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Mission CNUH au CHAR de Cayenne

7- 8 Juillet 2018

Pr Pierre CARLI Président du Conseil National de l'Urgence Hospitalière


et chef de service du Samu de Paris

Pr Olivier MIMOZ Chef de Service des Urgences Adultes et du Samu 86

Version du 27 juillet 2018

1
Chapitre 1

1.1 Contexte de la mission

Cette mission flash, qui a duré 48 heures sur place, a été réalisée à la demande de

la DGOS à la suite d’une menace de démission collective de 14 praticiens

contractuels du SAU et de la demande de mise en disponibilité de 3 praticiens

titulaires. Elle s’inscrit donc dans un contexte de grande instabilité du service. Des

négociations ont été menées par la direction de l’ARS et la Direction du CHAR

aboutissant à une feuille de route de sortie de crise portant sur 40 propositions. Ce

document bien que consensuel n’a pas été adopté officiellement par les médecins du

SAU. Quelques jours avant la mission, à la suite d’une séance de la CME

particulièrement tendue la direction de l’établissement, a reconduit 11 praticiens

démissionnaires en signant un contrat de 2 mois pour 9 d’entre eux.

1.2 Les objectifs de la mission :

Ils sont détaillés dans la lettre de mission (annexe1) et peuvent se résumer en 3

axes :

 Une expertise notamment portant sur

o L’organisation et le fonctionnement du SAU

o L’adaptation de l’infrastructure du service

o Les relations entre le SAU et les autres services

o L’organisation du SAMU et des EVASAN

o La maquette des effectifs du service

2
 Une analyse et une priorisation des actions qui pourraient être mises

en œuvre à partir de la plateforme de négociations du 27 juin (annexe

2)

 Participer à la médiation entre les praticiens démissionnaires et la

direction du CHAR et ainsi favoriser le rétablissement d’un climat de

confiance entre les différentes parties en présence.

1.3 Méthodologie

La mission a consisté en :

 D’une part, plusieurs entretiens dont la liste figure en annexe 3. Ils ont permis

d’établir un contact direct et une expression libre, à la fois avec les médecins

du SAU mais aussi avec les personnels paramédicaux, la direction du CHAR,

l’ensemble de la communauté médicale, les syndicats du CHAR, des

représentants politiques locaux (sénateur, député), la présidence de la

communauté de territoire, des représentants des usagers. Ces entretiens ont

été organisés avec l’aide de l’ARS avec laquelle plusieurs réunions ont été

aussi tenues.

 D’autre part, les missionnaires ont disposé de toutes les sources écrites et les

documents réalisés par les missions d’audit antérieures, ainsi que des

documents internes de l’établissement concernant les projets et les maquettes

d’organisations, et les analyses réalisées préalablement par l’ARS. Ces

documents ont été fournis par la direction générale de l’ARS et par le

secrétaire général du CHAR. D’autres documents ont été fournis par les

médecins du SAU.

3
Chapitre 2

2.1 Les médecins urgentistes du CHAR

Nous avons pu rencontrer au cours de plusieurs entretiens formels et

informels environ 50 % des membres de l’équipe d’urgence du CHAR. Cette équipe

est jeune, constituée en majorité de praticiens contractuels, avec des contrats de

durée variable. Certains de ces médecins bénéficient de conditions d’exercices

spécifiques au territoire (médecins à diplôme non européen). Il n’y a pas de chef de

service en fonction et l’équipe s’est organisée comme un collectif. Le turn-over des

médecins est important. Les médecins remplaçants ou intérimaires sont de

compétences variables et leur intégration n’est pas toujours simple. Les activités sont

mutualisées entre le SAU, le SAMU SMUR et les EVASAN. La jeunesse de l’équipe

s’accompagne d’un très fort investissement. Plusieurs médecins ont fait une partie de

leurs études et de leur internat à Cayenne et/ou dans les Caraïbes. Ils expriment une

volonté de rester dans le département et d’y construire un avenir en exerçant une

médecine d’urgence de qualité (demande de formation complémentaire, de

participation à des projets de recherche clinique…).

La situation actuelle est cependant instable et mal vécue par le collectif. Les

médecins expriment surtout le sentiment de ne pas être compris, d’être mal

considérés, alors que la crise actuelle couvait depuis longtemps, notamment depuis

le départ des chefs historiques du SAU et du SAMU. Ils sont demandeurs d’une

sortie de crise, donc de la médiation, et ils espèrent un retour à un régime de travail

stable qui permettrait le recrutement des médecins manquants.

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2.2 L’équipe paramédicale

Elle est aussi, avec son encadrement, très marquée par la crise actuelle. Elle décrit

ce qu’elle appelle « une triple insécurité ».

 Une insécurité physique correspondant à l’absence de protection des

professionnels dans l’enceinte du SAU. Le service est considéré

comme une « passoire » dans laquelle les intrusions d’accompagnants

sont permanentes. Ceci complique la prise en charge des patients

surtout lorsque les familles qui attendent deviennent agressives. Le

mélange du parcours de soin (adulte, pédiatrie, gériatrie) participe à

cette insécurité.

 Une insécurité médicale : Le manque de médecins et leur forte

occupation les rendent moins accessibles. Les compétences de

certains médecins paraissent au personnel paramédical (au SAU

comme au SMUR) insuffisantes et inquiètent les infirmières.

 Une insécurité administrative : malgré de très nombreuses tentatives

pour informer la direction et dénoncer les problèmes existants, l’équipe

paramédicale a l’impression de ne pas être écoutée et de ne pas être

comprise.

L’équipe paramédicale constate que beaucoup de (petits) problèmes qui sont

signalés, s’accumulent et rendent la situation globale difficile :

 Perte de temps pour la recherche de matériel dans le service, pénalisante

pour les infirmières qui sont débordées. Ainsi l’exemple des brancards ou

des pieds à perfusion qu’il faut aller chercher partout est cité plusieurs fois.

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 Glissement de tâches à l’intérieur du service d’urgence entre les

différentes professions, comme la participation des infirmières à

l’enregistrement administratif de nuit alors que les soins débordent …

Le manque de communication entre les médecins (absence d’interlocuteur

médical unique) mais aussi avec l’administration est souligné avec

l’impression lassante que rien n’avance. Il faut noter que cependant

l’équipe paramédicale reste compétente, impliquée et bien encadrée.

2.3 L’organisation interne du SAU:

 Une zone d’accueil et d’orientation (ZAO) des patients et de leurs

accompagnants par une équipe soignante dédiée qui oriente les patients

dans le secteur de soins adéquat après avoir évalué le degré d’urgence.

Elle est composée de deux IDE et d’un médecin dédié de 8h à 18h.

 Une salle d’accueil des urgences vitales (SAUV) accueillant tous les

patients en situation d’urgence vitale ou nécessitant une surveillance

médicale rapprochée. Elle comprend un espace ouvert contenant 5

emplacements pour adultes ou enfants. Elle fonctionne avec un médecin

dédié de 8h à 18h. Elle sert aussi de zone de débordement lorsque la

réanimation est pleine, ce qui est assez fréquent.

 Un box de consultation de médecine générale (« circuit court ») qui

fonctionne avec un médecin dédié de 8h à 21h.

 Un circuit long médico-chirurgical adulte de 8 boxes qui prend en charge

des patients nécessitant des examens complémentaires et la mise en

route de thérapeutiques. Il fonctionne avec 1 médecin H24 et un autre de

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8h à 18h.

 Un box de consultation et un circuit long médico-chirurgical enfant de 2

boxes qui fonctionnent avec un urgentiste pédiatre de 8h à 18h et un autre

de 10h à 21h. Un des médecins assure également les transferts

néonataux.

 Une unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD) de 12 lits qui accueille

les patients pour poursuivre une prise en charge débutée aux urgences,

avant un retour à domicile ou en attente d’un lit dans un service spécialisé.

Elle accueille également les patients relevant de soins continus en

l’absence d’une telle unité au CHAR. Elle fonctionne avec un médecin

H24. La DMS est de 8 j.

 Des internes participent également aux différentes missions de soins du

service. Leur ressenti sur l’intérêt du travail et la qualité de leur

encadrement est bon.

Ce service reçoit environ 50 000 passages par an. Seulement 15 % de ces passages

conduisent à une hospitalisation. Le temps de passage moyen est de 5h45.

2.4 La structure du service

L’architecture du service est assez ancienne, avec une disposition en carré, comme

elle existait fréquemment dans les années 1980. Les locaux même s’ils ne sont pas

neufs restent parfaitement utilisables. Des travaux cosmétiques pourraient

considérablement améliorer le vécu des équipes. Les locaux sont en meilleur état

que certains services d’hospitalisations. L’architecture du service était basée sur le

concept d’un circuit médecine et de chirurgie individualisés qui aujourd’hui est

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dépassé. Elle rend difficile l’organisation des parcours de soins internes au service.

Elle induit une perte d’efficacité et elle est consommatrice de personnels médicaux et

paramédicaux ce qui nuit à l’efficience du service.

L’accueil des urgences lui-même n’est ni chaleureux ni fonctionnel. La salle d’attente

générale et celle du circuit court sont particulièrement exigües. L’ensemble participe

à l’agacement des patients et/ou de leurs accompagnants. Il existe un problème de

sécurité à l’intérieur du service (intrusions violentes) et en amont de sécurisation des

admissions et de la salle d’attente. Il n’y a pas de concertation avec les associations

de patients (qui sont vécues comme agressives par les médecins) ni d’utilisation de

volontaires du Service Civique ou de membres associatifs pour faciliter l’attente aux

urgences et améliorer les relations avec les usagers.

Le circuit court est nettement sous dimensionné en locaux et en personnel alors que

85% des passages au SAU ne sont pas suivis d’une hospitalisation. La maison

médicale est saturée aux heures d’ouverture (PDSA).

Le circuit pédiatrique est mal individualisé et insuffisamment développé alors qu’il

représente une activité très importante. Près de 30 % des 50 000 passages annuels

sont des patients de moins de 16 ans.

Les circuits pédiatrique et adulte ne sont pas indépendants, provoquant des

croisements de flux et d’accompagnants.

Les dispositifs médicaux du service semblent globalement suffisants avec des

difficultés pour l’entretien.

La majorité de ces problèmes a déjà été identifiée mais les solutions n’ont pas été

mises en place. Ceci s’explique en partie par :

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 L’absence de chef de service pour porter les projets du service et assurer

l’interface entre les urgences et l’administration ou les autres spécialités

médicales.

 L’absence d’un projet de service écrit, consensuel et validé par la direction

générale.

2.5 L’aval des urgences

Beaucoup de patients (y compris programmés) transitent inutilement par le SAU

pour être admis dans un service d’hospitalisation ce qui augmente l’attente des

urgences. Cette organisation est ancienne et doit être discutée avec les services.

Le problème de l’aval des urgences est important au sein du SAU. Il explique des

DMS très longues qui peuvent être observées. Il manque des lits d’USC qui

expliquent que la SAUV devient un lieu d’hospitalisation pour des patients aigus qui

peuvent y rester plusieurs jours. De la même façon l’UHCD peut avoir une DMS de 8

j (pour une DMS attendue de 24-48 h) en fonction de la libération de lits dans le reste

des services de l’hôpital. Il n’y a pas d’admissions directes en USIC. L’absence de

lits de certaines spécialités comme la gériatrie participe à « l’hospitalisation » de

patients au sein des urgences. Il n’y a pas de politique de « bed management » et la

recherche de lit est chronophage pour les médecins du SAU. L’identification d’un

médecin du SAU pour cette fonction n’est pas adéquate, il serait plus judicieux

d’envisager un dispositif conforme aux préconisations de l’ ANAP.

Le plateau technique de l’établissement explique aussi une partie des problèmes

rencontrés aux urgences, comme la nécessité de thrombolyser l’ensemble des

patients coronariens et la nécessité de les transférer ensuite par EVASAN

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principalement sur les CHU des Antilles. L’absence d’USINV malgré la thrombolyse

par télé médecine nécessite aussi le transfert de certains patients pour

thrombectomie.

Les filières de prise en charge des principaux parcours de soins (SCA, Neuro -

vasculaire, trauma crâniens sévères ...) ne sont pas clairement identifiées dès le

SAU et dans l’hôpital. Les protocoles de prise en charge de ces patients ne sont pas

développés.

2.6 LE SAMU et le SMUR

2.6.1 L’organisation médicale

L’équipe médicale est globalement mutualisée entre le SAMU-SMUR et le SAU.

La régulation médicale fonctionne avec un médecin urgentiste H24. La médecine

libérale ne participe pas à l’activité y compris pendant les horaires de PDS.

Le SMUR fonctionne avec 2 médecins H24. Après 18h, l’activité du SMUR2 est

mutualisée avec le poste SAUV, le poste ZAO et selon l’activité, le circuit long adulte.

Les EVASAN sont assurées, selon la présence médicale et la distance, soit par un

des médecins SMUR, soit par un médecin non posté.

2.6.2 La régulation Médicale du SAMU

Elle a traité en 2016 33 925 DRM. La participation des médecins libéraux à la

régulation du 15 est inexistante. Par contre les médecins généralistes de Cayenne

assurent, sur les horaires de PDS et jusqu’à 01h00, le fonctionnement d’une maison

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médicale à l’entrée des urgences. Cette activité est importante et appréciée. Il est à

noter que l’offre de ville est existante pour la médecine générale mais qu’il n’y a plus

de structure hospitalière d’urgence privée. L’activité des généralistes est importante

et à la limite de la saturation.

2.6.3 L’activité SMUR en Guyane est particulière.

Beaucoup de transports SMUR s’effectuent par hélicoptère. De jour principalement

par un HéliSMUR dédié, et de nuit ou en milieu périlleux avec un hélicoptère de la

Sécurité Civile. L’activité en 2016 était de 1990 primaires, dont 789 par voie

terrestre. L’activité de transports secondaires, ou de primo-secondaires héliportés à

partir du maillage territorial des centres de santé du département est importante (417

patients en 2016). Il s’agit de la prise en charge de malades ou de blessés graves

qui sont transportés vers le CHAR et qui peuvent nécessiter une EVASAN ultérieure.

Les missions héliportées sont souvent techniquement difficiles et sont surtout de

durée prolongée : certaines de ces missions pouvant durer plusieurs heures. Elles

impactent donc notablement le temps de travail de l’équipe.

Enfin, il faut noter qu’il existe un glissement des taches du SMUR qui effectue des

missions intra hospitalières « primaires » en cas d’aggravation d’un patient déjà

hospitalisé au CHAR (environ 60 en 2016). Cette couverture médicale est en principe

organisée dans les CHG par le service de Réanimation.

2.6.4 Les EVASAN :

L’activité d’EVASAN du CHAR est une des plus importantes de France. Elle est

réalisée sur les lignes commerciales et peut se comparer à un véritable « pont

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aérien » notamment pour la cardiologie et la neurologie interventionnelle. Elle est

évaluée à 220 transports en 2016, dont 128 sur Fort de France et 83 sur Paris.

Les EVASAN urgentes sont à la charge exclusive des médecins urgentistes du

CHAR. Cette activité est très consommatrice de temps médical. Chaque transport

peut mobiliser une équipe complète de 1 à 3 jours Il n’existe pas dans ce domaine de

constitution d’équipes de territoire pour répartir cette charge de travail importante et

pas toujours prévisible.

Certaines EVASAN sont techniquement difficiles et nécessitent des compétences

médicales (pédiatrie et néonatologie) qui font parfois défaut aux jeunes médecins et

aux médecins remplaçants.

Le matériel d’EVASAN est adapté mais sa disponibilité est limitée par le retour des

moyens engagés au cours des transports en métropole.

Les EVASAN non urgentes sont réalisées par les autres services du CHAR

2.6.5 Les Situations Sanitaires Exceptionnelles :

Compte tenu de l’isolement du département, les médecins urgentistes sont très

demandeurs de formation dans ce domaine et de mise à niveau de leurs protocoles

d’intervention. Une partie du PSM engagé aux Antilles n’a pas été récupéré.

L’activité SAMU – SMUR semble donc moins sous tension que celle du SAU. Elle

jouit toujours d’une bonne réputation pour les professionnels de santé et le public.

Les spécificités de cette activité en Guyane impacte sensiblement l’organisation du

temps de travail médical.

2.7 Relations avec les autres services

12
 Concernant la crise actuelle traversée par l’équipe médicale des urgences, la

position de la communauté médicale hospitalière n’est pas unanime. Elle est

divisée sur le soutien à apporter à leur mouvement. Une partie des médecins est

aussi critique sur l’organisation du SAU et des filières de soins, ainsi que sur la

compétence de certains médecins urgentistes. Le sentiment a été exprimé à

plusieurs reprises qu’en l’absence d’un chef de service, la qualité de la prise en

charge au SAU s’est dégradée par rapport à l’époque où les chefs historiques du

SAU et du SAMU étaient présents. La mutualisation de l’équipe médicale SAU-

SAMU est aussi citée comme un facteur de baisse de qualité du service. Le

choix de plusieurs médecins urgentistes du CHAR, considérés comme très

compétents, d’aller travailler au CH de Kourou va dans le même sens. Enfin

certains médecins se plaignent non seulement de la mauvaise image que la crise

des urgences donne de l’hôpital, mais aussi de la captation possible par ce

service, pour résoudre la crise, de ressources rares, au détriment d’autres

unités moins médiatisées.

 Concernant l’aval des urgences, dont nous avons vu la difficulté plus haut, la

communauté médicale est prête à faire des efforts et à participer à un meilleur

« bed management ». Elle considère cependant que l’hôpital est chroniquement

plein et a donc peu de marge de manœuvre. La charge de travail des services

d’aval est considérée comme importante et un afflux de patients montant

directement du service d’urgence sans avoir un parcours de soin clair peut

perturber leur activité. Le problème des patients hébergés dans un service dont

ils ne relèvent pas directement est aussi considéré comme une perte de temps et

de qualité.

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 Les glissements de taches du SAU (accueil de patients attendus, urgences

internes, débordement de l’hospitalisation sur la SAUV et l’UHCD, la

médicalisation de la future USC …) sont sous évalués et un recentrage de

l’activité d’urgence doit faire l’objet d’une concertation au sein de l’établissement.

 Enfin il faut noter l’absence de politique d’assurance qualité orientée vers les

urgences. La gestion des EIG ainsi n’a pas donné lieu à des CREX ou des RMM

spécifiques inter-services, qui pourraient être un facteur de meilleure

compréhension, entre le SAU et les autres services.

2.8 Relation avec la direction du CHAR :

L’équipe de direction est peu nombreuse et elle est affaiblie par la situation de crise.

Cette situation mobilise tous ses membres et tout particulièrement la directrice. Elle

se surajoute à une situation quotidienne déjà difficile à gérer avec le plan de retour à

l’équilibre de l’établissement. L’équipe de direction a conscience de ne pas pouvoir

répondre à toutes les demandes actuelles, ce qui fait l’objet de nombreuses critiques

de la part des médecins et des personnels paramédicaux, mais elle essaie de faire

le maximum compte - tenu de ses moyens. Le dialogue avec les médecins

urgentistes grévistes n’est pas rompu mais il est difficile. La signature récente des

contrats au cours de la CME en est une illustration.

2.9 Relation avec les autres structures d’urgences de Guyane

Le recours à une équipe de territoire au sein d’un GHT est une organisation

fréquemment mise en œuvre en métropole dans le domaine des SAU et de SAMU-

14
SMUR. Au niveau de la Guyane, les 3 hôpitaux disposant d’un service d’urgence ne

travaillent pas suffisamment ensemble : malgré quelques exemples il n’y a pas

d’entraide médicale structurée en cas de difficultés sur le planning, pas de filière de

soins écrite pour l’instant, et pas de procédures communes. Pourtant, certaines

compétences (comme les urgences néonatologiques) font défaut au CHAR alors

qu’elles existent dans les autres structures. Il n’y a pas de formation commune pour

les SSE ou utilisant la simulation pour les prises en charge complexes.

2.10 Relation avec le public :

L’image du CHAR est ternie par la crise actuelle. La multiplication et la médiatisation

de problèmes médicaux et tout particulièrement liés aux urgences a conduit à une

défiance de la population envers l’établissement. Un report des patients vers les

urgences de l’hôpital de Kourou est même observé. Les réseaux sociaux,

l’association des usagers, mais aussi les élus soulignent cette vision négative des

urgences du CHAR. Elle est exploitée de façon caricaturale par les syndicats. Les

médecins urgentistes ont dénoncé publiquement la situation des urgences, avec

d’autant plus de vigueur qu’ils ne veulent pas en être tenus pour responsables.

La demande d’un changement rapide est donc unanimement exprimée. Les très

nombreuses missions et audits antérieurs n’ayant finalement abouti qu’à très peu de

changements concrets, un doute concernant les résultats de la mission actuelle est

compréhensible.

2.11 En conclusion :

15
Les experts constatent donc qu’une perte de confiance s’est installée à tous les

niveaux au CHAR aussi bien à l’intérieur de l’établissement entre les médecins

urgentistes, la communauté médicale et l’administration mais aussi à l’extérieur où

l’image du SAU du CHAR est mauvaise.

L’analyse du fonctionnement du SAU et du SAMU-SMUR montre que des

améliorations techniques sont possibles. Elles peuvent participer à rétablir une part

de la confiance et créer un terrain propice au recrutement de médecins et à

l’amélioration de la qualité de l’accueil et des soins. Cependant à ce stade une

modification importante de la maquette des effectifs est prématurée compte tenu de

nombreuses activités très chronophages en temps médical qui ont été attribuées aux

médecins urgentistes (liées au débordement de la SAUV, de l’UHCD , de l’USIC ,

EVASAN …) qui pourraient ou non être modifiées par un futur projet de service.

C’est une marge de manœuvre importante pour un futur chef de service.

Les négociations qui ont été réalisées sur place par la Direction du CHAR et l’ARS

avec les médecins du SAU, ainsi que les différentes audits qui ont été réalisés à

l’hôpital et sur son activité ont permis d’aboutir à une plateforme de sortie de crise

présentant 40 propositions (annexe 2). Pour éviter de rendre encore plus complexe

la situation actuelle cette plateforme qui est déjà très large a servi de base aux

experts pour proposer et prioriser les actions à entreprendre rapidement.

16
Chapitre 3 : Propositions

3.1 Contexte

Il est important de noter que dans le contexte actuel, compte - tenu de l’attente

importante qu’a suscité la mission, il faut mettre en œuvre en priorité des actions qui

présentent les caractères suivants :

 une forte pertinence médicale

 une faisabilité rapide tenant compte du financement et des moyens

disponibles sur place

 une forte visibilité pour illustrer le changement et participer au rétablissement

de la confiance

Ces actions doivent faire l’objet d’un engagement mutuel regroupant les médecins

urgentistes, la communauté médicale (CME), les personnels paramédicaux et

l’administration sous l’égide de l’ARS. Cet engagement est à la base de la

reconquête de la confiance en montrant que chacun dans son domaine de

compétence fait du mieux qu’il peut pour aboutir à un résultat positif. Ainsi, en

attendant la nomination d’un chef de service, pour chacune des actions entreprises il

serait pertinent de désigner des responsables (ou des pilotes) de sa réalisation

comprenant un médecin urgentiste, un cadre des urgences et un directeur délégué.

Ces actions doivent donner lieu à un suivi régulier avec des points d’étape identifiés

par une feuille de route qui s’accompagne d’une information interne des équipes

médicales et soignantes du CHAR. Une politique de communication vis à vis des

médias et du public doit être formalisée en mettant en exergue les progrès et dès

17
que possible des réalisations concrètes et des « success story » organisationnelles

ou médicales.

3.2 Les mesures suivantes paraissent prioritaires

3.2.1 Au niveau du SAU :

 Nommer un chef de service, interlocuteur privilégié de ses collègues et de

l’administration qui aura la charge de rédiger le projet médical – décliner les

besoins humains et matériels en fonction des organisations choisies. Le choix

de ce chef de service est particulièrement important. Il devra notamment

investir les médecins du service dans les missions d’organisation interne et de

fonctionnement qui pour l’instant ne sont pas pourvues. Pour aider un

nouveau chef de service une mission d’appui par les organismes

professionnels pourrait être envisagée.

 Améliorer l’accueil des urgences pour le rendre plus accueillant, plus

fonctionnel et aussi plus sûr. Des mesures de contrôle des accès (badges,

portes, modification de la fiche de poste des vigiles, système d’alerte à la

Police ...) peuvent être mises en place mais il faut aussi impliquer les

associations de patients pour diminuer les tensions entre soignants et

soignés. La CDU (commission des usagers) doit être mobilisée dans ce sens.

Concrètement plusieurs actions simples (qui ont été utilisées notamment dans

les SAU de l’APHP) peuvent aussi être réalisées rapidement :

18
o L’affichage (multilingue) d’un règlement intérieur, précisant les

modalités d’accès, le code de conduite entre personnels soignants et

usagers (droits et devoirs de chacun).

o Une amélioration du mobilier des salles d’attentes (incluant par

exemple un écran de télévision, une fontaine à eau, des prises de

courant pour charger les téléphones portables...). Ces éléments

peuvent faire l’objet d‘un sponsoring local.

o La création de postes de jeunes volontaires du Service Civique,

affectés au SAU et spécialement formés à la gestion de l’attente et à

une mission d’interface entre les personnels et les usagers.

 Développer un circuit court adulte et un circuit pédiatrique suffisamment

dimensionnés et bien différenciés des autres filières pour réduire les temps de

passages aux urgences et améliorer la satisfaction des consultants.

3.2.2 Au niveau de l’établissement :

 Impliquer l’ensemble de la communauté médicale du CHAR pour 1) ne plus

faire passer par les urgences les patients pouvant être admis directement

dans les services d’hospitalisation, 2) participer rapidement à la gestion des

patients aux urgences lorsque leurs connaissances sont requises et 3)

hospitaliser dans leur service et le plus rapidement possible tous les patients

le nécessitant. Les parcours de soins les plus fréquents doivent ainsi faire

l’objet d’un protocole de soins partagé entre le SAU et le service d’aval. Mettre

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en place dès que possible une gestion des lits efficace (éventuellement avec

l’aide de l’ ANAP).

 Développer la cardiologie interventionnelle afin de réduire les EVASAN

fortement consommatrices en ressources humaines. Préciser le parcours de

soins des patients neuro – vasculaires ayant une indication de

thrombectomie.

 Réaliser le projet d’USC et revoir alors les modalités de fonctionnement de la

SAU et de l’UHCD

3.2.3 Au niveau du département

Rapprocher les 3 équipes d’urgentistes de la Guyane autour d’un collège guyanais

de médecine d’urgence et discuter la création d’une équipe d’urgentiste de territoire

(GHT). Cela permettra, entre autres, de répartir les efforts sur l’ensemble des

urgentistes du territoire (EVASAN) mais également de bénéficier de compétences

non disponibles sur le CHAR (néonatologie).

3.2.4 Améliorer l’attractivité de l’équipe médicale

Pour favoriser l’arrivée de nouveaux médecins et favoriser leur maintien sur

place, des mesures simples peuvent être rapidement instituées : Mise en place d’un

véritable package d’accueil des nouveaux médecins leur permettant d’accéder à

l’informatique et au matériel, de percevoir leur tenue, de disposer du mode d’emploi

de l’hôpital, de bénéficier d’un tour de présentation des services du CHAR

A plus long terme dès que de la taille de l’équipe d’urgentistes le permettra

réintroduire des activités non cliniques, en particulier celles préconisées par le

rapport établi par le Professeur E. CASALINO : organisation de sessions de

formation (par exemple une session de Capacité de Médecine de Catastrophe avec

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l’Université Paris Descartes), de bibliographie, d’un programme d’assurance qualité,

de la participation à des travaux de recherche clinique, de la mise en place d’un

accompagnement spécifique pour les jeunes médecins et les internes.

Les experts tiennent à remercier Monsieur Laleu, Directeur général adjoint de l’ARS

Guyanne, et Monsieur Beauvais, Secrétaire Général du CHAR, et le Dr Deroure

Corte, médecin urgentiste, pour l’aide apportée à la réalisation de la mission.

Professeur Pierre CARLI Professeur Olivier MIMOZ

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