incendiés, ete. En France, l’atomi- sation est telle qu’il n’y a méme pas de résistance au despotisme de I'Etat, et d’autant moins qu'il se trouve justifié au nom des principes démocra- tiques. LA DOMESTICATION INFORMATIQUE branle une stratégie sociale improprement conaue sous le nom de « révolution indus- tielle », qui consista & autonomiser la sphére du travail pour la placer au centre de la vie sociale. Le Jong cycle commencé alors est en train de s’ache- ver :aujourd’hui, le ezaval s'est emparé de I'ensem- ble de fa vie sociale, et peut virtuellement cesser d’exister en tant que sphére autonome. Tel est le sensde la « nouvelle révolution industrielle » dont ‘on nous rebat les orcilles. Il y a deux sigcles, Vimplantation des usines avait été le moyen de cette LI: y a deux sicles, la bourgeoisie mettait en Toujours enchaind av président Beitheche. Georges Courtols tire ‘on duwetion des fournatstes stratégie, aujourd’hui c’est l’informatisation de la société. L'informatique avait d’abord eu comme fonction de rationaliser le conteéle, la gestion et le flicage (et cette fonction s’accroit toujours, évidem- ment). Aujourd’hui, son rdle s'est €tendu : 3 la fois util de travail généralisé et marchandise de pointe, le mico-ordinateur permet au cravail ec & la con- sommation de se fondre dans une pseudo-activité commune. C’est sur la méme machine que l’esclave moderne travaille, progeamme ses losis, fait ses achats 2 distance *. Ce retour apparent au travail domestique qui caractérisait &ce préindustrielle ta duit au contraire que désormais la totalité de la vie sociale a été domestiquée par le travail. Hy a vinge ans déji, les situationnistes relevaient que « les loi sirs travaillent >. Mais nul n’auraic alors pu imagi ner que ce constat s"appliquerait 4 des choses aussi simples que le fait d’adresser la parole & un qui- dam dans un bar, ou d’aborder une inconnue dans 95. est deta techoiquemen: possible de faite en sere que es pave 1 ier pluy besoin de somurde chez eur. Newors Ace sujet le deveie com ‘mum de organisation de'explotation et de celle de a eptesion Tappa tition des pasonsmodernes sat coneemporaine de la penetalsation des ssines :avjourd'hut.ceraies Ets USen sone « supper» lex prsone eat fon "en franc ane d¢bnquants un «boule Alston Ja rue. Aujourd’hui que régnent un froid isolement dans les bars et une sourde terreur dans les rues, le Minitel est venu s'imposer comme la m nécessaire aux petits hommes pour échanger des mots toujours plus vides. Dans le deuxiéme tiets du XX+ side, la bour- geoisie avait mis 'abondance marchande 3 la por- tée des pauvees, ce qui est 13 aussi improprement connu comme « deuxiéme révolution industrielle ». Dés loss, le salaie octroyé aux esclaves ne devait plus seulement permettre di ceux-ci de se maintenir en état de survie, mais encore d’acheter toujours plus de marchandises. Aujourd’hui, avecla « troisiéme révolution industrielle >, laméme question se pose & propos du temps de travail : le « cemps libre » alloué aux esclaves n’a plus seulement pour fonc- tion de permetice la reproduction de leur force de travail, mais surtout de leur laisser le temps néces- saire 4 la consommation de nouvelles marchandi- ses. Cette question est de plus en plus cruciale, notamment au Japon qui, ayant atteint quasiment Ia limite de la conquéte des marchés étrangers, doit maintenant développer son marché intérieur : les industricls aippons, qui avaicnt fondé leur pros- périté sur la quanticé effarante de travail fournie par Icurs salariés, se rendent compte aujourd’hui que cette prospérité se verra compromise s’ils ne réduisent pas le temps de travail pour leur permet- tte de devenir eux aussi des consommateurs 3 part entiére. iation Le temps libre » est désormais totalement colo- nisé par la logique de la marchandise. Et celle-ci exige de plus en plus que ses esclaves s'y invests. sent : alors que la TV sécrétait des spectateurs pas- sifs, V ordinateur est fait pour qu’on le « bidouille » a longueur de temps. Cette nouvelle forme d’acti- vied qui est exigée des pauvees tant dans leur tra- vail que dans leur consommation est dépouillée de toute forme sensible, elle est de plus en plus abs- traite. Un dénommé Lasfargue, grand larbin d’Erat, écrivait récemment que le travail était en voie de devenic de plus en plus communicationnel et abs- trait, Chacun travaillera sur des représentations de Ja séalité, La sectétaire travaillera sur une représen- tation de la lettre et non plus sur la lettre. L’ouvrier travaillera sur la repsésentation sur écran de la pidce usinée, ete. La monnaie électronique (monétique) va dans le méme sens », Le néo-réformisme est I’expression dans la pen- sée de ce mouvement vers ‘abstraction généralisée : de méme qu’avec ka monétique l'acgent se passe de sa forme tangible pour retourner vers sa subs- tance, de méme les vieilles barriéres politiques 16 s’effacent devant essence qui leur est commune, Vesprit du droit et de la démocratie. Et c'est a la méme force sociale qu’il revient de propager l’abs- traction ; les éudiants dans la pensée, les cadres dans le travail et la consommation (si tous les écu- diants ne deviendront pas des cadres, tousles cadres sont d’anciens étudiants). Nocons par illeuts que dans tous ces domaines, la France est devenue le premier pays producteur d’abstraction — elle en exporte méme ! C’est le berceau du Minitel, de la carte & puce et de SOS-Racisme. Leméme Lasfargue poursuit : « Une grande par- tie des individus acceptera cette Evolution sans pro- bléme particulier. Mais ne risque-t-on pas de créer des “‘exclus del’abstraction’’, c’est-A-dice des per- sonnes ne pouvant, soit par profil personnel soit par culture, supporter I’abstraction généralisée ? » Cer- tes, nombre de gens, dont nous sommes, n'ont pas le « profil » suftisamment bas pour supporter une telle horreur. Mais ce que les Lasfargue tentent ainsi dexorciser, c'est le négatif qui surgica immanqua- blement au cceur méme de ‘abstraction :1ioit l'on fait miroiter des individus toujours plus atomisés tune communication inacessible 6 Lasfargue signale le point faible de ce nouveau systéme : « On passera dans les vingt ans, divil, de 6. Les indidus sone toujours plus abit dans a sci cle, issavent Quilsdeivent beaucoup wavaile pour rejindre dans une enson inhumane lacoutbe d abstaction du capital. Cee enon ec leurtraval. Leu avail cestcete tension. Le adie ne dox jamais 'arrter, ia peur duvide. lest ‘evindivid aba qui dot cote pour wit. defintivement slate, aa plat pour interlouner que von nupcushideahique dani eve le ignet fextéreure de richene +t qui avert le plas souvent qu'un simple ordiniest Lids Pant Altch,cepropoed an Francie rstant e eavalare av Japon « Onboie top, 1ptead Franois, cet le veul moyen de combate less ‘deeper ko problimes de wari mces00 sepdcut i emake C'est cnmmancation 01, e4 japutas, bout se dit "oom". Cela» xo ‘du un nouveau mot ets ule + “nomuniation” > la civilisation de la peine (travaux physiques 4 effee- wer) 3 la civilisation de la panne, of les principaux travaux seront de surveillance, de maintenance, de diagnostic et de dépannage. » Le risque, poursuit il, est d’en artiver & la « civilisation » de la catas- trophe, économique ou humaine, et il cite V'appui les précédents de Bhopal et Tehernobyl ! La seule alternative a cet avenir radieux (et irradié) passe iné- vitablement selon lui par un ¢ traitement social » approprié, permertant la motivation et l’implica- tion des salariés, « Les changements technologiques s‘accompagneton¢ obligatoirement de changements dans les rapports sociaux. Sinon ils risquent de pro- voquer des rejets massifs, et ces rejets scraicnt dra- matiques pour la modernisation de notre pays. » Il précise encore qu’il est « ués difficile d’exercer un contrdle hiérarchique sur les opérateurs de machines automatiques ». Déja un nombre cn sant de sabotages et de détournements viennent perturber la mise en place de ce dispositif (on en lira quelques exemples en annexe). Ce n’est pas la moindre ignominie de l’époque que ce tapage incessant, célébrant l’avénement de «Pre de la communication ». On aurait tore cepen- dant de ne voir 1i qu’une antiphrase : les petits hommes sont effectivement les instruments dune communication qui leur est totalement extérieure. Voila qui n’est pas nouveau, mais désormais il suf- fit de pianoter sur un petie clavier pour voir cette communication s’effectuer — d’oii la fascination qu'exercent de tels objets, notamment sur les enfants: ce monde est devenu visiblement magique. principe devient connaissable. Le concept de P lus ce monde devient invivable et plus son spectacle est encore plus intelligible qu’il y avingt ans, Ce a’est done pas seulement paemi ceux qui se uouvent rejetés a la périphérie de la sociécé mais aussi bien parmi ceux qui se trouvent en son centre que pourra étre formulé, plus explicitement qu’en 1968, le programme révolutionnaite : ins- ‘aurer la communication sociale, La possibilité pour les pauvres d’accéder aux mia chandises avait semblé consacrer la victoire du vieux mensonge matérialiste selon lequel la richesse con- sistait en biens matériels. Mais ce fut en fait sa déroute : aspiration des pauvies a la richesse se trouvait toujours aussi conteariée, et leur existence toujours aussi pauvre et décevante. La révolte de 1968 fut a la fois le démenti du mensonge macé- rialiste sue la richesse et une protestation contre ignorance dans laquelle chacun était tenu quant 4 lia véritable nature de la richesse. Depuis, I'ennemi a été contraint de moderniser son mensonge, en méme temps que la logique de la marchandise s‘intensifiait toujours plus. Le monde se charge ainsi de nous apprendre que kt richesse consiste en une activité : mais Vesprit de ceite activité échappe toujours plus aux pauvres, il ne leur reste que le travail. Le nouveau mensonge reyient 4 démocratiser l’accés des pauvtes 2 cette activité, c'est-A-dice en fait a les faire travailler tou- jours plus. La spiritualité abstraite de la matchandise pré- tend annexer absolument toute activité 4 son prin- cipe, La vie en est devenue irtespirable sur toute a plandte. A force d’étee confronté 4 cette spiri- tualié abstraite du monde, les pauvres vont finit pat y reconnaitre Ja cause unique de leut misére. Notes résultane d’un débat collectif. Mise en forme définitive ascurée par Yves Delhoysie et Léopold Roc.

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