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15/11/2010 16:11

Politique

Chat modéré par Olivier Biffaud

«Le président est apparu hésitant ou


velléitaire»

Frédéric : Etes-vous surpris par ce

L
’intégralité du débat avec Gérard Courtois,
directeur éditorial du «Monde», lundi 15 no- remaniement ?
vembre. - Jacquesv : Pouvez-vous m’expli-
quer la signification de ce remaniement ? Quel Oui et non. Surpris par le constat que le président
intérêt d’accepter sa démission pour le recons- de la République n’a, au bout du compte, pas pu réa-
tituer pratiquement inchangé ? liser le changement en profondeur qu’il souhaitait
opérer pour aborder la fin de son mandat.
Gérard Courtois : Nicolas Sarkozy avait renoncé
à changer de gouvernement en mars dernier, au Mais ce qui est moins surprenant, c’est cette im-
lendemain de l’échec de la droite aux régionales, puissance présidentielle, qui ne fait que traduire
comme le lui demandait alors le premier ministre l’affaiblissement constant du chef de l’Etat depuis
François Fillon. maintenant plus d’un an.

Huit mois ont passé. Nous sommes donc à à peine Une règle élémentaire de la physique politique est
plus d’un an du début de la campagne électorale que l’affaiblissement du président de la République
de 2012. Le gouvernement nommé hier est claire- se traduit fréquemment par le renforcement du pre-
ment un gouvernement de campagne, une équipe mier ministre. C’est ce que l’on observe aujourd’hui.
resserrée, plus compacte, destinée à s’engager dans Comme, toutes proportions gardées, on avait pu le
cette bataille. constater dans le couple formé autrefois par le gé-
néral de Gaulle et Georges Pompidou.
VD : Ce remaniement a-t-il été vraiment
réfléchi ou pourrions-nous le qualifier de Londonboy : N’y a-t-il pas de la part du prési-
dent une volonté de laisser un espace vacant au
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«coup de speed» ?
centre-droit ?
Oui, il a dû être réfléchi, puisqu’il est annoncé dans
son principe depuis le printemps et confirmé dans Une volonté, sûrement pas. Nicolas Sarkozy, sans lui
son calendrier depuis le début de l’été. faire de promesse formelle, avait clairement invité
Jean-Louis Borloo, qui incarne parmi d’autres cette
Le président de la République a donc eu tout le temps sensibilité, à se préparer à Matignon.
de peser les différentes options qui s’offraient à lui.
Les erreurs de celui-ci et la résistance du noyau dur
Mieux, il a même, de façon à la fois inédite et im- de la majorité autour de François Fillon ont conduit
prudente, ouvert une sorte de compétition entre cette solution dans l’impasse.
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les premiers ministrables possibles.


Le départ de M. Borloo, comme celui d’Hervé Morin,
traduit donc le resserrement du dispositif gouver-
nemental autour de l’ancien RPR, au détriment du
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centre-droit.

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«Le président est apparu hésitant ou velléitaire»

La promotion de Michel Mercier et l’arrivée de C’est effectivement mathématiquement un gouver-


Maurice Leroy ne compenseront pas le départ du nement moins nombreux et probablement l’un des
président du Parti radical et de celui du Nouveau moins nombreux de ces dernières décennies.
Centre. C’est un risque certain mais contraint que
Nicolas Sarkozy est obligé de prendre. En outre, ce gouvernement est politiquement plus
compact : il est marqué à la fois par le renforce-
Le chef de l’Etat s’en est toujours tenu à sa stratégie ment des poids lourds chiraquiens (arrivée d’Alain
gagnante de 2007 : il espère faire la différence au Juppé, maintien de Michèle Alliot-Marie, promo-
premier tour de 2012 pour l’emporter grâce à cet tion de François Baroin et prise en main de l’UMP
élan initial. par Jean-François Copé) et par le renforcement des
sarkozystes pur jus (retour de Xavier Bertrand et
Les rancunes ou les amertumes des centristes ris- entrée de Frédéric Lefebvre et Thierry Mariani).
quent de le priver d’une part significative de son
électorat d’il y a quatre ans. Petar : Quel était l’intérêt de Nicolas
Sarkozy d’anticiper autant dans le temps
Christine : Quel(s) argument(s) politique(s) a ce remaniement ?
ou ont penché en faveur de François Fillon au
détriment de Jean-Louis Borloo ? On peut évidemment se poser la question. Il s’est
privé de l’effet de surprise et de dramatisation dont
Les couples président-premier ministre sous la joue habituellement le chef de l’Etat.
Ve République reposent toujours sur des relations
complexes. Il a probablement péché par orgueil : en affichant
si longtemps à l’avance son calendrier, il entendait
Dans le cas de Nicolas Sarkozy et François Fillon, démontrer à tout le monde qu’il reste le maître du
le contrat initial était clair : le premier ministre se temps politique.
mettait ouvertement au service de l’hyperprésident.
Il n’avait pas mesuré que cette longue période de
La première partie du mandat a été humiliante à rivalités et de supputations allait en réalité le rendre
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certains égards pour M. Fillon, qualifié – on s’en prisonnier de cet agenda.


souvient – de «collaborateur» par le chef de l’Etat,
et privé ouvertement de liberté de manœuvre. GL : L’impuissance de Nicolas Sarkozy que
vous décrivez est-elle préjudiciable au
Mais le premier ministre a fait preuve d’une capacité chef de l’Etat ?
de résilience peu commune : il en a tiré bénéfice
dans l’opinion et auprès des parlementaires et de la A ce stade, oui. Le président, qu’il le veuille ou non,
droite traditionnelle, qu’il rassure. Il est devenu in- est apparu hésitant ou velléitaire. Il a semblé vou-
déboulonnable. M. Sarkozy l’a constaté à ses dépens. loir changer le premier ministre et il n’y est pas
parvenu. Du coup, la thématique de la «nouvelle
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Dartunghuver : Pourquoi tout le monde parle étape» annoncée au printemps et la rhétorique du


d’équipe resserrée, alors qu’on passe de 37 à 30 «nouveau souffle» tombent à plat.
membres du gouvernement, et de 18 à 22 mi-
nistres ? Au final, les Français vont retenir que le premier
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ministre ne change pas, donc que l’essentiel ne


change pas.

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Guest : Ce remaniement est-il une preuve que le le temps de mettre en place les réformes dont
président serait déjà en pré-campagne électorale vous parlez ?
pour l’élection présidentielle de 2012 ?
Pour ce qui est de la dépendance, réforme préparée
C’est une évidence. Le quinquennat a sensiblement depuis des mois, c’est vraisemblable. Pour ce qui est
raccourci le temps politique. du G20, M. Sarkozy n’est évidemment pas maître
du jeu. Quant à la conjoncture économique, il en
Nicolas Sarkozy, de plus, a toujours considéré ouver- est de même.
tement que ce raccourcissement imposait une sorte
de campagne permanente : il en a fait la démons- Abdurahman : Kouchner, Rama Yade et d’autres
tration depuis trois ans et demi en multipliant sans ne sont plus au gouvernement. Peut-on inter-
cesse les promesses, les propositions et les réformes. préter ce remaniement comme un clin d’œil à
A l’approche du scrutin de 2012, il se met clairement l’électorat de droite ?
en position d’engager la bataille contre la gauche.
Un «clin d’œil» ne me paraît pas le mot juste. Dans
Naaba : Dans cette hypothèse peut-on réellement le cas des ministres d’ouverture (Bernard Kouch-
attendre de ce nouveau gouvernement la mise ner, Jean-Marie Bockel et Fadela Amara), c’est la fin
en place de politiques à long terme ? d’une expérience peu concluante qui est enterrée
sans fleurs ni couronnes. Dans le cas de Rama Yade,
Un chantier a été annoncé et va être ouvert rapide- le chef de l’Etat et le premier ministre sanctionnent
ment : c’est celui de la dépendance des personnes des insolences répétées ; mais je serais prêt à parier
âgées. Il s’agit dans ce cas, un peu comme pour les que Jean-François Copé saura faire de l’ancienne
retraites, d’un chantier à long terme. Un deuxième secrétaire d’Etat le meilleur usage à l’UMP.
chantier a été annoncé récemment, qui devrait
déboucher à l’été 2011 : il s’agit de la réforme du L’ouverture qui avait marqué le début de mandat
système fiscal. de Nicolas Sarkozy avait profondément irrité sa
majorité. La voilà comblée !
Mais dans ce cas, il est clair que les propositions qui
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seront formulées seront essentiellement destinées Pelens : Le pari de l’émiettement de la mouvance


à nourrir le programme du futur candidat Sarkozy centriste entre Borloo, Morin et Bayrou n’est-il
et à le délester autant que possible du boulet du pas très risqué ?
«bouclier fiscal» instauré en 2007.
Encore faudra-t-il voir si tous ces centristes vont
Pour le reste, l’agenda du président et du gouver- jusqu’au bout de leurs intentions plus ou moins af-
nement sera dominé par les enjeux internationaux fichées. Dans le cas de Jean-Louis Borloo, je doute
du G20, que préside M. Sarkozy pour un an, et par qu’il aille jusqu’à se présenter en 2012 contre Nicolas
le pilotage économique du pays. Sarkozy au risque d’apparaître comme un diviseur
de la droite.
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L’obsession du chef de l’Etat est à cet égard de tout


faire pour éviter l’atonie de la conjoncture et ses Dans le cas d’Hervé Morin, il lui reste à démontrer
conséquences très négatives sur le chômage. qu’il peut dépasser le stade des velléités. François
Bayrou, qui a déjà conduit deux campagnes prési-
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Christine : Pensez-vous qu’un remaniement dentielles, pourrait fort bien faire son miel de ces
aussi près de la présidentielle est une décision divisions et de ces amertumes.
judicieuse ? Ce nouveau gouvernement aura-t-il

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A moins que Dominique de Villepin, décidé à tout explorées depuis des décennies sans que personne
pour entraver la réélection de M. Sarkozy, ne par- n’ait jamais trouvé la pierre philosophale.
vienne à apparaître comme une sorte de recours
aux yeux du centre-droit. Arnaud : Le recrutement de Marie-Anne
Montchamp est-il un coup dur pour
Mais ce n’est pas le plus vraisemblable. Dominique de Villepin ?
André : Une stratégie de réunification du C’est en tout cas la démonstration de la volonté te-
centre est-elle possible ? nace du chef de l’Etat d’affaiblir tous ses rivaux. On
l’a vu avec le recrutement progressif des principaux
Elle est souhaitée par beaucoup des leaders de ce soutiens de Dominique de Villepin (Bruno Le Maire,
courant. Mais l’on assiste plutôt, depuis une dizaine Georges Tron, et maintenant Mme Monchamps).
d’années, à un émiettement de cette sensibilité po-
litique. Mais c’est également le cas avec la promotion de
Michel Mercier, qui était il y a peu encore le bras
Dans la Ve République, la règle est impérieuse : un droit de François Bayrou.
courant politique n’existe durablement que s’il est
porté par un candidat crédible à l’élection prési- Olivier : Mettre Alain Juppé à la défense,
dentielle. n’est-ce pas du gâchis vu ses compétences
?
Jérôme : Que penser de l’action à venir de Jean-
Louis Borloo quand il dit «retrouver sa liberté A vrai dire, ma surprise est qu’il soit de retour au
de parole» ? Que faut-il entendre par là ? gouvernement. Que peut-il en attendre, après avoir
été premier ministre et sur un poste ministériel où
Honnêtement, je n’en sais rien. Peut-être aura-t-il il sera sous le contrôle étroit et du président de la
envie de régler quelques comptes, notamment avec République, et du premier ministre, que les ques-
le premier ministre, dont il estime qu’il ne l’a guère tions de défense intéressent depuis toujours ? Le
soutenu dans les réformes qu’il a conduites. parfum du pouvoir est décidément irrésistible...
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Mais au risque de me tromper, je doute qu’il aille Mailman : La disparition du ministère de l’im-
beaucoup plus loin dans la dissidence. migration et de l’identité nationale sonne-t-elle
l’échec de la stratégie «droitière» du président ?
Peut-être est-il plus soucieux de préparer l’étape
ultérieure, c’est-à-dire l’après-2012. Sûrement pas, si l’on en juge par les initiatives prises
cet été par le président de la République. La dispari-
Maxime : Les ministères de la santé et du tra- tion de cet intitulé est cependant une surprise. C’était
vail sont-ils si peu importants que l’on puisse un des marqueurs symboliques et idéologiques de
les mettre sous la direction d’un seul ministre ? la campagne et de la victoire de 2007.
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Eternelle question du périmètre des départements Cela avait certainement contribué à convaincre une
ministériels. Le choix, difficile, est entre l’organisa- partie importante de l’électorat du Front national
tion de grands ministères transversaux permettant qu’il pouvait faire confiance à Nicolas Sarkozy. En
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une approche plus globale des problèmes et des gommant aujourd’hui cette référence, le chef de
ministères consacrés de manière plus spécifique l’Etat se débarrasse d’une étiquette devenue en-
à un domaine d’action. Toutes les formules ont été combrante, notamment après l’échec du débat sur

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l’identité nationale, il y a un an. Mais il risque de Tout comme le choix de François Fillon de continuer
convaincre les électeurs d’extrême droite que, déci- à faire équipe avec Nicolas Sarkozy.
dément, l’original (Le Pen) vaut mieux que la copie.
Mais le maire de Meaux n’a jamais caché ses am-
Louis : Que signifie l’entrée au bitions pour l’échéance suivante (2017) et sa prise
gouvernement de Frédéric Lefebvre ? en main du parti majoritaire, après celle du groupe
UMP à l’Assemblée nationale, témoigne d’une stra-
Il a été depuis vingt ans l’homme lige de Nicolas tégie à long terme.
Sarkozy, prêt à tout pour l’aider. Il est payé au-
jourd’hui de cette fidélité.

Il sera, à n’en pas douter, l’un des principaux co-


gneurs de la prochaine campagne présidentielle.

Guest : Pouvez-vous expliquer quelle


est l’importance du «classement
protocolaire» des ministres ?
On serait presque tenté de dire, dans le cas de ce
gouvernement, que ce sont les plus anciens qui
obtiennent les grades les plus élevés. Alain Juppé,
ancien premier ministre, et Michèle Alliot-Marie,
ministre à vie, sont les deux seuls à obtenir le titre
de ministre d’Etat.

Ensuite, l’ordre protocolaire est destiné symboli-


quement à marquer les promotions (par exemple
Nathalie Kosciusko-Morizet) ou les rétrogradations
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(Eric Besson) des uns et des autres.

C’est une satisfaction d’amour-propre pour les bé-


néficiaires, mais sans signification opérationnelle
plus marquée.

Philippe : Ne pensez-vous pas que pour l’UMP,


Nicolas Sarkozy n’a aucune chance d’être réélu
en 2012, d’où le refus de Jean-François Copé d’en-
trer au gouvernement ?
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Non, l’UMP ne peut qu’espérer la victoire de son


chef et s’organiser pour l’obtenir. Le choix de Jean-
François Copé de prendre la responsabilité du parti
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du président est, pour 2012 en tout cas, un choix


d’allégeance.

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