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Guide méthodologique
Résistance à l’incendie
des ponts routiers
Groupe de relecture :
• Sébastien DEFAUX (Cerema Normandie-Centre)
• Jean-François DOUROUX (RATP)
• Jean-Marc FRANSSEN (Université de Liège)
• Didier GERMAIN (Cerema Centre-Est)
• Bruno GODART (IFSTTAR)
• Laurent LABOURIE (Cerema Normandie-Centre)
• Bérénice MOREAU (CETU)
Le comportement à l’incendie des ponts est une préoccupation importante pour les maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre
et gestionnaires. Des accidents de la circulation surviennent, provoquant des incendies parfois sur, sous ou à proximité
des ouvrages. De même, des occupations humaines des abords de l’ouvrage, campements provisoires, etc. peuvent
être la cause d’incendies accidentels. Ces incendies n’ont pas en général de conséquences extrêmes mais on relève
à l’étranger quelques cas d’incendies ayant provoqué un effondrement d’ouvrage.
Actuellement, le comportement au feu des ponts n’est pas traité par la réglementation française qui ne concerne que
les bâtiments et les tunnels. Dans ces deux cas, le confinement apporté par la structure qui aggrave les conséquences
de l’incendie et la difficulté d’évacuer les personnes pendant l’incendie imposent aux structures une durée minimale de
résistance. La norme NF ISO 23932 [1] applicable à toutes les configurations d’ouvrage (par exemple, les bâtiments,
les infrastructures de transport et les installations industrielles) fournit les principes généraux relatifs à une méthodologie
« performantielle » utiles aux ingénieurs pour l’évaluation du niveau de sécurité incendie des ouvrages, neufs ou existants.
En ce qui concerne la sécurité des personnes, pour les ponts, la problématique est sensiblement différente dans la mesure
où la question de l’évacuation se pose avec un degré moindre. Contrairement au cas des incendies dans un tunnel,
les usagers voient l’incendie qui concerne un pont et peuvent modifier leur comportement en conséquence. De plus, il
est souvent relativement facile pour les personnes de se dégager des effets de l’incendie, en se déplaçant de quelques
mètres perpendiculairement à l’axe de l’ouvrage si elles se trouvent sous celui-ci ou en s’éloignant longitudinalement
pour les personnes qui se trouvent sur le tablier. Dans quelques rares cas cependant, par exemple pour les ouvrages
à câbles, les durées de résistance à l’incendie peuvent être très réduites et l’usager peut être surpris par la rapidité
du phénomène.
D’autre part, lorsque les enjeux socio-économiques sont forts, la préservation des ouvrages d’art vis-à-vis des risques,
y compris l’incendie, devient inévitable.
Il y a donc lieu de s’intéresser au comportement de ces ouvrages en cas d’incendie et de l’améliorer pour la sécurité
des usagers et la préservation de la voie de communication. Cette étude n’est indiquée que pour les structures à risque
élevé pour des raisons d’efficacité économique.
Par ailleurs, après un incendie ayant endommagé un pont, la question du maintien ou non de la circulation sur l’ouvrage
se pose et une réponse doit y être apportée, souvent dans l’urgence. Or, il n’existe pas, à ce jour, de documents pour
aider le gestionnaire dans cette situation.
Préambule 3
Sommaire
Préambule 3
Introduction 7
Généralités sur le « risque incendie » 7
Exigences du maître d’ouvrage 7
Retour d’expérience des incendies 7
Parallèle avec les incendies dans les tunnels 8
Origines des incendies affectant les ponts 8
1 - Trafic 8
2 - Feux liés à des présences humaines sous ou dans les ouvrages 8
3 - Cas particulier de la foudre 10
4 - Feux de broussailles 10
Sommaire 5
4 - Comportement global de la structure 45
4.1 - Les différents modes de ruine 45
4.2 - Modélisation des sections 46
4.3 - Sollicitation de la structure 49
4.4 - Modélisation globale 49
4.5 - Vérifications à mener 51
5 - Exemples d’applications 54
5.1 - Pont en béton 54
5.2 - Bipoutre mixte 55
5.3 - Pont à haubans 58
Annexes 137
Annexe 1 - Bibliographie 137
Annexe 2 - Photographies de plaques métalliques revêtues de différentes protections anticorrosion
chauffées au four 140
Si le trafic est une cause évidente des incendies, il ne faut pas négliger d’autres causes. Les feux peuvent avoir d’autres
origines, humaines, naturelles (la foudre par exemple sur des haubans). Le feu peut même se déclarer à l’intérieur
du tablier (cas des caissons) si son accès est laissé libre.
Lorsque la structure porteuse est au-dessus des voies, le risque est accru pour les usagers pris dans un embouteillage.
La vulnérabilité des structures dépend de leur conception. De manière générale, les ouvrages dont les éléments
métalliques résistants sont protégés (ponts en béton armé) résistent mieux que ceux dont les éléments métalliques
sont directement exposés aux effets de l’incendie (ponts à charpente métallique, ponts à haubans, ponts suspendus).
Cette généralité n’est plus vraie quand, sous la violence de l’incendie, le béton s’écaille et dégarnit les armatures.
La précontrainte résiste moins bien que les aciers de charpente et les aciers de béton armé, mais elle est en général
mieux protégée par l’enrobage de béton. Les structures hyperstatiques ont globalement un meilleur comportement
que les structures isostatiques, bien que l’incendie génère des efforts hyperstatiques dus aux dilatations difficiles à
appréhender. Les structures en bois peuvent être plus ou moins sensibles à l’incendie suivant leur conception.
A l'étranger, les exemples d'incendies ayant occasionné des désordres voire un effondrement d'ouvrage sont plus
nombreux, mais l’incendie reste une cause mineure dans la ruine des ouvrages. Il existe des cas spectaculaires
d’effondrement d’ouvrages, essentiellement générés par des camions citernes transportant des hydrocarbures. Par
exemple, un ouvrage en Californie s’est effondré en 2007 sur un autre ouvrage qu’il surplombait à la suite de l’incendie
d’un camion-citerne transportant plus de 30 tonnes de fuel. D’après les témoins, les flammes montaient à près de
60 mètres de haut.
Le paragraphe 1-3 du chapitre 4 détaille le retour d’expérience obtenu à partir de l’analyse d’une base de données
comprenant 154 ponts incendiés entre 1997 et 2015.
Introduction 7
Photo 1 : Déformation d’un tablier métallique soumis à un incendie sous ouvrage
Le lecteur pourra se reporter aux guides du CETU (Centre d’Études des Tunnels, [2] [3] [4]) pour plus de précisions.
Pour les ponts routiers, il n’est pas justifié d’imposer les mêmes niveaux de résistance. En effet, il n’y a pas de notion
de confinement et l’évacuation des usagers est sensiblement plus aisée. Le présent guide s’inspire des méthodes
d’analyse des risques conçues pour les tunnels routiers. Il les transpose pour les ponts et viaducs en conservant bien
sûr le souci de la sécurité des personnes.
Dans de nombreux cas, le feu est une conséquence d’un accident (choc sur une pile ou sur un tablier de pont,
renversement de véhicule), mais parfois il peut être dû à la surchauffe du moteur ou des freins, ou du chargement.
Ce type d’incendies est assez fréquent mais ils sont en général moins violents que ceux impliquant des poids lourds,
même s’ils peuvent être localement très défavorables. Il y a cependant peu de méthodes permettant d’évaluer
la probabilité de tels scénarios et les puissances d’incendie associées.
Photo 3 : Autre exemple de dégradation due à un incendie d’un campement provisoire sous ouvrage
Il convient également de citer le cas de feu à l’intérieur même de ponts caissons provoqué par des liquides enflammés
amenés par l’assainissement ou par des occupants non autorisés (cf. photo 4).
Introduction 9
Photo 4 : Gaine d’un câble de précontrainte extérieure entièrement fondue suite à un incendie lié à une occupation du caisson
Dans ce dernier cas, la gestion du risque consiste à réduire l’aléa, en interdisant l’accès au caisson par un système
anti-intrusion efficace.
Certains ouvrages peuvent se situer au-dessus d’installations permanentes, parkings, stations-service, maisons, etc.,
et dans ces cas, la probabilité d’occurrence d’un incendie doit également être examinée.
Il existe des méthodes permettant d’évaluer le risque «foudre» sur les installations. On peut se référer au document
«UTE C17-108» [5] d’avril 2006 édité par l’AFNOR qui permet d’évaluer le risque et le besoin de protection, en fonction
de différents facteurs. Ce document renvoie à d’autres documents traitant de ce sujet. Le niveau de risque dépend de
la région, de la forme et des dimensions de la structure, de l’environnement (autres éléments plus ou moins hauts),
du niveau de protection de la structure (quand elle existe), et de l’importance des conséquences. Du point de vue du
traitement du risque «foudre», trois types de conséquences sont envisagés (perte en vies humaines, d’exploitation,
ou d’héritage culturel). Des niveaux maximaux admissibles sont fournis pour ces trois types de conséquences.
Si le risque «foudre» s’avère supérieur aux seuils indiqués, le traitement du risque consiste à mettre en place une
protection (quatre niveaux) destinée à réduire la vulnérabilité de l’ouvrage. Étant donné l‘existence de ces documents,
le présent guide n’apportera pas d’élément complémentaire sur ce sujet. On recommande donc d’appliquer l’analyse
de risque indiquée dans le document de l’AFNOR cité précédemment, et de dimensionner une protection de type
parafoudre (appelée SPF : système de protection contre la foudre) si le risque est trop élevé.
4 - Feux de broussailles
Ces feux ne sont que peu énergétiques, notamment à cause de la faible végétation régnant ordinairement sous
les ouvrages.
Pour pallier ces différentes difficultés, le domaine de la construction utilise des courbes normalisées, qui représentent
la montée en température de l’incendie au cours du temps. Ces courbes sont internationalement codifiées et acceptées.
Elles sont cependant très restrictives car elles ramènent l’incendie à la donnée d’une température, dont on ne sait pas
très bien si elle se manifeste au niveau de la flamme ou des fumées chaudes, ni comment elle se répartit dans l’espace.
De plus, cette notion n’est pas suffisante pour vérifier le comportement des structures, car ce sont les températures des
matériaux de la structure elle-même qui sont importantes. Le transfert de chaleur se fait de l’incendie vers le matériau
par l’intermédiaire d’un flux de chaleur. Autrement dit, la température du solide au niveau de son interface avec
les gaz d’incendie n’est pas égale à la température de ces gaz.
Étant donné que les éléments de l’incendie sont en général sous forme de fluide ou de gaz (flamme) et ne sont pas
de la matière solide, le transfert de chaleur se fait par convection (transmission de chaleur d’un gaz chaud à un solide)
et par rayonnement (transmission de chaleur par rayonnement électromagnétique entre deux corps).
Les théories de la convection et du rayonnement permettent de relier le flux de chaleur transmis aux températures
des corps en présence c’est-à-dire, en pratique, la température issue de la courbe normalisée et la température de
la structure. Dès lors, la détermination des températures dans les matériaux solides constituant la structure n’est plus
qu’un problème de conduction avec des flux de chaleur aux limites de ce matériau.
Ce chapitre a pour vocation de décrire les différents phénomènes thermiques en jeu, depuis l’incendie lui-même jusqu’à
ceux qui se développent au sein de la structure. Cette analyse précède l’analyse mécanique car elle est le plus souvent
découplée de cette dernière. L’état mécanique du matériau (contraintes et déformations) dépend des températures
et flux thermiques, alors que l’inverse est moins vrai. En effet, le comportement de la structure sous incendie peut
impacter le transfert thermique, par exemple les grandes déformées qui changent les facteurs de forme. L’analyse
mécanique étudiée ultérieurement fait l’objet du chapitre 2.
Les trois parties suivantes traitent de la modélisation de l’incendie, du transfert de chaleur à la structure, et de la répartition
des températures dans la structure. Ces trois étapes bien séparées sont à mener les unes à la suite des autres.
2 - Modélisation de l’incendie
L’objectif de ce paragraphe est de décrire la manifestation de l’incendie, et notamment les grandeurs qui seront
utiles ultérieurement pour envisager les processus de transfert de chaleur à la structure. On cherche ainsi à déterminer
les températures des corps (solides ou gazeux) qui vont transmettre de la chaleur à la structure.
La manifestation la plus simple de l’incendie est représentée par les courbes normalisées température-temps, qui ne
nécessitent pas de connaître ou de modéliser l’incendie (cf. paragraphe 2.1).
Une fois l’évolution de la puissance connue au cours du temps, il faut encore déterminer les caractéristiques géométriques
de l’incendie ainsi que la répartition de la température grâce par exemple aux modèles de feu isolé fournis dans
l’Eurocode 1 partie 1-2 [6] (cf. paragraphe 2.2). On cite au paragraphe 2.3 d’autres modèles et formules simplifiées
permettant de modéliser l’incendie. Ces modèles sont issus de la littérature et principalement repris et résumés
dans les publications de l’INERIS. Enfin, le paragraphe 2.4 expose sans trop de détails les modèles sophistiqués
permettant de définir les températures en tout point du milieu environnant l’incendie. Ce sont des méthodes basées
sur les équations de la dynamique des fluides (modèles dits «CFD» Computational Fluid Dynamics), qui nécessitent
des outils très perfectionnés, sont très consommatrices de temps de calculs et requièrent une grande expérience de
la part de l’utilisateur. Il convient d’utiliser des moyens plus simples pour contrôler l’ordre de grandeur des résultats
obtenus. Elles sont donc à réserver à des cas extrêmement particuliers.
Cette température, , représente la température des gaz en °C. L’illustration graphique de cette courbe est donnée
sur la figure 1 (courbe «CN»).
L’Eurocode 1 partie 1-2 fournit une troisième courbe, dite courbe d’hydrocarbure (non majorée), notée HC. Cette courbe
est donnée par l’expression suivante (Eurocode 1-1-2 [6] paragraphe 3.2.3) :
Cette température, , représente la température des gaz en °C. L’illustration graphique de cette courbe est donnée
sur la figure 1 (courbe «HCM»).
La courbe HCM est semblable à la courbe HC, mais supérieure puisque le palier maximal de température est de 1300 °C.
On voit très clairement sur la figure 1 que la courbe HC monte en moins d’un quart d’heure à la température maximale de
1100 °C (1300 °C pour la courbe HCM) et reste constante par la suite. La courbe CN – ISO 834 monte plus lentement et
ne dépasse 1000 °C qu’au bout d’une heure vingt. Les courbes sont ici représentées jusqu’à 200 minutes d’incendie,
mais elles peuvent naturellement s’étendre au-delà de cette durée. La courbe CN – ISO 834 peut être utilisée pendant
4 h et monte alors jusqu’à 1150 °C.
Il est indiqué que le diamètre de l’incendie est limité à 10 m et la puissance de l’incendie à 50 MW.
Des indications sur les puissances d’incendie de véhicules routiers peuvent être trouvées à l’annexe C du guide du
CETU « Guide des dossiers de sécurité des tunnels routiers – Fascicule 4 : Les études spécifiques des dangers » [2]. On
reportera le lecteur vers ce document permettant d’avoir une bonne idée des puissances d’incendie développées par
tous types de véhicules, par exemple :
• incendie de véhicules de tourisme (Energie de 18000 MJ) développant une puissance de 8 MW pendant environ
50 minutes ;
• incendie d’un fourgon (Energie de 63000 MJ) développant une puissance de 15 MW pendant environ 80 minutes
(surface de 6 m²) ;
• incendie d’un PL de 35 tonnes (Energie de 125000 MJ) développant une puissance de 30 MW pendant environ
90 minutes ;
• incendie d’un PL de 35 tonnes avec charge fortement combustible (Energie de 330000 MJ) développant une puissance
de 100 MW pendant environ 70 minutes (surface de 50 m²) ;
• incendie d’une citerne de 20 tonnes de chargement liquide inflammable (Transport de Matières Dangereuses)
(Energie de 960000 MJ) développant une puissance de 200 MW pendant environ 100 minutes (surface de 80 m²).
Ces puissances sont utilisées pour le dimensionnement de la ventilation, mais n’ont qu’un caractère indicatif pour
le dimensionnement des structures.
L’application de la formule de la longueur de flamme, avec une puissance de 30 MW, une surface de 20 m² et un
diamètre D = 5 m donne une hauteur de flamme d’environ 10 m. Bien qu’elle ne soit pas applicable au-delà de 50 MW,
son application donne respectivement environ 15 m pour un feu de 100 MW et environ 20 m pour un feu de 200 MW
(citerne inflammable). Ceci donne le point le plus haut atteint par la flamme. Au-dessus, on trouve les fumées issues
de la combustion. La hauteur réelle de l’incendie est donc sensiblement supérieure à la longueur de flamme.
L’Eurocode 1 partie 1-2 (annexe informative C) donne ensuite la formule qui permet de calculer, si la flamme ne
touche pas le plafond (L f<H, cf. figure 2), la distribution des températures le long de l’axe de la flamme en fonction
de la hauteur z au-dessus du foyer, :
avec :
Avec ces formules, les températures sont inférieures à 500 °C dès que l’on dépasse en hauteur environ 10 m pour
le feu de 30 MW, 15 m pour le feu de 100 MW et 21 m pour le feu de 200 MW (bien que dans ces deux derniers cas
les formules ne soient en toute rigueur pas applicables) cf. figure 3.
Si l’on prend en compte le fait que, lors de l’incendie d’un véhicule, la hauteur de la source se situe entre 3 et 4 m
au-dessus de la chaussée alors on peut raisonnablement penser que, en l’absence de transport de matières dangereuses,
les températures baissent significativement au-delà d’une quinzaine de mètres de haut. Dans le cas d’incendies de
matières fortement inflammables (citernes d’essence par exemple), cette hauteur dépasse 25 m de haut.
Ces indications (15 m pour un feu hors matières dangereuses et 25 m pour un feu de matières dangereuses) ne
représentent qu’un ordre de grandeur de la zone d’influence de l’incendie dans le sens vertical, utile pour évaluer
qualitativement l’impact de l’incendie sur un ouvrage, mais insuffisant pour garantir sa sécurité dans toutes les conditions
d’incendie.
De tels modèles prennent en compte à la fois les équations de la dynamique des fluides, les effets thermodynamiques,
et les effets de convection et de rayonnement. Lorsque tous ces effets sont bien pris en compte, ils permettent d’obtenir
une carte des flux reçus à la surface des éléments, ce qui permet de procéder ensuite au calcul des températures à
l’intérieur des solides.
Malheureusement, de tels modèles sont longs à mettre au point et nécessitent des temps de calcul extrêmement
longs, compte tenu du caractère fortement non linéaire des équations de la dynamique des fluides. De plus, ils ne
couvrent qu’un seul cas et, pour avoir une panoplie suffisamment variée de situations d’incendie possibles, il faut
refaire le même calcul de nombreuses fois ce qui multiplie les temps de calcul.
On renvoie le lecteur au guide du CETU sur le comportement au feu des tunnels routiers [4] pour plus de détail sur ces
méthodes et sur les précautions à prendre. Dans le cas de l’analyse à l’incendie des ponts routiers, on ne conservera
ces méthodes que dans des situations très particulières avec des enjeux importants, mais on préfèrera les méthodes
simplifiées pour les cas courants.
3.1.1 - Principe
La convection est un mode de transport d’énergie par l’action combinée de la conduction et du mouvement du milieu.
La convection est le mécanisme le plus important de transfert d’énergie entre une surface solide et un liquide ou un gaz.
Le transfert d’énergie par convection d’un gaz dont la température est supérieure à celle de la surface solide s’effectue
en plusieurs étapes. D’abord la chaleur s’écoule par conduction des molécules du fluide adjacentes à la surface vers
la surface. L’énergie ainsi transmise augmente la température de la surface et fait baisser la température du fluide.
Ensuite les molécules vont se mélanger avec d’autres molécules situées dans une région à haute température et
provoquer un écoulement. Dans ce cas l’écoulement transporte le fluide et l’énergie et le restitue à la surface solide
réceptrice.
En pratique, le flux de chaleur transmis du gaz vers la surface solide est proportionnel à la différence de température
entre ces deux éléments. Le coefficient d’échange gaz-surface solide traduit l’efficacité de ce transfert, à différence
de température donnée.
3.1.2 - Détermination
Le flux de convection (quantité d’énergie transmise à une surface unitaire pendant un temps unitaire) s’écrit :
(en W.m-2)
Avec :
a c : coefficient de transfert thermique par convection (en W.m -2.K-1)
T gaz : température des gaz à proximité de l’élément exposé au feu (en K)
Tstructure : température de surface de l’élément (en K)
L’Eurocode 1-1-2 [6] indique de prendre pour la courbe CN – ISO 834, pour la courbe
d’hydrocarbure (que l’on étend à la courbe HCM), et pour le côté non exposé au feu.
3.2.1 - Principe
Tous les corps solides, liquides ou gazeux émettent un rayonnement de nature électromagnétique. Cette émission
d’énergie représente un flux de chaleur émis par le corps considéré. Ce rayonnement est composé de radiations de
longueurs d’ondes différentes (0,3 μm à 100 μm) donnant des spectres continus dans le cas des solides et des spectres
de bandes pour certains gaz. L’intensité dépend de la température du corps. Le vide et la plupart des gaz simples
(O2, N2, H2) constituent des milieux parfaitement transparents à la propagation de ce rayonnement. Certains gaz composés
Les corps opaques émettent un rayonnement caractérisé par un flux thermique proportionnel à la puissance 4 de
la température absolue (exprimée en Kelvin) de ce corps.
Ainsi :
Lorsque ce flux est reçu par un corps absorbant, il n’est que partiellement absorbé par ce corps. On définit de la même
manière un coefficient d’absorption qui se trouve être le même que l’émissivité . Par conséquent, le rayonnement
reçu par le corps absorbant de la part du corps émetteur est donc :
Cependant, le corps absorbeur émet lui aussi du rayonnement, et le bilan de flux thermique reçu est la différence entre
le flux de rayonnement reçu, et le flux de rayonnement émis. De plus, le processus se complique lorsque l’on prend
en compte la fraction non absorbée du flux qui est réfléchie au corps émetteur. Lui-même en absorbe une partie et
en réfléchit l’autre de sorte que le bilan est nettement plus difficile à évaluer.
On remplace souvent cette formule par car l’émissivité de l’un des corps (le feu) est
prise égale à 1.
Cette formule ne fait absolument pas intervenir de conditions géométriques. Elle n’est applicable que si les deux corps
émettent directement l’un sur l’autre. En réalité, il faut raisonner différemment et séparer la source de l’incendie en
surfaces élémentaires de centre M1 et d’aire dA1. La surface cible a une aire dA2 et est située au niveau du point M2.
Si on note l’angle entre la normale sortante à dA1 et la ligne M1M2 et l’angle entre la normale sortante à dA2 et
la ligne M 1M 2, alors la quantité d’énergie reçue (par unité de temps) par rayonnement de dA1 vers dA2 est :
qui peut, si la température et l’émissivité de l’émetteur sont uniformes, se mettre sous la forme :
Le facteur de forme F est compris entre 0 et 1. Lorsque le feu est proche de la paroi qui reçoit le rayonnement, il
vaut quasiment 1, mais dès que l’on s’éloigne du feu il diminue. Pour les tunnels routiers, l’exiguïté de l’espace dans
le tunnel et l’importance de l’incendie conduit systématiquement à des facteurs de forme égaux à 1. Par contre, pour
un incendie en plein air, dès que l’on s’éloigne de l’incendie, le flux de rayonnement devient plus faible.
F est le facteur de forme, qui dépend de la géométrie relative de la source de rayonnement (les gaz) et de
la cible (la paroi). Si on fait l’hypothèse que les gaz sont opaques et lèchent la paroi, on prend F=1.
Pour des matériaux courants, l’Eurocode 1 [6] préconise de prendre une émissivité de 0,8. L’Eurocode 3 [8] ramène cette
valeur à 0,7 pour l’acier au carbone, et jusqu’à 0,4 pour l’acier inoxydable. On verra plus loin que c’est le phénomène
de rayonnement thermique qui est prépondérant, de sorte que le choix du type d’acier a une importance considérable.
Pour le béton, l’Eurocode 2 partie 1.2 a aussi ramené la valeur à 0,7.
Facteur de forme pour d=1m, F est proche de 1 Facteur de forme pour d=2m, F=0,8/0,9
Facteur de forme pour d=5m, F < 0,5 Facteur de forme pour d=10m, F < 0,3
Cependant, on peut considérer que le rayonnement électromagnétique n’est pas simplement émis par la flamme
mais aussi par les fumées et gaz chauds qui se dégagent de l’incendie, et qui remplissent l’espace disponible. Pour
le rayonnement provenant des fumées, le facteur d’ombre n’a plus aucun sens. On évitera donc d’utiliser ce coefficient
bien que l’Eurocode le permette. Par contre, l’éloignement de l’incendie de la structure métallique pourra être pris en
compte par le facteur de forme tel que défini précédemment, mais sur la base d’une définition précise de la géométrie
et des scénarii d’incendie.
Figure 7 : Courbe CN – ISO 834, comparaison flux de rayonnement et flux de convection (en W.m-2)
Figure 9 : Courbe HCM, comparaison flux de rayonnement et flux de convection (en W.m-2)
On constate sur ces graphes que le flux de rayonnement est quasiment toujours plus élevé que le flux de convection. Son
pic est 3 à 4 fois plus élevé que le pic du flux de convection aussi bien pour la courbe CN – ISO 834 que pour la courbe
HCM. Ceci montre bien que la réflexion à mener autour du facteur de forme, traduisant l’efficacité du rayonnement
est nettement plus intéressante que celle concernant la convection des gaz.
Lorsqu’un matériau reçoit de la chaleur, sa température s’élève plus ou moins en fonction de sa chaleur spécifique.
Plus celle-ci est élevée, moins la température s’élève rapidement et inversement. La chaleur spécifique est notée Cp
(sous-entendu à pression constante), et s’exprime en Joules par kilogramme et par degré Kelvin. Elle signifie qu’il faut
apporter une quantité de chaleur Cp (en Joules) pour élever la température d’un kilogramme de matériau d’un degré
(Kelvin ou Celsius). Plus celle-ci est élevée, plus il faut de quantité de chaleur pour augmenter la température d’un corps.
Le second phénomène qui intervient est la conduction thermique. Celle-ci caractérise la manière dont le flux de
chaleur se transmet progressivement à l’ensemble du matériau, y compris pour les zones situées à l’intérieur. Le flux
de chaleur transmis entre deux zones distinctes est directement proportionnel à la différence de température entre
ces zones. Le facteur de proportionnalité est le coefficient de conductivité thermique noté l.
Ces deux phénomènes se relient via l’équilibre thermique d’un volume élémentaire de matériau. La quantité de chaleur
reçue par le volume élémentaire est utilisée pour élever sa température. Le flux de chaleur net reçu par le volume
élémentaire est lié au flux de conduction entrant depuis les parties de structure plus chaudes que le volume considéré,
et au flux sortant vers les parties plus froides. Cet équilibre s’écrie mathématiquement par l’équation de la chaleur
dont la forme générale est donnée ci-dessous :
On voit dans cette équation apparaître la chaleur spécifique C p et l’évolution de la température du volume élémentaire
( ), et de l’autre côté le terme de conductivité thermique représenté par le coefficient l et la différence de température
représentée par le gradient de température : ,
Au niveau des parois du matériau en contact avec l’incendie, il y a égalité entre le flux thermique issu de l’incendie
(convection et rayonnement) et le flux de conduction :
La traduction de cette équation de la chaleur et des conditions aux limites associées est très différente suivant
les matériaux : le béton est peu conducteur, donc il s’établit un profil de températures très différentes au sein de
la matière. En pratique, le béton présent au cœur de la structure est assez éloigné des parois et ne voit quasiment pas
l’incendie. Les épaisseurs de béton étant en général assez importantes, supérieures à 25 cm dans la majorité des cas,
le problème thermique se ramène assez souvent à l’examen des 5-10 premiers centimètres.
Inversement, l’acier est très bon conducteur, donc la température s’équilibre assez rapidement au sein de la matière.
Ceci est d’autant plus vrai que les épaisseurs des structures métalliques sont en général assez faibles. Néanmoins, on
verra par la suite que le phénomène de conduction au sein de l’acier peut tout de même entraîner des différences de
température au sein d’une même structure composée d’éléments d’épaisseur différente.
où Cp(T) est la chaleur spécifique du béton (J.kg-1.K-1), ρ la masse volumique du béton (kg.m-3) et λ la conductivité
thermique du béton (W.m-1.K-1). Ces grandeurs sont données dans l’Eurocode 2 partie 1-2. Elles varient toutes les 3 en
fonction de la température atteinte, ce qui fait qu’en pratique cette équation ne peut être résolue que numériquement.
La situation se simplifie pour les éléments de dalle, puisque du fait de la symétrie, le calcul revient à un calcul à
une dimension ( cf. paragraphe 4.2.2). De plus, les éléments de dalle en béton, dans les ponts, ont très souvent des
épaisseurs supérieures à 20 cm, et ne sont dans ce cas chauffés que d’un seul côté. Dans ce cas, seuls les 10 premiers
centimètres sont significativement chauffés. La condition aux limites du côté de la paroi non chauffée ne modifie pas
le résultat du calcul, y compris sa position. Par conséquent, pour les éléments de béton rectangulaire (type dalle)
chauffés sur une paroi seulement, la distribution est la même quelle que soit l’épaisseur de l’élément. Ceci est très
intéressant, car le calcul thermique peut être réalisé une seule fois et couvrir tous les cas de figure. Le calcul est
présenté dans le paragraphe 4.2.3 ainsi que la démonstration permettant de montrer l’insensibilité du résultat à
l’épaisseur de l’élément.
Dans le cas général, on ne tient pas compte de la propagation spécifique de la chaleur due à la présence des aciers
à l’intérieur du béton.
En plus de cette évolution, la courbe représentant la chaleur spécifique du béton en fonction de la température
présente un pic vers 100-115 °C puis décroît linéairement jusqu’à 200 °C pour rattraper la courbe initiale. Ceci est lié
au changement d’état de l’eau emprisonnée dans le béton, qui consomme beaucoup d’énergie pour passer de l’état
liquide à l’état vapeur (chaleur latente de vaporisation). Au niveau du matériau global, ceci est modélisé simplement
par une augmentation ponctuelle et très forte de la chaleur spécifique du béton. Le pic monte à 1470 J/kg/K si la teneur
en eau (notée u ) représente 1,5 % du poids du béton, et 2020 J/kg/K si elle représente 3 % du poids du béton. Cet
effet est cependant relativement limité puisqu’il ne se produit qu’à 100 °C. Dans les cas standards, on le néglige
d’autant plus que la teneur en eau réelle reste une inconnue.
La masse volumique du béton évolue aussi avec la température (effet de l’évaporation de l’eau), mais l’évolution n’est
pas importante et peut être négligée (cf. l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] [11] pour les lois d’évolution).
Ces cas sont très intéressants car le problème thermique se ramène à un problème à un seul degré de liberté, du fait
de la symétrie. De plus, compte tenu de la faible conductivité du béton, seuls les 10 premiers centimètres sont en
pratique chauffés, si bien que tout ce qui est au-delà de 20 cm de la paroi chauffée (si on chauffe la paroi d’un seul
côté uniquement) n’a pas d’influence sur la température. Comme en pratique, les éléments de dalle en ouvrages d’art
font rarement moins de 20 cm d’épaisseur, il suffit de calculer une fois pour toute la répartition des températures pour
les différentes courbes d’incendie envisagées pour pouvoir traiter un grand nombre de situations de pont en béton.
Ces courbes considèrent la profondeur par rapport au parement exposé au feu. Dans le cas d’un diagnostic d’un ouvrage,
pour tenir compte de l’écaillage, la profondeur est calculée par rapport au parement écaillé, de manière sécuritaire.
Les courbes de la figure 11 représentent les profils des températures dans une dalle en béton à différents instants
(toutes les 10 minutes jusqu’à une heure) pour la courbe CN – ISO 834. En parallèle, on donne les variations continues
de température en différents points à l’intérieur du béton, en fonction de leur éloignement (à partir de 3 cm et
tous les cm jusqu’à 7 cm car cela représente les différents points d’implantation possible des armatures passives à
l’intérieur du béton).
Pour établir ces courbes, on a pris une émissivité du béton de 0,7, une masse volumique de 2500 kg/m3 mais décroissant
avec la température, les lois de conductivité thermique et de chaleur spécifique telles que décrites précédemment
sans prendre en compte le pic de chaleur à 100 °C, et le coefficient de convection indiqué précédemment en fonction
du type de courbes.
Outre ces aspects concernant le talon des poutres, on trouve en général une âme de faible épaisseur qui va être chauffée
des deux côtés. Même si elle peut être qualifiée de dalle au sens où le problème n’a qu’un degré de liberté, elle est
chauffée des deux côtés donc la répartition des températures est différente. On peut considérer que si l’âme a une
épaisseur de plus de 20 cm alors tout se passe comme si elle était chauffée de manière indépendante de chaque côté et
on peut prendre les profils donnés au paragraphe 4.2.2. Par contre si elle est plus fine, les deux profils de température
se chevauchent et cela donne des températures plus élevées. Les courbes de la figure 12 illustrent ce point. Au bout
d’une heure avec la courbe CN – ISO 834, le profil est rigoureusement le même jusqu’à 7 cm de profondeur. Au-delà,
les températures sont plus élevées lorsque l’incendie agit des deux côtés, mais sont suffisamment faibles (moins de
200 °C) pour que cela ne modifie pas le comportement.
Figure 12 : Incendie d’un seul côté, ou des deux côtés d’une paroi de 20 cm entre 10 min et 60 min (courbe CN – ISO 834).
Profondeurs en abscisse (mm) et températures en ordonnée (°C)
Pour le hourdis supérieur des poutres, on rentre cette fois dans l’hypothèse du paragraphe 4.2.2 précédent et on peut
donc appliquer les résultats qui s’y rapportent.
Si les coins sont suffisamment éloignés les uns des autres, la combinaison des différents résultats précédents permet
d’obtenir le profil des températures dans la poutre. Il est prudent dans le calcul mécanique de ne pas tenir compte
des aciers de coin, car outre les températures importantes qui se concentrent dans un coin de béton, on peut obtenir
des éclatements de béton du fait de gradients de température très forts dans des zones avec des angles vifs.
Figure 13 : Différents types de calcul thermique sur une poutre en béton avec talon
Lorsque les épaisseurs de structure sont faibles, ce qui est fréquemment le cas pour des structures métalliques, et
lorsque ces éléments sont chauffés des deux côtés, on a une répartition quasiment constante des températures dans
l’épaisseur, de sorte que la résolution de l’équation de la chaleur n’apporte aucun intérêt dès lors que l’on n’étudie pas
la propagation longitudinale. L’évolution des températures est alors simplement régie par le flux de chaleur entrant
aux extrémités et la chaleur spécifique, comme illustré par l’équation suivante :
ce qui donne :
Cette représentation fait apparaître trois facteurs, l’un géométrique A/V appelé facteur de massivité de l’élément,
l’autre ne dépendant que des caractéristiques du matériau (chaleur spécifique et masse volumique), et le dernier
étant le flux de chaleur. En pratique, c’est donc le facteur de massivité qui détermine les différentes températures
obtenues dans des éléments métalliques de taille différente.
Si l’on considère un élément métallique plan d’épaisseur e et de dimension b x h, alors le volume de l’élément est
e x b x h. Si l’on considère qu’il est chauffé des deux côtés, avec un flux de chaleur uniforme prenant en compte
la convection et le rayonnement, et dépendant de la courbe d’incendie choisie et de la température de l’élément
métallique, alors l’équation précédente se simplifie encore :
Avec :
T : la température, supposée uniforme du plat métallique (en K)
e : l’épaisseur de l’élément métallique plan (en m)
Cp : la chaleur spécifique de l’acier (en J.kg-1.K -1)
r : la masse volumique de l’acier (en kg.m-3)
: le flux de chaleur uniforme auquel est soumise chacune des 2 faces du plat métallique (en W.m-2)
La montée en température est représentée pour des épaisseurs variant de 10 mm à 160 mm tous les 10 mm. On voit
dans ce diagramme l’effet très important du facteur de massivité. La résistance de l’acier descend en dessous de 50 %
dès que l’on dépasse 600 °C. On voit sur le graphe que la température de 600 °C est dépassée au bout de 20 minutes
si l’épaisseur est de 30 mm, et 47 minutes si l’épaisseur est de 120 mm.
Dans le cas de la courbe HCM, les durées nécessaires pour atteindre la température de 600 °C sont très réduites, et
le changement d’épaisseur n’offre pas beaucoup d’intérêt puisque l’on atteint 600 °C en 5 à 14 minutes pour des
épaisseurs de 30 à 120 mm. La température de 800 °C, au-delà de laquelle l’acier perd quasiment toute sa résistance,
est atteinte en moins de 22 minutes pour une épaisseur de 120 mm. D’où l’intérêt de l’intervention rapide des pompiers
pour abaisser la température.
Figure 16 : Courbes de montée en température pour une tôle en fonction de son épaisseur, courbe HCM
Figure 17 : Courbes de montée en température pour une tôle en fonction de son épaisseur, courbe HC
Les parties « feu » des Eurocodes 3 et 4 proposent en pratique les deux approches. L’Eurocode 3 [8] raisonne plutôt en
fonction du facteur de massivité global, alors que l’Eurocode 4 [9] propose de raisonner élément par élément (mais
permet quand même de considérer la température de l’âme égale à celle de la semelle inférieure si l’âme fait moins
de 500 mm de haut, ce qui n’est jamais le cas dans les ponts bipoutres mixtes). Quoiqu’il en soit, les deux Eurocodes
laissent la possibilité d’utiliser des méthodes avancées consistant à calculer directement le champ des températures,
ce qui fait alors appel à un calcul 2D.
La méthode globale présente l’inconvénient de sous-estimer les températures dans les éléments plus fins que
la moyenne, et de les surestimer dans les éléments plus épais. La méthode élément par élément donne des températures
différentes dans deux éléments métalliques reliés entre eux, ce qui, compte tenu de la grande conductivité thermique
de l’acier, n’est guère réaliste.
En fait, la conductivité thermique de l’acier est très élevée à l’échelle des épaisseurs des structures en acier courantes,
mais ne peut être considérée comme infinie à l’échelle des éléments eux-mêmes. Pour les poutres en I des ponts,
les éléments sont en général de grandes dimensions (nettement plus élevées que les poutres de bâtiment), de sorte
qu’il peut s’établir des températures différentes dans des éléments d’épaisseur différente, même reliés entre eux
(avec un profil de température continu à la jonction).
On considèrera donc que l’on peut appliquer la méthode du facteur de massivité élément par élément, en négligeant
les rattrapages de température au niveau des jonctions. La petite étude menée dans le paragraphe suivant confirme
cette hypothèse.
La seconde conséquence de cette observation est que, lorsque les éléments sont très épais, la température n’est
pas rigoureusement uniforme. Les semelles des poutres en I de ponts de grande portée présentent en général des
épaisseurs assez importantes, donc cet effet peut être favorable. Même si l’effet est favorable, il reste faible mais
les calculs nécessaires associés peuvent être très fastidieux. On négligera donc cet effet dans les situations courantes
et on considèrera la température constante dans chaque élément d’épaisseur donnée, et régie, élément par élément,
par l’équation thermique décrite précédemment en faisant apparaître le facteur de massivité de l’élément.
Le chapitre suivant décrit des cas de prise en compte de la conductivité thermique dans l’acier, et donne plusieurs
types de résultats (jonction entre deux éléments d’épaisseur différente, température dans une section d’acier épaisse).
On représente une zone de jonction entre une âme d’épaisseur 26 mm et une semelle d’épaisseur 120 mm. Pour ne
pas avoir de calculs trop lourds, on se restreint à un carré de 20 cm x 20 cm décrit dans la figure 18 :
On impose un flux thermique correspondant à la courbe CN – ISO 834 sur les parois exposées à l’incendie (symbolisées
par un trait rouge sur le schéma de la figure 18). On utilise les mêmes hypothèses pour le calcul thermique que dans
les paragraphes précédents mais en réalisant un calcul 2D.
Figure 19 : Répartition des températures (en °C sur l’axe vertical) à la jonction de deux profilés métalliques de 120 mm d’épaisseur et 26 mm
Dès que l’on s’éloigne de 10 cm de la zone de jonction, tout se passe comme si les deux éléments n’étaient pas reliés
On constate d’une part que la température n’est pas uniforme dans la semelle d’épaisseur 120 mm. Cependant, il n’y
a que 40 °C d’écart entre la paroi et le cœur de l’élément. On reviendra sur ce point ci-dessous puisque cet effet peut
être simplement retrouvé avec un calcul 1D.
Par contre, on voit bien qu’il y a un réel écart de température entre la semelle et l’âme. Ceci était a priori en partie
prévisible, puisque le facteur de massivité n’est pas le même dans les deux éléments. Néanmoins, on aurait pu penser
que du fait de la forte conductivité thermique, la température allait s’équilibrer. Ce n’est manifestement pas le cas
dès que l’on s’éloigne d’une dizaine de centimètres de la zone de jonction. Or les éléments de structure métallique
(âmes et semelles) des ponts mixtes ont en général des longueurs nettement plus grandes compte tenu du domaine
d’emploi de ces structures.
Ceci simplifie grandement le calcul, puisque l’on peut déterminer la température de chaque élément de poutre
indépendamment les uns des autres. Les courbes tabulées au paragraphe précédent peuvent donc être reprises
telles quelles.
La non-uniformité des températures à l’intérieur d’un élément d’épaisseur donnée peut se retrouver à l’aide d’un calcul
1D. Les figures 20 donnent les résultats obtenus pour deux configurations d’épaisseur et pour la courbe CN – ISO 834. Il
y a très peu d’écart de température (50 °C au maximum) entre la paroi exposée à l’incendie et le centre, et la moyenne
est, à quelques degrés près, rigoureusement identique à la température que donnerait le calcul en considérant une
conductivité infinie. Il est donc totalement justifié de considérer une température uniforme dans l’acier.
Figures 20 : Profil des températures (en °C) dans une section d’acier toutes les 10 minutes (courbe CN – ISO 834)
pour une épaisseur de 60 mm (à gauche) et 120 mm (à droite)
Il faut cependant se préoccuper de la zone de jonction car on ne peut les dissocier dans le calcul thermique.
Les ponts routiers mixtes acier béton sont répartis en général en 3 grandes familles : ponts à poutrelles enrobées,
bipoutres mixtes et caissons mixtes. Pour ces différentes familles, on peut réaliser le calcul thermique matériau par
matériau pour la plupart des éléments (hourdis en béton, âme et semelle inférieure du bipoutre, âme et hourdis
inférieur du caisson mixte). Il reste à étudier deux cas de figure :
• la présence d’une semelle connectée au béton sur une de ses faces, et en contact avec l’incendie sur l’autre
(semelle supérieure de bipoutre ou semelle inférieure de poutrelle enrobée) ;
• la présence d’une âme à l’intérieur du béton (cas des poutrelles enrobées).
Pour évaluer ces phénomènes, il faut modéliser l’interface acier-béton. Il faut se donner deux conditions d’interface.
La première est l’égalité des températures entre le béton et l’acier immédiatement adjacent, et la seconde est
la continuité du flux thermique. La distribution des températures sera donc continue, mais le gradient de température
discontinu du fait de la grande différence de conductivité thermique entre les deux matériaux.
Ce flux « sortant » de chaleur est difficile à quantifier car il faut faire un calcul thermique prenant en compte le béton. On
peut soit négliger cet effet et considérer que la chaleur ne sort pas (cela est sécuritaire et peut suffire dans la majorité
des cas), ou bien réaliser un calcul thermique.
Comme dans les cas précédents, si l’on suppose la dalle béton suffisamment épaisse, le calcul thermique ne va dépendre
que de l’épaisseur de la semelle et de la température de l’incendie. Cela reste un calcul 1D dès que la semelle est
suffisamment large, ce qui est le cas pour les bipoutres et même les poutrelles enrobées.
Les figures 21 donnent plusieurs courbes provenant d’un calcul thermique réalisé avec plusieurs épaisseurs de métal
(respectivement 60 mm et 120 mm), et pour la courbe CN – ISO 834. Ces courbes peuvent être utilisées dans n’importe
quelle configuration du moment que la semelle dépasse 30 cm de large.
Figures 21 : Profil des températures (sous courbe CN – ISO 834) dans une section mixte – métal (60 mm à gauche ou 120 mm à droite) et béton
Pour illustrer ce résultat, on réalise un calcul thermique sur une portion d’un pont à poutrelles enrobées, constituées
de poutrelles HEB 600. On ne modélise qu’une portion de largeur 250 mm de la poutrelle. L’âme a une épaisseur de
16 mm et est enrobée de béton.
La figure 22 montre que la semelle inférieure est chauffée relativement uniformément sauf près de l’âme. Celle-ci
est quasiment à la température du béton qui l’environne (plus frais que l’acier de la semelle) qui n’est pas en contact
avec l’incendie. On voit même que l’âme «refroidit» la semelle à la jonction âme-semelle mais sur une petite distance.
On tire de ce modèle que la température de la semelle inférieure des poutrelles enrobées de béton peut être considérée
à partir du modèle 1D présenté précédemment ( cf. paragraphe 4.4.1). La température du béton est évaluée par ce
même modèle, et la température de l’âme est égale à celle du béton qui l’environne. Les courbes précédentes peuvent
donc exactement être reprises dans le modèle de calcul.
Pour les haubans et les câbles de précontrainte extérieure au contact du feu, on prendra donc les mêmes caractéristiques
thermiques que pour l’acier de charpente.
Il y a une grande diversité de câbles et de haubans dans la construction. Leur point commun est en général une forme à
peu près circulaire, et leur composition à base de torons, eux-mêmes constitués de fils (ou directement un ensemble de
fils). Quoi qu’il en soit, les éléments métalliques sont adjacents les uns des autres, et malgré le toronnage, on peut
considérer que le câble est une section circulaire métallique homogène protégée par une gaine, et éventuellement
par du coulis de ciment.
Compte tenu de la violence des incendies que l’on considère, on va supposer que cette gaine ne joue pas de
rôle protecteur (sauf si elle est conçue pour) et que l’acier est directement en contact avec l’incendie.
Compte tenu de la symétrie de révolution liée à la forme circulaire du câble, le problème thermique, à deux degrés
de liberté, se ramène très vite à un problème à un seul degré de liberté. Néanmoins, les résultats précédents liés à
la très grande conductivité thermique de l’acier peuvent être repris ici, et on considèrera la température uniforme à
l’intérieur du câble. Le facteur de massivité est égal à 2/R où R est le rayon (périmètre 2pR divisé par la section pR²).
Les résultats thermiques pour la charpente peuvent être reconduits en remplaçant l'épaisseur par le rayon.
Ce modèle suppose que les câbles reçoivent un flux thermique maximal sur tout leur pourtour. Ceci suppose qu'ils
sont à l'intérieur de l'incendie, ou au moins que des fumées chaudes de l'incendie exercent à la fois une convection
et un rayonnement sur le câble. Lorsque le câble est en dehors de l'incendie, il ne reçoit que le flux de rayonnement,
et pas sur la totalité de son pourtour (les 2/3 environ pour tenir compte de l'encombrement du feu). Ceci augmente
la durée de montée en température de 50 % environ ( cf. figures 23).
Pour les ponts à haubans, on renvoie au chapitre 2. Il faudra tenir compte de la distance des câbles par rapport au foyer.
Pour pallier cette difficulté, il est également possible de développer des outils informatiques permettant de réaliser
ces calculs thermiques, dans le cas à 1 dimension comme dans le cas à 2 dimensions.
Un module spécifique du logiciel ST1 est en cours de développement au Cerema à la date de publication du guide.
En s’inspirant de la méthode proposée dans le DTU P92-701 [12], on peut adopter la démarche suivante.
On réalise un maillage de l’élément dont on veut obtenir la température, par exemple en approchant la géométrie
globale par des petits carrés de dx x dx où dx est une dimension suffisamment faible (1 mm en général). On sépare
alors les carrés en contact avec l’extérieur (interface), des carrés situés au milieu de l’élément.
Pour les carrés situés au milieu de l’élément et adjacents à d’autres éléments de structure, on utilise l’équation de
la chaleur :
On suppose que localement les variations du coefficient de conductivité thermique ne sont pas trop fortes si bien que
En discrétisant cette expression en temps et en espace, et en notant i le numéro de l’élément dans le sens des x et
j dans le sens des y, il vient :
Partant de la connaissance des températures à l’instant t, il est très aisé d’obtenir les températures à l’instant t+Dt.
Pour les éléments d'interface, cette expression ne peut pas être utilisée. Par contre, on peut écrire que le flux thermique
entrant est égal au flux de conduction.
Pour une interface verticale (x = constante), cette expression se discrétise de la façon suivante :
L’inconnue apparaît alors à plusieurs endroits (flux, conductivité, et terme en gradient de la température). On peut
cependant faire l’approximation que le flux et la conductivité à l’instant t+Dt sont proches de ceux à l'instant t ce qui
(facteur 100 environ) ce qui conduit pour du béton à environ 10 millisecondes, et pour de l’acier à 0,1 millisecondes
(à cause de la conductivité thermique nettement plus élevée) pour le béton.
Pour une durée d’incendie allant de 1 heure à 2 heures, cela représente un nombre important d’itérations.
Nota : I l est également possible de tenir compte de la variation de la conductivité thermique dans l’espace. Dans
ce cas, pour un calcul en 1D, on obtient l’expression suivante :
Pour les matériaux béton et acier (armatures passives, précontrainte et aciers de charpente), la loi de comportement
contrainte-déformation est profondément modifiée, à la fois pour la limite élastique ou la résistance à la rupture, de
même que pour le module de déformation. Les matériaux chauffés résistent moins bien et sont plus souples.
Cela modifie également les limites de déformations, mais dans le sens d’une augmentation. Bien que les matériaux
soient plus souples et moins résistants, ils sont plus ductiles.
Enfin, toutes les caractéristiques qui interviennent dans un modèle mécanique sont modifiées : masse volumique,
coefficient de dilatation thermique, etc.
Cette modification du comportement des matériaux au niveau local a bien entendu des conséquences au niveau semi-
global (comportement des sections de poutres ou de dalles), et au niveau global (comportement d’ensemble du pont).
Selon l’étendue de l’incendie, les efforts peuvent être redistribués suivant une répartition non étudiée lors du
dimensionnement de l’ouvrage. De plus, les températures importantes créent des déformations thermiques (dilatations,
courbures) susceptibles de créer des efforts très importants dans les structures hyperstatiques pouvant aller au-delà
de la capacité résistante de la structure. On se place à l’état limite accidentel ce qui autorise à prendre en compte
le comportement élasto-plastique des matériaux, et les redistributions d’efforts par formation de rotules plastiques.
La structure ainsi plastifiée est capable de se déformer sous réserve que les matériaux aient des capacités de
ductilité suffisantes.
L’objet de ce chapitre est de présenter l’évolution des caractéristiques mécaniques des matériaux avec la température,
d’en déduire les comportements des sections au niveau semi-global (lois moment-courbure ou effort normal-déformation
longitudinale pour des éléments de poutres ou de dalles) et d’étudier les conséquences au niveau de l’ouvrage.
Ce chapitre présente également une méthode pour mener l’analyse et des exemples sur diverses structures types.
L’Eurocode 2 prescrit deux types de lois de comportement pour le béton, l’une obtenue pour des granulats siliceux, et
l’autre pour des granulats calcaires. Elles sont données via le tableau 3.1 et la figure 3.1 de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] [11].
En cas d’incertitude sur la nature des granulats (calcaire-siliceux), on utilisera la loi des granulats siliceux qui est plus
défavorable.
Figure 25 : Lois de comportement en fonction de la température pour le béton à granulats siliceux (fck = 35 MPa)
La figure 25 fait apparaître que la résistance du béton décroît en fonction de la température. En parallèle, la déformation
correspondant à la résistance maximale augmente également au-delà des 3,5 pour mille classiquement utilisés pour
le béton à froid.
Le module élastique diminue rapidement. La simple diminution de la résistance avec la température n’a donc pas
beaucoup de signification en pratique, puisque la résistance maximale n’est atteinte qu’à des taux de déformation très
élevés. Des analyses simplifiées de calcul à l’ELU avec béton comprimé chauffé en considérant le béton à sa résistance
maximale sur une certaine hauteur n’ont donc pas beaucoup de sens physique. Il faut réaliser des calculs plus précis
prenant en compte la distribution des déformations au sein de la section, et les contraintes associées.
Le paragraphe 3.3.1 de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] donne également les dilatations thermiques du béton en fonction
de la température, on note que leur évolution n’est pas linéaire.
L’attention est attirée sur le fait que le refroidissement du béton est accompagné d’une perte de résistance. Après
retour à 20 °C, la résistance résiduelle est minorée de 10 % pour des températures maximales atteintes supérieures
à 300 °C (cf. Annexe C de l’Eurocode 4-1-2 [9]).
On trouve en pratique 4 types de lois, décrites dans les tableaux 3.2a et 3.2b de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] et illustrées
dans la figure 3.3 de l’Eurocode. On distingue les aciers de classe N ou de classe X, ainsi que les aciers formés à froid
ou laminés à chaud. L’annexe nationale précise que la classe N est à utiliser avec le choix du type d’acier (formé à
froid ou laminé à chaud), si celui-ci peut être justifié. En l’absence de justification, on utilise les caractéristiques des
aciers de classe N, formés à froid. La figure 27 illustre les lois de comportement en fonction de la température pour
ce type d’acier, que l’on recommande pour les calculs mécaniques.
Figure 27 : Lois de comportement en fonction de la température pour l’acier formé à froid de classe N
(contrainte en MPa en fonction de la déformation en pour mille)
Ces courbes font apparaître, comme pour le béton, une perte de résistance du matériau, un assouplissement caractérisé
par un module de déformation plus faible et une plus grande ductilité.
Le paragraphe 3.4 de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] donne également les dilatations thermiques de l’acier en fonction
de la température, on note que l’évolution n’est pas linéaire.
Figure 29 : Lois de comportement en fonction de la température pour un acier de précontrainte formé à froid de classe A
(contrainte en MPa en fonction de la déformation en pour mille)
Ces courbes font apparaître, comme pour les aciers passifs, une perte de résistance du matériau, un assouplissement
caractérisé par un module de déformation plus faible, et une plus grande ductilité.
Le paragraphe 3.4 de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] donne également les dilatations thermiques de l’acier de précontrainte
en fonction de la température (cf. figure 28).
La figure 30 fait apparaître, comme pour les aciers passifs et de précontrainte, une perte de résistance du matériau,
un assouplissement caractérisé par un module de déformation plus faible, et une plus grande ductilité.
Le paragraphe 3.4.1.1 de l’Eurocode 3 partie 1-2 [8] donne également les dilatations thermiques de l’acier en fonction
de la température. Ce sont les mêmes valeurs que pour les aciers passifs.
L’utilisation de logiciels de calcul de structures prenant en compte les effets volumiques, les fortes non-linéarités dues
aux effets thermiques et les plastifications est possible. Néanmoins, de tels calculs sont extrêmement complexes et
nécessitent des outils spécialisés et du temps.
Le but de ce paragraphe est de montrer que, sur des typologies de sections simples et courantes, on peut déduire des
caractéristiques équivalentes (module de déformation, inertie, section, gradient thermique, température uniforme)
utilisables dans un programme linéaire.
Avec des logiciels linéaires permettant un calcul itératif par programmation (comme le logiciel ST1 du Cerema), on peut
mener des analyses plus sophistiquées prenant mieux en compte le comportement thermomécanique des sections
et les plastifications successives.
Le postulat de base de tout ce qui va suivre est que les hypothèses de la Résistance des Matériaux (planéité des
sections notamment) restent valables sous sollicitations d’incendie, avec des variations importantes des rigidités au
sein d’une section et avec des gradients forts et non linéaires. Cette hypothèse est en pratique bien vérifiée sauf sur
des éléments d’épaisseur très faible (dalles en béton de moins de 20 cm d’épaisseur).
Lorsque la section fait craindre une non-planéité des sections, il faut employer des logiciels aux éléments finis et
modéliser les différents éléments de la section, et leur épaisseur, ce qui conduit à des modèles extrêmement volumineux
et peu aisés à interpréter.
Cette loi de comportement de la section, dite loi « moment-courbure » (M/g) prend en compte le comportement réel
des matériaux, ainsi que la fissuration du béton (contrainte nulle dès que le béton est tendu). Elle est donnée pour
une valeur d’effort normal constant.
Elle est obtenue en calculant, pour chaque valeur de courbure (g), la déformation longitudinale de la fibre moyenne
(e0) telle que l’effort normal soit égal à l’effort normal imposé par l’extérieur. On note que cet effort normal varie peu
pendant l’incendie, sauf en présence de précontrainte.
Conformément au document [4], on considère que la déformation totale de la section (e tot) reste linéaire quels que
soient la sollicitation et le profil de température. Quelle que soit l’ordonnée z de la section, on peut écrire :
En utilisant les lois de comportement des matériaux décrites au paragraphe 2 « Comportement des matériaux », on
trouve la valeur de la contrainte en tout point de la section.
Par intégration de ces contraintes sur la surface S, il est possible de calculer le torseur d’efforts (M ; N) pour chaque
valeur du couple (g ; e0).
Inversement, il est possible de calculer les déformations pour chaque valeur du couple (M ; N), ce processus est
relativement long compte tenu des itérations nécessaires pour aboutir au résultat du fait du comportement fortement
non linéaire des matériaux (élasto-plasticité, fissuration du béton, etc.).
L’effort tranchant résistant est également modifié par l’incendie. En première approximation, il est établi sur la base
des mêmes calculs qu’à froid mais en prenant les caractéristiques réduites des matériaux et la variation de la partie
du béton comprimée dans les sections.
On constate que seule la partie de la courbe vers les moments positifs (partie droite de la courbe) est affectée par
l’incendie. En effet, lorsque la dalle est sollicitée en moment positif, les aciers qui travaillent en traction sont situés
en partie inférieure et directement exposés à l’incendie. Plus la température augmente, moins la frontière entre
comportement élastique et comportement plastique est marquée (la zone de transition s’arrondit). Du côté des
moments négatifs, l’incendie n’a que très peu d’influence puisque les aciers supérieurs (qui travaillent en traction) ne
sont pas chauffés. Il y a cependant une légère diminution du moment plastique maximal (15 % au bout de 2 h). En
effet, le béton inférieur est fortement chauffé, donc ses caractéristiques mécaniques diminuent. Le centre de gravité
du béton comprimé remonte un peu, le bras de levier des aciers supérieurs diminue en conséquence, de même que
le moment résistant.
Par ailleurs, la pente de la tangente à la courbe à l’origine (point de moment nul) diminue avec le temps. Cette
tangente représente la rigidité élastique EI de la section. Comme la section est fissurée, la rigidité est principalement
liée aux aciers passifs. Compte tenu de l’affaiblissement du module de l’acier, cette rigidité diminue avec le temps.
Figure 31 : Loi « moment-courbure » pour une dalle en béton armé sous courbe CN – ISO 834 de 1 à 120 minutes par paliers de 15 minutes
3.2.2 - Loi de comportement d’une section de béton précontraint (dalle – poutre – caisson)
Lorsque la structure est précontrainte, le comportement est modifié puisque le béton est très majoritairement non fissuré.
De plus, les câbles sont plus enrobés et donc moins chauffés, mais leurs caractéristiques diminuent plus fortement avec
la température (cf. paragraphe 2.3). On reprend la même dalle que dans le cas précédent (cf. paragraphe 3.2.1), mais
on considère ici des aciers passifs minimums (HA 12 tous les 20 cm) et par contre 2 câbles 7T15S (tension initiale à
20 °C de 1160 MPa) enrobés de 8 cm en partie inférieure de la dalle.
La courbe de la figure 32 est un peu différente de la précédente compte tenu de la précontrainte de la section.
En effet, lorsque le moment est faible, toute la section est comprimée. Puis au-delà d’un certain moment, la section
se décomprime, fissure et la rigidité apparente diminue progressivement au fur et à mesure que l’épaisseur de béton
comprimé diminue. Enfin, les aciers de précontrainte plastifient.
On retrouve toutefois le gradient thermique équivalent et un comportement linéaire lorsque les moments sont faibles.
Figure 32 : Loi « moment-courbure » pour une dalle en béton précontraint sous courbe CN – ISO 834 de 1 à 120 minutes par paliers de 15 minutes
On retrouve le même type de loi, mais inversée par rapport au cas précédent puisque les câbles sont en partie haute,
et l’incendie s’effectue par au-dessus.
Du côté des moments positifs, on retrouve les 3 domaines : élastique comprimé, élastique fissuré et plastique.
Du côté des moments négatifs, les différents domaines sont nettement moins marqués du fait de la température
(cf. paragraphe 2 « Comportement des matériaux »).
Le gradient thermique est inversé par rapport aux cas précédents car l’incendie est au-dessus de l’ouvrage.
Figure 33 : Loi « moment-courbure » pour un caisson en béton précontraint chauffé au-dessus,
courbe CN – ISO 834 à 120 minutes (moment en MN.m en fonction de la courbure en mrad/m)
Lorsque la semelle inférieure est chauffée, les deux moments résistants extrêmes sont impactés. En effet, qu’elle soit
tendue ou comprimée, la semelle inférieure joue un rôle très important dans la résistance de la section. Ce n’était
pas le cas des aciers passifs d’une section de béton armé qui jouent, eux, peu de rôle lorsqu’ils sont comprimés car
le béton comprimé est prépondérant.
La figure 34 présente les lois « moment-courbure » pour la courbe CN – ISO 834 pour une durée de 45 minutes par
paliers de 5 minutes. On s’arrête désormais à 45 minutes du fait de la plus grande susceptibilité de l’acier de charpente
vis-à-vis de l’incendie par rapport aux aciers passifs ou de précontrainte.
On retrouve cependant le même type d’évolution avec la température que dans les cas précédents, à savoir
un assouplissement de la section, une diminution du moment plastique maximal, et la présence d’un gradient thermique.
En pratique, dans les zones où l’effort tranchant est important (près des appuis) les rotules plastiques sont de
dimensions réduites. En effet, la variation de moment par unité de longueur (égale à l’effort tranchant) évolue peu,
la plastification d’une section conduit à un simple décalage de la courbe des moments dont le maximum est égal au
moment plastique et dont la pente reste quasi constante ce qui entraîne un retour à un comportement élastique. On
parle ainsi de rotule plastique. Pour mémoire, l’Eurocode 2 partie 1-1 [13] fixe la dimension des rotules plastiques
à 0,6 fois la hauteur de la section dans le cas d’un encastrement. Pour le métal, le critère dépend de la géométrie
des sections. Il n’est pas possible de généraliser.
Les capacités de plastification de la structure peuvent être utilisées, comme en analyse sismique. La formation successive
de rotules plastiques diminue le degré d’hyperstaticité de la structure jusqu’à ce que celle-ci devienne isostatique. Une
fois la structure isostatique, toute augmentation de température ne se traduira que par des déformations, les efforts
n’évoluant plus. Les moments résistants des structures peuvent rester suffisants et il faut simplement dans ce cas se
contenter de vérifier les rotations des rotules plastiques (cf. paragraphe 4.5.2), ce qui peut s’avérer dimensionnant
compte tenu des dilatations en jeu.
Pour les structures qui n’ont pas de ductilité (ruine causée par la rupture fragile du béton ou par instabilité d’une paroi
métallique), il n’y a ni rotule plastique, ni redistribution d’effort et la ruine de l’ensemble apparaît lorsque les capacités
résistantes sont dépassées.
Toutes les considérations sur les rotules plastiques ne concernent pas les mécanismes de ruine liés à l’effort tranchant
pour lesquels il convient de mener les calculs élastiques avec les caractéristiques dégradées des matériaux.
La loi « moment–courbure » est alors linéarisée de la façon représentée sur la figure 35. Il est possible d’ajouter
un comportement plastique parfait en bornant les moments à la valeur du moment maximum admissible, même si
l’on atteint ce moment progressivement.
: courbure totale
: courbure thermique
Il est à noter que l’origine de la courbe ne correspond pas à une courbure totale nulle à cause des déformations
thermiques imposées. De plus, les différentes caractéristiques EI, g th et Mplast dépendent de la température.
Si l’écaillage doit être pris en compte, ce dernier peut être considéré de manière simplifiée en déterminant la distribution
des températures et la résistance des sections en diminuant les sections de l’épaisseur d’enrobage dès le début de
l’incendie.
Dans un logiciel de calcul linéaire, on peut entrer le comportement parfaitement linéaire élastique dans un premier
temps, et étudier la distribution des moments par rapport aux moments maximums. Lorsqu’il y a dépassement
du moment plastique, on introduit une rotule plastique et un moment ponctuel égal au moment plastique. On
renouvelle le processus plusieurs fois s’il le faut. Si ce processus aboutit, alors on doit vérifier que les rotations des
rotules plastiques sont acceptables. Si le processus n’aboutit pas, ce qui s’obtient par exemple lorsque l’on est obligé
d’introduire plus de rotules plastiques qu’il n’y a de degrés d’hyperstaticité, alors la structure n’est plus justifiée. Ceci
représente les deux modes de ruine évoqués précédemment.
: déformation thermique
Il existe plusieurs méthodes permettant de déterminer au mieux la rigidité EI à l’itération n+1 de sorte de converger
plus rapidement vers la solution définitive.
Méthode incrémentale
Il s’agit de considérer que le comportement de la structure est localement, c’est-à-dire pour une faible variation de
l’effort, linéaire. Pour que la variation de l’effort soit faible, il faut introduire les différents chargements (charges
extérieures et déformations imposées d’origine thermique) de façon progressive, par incrémentations successives,
en réactualisant à chaque étape les paramètres de rigidité de la structure, de manière à suivre au plus près la loi de
comportement réelle.
On utilise les rigidités « sécantes » de la structure, illustrées sur la loi « moment-courbure » de la figure 37.
De même, lorsque toute la structure est construite par phases, la distribution des moments dépend des phases de
construction.
Néanmoins, lorsqu’on évalue les ouvrages d’art vis-à-vis d’un incendie, on s’autorise toutes les plastifications nécessaires
(du moment que les déformations sont acceptables vis-à-vis des limites des matériaux) puisque le cas testé est un
chargement accidentel très défavorable. L’incursion des matériaux dans leur domaine plastique gomme les différences
d’état initial entre les matériaux mis en œuvre à des temps différents. Il subsiste des écarts de déformation, mais qui
n’ont aucune conséquence puisque les matériaux sont à leur palier plastique.
Cette constatation doit bien entendue être prise avec précaution puisque l’on peut trouver des cas particuliers dans
lesquels ceci ne se vérifie pas, ou bien lorsqu’une instabilité survient avant l’incursion dans le domaine plastique.
Cependant, il est très difficile de coupler un comportement des sections non linéaires, dépendant de la température,
et un phasage de construction. On utilisera donc la constatation précédente pour mener les calculs thermiques comme
si la structure était construite en une seule phase, et l’on supposera que le phasage ne modifie pas les conclusions
de l’étude d’incendie.
L’étendue de l’incendie compte beaucoup dans le calcul. L’effet du gradient thermique est d’autant plus important
que la longueur où il s’exerce est élevée. Compte tenu de l’emprise des incendies telle qu’évoquée dans les chapitres
précédents, on pourra prendre en compte une étendue de l’ordre d’une vingtaine de mètres longitudinalement (des
longueurs plus grandes peuvent être prises). On fera le calcul avec la sollicitation thermique et sans sollicitation
thermique, de façon à couvrir l’ensemble des étendues d’incendie possible (le calcul sans déformation thermique
imposée simule un incendie fortement localisé, dont la température chute significativement dès que l’on s’éloigne
du feu).
Les Eurocodes proposent des méthodes simplifiées ou avancées. Les méthodes simplifiées reviennent à déterminer
les valeurs de résistance maximale des éléments chauffés en utilisant les courbes de réduction de la résistance avec
la température. On compare ces valeurs de résistance aux sollicitations calculées sur la base d’un modèle élastique
linéaire, en prenant en compte des charges réduites.
Les différentes méthodes possibles vont être exposées dans les paragraphes suivants. Il est conseillé de réaliser
des méthodes plutôt évoluées avec les structures mixtes, qui sont plus sensibles à l’incendie et présentent des durées
de résistance relativement faibles. Pour les structures en béton, des méthodes plus simplifiées peuvent être utilisées
car elles sont moins sensibles à l’incendie. Dans tous les cas autres que des travées isostatiques, l’analyse est à mener
au minimum avec un modèle de calcul intégrant l’effet des dilatations thermiques.
L’Eurocode 3 précise bien que cette méthode n’est applicable que lorsque la structure est dimensionnée en plasticité
et non en instabilité (paragraphe 5.6 de l’Eurocode 3 [18] [19]). De plus, elle est très sécuritaire puisque ne permet
aucune redistribution d’efforts.
Pour les éléments en béton, il existe aussi des règles de dimensionnement très simplifiées portant sur les dimensions
des structures, l’enrobage des aciers passifs, etc. Un certain nombre de valeurs tabulées sont également données.
Compte tenu du fonctionnement mécanique des ouvrages d’art, et de l’importance de ceux-ci, on préférera des
méthodes plus évoluées, au minimum celles préconisées dans le paragraphe suivant.
L’état limite de la structure est atteint dès qu’un des efforts résistants est dépassé.
Lorsque la courbe HCM est utilisée sur un pont en béton, l’effort résistant doit tenir compte du phénomène d’écaillage
du béton, limité au premier lit d’armatures ou à une certaine profondeur.
La contrepartie est que les rotations des rotules doivent être limitées (cf. paragraphe 4.5.2).
Pour les moments, les valeurs maximales sont plafonnées au moment plastique après redistribution des efforts. Il
convient de vérifier la ductilité et l’absence d’instabilité.
Pour les efforts tranchants, à moins d’utiliser des modélisations complexes, ou pour certains types de structures
inhabituelles, il n’y a pas de redistribution possible.
On trouve beaucoup d’éléments permettant de vérifier les rotations des rotules plastiques pour les éléments en béton.
L’Eurocode 2 partie 1-1 [13] y consacre un paragraphe entier (clause 5.6.3). De même toute la conception parasismique
suppose la formation de rotules plastiques, et les dispositions constructives contraignantes que l’on trouve permettent
d’atteindre de grandes valeurs de rotation admissible.
Globalement, un bon ordre de grandeur de la rotation plastique admissible consiste à multiplier la courbure
plastique maximale, évaluée à l’aide de la loi « moment-courbure », par la longueur de la rotule plastique, évaluée
« expérimentalement ». Cette dernière est souvent une fraction (5 à 10 %) de la longueur entre la rotule et le point
de moment nul. On trouve aussi d’autres formules en référence à la hauteur des sections (en général 0,5 h jusqu’à h).
L’Eurocode 2 [13] donne directement des valeurs de la rotation maximale en fonction de la position de l’axe neutre
dans la section. On renvoie le lecteur aux documents du CETU, notamment la référence [4] qui contient une annexe
présentant toute la théorie des rotules plastiques.
Pour les structures métalliques, il y a peu d’éléments car l’acier est nettement plus ductile qu’une section en béton
armé, pour laquelle c’est le comportement fragile du béton qui réduit la ductilité. La partie pont de l’Eurocode 3
[20] interdit l’utilisation d’une analyse plastique pour le dimensionnement des ponts, mais laisse la possibilité à
l’annexe nationale [21] d’utiliser une telle analyse pour les situations accidentelles, ce qui est le cas ici. L’annexe
nationale ne donne pas d’élément particulier, et l’on peut donc considérer qu’une analyse plastique est possible,
suivant les indications de l’Eurocode 3 partie 1-1 [18] à condition de réaliser un certain nombre de vérifications.
Le paragraphe 5.6 présente les exigences requises. Il n’y a pas comme pour les structures en béton de limite de rotation
donnée, mais plutôt des critères à vérifier pour que la ductilité des rotules soit suffisante.
L’Eurocode 3 autorise l’analyse plastique lorsque, d’une part, la stabilité au droit de la rotule plastique peut être
assurée et que, d’autre part, ces barres ont une capacité de rotation suffisante. La première condition concerne pour
les bipoutres la condition de déversement qui doit être empêché pour assurer un comportement plastique suffisant.
La seconde condition est considérée comme vérifiée lorsque les sections sont de classe 1.
Lorsque les rotules se forment sur les sections sur appui des bipoutres mixtes, il est peu probable que l’analyse plastique
soit possible puisque ces sections sont rarement de classe 1 à cause de l’âme, et que la condition de déversement
est souvent déterminante. Par contre, lorsque la rotule est envisagée en travée, l’analyse plastique est totalement
justifiée (sections de classe 1 en général et semelle inférieure tendue sans risque de déversement).
De la même manière, on néglige la participation des semelles, en général négligeable, dans la résistance à l’effort
tranchant des sections.
Une fois les résistances plastiques (moment et effort tranchant) et les éventuelles redistributions prises en compte,
il faut s’intéresser aux instabilités qui peuvent être plus déterminantes.
Pour un bipoutre mixte, plusieurs types d’instabilités, détaillés dans les paragraphes ci-dessous, sont à prévoir.
chauffée, mais en prenant le facteur égal à au lieu de . L’effet thermique apparaît directement
et forfaitairement dans le coefficient 0,85.
Globalement, avec ce changement, la classe des sections peut augmenter. Inversement, l’élancement c/t doit être
plus petit pour rester dans une même classe.
Comme il est déjà rare que les âmes de pont soient de classe 1 ou 2, en situation d’incendie, un comportement plastique
est d’autant moins possible si l’on considère l’âme. Il est donc conseillé de négliger complètement la présence de
l’âme pour évaluer les moments et rigidités en flexion. On peut dans ce cas considérer un comportement plastique
des sections (sauf celles en classe 4 cependant).
avec , et
: limite d’élasticité
: coefficient partiel
: hauteur de l’âme
: épaisseur de l’âme
: coefficient de Poisson
On voit que la dépendance de l’effort tranchant résistant varie de manière complexe avec la température. Si on néglige
la participation des semelles à la résistance à l’effort tranchant, cette valeur est à comparer à l’effort tranchant résistant
On donne sur la figure 38 la courbe et les courbes de variation de la limite élastique de l’acier et de son module à
l’origine, en prenant comme exemple une âme en acier S355 de 26 mm d’épaisseur, et une hauteur de 2,56 m avec
un espacement des raidisseurs transversaux supposés rigides de 8 m. On se rend compte que la rigidité diminue avant
la résistance. Le facteur baisse donc dans un premier temps. Puis la limite élastique baisse aussi et évolue
plus rapidement, ce qui fait que le facteur reste à peu près constant dans cette seconde étape. Par rapport au
cas sans incendie, la diminution du facteur est de l’ordre de 20 % au maximum, alors que dans le même temps
la limite élastique baisse considérablement. La présence de l’incendie accentue le risque de voilement de l’âme, mais
cela reste surtout l’effet de la diminution de la limite élastique qui est prépondérant.
, facteur minimal d’amplification à appliquer aux sollicitations de l’ELU pour atteindre la résistance caractéristique
de la section transversale la plus sollicitée du tablier.
En situation d’incendie, on peut ramener le coefficient de sécurité à 1. Ecrit autrement, le critère devient :
où M est le moment sollicitant, avec les charges réduites et les effets des dilatations thermiques
Ed
à l’ELU accidentel. M Rd (T) est le moment résistant de la section avec prise en compte de la température.
On a :
Avec :
• et pour une section de classe 1, 2 ou 3,
• et défini dans le tableau 6.3 de l’EC3-1-1 [18] (dans le cas
courant d’un profilé en acier laminé à chaud) pour une section de classe 4,
Et
: f acteur minimal d’amplification à appliquer aux sollicitations de l’ELU pour atteindre la résistance
critique au déversement
Le moment résistant a déjà été déterminé auparavant. Par contre, le moment critique de déversement est nettement plus
difficile à calculer, puisqu’il fait appel à des calculs de mode de flambement qui dépendent de la rigidité des différents
éléments qui s’opposent au déversement (âme, entretoises, montants verticaux etc.). Or, tous ces éléments sont
d’épaisseurs différentes, donc sont chauffés différemment. Soit l’on peut déterminer les nouveaux moments critiques
de déversement avec l’effet de la température, soit on doit procéder en simplifiant le comportement, et en considérant
que toutes les rigidités sont réduites dans le même rapport. Il faut donc prendre la température de l’élément le plus
fin, qui est le plus chauffé, et considérer que l’affaiblissement de la température s’applique à tous les autres éléments.
On en déduit alors que :
Au final, on peut évaluer le facteur et déterminer le moment maximal supporté par la structure.
4.5.3.5 - Flambement
Se reporter à l’article 4.2.3 de l’Eurocode 3, partie 1-2 [8].
5 - Exemples d’applications
Pour illustrer les méthodes présentées dans les paragraphes précédents, on étudie la vulnérabilité à l’incendie de trois
types d’ouvrages bien différents : pont en béton, bipoutre mixte et pont à haubans.
La réglementation des tunnels routiers nécessite des vérifications au feu sur des durées relativement longues (de
2 à 4 heures). Les tunnels et notamment les tranchées couvertes sont de bons exemples de vérification de résistance
au feu. On renvoie le lecteur vers les deux guides publiés par le CETU sur le sujet (références [3] et [4]), notamment
le second qui présente des méthodes de calcul non linéaire de structures en béton armé.
Dans le cadre d’une analyse de risques qui ne vise pas à établir la garantie d’une durée de résistance, mais à informer
les gestionnaires d’ouvrages de la sensibilité des ouvrages vis-à-vis du risque incendie, ou encore de classer ces
ouvrages par rapport à ce risque dans un but d’améliorer les plus critiques, il est intéressant d’établir objectivement
le comportement réel de tels ouvrages vis-à-vis de l’incendie.
On se rend compte que l’effort tranchant résistant chute assez rapidement et passe sous l’effort tranchant sollicitant
sur appui au bout de 20 minutes sous la courbe CN – ISO 834. Néanmoins, le dépassement est ponctuel et on ne tient
pas compte des réductions d’effort tranchant sur appui, et de la possible contribution de la dalle (0,5 MN). Néanmoins,
au bout de 25 minutes, il ne reste plus que les mi-travées qui restent justifiées vis-à-vis de l’effort tranchant.
On peut considérer que si l’âme se voile, il reste une part de résistance possible après voilement (comportement
post-flambé). On peut supposer qu’il y a peu de chance qu’il y ait un incendie majeur sous un ouvrage à un endroit
où l’âme présente un défaut initial non négligeable mais l’on peut aussi considérer que l’incendie génère un défaut
initial s’il y a une différence de température entre les deux parois de l’âme.
Néanmoins, ceci ne modifie que très peu la conclusion car la résistance plastique de l’âme sans voilement devient
elle aussi rapidement insuffisante, dès que l’on dépasse 25 minutes d’incendie sous la courbe CN – ISO 834. De plus,
il faut signaler que la résistance de l’âme au voilement tient compte de l’effet favorable des montants verticaux, dont
les éléments présentent des épaisseurs de 20 et 30 mm, donc du même ordre de grandeur que l’âme. Leur rigidité et
résistance sont donc aussi fortement réduites, mais il est quasiment impossible de déterminer comment cela modifie
l’effort tranchant résistant avant voilement de l’âme. Quoi qu’il en soit cela montre que le voilement de l’âme reste
sans doute le phénomène initiateur de la ruine de l’ouvrage.
La conclusion est que l’ouvrage résiste à l’incendie 20 minutes lorsque l’incendie a lieu près des appuis, et un peu plus
(30 minutes) à mi-travée. La perte de résistance est due à une instabilité par voilement de l’âme, et les redistributions
ne fonctionnent pas puisque l’ouvrage est incapable de reprendre une travée complète en console (le moment sur
l’autre appui est multiplié par 6 environ, alors qu’il n’y a qu’une marge de 2 à l’ELU accidentel). Lorsque la rupture a
lieu à mi-travée, l’ouvrage continue de fonctionner, mais avec une rupture de pente à mi-travée. Cependant, dès que
l’on s’éloigne d’une vingtaine de mètres de la mi-travée, le fonctionnement mécanique après disparition de l’âme
n’est plus garanti, car la dalle ne parvient pas à reprendre l’effort tranchant et à compenser la perte de l’âme.
Le premier scénario consiste à placer l’incendie sous la travée centrale, sur une longueur de 40 m centrée sur la mi-
travée. On représente sur la figure 40 les résultats obtenus avec la courbe CN – ISO 834 au bout de 35 minutes (soit
10 minutes de plus que la résistance à l’effort tranchant le permet).
On représente sur une même courbe la déformée, les moments dans l’ouvrage, ainsi que les moments résistants
extrêmes prenant en compte, le cas échéant, l’effet des températures.
On constate que le moment résistant minimum est atteint aux abscisses x = 87 m et x = 114 m qui correspondent au
changement d’épaisseur des semelles (de 55 mm à 40 mm). Des rotules plastiques se forment dans cette zone, et se
traduisent par des ruptures de pente sur la déformée. Les rotations sont largement vérifiées, mais comme le moment
est négatif, il est difficile de s’assurer s’il y a ou non déversement (les semelles inférieures sont comprimées, bien
qu’elles se soient allongées globalement du fait de la dilatation thermique).
Figure 40 : Courbe de moments fléchissants pour un incendie au milieu de l’ouvrage entre les abscisses 80 m et 120 m (mi-travée à x=100 m)
Le second scénario consiste à placer l’incendie près de l’appui, sur la travée centrale, sur une longueur de 20 m à partir
de l’appui. On représente sur la figure 41 les résultats obtenus avec la courbe CN – ISO 834 au bout de 35 minutes
(soit 15 minutes de plus que la résistance à l’effort tranchant le permet dans cette zone).
Figure 41 : Courbe de moments fléchissants pour un incendie près d’un appui entre les abscisses 60 m (appui) et 80 m
Les sections chauffées ayant des épaisseurs plus élevées qu’à mi-travée, la température est moins élevée, et donc
la réduction des résistances du fait de la température moins forte. Les moments résistants ne sont pas atteints, mais
il ne faut pas que la section soit plus chauffée encore. En moment, on reste élastique, mais on a vu précédemment
que la rupture est déjà survenue du fait de l’effort tranchant.
Figure 42 : Courbe de moments fléchissants pour un incendie sur tout l’ouvrage
Le calcul a beaucoup de difficultés pour converger. La courbe de moment peine à ajuster les efforts hyperstatiques de
sorte d’être à l’intérieur de la zone autorisée et en pratique n’y arrive pas (discontinuité de moment aux abscisses
87 m et 114 m, moment constant sur les 30 m au centre ce qui n’est physiquement pas possible). Les déformées sont
très grandes (plusieurs mètres), et la stabilité n’est pas assurée. Ce scénario illustre le mode de ruine où l’on épuise
l’hyperstaticité de la structure pour former un mécanisme qui ne parvient pas à reprendre les efforts.
En conclusion, mis à part le scénario catastrophe et irréaliste où les 200 m de pont sont chauffés, l’ouvrage arrive assez
bien à accepter des durées d’incendie de 35 minutes et sans doute au-delà, moyennant la formation de rotules plastiques
et la vérification des rotations de celles-ci. Néanmoins, les moments sont négatifs sur quasiment toute la longueur
du pont, et compte tenu des réductions de caractéristiques mécaniques, le déversement peut se produire partout. Il
est très difficile voire impossible de l’appréhender complètement. On restera donc prudent sur la durée de résistance
en flexion de l’ouvrage.
Les conditions aux limites des haubans ne peuvent pas se simplifier aisément, puisque l’extrémité côté tablier
du câble n’est ni soumise à une force constante, ni un déplacement constant car la rigidité du tablier intervient.
Néanmoins, si l’on considère le tablier suffisamment rigide dès lors que peu de câbles seulement sont touchés par
l’incendie, alors on peut pratiquement considérer que la longueur totale du câble (incluant les effets thermiques et
mécaniques) ne varie pas.
Avant l’incendie, le câble est soumis à une certaine contrainte. On prend sp = 0,3 fpk = 558 MPa pour l’exemple.
La déformation mécanique est égale à : %. Si le câble a une longueur totale de Lc = 100 m,
sa déformation initiale totale est de 28,6 cm.
Lorsque l’incendie se produit, une déformation longitudinale thermique apparaît sur une longueur Lf correspondant
à l’influence de l’incendie. La contrainte reste constante le long du câble et le déplacement total de l’extrémité est
le même qu’en configuration initiale.
Ceci est bien entendu une approximation au sens où l’on suppose le comportement linéaire ce qui n’est pas le cas
rigoureusement dès que le câble est chauffé.
La figure 43 donne l’évolution des différentes déformations données ci-dessus avec le temps dans le cas favorable sans
convection et avec rayonnement sur seulement les 2/3 du périmètre. Le câble fait 100 m de long, et sa partie chauffée
représente 30 m. On suppose qu’il est tendu à 30 % de sa limite à la rupture en situation accidentelle (charges réduites).
Figure 43 : Cas d’un hauban chauffé par l’incendie. Déformations pour la courbe CN – ISO 834 avec rayonnement seul sur 2/3 du périmètre.
Portion de 30 m de câble chauffée par rapport à une longueur totale de 100 m.
On se rend compte que du fait de la forte dilatation du câble dans la partie chauffée, la déformation dans la partie non
chauffée («eps méca froid») diminue, et donc l’effort aussi. On perd la moitié de l’effort initial au bout de 30 minutes,
et le câble est complètement détendu au-delà de 50 minutes.
Si l’on considère l’incendie très localisé, alors la tension du câble n’évolue pas dans la partie non chauffée. C’est donc
la résistance des haubans qui conditionne la résistance globale. En pratique, la résistance résiduelle est de 30 % de
la résistance initiale au bout de 30 minutes. Il y a donc potentiellement disparition du câble au bout de 30 minutes.
Si l’on considère le câble complètement entouré des fumées de l’incendie, alors les durées de 30 minutes sont ramenées
à 20 minutes. Sous un feu HCM, les durées ne dépassent pas les 10 minutes même si le câble est un peu éloigné de
l’incendie (pas de convection et rayonnement sur 2/3 du pourtour).
La conclusion globale de cette analyse est qu’il est peu utile de réaliser des calculs complexes sous sollicitation d’incendie
pour les ponts à câbles (haubans, ponts suspendus) sauf si le diamètre du câble est suffisamment important (plus de
40 cm, ce qui est rarement le cas) auquel cas l’inertie thermique du câble apporte une durée non négligeable. Il faut
supposer que le hauban dans l’incendie disparaît assez rapidement.
La tenue d’un pont à haubans par rapport à un incendie va dépendre du nombre de haubans sollicités par l’incendie, et
donc de l’interdistance entre ancrages des haubans, et de la capacité de l’ouvrage à supporter la rupture de plusieurs
haubans le cas échéant. Si l’on utilise la courbe CN – ISO 834, l’emprise de l’incendie est d’environ 20 m dans le sens
longitudinal et 20 m en hauteur. Si l’on utilise la courbe HCM, la hauteur peut être portée à 40 m.
Pour un pont suspendu, le même type d’analyse peut être mené sur les suspentes si le câble porteur n’est pas dans
l’incendie. S’il est susceptible d’être concerné par l’incendie, et que son diamètre n’est pas suffisamment important pour
retarder la montée en température, alors l’ouvrage a peu de chance de résister à l’incendie sans protection adaptée.
Ceci a des conséquences notables sur l’organisation des phases techniques d’auscultations, de surveillance et de
mise au point du projet de réparation dans la mesure où les interventions effectuées sur l’ouvrage doivent, tout au
long du processus, préserver les droits du maître d’ouvrage et, autant que possible, permettre un règlement rapide
de la situation.
L’incendie volontaire :
Dans le cas d’un incendie dont l’origine est vraisemblablement criminelle, il faut permettre aux officiers de police
judiciaire de recueillir tous les éléments sur les lieux du sinistre pouvant permettre de retrouver l’auteur de l’incendie.
Aussi, il est recommandé aux techniciens de n’intervenir qu’une fois que la police les y aura autorisés.
L’incendie accidentel (notamment celui provoqué par manquement à une obligation de prudence ou de sécurité
imposée par la loi ou le règlement) :
Dans le cas d’un incendie consécutif à la survenue d’un accident comme l’incendie d’un véhicule stationné sous
un pont, le maître d’ouvrage cherchera à recouvrer le montant des frais relatifs à la remise en état de l’ouvrage auprès
du propriétaire du véhicule en cause. S’il est assuré, l’assureur pourrait se subroger dans les droits de son assuré et
prendre en charge la réparation des dommages causés à l’ouvrage. De même, le gestionnaire peut tenter de se faire
indemniser pour les préjudices qu’il aura subis sur ses propres infrastructures (glissières de sécurité, panneaux de
signalisation, etc.) ou pour le coût des mesures d’exploitation qu’il aura dû mettre en œuvre (déviations, mise en
place d’alternats, etc.).
Toutes les décisions prises doivent être traçables et tous les documents doivent être archivés avec soin.
Dans le cas des ouvrages métalliques, il a été montré, lors de l’incendie du pont Mathilde à Rouen, l’intérêt du relevé
laser-topographique 3D pour fixer le périmètre des parties affectées et donc le périmètre de la réparation, en référence
aux normes sur les tolérances de déformations acceptables. Les auscultations des matériaux complètent et confirment
le contexte global des dégradations. La réparation d’un ouvrage métallique est, en principe, souvent possible mais
elle est conditionnée par les possibilités d’intervention in-situ ou de dépose de l’ouvrage.
Dans le cas des ouvrages en béton armé, si seules des réparations superficielles sont nécessaires, elles sont alors
relativement faciles à circonscrire in-situ . Si les structures sont endommagées plus profondément, un projet de
réparation voire de reconstruction doit être mis au point.
Dans le cas des ouvrages en béton précontraint, il peut vite s’agir de grosses réparations structurales : renforcement
par précontrainte additionnelle, remplacement de tout ou partie d’un tablier suivant les possibilités. Comme il n’est
pas aisé de déterminer l’étendue des dégâts, a priori , sans investigations détaillées, il faut ici être particulièrement
réservé sur les suites à donner en l’absence d’investigations complètes.
Dans tous les cas, les réparations et interventions nécessaires sur les éléments accessoires, les superstructures et
les chaussées sont à circonscrire avec soin car elles peuvent s’étendre sensiblement au-delà des ouvrages concernés
ou être découvertes trop tard.
Pour les structures en alliages d’aluminium comme les structures porteuses de signalisation verticale (PPHM),
la vulnérabilité est extrêmement forte et les structures incendiées sont le plus souvent irrécupérables.
Les effets thermiques ont pu aussi engendrer des contraintes très élevées dans les pièces dont les déformations sont
empêchées. Les plastifications durant l’incendie peuvent être aussi à l’origine de concentrations de contraintes. Il
peut en résulter des pliures ou des déchirures au pied de certains cordons de soudure, ou au sein de certaines tôles,
notamment les tôles assemblées par boulons ou rivets. La capacité portante de la structure risque d’en être alors
gravement réduite, même une fois refroidie. C’est pourquoi les fissures, pliures et déchirures doivent être recensées
et leurs effets analysés. C’est l’objet des investigations décrites au paragraphe 3.3.3.6.
Afin d’évaluer les caractéristiques mécaniques résiduelles de l’acier, il peut s’avérer utile d’évaluer les températures
maximales atteintes au sein de ses différents éléments constitutifs ainsi que l’étendue de la zone affectée.
L’ordre de grandeur des températures atteintes peut être obtenu à partir de l’état des différentes couches de peintures ;
notamment pour les ouvrages protégés par une peinture anti-corrosion à base de minium (oxyde de plomb rouge) qui a
la propriété d’avoir un point de fusion (décomposition) de 500 °C, suffisamment élevé pour être significatif. En l’absence
de minium, produit qui n’est plus utilisé depuis le milieu des années 80 en raison de sa toxicité, les constatations
in situ resteront limitées.
La photo 5 indique par ses zones de couleurs noire, grise ou blanche les zones de métal dont la température est restée
très en deçà de 500 °C. Seules les zones faiblement étendues en orange se sont approchées de 500 °C.
Photo 5 : Multipoutre mixte – La présence de minium indique que la température est globalement restée inférieure à 500 °C
Cette estimation des températures maximales atteintes permet, sur la base d’éléments disponibles dans la littérature,
d’évaluer l’impact sur la limite élastique et la résistance ultime obtenues après refroidissement. On trouvera en annexe 3
des tableaux de photographies de plaques métalliques revêtues de différentes protections anticorrosion, qui ont été
chauffées vingt minutes au four à différentes températures. En première approche, ces tableaux peuvent fournir des
indications précieuses.
Le risque de perte des caractéristiques mécaniques apparaît dès 500 °C pour les aciers thermomécaniques quelle que
soit leur limite élastique.
L’éclatement désigne le mécanisme par lequel les parements en béton perdent une partie de leur béton de surface
(cf. photo 6). Il s’agit de morceaux de béton qui se détachent au cours de l’agression par le feu, souvent dans les zones
les plus chauffées et les moins confinées, telles que, par exemple, les angles inférieurs de la retombée rectangulaire
d’une poutre de plancher ; on constate alors que des morceaux significatifs de section triangulaire se détachent
mettant à nu l’armature latérale du premier lit d’aciers. Ces morceaux sont assez gros et peu nombreux. Ils résultent du
détachement de la zone d’enrobage non armée située dans l’angle de section. Les morceaux détachés ne proviennent
jamais du volume intérieur à la cage d’armatures. Ils sont d’autant plus gros que l’enrobage des aciers est important.
L’écaillage consiste en un détachement progressif et continu de très petits morceaux de béton qui sont expulsés avec
force du parement exposé au feu ( cf. photo 7). Ces morceaux ont la particularité d’être de très faible épaisseur (quelques
millimètres) et très aplatis (leurs dimensions perpendiculaires à l’épaisseur sont de l’ordre de quelques centimètres).
Ces morceaux sont très nombreux et sont assimilables à des copeaux minces qui se détachent successivement en
grand nombre et sur des surfaces très étendues en proportion de leur taille. L’épaisseur de béton diminue donc par
fines écailles, pour atteindre des valeurs de plusieurs centimètres, voire dizaines de centimètres. Ce phénomène
se rencontre principalement lorsque les sections de béton sont soumises à de fortes montées en température (ce
qui est le cas quand la courbe HCM est utilisée) ou bien lorsque le béton est peu poreux (cas des BHP). A l’inverse,
des bétons formulés avec des fibres organiques résistent bien à ce phénomène. La manifestation de ce phénomène
dépend de caractéristiques telles que la composition du béton et ses propriétés associées (notamment sa porosité et
sa teneur en eau), sa géométrie et son état de contrainte. En général, pour les bétons courants, elle peut commencer
dès les premières minutes de l’incendie et s’arrêter au bout de 30 min, il s’agit de l’écaillage explosif. Dans le cas
rare d’une montée en température très lente (quelques degrés par minute), elle ne commence qu’à partir d’un certain
temps d’exposition et se poursuit continûment tant que l’incendie n’est pas maîtrisé, à une vitesse quasi-constante.
L’épaisseur de la pièce diminue alors progressivement et de façon quasi proportionnelle au temps.
Phénomènes thermo-hydriques :
Dans la zone de béton fortement chauffée, l’eau s’évapore. Un gradient de vapeur d’eau se crée vers l’intérieur du
béton. Lorsque la vapeur arrive dans des zones plus froides, elle se condense. L’eau qui se forme vient occulter les pores
du béton et crée un bouchon qui empêche la vapeur d’eau de migrer vers l’intérieur du béton. La pression monte,
le béton se met en traction pour compenser cette pression jusqu’à ce que la pression soit trop grande. Le béton cède
et une écaille se décolle. On voit bien que la porosité du béton, le taux initial d’humidité et l’importance des gradients
de température jouent un rôle dans le phénomène. Ensuite le processus se répète identique à lui-même.
Phénomènes thermo-mécaniques :
L’élévation non uniforme de la température au sein du béton génère des dilatations différentielles entre la peau et
le cœur du béton, à l’origine d’autocontraintes qui favorisent l’écaillage du béton (compression au niveau de la peau).
La présence d’une cage d’armature ne modifie pas significativement le phénomène sauf si les barres d’acier sont
d’un diamètre tel qu’elles constituent un obstacle physique à l’expulsion du béton qu’elles masquent. Elles permettent
alors de limiter le phénomène aux zones non masquées par les barres. En revanche, les aciers de petit diamètre ne
permettent pas d’escompter d’effet de ralentissement significatif de l’enlèvement progressif de matière. On note
que les aciers dégarnis sont en contact direct avec l’incendie, ils perdent alors toute leur résistance. D’un point de
vue réglementaire, seul le terme d’éclatement est employé (instruction technique annexée à la circulaire 2000-63
[27] [28], DTU FB [12], Eurocode 2 partie 1-2 [10] [11]). Il recouvre alors les deux phénomènes présentés ci-dessus.
Le terme d’écaillage est fréquemment employé dans la littérature. Pour le dimensionnement, les termes d’écaillage
et d’éclatement peuvent être utilisés indifféremment car ils conduisent l’un et l’autre à une perte de matière qu’il
faut pouvoir prendre en compte dans le calcul, thermique d’une part (modification des conditions aux limites) et
mécanique d’autre part (réduction de section) [3].
L’écaillage reste difficile à évaluer et il n’existe pas de texte ou d’étude permettant de le quantifier dans le cas général.
On reste toujours sur le résultat d’essais à réaliser au coup par coup. Néanmoins, le phénomène est généralement
limité pour les bétons ordinaires soumis à la courbe CN – ISO 834.
En cas d’incendie, un câble extérieur est généralement chauffé sur une faible partie de sa longueur. En conséquence,
la dilatation thermique reste faible par rapport à l’allongement mécanique qui conduirait à une détention du câble.
En première approximation, la tension du câble peut être considérée constante.
En se référant aux caractéristiques mécaniques des aciers de précontraintes de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] et pour
un câble tendu après perte à 0,7 fpk, on obtient, pour les câbles extérieurs, une rupture théorique à environ 300 °C.
L’étude du document [29] donnait une rupture à 250 °C qui correspondrait plutôt à un câble tendu à 0,8 fpk.
Une gaine PEHD non fondue indique alors une faible dégradation du câble injecté au coulis de ciment, la température
de fusion de la gaine étant proche de 130 °C.
Dans ce cas, puisque la température de l’armature ne pourra avoir été portée au-delà de 130 °C, les éventuelles pertes
de précontrainte ne sont pas significatives. Il conviendra d’admettre que les caractéristiques de calcul sont respectées
et que le câble remplit et remplira son rôle pour la durée de vie initialement prévue [29].
Dans le cas où le câble est rompu ou dans le cas intermédiaire où la gaine PEHD est fondue, mais le câble n’est pas
rompu, il est en général nécessaire de poursuivre la réflexion pour pouvoir envisager une réouverture à la circulation
(analyse des plans et du fonctionnement de l’ouvrage, pourcentage de câbles concernés, etc.).
Au refroidissement, le même processus se déroule mais la contrainte finale dans le câble n’est plus la contrainte
initiale en raison des déformations plastiques irréversibles [29].
Pendant l’échauffement, il se produit une chute locale du module élastique du câble qui conduit, à allongement constant
du câble, à une perte de tension locale de celui-ci. Lors du refroidissement après incendie le module augmente mais
pas la tension.
Cette perte de tension du câble peut être évaluée à partir des lois contrainte/déformation du paragraphe 3.2 de
l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] ( cf. figures 48.b). La température maximale atteinte par le câble pendant l’incendie
peut être estimée, en première approche avant de disposer de résultats de mesures, à partir de l’Eurocode 2
partie 1-2 [10], en connaissant la position du câble dans la dalle et la durée d’incendie (cf. figures 48.a). On considère
que la déformation du câble par rapport au béton varie peu avant et après incendie car il n’y a pas de glissement
entre l’acier de précontrainte et le béton.
En se basant sur les principes ci-dessus, il est possible d’estimer la perte de précontrainte en fonction de la température
atteinte.
Pour savoir si la perte de tension est tolérable et envisager une réouverture à la circulation, il est en général nécessaire
de poursuivre la réflexion (pourcentage de câbles concernés, modélisation de la structure avant et après incendie, etc.).
a) b)
Figures 48 :
a) Distributions de température dans les dalles (hauteur h = 200) pour R15-R240 (Eurocode 2 partie 1-2 [10])
b) Lois contrainte-déformation des câbles de précontrainte (Eurocode 2 partie 1-2 [10], 3.2.4)
Une attention particulière doit être portée au cas où l’incendie s’est produit au niveau des têtes d’ancrage des câbles,
notamment dans le cas d’une injection à la cire.
En première urgence, l’observation du béton peut permettre de donner des informations sur la température atteinte
par les câbles. Par exemple, la fib [30] propose une méthode d’étude des couleurs rappelée ci-dessous, même si dans
les faits elle s’avère en général difficilement opérationnelle.
Extrait traduit de [30] Appendix 6 : La couleur du béton peut changer suite à l’échauffement. Les propriétés mécaniques d’un
béton de couleur normale auront été très peu modifiées par les effets d’échauffement. Inversement, un béton de couleur
rose, apparemment sain, verra sa résistance et son module élastiques significativement réduits. Un béton de couleur gris-
blanchâtre et chamois sera faible et friable.
Pour l’examen de la structure en béton endommagée par le feu, il peut être suffisant d’entreprendre un examen visuel et de
« sonder » à l’aide d’un marteau en acier afin de déterminer l’étendue du béton endommagé, des excavations locales étant
faites pour établir la profondeur de la décoloration rose. Le « sondage » permet de distinguer rapidement le matériau
délaminé et les zones de béton faible du matériau sain. La frontière interne de la coloration rose est typiquement prise
comme l’isotherme à 300 °C.
Cette méthode a ses limites. L’étendue du changement de couleur varie avec le type de granulats (grossiers ou fins).
La décoloration rose qui apparaît est due à la présence de sels ferreux et est produite par un changement dans leurs états
d’hydratation. L’effet tend à être plus marqué avec les granulats siliceux. Il est peu probable que les granulats de roches
concassées éruptives ou calcaires montrent cet effet. Bien que le fait de mouiller le béton affecté rehausse les couleurs,
rendant les changements plus faciles à distinguer, établir la limite de décoloration peut être difficile. Il doit être reconnu
que le béton qui n’est pas devenu rose n’est pas nécessairement non endommagé par le feu ; les sels ferreux peuvent
simplement ne pas être présents.
Il est à noter que la valeur de 300 °C citée par le document [30], peut conduire à des pertes locales de résistance
dans le béton de 15 % pour les granulats siliceux ( cf. figure 25). De même, la figure 25 indique, pour une élévation
de 600 °C, une perte de résistance du béton de 55 %.
2.1.4 - Cas des ponts présentant une réparation par matériau composite
La vulnérabilité est moyenne.
Selon les recommandations de l’AFGC sur la réparation et le renforcement des structures en béton au moyen des
matériaux composites [31], l’ouvrage sans renforcement doit résister à l’incendie en combinaison ELU accidentel dans
les zones à risque définies dans le CCTP. Il est important de le vérifier.
Lorsque le renforcement composite est protégé par un revêtement protecteur ou ignifuge, il est recommandé de
prendre connaissance des spécifications sur la classe de résistance au feu des matériaux de protection.
De manière générale, l’état du composite n’est pas un indicateur de son adhésion au substrat béton. Cela peut sembler
évident pour un composite pultrudé (plat rigide) dont la matrice est de bien meilleure qualité que l’adhésif : une
bonne tenue de la matrice après l’incendie ne présage en rien de la tenue de l’adhésif. Ceci est tout aussi vrai pour
des composites moulés au contact avec la même résine que celle qui a servi d’adhésif (tissu collé). En effet, après
avoir été soumise à une température supérieure à la température de transition vitreuse, la couche adhésive a pu
partiellement se détacher du substrat. Si la montée en température n’a pas été trop importante, la baisse a permis
au polymère de se re-durcir, celui-ci n’étant plus forcément complètement adhérant. D’où la pertinence des essais de
cohésion superficielle du renforcement même si celui-ci semble en bon état.
Il est donc le plus souvent décidé immédiatement après l’incendie de limiter le tonnage sur l’ouvrage ou encore de
restreindre le nombre de voies circulées dans l’attente des premiers résultats des essais.
L’attention est attirée sur le fait que l’altération du renforcement par matériaux composites n’est pas limitée au strict
périmètre de l’incendie, mais peut s’étendre à l’ensemble de la zone affectée thermiquement notamment par diffusion
de la chaleur dans les armatures.
Vis-à-vis de la stabilité au feu, les éléments les plus faibles sont les assemblages réalisés à l’aide d’interfaces métalliques.
Les assemblages avec éléments métalliques les moins vulnérables sont ceux ancrés profondément dans le bois. De
même, certains aciers inoxydables austénitiques conservent des propriétés mécaniques suffisantes jusqu’à environ
1000 °C pour les assemblages de charpentes en bois.
Une zone noircie n’est pas nécessairement endommagée. Il apparaît pertinent de concentrer la visite sur la partie
douteuse exposée aux flammes, le reste de l’ouvrage pouvant être étudié par la suite.
Les appareils d’appui peuvent être endommagés et gêner les déformations de la structure. Il convient dans ce cas de
les remplacer.
La démarche diffère selon qu’il s’agit d’un ouvrage métallique, d’un ouvrage en béton armé, d’un ouvrage en béton
précontraint, d’un ouvrage réparé par matériau composite ou d’un ouvrage en bois (cf. paragraphe 2.1).
Dans le cas d’une fermeture de l’ouvrage, il convient d’apprécier la nécessité d’interdire également la circulation sous
l’ouvrage.
Des mesures de restriction de circulation peuvent alors être envisagées, par exemple, lorsque l’encorbellement présente
un doute, il est pertinent de ne pas y circuler en attendant l’inspection détaillée.
Toutefois, dans le cas du pont Mathilde, une palée provisoire aurait été probablement mise en place à partir du quai si
des déchirures des soudures âmes/semelles étaient apparues à l’about de la poutre la plus exposée à l’incendie. Une
telle palée est seulement mise au contact de façon à pouvoir reprendre les descentes de charge en cas de défaillance
de la poutre déchirée, et elle suppose généralement qu’on est en mesure de souder des raidisseurs locaux de l’âme
si cela est nécessaire (cf. figure 50).
Ce paragraphe rappelle donc les définitions des termes qui seront employés. Pour plus de précisions, il est conseillé
de se reporter à l’ITSEOA 2010.
Pour mener à bien certaines de ses missions, il fait appel aux compétences existantes au sein du réseau scientifique
et technique de l’Etat, voire à des compétences externes si nécessaire.
Pour les ouvrages des itinéraires importants, le fascicule 3 de l’ITSEOA 2010 [37] conseille de préparer, même en l’absence
de désordres, les consignes nécessaires à l’application des mesures de sécurité immédiate, afin que ces dernières
puissent être prises le plus rapidement possible en cas de nécessité.
Toute mesure de restriction de circulation doit en effet faire l’objet d’un arrêté de la part de l’autorité compétente,
et nécessite une phase d’instruction qui demande généralement un délai relativement important. Il convient donc de
souligner l’intérêt de préparer convenablement des mesures qui ne doivent ensuite être mises en application que si
un événement particulier le justifie.
Les restrictions de circulation peuvent porter sur les points suivants (cf. ITSEOA 2010 [37] chapitre 6 § 1.1) :
• catégories d’usagers admis sur l’ouvrage ;
• largeur offerte au trafic ;
• espacement entre véhicules, ou le cas échéant entre poids lourds seulement ;
• limitation de vitesse, éventuellement adaptée en fonction des catégories de véhicules.
Les restrictions sur les catégories d’usagers admis à utiliser l’ouvrage sont justifiées lorsque le risque est lié au poids
des véhicules circulant sur la chaussée ; les seules restrictions dont il est généralement possible d’obtenir l’application
effective sont :
• l’interdiction de tout poids lourd par une limitation à 3,5 t ;
• l’interdiction à tout véhicule automobile ;
• la fermeture totale de l’ouvrage (y compris aux piétons).
Cette dernière restriction est nécessaire dès lors que le risque encouru est celui d’un effondrement de l’ouvrage à vide.
D’une façon générale, les restrictions apportées à la circulation pour des raisons de sécurité doivent être appliquées
rigoureusement. Pour cela, elles doivent être matérialisées par des obstacles robustes qui empêchent physiquement
les infractions.
Une réduction de la largeur offerte au trafic se traduit le plus souvent par la réduction du nombre de voies, elle est
justifiée par exemple dans le cas où le risque est lié à la position transversale des véhicules.
La réglementation de l’espacement entre véhicules, le plus souvent les poids lourds, a pour objectif de n’admettre
qu’un véhicule à la fois sur une même travée.
La limitation de la vitesse des véhicules lourds est un moyen peu efficace pour diminuer de façon significative les effets
dynamiques, sauf dans le cas où il existe des irrégularités de chaussée sur l’ouvrage ou une irrégularité de profil en
long située juste avant l’ouvrage.
La limitation de vitesse et la réglementation de l’espacement entre poids lourds sont des mesures difficiles à faire
respecter sans l’appui des forces de police.
L’ITSEOA 2010 [37] précise également que le niveau opérationnel doit informer les occupants du domaine public des
risques présentés par l’ouvrage et des conséquences potentielles sur les réseaux que ces occupants gèrent, afin que
ces derniers puissent prendre les mesures de sécurité adéquates.
Si nécessaire, une inspection détaillée exceptionnelle peut aussi être organisée lorsqu’une anomalie grave a été décelée.
En général, la surveillance renforcée a pour objectif de suivre d’une façon plus attentive l’évolution d’un ouvrage
défectueux ou douteux, pendant une certaine durée :
• soit, dans le cas le plus général, pour détecter une évolution anormale ou déceler toute aggravation susceptible de
mettre en jeu la sécurité ;
• soit, dans le cas où l’examen de la structure n’a pas permis d’expliquer les causes exactes des désordres ou lorsque
l’auscultation n’a pas permis d’évaluer l’état réel dans lequel se trouve l’ouvrage, pour mieux identifier les problèmes
et mieux appréhender son comportement.
La nature de ces objectifs implique qu’un régime de surveillance renforcée ne peut être appliqué pendant une durée
trop courte ; sauf exception, un délai de l’ordre d’un an constitue un minimum.
La surveillance renforcée se distingue de la haute surveillance (présentée dans le paragraphe suivant) par le fait que
la sécurité présentée par la structure ne doit pas être mise en cause pendant toute la durée de cette opération, et
que des consignes ne sont pas indispensables.
L’ITSEOA 2010 [37] précise que la surveillance renforcée d’un ouvrage peut être effectuée par des examens réguliers
et parfois fréquents de celui-ci (examens visuels périodiques, moyens de mesures simples à mettre en œuvre tels que
le relevé de fissures), accompagnés ou non par une instrumentation permettant un suivi de l’évolution des désordres
grâce à des relevés périodiques de mesures.
Lorsque la surveillance renforcée ne comporte que des examens visuels, les objectifs et la fréquence du programme
de surveillance sont fixés par le niveau décisionnel. L’organisation de ces examens est de la responsabilité du niveau
organisationnel. L’interprétation des résultats est du ressort du niveau organisationnel qui doit avertir le niveau
décisionnel en cas d’évolution défavorable du comportement de l’ouvrage.
Lorsque la surveillance renforcée comporte l’utilisation d’instruments de mesures, le programme de surveillance est
établi par le niveau organisationnel après consultation et avis des spécialistes dont l’intervention est souhaitable. Il
est ensuite arrêté par le maître d’ouvrage gestionnaire.
Si, pendant cette période de surveillance renforcée, une défaillance de l’ouvrage est à redouter, il convient de prendre
des mesures de sécurité immédiate ou de sauvegarde.
Dans la pratique, la haute surveillance consiste à suivre l’évolution d’une ou plusieurs grandeurs physiques mesurables de
préférence, et à provoquer, dès que ces grandeurs physiques atteignent un seuil permettant de caractériser une situation
dangereuse, l’application des mesures de sécurité prédéfinies.
La mise en place d’un régime de haute surveillance se distingue de celle d’un régime de surveillance renforcée
(cf. paragraphe 3.1.5 ci-dessus) par le fait qu’elle doit être conditionnée par l’exécution préalable des deux opérations
suivantes :
• une analyse poussée des phénomènes susceptibles de se produire, permettant une évaluation des risques
correspondants ;
• un établissement de consignes précises, adaptées au cas particulier, et qui doivent être appliquées strictement en
cas de nécessité. Cet ensemble de consignes doit inclure les consignes d’exploitation du trafic à appliquer en cas
de restriction d’utilisation de l’ouvrage.
Le maître d’ouvrage gestionnaire prend non seulement la décision de placer un ouvrage sous haute surveillance,
mais il en fixe également les principaux objectifs. L’organisation et la mise en place de cette haute surveillance est
de la responsabilité du niveau décisionnel. Le programme de mise sous haute surveillance est établi par le niveau
organisationnel après consultation et avis des spécialistes dont l’intervention est souhaitable, et le niveau opérationnel.
Il est ensuite soumis à l’accord du niveau décisionnel, puis arrêté par le maître d’ouvrage gestionnaire.
3.2.1 - Généralités
A la suite d’un incendie sur ou sous ouvrage, un certain nombre de mesures sont à prendre immédiatement avant
d’entamer la phase d’investigations spécifiques. Sont notamment présentés dans ce paragraphe les principes généraux
(fonction du lieu de l’incendie et du type d’ouvrage) permettant au maître d’ouvrage gestionnaire de décider, après
une visite exceptionnelle, du maintien de la fermeture ou de la remise en circulation de l’ouvrage. Ces principes
généraux sont à adapter en fonction des cas rencontrés. Il est important de noter que ceci est affaire d’appréciation
et non l’application d’une réglementation.
Les investigations spécifiques à mener par la suite sont présentées dans le paragraphe 3.3 intitulé « Evaluation de
la portance après incendie » de ce chapitre.
Pendant l’incendie, la circulation sur et sous ouvrage est généralement coupée, sauf en cas d’incendie mineur.
Les pompiers et les services de sécurité sont alors présents sur les lieux afin respectivement d’éteindre l’incendie et
de maintenir les coupures de circulation. Il est souhaitable de les mobiliser jusqu’à la fin de réalisation d’une visite
exceptionnelle de l’ouvrage.
Nous attirons particulièrement l’attention sur le risque de ruine des ouvrages en béton fortement élancés lors de
la phase de refroidissement, plusieurs heures encore après la fin de l’incendie. Un tel accident tragique s’est produit
en Suisse en 2004 durant lequel sept membres d’une brigade de pompiers ont été tués par l’effondrement soudain
d’une structure en béton d’un parking souterrain après avoir éteint l’incendie [38].
Cette visite exceptionnelle doit nécessairement être effectuée avant toute remise en circulation. Il s’agit d’observer
les parties d’ouvrage qui pourraient avoir été endommagées par l’incendie. L’ITSEOA 2010 [36] (chapitre 3 § 3.4) précise
que c’est le chef du niveau opérationnel concerné par l’ouvrage qui est responsable de cette visite exceptionnelle et
qui doit la déclencher en informant le niveau organisationnel. Elle peut être faite par les agents du niveau opérationnel
et/ou les agents du niveau organisationnel.
Généralement, les spécialistes en ouvrages d’art ne sont pas immédiatement présents sur les lieux et il appartient
au gestionnaire de décider de rouvrir ou non à la circulation, avec ou sans restriction. Il doit alors disposer d’outils lui
permettant d’analyser dans quelle mesure l’ouvrage est endommagé.
Tout d’abord, il doit quantifier l’intensité de l’incendie. Pour cela, il est nécessaire de recueillir des informations
auprès des pompiers, des forces de police ou de gendarmerie et des témoins, notamment sur les caractéristiques
de l’incendie : les combustibles (bouteilles de gaz, hydrocarbures, véhicules courants, etc.), sa durée, son étendue,
la distance de son foyer à la structure, etc.
Il est conseillé ensuite d’analyser le profil en long et l’alignement du dispositif de retenue.
Il est indispensable de définir le lieu de l’incendie (sur ou sous ouvrage) et le type de l’ouvrage (métallique, béton
armé, béton précontraint, réparé par matériau composite, en bois).
Il est utile de réaliser une première liste des éléments les plus fortement touchés et une estimation initiale de l’étendue
des désordres. Après examen visuel, des plans définissant un zonage et un bilan détaillant les désordres des éléments
seront préparés pour obtenir une vue d’ensemble de la situation.
Dans le cas de la mise en œuvre de palées provisoires, l’effet de la modification du schéma statique longitudinal doit
être analysé.
Ces épreuves réalisées avec le souci de sécurité des personnes doivent être accompagnées de mesures topométriques.
Si aucune perte de portance n’a été mise en évidence, il est possible de rétablir la circulation.
Même si la circulation est susceptible d’être rouverte, il est conseillé de poursuivre les investigations les jours suivants
et de mettre l’ouvrage sous surveillance renforcée, voire sous haute surveillance.
Lorsque l’état de l’ouvrage est considéré, à la suite de l’incendie, comme douteux ou défectueux, il doit d’abord faire
l’objet d’une inspection détaillée, puis d’investigations complémentaires afin de :
• confirmer l’existence ou l’absence de désordres s’il y a un doute ;
• déterminer les causes des désordres et les mécanismes de leur évolution ;
• définir les réparations ou renforcements à effectuer ;
• le cas échéant, effectuer l’analyse préalable qui sert à définir le dispositif de haute surveillance.
Les définitions de « défectueux » et de « douteux » sont fournies dans l’ITSEOA 2010 [37] et rappelées ci-dessous.
• l’état d’un ouvrage est qualifié de défectueux lorsque des désordres majeurs structurels ont été mis en évidence,
que leur gravité a pu être appréciée au moins sommairement, et que ces désordres sont susceptibles, soit tels quels,
soit après évolution, de mettre en cause la sécurité ou la pérennité de l’ouvrage ;
• l’état d’un ouvrage est qualifié de douteux lorsque l’analyse ne permet pas de conclure : soit parce que des désordres
ont été constatés, mais que l’analyse n’a pas permis d’apprécier la gravité réelle ou potentielle, soit parce que des
désordres n’ont pas été mis en évidence, mais des indices permettant d’en soupçonner l’existence ont été reconnus.
Cette situation doit être transitoire et les investigations effectuées doivent permettre de reclasser l’ouvrage dans
la catégorie des ouvrages en état normal ou défectueux.
L’inspection détaillée exceptionnelle est prescrite par le niveau décisionnel (cf. ITSEOA 2010 [36] chapitre 3 § 3.4).
Elle doit être dirigée et exploitée par un agent qualifié de niveau ingénieur. Elle doit être réalisée par des agents
ayant une qualification adéquate.
Les rapports d’inspection détaillée exceptionnelle sont remis au niveau organisationnel qui en fait l’exploitation et
qui rend compte au niveau décisionnel des suites à donner. Un exemplaire du rapport est conservé dans le dossier de
l’ouvrage (cf. ITSEOA 2010 [36] chapitre 3 § 3.5).
Lorsque les résultats de l’inspection détaillée ne permettent pas d’atteindre l’ensemble des objectifs des investigations,
et en particulier pour déterminer plus complètement les causes et les mécanismes d’évolution des désordres, il peut
être nécessaire d’effectuer :
• une auscultation ;
• une étude par le calcul ;
• une auscultation et une étude par le calcul menées conjointement.
3.3.3 - Auscultation
3.3.3.1 - Généralités
Il est souhaitable que la réparation de l’ouvrage soit précédée d’une inspection détaillée et d’une étude approfondie
de l’ouvrage ; l’auscultation, au même titre que les calculs ou recalculs, fait partie de cette étude approfondie. Il
s’agit d’un ensemble d’examens et de mesures spécifiques faisant le plus souvent appel à des techniques élaborées,
destiné à approfondir la connaissance réelle d’un ouvrage, à partir des résultats de l’inspection détaillée ( cf. ITSEOA
2010 [37] chapitre 3).
L’auscultation d’un ouvrage d’art doit faire l’objet d’un programme qui en fixe les objectifs généraux, et qui précise
la nature des investigations à effectuer.
Le programme d’auscultation est établi par le niveau organisationnel et arrêté par le niveau décisionnel, après
consultation et avis des spécialistes dont l’intervention est souhaitable, ou même, le cas échéant sur leur proposition.
Le niveau opérationnel est informé de son contenu (cf. ITSEOA 2010 [37] chapitre 3 § 4). Le nombre d’intervenants lors
de l’auscultation peut être important, le niveau organisationnel doit donc définir un cadre de références (numérotation
des piles, numérotation et emplacements des carottes, etc.) de façon à faciliter le recoupement des résultats à l’issue
de l’auscultation.
Les méthodes d’auscultation sont parfois coûteuses, et l’une des difficultés de l’établissement d’un bon programme
d’auscultation est de procéder à toutes les investigations nécessaires à l’expertise ainsi qu’à l’établissement du projet
de réparation, tout en évitant les essais et recherches inutiles. L’établissement du programme doit donc être précédé
d’une phase de réflexion, et le programme peut être revu en cours d’exécution, si nécessaire, en fonction des premiers
résultats obtenus et de l’interprétation qui peut en être faite (cf. ITSEOA 2010 [37] chapitre 3 § 4).
Les investigations conduites avant l’établissement d’un projet de réparation doivent répondre aux objectifs suivants :
• évaluer l’ampleur des désordres : cette évaluation fait souvent appel à une conjugaison de techniques de contrôles non
destructifs (généralement qualitatives) et de techniques quantitatives appliquées sur des prélèvements ;
• établir le diagnostic ;
• définir ou étayer des hypothèses de calcul : la détermination de caractéristiques mécaniques des matériaux constitue
un cas courant.
Assez souvent, ces deux types d’analyse existent dans une même campagne d’investigations. Les deux natures
d’investigations font appel à divers moyens d’auscultation.
Le prélèvement d’un échantillon sur un ouvrage a l’inconvénient d’être partiellement destructif. Il est donc recommandé
d’extraire des échantillons les plus petits possible, en nombre limité, et aux endroits les moins vitaux de la structure.
Il en résulte un second inconvénient, à savoir que les renseignements obtenus ne peuvent être représentatifs de
l’ensemble de l’ouvrage. Le plus souvent, on utilise donc ces échantillons comme référence d’étalonnage, ou comme
élément comparatif, afin de compléter les informations que l’on peut tirer d’essais non destructifs effectués sur
l’ouvrage. Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de méthode non destructive pouvant donner des résultats suffisamment
sûrs sans aucun rattachement à un étalonnage sur le même matériau.
Mesures in-situ
Pour ce qui concerne les mesures in situ , et notamment dans le cas de dégâts de grande ampleur, les essais non
destructifs sont à privilégier grâce à leur facilité de mise en œuvre et à leur cadence élevée. Parmi ceux-ci, deux
méthodes sont particulièrement intéressantes : la mesure de dureté superficielle au scléromètre et l’auscultation sonique.
• la sclérométrie est couramment utilisée, elle ne requiert qu’un matériel léger et sa mise en œuvre est rapide et
simple. Elle nécessite toutefois d’être menée avec beaucoup de soin et dans le strict respect des procédures afin de
fournir des données fiables et exploitables. Les inconvénients de cette méthode sont la faible profondeur investiguée
et la sensibilité à l’état de surface ;
D’autres campagnes de mesures in situ complémentaires peuvent renseigner sur la profondeur d’altération du béton
comme par exemple des forages destructifs avec enregistrement des paramètres de forage, des reconnaissances au
radar ou des mesures soniques par ondes de surface. Des recoupements d’autres essais peuvent également, dans
certains cas, être apportés par le traitement numérique des images des parements incendiés.
Études en laboratoire
Les investigations in-situ peuvent ensuite être complétées par une étude en laboratoire sur des prélèvements carottés.
Les prélèvements carottés sont le plus souvent utilisés pour l’estimation des températures atteintes à différentes
profondeurs dans le béton. Les méthodes les plus couramment adoptées sont l’examen au microscope électronique à
balayage, les analyses thermiques, la diffractométrie des rayons X. Les carottes incendiées sont découpées en tranches
et comparées au béton sain mis au four.
Mais il est également possible d’avoir recours à la colorimétrie, à la thermoluminescence et aux analyses chimiques
et pétrographiques.
Une campagne d’essais mécaniques classiques peut également être menée avec pour objectif notamment de valider
et de calibrer les mesures non destructives réalisées sur ouvrage : détermination de la résistance à la compression et
à la traction, mesure de module d’élasticité et de vitesse du son.
S’il apparaît nécessaire de caractériser finement la variation de dégradation suivant la profondeur, on peut recourir à deux
méthodes de mesure : le relevé de profils soniques sur carottes ou la détermination de profils de module d’élasticité
par la mesure de fréquence de résonance sur disques minces découpés dans les carottes.
L’adhérence acier-béton pendant l’incendie et après refroidissement est également affectée d’une manière dépendant
aussi bien de la sévérité et de la durée de l’incendie que du type et de l’état de l’armature passive concernée ;
néanmoins peu d’éléments sont disponibles à ce sujet sur les armatures plus récentes.
Quelques éléments d’appréciation peuvent toutefois être formulés à partir des différents essais réalisés et résumés
dans le document [46] :
• l’adhérence est réduite lorsque la température augmente et cette réduction est plus importante que celle de
la résistance en compression du béton ;
• le pourcentage de perte d’adhérence est à température identique plus important pour des armatures lisses que
pour des armatures nervurées ;
• le diamètre des barres a peu d’effet sur la réduction de l’adhérence ;
• le type de granulats du béton influe sur l’adhérence à des températures élevées ;
• plus l’enrobage est faible, plus la réduction de l’adhérence est importante.
Cette perte d’adhérence peut conduire, de manière sécuritaire, à ne pas tenir compte des aciers ancrés et/ou recouverts
longitudinalement dans la zone chauffée.
La dégradation des armatures affectées par l’incendie (chauffées, apparentes, voire non-adhérentes) doit être prise
en compte dans les calculs en retenant des valeurs réduites des caractéristiques mécaniques.
A défaut de données sur les températures atteintes des armatures apparentes ou non-adhérentes, il est possible de
les négliger.
Acier de précontrainte
Les propriétés mécaniques des aciers de précontrainte après refroidissement se détériorent pour des températures
maximales atteintes plus faibles que pour les armatures passives. Ainsi, la résistance ultime après refroidissement
diminue de manière linéaire à partir de 200 °C pour atteindre 50 % de sa valeur initiale lorsque la température
maximale a atteint 600 °C. En dessous d’une température d’échauffement de 200 °C, les aciers de précontrainte
retrouvent leurs caractéristiques mécaniques après refroidissement. Dans le cas d’armatures de précontrainte tendues
à 80 % de la Force de Rupture Garantie (FRG), une rupture spontanée risque de se produire à partir d’une température
de 300 °C.
Figure 52 : Résistance ultime et limite élastique des aciers de précontrainte après refroidissement [30] [47]
Figure 53 : Fil tréfilé. Evolution du taux de relaxation à 20 °C pour divers traitements thermiques (maintien à X °C pendant 1 ou 4 heures suivi
d’un refroidissement lent). Pour 4 heures à 100 °C ou 1h à 300 °C le taux de relaxation maximal garanti est dépassé [29]
Un incendie peut avoir un impact sur le taux de relaxation même à des températures relativement faibles (de l’ordre
de 80 °C) en fonction de sa durée (cf. figure 53 et document du LCPC [29]).
Lorsque l’évaluation de la capacité portante de l’ouvrage est particulièrement sensible à la tension résiduelle des
armatures actives intérieures, cette dernière peut être obtenue, pour un fil, un toron voire un câble entier, à partir d’une
mesure à l’arbalète (cf. photo 11 et guide technique du LCPC « Mesure de la tension des armatures de précontrainte
à l’aide de l’arbalète » [48]).
Dans le cas de la précontrainte extérieure, l’accession à l’effort d’un câble et son interprétation dans l’évaluation de
la capacité portante est un peu plus délicate : si la gaine est injectée au coulis, la mesure à l’arbalète est possible.
Une approche avec les méthodes vibratoires peut être aussi utilisée pour estimer la tension résiduelle de câbles de
précontrainte extérieure présumée dégradée par un incendie (méthode des lpc n°35 [49]), par exemple pour l’incendie
du pont de l’ONIA à Toulouse (12T15 et 19T15 dans gaine PEHD remplie de coulis de ciment). L’analyse vibratoire
des câbles sains et des câbles chauffés dans la même section et les sections voisines a permis de conclure que
les câbles dégradés par incendie sont restés sous les seuils induisant des pertes par relaxation, et ont gardé toutes
leurs caractéristiques mécaniques.
Dureté Vickers
Des essais de dureté (norme EN ISO 6507-1 d’avril 2006 [50]) permettent, par comparaison avec des mesures réalisées
dans des zones saines et croisées par l’analyse micrographique de la structure cristalline de l’acier, d’avoir une estimation
de l’impact de l’incendie sur les caractéristiques mécaniques.
Répliques métallographiques
Cette technique est normalisée et permet le diagnostic de l’acier après un incendie en plusieurs points au moyen d’un
équipement portatif léger.
Les répliques métallographiques sont possibles sur de petites surfaces d’un centimètre carré et peuvent être prises
après préparation par exemple sur la tête d’un boulon HR. Les répliques métallographiques sont des examens non
destructifs qui sont complémentaires des mesures de la dureté Vickers car elles permettent de préciser les causes des
augmentations éventuelles de la dureté qui auraient été détectées.
Le relevé en trois dimensions des déformations de la charpente à l’aide d’un balayage laser permet d’acquérir
les coordonnées de centaines de millions de points sur un pont.
Pour un ouvrage métallique, ces relevés peuvent être utiles à plusieurs titres car :
• ils facilitent la détection de pliures voir de déchirures qui sont peu perceptibles sur place en raison de la noirceur
des tôles causée par les fumées ;
3.3.4 - Calculs
Des calculs d’évaluation structurale peuvent également être menés. Les besoins en calcul pour l’expertise sont très
variables selon les cas.
Ces calculs prennent en compte les éventuelles caractéristiques dégradées des matériaux (résistance, géométrie,
section, etc.) déterminées par les diverses investigations réalisées sur l’ouvrage endommagé.
Ils peuvent permettre de conclure sur la possibilité de remettre en circulation ou sur le niveau de limitation de tonnage
à retenir.
Pour plus de détail sur les principes des calculs, il conviendra de se reporter au chapitre 2 du présent guide.
4 - Exemples d’ouvrages incendiés
Dans cette partie, des exemples de mesures conservatoires, de mise en sécurité et d’investigations après incendie
sont présentés pour des ouvrages de différents types.
4.1 - Exemple d’un incendie sous un pont dalle en béton précontraint à deux nervures
4.1.1 - L’incendie
Un incendie s’est déclaré dans un campement provisoire qui était installé sous la deuxième travée d’un ouvrage,
occasionnant des dégâts visibles sur la structure (cf. photo 13). La circulation sur l’ouvrage a été interdite immédiatement
dans l’attente d’un avis sur son état.
L’ouvrage a été identifié comme un pont dalle en béton précontraint à deux nervures et à quatre travées continues.
Il est précontraint longitudinalement et transversalement.
Aucun désordre structurel montrant un endommagement catastrophique de l’ouvrage n’a été observé. Cependant,
l’incendie a endommagé le béton sur la moitié de la surface de la deuxième travée, entraînant un écaillage superficiel
pour une grande partie, mais un écaillage plus profond sur des zones sensibles à mi-travée (cf. photos 14), mettant
notamment à nu des armatures transversales majeures. L’ensemble de ces observations a conduit à la possibilité
que la précontrainte longitudinale ait été touchée en sous face de l’une des deux nervures, et que la précontrainte
transversale l’ait été aussi au niveau du hourdis intermédiaire.
Photos 14 : a) Deuxième travée du pont dalle en béton précontraint à deux nervures et à quatre travées continues après incendie,
b) Écaillage au niveau de l’une des deux nervures
Renseignements pris auprès de témoins et des pompiers, la durée d’exposition au feu de l’ouvrage a pu être estimée
à 2h par le niveau opérationnel.
Le dossier d’ouvrage étant néanmoins incomplet et l’auscultation non terminée au stade des calculs, il a été nécessaire
de faire certaines hypothèses sur l’incendie, les matériaux et le mode de réalisation de l’ouvrage :
• il a été retenu l’hypothèse d’un incendie d’une durée de 2h avec une montée en température conforme à la norme
ISO 834 (courbe CN – ISO 834) ;
• il a été supposé que les câbles utilisés pour la précontrainte sont de classe I à très basse relaxation ;
• puisqu’il était courant lors de la construction de l’ouvrage d’utiliser des bétons de résistance nominale élevée pour
les ouvrages précontraints, la valeur de 30 MPa a été adoptée.
Flexion longitudinale
Une première modélisation a été réalisée avec le logiciel ST1 afin de vérifier l’état de la structure avant l’incendie en
tenant compte de la géométrie de chaque câble, du phasage de construction et du fluage du béton.
La température atteinte dans le béton au niveau des câbles de précontrainte (au nombre de 10) au cours de l’incendie
a été estimée à partir de l’annexe A de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] (cf. figure 57). Cet abaque donne la répartition
des températures dans une poutre hxb = 800x500 pour une durée d’incendie de 2 heures. Ces valeurs peuvent être
utilisées pour les nervures dont les dimensions hxb = 1450x1400 sont supérieures. Les températures ont été estimées
en tenant compte d’un écaillage de deux centimètres et d’une épaufrure de l’angle inférieur.
La perte de tension dans les câbles a été estimée à partir des lois contrainte/déformation du paragraphe 3.2 de
l’Eurocode 2 partie 1-2 [10] (cf. tableau 2). On considère que la déformation du câble par rapport au béton varie peu
avant et après incendie (pas de glissement entre l’acier de précontrainte et le béton), et que la perte de tension se
produisant pendant l’incendie à la température maximale atteinte est conservée après l’incendie.
Une seconde modélisation prenant en compte les nouvelles tensions calculées des câbles a alors été réalisée portant
sur l’état après incendie pour la nervure la plus touchée. Il a été estimé que la précontrainte longitudinale restait
surabondante et que les nervures étaient aptes à supporter les charges civiles routières. Un essai de chargement a
été demandé pour confirmer ce résultat.
Temp. acier fpy,θ /( b fpk ) fpp,θ /( b fpk ) Ep,θ /Ep ept,θ [-] epu,θ [-]
θ [°C] ff t&r ff t&r ff t&r ff, t & r ff, t & r
Classe A Classe B
1 2a 2b 3 4 5 6 7 8 9
20 1.00 1.00 1.00 1.00 1.00 1.00 1.00 0.050 0.100
100 1.00 0.99 0.98 0.68 0.77 0.98 0.76 0.050 0.100
200 0.87 0.87 0.92 0.92 0.62 0.95 0.61 0.050 0.100
300 0.70 0.72 0.86 0.86 0.58 0.88 0.52 0.055 0.105
400 0.50 0.46 0.69 0.69 0.52 0.81 0.41 0.060 0.110
500 0.30 0.22 0.26 0.26 0.14 0.54 0.20 0.065 0.115
600 0.14 0.10 0.21 0.21 0.11 0.41 0.15 0.070 0.120
700 0.06 0.08 0.15 0.15 0.09 0.10 0.10 0.075 0.125
800 0.04 0.05 0.09 0.09 0.06 0.07 0.06 0.080 0.130
900 0.02 0.03 0.04 0.04 0.03 0.03 0.03 0.085 0.135
1000 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.090 0.140
1100 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.095 0.145
1200 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.00 0.100 0.150
Note : Pour des valeurs intermédiaires de températures, une interpolation linéaire peut être utilisée.
Tableau 2 : Valeurs des paramètres contrainte-déformation aux températures élevées des aciers de précontrainte formés à froid (ff) (torons et fils)
ou trempés et revenus (t&r) (barres) (tableau 3.3 paragraphe 3.2 Acier de précontrainte - Eurocode 2 partie 1-2 [10])
Flexion transversale
Une modélisation a été réalisée pour l’état avant incendie et une seconde pour l’état après incendie. Le modèle utilisé
comprend les deux nervures longitudinales et le hourdis intermédiaire représenté par des barres transversales pour
former une structure de type « poutre échelle ». La précontrainte transversale a été modélisée par deux forces égales et
opposées centrées sur le centre de gravité du hourdis d’épaisseur 20 cm.
La température atteinte dans le béton au niveau des câbles de précontrainte a été estimée à partir de l’annexe A de
l’Eurocode 2 partie 1-2 [10], Figure A.2. Cet abaque donne la répartition des températures dans une dalle d’épaisseur
20 cm (cf. figure 58.a).
La température des câbles est vraisemblablement restée en dessous de 350 °C. La perte de tension dans les câbles a
pu être estimée comme précédemment, à partir des lois contrainte/déformation du paragraphe 3.2 de l’Eurocode
2 partie 1-2 [10]. La seconde modélisation portant sur l’état après incendie a alors montré que les tractions dans
le hourdis ont été limitées à une valeur proche de 1 MPa.
Figure 58 : a) Répartition de la température dans une dalle d’épaisseur 20 cm (figure A.2 modifiée de l’annexe A de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10]),
b) Isothermes contrainte-déformation de l’acier de précontrainte à 20 °C et 350 °C.
L’IP1 [55] (règlement de béton précontraint en vigueur en 1973) n’acceptant pas de traction dans le béton en service,
la précontrainte transversale est apparue insuffisante pour respecter l’IP1. Néanmoins, selon le BPEL [56], il est
possible d’admettre des tractions sous combinaison rare, à condition que la section contienne suffisamment d’aciers
passifs. Il est apparu nécessaire d’avoir des données complémentaires sur les aciers passifs en place, la qualité du
béton et la température maximale atteinte au niveau des câbles transversaux pour estimer la capacité du hourdis.
4.1.4 - Auscultation
En parallèle des calculs, des investigations sur la précontrainte ont été menées. Ces investigations passent par
la détermination des températures maximales atteintes en fonction de la profondeur et par la détermination précise
du positionnement de cette précontrainte (en complément des plans de câblages).
L’ouvrage a été nettoyé et passé au scléromètre par les spécialistes en ouvrages d’art. Les armatures de précontrainte
intérieure ont été localisées à l’aide du radar. Le programme de carottage a pu être défini.
La méthodologie retenue par les spécialistes en pathologie du béton pour évaluer la température atteinte dans le béton
consiste à caractériser l’impact de l’échauffement sur les constituants du béton par analyses thermiques (ATD/ATG)
et diffractométrie des rayons X (DRX). Le protocole d’essai comporte 2 étapes :
• un étalonnage en laboratoire. L’étalonnage est réalisé sur un béton témoin issu d’une zone non incendiée. Il consiste
à traiter thermiquement une tranche de béton à 100, 200, 300, 400 ou 500 °C pendant 2 heures pour ensuite réaliser
les essais d’ATD/ATG et DRX. Ces traitements thermiques ont permis d’identifier des traceurs caractéristiques de
la température atteinte par le béton ;
• la caractérisation de l’impact de l’incendie sur le béton. Pour cela, les carottes de béton incendié ont été
échantillonnées en 4 tranches de 2 cm. Les tranches obtenues sont ensuite concassées puis broyées. La poudre
obtenue est analysée par ATD/ATG et DRX.
Les distances données ne prennent pas en compte la perte de matière provoquée par l’incendie.
L’auscultation a révélé que les températures atteintes étaient bien plus faibles que celles supposées pour les calculs
et que le hourdis devait être apte à supporter les charges civiles routières, moyennant vérification à l’aide d’un essai
de chargement.
Le comportement du hourdis en flexion transversale a été évalué par la mesure de la courbure. Les capteurs ont été
placés dans une section saine pour servir de courbe d’étalonnage et dans les zones endommagées. Le chargement a
été réalisé par un camion placé sur la nervure la plus touchée avec les roues côté Sud sur l’axe du tablier. Les résultats
ont été lus sur des comparateurs placés en sous-face du hourdis dans l’axe de l’ouvrage.
Les rotations des nervures sous charges décentrées mesurées étaient conformes aux prévisions du calcul et n’ont pas
montré d’affaiblissement des nervures vis-à-vis de la flexion longitudinale.
Concernant la flexion transversale du hourdis, les valeurs mesurées en partie centrale étaient du même ordre de
grandeur que les valeurs de calcul, mais il a été constaté un affaiblissement des sections incendiées par rapport aux
sections saines.
Il a été décidé de rouvrir l’ouvrage en autorisant la circulation sur une file centrée sur l’axe de l’ouvrage. L’ouvrage a
été placé sous surveillance renforcée jusqu’à sa réparation.
4.1.6 - Réparation
Le béton dégradé a été purgé par hydrodémolition de façon superficielle après avoir préalablement repéré les aciers
de précontrainte ( cf. photos 15). Les fissures ont été injectées. Le béton purgé a été reconstitué par projection de
mortier. Lorsque cela a été nécessaire, des aciers ont été ajoutés par scellement. La circulation initiale a pu être rétablie.
a) b)
4.2.1 - L’incendie
Un incendie s’est déclaré sous un ouvrage stratégique d’une rocade, au niveau d’une travée de rive du tablier portant
un sens de circulation. L’incendie éteint et les pompiers partis, le maître d’ouvrage gestionnaire a décidé de rouvrir
l’ouvrage à la circulation compte tenu de sa bonne connaissance de la structure et du fait que la zone endommagée
se trouvait sous la voie rapide non empruntée par des véhicules lourds.
L’ouvrage a néanmoins été placé sous surveillance renforcée, une visite journalière devant être effectuée par le niveau
opérationnel afin de vérifier qu’aucun nouvel élément ne se détache de l’ouvrage et qu’aucune nouvelle dégradation
n’apparaisse. Cette surveillance a été maintenue jusqu’à la réalisation d’essais de chargement.
L’ouvrage a été identifié comme un viaduc à travées indépendantes à poutres préfabriquées précontraintes par
post-tension. Constitué de deux tabliers parallèles et indépendants, il comporte trois travées indépendantes.
Le fonctionnement de chaque partie de structure pouvant être isolé du reste, seule la zone directement soumise à
l’incendie (travée de rive d’un des deux tabliers) a été étudiée. La pile touchée par l’incendie est constituée de colonnes
voiles reliées en tête par un chevêtre en béton armé. Le chevêtre supporte les poutres du tablier par l’intermédiaire
d’appuis en élastomère.
La visite exceptionnelle a révélé une concentration des dégâts sous les poutres sur une longueur d’environ 5 à 6 m,
à proximité de la pile intermédiaire (cf. photos 16) :
• la pile est constituée d’un chevêtre appuyé sur des fûts verticaux suffisamment massifs pour ne pas avoir été fragilisés
par le faible écaillage qui a été constaté. Les appareils d’appui étaient peu visibles, mais l’absence de déformation
visible semblait indiquer que leurs caractéristiques mécaniques ont été globalement conservées ;
• les poutres étaient écaillées sur une longueur d’environ 5 m près de la pile. Le talon des poutres présentait un
écaillage limité au centimètre en partie axiale, mais beaucoup plus important au niveau des arêtes. Il pouvait
localement atteindre 4 à 5 cm jusqu’à 10 cm au niveau de l’arête inférieure. Les âmes étaient écaillées de manière
relativement uniforme sur une épaisseur inférieure au centimètre ;
• l’entretoise sur appui présentait un écaillage inférieur au centimètre sur sa face verticale avec un écaillage plus
important au niveau des arêtes ;
• le hourdis n’avait pu être examiné de près. Il semblait cependant que l’écaillage se limitait à une épaisseur de 1 et
à 2 cm, les aciers extérieurs n’étant visibles à aucun endroit.
a) b)
Photos 16 : a) Travée de rive de VIPP atteinte par l’incendie, b) Écaillage au niveau des poutres, de l’entretoise et du hourdis
Immédiatement après la visite exceptionnelle, une série de calculs a été réalisée par les spécialistes en ouvrages
d’art afin d’évaluer, de manière théorique et en fonction des données disponibles, la capacité portante de la structure.
Les représentants de la police présents sur place lors de l’incendie ont déclaré que l’incendie s’était développé à
la suite de l’explosion d’une bouteille de gaz donnant immédiatement l’alerte. Les secours une fois sur place ont
maîtrisé le sinistre en une vingtaine de minutes. La durée d’incendie a été estimée à 30 min. Étant donné la nature
des combustibles, il a été supposé que les températures lors de l’incendie étaient proches de la courbe de feu
d'hydrocarbures majorée (courbe HCM). De plus, il a été considéré que les aciers passifs avaient retrouvé leurs
caractéristiques initiales si leur température n'avait pas dépassé 600 °C au cours de l’incendie (cf. document [57]).
Poutres
En prenant l’hypothèse d’un incendie HCM de 30 minutes, il a été possible d’accéder à la répartition des températures
en fonction de la profondeur à l’intérieur du béton à partir de la loi de propagation de température décrite dans
l’Eurocode [10] (cf. figure 59). Les valeurs obtenues montrent qu’il suffit d’un enrobage à l’intérieur du béton non
écaillé supérieur à 2 cm pour que les aciers ne perdent pas de manière irréversible leurs caractéristiques mécaniques.
Figure 59 : Répartition des températures dans les poutres en fonction de la profondeur à l’intérieur du béton
La précontrainte longitudinale des poutres est assurée par 6 câbles. En observant l’écaillage maximum, il a été
constaté que 5 câbles ont conservé leurs caractéristiques sur toute la longueur. Seul un câble a semblé avoir des
caractéristiques diminuées sur une zone entre 4 et 6 m, à proximité de l’about des poutres. Il s’agit d’une zone pour
laquelle la précontrainte est généralement surabondante.
Les étriers d’effort tranchant sont constitués de cadres en acier Tor f10 espacés de 0,25 m. En considérant un écaillage
moyen de 0,5 cm, la température atteinte est comprise entre 750 et 850 °C, ce qui ne garantit pas une réversibilité
complète des caractéristiques mécaniques de l’acier.
Entretoises
Seule l’entretoise sur appui est concernée. La résistance à la flexion est essentiellement obtenue par 2 câbles 12f8
dont l’enrobage est resté partout supérieur à 5 cm. Il n’y a pas eu de perte de résistance en flexion. Vis-à-vis des
contraintes de cisaillement, une augmentation de la contrainte de 2,5 % a été obtenue, ce qui reste faible.
Hourdis
La résistance à la flexion de moment positif du hourdis est assurée par des câbles transversaux dont l’enrobage initial
est de 4,5 cm par rapport à la face inférieure. Si l’on admet une profondeur d’écaillage légèrement inférieure à 2 cm,
on obtient une température maximale des câbles de 450 °C, conduisant à une perte de précontrainte d’environ 60 %.
En cas de valeur d’écaillage plus importante, il pourrait y avoir un risque de rupture fragile du hourdis, au niveau de
la section de reprise de bétonnage avec les ailes des poutres, dans le cas où la voie rapide serait circulée par des
poids lourds (ce qui est théoriquement interdit par le code de la route).
Les essais de chargement n’ont pas montré de comportement anormal des poutres et des entretoises, par contre ils ont
confirmé une perte importante de la précontrainte transversale du hourdis. Dans ces conditions, le respect de la non-
décompression du hourdis a conduit à limiter la circulation sur la voie rapide à des véhicules légers dont le PTC était
inférieur à 12 t, ce qui était déjà le cas. L’interdiction a été renforcée par un message sur PMV en amont de l’ouvrage.
L’auscultation a permis de préciser que les dégâts sous les poutres se concentraient sur une longueur d’environ 6 à
7 m et que les poutres étaient écaillées sur une longueur d’environ 6 m près de la pile. L’écaillage du hourdis a été
évalué à un peu moins de 2 cm.
Dans les poutres, près des appuis, il a été montré que vis-à-vis de l’effort tranchant au moins 90 % de la précontrainte
a été conservée, l’enrobage des câbles en prenant en compte l’écaillage étant de 5,5 à 6 cm (cf. figure 60).
Les calculs ont également montré que le niveau de résistance du hourdis permettait le passage des camions de
livraison de 12 tonnes, mais devenait insuffisant pour ceux de 16 tonnes, dans le cas défavorable d’un chargement
de file entre la voie médiane et la voie rapide. Un camion de 16 tonnes centré sur les voies de circulation ne posait
pas de problème de flexion.
Au niveau de la reprise de bétonnage hourdis/aile des poutres, la contrainte de cisaillement admissible a été comparée
aux contraintes de cisaillement obtenues pour les charges du fascicule 61 titre II [42]. Il est apparu que la section de
reprise de bétonnage devait pouvoir accepter le passage d’un camion de type Bc (30 tonnes), mais qu’un convoi plus
lourd et plus concentré de type Bt entamait le coefficient de sécurité.
4.2.5 - Réparation
Au niveau des talons des poutres, un sablage a été réalisé, de même que la passivation des armatures et la reconstruction
de leur enrobage. Le hourdis a été renforcé par la mise en place de six pièces de ponts rapportées sous hourdis.
Chaque pièce de pont est fixée aux trois poutres les plus touchées par une barre placée dans une gaine injectée de
coulis de ciment.
Photos 17 : Vue des 6 pièces de pont, légèrement précontraintes, rapportées sous le hourdis
4.3.1 - L’incendie
Un violent incendie s’est déclaré sous une travée centrale d’un pont en béton armé à cinq travées continues. Cet
incendie est dû à l’embrasement d’un camping-car, puis à l’explosion de deux bonbonnes de gaz qu’il contenait. Quatre
autres véhicules stationnant sous la travée ont également été détruits et trois autres ont subi des dégâts importants.
Le feu a brûlé pendant environ 20 minutes avant l’intervention des pompiers, qui auraient mis ensuite 2 heures à
l’éteindre (selon les voisins et témoins interrogés).
Les services techniques de la Communauté Urbaine, arrivés très tôt sur place, ont décidé d’empêcher immédiatement
la circulation sur l’ouvrage dans l’attente d’un avis sur son état.
Les données disponibles sur l’ouvrage sont partielles et essentiellement constituées de plans de coffrage. Les conditions
d’appui ne sont pas connues et non visibles sur site, il est probable que le tablier repose sur des sections rétrécies
sur piles.
Aucun désordre structurel montrant un endommagement catastrophique de l’ouvrage n’a été observé (absence
notamment d’une déformation prononcée et de fissures importantes) et les désordres se limitaient à la travée incendiée.
La partie haute des piles et les zones d’appui ne présentaient pas de désordres significatifs.
L’observation de la dalle en intrados de la travée incendiée permet de distinguer essentiellement deux grandes zones
selon l’importance de l’écaillage du béton (cf. photo 18).
Zone A : Elle est située côté travée 3 et présente un écaillage superficiel sur une bande d’environ 3,70 m le long de
la pile, quasiment aucun acier n’y est apparent (cf. photo 19) ;
Zone B : Elle est située côté travée 1 et le béton d’enrobage y a pratiquement intégralement disparu. La nappe inférieure
se compose d’aciers transversaux dont une très grande partie est apparente, voire n’est plus du tout enrobée de
béton. Sur une zone de quelques mètres carrés et située environ à mi-travée, la nappe suivante, constituée d’aciers
longitudinaux, est apparente mais aucun acier n’est complètement dégagé (cf. photo 20).
L’épaisseur d’écaillage de béton dans la zone B est estimée à 5 cm, sauf dans les zones de transition dalle /
encorbellements, où les éclats sont ponctuellement plus profonds.
Les aciers transversaux sont sains en apparence. Aucune déformation n’est observée, excepté un léger bâillement de
ces aciers totalement dégagé sur une grande longueur.
L’examen visuel de l’intrados n’a pas permis de repérer les éventuelles zones de recouvrement des aciers longitudinaux.
Les désordres relevés traduisent un endommagement important du tablier au droit de la travée incendiée avec une
diminution certaine de sa résistance en flexion transversale et des doutes quant à sa résistance en flexion longitudinale Il
a donc été décidé de maintenir la fermeture de l’ouvrage y compris aux véhicules légers et aux transports en commun.
A l’issue de cette visite, il est apparu nécessaire de :
• fermer l’accès sous la travée incendiée ;
• procéder à un nettoyage des parements (purge des morceaux de béton et lavage des suies) ;
• mieux cerner l’importance des désordres et leur conséquence sur l’état des matériaux au titre des investigations
complémentaires.
4.3.4 - Auscultation
Le faible tirant d’air de la travée de l’ordre de 3 m en moyenne fait que le béton a été directement soumis à l’incendie.
En conséquence, il a chauffé de manière importante et ses propriétés mécaniques ont été altérées. L’important écaillage
constaté a également entraîné une élévation significative de la température dans les armatures.
Campagne sclérométrique
L’objectif de cette campagne est de délimiter la zone altérée par l’incendie et d’évaluer la perte de résistance du
béton en place.
Dans les zones écaillées et éclatées, on observe des pertes de résistance variant de 34 à 44 %, ce qui est bien
évidemment très important. Ces résultats sont à relativiser dans le sens ou seule la résistance de surface est mesurée
par le scléromètre. Ainsi, rien n’indique que le béton soit altéré en profondeur. Toutefois, la campagne sclérométrique
permet d’identifier avec une relative précision les zones altérées, qu’il est nécessaire de purger.
a) b)
Photos 21 : Fenêtre avec recherche d’un béton gris sain et cohérent b) sous un béton blanc peu cohérent a)
Analyse chimique
Les analyses ont été réalisées par Analyseur Thermogravimétrique couplé à une analyse calorimétrique
différentielle qualitative (Mettler Toledo ATG/DSC1).
La perte de masse constatée sur échantillons de béton aux environs de 650 - 750 °C, caractéristique de la perte de CO 2
durant l’analyse thermogravimétrique montre que le béton étudié n’a pas subi de température supérieure à 800 °C
lors de l’incendie. La présence des flux de chaleur caractéristiques de la présence d’eau dans certains minéraux des
granulats au-dessus de 800 °C et du changement de forme du quartz confirment cette hypothèse.
Métallographie
La détermination de la teneur en inclusions, réalisée suivant la norme NF A 04-106 [58], révèle une assez forte teneur
en oxydes globulaires de type D3e et une légère présence de sulfures de type A1. La structure est de type ferrite-
perlite avec une assez faible proportion de perlite. La taille de grain, déterminée suivant la norme NF EN ISO 643 [59],
donne un résultat ASTM de 8, ce qui correspond à une structure fine.
Il n’y a pas eu de changement de structure suite à l’incendie, le risque d’une trempe martensitique a pu être exclu. Une
observation des bords (zone potentiellement plus affectée par l’incendie) ne montre pas de modifications particulières
et il n’y a pas d’indice d’endommagement par fluage sous forme de micro-vides ou de microfissures (cf. photos 22).
a) b)
Photos 22 : Vue de la structure granulaire du pont étudié (x500) a) et d’une structure ayant subi une trempe (x1000) b)
Caractéristiques mécaniques
Un essai de traction a été réalisé suivant la norme NF EN ISO 15630-1 [60]. La résistance élastique (Re) mesurée est
de 430 MPa et la résistance mécanique à la rupture (Rm) de 463 MPa, avec un allongement (Agt) de 6,9 %.
Ces résultats ont été comparés aux propriétés connues des aciers des années 1970. Il s’agit très probablement d’un
acier de nuance FeE400 de catégorie 3 (Re mini de 400 MPa, Rm mini de 440 MPa et Agt mini de 5 %).
Les essais de dureté (moyenne de 10 essais) donnent une valeur de 158 Hv5, ce qui est en accord avec la structure et
la composition chimique de l’acier. Les résultats des essais ne sont pas homogènes (valeurs de 146 à 177 Vickers) ;
le centre de l’échantillon est légèrement moins dur. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que l’acier soit de type « Tor »,
ce que la géométrie des nervures semble également indiquer.
Analyse chimique
L’analyse chimique a été réalisée par spectrométrie d’étincelle.
Le taux de carbone est de 0,176 % et le taux de carbone équivalent est de 0,296 %. Ces taux n’amènent pas de
remarque particulière pour ce type d’acier. La teneur en éléments fragilisant est correcte pour le soufre (0,028 %), mais
élevée pour le phosphore (0,081 % pour un maximum admissible de 0,05 % pour les aciers de béton armé actuels).
La puissance de l’incendie a vraisemblablement été inférieure à celle du feu donné par la norme ISO 834 (courbe
normalisée). En effet, la distribution de température dans une dalle d’épaisseur d’au moins 20 centimètres peut
être déterminée à partir de la figure A2 de l’Eurocode 2 partie 1-2 [10]. Au bout de 2 heures (durée supposée de
l’incendie), la surface du béton aurait dû atteindre plus de 1100 °C. Les armatures transversales dont l’enrobage peut
être estimé à 3 cm auraient dû atteindre 750 °C et les armatures longitudinales, qui ont un enrobage de 5 cm environ,
une température de 575 °C.
Figure 64 : Distribution de température dans une dalle (hauteur = 20 cm) sous courbe de feu normalisé
CN – ISO 834 selon figure A2 de l’Eurocode 2 Partie 1-2 [10]
Compte tenu de l’absence de désordres majeurs et de l’intégrité des armatures transversales, les plus exposées, les calculs
réalisés suite à l’incendie ont eu pour objectifs de s’assurer de la résistance de l’ouvrage à sa remise en service après
réparation. Les sections ont été vérifiées à l’ELU, ce qui permet de s’affranchir du phasage de réalisation de la réparation.
En l’absence de plan de ferraillage, les sections d’acier ont été déterminées à partir des relevés réalisés sur site.
Les calculs réalisés ont montré que l’ouvrage est apte à supporter en flexions longitudinale et transversale les charges
pour lesquelles il a été dimensionné. Les vérifications ont été réalisées selon les règles CCBA 68 et 70 [61] en considérant
les effets des charges civiles du fascicule 61 titre II de 1971 [42]. La résistance caractéristique du béton a été prise
égale à 30 MPa. La limite élastique des armatures est prise égale à 400 MPa.
L’ordre de grandeur des épaisseurs à purger a été estimé au préalable sur la base des examens visuels et des
auscultations par grandes zones (en gros de 2 à 5 cm). Comme il n’est pas facile de contrôler l’épaisseur de purge,
les consignes suivantes ont été données :
• purge de ce qui n’est pas adhérent ;
• dégagement des armatures transversales lorsque leur béton d’enrobage paraissait friable (enrobage assez faible et
souvent en dessous de 3 cm) ;
• p a s d e d é g a g e m e n t s u p p l é m e n t a i r e d e s a r m a t u r e s l o n g i t u d i n a l e s o u a l o r s t r è s l o c a l e m e n t .
Les armatures transversales étaient déjà visibles sur pratiquement la largeur de dalle sur environ 3 m de long après
incendie, les purges en ont dégagé une très grande majorité. L’ouvrage immédiatement coupé lors de l’incendie
n’a donc pas été ré-ouvert.
Photo 24 : Vue d’un essai de pastillage - rupture dans le béton support
• projeter un mortier par voie sèche en deux passes, dont une passe de finition (cf. photo 26) ;
• attendre 3 semaines de séchage avant épreuves de chargement.
Les épreuves ont été réalisées avec deux camions de 26 tonnes (1 par voie), compte tenu des petites longueurs de
travée (cf. photo 27).
Les épreuves de chargement n’ont pas fait apparaître de problèmes particuliers (flèches conformes, pas de fissuration
anormale détectée du mortier projeté).
A l’issue des épreuves, le pont a pu être ré-ouvert à la circulation sans restriction particulière. La durée de fermeture
de l’ouvrage a été de 2 mois et demi.
4.4.1 - L’ouvrage
Le pont Mathilde à Rouen a été construit entre 1976 et 1979 et comporte en particulier deux travées jumelles en
acier de 115 m de longueur. Chacune de ces travées métalliques se compose d’une dalle orthotrope portée par deux
poutres de 4 m de haut, espacées de 17,35 m et reliées entre elles tous les 4 mètres par des pièces de pont. Chacune
de ces travées métalliques s’appuie d’une part sur une culée à une extrémité et à l’autre extrémité sur l’about en
porte-à-faux d’un pont en béton précontraint [62] [63].
Figure 65 : Élévation longitudinale du pont de Mathilde (les travées en acier sont en bleu)
Les pompiers sont intervenus très rapidement. Les importantes quantités de combustibles apportés sur le pont par
le camion-citerne ou présents dans les véhicules stationnés sous le pont ont entretenu le foyer durant une heure
trente environ. Les pompiers ont utilisé de l’eau pour refroidir le pont, ce qui a permis de limiter la température dans
la charpente métallique avant qu’elle n’atteigne la température critique de 725 °C environ, et a probablement sauvé
le pont.
Cette température est en effet celle au-dessus de laquelle l’austénite commence à se former. Par conséquent, si l’action
de refroidissement par arrosage n’est pas menée très rapidement, l’effet de trempe métallurgique sur un acier ayant
dépassé la température critique peut entraîner une fragilisation.
À température élevée, la limite d’élasticité d’un acier diminue. Si elle devient insuffisante par rapport aux contraintes
produites par les charges, la structure se déforme par plastification ou instabilité élastique. Ainsi, l’âme de la poutre
aval s’est déformée de façon impressionnante durant l’incendie : une diagonale tendue s’est formée sur une longueur
de 8 m à partir de la culée avec une onde pliant le premier montant intermédiaire à 4 m de la culée (cf. photo 28).
Indépendamment d’un secteur présentant des petits cratères de corrosion sur une longueur de 400 millimètres, et
excepté quelques secteurs à la jonction des âmes avec les membrures qui auraient nécessité des rechargements,
les soudures ont été jugées en bon état.
Par ailleurs, des examens déjà réalisés en 1998 (ressuage, magnétoscopie et ultra-sons) ont été reproduits selon
les mêmes protocoles sur les soudures d’attache des tôles additionnelles des membrures inférieures. Aucune dégradation
n’a été détectée.
Il convient de noter que les poutres du pont de Mathilde sont entièrement soudées : cette configuration a contribué à
la survie du pont car l’expérience montre que les assemblages boulonnés peuvent être le siège de dégradations graves
lors d’un incendie. Pour les cordons de soudure dont l’acier n’a pas subi de transformation métallurgique, la température
de l’incendie a même probablement amélioré leur résistance en les soulageant des contraintes résiduelles de fabrication
comme dans une opération de détensionnement.
Une de ces répliques a été effectuée côté extérieur dans le secteur directement arrosé par les sapeurs-pompiers.
Certains points sont sur des cordons de soudure. Un point de référence a été pris hors de la zone soumise à l’incendie
(cf. photo 30).
Les résultats se sont avérés très positifs car la structure observée est partout purement ferrito-perlitique sans trace de
martensite ou d’autre structure dégradée par une température excessive. Par ailleurs, l’Institut de Soudure souligne
l’absence de tout indice de fissuration lié à l’endommagement par fluage ou attaque par métaux liquides.
4.4.5.6 - Effet de la chaleur sur l’acier : Échantillons prélevés pour des essais Charpy
De multiples éprouvettes ont été prélevées pour essais Charpy dans les augets. Ces raidisseurs fermés du platelage
sont très redondants vis-à-vis de la stabilité de la structure incendiée, et de toute façon irrécupérables. On a aussi
prélevé des éprouvettes pour essais Charpy en extrémité des raidisseurs longitudinaux des âmes de la poutre aval
car ces prélèvements n’affaiblissent pas significativement la structure subsistante : prise sur le bord et orientée
parallèlement au raidisseur, l’entaille n’occasionne qu’une découpe d’un peu plus de 1 centimètre de profondeur. Ces
prélèvements de petite taille sont découpés à la scie refroidie à l’eau pour que la chaleur de la découpe ne fausse
pas les résultats (cf. photo 32).
Photo 32 : Prélèvement pour essai Charpy sur un raidisseur longitudinal du platelage
Un modèle longitudinal du pont entier par des barres a été réalisé avec les travées en béton précontraint sur l’Ile Lacroix
et les deux travées métalliques. L’inertie thermique des travées en béton est prise en compte. Ce modèle permet
d’expliquer les allongements observés avec l’hypothèse d’un frottement très petit au droit de l’appareil d’appui.
La figure représente en rouge la température extérieure qu’on suppose être également la température des travées
métalliques, et représente en vert la température des travées en béton en tenant compte de leur inertie thermique.
Les courbes des allongements calculés par le modèle permettent d’estimer le coefficient de frottement de l’appui
soumis à l’incendie à une valeur d’environ 30 %. L’hypothèse du non-blocage des appareils d’appui est donc une
hypothèse réaliste.
Ce premier calcul a permis d’expliquer la bonne tenue de l’ouvrage à vide avec des contraintes (Von Mises = 366 MPa)
restant alors dans le domaine élastique sous son poids propre pondéré par le coefficient 1,35 et en tenant compte
de l’effet des déformations géométriques importantes résiduelles de l’incendie. Un effort concomitant horizontal H
de 300 tonnes a été pris en compte par prudence pour tenir compte de frottement dans l’appareil d’appui car on ne
disposait pas encore au mois de décembre d’un long enregistrement des effets de la température sur les dilatations.
La figure 70 montre les contraintes sur les fibres extrêmes des coques les plus sollicitées.
Figure 70 : Calcul plastique - poids propre pondéré par 2 (échelle allant de 0 à 377 MPa)
Pour effectuer ce remplacement, le pont a été déposé par voie fluviale ( cf. photos 33), cette technique offrant de
nombreux avantages. Le pont est transporté à quai pour y être découpé et les parties endommagées sont remplacées
par des parties neuves.
Cette technique n’occasionne que très peu de gêne à la navigation sauf durant les deux journées de manœuvre pour
la dépose et la repose.
Ainsi, cette méthode présente moins de risques que la mise en œuvre d’une palée provisoire dans la Seine qui aurait
modifié profondément en phase provisoire le fonctionnement mécanique de la travée métallique en mettant le platelage
déformé et plié en traction avec un risque de déchirures au droit des plis.
Le lestage de la console béton précontraint permet aux consoles en encorbellement en béton précontraint de supporter
en l’absence de la travée métallique toute la précontrainte ayant été mise en tension par phases.
Les aléas de chantier sont plus réduits car toutes les contraintes liées au travail au-dessus de la Seine sont évitées,
d’où aussi une probable meilleure qualité d’exécution.
Cette technique ne cause donc pas de nuisance due au chantier en ville, notamment lors de la rénovation de l’ancienne
protection anticorrosion. Le décapage en ville au-dessus de la Seine aurait nécessité la mise en œuvre d’un platelage
engageant le gabarit de navigation et d’une enceinte de confinement pour assurer à la fois de bonnes conditions
d’hygiène, de sécurité et de protection de l’environnement
Photos 33 : Dépose de la travée centrale par barge pour remplacement partiel (1/3 de la travée)
Pour les six ouvrages principaux, la structure est composée de deux poutres sous chaussée en caissons de fortes sections
3,5 m de largeur par 3 ou 4 m de hauteur, reliées par une série de pièces de ponts de faibles sections espacées de
2,8 m environ. Les assemblages sont rivetés (cf. photo 34 et photo 35).
4.5.2 - L’incendie
Au cours de la nuit du 15 au 16 décembre 1988, un incendie s’est déclaré sous le caisson Ouest. Par principe de
précaution, le gestionnaire de l’ouvrage a logiquement décidé, avec l’avis des services de l’État, de fermer aussitôt
la rocade dans un sens de circulation, le sens intérieur.
Le foyer concernait des wagons stationnés sur des voies ferrées. Cet incendie s’est déclenché dans un dépôt de matériaux
de drainage très légers (6 tonnes pour 120 m3) mais dégageant une forte chaleur (7500 calories par gramme).
Les caissons des ouvrages étant situés à environ huit mètres au-dessus du sol, le feu peut être localisé entre trois et
huit mètres sous les ouvrages.
On estime que le feu a duré une vingtaine de minutes seulement. Il a pu être maîtrisé rapidement par les pompiers.
Ces fissures s’expliquent très facilement : les différents raidisseurs intérieurs du caisson étaient à une température
certainement bien inférieure à celle de la tôle de fond de caisson, ce qui a produit une dilatation différentielle qui a
eu tendance à déchirer l’âme du raidisseur vertical à son point faible. Ces contraintes thermiques se sont ajoutées aux
contraintes résiduelles de soudage non négligeables dans le cas de la disposition constructive figurée.
On peut évaluer la dilatation différentielle au niveau de ce raidisseur, de 300 millimètres, pour une différence de
température de 200 degrés :
Ce déplacement des appareils d’appui fixes ne peut être expliqué que d’une seule façon : l’incendie a provoqué un
échauffement et une dilatation de l’ouvrage qui a produit une extension vers le Sud, jusqu’à ce que l’ouvrage vienne
en butée sur la culée Sud. La poursuite de l’incendie et de la dilatation a produit alors un mouvement, qui n’a plus
pu avoir lieu que vers le Nord, provoquant le déplacement des appareils d’appui.
L’incendie n’ayant régné sur une vingtaine de mètres de longueur, on pourrait sous-estimer ces effets thermiques
en ignorant la diffusion rapide de la chaleur dans le métal. Mais il est très probable que, si la très forte élévation de
température de la structure n’a régné que sur une longueur aussi limitée, la diffusion de la chaleur jointe à la rétention
des gaz chauds entre les deux caissons de l’ouvrage d’une part, et dans les caissons d’autre part, ont provoqué
une élévation de température générale certainement supérieure à celle qui a été réglementairement prévue dans
la conception et les calculs de la structure.
De plus, un gradient de température dû à l’échauffement supérieur du fond de caisson par rapport au reste de
la structure s’est formé.
Mais il serait très difficile de fixer des valeurs précises pour ces différentes variations de température. Il est par contre
facile de montrer qu’on explique ainsi le mouvement des appareils d’appui.
Par ailleurs, en plus des cas de charges centrées initialement prévus qui ont été limités aux 3/4 des charges routières
réglementaires, des cas de charges excentrées sur chaque demi-ouvrage ont également été effectués pour solliciter
les caissons en torsion. Les essais ont ainsi permis de comparer le comportement de chaque caisson du pont bi-caisson
dont seul le caisson Ouest avait été directement exposé à l’incendie. Pour des raisons de sécurité, cette charge a été
installée par paliers successifs (une rangée de camions à la fois).
Ce niveau de charge élevé est bien adapté au cas des ponts métalliques en bi-caisson d'une rocade péri-urbaine, qui
sont parfois effectivement lourdement chargés par le trafic poids lourd. Rappelons qu’à l’époque de l’incendie, la masse
des charges d’épreuves de réception devait être comprise entre les 2/3 et les 3/4 des charges routières réglementaires.
Les flèches mesurées et immédiatement interprétées sur place étaient en accord avec celles résultant du calcul. Il
n’a pas été relevé de flèche résiduelle après déchargement ni de non-linéarités lors de l’application successive des
charges par paliers.
Enfin, il n’a pas été relevé de différence significative entre les comportements des caissons Est et Ouest, notamment
sous l’action des charges dissymétriques d’essai, alors que seul le caisson Ouest a été violemment soumis à l’incendie.
Dès le samedi 17 décembre 1988 au matin, après réunion d’un comité d’examen des épreuves, le pont a pu être
ré-ouvert à la circulation.
4.6.1 - L’ouvrage
Le viaduc construit dans les années 80 comporte 6 travées continues à poutre caisson en béton précontraint pour une
longueur totale de 567 m.
La plate-forme du tablier de 19,60 mètres de largeur comporte une pente transversale unique de 5 %. De ce fait,
l’évacuation des eaux a été prévue à l’intérieur du caisson pour le sens de circulation situé le plus en hauteur.
Précontrainte de l’ouvrage
La précontrainte longitudinale est mixte :
• précontrainte intérieure au béton constituée de câbles 19 T15 pour la précontrainte de fléau et de câbles 12 T15
pour la précontrainte de continuité.
• précontrainte extérieure au béton réalisée avec des câbles 19 T15 ancrés sur les entretoises des piles et culées,
déviés par des diaphragmes béton. Les câbles visibles à l’intérieur du caisson sont protégés par des gaines PEHD
(polyéthylène à haute densité) injectées au coulis de ciment.
Le hourdis supérieur est précontraint transversalement à l’aide de câbles 4 T15 (espacement de 60 cm en partie
courante et de l’ordre de 25 cm à l’approche des culées).
En dépit du foyer alimenté par l’essence enflammée sur et à l’intérieur de l’ouvrage, celui-ci ne présente pas de
déformation structurale. En effet, le poids propre de l’ouvrage est supporté par les câbles, intérieurs aux âmes en
béton, qui n’ont pas souffert de l’incendie.
Il n’y a pas eu de détérioration de la gaine en PEHD de la précontrainte extérieure à l’intérieur du caisson et on estime
donc que la perte de tension éventuelle sous l’effet de la chaleur a été limitée à la durée de l’incendie. Les canalisations
d’assainissement en PVC dans la zone touchée par l’incendie ont dû être en revanche remplacées.
La seconde phase de renforcement de la robustesse du pont est intervenue plus tard. Elle est recommandée pour
tous les ponts à précontrainte extérieure. Elle a consisté à déposer les anciennes canalisations en PVC du système
d’assainissement, y compris celles qui avaient été reprises après l’incendie. Elles ont été remplacées par des canalisations
en fonte sur toute la longueur de l’ouvrage.
Les canalisations et leurs accessoires sont en fonte et conformes à la norme NF EN 598 [65] et à la norme NF EN 877 [66].
« L’aléa » est le phénomène qui est à l’origine du risque, qui peut se produire ou non au cours de la vie de l’ouvrage.
Il est très important de noter que l’aléa est « incertain ». Un aléa est en toute rigueur caractérisé par sa probabilité
d’occurrence pendant une période de référence (on parle aussi de période de retour de l’événement qui peut être
décennale, centennale ou plus) et l’intensité de sa manifestation.
« La vulnérabilité » est la sensibilité de l’ouvrage vis-à-vis de l’aléa. Cette vulnérabilité dépend de l’aléa proprement
dit, mais aussi de l’ouvrage, car les ouvrages sont plus ou moins sensibles aux différents aléas. La vulnérabilité dépend
de plusieurs aspects : la conception de l’ouvrage, mais aussi son état réel pour un ouvrage existant. La vulnérabilité
peut s’évaluer suivant deux aspects : la vulnérabilité locale qui concerne le comportement des éléments de structure
directement soumis à l’aléa, et la vulnérabilité globale qui prend en compte la contribution d’autres éléments de
structure, pas directement exposés à l’aléa, mais pouvant reprendre une partie des efforts suite à la rupture de
l’élément soumis à l’aléa, et à la redistribution des efforts qui suit.
« La gravité des conséquences » (ou encore l’enjeu, ou l’importance) comptabilise les pertes de vies humaines et
les dommages directs à la fin de l’événement exceptionnel sur les ouvrages et les coûts de réparation associés. Ceci
inclut également les perturbations économiques et sociales qui découlent essentiellement des pertes d’exploitation
de l’infrastructure routière ou des installations et équipements desservis, mais aussi des atteintes à l’environnement.
Il est à noter que le document définit également la notion de « danger » (ou « criticité ») qui est une étape intermédiaire
de la démarche permettant de synthétiser les aspects « aléa » et « vulnérabilité ».
L’analyse des risques peut être complète (tous les aléas connus sont envisagés) ou partielle (un seul type d’aléa est
envisagé) pour restreindre l’analyse lorsqu’une famille d’ouvrage est par exemple particulièrement sensible à un aléa,
ou pour traiter un aléa spécifique (incendie, affouillement) sans compliquer l’analyse avec les autres aléas possibles.
Les différents concepts de l’analyse des risques présentée précédemment sont purement descriptifs et basés sur
l’observation des différents risques pouvant survenir sur une structure. L’étape suivante est nécessairement décisionnelle,
puisque l’analyse des risques est conduite dans le but d’évaluer un ouvrage ou un parc d’ouvrages pour éventuellement
prendre des mesures. Cette étape est appelée « maîtrise des risques » et inclut l’analyse des risques et le traitement
des risques évalués.
De manière succincte, cette méthodologie propose deux étapes de réflexion. Dans le cadre d’un patrimoine d’ouvrages,
la première étape est une analyse simplifiée appliquée systématiquement à tous les ouvrages et dont le but est de
mettre en évidence ceux qui présentent le risque le plus élevé. Pour ces ouvrages, en nombre faible a priori , une
seconde étape de gestion du risque consistant en une analyse détaillée est effectuée afin de mieux cerner le risque
réel et de le quantifier pour proposer des améliorations éventuelles.
Les deux analyses, simplifiée et détaillée, sont menées sur le même principe. La seule différence réside dans le niveau
de détail des évaluations menées et la sophistication des outils utilisés. Dans les deux cas, on évalue successivement
l’aléa (l’incendie), la vulnérabilité (comportement au feu de l’ouvrage) et la gravité des conséquences (dégâts humains,
matériels et économiques). Le niveau du risque résulte alors de ces trois facteurs et peut être évalué de manière
qualitative (matrice de risque) ou quantitative. L’analyse de risque dans le cas de l’incendie vise donc à évaluer ces
trois paramètres.
Les tableaux 4 et 5 ci-dessous synthétisent la méthodologie de l’analyse des risques qui comprend deux étapes,
l’appréciation du niveau de danger, puis l’appréciation du niveau de risque.
Tableau 4 : Croisement Aléa x Vulnérabilité = Danger Tableau 5 : Croisement Danger x Conséquences = Risque
Ce chapitre explicite une méthodologie pour apprécier le niveau du risque incendie sur un ouvrage donné ou sur un
parc d’ouvrages. Il s’agit de principes généraux qui ne sauraient couvrir l’ensemble des configurations et qui doivent
éventuellement être adaptés par les concepteurs et les gestionnaires aux cas particuliers de leurs ouvrages. Cette
méthode a été calibrée sur un échantillon représentatif d’ouvrages.
Les moyens d’évaluer l’aléa, la vulnérabilité et la gravité des conséquences et les méthodes pour combiner ces facteurs
et en déduire un indicateur simple sont détaillés dans les paragraphes suivants du présent chapitre.
Ces principes, moyens et méthodes sont donnés uniquement pour l’analyse simplifiée, le présent document n’abordant
pas l’étape de l’analyse détaillée.
Pour plus d’informations sur les phénomènes physiques lors de l’incendie, le lecteur est invité à se reporter aux
chapitres 2 et 3.
- identification et évaluation
Investigations
de l‘aléa
- vulnérabilité
- conséquences
Risque élevé
Risque Faible Risque Moyen
ou risque diificile à évaluer
Requalification Maintien en
du risque risque élevé
en faible ou
moyen
Cette base contient de nombreuses informations concernant 154 ponts incendiés dans différents pays : localisation,
type de structures, origine de l’incendie, position du feu par rapport à l’ouvrage, gravité des dommages observés.
Concernant les dommages, ceux-ci sont classés en cinq niveaux de gravité des désordres :
1 : Impact mineur
2 : Impact limité
3 : Dommages partiels (ouvrage réparable)
4 : Dommages majeurs (cas du Pont Mathilde à Rouen par exemple)
5 : Ruine
Il ressort les principales analyses suivantes basée sur cet indice de gravité :
A) Les ponts incendiés se situent majoritairement en zone urbaine ou suburbaine (2/3 des cas) et les feux avec foyer
sous l’ouvrage sous plus fréquents (60% des cas) que les feux avec foyers sur ouvrage (40% des cas). Hors ponts en
bois, les dommages occasionnés sur les ponts en milieu rural (indice de gravité moyen de 2,61) sont supérieurs à
ceux occasionnés aux pont urbains (indice de gravité moyen de 2,21), probablement du fait des délais d’intervention
nécessaires aux pompiers. Cependant, sous feu de camions citernes, les indices de dégâts sont par contre très voisins
du fait de la puissance des feux.
B) Les dommages les plus importants (indice de gravité 4 et 5) sont dus de manière très majoritaire à des incendies
de camions citernes transportant des hydrocarbures. Les conséquences de l’incendie de voitures (indice de gravité
moyen de 1,08) ou de poids lourds (indice de gravité moyen de 1,57) sont très faibles au regard des désordres induits
par les camions citerne (indice de gravité moyen de 3,06). C’est cet aléa qui doit principalement être pris en compte
dans une démarche de prévention des risques, sauf, bien sûr lorsque leur circulation est interdite.
C) Les délais de remise en état des dommages d’indice de gravité 4 est en moyenne de 5 mois (hors ponts en bois).
D) Les feux sous ouvrage sont très nettement plus graves (indice de gravité moyen de 2,64) que les feux situés sur
ouvrage (indice de gravité moyen de 1,7) du fait que les structures porteuses sont très majoritairement situées sous la
chaussée. Les feux situés sur ouvrages peuvent parfois (dans environ 25% des cas) du fait d’écoulements de liquides
inflammables occasionner un foyer sous l’ouvrage et dans ces cas, les désordres observés sont particulièrement graves
(indice de gravité moyen de 3,7).
E) Vis-à-vis du risque de ruine de l’ouvrage sous incendie, il ressort que les ponts en bois, fortement présents aux
Etats Unis, présentent une résistance aux incendies nettement inférieure à celle des ponts en acier ou en béton. Les
ponts métalliques s’avèrent aussi plus sensibles que les ponts en béton. Selon cette base, sur la période observée,
tous les ponts ruinés (vingt-quatre ouvrages) sont soit en bois (15 ruines) soit en métal (9 ruines). Ceci ne signifie
aucunement que la ruine des ponts en béton est impossible, mais elle reste très rare, ce fut par exemple le cas du
pont d’Atlanta sur l’Interstate 85 qui s’effondra en 2017.
F) Vis-à-vis des désordres induits sur les structures, il ressort que tous les matériaux souffrent gravement de l’incendie,
l’acier comme le béton. Sous feu de camions citernes situés sous ouvrage, les désordres sur les ponts à poutres en
béton ont un indice de gravité moyen de 3,45 contre un indice de 3,9 pour les ponts à poutres en acier (ou mixtes).
La raison provient de la plus grande conductivité thermique de l’acier ainsi que des faibles épaisseurs des pièces
constituant les structures métalliques.
1.4.1 - Principes
L’analyse simplifiée peut mener à trois niveaux de risque :
• risque faible : dans ce cas, aucune disposition particulière n’est à envisager ;
• risque moyen : pour un ouvrage à construire, on peut rendre l’ouvrage moins vulnérable (augmenter les enrobages,
les épaisseurs de charpente métallique) ou réduire l’aléa après une analyse plus détaillée. Pour un ouvrage existant,
la réduction de vulnérabilité est généralement d’un coût élevé. Une analyse détaillée peut être utile pour évaluer
plus précisément les facteurs influents ;
• risque élevé : une analyse détaillée s’impose pour évaluer plus précisément les facteurs prépondérants (ouvrages
neufs ou existants).
L’aléa incendie est défini de manière simplifiée, en définissant un « niveau d’aléa » (faible, moyen, élevé) en fonction
d’un certain nombre de facteurs (trafic poids-lourds (PL), présence de matières dangereuses, conditions accidentogènes
particulières, habitations sous ouvrages, etc.).
Le niveau de l’aléa d’un incendie peut être différent suivant que celui-ci a lieu sur ou sous l’ouvrage. Par exemple,
parmi les facteurs ayant une importante influence sur l’aléa, on trouve les niveaux du trafic routier poids lourds qui
peuvent être différents pour les voies portées et les voies franchies. De plus, sous ouvrage, le type d’occupations
permanentes ou temporaires est aussi déterminant.
On se doit donc de distinguer deux cas en évaluant un aléa d’incendie sur ouvrage et un aléa d’incendie sous ouvrage.
Or le niveau de l’aléa d’un incendie sous ouvrage dépend de la hauteur libre sous l’ouvrage, pour le tablier en tout
cas mais pas pour les appuis.
Pour les ponts dont l’intérieur est accessible, le risque doit être considéré comme élevé. La réduction de l’aléa passe
obligatoirement par leur fermeture avec un système anti-intrusion efficace.
De même, pour les ponts pour lesquels les eaux récupérées sur le tablier transitent par l’intérieur de l’ouvrage le risque
doit être considéré comme élevé.
La vulnérabilité est établie de manière simplifiée, sans calcul, mais en prenant en compte notre connaissance des
structures (à dire d’expert). Pour un ouvrage donné, la vulnérabilité peut être différente suivant que l’incendie peut
atteindre les appuis, la structure porteuse ou pas. On distinguera donc là aussi trois familles de vulnérabilité :
• la vulnérabilité d’un ouvrage pour un incendie sur l’ouvrage ;
• la vulnérabilité du tablier pour un incendie sous l’ouvrage ;
• la vulnérabilité des appuis pour un incendie sous l’ouvrage.
Les ouvrages sont répartis en trois classes de vulnérabilité (faible, moyenne ou élevée) en fonction de leur conception
(cf. paragraphe 1.4.3). Pour les ouvrages existants, il peut être utile de modifier ce classement pour prendre en compte
l’état réel de l’ouvrage.
Les conséquences sont également définies de manière qualitative et simplifiée (élevées – moyennes – faibles).
L’analyse simplifiée des risques a pour objectif de faire un premier tri dans un patrimoine d’ouvrages existants, ou
d’orienter les études pour un ouvrage neuf. Elle est calibrée pour faire ressortir les cas les plus critiques (qui concernent,
normalement, un faible pourcentage d’un parc d’ouvrages).
Lorsque le risque est qualifié de faible ou de moyen mais qu’un certain nombre de dispositions sont prises
(cf. paragraphe 2 du présent chapitre), l’analyse peut s’arrêter au niveau simplifié. Dans les autres cas, une analyse
plus détaillée peut être menée (cf. paragraphe 1.5 du présent chapitre).
Cas du tablier
Comme pour l’aléa d’un incendie sur ouvrage, on retrouve, pour l’aléa d’un incendie sous ouvrage, les quatre premiers
critères définis précédemment ; ici le trafic, le caractère accidentogène et la présence de transports de matières
dangereuses concernent la (les) voie(s) franchies, le critère D lié à la présence de conduite de gaz portée par l’ouvrage
concerne lui toujours la voie portée. On rappelle que si l’ouvrage franchit une conduite de gaz, cette situation est
prise en compte dans le critère supplémentaire lié à l’environnement de la zone franchie. Les niveaux de ce critère
et les valeurs attribuées à chacun d’entre eux sont définis dans le tableau 12.
Un paramètre supplémentaire intervient dans la qualification de l’aléa d’un incendie sous ouvrage, il s’agit de la hauteur
libre H sous ouvrage. En effet, au-delà d’une certaine hauteur, l’effet des températures de l’incendie est négligeable.
On considèrera qu’au-delà de 15 m de hauteur libre sous ouvrage l’incendie d’un poids-lourd ne se fait plus ressentir.
Dans le cas d’un incendie de matières dangereuses (circulation de TMD ou franchissement d’une station essence)
la hauteur de 15 m est portée à 25 m au moins, voire plus pour une conduite de gaz (Hgaz-lim qui reste à déterminer
par une étude spécifique). Ceci amène à pondérer :
• les critères A, B et C précédents rattachés au trafic par un coefficient aH égal à 0 ou 1 suivant la hauteur H et
la circulation ou pas de TMD sous l’ouvrage ;
• le critère D est indépendant de la hauteur libre sous l’ouvrage puisque la conduite de gaz est portée directement
par le tablier ;
• le critère E par un coefficient gH égal à 0 ou 1 suivant la hauteur H et la présence ou pas, sous l’ouvrage, d’une
station essence ou d’une conduite de gaz.
L’indice de l’aléa (IA2) incendie sous ouvrage pour le tablier est donc obtenu par la formule suivante :
Enfin, on notera que les valeurs précédentes sont valables pour des ouvrages de largeurs classiques. Plus le rapport
entre la largeur de l’ouvrage d’une part, et les dimensions transversales (largeur et hauteur libre) de la voie franchie,
d’autre part, est important, plus on se rapproche de la problématique des tunnels. Pour les ouvrages très larges
(> 30 m), la probabilité d’un incendie sous l’ouvrage est plus forte et les températures atteintes lors de cet incendie
seront plus élevées. Pour ces ouvrages, la valeur de l’aléa devra donc être majorée de 1.
Niveaux de l'aléa d’un incendie sous Niveaux de l'aléa d’un incendie sous
Indice IA2
l’ouvrage pour le tablier (avec TMD) l’ouvrage pour le tablier (sans TMD)
Indice ≤ 3 Faible Nul
4 ≤ Indice ≤ 6 Moyen Faible
7 ≤ Indice Élevé Moyen
Tableau 14 : Seuils de classement de l’aléa pour un incendie sous le pont (tablier)
On considère en général qu’au-delà de 5 m de distance horizontale, l’incendie d’un poids lourd n’a plus d’influence
sur un élément de structure.
Dans le cas de la circulation de poids lourds, si la chaussée est encadrée par des dispositifs de retenue de niveau H2,
on pourra, par exemple, considérer l’effet des incendies comme négligeable si la distance appuis-dispositifs H2 est
supérieure à environ 5 m et donc prendre ad = 1 si d < 5 m et ad = 0 si d > 5 m.
L’indice de l’aléa sous ouvrage pour les appuis (IA3) est donc obtenu par la formule suivante :
Enfin, on notera que les valeurs précédentes sont valables pour des ouvrages de largeur classique. Pour les ouvrages
très larges (>30 m), la valeur de l’aléa devra donc être majorée de 1.
Indice IA3 Niveaux de l’aléa d’un incendie sous l’ouvrage pour les appuis
Indice ≤ 3 Faible
4 ≤ Indice ≤ 6 Moyen
7 ≤ Indice Élevé
Tableau 15 : Seuils de classement de l’aléa pour un incendie sous le pont (appuis)
Les appareils d’appui peuvent poser des problèmes structurels après l’incendie s’ils sont détériorés ou bloqués. Mais
en général, ils ne concourent pas à la vulnérabilité durant l’incendie.
On classe les différents types de structure en fonction des matériaux utilisés. Le tableau 16 indique les niveaux de
vulnérabilité pour un incendie sur ouvrage et sous ouvrage (pour le tablier). Il s’agit d’une vulnérabilité globale (sous-
entendu de la portance de l’ouvrage) qui conditionne la tenue de l’ouvrage pendant l’incendie. L’ouvrage peut également
présenter des vulnérabilités locales susceptibles d’affecter sa remise en exploitation, par exemple, précontrainte
transversale des hourdis des VIPP de la première génération pour un incendie sur ou sous ouvrage.
On trouve en annexe 2 un tableau récapitulant pour chaque type d’ouvrage de la méthode IQOA (Image Qualité
Ouvrage d’Art méthode d’évaluation de l’état des ouvrages), les classes de vulnérabilité proposée pour les deux
familles « incendies sur ouvrage » et « incendie sous ouvrage ».
La vulnérabilité des appuis peut aussi être prise en compte suivant le même principe. On détermine la classe de
vulnérabilité en fonction du matériau des appuis selon le tableau 17.
Appuis
Matériaux Vulnérabilité
Métal Elevée
Béton précontraint Elevée
Béton armé Moyen
Maçonnerie Faible
Aucun Nulle
Tableau 17 : Niveaux de vulnérabilité pour un incendie sous ouvrage (pour les appuis)
Nota : les piles marteaux en béton précontraint sont particulièrement vulnérables car elles ne présentent pas de
redondances.
A noter que les pylônes au-dessus de la structure porteuse (cas des ponts à haubans ou suspendus) sont considérés
comme faisant partie de la structure porteuse.
Pour les ponts routiers, il a été retenu une méthode simplifiée d’évaluation de la gravité des conséquences qui repose
essentiellement sur des critères socio-économiques représentatifs.
La méthode d’évaluation consiste à définir un indice de priorité socio-économique (ISE) tel que développé dans
le guide du Cerema de mai 2006 « Guide pour la gestion des ouvrages d’art à l’usage des départements et autres
collectivités » [69].
Cet indice est conçu pour refléter le niveau d’intérêt que présentent les ouvrages - selon le jugement du maître
d’ouvrage - d’un point de vue stratégique, politique, économique, social, culturel, etc.
L’indice ISE est défini suivant une échelle allant de 1 à 5. Il vaut 1 lorsque l’ouvrage considéré est peu stratégique.
Le maître d’ouvrage attribue à l’indice ISE la valeur maximale de 5 lorsque l’ouvrage présente un intérêt majeur.
Les conséquences humaines sont jugées au même degré d’inadmissibilité pour l’ensemble du patrimoine. Elles ne
permettent pas de discriminer les ouvrages. Dans la méthode détaillée, on peut faire intervenir le facteur humain en
fonction des niveaux de pertes humaines.
Si l’on n’y prend pas garde, certains critères peuvent inclure totalement ou partiellement d’autres critères également
sélectionnés, et donc conduire à des comptes doubles, voire triples, qui diminueraient fortement l’influence des
autres paramètres. Une étude de sensibilité des critères et des coefficients pondérateurs choisis paraît donc un
préalable indispensable à la réalisation de la deuxième étape.
A. classification du réseau
Hiérarchisation du réseau : critère dépendant de la catégorie de l’itinéraire porté par l’ouvrage.
B. enjeux
Habituellement, ce critère fait reposer le niveau d’importance des enjeux sur le trafic routier de la voie portée.
Or le volume du trafic intervient déjà dans la qualification de l’aléa, pour éviter de surévaluer ce paramètre, il ne sera
pas pris en compte dans ce critère B.
On pourra adopter d’autres critères n’intervenant pas dans l’aléa tel que :
• rôle de desserte de l’ouvrage : activité économique, touristique, etc. ;
• enjeux particuliers : importance de la voie franchie, ouvrage supportant un réseau d’intérêt national.
C. valeur patrimoniale
Valeur de reconstruction : coût de la construction d’un ouvrage garantissant le même niveau de service
Tableau 19 : Croisement Aléa incendie sur OA, sous OA pour le tablier ou sous OA pour les appuis x Vulnérabilité incendie
sur OA= Danger incendie sur OA
Dans un troisième temps, on croise le niveau de danger ainsi obtenu et le niveau des conséquences, ce qui donne
le niveau de risque du tableau 20.
Conséquences
Risque
Faibles Moyennes Elevées
Pour les ouvrages sensibles, les ouvrages situés dans une zone pour laquelle a été établi un Plan de Prévention des
Risques (PPR), les ouvrages situés à proximité d’installations classées, etc., l’analyse détaillée peut être élargie à
une étude de type « étude spécifique des dangers (ESD) », à l’image de celle réalisée pour les dossiers de sécurité
en tunnel. Basée notamment sur le retour d’expérience relatif aux incidents et accidents significatifs, elle décrit
les accidents susceptibles de se produire durant la phase d’exploitation, quelle qu’en soit l’origine ainsi que la nature
des conséquences possibles. Elle précise les mesures propres à réduire la probabilité que ces accidents ne surviennent
ainsi que les conséquences de ces accidents.
On renvoie le lecteur aux documents du CETU décrivant l’ESD [2] et son processus d’élaboration, ainsi qu’à la norme
NF ISO 16732-1 « Ingénierie de la sécurité incendie – Evaluation du risque d’incendie – Partie 1 : Généralités » [70].
Ces stratégies jouent sur les trois leviers de l’analyse de risque : l’aléa, la vulnérabilité et les conséquences.
Lorsque le risque est considéré comme moyen, il est recommandé de réduire l’aléa, la vulnérabilité ou les conséquences
pour aboutir à un risque faible dans le cas d’un ouvrage à construire. Pour un ouvrage existant, on recommande de
prendre des mesures permettant de diminuer le niveau de risque pour autant que ces mesures ne soient pas trop
lourdes et qu’elles soient économiquement acceptables.
Lorsque le risque est considéré comme élevé, il est recommandé de réduire l’aléa, la vulnérabilité ou les conséquences
pour aboutir à un risque faible dans le cas d’un ouvrage à construire ou à un risque faible ou moyen dans le cas d’un
ouvrage existant.
Ces indications sont évidemment à adapter aux différents cas particuliers. En effet, il convient de distinguer, d’une part,
le risque humain lié à l’incendie et à ses conséquences directes et, d’autre part, le risque économique lié à la perte
de l’ouvrage ou à sa fermeture provisoire.
• la mise en œuvre de mesures réduisant le risque est obligatoire quand les conséquences humaines s’avèrent
inacceptables. En pratique, il convient de concevoir des ouvrages neufs ou de protéger les ouvrages existants pour
qu’ils aient au moins une durée minimale de résistance à l’incendie permettant l’évacuation des usagers. Cette
durée est très sensiblement plus courte que dans le cas des tunnels ;
• dans le cas contraire, le coût des dispositions doit être en rapport avec l’évaluation des conséquences économiques
attendues. Des conceptions ou protections plus lourdes, permettant une résistance de l’ouvrage pendant le temps
de l’action des pompiers (2 heures par exemple) sont à étudier vis-à-vis du critère économique.
Par exemple, en Allemagne, la travée de l’ouvrage en bois de la photo 38 a été accidentellement incendiée et a dû
être entièrement reconstruite. Il est désormais strictement interdit de camper ou d'allumer des feux sous l’ouvrage
et celui-ci fait l’objet d’une surveillance particulière à cet égard.
Pour les ponts en béton, l’enrobage des aciers passifs participe beaucoup à la résistance de l’ensemble et peut être
augmenté pour diminuer les températures atteintes par les aciers passifs lors d’un incendie.
Il est également possible de recourir à un béton fibré (fibres plastiques de polypropylène par exemple, uniquement
pour empêcher l’écaillage) comme composant naturel des structures en béton armé ou précontraint.
Pour les structures mixtes, la vitesse de montée en température dépend du facteur de massivité (ou surface spécifique)
de l’élément métallique, inversement proportionnel à l’épaisseur. Il est donc possible soit d’augmenter les épaisseurs
des éléments, soit de préférer des éléments moins larges et plus épais par rapport à des éléments élancés. Dans ce
cas, on améliorera aussi le comportement aux instabilités. Il ne faut cependant pas oublier que la limite élastique de
l’acier peut diminuer en fonction de l’épaisseur.
Il est également possible d’améliorer le comportement au feu en surdimensionnant les sections. Les matériaux
travailleront à un taux plus faible et il faudra donc plus de temps pour que la résistance diminuée du fait de l’incendie
soit inférieure à la contrainte réelle au sein de ceux-ci. Ce principe est bien sûr peu économique, surtout dans le cas
des structures mixtes.
Ce n’est pas parce qu’une résistance est dépassée dans une section que la stabilité de l’ouvrage n’est plus assurée. Des
redistributions peuvent être possibles à condition que les ouvrages aient été conçus dans ce sens, avec suffisamment
de robustesse. Les moyens pour conférer à l’ouvrage une robustesse suffisante lui permettant de mieux résister aux
effets d’un incendie localisé sont les suivants :
• assurer la redondance des éléments potentiellement en contact avec l’incendie ;
• faciliter les redistributions plastiques ;
• utiliser des matériaux plus ductiles (utilisation d’aciers ductiles, par exemple armatures en béton armé de classe C,
confiner le béton) ;
• rendre l’ouvrage plus hyperstatique, encastrer sur culée ou sur appui ;
• utiliser le soudage à la place du boulonnage ;
• empêcher l’effondrement en chaîne à défaut de pouvoir empêcher l’effondrement local.
La méthode la plus économique pour améliorer le comportement au feu d’un ouvrage existant est de protéger
les éléments porteurs. Plusieurs systèmes existent, correspondant à des domaines d’emploi spécifiques. Il convient
de vérifier qu’ils présentent les garanties suffisantes (essais certifiés par un laboratoire agréé en résistance au feu). Il
faut noter que les produits résistants à la courbe Hydrocarbure Majorée (HCM) ( cf. chapitre 1 paragraphe 2.1) sont plus
rares. Le guide « Systèmes de protection passive contre l’incendie – Justification des performances pour les structures
de tunnel routier » [71] fournit des éléments utiles à la justification et à l’acceptation des systèmes de protections
passives (protections par plaques ou par matériaux projetés).
• béton/mortier projeté ou autres revêtements mis en place par flocage sur ouvrages d’art existants.
Le flocage est un procédé de recouvrement par projection qui est couramment utilisé dans le domaine du bâtiment
pour améliorer l’isolation thermique, la protection acoustique mais également pour la protection incendie passive.
Les revêtements projetés sont subdivisés en systèmes pâteux ou fibreux.
Le flocage peut aussi bien être réalisé sur des structures métalliques que sur des structures béton.
Le premier inconvénient de tous ces matériaux de protection est leur tenue dans le temps, en général inférieure
à la durée de vie des ponts, ce qui nécessite leur remplacement périodique. Ceci doit être intégré dans l’analyse
économique réalisée au moment du choix.
Le second inconvénient est que certaines protections cachent les éléments porteurs qui ne sont plus visitables et
constituent ainsi un obstacle à la réalisation de la surveillance de l’ouvrage. Les plaques rajoutées sur un ouvrage béton
ne permettent pas, par exemple, de déceler l’apparition de fissures dans la structure. Lorsque le système empêche
nettement d’évaluer l’état de la structure, il faut qu’il soit démontable. Ceci doit être aussi intégré dans le coût de
la protection surtout si le seul moyen de démonter la protection est de la détruire. La mise en place d’un système de
protection sur les parties sensibles (limitées en nombre) d’un ouvrage est une mesure qui peut être réalisée à peu de
frais et facilement si les parties sensibles sont accessibles sans trop perturber la circulation.
A l’inverse, la mise en place d’une protection générale sur tout l’ouvrage et résistante à un incendie d’hydrocarbure
est une mesure lourde et très onéreuse, qui ne s’impose pas systématiquement si le risque est seulement moyen.
[1] NF ISO 23932 : Ingénierie de la sécurité incendie - Principes généraux, août 2009.
[2] CETU, Guide des dossiers de sécurité des tunnels routiers : Fascicule 4 - Les études spécifiques des dangers
(ESD), septembre 2003.
[3] CETU, Comportement au feu des tunnels routiers - Guide méthodologique, mars 2005.
[4] CETU, Comportement au feu des tunnels routiers - Compléments au guide de 2005, mars 2011.
[5] UTE Union Technique de l’Electricité et de la Communication, UTE C17-108 : GUIDE PRATIQUE : Analyse simplifiée
du risque foudre, avril 2006.
[6] NF EN 1991-1-2 : Eurocode 1 : Actions sur les structures - Partie 1-2 : actions générales - Actions sur
les structures exposées au feu, juillet 2003.
[7] INERIS, Méthodes pour l’évaluation et la prévention des risques accidentels (DRA-006) - Feux de nappe, Octobre
2002.
[8] NF EN 1993-1-2 : Eurocode 3 : Calcul des structures en acier - Partie 1-2 : règles générales - Calcul du
comportement au feu, novembre 2005.
[9] NF EN 1994-1-2 : Eurocode 4 : Calcul des structures mixtes acier-béton - Partie 1-2 : règles générales - Calcul du
comportement au feu, février 2006.
[10] NF EN 1992-1-2 : Eurocode 2 : Calcul des structures en béton - Partie 1-2 : règles générales - Calcul du
comportement au feu, octobre 2005.
[11] NF EN 1992-1-2/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1992-1-2:2005, octobre 2007.
[12] DTU P92-701 : Règles de calcul FB - Méthode de prévision par le calcul du comportement au feu des structures
en béton, décembre 1993.
[13] NF EN 1992-1-1 : Eurocode 2 : Calcul des structures en béton - Partie 1-1 : règles générales et règles pour
les bâtiments, octobre 2005.
[14] NF EN 1992-1-1/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1992-1-1:2005, mars 2016.
[15] NF EN 1991-1-2/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1991-1-2, février 2007.
[16] NF EN 1993-1-2/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1993-1-2:2005, octobre 2007.
[17] NF EN 1994-1-2/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1994-1-2:2006, octobre 2007.
[18] NF EN 1993-1-1 : Eurocode 3 : Calcul des structures en acier - Partie 1-1 : Règles générales et règles pour
les bâtiments, octobre 2005.
[19] NF EN 1993-1-1/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1993-1-1:2005, août 2013.
[20] NF EN 1993-2 : Eurocode 3 : Calcul des structures en acier - Partie 2 : Ponts métalliques, mars 2007.
[21] NF EN 1993-2/NA : Annexe Nationale à la NF EN 1993-2:2007, décembre 2007.
[22] Sétra, Guide méthodologique « Eurocodes 3 et 4 - Application aux ponts-routes mixtes acier-béton », juillet 2007.
[23] J.-M. Franssen et P. Vila Real, Fire Design of Steel Structures - ECCS Design manuals, Ernst & Sohn, mai 2010.
[24] API 579-1/ASME FFS-1 : Fitness-For-Service - Part 11 « Assessment of Fire Damage », juin 2007.
[25] NF EN 10025-4 : Produits laminés à chaud en aciers de construction - Partie 4 : conditions techniques de
livraison pour les aciers de construction soudables à grains fins obtenus par laminage thermomécanique, mars
2005.
[26] FD CEN/TR 10347 : Guide pour le formage des aciers de construction lors de leur mise en oeuvre, février 2008.
Préambule
L’étude, dont cette annexe constitue une synthèse rapide, reste une étude préliminaire qui devra être complétée afin
de s’assurer que le mode opératoire utilisé est représentatif de la réalité. Notamment, l’étude de l’interaction entre
la nature de l’incendie (durée, température, vitesse de montée en température, moyen d’extinction, combustible...)
et la dégradation de la protection anticorrosion n’a pas été menée. Enfin, la taille des échantillons est ici réduite et
limite l’effet de l’inertie des réactions de dégradations et de la conductivité thermique qui peuvent intervenir sur un
ouvrage incendié.
En conséquence, le présent document ne permet pas d’établir une corrélation entre l’aspect d’une peinture d’un
ouvrage incendié et la température maximale atteinte lors de l’incendie.
1/ Protocole d’essai
L’essai a pour objet de soumettre une pièce métallique revêtue d’un système de protection anticorrosion à une montée
en température dans un four à moufles.
L’essai simule la montée en température d’un incendie, et permet d’observer l’évolution d’aspect de différents systèmes.
Chaque échantillon est placé dans le four et subit une montée en température de 0 °C jusqu’à 1 000 °C.
Cette montée en température est réalisée par palier de 100 °C. À chaque palier, la température est maintenue pendant
45 minutes, puis l’échantillon est observé et photographié avant passage au palier suivant.
2/ Échantillons testés
Les systèmes de protection anticorrosion suivants ont été testés :
• revêtement au plomb ;
Ce système comporte une couche primaire de 40 µm de glycérophtalique minium de plomb orange, une 2 e couche
de composition similaire mais de couleur marron, une 3 e couche de peinture glycérophtalique gris foncé et une
couche de finition également en glycérophtalique de couleur gris clair.
Pour chacun des systèmes, les observations et photographies correspondantes de l’essai sont exposées ci-après.
-
0°
(état initial)
Photo A1
Photo A2
Photo A3
NB : la métallisation
en sous-face est devenue
bleue.
Photos A4 et A5
Photo A6
500°
Fort craquelage,
décollement généralisé
avec formation de gros
copeaux
Photo A7
Photo A8
Photo A9
Propagation de la couleur
800°
jaune pâle
Photo A10
Propagation de la couleur
900°
jaune pâle
Photo A11
Photo A12
-
État initial : 4 couches
0° numérotées 1
(primaire minium de
plomb) à 4 (finition)
Photo A13
Photo A14
Toutes les couches
sont plus foncées,
sauf couche 3.
200°
Apparition de quelques
petites cloques sur toutes
les couches, sauf couche 1
Photo A15
Revêtement marron
300° très foncé, presque
uniformément noir
Photo A16
Photo A18
Éclaircissement général
(particulièrement
couche 3)
600°
Augmentation des
craquelures
Photo A19
Éclaircissement général
700° La couche 4 est devenue
blanche.
Photo A20
Éclaircissement
des couches 1 et 2
(couche 1 minium
800° de plomb blanche, très
légèrement orangé)
Les couches 3 et 4 sont
plus foncées
Photo A21
Noircissement général
La couche 1 (minium de
plomb) n’est plus orangée
mais grise.
900°
La couche 1 (minium
de plomb) n’est plus
adhérente au support
(tout le revêtement est
décollé du support).
Photo A22
Photo A23
-
0°
(état initial)
Photo A24
Photo A25
Photo A26
Photo A27
Revêtement noir
Photo A28
Revêtement noir
Gonflement du film
(cloque sur l’ensemble
de l’échantillon)
500°
Après refroidissement
total de l’échantillon :
apparition de petits
morceaux de couleur
blanche-rouille
Photo A29
600°
Désagrégation du film
superficiel : formation
de petits copeaux
Photo A30
Photo A31
Photo A32
Revêtement orangé
1000° très clair
Craquelures
Photo A33
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150 Notes
Notes :
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Notes 151
© 2018 - Cerema
Le Cerema est un établissement public, créé en 2014 pour apporter un appui scientifique et technique renforcé dans l’élaboration,
la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques de l’aménagement et du développement durables. Centre d’études et
d’expertise, il a pour vocation de diffuser des connaissances et savoirs scientifiques et techniques ainsi que des solutions innovantes
au cœur des projets territoriaux pour améliorer le cadre de vie des citoyens. Alliant à la fois expertise et transversalité, il met à
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naturelles - Prévention des risques - Bien-être et réduction des nuisances - Mobilité et transport - Infrastructures de transport - Habitat et bâtiment
Prix : 70 €
ISSN : 2276-0164
ISBN : 978-2-37180-281-0
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