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Gabriele Cappelletti

Guerre civile
et
Participation
La participation politique réduit-elle le risque
d'éclatement des guerres civiles?

de Gabriele Cappelletti Assistant: Damian Raess


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Gabriele Cappelletti

Indice
Les causes des guerres civiles, un aperçu de la littérature....................................................................2
Les causes des guerres civiles, un aperçu de la littérature....................................................................3
Approches théoriques et facteurs explicatifs....................................................................................3
Approche économique..................................................................................................................4
Approche politique.......................................................................................................................5
Approche constructiviste..............................................................................................................6
Approches démographiques-géographiques.................................................................................6
L'influence du régime politique........................................................................................................7
La paix libérale dans les relations internationales........................................................................7
Guerre civile et régime politique..................................................................................................8
Les concepts-clé..................................................................................................................................11
Démocratie et participation.............................................................................................................11
Les guerres civiles..........................................................................................................................12
Hypothèses.........................................................................................................................................13
Présentation des sources.....................................................................................................................15
Les indices de démocratie..............................................................................................................15
Le Polity IV Index......................................................................................................................15
Le database des Guerres civiles......................................................................................................16
Le Correlates of War dataset.......................................................................................................16
Opérationnalisation des concepts.......................................................................................................17
Participation politique et Limites à l’exécutif................................................................................17
La Participation..........................................................................................................................17
L’indépendance de l’exécutif (XCONST)..................................................................................19
Les guerres civiles selon le CoW Project.......................................................................................20
Analyse...............................................................................................................................................22
PARCOMP et CWPROB................................................................................................................22
PARCOMP, XCONST et CWPROB..............................................................................................23
XCONST et CWPROB..................................................................................................................27
Polity et CWPROB.........................................................................................................................29
Conclusions........................................................................................................................................32
Bibliographie......................................................................................................................................34

1. Introduction
La théorie de la paix démocratique est probablement l'une des théories plus connues – et débattues –
du domaine des Relations Internationales: la possibilité de trouver un élément explicatif qui pourrait
aider à éviter l'émergence des guerres est sans doute un stimulus important pour s'efforcer
d'approfondir cette hypothèse.
On se trouve pourtant confrontés à une autre constatation: les guerres inter-étatiques ne constituent
qu'une partie relativement restreinte du nombre total de conflits dans le monde. Mis à part leur
visibilité médiatique, ce sont les guerres civiles qui constituent actuellement le plus grand défi pour
la paix et la sécurité mondiale, et cela non seulement à cause du nombre des victimes:
l'internationalisation des conflits internes est en effet un risque concret qui déstabilise des régions

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entières.
C’est en partant de ce constat que j’ai eu l’idée de traiter la question du lien entre démocratie et
risque de guerres civile. Après un aperçu de la littérature j’ai constaté deux choses. Premièrement, le
régime politique a été déjà considéré comme une variable capable d’expliquer l’éclatement de
guerres civiles, en postulant qu’un plus haut niveau de démocratie entraînerait à un risque réduit de
guerres civiles. Deuxièmement j’ai pu observer qu’il y a très peu d’auteurs qui, parallèlement aux
tests empiriques, se sont interrogés sur le « pourquoi » de ce lien. Mais la démocratie est un concept
multiforme, qui touche plusieurs dimensions et qui compte différentes composantes qui – peut-être
– ont un « poids spécifique » différent dans la prévention des conflits à l’intérieur de l’état.
J’ai donc pensé qu’un travail intéressant pourrait être celui de ne pas prendre en considération
simplement la démocratie dans son ensemble, mais plutôt d’analyser le lien entre guerre civile et
l’un des critères qui définissent le régime politique. Ceci pourrait aider à tracer non seulement une
corrélation empirique, mais aussi à éclairer quels sont les composantes de la démocratie qui
contribuent effectivement à la réduction du risque de guerres civiles.
Parmi ces composantes j’ai intuitivement considéré que la participation politique pourrait jouer un
rôle essentiel : je crois en effet que le fait que les mécontentements de la population puissent
s’exprimer librement et puissent arriver à conditionner la prise de décision à travers des moyens
légaux pourraient réduire le recours à des moyens illégitimes, et notamment le recours à la force.
J’ai donc commencé mon travail avec un propos à l’esprit : chercher d’analyser s’il y a un lien de
corrélation entre le degré de participation politique permise dans un état donné et la probabilité que
ce même état connaisse une guerre civile, et notamment si un plus haut degré de participation
entraîne à un risque réduit de guerre civile.

2. Les causes des guerres civiles, un aperçu


de la littérature
2.1. Approches théoriques et facteurs explicatifs
Une observation préliminaire est nécessaire. Parmi les nombreux travaux qui ont été faits sur ce
sujet, je vais prendre en considération seul ceux qui portent spécifiquement sur les causes des
guerres civiles: je ne vais pas discuter ceux qui cherchent à expliquer leur durée, ni ceux qui veulent
cerner les éléments qui facilitent leur fin. De la même manière, je ne vais pas m'intéresser aux
travaux de relations internationales qui expliquent les guerres civiles en fonction des interventions
d'états tiers. Ce qui m'intéresse ce sont exclusivement les causes endogènes qui portent à

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l'éclatement des guerres civiles.

Dans ce sens, nombreux auteurs ont cherché à analyser les guerres civiles à l'aide d'autant de causes
explicatives, mais aucune étude ne prétend d'avoir réussi à trouver une cause univoque qui puisse
expliquer, elle seule, pourquoi une guerre civile éclate: les phénomènes sociaux sont le résultants
d'une toile épaisse d'interactions qui souvent échappent à toute simplification.

Nicholas Sambanis (2002) indique 4 perspectives qui ont été utilisées pour expliquer l'éclatement
des guerres civiles.

2.1.1. Approche économique


La première perspective est celle économique, que Sambanis divise en deux « générations », la
première étant celle qui met l'accent sur la modernisation économique et la concurrence entre
ethnies pour obtenir l'accès aux ressources (Newman cité dans Sambanis 2002), et la deuxième celle
selon laquelle les individus s'engagent dans une guerre civile suivant des préférences et des calculs
d'utilité rationnels (Hirscheifer, Grossman, Fearon et Laitin cités dans Sambanis 2002, Collier et
Hoeffler 2000). Ces travaux utilisent des modèles économiques qui traitent la variable « offre de
rebelles » en fonction de variables telles que « probabilité de victoire » et « analyse coût-bénéfice
de la violence », et reposent sur des indicateurs strictement liés à la situation économique.

Parmi les facteurs économiques, le plus important est le niveau de développement économique de
l'ensemble de la société. Dans tous les travaux qui prennent en considération le PNB ou le PNB par
habitant (ou des autres indicateurs qui mesurent également le développement économique des pays,
comme par exemple Henderson et Singer (2000), qui utilisent le taux de consommation d'énergie
par habitant), la conclusion est que le niveau de développement économique d'un pays a un rapport
significatif avec la probabilité que ce même pays a de connaître une guerre civile (Auvinen 1997,
Henderson et Singer 2000, Sambanis 2000, Elbadawi et Sambanis 20000, Hegre et al 2001, Collier
et Hoeffler 2000, Elbadawi et Sambanis 2002, Fearon et Laitin 2003, Henderson 2000).
L'importance du taux de croissance du PNB n'est par contre pas claire: certains auteurs (Collier et
Hoeffler 2000, Elbadawi Sambanis 2002) considèrent qu'entre cette variable et la probabilité de
guerre civile il y a un lien négatif, par contre Auvinen (1997) et Sambanis (2000) trouvent que ce
rapport n'est pas significatif du tout. Le dernier des facteurs économiques que je vais citer c'est la
présence de ressources primaires: dans ce sens, l'hypothèse est que la présence de ce type de
ressources facilite le financement des rebelles, et donc contribue à augmenter la propension des

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possibles rebelles vers le conflit. Collier et Hoeffler (2000), qui ont étés les premiers à proposer ce
raisonnement, trouvent que l'hypothèse est confirmée en utilisant comme indicateur le poids de
l'exportation de matières premières sur le total du PIB. Des autres travaux (Sambanis 2000,
Elbadawi et Sambanis 2002) nient que cette relation existe.

2.1.2. Approche politique


La seconde perspective citée par Sambanis est celle du choix rationnel politique, selon laquelle la
décision des rebelles de se révolter contre l'État serait de redresser des torts. Dans ce cas aussi,
l'éclatement des guerres civiles serait expliqué par des calculs d'utilité et de « coût-bénéfice »
individuels, mais parmi les bénéfices on considère que les revendications politiques jouent un rôle
fondamental et, pour ce qui concerne les coûts, la capacité de répression étatique est un facteur
essentiel. Une des plus importantes études dans ce sens est celui de Hegre et al (2001).

Les facteurs politiques que j’inclus dans cette partie ne sont pas liés strictement au régime politique,
que je vais analyser dans la prochaine partie de ce chapitre.

Une cause généralement cité dans les travaux liés au domaine de l'explication des guerres civiles est
celui de l'instabilité. Les indicateurs utilisés pour mesurer l'instabilité d'un pays sont généralement
trois: la proximité dans le temps d'un conflit violent (Hegre et al 2001, Sambanis 2000, Elbadawi et
Sambanis 2002), la « jeunesse » de l'État (Fearon et Laitin 2003, Hegre et al 2001) et la proximité
d'un grand changement politique ( Fearon et Laitin 2003, Hegre et al 2001, Sambanis 2000). Quel
que soit l'indicateur adopté par les auteurs, il reste toujours évident que les changements politiques
et l'instabilité sont liés à une plus grande probabilité de connaître des guerres civiles.

Un autre élément qui a été souvent analysé dans le cadre des guerres civiles est celui des dépenses
militaires. Selon certains auteurs (Henderson 2000, Auvinen 1997), si l'État utilise une grande
portion de son PNB pour des dépenses militaires, les groupes contestataires percevront le conflit
armé comme le seul moyen pour exprimer leur mécontentement. En plus, dans le cas des PVD les
dépenses militaires seraient un frein aux investissements étatiques en faveur des services à la
population et du développement économique, ce qui augmenterait ultérieurement la probabilité de
guerre civile. Cette hypothèse a été confirmée dans le cas des guerres civiles africaines (Henderson
2000) et dans celui des guerres civiles dans les pays sous-développés entre 1981 et 1989 (Auvinen
1997). Par contre il semblerait que les dépenses militaires diminuent le risque de guerre civile dans
les états post-coloniaux (Henderson et Singer 2000).

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2.1.3. Approche constructiviste


La troisième perspective est celle constructiviste. Cet approche se concentre sur l'explication des
guerres civiles en fonction de la construction et de la mobilisation collective des différentes
identités, et notamment sur l'utilisation que les élites font des représentations collectives (voire leur
manipulation) afin de poursuivre des buts. Il faut toutefois rappeler que la compétition entre
groupes ethniques est considérée un élément clé pour expliquer l'éclatement des guerres civiles par
nombreux chercheurs en dehors du paradigme constructiviste. Pratiquement tous les travaux qui
traitent les causes des guerres civiles prennent en compte la variable de l'hétérogénéité ethnique (par
exemple Collier et Hoeffler 2000, Hegre 2001). Pour une critique de l'influence du facteur ethnique
dans l'explication des guerres civiles, il faut par contre faire référence à Henderson (2000).

Les facteurs explicatifs qui se relient à l’approche constructiviste sont principalement ceux qui
concernent les caractéristiques ethniques et religieuses de l'État en question. En analysant le lien
entre fragmentation ethnique et guerre civile, la plupart des études ont démontré que ce n'est pas un
rapport significatif (Sambanis 2000, Collier et Hoeffler 2000, Elbadawi et Sambanis 2000, Fearon
et Laitin 2003). Par contre, pour ce qui concerne l'hypothèse de la polarisation, les conclusions sont
contradictoires: les recherches de Henderson (2000) et Henderson et Singer (2000) excluent
l'existence d'un rapport entre concentration ethno-culturelle et guerre civile, par contre Auvinen
(1997) le trouve confirmée. Elbadawi et Sambanis (2000) se sont exprimés en faveur d'une « vision
alternative »: ils ont découvert que la probabilité de conflit est plus haute quand on se trouve dans
une situation de « bipolarisme culturel », tandis que les pays avec un degré d'hétérogénéité et
d'homogénéité marqué connaissent moins de guerres civiles. Tout en confirmant que, du point de
vue général, le bipolarisme ethnique est la conditions la plus incline à la guerre civile, dans
Elbadawi et Sambanis (2002) les auteurs ont soutenu la thèse selon laquelle bipolarisation,
concentration et fragmentation ethnique peuvent toutes favoriser l'éclatement des conflits, mais il
faut qu'elles soient combinées avec des autres facteurs explicatifs, tels que la situation politique ou
la pauvreté. Une dernière observation est celle de Henderson (2000), qui trouve que le risque de
guerre civile augmente si les groupes ethniques se constituent en partis politiques « ethnicisés ».

2.1.4. Approches démographiques-géographiques


La dernière « famille » explicative que je vais prendre en considération est celle liée aux facteurs

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démographiques et géographiques des états. Trois travaux prennent en considération ce genre de


facteurs, notamment la présence de montagnes – qui favoriserait des techniques de guerrilla en
encourageant les éventuels rebelles – et la taille de la population qui, en augmentant, augmenterait
la probabilité qu'il y ait deux ou plus groupes potentiellement en conflit entre eux (Collier et
Hoeffler 2000). Le premier de ces deux éléments est considéré non significatif par Sambanis
(2000), tandis que Fearon et Laitin (2003) soutiennent les montagnes jouent un rôle important.

Pour ce qui concerne la taille de la population, tous les auteurs se trouvent d'accord sur le fait qu'il
existe une relation positive entre celle-ci et la probabilité de l'éclatement d'une guerre civile
(Sambanis 2000, Elbadawi et Sambanis 2002, Fearon et Laitin 2003). Il faut cependant faire un
constat par rapport au possible biais de sélection présent dans les résultats de ces travaux: il est fort
possible que ces résultats se limitent à reproduire le fait qu'on considère une guerre civile en
fonction des morts qu'elle entraîne. Le dataset des guerres civiles serait donc forcément plus riche
de pays avec une population plus grande, car les guerres civiles sont logiquement plus inclines à
causer un plus grand nombre de victimes (Sambanis 2000).

2.2. L'influence du régime politique


2.2.1. La paix libérale dans les relations internationales
L'hypothèse selon laquelle les régimes démocratiques connaissent moins de guerres inter-étatiques
est strictement liée à la théorie de la paix libérale dans les relations internationales. Cette théorie,
qui a vu le jour grâce à Immanuel Kant en 1795, soutient que des pays avec un régime
démocratique et libéral n'entreront jamais en guerre entre eux, à cause d'une série de caractéristiques
intrinsèques au régime démocratique. Nombreux auteurs se sont penchés sur cette question en vertu
de son importance pratique: trouver une constante qui empêcherait toute guerre est sans doute un
encouragement important. Mais avant que la communauté scientifique ne prenne en considération
sérieusement cette hypothèse, c'est le milieu politique qui s'en est approprié: les « 14 points » de
Wilson sont un exemple évident de l'espoir que la politique occidentale reposait dans l'équation
« démocratie = paix ».

Les premiers travaux empiriques de la communauté scientifique sur cette question datent de la fin
des années '70, et sont formulés comme une critique à l'automatisme du lien entre démocratie et
paix. Dans leur travail de 1976, Singer et Small notent que les démocraties sont loin de ne pas

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s'engager dans des conflits violents et, au contraire, les guerres dans lesquelles elles s'engagent
tendent à durer plus longtemps. Ils notent cependant qu'il y a une absence de guerres entre
démocraties, mais ils expliquent ceci simplement en fonction de l'absence de frontières communes
entre les pas démocratiques.

Le travail de Rummel (1983) contredit partiellement l'hypothèse de Singer et Small: il constate en


effet qu'il n'y a pas de guerre entre pays démocratiques et que, parallèlement, entre 1976 et 1980, il
n'y a pas eu de guerre sans la participation d'au moins une non-démocratie. Les régimes non-
démocratique seraient donc plus prônes à la guerre.

Ces deux travaux, qui sont d'une nature strictement quantitative et se limitent à constater une
constante empirique, inaugurent une période d'efforts qui cherchent à donner une justification
théorique à l'hypothèse de la paix libérale.

Selon Battistella (2006), les deux contributions principales dans ce domaine sont celles de Doyle et
de Russett (cités dans Battistella 2006). Le premier auteur justifie la paix libérale en fonction des
contraintes auxquelles sont soumis les décideurs politiques, ainsi que des réticences morales qui,
absentes dans le cas d'une autocratie, sont fortes quand une démocratie se trouve confrontée à une
autre démocratie. Russett remplace l'argument « unilatéral » avec une explication « relationnelle »:
ce ne sont pas des caractéristiques intrinsèques à la démocratie en tant que telle à empêcher les
guerres entre démocraties, mais plutôt la reconnaissance mutuelle et réciproque du « status » de
démocratie entre les états. La prudence et la disponibilité au règlement pacifique des différends est
donc le produit de la conscience d'un partage de culture politique fondée sur la médiation et le
règlement pacifique, ainsi qu'un système institutionnel qui rend la déclaration d'une guerre plus
compliquée et longue.

On voit donc que les caractéristiques du système politico-institutionnel sont considérées essentielles
dans la prévention des guerres inter-étatiques. Ceci nous permet d'imaginer que ces facteurs
politiques institutionnels pourraient se révéler déterminants aussi dans la prévention des conflits
internes.

2.2.2. Guerre civile et régime politique


Selon Krain et Myers (1996), il y a plusieurs liens qui ont permis de passer de la théorie de la paix
démocratique en relations internationales au lien entre démocratie et conflit interne. Le premier est
le travail de Rummel de 1995 qui, « en démontrant que les démocraties ne tuent pas leurs citoyens,

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a tracé un lien direct entre régime politique et conflit violent interne » (Krain et Myers 1996).

Bien que nombreux auteurs soient d'accord avec le fait que, d'une manière ou de l'autre, le type de
régime politique ait un poids sur la probabilité de guerre civile, le consensus n'est évidemment pas
unanime. Selon Collier et Hoeffler (2000), la variable du régime politique est dotée d'une « force
explicative très modeste », et Fearon et Laitin (2003) trouvent que « la démocratie ne s'associe pas
fortement à une baisse de la probabilité des guerres civiles ». Par contre, la plupart des auteurs
considèrent que le type de régime a un poids important sur le risque de guerre civile: Elbadawi et
Sambanis (2000), ainsi que Hegre et al (2000) et Gleditsch et al (2002) trouvent que les anocraties
(c’est-à-dire les régimes intermédiaires qui se trouvent entre démocratie et autocratie, ceux qui par
exemple prévoient des élections, mais ne respectent pas des droits politiques et civils importants)
sont significativement plus frappées par les guerres civiles par rapport soit aux démocraties soit aux
autocraties. En parlant de la liberté politique dans leur travail de 2000, Elbadawi et Sambanis la
définissent « extrêmement efficace dans la gestion des sociétés polarisées ».

La proposition théorique sous-jacente aux recherches sur le lien entre régime politique et émergence
de guerres civiles est généralement le même. On imagine que la démocratie réduit le risque de
guerre civile grâce à ses mécanismes de règlement pacifique des conflits internes, notamment grâce
à l'espace qui est laissé au « conflit civil » non violent. Par contre, l'espace restreint que les
autocraties laissent à la protestation devraient porter à une radicalisation du dissentiment qui, enfin,
va conduire à la rébellion ouverte contre le gouvernement (Auvinen 1997).

Une autre considération théorique est celle selon laquelle les régimes intermédiaires qui possèdent
des caractéristiques de la démocratie tout en restant autoritaires pour ce qui concerne des autres
domaines (notamment celui des libertés politiques et civiles), sont significativement plus frappés
par des guerres civiles que les régimes « purs ». Les anocraties seraient donc suffisamment libres
pour permettre au dissentiment de s'exprimer, mais pas assez démocratiques pour que les
revendications puissent être poursuivies avec des instruments institutionnels, et parallèlement
manquent de l'appareil répressif typique des régimes autoritaires (Hegre et al 2001).

Les premiers travaux empiriques qui ont cherché à éclairer l'effet du régime politique sur la
probabilité de guerres civiles se sont concentrés sur la dichotomie démocratie – autocratie. En
divisant les pays en fonction de la variable dichotomique « démocratie – non démocratie », dans
leur travail de 1996, Krain et Myers démontrent que les démocraties connaissent moins d'années de
guerres civiles que les non-démocraties. Auvinen (1997) obtient des résultats cohérents avec ces
observations en constatant que les autocraties sont systématiquement plus frappées par des guerres

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civiles que les démocraties, mais il observe aussi que, parmi les autocraties, ce sont les régimes
« moyennement autocratiques » qui connaissent le plus de guerre civile, tandis que la probabilité de
guerre civile diminue drastiquement dans les autocraties les plus répressives.

À partir de 2000 les chercheurs ont pris plus conscience que la variable du régime politique ne
pouvait pas être efficacement représentée de manière dichotomique, et que la distinction entre
démocraties et autocraties ne suffisait pas pour comprendre les mécanismes qui portent à
l'émergence des guerres civiles.

Un des travaux les plus éclairants dans ce sens est celui de Hegre et al (2001), dans lequel les
auteurs ont mesuré le risque de guerre civile en fonction du régime politique et de la proximité de
changement de régime. Le résultat de cette observation est une surface qui démontre clairement
comment les régimes intermédiaires connaissent un risque significativement plus haut de guerre
civile et, parallèlement, les pays qui ont connu une guerre civile resteront beaucoup plus exposés à
une nouvelle guerre civile dans les trois ans successifs à la fin du premier conflit.

Henderson et Singer (2002) confirment l'existence de cette « U inversée », et soulignent qu'elle n'est
pourtant pas symétrique: les démocraties connaissent moins de guerres civiles que les autocraties.

Celle de la « U inversée » peut être considérée une « constante » confirmée par tous ceux qui ont
analysé empiriquement la relation entre niveau de démocratie et risque de guerre civile (voir par
exemple Elbadawi et Sambanis 2000).

On voit donc qu'une littérature concernant les causes des guerres civiles est en place, et la variable
du régime politique a été prise en considération jusqu'à arriver à une observation (celle de la « U
inversée) qu'on pourrait définir généralement accepté. Je vais donc procéder à mettre en place les
« briques » de mon analyse personnelle, qui va se pousser plus en détail et se focalisera – comme je
l'ai anticipé dans l'introduction – sur le lien entre le risque de guerre civile et une composante du
régime politique: la participation.

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3. Les concepts-clé
3.1. Démocratie et participation
On ne peut pas parler de la participation politique sans parler du concept de démocratie : cette
section se focalisera sur la définition de « démocratie », et de la participation en tant qu’une de ses
composantes.

Dans son ouvrage « La démocratie », Charles Tilly propose une distinction quadripartite des
définitions théoriques du terme « démocratie » (Tilly 2007).
Les approches constitutionnels se concentrent sur les lois énoncées dans un système politique
donnée concernant l’activité politique. Les approches factuels se focalisent sur les buts que le
régime poursuit avec ses actions. Les approches « de procédure » prennent en considération si le
régime inclut des élections dans son système juridique.
La dernière « famille d’approches » citée par Tilly est celle des approches « orientés au procès ».
Selon cette vision, la démocratie est le produit d’un mécanisme qui comprend différents procès
continuels et intégrés, tels que la participation effective, la parité des voix, le droit à l’information,
le contrôle de la mise en agenda et l’universalité du suffrage.
Parmi ces approches, celui qui me paraît le plus pertinent - et celui en fonction duquel je chercherai
soit de continuer la définition de « démocratie », soit de choisir mon database de référence – est le
dernier.
Le « père » de cet approche est Robert Dahl, qui a formulé une définition de démocratie en fonction
de cinq critères essentiels : participation effective, parité de voix, droit à l’information, contrôle de
la mise en agenda et universalité du suffrage (Dahl 1998). Ce modèle de démocratie est évidemment
un « idéal-type », une « check list » de conditions pour qu’un régime puisse se définir
démocratique. On peut toutefois considérer ces cinq facteurs comme des « jalons » de toute
définition moderne de démocratie.
Mais la démocratie échappe enfin à toute définition englobante. Un exemple éclairant de cette
difficulté de définition est le travail de David Held : « Modèles de démocratie » (Held 1996). Dans
cet ouvrage, Held trace douze profils de démocratie, chacun d’entre eux se fondant sur des
différents principes. Pour chacun de ces « modèles démocratiques », Held énonce une table avec ses
caractéristiques essentielles. Si on compare ces caractéristiques on note que la participation
politique est le seul facteur qui paraît toujours, même si sous des définitions différentes:
« participation de la citoyenneté obtenue à travers différents mécanismes », « élections régulières »,
« système électoral compétitif », sont des exemples de composantes des différents modèles
démocratiques qui impliquent la participation politique des citoyens.
On voit donc qu'il est difficile de fournir une définition univoque de la participation, car chaque
« démocratie » interprète ce concept de manière différente. La participation reste pourtant une
dimension sine qua non de toute démocratie.
Dans ce travail on utilisera le terme « participation » de manière à rester cohérents avec l'approche
« orienté au procès »: on la considérera comme l'ensemble des procès qui permettent à la population
d'influencer les choix politiques, ou les élites censées d'opérer ces choix.

3.2. Les guerres civiles


Mon discours théorique sur le concept de guerre civile sera beaucoup moins développé que celui sur
la participation et la démocratie: un aperçu important sur l'éclatement des guerres civiles a en effet
été déjà fourni dans la première partie du travail.

Le Blackwell Dictionary of Political Science fournit une définition maximaliste de guerre civile et
un série d'exemples de guerres civiles dans l'histoire: une guerre civile est « une période prolongé
de conflit armé dans un pays parmi deux groupes qui combattent pour le pouvoir coercitif
suprême ».

Dans cette définition on peut isoler quatre éléments que nous allons retrouver dans le chapitre
consacré au Correlates of War Project: premièrement, il faut qu'il y ait un conflit armé,
deuxièmement que ceci soit « prolongé », troisièmement que le but de ce conflit doit être le contrôle
de l'État.

C'est avec cette définition maximaliste que nous allons procéder aux phases suivante, où le concept
de guerre civile sera explicité de manière plus précise à l'aide du Correlates of War Project.
4. Hypothèses
Après avoir mis en place tous les éléments-clé de mon travail, le temps est venu d'énoncer
explicitement ce que je suis en train de rechercher.

Mon but n'est pas simplement de vérifier si la théorie de la Paix Démocratique est applicable aussi
aux guerres intra-étatiques: comme on l'a vu, des nombreuses observations empiriques ont déjà été
faites, et les évidences empiriques démontrent que, même si c'est vrai que les démocraties
connaissent moins de guerres civiles que les non-démocraties, on ne peut pas énoncer une règle
générale telle que celle qui régit le rapport entre démocratie et guerres inter-étatiques.

Ce que je voudrais chercher à analyser est quel est l'élément constitutif de la démocratie qui
contribue effectivement à la réduction du risque de conflit dans les régimes démocratiques.

Les théories qui cherchent à explorer le phénomène de la Paix Démocratique en fonction des
différents attributs de la démocratie sont nombreux. Hermann et Kegley (1995) proposent une table
très intéressant sur les différentes études qui ont été faits dans ce sens. Bien sûr, pas toutes ces
hypothèses explicatives peuvent être transposées de manière pertinente dans une analyse qui vise
l'émergence de conflits sur le plan interne.

Après avoir consulté des ouvrages des différentes « écoles de pensée », je crois que le premier
élément constitutif de la démocratie qu'on devrait prendre en considération c'est la participation.

Le premier à tracer un rapport direct entre participation et limitation des conflits a été Kant dans son
ouvrage « De la Paix perpétuelle », où – partant de l'idée que la guerre cause de la suffrance aux
participants – il argumente que si les décideurs sont ceux qui devront supporter le poids de la guerre
ils seront poussés à rejeter l'usage de la force.

Ceci est à mon avis transposable aisément sur le plan interne: si les citoyens ont la possibilité de
conditionner les décisions du gouvernement, ils seront moins poussés à l'usage de la violence pour
chercher à poursuivre leurs revendications. La participation n'influence donc pas simplement les
préférences des décideurs en fonction du fardeau entraîné par la violence, mais aussi en fonction de
la création de canaux légitimes de gestion des conflits.

Dixon (1994) renforce l'argument de la participation pour limiter les conflits violents en énonçant le
concept de « bounded competition ». Selon cette thèse, dans les démocraties il existe un régime de
« compétition délimitée » qui implique l'acceptation de la part des citoyens d'un ensemble de
« mécanismes » de prise de décision qui, à travers la compétition ouverte entre les différentes
positions, porte à prendre des décisions qui seront perçues comme légitimes par tous (il appelle ce
phénomène « contingent consent »). Dans le même travail, Dixon soutient que la présence d'acteurs
capables d'opérer des médiations entre les parties est un élément important qui contribue à limiter le
risque de guerre entre deux états: on peut imaginer que, en portant cette observation sur le plan
interne, l'existence de forces d'opposition institutionnelles pourraient décourager le recours aux
armes de la part des membres de la société qui se trouvent en dissentiment avec le gouvernement.

Dans leur travail « A comparative test of democratic Peace Arguments », Lektzian et Souva (2009)
tracent un résumé des théories explicatives de la Paix Démocratique. Parmi les arguments
normatifs, ils citent une caractéristique des démocraties et soutiennent que « in democracies, norms
of compromise and negotiaton dominate ». Ces normes et la possibilité même de la négociation sur
le plan politique est essentiellement le produit de la participation démocratique, qui crée le régime
de « contingent consent » décrit par Dixon: c'est la participation qui permet l'instauration
d'institutions capables – voire obligées – de négocier et faire des compromis entre les différentes
positions au sein de la société.

À ces observations sur la participation démocratique il faut toutefois ajouter un élément: pour que la
participation ait effectivement un effet sur les choix politiques il faut aussi que le pouvoir exécutif
ne soit pas tout-puissant. Des décideurs qui, bien que peut-être élus, ne doivent rendre compte à
personne, ne représenteront probablement pas un « canal de règlement pacifique » des tensions
sociales. Par contre, un exécutif qui est forcé de rendre compte à des institutions démocratiquement
élues sera plus incline à la médiation et à la négociation avec les dissidents. Comme le fait noter
Bueno de Mesquita (1999), les contraintes au pouvoir exécutif constituent un élément important
dans la pratique de la Paix Démocratique au niveau international: je crois que cette observation soit
pertinente sur le plan interne aussi. Mes hypothèses sont donc les suivantes:

• Plus un pays permettra à sa population de participer au processus de décision politiques,


moins ce pays connaîtra des guerres civiles.

• À parité de niveau de participation, les pays avec le plus de contraintes sur l'exécutif
connaîtront moins de guerres civiles par rapport à ceux où le pouvoir exécutif est plus
indépendant.

Je vais procéder au test de mes hypothèses dans la prochaine partie.


5. Présentation des sources
5.1. Les indices de démocratie
Dans leur article « Conceptualizing and Measuring Democracy », Munck et Verkuilen (2002) ont
essayé de recenser différents indices de démocratie: après avoir énoncé des critères d'évaluation
précis, ils ont analysé neuf différents indices en fonction de ces critères.

En me trouvant à choisir l’un de ces indices j’ai opté pour le Polity IV Index. Ce choix a été
opérée en fonction des facteurs suivants. Premièrement, son database – ainsi que ses donnés
désagrégés – est très facile à obtenir : il suffit de se connecter au site internet du projet.
Deuxièmement, ses règles de codification sont publiquement accessibles, très claires et simples à
interpréter, soit du point de vue logique, soit du point de vue strictement algébrique. Pour finir, la
portée temporelle et conceptuelle de cet indice est extrêmement complète: il prend en considération
le laps de temps entre 1800 et 2007 et, du point de vue conceptuel, comprend un nombre de
dimensions très étendu, ce qui rend possibles nombreuses mesures différentes.

Dans la prochaine section je vais donc présenter les caractéristiques principales du Polity IV Index.

5.1.1. Le Polity IV Index


Le Polity IV Index est la dernière version du Polity Index, conçu pour la première fois par T. Gurr
en 1975 et qui a progressivement évolué jusqu’à aujourd’hui sous la direction de N. Gleditsch et
M.Marshall. Il est un indice dont le but est de « mesurer les caractéristiques des autorités des états
dans le système mondial aux fins d’analyse quantitative et qualitative » (Marshall et Jaggers 2009).
Son unité d’analyse est la « polity », c’est-à-dire « une organisation politique ou gouvernementale ;
une société ou une institution avec un gouvernement organisé, un état et un corps politique »
(Marshall et Jaggers 2009), et pour chaque unité annéee-polity est disponible un numéro compris
entre -10 et 10, qui représente la position de l’état sur le continuum entre autocratie parfaite (-10) et
démocratie parfaite (10).

Le procès pour obtenir cette valeur passe par l’analyse et la somme de six indicateurs dont les
variables assument une valeur positive s’ils appartiennent à la catégorie « démocratie » et négative
s’ils se trouvent parmi les attributs de l’ « autocratie ». Les indicateurs (Régulation du recrutement
des chefs de l’exécutif, Compétitivité du recrutement des chefs de l’exécutif , Ouverture du
recrutement des chefs de l’exécutif, Limites à l’action de l’exécutif, Régulation de la Participation
et Compétitivité de la participation) sont évalués en fonction de critères énoncés dans un manuel
publiquement accessible (http://www.systemicpeace.org/inscr/p4manualv2009.pdf) et leur valeur
est attribué sur une base annuelle par un team formé d’experts du « Center for Systemic Peace ».

5.2. Le database des Guerres civiles


Le cadre théorique qui définit le concept de guerre civile est beaucoup moins « bondé » que celui de
la définition du terme « démocratie ». Le database qui représente le standard plus ou moins absolu
dans ce domaine est le Correlates of War Project.

Ce projet, fondé par J. Singer et M. Small en 1972, a ensuite évolué dans le temps avec des efforts
de réconceptualisation et - sous la direction de S. Bremer, D. Bennet et P. Diehl - a rejoint la forme
actuelle.

La dernière mise à jour conceptuelle de ce projet a été opérée par Sarkees et Schafer (2000).

5.2.1. Le Correlates of War dataset


Le Correlates of War Project (CoW) ne prend pas en considération seulement les guerres civiles. Au
contraire, il cherche à cataloguer tous les conflits armés en les divisant en trois catégories : guerre
inter-étatiques, guerres extra-étatiques et guerres intra-étatiques.

La première catégorie indique un conflit armé entre deux membres du système interétatique. La
deuxième désigne un conflit où au moins une des principales parties en cause ne fait pas partie du
système interétatique et se trouve en dehors des frontières de l’état contre lequel il est en train de se
battre. La troisième catégorie est celle qui nous intéresse : elle indique en effet un conflit armé entre
deux groupes à l’intérieur du même état, et regroupe fondamentalement les guerres civiles. (Sarkees
et Schafer 2000). Les critères qui définissent les guerres civiles seront explicités dans la section
dédiée à l’opérationnalisation des variables.

Pour finir, comme dans le cas du Polity IV Index, le CoW considère la période temporelle entre
1800 et 2008.
6. Opérationnalisation des concepts
6.1. Participation politique et Limites à l’exécutif
Comme j’ai souligné lors de ma question de recherche et de mes hypothèses, la variable
indépendante de mon projet n’est pas la démocratie dans sa totalité, mais plutôt la participation
politique. Le Polity IV Index considère six variables de type qualitatif-ordinal, dont deux se réfèrent
explicitement à la participation et une aux contraintes à l’exécutif. Je vais donc expliciter les critères
et les valeurs numériques que ces trois variables peuvent prendre dans le Polity IV Index et dans
toute la section empirique de mon travail, ainsi qu’expliquer pourquoi je vais en écarter une. Les
descriptions des indicateurs sont tirées de Marshall et Jaggers (2009).

6.1.1. La Participation
Le Polity IV utilise deux indicateurs pour mesurer la participation.

a. Régulation de la participation (PARREG)

Cet indicateur désigne la présence et les qualités des réglementations concernant les
modalités selon lesquelles les préférences politiques peuvent être exprimées. On peut
avoir une situation où toute réglementation est absente. La deuxième possibilité est
celle où il existe des partis politiques, mais ils sont éphémères, car ils s'organisent
autour de revendications ou positions « du moment ». Troisièmement, la régulation
peut être « sectaire » : il y a plusieurs groupes politiques identitaires caractérisés par
un factionnalisme très fort et par un lotissement des places de pouvoir. Il y a ensuite
le régime de « restriction », où certains groupes peuvent exercer leurs activités,
tandis que d’autres sont systématiquement exclus du processus politique. La dernière
situation qui peut se présenter est définie « réglée » : elle se présente quand le
système politique d’un pays voit des groupes politiques stables, et aucun d’entre eux
subit des limitations dans l’accès au processus politique.

Le problème c’est que, dans le cas de mon travail qui considère la participation
comme « l'ensemble des procès qui permettent à la population d'influencer les choix
politiques », un niveau plus haut de PARREG ne signifie pas un niveau plus haut de
participation: un régime de type 1, 2 ou 3 pourrait se révéler plus « participatif »
d’un régime de type 4. Ceci n’est évidemment pas un problème de l’indicateur, qui
mesure en effet ce qu’il est censé de mesurer (le niveau de réglementation du
système politique): simplement, malgré son inclusion dans la section
« participation » du Polity IV Index, il ne mesure pas la caractéristique de la
participation que je veux analyser. Je ne vais donc pas utiliser PARREG dans mon
analyse.

b. Compétitivité de la participation (PARCOMP)

La compétitivité indique la facilité de choisir une politique ou une leadership


alternative dans l’arène politique. Il existe cinq niveaux de PARCOMP.
Premièrement, on considère comme « réprimée » une situation où aucune opposition
et activité politique est permise en dehors de l’élite au pouvoir. Le deuxième cas,
nommé « supprimé », indique une réalité où il existe de l’opposition politique
représentante au moins le 20% de la population, mais dont l’action est
systématiquement limitée par le régime au pouvoir. Troisièmement, on peut observer
un régime « factionnel », où les groupes politiques sont basés sur des distinctions
ethnique et énoncent une agenda politique fondée sur la promesse de favoriser des
membres de ce groupe à détriment des autres communautés. L’attribut
« transitionnel » désigne tout régime de transition d’une situation de type
« factionnel » au type « compétitif », ou vice-versa. Le dernier cas de figure est celui
du régime « compétitif », où la compétition politique se fait entre des groupes
politiques non sectaires et relativement stables.

Dans ce cas aussi, la division est de type ordinal : à la valeur la plus basse
correspond le régime le plus répressif, tandis que la valeur 5 désigne les régimes les
plus ouverts, où la choix entre politiques alternatives est la plus aisée. Je ne vais
prendre en considération les valeurs de -66, -88 et -99, car ils ne représentent pas un
indice précis de la participation, mais plutôt une incertitude d’évaluation. De la
même manière, je ne prendrai pas en considération la valeur 0, car elle indique
simplement l’absence de toute réglementation de la participation (il est une
conséquence de la valeur 0 donnée à l’indicateur PARREG dans l’unité), et pas le
degré de participation.
6.1.2. L’indépendance de l’exécutif (XCONST)
Cet indicateur désigne le niveau de contraintes institutionnelles auxquelles le pouvoir exécutif doit
faire face dans ses actes : il peut être résumé dans le système de « checks and balances » présent
dans le processus décisionnel.

o Autorité illimitée : Il n’existe pas de contraintes institutionnelles et légales à l’action


de l’exécutif: les décrets sont utilisés avec une fréquence régulière, la constitution
peut être amendée ou suspendue en fonction de la volonté de l’exécutif, qui a aussi le
pouvoir de nommer les majorités de tous les groupes de contrôle.

o Catégorie intermédiaire

o Limites légers ou modérés à l’autorité exécutive : Les contraintes existent, mais sont
restreints, par exemple l’existence d’une autorité judiciaire, la nécessité que certains
membres nommés par l’exécutif soient approuvés par le législatif, le fait que le pou-
voir législatif peut bloquer l’implémentation des actes de l’exécutif, ou que certains
règles constitutionnelles ne puissent pas être modifiées exclusivement par l’exécutif.

o Catégorie intermédiaire

o Limitation substantielles sur l’autorité exécutive : Cette situation se présente quand


« l’exécutif a une autorité supérieure à celle des groupes de contrôle, mais est sujet à
des obligations de leur part » (Marshall et Jaggers 2009), tels que la négation pério-
dique de fonds à l’exécutif, l’interdiction imposée par ces groupes à l’exécutif de
laisser le pays, ou le fait que le législatif (ou un conseil de parti) arrive souvent à mo-
difier ou rejeter les propositions de l’exécutif.

o Catégorie intermédiaire

o Parité ou subordination de l’exécutif : On se trouve confrontés à une telle situation


quand les groupes de contrôle ont un pouvoir similaire ou supérieur à celui de l’exé-
cutif. Cela peut signifier que la majorité des initiative de législation sont initiées par
une institution qui n’est pas l’exécutif ou que l’exécutif est nommé par une de ces
institutions et doit en maintenir la confiance pour rester en charge.
6.2. Les guerres civiles selon le CoW Project
Le Correlates of War Project énonce quatre conditions nécessaires et collectivement suffisantes pour
l’étiquetage d’un phénomène en tant que guerre civile. Il faut:

o ...qu’il y ait une action militaire

o ...que le gouvernement central participe au conflit

o ...qu’il y ait eu une résistance effective de la part des deux parties en cause

o ...qu'au moins 1'000 victimes résultent des combats

Après avoir vérifié la présence de ces éléments, il faut opérer une ultérieure distinction entre
« conflits pour le gouvernement central » et « conflits concernant des intérêts locaux ou
régionaux ». Dans le premier cas, les rebelles cherchent à renverser le gouvernement central, tandis
que dans le deuxième cas ils peuvent se battre pour modifier les actions du gouvernement envers
une région particulière, pour remplacer un gouvernement local ou pour permettre à la région de
faire sécession du reste de l’état.

La dernière possibilité est qu’une guerre civile devienne « internationalisée » : ceci se passe quand
un membre tiers du système inter-étatique intervient directement pour supporter soit les insurgés,
soit le gouvernement (Sarkees et Schafer 2000).

6.2.1. Les variable CW et CWPROB


Pour arriver à mes conclusions j’ai dû expliciter deux variables concernant les guerres civiles.

• CW : Mon travail se focalise sur l’éclatement des guerres civiles, et pas sur leur durée ou
leur terminaison. Dans mes tables, la variable CW (Civil War) prendra donc exclusive-
ment deux valeurs : 1 si durant l’année au moins une guerre (soit pour le gouvernement
central, soit pour le gouvernement régional) a éclaté, 0 si aucune guerre n’a éclaté. Les
années où le pays se trouve déjà dans une guerre civile et une autre guerre civile éclate
seront donc traités simplement comme des « 1 ». Cette variable nous dit pourtant très
peux en des termes relatifs : elle sert donc exclusivement à obtenir la deuxième variable :
CWPROB.

• CWPROB : Il est évident que je ne pourrais pas présenter des conclusions basées sur des
valeurs absolus. Ma variable dépendante, qui paraîtra dans les résultats et les graphes,
sera donc CWPROB. Elle représente la probabilité qu’une unité appartenant à la
population considérée (c’est-à-dire, un pays tiré au sort dans une année tirée au sort,
avec un niveau de la variable indépendante donné) connaisse une guerre civile.
7. Analyse
Je vais présenter le travail que j’ai effectué sur les donnés en le divisant en 4 étapes, durant
lesquelles je vais utiliser les deux datasets présentés dans la dernière partie dans leur totalité, c'est-
à-dire de 1800 à 2007: au delà du fait que mes hypothèses ont une portée générale, ceci rendra aussi
ma mesure plus robuste. Pour ce qui concerne le software utilisé, j'ai employé « OpenOffice.org
Calc » pour les tables et les graphes à deux dimensions, « SPSS Statistics » pour les corrélations et
pour le graphe à trois dimensions et « MATLAB » pour le graphe de surface fitting.

7.1. PARCOMP et CWPROB


Pour calculer la corrélation des deux variables CWPROB et PARCOMP j’ai classé les unités
d’analyse en fonction du niveau de PARCOMP, et pour chacun des groupes résultants j’ai calculé,
en divisant le nombre de CW=1 pour la population de chaque cas, la variable CWPROB. J’ai
ensuite construit une table et un graphe basés sur ces résultats.
PARCOMP CWPROB
1 0,01397
2 0,00755
3 0,02011
4 0,00272
5 0,00124

CWPROB / PARCOMP
0,02500

0,02000

0,01500
CWPROB

CW PROB
Regressione lineare per
0,01000 CW PROB

f(x) = -0,00303x + 0,01820


0,00500

0,00000
1 2 3 4 5

PARCOMP
Ces résultats sont – à mon avis – très intéressants : ils montrent que la probabilité de guerre civile se
réduit fortement au fur et à mesure que le niveau de participation augmente, sauf pour
PARCOMP=3, qui représente un véritable pique de fréquence de guerres civiles. Cette observation
est importante, car nous permet de formuler une hypothèse ultérieure, c’est-à-dire que les systèmes
politiques structurés en fonction d’associations identitaires (ethniques ou religieuses) sont plus
prônes à connaître des guerres civiles. Cela serait cohérent avec nombreuses théories des sciences
sociales, et notamment avec la théorie des clivages de Lipset et Rokkan et le travail de Henderson
(2000).
J'ai ensuite calculé l’indice de corrélation de Pearson entre la variable PARCOMP et CWPROB.
Correlazioni

PARCOMP CW PROB

PARCOMP Correlazione di Pearson 1 -,606

Sig. (2-code) ,279

N 5 5

CW PROB Correlazione di Pearson -,606 1

Sig. (2-code) ,279

N 5 5

Le résultat de ce calcul est plutôt satisfaisant : une valeur de -0,606 signifie que la corrélation entre
ces deux variables est modérée, et se révèle presque fort (une valeur de 0,7 étant considéré
« corrélation forte »).

7.2. PARCOMP, XCONST et CWPROB


Pour vérifier ma deuxième hypothèse j'ai divisé les 5 groupes résultants du travail au point 1 en
fonction du niveau de XCONST. Un problème qui s'est posé à ce point à été le suivant. Certains
ensembles ne comptaient que deux ou trois unités: en effet un régime avec un niveau de
participation très bas aura probablement un niveau des autres indicateurs plutôt bas, et viceversa.
Pour éviter d'avoir des groupes non représentatifs j'ai donc calculé la fréquence de CW=1 dans la
totalité du dataset, et conclu qu'il fallait moyennement au moins 88 unités pour observer au moins
un éclatement de guerre civile. J'ai donc écarté tous les croisements de XCONST et PARCOMP qui
comptaient moins de 88 unités et calculé CWPROB pour chacun des groupes restants. La table et
les graphes dans les pages suivantes représentent les résultats de cette opération.
P
A R
COMP X
CON
ST C
W P
R O
B
1 1 0
,01
638
1 2 0
,02
108
1 3 0
,00
251
2 1 0
,01
734
2 2 0
,00
331
2 3 0
,00
840
2 5 0
,00
585
2 7 0
,00
269
3 1 0
,02
523
3 2 0
,01
047
3 3 0
,02
009
3 4 0
,02
020
3 5 0
,01
815
3 6 0
,01
000
3 7 0
,00
269
4 5 0
,00
000
4 6 0
,00
392
4 7 0
,00
200
5 3 0
,01
111
5 5 0
,00
000
5 7 0
,00
094

PARCOMP = 1
0,02500

0,02000
f(x) = -0,00693x + 0,02719
0,01500
CWPROB

CWPROB
Regressione lineare per
0,01000 CWPROB

0,00500

0,00000
1 2 3
XCONST

PARCOMP = 2
0,02000
0,01800
0,01600
0,01400
0,01200
f(x) = -0,00268x + 0,01555
CWPROB

CWPROB
0,01000
Regressione lineare per
0,00800 CWPROB
0,00600
0,00400
0,00200
0,00000
1 2 3 5 7
XCONST
PARCOMP = 3

0,03000

0,02500
f(x) = -0,00252x + 0,02533
0,02000
CWPROB
CWPROB

0,01500 Regressione lineare per


CWPROB

0,01000

0,00500

0,00000
1 2 3 4 5 6 7
XCONST

PARCOMP = 4
0,00450

0,00400
f(x) = 0,00100x - 0,00002
0,00350

0,00300
CWPROB

0,00250 Colonna C
0,00200 Regressione lineare per
Colonna C
0,00150

0,00100

0,00050

0,00000
5 6 7
XCONST

PARCOMP = 5
0,01200

0,01000
f(x) = -0,00508x + 0,01419
0,00800
CWPROB

CWPROB
0,00600
Regressione lineare per
CWPROB
0,00400

0,00200

0,00000
3 5 7
XCONST
Ces résultats tendent à confirmer ma deuxième hypothèse : dans chaque catégorie de PARCOMP,
sauf pour PARCOMP=4, une augmentation de la variable XCONST porte à une réduction du risque
de guerre civile.
Pour finir j’ai généré, à partir des groupes obtenus du croisement de PARCOMP et XCONST, un
graphique à trois dimensions capable de montrer plus clairement la distribution du risque de guerres
civiles sur la base des deux variables analysées.

Ce graphe nous montre visuellement qu’il existe toujours un « pique » de CWPROB lors des
valeurs intermédiaires, et en particulier tout au long de la ligne PARCOMP=3. Ce qui est très
intéressant c'est observer comment il paraît que la variable CWPROB soit beaucoup plus sensible
aux changement de XCONST qu'à ceux de PACROMP. Pour vérifier cette observation de manière
plus précise j'ai pensé d'utiliser la fonction « sftool » de Matlab, qui permet de créer une
« régression » à trois dimensions. Voilà le graphe que j'ai obtenu:
Ce graphe est le résultat le plus intéressant que j'ai obtenu jusqu'ici: il montre en effet que
CWPROB est extrêmement sensible à des variations de XCONST, au point que PARCOMP devient
pratiquement non-influente.
Bien que ce travail soit censé d'analyser la variable PARCOMP, j'ai pensé qu'il aurait été intéressant
de dédier un petit effort et quelques lignes à analyser le lien entre XCONST et CWPROB.

7.3. XCONST et CWPROB


Pour la troisième étape j'ai suivi la même procédure qu'à l'étape 1, mais en substituant la variable
PARCOMP avec la variable XCONST. J'ai obtenu les résultats suivants:

XCONSTCW PROB
1 0,01769
2 0,01205
3 0,01248
4 0,00722
5 0,00932
6 0,00412
7 0,00475
0,02000

0,01800

0,01600

0,01400

0,01200 f(x) = -0,00207x + 0,01793


0,01000 CWPROB
Regressione lineare per
0,00800 CWPROB

0,00600

0,00400

0,00200

0,00000
1 2 3 4 5 6 7

Ces donnés confirment que la relation entre CWPROB et XCONST est négative, bien que la
régression linéaire nous montre que PARCOMP a un coefficient plus important (-0,00303 contre
-0,00207) . Ce qui nous intéresse est, à ce point, d'évaluer la corrélation statistique entre XCONST
et CWPROB:

Correlazioni

XCONST CWPROB

XCONST Correlazione di Pearson 1 -,927**

Sig. (2-code) ,003

N 7 7

CWPROB Correlazione di Pearson -,927** 1

Sig. (2-code) ,003

N 7 7

**. La correlazione è significativa al livello 0,01 (2-code).

Cette corrélation est sans doute l'information la plus intéressante que j'ai pu observer dans mon
travail. Une corrélation de 0,927 est extrêmement haute et significative. Une corrélation si forte
pourrait même faire penser que le vrai facteur-clé politique qui détermine l'éclatement des guerres
civiles soit l'absence de contraintes sur l'exécutif.
Bien que l'information concernant la corrélation entre XCONST et CWPROB soit à mon avis
fondamentale, je me trouve pourtant obligé à retourner sur la vérification de mes hypothèses. Je ne
manquerai pourtant pas de citer cette « découverte » dans mes conclusions.
7.4. Polity et CWPROB
La dernière étape de mon travail a été de vérifier si la variable PARCOMP avait une incidence
négative sur l’éclatement des guerres civiles seulement en fonction du niveau global de
démocratie/autocratie des unités prises en considération : peut-être en effet que nos conclusions sont
conditionnés par le fait que, en général, un pays avec un degré de PARCOMP haut a aussi un haut
degré des autres variables de Polity, et que PARCOMP ne joue qu’un rôle très restreint.
J’ai donc procédé en appliquant aux unités la même méthode du point 1, mais en utilisant comme
critère la variable « Polity », qui représente le niveau global de l’état sur l’échelle « démocratie –
autocratie », calculé en intégrant les six composantes du Polity IV Index. Mon but est de vérifier si
PARCOMP a une corrélation plus importante avec la variable CWPROB que la variable « Polity ».
Ceci nous permettrait de conclure que, même si peut-être PARCOMP n’est pas la variable la plus
importante dans l’explication du lien entre « Polity » et CWPROB, elle n’est pas non plus une des
composantes qui réduit l’importance de la corrélation.
Polity C
W PROB
-1
0 0,018
32
-9 0,008
89
-8 0,012
42
-7 0,008
95
-6 0,016
95
-5 0,035
34
-4 0,004
78
-3 0,017
72
-2 0,008
13
-1 0,016
19
0 0,037
27
1 0,012
92
2 0,009
64
3 0,017
09
4 0,004
20
5 0,009
35
6 0,002
38
7 0,009
37
8 0,016
10
9 0,002
00
10 0,000
96
CWPROB / Polity
0,04000

0,03500

0,03000

0,02500

f(x) = -0,00055x + 0,01888


CWPROB

Polity
0,02000
Regressione lineare per
Polity
0,01500

0,01000

0,00500

0,00000
-10 -9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Polity

Comme on pouvait s’attendre en fonction de la revue de littérature, on peut observer clairement que
les piques les plus importants de CWPROB se trouvent entre les valeurs -5 et 5, c'est-à-dire dans les
régimes anocratiques. La régression linéaire a pourtant un coefficient négatif, ce qui est cohérent
avec la revue de littérature qui postule une réduction du risque de guerres civiles dans les
démocraties. Mais qu’en est-il de la corrélation de Pearson ?

Correlazioni

Polity CWPROB

Polity Correlazione di Pearson 1 -,360

Sig. (2-code) ,109

N 21 21

CWPROB Correlazione di Pearson -,360 1

Sig. (2-code) ,109

N 21 21

On voit donc que la corrélation entre Polity et CWPROB est moins forte que celle entre PARCOMP
et CWPROB. Ceci renforce, bien que pas de manière déterminante, la thèse qui lie PARCOMP et
CWPROB.
8. Conclusions
Arrivé à la fin de ce bref travail, je me trouve à devoir synthétiser les résultats que j'ai obtenu.

Comme il se passe souvent dans le domaine des sciences, la « découverte » la plus importante n'a
rien à voir avec le fil rouge principal de ma recherche. Le résultat de l'analyse de corrélation entre
XCONST et CWPROB est probablement l'aboutissement le plus intéressant du travail, et pourrait
représenter un point de départ pour un projet ultérieur: si intuitivement on pouvait déjà imaginer
qu'un exécutif plus contrôlé réduit le risque de guerre civile, maintenant on a une base empirique
qui nous encourage sur cette route. Une autre observation imprévue mais intéressante est celle qui
voit un pique de CWPROB non négligeable lors de PARCOMP=3: ceci pourrait encourager à
approfondir le rôle des partis politiques dans la gestion des conflits sociaux.

Pour ce qui concerne mes deux hypothèses, je crois qu'elle se trouvent partiellement confirmées.

Non seulement la corrélation entre PARCOMP et CWPROB est importante, mais elle est beaucoup
plus significative que celle entre Polity et CWPROB. Ceci paraît confirmer l'hypothèse selon
laquelle la possibilité d'influencer le processus politique de manière légale réduit le recours aux
armes, et que cette relation n'est pas exclusivement la conséquence du niveau global de démocratie
dans un pays: individuellement, la participation semble avoir une incidence plus forte que le type de
régime dans son ensemble.

En partant de cette constatation, un travail intéressant pourrait être celui d'analyser quels sont
exactement les mécanismes participatifs qui réduisent le risque de guerre civile et, en particulier, la
création d'un indicateur capable de mesurer ces mécanismes avec plus de précision. Un régime
comme celui de la Suisse est sans doute plus participatif que celui de l'État Italien: comment
mesurer cela?Le manque d'un indicateur de la participation directe de la population dans la prise de
décisions serait fortement envisageable, bien que probablement mal vu par la plupart des
gouvernements, particulièrement par les plus « démocratiques ».

Une deuxième filière d'analyse pourrait être celle d'analyser quels sont les conditions
complémentaires qui rendent la participation politique efficace dans la réduction du risque de
guerres civiles. Un exemple pourrait être la liberté de la presse ou le degré d'instruction : on peut en
effet imaginer qu'un pays où la population qui participe à la vie politique a aussi accès à une bonne
instruction et à des informations complète soit capable de gérer de manière plus « civile » les
conflits sociaux.
La deuxième hypothèse, qui s'insère dans cette perspective, se trouve elle aussi partiellement
confirmée. Ceci est cohérent avec l'hypothèse d'origine kantienne selon laquelle les directes
intéressés seront moins inclines à recourir à la guerre: il paraît que là où les gouvernements doivent
non seulement faire face à une participation populaire, mais aussi se trouvent plus contraints –
directement ou indirectement – par les préférences de la population, le risque de guerre civile tombe
drastiquement. On imagine donc que dans des telles situations le gouvernement central serait obligé
à chercher la médiation dans des situations de conflit.

Il reste pourtant trois limites importants aux tests de mes hypothèses. Premièrement, il y a le fait
que la participation politique n'est pas scindable du reste du régime politique: il est évident qu'un
régime politique qui permet à ses citoyens de participer librement à la vie politique tendra à être un
régime globalement plus démocratique qu'un régime qui réprime la participation. Quel est donc le
« poids spécifique » de la participation, est-ce qu'elle suffit où doit-elle être combinée avec d'autres
éléments pour être efficace?

Deuxièmement, on peut citer un des problème qui est commun à la quasi-totalité des analyses
scientifiques: la participation politique est-elle la cause ou l'effet de la fréquence des guerres
civiles? Il est évident qu'un pays plus pacifique aura plus de possibilité de créer un régime stable et
de concéder plus de droits à ses citoyens. Dans ce travail j'ai proposé une justification causale et j'ai
testé une « simple » corrélation: un travail théorique plus approfondi serait nécessaire pour tracer un
lien causal plus consistent.

En troisième lieu, il y a le fait que mon test partiel considérait seulement le degré de participation
durant l'année où la guerre civile éclate. Il est évident que la décision de prendre les armes ne se
prend généralement pas en 365 jours, mais elle est souvent prise après des années de vie dans une
situation politique, économique et sociale jugée intolérable. Dans une hypothétique continuation de
mon travail j'aurais voulu analyser le degré de participation dans les ans qui précèdent une guerre
civile, en soulignant la « période d'incubation » que porte à l'éclatement des guerres civiles.

Pour finir, ce travail pourrait représenter le début d'une recherche plus ample, focalisé sur la
participation politique ou sur les contraintes à l'exécutif, et fournit – à mon avis – des bases
intéressantes pour pousser vers une analyse de ce type.
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