Sie sind auf Seite 1von 20

BUREAU CONJOINT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L’HOMME EN RDC

(BCNUDH)
MONUSCO – HCDH

Sujet : Analyse de la situation des droits de l’homme


de janvier à juin 2018

Introduction

1. Le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) est composé de la Division
des droits de l’homme de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en
République démocratique du Congo (MONUSCO) et du Bureau du Haut-Commissariat des Nations
Unies aux droits de l’homme (HCDH) en République démocratique du Congo (RDC). Son mandat est
notamment d’assister le gouvernement de la RDC dans la promotion et la protection des droits de
l’homme à travers ses 18 bureaux de terrain, ainsi que son quartier général à Kinshasa. Ce rapport a été
élaboré sur la base d’informations que le BCNUDH a recueillies et ne reprend que les violations des
droits de l’homme enregistrées et vérifiées par ce dernier entre janvier et juin 2018. Les informations
contenues dans cette note sont partagées aux niveaux local et provincial, ainsi qu’au niveau national, avec
les autorités de la RDC pour leur action.

Principales tendances des violations des droits de l’homme

2. Le BCNUDH a documenté 3.316 violations et atteintes aux droits de l’homme sur l’ensemble du territoire
de la RDC au cours du premier semestre 2018,1 soit une moyenne de 552 par mois. De façon générale,
les tendances sont à la baisse par rapport au semestre précédent (juillet - décembre 2017) mais en hausse
significative par rapport à la même période l’année dernière, ainsi qu’à la même période il y a deux ans.
Ces trois dernières années (2016, 2017 et 2018), étant considérées comme des années électorales où les
violations ont systématiquement augmenté au fur et à mesure que l’ont s’approchait des échéances en fin
de chaque année, il nous semble pertinent de comparer le premier semestre 2018 aux premiers semestres
de 2017 et 2016.

3. Ainsi, le BCNUDH relève la forte augmentation du nombre de violations et atteintes aux droits de
l’homme constatées sur l’ensemble du territoire au cours de ce semestre par rapport à la même période
l’année précédente.2 Cette augmentation globale, en particulier celle du nombre de violations de plus en
plus généralisées des droits civils et politiques dans le cadre de la persistance des restrictions à l’espace
démocratique, est préoccupante alors que le pays se prépare à des échéances électorales déterminantes
pour la stabilité de la RDC et de la région. Cette détérioration de la situation des droits de l’homme est
également préoccupante eu égard à la persistance de conflits interethniques et intercommunautaires ainsi
1
Les chiffres évoqués dans le présent rapport ne reflètent pas la situation exacte des violations des droits de l’homme en RDC
pour la période sous analyse. Il s’agit uniquement des cas recensés et vérifiés par le BCNUDH au cours de la période en revue.
Il se peut également qu’il y ait des violations des droits de l’homme commises pendant la période précédente, mais qui n’ont
été portées à la connaissance du BCNUDH qu’au cours du premier semestre de l’année 2018. En outre, les statistiques
concernant le nombre de violations rapportées sont susceptibles d’augmenter ou de diminuer à une période donnée en raison
de multiples facteurs échappant au contrôle et à la connaissance du BCNUDH et doivent, de ce fait, être exploitées avec
précaution.
2
Entre janvier et juin 2017, le BCNUDH avait documenté 2.822 violations, soit une moyenne de 470 violations par mois, soit
déjà une forte augmentation par rapport à la période précédente (2.343 violations avaient été documentées entre janvier et juin
2016, soit une moyenne de 390 violations par mois).
qu’à l’activisme accru de plusieurs groupes armés et milices, confirmant une fois encore des tendances
déjà relevées en 2016 et 2017.

Nombre de violations documentées depuis janvier 2016


800

700

600

500

400

300

200

100
Janvier 2016 Juillet 2016 Janvier 2017 Juillet 2017 Janvier 2018 Juin 2018

Agents de l'Etat Groupes armés Total


Tendance (agents de l'Etat) Tendance (Groupes armés) Tendance (Total)

4. Plus de 64% des violations documentées durant le premier semestre 2018 ont été commises par des agents
de l’Etat (2.132 violations), soit une augmentation significative par rapport au premier semestre de 2017,
au cours duquel les agents de l’Etat avaient commis 1.627 violations. Les agents de l’Etat ont notamment
été responsables des exécutions extrajudiciaires d’au moins 202 personnes, dont 24 femmes et deux
enfants, sur l’ensemble du territoire de la RDC. Les combattants de tous les groupes et milices armés
confondus ont quant à eux commis près de 36% des violations documentées par le BCNUDH sur
l’ensemble du territoire, soit 1.184 atteintes aux droits de l’homme, un nombre relativement stable par
rapport au premier semestre 2017.3 Les combattants de tous les groupes et milices armés confondus ont
été responsables de l’exécution sommaire d’au moins 393 personnes, dont 67 femmes.

5. Parmi les agents de l’Etat,4 les militaires des Forces armées de la République démocratique du Congo
(FARDC) sont ceux ayant commis le plus grand nombre de violations documentées au cours du semestre,
à savoir 1.009 violations, près du tiers de l’ensemble des violations documentées par le BCNUDH. Ce
nombre a connu une forte augmentation par rapport au premier semestre 2017 (663 violations). La
majorité de ces violations a été commise dans les provinces du Nord-Kivu (249 violations), Sud-Kivu
(158 violations) et Maniema (97 violations). Les militaires des FARDC ont notamment commis 305
violations du droit à l’intégrité physique (492 victimes, dont au moins 101 femmes, y compris 64 victimes
de violences sexuelles), 289 violations au droit de propriété, 242 violations du droit à la liberté et la
sécurité de la personne (727 victimes, dont au moins 85 femmes et 60 enfants), 124 violations du droit à

3
Entre janvier et juin 2017, les combattants de tous les groupes et milices armés confondus avaient commis 1.195 atteintes
aux droits de l’homme sur l’ensemble du territoire de la RDC.
4
Les agents de l’État incluent les agents de la Police nationale congolaise (PNC), les militaires des Forces armées de la
République démocratique du Congo (FARDC), les agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR) et d’autres agents
de l’Etat tels que les autorités administratives ou judiciaires. Entre janvier et juin 2018, les militaires des FARDC ont été
responsables de 1.009 violations, les agents de la PNC de 779 violations, les agents de l’ANR de 124 violations, et les autres
agents de l’Etat de 220 violations. À titre de comparaison, entre juillet et décembre 2017, les agents de la PNC avaient été
responsables de 1.000 violations, les militaires des FARDC de 912 violations, les agents de l’ANR de 139 violations, et les
autres agents de l’Etat de 295 violations ; et entre janvier et juin 2017 les agents de la PNC avaient été responsables de 693
violations, les militaires des FARDC de 663 violations, les agents de l’ANR de 90 violations, et les autres agents de l’Etat de
181 violations.
2
VERSION ORIGINALE
la vie (180 victimes, dont 145 personnes victimes d’exécutions extrajudiciaires, dont au moins 16 femmes
et six enfants).5
6. Les agents de la Police nationale congolaise (PNC) ont pour leur part, commis 779 violations, soit un peu
moins du quart de l’ensemble des violations documentées par le BCNUDH. Les agents de la PNC ont
principalement commis des violations du droit à la liberté et la sécurité de la personne (387 violations et
1.407 victimes, dont 99 femmes et 64 enfants), suivies par des violations du droit à l’intégrité physique
(161 violations et 338 victimes, dont 41 femmes, y compris 14 victimes de violences sexuelles), des
violations du droit de propriété (95 violations) et des violations du droit à la vie (45 violations, avec
notamment 43 victimes, dont les exécutions extrajudiciaires de sept femmes). Les violations commises
par les agents de la PNC ont principalement été documentées dans la province du Nord-Kivu (173
violations), Haut-Katanga (100 violations), Kongo Central (87 violations), Kinshasa (83 violations). Un
grand nombre de ces violations a été commis dans le cadre de restrictions de l’espace démocratique.

Type de violations commises par les Types de violations commises par la PNC
FARDC
Travaux
forcés, 3 Droit à la vie, 31 Travaux forcés, 3

Droit de Droit à
l'intégrité Droit de
propriété, propriété,
289 physique,
305 95
Droit à la
liberté et
sécurité de
Droit à la personne,
l'intégrité 387
physique,
161
Droit à la
vie, 124 Droit à la liberté
et sécurité de la
personne, 242

Provinces avec les plus hauts pourcentages de violations

Nord-Kivu 37%
Ituri 10%
Sud-Kivu 9%
Haut-Katanga 6%
Kongo Central 6%
Maniema 5%
Kasai 4%
Kasai Central 4%
Kinshasa 4%
Tanganyika 3%

5
Les autres violations du droit à la vie sont principalement constituées par des menaces de mort, des disparitions forcées et
des décès en détention.
3
VERSION ORIGINALE
Situation générale des droits de l’homme dans les provinces en conflit6

7. Au cours du premier semestre, le BCNUDH a documenté un total de 2.581 violations et atteintes aux
droits de l’homme dans les provinces affectées par les conflits. Les agents de l’Etat ont commis 1.417
violations, soit près de 55% des cas documentés. Les combattants de tous les groupes armés confondus
ont pour leur part commis 1.164 atteintes, soit plus de 45% des violations documentés dans les provinces
concernées.

8. Conformément à la tendance générale, le nombre de violations dans ces provinces est en baisse par
rapport au semestre précédent (2.708 violations) et en hausse par rapport à la même période l’année
dernière (2.068 violations). Cette augmentation s’explique notamment par l’expansion des zones
affectées par les conflits depuis 2017, ainsi que par leur répression par les autorités congolaises. Alors
que les chiffres sont globalement à la hausse, le nombre d’atteintes par les groupes armés est à la baisse
par rapport au premier comme au deuxième semestre de 2017 (1.164 atteintes, contre 1.303 la période
précédente et 1.186 pour celle d’avant). À l’inverse, les agents de l’Etat, et en particulier les militaires
des FARDC, ont commis davantage de violations que les deux semestres précédents (1.417 ce semestre
contre 1.269 le semestre précédent et 882 pour le premier semestre de 2017). Ces violations par les agents
de l’Etat ont toutefois été moins meurtrières (155 civils tués, contre 541 au premier semestre de 2017)
alors que les atteintes par les groupes armés, bien qu’en légère baisse, ont entrainé la mort de plus de
civils (386 personnes contre 343 au premier semestre de 2017). En tout, le BCNUDH reste préoccupé
par le nombre trop élevé de civils tués au cours des six premiers mois de 2018 : 541 personnes, dont au
moins 83 femmes, soit, en moyenne, trois civils tués chaque jour dans le cadre des conflits.

Proportion de violations par auteur présumé dans les zones affectées par les conflits
armés
Agents de l'Etat : 55% Autres agents de l'Etat, 5%
Groupes armés : 45% ANR, 3%
PNC
FARDC 15%
PNC FRPI
Autres agents de l'Etat 7%
ANR Nyatura
FRPI 6%
FARDC
Nyatura 33% Maï Maï
Maï Maï 6%
MM Mazembe MM Mazembe
FDLR 5%
ADF FDLR
Autres groupes armés ADF 5%
NDC 4%
NDC
3%
APCLS
Raïa M.
Twa Luba, 0%
LRA Kamuina Nsapu
Kamuina Nsapu 1% LRA, 1% Autres groupes armés
Raïa M. APCLS
Luba Twa, 1% 1% 2% 3%

6
Le BCNUDH compte parmi les provinces affectées par le conflit les provinces de l’Est de la RDC, à savoir le Bas-Uélé, le
Haut-Uélé, l’Ituri, le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, ainsi que les provinces du Kasaï, du Kasaï Oriental et du Kasaï Central en
raison des activités de milices et de la lutte contre celles-ci par les autorités congolaises (notamment les activités des miliciens
de Kamuina Nsapu), et enfin la province du Tanganyika en raison de la résurgence de conflits interethniques entre Twa et
Bantous. Depuis novembre 2017, la province du Maniema est également considérée par le BCNUDH comme étant affectée
par les conflits, en raison du nombre significatif de violations et atteintes aux droits de l’homme commises par des militaires
des FARDC et des combattants Maï-Maï.
4
VERSION ORIGINALE
Nombre de victimes d'exécutions Nombre de victimes d'exécutions
extrajudiciaires par les agents de l'Etat sommaires par les combattants de
dans les zones en conflits groupes armés dans les zones en conflits

Sud-Kivu, 15
autres, 14
Haut-Uélé,
Kasai 15
Nord Nord-
Central, 10
Kivu, 35 Kivu, 141 Ituri , 7
Ituri, 12 Tanganyika,
7
Maniema , Kasaï, 7
Sud Kivu,
17 Kasaï Central, 5
16 Maniema, 5
Bas-Uélé, 2

9. Les militaires des FARDC ont commis le plus grand nombre de violations des droits de l’homme dans
les provinces affectées par les conflits (845 violations, soit près du tiers des violations documentées dans
ces provinces et presque le double par rapport à la même période, l’année dernière),7 principalement au
Nord-Kivu (249 violations). Les militaires des FARDC ont notamment commis 266 violations du droit à
l’intégrité physique (432 victimes, parmi lesquelles 91 femmes, dont 59 victimes de violences sexuelles),
201 violations du droit à la liberté et la sécurité de la personne (642 victimes, dont 75 femmes et 57
enfants), 82 violations du droit de propriété et huit cas de travaux forcés (avec 56 victimes, dont un
enfant). Ils sont en outre responsables des exécutions extrajudiciaires d’au moins 129 civils, dont 15
femmes, principalement au Nord-Kivu (notamment à Beni), au Kasaï Central (notamment dans les
territoires de Demba et Kananga), et dans le Maniema (territoire de Kabambare).

845 Nombre de violations par auteur dans les zones en conflits


800

700

600

500
384
400

300
177 166 163
200 135
123 132
96
100 65 71 68
40 37 27 23 21 10
0

* Cette catégorie inclut divers groupes Maï-Maï tels que : les Apa Na Pale, Bakata Katanga, Bizolezole, Charles, Karakara, Kifuifua, Luanda,
Lumumba de Manu, Saperita Kilalo, Simba, UPDI, UPLC, Yro, et d'autres non autrement identifiés.

7
Entre janvier et juin 2017, le BCNUDH avait documenté 468 violations par les militaires des FARDC dans les provinces
en conflits.
5
VERSION ORIGINALE
10. Parmi les provinces en conflits, et à l’instar des semestres précédents, c’est celle du Nord-Kivu qui reste
de loin la plus affectée (1.213 violations), suivie de l’Ituri (317 violations), du Sud-Kivu (310 violations),
du Maniema (167 violations). À elles trois, les provinces du Kasaï comptent 343 violations.

11. Parmi les groupes armés, les combattants des Forces de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI) ont, à
l’instar des semestres précédents, commis le plus d’atteintes aux droits de l’homme entre janvier et juin
2018 : 177 atteintes, toutes concentrées dans le territoire d’Irumu, en Ituri. Ce nombre est en baisse par
rapport aux 239 atteintes documentées à la même période l’année dernière. Parmi les atteintes
documentées par le BCNUDH, les combattants des FRPI continuent de mener des embuscades et des
attaques contre des villages qui sont systématiquement pillés mettant les populations en danger de mort
(neuf tués et 56 blessés) et vulnérables aux violences sexuelles (au moins 17 femmes et trois enfants
victimes). Les combattants des FRPI n’hésitent pas à forcer ces mêmes populations à transporter les biens
pillés sous la contrainte et la menace (13 victimes, dont deux femmes et deux enfants).

12. La période sous revue a été marquée par la résurgence du conflit interethnique entre communautés Hema
et Lendu à Djugu, en Ituri. En effet, entre décembre 2017 et mars 2018, plusieurs localités du territoire
de Djugu, ont connu des exactions contre les populations, notamment des meurtres de masse, des
personnes blessées, des maisons incendiées et des villages pillés et détruits, lors d’attaques d’une extrême
violence entrainant des déplacements massifs de populations vers Bunia, Aru, Mahagi et en Ouganda.
Une mission d’enquête du BCNUDH a pu établir qu’au moins 263 personnes, dont au moins 91 femmes,
avaient été tuées, 29 autres blessées, et 120 localités et villages pillés et détruits. La majorité des victimes
sont de l’ethnie Hema. Les militaires des FARDC et les agents de la PNC, en sous-effectif, n’ont
généralement pas pu apporter de réponse appropriée à ces attaques ni pu sécuriser les villages pour en
éviter d’autres. Sur 70 attaques enregistrées entre le 2 février et le 14 mars, les forces de défense et de
sécurité ne seraient intervenues que dans 10 cas. L’équipe a par ailleurs identifié cinq sites probables de
fosses communes à Blukwa Centre et Maze/Waliba, dont les coordonnées GPS ont été partagées avec les
autorités compétentes.

13. Dans la province du Nord-Kivu, les groupes armés Nyatura et Forces démocratiques de libération du
Rwanda (FDLR) ont commis respectivement 166 et 132 atteintes aux droits de l’homme, soit une baisse
par rapport aux 170 et 173 respectivement documentés au semestre dernier. Ces groupes, parfois associés
en appui aux communautés Hutu, se sont vus opposés aux Maï-Maï Mazembe et Nduma Defense of
Congo (NDC), parfois associés en appui aux communauté Nande. Les Maï-Maï Mazembe ont commis
135 atteintes aux droits de l’homme et les combattants du NDC, 68 autres. Alors que ce chiffre est stable
pour les Mazembe, il est en large baisse pour les NDC qui avaient commis 138 atteintes lors du semestre
précédent.

14. La période considérée a une fois de plus été marquée par un fort activisme de divers groupes Maï-Maï.
Le BCNUDH a ainsi documenté un total de 163 atteintes aux droits de l’homme commises par divers
groupes Maï-Maï, soit un nombre relativement stable par rapport à la même période l’année dernière
(192 atteintes). Ces groupes ont principalement été actifs dans les provinces du Nord-Kivu (98 atteintes),
à l’image des Maï-Maï Kifuafua ; du Sud-Kivu (35 atteintes), à l’image des Maï-Maï Karakara ; du
Maniema (22 atteintes), principalement par des Maï-Maï Malaïka ; ainsi que quelques atteintes dans les
provinces de l’Ituri, par des Maï-Maï Simba, et du Tanganyika, notamment par des Maï-Maï Apa Na
Pale.8 Les groupes Maï-Maï ont principalement commis des atteintes à la liberté et la sécurité de la
personne (56 atteintes contre 160 victimes, dont 29 femmes et six enfants), au droit de propriété (44
atteintes), au droit à l’intégrité physique (37 atteintes et 68 victimes, dont 26 femmes, y compris des
violences sexuelles à l’encontre d’au moins 23 femmes), au droit à la vie (22 atteintes dont les exécutions
sommaires de 33 civils dont au moins deux femmes). Alors que la coalition dirigée par William

8
Des groupes Maï-Maï, à l’image des Bakata Katanga, ont par ailleurs commis trois atteintes dans la province du Haut-
Katanga qui ne figure pas parmi les zones considérées en conflit.
6
VERSION ORIGINALE
Yakutumba, aux revendications souvent politiques, avait été très active au deuxième semestre de 2017,
ses combattants n’ont presque pas commis de violation au premier semestre 2018, illustrant le lien entre
leurs activités et la situation politique du pays.

15. Dans la province du Sud-Kivu, les agents de l’Etat ont commis les deux tiers des violations (206
violations), principalement par les militaires des FARDC (158 violations) dans le cadre de leurs
opérations militaires contre les groupes armés et notamment les Raïa Mutomboki et autres groupes Maï-
Maï. Ces derniers sont responsables d’environ 35 atteintes aux droits de l’homme chacun, soit une baisse
significative de leurs activités par rapport à la période précédente. Toutefois, la période sous revue a été
marquée par la recrudescence des violences commises par des combattants Gumino dans les Hauts
Plateaux du territoire d’Uvira: 23 atteintes, dont les exécutions sommaires d’au moins 25 personnes,
parmi lesquelles six femmes.

16. Dans le Maniema, les opérations miliaires contre les groupes armés se poursuivent et entrainent un grand
nombre de violations par ces militaires (97 violations, soit 58% des violations commises dans cette
province). Les militaires sont notamment responsables des exécutions extrajudiciaires de 25 personnes,
dont deux femmes ; des violences sexuelles à l’égard de 11 femmes ; de mauvais traitements à l’égard
de 46 personnes ; d’atteintes au droit à liberté et la sécurité de la personne de 35 victimes ; et enfin de 31
atteintes à la propriété. Les Maï-Maï Malaïka, sont quant-à-eux principalement responsables d’atteintes
au droit à la liberté et la sécurité de la personne (40 victimes).

17. La province du Tanganyika reste en proie au conflit interethnique entre communautés Bantu (dont les
Luba) et Pygmée (Twa), à l’origine de graves atteintes aux droits de l’homme, causant notamment de
nombreuses pertes en vies humaines, ainsi que de nombreux cas de violences sexuelles utilisées comme
arme de guerre par les miliciens de ces communautés. Ainsi les miliciens Twa sont responsables de 26
atteintes aux droits de l’homme, en particulier les viols de 23 femmes et les exécutions sommaires de 14
personnes dont quatre femmes. Les miliciens Luba sont quant à eux responsables de 10 atteintes, toutes
dans le territoire de Moba, dont les viols de six femmes.

18. Lors du premier semestre 2018, le nombre de violations et atteintes commises dans les trois provinces du
Kasaï est resté stable en comparaison avec la période précédente (respectivement 343 violations contre
339 au semestre précédent). Le bureau note néanmoins une baisse considérable du nombre d’exécutions
extrajudiciaires par les militaires des FARDC qui avait connu en 2016 et 2017 une croissance alarmante9
notamment dans les provinces du Kasaï et du Kasaï Central dans le cadre d’une répression brutale et
disproportionnée des miliciens Kamuina Nsapu. Quant à ces derniers, si le nombre d’atteintes commises
lors de ce semestre a été divisé par deux (21 par rapport à 42), le nombre de personnes sommairement
exécutées est en hausse (50 par rapport à 42 victimes). Enfin le nombre de violations perpétrées par les
miliciens des Bana Mura, toutes dans le territoire de Kamonia, reste stable (autour de 26 violations). Le
bureau est toutefois particulièrement inquiet par les enlèvements de femmes et enfants par des membres
de cette milice exploités sexuellement et pour le travail forcé. Au moins trois femmes, deux hommes et
70 enfants (51 filles et 19 garçons), tous de l’ethnie Luba et Lulua, ont ainsi été enlevés depuis mars
2017. Le BCNUDH, la Section protection de l’enfant de la MONUSCO et d’autres acteurs intervenant
dans le domaine de la protection de l’enfance travaillent avec diverses autorités aux niveaux local,
provincial et national pour leur libération. Ceci montre bien que les violences se poursuivent et les
conséquences des violations des droits de l’homme continuent de peser lourdement sur les populations
civiles. Dans ce contexte fragile, les risques de résurgence de la crise qu’a connue cette région sont à
surveiller.

9
Entre janvier et juin 2018, le BCNUDH a documenté 36 victimes d’exécutions extrajudiciaires par des militaires des
FARDC, contre 527 entre janvier et juin 2017 et 372 entre juillet et décembre 2016.
7
VERSION ORIGINALE
Violences sexuelles liées aux conflits10

19. Au cours du premier semestre 2018, le BCNUDH a documenté plusieurs cas de violences sexuelles liées
aux conflits affectant 244 femmes et un homme adulte, soit une baisse par rapport au semestre précédents
(323 victimes adultes), mais une hausse par rapport aux six premiers mois de 2017 (210 victimes adultes).
Plus de 31% de ces victimes sont attribuables à des agents de l’Etat (77 victimes). Les militaires des
FARDC sont responsables à eux seuls de près d’un quart des victimes, ce qui en fait les principaux
auteurs, essentiellement dans la province du Nord-Kivu (24 victimes, dont 18 dans le territoire de Masisi).
Les agents de la PNC sont, quant à eux, responsables de près de 5% des victimes (12 femmes).11

20. Les combattants des différents groupes armés et milices sont responsables de près de 69% de ces victimes
(167 femmes et un homme). Parmi eux, les combattants de l'Alliance des patriotes pour un Congo libre
et souverain (APCLS) – surtout de l’aile Mapenzi –, actifs dans le territoire de Masisi au Nord-Kivu, sont
les principaux auteurs (28 victimes), suivi des Raïa Mutomboki dans le territoire de Shabunda au Sud-
Kivu et de miliciens Twa dans le Tanganyika, toujours dans le cadre du conflit interethnique les opposant
aux Bantous (27 victimes chacun).12

Nombre de victimes adultes de violences sexuelles liées aux conflits par auteur au
61
premier semestre 2018

28 27 27
23
17
12 11
9 8
6 6 6
3
1

FARDC PNC ANR Aut. A.E. APCLS


Raïa M. Twa Maï-Maï FRPI Autres Groupes Armés
Nyatura MM Mazembe FDLR Luba NDC

21. À l’instar des autres violations des droits de l’homme, la province du Nord-Kivu est la plus affectée par
les violences sexuelles liées aux conflits (91 victimes adultes, dont un homme), ce qui s’explique par
l’activisme des groupes armés, dont au moins huit ont été actifs en matière de violences sexuelles liées
au conflit,13 et par le nombre important de violences sexuelles commis par les agents de l’Etat dans cette

10
Pour ce qui est des violences sexuelles liées au conflit, les provinces concernées sont déterminées par le groupe de travail
sur les “Arrangements normalisés de suivi, d’analyse et de communication de l’information sur les violences sexuelles liées
aux conflits” (Monitoring, Analysis and Reporting Arrangements - MARA) qui rapporte notamment au Représentant spécial
du Secrétaire général des Nations Unies chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit. En
2018, les provinces concernées sont les provinces de l’Est de la RDC, à savoir le Bas-Uélé, le Haut-Uélé, l’Ituri, le Nord-Kivu
et le Sud-Kivu, ainsi que les provinces du Kasaï, du Kasaï Oriental, du Kasaï Central, du Haut-Katanga, du Tanganyika, du
Lualaba, du Haut-Lomami, du Maniema et de la Tshopo.
11
Les agents de l’ANR ont également été les auteurs de violences sexuelles contre trois femmes et un garde-parc de l’Institut
congolais de conservation de la nature est responsable d’une victime adulte dans le territoire de Mambasa, province de l’Ituri.
12
A noter que des miliciens de l’ethnie Tabwa ont commis des violences sexuelles liées au conflit sur six victimes dans le
territoire de Moba.
13
Il s’agit des APCLS (28 victimes), des Nyatura (neuf victimes), des Maï-Maï Mazembe (huit victimes, dont deux hommes),
des combattants du NDC et des FDLR (six victimes chacun, dont un homme pour les FDLR), et de divers groupes Maï-Maï,
à savoir les Kifuafua (quatre victimes), les Simba (trois victimes) et les Luanda (une victime).
8
VERSION ORIGINALE
province (26 victimes). Viennent ensuite les provinces du Sud-Kivu (58 victimes), du Tanganyika (36
victimes) et de l’Ituri (22 victimes, dont 17 attribuables aux seuls combattants des FRPI).

Nombre de victimes adultes de violences sexuelles liées au conflit par province au


premier semestre 2018
Haut-Uélé 1

Kasaï-Oriental 2

Kasaï 3 2 Agents de l'Etat


Groupes armés
Kasaï-Central 7

Haut-Katanga 6 4

Maniema 11 2

Ituri 5 17

Tanganyika 6 30

Sud-Kivu 10 48

Nord-Kivu 26 65

Violations des droits de l’homme et du droit humanitaire à l’encontre d’enfants dans les
territoires affectés par les conflits14
22. Durant le premier semestre de l’année 2018, la Section protection de l’enfant de la MONUSCO a
documenté 1.618 violations graves des droits de l’enfant dans le cadre des conflits armés en RDC, et a
reçu 675 allégations non encore vérifiées de la part de ses partenaires. Les allégations comprennent
notamment 638 cas de recrutement et utilisation et concernent essentiellement la province du Kasaï
Central (306 allégations).

23. Au total, 81% des violations graves commises à l’encontre d’enfants documentées entre janvier et juin
2018 sont attribuables aux groupes et milices armés, 11% ont été commises par des éléments armés non-
identifiés, et 8% sont attribuables aux agents de l’Etat, notamment les éléments des FARDC (122
violations) et de la PNC (11 violations). Parmi les groupes et milices armés identifiés, les principaux
auteurs des violations documentées durant ce semestre sont les Maï-Maï Mazembe (345 violations), les
miliciens Kamuina Nsapu (178 violations), les Nyatura (129 violations) les Raïa Mutomboki (101

14
Les informations contenues dans cette partie ont été collectées par la Section de la protection de l'enfant de la MONUSCO.
Le mandat sur les enfants et les conflits armés découle de la résolution l'Assemblée générale des Nations Unies sur les droits
de l'enfant 51/77 (1996) et de ses résolutions ultérieures. Le Conseil de sécurité a créé des mécanismes et des outils pour
appliquer ce mandat, notamment avec la résolution du Conseil de sécurité 1612 (2005) qui créé le Mécanisme de suivi et de
rapportage (MRM) pour collecter des informations fiables et actualisées sur les violations commises contre les enfants par les
parties au conflit, ainsi que le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés. Ce mandat a par
la suite été confirmé dans diverses autres résolutions. Dans chaque pays où il s’applique, une équipe spéciale des Nations
Unies – coprésidée en RDC par la RSSG et le Représentant de l'UNICEF – surveille et signale les six violations graves
couvertes par le MRM, à savoir le recrutement et l’utilisation d’enfants, les meurtres et mutilations, les violences sexuelles,
les enlèvements, les attaques contre les écoles et les hôpitaux, et le refus d'accès humanitaire. En outre, le travail de la Section
de la protection de l'enfant de la MONUSCO est guidé par la politique conjointe des départements des opérations de maintien
de la paix et de l'appui aux missions sur l'intégration de la protection de l’enfant dans les opérations de maintien de la paix des
Nations Unies (2017). Outre son travail visant à documenter les six violations graves susmentionnées, la Section a pour
priorités le suivi de la mise en œuvre continue du plan d'action conjoint du Gouvernement de la RDC et des Nations Unies
visant à mettre un terme et empêcher le recrutement et l'utilisation d'enfants dans les forces et groupes armés et les autres
violations graves contre les enfants ; dialoguer avec les groupes armés pour libérer les enfants, arrêter leur recrutement et
empêcher qu’ils ne soient réutilisés ; soutenir les efforts en matière de lutte contre l'impunité pour les auteurs de violations
graves des droits de l’enfant.
9
VERSION ORIGINALE
violations), les miliciens Bana Mura (71 violations), les NDC-Renové (60 violations), les Maï-Maï
Charles (50 violations), les FDLR des Forces combattantes Abacunguzi (FDLR-Foca) (45 violations) et
les ADF (42 violations). Plus de la moitié des violations ont été commises dans la province du Nord-
Kivu (883 violations), suivi de l’Ituri (231 violations), du Kasaï (196 violations), du Sud-Kivu (158
violations), du Kasaï Central (147 violations), de la Tshopo (deux violations) et du Maniema (une
violation).

Violations graves des droits de l'enfant dans le cadre du conflit armé par
principaux auteurs

Nyatura
Non identifiés 10% Raïa Mutomboki
14%
8%
Bana Mura
Kamuina Nsapu 6%
14%
NDC Renové
5%

Maï-Maï Charles
Maï-Maï Mazembe 4%
28% FARDC
10%

PNC

24. La majorité des violations documentées concerne le recrutement et l’utilisation d’enfants par les groupes
armés et milices. En effet, au moins 794 enfants (101 filles, 693 garçons), âgés entre un et 17 ans sont
sortis des groupes et milices armés ce semestre. Près de 68% des séparations ont été documentées au
Nord-Kivu (534 enfants), suivi du Sud-Kivu (104 enfants), du Kasaï Central (66 enfants), du Kasaï (64
enfants), de l’Ituri (24 enfants), de la Tshopo et du Maniema (un enfant par province). Les principaux
auteurs de recrutement et utilisation d’enfants sont les Maï-Maï Mazembe (219 enfants), les miliciens
Kamuina Nsapu (130), les Nyatura (77 enfants), les Raïa Mutomboki (66 enfants), les Maï-Maï Charles
(39 enfants), les Maï-Maï du Mouvement acquis au changement (Maï-Maï MAC) (34 enfants), les
combattants des Forces de défense congolaises (FDC) (33 enfants), les NDC-Rénové et les FDLR (29
enfants par groupe armé), les Maï-Maï Yakutumba (22 enfants), les FRPI (14 enfants), les ADF et les
FDLR du Conseil national pour le renouveau et la démocratique (CNRD) (12 enfants par groupe armé).

25. Au total, 365 enfants (104 filles, 261 garçons), âgés entre 2 et 17 ans, ont été enlevés dans les provinces
du Nord-Kivu (273 enfants), du Kasaï (64 enfants) du Sud-Kivu et Ituri (12 enfants par province), du
Kasaï Central (trois enfant) et de la Tshopo (un enfant). Les principaux auteurs d’enlèvements sont les
combattants des Maï-Maï Mazembe (109 enfants), la milice Bana Mura (56 enfants), des Nyatura (49
enfants), des ADF (26 enfants), des NDC-Rénové (20 enfants) et des FDLR-Foca (16 enfants).

26. Au moins 113 filles âgées de 3 à 16 ans ont survécu à différents types de violences sexuelles en Ituri (32
filles), au Nord-Kivu (31 filles), au Sud-Kivu (23 filles), au Kasaï (16 filles), et au Kasaï Central (12
filles). Plus d’un tiers des violences sexuelles ont été commises par des agents de l’Etat, soit 30 par les
éléments des FARDC et neuf par des agents de la PNC. Les principaux autres auteurs de violences
sexuelles sont les éléments des Raïa Mutomboki (24 violations), du NDC-Rénové et des Maï-Maï Luc
(10 violations par groupe armé).
10
VERSION ORIGINALE
27. Au moins 193 enfants (61 filles, 132 garçons), âgés de deux mois à 17 ans, ont été victimes de meurtres
(107 enfants) et mutilations (86 enfants), principalement dans le Kasaï Central (52 enfants), le Kasaï (48
enfants), l’Ituri (45 enfants), le Nord-Kivu (39 enfants) et le Sud-Kivu (neuf enfants). Près de 40% de ces
violations sont attribuables aux agents de l’Etat, à savoir les éléments des FARDC (67 enfants) et de la
PNC (neuf enfants). Les autres meurtres et mutilations ont été commis par des éléments armés non
identifiés, principalement durant la crise de Djugu (50 enfants), mais aussi par des miliciens de Kamuina
Nsapu (37 enfants) et des Bana Mura (13 enfants), ainsi que par des Maï-Maï Mazembe (10 enfants).

28. La Section protection de l’enfant a documenté 153 attaques contre des écoles (144) et hôpitaux (neuf)
commis principalement par des éléments armés non identifiés (119) durant la crise de Djugu, ainsi que
par les militaires des FARDC (19) et la milice Kamuina Nsapu (cinq).

Evolution du nombre de violations graves des droits de l'enfant dans le cadre du


conflit armé en RDC de janvier à juin 2018
504
500

91 Attaques contre les


écoles et hôpitaux

400 19

57 Violences sexuelles

300 82
265
Meurtre et mutilation
216 43 222 222
2 1 11
200
189 9 20 27
20 14
7 12 52
16 35 Enlèvement
23 48 70
255 59 56
50
100
Recrutement et
127 118
93 99 102 utilisation

0
Janvier 18 Février 18 Mars 18 Avril 2018 Mai 2018 Juin 2018

Violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales liées aux restrictions de l’espace
démocratique

29. Du 1er janvier au 30 juin 2018, le BCNUDH a documenté 499 violations des droits de l’homme et des
libertés fondamentales liées à des restrictions à l’espace démocratique sur l’ensemble du territoire
congolais, soit un nombre supérieur au total des violations de ce type documentées pour toute l’année
2015 (260 violations) et une augmentation significative par rapport aux six premiers mois de l’année
2017 (430 violations). Ce nombre confirme la persistance de la tendance inquiétante de restrictions de
l’espace démocratique depuis 2015, et cela en quasi totale impunité, ce qui menace la crédibilité du
processus électoral en RDC.

11
VERSION ORIGINALE
Evolution des violations des droits de l'homme en lien avec l'espace démocratique
documentées par mois
297
300 Droit à la liberté et à
la sécurité de la
personne

Liberté d'opinion /
250 234 expression

Liberté de réunion
200 pacifique

Droit à l’intégrité
150 136 physique
123
112
106 103 108 Droit de propriété
100 87 85 81
73
57 60 57 59 Droit à la vie
47 49
50

Liberté d'association

30. Les principaux auteurs présumés de ces violations sont, à l’instar de l’année dernière,15 les agents de la
PNC avec 231 violations, soit près de la moitié des violations documentées, suivies des militaires des
FARDC (116 violations), des autorités politico-administratives (78 violations) et des agents de l’Agence
nationale de renseignements (ANR) (62 violations). En 2018, les FARDC ont à nouveau joué un rôle
important dans les restrictions à l’espace démocratique, notamment à travers les arrestations arbitraires
de ceux perçus comme des voix dissidentes et par la répression souvent violente de manifestations
pacifiques. Des combattants de groupes armés, quant à eux, ont commis huit violations en lien avec
l’espace démocratique.
Par auteur présumé

FARDC, 116
PNC, 231

ANR, 62

Autres agents de l'Etat, 4 Autorités politico-


administratives, 78
Groupes armés, 8

15
Les auteurs présumés des violations documentées par le BCNUDH pendant l’année 2017 sont principalement des agents de
la PNC (712 cas) suivis par les FARDC (269 cas), les autorités politico-administratives (152 cas), les agents de l’ANR (135
cas) et autres agents de l’Etat (44 cas). Les groupes armés étaient responsables de 41 atteintes aux droits de l’homme.
12
VERSION ORIGINALE
31. Les violations les plus rapportées sont les atteintes au droit à la liberté et à la sécurité de la personne (147
violations), suivies par celles à la liberté de réunion pacifique (135 violations) et la liberté d’opinion et
d’expression (77 violations). Le BCNUDH a également documenté 65 violations à l’intégrité physique
et 32 violations du droit à la vie, avec notamment 23 victimes d’exécutions extrajudiciaires (dont trois
femmes).16
Nombre de cas documentés par type de violation

147
Droit à la liberté et à la sécurité de la
135 personne

Liberté de réunion pacifique

Liberté d'opinion / expression

77
Droit à l’intégrité physique
65

Droit à la vie

32 32
Droit de propriété

11
Liberté d'association

Janvier à juin 2018

32. À titre d’exemple, le Comité laïc de coordination (CLC) de l’Eglise catholique a appelé à manifester
pacifiquement à travers le pays pour exiger le respect de l’Accord du 31 décembre et la tenue d’élections
le 21 janvier et 25 février 2018. Les partis politiques de l’opposition ainsi que des mouvements citoyens
ont adhéré à cette initiative. Les autorités ont, une fois de plus, restreint l’exercice des libertés
fondamentales, y compris par le recours excessif et disproportionné à la force. Les forces de défense et
de sécurité ont été largement déployées dans la plupart des grandes villes du pays autour des églises et
sur le tracé de l’itinéraire des marches portant des armes létales et non-létales, dans le but de dissuader
les manifestants et de disperser les marches. Ainsi, neuf personnes ont été tuées lors de ces
manifestations, dont deux femmes, sept le 21 janvier (tous à Kinshasa) et deux le 25 février (une personne
à Kinshasa et une à Mbandaka). Au moins 96 personnes ont été blessées sur l’étendue du territoire de la
RDC dans le cadre de ces manifestations, par balles réelles, balles en caoutchouc, éclats des grenades
lacrymogènes ou suite aux mauvais traitements infligés par les forces de sécurité. Au moins 316
personnes, dont trois femmes et sept enfants, ont été arrêtés dans le cadre de ces manifestations. La
plupart d’entre eux a été libérée par la suite. Pendant ces deux jours des manifestations, les services
internet et SMS ont été suspendus sur instruction du Ministre de la Communication.
33. Les violations des droits de l’homme liées à l’espace démocratique ont été commises principalement au
Nord-Kivu (93 violations), à Kinshasa (63 violations) et dans les provinces de Tshopo (52 violations) et
du Haut-Katanga (47 violations), suivi par le Kongo Central (43 violations) et Maniema (38 violations).
34. Les violations des droits de l’homme et libertés fondamentales liées au processus électoral ont fait au
total 957 victimes au cours de ce semestre. Les membres des organisations de la société civile (302
victimes) continuent d’être les principales victimes de ces violations, suivis par les membres de partis
politiques (185 victimes), ainsi que les journalistes et autres professionnels des médias (38 victimes).

16
En 2017, sur la même période, le BCNUDH avait également documenté 23 cas des exécutions extrajudiciaires.
13
VERSION ORIGINALE
Partis politiques, 77
Médias, 38

Société civile,
302
Autres/ non identifiés, Par victime
540

35. Les militants des mouvements citoyens ont régulièrement été visés par des menaces et arrestations
arbitraires par des autorités congolaises. Le 25 février, à Beni (Nord-Kivu), 23 membres du mouvement
citoyen Lutte pour le changement (Lucha) ont été arrêtés arbitrairement par des agents de la PNC alors
qu’ils participaient à la manifestation pacifique appelé par le CLC. Les policiers les ont embarqués dans
des véhicules et conduits au village de Ngite situé à 15 km au nord de Beni où ils ont été abandonnés au
milieu d’une zone ayant connu des attaques des groupes armés et forcés de rentrer à Beni à pied. En
outre, à leur retour en ville, ils ont à nouveau été interceptés par des policiers qui les ont dispersés avec
des gaz lacrymogènes
36. Les membres et fonctionnaires des partis politiques ont également été empêchés dans leurs activités,
harcelés et/ou arrêtés arbitrairement par des agents de l’Etat. À titre d’exemple, à Lubumbashi (Haut-
Katanga), les militants de la plate-forme politique d’opposition « Ensemble pour le changement » de
Moise Katumbi, ont été empêchés de se réunir à plusieurs reprises. Les 7 et 21 avril, 33 sympathisants
arrêtés arbitrairement par des agents de la PNC quand ils se rendaient à une réunion de la plateforme. Le
3 mai, des agents de la PNC ont encerclé la résidence de M. Gabriel Kyungu, coordonnateur provincial
de la plateforme, pour empêcher la tenue d'une réunion du parti. Le 27 juin, à Kasumbalesa, la plateforme
n’a pas pu organiser une réunion politique car la délégation a été bloquée pendant plusieurs heures a une
soixantaine de kilomètres de Lubumbashi par des agents de la PNC.
Mesures de décrispation

37. Le BCNUDH regrette le manque de volonté des autorités pour mettre en œuvre entièrement les mesures
de décrispation, y compris celles contenues dans l’Accord politique du 31 décembre 2016, qui
permettraient un apaisement de la situation politique en vue de la tenue d’élections crédibles, libres et
transparentes dans le pays. Néanmoins, le BCNUDH note avec satisfaction la libération de plusieurs
prisonniers politiques ou d’opinion pendant la période considérée. Au moins 50 personnes arrêtées dans
le cadre de l’exercice des activités politiques ou de leurs libertés publiques ont été libérées dans la période
sous considération, dont 18 membres ou fonctionnaires de partis politiques, 22 membres des mouvements
citoyens, et 10 autres. Un total de 148 personnes détenus a été libéré suite à quatre arrêtés signés par le
Ministre de la justice et Garde des Sceaux en janvier et février 2018, deux appliquant la loi d’amnistie de
février 2014 (43 personnes libérées), et deux autres introduisant des mesures de liberté conditionnelle
pour des personnes poursuivies pour faits insurrectionnels, faits de guerre et infractions politiques.
38. À titre d’exemple, le directeur de cabinet de Moïse Katumbi a bénéficié d’une libération conditionnelle
suite à un arrêté signé le 22 février 2018 par le Ministre de la Justice. Pour rappel, il avait été arrêté le 30
août 2016 pour détention d’arme et munitions de guerre et condamné à trois ans de prison par la cour
militaire de Lubumbashi. Durant sa détention, il a fait plusieurs séjours à l’hôpital pour raison de santé.

14
VERSION ORIGINALE
39. Cependant, le BCNUDH appelle les autorités à prendre des mesures de libération définitive et non des
placements sous libération conditionnelle ouvrant la porte à la relance des poursuites. Ainsi, deux
activistes de la société civile, libérés le 29 août 2016 par la Cour suprême de justice à la suite d’un arrêté
du Ministre de la Justice accordant la liberté provisoire à 24 détenus politiques, ont reçu un mandat de
comparution devant la Cour de cassation et une audience s’est tenue le 5 février 2018.
40. Au 30 juin 2018, 108 personnes demeurent en détention pour leurs opinions ou activités politiques ou de
défense de droits de l’homme, ou pour l’exercice de leurs libertés publiques. Il s’agit de 47 membres ou
sympathisants de partis politiques, 13 membres de la société civile, un journaliste et 47 autres personnes,
y compris des manifestants. Afin d’instaurer un climat politique apaisé, le BCNUDH recommande de
libérer ceux arrêtés dans le cadre de leurs activités légitimes, et de garantir l’accès à un procès rapide et
équitable pour les autres.
41. Le BCNUDH est également préoccupé par les détentions prolongées des personnes en garde à vue à
l’ANR, sans aucune supervision judiciaire. À titre d’exemple, quatre personnes arrêtées lors des
manifestations du CLC le 31 Décembre 2017 et 21 janvier 2018, à Kinshasa, dont trois accusés d’avoir
mené une attaque contre un sous-commissariat de la PNC, restent encore en détention à l’ANR.
42. Alors que les libertés d’expression, de réunion pacifique et d’association sont garanties et protégées par
la Constitution ainsi que par plusieurs instruments internationaux ratifiés par la RDC, plusieurs
manifestations organisées par l’opposition ou la société civile, dont celles du CLC le 21 janvier et 25
février, ont été interdits et/ou violemment réprimés.
43. Le BCNUDH salue les travaux de la Commission d’enquête mixte 3121 (CEM-3121) crée par la Ministre
des Droits Humains en février 2018 pour enquêter sur les violations commises lors des manifestations du
31 Décembre 2017 et 21 janvier 2018. Cette commission était composée de représentants des autorités
et de la société civile, ainsi que de la CNDH. Le BCNUDH et l’Union Africaine ont fourni un appui
technique et accompagné la Commission en tant qu’observateurs. Dans son rapport, rendu public en mars
2018, La CEM-3121 a formulé des recommandations pertinentes prônant l’ouverture de l’espace
démocratique dans le contexte électoral, en demandant notamment la levée des interdictions générales de
manifestations publiques, l’adoption par le Parlement de la loi portant fixation des modalités pratiques
de l’exercice de la liberté de manifestations publiques afin de se conformer à la Constitution congolaise
et aux standards internationaux et la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement en lien
avec les manifestations publiques. La Commission mixte a également exhorté un renforcement de
l’encadrement des manifestations en dotant la police du matériel adéquat et en interdisant l’intervention
de l’armée dans les missions de maintien et de rétablissement de l’ordre public. La Commission a
également insisté sur la nécessité de mener des enquêtes judiciaires sur ces violations et atteintes aux
droits de l’homme, sans pour autant oublier les victimes, puisqu’elle préconise une prise en charge de
leurs soins de santé et la création d’un fonds de réparation. Afin de contribuer à la lutte contre l’impunité,
la CEM-3121 a partagé, le 28 juin, un rapport plus détaillé avec le Ministre de la Justice et Garde des
Sceaux.
44. Le BCNUDH note l’engagement pris à cette occasion par le Ministre de la justice de donner injonction
au Procureur général de la République et à l’Auditeur général des FARDC, afin que ceux-ci ouvrent des
enquêtes sur les cas repris dans le rapport. Le BCNUDH salue également l’engagement pris par la
Ministre des droits humains lors de la session du Conseil des droits humains en mars de faire lever
l’interdiction générale des manifestations publiques, tel que recommandé dans le rapport.
45. Toutefois, le BCNUDH a constaté, que si plusieurs manifestations et réunions politiques ont pu se tenir
sans incident ni faire l’objet de répression de la part des autorités congolaises, d’autres continuent d’être
interdites ou réprimées par ces dernières, démontrant une inconsistance dans la gestion des réunions et
manifestations publiques, notamment celles de l’opposition ou de la société civile. À titre d’exemple, le
25 avril 2018, à Beni, province du Nord-Kivu, 42 membres de la Lucha ont été arrêtés arbitrairement par

15
VERSION ORIGINALE
des agents de la PNC dans le cadre d'une manifestation pacifique organisée en vue de dénoncer la
situation sécuritaire qui prévaut dans la ville et territoire de Beni. Ils ont été libérés à la suite de
l’intervention du BCNUDH.
46. L’interdiction dite généralisée semble également sélective puisque les partis politiques proches du
pouvoir n’ont pas été affectés par ces restrictions. À titre d’exemple, à Kindu, province du Maniema, le
maire a interdit la tenue d’une marche organisée par la plateforme Ensemble, prévue pour le 19 mai, et
les manifestants ont été empêchés d’accéder au siège de leur parti par un dispositif renforcé d’agents de
la PNC. Les 5 et 15 mai 2018, des partis proches de la majorité présidentielle ont quant à eux pu organiser
des caravanes motorisées dans la même ville, sans être inquiétés par les autorités.
47. Le BCNUDH salue les mesures prises par la justice contre les auteurs des violations des droits de
l’homme dans le cadre des manifestations publiques. Un agent de police a été condamné en procédure de
flagrance à perpétuité le 26 février 2018, à Mbandaka (Equateur), par le Tribunal militaire de garnison,
après avoir tué un manifestant. Un autre policier a été condamné en procédure de flagrance à 20 ans de
prison pour meurtre et violation de consignes pour avoir tiré sur une femme lors de la répression des
manifestations, dont certaines violentes, d’étudiants et de conducteurs de taxi-moto le 22 et 23 mai à
Kisangani (Tshopo). Le 18 juin, cinq agents de la PNC ont été condamnés à 20 ans de prison et perpétuité
pour avoir ouvert le feu sur une manifestation spontanée a Mahagi-Port, province de l’Ituri, faisant deux
morts et deux blessés. Un procès est actuellement en cours contre un policier accusé d’avoir tué un
militant de Filimbi lors de la répression de la manifestation du 25 février à Kinshasa.
48. Le BCNUDH s’inquiète du caractère peu équitable de certains procès à l’égard d’opposants politiques et
activistes citoyens et les risques d’instrumentalisation de la justice à des fins politiques. Le 19 mars 2018,
à Kinshasa, le Tribunal de paix de la Gombe a condamné l’ancien député national Gérard Mulumba
Kongolo wa Kongolo, alias « Gecoco », et un de ses collaborateurs, à 18 mois de prison pour offense
envers le chef de l’Etat et injures publiques. Le 28 avril 2018, à Kinshasa, le Tribunal de grande instance
de la Gombe a confirmé en appel cette condamnation. Gecoco aurait envoyé un message à son
collaborateur sur le service de messagerie WhatsApp au sujet du chef de l’Etat et de sa femme. Le
BCNUDH reste par ailleurs préoccupé par la détérioration de l’état de santé de Gecoco, qui impose une
prise en charge médicale adéquate. Une demande de liberté conditionnelle adressée au Ministre de la
justice le 6 mai 2018 afin de recevoir des soins appropriés dans un établissement à l’étranger demeure
sans réponse.
49. Cinq membres du mouvement citoyen Filimbi, arrêtés fin décembre, ont été détenus pendant plus de cinq
mois à l’ANR et à l’Etat-Major du Renseignement, puis transférés à la Prison Centrale de Makala le 06
juin 2018. Ils sont poursuivis pour atteinte à la sureté de l’Etat, outrage au chef de l’Etat et incitation à la
désobéissance civile. Leur procès devant le Tribunal de Paix de la Gombe est en cours, la prochaine
audience est prévue pour le 11 juillet. Pour rappel, quatre d’entre eux avaient été arrêtés le 30 décembre
2017 par des agents de la PNC pendant qu’ils mobilisaient la population pour la marche du CLC du 31
décembre 2017. Le cinquième a été arrêté le 23 décembre 2017 par des éléments des FARDC en
possession de tracts du mouvement Filimbi.
50. Enfin, le BCNUDH prend note de la création, le 8 mai, par le Conseil national de suivi de l’Accord
(CNSA) d’une commission ad hoc chargée notamment d’accélérer l’application des mesures de
décrispation dont la libération des prisonniers politiques et espère que cette commission va rapidement
porter ses fruits.
Aperçu de la liberté de la presse en RDC
51. À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le 3 mai, le BCNUDH a fait un état des
lieux de la situation de la liberté de la presse et l’indépendance des médias en RDC.

16
VERSION ORIGINALE
52. La liberté de la presse est une composante indispensable à la démocratie. Elle repose sur la liberté
d'opinion et la liberté d'expression et revêt une importance primordiale lors d’un processus électoral
inclusif, apaisé et crédible. C’est notamment à travers elle que les électeurs peuvent faire un choix éclairé
lors du choix de ses représentants. Elle est protégée par l’article 19 du Pacte international relatif aux
droits civils et politique et par l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et
garantie par l’article 23 de la Constitution congolaise.17 En outre, son article 24 prévoit que l’Etat doit
favoriser un environnement médiatique pluraliste.

53. C’est dans ce but que le Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) a été créé 18
et mis en place en 2011. Le CSAC a notamment pour mission de veiller à l’accès équitable des partis
politiques, des associations et de toute autre personne aux moyens officiels d’information et de
communication et d’étudier toute violation de la loi sur la presse.

54. Au cours de la dernière période électorale, le BCNUDH avait déjà documenté plusieurs violations aux
droits à la liberté d’expression et à la liberté de la presse, les restrictions à la liberté de la presse entraînant
souvent des violations de la liberté d’expression. Ainsi, entre le 1er octobre 2011 et le 31 janvier 2012,
42 atteintes à la liberté d’expression et 18 atteintes à la liberté de la presse avaient été documentées.19 En
effet, plusieurs radios et télévisions ont vu leur signal coupé par les autorités congolaises, mais celles-ci
devenant disproportionnées et injustifiées du fait que ces décisions provenaient essentiellement d’abus
de pouvoir d’autorités provinciales ou locales, souvent ordonnées sans se référer au CSAC.

55. Cette tendance aux violations aux droits à la liberté d’expression et à la liberté de la presse s’est encore
aggravée passant de 72 violations aux droits aux liberté d’opinion et d’expression sur toute l’année 201520
à plus de 220 violations par année en 2016 et 2017. Une évolution similaire semble se dessiner en 2018
où 78 violations de ce type ont été documentées au cours des six premiers mois de l’année. À titre
d’exemple, le 2 avril 2018, à Tshikapa, province du Kasaï, un journaliste de la Radio Les ondes du
progrès, venu couvrir une manifestation a été arrêté par des agents de la PNC et détenu pendant environ
quatre heures au motif que la manifestation n’était pas autorisée par les autorités communales.

56. En outre, le BCNUDH note avec préoccupation une augmentation du nombre de cas de violations,
menaces et intimidation à l’encontre de professionnels des médias, passant de 34 journalistes et
professionnels des médias victimes de violation en 2015 à 86 aussi bien en 2016 qu’en 2017. Cela s’est
notamment illustré dans le cadre de son programme de protection, par lequel le BCNUDH a traité en
2017, plus du double de cas de journalistes victimes de violations par rapport à 2015. Une évolution
similaire semble se dessiner en 2018 où déjà 39 journalistes et autres professionnels des médias ont été
victimes de menaces et/ou violations des droits de l’homme au cours des six premiers mois de l’année.
À titre d’exemple, les 27 et 28 avril 2018, à Kananga, province du Kasaï Central, quatre journalistes, dont
une femme, ont été battus et menacés de mort par des éléments de la garde civile du gouverneur de
province car ces journalistes accusaient le Gouverneur d’avoir au sein de sa garde civile des anciens
combattant de Kamuina Nsapu.

17
Constitution de la RDC du 18 février 2006, telle que modifiée par la loi n° 11/002 du 20 janvier 2011
18
Loi nº 11/001 du 11 janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel
et de la Communication ; Ordonnance présidentielle no 11/054 du 12 août 2011.
19
Voir notamment, Rapport du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme sur les violations des droits de
l’homme et des libertés fondamentales commises pendant la période électorale en République démocratique du Congo, ainsi
que sur les mesures prises par les autorités congolaises en réponse à ces violations (octobre 2011 - novembre 2013), publié
en décembre 2013.
20
Voir notamment, Rapport du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme sur les droits de l’homme et les
libertés fondamentales en période pré-électorale en République démocratique du Congo, entre le 1er janvier et le 30
septembre 2015, publié en décembre 2015.
17
VERSION ORIGINALE
57. À l’occasion de la journée mondiale de la liberté de la presse, du 3 mai 2018, Antonio Guterres, le
Secrétaire-général des Nations Unies, a demandé « aux gouvernements de faire davantage pour que la
liberté de la presse soit respectée et les journalistes protégés. En soutenant la liberté de la presse, nous
défendons notre droit à la vérité ».

Les mécanismes des Nations Unies, ainsi que d’autres instances régionales et internationales,
s’expriment sur la situation des droits de l’homme en RDC

58. Au premier semestre 2018, en mars et juin, à Genève, se sont tenues les 37ème et 38ème sessions du Conseil
des droits de l’homme, où la RDC siège comme membre depuis janvier de cette année. 21 Au cours du
dialogue interactif sur la situation des droits de l’homme en RDC, en mars, les membres du Conseil ont
exprimé leurs préoccupations quant à la détérioration de la situation des droits de l'homme, la réduction
de l'espace démocratique et l'usage excessif de la force par les autorités, ainsi que par les intimidations
des défenseurs des droits humains et des journalistes. Ils étaient profondément inquiets par l'augmentation
alarmante du nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l'intérieur de la RDC et ont appelé à la fin
de l'impunité, notamment pour les violences sexuelles. La session de juin 2018, a quant à elle été marquée
par la présentation du rapport du Haut-Commissaire aux droits de l’homme sur les enquêtes menées par
l’équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaïs,22 peignant une situation des droits de
l’homme et humanitaire choquante où les atrocités commises par des agents de l’Etat, par les miliciens
des Kamuina Nsapu ainsi que par ceux des Bana Mura persistent et pourraient être qualifiées de crimes
de guerre et crimes contre l’humanité. À la fin de la session, le Conseil a adopté une résolution
condamnant les violences, l’incitation à la haine et aux violences ethniques et les violations au droit
international humanitaire et aux droits de l’homme, en particulier celles visant les enfants, dans la région
du Kasaï, depuis août 2016. La résolution invite les autorités de la RDC de se saisir des conclusions du
rapport de l’équipe d’experts internationaux, notamment dans le cadre de la lutte contre l’impunité, et à
poursuivre et intensifier ses efforts afin de respecter, protéger et garantir tous les droits de l'homme et
toutes les libertés fondamentales pour tous, conformément à ses obligations internationales. Enfin la
résolution étend le mandat d’une équipe restreinte d’experts internationaux chargée de suivre, évaluer, et
soutenir la mise en œuvre des recommandations de la première équipe. Comme pour la première une
mise à jour orale sera présentée lors de la 40 ème session du Conseil puis un rapport complet lors de la
41ème session.

59. Le 4 juin 2018, à Genève, les Rapporteurs spéciaux sur les droits à la liberté de réunion pacifique et
d'association ; sur la situation des défenseurs des droits de l'homme ; et sur la promotion et la protection
du droit à la liberté d'opinion et d'expression ont exprimé des profondes préoccupations sur un projet de
loi visant à réguler le travail des organisations non-gouvernementales (ONG). Ce projet de loi
introduisant de nouvelles restrictions visant à réduire le nombre d'ONG opérant dans le pays menace les
droits à la liberté d'expression et d'association et de restreindre davantage l'espace civique dans le pays,
de créer la confusion et la peur parmi la société civile, et d’avoir un effet dissuasif sur les défenseurs des
droits de l'homme. Les experts ont par ailleurs rappelé qu’un autre projet de loi sur la protection des
défenseurs des droits de l'homme et de leurs activités en RDC « semble également conduire à une
restriction supplémentaire de leur rôle et de leurs activités, et que, ensemble, ce nouveau cadre juridique
pourrait considérablement entraver le rôle de la société civile, rôle d’autant plus crucial en cette année
électorale ». Les experts ont ainsi exhorté les autorités congolaises à procéder à un examen complet du
projet de loi à la lumière des normes internationales relatives aux droits de l'homme, en particulier des
Directives sur la liberté d'association et de réunion en Afrique, et ont offert de leur fournir une assistance
technique.

21
Cf. résolution A/RES/60/251
22
Cf. résolution A/HRC/RES/35/33
18
VERSION ORIGINALE
Rapports publiés par le BCNUDH
60. Le 19 mars 2018, le BCNUDH a publié un rapport sur Recours illégal, injustifié et disproportionné à la
force lors de la gestion des manifestations publiques en République démocratique du Congo de janvier
2017 à janvier 2018.

61. Le BCNUDH regrette qu’à ce jour, les recommandations de ce rapport restent pour la plupart sans suite,
alors que de nouvelles journées de mobilisation et manifestations sont déjà prévues avant les prochaines
échéances électorales.

Développements dans le cadre de la lutte contre l’impunité

62. Durant le premier semestre 2018 et selon les informations mises à la disposition du BCNUDH, au moins
52 militaires des FARDC et 34 agents de la PNC ont été condamnés pour des actes constitutifs de
violations des droits de l’homme sur tout le territoire de la RDC, ce qui traduit un effort important des
autorités judiciaires en matière de lutte contre l’impunité. Le BCNUDH a continué d’appuyer ces efforts
en participant à six missions d’enquête conjointe (JIT) et neuf audiences foraines aux côtés des autorités
de la justice militaire et civile à travers le pays, afin de traduire en justice les auteurs de violations graves
des droits de l’homme.

63. Le 22 février 2018, le Tribunal militaire de garnison de Mbuji-Mayi et Tshilenge, siégeant en audience
foraine à la prison centrale de Mbuji-Mayi (Kasaï Oriental), a rendu son jugement dans le dossier
impliquant 22 miliciens présumés de Kamuina Nsapu, poursuivis pour participation criminelle à un
mouvement insurrectionnel. Le Tribunal a prononcé deux condamnations à cinq et deux ans de prison et
20 acquittements. Un appel a été interjeté. Malgré ces avancées, et quelques autres jugements rendus
contre des présumés miliciens de Kamuina Nsapu, le BCNUDH regrette que peu d’efforts n’aient été
entrepris pour assurer que des enquêtes crédibles et indépendantes soient menées et traduire en justice
les responsables de graves violations des droits de l’homme par les forces de défense et de sécurité dans
les provinces du Kasaï.

64. Le 28 avril 2018, le Lieutenant-colonel des FARDC Maro Ntumba, alias “Marocain”, a été condamné à
20 ans de prison et au paiement de dommages et intérêts aux parties civiles par la Cour militaire du Sud-
Kivu, pour crimes de guerre par esclavage sexuel, pillage et traitements cruels, inhumains et dégradants,
et pour crimes contre l’humanité par viol massif, attaques contre la population civile et pillages, commis
entre 2005 et 2007 dans le territoire de Kalehe.

65. Le 22 janvier 2018, après 17 mois d’instruction, la Cour militaire opérationnelle a clôturé ses audiences
foraines à Beni (Nord-Kivu), au cours desquelles elle a instruit 60 dossiers portant sur 179 prévenus :
134 ont été condamnés et 45 acquittés.

66. Le BCNUDH a enregistré un total de 120 personnes décédées en détention au cours du semestre en revue,
soit une hausse de 20% par rapport au semestre précédent (environ 100 personnes sont mortes en
détention entre juillet et décembre, ainsi qu’entre janvier et juin 2017, alors qu’elles n’étaient que 57 lors
du deuxième semestre de 2016). Ces décès ont été notamment causés par la malnutrition, aux mauvaises
conditions d’hygiène, et un manque d’accès à des soins appropriés. Enfin peu de mesures ont été mises
en place lors d’épidémies de choléra et tuberculose touchant des centres de détention surpeuplés et
insalubres ayant parfois un accès restreint à l’eau potable.

67. Au moins 243 individus se sont évadés d’établissements pénitentiaires au cours de la période considérée,
soit une nette baisse par rapport au semestre précédent (408 évasions documentées). Ces évasions
s’expliquent surtout par l’état de délabrement des infrastructures, de la surpopulation carcérale, du faible
nombre de gardes affectés aux centres de détention, du manque de formation et de cas de négligence et
19
VERSION ORIGINALE
corruption. La durée des détention préventives ainsi que le nombre de décès en détention peut aussi
encourager les personnes détenues à vouloir s’échapper.

Activités du BCNUDH

68. Au cours du premier semestre 2018, le BCNUDH a organisé ou pris part, sur l’ensemble du territoire, à
au moins 173 activités de formation, appui technique ou sensibilisation, certaines organisées par ou avec
le concours de partenaires et des institutions nationales, en vue de renforcer les capacités des acteurs
étatiques et non-étatiques en matière de droits de l’homme et de les informer de son mandat, en particulier
la CNDH et le Ministère des droits humains. Ces activités, à l’intention de près 7.000 personnes dont
30% de femmes, ont notamment porté sur les mécanismes nationaux et internationaux de protection et
de promotion des droits de l’homme, la protection des défenseurs des droits de l’homme, le respect des
droits de l’homme dans le contexte électoral, la lutte contre l’impunité, la lutte contre les violences
sexuelles, ainsi que sur la commémoration des journées internationales des droits de l’homme.

69. À titre d’exemple, du 1er mars au 31 mai 2018, le BCNUDH a organisé, avec l'appui financier des Pays-
Bas, de la Belgique et de la Suède, 31 sessions de formation, à travers la RDC, sur l’exercice des libertés
publiques visant les populations vulnérables. Ainsi, 2.261 participants dont 1.083 femmes (soit 48%) ont
participé à ces ateliers sur l’exercice de la citoyenneté et la possibilité pour chacun, sans discrimination,
de s’exprimer et participer à la vie publique notamment à travers le vote mais aussi sur la possibilité
d’exprimer librement des opinions diverses sur le déroulement dudit processus afin de garantir sa
crédibilité sans craindre pour sa sécurité ou sa vie. Les participants ont ainsi été sensibilisés sur leurs
obligations dans le cadre de l’exercice de leurs droits et libertés. Ont également participé à ces ateliers,
des personnes vivant en situation de handicap, des jeunes, et des populations autochtones de manière à
favoriser une participation citoyenne au processus électoral.

70. En mai et juin 2018, à Bunia (Ituri) et à Kalemie (Tanganyika), le BCNUDH a organisé des ateliers de
renforcement de capacités en matière de droits de l’homme à l’intention des éléments des FARDC et de
la PNC commis à la garde de compagnies privés mettant en œuvre un projet de la Banque Mondiale
visant l’amélioration de l’infrastructure routière en RDC. Ces ateliers ont été organisés dans le cadre du
partenariat entre le BCNUDH et la Banque Mondiale, en vue de garantir que les projets financés par la
Banque Mondiale en RDC sont mis en œuvre en application de la Politique de diligence voulue en matière
de droits de l’homme (HRDDP) par le système des Nations Unies.

71. Le BCNUDH a continué à accompagner techniquement et financièrement la CNDH, le Parlement et la


société civile concernant l’adoption de la Loi relative à la protection et à la responsabilité du défenseur
des droits de l'homme en RDC, notamment à travers des plaidoyers auprès des parties prenantes.

72. Les différentes journées internationales des droits de l’homme ont aussi été célébrées par le BCNUDH
et ses partenaires sur toute l’étendue de la RDC et ont eu pour but de sensibiliser et de renforcer les
capacités de différents groupes cibles sur des thèmes spécifiques inhérents aux droits de l’homme. Parmi
elles, le BCNUDH a commémoré la Journée internationale de la femme le 8 mars 2017, la Journée
mondiale de la liberté de la presse le 3 mai 2017, la Journée internationale de sensibilisation à l'albinisme
le 13 juin 2017 et la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture le 26 juin 2017.

73. Enfin, dans le cadre de son programme de protection, le BCNUDH a traité 222 cas de menaces et de
violations des droits de l’homme à l’encontre de 141 défenseurs des droits de l’homme, 39 journalistes
et autres professionnels des médias, ainsi que de 37 victimes et cinq témoins de violations des droits de
l’homme sur l’ensemble du territoire congolais. Le BCNUDH s’inquiète du nombre de menaces,
intimidations à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme (près de 64% des cas de protection).

20
VERSION ORIGINALE

Das könnte Ihnen auch gefallen