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Brésil(s)

Sciences humaines et sociales


1 | 2018
Comprendre la crise au Brésil

Une criminalisation de l’éducation au Brésil ?


Uma criminalização da educação no Brasil?
The Criminalization of Education in Brazil?

Luis Felipe Miguel


Traducteur : Anaïs Fléchet

Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/bresils/2856
DOI : 10.4000/bresils.2856
ISSN : 2425-231X

Éditeur
Editions de la maison des sciences de l'homme

Édition imprimée
ISBN : 978-2-7351-2065-9
ISSN : 2257-0543

Ce document vous est offert par Université Paris 8

Référence électronique
Luis Felipe Miguel, « Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? », Brésil(s) [En ligne], 1 | 2018, mis en
ligne le 16 juillet 2018, consulté le 24 janvier 2019. URL : http://journals.openedition.org/bresils/2856 ;
DOI : 10.4000/bresils.2856

Ce document a été généré automatiquement le 24 janvier 2019.

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d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? 1

Une criminalisation de l’éducation


au Brésil ?
Uma criminalização da educação no Brasil?
The Criminalization of Education in Brazil?

Luis Felipe Miguel


Traduction : Anaïs Fléchet

1 La montée en puissance des opinions conservatrices est l’une des caractéristiques les plus
notables de la crise politique brésilienne des années 20101. Depuis la fin de la dictature
militaire, la lutte contre les inégalités et pour la défense des droits humains a longtemps
fait consensus – dans les paroles, au moins – parmi les principales forces politiques du
pays. Aujourd’hui, on note au contraire la présence significative de discours exaltant
l’inégalité, présentée comme le corollaire de la « méritocratie », et dénonçant la volonté
de rompre avec les hiérarchies traditionnelles comme un crime contre nature. Ces
positions ont fait partie des thèmes favoris de la coalition à l’origine du coup d’État
parlementaire de mai 2016. Jusqu’alors les politiques de désengagement de l’État étaient
dénoncées car génératrices d’inégalités. Ceux qui, malgré tout, les justifiaient soutenaient
qu’à moyen et à long terme ces défauts passagers seraient corrigés. L’égalité politique et
la défense des droits humains étaient toujours présentées comme des objectifs des
gouvernements au pouvoir, même pour les moins progressistes
2 Les discours réactionnaires sont nés, dans le cas brésilien, de la combinaison inédite de
l’ultra-libéralisme, du fondamentalisme religieux et d’un vieil anticommunisme.
L’idéologie ultralibérale, diffusée en Amérique latine par le biais notamment de
fondations états-uniennes, plaide pour un minimum d’État et affirme que toute situation
née des mécanismes du marché est, par définition, équitable bien qu’elle puisse paraître
inégalitaire. Le fondamentalisme religieux est devenu une force politique au Brésil dans
les années 1990, avec l’investissement du champ électoral par les Églises néo-
pentecôtistes mais aussi par le secteur le plus conservateur de l’Église catholique.
L’anticommunisme, qui semblait pourtant devoir s’éteindre avec la fin de la guerre froide,
a revêtu de nouveaux habits avec la menace du « bolivarisme » (la doctrine du président

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Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? 2

vénézuélien défunt, Hugo Chávez) et du Forum de São Paulo (Foro de São Paulo), un
rassemblement de partis de gauche et de centre-gauche perçu par ses adversaires comme
une vaste conspiration visant à dominer le continent. En dépit d’une pratique modérée du
pouvoir, le Parti des travailleurs (Partido dos Trabalhadores – PT) a été présenté comme
l’incarnation du communisme au Brésil, dans un récit superposant anticommunisme et
anti-pétisme. Parmi ces trois courants, seuls les fondamentalistes possèdent un groupe
organisé (bancada) au Congrès national2. L’ultralibéralisme caractérise l’action de certains
députés, mais il s’agit plutôt d’un discours diffus que d’une action politique coordonnée.
L’anticommunisme radical a des porte-voix au Parlement, notamment l’ex-capitaine Jair
Bolsonaro et son fils Eduardo Bolsonaro, mais ils font figure d’exception. Dans l’ensemble,
ce type de discours fonctionne plus comme une toile de fond que comme la ligne
directrice de l’action politique.
3 Le tournant conservateur a donné une visibilité inédite à des organisations qui militent
contre « l’endoctrinement idéologique » dans les écoles et entendent empêcher les
professeurs d’exprimer des opinions « impropres » dans les salles de cours. Le
mouvement École sans parti (Escola sem Partido – ESP) se présente comme une
« initiative conjointe d’élèves et de parents préoccupés par le degré de contamination
politico-idéologique des écoles brésiliennes à tous les niveaux : du primaire au supérieur 3
. » Fondé en 2004 par l’avocat Miguel Nagib, ESP est resté dans l’ombre jusqu’au début des
années 2010 lorsque le mouvement s’est imposé comme une voix incontournable des
débats sur l’éducation au Brésil.
4 L’émergence d’ESP dans le débat public est contemporaine de l’apparition d’une nouvelle
thématique dans le discours conservateur, la lutte contre « l’idéologie du genre », alors
qu’auparavant la cible était la « doctrine marxiste ». La question du genre, qui avait fait
son entrée dans les écoles avec les combats contre l’homophobie et le sexisme, est
devenue un sujet majeur pour les groupes religieux conservateurs. ESP se positionne ainsi
sur un terrain en apparence « moral » (par opposition au « politique ») pour relancer le
débat sur le rôle de l’école et de la famille dans l’éducation des enfants.

De « l’idéologie du genre » au mouvement Escola Sem


Partido
5 C’est dans les milieux académiques états-uniens que le concept de genre (gender) est
apparu, dans les années 1970, pour distinguer le dimorphisme sexuel de l’espèce humaine
des rôles sociaux assignés aux hommes et aux femmes et remettre en cause l’assimilation
automatique du premier aux seconds. Ce questionnement est une marque distinctive du
féminisme contemporain, déjà présent dans la phrase emblématique de Simone de
Beauvoir : « On ne naît pas femme, on le devient » (1949, II, 15). L’identité, explique-t-elle,
est une construction sociale qui dépend de sollicitations, d’attentes, d’opportunités
différenciées. La femme n’est pas définie par son appareil reproductif, mais par son
adéquation à un rôle social déterminé. C’est cette réflexion qui est condensée dans le
concept de genre.
6 La dénonciation de la théorie du genre, du féminisme radical et des mouvements pour les
droits des homosexuels est devenue un cri de ralliement dans les milieux chrétiens
conservateurs aux États-Unis (Fillos 2014). Ces derniers y voient un risque majeur de
subversion de l’ordre familial, perçu à la fois comme naturel, d’origine divine et

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Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? 3

indispensable à la bonne marche de la vie sociale. À leurs yeux, cette menace a gagné en
intensité dans les années 1990 avec l’organisation des conférences de l’ONU sur la
population et le développement (1994) et sur les femmes (1995), au cours desquelles la
question du genre a été présentée comme un objectif central. Le Saint-Siège a pu aussi y
voir une opportunité pour « sauver l’influence de l’Église dans un contexte de
sécularisation » (Carnac 2014, 140). L’opposition au féminisme et à la diversité sexuelle a
servi à la fois à renforcer l’autorité de la hiérarchie vaticane sur le troupeau des fidèles,
mais aussi à préserver un rôle politique de premier plan. Paradoxalement, l’Église
réaffirme sa centralité politique dans la mesure où elle cherche à « dépolitiser » certaines
questions, en les faisant passer dans la sphère morale où son autorité serait plus légitime.
Le premier cadre de la discussion est donc fondé sur l’opposition entre un discours
politique portant sur des « droits », brandi par les mouvements féministes et LGBT, et un
discours moral fondé sur des « valeurs », porté par l’Église et ses alliés.
7 C’est sous le pontificat de Jean-Paul II, alors que le cardinal Ratzinger (futur Benoît XVI)
était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qu’a débuté la croisade « anti-
genre ». À partir des années 2000, l’adversaire a été clairement identifié: « l’idéologie du
genre » au Brésil, la « théorie du genre » en France et en Italie, avec l’utilisation fréquente
de l’anglicisme gender pour insister sur son origine étrangère. Bien que s’appuyant
superficiellement sur la littérature féministe et queer, « il s’agit d’une invention
polémique des milieux conservateurs catholiques qui vise à caricaturer et à délégitimer
un champ d’études » (Garbagnoli 2014, 149).
8 Le pontificat de Jean-Paul II a été marqué, dès ses débuts, par la question du rôle des
femmes, sur lequel le pape s’est exprimé dans de nombreux textes et conférences. La
complémentarité entre les sexes y est expliquée par l’idée selon laquelle « Dieu a donné à
la femme un ‘génie féminin’ pour accompagner sa fonction procréatrice, qui se
caractérise par une propension et un don naturel pour le soin et la sensibilité aux autres »
(Fillod 2014, 327). Ces éléments ont été par la suite déterminants dans l’élaboration d’une
pensée catholique opposée à « l’idéologie du genre »4.
9 Les groupes religieux tendent cependant à minimiser la dimension proprement divine de
cette assertion dans les débats publics. D’une part, en développant un discours
d’apparence scientifique, avec une série d’arguments biologiques, psychologiques ou
sociologiques. D’autre part, en affirmant que la position de l’Église n’est pas « fondée sur
une croyance », mais constitue « une réponse aux défis éthiques contemporains, reposant
sur une certaine vision de l’homme et de la société, une voie civilisationnelle » (Carnac
2014, 131). La remise en cause des rôles sexués met en danger la famille et, partant, toute
la société qui – conformément au savoir conventionnel – en dépend (Garbagnoli 2014,
151). La « confusion » des rôles masculins et féminins est perçue comme le symptôme
d’un « désordre » social grave qui doit être combattu sans trêve.
10 Bien que l’égalité des genres soit devenue un enjeu transversal de nombreuses politiques
gouvernementales, l’éducation constitue la première préoccupation des conservateurs
religieux. Au Brésil, les principales cibles ont été le plan national d’éducation (2014) et les
plans d’éducations votés par les assemblées législatives des États et des municipalités en
2015. Les évangéliques et les catholiques ont travaillé ensemble pour exclure la question
du genre des programmes scolaires aux niveaux de l’État fédéral, des États fédérés et
localement5. Durant toute la durée des discussions, on a pu voir des religieuses siéger au
côté de pasteurs d’églises néo-pentecôtistes devant les assemblées, pour faire pression sur
les députés et les conseillers municipaux.

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11 L’opposition de groupes religieux conservateurs à une éducation progressiste sur les


questions de genre n’est en aucun cas née du mouvement Escola sem Partido, qui s’était
donné d’autres objectifs. Selon son propre mythe fondateur, ESP aurait vu le jour avec la
profonde indignation ressentie par son chef – un avocat de São Paulo – lorsque sa fille lui
aurait rapporté les propos de son professeur d’histoire comparant Che Guevara à saint
François d’Assise6. À l’origine, son but était de lutter contre la présence de la « doctrine
marxiste » dans les écoles, un thème récurrent depuis la fin de la dictature militaire. C’est
ainsi qu’ESP s’est forgé un espace à côté de l’Institut Millenium, un think tank ultralibéral
qui promeut un programme économique de droite, mais ne s’intéresse guère à la défense
de la morale sexuelle, de la famille et des bonnes mœurs. Le fondateur d’ESP, Miguel
Nagib, a publié un texte sur le site de l’Institut en 2009, intitulé « Pour une école qui
promeuve les valeurs de Millenium », dans lequel l’alignement sur le modèle ultralibéral
est patent. Les problèmes de l’éducation brésilienne y sont attribués au manque de
déférence envers la propriété privée, la méritocratie et la responsabilité individuelle.
Aucune mention n’est faite ni du genre ni des valeurs familiales7.
12 La peur de l’infiltration de la « doctrine marxiste » dans les écoles est alimentée par une
lecture fantaisiste de l’œuvre d’Antonio Gramsci. Son analyse complexe des luttes
éthiques et politiques devient, dans les mains de ses détracteurs de droite, une stratégie
pour manipuler les âmes et mettre à bas le consensus social. Il est présenté comme
l’auteur d’un « plan infaillible » pour la victoire du communisme. Cette lecture étrange de
son œuvre a reçu le nom de « marxisme culturel »8. Associer la lutte contre la « doctrine
marxiste » au combat contre « l’idéologie du genre » a été une véritable opportunité pour
ESP qui s’est ainsi pourvue de nouveaux alliés de poids, d’une capillarité à laquelle elle ne
pouvait pas même rêver et d’une forte résonance dans les milieux populaires.
13 À partir du moment où « l’idéologie du genre » s’est superposée à la « doctrine
marxiste », le discours d’ESP a connu une nette inflexion. La défense d’une éducation
« neutre », jusqu’alors prédominante, a cédé la place à l’affirmation de la primauté de la
famille sur l’école. Empêcher que les professeurs ne transmettent, dans les salles de
classes, des contenus contraires aux valeurs des parents d’élèves constitue aujourd’hui la
principale revendication du mouvement. Si « l’idéologie du genre » en est la cible
principale, cette règle s’applique également à toute prise de position politique, à la
théorie de l’évolution et à l’héliocentrisme. Selon le credo d’ESP, les écoles publiques
doivent être soumises au veto des parents d’élèves et les écoles privées pourront bien sûr
toujours inclure des clauses contractuelles afin de garantir l’enseignement de certains
contenus.
14 Aucune de ces mesures n’a été reconnue dans la législation, mais ESP a mené campagne
auprès des parents d’élèves en 2015 pour dénoncer les professeurs et les écoles hors de
tout cadre judiciaire, en s’appuyant sur l’article 12-4 de la Convention américaine des
droits humains qui stipule : « Les parents, et le cas échéant, les tuteurs, ont droit à ce que
leurs enfants ou pupilles reçoivent l'éducation religieuse et morale conforme à leurs
propres convictions9. » Signée en 1969, cette convention se caractérise par une ligne très
conservatrice et défend notamment la prévalence de la famille et le droit à la vie « en
général à partir de la conception » (article 4-1). Elle est devenue une référence
fondamentale pour les opposants au droit à l’avortement et les adversaires de l’éducation
critique, qui s’en servent pour placer leur combat sous la bannière des « droits humains »
et de la « législation internationale ».

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15 La campagne de dénonciation a été lancée par la droite catholique puis récupérée par ESP
qui a mis à disposition des parents un modèle de plainte à télécharger sur son site
Internet. Le point 21 de ce long document est rédigé de la manière suivante : « Mon
enfant a pris connaissance de ce document et doit me rapporter de manière détaillée les
possibles atteintes à sa liberté de conscience et de croyance et à mon droit à ce qu’il
reçoive une éducation religieuse et morale en accord avec mes convictions. » Une note de
bas de page précise : « À notre avis, le point 21 est important et doit figurer sur la
dénonciation même si, pour préserver les enfants d’un stress inutile, les parents décident
de ne pas leur parler de cette initiative10. »
16 Ainsi est établie une domination stricte de la famille sur l’école. Sur le plan « théorique »,
cette position se fonde sur un ouvrage du Portugais Armindo Moreira (2012), Professor não
é educador [Un professeur n’est pas un éducateur], dans lequel il défend l’idée que l’école,
quand elle éduque, « usurpe une des fonctions sacrées de la famille ». Selon Moreira, le
professeur doit être un simple « instructeur » – son rôle est de transmettre des contenus
neutres et objectifs – et l’éducation incombe, quant à elle « à la famille, à la société et à
l’Église11. » De manière significative, Professor não é educador figure parmi la liste réduite
des quatre livres recommandés à la lecture sur le site d’ESP.
17 C’est toutefois le slogan « meus filhos, minhas regras » [mes enfants, mes règles] qui résume
le mieux la démarche pro-famille d’ESP. On le retrouve dans toutes les interventions
publiques du groupe et de ses alliés, qui l’utilisent aussi comme mot-dièse sur les réseaux
sociaux. Cette parodie du mot d’ordre historique du mouvement féministe, « mon corps,
mes règles », en subvertit complètement le sens : l’affirmation de l’autonomie et des
droits des femmes fait place à la revendication d’une soumission absolue des enfants aux
parents dont ils seraient la propriété. Deux négations convergent ici : celle du caractère
républicain de l’institution scolaire, dont une des fonctions est d’éduquer au caractère
pluraliste d’une société démocratique ; et celle de l’enfant comme sujet de droits, incluant
le droit à connaître le monde et à acquérir des instruments pour penser par soi-même.
L’autorité absolue des parents, qui sous-tend ce projet d’intimidation des éducateurs, est
caractéristique de ce que Christine Delphy appelle « l’état d’exception » de la famille,
dans lequel les droits de chacun de ses membres sont suspendus (Delphy 2013[1995]).

Le combat contre l’éducation au Congrès national


18 Plusieurs projets de loi sur la « doctrine » ou « l’idéologie du genre » sont aujourd’hui en
examen au Congrès national12. Les projets de loi (PL) n° 7180/2014 et 7181/2014 affirment
que « les valeurs familiales doivent prévaloir sur l’éducation scolaire pour tous les aspects
relatifs à l’éducation morale, sexuelle et religieuse. » Le PL n° 7181/2014 précise que « les
programmes scolaires et le travail pédagogique réalisé par les professeurs de
l’enseignement primaire en salle de classe ne doivent pas entrer dans le champ des
convictions personnelles et des valeurs familiales. Ces sujets doivent être traités dans la
sphère privée. » Le PL n° 1859/2015 stipule que les directives sur l’éducation « ne peuvent
inclure dans le curriculum scolaire des disciplines, obligatoires ou optionnelles, qui
tendent à promouvoir l’idéologie du genre, le mot ‘genre’ ou l’expression ‘orientation
sexuelle’ ». L’argumentaire comprend une longue digression sur « l’idéologie du genre »
qui commence avec Judith Butler et se termine avec le marxisme, les deux propositions
étant jugées équivalentes. Ainsi, le renversement du capitalisme exigeant de mettre fin à
la division sociale du travail et la répartition sexuelle étant la première forme de division

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du travail, la fin de la différenciation entre les sexes serait une étape vers le triomphe du
communisme. Le « genre » serait le cheval de Troie du féminisme marxiste. C’est pour
cette raison qu’il faut interdire jusqu’à l’usage même de ce mot.
19 Le PL n° 5487/2016 entend interdire au ministère de l’Éducation de « distribuer dans les
écoles publiques des livres qui traitent de l’orientation et de la diversité sexuelle. » La
justification, très succincte, s’appuie sur la résolution n° 12/2015 du ministère de
l’Éducation qui « garantit l’usage des toilettes et des vestiaires en accord avec les identités
de genre de chaque personne, dans tous les établissements scolaires, à tous les niveaux. »
Le lien entre les livres et les toilettes n’est à aucun moment explicité. Quant au PL n
° 1411/2015, il définit le crime de « harcèlement idéologique » de manière très similaire
au décret-loi n° 477 adopté en 1969 par le régime militaire pour faire taire toute forme
d’opposition politique au sein de l’enseignement. L’argumentation repose sur l’idée que le
PT se serait infiltré dans les écoles brésiliennes pour recruter de futurs militants.
20 C’est toutefois le PL n° 867/2015 qui constitue le projet le plus ambitieux d’ESP. Son
objectif est d’inclure le Programme Escola sem Partido dans les directives de base de
l’éducation nationale. Qu’y lit-on ? Que l’éducation doit être fondée sur la « neutralité
politique » (article 2) et que l’école ne doit développer aucune activité susceptible
« d’entrer en conflit avec les convictions religieuses ou morales des parents ou des
tuteurs des élèves » (article 3) même si les institutions confessionnelles privées peuvent
exercer leur prosélytisme en accord avec les familles (article 3, §1). L’article 5 prévoit que
des affiches soient apposées dans les écoles pour informer les élèves de leur droit à
dénoncer les professeurs. Ce programme doit s’appliquer également au matériel
pédagogique et à tous les niveaux, y compris dans l’enseignement supérieur. Outre la
souveraineté de la famille, on retrouve ici l’idée de « neutralité » fondée sur la fiction
d’une connaissance qui ne serait pas située socialement. Ainsi, une analyse critique qui
pointerait injustices et inégalités ne franchirait pas les barrières de la « neutralité ». En
fait, une vision qui se veut seulement descriptive n’est pas non plus neutre : elle participe
à une opération de naturalisation de l’ordre social en vigueur et, partant, à sa
reproduction. À suivre ces propositions, des disciplines comme l’histoire, la philosophie,
la sociologie, la géographie ou la littérature seraient soit marginalisées soit réduites
(comme c’était le cas pendant la dictature militaire) à l’apprentissage de listes de dates et
de personnalités. Ce type d’enseignement peut sembler neutre, mais en privant les élèves
de la possibilité de situer les processus historiques et d’en comprendre les enjeux
conflictuels, il joue un rôle éminemment conservateur.
21 Au Sénat fédéral, les discussions ont porté sur le projet de loi sénatorial (PLS) n
° 193/2016, aujourd’hui rejeté, dont l’article unique visait à « interdire d’appliquer les
postulats de la théorie et de l’idéologie du genre » au nom du « droit des parents à ce que
leurs enfants reçoivent une éducation religieuse et morale en accord avec leurs propres
convictions. » Le ministère et les secrétariats de l’Éducation auraient dû, en outre, mettre
en place un service pour le dépôt de plaintes contre les professeurs et les écoles. La
justification du projet reposait sur l’idée selon laquelle la « neutralité religieuse » de l’État
(expression systématiquement préférée à celle de laïcité) serait indissociable de l’autorité
absolue de la famille. L’évocation en classe de valeurs autres que celles privilégiées par la
famille aurait pour conséquence de « vilipender et détruire, indirectement, la croyance
religieuse des élèves. » La liberté de croyance est ainsi transformée en rempart contre
tout contact avec d’autres visions du monde.

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22 Le débat au Congrès ne s’est pas limité à ces projets de loi. Lors du vote qui a conduit à la
destitution de Dilma Rousseff, en 2016, le spectre de « l’idéologie du genre » et de la
politisation de l’enseignement a été brandi. Trois députés en ont fait la justification
principale de leur soutien au coup d’État13. La discussion sur le genre ne constitue qu’une
des deux facettes du discours des élus conservateurs à la Chambre. La seconde repose sur
un amalgame entre la famille, la nature et la « création » : « La nature est sage et la
création divine. Si être un homme ou être une femme étaient des rôles que chacun
pouvait interpréter librement, pourquoi les êtres humains auraient-ils été créés
différents14 ? » L’éducation sur le genre serait un aspect d’un processus plus général
visant à la « décomposition de la famille naturelle » qui aurait commencé, avant même la
lutte contre l’homophobie dans les écoles, avec la loi qui interdit la fessée15.
23 Si la famille traditionnelle et les rôles de genre sont définis comme naturels et d’origine
divine, toute forme de discussion est impossible. L’ordre naturel et divin est, par
définition, incontestable. Ce discours culmine avec la défense de valeurs qui devraient
être immuables, mais qui sont aujourd’hui « renversées » et « substituées »16. Le débat se
situe ici sur un terrain infra-politique, celui d’une croisade morale. Cette montée en
puissance des interventions réactionnaires dans le domaine éducatif n’aurait pas eu lieu
si ESP était resté fidèle à sa première ligne de combat contre la « doctrine marxiste ».

Conclusion
24 Leis da mordaça [lois de la muselière] : c’est ainsi qu’ont été surnommés par les défenseurs
de la liberté d’enseigner les projets de lois inspirés par le mouvement Escola Sem Partido.
Il s’agit, de fait, d’une criminalisation de l’éducation qui empêche les enseignants
d’exercer librement leur profession et les place à la merci des parents. La définition du
« harcèlement idéologique » étant extrêmement vague et subjective, tout enseignant peut
devenir un jour la cible d’une procédure judiciaire. Loin d’être vus comme des acteurs de
la formation intellectuelle, les professeurs sont perçus comme une menace à contenir.
25 ESP affirme ouvertement qu’il souhaite museler la liberté d’expression des professeurs.
Selon les propres termes de Miguel Nagib, répétés dans de nombreux entretiens et débats,
« dans une salle de classe, le professeur n’a pas de liberté d’expression. Il est tenu à
transmettre un contenu, c’est tout17. » Ce « contenu » est défini de manière implicite
comme un ensemble de savoirs objectifs qui seraient enseignés indépendamment du
contexte de l’interaction entre le professeur et ses élèves. Quant à l’exercice d’un droit,
selon la logique d’ESP, il relève du tout ou rien. Si on reconnaît la liberté d’expression des
enseignants, on ne peut exiger d’eux qu’ils appliquent les programmes : exercer ses droits
rend irresponsable. En posant la question de cette manière, on en vient à renoncer à
toutes les libertés. Celle d’expression est fondamentale dans le journalisme et les sciences,
par exemple, sans pour autant qu’elle implique l’abandon de la déontologie
professionnelle qui impose, notamment, de ne pas manipuler les données et les
informations. Dans le cas du professeur, la liberté d’expression se traduit par la liberté de
choisir le meilleur chemin pour la formation des élèves. Il ne s’agit pas d’une
irresponsabilité ; au contraire, c’est une nécessité qui découle de sa responsabilité
professionnelle.
26 La prétendue neutralité promeut une éducation incapable d’intervenir dans le monde et,
pour cette raison, complice de ses injustices et de ses violences. Le débat sur le genre est

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particulièrement exemplaire. L’idée selon laquelle les rôles stéréotypés des femmes et des
hommes sont naturels contribue à exclure les femmes de certains espaces sociaux, en
stigmatisant les comportements qui ne suivent pas la règle. La culture du viol, qui
s’appuie sur une vision de la femme comme être dépourvu d’autonomie, ainsi que les
agressions contre les gays, les lesbiennes et les travestis, présentés comme « anormaux »,
en sortent renforcés. On compte plus de 5 000 féminicides par an au Brésil (Garcia et al.
2015) et plus de 300 meurtres homophobes18. Empêcher que le genre soit discuté dans les
écoles, c’est aussi s’interdire d’agir contre ces crimes. Une école « sans parti » est une
école qui prend le parti de l’injustice et de l’oppression.
27 Ces attaques visent également les droits des élèves. Recevoir une éducation qui permette
d’appréhender le monde avec un esprit critique et d’être en capacité de faire ses propres
choix est une condition nécessaire pour exercer son autonomie (Miguel 2015). Les
arguments des partisans d’Escola Sem Partido font des enfants la propriété des parents.
La famille est présentée comme une entité dont les droits sont supérieurs à ceux,
individuels, des membres qui la composent. On touche ici à une vision profondément
enracinée dans le sens commun, qui a été en partie vaincue pour ce qui concerne les
femmes, mais qui commence tout juste à être remise en question pour les enfants. Dans
un monde où les « valeurs sont inversées », comme le martèle le discours fondamentaliste
religieux, il est devenu nécessaire de garantir la protection de l’entité familiale contre les
influences externes pour qu’elle puisse modeler l’enfant à son goût. C’est ici que le
fondamentalisme et l’ultralibéralisme se rencontrent : pour ces deux courants, l’État est
l’ennemi à combattre car il œuvre – bien que de manière très insuffisante – à promouvoir
des formes d’égalité qui menacent les hiérarchies établies par le marché ou dans la sphère
domestique. Derrière la revendication d’une éducation « neutre » se cache en fait la
volonté de « neutraliser » l’école.
28 Le caractère inconstitutionnel des propositions de « lois du muselage » est flagrant. Elles
représentent, en fait, la plus parfaite illustration de deux phénomènes qui les
transcendent. D’une part, le consensus minimum sur lequel reposait – ou du moins le
croyait-on – le débat public au Brésil a pris fin. Le discours en défense des droits, qui était
devenu la base incontestée de tout affrontement politique, est aujourd’hui mis à mal au
nom de valeurs, de la tradition et même de la volonté divine. D’autre part, l’alliance entre
le conservatisme moral et l’ultralibéralisme économique est devenue la colonne
vertébrale de la droite brésilienne. Le fondamentalisme chrétien est désormais l’un des
piliers majeurs des forces politiques conservatrices. Le discours pro-famille, homophobe
et antiféministe n’est pas une survivance excentrique mais un élément essentiel pour
conquérir les couches populaires. Le déplacement du débat politique sur un terrain
prétendument « moral », la lutte contre la corruption et contre « l’idéologie du genre »
font cause commune dans une stratégie de reconquête de la base sociale de la droite.
29 Affronter ce discours n’est donc pas une tâche secondaire pour les forces politiques
progressistes. Sur le fond, les mouvements féministes et LGBT dénoncent les formes
d’oppression et de violence dont sont victimes des millions de personnes. Comment peut-
on penser créer une société juste sans faire du combat contre la misogynie et
l’homophobie une priorité ? Sur le plan tactique, on aurait tort également de reléguer ces
questions au second plan. Éviter les polémiques peut sembler apporter des bénéfices à
court terme, mais le prix à payer est élevé s’il préserve et entretient le bouillon de culture
qui mobilise la droite. Le mouvement Escola Sem Partido en est un parfait exemple.

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BIBLIOGRAPHIE
Beauvoir, Simone de. 1949. Le Deuxième Sexe. Paris: Gallimard.

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Moreira, Armindo. 2012. Professor Não é Educador. Toledo (Pará): Indicto Editora.

NOTES
1. Cet article est une version résumée et actualisée de l’article : « Da ‘doutrinação marxista’ à
‘ideologia de gênero’: o ‘Escola Sem Partido’ e as leis da mordaça no parlamento brasileiro »,
Direito e Práxis, 15, 2016, p. 590-621.
2. Le Front parlementaire évangélique réunit 92 députés sur un total de 513, pour la plupart
proches du fondamentalisme, auxquels s’ajoutent les parlementaires liés à la Rénovation
charismatique (Renovação Carismática), la branche la plus conservatrice de l’Église catholique.
3. http://www.escolasempartido.org/quem-somos (consulté le 7 juin 2016). Bien qu’elle se
présente comme un mouvement ou comme une association, l’ESP ne donne aucune indication sur
ses membres. Ses seuls porte-parole publics sont le « coordinateur » Miguel Nagib et le « vice-
président » Bráulio Porto, une hiérarchie pour le moins confuse.
4. Dans la formulation originale, le pape évoque seulement le « génie féminin », sans « génie
masculin » correspondant. Les hommes seraient, semble-t-il, dotés d’une âme humaine tout
court.
5. Au Brésil, la scolarisation publique peut dépendre des trois niveaux territoriaux : État fédéral,
États fédérés ou municipalités (NdT).
6. Bedinelli, Talita. 2016. « O professor da minha filha comparou Che Guevara a São Francisco de
Assis ». El País, Edição Brasil, online, 25 juin. http://brasil.elpais.com/brasil/2016/06/23/
politica/1466654550_367696.html (consulté le 28 juin 2016).
7. Texte disponible sur le site : http://www.institutomillenium.org.br/artigos/por-uma-escola-
que-promova-os-valores-do-millenium/ (consulté le 6 juillet 2016). La signature initiale de

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Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? 10

Miguel Nassib, visible sur les captures d’écran de l’époque a été remplacée par la mention
« Communication Millenium » (Aquino, Renata. 2015. « A ideologia do Escola Sem Partido ».
Liberdade para Ensinar. https://liberdadeparaensinar.wordpress.com/tag/miguel-nagib/ (consulté
le 28 juin 2016).
8. L’autre grand adversaire d’ESP est Paulo Freire, dont la pédagogie devait fournir aux opprimés
un moyen de se délivrer du « monde de l’oppression » et de s’engager, « en pratique, dans sa
transformation » (Freire 2015 [1968], 57). On trouve sur le site internet d’ESP de nombreux textes
contre Freire. Dans un débat télévisé, en 2016, Miguel Nagib avait affirmé que son modèle
éducatif visait à recruter des jeunes pour le PT, ignorant visiblement que son action remontait
aux années 1960, soit bien avant la naissance du Parti des travailleurs. Voir : https://
www.youtube.com/watch?v=J2v7PA1RNqk (consulté le 18 juin 2018).
9. Voir le texte français de la Convention sur le site de la Commission interaméricaine des droits
de l’homme : https://www.cidh.oas.org/Basicos/French/c.convention.htm (consulté le 28 juin
2018).
10. Le texte intégral peut être consulté sur le site : http://www.escolasempartido.org/artigos-
top/552-notificacao-extrajudicial-servico-de-utilidade-publica (consulté le 30 juin 2016).
11. Wurmeister, Fabiula. 2012. « O educador usurpa uma função que é da família (entrevista com
Armindo Moreira) ». Gazeta do Povo, edição online, 7 août. http://www.gazetadopovo.com.br/
vida-e-cidadania/o-educador-usurpa-uma-funcao-que-e-da-familia-293fk255btxfvp15ip2ikn4ni
(consulté le 30 juin 2016).
12. Au niveau des États de la fédération, on compte plus de dix projets similaires en cours. En
Alagoas, une loi a été votée, mais elle a été suspendue par le Suprême Tribunal fédéral. La liste de
tous ces projets est disponible sur le site : https://
professorescontraoescolasempartido.wordpress.com/vigiando-os-projetos-de-lei/ (consulté le 24
juin 2018).
13. Selon le dépouillement des discours effectué par Priscila da Costa e Silva, étudiante de
l’Université de Brasília, que je remercie ici.
14. Jefferson Campos, session du 3 mars 2016.
15. Arolde de Oliveira, session du 16 avril 2016.
16. Pasteur Marco Feliciano, session du 25 février 2016.
17. Cité dans Resende, Leandro. 2015. « ‘Escola sem partido’ quer fim da ‘doutrinação de
esquerda’ ». O Dia, edição online, 6 septembre. http://odia.ig.com.br/noticia/brasil/2015-09-06/
escola-sem-partido-quer-fim-da-doutrinacao-de-esquerda.html (consulté le 25 juillet 2016).
18. GGB – Grupo Gay da Bahia. 2015. Relatório 2015: assassinatos de LGBT no Brasil. Salvador: GGB.
http://en.calameo.com/read/0046502188e8a65b8c3e2 (consulté le 25 juillet 2016).

RÉSUMÉS
De nombreux projets de loi ont été présentés devant le Congrès national afin d’empêcher
« l’endoctrinement idéologique » au sein des institutions d’enseignement. Ces projets font écho
aux travaux de l’organisation « École sans parti » qui bénéficie désormais d’une grande visibilité
dans l’espace public. Son objectif principal est une réflexion critique sur les questions de genre,
stigmatisées comme relevant de la « théorie du genre ». Selon ses propositions, toute remise en
cause des rôles conventionnels attribués respectivement aux femmes et aux hommes serait

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Une criminalisation de l’éducation au Brésil ? 11

censurée. L’article analyse ces projets et leurs implications en matière d’éducation et pour la
démocratie.

Vários projetos de lei têm sido apresentados, no Congresso Nacional brasileiro, com o objetivo de
evitar “doutrinação ideológica” nas instituições de ensino. Eles ecoam as propostas da
organização “Escola Sem Partido”, que adquiriu grande visibilidade no debate público. O
principal alvo é a reflexão crítica sobre questões de gênero, estigmatizada como “ideologia de
gênero”; pelas propostas, qualquer questionamento aos papéis convencionais atribuídos a
mulheres e homens estaria vetado. O artigo analisa os projetos e suas implicações para a
educação e para a democracia.

Numerous law reforms have been submitted to the National Congress of Brazil to prohibit
“ideological proselytization” in education. These propositions are linked to the action of the
Non-Partisan School Program (Programa Escola sem Partido), an organization now very well
known in the public sphere. Its main goal is a critical analysis of the gender debate, stigmatized
as “gender theory”. For this organization, all efforts that remake the conventional role
associated with men and women must be prohibited. This article analyzes these projects and
their consequences in education policy and for democracy.

INDEX
Mots-clés : Brésil, éducation, Programme École sans parti, genre
Palavras-chave : Brasil, educação, Programa Escola sem Partido, gênero
Keywords : Brazil, education, Non-Partisan School Program, gender

AUTEURS
LUIS FELIPE MIGUEL
Luis Felipe Miguel est professeur de sciences politiques à l’Université de Brasília, coordinateur du
Groupe de recherche sur la démocratie et les inégalités (Grupo de Pesquisa sobre Democracia e
Desigualdades – Démodé) et chercheur du Conselho Nacional de Desenvolvimento Científico e
Tecnológico (CNPq).

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