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MELMAN Charles
Jean Clavreul vient de mourir, je l'ai appris par la presse. Il a été l'un de mes frères
aînés, ceux sur lesquels je prenais modèle et appui une fois débarqué il y a 50 ans
dans le milieu psychanalytique.
À ma surprise naïve, ceux-là, je les avais vus au cours du temps se séparer. Seuls ou
par paquets, sans motif doctrinal mais avec une fière assurance oedipienne des
héros.
Pour qui avait cru que la cure permettait de donner au complexe paternel une
autre issue que la triviale affirmation de soi, ça avait été autant de coups durs. Mais
Clavreul s'est distingué, préférant la rigueur intellectuelle et morale au copinage.
Mais je n'ai pas vu venir le coup, la façon dont s'est rapidement agencé contre mes
efforts, au moment même de notre commune réussite, une prise à partie
personnelle, vindicative et persécutrice, dénonciatrice de ma tyrannie et destinée à
m'éliminer. Aucun fait ni argument ne pouvaient trouver grâce. Solange se tenait
un peu à l'écart, avec seulement une neutralité malveillante. C'est ainsi qu'a
sombré la possibilité de trouver sur le champ une digne suite à l'enseignement de
Lacan et que ses élèves se dispersèrent.
Il resta alors à Jean une solitude orgueilleuse qui s'épancha dans plusieurs
manuscrits vengeurs restés sans éditeurs.
J'imagine être suffisamment éloigné de la peine qu'il m'a causé, voire du dégât
provoqué, pour pouvoir dire mon chagrin à sa disparition et rappeler, puisque les
notices biographiques le négligent, qu'il était resté jusqu'au terme un lacanien,
c'est-à-dire et même en dépit de ses sentiments, un frère.
tomado de https://www.freud-lacan.com/getpagedocument/8684