Sie sind auf Seite 1von 20

« Mexicaine anti-tyrannique : Juana Belén Gutiérrez de Mendoza »

Sofía Mateos Gómez

1. Contexte: la Révolution Mexicaine


En mars 1908 le président mexicain Porfirio Díaz a été interviewé par le journaliste américain James
Creelman pour la revue Pearson's Magazine. Pendant cet entretien, Díaz a affirmé "en toute sincérité,
la pratique du gouvernement n'a pas altéré mes idéaux politiques ; je crois que la démocratie est le seul
gouvernement juste, même si elle n'est possible que dans des populations hautement développées" 1. Il a
aussi annoncé qu'il finirait son mandat présidentiel en 1910 "sans aucun remord".
Díaz avait exercé la présidence du Mexique depuis 1877; c'est-à-dire, pendant plus de trente
ans : l'équivalent de sept mandats présidentiels. Et malgré ses déclarations, il s'est encore proposé
comme candidat aux élections de 1910.
Les Lois de Réforme (officialisées dans la Constitution de 1857) avaient établi certains droits
humains fondamentaux, comme la liberté de culte, la liberté de presse et le droit au mariage laïc, à
partir d'une pensée qui se revendiquait comme libérale. Porfirio Díaz, lui même, est arrivé au pouvoir
comme candidat du Partie Liberal.
Mais l'idéologie du régime de Porfirio Díaz privilégiait le progrès industriel et la stabilité
sociale sur l'égalité des citoyens. Le groupe d'intellectuels qui accompagnait Díaz et qui élaborait la
base théorique du discours officiel était connu sous le nom des "scientifiques". Il s'agissait d'un groupe
d'environ 50 professionnels (écrivains, avocats, médecins,...), parmi lesquels on peut signaler Gabino
Barreda, Justo Sierra, José Yves Limantour et Emilio Rabasa, comme les plus célèbres. Leur pensée,
fortement influencée par le positivisme européen, soutenait que le peuple mexicain n'était encore prêt à
une démocratie libre; qu'il fallait une main de fer pour garantir l'amélioration sociale du pays.
Dans son essai L'évolution politique du peuple mexicain, Justo Sierra affirme que:
Pour que le président puisse mener à bien la grande tâche qui lui était imposée, il lui fallait
un maximum d'autorité, non seulement d'autorité légale, mais d'autorité politique lui
permettant d'assumer la direction effective des instances politiques [...] ; de l'autorité
sociale, devenant le juge suprême de la paix de la société mexicaine avec le règlement
général, [...]; et de l'autorité morale2.

1 James Creelman, "Entrevista Díaz-Creelman", Mario Julio del Campo (trad.), México: UNAM-IIH, 2008. Web
<http://www.historicas.unam.mx/publicaciones/publicadigital/libros/diaz/EDC004.pdf> 05 mars 2019. Notre traduction.
2 "Para que el presidente pudiera llevar a cabo la gran tarea que se imponía, necesitaba una máxima suma de autoridad
entre sus manos, no sólo de autoridad legal, sino de autoridad política que le permitiera asumir la dirección efectiva de
los cuerpos políticos [...]; de autoridad social, constituyéndose en supremo juez de paz de la sociedad mexicana con el
asentamiento general, [...]; y de autoridad moral [...]" (Sierra, Justo. Evolución política del pueblo mexicano. Mexico:
La devise du groupe des "scientifiques" était: "ordre et progrès". Et selon leur conception de ces
valeurs, le régime de Díaz réussirait. Le projet de modernisation de Díaz incluait la construction d'une
infrastructure ferroviaire, l'industrialisation et la rénovation des capitales avec de l'éclairage public, des
nouvelles écoles, l'installation des tramways électriques et la promotion des activités commerciales.
Mais ces progrès ne beneficiaient qu'à une petite partie de la société mexicaine.
La plupart des terres mexicaines appartenait à un petit nombre de familles et s'organisaient
autour d'une hacienda, forme d'administration du travail et de la production agricole heritée de l'époque
coloniale où les hiérarchies et les conditions de travail était encore féodales 3. Dans les haciendas les
paysans habitaient et travaillaient dans des conditions proches de l'esclavage dû à un système
d'endettement héréditaire et à la répression brutale de toute forme de protestation ou même tentative de
fuite.
En 1901, les frères Flores Magón fondèrent leur journal Regeneración4, qui diffusait des idées
anarchistes auprès des étudiants, des enseignants et des familles rurales; ils créèrent le Parti Liberal
Mexicain et, fidèles au principe de l'action directe, ils commencèrent à organiser des groupes armés au
nord du pays. Au même temps, le mouvement syndicaliste prenait de l'ampleur à travers le Mexique, et
les grèves devenaient de plus en plus fréquentes, toujours violemment réprimées par le gouvernement
de Díaz.
1908 est une année clé dans la préparation de la Révolution. L'interview de Díaz avec Creelman
encouragea certains acteurs politiques à se préparer à la première élection libre du nouveau siècle, du
moins le pensaient-ils.
Encore une fois Díaz proposa sa candidature, avec Ramón Corral comme viceprésident.
Bernardo Reyes (à l'époque secrétaire de la Marine dans le gouvernement de Díaz) comptait avec le
soutien de l'armée, certains entrepreneurs, des professionels, des universitaires, et proposait sa
candidature pour la vice-présidence. Le Parti Démocratique soutenait aussi la présidence de Díaz, mais
s'opposait à la candidature de Ramón Corral comme viceprésident, à cause de ses antécédents comme
gouverneur. Il avait, en effet, brutalement réprimé le groupe indigène des yaquis, au Nord du Mexique.
Finalement, le principal opposant à Porfirio Díaz était Francisco I. Madero, auteur en 1908 du
document fondateur du Partie Anti-Réélection (intitulé La succession présidentielle en 1910).

Consejo Nacional para la Cultura y las Artes/Cien de México, 1993. pp. 260-261) [Notre traduction]
3 Adolfo Gilly, La revolución interrumpida, Mexico : Era, 2016, cap. 1 "El desarrollo capitalista".
4 Ils ont aussi édité le journal El hijo de El Ahuizote, opposé au régime de Díaz.
Malgré tout, Díaz et son vice-président Ramón Corral gagnèrent les élections, notamment
parce-qu'auparavant, Díaz avait envoyé Bernardo Reyes en mission en Europe de façon à ce qu'il ne
puisse pas participer aux élections; et Francisco I. Madero avait été emprisonné (en 1909) sous
l'inculpation d'incitation à la rébellion et offense contre l'autorité.
La Révolution vit le jour au Nord du Mexique, dans le milieu rural où des petits groupes armés
dirigés par des leaders locaux (comme Francisco Villa) commencèrent une guérilla qui s'étendit
rapidement au reste du pays. Madero, le représentant de l'opposition institutionnelle, réussit à
s'échapper aux États-Unis, où il rédigea, au Texas, le Plan de San Luis, premier appel officiel aux
armes contre le régime qui déclencha la Révolution et qui provoqua la renonciation et l'exil de Díaz en
1911.
Ceci est une trop brève synthèse du commencement d'une Révolution extrêmement complexe,
qui donna le ton du XXème siècle mexicain. La guerre civile qui a suivi les élections de 1910 dura plus
de dix ans et causa la mort d'environ 1 400 000 Mexicains. Il s'agit d'un moment historique difficile à
simplifier en groupes distincts et tendances claires, à cause de la diversité des acteurs politiques
(l'armée, les conservateurs pro-Díaz, les entrepreneurs étrangers, l'Église, les intellectuels libéraux, les
syndicats, les groupes communistes et anarchistes, les paysans levés en armes...), à cause aussi des
tensions et déplacements au cœur même de chaque groupe politique et à cause des anciennes structures
de la société mexicaine coloniale qui continuaient de jouer un rôle pendant le conflit armé (comme le
système patriarcal, la discrimination à l'égard des peuples indigènes, les privilèges de classe).
Parmi les résultats de la Révolution on peut compter la naissance de quelques institutions
fondamentales du Mexique du XXème siècle, tels que la Constitution de 1917 (encore en vigueur), la
Banque du Mexique et le Parti National Révolutionnaire (renommé Parti Révolutionnaire
Institutionnel, qui a gouverné le pays sous une forme hégémonique jusqu'en 2000). La Révolution a
inauguré une époque de fort nationalisme au Mexique, pendant laquelle d'énormes efforts de l'élite
intellectuelle et du gouvernement ont été déployés pour donner une image claire et positive du
Mexique.
C'est la raison pour laquelle la Révolution Mexicaine a toujours joué un rôle central dans
l'histoire de notre pays, et dans les discours politiques de groupes très divers. À cause de son
importance, réelle ou supposée, dans la formation du Mexique tel qu'il se présente aujourd'hui, on a
fortement tendance à simplifier les événements de la Révolution, ainsi que les idéologies et groupes qui
y ont participé. C'est pourquoi le travail de recherche et de collecte documentaire sur l'époque de la
Révolution reste toujours nécessaire pour souligner la complexité de cet événement.

2. Les femmes dans la Révolution


La participation féminine à la Révolution nous offre un angle de lecture qui croise tous les niveaux
socio-économiques, les régions du pays et recouvre tout le spectre des idéologies politiques.
La culture populaire mexicaine associe, encore aujourd'hui, le rôle des femmes dans la
Révolution à l'image des adelitas. Issue de la littérature de la Révolution, du cinéma mexicain
(particulièrement à l'âge d'or des années 40 et 50) 5 et des chansons populaires, l'image des adelitas est,
en gros, celle des femmes dévouées qui accompagnaient les soldats en réalisant des tâches ménagères,
comme soigner les blessés, cuisiner, préparer les zones de repos dans les camps, c'est-à-dire, qu'elles
réalisaient dans les campements militaires les travaux domestiques traditionnellement réserves aux
femmes. Si elles portaient des armes, c'était toujours pour défendre et aider son compagnon.
Le nom adelitas surgit d'une chanson devenue extrêmement populaire à l'époque, un corrido
(chanson populaire) intitulé précisément "La Adelita", qui décrit une femme s'ayant intégré à la lutte en
suivant un homme dont elle est amoureuse :
Au sommet d'une montagne abrupte
campé il y avait un régiment
et une fille courageuse qui le suivait
follement amoureux du sergent6

Déjà en 1940 les adelitas étaient devenues un symbole national. En faisant l'éloge de
l'autobiographie de Benita Galeana (femme du milieu rurale qui a migré à Mexico et a lutté à côté du
Partie Communiste au début des années 20), José Revueltas décrit l'image de l'adelita comme un faux
mythe romantique et folklorisant :
Avec [son autobiographie, Benita] a remporté la victoire suprême en détruisant un mythe
romantique – et si faux! – créé pour le plaisir et l’inspiration de faux écrivains et touristes
authentiques : La Adelita. La Adelita, au début était une chanson, avec tout ce qu'une
chanson que les gens chantent comporte d'histoire et de vie. Puis, elle est devenu un mythe
vernaculaire, comme tant d’autres éléments de notre révolution, dont le destin a été gâté
entre les mains des chercheurs d’anecdotes. Aujourd'hui, l'Adelita est la chanson que les

5 Quelques exemples de films sont : La Adelita (1937), Jesusita en Chihuahua (1942) et Si Adelita se fuera con otro
(1948), et Pancho Villa y la Valentina (1958).
6 En lo alto de una abrupta serranía / acampado se encontraba un regimiento / y una moza que valiente lo seguía /
locamente enamorada del sargento (Chanson populaire, notre traduction)
touristes chantent à El Tenampa, car après tout, elle a déjà été intégrée au folklore et en fait
partie intégrante. 7

Dans le milieu littéraire, la Révolution à donné la matière à tellement de récits qu'un sub-genre
nouveau est né dans la tradition de la littérature mexicaine : le roman de la Révolution. L'anthologie
proposée par Antonio Castro Leal en 1962, intitulée La novela de la Revolución Mexicana, a eu une
énorme influence sur la constitution de ce corpus d’œuvre canoniques sur le conflit armé. Bien que la
liste change selon l'interprète, on peut dire que les principaux auteurs qui forment le canon de cette sub-
genre sont Mariano Azuela (Los de abajo, 1915), Martín Luis Guzmán ( El águila y la serpiente, 1928;
La sombra del caudillo, 1929), José Vasconcelos (Ulises criollo, 1935; La tormenta, 1936 et El
preconsulado, 1939), Gerardo Murillo (Cuentos bárbaros, 1930), Ermilio Gómez Abreu (Cuentos de
Juan Pirulero, 1939), Rafael F. Muñoz (Vámonos con Pancho Villa, 1931), Francisco Luis Urquizo
(Memorias de una campaña, 1933) et Agustín Yáñez (Al filo del agua, 1947).
En faisant le tour des représentations sexistes dans la littérature mexicaine, l'essayiste Carlos
Monsiváis fait mention en particulier des stéréotypes transmis dans des œuvres de l'époque post-
révolutionnaire :
Autres archétypes: le fidèle soldadera, la créature admirable que se laisse tuer par son
homme dans l'échange de vies (la Codorniz de Mariano Azuela); la victime convoitée qui
joue avec son honneur à perdre (Micaela dans Al filo del agua, de Agustín Yáñez); l'être
fébrile et isolée (Susana San Juan dans Pedro Páramo, par Juan Rulfo); l'amante folle,
victime d'amour-passion qui est rachetée de son impudeur (Adriana dans La Tormenta de
José Vasconcelos); la déesse vénérée, si magnifique qu'elle mérite d'être alternée avec la
mère (Rosario dans le "Nocturno" de Manuel Acuña); la femelle terrestre ne pouvant plus
être retrouvée (l'indienne sauvage à cheveux bruns dans "Idilio salvaje" de Manuel José
Othón); la nymphe la plus pure dont l'amour avec l'adulte ne peut être consommé que dans
la tragédie (Carmen de Pedro Castera).8

7 "Con [su autobiografía, Benita] ha logrado la suprema victoria en derrumbar un mito romántico -¡y tan falso!- que se
creó para goce e inspiración de falsos escritores y turistas auténticos: La Adelita. La Adelita, al principio fue una
canción, con todo lo que de historia y vida tiene una canción que canta el pueblo. Después se transformó en un mito
vernáculo, como tantas otras cosas vivas a nuestra revolución cuyo destino se ha malogrado en manos de los buscadores
de anécdotas. Hoy la Adelita es la canción que entonan los turistas en El Tenampa, pues al fin y al cabo ya se ha
incorporado al folklore y forma parte inseparable de él." (José Revueltas, "Benita Galeana ha escrito su vida", El
Popular, 9 mai 1940, p. 3, notre traduction).
8 "Otros arquetipos: la soldadera fiel, la criatura admirable que se deja matar por su hombre en el canje de vidas (la
Codorniz de Los de abajo de Mariano Azuela); la coqueta victimable que juega con su honra para perder (Micaela en Al
filo del agua, de Agustín Yáñez); el ser febril y remoto (Susana San Juan en Pedro Páramo, de Juan Rulfo); la amante
enloquecida, la víctima del amor-pasión que en la entrega se redime de su impudor (Adriana en La Tormenta de José
Vasconcelos); la diosa venerada, tan mangnífica que merece alternar con la madre (Rosario en el "Nocturno" de Manuel
Acuñañ); la hembra terrenal ya irrecuperable (la india brava de bruna cabellera en el "Idilio salvaje" de Manuel José
Othón); la ninfeta purísima cuyo amor con el adulto sólo puede consumarse en la tragedia (la Carmen de Pedro
Castera)." (Carlos Monsiváis, "Soñadora, coqueta y ardiente. Notas sobre sexismo en la literatura mexicana". Misógino
feminista. Mexico : Océano/Debate feminista, 2013, pp. 27-28, notre traduction).
La seule femme incluse dans l'anthologie canonique La novela de la Revolución Mexicana,
éditée par Antonio Castro Leal est Nellie Campobello. Elle a écrit un livre de poésie (Yo Francisca,
1929), et trois œuvres en prose : Cartucho (1939), Las manos de mamá (1937) et Apuntes sobre la vida
militar de Francisco Villa (1940), dont Cartucho est devenu immédiatement célèbre, grâce non
seulement à son inclusion dans l'anthologie célèbre, mais surtout à son excellente qualité littéraire.
L'histoire de la réception de chacun des livres de Campobello, ainsi que les montés et descentes de sa
popularité comme figure publique sont profondément représentative des idées changeantes sur la
Révolution et sur les femmes mexicaines.
Mais Campobello n'est pas la seule voix grâce à laquelle nous connaissons le point de vue
féminin sur la Révolution. Parmi d'autres, on trouve les romans de Celia Herrera (Francisco Villa ante
la historia, 1939), Blanca Lydia Trejo (Un país en el fango, 1942), Consuelo Delgado (Yo también,
Adelita..., 1936) et l'américaine Anita Brenner (The Wind that Swept Mexico, 1943) ; l'autobiographie
de Benita Galeana (Benita, 1940), les contes de María Esther Nájera et Carmen Báez 9 ; ainsi que les
témoignages d'Úrsula Tapia10, Ignacia et Esther Torres11, Herlinda Barrientos12, María Dolores Cárdenas
Aréchiga13 et Antonia Álvarez14, recueillis par d'historiens pendant les années 90.
La publication de ces œuvres a contribué à enrichir le regard sur la diversité de positions que les
femmes occupaient par rapport à la lutte révolutionnaire. Les textes cités sont issus de divers régions du
pays, les femmes qui les ont écrits appartenaient à un éventail de groupes sociaux et soutenaient des
positions diverses face au conflit armé. Par exemple, Celia Herrera s'intéresse à dénoncer les dégâts
provoqués par les troupes de Francisco Villa dans son village ; Blanca Lydia Trejo peint dans son
roman un pays ravagé par une guerre sans idéologies claires et sans projet de nation ; pendant
qu'Antonia Álvarez et Úrsula Tapia racontent sa participation directe à la guerre en tant que soldate et
infirmière, encore convaincues de la légitimité de la lutte.
Vers la fin du XXe siècle, le rôle des femmes dans la Révolution est devenu un sujet d'un intérêt
croissant, et les recherches ont montré une participation, effectivement, très complexe. Un antécédent
fondamental dans les études du rôle des femmes dans la lutte révolutionnaire est le travail de María de

9 Inclus dans l'exhaustive anthologie de Xorge del Campo, Cuentistas de la Revolución Mexicana (1985-1986).
10 Jesús Arzola, Una historia vivida: según el testimonio de Úrsula Tapia. Ciudad Victoria : Instituto Tamaulipeco de
Cultura, 1991.
11 Jorge Basurto, Vivencias femeninas de la Revolución, Mexico : INEHRM, Secretaría de Gobernación, 1993.
12 Herlinda Barrientos, María Dolores Cárdenas, Guillermo González Cedillo, Con Zapata y Villa. Tres relatos
testimoniales. Mexico : INEHRM, Secretaría de Gobernación, 1991.
13 Idem.
14 Jorge Trujillo Bautista (comp.), Testimonios de la Revolución Mexicana en Tamaulipas. Tamaulipas : INEHRM,
Secretaría de Gobernación, Gobierno del Estado de Tamaulipas, Instituto Tamaulipeco de Cultura, 1992.
los Ángeles Mendieta, La mujer en la Revolución Mexicana (1961). Elle base sa recherche sur les
archives historiques du Sécretariat de Défense Nationale, mais se souci de souligner le fait qu'une
grande quantité de femmes ayant lutté à la Révolution ont resté anonymes : "Je m'intéresse de nouveau
à insister sur la participation modeste, simple et désintéressée de la femme anonyme, sans nom dans
l'histoire, dont la mémoire reste vivante comme un avertissement inexcusable pour les générations
futures."15
Héritière explicite du travail de Mendieta, l'historienne Martha Eva Rocha 16 propose 4 groupes
principaux, dans son effort pour classifier les diverses formes d'engagement des femmes au mouvement
révolutionnaire : les propagandistes (ce qui inclut les journalistes, les enseignantes et les femmes qui
ont constitué et appartenu aux clubs politiques), les infirmières, les soldates et les féministes. Elle
construit sa recherche à partir du reconnaissance officiel de la participation des femmes à la lutte
révolutionnaire grâce au statut de vétéran établi par le président Lázaro Cárdenas en 1939. Exactement
432 femmes ont reçu ce statut. Donc, à partir d'une liste officielle, la chercheuse pose les question pour
les formes et raisons de la participation des femmes à la lutte, ainsi que la question pour les effets à
longue terme de ces événements sur la vie des révolutionnaires.
De son côté, les auteures de Mujeres en la Revolución Mexicana (Mayabel Ranero Castro,
Mirna Benítez Juárez et Olivia Domínguez Pérez) proposent deux groupes clairement séparés : les
activistes et femmes politiques, issues de la classe moyenne ou moyenne-haute, qui avait une certaine
visibilité publique ; et les soldates d'origine défavorisée, souvent paysannes, qui participaient
directement aux actions militaires toujours sous forme anonyme. Cet étude suit un ordre chronologique
et séparé par positions politiques (magonismo, maderismo, villismo,...), dans l'intention de suivre les
changements de la place des femmes dans la vie politique, à partir du libéralisme du XIXe siècle et
jusqu'à l'époque post-révolutionnaire.
Pendant qu'Ángel Gilberto Adame, dans son livre De armas tomar, classifie les femmes selon le
milieu où elles ont mené sa lutte : la santé publique (Matilde Montoya), l'éducation (Adelaida
Argüelles), les clubs féministes (Hermila Galindo), le théâtre et l'industrie du spectacle (Mimí Derba),
l'archéologie préhispanique (Eulalia Guzmán), la diplomatie (Palma Guillén), la photographie (Tina
Modotti).

15 "Me interesa nuevamente insistir en la participación modesta, sencilla y abnegada de la mujer anónima, sin nombre en
la historia, cuyo recuerdo permanece vivo como una inexcusable amonestación para las generaciones futuras"
(Mendieta, La mujer en la Revolución Mexicana, Mexico : INEHRM, 1961, p. 112, notre traduction)
16 Los rostros de la rebeldía. Mexico : Secretaría de Cultura, Instituto Nacional de Estudios Históricos de las
Revoluciones de México, 2016.
Récemment, quelques chercheurs américains se sont aussi intéressés par le rôle des femmes
dans la Révolution, surtout du point de vue de leur travail journalistique. C'est le cas, par exemple, de
Joel Bollinger Pouwels (Political Journalism by Mexican Women During the Age of Revolution, 1876-1940,
2006) et Cristina Devereaux Ramírez (Occupying our space. The Mestiza Rhetorics of Mexican Women
Journalists and Activists, 1875-1942, 2015).
Ces exemples des diverses approches attestent de la pluralité des formes de participation des
femmes à la Révolution Mexicaine, et s'occupent de souligner le fait que ce moment historique a été
fondamental pour l'intégration des femmes mexicaines à la vie publique et politique du pays. Gilberto
Adame remarque que :
la participation des femmes était cruciale pour le mouvement révolutionnaire, tout comme
le mouvement révolutionnaire était crucial pour que les femmes puissent pénétrer sur la
scène publique. La tension sociale de l'époque était un terreau propice, de sorte que toutes
les non-conformités accumulées au fil des siècles ont émergé pour exiger un changement.
Une fois que le germe du possible a été semé, toute l'indignation contenue a servi de moteur
pour sortir de la léthargie de la démission17.

3. Juana Belén Gutiérrez de Mendoza


L'une des figures centrales dans les études qui visent à récupérer la participation des femmes à la
Révolution est Juana Belén Gutiérrez Chávez. Elle est née en 1875, au nord du Mexique, au sein d'une
famille d'ouvriers de pensée libérale qui ont fait des efforts pour envoyer Juana Belén à l'école malgré
sa situation économiquement précaire.
À l'âge de 17 ans, elle a épousé Cirilo Mendoza, et ils ont eu trois enfants : Santiago, Julia et
Laura. Bientôt veuve, Juana Belén a dû veiller sur sa famille, alors elle a profité de la formation qu'elle
avait reçu et elle est devenue journaliste. Elle s'est intégrée à l'équipe de rédacteurs de El Hijo del
Ahuizote, journal anti-Díaz où les frères anarchistes Flores Magón publiaient aussi. En 1897 elle a été
emprisonnée pour la première fois à cause de son reportage sur les conditions de travail dans les mines
de La Esmeralda (Chihuahua, nord du Mexique).
Une fois hors de la prison, Juana Belén a fondé le Club Liberal Benito Juárez, à Coahuila (nord
du Mexique), en 1899; peu après elle a déménagé à Guanajuato (centre du pays) où elle a fondé, en
1901, le journal Vésper, toujours de tendance libérale et anti-régime dont la devise était "justice et

17 "La participación de las mujeres fue crucial para el movimiento revolucionario, así como el movimiento revolucionario
fue crucial para que las mujeres pudieran irrumpir en l escena pública. La tensión social de la época fue un caldo de
cultivo idóneo para que toda la inconformidad acumulada a lo largo de los siglos emergiera para exigir un cambio. Una
vez sembrada la semilla de la posibilidad, toda la indignación contenida fungió como un motor para salir del letargo de
la resignación" (Adame, Ángel Gilberto. De armas tomar. Feministas y luchadoras sociales de la Revolución Mexicana.
Mexico : Aguilar, 2017. Position 72 ebook.)
liberté!"18. Vésper était une publication ouvertement anarchiste; ses presses ont publié aussi des
nombreux exemplaires de l’œuvre de Kropotkin La conquête du pain; et Juana Belén était en constante
communication avec Ricardo Flores Magón, promoteur de l'anarchisme et du soulèvement armé au
nord du pays.
Selon la chercheuse Alicia Villaneta, Vésper était unique parmi les journaux anti-régime :
Les journaux d'opposition au régime Diaz étaient à l'époque exclusivement écrits par des
hommes ; les femmes ont participé à certaines publications, mais c'étaient des journaux
"pour femmes" dans lesquels étaient abordés des thèmes tendant à reproduire et à justifier
le modèle de l'ange du foyer, conseils, recettes, modes, étaient les sujets d'intérêt des
journalistes mexicains de l'époque.19

En ce sens, Vésper est le résultat de la lutte pour la liberté d'expression féminine menée par des
premiers publications écrits par des femmes qui visaient mettre en question leur rôle traditionnellement
assigné, comme La Mujer (1880-1883), El Correo de las Señoras (1883-1893), El Álbum de la Mujer
(1884-1888) et Violetas de Anáhuac (1888)20. Ces journaux ne s'occupaient pas du régime, mais ont
constitué un important précédent puisqu'ils ont consolidé les bases de la participation féminine à la
politique par voie du travail journalistique.
Dès sa fondation, le journal Vesper avait comme principal sujet la critique du gouvernement de
Díaz et de sa personne, lui qualifiant de "trompeur", "lâche", "monstrueux"... le langage était dur et
direct et visait clairement à persuader l'audience par tout moyen. En se dirigeant directement à Porfirio
Díaz, les articles de Vesper lui exigeaient souvent, directement, de démissionner. Vesper dénonçait
également la persécution et l'emprisonnement de journalistes, comme les frères Flores Magón,
créateurs de Regeneración. Dans ses pages on trouve aussi des exhortations au peuple mexicain à
s’insurger contre le régime qui limitait ses libertés et l'exploitait.
En 1901 la presse de Vesper a été confisquée par les autorités de la Ville de Guanajuato, et avant
d'être emprisonnée encore, Juana Belén s'est enfuie vers Mexico, où elle a recommencé la publication
18 Malheureusement, aujourd'hui, aucune archive des bibliothèques mexicaines conserve des exemplaires de ce journal.
19 "Los periódicos de oposición al régimen de Díaz, eran entonces escritos exclusivamente por varones; las mujeres
participaban en algunas publicaciones, pero fueron periódicos "para mujeres" en los que se tocaban temas tendientes a
reproducir y justificar el modelo de ángel del hogar, consejos, recetas, modas, eran las cuestiones que preocupaban a las
periodistas mexicanas de aquellos tiempos." (Alicia Villaneda, Justicia y libertad: Juana Belén Gutiérrez de Mendoza,
1875-1942, Mexico : DEMAC, 1994, p. 22, notre traduction).
20 Voir Martha Eva Rocha Islas, "Presencia de las Mujeres en la Revolución Mexicana: Soldaderas y Revolucionarias ",
Memoria del Congreso Internacional sobre la Revolución Mexicana. San Luis Potosí : Gobierno del Estado de San Luis
Potosí / INEHRM, 1991. 182-197. Web
<https://www.bibliotecas.tv/zapata/bibliografia/indices/memoria_del_congreso_internacional_3.html>, consulté le 25
mars 2019. Ainsi que Morelos Torres Aguilar et Ruth Yolanda Atilano Villegas, "La educación de la mujer mexicana en
la prensa femenina durante el Porfiriato", Revista Historia de la Educación Latinoamericana, vol. 17, no. 24, janvier-
juin 2015, pp. 217-242.
de son journal. Pendant cette époque, elle a participé aux congrès libéraux, telle que la commémoration
de l'anniversaire de la mort de Melchor Ocampo (un homme politique central pour le libéralisme
mexicain), en juin 1902. Cet événement réunissait les libéraux radicaux, les dissidents religieux et les
anti-catholiques. Dans le discours qu'elle a prononcé à ce moment, on trouve l'appel à l'action, à une
fierté de l'identité mexicaine et l'exaltation de la liberté qui caractériseront ses textes :
Coreligionnaires: au nom de la liberté, au nom du groupe que je représente, rendez-vous
dignes du héros que vous admirez. Seuls les vrais Mexicains ont des droits sur les gloires
mexicaines, reconquérez le droit, appliquez vos garanties, détrônez les Césars, puis, en tant
que vrais citoyens, rendez hommage au Christ de la Réforme, brûlez un parfum de
reconnaissance devant le sublime martyr de Caltengo.21

En 1903 Juana Belén s'est intégrée, en tant que vocale, au Club Liberal Ponciano Arriaga,
organisation dirigeante de tous les clubs libéraux de Mexique, installée à Mexico. Le même année, tous
les membres du groupe ont été emprisonnés par le régime de Díaz. Dans ses écrits autobiographiques,
elle a témoigné de la subtile redirection que ses passages par prison ont provoqué sur sa pensée :
la prison avec ses réalités brutes m'a averti de la distance que j'étais de la vérité. Parce qu'il
est vrai qu'il ne croyait plus que la chute ou la mort ou la suppression sous quelque forme
que ce soit du président de la République était suffisante, pour que tout soit résolu [...]
Il y avait des êtres arrachés de leur condition d'êtres humains transformés en je ne sais pas
quelles monstruosités d'abjection et de douleur. Impossible qu'il cesse d'être juste
d'appliquer exactement la loi, si précisément l'application de cet odieux instrument était ce
qui transformait l'humanité en monstre.22

Une fois libérée, elle est partie au Texas, États-Unis où elle rejoint certains journalistes libéraux
exilés, qui l'ont encouragée à recommencer l'édition de Vesper. Díaz avait interdit la publication de tout
journal dont un des membres du Club Liberal Ponciano Arriaga participait, alors la solution était de les
imprimer à l'étranger et les envoyer par la poste (un milieu de communication assez sûr, car le respect à
la confidentialité des contenus était garanti par la loi).

21 "Correligionarios: en nombre de la libertad, en nombre de la agrupación que represento, haceos dignos del héroe a
quien admiráis. Sólo verdaderos mexicanos tienen derechos a las glorias mexicanas, reconquistado el derecho, haced
efectivas vuestras garantías, destronad a los césares y entonces, venid como verdaderos ciudadanos a rendir homenaje al
cristo de la Reforma, a quemar incienso de gratitud ante el sublime mártir de Caltengo" (Alicia Villaneta, op. cit., pp.
29-30, notre traduction).
22 "la cárcel con sus crudas realidades me advirtió la distancia a que estaba de la verdad. Porque es cierto que ya no creía
que bastaba la caída o la muerte o la supresión en cualquier forma del Presidente de la República, para que se resolviera
todo [...] Allí había seres arrancados a su condición de seres humanos transformados en no sé qué monstruosidades de
abyección y dolor. Imposible que aquello dejara de ser con sólo aplicar exactamente la ley, si precisamente la aplicación
de ese odioso instrumento era lo que transformaba la humanidad en monstruo". (Mendieta Alatorre, Juana B. Gutiérrez
de Mendoza. Extraordinaria precursora de la Revolución Mexicana, ed. cit., p. 64. Notre traduction).
C'est à ce moment que des différences idéologiques ont commencé a créer des conflits au cœur
du groupe. Notamment, Camilo Arriaga proposait une solution démocratique (institutionnelle) aux
problèmes du pays, pendant que Ricardo Flores Magón préférait la voie anarchiste de l'insurrection.
Juana Belén s'est alliée à Camilo Arriaga, et ses bonnes relations avec les frères anarchistes ont pris fin.
À l'encontre des commentaires élogieux que les Flores Magón avait toujours écrits sur Juana Belén et
Vésper, à partir de ce moment il la traite d'antipatriotique et recourt à des attaques personnels pour la
discréditer.
Juana Belén est retournée au Mexique en 1905. Avant l'éclatement de la Révolution, elle a
continué son travail journalistique, en collaborant avec La Corregidora (publication fondée par Sara
Estela Ramírez) et El Partido Socialista. Elle a collaboré à la fondation de divers associations
politiques : le groupe Socialistas Mexicanos, créé avec Dolores Jiménez y Muro à Mexico, dans le but
de contribuer à l'organisation de la lutte des artisans et travailleurs de la capitale ; le Club Político
Femenil Amigas del Pueblo, fondé aussi à Mexico avec Dolores Jiménez y Munro ; le Club Hijas de
Cuauhtémoc, formé en captivité avec Dolores Jiménez y Muro et Elisa Acuña Rosetti, journalistes et
activistes emprisonnées au même temps que Juana Belén ; et le groupe Hijas de Anáhuac, formé par
environ 300 femmes ouvrières. Les membres de ces ensembles ont été parmi les premières à exiger le
vote des femmes auprès du candidat présidentiel Francisco I. Madero.
Juana Belén a eu une participation active dans la campagne de Madero. Il a demandé son aide
en tant que représentante des travailleurs et elle a accepté de collaborer à la propagande du Parti Anti-
Réélection. Quand la Révolution a éclaté, elle a lutté à côté de Madero, telle comme la plupart des
libéraux, de 1910 à 1911; elle a participé au Complot de Tacubaya, mené surtout par des intellectuels
de la capitale, qui visait à inciter une rébellion au caserne militaire de San Diego, Tacubaya, à côté de
Mexico. Le complot a échoué car il a été trahi. Mais c'est en participant à ce complot que Juana Belén a
rencontré José Vasconcelos, qui serait le premier secrétaire d'éducation publique pendant le
gouvernement d'Álvaro Obregón (1921-1924).
Madero a reussi à faire partir Díaz du pays. En ce moment, Vesper a pu renaître et Juana Belén
a publié un texte soulignant les engagements du journal, en donnant à entendre que son esprit critique
ne disparaîtrait pas après la défaite de Díaz :
Vesper, hautain toujours, se rebellera éternellement contre tous les tyrans et contre toutes
les tyrannies.
Vésper a ses propres critères et, tout comme le critère officiel ne lui sera jamais imposé, le
critère absurde des groupes auquel nous faisons allusion ne sera jamais imposé.
Vesper n'a pas emprunté ses énergies à la dureté de la parole. Vésper n'a pas ses armes de
combat dans les arsenaux de blessure. Vesper ne se tient pas devant les magnats pour
s'incliner devant les idiots. Vésper ne fouette pas les tyrans pour flatter les foules. Vésper
n'a pas un acre de censure pour les fonctionnaires obstinés et un éloge servile pour les
foules passionnées. Vésper ne quitte pas la presse qui vend pour rejoindre la presse qui est
louée. Vesper ne sacrifie jamais l'énergie de sa persévérance pour la complaisance envers
les gens23.

Pendant le débout du gouvernement de Madero, Juana Belén s'est déplacé au centre du pays, où
elle a attesté que la situation des paysans n'avait suffisamment amélioré, et elle a constaté que la lutte
armée était encore nécessaire pour assurer que la répartition de terres serait une priorité pour la
nouvelle gestion. Ainsi, elle s'est alliée avec le chef de guerre Emiliano Zapata, qui continuait à se
battre malgré la victoire de Madero, en considérant insuffisant la solution à long terme au problème de
la distribution de terres. Si certains libéraux ont tourné le dos aux guerrillas, Juana Belén a fait parti de
ceux qui leur ont donné une base idéologique et qui ont collaboré à la rédaction de leurs principaux
manifestes, comme le Plan de Ayala.
Le régime de Madero a été renversé par un groupe d'opposants dirigé par Bernardo Reyes et
Victoriano Huerta. À ce moment, Juana Belén commandait le régiment Victoria de l'armée zapatiste;
raison pour laquelle elle a été nommée colonelle. Alors le nouveau gouvernement l'a capturée et
emprisonnée pour la troisième fois ; libérée après dix mois, elle a continué la lutte à côté des zapatistas,
cette fois en exerçant sa profession de journaliste. Elle a recommencé la publication de Vesper et fondé
La Reforma, journal consacré à la cause indigène et à la demande de redistribution des terres (les
principales revendications de la lutte zapatista).
Les dernières années de la Révolution, après la défaite de Victoriano Huerta en 1914, ont été
marquées par la lutte progressivement inégale entre l'armée officielle du nouveau président Venustiano
Carranza et les armées de guerrilla de Zapata et Villa. Encore en raison de sa collaboration au
zapatisme, Juana Belén a été emprisonnée, cette fois-là pendant un an. Parmi les moments importants
marquant la fin de la Révolution Mexicaine, on peut signaler trois événements clés: la promulgation de

23 "Vésper, altivo siempre, se rebelará eternamente contra todos los tiranos y contra todas las tiranías. / Vésper tiene su
criterio propio, y así como nunca se le impondrá el acomodaticio criterio oficial, nunca tampoco se le impondrá el
absurdo criterio de los grupos a que aludimos. / Vésper no tiene sus energías prestadas de la dureza de la palabra.
Vésper no tiene sus armas de combate en los arsenales de la injuria. Vésper no se yergue ante los magnates para
doblegarse ante los idiotas. Vésper no fustiga a los tiranos para adular a las multitudes. Vésper no tiene una acre censura
para los funcionarios obcecados y un elogio servil para las chusmas apasionadas. Vésper no se aparta de la prensa que
se vende para afiliarse a la prensa que se alquila. Vésper no sacrifica nunca la energía de su perseverancia parra la
complacencia a las personas." (Vesper, 8 mai 1910)
la Constitution de 1917, la mort en 1919 d'Emiliano Zapata, et la mort en 1923 de Pancho Villa. La
participation de Juana Belén au mouvement zapatista a alors pris fin.
Pendant l'époque qui a suivi la Révolution, Juana Belén a continué son travail journalistique et
sa participation politique sans cesser d'adapter sa position politique et son esprit critique aux nouvelles
circonstances du pays. En 1919 elle a fondé un nouveau journal, El Desmonte, publication qui naît de la
désillusion sur les résultats achevés par la lutte révolutionnaire. Dans un article de ce journal, Juana
Belén écrit "À mon avis, la situation en général n'est ni meilleure ni pire que lorsque ce mouvement a
débuté à la fin du siècle dernier, en 1900, alors que je participais pour la première fois à des
manifestations populaires"24.
Cette même année, à Morelos, une colonie agricole experimentale (Colonia Agrícola
Experimental Santiago Orozco) ; ces projets étaient des terres de propriété communale, où les
travailleurs habitait et cultivait ses propres aliments et des produits à vendre. Quelques vétérans du
régiment Victoria ont habité a ce colonie, mais le projet n'a pas duré longtemps par manque du soutien
gouvernemental.
Plusieurs de ses collègues ex-combattants ayant obtenu des postes au gouvernement, Juana
Belén a été nommée enseignante dans le système national d'éducation, et elle a collaboré alors à la
campagne d'alphabétisation créée par Vasconcelos (illustre pédagogue mexicain), et pendant les années
30 elle a dirigé l'Escuela Industrial para Señoritas, à Morelia.
Elle a poursuivi son travail éditorial, en créant la revue Alma Mexicana (en collaboration avec
Julia Ibáñez de Sámano) et en continuant à publier Vesper (en 1932).

4. La plume de Juana Belén


Outre son prolifique travail journalistique, Juana Belén a écrit d'éphémérides personnelles (entre 1902
et 1909), quelques notes autobiographiques (écrites en 1913 et recueillis par Ángeles Mendieta dans
Juana B. Gutiérrez de Mendoza. Extraordinaria precursora de la Revolución Mexicana) et trois œuvres publiés
comme volumes indépendants : le long essai Por la tierra y por la raza (1924) et deux manifestes intitulés
¡Alto! (1922) et Los tres problemas nacionales (1933).
Nous proposons une brève analyse de l'essai Por la tierra y por la raza, le plus longue texte
publié par Juana Belén, où elle développe en détail quelques idées qui ont caractérisé sa pensée après la

24 "En mi concepto, la situación en general no es ni mejor ni peor que cuando se inició este movimiento a finales del siglo
pasado, en 1900, cuando por vez primera tomé parte en las protestas populares" (Juana Belén Gutiérrez de Mendoza,
"Desmontado", El Desmonte: Por la Tierra y por la Raza, 1, no. 1 juin 15, 1919, p. 1. Apud. Devereaux, Occupying our
Space, p. 150).
fin de la Révolution. Por la tierra y por la raza est aussi une œuvre qui nous permet d’apprécier son
style d'écriture, ainsi que quelques stratégies de persuasion fréquents dans ses textes.
Cet essai en six parties développe l'idée que dans le territoire de Mexique il y a une race qui a
survécu la colonisation espagnole et les efforts civilisatrices de la part du gouvernement mexicain
depuis l'Indépendance, et que ce groupe conserve encore une culture propre en attendant l'opportunité
d'occuper à nouveau une place central dans le pays.
La premier partie du texte narre l'origine mythique des Caxcanes : selon l'auteure, ils sont les
descendants des dieux Quetzalcóatl et Xochiquétzal, et ils se sont separés en trois groupes après qu'un
autre dieu, Tezcatlipoca, a provoqué la partie de Quetzalcóatl en convainquant les humains de
construire une tour énorme pour adorer un dieu unique, sans nom. Le groupe qui a suivi Tezcatlipoca et
a décidé d'adorer le dieu unique a disparu, un autre groupe est parti chercher Quetzalcóatl à côté du lac
où il a disparu (ce sont les nahuas qui ont fondé la célèbre Tenochtitlán, aujourd'hui Mexico), et le
troisième groupe sont les Caxcanes, ceux qui ont décidé d'habiter dans les montagnes en attendant le
retour de Quetzalcóatl.
Ce mythe d'origine établit l'identité des Caxcanes comme une des premières races et
civilisations du monde, qui existe encore et attend le retour de son dieu (en d'autre mots, le retour de
son hégémonie) et qui, à l'encontre des pratiques d'exploitation des colonisateurs européens, s'organise
sur des principes de coopération et partage du travail et des produits :
Alors Quetzalcoatl nous a tous appelés à la grotte et nous a dit que le Tahtli qui dormait
dans le lac en train de faire cette grotte avait réussi à ne pas dévorer les bêtes, mais il ne
savait pas comment faire une autre grotte pour que nos frères ne se dévoraient pas entre
eux ; que la meilleure chose à faire était de rassembler dans la grotte tout ce dont nous
avions besoin pour donner à chacun ce dont il avait besoin, et pour que la provision ne
prenne pas fin, à chaque soleil, nous prenions tous ce que nous avions fait ou les fruits que
nous avions récoltés. Celui qui ne prenait rien, ne recevait rien de ce qu'il y avait dans la
grotte.25

C'est évident que l'auteure imprime sur ce groupe mythique les caractéristiques de ce qu'elle
considère une société idéale. La construction de l'identité de ce groupe comme exemplaire lui permet,
alors, de l'opposer à la brutalité des colonisateurs. La deuxième partie de l'essai est basée en grande

25 "Entonces Quetzalcóatl nos llamó a todos a la cueva y nos dijo que el Tahtli que dormía en el lago haciendo aquella
cueva había logrado que las fieras no nos devoraran, pero que él no sabía hacer otra cueva para que nuestros hermanos
no se devoraran entre sí como las fieras; que lo mejor era que reuniéramos en la cueva todo lo que tuviéramos para darle
a cada uno lo que necesitara, y para que la provisión no se acabara, cada sol lleváramos todos lo que hubiéramos hecho
o los frutos que hubiéramos reunido. El que no llevara nada, no recibiría tampoco nada de lo que hubiera en la
cueva"(Juana Belén Gutiérrez de Mendoza, Por la tierra y por la raza, Mexico : Biblioteca Nacional, 1924, pp. 12-13.
Notre traduction).
proportion sur les textes de Fr. Frejes, prêtre espagnol, auteur de Historia breve de la Conquista de los
Estados Independientes del Imperio Mexicano (1838). Juana Belén cite extensivement ce texte pour
évoquer certaines batailles pendant la période de colonisation qu'elle considère caractéristiques de la
résilience des groupes indigènes ; le texte de Fr. Frejes lui permet, aussi, de montrer que même du point
de vue des espagnoles il était évident que les groupes indigènes souffraient des traitement
excessivement cruels. Elle s'intéresse particulièrement aux fragments du livre de Fr. Frejes qui
décrivent une société égalitaire chez les Caxcanes :
ILS GOUVERNAIENT LEURS SUJETS DAVANTAGE EN TANT QUE PARENTS D'UNE FAMILLE
QU'EN TANT QUE SOUVERAINS : LA SIMPLE POLITIQUE DE LEUR GOUVERNEMENT
CONSPIRAIT AU BONHEUR DES SUJETS D'UN TEL TERRITOIRE FÉODAL. La sobriété des
souverains et des chefs correspond à celle des sujets, DONT ON IGNORE LE FAIT QU'ILS ONT
SACRIFIÉ DES VICTIMES HUMAINES À LEURS DIEUX. ILS ONT VOLONTIERS CONTRIBUÉ À LA
SUBSISTANCE ET AU DÉCORUM DE LEURS SUPÉRIEURS ET, ENTRE EUX, ONT ÉTÉ DONNÉS EN
TANT QUE MEMBRES DE LA MÊME FAMILLE26

Donc les deux premières parties de l'essai visent à corriger une injustice historique. L'auteure
oppose Histoire à Tradition (en mettant en majuscule ces termes, geste très significatif), où l'Histoire
correspond au récit intentionnellement manipulé, créé par les colonisateurs, et Tradition correspond aux
narrations orales transmis par les Caxcanes. Selon Juana Belén, la fausseté de cette Histoire a eu pour
le peuple mexicain de conséquences plus graves que la conquête même, car elle a effacé l'identité des
peuples originaires. Mais, elle ajoute, la rectification de ces erreurs aura des conséquences également
importants.
La troisième partie du texte s'occupe du moment présent, du débout du XXe siècle. L'auteure
prend la parole des Caxcanes et crée un discours qu'ils pourraient prononcer par rapport à la situation
du pays en cette époque. Ce fragment nous permet de localiser certaines oppositions conceptuels
centrales à la pensée de Juana Belén : 1. Les Caxcanes sont décrits comme un peuple très proche de la
Nature (en majuscule), et le texte dénonce l'erreur de vouloir faire de l'être humain un produit artificiel,
comme si il ne faisait pas partie de l'ensemble du monde naturel. Elle argumente que les humains et
leurs cultures sont très liés au territoire où ils sont nés, de telle forme que les déplacements forcés
provoques la perte de leur identité.

26 "GOBERNABAN A SUS SÚBDITOS MÁS BIEN COMO PADRES DE UNA FAMILIA QUE COMO SOBERANOS: LA POLÍTICA
SENCILLA DE SU GOBIERNO CONSPIRABA A LA FELICIDAD DE QUE DISFRUTABAN LOS SÚBDITOS DE UN TERRITORIO TAN
FERAZ. La sobriedad de los soberanos y jefes correspondía a la de los súbditos, DE QUIENES NO HAY NOTICIAS DE QUE
SACRIFICASEN VÍCTIMAS HUMANAS A SUS DIOSES. GUSTOSAMENTE CONTRIBUIAN AL SUSTENTO Y DECORO DE SUS
SUPERIORES, Y ENTRE SÍ MISMOS SE OBSEQUIABAN COMO MIEMBROS DE UNA MISMA FAMILIA." (Juana Belén Gutiérrez
de Mendoza, op. cit., p. 32. Notre traduction. Les petites capitales sont à l'original).
2. Elle oppose une pensée universaliste à la particularité des cultures humaines. L'auteure décrit
l'universalisme comme une caractéristique fondamentale de la pensée colonialiste :
Au nom de la civilisation, disent-ils, nous devons nous battre jusqu'à l'extinction de ce
sentiment sauvage qui lève la frontière et ferme la voie aux intérêts et aux hommes des
autres pays. Et ils proposent le même modèle pour toute l'humanité, ainsi que pour ceux qui
vident des pièces dans un même moule [...] comme si la création entière n'avait d'autre
objet que de produire des automates, sur lesquels le mouvement peut être imprimé
arbitrairement et tout destin peut être imposé.27

3. Elle souligne la différence entre nationalisme et patriotisme. Selon Juana Belén, le


nationalisme naît naturellement, par une loi d'affinité, de forme que les races humaines acquièrent des
identités particulières selon l'espace géographique où elles se trouvent, selon les habitudes qu'elles
développent, selon ses symboles et rites. Mais le patriotisme, par contre, est une production artificielle
qui cherche à grouper les humains selon un critère politique, et non géographique.
4. Elle distingue fraternité internationale d'imposition d'une culture sur une autre. L'auteure
s'intéresse à souligner que sa défense du nationalisme n'implique pas un rejet de la fraternité
internationale, "ce qui serait la plus haute expression du perfectionnement humain" 28. Parce-que la
vraie fraternité ne comporte pas l'imposition de normes, l’expropriation de ressources et l'effacement
de la volonté des autres.
5. Elle conteste l'autorité de la science. Juana Belén est consciente que la science telle comme
elle se présente à son époque est d'origine européen, donc marquée par des intérêts des groupes qui
visent à justifier la colonisation. Elle souligne l'arbitrarité d'établir un standard de civilisation et
d'attribuer aux peuples le caractère de "race inférieure", en montrant l'aspect profondément politique
des discours scientifiques qui se prétendaient objectifs et neutres.
Les dernières parties de l'essai s’occupent de dénoncer les abus aux peuples indigènes après
l’Indépendance et jusqu'au temps de la Révolution. Juana Belén considère que l'état mexicain, en tant
qu’héritier de la pensée colonialiste, a continué à nier la culture et l'histoire des groupes indigènes,
d'abord en les agressant directement (elle fait référence aux massacres des yaquis au nord du Mexique
pendant le XIXe siècle), puis en essayant de les intégrer à la civilisation (c'est-à-dire, à effacer leurs
cultures propres).

27 En nombre de la civilización, dicen, hay que combatir hasta extinguirlo ese sentimiento salvaje que alza la frontera y
cierra el paso a los intereses y a los hombres de otros países. Y proponen un mismo patrón para la Humanidad entera,
así como quien vacía piezas en un solo molde [...] como si la Creación entera no tuviera más objeto que producir
autómatas, a los que arbitrariamente se les puede imprimir el movimiento y dar el destino que se quiera " (Ibid., p. 65.
Notre traduction).
28 Ibid., p. 71.
Por la tierra y por la raza conclut, alors, que la race des Caxcanes ne disparaîtra pas, elle attend
le moment quand elle pourra à nouveau régner sur les terres mexicaines ; les caxcanes gardent leur
propre version de l'histoire car ils ont réussi à préserver leurs traditions malgré tous les efforts pour
l'éliminer. Parmi les textes de Juana Belén, ce long essai nous permet d'apprécier les bases de sa pensée
et de la critique qu'elle fait aux politiques de l'état mexicain post-révolutionnaire, ainsi que son
diagnostique sur les origines profonds des principaux problèmes du pays, toujours liés à l'identité
tortueuse d'un peuple colonisé.

Conclusions
L’œuvre et la vie de Juana Belén Gutiérrez de Mendoza méritent d'être étudiés à profondeur. La plupart
de ses textes sont malheureusement très difficiles à consulter (nous attendons une très nécessaire
réedition de ses articles et essais), mais les efforts son payants, car Juana Belén est un des cas
exceptionnels où une femme qui a participé directement à la Révolution a eu, aussi, la capacité de
s'exprimer à l'écrit avec un style bien développé et sur de bases intellectuelles solides.
Cet article ne constitue qu'un essaie d'introduire la figure de Juana Belén, en soulignant la
complexité de son parcours politique et intellectuel. Grâce a son histoire, nous confirmons que les
diverses factions politiques avaient des contradictions internes, subissant des rapprochements et des
éloignements entre elles et avec le gouvernement. Juana Belén s'est revendiquée d'abord comme
libérale (ce qui renvoie à la Réforme laïque du XIXème siècle), puis comme anarchiste, enfin comme
socialiste (après sa rupture avec Flores Magón) ; c'est-à-dire, sa conception de la liberté, de la justice et
des moyens pour les traduire dans la réalité sociale n'ont pas cessé de changer. Ses mouvements
stratégiques montrent qu'un environnement politique aussi bouleversé que le Mexique du début du XXe
siècle ne permettait pas des factions nettement séparées et stables, mais poussait tous les acteurs
politiques à trouver continuellement des nouvelles voies d'action et de nouveaux alliés.
Un siècle après, la Révolution Mexicaine est toujours très présente dans les discours politiques,
l'imaginaire social et même la réalité des Mexicains. Il suffit de rappeler le mouvement zapatiste
qu'existe encore (dont le rapport avec le zapatisme du débout du XXe siècle est évident, mais
complexe) et qui est, depuis 1994 jusqu'à aujourd'hui, en guerre contre l'État mexicain. Un autre
exemple est la devise du partie de gauche qui vient d'arriver au pouvoir en 2018, Mouvement de
Régénération Nationale (Morena) : "la cuarta transformación" ("la quatrième transformation"), phrase
qui évoque trois moments historiques considérés comme constructeurs du Mexique contemporain :
l'Indépendance, la Réforme et la Révolution. Ainsi, la quatrième transformation serait l'héritière de ces
trois mouvements politiques. Si Juana Belén considérait que la narration de l'histoire du peuple
mexicain avant et pendant la colonisation était fondamentale pour l'identité contemporaine, nous
estimons qu'également la narration de la Révolution mexicaine est déterminante aujourd'hui, et des
recherches critiques et bien fondés sont indispensables face aux divers usages de ce moment de notre
histoire. Tout forme d’interprétation de l'histoire étant politique, il nous faut une pluralité de recherches
pour éviter une version hégémonique.
En autre, même si les femmes mexicaines sont de plus en plus présentes dans la politique de
notre pays, le Mexique reste encore un pays sévèrement inégal, car le machisme semble former encore
partie d'une certaine conception de l'identité mexicaine. C'est pour ça que la recherche sur le rôle des
femmes à ce moment clé de l'histoire mexicaine nous semble essentielle.
La figure de Juana Belén Gutiérrez de Mendoza est très méconnue au Mexique, sauf pour des
spécialistes du sujet du rôle des femmes dans la Révolution ; mais l'intérêt pour ce personnage et son
travail écrit semble croître graduellement. Nous espérons contribuer à la diffusion de son œuvre parmi
un public de plus en plus divers (géographiquement et disciplinairement) et, à travers la suggestion de
quelques lignes possibles d'analyse et la compilation d'une bibliographie essentielle, inciter des
recherches ultérieurs.
Bibliographie

Adame, Ángel Gilberto. De armas tomar. Feministas y luchadoras sociales de la Revolución Mexicana.
Mexico : Aguilar, 2017.
Arzola, Jesús. Una historia vivida: según el testimonio de Úrsula Tapia. Ciudad Victoria : Instituto Tamaulipeco
de Cultura, 1991.
Barrientos, Herlinda, María Dolores Cárdenas, Guillermo González Cedillo, Con Zapata y Villa. Tres relatos
testimoniales. Mexico : INEHRM, Secretaría de Gobernación, 1991.
Basurto, Jorge. Vivencias femeninas de la Revolución, Mexico : INEHRM, Secretaría de Gobernación, 1993.
Bollinger Pouwels, Joel, Political Journalism by Mexican Women During the Age of Revolution, 1876-1940.
New York : Edwin Mellen Press, 2006.
Brenner, Anita. The Wind that Swept Mexico. The History of the Mexican Revolution of 1910-1942 [1943]. 184
photographs assembled by George R. Leighton. Austin: University of Texas Press, 1984.
Campo, Xorge de (ed.). Cuentistas de la Revolución Mexicana. Mexico : Comisión Nacional para las
Celebraciones dele 175 Aniversario de la Independencia Nacional y 75 Aniversario de la Revolución
Mexicana, 1985-1986.
Creelman, James. "Entrevista Díaz-Creelman", Mario Julio del Campo (trad.), Mexico : UNAM-IIH, 2008. Web
<http://www.historicas.unam.mx/publicaciones/publicadigital/libros/diaz/EDC004.pdf>, consulté le 05
mars 2019.
Devereaux Ramírez, Cristina. Occupying our space. The Mestiza Rhetorics of Mexican Women Journalists and
Activists, 1875-1942. Arizona : The University of Arizona Press, 2015.
Gilly, Adolfo. La revolución interrumpida. Mexico : Era, 2007.
Gutiérrez de Mendoza, Juana Belén, Por la tierra y por la raza. Mexico : Biblioteca Nacional, 1924.
_____. ¡Alto! [1922] Mexico : s/e, 1950.
_____. Los tres problemas nacionales. Mexico : Indé, 1933.
Hernández Carballido, Elvira Laura, Las otras soldaderas. Mujeres periodistas de la Revolución Mexicana.
1910-1917. Madrid : Editorial Académica Española, 2016.
Mendieta Alatorre, María de los Ángeles. La mujer en la Revolución Mexicana, Mexico : INEHRM, 1961.
_____. Juana B. Gutiérrez de Mendoza. Extraordinaria precursora de la Revolución Mexicana. Mexico :
Talleres de Impresores de Morelos, 1983.
Monsiváis, Carlos. "Soñadora, coqueta y ardiente. Notas sobre sexismo en la literatura mexicana". Misógino
feminista. Martha Lamas (selection et prologue). Mexico : Océano/Debate feminista, 2013, pp. 21-44.
Morelos Torres Aguilar et Ruth Yolanda Atilano Villegas, "La educación de la mujer mexicana en la prensa
femenina durante el Porfiriato", Revista Historia de la Educación Latinoamericana, vol. 17, no. 24,
janvier-juin 2015, pp. 217-242.
Ranero Castro, Mayabel, Mirna A. Benítez Juárez et Olivia Domínguez Pérez. Mujeres en la Revolución
Mexicana. Veracruz : Instituto de Investigaciones Histórico-Sociales, Universidad Veracruzana, 2011.
Revueltas, José, "Benita Galeana ha escrito su vida", El Popular, 9 mai 1940, p. 3.
Rocha Islas, Martha Eva. Los rostros de la rebeldía. Veteranas de la Revolución Mexicana, 1910-1939. Mexico :
Secretaría de Cultura, Instituto Nacional de Estudios Históricos de las Revoluciones de México, 2016.
_____. "Presencia de las Mujeres en la Revolución Mexicana: Soldaderas y Revolucionarias ", Memoria del
Congreso Internacional sobre la Revolución Mexicana. San Luis Potosí : Gobierno del Estado de San Luis
Potosí / Instituto Nacional de Estudios Históricos de la Revolución Mexicana de la Secretaría de
Gobernación, 1991. 182-197. Web
<https://www.bibliotecas.tv/zapata/bibliografia/indices/memoria_del_congreso_internacional_3.html>,
consulté le 25 mars 2019.
Sierra, Justo. Evolución política del pueblo mexicano. Mexico : Consejo Nacional para la Cultura y las Artes.
Cien de México, 1993.
Trujillo Bautista, Jorge (comp.). Testimonios de la Revolución Mexicana en Tamaulipas. Tamaulipas :
INEHRM, Secretaría de Gobernación, Gobierno del Estado de Tamaulipas, Instituto Tamaulipeco de
Cultura, 1992.
Vesper, Mexico, 8 mai 1910.
Villaneda, Alicia, Justicia y libertad: Juana Belén Gutiérrez de Mendoza, 1875-1942. Mexico : DEMAC, 1994.

Das könnte Ihnen auch gefallen