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Le Patrimoine Culturel
Immatériel
Le Patrimoine Culturel Immatériel
Juliiette El-Abiad
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Claude LEVI-STRAUSS, Claude LEVI-STRAUSS et les responsabilités de
l'ethnologue (compte-rendu) in Hérodote n°8, 4ème trimestre. Paris 2003. In
Le patrimoine culturel marocain sous la direction de Caroline
GAULTIERKURHAN, Maisonneuve et Larose. Paris 2003, p 381.
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Introduction
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Il réside un enjeu anthropologique. Il s'agit d'enrichir des
connaissances communes, d'établir une mémoire collective et
individuelle. Ce patrimoine culturel immatériel permet de
socialiser les êtres aux différentes pratiques culturelles et
d'instaurer un dialogue entre les communautés. Un objectif
semble occuper l'esprit des précurseurs de cette notion en pleine
essor : sauvegarder. Il ne s'agit pas de figer les différentes
formes de patrimoine culturel immatériel, mais de les faire
perdurer, de les rendre intemporelles. C'est une lutte contre
l'oubli et même un combat contre le délitement.
Nombre de chercheurs se heurtent à son caractère énigmatique
et déroutant. Qu'est-ce que le patrimoine culturel Immatériel ?
D'où vient ce paradigme patrimonial ? Comment comprendre le
syntagme qui associe les termes de « patrimoine », de
« culture » et d' «immatérialité » ?
A travers un questionnement autour de la notion de patrimoine
culturel immatériel, nous nous attacherons à comprendre
l'émergence de ce concept nouveau à partir du texte fondateur
qu'est la convention de l'UNESCO de 2003. Le texte juridique
fait acte de ce patrimoine. Il devient une institution (il est
reconnu officiellement au même titre que le Patrimoine
Mondial posé par la convention de 1972). Il s'agit de réaliser la
genèse de ce patrimoine pour en saisir les principaux enjeux.
Le cas de l'Oasis de Figuig inscrite sur la liste indicative du
patrimoine de l'humanité de l'UNESCO depuis juin 2011
permet de mettre à l'épreuve le texte de la convention. Après
avoir présenté les enjeux et les objectifs de ma mission (à
Figuig en Avril 2012) et son intérêt en tant qu'étude de terrain,
on s'attachera à décrire dans un premier temps les caractères
généraux de l'oasis : espace au premier abord nié et délaissé.
L'oasis de Figuig est un territoire riche et situé à la croisée de
plusieurs cultures. Cet écosystème (élaboré par l'homme)
permet de mettre en exergue l'interaction peu commune et
idyllique entre l'homme et la nature. Les ressources naturelles
contenues dans cette oasis permettent de faire vivre une
communauté. L'étude de terrain se rapproche d'une analyse
anthropologique, et d'une étude d'art. Les savoir-faire
immatériels (contenus dans cette oasis) sont dignes d'être
protégés et valorisés. Il s'agira de dresser une sorte d'inventaire
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du patrimoine culturel immatériel présent sur le site. L'étude du
patrimoine culturel immatériel Figuigui s'est orientée vers la
thématique du savoir-faire réalisé par les femmes. Le tissage est
une activité ancestrale à Figuig. Elle est représentative de la
diversité du patrimoine culturel immatériel et a permis de
mettre en application la définition posée par la convention de
l'UNESCO (article 2).
Enfin, l'approche critique de la notion de Patrimoine Culturel
Immatériel mettra en exergue les limites de ce concept. La
notion semble riche et ne cesse de s'enrichir. Elle est un concept
valise, une notion fourre-tout et polysémique qui appelle
plusieurs significations. L'UNESCO s'attache à réaliser des
partitions entre les différents patrimoines dits "matériels" et
"immatériels". Il s'agira de montrer qu’il y a d'ores et déjà un
lien fort entre le matériel et l'immatériel.
La notion de Patrimoine Culturel Immatériel semble être « à la
mode ». La course à l'immatériel est ouverte. Du tout-
immatériel à la patrimonialisation : la notion de patrimoine
culturel immatériel matérialise une angoisse. Cette
reconnaissance accrue du Patrimoine Immatériel a un enjeu
historique. Les pratiques restrictives du patrimoine ne sont plus
d'actualité. La notion de patrimoine s'élargit et même s'évase de
plus en plus. L'on s'attachera à mettre en exergue les non-dits de
la convention. Il s'agira alors de cerner les points obscurs,
contradictoires de la convention de l'UNESCO.
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Première partie : Le Patrimoine Culturel Immatériel, Un
patrimoine original et déroutant
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populaires et est une manifestation culturelle. Le patrimoine
culturel immatériel est le résultat d'un processus de gestation et
de bouillonnement de la recherche dans des domaines variés
tels que l'histoire, l'anthropologie, la sociologie et la sémiotique.
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Chapitre 2 : Un syntagme inédit et surprenant
L'on peut dire que ce sont trois notions assez floues. Le terme
de « patrimoine », de « culturel » et d' « immatériel » forment
un même syntagme. La démarche semble inédite et surprenante.
L'UNESCO s'attache à reconnaître l'aspect intangible du
patrimoine qui est doté d'un sens particulier, et d'une valeur.
La notion de patrimoine est assez large et complexe. Elle est un
concept à la mode. Elle tend à être une étiquette que l'on peut
poser à n'importe quel endroit. La notion de patrimoine culturel
immatériel ne fait qu'évaser encore plus le concept de
patrimoine. Elle participe à fonder et à faire perdurer une
politique de patrimonialisation accrue. Elle rompt avec les
pratiques restrictives du patrimoine d'antan (le patrimoine subit
une extension géographique et spatiale). Le patrimoine culturel
immatériel est pour ainsi dire « le reste » qui tend à être reconnu
officiellement.
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le concept de patrimoine culturel immatériel se situe à la croisée
de deux logiques : celle de l'institution et du populaire. Ce sont
deux approches du patrimoine. Elles peuvent se penser
séparément ou dans une dynamique globale. Dans la démarche
institutionnelle, le patrimoine est un symbole irréfutable et
régalien lié à l'émergence de la République. La logique
populaire se lie à une dimension plus sociale qui met en
corrélation des acteurs et des groupes sociaux. L'institution
englobe le patrimoine d'un cadre juridique, elle vient déterminer
des objets culturels, des lieux qui auraient une valeur
exceptionnelle et universelle. Cette logique savante trouve sa
légitimité en la mise en place d'instruments normatifs
matérialisés dans des labels ou d'autres procédures
réglementaires.
La logique populaire se lie à une dimension sociale. Elle touche
des individus conscients de leurs patrimoines culturels (qu'ils
soient matériels et immatériels) et qui formeraient un groupe
social qui partageraient les mêmes valeurs et les mêmes
pratiques.
L'étymologie du patrimoine provient du latin patrimonium qui
désigne les biens d'une famille à transmettre de père en fils. Le
concept évolue, le patrimoine est fondé sur l'idée d'une
possession et d'une transmission. Désormais, le terme de
patrimoine désigne des biens culturels, des modes de vies et des
réalisations qui apportent une reconnaissance à un lieu, et,
édifie une identité (nationale).
La notion de patrimoine reste une notion très complexe. Elle est
le résultat d'un d'héritage de père en fils destiné à être protégé
dans l'intimité du foyer familial puisqu'elle est le résultat d'un
processus de transmission : une fois le bien transmis l'héritier
devient le possesseur et le propriétaire de ce bien (héritier =
dépositaire = propriétaire). Le patrimoine familial a un sens
fort, il est un symbole familial et structurant pour la famille. Il
se lie à des notions d'historicité et d'anthropologie. La tradition
de la notion de patrimoine a montré que la prise de conscience
par les individus de leurs patrimoines culturels aurait permis le
passage du fait familial à la notion de patrimoine comme bien
de la nation. Le patrimoine deviendrait alors une vitrine du
génie de la nation et un témoignage physique et sensible d'une
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identité et d'une sociabilité acceptée et partagée. On dira donc
que l'on est passé du patrimoine familial, transmis de génération
en génération à un patrimoine collectif.
Le concept de patrimoine culturel immatériel permet de voir
cette évolution, mais de manière inversée. L'on retrouve
vraisemblablement cette notion de transmission de génération
en génération (revendiquée aussi dans le texte normatif - Article
2), mais a contrario le patrimoine culturel immatériel garde une
certaine dimension intime. Il est publicité par la contrainte du
texte juridique qui désire assurer la visibilité des cultures. La
particularité du patrimoine culturel immatériel est que le bien
reste dans une intimité, dans une transmission familiale. La
dimension identitaire est ressentie par la communauté d'où
s'extrait le savoir-faire ou la représentation. Les pratiques
ancestrales n'avaient pas besoin que la catégorie patrimoniale
qu'est le patrimoine culturel immatériel émerge pour que les
communautés prennent conscience de leurs patrimoines et de
leurs pratiques. Malgré la volonté de reconnaissance
internationale, le patrimoine culturel immatériel reste un bien
intime. Il opère une synthèse entre l'intimité de la famille, la
reconnaissance locale de la pratique (en tant que bien de la
nation) et l'identité collective qu'il représente. La logique
populaire prend le pas sur la dimension institutionnelle qui n'est
autre qu'un simple aspect juridique qui doit néanmoins réguler
et administrer le patrimoine culturel immatériel.
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