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REVUE INTERNATIONALE DE SOCIOLOGIE

législatifs adoptés jusqu'à ce jour depuis le 1«* janvier 1893 nous en


avons déjà cité plusieurs au cours des paragraphes précédents nous
nous bornons à compléter cette énumération

a) Loi du 12 juin 1893 concernant l'hygiène et la sécurité des tra-


vailleurs dans les établissements industriels.

b) Loi du 15 juillet 1893 sur l'assistance médicale gratuite.


c) Loi du 29 juillet 1893 sur l'admission d'associations ouvrières
françaises aux marchés de travaux et de fournitures à passer pour le

compte des communes.

d) Loi du 1er août 1893 modifiant la loi de 1867 sur les sociétés.

e) Loi du 8 août 1893 sur le séjour des étrangers en France et la


protection du travail national.

f) Décret du 10 mars 1894 relatif à l'application de la loi précitée


du 12 juin 1893.

MAURICE DUFOURMANTELLE,

Avocat à la Cour d'appel de Paris,


Docteur en droit.

NOTES & DISCUSSIONS

Réponse à « un docteur en Droit », sur la Sociologie.

Au mois d'août 1893, dans la Revue générale de Droit, j'avais écrit

quelques pages sur cette question l'enseignement de la Sociologie


doit-il être introduit dans le programme des Facultés de Droit? Je ré-
très hau-
pondais à des articles antérieurs dont les conclusions étaient
taines. La Sociogie, disait-on, avait droit à être introduite dans l'en-

seignement officiel de nos Facultés, elle devait


en prendre la même

direction, car en sa qualité de science elle était supérieure au Droit.


J'avoue que je pris la défense du Droit et que je demandai à la So-

ciologie de faire ses preuves avant d'être admise à l'honneur d'un

programme imposé tous les ans à plusieurs milliers de jeunes gens.


Ici même, dans le numéro de janvier 1894, « un Docteur en Droit »
m'a répondu. Je me plais à reconnaître la parfaite courtoisie et même
NOTES ET DISCUSSIONS

l'amabilité de ses critiques, mais il me permettra de répliquer à mon


tour.
Je n'entrerai pas dans le détail; d'ailleurs, à quoi bon? Nous ne
sommes pas dans le même état d'esprit. Les opinio ns que l'on a sur
des points particuliers comme la question de pédagogie qui nous
occupe dépendent de systèmes d'idées, et les systèmes eux-mêmes de
l'état d'esprit. C'est
là qu'il faut frapper.
Or donc, au regard de la science, de sa valeur, de la valeur de la
recherche scientifique, nous ne sommes point dans les mêmes dispo-
sitions d'esprit.
Mon contradicteur est dans cet état que nous connaissons bien de-

puis les confidences de Renan, qu'on peut appeler l'ivresse de la science,


et qui est une variété d'optimisme. Je ne prétends point qu'il se fasse
d'illusion sur l'avenir de la science, sur ses progrès indéfinis, sur le

pouvoir ou le bonheur qu'elle donnerait à l'homme. Je m'attache uni-

quement à ceci qu'il croit la science absolument bonne en soi, qu'il


croit absolument bonne aussi et sans danger la recherche scientifique;
qu'il n'y a point pour lui d'autre conduite à tenir vis-à-vis de la science

qu'à la divulguer le plus possible, à associer le plus d'esprits possible


à sa recherche. Je ne crois pas dépasser sa pensée.
Je suis au contraire dans un état d'esprit pessimiste. D'abord, je ne
crois pas que rien dans le monde soit absolument bon. Je crois le
monde livr à la contradiction du bien et du mal, ou, sil'onveut,que
tout est pour l'homme occasion de conduite bonne ou mauvaise. Je
ne m'appuie pour dire cela sur aucun dogme. Je prétends que c'est un
fait et le plus évident des faits pour qui sait regarder sans idées pré-

conçues. Au besoin je renverrai à l'enquête de Pascal et à l'immortel

procès-verbal que sont les Pensées. J'ajouterai, puisque je suis sur ce


chapitre, que la Sociologie ne fera que du travail inutile tant qu'elle
ne prendra pas pour point de départ cette contradiction fondamentale
du bien et du mal, tant qu'elle s'acharnera à les ramener à l'identité
comme elle
l'a fait jusqu'ici par des voies plus ou moins détournées
avec des habiletés plus ou moins spécieuses. S'il doit y avoir deux
écoles de science sociale, qu'il y en ait deux! mais que l'une arbore

pour drapeau la contradiction entre le bien et le mal (1).

(1) Dans un article qui vient de paraitre, dans la Revue de Droit public
sur la crise de la science sociale, je signale justement ces symptômes de re-
tour à la morale, c'est-à-dire à la préoccupation du bien et du mal.
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Cela dit, j'arrive à la science. Je ne la crois pas absolument


bonne. Je la crois socialement périlleuse, avec des nuances, avec des

degrés.
La science est une conscience. Elle joue dans lavie sociale le même
rôle que la conscience dans la vie individuelle. Plus elle nous apprend
de réalités sur les choses, plus de problèmes elle pose de conduite en
face de ces réalités. Quand on ignore les choses ou qu'on a sur elles
des opinions toutes faites, il n'y a point de problèmes, la conduite
est instinctive, machinale. Quand on sait, la conduite devient raison-
née. Là est le péril, car rien n'est plus faillible que le raisonnement.
Et comme il y a des conduites bonnes, d'autres mauvaises, tôt ou tard
les conséquences des erreurs se font sentir.
La crise de science que traverse en ce moment l'humanité est aussi

dangereuse pour elle que la crise de conscience que subissent les ado-
lescents vers la vingtième année, alors que rejetant les idées tradi-

dionnelles, en présence des choses directement vues, ils se font un sys-


tème de conduite à eux. Malheur à ceux qui se trompent à ce mo-
ment-là sur la conduite à tenir dans la vie, ils s'en repentent plus
tard. Malheur aussi aux états, aux sociétés qui se tromperont dans la
conduite à tenir en présence des réalités que la science a brutalement
mises à nu, qui résoudront à faux les questions sociales qu'elle a fait
naître.
Si la science faite, arrivée à des conclusions certaines, est périlleuse,

que sera-ce de la recherche scientifique ? La recherche suppose le tâton-

nement, l'hypothèse, d'abord adoptée,


prônée, puis abandonnée les
livres scientifiques sont des musées de systèmes condamnés. Mais
chemin faisant il se trouve toujours quelque esprit qui s'arrête à ces

hypothèses, qui les proclame vérités, qui en tire des préceptes de


conduite. Ce n'est pas scientifique, mais c'est si conforme à l'esprit

humain, à son besoin de certitude immédiate! Alors pendant qu'une


science se fait, évolue, passe par des avatars, des générations d'hommes
s'arrêtent à quelques-unes de ses conclusions provisoires et vivent
toute leur vie sur des erreurs.
Toutes les sciences ne sont pas également inquiétantes. Assurément
les erreurs possibles de la minéralogie ne font pas frémir. Mais la

C'est en ce sens que les sciences sociales se définissentde plus en plus en

Allemagne à en croire le très intéressant article de M. Bougie, dans la Revue


de métaphysique et de morale, mai 1894, sur les œuvres de Dithey, Wundt
>
Barlh, Lazarus, G. Simmel et sur la Volkerpsycleologie.
NOTES ET DISCUSSIONS

Sociologie est, socialement parlant, la plus dangereuse de toutes. Par


cela même qu'elle a pour objet l'étude des ressorts sociaux, les con-

séquences pratiques que l'on est tenté d'en tirer sont radicalement
sociales. Ce sont les réformes sociales, à moins que ce ne soient des
insurrections ou des attentats! Je n'insiste pas.
Or donc, c'est cette science si facilement meurtrière que vous voulez

enseigner à de grands auditoires, inscrire dans des programmes, in-

culquer à tous les futurs avocats, magistrats, administrateurs. Bien

plus, comme elle n'est pas faite, vous voulez associer ces auditoires
à votre recherche scientifique. Mais vous savez bien qu'on n'associe

pas un grand auditoire à une recherche. Devant lui on ne doute

pas, on n'hésite pas, on ne nuance pas, on affirme. De sorte que


pendant les premières années vous dogmatiserez sur des erreurs hy-
pothèses pour vous, certitudes pour l'auditoire. Votre science se fera

peut-être, mais vous aurez faussé l'esprit d'une génération. Comme


rien ne se perd, cettegénération arrivera aux affaires, ou s'irritera de

n'y pas arriver. On en saura des nouvelles.


C'est pourquoi je disais avant d'enseigner ayez des
officiellement,
résultats. -J'ajoute même attendez d'avoir
des résultats qui ne soient
pas contraires aux vieilles traditions morales et juridiques, qui soient
dans le même sens. Je ne puis pas arriver à me figurer que l'hu-
manité se soit trompée jusqu'ici, qu'elle ait attendu le xix' siècle pour
s'orienter vers a pu ne pas tout voir,
la vérité: elle elle a marché
très doucement, mais je ne puis admettre qu'elle ait tourné le dos à la
véritable route. Quand on vient medire, par exemple, que jusqu'ici la
morale était fondée sur des similitudes, qu'il était bon de se faire le
frère des autres hommes
l'intelligencepar et par l'amour, mais que
désormais tout est changé, que le devoir sera de se spécialiser, la mo-
rale devant se fonder à l'avenir sur la division du travail, c'est-à-dire
sur les différences je demeure stupide. Les « initiés » prétendent
que tous les cent mille ans la terre subit ainsi une révolution sur ses

pôles. Seulement ils ajoutent, en quoi ils me semblent judicieux, que


cela occasionne un cataclysme.
Construisez votre science dans le laboratoire, travaillez dans des
conférences ou des cours
libres, discutez dans des revues prenez
garde à la divulgation du cours officiel. La liberté de la presse a déjà
causé quelques inquiétudes la liberté de l'enseignement ne doit pas
en causer. C'est au corps enseignant à veiller sur lui-même et à distin-

guer soigneusement l'enseignement de recherches de celui des vérités

acquises.
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Je n'ai traité
qu'une question de pédagogie et il est bien entendu

que je ne suis pas l'ennemi de la Sociologie, au contraire j'en suis


avec intérêt les progrès j'en attends beaucoup lorsqu'elle sera faite

je suis persuadé qu'elle apportera aux idées traditionnelles un re-

gain de force par cela seul qu'elle leur appliquera le genre de démons-
tration dont les esprits modernes ont besoin. Lorsque, grâce à elle,
nous aurons recommencé à croire à une foule de bonnes vieilles choses,
nous repartirons pour le progrès, non dans une nouvelle direction,
dans la même, car la logique sociale nous emporte, mais nos idées se
seront élargies. Je ne suis pas davantage hostile à l'enseignement de
la Sociologie dans les facultés de Droit à titre de science en formation.
Bien qu'elle relève principalement de la psychologie, elle gagnera à
être étudiée par des esprits ayant le sens juridique, car le sens juridi-

que qui est sûrement dans la vraie direction sociale, la préserve de


bien des écarts.
C'est parce que je m'intéresse beaucoup à la Sociologie que je si-
gnale et que je signalerai avec insistance les travaux de M. Tarde. Ce

qui les caractérise, c'est que tout en étant scientifiques ils sont dans la
voie traditionnelle. Le grand mérite des Lois de l'imitation est d'avoir
donné une base positive aux éternelles idées
d'égalité, de fraternité,
de charité; d'avoir analysé tout ce qu'il y a de saisissable par la mé-
thode d'observation dans l'effort continuel que fait l'homme pour se
rapprocher des autres hommes; d'avoir montré que c'est ce travail
d'assimilation individuelle qui fait la matière sociale que la morale et le
Droit reposent sur les similitudes ainsi créées et s'évanouiraient avec

elles, d'avoir
enfin réhabilité la croyance et l'amour qui sont au fond
de ce mouvement de l'homme vers l'homme.
Je dis que là est la vérité. Comme contre-partie, je crois dans
l'erreur tous ceux, et ils sont nombreux, qui ont voulu enfermer la
science sociale dans l'étude des formes sociales, des institutions, des

organes. La structure sociale a son importance, mais elle n'est pas


tout. J'ajoute même avec M. Tarde: elle est secondaire.
Si la Sociologie la fait passer au premier plan, elle verse pratique-
ment dans le pire socialisme, car il est entendu alors que toute ré-
forme, toute amélioration est obtenue par une nouvelle organisation
de la machine sociale, qu'il n'y a rien à attendre de l'amélioration de

l'individu, ou que du moins il ne sera amélioré que par la machine.


Je crois au contraire que la machine ne peut être améliorée que lors-
que l'individu est devenu meilleur et qu'il devient meilleur par le frot-
NOTES ET DISCUSSIONS

tement avec ses semblables; que ce qui agit sur lui, ce n'est pas tant
la Société organisée que la Sociabilité.

Voyez une fois de plus combien c'est une matière grave et combien
il faut éviter de lancer pêle-mêle ces idées dans l'enseignement avant

que le triage ne se soit fait.

MAURICE HAURIOU,

Professeur à la faculté de droit de Toulouse.

OBSERVATIONS CRITIQUES

Nous sommes heureux


que M. Maurice Hauriou ait souhaité ré-

pondre à la note de notre collaborateur anonyme, puisque nous avons

pu ainsi placer sous les yeux de nos lecteurs le résumé de ses pro-

pres idées sur le rôle de la sociologie. Mais ces idées, on le sent bien,
sont trop directement opposées à celles que s'efforce de faire préva-
loir la direction de cette Revue
pour que nous ne nous sentions pas
tenu de répliquer, à notre tour, aux pages que l'on vient de lire.
M. Hauriou prête aux partisans de la sociologie la prétention de dé-
clarer « leur science » supérieure au droit. Nous lui ferons observer

qu'il n'est point un seul écrivain


marquant, parmi les sociologues

contemporains, qui se soit préoccupé de cette vaine question de pré-


séance. La sociologie est une science, la science des phénomènes so-
ciaux envisagés dans leur ensemble et dans leur liaison. Le droit est
un art, l'art
d'organiser ces phénomènes de la façon la plus conforme

qu'il soit possible à un certain idéal de paix et de justice. Chacune de


ces deux disciplines a son domaine propre, la science s'occupant de ce

qui est, l'art de ce qui devrait être. Aucune des deux n'est supérieure
à l'autre, mais aucune ne saurait dispenser de l'autre, la détermina-
tion et l'application de l'idéal ne pouvant se faire que grâce à la con-
naissance du réel, l'étude du réel étant infructueuse si elle n'aide pas
à se former un idéal et à le faire passer de la virtualité à l'acte.
De quoi doit s'occuper la sociologie? De la structure du corps so-
cial, ou de son fonctionnement? De l'un et de l'autre, assurément;
et de l'un et de l'autre, au même titre. M. Hauriou ne pense pas ainsi.
Il estime que l'étude de la structure sociale est « secondaire », qu'elle
doit être subordonnée à l'étude de la manière dont les hommes se

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