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Fiche de lecture : La pensée économique depuis Keynes : Dostaler et Beaud point économie

1. Keynes et la théorie générale


De l’éthique à la politique
John Maynard Keynes est né à Cambridge le 5 juin 1883. Son père, John Neville, y enseignait
l’économie politique et adhérait aux idéaux de l’Angleterre victorienne, comme son ami Alfred
Marshall. John Maynard s’éloigna rapidement de cette influence de par son éducation à Eton (1897-
1902) et à Cambridge (1902-1906). A partir de 1906 il prépare une thèse sur les fondements des
probabilités, qui lui permet d’être nommé en 1909, membre du King’s College, après avoir été
fonctionnaire au bureau des affaires indiennes entre1906 et 1908; Cette thèse sera publiée en 1921 sous
le titre « A Treatise on probability ». Il y critique l’utilitarisme benthamien et l’utilisation des
mathématiques dans les sciences morales.

Membre du Trésor britannique, il en démissionne car désapprouve les closes imposées à l’Allemagne
dans le traité de Versailles et publie en 1919 «les conséquences économiques de la paix » où il dénonce
la croyance de l’ajustement automatique des prix et des quantités. Il ne croit donc pas à la théorie de la
main invisible de Smith et encore moins à sa formalisation mathématique donnée par Walras. Il montre
que l’inaction qu’elle implique entraîne le risque d’un écroulement du système capitaliste qui pourrait
déboucher sur le bolchevisme ou le fascisme. Pour Keynes, «le problème politique de l’humanité
consiste à combiner les choses : l’efficacité économique, la justice sociale et la liberté politique. »
En 1929, il est nommé membre de la commission Macmillan pour étudier la situation économique et
prône une intervention active de l’état dans l’économie.

L’assaut contre la citadelle


Keynes commence sa carrière d’économiste comme élève de Marshall et de Pigou, c’est à dire comme
économiste classique. Il classe dans les économistes «classiques », les classiques »habituels » mais aussi
les néoclassiques, en fait tous ceux qui acceptent la loi de Say, la détermination de l’investissement par
l’épargne préalable, la dichotomie entre le secteur monétaire et le secteur réel et la théorie quantitative
de la monnaie.
Keynes se libère péniblement de ses conceptions pour élaborer l’approche développée dans «la
Théorie Générale », qualifiant d’orthodoxe la pensée selon laquelle l’ajustement du marché est
automatique et la critique dans la mesure ou elle n’est pas capable d’expliquer le chômage et les cycles.
Il qualifie les économistes, dont il fait partie, opposés à celle-ci, d’hérétiques.

La rupture
La première fissure avec l’orthodoxie concerne la méthode. Il lui est reproché de ne pas utiliser les
mathématiques alors que lui conseille davantage le «bon sens » et la connaissance approfondie des
processus réels et des institutions. Il reproche à la théorie classique de ne pas décrire la réalité. « Il se
peut que la théorie classique décrive la manière dont nous aimerions que notre économie se
comporta ». De plus, il considère l’économie comme une science morale c’est à dire qu’elle utilise
l’introspection et les jugements de valeur, ainsi les mathématiques ne peuvent pas avoir leur place au
sein de celle-ci.
La deuxième rupture concerne le rôle du temps. Il insère un temps historique, irréversible opposé au
temps logique des néoclassiques. Il situe son analyse dans le court terme ou il y a un passé mais aussi
un futur qui est inconnu. Le traitement de l’anticipation en contexte d’incertitude est un élément majeur
de la rupture de Keynes avec l’orthodoxie.
La troisième fissure en découle, qui est celle de la conception de la monnaie. Il abandonne la théorie
quantitative de la monnaie et déclare que la monnaie est un pont entre le passé et l’avenir, qu’elle est
intimement liée à l’incertitude et au chômage, ainsi une économie monétaire peut influer sur le volume
de l’emploi.
Keynes reproche aussi aux classiques de ne pas avoir d’explications sur ce qui détermine le niveau
global de l’emploi, de la production et du revenu. Selon lui, l’épargne est toujours égale à
l’investissement mais il s’agit d’une constatation ex-post. La décision d’investir est le principal
déterminant du niveau de la production, de l’emploi et du revenu et elle n’est absolument pas limitée
par une épargne préalable ; Elle découle des anticipations des entrepreneurs. De plus, l’investissement
même provoque une épargne qui lui est égale par les variations de la production.

2. La révolution keynésienne
Keynes et la révolution keynésienne
« La Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie » paru le 4 février 1936 propulse
Keynes au premier rang des économistes du vingtième siècle. La formule de «révolution keynésienne »
apparaît pour la première fois dans le titre de l’ouvrage de Lawrence Klein en 1947. Elle désigne un
moment de la grande transformation d’un système international qui avait triomphé au19éme siècle et
cette recherche par Keynes de «la troisième voie ».

De Vienne à Londres
C’est par Londres que l’école walraso-parétienne et l’école autrichienne pénétrèrent le monde anglo-
saxon. La première aboutira à la synthèse néoclassique et la deuxième, par le biais de Hayek constituera
un pôle de résistance important à l’interventionnisme et au keynésiannisme. Mais on peut tout de même
souligner certaines analogies entre la vision autrichienne et celle de Keynes : importance du temps et
de l’incertitude, méfiances envers les mathématiques. Il existe quand même de réelles différences entre
ces deux mouvements puisque l’école autrichienne prône un libéralisme radical où la planification est
impossible et selon Hayek, la société constitue un ordre spontané et la crise de 1929 est due à un
surinvestissement provoqué par une politique laxiste alors que pour Keynes elle est la cause de
l’effondrement de l’investissement ; Ainsi le premier préconise une baisse des salaires tandis que le
deuxième, sa hausse pour stimuler la consommation.

Précurseurs et explorateurs indépendants


Les suédois ne voient rien de bien nouveau dans « la Théorie générale » face aux thèses de Wicksell et
de ses disciples Lindahl, Myrdal et Ohlin qui avaient chacun développés des brides de la théorie
keynésienne ( possibilité d’un équilibre de sous-emploi pour Lindahl, rôle des anticipations pour
Myrdal ou encore l’intervention de l’état contre le chômage pour Ohlin). Il apparaît évident que l’école
de Stockholm a joué un rôle important dans la mise en œuvre de politiques de relance à partir de 1932.
Le même phénomène apparaît entre Keynes et Kalecki qui avait déjà publié des modèles intégrant une
théorie de la demande effective en 1933 mais qui passèrent inaperçus sauf pour Tinbergen qui opposa
les théories non-mathématiques de Keynes et Hayek à celles mathématiques de Kalecki et de Frisch.
Frisch et Tinbergen, premiers lauréats du prix Nobel de sciences économiques en 1969, peuvent être
considérés comme des « explorateurs indépendants » au même titre que Kalecki ou que les suédois. Ils
rentrent d’ailleurs en contact, Kalecki devenant un des chefs de file du mouvement post-keynésien.

Disciples et compagnons de route


Richard Kahn peut être considéré comme le plus proche collaborateur de Keynes, Schumpeter en
faisant même le coauteur de la Théorie générale. On peut aussi y rajouter James Meade Austin et Joan
Robinson, Piero Sraffa.
Les post-Keynésiens se rallient globalement à Kalecki alors que Sraffa conseille un retour à la vision
classique de la valeur et, c’est encouragé par Keynes, qu’il se lance dans un long travail d’édition de la
correspondance de Ricardo. Keynes possède aussi des alliés à Oxford dont Meade et Harrod ; ce
dernier rédigera ainsi la première biographie de Keynes.

De la théorie aux politiques


Pour Keynes, les deux défauts du capitalisme, chômage trop élevé et répartition trop inégale des
revenus, risquent de briser la cohésion sociale en débouchant sur le Fascisme ou le Bolchevisme. De
plus, ils ne sont pas des phénomènes conjoncturels, mais des résultats inévitables du capitalisme du
laisser-faire. Il qualifie lui-même sa position d’assez conservatrice puisqu’elle implique le maintien
d’entreprises privées donc une inégalité de revenus qu’on ne doit pas viser à extirper totalement et un
interventionnisme aux aspects radicaux, l’état étant le seul en mesure de prendre en charge
l’investissement nécessaire pour stimuler la demande effective mais aussi pour en assurer l’utilité
sociale.
Il appelle aussi à une transformation sociale radicale en évoquant la nécessaire euthanasie du rentier, à
laquelle peut mener une baisse graduelle du taux d’intérêt. Il s’attaque, par là, à la même classe sociale
que Ricardo.
Keynes a ainsi définit plusieurs types de politiques pour surmonter les contradictions du capitalisme et
permettre la sauvegarde des sociétés libérales. C’est pourquoi de nombreuses expériences de politiques
économiques d’après-guerre pourront être qualifiées de keynésiennes.

3. Le triomphe de l’interventionnisme
Les positions de Keynes après 1936
La publication de «la Théorie générale » suscite de vifs débats au cours desquels Keynes varie
l’interprétation à donner à son œuvre. Il s’oppose totalement à l’orthodoxie mais se porte caution de la
grille de lecture commune pour la théorie générale et la théorie classique effectuée par John Hick. Plus
tard il revient sur son acceptation de l’égalité entre le salaire réel et le produit marginal physique du
travail.
Il réaffirme, le rôle que doit avoir l’état dans l’économie par rapport à la parution de «la Route de la
servitude » de Hayek en 1944 où l’auteur dénonce le socialisme et la planification. Keynes se pose
alors comme défenseur de la planification économique et craint les dérives que peuvent avoir de telles
thèses, notamment aux USA.

L’ambigu raz de marée keynésien


De nombreuses politiques d’après-guerre comportent un caractère keynésien plus par son inspiration
que par une cohérence profonde. Mais cette influence a permis le développement d’idées simples telle
que le devoir des gouvernements d’assurer le plein emploi.
Parallèlement, une mutation radicale s’opère : la mathématisation et la formalisation de l’économie dont
la théorie keynésienne ne fut pas épargnée ce qui gomma les caractères essentiels de cette théorie. Ces
simplifications donnèrent le jour à la synthèse néoclassique.
On peut observer les transformations qu’a, en partie, engendré la pensée de Keynes notamment la prise
en compte du plein emploi comme objectif prioritaire, un large consensus autour de la politique
économique, la mise en place des comptabilités nationales.

L’acceptation du plein emploi comme objectif prioritaire


Dès 1943, un rapport de la Société des Nations, «le passage de l’économie de guerre à l’économie de
paix » met en avant le droit au travail dans le but d’assurer à la fois la liberté et la possibilité de
travailler. En Grande-Bretagne, le gouvernement publie, en mai 1944, un livre blanc dans lequel il se
donne pour but le plein-emploi, grâce à une politique maintenant la dépense totale. Dans le rapport
« Full Employment in a Free Society », William Beveridge se réfère explicitement à Keynes et propose
une politique budgétaire basée sur «le potentiel humain et non sur l’argent »ainsi qu’une «politique de
socialisation de la demande plutôt que de la production ».
Le plein emploi comme objectif prioritaire se développe comme, au Canada, en Australie et dans la
plupart des pays européens. Aux Etats-Unis, le préambule de «l’Employment Act » de 1946 affirme
aussi cet objectif principal. C’est en 1948, à la conférence de la Havane, que les Nations-Unies
soulignent l’importance de cet objectif.
Paradoxalement, cela fait longtemps que Keynes s’est inquiété des conséquences du plein emploi et
Fellner et Lerner (1951) se préoccupent des risques pour la stabilité des prix si les politiques sont
menées sans discernement, Joan Robinson également. Weintraub, conscient du risque de coexistence
entre l’inflation et le chômage, propose de compléter la politique de gestion de la demande par une
politique des revenus.

L’âge d’or de l’interventionnisme et des politiques économiques


Hansen, dans « Economic Policy and Full Employment » (1947), rejette les positions de Hayek et
affirme que la gestion de la demande globale et de ses composantes majeures doit être le principal
instrument d’action des politiques économiques, un programme pour le plein emploi doit ainsi être
accompagné par un programme de stabilité des prix. Dans l’après-guerre, les opposants à
l’interventionnisme ne sont guère écoutés et les gouvernements poursuivent d’autres objectifs tels que
l’élargissement et l’amélioration de la protection sociale, du logement, de la santé, de l’éducation,
l’élévation du niveau, bref de la croissance.
Souvent qualifiées de keynésiennes, ces politiques ont aussi d’autres sources comme l’étatisme libéral
au Japon et en Allemagne, la tradition social-démocrate en Europe du Nord, l’interventionnisme et le
Colbertisme en France où Jean Monet jette les bases de la planification indicative. En Allemagne,
Ludwig Erhard conçoit «l’économie sociale de marché » où une large confiance est donnée dans le
marché, l’état devant veiller à ce que le progrès bénéficie à l’ensemble de la société. En Hollande,
Tinbergen a joué un rôle important pour la planification et la définition de la politique économique.
Très tôt, avec Meade, ils ont pris en compte l’environnement extérieur et conçu les instruments de
politique économique pour une économie ouverte.
Aux Etats-Unis, la détérioration de la situation économique et l’élection de Kennedy ont permis le
développement de la «nouvelle économie »proposée par Tobin, Heller, Gordon, Solow et Okun. Elle
repose sur trois principes : la mise en œuvre d’instruments politiques macro-économiques pour atteindre
des objectifs réels, une gestion active de la demande et la combinaison de politiques fiscales et
monétaires, si ces dernières n’étaient pas suffisantes la mise en place d’une politique des revenus serait
nécessaire. Pour Heller les politiques menées par Kennedy et son successeur sont à la base de
l’expansion économique du pays depuis 1961. Désormais, la responsabilité économique du
gouvernement est reconnue et la révolution keynésienne apparaît à la base de la maîtrise de l’activité
économique. Il semble naturel que le gouvernement intervienne pour maintenir l’emploi et la
croissance économique, tache essentielle que les mécanismes du marché ne sauraient effectuer
spontanément »selon Heller.

La mise en place des comptabilités nationales


Elles ont été mises en place dans l’immédiat après-guerre. C’est en Grande-Bretagne qu’elles trouvent
leur source avec un premier livre blanc publié en 1941 par le Trésor britannique. Parallèlement, des
voies originales sont ouvertes en Hollande et en France. Un effort de rapprochement est fourni par la
réalisation de différents modèles de la SDN, de l’ONU et de l’OECE, ils aboutissent au système de
comptes normalisés de l’ONU.
Dans l’après-guerre chaque pays se dotera d’un système de comptabilité nationale et l’on peut affirmer
que l’analyse keynésienne a offert un cadre conceptuel pour la construction, l’articulation et l’utilisation
des comptes nationaux.

Un keynésiannisme hydraulique
Parallèlement, s’est développé un keynésiannisme simplifié et vidé de dimensions essentielles de la
pensée de Keynes telles que le temps, l’incertitude... Les travaux de Samuelson ou encore de Phillips,
celui-ci concevant les flux macro-économiques et les niveaux des prix comme un système de
tuyauteries et de réservoirs, illustrent bien cette révolution que l’on qualifie toujours de keynésienne et
qui porte donc à confusion.

4. Axiomatisation, formalisation, mathématisation


A cette période, une mutation radicale s’opérait : la mathématisation de l’économie. Même si elle
demeure largement littéraire jusqu’à la seconde guerre mondiale, des économistes comme Walras,
Jevons ou Marshall préparent cette mutation dès les années trente.

Naissance et développement de l’économétrie


Des économistes comme Fischer, Mitchell et Moore s’intéressent dés 1912 à l’économie mathématique
et à l’utilisation des statistiques. En 1920, Mitchell et d’autres économistes créent le National Bureau of
Economic Research dont le but est de « présenter au public les faits économiques d’une manière
simplifiée et impartiale ».
C’est Ragnar Frisch qui joue un rôle déterminant dans ce qu’il a baptisé «l’économétrie ». Il fonde avec
Charles Roos et Irving Fischer la Société d’économétrie qui est «une association internationale pour
l’avancement de la théorie économique dans ses relations avec les statistiques et les mathématiques »
en 1930. Frisch construit un modèle mathématique des fluctuations cycliques dans lequel les
oscillations sont provoquées par des chocs exogènes, Kalecki propose, lui aussi, un modèle de
fluctuations cycliques en 1933. En 1936, Tinbergen publie le premier modèle macro-économique global
d’une économie nationale puis se consacre à la vérification empirique des théories des cycles à la
demande de la SDN, donnant lieu à la publication de deux ouvrages auxquels Keynes et Friedman vont
s’opposer. Aux Etats-Unis, c’est la commission Cowles de recherche en économie, fondée en 1932, qui
sera le principal vecteur de recherche économétrique. En 1942, Marschak en prend la direction et
Haavelmo prônent une approche probabiliste à l’encontre de la plupart des économistes mais ces
derniers seront vite convaincus de la justesse de cette approche. On nomme souvent cette révolution
la « révolution probabilistique ».

Les jeux et la guerre


John Von Neumann, grand mathématicien, est à l’origine de la théorie des jeux qui occupe désormais
une place majeure dans l’économie. D’après celle-ci, il existe une stratégie rationnelle qui assure à un
joueur l’avantage maximal, quelle que soit la stratégie de l’adversaire. Von Neumann considère que
cette théorie s’applique à toutes les situations dans lesquelles les comportements des agents décideurs
ont des effets les uns sur les autres.
Elle peut donc s’appliquer à l’économie et apparaît comme un instrument très fécond pour la théorie
néoclassique, Von Neumann y fait d’ailleurs allusion dans son livre « Theory of Games and Economic
Behavior » écrit avec Oskar Morgenster qui a pour but de « découvrir les principes mathématiquement
complets qui définissent le comportement rationnel des membres d’une économie sociale et d’en
dériver les caractéristiques générales de ce comportement ».
C’est la guerre qui a permis le développement de la théorie des jeux, élément important de la recherche
militaire ainsi que la théorie de l’input-output de Wassily Leontief, suivra, après la guerre, le
développement de la programmation linéaire.

L’équilibre général
C’est l’économiste français, Léon Walras qui propose, en 1874, le premier la théorie de l’équilibre
général. Elle part de l’hypothèse que la société est composée d’agents rationnels et cette hypothèse
représente le fondement de la théorie néoclassique. Le terme d’équilibre général renvoie au fait que
l’offre et la demande pour chaque bien dépendent du prix de ce bien mais aussi de tous les autres prix.
Différents auteurs cherchent à prouver son existence tels que Wald, Von Neumann, Kakutami ou
Nash, suivant différentes méthodes. Arrow et Debreu (1954) et McKenzie la démontrent à partir d’un
nombre restreint d’hypothèses relatives à la rationalité des consommateurs et au comportement des
firmes et en faisant appel à la théorie de la convexité. Arrow et Debreu montrent que si chaque
individu détient au départ une certaine quantité de chaque bien disponible alors un équilibre
concurrentiel existera.
Toutefois, ni la stabilité, ni l’unicité de cet équilibre ne sont démontrées, mais, ainsi, la main invisible
acquiert une preuve mathématique puisqu’ils avaient au préalable établit l’équivalence entre l’équilibre
général et l’optimum de Paréto. Les économistes qui se méfient des mathématiques dans l’économie
critiquent fortement ces modèles de part l’irréalisme des hypothèses et les auteurs, eux-mêmes,
soulignent l’aspect trop contraignant des hypothèses et l’irréalisme des modèles par la non-prise en
compte de la monnaie et de l’incertitude.

Triomphe et limites des mathématiques


Trois auteurs ont joué un rôle décisif dans la re formulation des théories économiques : John Hicks en
Grande-Bretagne, Maurice Allais en France et Paul Samuelson aux Etats-Unis. Cette reformulation
transforme la nature même de cette discipline. La synthèse keynéso-néoclassique de Hicks en est la
preuve puisqu’elle gomme l’incertitude, ce que Keynes avait grandement combattu. La science
économique est désormais caractérisée par ses méthodes formalisées et certains appliquent leurs outils
à des domaines traditionnellement traités par d’autres disciplines tels que l’analyse de la famille, par
exemple.
Une autre mutation majeure de cette période est le basculement de la Grande-Bretagne vers les Etats-
Unis du centre intellectuel de la science économique, car les Etats-Unis possède un système
d’interrelations entre l’université, l’administration, les banques et les affaires et le rôle-clé des
fondations et des institutions de recherche, ce que l’Europe n'a pas. Ils possèdent un grand dynamisme
et acceptent les contestataires ou esprits atypiques.
5. Une nouvelle orthodoxie : la synthèse néoclassique
La macro-économie repensée en équilibre
Hicks, après avoir mis en relief l’importance des anticipations en 1936, propose, en 1937, d’évaluer
l’opposition entre Keynes et les classiques. Pour cela, il réduit les deux théories à trois équations : la
demande de monnaie, l’investissement et l’investissement comme égal à l’épargne. Ainsi, les deux
théories ne s’opposent plus guère : les trois grandeurs étant fonctions soit du revenu Y , soit du taux
d’intéret i ou, soit des deux en même temps Il en fait une représentation graphique ou le point
d’intersection des deux courbes (la courbe IS représentant les points ou il y a égalité entre
l’investissement I et l’épargne S pour les couples (Y,i) et la courbe LL représentant les points ou il y a
équilibre monétaire pour les couples (Y,i)) est le point d’équilibre de l’économie. Cette analyse de
Keynes est toute particulière car il ne prend pas en compte l’incertitude, les anticipations, les fonctions
keynésiennes sont épurées et, surtout son but est de dégager les conditions de l’équilibre. Hicks est
aussi le seul à présenter les modèles de Keynes et des classiques comme des cas particuliers d’un
modèle général. D’autres auteurs ont essayé de simplifier la théorie de Keynes comme Franco
Modigliani en 1944 qui, en utilisant un schéma de type IS-LL, montre que l’hypothèse de rigidité des
salaires est essentielle pour expliquer l’équilibre de sous-emploi puis présente un modèle en quatorze
équations du système keynésien. Klein est influencé par celui-ci et propose un système en huit
équations.
Hansen fait une nouvelle élaboration du modèle IS-LL et cherche à réconcilier Keynes et ses
adversaires. Pour obtenir la courbe IS, il combine la fonction de demande d’investissement avec « les
fonds prétables » des néoclassiques et construit la courbe LM, étant les points ou il y a égalité entre
l’offre et la demande de monnaie pour les couples (Y,i). Le modèle IS-LM devient le cadre principal de
la macro-économie keynésienne. Pour la macro-économie, IS-LM représente l’équilibre des quantités
globales et permet aux économistes de retrouver un point de repère cher à leurs yeux: L’équilibre. Il a,
quand même, été critiqué par certains économistes et Hicks, lui-même, en marquera les limites au fur et
à mesure qu’il s’éloignera de la nouvelle orthodoxie. Parallèlement, la séparation entre les travaux sur
les équilibres réels et sur les phénomènes monétaires se renouvelait. Ainsi, certains auteurs, comme
Baumol, Kahn et Tobin, intègrent la théorie de la demande de monnaie dans une analyse élargie à
différents types d’actifs. En 1956, Patinkin traite de l’approche macroéconomique en recherchant, dans
un cadre de structure keynésienne et avec des hypothèses de comportement classique, quelles sont les
conditions de neutralité de la monnaie. La même année, Friedman publie sa reformulation de la théorie
quantitative de la monnaie.
Alors que Keynes avait donné une place privilégiée à la monnaie, le keynésiannisme des années
cinquante et soixante la néglige et c’est contre cela que se développera le courant monétariste, a croire
que Keynes a été tellement dénaturé qu’on lui reproche de ne pas considéré la monnaie comme active.

La révision des principales fonctions keynésiennes


Beaucoup d’économistes formés à l’école néoclassique ont réalisé de nouvelles élaborations des
principales fonctions keynésiennes ce qui a provoqué une certaine dénaturation de l’intention
fondatrice de Keynes.
Ce mouvement a été très net pour la fonction de consommation. Avec d’abord ; Duesenberry qui fait
intervenir le plus haut revenu disponible obtenu dans le passé, ainsi, la part du revenu épargné est
fonction de la position de la famille dans l’éventail des revenus. Pour Modigliani, la proportion du
revenu épargné s’explique par les choix effectués pour être en mesure de faire face aux situations,
prévisibles ou non, susceptibles de marquer le cycle de la vie. Friedman, quant à lui, remet en cause la
fonction de consommation et met en avant l’hypothèse du « revenu permanent » et c’est surtout avec la
prise en compte du taux d’intérêt, du rapport richesse-revenu et d’autres facteurs qu’il rompt avec la
théorie de Keynes.

L’invention de la courbe de Phillips


Keynes avait conscience que l’approche du plein emploi, par une hausse des salaires, pouvait conduire
à l’inflation et c’est ce qui devint le problème des années quarante et cinquante. Samuelson et Solow
mettent alors en avant le schéma de Phillips reliant chômage et variations des salaires et qui associe des
situations de faible chômage à des hausses du taux de salaire. Les deux auteurs la modifient en
remplaçant la variation du taux de salaire par l’inflation. Et c’est en partant de la courbe de Phillips que
monétaristes et nouveaux classiques combattront le keynésiannisme en affirmant que la courbe est à
pente positive alors que les keynésiens maintiennent qu’elle est négative.

L’élaboration des grands modèles macro-économiques


Progressivement, les grands modèles macro-économiques intéressent de plus en plus les banques, les
organismes financiers, les grandes entreprises et les construire devient une nouvelle branche d’activité.
Pour la plupart, ils sont d’inspiration du schéma IS-LM et deviennent indispensables à la définition et à
l’évaluation des politiques économiques.
Globalement le keynésiannisme triomphe encore même si ce n’est pas celui de Keynes et l’on parle
plutôt de synthèse néoclassique; cette dernière devenant la nouvelle orthodoxie. L’opposition existe
tout de même, avec la naissance du monétarisme ayant pour chef de file Friedman.

6. Permanence et renouveau des hétérodoxes


Dans l’après-guerre, la remontée de l’économie néoclassique s’est engagée. Elle privilégie l’homo
economicus, donc une rationalité générale portant sur quelques choix élémentaires, le marché,
l’équilibre, l’optimum et se place ainsi dans un irréalisme convenu. Cette période a aussi été marquée
par l’affirmation de l’hétérodoxie post-keynésienne, la permanence de l’institutionnalisme et le
renouveau du marxisme.

Nouveaux développements keynésiens


Beaucoup d’auteurs qui se réfèrent à Keynes attachent un grande importance aux éléments majeurs qui
ont constitués la rupture avec les classiques et c’est à travers un ensemble diversifié de travaux que va
naître l’analyse post-keynésienne.
Les premiers portent sur la croissance et la répartition avec des esquisses d’analyses formalisées des
cycles économiques et de la croissance par Frisch, Kalecki, ou Tinbergen. Schumpeter cherche, lui, à
expliquer la dynamique des économies capitalistes. Harrod propose un modèle au cœur duquel se
trouve l’équation GC=s ou G est le taux de croissance, C le capital et s la propension à épargner. Il
prend aussi en compte Gw, le taux de croissance nécessaire et Gn, le taux de croissance naturel, qui
est le taux maximum permis par le progrès technique. Ce modèle permet de rendre compte de
l’instabilité de la croissance, ce que Schumpeter appelle en 1956 «l’équilibre du fil du rasoir. »
Solow, Tobin (1955), Meade (1961) et d’autres montrèrent que ce modèle tenait debout par des
hypothèses irréalistes dont la levée pourrait permettre une croissance stable. L’analyse de la croissance
fut un des grands sujets de controverse entre les deux Cambridge : Celui américain qui développe la
synthèse et celui anglais, fidèle à Keynes.
Les apports de Kalecki et de Kaldor furent aussi décisifs aux post-keynésiens. Pour Kalecki, la société
est divisée en deux classes dont l’une a pour revenus les profite et l’autre les salaires. Il développe
aussi une analyse des prix autour de la notion de taux de marge lui-même lié au degré de monopole.
Parallèlement, Kaldor propose un modèle de cycle économique, en 1940, ou il prend en compte la
répartition des revenus pour expliquer la dynamique économique, l’importance du profit anticipé,
duquel dépend le niveau de production et le constat que le multiplicateur et la relation entre l’épargne
et le revenu varient avec les modifications dans la répartition.
Kaldor développe, après-guerre, ses analyses de la croissance et montre que le caractère moteur réside
dans les dépenses des entrepreneurs. Ainsi, la part du profit dans le revenu national dépend du rapport
de l’investissement au produit, et si l’on suppose que les travailleurs n’épargnent pas, le taux de profit
dans l’économie est égal au taux de croissance divisé par la propension à épargner des capitalistes. Joan
Robinson met au cœur de son modèle le fait que le taux d’investissement est lié au profit espéré et que
le taux de profit réalisé est déterminé par l’investissement et a montré comment une hausse de
l’épargne réduit le taux de croissance, ainsi elle projeta dans le long terme ce qu’on a appelé le
paradoxe de la Théorie Générale.
La théorie du capital a aussi été facteur de controverse, notamment au sujet du phénomène « de retour
de production ». Sraffa a montré qu’une technique de production donnée peut se montrer plus
profitable qu’une autre à deux niveaux différents du rapport profit-salaire, car il est impossible de
mesurer le capital indépendamment de la connaissance des prix et du taux de profit. Dès lors, la
fonction de production agrégée, fondée sur un capital « réel » impossible à mesurer, s’écroule. Les
auteurs néoclassique ,par Samuelson, ont admis la justesse de cette démonstration.
L’affirmation du courant post-keynésien
Ce courant se caractérise par un effort marquant pour faire progresser la connaissance des économies
contemporaines. D’abord, par des travaux sur la croissance et la répartition, ensuite par des efforts
convergents pour construire une analyse non néoclassique des prix. La vision de Kalecki est reconnue
comme fondatrice, pour lui, les prix de la plupart des produits manufacturés sont déterminés par les
coûts variables auxquels s’applique un taux de marge lié au degré de monopole. Pour les post-
keynésiens la monnaie est active et ils pensent une conception endogène de l’offre de monnaie
contrairement à la synthèse ou au monétarisme. Les post-keynésiens insistent donc sur les éléments de
rupture entre Keynes et les classiques et préconisent des politiques largement interventionnistes.

Autour de l’institutionnalisme
Myrdal, qui s’est de plus en plus éloigné de l’économie conventionnelle, pense qu’on ne doit pas
couper l’économie des dimensions sociales, culturelles ou politiques.
François Perroux construit un modèle centré sur l’effet de domination puis a plaidé pour une
« économie humaine » où l’homme serait reconnu comme finalité (1961).
Galbraith, lui, analysa le rôle de la grande entreprise dans le système industriel en cernant des
phénomènes cruciaux qu’il baptisa de « contre-pouvoirs » ou de « technostructure ».
D’autres auteurs, tels que Veblen; Clark, Mitchell ou Gruchy se rapprochent du courant
institutionnaliste par leur approche holiste c’est à dire refusant de couper l’économie de son
environnement sociale. On peut trouver des liens de l’institutionnalisme avec l’économie
comportementale, l’école historique allemande ou encore l’école autrichienne moderne.

Du côté du marxisme
Un autre mouvement hétérodoxe se développe qui est appelé aux Etats-Unis l’économie radicale ou
économie politique radicale et qui englobe suivant les auteurs différents mouvances dont le marxisme
fait parti mais il reste un monde à part entière.
Dans l’univers anglo-saxon, la pensée économique marxiste est dominée par trois auteurs : Paul Baran,
Maurice Dobb et Paul Sweezy, et dans celui francophone par Charles Bettelheim, Henri Denis et
Ernest Mandel. Après la guerre les thèses de Von Mises sur l’impossibilité du marxisme semblent
invalidées et avec sa planification centralisée, l’URSS apparaît comme une grande puissance, de plus le
socialisme fait des progrès décisifs en Chine et dans le Tiers-Monde. Depuis Lénine et surtout Staline
le marxisme devient orthodoxe avec , pour illustration la rédaction d’un manuel d’économie politique
ordonné par Staline et publié en 1954 qui affirme les deux dogmes : la supériorité du socialisme et
l’effondrement du capitalisme. Cependant, des difficultés liées à la planification même et au système
étatique provoquent des successions de propositions de réformes.

Débats sur le développement


Les premières réflexions ont concerné l’Europe de l’Est et du Sud-est, puis avec les vagues
d’indépendance ce sont l’ensemble des pays pauvres qui va être pris en compte.
La planification sera l’outil presque incontesté de l’industrialisation et de la modernisation des pays
pauvres, la voie soviétique apparaît comme un modèle que suivront la Chine et d’autres pays
nouvellement indépendants. Rostow analyse le développement en terme d’étapes que chaque pays
développé a franchit et que chaque pays attardé franchira un jour.. Deux attitudes face au
développement vont s’affirmer. Tout d’abord l’attitude marxiste qui met « l’accumulation du capital » au
centre du processus de développement et d’autres auteurs qui ont cherché à identifier les rigidités et
distorsions source de retard, cette approche peur être qualifiée de structuraliste. François Perroux
plaide pour que soient couverts les « coûts de l’homme » et que le développement soit celui de « tout
l’homme et tous les hommes ».Myrdal applique au sous-développement son analyse en termes de
causalité circulaire et cumulative. Hirscham souligne le caractère nécessairement déséquilibré de tout
processus de développement ; il prend en compte, comme Schultz, les rationalité cachées et, comme
Perroux, les effets d’entraînement.
Tandis que sont de plus en plus mis en accusation les rapports inégaux à l’échelle mondiale, en 1972,
Robert McNamara met l’accent sur l’aggravation des inégalités au sein de chaque pays et Adelman
travaille sur la relation entre croissance et inégalités de revenus. L’analyse se porte ensuite sur le
minimum nécessaire et la revendication d’un nouvel ordre mondial.

7. Résurgences du libéralisme
Le libéralisme classique est loin d’avoir disparu et il s’est même développé. Avec le ralentissement de
la croissance, les difficultés du Tiers-Monde et des pays de l’Est, on observe sa résurgence. De plus la
coexistence de taux d’inflation et de taux de chômage remet en cause les politiques keynésiennes.

Milton Friedman et le monétarisme


Cette « contre-révolution monétariste » se caractérise par »l’accent mis sur le rôle de la quantité de
monnaie ». Sa vision globale est la croyance dans la stabilité inhérente des économies de marché et
donc, la méfiance face à l’interventionnisme , et son noyau théorique est la théorie quantitative de la
monnaie. En 1956, Friedman propose une réhabilitation de cette théorie ou il la présente comme une
théorie de la demande de monnaie qui est une fonction stable de quelques variables dont le taux
d’intérêt; Il considère que la vitesse de circulation de la monnaie est variable mais que cette variabilité
n’est pas importante et qu’elle est prévisible, il en tire comme conclusion la faiblesse de l’élasticité de
la demande de monnaie par rapport au taux d’intérêt. De plus, pour lui, « l’inflation est toujours un
phénomène monétaire ». Friedman et Schwartz font une étude des rapports entre les cycles
économiques et les variations de la masse monétaire (1963, 1970, 1982) et prétendent avoir démontré
empiriquement que les variations dans la quantité de monnaie jouent un rôle déterminant pour rendre
compte des fluctuations économiques, s’opposant ainsi aux analyses de Keynes et de ses disciples.
Dans le domaine politique, pour Friedman, l’état doit se limiter à assurer un encadrement stable aux
opérations du marché et il faut se contenter de fixer quelques objectifs globaux et laisser agir le seul
mécanisme apte à gérer efficacement l’allocation des ressources : le marché. Il ajoute, en 1960, que
pour assurer la stabilité des prix, le seul moyen est de soustraire les variations de la masse monétaire à
la décision arbitraire des autorités politiques. Avec Phelps, il ajoute un nouveau concept, celui de taux
de chômage naturel qui dépend des caractéristiques structurelles de l’économie et des préférences des
agents qui la composent, les imperfections du marché comptent parmi les réalités qui le déterminent.
Son existence prouve que les politiques économiques sont à long terme inefficaces;

Economie de l’offre et autres courants libéraux


On trouve dans la théorie de l’offre la courbe de Laffer selon laquelle le rendement de l’impôt
augmente puis diminue au fur et à mesure que la pression fiscale augmente. Des impôts trop élevés
découragent l’initiative, l’épargne, l’investissement et l’effort productif et provoquent l’émergence et
l’extension d’une économie souterraine. Les économistes de l’offre propose une réduction importante
de l’impôt direct et une atténuation sensible de son caractère progressif. Ils insistent sur la génération
d’une demande de monnaie par la production de biens. Le problème fondamental n’est donc pas
l’inflation mais une stagnation de la production causée en grande partie par un système fiscal qui détruit
l’initiative et provoque des distorsions dans les prix relatifs.
La réduction de la fiscalité doit être accompagnée d’une diminution des dépenses de l’état. L’économie
de l’offre croit à l’existence de l’effet d’éviction c’est à dire que les dépenses gouvernementales
détournent des fonds autrement disponibles pour le secteur privé. Cela rend nécessaire la réduction de
toutes les dépenses sociales qui sont, pour Gilder, l’obstacle principal à la croissance économique mais
aussi à la survie même de la civilisation.
L’économie de l’offre participe au courant libertarien parfois appelé anarcho-capitaliste qui prône une
réaffirmation des vertus du marché et de la concurrence contre l’intervention de l’état et toute forme
de réglementation sociale. Pour eux, l’anarchisme est la forme ultime du capitalisme libéral.

L’impérialisme de l’économie néoclassique


Alors que la théorie néoclassique a été critiquée par son réductionnisme, certains théoriciens
néoclassiques ont réagi, paradoxalement, en poussant à l’extrême cette réduction, et en faisant la clé qui
ouvre à la connaissance de tous les phénomènes sociaux.
Selon eux, la société est une somme d’agents indépendants, chacun est doté d’un libre arbitre et
l’interaction des décisions individuelles est à l’origine de la vie économique, sociale et politique ;
chaque comportement peut être prédit à partir de l’hypothèse de la rationalité.
L’une des formes les plus importante de la généralisation de l’approche néoclassique est la théorie du
capital humain. Outre les biens matériels servant à la production d’autres biens, ce sont désormais les
ressources humaines qui sont considérées comme des capitaux gérés selon les mêmes principes que les
ressources physiques. Pour Schultz, c’est l’investissement humain qui devrait être prioritaire. Stigler a
appliqué cette approche à l’acquisition de l’information qui constitue une activité coûteuse, qui sera
poursuivie aussi longtemps que le bénéfice marginal en dépasse le coût marginal (1961). Becker et
Mincer appliquent cette approche à l’ensemble des comportements humains et cela permet d’expliquer
tout acte humain ou dans tous les cas il y a une comparaison, rationnelle, des coûts et des bénéfices.
Ainsi, l’économie devient en quelque sorte la théorie générale du comportement humain.

Politiques libérales et ripostes keynésiennes


Toutes les théories précédentes militent contre l’interventionnisme de l’état et l’on assiste à une
inflexion profonde des politiques économiques menées dans les grands pays industrialisés symbolisée
par les deux noms de M. Thatcher et de R.Reagan. menant des politiques monétaristes.
C’est en 1977 que Friedman propose à la Grande-Bretagne une « thérapie de choc » comprenant de
larges privatisations, des déréglementations et une remise en cause des prérogatives syndicales et c’est
en 1979 que le gouvernement Thatcher l’applique. De son coté, Reagan affirme que la tache du
gouvernement doit se limiter à »construire un cadre à long terme solide et stable, à l’intérieur duquel le
secteur privé constitue le moteur principal de la croissance, de l’emploi et de l’améliorations des
conditions de vie ». Et il s’est fixé comme premier objectif de réduire le rôle du gouvernement dans de
nombreux domaines.
Le monétarisme suscite de nombreuses critiques tant au niveau théorique que par son manque de
rigueur et en particulier l’absence de fondements micro-économiques clairs à leurs constructions
macro-économiques.

8. De nouvelles macro-économie
La remise en question du keynésiannisme passe par la critique de l’insuffisance des fondements micro-
économiques et par celle des modèles macro-économiques keynésiens. C’est en fait de la macro-
économie Friedmannienne et keynésienne que l’on se sépare pour reconstruire l’analyse économique
sur la base d’un postulat de rationalité étendu à l’acquisition de l’information et aux anticipations.

La nouvelle macro-économie classique


Elle est née dans les années soixante-dix pour s’affirmer rapidement comme courant dominant. Lucas
affirme qu’il faut revenir au programme de recherche des théories du cycle de la première moitié du
vingtième siècle, tels ceux de Mitchell et Hayek et, de plus, qu’il faut pour construire une théorie
macroéconomique rigoureuse, partir de l’hypothèse que tous les marchés sont en équilibre, ainsi cette
école est souvent appelée théorie d’équilibre des cycles.
Aux hypothèses néoclassiques, cette école rajoute le traitement optimal, par les agents, des
informations dont ils disposent, informations imparfaites, dont l’acquisition est coûteuse. Deux sources
doivent être distinguées : la théorie de l’information de Stigler (1961) et l’hypothèse des anticipations
rationnelles de Muth (1961) critiquée d’irréaliste mais, pour eux, peu importe l’irréalisme du moment
que les hypothèses permettent de déduire des résultats qu’on peut tester empiriquement. Après eux, la
courbe de Phillips est verticale à court comme à long terme, il n’y a donc pas d’arbitrage à faire entre
l’inflation et le chômage et toute politique de stimulation de la demande qui est anticipée et
systématique ne peut avoir aucun effet sur la production et l’emploi, c’est ce qu’on appelle le théorème
de neutralité ou d’inefficacité politique formulé par Sargent et Wallace et Barro. Les responsables
politiques réagissant eux-mêmes à l’état de la conjoncture, les agents finissent par deviner ce qu’ils
feront et ajustent leurs comportements en conséquences.
Les fluctuations cycliques sont alors provoquées par des chocs qui sont ensuite amplifiés et qui amène
les agents à prendre de mauvaises décisions de production. Les fluctuations dans l’emploi sont
provoquées par le choix entre loisir et travail, il n’y a donc pas de chômage involontaire. Lucas pense
ainsi que le chômeur choisit son état dans le cadre d’un processus d’optimatisation.
Pour la nouvelle macro-économie classique, les chocs sont de nature monétaire alors que pour la
théorie des cycles réels les fluctuations sont générées par des chocs au niveau de la productivité
heurtant des économies dans lesquels les marchés sont toujours en équilibre. Au niveau politique, on
retrouve une attitude commune qui est celle d’un scepticisme absolu face à l’intervention étatique car il
suffit d’avoir les « règles du jeu » bien connues de tous : Un taux annuel stable de l’augmentation de la
masse monétaire, un taux de dépenses et de transfert gouvernemental qui ne varie pas selon les cycles
et, des taux de fiscalités fixes dont l’objectif serait à long terme d’équilibrer le budget; Lucas ajoute que
les prix et les salaires déterminés par des accords privés ne doivent pas être modifiés par l’action
gouvernementale. En fait, la meilleure politique économique est l’absence de politique économique.
Cette école fut critiquée par son manque de cohérence et l’absence de crédibilité des mesures
proposées.

Les théories du déséquilibre


Pour Patinkin, il n’existe pas de forces suffisantes pour amener le système à l’équilibre et préfère
qualifier la théorie de Keynes de théorie de déséquilibre du sous-emploi. Hicks développe, quant à lui,
les concepts de prix flexibles (flexprice) ou les prix s’ajustent dans chaque période de temps qui se
succèdent de telle sorte que les transactions courantes égalisent les offres et les demandes, et de prix
fixes (fixprice) ou les prix sont donnés au début de chaque période et demeurent inchangés de sorte
que les offres et les demandes peuvent demeurer en déséquilibre. Hicks estime que la réalité se trouve
entre ces deux concepts.
Leijonhufvud introduit les problèmes de structures des transactions, de circulation de l’information et
de contraintes de liquidité pour expliquer les déséquilibres keynésiens. Pour lui, le chômage et les
dépressions sont causés en grande partie par le fait que le système de marché donne de mauvais
signaux.
C’est un groupe d’économistes qui développe la théorie du déséquilibre en cherchant à élaborer une
explication endogène de la rigidité des prix. On peut mentionner Malinvaux qui fit la distinction entre
chômage keynésien, caractérisé par une insuffisance de la demande et le chômage classique caractérisé
par des salaires réels trop élevés.

La nouvelle économie keynésienne


Il s’agit de donner à la théorie macroéconomique keynésienne des fondements micro-économiques plus
rigoureux. Elle cherche à expliquer la rigidité des prix et des salaires et à montrer comment ces rigidités
provoquent les caractéristiques qualifiées de keynésiennes des économies contemporaines dont la
persistance de taux de chômage élevés est la plus importante. Il s’agit de voir comment de petites
rigidités nominales peuvent engendrer d’importants effets réels sur le plan macroéconomique comme le
coût d’ajustement des prix.
Ces phénomènes sont amplifiés par le caractère monopolistique des économies contemporaines.
Dennis W.Carlton montre d’ailleurs que la rigidité des prix est beaucoup plus la norme que l’exception.
Les nouveaux keynésiens vont aussi montrer l’existence d’« échecs de coordination » liés à des
problèmes de circulation de l’information. L’étude des caractéristiques du marché du travail joue un
rôle important dans la nouvelle économie keynésienne.
Ils analysent des phénomènes comme ceux des contrats implicites ,des salaires d’efficience ou
d’étalement des contrats qui constituent des sources de rigidité et d’amplification des déséquilibres.
Même si ces nouveaux fondements micro-économiques semblent dépasser le clivage entre le
keynésiannisme »classique » et le monétarisme, ce courant pense que le fonctionnement normal des
économies monétaires ne mène pas à la stabilité et à l’équilibre et la plupart considèrent donc que
l’intervention étatique peut améliorer la situation.

9. Sur Babel et trois démarches de la pensée économique contemporaine


Babel : les économistes en leur nouveau monde
Aujourd’hui, un économiste doit avoir l’esprit assez ouvert pour pouvoir se tenir aux courants des
principaux débats en cours car l’économie est devenue un domaine en incessante expansion et
remodelage. Depuis la seconde guerre mondiale, les domaines couverts par la science économique ne
cessent de s’étendre et le nombre d’écoles d’augmenter.
La science économique contemporaine est caractérisée par une double dynamique, dont témoigne la
multiplication du nombre des revues : le gonflement du stock publié et sa parcellisation. Cela
transforme le monde des économistes en une sorte de tour de Babel ou rares sont ceux qui écoutent
les autres et ou seule une infime part du discours émis est entendue. Dans ce cadre, les économistes
tendent à constituer une multitude de microcosmes, chacun fondé sur une communauté d’approche et
sur la reconnaissance réciproque. Ainsi, la science économique est en perpétuel renouvellement mais
cette réorganisation se fait de manière difforme et discordante.

De l’idéal théorique à la complexité du monde, tisser l’impossible toile


Dans l’après-guerre, une nouvelle forteresse classique s’est constitué, basée sur la théorie de
l’équilibre général et dont les postulats simplificateurs font la force. Mais cette nouvelle orthodoxie a
aussi été victime de critiques au sujet, par exemple, du marché. Ils pensent le marché comme une entité
mécanique ou les informations circulant entre les acteurs conduisent à l’ajustement en équilibre.
Hayek rejette la conception d’un marché sur lequel les agents seraient parfaitement informés (1937),
selon lui le marché est un « ordre spontané » et non une création rationnelle. On a aussi cherché ,dans
le cercle de l’économie néoclassique, a donné plus de réalisme à la vision du marché. Ainsi se sont
ouverts de nouveaux champs de spécialisation tels que l’économie de l’information et l’économie de
l’incertain. Parallèlement, la théorie des jeux a profondément renouvelé l’analyse du marché, celui-ci
n’en étant que mieux délimité.
D’autres critiques apparaissent en ce qui concerne la rationalité. Pour la nouvelle orthodoxie, la
rationalité d’un agent se borne à maximiser des avantages et à minimiser des coûts. Simon développe la
« rationalité procédurale » où l’agent tient compte de l’imperfection de l’information et du coût de son
amélioration mais aussi de la pluralité des contraintes, des critères, des avantages et des inconvénients.
C’est l’article de Coase (1937) qui ouvrit de nouvelles perspectives puisqu’il cherche à expliquer la
spécificité de la firme par rapport au marché et donc la nature de la firme dans une économie de
marché. Il le fait en développant la thèse selon laquelle la firme est une structure qui permet d’éliminer
les « coûts de transactions ».
Ces différentes pensées ont eut trois conséquences : l’ouverture de brèches dans l’orthodoxie, le
renforcement de celle-ci et un profond renouvellement des analyses des institutions, des organisations,
des firmes.. Alors que certains travaillent à mieux rendre compte de la réalité, d’autres appliquent des
analyses encore plus réductrices qu’avant.

L’hétérodoxie toujours à reconstruire


Face à la vitalité de la nouvelle orthodoxie, les hétérodoxies peuvent paraître touchées. Ainsi,
l’institutionnalisme décline, le courant post-keynésien est toujours vivant mais des courants s’opposent
au sein même de celui-ci et le marxisme connaît un renouveau à partir de 1968.Les ouvrages marxistes
se multiplient, Samuelson reconnaît Marx comme un important mathématicien et l’on assiste à un
intense débat sur le problème séculaire de la transformation des valeurs en prix de production formulé
par Marx.
Avec la stagflation qui a frappé les économies capitalistes au début des années soixante-dix, le
keynésiannisme et le marxisme ne sont plus à la mode. Désormais, l’hétérodoxie se caractérise par des
efforts d’analyse de la réalité économique prise dans sa dimension historique, de l’économie historique.
D’ailleurs le projet de Dockés et de Rosier est de «privilégier l’analyse du changement dans un temps
historique ». Cette recherche de l’articulation des deux dimensions, théorique et historique, rejoint les
démarches de Schumpeter ou de Perroux.
Dans cette mouvance, un effort d’élaboration théorique plus systématique a été mené par l’école de la
régulation. Elle puise son inspiration du marxisme, des post-keynésiens, de l’école historique et de
Schumpeter. Selon Boyer, l’approche régulationniste apporte « ’une attention extrême à la forme précise
que prennent les rapports sociaux fondamentaux, lors d’une phase historique et pour une société
donnée », elle analyse les « régimes d’accumulation » et le « mode de régulation ».
Dans la lignée de l’économie historique, se situent des auteurs qui ont travaillé sur le système
capitaliste mondial et sur les firmes multinationales. Mais aussi ceux appartenant à l’économie des
conventions qui met au cœur de son analyse les deux formes majeures de coordination que constituent
le marché et l’entreprise qui ne peuvent fonctionner sans un cadre commun situé dans l’histoire des
sociétés.

Le vol brisé de la pensée économique


Désormais les économistes ne s’attellent plus à construire une pensée globale mais se restreignent à
certains domaines, de plus l’étude des réalités économiques est considérée comme une activité de
deuxième rang. La pensée économique apparaît comme souffreteuse et c’est désormais le
développement que l’on place comme objectif universel. L’environnement est aussi devenu un des
grands chantiers de cette fin de siècle et là aussi une pensée globale nécessaire est absente.
Discipline éclatée, la science économique se développe aujourd’hui à travers une multitude de travaux
consacrés, pour la plupart, à des objets ponctuels, abordés à travers des approches réductrices.
Beaucoup d’économistes cherchent à rouvrir leur réflexion en remettant en cause la méthode et les
bases mêmes de la réflexion économique. R.H Nelson met en relief le besoin d’élargir les
connaissances des futurs économistes aux domaines de l’histoire, du droit, de la science politique et
des institutions, avec, finalement un retour à la tradition de l’économie politique.
Dans cette perspective, s’inscrit la « socio économie » avec Boulding, Sen, Simon. Plus largement, des
plaidoyers pour la reconstruction de l’économie politique ne manquent pas, prenant en compte la
dimension éthique de celle-ci. Aujourd’hui, la pensée économique éclatée laisse l’économiste désarmé
face aux grands problèmes de notre temps.

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