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DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE
Mme Meyer
Rapporteure
___________ Le tribunal administratif
de la Polynésie française
M. Retterer
Rapporteur public
___________
- afin de faire annuler les arrêtés des 28 mars 2013 et 15 février 2016 et d’évaluer ses
préjudices, la SNC Pharmacie de Papara a exposé 2 617 411 F CFP de frais d’avocat et 435 050
F CFP de frais d’expertise comptable ;
- l’angoisse, le stress et les tensions générés par les autorisations illégales d’ouverture
de la pharmacie de Taharu’u ont causé à M. et Mme H. un préjudice moral dont ils demandent
l’indemnisation à hauteur de 10 000 000 F CFP chacun.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code de justice administrative.
Papara, aux motifs, d’une part, que sa motivation peu circonstanciée ne permettait pas de
connaître les éléments de fait sur lesquels l’autorité administrative s’était fondée pour apprécier
les besoins de la population, et d’autre part, que ces besoins, tels qu’identifiés par ce jugement,
n’étaient pas, à la date de cet arrêté, de nature à justifier l’autorisation accordée. Par décisions du
2 novembre 2016, le Conseil d’Etat a rejeté les pourvois en cassation présentés par la Polynésie
française et le bénéficiaire de l’autorisation.
3. Si toute illégalité entachant une décision constitue en principe une faute de nature à
engager la responsabilité de la collectivité au nom de laquelle elle a été prise, une telle faute ne
peut donner lieu à la réparation d’un préjudice lorsque les circonstances de l’espèce étaient de
nature à justifier légalement la décision annulée. Par un jugement nos 1600071, 1600133 et
1600143 du 11 avril 2017 dont il n’a pas été fait appel, le tribunal a annulé l’arrêté du 15 février
2016 par lequel le président de la Polynésie française avait à nouveau autorisé M. Lutringer à
ouvrir la même officine, au motif qu’il n’avait pas été précédé de la procédure d’instruction
prévue par la réglementation. La troisième autorisation délivrée par un arrêté du 24 octobre 2017
a été annulée, par un jugement du tribunal n° 1700423 du 29 mai 2018, au motif qu’aucun des 7
éléments de fait constituant sa motivation ne caractérisait des besoins de la population de nature
à justifier l’ouverture d’une officine à titre dérogatoire. En l’absence de toute argumentation de
la Polynésie française tendant à démontrer que la situation de fait aurait été différente à la date de
la deuxième autorisation, il ne peut qu’en être déduit que les besoins de la population ne la
justifiaient pas.
4. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 que les requérants sont fondés à
demander la condamnation de la Polynésie française à les indemniser des préjudices en lien avec
la faute commise en autorisant l’ouverture de la pharmacie de Taharu’u par les arrêtés des 28
mars 2013 et 15 février 2016.
5. S’il n’est pas démontré que la concurrence due à l’ouverture illégale de la pharmacie
de Taharu’u sur une durée totale de 27 mois (du 1er janvier 2015 au 3 février 2016 et du 18
février 2016 au 19 avril 2017) aurait mis en cause la santé financière de la SNC Pharmacie de
Papara, elle a nécessairement causé à ses cogérants et associés des préoccupations relatives à une
baisse des revenus de leur officine. En outre, il résulte de l’instruction que les deux ouvertures
successives de la pharmacie de Taharu’u et sa fermeture, fortement médiatisées, ont divisé la
population de la commune, et que dans ce contexte, les recours contentieux engagés par M. et
Mme H. ont perturbé la sérénité de l’exercice de leur profession. Il sera fait une juste
appréciation de leur préjudice moral en fixant son indemnisation à la somme de 1 000 000 F CFP
chacun.
6. Les frais d’avocat exposés par la SNC Pharmacie de Papara à l’occasion des
contentieux qu’elle a engagés pour obtenir l’annulation de l’arrêté du 28 mars 2013 ont été
indemnisés, alors même qu’ils étaient supérieurs au montant attribué, par l’exécution de l’arrêt
de la cour administrative de Paris du 1er février 2016, qui a condamné la Polynésie française à lui
verser une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code
de justice administrative. Ses conclusions relatives aux frais liés au litige ayant été rejetées par le
jugement du tribunal administratif de la Polynésie française n° 1300225 du 26 novembre 2013,
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7. Alors même que l’expertise réalisée par l’expert comptable de la SNC Pharmacie de
Papara ne permet pas d’établir le montant de son préjudice financier, elle apporte des éléments
de nature à en démontrer l’existence. Par suite, les honoraires de cette expertise, qui s’élèvent à
435 050 F CFP, constituent des frais en lien direct et certain avec l’indemnisation du préjudice
causé par les autorisations illégales d’ouverture de la pharmacie de Taharu’u.
8. Il résulte de ce qui précède que la SNC Pharmacie de Papara est fondée à demander
la condamnation de la Polynésie française à lui verser une indemnité de 1 914 825 F CFP au titre
des frais divers.
10. Les requérants ont droit aux intérêts au taux légal sur les condamnations prononcées
à leur profit par le présent jugement à compter du 20 décembre 2017, date de notification de leur
demande préalable. Les intérêts n’étant pas dus pour une année entière à la date du présent
jugement, la demande de capitalisation doit être rejetée.
DECIDE:
Article 1er : La Polynésie française est condamnée à verser à M. Frédéric H. et à Mme Agnès
Ragosa épouse H. une indemnité de 1 000 000 F CFP chacun au titre de leur préjudice moral, et
à la SNC Pharmacie de Papara une indemnité de 1 914 825 F CFP au titre des frais divers, avec
intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2017.
Article 2 : Avant de statuer sur les conclusions à fin d’indemnisation du préjudice financier de la
SNC Pharmacie de Papara, il sera procédé à une expertise aux fins indiquées ci-après :
1°) se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utile à
l’accomplissement de sa mission ;
2°) prendre connaissance de la comptabilité de la SNC Pharmacie de Papara, relative
aux années au cours desquelles l’exploitation de la pharmacie de Taharu’u était autorisée par les
arrêtés des 28 mars 2013 et 15 février 2016, ainsi qu’aux années 2010, 2011 et 2012 ;
3°) après avoir explicité la méthode retenue, évaluer les pertes de bénéfice net en lien
avec la concurrence de la pharmacie de Taharu’u à laquelle la SNC Pharmacie de Papara a été
exposée au cours des périodes d’autorisation mentionnées au point précédent, en tenant compte :
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Article 3 : L’expertise aura lieu en présence des représentants de la SNC Pharmacie de Papara
d’une part, et de la Polynésie française d’autre part.
Article 4 : L’expert sera désigné par le président du tribunal. Après avoir prêté serment, il
accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-4 du code de
justice administrative. Il ne pourra recourir à un sapiteur sans l’autorisation préalable du
président du tribunal administratif.
Article 5 : l’expert déposera son rapport en deux exemplaires au greffe du tribunal. Il en notifiera
des copies aux parties intéressées. Avec leur accord, cette notification pourra s'opérer sous forme
électronique. L’expert n'établira un pré-rapport que s'il l'estime indispensable.
Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le
présent jugement sont réservés jusqu'en fin d'instance.
La rapporteure, Le président,
La greffière,
D. Germain
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Pour expédition,
Un greffier,