www.associationmodeemploi.

fr
N°
ploi a 20 ans
Associations mode d’em

20 ans d’association,
20 ans d’action
# bénévolat

# loi 1901
Prix au n° : 12 euros TTC • n° ISSN : 1291-7826

# association

n° 200 • Juin-Juillet 2018

www.associationmodeemploi.fr SOMMAIRE
N°
Jean-Louis Laville : « Les associations actrices
loi a 20 ans
invisibles du changement ».................................................................... 5 Associations mode d’emp

59
propositions
pour une société En Europe, les associations
de l’engagement .............. 6
cherchent encore leur place............................................................18
Les associations, combien de divisions ?............22
Une révolution fiscale qui n’est pas terminée....10
L’accompagnement
Les associations associatif vit
tentent de sa révolution 24 ........

s’adapter à
la baisse des
subventions 12 ...................
Emploi associatif : la fin d’une spécificité............26

État-associations : une indépendance Les habits neufs

toute relative...............................................................................................................14 de l’engagement associatif...............................................................28

Associations L’engagement
et collectivités : associatif
je t’aime prend un coup
moi non plus 16 ........ de jeune 30 .................................

Et aussi : Infographie : 20 ans en chiffres........................................................................ 4

Quiz : 20 ans de vie associative en 20 questions............ 8
20 couvertures pour 20 ans....................................................................................32

COMITÉ DE RÉDACTION : Mensuel édité par Territorial

Experts-comptables/Commissaires
aux comptes
• Frédéric Dintras, Sarl Secal,
Limoges
• Gérard Lejeune, Euro compta
finance, Ste-Geneviève-des-Bois
• Damien Potdevin, JPA Associations
• Malik Tine, Alliance Expert Paris
• Camille Viltart-Lamy, Augefi, Paris
Avocats
• Cécile Chassefeire, et Adeline
Beaumunier, cabinet Camino et
associés, Sucy-en-Brie
• Colas Amblard, Avocat,
NPSConsulting, Lyon
• Eric Landot, Landot & associés,
Paris
• Xavier Delsol, Cabinet Delsol
Avocats
Maisons des associations
• Grégory Autier, directeur de S3A
• Marie-Pierre Berut, Sport Emploi
Animation 74, profession sport,
PAVA et CRIB de Haute-Savoie
• Christian Cascio, directeur
du Carrefour des associations
parisiennes
• Thomas Bilanges, Carrefour des
associations parisiennes
• Fabienne Orban, Maison des
associations de Strasbourg
• Claude Rogeaux et Alain Détolle,
Maison interassociative de
Millevaches (MIAM)
Structures d’accompagnement
• Luc Jambois, Strasbourg
• Claire Marenco, directrice du
centre culturel de Cagnes-sur-mer
• Lucile Manoury, l’Atelier, Oppède
• Claudia Zi Miou Sie et Suzel
Chassefeire, Chambre des
associations, Saint-Maur-des-
Fossés
• Philippe Gril, CLAP Midi-Pyrénées
Organismes partenaires ou
représentatifs des associations
• Yannick Blanc
• Patrick Bertrand, Passerelle &
compétences, Paris
• Guillaume Chocteau
• Laurent Costy, April
• Carole Orchampt, déléguée
générale du RNMA
• Sylvain Rigaud et Paul Bucau, SAS au capital de 1 259 907 euros Responsable de diffusion : Valérie Friedel
RNMA Siège social : Antony Parc 2 – 10 place Publicité : Gilles Dubois, directeur de
•P  hilippe Eynaud, CNAM & IAE- du Général de Gaulle – La Croix de Berny clientèle, 01 79 06 79 67 ou 06 67 15 78 67
Université Paris 1 BP 20156 – 92186 Antony Cedex Vente par abonnement :
•E  mmanuelle Maudet, France Bureaux : Espace Cévé, 58, cours Becquart
Active, Paris • Abonnement personnel ou abonnement
Castelbon, 38 500 Voiron
•A  nna Fontaine, Avise, Paris associatif : (1 an soit 10 nos) : 79 e TTC/an ou
RCS NANTERRE 404 926 958 - N° SIRET : prélèvement automatique : 6,65 e TTC/mois
•M  arion Boinot, Mouvement 404 926 958 00020 - Code APE : 5813Z -
associatif, Paris (sur 12 mois),
•C  éline Fiorentino, Crédit N° TVA intracommunautaire : FR 28 404
•A bonnement administratif : 115 e TTC/an ;
coopératif, Paris 926 958
• Prix au numéro : 12 e TTC
•M  arc Genève, Fonda, Paris Commission paritaire : 0918 T 78440
Tél. abonnements : 04 76 65 93 78
•E  va Camps, Cofac, Paris ISSN : 1291-7826 - Dépôt légal : à parution
Fax : 04 76 05 01 63
•D  ominique Thierry, France Site internet : www.associationmodeemploi.fr
Bénévolat, Paris e-mail : info@ame1901.fr abonnement@territorial.fr
Impression : Imprimerie du Pont de Claix
•L  ouise Lefevre Associé principal : Info Services Holding
ZAE Les Bauches - 38640 Claix
• Julien Dubois, Animafac Présidente et directrice de publication :
Isabelle André Origine du papier : Allemagne. Ce papier
Rédacteurs
• Yannick Dubois, Bourghelles (59) Directeur des rédactions : Guillaume Doyen provient de forêts gérées durablement
•D  idier Barthel, Besançon et ne contient pas de fibres recyclées.
Directeur de la rédaction : Laurent Thoviste
•A  ntonio Garcia Certification : Impact sur l’eau (P tot) :
Tél. : 04 76 65 77 78
•H  enri Busnel, trésorier 0,016 kg/tonne
Rédaction en chef : La Navette
d’association, Rennes Crédit photo couverture : ©hurca.com/
Secrétaire de rédaction : Annie Lozac’h-Menez
• Magali Robert, Paris AdobeStock
Maquette : Xavier Pau
• Vanina Roques Assistante de rédaction : Marie-Aurélie Colpin Encarts jetés : mailings DA168949,
• Philippe
 Villette, Hautes-Pyrénées
Chef de fabrication : Hervé Charras DB168949, DC168949 aux prospects
• L’équipe
 de la Navette,
Faux la Montagne (23) Directeur diffusion : Guillaume de Corbière catalogue C01A03 aux abonnés et prospects

Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 3

ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

20 en chiffre
asns
En 20 ans, le dynamisme de la vie associative ne s’est pas ralenti au contraire…
1998 Toujours plus … Et de salariés et bénévoles Des budgets en hausse malgré
d’associations… pour les faire vivre une baisse des subventions
De nos
jours Nombre d’associations Nombre de salariés Budget cumulé
en France associatifs des associations

880 000 1 MILLION 47 Mde

380 000
1 MILLION 1 MILLION 85 Mde
300 000 853 000
Part des ressources publiques
Nombre d’associations Nombre de bénévoles dans les budgets associatifs
créées dans l’année scolaire associatifs
54 %
60 000 10,5 MILLIONS 49 %
Part des ressources privées
dans les budgets associatifs

73 000 46 %
13 MILLIONS
51 %
La mention « de nos jours » fait référence à la dernière année de référence connue qui peut remonter à un ou deux ans en arrièrre
selon les données disponibles.

4 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


Les associations,
actrices invisibles
du changement
DR
D
epuis une vingtaine d’années, il est un
phénomène mondial : c’est l’essor considé-
rable des initiatives citoyennes, ce que je
nomme l’associationisme. À chaque fois qu’on se
rend sur un territoire, on est étonné du nombre
de choses qui s’y passent et qui, bien souvent,
permettent à la société de « tenir ». Au-delà des
statuts juridiques (même si le statut associatif
en est une manifestation très nette), l’associatio-
nisme est cette capacité de chacun et chacune de
se lier à d’autres pour réaliser ensemble un objec-
tif commun.
Ce regain de l’associationisme est pourtant peu
perceptible et presque invisible. Il y a à cela
d’abord une raison historique. Né au début du
XIXe siècle, l’associationisme a été ostracisé à la
fois par le courant libéral qui y a vu un mouve-
ment naïf et sans importance et par le courant
marxiste qui l’a jugé « utopique » et immature.
Tout le XXe siècle a vécu sur cette vision des choses
où, hors du capitalisme marchand pour les uns,
ou de l’État social pour les autres, il n’y avait pas
d’autre voix. Il nous faut donc d’abord retrou-
ver cette mémoire, réhabiliter cette pensée de la
transition plutôt que de la rupture, cette volonté
d’aller, non vers une société parfaite, mais vers
une société meilleure. L’autre raison est liée au
modèle néolibéral qui réduit l’association à une
forme d’entreprise qu’il faudrait « professionnali-
ser », qui aimerait que les associations deviennent
des entreprises (presque) comme les autres mais
avec un but social.
Ces dilemmes, nous les retrouvons dans chaque
association : bureaucratisation ou délibération ;
adaptation aux normes ou recherche d’une dimen-
sion politique au cœur du projet associatif. Pour
ne pas passer d’une dépendance aux financements
publics à une dépendance aux financements pri-
vés, les associations doivent activer leurs res-
sorts propres : bénévolat, volontariat. Mais elles
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
doivent aussi s’affirmer comme des lieux d’expé-
rimentation de nouvelles façons de faire dans l’es-
pace public ; afficher le sens de leurs actions en
faveur d’une société qui ne soit pas gouvernée par
l’uniformisation ; faire vivre les différences dans
une égalité entre les personnes. Des défis aux-
quels elles se sont déjà confrontées au cours de
ces vingt dernières années – ce numéro anniver-
saire d’Associations mode d’emploi en témoigne
– et qui, n’en doutons pas, continuent à se dres-
ser devant elles.
Jean-Louis Laville
Professeur du Cnam, auteur de « La gouvernance des
associations » (Érès, 2013), « Associations et action
publique » (Desclée de Brouwer, 2015), « L’économie
sociale et solidaire » (Le Seuil, 2016), « L’association,
sociologie et économie » (Pluriel, nouvelle édition 2018).
UN NUMÉRO SPÉCIAL
POUR QUOI FAIRE ?
Depuis vingt ans, Associations mode
d’emploi, dont le premier numéro est
sorti en même temps que la nouvelle
instruction fiscale (un pur hasard, nous
avions dû refaire le n° 1 dans l’urgence),
accompagne les associations et leurs
partenaires publics pour les aider à
comprendre les évolutions de la vie
associative et ainsi mieux faire face à
ces changements. Informer, remettre
en perspective, militer pour que la vie
associative soit pleinement reconnue est
la mission que nous nous sommes fixée.
Dans ce numéro anniversaire, nous avons
voulu mettre en évidence les points qui
nous ont paru les plus importants. Non
pas pour regarder derrière nous, mais
pour, comme le dit Jean-Louis Laville,
vous aider à affronter les mutations à
venir. Plus qu’un numéro de collection,
c’est donc avant tout un outil de travail et
de réflexion. Bonne lecture.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 5
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

59 propositions
pour une société de l’engagement
Après des débuts difficiles, la
concertation lancée par le Premier
ministre en novembre 2017 a
débouché le 8 juin sur la remise
d’un rapport du Mouvement
associatif « Pour une politique
de vie associative ambitieuse et
le développement d’une société
de l’engagement ». La balle est
maintenant dans le camp
du gouvernement.

C
ela avait mal commencé. Lorsqu’il
©Mouvement associatif

y a un an le gouvernement
d’Édouard Philippe était consti-
tué, certains avaient été déçus de voir la
vie associative sans ministère ou secréta-
riat d’État spécifique. Puis est venue cette
série de décisions qui, sans viser direc-
tement les associations, les ont néan-
moins cruellement impactées : baisse des
emplois aidés, fin de la réserve parlemen-
taire, suppression de l’ISF.
Signal négatif
Un an plus tard, les choses se sont-elles
améliorées ? Oui et non. Commençons
par le non. Il est parfaitement illustré
par une tribune (1) signée par d’émi-
nents responsables associatifs – et pas
spécialement des adeptes de la contes-
tation permanente – qui n’y vont pas
de main morte : « Le secteur associatif
a le sentiment de ne plus être reconnu
comme un interlocuteur naturel du gou-
vernement dans l’élaboration des poli-
tiques publiques […] La liste est longue
des sujets sur lesquels les associations
n’ont pas été écoutées par les pouvoirs
publics avant que soient prises des déci-
sions majeures […] C’est un signal néga-
tif pour les associations. »
Remise du rapport du Mouvement associatif au Premier ministre, le 8 juin dernier.
De gauche à droite : Philippe Jahshan, président du Mouvement associatif,
Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, Édouard Philippe, Premier ministre
et Jean-Christophe Itier, Haut-commissaire à l’ESS et à l’innovation sociale.
Une restitution des trois groupes de tra-
Les représentants vail mis en place en novembre 2017 a eu
du monde associatif lieu le 27 février dernier en présence de
Jean-Michel Blanquer et Christophe Itier.
reconnaissent une qualité Sans crier victoire, les représentants du
d’écoute qui, espèrent-ils, monde associatif reconnaissent une qua-
se traduira bientôt lité d’écoute qui, espèrent-ils, se traduira
en décisions. bientôt en décisions.
130 contributions
Volonté de faire La dernière étape de cette concertation a
Pourtant, « dans le même temps », le gou- eu lieu le 8 juin à Toulouse. Philippe Jahs-
vernement a enclenché une dynamique han, président du Mouvement associatif,
de concertation avec les acteurs associa- a remis à Édouard Philippe un copieux
tifs en mettant en place des groupes de rapport, issu d’un travail véritablement
travail « de co-construction de la poli- collectif (2). 113 participants réunis sous
tique associative du gouvernement­ ». la houlette du Mouvement associatif ont
C’était reconnaître que celle-ci n’existait produit quelque 130 contributions qui
pas vraiment, mais c’était aussi afficher débouchent sur 59 propositions. Celles-
une volonté de faire avec les associations. ci s’organisent en trois grandes théma-

6 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


tiques : faire vivre les potentialités de la
loi 1901 ; bâtir une politique de dévelop-
pement, de soutien et de reconnaissance
de la vie associative ; faciliter la mission
d’intérêt général des associations.
Effort de synthèse
Si l’on ne trouve pas vraiment d’idées
nouvelles dans ce rapport qui reprend
au contraire des thématiques récurrentes
déjà bien labourées, c’est justement là
toute sa force. On sent un effort de syn-
thèse pour couvrir l’ensemble des préoc-
cupations des associations. On ne sera
donc pas étonné de relever 13 propo-
sitions autour de l’engagement, un des
maîtres mots du rapport, 8 autour de la
meilleure connaissance du secteur, 11
autour de la non-lucrativité ou 13 autour
du financement. On notera ainsi l’idée
président du Mouv
Témoin PH IL IPPE JAHSHAN,
©Mouvement associatif
« Les associations sont un contre-pouvoir indispensable pour
notre démocratie »
Quel bilan faites-vous
de la concertation avec
le Gouvernement ?
Mis à part le temps court, la méthode
de travail et de concertation a été saluée.
Elle a créé un lieu d’interconnaissance, de
dialogue et de réflexion partagée entre les
associations et les pouvoirs publics dans
une dimension interministérielle. Elle a
permis de dégager des axes pour nourrir
une stratégie complète de développement
de la vie associative. Nous avons à présent
un cadre légitime sur lequel il est possible
d’asseoir une politique publique. Il s’agit de
ne pas décevoir et d’y donner suite.
de créer un dispositif d’aide aux associa-
tions en difficulté (proposition n° 43), de
permettre aux associations manquant de
fonds propres de bénéficier de garanties
d’emprunts de l’État (n° 44), de créer un
fonds d’avance de trésorerie permettant
des avances remboursables pour lancer
des projets sur financements européens
(n° 45) ou de donner aux associations la
possibilité de conserver leurs excédents,
y compris pour les secteurs « tarifés » du
médico-social (n° 50).
Portrait du secteur
Sans surprise, le rapport insiste sur la
nécessité d’instaurer une politique spé-
cifique de l’emploi associatif (n° 56) et
réclame une augmentation « significa-
tive » des moyens alloués au Fonds de
développement de la vie associative
ement associat if
Qu’attendez-vous
en particulier ?
Nous attendons bien sûr des réponses
aux 59 propositions formulées, mais
aussi et surtout que ce rapport nourrisse
une politique pour le quinquennat et
permette de lancer différents chantiers
plus structurants sur des sujets clé pour
la vie associative, comme les leviers de
développement, l’accompagnement
et le renforcement des associations,
l’évaluation, le soutien à l’engagement, la
simplification administrative ou encore
l’expérimentation de la co-construction
dans les territoires. Nous attendons
aussi des mesures plus immédiates qui
peuvent trouver une traduction rapide
dans l’exécution budgétaire à venir. Il y
a, notamment pour les associations les
plus fragiles, des besoins urgents pour
retrouver des marges pour le soutien à
leurs projets, à leur développement, ou
à la stabilisation de leurs emplois.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
(n° 24). Pour faciliter l’accès aux marchés
publics il suggère de généraliser le prin-
cipe d’allotissement qui permet la décom-
position d’un marché en lots (n° 22).
Deux propositions enfin sont dédiées à la
liberté associative (n° 14 et n° 15). L’une
d’elles exige une « protection des associa-
tions face aux procédures baillons qui leur
sont intentées par certaines entreprises
pour intimider, limiter la liberté d’expres-
sion, et dissuader de s’exprimer dans des
débats publics. » Un véritable portrait du
secteur, de ses inquiétudes et de ses dif-
ficultés. Reste à savoir comment le gou-
vernement y répondra.
Michel Lulek
(1) bit.ly/2FJWCCb
(2) bit.ly/2l0hE7H
Le pari d’une « gouvernance
confiante, partenariale
et ouverte » avec le
gouvernement est-il réaliste ?
Le 9 novembre dernier, le Premier
ministre nous a qualifiés de « cousins »
des élus politiques. Ce qualificatif reflète
assez bien ce qui anime avant toute chose
un engagé associatif : l’exercice plein de
sa citoyenneté dans le cadre que permet
la grande loi de liberté qu’est la loi 1901.
Les associations jouent un rôle de contre-
pouvoir indispensable qu’il est essentiel
de protéger. Partout dans le monde, le
recul démocratique commence toujours
par la restriction du droit d’association et
de l’espace de la société civile. Le dialogue
civil est forcément exigeant, mais une
grande démocratie se grandit toujours à
respecter et nourrir cette vitalité critique
en son sein, avec ses convergences et ses
controverses.
7
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Quiz : 20 ans de vie

1 • Au cours des 20 dernières années, 7 • La Conférence des organisations
en moyenne, combien d’associations internationales non gouvernementales
se sont-elles créées chaque année en (Coing), instance de participation
France ? des associations auprès du Conseil
o 7 000 de l’Europe, réunit :
o 70 000 o 320 ONG internationales
o 140 000 o 1 représentant des ONG par pays européen
(réponse page 23) o 6 000 ONG ou associations loi 1901
(réponse page 20)
2 • Sur le 1,3 million d’associations en
France, combien sont-elles représentées 8 • Le crowdfunding
au sein du « Mouvement associatif »  ? est possible :
o 130 000 o uniquement aux associations reconnues
o 300 000 d’utilité publique
o 600 000 o aux associations caritatives
(réponse page 23) o à toutes les associations, quelle que soit
leur taille
3 • En 2017, la loi a établi la liberté (réponse page 13)
d’association sans accord parental
préalable à partir de : 9 • L’agrément Esus, entreprise
o 14 ans solidaire d’utilité sociale, permet
o 15 ans aux associations :
o 16 ans o de mener des actions de solidarité
(réponse page 30) internationale
o de bénéficier des outils de la finance solidaire
4 • Au cours des dernières années, o de pouvoir émettre des reçus de dons
le bénévolat associatif : (réponse page 12)
o a largement diminué
o est resté stable avec un difficile 10 • En 20 ans,
renouvellement l’emploi dans les associations :
o n’a pas cessé d’augmenter o a baissé de 150 000 emplois
(réponse page 29) o a augmenté de 150 000 emplois
o a augmenté de 450 000 emplois
5 • On estime qu’en France, est bénévole (réponse page 26)
dans une association :
o 1 Français sur 10 11 • Dans le milieu associatif,
o 1 Français sur 4 les emplois en CDI représentent :
o 1 Français sur 2 o 82 % de l’emploi
(réponse page 29) o 53 % de l’emploi
o 24 % de l’emploi
6 • Le statut d’association européenne (réponse page 27)
valable dans l’ensemble de l’Union
européenne : 12 • Les DLA ont été créés pour :
o existe depuis le traité de Rome (1957) o aider les associations à pérenniser
o existe depuis le traité de Lisbonne (2009) leurs emplois
o n’existe toujours pas o transformer les associations en entreprises
(réponse page 21) o soutenir financièrement des manifestations
culturelles
(réponse page 25)

8 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018

 N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp

associative en 20 questions
13 • Que signifie l’acronyme OPCA ? 19 • Depuis la loi Notre,
o Organisation participative des conseils les communes sont toutes regroupées
d’administration en intercommunalités et :
o Organisme public constitué en association o ne peuvent plus subventionner directement
o Organisme paritaire collecteur agréé les associations
(réponse page 24) o ne peuvent subventionner que les
associations relevant de leur compétence
14 • Depuis quelle année les associations o peuvent subventionner toutes les associations
loi 1901 ont-elles un plan comptable de la commune
spécifique ? (réponse page 17)
o 1901
o 1946 20 • En 2014, les pouvoirs publics
o 1999 et les associations ont signé :
(réponse page 11) o une convention pluriannuelle d’objectifs
o un protocole d’accord pour la mise en œuvre
15 • À partir de quelle somme du service civique
de subventions ou de dons reçus o une nouvelle charte d’engagements
annuellement une association doit-elle réciproques
rendre publics ses comptes annuels ? (réponse page 16)
o 63 000 €
o 103 000 €
o 153 000 €
(réponse page 11)

16 • La règle européenne de minimis limite

le financement public d’associations
ayant une activité économique :
o à 200 000 € par an
o à 200 000 € sur 3 ans
o à 500 000 € sur 3 ans RÉSULTATS :
(réponse page 14) • Si vous avez bien répondu à toutes les
questions (ou presque), soit vous avez
17 • Quel est le rôle du Haut Conseil lu ce numéro d’Associations mode
à la vie associative ? d’emploi avant d’avoir fait ce quiz,
o Conseiller les pouvoirs publics sur soit vous êtes un lecteur assidu de la
les questions associatives revue. Félicitations, continuez !
o Distribuer les subventions du Fonds national
• Si vous n’avez répondu qu’à une
de développement de la vie associative moitié des questions, vous avez encore
o Représenter les associations au sein quelques lacunes.
du Conseil économique, social et Relisez votre collection d’anciens
environnemental numéros d’Associations mode d’emploi.
(réponse page 14)
• Si vous n’avez pas pu répondre
18 • Le service civique s’adresse à la plupart des questions…
aux jeunes : il n’y a pas à tergiverser : laissez
o de 18 à 25 ans ce numéro bien en vue dans les locaux
de l’association et relisez-le chaque jour
o de 16 à 25 ans avant la prochaine AG.
o de 16 à 30 ans
(réponse page 30)

Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 9

ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Une révolution fiscale

qui n’est pas terminée
Dans les années 1990, les
associations ont vu se multiplier
les redressements fiscaux.
L’intérêt général et la non-
lucrativité devaient dès lors être
mieux définis afin de permettre la
conduite d’activités associatives
« sécurisées ». L’instruction
fiscale du 15 septembre 1998
a ouvert la voie à de nombreux
textes jusqu’à la loi ESS en 2014.
Mais l’évolution fiscale n’est
certainement pas terminée.

L’
instruction fiscale du 15 sep-
tembre 1998 (gestion désinté-
ressée – concurrence – 4P) visait
à distinguer avec des critères simples et
concrets les situations fiscalisables. S’en
sont suivis de nombreux textes, dont les
plus marquants resteront l’instruction
fiscale du 16 février 1999 stabilisant le
cadre de la sectorisation et de la filialisa-
tion, l’ouverture de la procédure du res-
crit fiscal, l’adaptation du plan comptable
général aux associations et fondations
en 1999.
Répondre aux évolutions
La loi sur le mécénat en 2003 qui misait
sur de fortes incitations fiscales pour déve-
lopper les dons des particuliers et des
entreprises, la création des fonds de dota-
tions en 2008, comme nouveau support,
plus souple, du financement des œuvres
d’intérêt général ou, plus récemment, la
loi relative à l’économie sociale et solidaire
(loi ESS) de 2014 qui a visé à encourager
la généralisation de l’ESS en lui donnant
des moyens juridiques semblables à ceux
du secteur lucratif, tel qu’un régime spé-
cifique pour les opérations de fusion par
exemple, ont eu pour objectif de répondre,
au fil des ans, à l’évolution culturelle et
économique qui s’est jouée pendant cette
période. Les associations se sont profes-
sionnalisées, s’éloignant parfois dangereu-
sement du concept associatif d’origine, et
se sont confrontées à de nouveaux défis :
gérance de fait, activités lucratives, fisca-
lisation partielle, recherche de finance-
ments privés.
Situations ambiguës
La publication de ces textes n’a pas bou-
leversé le cadre applicable aux associa-
tions. Les exonérations fiscales exis-
taient depuis longtemps notamment à
travers « la doctrine des œuvres ». La pra-
tique des fusions entre associations exis-
tait avant 2014, grâce aux techniques
de droit privé contractuel. Cependant,
il convient de ne pas négliger l’utilité de
disposer de textes de référence plus expli-
cites qui ont aussi apporté des réponses
techniques précieuses. Par exemple, pour
les fusions, le transfert de plein droit de
l’ensemble du patrimoine, des créances et
des dettes ne pose plus question et cela
évite les débats sur l’obligation de pro-
céder par signification d’huissier. Toute-
fois, des situations ambiguës perdurent.
Il est ainsi regrettable que les textes sur
les fusions prévoient la double publica-

10 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


tion dans un journal d’annonces légales,
même lorsque les entités fusionnantes
sont dans le même département. Le coût
des formalités est alors doublé sans que
cela soit justifié par l’objectif recherché
d’information des tiers. Autre exemple :
le secteur de l’insertion par l’activité éco-
nomique demeure écartelé entre la mis-
sion d’insertion entrant dans l’intérêt
général et le caractère économique de ses
activités support.
Accès complexe
Ces nouvelles réglementations restent
par ailleurs d’un accès complexe. Les
dirigeants associatifs, qui exercent le
plus souvent leur mission dans un cadre
bénévole, ne peuvent pas être en même
temps des professionnels juristes ou fis-
E, expert-comptable, memptes et de l’ordre des experts-comptables
Témoin GÉRARD LEJEUNde s commissaires aux co
la Compagnie nationa
« La première règle de la bonne gestion associative
est de tenir des comptes »
DR
Comment voyez-vous
l’évolution de la fiscalité et
de la comptabilité du secteur
associatif ?
Suite au rapport Goulard, le gouvernement
Jospin a, par les instructions fiscales
de 1998 et 1999, permis de clarifier
de nombreuses situations ambiguës.
La procédure du rescrit fiscal, le
questionnaire, le correspondant
association (dans chaque service des
impôts des entreprises) et « l’amnistie
fiscale » pour celles qui mettaient à plat
leur situation avant le 1er janvier 2000
ont été un grand progrès pour le secteur
associatif. La publication par Bercy d’avis
sectoriels a ensuite permis de clarifier des
situations particulières, car nous avions
dans la pratique des avis divergents de
correspondants associatifs locaux pour
des situations identiques !
calistes. La bonne gestion de leur struc-
ture demande pourtant qu’ils respectent
la réglementation applicable alors même
que gérer une association est parfois bien
plus compliqué que gérer une entreprise !
Il faut identifier le texte applicable dans
le dédale des lois et il faut souvent mettre
en œuvre des exceptions ou des exoné-
rations qui contraignent les structures
à devoir les justifier. Le modèle écono-
mique hybride, la diversité des statuts des
acteurs font que de nombreux paramètres
sont à prendre en compte. Le renforce-
ment des compétences des bénévoles et
une professionnalisation des équipes sont
donc indispensables dans des domaines a
priori austères et moins directement en
lien avec le cœur de la mission de l’asso-
ciation. Le soutien à l’engagement béné-
mbre du groupe de tra
le
C’était une nécessité ?
Les associations n’avaient pas d’obligations
comptables générales. Le Conseil national
de la comptabilité proposait bien depuis
1985 d’utiliser un plan comptable, mais ce
n’était qu’une simple « recommandation ».
Il faudra attendre le début du XXIe siècle
pour que le nouveau plan comptable
associatif devienne une obligation ! Il
s’applique depuis le 1er janvier 2000 et crée
un cadre légal de présentation des états
financiers qui s’applique obligatoirement
aux associations dès lors qu’elles doivent
rendre publics des comptes annuels (parce
qu’elles reçoivent plus de 153 000 € de
subventions ou de dons déductibles).
Cela a constitué une formidable évolution
réglementaire ! Une réforme de ce
plan comptable est en cours et devrait
s’appliquer début 2020.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
DATES
5 avril
1998 : publication
de l’instruction fiscale
4-H-5-98
1999 : publication du plan
comptable associatif
2014 : dispositions légales
sur les fusions
vole est ainsi un enjeu clairement iden-
tifié et fait partie des axes de politique
gouvernementale pour la vie associative
pour lesquels nous attendons encore à ce
jour le plan d’actions.
Camille Viltard-Lamy, Malik Tine,
Cécile Chassefeire, Gérard Lejeune
vai l Associations de
Ces évolutions représentent
un coût pour les associations.
Est-ce justifié ?
Le partenariat entre les professionnels du
chiffre (comptables, experts-­comptables,
commissaires aux comptes) et les
associations est un facteur de sécurité
et de confiance pour le respect des
règles légales. Aujourd’hui, il y a chaque
année près de 30 000 interventions de
commissaires aux comptes dans le secteur
associatif. Pour les associations, leurs
membres et donateurs comme pour les
pouvoirs publics, cela offre une meilleure
transparence et une meilleure lisibilité
financière. C’est un plus en matière de
gouvernance démocratique et de bonne
gestion. Pour paraphraser un ministre
des Finances : la première règle de la
bonne gestion associative est de tenir des
comptes, et la première qui conduit à la
ruine est de les négliger.
11
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Les associations tentent de s’adapter

à la baisse des subventions
Face à la baisse des financements
publics, les associations ont dû, au
cours des vingt dernières années,
adapter leur modèle économique
pour intégrer de nouvelles
ressources privées (mécénat,
produit-partage, vente de produits
et services, finance solidaire, social
impact bonds, etc.). La législation
a toujours tenté de prendre en
compte les nouvelles pratiques.

L
es politiques publiques de rigueur
et l’évolution de la réglementation
européenne en matière d’aides
d’État ont imposé un contrôle strict des
subventions (1). Ces dernières font sou-
vent l’objet d’une convention fixant les
obligations respectives de l’association
et du financeur (2). Leur montant a été
réduit de manière significative et elles
tendent à être remplacées par des pro-
cédures d’appels à projets soumises aux
règles de la commande publique.
Les bienfaits du mécénat
Heureusement, depuis 2003, la France
est dotée d’un dispositif fiscal attractif
incitant les particuliers et les entreprises
à soutenir les associations d’intérêt géné-
ral. Le développement des outils numé-
riques permet aujourd’hui aux petites
associations de collecter des dons de
manière peu coûteuse grâce aux plate-
formes en ligne de financement parti-
cipatif. En outre, l’évolution technolo-
gique des services de paiement permet
aux entreprises commerciales de propo-
ser à leurs clients ou à leurs salariés le
mécanisme de l’arrondi solidaire consis-
tant à verser des microdons. L’arrivée en
2008 (3) des fonds de dotation dans le
paysage des organismes sans but lucra-
tif a permis aux associations simplement
déclarées de se doter d’un outil de collecte
de donations et de legs. Enfin, ces der-
nières années, associations et entreprises
ont également pu mesurer les bienfaits du
mécénat de compétence en plein dévelop-
pement (mise à disposition de personnel
et de moyens par des entreprises).
Diversification des ressources
À côté du mécénat, les associations ont
été amenées à développer des partena-
riats avec les entreprises dans le cadre
de parrainages (sponsoring), activité fis-
calement lucrative (4). Suivant la même
logique de diversification des ressources,
certaines ont entrepris d’exercer des acti-
vités de ventes de marchandises ou de
prestations de services dans un cadre fis-
cal sécurisé par l’administration depuis
1998. Elles peuvent ainsi financer une
partie de leurs activités non lucratives
structurellement déficitaires. Ces acti-
vités sont développées en interne, dans
le cadre de la franchise d’impôts com-
merciaux ou d’une sectorisation fiscale,
ou en externe, à travers une filialisation.
Il est ainsi de plus en plus courant que
des associations contrôlent et gèrent une
filiale commerciale (ex. : une société par
actions simplifiée). De grandes associa-
tions ont même mis en place des mon-
tages juridiques et fiscaux permettant
d’attirer des investisseurs dans leurs
filiales tout en gardant leur contrôle
(actions de préférence, société en com-
mandite par actions…).
Nouveaux mécanismes
La recherche de nouveaux financements
impose parfois des restructurations se
traduisant par des fusions, groupements
de moyens ou coopérations. Par ailleurs,
les associations bénéficient des outils de
la finance solidaire (agrément Esus) et

12 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


sont visées par deux nouveaux disposi-
tifs privés et publics en faveur de l’innova-
tion sociale, ainsi que certains fonds d’in-
vestissement. Les solutions sous forme
d’apport associatif, de prêt ou de garan-
tie de prêt peuvent néanmoins apparaître
exigeantes et sélectives. En revanche, le
mécanisme des titres associatifs, réformé
par la loi ESS de 2014, demeure peu fré-
quent en pratique car les investisseurs
trouvent le produit peu attractif en raison
des conditions de remboursement. Enfin,
il est encore trop récent pour apprécier
l’efficacité du nouveau mécanisme de
financement par contrat à impact social
(social impact bond). L’expérience per-
mettra de vérifier si ce mode de finance-
ment est adapté aux enjeux. De manière
plus insolite, il existe des associations qui
Témoin LÉA THOMASSI N, direc
Les petites associations ont besoin de fédérer dans la durée
©Eloise Vene
une communauté de donateurs
Quelle a été l’évolution de
votre activité par rapport au
financement associatif ?
Il y a neuf ans, au début des réseaux
sociaux, nous avons commencé par le
projet Mail For Good. Nous proposions
aux associations d’améliorer leur visibilité
par les e-mails. Puis, avec HelloAsso, nous
avons proposé des outils numériques
gratuits pour la collecte de dons et de
cotisations, la gestion de campagnes
de financement participatif ou pour la
billetterie d’événements. Aujourd’hui,
nous travaillons sur un système de
flashcode pour contrôler les billets à
l’entrée des événements et améliorer le
comptage et les justificatifs. Un autre
projet vise à faciliter la gestion des ventes
de produits et services. Le but est de
soulager les bénévoles quant aux aspects
logistiques très chronophages de ces
activités.
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
travaillent sur des projets de financement
en crypto-monnaie. Reste que si l’imagi- DATES
5 avril
nation des porteurs de projets est sans
2003 : loi Aillagon sur
limite pour pallier le désengagement de le mécénat
la puissance publique, certaines missions
2008 : création des fonds
ne pourront toutefois jamais être cor- de dotation
rectement assurées sans investissement
2014 : loi ESS – Définition
public, politique et financier. de la subvention, titres
associatifs, fusion
Sarah Bertail et Emmanuel Sadorge,
avocats, Delsol avocats CHIFFRES
3,5 milliards d’euros de
(1) Loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits
des citoyens dans leurs relations avec les administrations, mécénat d’entreprise
art. 10 ; code du commerce art. L.612-4 et D.612-5 ; loi
7,5 milliards d’euros de dons
n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du
mécénat, art. 4-1. des particuliers
(2) Circulaires du 18 janvier 2010 et du 29 septembre
Hausse depuis dix ans des
2015.
(3) Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation dons déduits de l’impôt sur
de l’économie, art. 140. le revenu : + 70 %
(4) BOI-BIC-RICI-20-30-10-20- § 150.
Asso
trice générale de Hello
Le mécénat semble également Quels sont les défis à venir ?
se démocratiser ? Le financement du fonctionnement. Il
Il y a plusieurs années, les opérations de reste difficile de pérenniser l’emploi de
collecte de dons étaient essentiellement permanents. Au-delà du financement
menées par les grandes associations par projet, les petites associations ont
caritatives et ONG. Elles seules besoin de fédérer dans la durée une
pouvaient financer des campagnes de communauté de donateurs, un cercle de
communication très coûteuses, réalisées fidèles qui contribuent régulièrement
par voie de presse, d’affichage ou de avec des petits versements (5 euros ou
streetfundraising… Face à la baisse des 10 euros par mois). Un autre défi majeur
financements publics, les associations, est d’acquérir les codes et les compétences
tous secteurs confondus, se sont pour développer les ressources privées.
mises à rechercher d’autres sources de Comment convaincre une PME de réaliser
financement. Grâce aux nouveaux outils du mécénat de compétence ? Il faut mieux
numériques, une petite association sensibiliser sur les solutions existantes,
peut aujourd’hui lancer une campagne former et accompagner.
de crowdfunding. On assiste à une
« démocratisation » des pratiques d’appels En savoir plus 
de fonds. www.helloasso.com
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 13
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

État-associations :
une indépendance toute relative
Tantôt choyées, tantôt honnies, les
associations occupent une place à
part dans les dispositifs législatifs,
qui témoigne de l’ambivalence du
regard de notre société à l’égard
des corps intermédiaires. Si les
circulaires Fillon puis Valls vont
globalement dans le sens d’une
sécurisation des rapports entre
l’État et les associations, l’équilibre
entre partenaire et prestataire
reste difficile à trouver.

L
a révision générale des politiques
publiques (RGPP) initiée par le
gouvernement en 2007 a obligé
les services de l’État à rendre compte
de l’efficacité des politiques publiques.
Très critiquée car considérée comme
aux antipodes de la culture associative,
la RGPP est probablement un des pre-
miers textes qui ancre les associations
dans une logique de prestation. Si son
aspect mécanique manquait parfois d’hu-
manisme, les associations ont dû inventer
des indicateurs qualitatifs et quantitatifs,
et intégrer l’évaluation dans la construc-
tion même des projets.
Minimis
Le 18 janvier 2010, via la circulaire Fillon,
le gouvernement entame une démarche
de sécurisation des relations financières
entre les pouvoirs publics et le monde
associatif. L’objectif principal est de redé-
finir les modalités de financement des
associations au regard de la réglemen-
tation européenne relative aux aides de
l’État. Désormais, les aides financières
accordées aux « associations à caractère
économique » sont considérées comme
des aides d’État. Cette notion « d’activité
économique » prévoit un régime déroga-
toire : la règle de minimis. Elle concerne
les associations dont les financements
publics n’excèdent pas les 200 000 euros
sur une période de trois ans. Ce dispositif
marque un virage important car « dans la
pratique, la grande majorité des activités
exercées par des associations peuvent être
considérées comme des activités écono-
miques ». Cette vision libérale témoigne
L’objectif principal est
de redéfinir les modalités
de financement des
associations au regard
de la réglementation
européenne
de l’emprise du droit communautaire sur
le droit national et de l’intégration indif-
férenciée des associations parmi les opé-
rateurs du marché européen.
Équilibre
Il aura fallu près de deux ans de concer-
tation pour que la circulaire Valls du
29 septembre 2015 remplace la circu-
laire Fillon. Elle permet de replacer les
associations dans une logique de partena-
riat avec l’État résumée à l’article 1 : « au
cœur de la société civile, [les associations]
occupent une place essentielle dans la vie
collective de la nation et le fonctionne-
ment de notre modèle de société, elles
sont fréquemment amenées à anticiper,
éclairer ou compléter l’action conduite
par les pouvoirs publics, inspirant à l’État
et aux collectivités territoriales de nou-
velles formes d’intervention, aux avant-

14 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018

 N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp

postes de l’innovation et de la créativité tion doit y apporter la preuve qu’elle a un

dans le territoire ». Pour conseiller les
pouvoirs publics, a été créé en 2011 le
Haut conseil à la vie associative (HCVA).
Il a vocation à représenter la vie associa-
tive, équilibre compliqué à réaliser entre
petites et grosses associations, associa-
tions employeurs et non employeurs,
secteurs d’activité… L’imbrication pro-
gressive des questions associatives avec
l’économie sociale et solidaire conduit à
se questionner sur son articulation avec
le Conseil supérieur de l’ESS.
Agréments
La loi du 22 mars 2012 relative à la sim-
plification du droit et à l’allégement des
démarches administratives a également
impacté de manière importante les asso-
ciations. Elle a créé le tronc commun des
agréments qui sera valable pour toutes les
demandes durant cinq années. L’associa-
objet d’intérêt général, un mode de fonc- DATES
5 avril
tionnement démocratique et qu’elle fonc- 2007 : RGPP
tionne avec une transparence financière.
2010 : circulaire Fillon
Cette homogénéisation relative livre une
photographie des associations considé- 2011 : création du HCVA
rées comme « dignes » d’être partenaires 2012 : création du socle
de l’État. Dans la mesure où aucune asso- commun des agréments
ciation n’a l’obligation de solliciter un 2015 : circulaire Valls
agrément, l’appréciation de l’État n’est
pas attentatoire à la liberté d’associa-
tion, principe à valeur constitution-
nelle. Cependant, en triant le bon grain
de l’ivraie, l’État témoigne de sa volonté
de normaliser les associations avec qui il
établit un partenariat. Une attitude que
l’on pourrait juger contradictoire avec la
charte d’engagements réciproques où il
s’était engagé à faire respecter « l’indé-
pendance associative ».
Yannick Dubois, consultant,
Cabinet Kogito Associations

lementaire
uvoir d’agir et ancien par
S, président du collectif Po
Témoin JEAN-P IERRE WORM
« Les associations sont de plus en plus des exécutantes
de la commande publique »
DR

les relations des associations avec le mécénat privé qui, en France,

Les associations sont-elles devenues
dépendantes de l’État ?
Du fait de leurs difficultés financières, beaucoup d’associations
sont de plus en plus des exécutantes de la commande publique
au détriment de la mise en œuvre de leur projet associatif. C’est
moins ce dernier que la performance de l’action circonscrite par
la commande de l’État qui domine. Beaucoup d’associations sont
plus attentives à ce que les pouvoirs publics attendent d’elles qu’à
ce qui peut provenir ou émerger de la société civile ou des besoins
des habitants, même lorsqu’elles ont un rapport critique avec
l’État.
Pourtant, on n’a jamais autant parlé
de démocratie participative
Le discours public affiche une très grande ouverture aux
initiatives citoyennes et à la société civile mais il ne reconnaît
les associations que comme le prolongement utile de politiques
publiques. On appelle à l’émergence d’une citoyenneté active,
mais en réalité on agit comme si l’on voulait des citoyens asservis.
C’est une contradiction majeure qu’on retrouve également dans
contrairement à ce qui se passe dans le monde anglo-saxon,
est très dépendant des choix et des priorités des fondations
d’entreprise.
Pourquoi les associations se laissent-elles
faire ?
La première raison tient à l’émiettement des initiatives
associatives qui freine la construction d’une capacité commune de
transformation sociale, d’un véritable pouvoir politique partagé.
Tous ces citoyens qui agissent pour développer et valoriser le
« pouvoir d’agir », tous ces membres d’une société civique active,
bien que mus par les mêmes valeurs… ne se connaissent pas ! Et,
de ce fait, ne constituent pas une force capable de peser ensemble
sur l’organisation et la mise en œuvre cohérente des politiques
publiques. Le second facteur, c’est la reproduction au sein de la
société civile de ce découpage en « silos » verticaux déconnectés
les uns des autres. Cela est souvent dénoncé concernant
l’action publique de l’État ou des collectivités locales. Mais les
associations, les réseaux ou les collectifs citoyens n’y échappent
pas. Ce qui est encore plus grave !

Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 15

ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Associations et collectivités :
je t’aime moi non plus
Pour les associations, c’est encore,
et de loin, souvent les premiers
partenaires. Mais dans leurs
relations avec les collectivités
locales, les associations ont
dû faire face à de multiples
problématiques : baisse
tendancielle des financements
publics, passage de la subvention
à la commande publique,
reconfiguration territoriale suite
aux lois Notre et Maptam.
Un contexte loin d’être stabilisé.

L
es politiques publiques de la vie
associative se présentent encore
souvent de façon descendante. Dans
les faits la relation est pourtant plus équi-
librée. Si les associations ont besoin du
soutien financier des collectivités, celles-
ci en retour savent que des pans entiers
de leurs politiques locales reposent sur
l’action associative.
Fondamental
Le baromètre des relations collectivités-
associations initié par Associations mode
d’emploi indiquait ainsi en 2013 que, glo-
balement, leurs relations sont marquées
par la confiance et le respect. Ainsi 76 %
des collectivités locales considéraient le
rôle des associations comme « impor-
tant » pour la commune, dont 26 %
comme « fondamental ». 25 % des col-
lectivités interrogées en 2014 avouaient
d’ailleurs avoir engagé des politiques
publiques sous l’impulsion d’une initia-
tive associative et 23 % les associaient à
l’évaluation des politiques qui relèvent de
leur secteur. 36 % des associations affir-
maient se sentir impliquées dans ces éva-
luations et elles étaient aussi nombreuses
à estimer avoir influencé des politiques
publiques.
Pacte de confiance
C’est dans ce contexte qu’a été cosignée
en 2014 la nouvelle charte des engage-
ments réciproques entre État, collectivi-
tés et associations, qui pose la première
pierre d’un nouvel édifice visant à refon-
der un pacte de confiance entre les pou-
voirs publics locaux et les associations.
Sans valeur coercitive, cette charte porte
au moins trois enjeux politiques impor-
tants. Un enjeu lié aux échanges voire
aux rapports de force entre les collecti-
vités territoriales et les associations. Un
enjeu démocratique du fait du rôle qu’as-
sociations et collectivités ont à jouer dans
le renforcement des modes de participa-
tion des citoyens. Enfin, un enjeu cultu-
rel et partenarial qui implique la prise en
compte de la coconstruction. Il est encore
un peu tôt pour savoir si la charte a été
appropriée localement mais, début 2017,
la HCVA a repéré une cinquantaine de
chartes signées.
Chassé-croisé
L’évolution majeure est peut-être ail-
leurs. Tandis que jusqu’alors la com-
mune était en 2014 le principal parte-
naire pour 41 % des associations, elles
sont désormais supplantées par les
autres niveaux de collectivité (régions,
départements, intercommunalités). Un
chassé-croisé qui corrobore les analyses
de Viviane Tchernonog qui avait déjà
signalé la place désormais prépondérante
des départements comme principaux
partenaires financiers des associations.
La tendance à la « métropolisation », le
regroupement des intercommunalités
dans des ensembles plus vastes, la créa-
tion de treize grandes régions en 2016,

16 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


poussent les associations à reconfigurer
leurs partenariats. Des bouleversements
qui impliquent en maints endroits des
regroupements ou des fusions pour adap-
ter certaines structures associatives aux
nouveaux périmètres.
D’égal à égal
Face à ces défis, le partenariat semble
s’imposer. C’était en tout cas la convic-
tion de Michel Dinet, président du conseil
général de Meurthe-et-Moselle préma-
turément disparu en 2014, deux mois
après avoir accueilli dans son départe-
ment la signature de la charte d’engage-
ments réciproques : « ce partenariat s’en-
racine dans une conviction : la société est
tonifiée, l’action publique est efficace, la
démocratie est respectée et vivifiée quand
ENT, maire de Sceaux,s de France
Témoin PH IL IPPE LAURl’A ssociation des maire
général de
« La commune reste l’acteur de proximité par excellence »
DR
Pourquoi l’AMF a-t-elle
accepté de cosigner la
charte des engagements
réciproques ?
Nous souhaitions répondre à un certain
nombre d’enjeux essentiels pour les
communes en lien avec les associations
pour satisfaire les besoins de la population
locale. Les communes sont libres de
s’en emparer ou pas, les circonstances
n’étant pas les mêmes dans chaque
territoire. Quatre ans plus tard, nous ne
disposons malheureusement que de peu
de retours concernant son appropriation
(une cinquantaine de chartes ont été
signées). En parallèle nous avons souhaité
proposer aux élus, dans le cadre du vade-
mecum sur la laïcité, un modèle de charte
pour s’assurer du respect du principe de
laïcité lorsque les communes ou leurs
groupements accordent des soutiens
publics.
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
tous les courants associatifs du dévelop-
pement local, de l’économie sociale et
DATES
5 avril
solidaire, du développement durable, de 2012 : loi de simplification
l’éducation populaire, du sport, de l’en- du droit et d’allègement
des procédures
traide civile, de la culture, de la solidarité, administratives
du caritatif, de la coopération internatio-
2014 : charte
nale, ne sont pas considérés par les res- d’engagements réciproques
ponsables politiques comme leurs cour- et loi Maptam (de
roies de transmission mais comme des modernisation de l’action
publique territoriale
acteurs majeurs pour construire « d’égal et d’affirmation
à égal » le développement et la vitalité des métropoles)
des territoires et du pays ». Encourager 2015 : circulaire Valls
la création d’espaces de dialogue, déve- et loi Notre (nouvelle
lopper une connaissance réciproque et organisation territoriale
construire collectivement, voilà le chal- de la République)
lenge qui s’impose aujourd’hui tant aux 2017 : lancement
d’une stratégie de
collectivités qu’aux associations. développement et
d’accompagnement
Carole Orchampt, déléguée générale du RNMA de la vie associative
secrétaire
Comment les communes Le développement des
font-elles face aux difficultés intercommunalités modifie-
financières des associations ? t-il les relations entre les
Elles font ce qu’elles peuvent pour communes et les acteurs
maintenir leur soutien mais le contexte associatifs ?
est particulièrement difficile en raison de Non, parce que la commune est la seule
la baisse de leurs moyens en provenance collectivité à bénéficier de la clause
de l’État, qu’elles subissent depuis générale de compétences depuis la
plusieurs années. La suppression de loi du 7 août 2015, ce qui lui permet
la taxe d’habitation, dont on ignore d’aider tout type d’associations.
tout des éventuelles compensations à Quant aux intercommunalités, elles
compter de 2021, risque de réduire encore n’ont pas forcément plus de moyens
leur marge de manœuvre. Les maires que les communes… Et la question
restent fondamentalement attachés ne se pose pas vraiment partout. La
aux associations qui œuvrent à la vie commune reste l’acteur de proximité par
démocratique, à la cohésion sociale, au excellence, partenaire naturel du monde
développement et au vivre ensemble associatif avec lequel elle œuvre pour
de leur territoire. C’est pourquoi ils l’intérêt général local, dans une relation
mobilisent d’autres moyens par la mise à partenariale équilibrée, responsable et
disposition de locaux et d’équipements ou sécurisée.
encore par du conseil.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 17
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BIC (Bank Identifier Code) : CMCIFRPP - N° SIRET : 404 926 958 00020 - Code APE : 5813Z
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS
En Europe, les associations
cherchent encore leur place
Au niveau européen, les associations
ont deux interlocuteurs : le Conseil de
l’Europe et l’Union européenne. Malgré
une évolution et une meilleure prise
en compte de leur rôle, notamment
sur la question des financements, le
statut d’association européenne fait
toujours figure de serpent de mer.
Pour construire un véritable modèle
européen, il faudra tenir compte des
histoires politiques et sociales des
différents États membres.
P
eu connu des associations, le
Conseil de l’Europe est pourtant
la seule institution européenne à
avoir signé une convention sur la recon-
naissance de la personnalité juridique des
organisations non gouvernementales.
Quadrilogue
Il a ainsi mis en place un « quadrilogue »,
auquel la Conférence des organisations
internationales non gouvernementales
(COING) qui rassemble 320 ONG inter-
nationales participe à égalité avec le sec-
teur ministériel, l’assemblée parlemen-
taire, et le Congrès des pouvoirs locaux
et régionaux. Son rôle a évolué au fil des
années, passant de la « consultation »
en 1951 à la « participation » en 2003.
Devenue partenaire des organes statu-
taires du Conseil, elle a créé des regrou-
pements thématiques qui permettent aux
ONG de travailler entre elles, de renfor-
cer leur coopération avec les directions
du Conseil de l’Europe et de faire valoir
leurs points de vue.
Le dogme de la concurrence
De son côté, la Commission européenne
donne l’impression de refuser l’idée d’en-
20 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018
treprise sans but lucratif et voudrait tout
soumettre au droit européen de la concur-
rence sans référence au statut. Ainsi, les
associations, malgré leur place dans les
différents droits nationaux des États
membres, sont les grandes absentes de
l’Acte pour le marché unique d’avril 2011.
Elles n’ont trouvé une place, somme toute
bien limitée, qu’au sein du Comité écono-
mique et social européen (Cese) qui est en
quelque sorte la voix de la société civile
LEXIQUE
Les organismes
internationaux utilisent
peu le terme « association »
et lui préfèrent d’autres
mots : « organisation
de base »(ODB) pour la
Commission européenne,
« organisation
internationale non
gouvernementale » (ONG)
pour l’ONU et le Conseil
de l’Europe ou « Private
Voluntary Organization »
(PVO) pour l’Organisation
de coopération et de
développement économique
(OCDE).
en Europe. Cette assemblée consultative
réunit 350 partenaires économiques et
sociaux (dont 24 Français), leur permet
de se faire entendre de la Commission,
du Conseil et du Parlement et, théorique-
ment, de participer au processus décision-
nel de l’Union européenne.
Du fait du prince
à une démarche contractuelle
Les associations françaises ont pu émar-
ger aux financements européens au tra-
vers de budgets alloués pour soutenir
les actions menées en direction de la
jeunesse, de l’éducation, de la mobilité.
Elles ont également utilisé des finance-
ments spécifiques destinés à favoriser les
actions de solidarité nationale ou inter-
nationale ou d’insertion. Ces finance-
ments ont entraîné une modification des
comportements face à la subvention : les
associations sont passées petit à petit
de la subvention relevant du « fait du
prince » à une démarche contractuelle
nécessitant une procédure de soumis-
sion, impliquant l’utilisation d’un for-
mulaire structuré où doivent apparaître
des objectifs, des modalités de mise en

œuvre, des indicateurs de résultats et un
budget construit selon une nomenclature
précisant les coûts éligibles et non éli-
gibles. Surtout, innovation importante,
la formalisation de l’aide accordée s’ap-
puie sur un contrat qui précise le coût
prévisionnel du projet et le pourcen-
tage du budget qui sera pris en compte
au moment de la restitution des bilans.
Cette démarche a mis fin aux pratiques
couramment utilisées jusqu’à la fin des
années 1970 où les demandes de sub-
vention étaient gonflées pour obtenir le
maximum d’aide, le projet étant ensuite
réajusté pour rentrer dans le montant
global de la subvention.
Le raté de l’association
européenne
Autre innovation, même si ce fut souvent
une difficulté pour accéder aux finance-
Témoin MAR IE-CHR ISTI NE VE
« Nous avons du mal à dépasser nos spécificités
pour construire de réels modèles européens »
DR
Les associations sont-elles
absentes du débat européen ?
Vu de France, elles peuvent paraître être
les grandes oubliées de la construction
européenne. Pourtant, rien n’est plus
faux. Dans l’Union européenne, les
associations sont d’abord et avant tout
reconnues comme des acteurs majeurs de
la société civile. C’est tout particulièrement
vrai pour le Parlement européen qui
a toujours soutenu les demandes des
acteurs associatifs, tant comme acteurs
de la société civile que comme acteurs de
l’économie sociale. C’est à ce double titre
qu’il faut désormais porter la demande
de reconnaissance des associations
européennes.
De quelles manières ?
Elles doivent pouvoir être reconnues, pour
celles qui le souhaitent, comme de vrais
ments, l’obligation de déposer des pro-
jets transnationaux en travaillant en par-
tenariat avec des associations d’autres
pays européens. Cette obligation a été un
choc culturel qui a contribué à la reven-
dication, portée en priorité par le monde
associatif français, d’un statut d’associa-
tion européenne (SAE). Ce projet qui aurait
pu être l’avancée phare des années 2000 a
avorté, une directive ayant bien été adop-
tée mais jamais mise en œuvre… Remettre
aujourd’hui ce dossier à l’ordre du jour
serait une reconnaissance du rôle des asso-
ciations pour dynamiser la société civile
européenne et faciliterait certainement
l’émergence de communautés sociales et
solidaires dans l’Union. Un beau défi au
moment où l’idéal européen semble de
plus en plus remis en cause par les peuples.
Marc Genève, administrateur Fonda
RG IAT, députée européenn
acteurs économiques et, personnellement,
je pense qu’il faut réfléchir, comme le font
aujourd’hui les mutuelles, à un statut de
sociétés de personnes qui les différencient
clairement des sociétés de capitaux.
D’autre part, il faut avancer comme l’a fait
le Comité économique et social européen
vers un statut des associations comme
acteurs transnationaux de la société
civile, de la construction de la citoyenneté
européenne. Cela devrait être un chantier
majeur à la veille des prochaines élections
européennes.
Pourtant le projet de statut
d’association européenne
a été un échec…
Il est vrai qu’il ressemble à un serpent
de mer ! Mais peut-être est-ce d’abord
parce que, nous, Français, avons du mal à
dépasser nos spécificités pour construire
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
DATES
5 avril
2005 : abandon du projet
de statut d’association
européenne
2014 : nouvelle
programmation des
financements européens
e 
de réels modèles européens en tenant
compte des histoires politiques et sociales
des différents États membres. C’était vrai
à quinze, c’est encore plus vrai à vingt-
huit ou vingt-sept. Le statut a voulu se
construire en se limitant aux associations
ayant des activités économiques. Ce
faisant, il s’est heurté à une double
opposition : celle des « charities » pour
qui les associations ne peuvent avoir la
moindre activité économique et celles des
acteurs économiques « classiques » qui ne
voulaient pas voir reconnu un nouveau
type d’acteurs qui auraient pu bénéficier
d’avantages fiscaux ou de subventions,
auxquels ils n’ont pas droit. Le débat est
loin d’être clos.
21
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Les associations,
combien de divisions ?
Viviane Tchernonog, spécialiste du monde associatif, le reconnaît
elle-même : « dans les années 1980, quand nous avons commencé
nos recherches, nous nous sommes très vite rendu compte que les
associations étaient pour la recherche une terra incognita ! » Depuis, et en
partie grâce à elle, ce n’est plus le cas et enquêtes et observatoires de la
vie associative se sont multipliés. Les associations sont-elles mieux prises
en compte ? Pas vraiment…

C’
e s t en 2007 que Viviane
Tchernonog publie le pre-
mier « Paysage associatif fran-
çais », résultat d’une enquête menée en
2005 à partir de 12 000 réponses d’as-
sociations. Rebelote en 2013 à partir de
8 000 réponses. Plus de 250 pages de
chiffres, de tableaux et d’analyses réa-
lisées par une quinzaine d’auteurs qui
démontrent le poids réel du monde asso-
ciatif et qui rendent visibles ses grandes
évolutions. Elle met par exemple en évi-
dence, entre 2005 et 2012, l’augmenta-
tion des financements privés face aux
financements publics et, parmi ces der-
niers, la baisse de la part des subventions
et l’augmentation substantielle de celle
des marchés publics et autres appels à
projets. En 2016, elle relance une nou-
velle enquête et prépare à partir des 7 000
réponses reçues, la troisième édition du
« Paysage associatif français » qui sortira
début 2019.
Dialogue civil
Depuis, d’autres s’y sont mis. Mais la pre-
mière enquête de statistique publique
couvrant l’ensemble du monde associa-
tif et ayant les associations comme uni-
tés enquêtées n’a été menée par l’Insee
qu’en… 2014 suite à une recommanda-
tion du rapport « Connaissance des asso-
ciations » du Conseil national de l’infor-
mation statistique de décembre 2010 (1).
Déjà, lors de la seconde conférence de la
vie associative du 17 décembre 2009, ce
manque avait été relevé : « l’amélioration
des outils d’observation et de connais-
sance de la vie associative est deve-
nue un enjeu majeur pour nos sociétés
modernes. » Cet enjeu apparaissait au
monde associatif, aux chercheurs et à
un certain nombre d’acteurs politiques
indispensables si l’on voulait dévelop-
per le « dialogue civil » ou la « démocra-
tie participative », concepts de plus en
plus mis en avant.
« lorsque le délégué national du RNMA
L’enjeu n’est évidemment se rendait dans une ville de France, il était
pas d’établir un palmarès intrigué d’entendre le maire lui annoncer
mais de mieux connaître souvent avec fierté : ‘‘ma ville est la ville
toutes les facettes du tissu la plus associative de France !’’ » Il appa-
raissait donc nécessaire d’objectiviser les
associatif local. choses ! L’enjeu de la connaissance de la
réalité associative locale n’est évidem-
ment pas d’établir un palmarès mais de
mieux connaître toutes les facettes du
Objectiver les choses tissu associatif local et de rendre visibles
C’est du même souci que sont nés à les évolutions. « En règle générale, un tra-
partir de 2007 les premiers observa- vail d’observation et d’enquête permet de
toires locaux de la vie associative, une découvrir entre 40 et 50 % d’associations
initiative portée par le Réseau national en plus de ce qu’on estimait exister sur le
des maisons d’associations (RNMA). territoire », témoigne Grégory Autier. Il
Grégory Autier, directeur de la maison existe aujourd’hui quinze observatoires
d’Hérouville-Saint-Clair, se souvient : de ce type en France.

22 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


Corps intermédiaires
Tous ces outils auxquels il faut rajouter
le gros travail de Recherches & Solidari-
tés mené depuis plus de quinze ans per-
mettent de montrer l’importance d’un
monde atomisé qui, s’il est souvent
regardé avec bienveillance, l’est aussi par-
fois avec trop de condescendance… « Les
associations, combien de divisions ? » Et
bien : 1,8 million de salariés, 85 milliards
de budget annuel total, près de 3,5 % du
PIB national, c’est-à-dire plus que le sec-
teur de l’hôtellerie-restauration (2,5 %)
ou de l’agriculture (2 %)… Pourtant, leur
poids politique est loin d’être à la hau-
teur. Malgré la création en 1999 de la
Conférence permanente des coordina-
tions associatives (CPCA), devenue en
2014 le Mouvement associatif, qui reven-
dique 600 000 associations et se veut la
voix politique du secteur, elles peinent
Témoin CÉ CI LE BA ZI N, cofon
« Il faut pousser les pouvoirs publics pour qu’ils prennent
vraiment conscience de la « valeur ajoutée » des associations »
DR
Qu’est-ce qui vous a motivés,
il y a quinze ans, à lancer
Recherches & Solidarités ?
Avec de nombreux experts et
universitaires, devenus des amis au fil des
années, nous avons voulu apporter un
complément utile aux travaux existants.
Nous l’avons fait en coopération avec
des partenaires comme la DJEPVA,
le Mouvement associatif, France
Bénévolat…, à partir de sources comme
l’Acoss-Urssaf, la MSA, la DGFIP, ou
d’enquêtes d’opinion auprès des acteurs
(responsables associatifs, bénévoles,
donateurs…). Nous avons aussi veillé à
informer régulièrement les observateurs,
les acteurs et les décideurs, avec des
publications annuelles en libre accès sur
notre site et largement repris par ailleurs.
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
à se faire entendre. Nicolas Sarkozy, en
2012, fustigeait déjà les « corps intermé- DATES
diaires qui s’interposent parfois entre 5 avril
2007 : parution du
le peuple et le sommet de l’État ». Les « Paysage associatif
associations n’étaient pas visées en tant français »
que telles, mais s’étaient senties concer- 2007 : premiers
nées. Six ans plus tard, la question se pose observatoires locaux
en des termes peut-être pas si éloignés. de la vie associative
C’est du moins le sentiment des associa- 2009 : Répertoire national
tions signataires d’une tribune du 5 mai des associations (RNA)
2018 dans « Le Monde » : « Changer la 2011 : le CNVA devient
société ne se décrète pas d’en haut, sans le HCVA
le public concerné et sans les corps inter- 2014 : la CPCA devient
médiaires ». le Mouvement associatif
CHIFFRES
Michel Lulek
1 300 000 associations
(1) « Connaissance des associations » Édith Archambault, actives
Jérôme Accardo et Brahim Laouisset, bit.ly/2rLDIqy
70 000 nouvelles
associations chaque année
tés
Recherches & Solidari
datrice et directrice de
Cela a-t-il eu un impact Qu’est-ce qui vous a le plus
sur la reconnaissance frappée dans vos enquêtes ?
par les pouvoirs publics Je retiendrai trois points. Une véritable
et les collectivités du fait fracture associative : les personnes
associatif ? modestes hésitent à adhérer à une
Certes, tous ces travaux que association, alors que quand elles le font,
nous souhaiterions encore plus elles deviennent plus souvent bénévoles
complémentaires, ont permis de progresser que les autres. Une France mobilisable :
largement sur la connaissance de ces notamment celle des adhérents et des
différents sujets. Mais il reste à pousser donateurs dont les caractéristiques
les pouvoirs publics, aux niveaux national prouvent qu’ils sont des bénévoles en
et local, pour qu’ils prennent vraiment puissance. Enfin, une jeunesse engagée,
conscience de la « valeur ajoutée » avec une soif de projets et une forte
considérable des associations, quel que volonté d’agir : c’est une belle source
soit le territoire. Dans le domaine social, d’espoir pour les associations et la société
sur le plan économique, et plus largement de demain.
dans une société où les individualismes
sont encore bien trop affirmés et où les En savoir plus 
divisions font tant de mal. https://recherches-solidarites.org
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 23
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

L’accompagnement associatif
vit sa révolution
Depuis la création du FNDVA en
1985, le soutien aux associations
s’est développé et fortement
structuré. La création du DLA
en 2002 a mis en avant les
logiques d’accompagnement.
Principalement orienté vers
l’emploi, ce maillage participe de la
professionnalisation des pratiques
associatives. Mais le secteur,
déjà bousculé par de nombreux
changements, l’est encore plus
avec l’arrivée du digital et du
privé.

L
a création du Fonds national pour
le développement de la vie associa-
tive (FNDVA), les réseaux tels que les
centres de ressources et d’information des
bénévoles (Crib) et les maisons des asso-
ciations ont largement contribué à la struc-
turation du soutien à la vie associative.
Outils de professionnalisation
Précédemment, le soutien à la vie associa-
tive relevait quasi exclusivement des fédé-
rations. De façon complémentaire, les dis-
positifs locaux d’accompagnement (DLA)
ont servi d’outils de professionnalisation
pour les associations employeuses. Il en
découle un réel écosystème qui permet,
quelles que soient la problématique et la
taille de l’association, de trouver des inter-
locuteurs et des ressources mobilisables.
Quant à la formation des salariés, elle est
liée au développement des organismes
paritaires collecteurs agréés (OPCA) et
à l’histoire récente de la formation pro-
fessionnelle. Celle-ci est marquée par le
développement de droits individuels à
la formation, avec le compte personnel
de formation (CPF), et plus récemment
la responsabilisation des employeurs au
regard du maintien et du développement
des compétences des salariés.
Besoins croissants
Cette structuration est aujourd’hui
remise en question, alors même que les
besoins du champ associatif sont crois-
sants. Le monde associatif vit en effet
un fort renouvellement générationnel de
Le monde associatif vit
un fort renouvellement
générationnel de ses
dirigeants et les réformes
sectorielles ainsi que celles
des collectivités poussent
les structures
à se regrouper
ses dirigeants et les réformes sectorielles
ainsi que celles des collectivités poussent
les structures à se regrouper. Des muta-
tions ont aussi été introduites par la loi
sur l’économie sociale et solidaire (ESS)
de 2014 qui ouvre la porte à la reconnais-
sance de l’utilité sociale de sociétés à sta-
tut commercial sous condition de satis-
faire des critères de gestion désintéressée.
Ce champ est donc lui aussi conduit à évo-
luer fortement.
Financement par projets
L’évolution des ressources financières vers
du financement par projets et sur appel
d’offres accentue également ces besoins
de soutien. Face à ces changements, le
paysage évolue. La réforme en cours de
la formation professionnelle conduit à la
transformation des OPCA en « opérateurs
de compétences ». Leur principal métier
sera dorénavant le conseil, le finance-
ment légal de la formation étant renvoyé
à l’Urssaf. Les financements seront priori-
tairement mobilisés sur les compétences

24 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


notamment des plus bas niveaux de qua-
lification, et sur l’apprentissage.
Un marché de
l’accompagnement
C’est donc une véritable métamorphose
du champ associatif comme de ses moda-
lités de soutien qui est en cours. Dans ce
contexte, de plus en plus d’acteurs pri-
vés investissent ce qui est devenu un
marché de l’accompagnement associa-
tif et y répondent avec des offres com-
merciales multiples : conseils juridiques,
en management, lancement de projets,
recherche de financement. Les associa-
tions n’échappent pas à la « révolution
digitale » et de nombreuses start-up pro-
posent des outils de collecte de fonds, de
financements par don ou par prêt.
E, pré
Témoin HUGUES SI BI LLl’E SS, président fondateu
président du Labo de
©Kathleen-Rengnet
« L’accompagnement n’a jamais été aussi nécessaire »
Pourquoi avoir créé les DLA ?
Le point de départ était la fin programmée
du dispositif des emplois jeunes. Il
s’agissait d’accompagner les associations,
tant sur leur projet que sur leur gestion,
pour pérenniser les emplois. En tant
qu’ancien consultant d’entreprise, je
connaissais le fonds régional d’aide au
conseil (Frac) pour les PME qui finançait
le conseil aux entreprises. Pourquoi ne
pas imaginer un équivalent pour les
associations créatrices d’emplois ?
Quelle était l’idée
sous-jacente ?
Directeur à la Caisse des dépôts et
consignations (CDC), je fus très soutenu
sur cette idée par la déléguée générale à
l’emploi (DGEFP) de l’époque, Catherine
Barbaroux. Dès le départ, nous voulions
un accompagnateur dans la proximité
(par département) capable d’un diagnostic
global des besoins opérationnels
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
Nouvelles pratiques
managériales DATES
5 avril
Ces nouveaux services engendrent des 1985 : Fonds national pour
besoins de personnes qualifiées, bénévoles le développement de la vie
associative (FNDVA)
ou salariées. Pour y répondre, les universi-
tés et écoles de commerces créent des cur- 1995 : organismes
paritaires collecteurs
sus de formations ESS en appliquant les agréés (OPCA)
méthodes des entreprises privées. Cette
2002 : dispositifs locaux
« professionnalisation du secteur » com- d’accompagnement (DLA)
plète cette métamorphose par l’introduc-
2006 : centres
tion de nouvelles pratiques managériales. de ressources et
Une telle évolution doit conduire le monde d’information des
associatif à être plus attentif : la révolu- bénévoles (Crib)
tion de l’accompagnement associatif peut,
à cette condition, conforter les germes de CHIFFRES
pratiques d’utilité sociale renouvelées au 4 OPCA pour l’ESS
service de l’intérêt général. 103 DLA
Celine Fiorentino, Crédit coopératif Le budget pour la
et Lucile Manoury, L’Atelier formation professionnelle
2018 s’élève à 15,2 millions
d’euros
Crédit coopératif,
sident de la Fondation
r de l’Avise  2002- 2016
d’une association (stratégie, finance, Les associations ont-
comptabilité, emploi, gouvernance, elles encore besoin d’être
communication, etc.), apte à accompagner accompagnées ?
les associations employeuses quel que soit Au vu des mutations fortes et rapides du
leur secteur d’activité. La DGEFP et la CDC secteur, plus que jamais. D’un côté il y a
se sont engagées au démarrage à travers la baisse des subventions, le recours trop
une convention « Agir pour l’emploi » qui fréquent aux appels d’offres, les incitations
mobilisait également des crédits FSE. aux rapprochements, etc., de l’autre des
besoins sociaux en hausse ; une révolution
16 ans après leur création,
digitale modifiant les métiers et les
quel bilan ? approches ; des gouvernances associatives
Reposant sur un prédiagnostic
à repenser avec un renouvellement
généraliste, puis la mise en place d’un
difficile d’administrateurs. Le rôle des
plan d’accompagnement, le fonds
DLA est de consolider les associations en
d’ingénierie permet au DLA de financer
gardant bien en vue leur projet d’utilité
les actions à réaliser si nécessaire par un
sociale spécifique et leur dimension non
prestataire externe (cabinet comptable,
lucrative. Un axe stratégique pour demain
juriste, agence de communication, etc.)
sera l’accompagnement à la recherche et
ou par une fédération. Cela a fonctionné
développement sociale et à l’innovation,
remarquablement. Les chiffres et les
ainsi qu’aux méthodologies d’évaluation
rapports d’évaluateurs indépendants en
d’impact.
témoignent.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 25
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Emploi associatif :
la fin d’une spécificité 
L’emploi associatif n’a cessé de se
développer passant de 1 380 000
salariés en 1998 à plus de 1 800 000
aujourd’hui. Les associations ont
en effet jonglé avec des dispositifs
divers et variés pour développer leurs
activités… sans qu’il n’y ait jamais
vraiment eu de politique de l’emploi
leur étant spécifiquement dédiée. Mais
le remplacement des CAE-CUI par le
parcours emploi compétences pourrait
marquer la fin d’une tendance.

F
ondé à l’origine sur l’engagement
bénévole, le secteur associatif
emploie aujourd’hui 1,8 million de
personnes salariées. Il s’agit pour la plu-
part de petites structures puisque plus de
80 % des associations employeuses ont
moins de dix salariés.

Satisfaits
Le deuxième Baromètre de la qualité
de vie au travail dans l’ESS réalisé par
la mutuelle Chorum montre que beau-
coup de salariés associatifs sont plutôt
heureux. Ils se placent en tête de tous
les salariés avec une note de satisfaction
de 6,5 sur 10, contre 6,3 pour les salariés
de l’ESS et 6,1 pour les salariés au niveau
national. Liberté d’expression et de par-
ticipation, autonomie dans le travail et
la prise de décision, ambiance au travail,
sentiment d’utilité des actions dévelop-
pées sont parmi les atouts les mieux per-
çus, toutes fonctions confondues.
Précaire
Pourtant, l’emploi associatif reste pré-
caire et l’absence d’une véritable politique
des pouvoirs publics le fragilise davan-
tage. Dans le secteur associatif, on trouve
plus d’emplois à temps partiel, les salaires
sont plus faibles, les conventions collec-
tives moins développées. « Les travail-
leurs de l’ESS servent des missions du
public dans des conditions du privé, voire
parfois même en deçà », explique le socio-
logue Mathieu Hély (1). Et de rajouter :
« le développement de ces entreprises
participe à l’institution d’une espèce de
quatrième fonction publique précarisée
qui a les missions du public sans en avoir
ni le statut ni les protections ». Une situa-
tion qui a motivé en 2010 la création du
premier syndicat spécifiquement dédié
aux salariés associatifs (voir ci-contre).
Pis-aller
Les associations – et elles le dénoncent
depuis longtemps – utilisent de fait les
outils de la politique de l’emploi pour
répondre à leurs besoins en étant par-
faitement conscientes que ces dispositifs,
conçus pour faire diminuer le chômage,
n’ont en réalité jamais été pensés pour
elles. À l’exception des emplois jeunes
dans les années 1990 et des emplois asso-
ciatifs régionaux dans les années 2000
et 2010, les contrats aidés ont constitué
des pis-aller même s’ils ont permis de
donner du travail à des personnes qui en
étaient dépourvues et à des associations
de développer leurs projets. Les emplois
jeunes, réservés aux moins de 26 ans,
concernaient 380 000 jeunes lorsqu’ils
ont été supprimés en 2002. Auparavant
portés par une vingtaine de régions, les
emplois associatifs régionaux sont eux
aussi en diminution et ne concernent
plus aujourd’hui que six régions.

26 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


Gel
Au niveau national, le gouvernement
a remplacé en 2017 les contrats aidés
CAE-CUI par le nouveau dispositif Par-
cours emploi compétences (PEC), consi-
dérant les premiers trop coûteux et inef-
ficaces. Se basant sur une étude de la
Dares, il indique que les deux tiers de
ceux qui embauchent en contrat aidé l’au-
raient de toute façon fait, même sans ces
contrats (2). Dans le secteur non mar-
chand (associations et collectivités), c’est
pourtant seulement 21 % des embauches
qui auraient eu lieu contre 64 % qui n’au-
raient pas été faites… Le Mouvement
associatif relève qu’en février 932 PEC
ont été signés à l’échelle nationale contre
plus de 18 000 CAE-CUI en 2017 sur le
même mois. Et le nouveau dispositif, cen-
Témoins FL OR IA N M ARTI NE
Syndicat ASSO (Acti
« Dans trop d’associations, il y a un flou entre le statut
de bénévole et celui de salarié »
DR
DR
Quelles sont les grandes
difficultés de l’emploi
associatif ?
Le problème principal, c’est la précarité.
Ce sont des emplois peu stables, peu
rémunérés avec des contrats de travail
qui peuvent être dérogatoires au
code du travail et qui très souvent ne
correspondent pas aux tâches et aux
responsabilités qui sont demandées aux
salariés. 53 % des salariés associatifs
sont en CDI (contre 80 % dans le reste
du privé), 30 % sont hors convention
collective (8 % dans le reste du privé).
Dans trop d’associations il y a un flou
entre le statut de bénévole, de salarié,
de militant qui conduit parfois à des
situations d’« auto-exploitation ». Tout
cela cause beaucoup de souffrance au
travail, tout particulièrement dans les
très petites associations. Ajoutons à cela
l’instrumentalisation du service civique
qui est parfois utilisé comme un moyen de
remplacer l’emploi…
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
tré sur l’insertion, ne semble pas adapté
aux petites associations ni aux primo- DATES
5 avril
employeurs, largement touchés par le 1997 : emplois jeunes
gel des emplois aidés. Selon les derniers 2004 : chèque emploi
chiffres de Recherches & Solidarités, l’em- associatif
ploi associatif affiche une baisse de 0,7 % 2004 : emplois associatifs
en 2017, soit environ 13 000 emplois de régionaux
moins. Un chiffre qui dénote avec la ten- 2010 : premier syndicat
dance globale de l’emploi privé qui lui est dédié aux salariés
à la hausse (+ 1,5 %). La fin d’une spéci- associatifs
ficité associative ? 2018 : parcours emploi
Sophie Weiler compétences
(1) Matthieu Hély et Pascale Moulévrier, « L’économie
sociale et solidaire : de l’utopie aux pratiques », éditions CHIFFRES
La Dispute.
(2) Argument fondé notamment sur l’étude de la Dares 167 500 associations
publiée en mars 2017 « Les contrats aidés : quels objectifs, employeuses
quel bilan ? »
1 834 000 salariés
38 milliards de masse
salariale
1 emploi sur 10 du secteur
privé
Z ET LUCI E BELLoc OTTO,
ur ass iat if)
des salarié.e.s du secte
on
Qu’est-ce qui motive les Quelles actions sont
salariés associatifs à adhérer nécessaires ?
à votre syndicat ? Il y a un gros travail d’information à faire
Ils le font pour des raisons politiques auprès des salariés associatifs. Beaucoup,
et militantes, mais il y a souvent un par exemple, ignorent qu’ils peuvent
moment clé dans leur engagement, faire appel à des conseillers auprès de
c’est le désenchantement. Ce sont des leur Direccte. Dans les restructurations
personnes volontaires, qui croient aux (regroupements, fusions…), il faudrait
valeurs des associations qui les emploient que les salariés soient davantage
et qui, brusquement, découvrent qu’il y impliqués et pris en compte. Il serait
a contradiction entre ces valeurs et leurs normal qu’il puisse y avoir des instances
conditions de travail. Ils s’aperçoivent représentatives du personnel même dans
souvent qu’ils ne sont pas les seuls à les petites structures associatives (qui ont
vivre cette déception et, de leur situation moins de dix salariés). Nous interpellons
individuelle, ils souhaitent passer à les associations sur la mise en cohérence
une dimension de lutte plus collective. des valeurs qu’elles affichent avec leurs
Aujourd’hui, notre jeune syndicat regroupe pratiques. Leurs difficultés financières
300 adhérents et adhérentes. Ce sont en sont réelles, mais est-ce une raison pour
règle générale des primo-syndiqués, plutôt recourir massivement au volontariat ou au
jeunes et plutôt des femmes. stage ou pour imposer à leurs équipes un
management entrepreneurial ?
En savoir plus
https://syndicat-asso.fr
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 27
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

Les habits neufs

de l’engagement associatif
Depuis vingt ans, le monde
associatif a su accompagner
un formidable mouvement
de diversification des modes
d’engagement. Les bénévoles
ont des profils plus divers,
« réguliers », « ponctuels », en
bénévolat de compétences,
auxquels se joignent des services
civiques, des actifs, des étudiants
en stage ou en projet collectif…
Le défi essentiel aujourd’hui :
associer tous les acteurs au projet
associatif.

D
e très nombreux acteurs ont
permis de concevoir, formali-
ser et développer différentes
formes d’engagement. Ainsi, au début
des années 2000, ont été créés sous l’im-
pulsion de nombreuses associations,
France Bénévolat pour promouvoir l’en-
gagement bénévole associatif, Espace
Bénévolat, devenu Tous Bénévoles, et
Passerelles et Compétences pour déve-
lopper le bénévolat de compétences.
Puis ce sera la création de Pro Bono
Lab pour le mécénat de compétences
ou encore Bénénova pour des actions
courtes, ponctuelles et collectives.
Rappeler les fondamentaux
Le paysage du volontariat a également été
profondément rénové, avec la création
de France Volontaires en 2009, pour le
champ international et du service civique
en 2010, sous l’impulsion d’Unis-Cité et
de nombreuses associations. La liste est
loin d’être exhaustive, et illustre le dyna-
En 2017, une prise de parole
publique montre combien
l’engagement associatif
est source de solutions
pour des défis sociétaux.
misme du monde associatif. Mais alors
que ces dynamiques se développent, de
nombreuses associations éprouvent la
nécessité de rappeler les fondamentaux
de l’engagement associatif. En 2015, une
quarantaine d’entre elles, membres de
France Bénévolat, prennent l’initiative
d’une tribune afin de promouvoir « l’en-
gagement bénévole associatif pour une
citoyenneté active » et d’en rappeler à
tous les valeurs : acte libre, volontaire,
sans contrepartie directe dans l’espace de
liberté ouvert par la loi de 1901.
Fausses bonnes idées
En 2017, une autre prise de parole
publique (1) montre combien l’engage-
ment associatif est source de solutions
pour des défis sociétaux : allongement
de la vie, accueil des réfugiés, bataille
pour l’emploi, transformation digitale,
transition écologique… Cette prise de
parole attire aussi l’attention sur les
fausses bonnes idées véhiculées à pro-
pos du bénévolat, comme celle d’un statut
du bénévolat qui en restreindrait fatale-
ment la forme et la liberté qui le fondent.
L’élaboration d’un tel statut a fait l’ob-
jet de différents travaux avec des repré-
sentants du monde associatif mais, par
bien des aspects, il heurte la nature même
du bénévolat qui est un don de temps
librement consenti et gratuit. Il en va
de même pour l’obligation de bénévo-
lat en échange d’un droit social comme
le RSA, une idée que le département du
Haut-Rhin a vainement tenté d’appli-
quer en 2016.

28 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018


Trois défis à relever
Si ces deux décennies ont fait progresser
l’engagement en France, des défis sont
encore à relever. Partageons en trois.
Le renouvellement des dirigeants est le
premier. Pour de nombreuses associa-
tions, il y a crise sur le sujet. Bien sou-
vent la question n’est pas de trouver le
(la) président(e) providentiel (le), mais
de renouveler le projet associatif ou de
réinterroger les modes de gouvernance.
Deuxième défi, l’engagement pour tous.
Comment le mettre au service de ceux
pour qui il peut être une chance dans leur
vie : personnes en situation de handi-
cap, chômeurs de longue durée, jeunes
décrocheurs… Troisième défi, la recon-
naissance et la valorisation de l’engage-
ment, pour prolonger les initiatives déjà
Témoin YANN ICK BLANC, etHaprésident de l’Agence du service civique
« L’axe de l’action collective s’est déplacé de la vie statutaire
vers le pilotage des projets »
DR
Comment la notion
d’engagement a-t-elle
évolué ?
Le mot « engagement » désigne, dans la
diversité même de ses usages, la mutation
qu’a connue en quelques décennies la
relation entre l’individu et le collectif.
Autrefois l’identité individuelle se
construisait à partir de l’appartenance à
une communauté, un métier, une classe
sociale, une organisation ou un courant
d’opinion. Aujourd’hui, la relation entre
l’individu et l’institution, l’organisation,
l’entreprise, l’association, est davantage
l’expression d’un choix volontaire et
un même individu peut participer
simultanément ou successivement à
plusieurs de ces communautés. Son
identité ne se construit plus à partir
de son appartenance mais au fil de son
parcours. « Engagement » est le mot que
nous utilisons pour parler de l’intensité et
de la stabilité de ces relations.
N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp
prises, comme l’extension de la valida-
tion des acquis aux activités bénévoles, DATES
5 avril
en 2003, et la création du Passeport Béné- 2006 : statut du volontaire
vole par France Bénévolat en 2007. Car associatif
la question ne se limite pas à la mobili- 2007 : le passeport
sation de nouveaux bénévoles. L’enjeu bénévole
véritable est la capacité des associations 2016 : la France s’engage
à associer tous les acteurs à leur projet
associatif, en accueillant leurs initiatives
quitte à prendre le risque de bouger les CHIFFRES
lignes en leur sein ! Au moins 13 millions de
bénévoles en France
Hubert Pénicaud, 25 % de Français sont
Vice-président de France Bénévolat bénévoles dans une
association
(1) Prise de parole de Bénénova, France Bénévolat, De 2010 à 2016,
Passerelles & Compétences, Pro Bono Lab et Tous le bénévolat associatif
Bénévoles. a augmenté de 16,8 %
agement civique
ut-commissaire à l’eng
Les associations ont-elles Quelles sont les incidences
une longueur d’avance ? sur leur fonctionnement ?
Elles ont été les premières à ressentir et L’essentiel est de comprendre que l’axe de
à comprendre cette mutation. Les partis l’action collective et de sa gouvernance
politiques et les syndicats n’ont pas su en s’est déplacé de la vie statutaire vers le
tirer les conséquences, d’où leur déclin pilotage des projets et des actions. Le cœur
spectaculaire. Le lien d’association, c’est- de la vie associative ne bat plus dans le
à-dire la contribution volontaire à un renouvellement des adhésions et la vie
projet ou en défense d’une cause, est des instances mais dans les groupes de
devenu le prototype du lien social, de projet et les comités de pilotage. C’est là
l’action collective. Les entreprises et les que se retrouvent salariés et bénévoles, là
institutions publiques cherchent, non que se prennent les décisions essentielles,
sans difficultés, à en adapter les ressorts là que se joue la reconnaissance, qui
à leur propre logique d’organisation. est la contrepartie fondamentale de
Les associations peuvent s’adapter plus l’engagement. Il faut apporter le plus grand
vite, faire évoluer leurs règles. Elles soin au fonctionnement de ces instances
devraient en faire bien davantage un levier informelles car elles sont le lieu de la
stratégique dans leurs relations avec leurs véritable démocratie associative.
partenaires.
Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 29
ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

L’engagement associatif
prend un coup de jeune
Depuis vingt ans, le travail
des associations et certaines
orientations politiques ont
contribué à transformer
la manière dont les jeunes
s’engagent. Mais au-delà
de l’influence des acteurs
institutionnels, l’évolution de cet
engagement est marquée par les
revendications d’une jeunesse à la
recherche tant d’épanouissement
individuel que d’expériences
collectives.

L
es formes d’engagement ont connu
une évolution depuis le début des
années 1970, qui s’explique autant
par le tournant de l’individualisation
que par la chute des grandes idéologies.
En 1997, Jacques Ion théorise ainsi le
passage d’un engagement dit « timbre »,
caractérisé par l’adhésion, à un engage-
ment dit « post-it ».
Refus de la délégation
de parole
En accordant une place décisive à l’indi-
vidu, le tournant de la modernité rebat
les cartes au point que l’engagement soit
considéré comme en crise, notamment
en raison d’un rejet de la politique tra-
ditionnelle. Mais Jacques Ion remet en
cause l’idée de crise en montrant que si le
nombre d’adhérents dans les partis poli-
tiques et les syndicats diminue, le nombre
de bénévoles associatifs augmente. L’en-
gagement devient réversible, pragma-
tique, caractérisé par le refus de la délé-
gation de parole, soucieux de permettre
aux individus de contribuer à construire
l’identité de la structure. Il se recompose
pour répondre aux aspirations des jeunes
qui souhaitent articuler défense de l’inté-
rêt général et épanouissement individuel,
porter un projet politique tout en étant
critique de la politique traditionnelle.
Le tournant de la Junior
association
Au cours des vingt dernières années, la
mise en place de certains dispositifs a
permis de répondre à ces attentes. Ainsi,
dès 1998, à l’initiative de quatre associa-
tions, voyait le jour le concept de Junior
association. Un dispositif qui marque
un véritable tournant puisqu’il permet
aux mineurs de se rassembler afin de
développer un projet commun dans une
dynamique associative. La Junior associa-
tion n’est pas soumise à la loi 1901 mais
se voit attribuer un label, délivré par le
Réseau national des Juniors associations,
permettant de bénéficier de certaines
facilités et de favoriser l’engagement des
jeunes. De son côté, la loi de 1901 a été
modifiée en 2017 pour officialiser une
majorité associative à 16 ans, âge à partir
duquel l’on peut adhérer et prendre des
responsabilités dans une association sans
l’autorisation préalable de ses parents.
Le boom du service civique
Autre évolution (révolution ?), le service
civique, créé en 2010 par Martin Hir-
sch. Il s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans
(30 ans pour les personnes en situation
de handicap) souhaitant s’investir pour
une durée de six à douze mois dans une
mission d’intérêt général. Avec pour

30 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018

 N°
loi a 20 ans
Associations mode d’emp

ambition d’encourager la mixité sociale et Reconnaissance

de renforcer le sentiment d’appartenance de l’engagement étudiant DATES
5 avril
à la Nation. Le dispositif rencontre rapi- La loi Égalité et citoyenneté du 27 jan- 1998 : création des Juniors
dement un franc succès auprès des jeunes vier 2017 avait dès les premières discus- associations
volontaires, qui y trouvent une manière sions l’ambition claire de favoriser et de 2010 : création du service
de s’engager pour le collectif tout en déve- reconnaître l’engagement étudiant dans civique
loppant de nouvelles compétences. C’est les établissements d’enseignement supé- 2015 : généralisation
aujourd’hui l’une des formes d’engage- rieur. Grâce à elle, les étudiants engagés de l’année de césure
ment les plus populaires, au point que le peuvent désormais bénéficier d’aménage- 2017 : loi Égalité &
nombre de candidats au volontariat sur- ments de scolarité, sur le même modèle citoyenneté
passe largement le nombre de missions que ceux dont bénéficient les étudiants
proposées. Dans une optique un peu dif- sportifs de haut niveau. Ils peuvent ainsi finale de leurs diplômes. Il s’agit d’une
férente, depuis juillet 2015, chaque étu- être dispensés de certains cours ou stages, véritable avancée pour les étudiants,
diant a le droit de prendre une année de ce qui permettra aux responsables asso- dont l’engagement a longtemps été perçu
césure dans son cursus. Cette pause dans ciatifs étudiants de conjuguer engage- comme contraire à la réussite scolaire.
les parcours scolaires, conforte la validité ment et études supérieures. Autre mesure
des itinéraires non linéaires et permet à phare de la loi : les étudiants engagés Julien Dubois, Animafac
de nombreux étudiants de découvrir l’en- pourront se voir attribuer des crédits
gagement sans interrompre leurs études. ECTS, qui participeront à la validation

ngage
fondation La France s’e
©João Pedro Correia - CC BY 2.0

, président de la
Témoin FRANÇO IS HOLLANDE

« La force de l’engagement, c’est qu’il permet de trouver

des liens, des solidarités et des philosophies communes »

Pour quelles raisons avez-
vous fait du service civique
une priorité de votre
quinquennat ?
Le service civique a été créé par Nicolas
Sarkozy et Martin Hirsch durant le
quinquennat précédent, mais il n’était
pas véritablement monté en régime. Je
voulais qu’il devienne universel, ce qui ne
voulait pas dire obligatoire. L’idée était de
garder l’esprit, c’est-à-dire le volontariat, la
durée des missions et faire en sorte qu’il
puisse être une expérience pour les jeunes.
J’ai donc mis davantage de moyens pour
qu’entre 150 000 et 180 000 personnes
puissent en bénéficier. Mais c’est encore
trop peu, car il y a plus de jeunes qui
veulent faire des services civiques que
d’offres de missions.
Quelles évolutions percevez-
vous dans les formes
d’engagement des jeunes ?
Ce sont des engagements plus ponctuels,
moins durables et qui se méfient des
grandes organisations. Mais il y a aussi
le besoin d’être avec les autres, parce que
même si on veut garder une forme de
relation individuelle à l’engagement, on
veut agir ensemble. Rendre nécessaire et
agréable le rapport à l’engagement avec
d’autres doit être notre objectif. La force
de l’engagement, c’est qu’il permet de
trouver des liens, des solidarités et des
philosophies communes.
Quelles sont vos ambitions
pour la fondation La France
s’engage ?
Je pense qu’il faudra aller au-delà du
concours qui ne permet de retenir qu’une
quinzaine de projets. Nous travaillons
notamment sur les jeunes entrepreneurs
sociaux innovants, sur la culture, nous
allons faire en sorte que l’on puisse
toucher des territoires qui pour l’instant
ne sont pas suffisamment organisés pour
porter ces projets et travailler avec d’autres
acteurs. Il faut éviter les concurrences
inutiles avec d’autres fondations. La
France s’engage doit davantage jouer un
rôle de coordination et d’amplification,
avec un soin particulier donné à
l’accompagnement des projets, car ce n’est
pas simplement une dotation financière
qui est attendue, mais un suivi, un conseil,
permettant une diffusion plus large et un
impact plus grand des projets labellisés.

Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 31

ASSOCIATIONS MODE D’EMPLOI A 20 ANS

20
N° 8 : avril 1999, le nouveau
plan comptable associatif
est sorti.
couvertu
N° 19 : avril 2000,
Associations
N° 1 : mode d’emploi
septembre 1998, pose une question
le n° 1 qui reviendra
d’Associations régulièrement : la
mode d’emploi parité femmes-
sort le même hommes dans les
mois que associations.
la grande
instruction
fiscale de
1998 !

N° 46 : février 2003,
le dossier unique
de demande
de subvention,
institué en 2002, va
N° 25 : rentrer peu à peu
janvier 2001, dans la pratique
c’est l’année du des pouvoirs
centenaire de publics.
la loi de 1901.
Cela mérite
bien un numéro
spécial réalisé
en partenariat
avec la
mission pour la N° 51 :
célébration du septembre 2003,
centenaire de le bénévolat
la loi. N° 31 : septembre 2001, les en Une. Il y en
emplois jeunes arrivent aura beaucoup
bientôt à terme… Un défi d’autres sur
(déjà !) pour les nombreuses cette précieuse
associations qui en ont « ressource
bénéficié. humaine » !

N° 63 : novembre 2004,
Associations mode
d’emploi célèbre le million
d’associations en France !
N° 83 : novembre 2006,
nouvelle forme
d’engagement, le
volontariat associatif
est né.
N° 65 : janvier 2005, concept de plus en
plus plébiscité, la démocratie participative
interpelle directement les associations.

32 Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018

ures pour
N° 87 : mars 2007,
20 ans
N° 100 : juin 2008, dix ans ! Un
anniversaire sous forme de
N°
Associations mode d’emp

N°114 : décembre 2009, le
financement associatif, de plus
en plus obligé de jongler entre
subventions et appel d’offres.
loi a 20 ans

Associations mode « mieux dix ans associatif ».

d’emploi met les
propositions pour
le monde associatif
des candidats à la
présidentielle au
banc d’essai. Un
exercice qui sera
renouvelé à chaque
élection.

N° 117 :
mars 2010,
la CPO, la
nouvelle
convention
pluriannuelle
d’objectif est
censée se
généraliser…

N° 136 : février 2012, l’Europe

N° 121 : septembre 2010, le service clarifie les règles de
civique est arrivé. Il n’est alors financement public des services
N° 160 : juillet 2014, d’intérêt économique général.
que promesses…
la loi relative à
l’économie sociale
et solidaire marque
une étape importante
pour les associations.

N° 168 : avril 2015, la
loi Notre bouscule le
paysage territorial
français. Les
associations vont
devoir travailler
avec les nouvelles
régions et de plus
en plus avec les
intercommunalités. N° 178 : avril 2016, le N° 191 : septembre 2017, c’est la
financement participatif mauvaise surprise de l’année : les
rentre dans les contrats aidés sont remis en cause
habitudes associatives. par le nouveau gouvernement…

Associations mode d’emploi n°200 Juin-Juillet 2018 33

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