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la France et de
l'étranger
Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
Revue philosophique de la France et de l'étranger. 1876.
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PhHosophîque
de ta France et de t'Étrangler
_n_
Revue
PhHosophique
de la France et de l'Étranger
CINQUANTE-HUITIÈME ANNÉE
1933
cxv
1 7 2 5 ~)
train.
La allemande, qui a dominé le mouvement psycho-
psychologie
dans la seconde moitié du dernier siècle, me paraît s'être
logique
totalement désintéressée de l'étude des ressorts de l'activité men-
pas une psychologie qui s'oppose à une autre. Elle n'est qu'une
façon d'envisager les phénomènes mentaux ou, si vous préférez,
les phénomènes de la conduite.
Mais cette façon d'envisager est-elle légitime?
A mon avis. l'homme de science doit être débarrassé de tout
que nous nous mettons soit à rénéchir, soit à vouloir. Mais. dans
demandez par quelle autre rue il est le plus court de passer la tin
logues ne sont-ils pas comme ces enfants décrits par Piaget, qui
'< a une définition avant d'être capables de la faire passer
agissent
sur le plan. de la pensée et du langage? Eh bien! la définition de
quels sont les stimuli qui le provoquent, quelles sont ses varia-
tions dans la série animale,, quelle est son origine biologique, etc.
E. CLAPARÈDE. LA PS\ CHOLUCIE FO~GTfO\ËLi.E t i
a-ique des processus, elle n'est pas portée à rechercher par quelle
suite de circonstances ces adaptations se sont peu à peu formées.
que les fameuses lois de l'association ont perdu la valeur qu'on leur
et était un appartenant à
mait, qu'il par conséquent phénomène
la vie puissent être ses racines végétatives).
mentale (quelles que
Car tes nécessités de la conduite impliquent cette loi qui se for
En. CLAPARÈDH.
TOMECxv.–1933(N~let2). 2
Dans le taureau de Phalaris
Spinoza qu'ils l'ont laissé loin derrière eux et s'en sont com-
1. L'homme doit, par la pensée atteindre à une ~énératité telle qu'il lui
devienne enectivement indifTerent s'il existe ou s'il n'existe pas, c'est-à-dire s'il
existe ou s'il n'existe pas dans la vie finie, de sorte que «si fractus illabatur
orhis. impavidum ferient ruinœ comme disait le poète romain; cette indiffé-
rence doit être encore ptus proche au chrétien.
33 REVUE PHBLOSOPHIQBE
11
La Critique de la de tout
raison pratique Kant provoquait par-
ticulièrement l'irritation de et de ses et
Hegel disciples, précisé-
ment parce qu'ils y trouvaient portée au maximum cette « édifica-
tion .) dont nous venons de On sait la de la
parler. que Critique
raison pratique est tout entière fondée sur l'idée du de
devoirpur,
ce que Kant appelle l'impératif Du la « critique
catégorique. reste,
de la raison » aussi bien en généra) 1
théorique que pratique était
insupportable pour HegeL Critiquer la
à ses yeux raison
un était
péché mortel contre la philosophie. Il se moquait de toutes les façons
des « critiques » de Kant et comparait le philosophe de Kœnigsberg
à ce scolastique qui voulait apprendre à avant d'entrer
nager
dans l'eau. Les plaisanteries passent souvent pourde& arguments,
et l'ironie de un certain bien
Hegel produisit effet, que sa compa-
raison fut complètement fausse- Kant avait-il commencé se
par
demander comment il fallait et ne s'était-il
philosopher attaqué
aux problèmes avoir obtenu une
philosophiques qu'après réponse
à cette première question? Kant termina sa de la raison
Critique
pure à cinquante-sept an&; il s'occupait déjà de philosophie depuis
de longues années sans se demander si les de recherche
procédés
de la vérité qu'il utilisait comme tout le monde dans le domaine des
sciences exactes, pouvaient être à la solution des
appliqués pro-
blèmes métaphysiques. C'est vers la soixantaine sous
seulement,
l'influence du '< scepticisme a de Hume ou bien
peut-être, frappé
par les antinomies qu'il avait rencontrées sur les confins de la
pensée, que Kant, comme il le raconte lui-même, se réveilla de son
sommeil dogmatique; c'est alors en lui ces doutes
que surgirent
qui l'amenèrent à la « )) de la raison r peut-être les
critique que
méthodes de la recherche de la vérité élaborées par les sciences
exactes et qui donnent de si excellents sont inapplicables
résultats,
CHESTOV. DAXS LE TAUREAU DE PHALARIS 23
eùt été réalisée, elle aurait ruiné les fondements mêmes de la pensée
humaine. Que cette Inquiétude n'était pas entièrement étrangère
a Hegel. on le devine à certaines réflexions de la Phénoménologie
Inzwischen wenn die Besorgniss in [rrthum zu gehen, ein MIss-
trauen in die Wissenschaft sezt, welche ohne dergleichen Beden-
ktichkeiten ins Werk se))st g-eht und wirklich erkennt, so ist nicht
trauen gesetzt und besorgt werden soll, dass diese Furcht zu irren
philosophie pour une telle lutte entre les méfiances? Kant savait
avant Hegel, et il en parle suffisamment dans son livre, que les
naissance. mais que l'on pouvait aussi s'en méfier. H écarte aussitôt
cette pensée, il est vrai, en indiquant. « was sich Furcht vor der
Irrthum nennt, sich cher aïs Furcht vor der Wahrheit zu erkennen
ist Mais il est peu probable que cette considération puisse faire
III
possédée d'une passion comme tout être limité, devrait déjà suffire
à nous mettre sur le qui-vive et à rendre suspects à nos yeux la
raison et ces jugements généraux et nécessaires auxquels elle
toutes les
recherches, à toutes les curiosités. Et en même temps
personne ne doute qu'en nécessaires
pénétrant jusqu'aux rapports
des choses, la pensée accomplitla tâche suprême de la philosophie.
De sorte que Hegel voyait assez en somme lorsqu'il
juste
démontrait a pas de « philosophies « la
qu'il n'y », qu'il y a
philosophie », que tous les philosophes ont toujours compris de
même la mission que leur avait le destin. Tous ils cher-
imposée
chaient à découvrir l'ordre rigoureux et immuable de l'être, car
tous, et ceux-là même qui comme Socrate savaient qu'ils ne
savaient rien, étaient complètement l'idée cet
hypnotisés par que
ordre qui ne dépend de personne devait exister, qu'il était
qu'il faut lui obéir. Bien entendu, les sciences exactes établissent
elles aussi les rapports nécessaires des choses et enseignent aux
hommes l'obéissance, mais
la philosophie ne se contente pas de
cela il ne lui suffit pas que les hommes acceptent la nécessité et
s'accommodent d'elle elle veut obtenir des hommes qu'ils aiment
la nécessité, qu'ils la vénèrent comme au temps jadis ils aimaient
et vénéraient les dieux.
Il se peut que la différence essentielle entre Socrate et les
sophistes, ainsi que plus tard saint Faut, réagirent avec violence:
s"T~. (Pour ce qui est des dieux, je ne sais s'ils existent ou s'ils
n'existent pas.) Devant ses devaient se sur
juges qui prononcer
l'accusation d'athéisme d'Anitas et de Mélyte. Socrate dit en
somme la même chose que Protagoras: mais comme il s'agissait
de l'immortalité de l'âme et non de l'existence des dieux, nombre
de gens se figurent encore aujourd'hui que Socrate pensait
autrement que Protagoras. En réalité tous deux de la
partaient
même idée. mais y réagissaient différemment, bien la
qu'avec
même passion Protagoras disait Si les dieux n'existent si
pas,
l'âme n'est pas immortelle, si la vie humaine se réduit à cette
brève existence terrestre qui commence par la naissance et se
30 REVUE PHILOSOPHIQUE
termine par la mort, si nous ne sommes pas reliés par des liens
invisibles à des êtres supérieurs, bref, si tout ce qui commence
dans ce monde y finit aussi, alors qu'est-ce qui peut enchaîner le
que les nier. De plus cela il ne le disait pas mais il est à croire
peut-être n'existent-ils pas, c'est donc que la cause des dieux est
perdue il y a tout lieu de croire qu'ils ont été inventés par les
hommes. Et cependant, la solution proposée par Protagoras était
réjouir lorsque l'on sait que les jours sont comptés et q-ue l'on
n'est pas sûr du lendemain?
Bien avant Socrate, les grands philosophes et les poètes grecs
considéraient avec terreur l'angoissante in-certitude -de notre dou-
loureuse existence. Héraclite enseignait que tout passe, que rien
ne demeure. Avec une force qui n'a jamais été depas&ée les tra-
rêves, tous les espoirs des humains. Mais il n'était déjà plus
donné il Socrate de parler ainsi nous ne savons pas ce qui nous
tacite qui lui incombait. H voyait tout aussi bien qu'Aristote que
l'homme savant être méchant, mais il avait découvert
pouvait que
notre existence se termine avec la mort: puisqu'il en est ainsi, le
IV
raison; celte-ci n'avait pas créé le monde, il est vrai, mais elle
nous offrait en nombre illimité ces mêmes fruits contre lesquels
le Créateur nous avait mis en garde. Il faut croire que ce fut
de biens au
avait recours au minimum temporels pour échapper
mais ce taureau n'est pas une fiction, c'est la
taureau de Phalaris;
il
réalité même. Et pas le droit
le savoir de niej? son existence;
n'a
court à toute tentative ayant pour but d'expulser
doit même couper
de Phalaris hors des limites du réel. Tout ce qui est réel
le taureau
raisonnable. C'est ce que disait Hegel. C'est
doit être reconnu
deux mille ans avant lui Aristote ~rx
ce que disait aussi
dans la nature de toute
-p <pu<~ ~E~
-H e~. (Il y a du divin
CHESTOV. fU\S LE TAt'RRAt.' nE PffALARIS 3S
chose '.t De sorte que t'en peut trouver des traces de divin jusque
dans le taureau de Phataris. et la raison n'a par conséquent pas le
droit de lui refuser sa bénédiction. Finalement, la sagesse apporte
a t homme non pas ~uox'.jjLc'xv,
non pas la béatitude, mais quelque
chose de tout différent ou pour mieux dire, la béatitude promise par
ta sagesse est pire que tes pires malheurs qui frappent les mortels.
Mais comment ta sagesse qui les conduit jusqu'au taureau de Pha-
taris pourra it-elte séduire les humains? En homme pratique Aris-
tote sentit le danger il comprit, que la sagesse de Socrate ne peut
trouver dans te monde ce désintéressement, cet esprit de sacrifice
-.ur tesquets comptait son éthique. Et ce même sens pratique souffla
a Aristote que le mépris que les philosophes témoignent d'ordinaire
a la foute. -o~~cAA~ était simulé. La philosophie ne peut se passer
du consensus omnium sous ce rapport elle apparaît comme
à la recherche du
Socrate. Mais comme je l'ai déjà indiqué, parti
du Socrate's'adressa aux hommes dont
savoir et bien, justement
disait ne savaient rien, n'entretenaient aucun rap-
lui-même qu'ils
le bien et ne se vantaient de leur science que parce
port avec
toute honte Socrate se tourna vers les méde-
qu'ils avaient perdu
vers les cuisiniers, les charpentiers, les hommes poli-
cins.
etc. Les historiens de la philosophie sesont souvent demandé
tiques,
le des hommes avaient pu confondre ce qui
comment plus sage
dans la vie quotidienne avec ce qui est moralement bon;
est utile
ils ont vu là une de ces inconséquences que ne parviennent pas à
TMVT&; K~pMKo: opEYo~T~t T;~ ~E: ToS e~Evot: (Tous les hommes
aspirent par nature à la connaissance), se hâte
qu'il d'ajouter
S'j TEv ix~cEEM~ se voit au
T/jp.E~v oLy~TjfTtç (cela déjà plaisir que
donnent aux hommes les perceptions sensibles). Mais Aristote
savait parfaitement la connaissance se
que distingue « toto cœ)o
de la perception sensible. Nous nous souvenons avec quelle insis-
tance il soulignait la connaissance
que est la connaissance du
général et du nécessaire, et c'était cette connaissance
que que
recherchait la science. Il faudrait donc dire la connaissance part
de l'expérience finir l'écarter
pour par complètement. 11 n'y a pas,
il ne doit pas y avoir dans la science
place pour v, -rS~ xis~creMv
0")~?)~; le but de la connaissance est de se détacher du donné sen-
sible, de le surmonter. Le donné sensible est chose
quelque qui
surgit et disparaît constamment et ne demeure jamais, quelque
chose dont on ne et dont il faut se
peut s'emparer débarrasser par
conséquent, ou comme s'expriment les au-dessus de
philosophes,
laquelle il faut s'élever. C'est ce et tel fut
qu'enseignait Socrate;
aussi le sens de la « conversion x de le
philosophique Spinoza
caractère versatile et fuyant de tout ce qui est terrestre rem-
plissait son âme d'inquiétude et ainsi )avoue
d'angoisse, qu'il
lui-même dans son Trac~a~Ms de eme~a~'o~e intellectus. 'H ï5~
KM~eMv ayM-qs-t;, l'attachement au donné sensible, ainsi
qui, que
le remarquait justement Aristote, est à tous les hommes et
propre
que Spinoza éprouvait aussi, constitue à première vue une apti-
tude très naturelle; or en réalité il est lourd de menaces et nous
prépare les pires comment s'attacher à ce
catastrophes peut-on
qui a un commencement et doit, avoir une fin?
par conséquent,
.Comment peut-on admettre cette Plus nous nous
dépendance?
attachons ardemment au au passager, douloureuse
temporel, plus
sera la souHrance de l'arrachement le moment viendra
quand pour
l'objet de notre attachement de rentrer dans ce néant d'où il a
surgi pour un court instant. Bien que ~) T<j,;v K~e~ce~ soit
Kyx~T'ç
propre à tous les hommes, il ne constitue une vertu
pas commune,
un principe de force, mais un défaut un de fai-
commun, principe
blesse. Et si Aristote l'a du ce n'est
rapproché savoir, qu'à la faveur
d'un malentendu, peut-être conscient. Aristote est sorti de Socrate
et de Platon et, comme nous le savons, il a toujours
souligné que
MOo~ou Y&p o:[ m;cT~o:[ Tcx~TMv et si tout se réduisait aux
que per-
DE t'HAL.\)![S 39
CHESTOV. DA'sS LE TAL'REAL'
et ce mur « custodit in
ojipositorum que angélus ingt'essu para-
disi constitutus x? I[ est vrai qu'il n'est donné à
pas apparemment,
l'homme d'écarter cet ange. et puis. non seulement Spinoza qui ne
question qui s'est présentée à lui? Cent ans plus tard Kant tomba a
dans le même piège. La métaphysique, dit-il, doit décider si Dieu
1. Ëtb. I, App.
CHESTOV. DA~ LE TAUREAU DE PHAJLARtS 43
"1 '1 1 11 1 f f 1
tative se débarrasser de celle-ci aboutit toujours au même
pour
résultat on se débarrasse non de la contradiction mais du pro-
blème. Est-ce à faut l'indiquer? Un âne placé à
Spinoza qu'il
distance entre deux bottes de foin, mourra de faim, dit-i),
égale
mais ne se tournera pas vers l'une ou l'autre à moins que n'inter-
war ') Et, en effet, d'après notre raison, la liberté c'est le libre choix
non pro re cogitante sed pro asino turpissimo habendus est Mai--
Vil
philosophie pour tous les temps. Or c'est grâce à ces fruits que
l'homme avait acquis la faculté de distinguer entre le bien et le mal
et s'était vu forcé de se soumettre aux lois du bien. De sorte que
si Socrate dans l'antiquité et Spinoza dans les temps modernes ont
goûté de ces fruits, ils ont par cela même renié la vérité et l'ont
comme s'il avait été écrit qu'il suivrait en tout Socrate et révéle-
rait ce que Socrate avait tu, Spinoza déclare dans l'avant-dernier
théorème de l'Éthique (avant de dire « beatitudo non est
VIII
que l'homme privé de liberté non pro re cogitante, sed pro asino
Il Il- 1
<Hates de la conscience. tant qu'elles ne sortent de ieurs
pas pro-
que nous n'aurons jamais de libre arbitre ou qu'il nous est interdit
de et de maudire quand nous constatons notre volonté
pleurer que
n'est libre, ou que nos malédictions et nos notre déses-
pas pleurs,
et notre ra~e ne parviendront jamais à renverser, a briser
poir
cc~e « /)/x/oso/)/a/7! {.'era~! ') <yMe nous la co~~a/s.sanee. e/
/'ourH~
<7 reco~<~uer;r notre /<6e/c /)fyf/ue. Mais s'il en est ainsi, l'affir-
ideo opus est. ut lege humilietur, ut sic bestia ista, opinio justitise,
occidatur, qua non occisa homo non potest vivere. » Dans tous ses
pire ennemi. Celui « qui sola ratione ducitur < ne peut plus recou-
vrer sa liberté perdue; il ne lui reste plus qu'à apprendre et à
aux autres à trouver le « meilleur » dans l'inévitable. Il
enseigner
faut se considérer bienheureux jusque dans le taureau de Pha-
quam tex et ratio, neque itta duo sine ma~no conatu et tab'ore
lait avec tant de mépris, réveillent dans l'âme de Luther tous les
« ridere, lugere et detestari que la raison avait ensorcelés.
Luther oublie « obedientiam s et « pietatem » sous la domination
LÉON CHESTOV.
(/1 suivre.),
Le scepticisme de Hume
iiqnes de son
temps.
Non seulement il s'est intéressé aux découvertes des mathéma-
ticiens touchant le calcul des probabilités et le calcul innnitt-
simal. aux expériences des physiciens touchant la décomposition
de la lumière, et surtout aux recherches des « naturalistes ') tou-
chant la paléontologie, la géologie et la biologie' mais, comme
l'a justement noté M. Lévy-BruhP, il a été. autant qu'homme de
son siècle, dominé par le prestige de la synthèse newtonienne
Vi~tUttS~
t. t.. p. t3S-t56.
t.. p. t3.
3. Tr., p. t86-)87.
TOMECXY.–d933(X~iet2,.
66 REVUE PHILOSOPHIQUE
1. 1., p. iss-tso.
2. Tr., p. 272.
3. I., p. '63; cf. Tr., I. )H, aect. t.
J.LAPORTE.–LESCEPTtCMMHDEtfL-M): 67
1. Ibid.
2. Voir l'Essai de Locke, par ex. tV, H, 2 et 7.
3. Voir Recherche de la vérité, t, U. n° 1.
4. Voir toutes tes jRc~ui~e.
5. C'est le mot dont se sert Thomsen.
6. Tr., p. 74-75; cf. I., p. 21-22.
7. C'est encore a peu près ainsi que l'entend M. RudotfMetz.
8. Tr. p. 13-16. Voir à ce propos, comme modèle d'inintelligence., la critique de
Gi'eun (Introduction, t. t. p. 207, 208, et p. 167-tCS).
t). Tr.. p. 16; cf. p. 8 et p. 275-276; p. )8.
)U. Tr., p.275-276 et p. 7-8.
J. LAPORTE. f.E .SCEPTfCtSMF. DE HL'ME TX
"i
t. Tt' p. 275-276: cf. p. 287 et suiv.; p. 422-42:t: voir aussi )es Df'aio~ufs sur la
rf'/t~fon naturelle, 2~ part.
2. Tr. Ibid., 273-27f;: cf. ru qu'il dit (Tr., p. 60-6!), des dissertions ima~-
p.
nitires du cerveau
3. Tr.. p. 7-8.
4. ~'uus v n'vi<')idrnrts ton~'ucm~n! a propos de la théorie de la crnyanee.
5. L, p. 18.
~4 REVUE PHILOSOPHIQUE
Il
1. Voir Locke, Essay, IV, 17, n" t et les remarques de Leibniz sur ce chap)).)'~
dans les Nouveaux Essais; cf. Tt' p. 69 et p. 464 (note).
2. Tr., p. 13 et suiv.
3. Tr., p. 13 et suiv. p. 69 et suiv.; p. 463 et suiv.
4. Voir Locke, Essay, ii, ch. 25, n''S.
5. Tr., p. M et suiv. p. 73.
6. I., p. 25; cf. LM., p. 287; et Tr., p. 463 et suiv.
7. Tr., p. 69 et suiv.; p. 74 et suiv.; p. t2t, fit'.
J. LAPORTE. LE SCEPTiCiSME DE HUME T7"1
1~ ,J~r'O" 4- 1- ~Al~ mc
les
la raison, ce sera donc envisager à tour de rôle
Critiquer
relations en nous demandant de chacune
>ept joMosopA~ues,
d'elles. suivant la règle adoptée que voyons-nous, qu'avons-nous
dans la conscience alors que nous t'affirmons?
tude que l'idée d'étendue n'est qu'une copie de ces points colorés
1. Tr., p. 34.
2. Ibid., p. 36.
3. lbid., p. 38.
/6M., p. 34.
S. Ibid., p. 34: cf. p. 20 et suiv. Nous exptiquernns. par la suite, quel est, chez
Hume. le vrai sens de cette théorie de la p'eneraiisation.
6. lbid., p. :).
78 REVUE PHILOSOPHIQUE
jouées sur une flûte », on ne veut pas dire que « le temps soit une
sixième impression qui se présente à l'ouïe, ni à aucun autre des
sens », ou « réflexion
qui naisse d'une » sur ces cinq impressions
sonores II n'y aurait, sans doute, nulle absurdité à supposer
que « la nature eût ainsi formé les facultés de l'esprit » « qu'il
points colorés
Ainsi « l'idée de temps non plus que l'idée « ne
d'espace,
dérive pas d'une impression particulière mêlée aux autres, et net-
tement discernable d'avec elles, mais provient globalement (a/~o-
1. Ibid., p. 33.
2. Ibid., p. 36.
3. .H6d., p. 37.
4.. /iM.. p. 37.
3. Tr., p. 37 without considering thèse particutarsounds cf. Tr., p. 3t n'c
omit the peeu!arities of colour, as far as possible, and found an abstract idea merc)v 'v
on tbat disposition of points, or manner of appearance, in which they agrce
6. Ibid., p. 37.
7. /6M., p. 39 et suiv.
8. MM., p. 39, 40 et p. 53.
9. 76M.. p. 3~, 36, 37, 39.
J. LAPORTE. LE SCF.PTtOSHE DE HCHE '79'
t. Ibid., p. 25.
ne
2. Le temps, n'apparaissant pas en tant qu'impression pnmaire distincte,
garait manifestement consister qu'en différentes idées, différentes impressions,
ou différents d'une certaine manière. Tr., p. 37; cf. p. 429.
objets, disposés
3. t[ va de soi que je ne prétends pas assimiler la conception bergsoniennc,
qui insiste tant sur la continuité de la durée, à celle de Hume qui compose le
moments indivisibles Voir Tr., p. 47. Je dis seulement que celle-ci
temps de
non moins que cette-ta admet et même implique, en dépit des allégations toutes
gratuites de M. Whitehead, une expérience directe de la succession comme telle,
encore que cette expérience pose un problème (celui de la mémoire et de l'iden-
tité du moi), dont Hume, nous le verrons, n'est pas arrivé à trouver la solution.
Je dis en outre que, dans l'une et l'autre doctrine, la succession ainsi éprouvée,
en une compound impression les impressions successives, est bien
groupant
une sorte d'organisation (organisation sui generis, naturellement, et très différente
de l'organisation au sens conceptuel du mot).
4. Tr., p. t68-t69.
5. Tr., p. M.
J. LAPORTE. LE SCEPTICISME DE HUME Si
autre action '), alors même que cette autre existence ou cette autre
là un pas fait par l'esprit qui est sans doute d'une pratique cou-
Tr., p. 73.
2. /btd., p. 73.
:t. /6;d., p. 73-75 et p. 89-HO.
4. p. 26 et p. 76.
a. t., p. 4[ et suiv.
TOMECXY.–i933(N'e!.2'. 6
82 REVUE PHILOSOPHK~OE
rante dans les sciences de la nature, mais qui n'en offre pas moins,
au regard de la knowledge, un scandale car il a lieu en quelque
sorte -dans le vide., .sans être, à ce .qu'il semble, « soutenu ') par
rien Si connaître c'est voir, par quel miracle peut-on voir un
Quoi donc?
fois deux sont considérés comme causes ou
Chaque que objets
effets l'un et l'autre, nous constatons qu'Us sont conligus dans
t. p. 41.
2. Tr.. p. 87 et suiv.
3. Tr., p. 75-77 et p. tS3.
4. Tr., p. t35 et p. 168.
5. T)' p. 77.
J. LAPORTE. LESCEf'TtCtSMEDHHUME 8.?
mander à sa jambe ou à son bras, non moins qu'à l'état normal '?
). Ibid., p. 66.
2. /b)'d., p. 66.
3. t.. p. 66-67.
4. Tr., p. 632-633.
5. p. 68.
6. 76;<< p. (i8.
88 REVUE PHILOSaPH!<?t)'E
Tt~eessctt're
En résumé, donc, une enquête minutieuse nous conduit à
t. t., p 67.
2. /6t<f. p. 09'
3. Ibid., p. 69.
4. ~<M. p. 7t.
5. l6id., p. 09.
G. 7&'d. p. 7i.
7. ~)M. p. 68-69.
8. Dialogues, I1, IV, VII.
9. Tr., p. 24.
10. L, p. 68 et suiv.
U. p. 68 et suiv. et p. 73-74.
t2. Tr., p. i6t.
J. LAPORTE. LE SCEPTICISME DE HUME 87
analyses précédentes
Idée ou impression, ou quelque nom qu'on lui veuille donner,
la représentation de la causalité est,par définition, celle d'une
connexion nécessaire. Or qui dit connexion nécessaire dit, d'une
part, que nous avons affaire à deux termes distincts d'autre part,
que ces deux termes ne vont point l'un sans l'autre. S'ils ne vont
point l'un sans l'autre. et peu importe ici que la liaison soit tenue
i. Tr.. p. 7: L, p 22 (note).
2. Tr.. p. 77; voir plus haut p. 24.
:i. t.. 2t) et :)U.
4. Tr.. p. t6t-[62; cf. I.,p. M): Si la force or)~!ne!if('tait connue, son efTet lui
austt devrait t'être, puisque toute force est rotative à son effet.
5. [.. p. M.
(t. p. 27.î.
88 REVUE PH!LOSOPHK)UË
Mais ces
Il--
elles-mêmes
,ot
se ramenant ào des
raae
signes'. propriétés
réactions seule révèle l'expérience, il
actions et éventuelles, que
reste vrai de dire absolument nul effet n'est pour
toujours que
une fût-elle assignable a priori.
intelligence humaine 2, parfaite,
à ce ce sont les d'ordre
Ce qui nous trompe sujet, phénomènes
de nous être nous
élémentaire qui à force familiers, paraissent
« naturels » et comme allant de soi. « Nous nous imaginons que,
introduits dans ce monde, nous aurions pu Inférer
brusquement
boule de billard, recevant une impulsion, communiquerait
qu'une
son mouvement à une et n'était point besoin
autre; qu'il
avec certitude à son
d'attendre l'événement pour prononcer
en est comme nous
sujet 3. » Illusion pure la preuve qu'avertis
des observations de la façon dont les
le sommes, par répétées,
choses se passent, il nous est pourtant loisible, non pas de croire,
mais de se passent autrement
sans. doute, penser 4 qu'elles
(. Quand une boule se mouvoir en ligne
je vois, par exemple,
une autre savoir « qu'un mouvement de la
droite vers )', j'ai beau
seconde boule sera le résultat du contact ou de
l'impulsion
< m'est-il de concevoir cent événements différents
impossible que
de celui-là eussent tout aussi bien résulter de cette cause ? Ces
pu
boules ne toutes deux demeurer dans un repos
peuvent-elles
absolu? La boule ne revenir en droite ligne?
première peut-elle
Ne de la seconde, dévier suivant une direc-
peut-elle, s'éloignant
tion Toutes ces sont cohérentes et con-
quelconque? suppositions
5. » Ainsi avant ou après l'événe-
cevables donc, qu'on l'envisage
au
ment, le lien qui unit le phénomène appelé effet phénomène
à la comme c entiè-
appelé cause, ne saurait apparaître pensée que
rement arbitraire~ ».
Du serrant davantage son argumenta-
reste, poursuit Hume,
nous venons de dire la liaison nécessaire d'une cause et
tion, que
effet de deux de
d'un signifierait proprement l'inséparabilité
de l'aveu est différent de la
nos perceptions. Mais, général, l'effet
). Ibid., p. 2a.
2. Tr., p. 10, 18, 24, 25, 79, 80. 87, etc.
t.. p. 47.
4. Tr., p. 79: I., p. 29-30.
~i. 1., p. 68 « nor cven concei~abif. »
0. Tr.. p. i62.
7. Tr., p. 164 etsuiv. cf. p. 74 et suiv.
8. Tr., p. 87 p. 162 et suiv. On a souvent objeeté à Hume et Hamelin a
rpcucUh cette objection, que nous ne considérons pas le comme cause
jour
de la nuit. Mais c'est mal comprendre la remarque de Hume. Car ne croyons-
nous pas qu'en vertu du mécanisme du système so)aire la nuit doit
astronomique
nécessairement faire suite au jour? Il y a donc connexion nécessaire, quoique
médiate, entre la nuit et le jour, à peu près comme, dans une horloge,
entre la sonnerie et la marche des aiguilles. Et Hume ne veut pas dire autre
chose.
9. Tr., p. 88.
'90 REVUE PHtLOSOPHtQUE
votr
oir Imoression
Impression toute
t.nutf u interne
tntfrnf na ~t
et «« r)~
de T.<f)&v;~n2
réflexion~ ~tr,;e
o. Mais ~~m.
comme
1 expérience encore le montre « l'esprit possède un grand pen-
chant à se répandre sur les objets extérieurs, à ces objets
à joindre
toutes les impressions internes qu'ils occasionnent et qui font tou-
j ours leur-apparition en même temps que ces objets se découvrent au
sens 3 », nous projetons hors de nous cette « détermination », cette
sentie en nous. et nous n'hésitons
impulsion pas à la «transporter a
dans les êtres, même corporels, qui nous entourent. Bien entendu.
quand nous venons à considérer de près les dits nous
êtres, n'y
trouvons nulle trace de tout cela et nos idées de cause ou de con-
nexion nécessaire nous semblent alors vides de contenu C'est
une erreur de perspective « Somme toute, la nécessité est quel-
que chose qui existe dans l'esprit, non dans les et il nous
objets
est à jamais impossible de nous en former une si
Idée, éloignée
soit-eHe, à la considérer comme une existant dans les
qualité
corps H
La nécessité n'est pas dans les choses, mais dans l'esprit
C est dans l'âme que « réside le pouvoir réel des ainsi
causes,
que leur connexion et leur nécessité' a! Est-ce à dire, comme
l'ont cru certains interprètes malavisés~. Hume finisse
que par
se rallier tout bonnement aux doctrines avant et
qui, après
Biran, mettent la source de l'idée de cause dans la conscience
d'une force Non Hume.
supra-corporelle? évidemment, puisque
nous l'avons vu, réfute ces théories des
par arguments exprès,
et puisqu'il déclare « Si rien n'est actif
catégoriquement que
ce qui possède un pouvoir la en aucun
apparent, pensée
n'est,
cas, si peu que ce soit plus active la matière » Ce qui
que appar-
tient à l'âme, ce n'est donc une causale au sens où
pas énergie
nous avons pris ce terme, une d'un etTet dif-
énergie productrice
férent d'elle-même et en découlerait nécessairement. C'est un
qui
faux-semblant d'énergie et de causalité, c'est l'amorce du pro-
1- ..at.L.
d'illusion où nous sommes conduits à attribuer aux
cessus par
mériter le nom de connexion
objets quelque chose qui nous paraît
A parler exactement, c'est une habitude, ou plutôt ce dont
causale.
nous avons conscience dans l'habitude une disposition (e~er/Hma-
autrement dit une inclination, un
lion) qui nous porte (conveys),
à passer d'une idée à une autre*. Ce pen-
penchant(propensity),
si ce n'est fait nous
chant n'est aucunement, nécessaire, qu'en
à lui résistera Et il marque bien, entre l'idée de ce
n'arrivons pas
cause et l'idée de ce qu'on effet, une « transi-
qu'on appelle appelle
tion du tout une « connexion réelle~ car il ne fait
», mais point
un terme aux deux termes qu'il s'agi-
qu'ajouter supplémentaire
rait d'unir. « Le principe d'union existant entre nos perceptions
internes est aussi celui qui existe entre les
inintelligible que
objets extérieurs~. »
phique, concernant les objets, mais qui n'est rien de plus que le
d'autre en un élément irréductible à
rapport spatio-temporel; part
la conjonction mais revient à l'association habi-
constante, qui
tuelle des idées dans relation naturelle6. C'est-à-dire
l'imagination:
au fond de la notion de cause
que tout ce qu'il y a de spécifique
est le sentiment d'une tendance subjective, mystérieusement
formée et mystérieusement objectivée~.
causale'. Il est vrai que Hume. de son côté, ne paraît pas s'être
autant soucié de la mettre en valeur. H ne la présente dans le
et l'unité~.
lève l'introduction du temps5. « Un
Impossibilité apparente, que
devant nous, et examiné durant un laps de
objet unique, placé
sans que nous y apercevions aucune interruption
temps quelconque
l'objet, lequel doit être multiplié pour être conçu comme existant
à la fois en ces deux points différents du ou bien, d'autre
temps
part, nous pouvons suivre le fil de la succession du temps au
pour mieux dire, est l'un ou l'autre, selon la manière dont nous
l'envisageons ').'
Mais encore, qu'est-ce que cette « manière », grâce
d'envisager
à quoi paraît un ce qui vient d'être reconnu multiple?
Nous avons eu précédemment l'occasion de noter que, confor-
mément à la distinction de Descartes entre la réalité objective et
la réalité matérielle des idées, et à la distinction de
(équivalente)
Malebranche entre idée et perception, Hume dans la
distingue
perception qui signifie pour lui, à l'instar de l'idée cartésienne,
n'importe quelle représentation, « un un soulier, une
chapeau,
pierre » d'une part l'objet il donne souvent le
perçu, auquel
1. Tr.. p. 30[.1.
2. 7&td.
3. /6M.
3.
i.. /&fd.
lbid.
5. 76M.
6. Voir plus haut. p. 74.
7. Tr., p. M2; cf. p. 034 donne comme exemples de « perception cette
table, cette cheminée. (Nous aurons à nous en souvenir torsque viendra le
moment d'examiner la doctrine du mot).
J. LAPORTE. H: SCEPTtClSME DE )fL'<E 9~
T1 -1. IW
au de Hume. Il veut marquer, lui, que,
peu trop généraux, gré
de « considérer2 », la ne
dans l' « acte d'examiner' ou pensée
mais « applique' et en
t.end pas seulement vers l'objet, qu'elle s'y
sorte à telle enseigne que toute impression
quelque s'y adapte
un de « direction «
nouvelle dans la pensée changement
provoque
et la de la
ou de « disposition' qu'inversement persistance
» nous facilement à une
même « disposition empêche de passer
c'est en cherchant à tout cela qu'il
idée nouvelles. Et symboliser
bien appelée à faire, par
rencontre cette suggestive expression,
sait dans la de nos jours
la suite, la fortune qu'on psychologie
« l'attitude de l'esprit ').
à la racine de notre « manière
Voilà donc ce qu'on trouve
une certaine « disposition )) ou « pos-
d'envisager ') les objets
est une indéfinissable mais incontestable
ture » mentale, qui
donnée de conscience.
donnée se réfèrent tous nos jugements d'identité.
A cette
Pour le il faut songer que,presque toujours,
comprendre,
consistent à déclarer identiques des objets qui,
lesdits jugements
ne le sont Ainsi des corps extérieurs.
absolument parlant, pas.
le vulgaire, ils ne sont pas autre
Nous n'en connaissons (et, pour
nous en offrent nos sens. Or les
chose'), que les
impressions que
de nos sens nous sont offertes comme intermittentes'
impressions
de ce fauteuil, je cesse de voir
celles que j'ai, par exemple, que
les yeux ou que je sors de la chambre, et que je
dès que je ferme
dans la chambre ou que je rouvre les yeux.
revois quand je rentre
fauteuil. En réalité, eu une série de
Je dis que c'est le même j'ai
comme une « existence
dont chacune m'apparaît
perceptions,
le caractère de l'objet identique,
périssable'' », et n'a nullement
de demeurer « invariable et ininterrompu. à travers un
qui est
de temps Pourquoi donc est-ce que je
changement supposé'"
Ibid., p. 20.').
2. /&M., p. 2M.
:<. /<)fd., p. 6i-62; p. 202-203; p. 263.
4. Tr., p. 203.
5. Ibid.
ti. /<))d.
7. Tr.. p. 202-203; cf. p. Gt et p. 2.).
TOME cxv. 1933 (x"s i et 2~.
9§ REVUE PHILOSOPHIQUE
1. Tr., p. 204.
2. Tr.. p. 254.
3. <btd.
4. Ibid., p. 204.
3. Tr.. p. 204.
6. Tr., p. 25S et 2;;6.
7. ~i)ic! p. 260 et suiv.
8. Ibid., p. 2M.
9. Tr.. p. 253.
10. /&M., p. 234.
)[. Tr., p. 253-254 et p. 204-203.
)2. Tr., p. 204-203 (note t).
J. LAPORTE. LE SCEPTtCtSME DE HUME 9~
imparfaite, n'est rien qui lie réellement entre elles nos différeutes
t. Tr.. p. OS.
Tr.. p. M; .'f. p. 20).
:i. Tr.. p. 20t et p. 2(M.
t. Tr.. p. 2.'i9 (that really &ftds ou;' M't'<'raf pf;'e<'p<f0tts to~fi/ter).
3. Ibid., p. 26U (identity is not/tfng really tlao lhese d(~'e<'e;t< pt'rcfpttOfts~.
6t'<ong;n;/
10~ KEYUE PHILOSOPHIQUE.
Ili
l. Tr.. p. tt.
2. Tr., p. 70.
LE SCEPTfCiSME DE HL'ME 103
J. LAPORTE.
fut-ce justement que par ces termes abstraits d'idée simple. Ils com-
). 76id.. p. H.Í.
Tr.. p. 2:tt).
Tr., p. 6:t7: rf. Burtnn. ï. p. ))S-)ti'.
t. Citons. )'nt)\' autres, t'intéressant artich; de M. D. Parodi sur la Perception
(ie la resseuibtance (Reu. Philos., mars-avrit t'j:i0). n se trouve, fan di~ne de
remarque, que la sotution à taqueUe est conduit M. Parodi touchant ta ressem-
hhmce. est très t'ont'orme a cette que Hum.' propose touchant l'identité.
104 REVUE PH!LOSOPHtQUE
t. Tr.. p. :<st.
2. Tr., p. ~):t.
:t. Tr., p. 2~4-20.1 inote t): rf. Tr.. p. (i).
t. Tr.. p. tit.
106 REVUE PHILOSOPHIQUE
nous n'avons pas d'étalon exact par où trancher une seule discus-
.sion touchant l'instant où elles acquièrent ou perdent leur titre au
nom d'identité'. II est donc facile de concevoir, la confusion
Soit, dira-t-on, mais, dans les textes cités plus haut, Hume
n'admet-il pas aussi des « perceptions » semblables en elles-mêmes,
). T)-p. 263.
2. Cette interprétation permet, si je ne nu' trompe, non seulement d'écarter
des reproches comme ceux de Green, qui accuse Hume de n'avoir pas distingue
entre idées qui se ressemblent et idée de la ressemblance (voir ~ntrod. au Treatise
n° ~t3), mais encore de résoudre l'objection de M. Russell, qui, dans ses Problèmes
de la p/ntosophte (tr. fr. p. t03), fait valoir, contre la prétention de ramener la
généralité d'une idée à un ensemble de ressemblances particulières, que l'idée
même de ressemblance est un universel. En revanche, le ruts que t'ait jouer
Hume à la confusion des attitudes et des tendances ne s'accorde guère avec l'un
des arguments par lesquels il réfute la doctrine courante de l'abstraction, à
savoir qu'aucune impression ne peut etr.c présente à l'esprit sans ûtre parfaite-
ment déterminée et précise (Tr., p. 19). Mais cet argument, emprunté à Berkctt'y,
ne tient pas à l'ensemble de la philosophie de Hume, et Hume le dément tui-menx;
expressément en maints endroits <par exemple I., p. 9.) Nous y reviendrons.
J. LAPORTE. LE SCEPTtCtSME DE HL'ME 107
temp~ et les lieux où il est supposé n'exister point. Tous les autres
point de vue. il est clair qu'une réalité n'a point en soi de quoi
).T)..p. i;i:ct'.p.7U.
-Tt..p.07-()S:('r.L.p.t.;2-t.'i:
:i.'i'r..p.i)(i-U7;n<)te(i).
i./hf.<t).:)tj-')7:(-f.h~6').
108 REVUE PHILOSOPHIQUE
tibles les unes aux autres, et qui ne sont aucunement formées par
ni par d'une couleur fondamentale. Et
composition, répétition
voilà en la moitié de la thèse célèbre que
déjà germe première
M. devait soutenir de nos jours à propos de l'intensité.
Bergson
Par ailleurs il reste ces quoique sem-
qualités que
originales,
blables, nous les rangeons dans un ordre où il y a du supérieur et
1. Tr., p. tH.
2. Tr..p.6:
J. LAPORTE. ).K SCEt'TfCtSME !)E HL'ME 109
i. )., p. 25.
2. T)' p. ~M et 4SI.
S. Tr.. p. t66.
4.7&M.
5.Je ne puis donc admettre avec M. C. V. Salmon que Hume le courageux
ait manqué de courage en n'osant pas étendre son explication subjectivité de la
reJattOR philosophique aux relations de <t<MttM (voir C. V. Salmon, The centra! pro-
Mem. p. 33T-338).
6. Tr., p. 7i.
7. Quoi qu'en ait dit M. Noi'man S~aith CT/te nafaraHsm of Hume, Mmd. )!))).'),
p. )57-t38).
8. Tr., p. 45.
9. Tr.. p. 7) cf. t. M., p. 288.
J. LAPORTE. LE SCEPTtCtSMF. DE HL'ME j)f f
1" 1 _1 _1'
suppose, par conséquent, l'idée d'unité, et rien de plus. Or d'où
nous vient l'idée d'unité''SuivantLocke, elle se trouverait «jointe
à chaque objet qui frappe nos sens, à chaque idée qui se présente
à notre entendement et à chaque pensée de notre esprit* M. Suivant
S'i) en est ainsi, nous n'avons pas, quoi qu'en pensent la quasi-
1. 1., p. ;¿;
'J. C<-<'i conformément à la théorie de Hume sur )es mee:- générâtes. Voir Tr.,
et sutv.
p. 2U
:). Tr.. p. 72-7~.
t. Tr., p. 22.1 et 2M.
.i. C'est pourquoi Kant oppose ces formes de la sensibilité aux catéyories de rentffi-
deMf'nt.
"1. 1. 1 11,
remment, n'est pas sans tenir compte de Descartes. C'est oublier
aussi que, comme nous l'avons constater', la retation causale
pu
n'est pas la seule à laquelle s'en prenne la critique de Hume la
rotation d'identité, entre et celle sont
d'égalité, n'y point
épargnées. Pour qui veut bien s'en souvenir, il est clair que
pareitie critique, si elle est vaiabte, vaut contre toutes les con-
ceptions connues de la rationalité, dans la mesure du moins ou
l'on entend sous ce mot, conformément à la tradition, une forme
de nécessité irréductible et au fait et à la pure
pur logique.
analyser'?
t. t., p. at.1.
H. p. :it et p.
:t. C'c~t bien, à peu près ainsi, ce nie st'mbte, que t'entend M. Latande, dans sa
bette étude sur le fondement de l'induction (voirZ.es T'Avaries de i'f'nductton W de
l'expérimentation, p. '~Gt, cf. p. 2.')6-2.'i7).
;H8 REVUE PHI[.OSOPmQUE
</cs/!an<uy:~) que Kant a en vue, cet acte qui produit l' unité
objective n et « nécessaire de et
l'aperception. qui.est principe
de connaissance a priori. Un tel acte, en vérité, ne saurait se
réduire à l'attention, puisqu'il commande et détermine, dans la
synthèse de
l'appréhension '). le jeu de l'attention même. Alors
en quoi consiste-t-il?
Il consiste dans le jugement. C'est par le jugement que nous
unissons des représentations en une conscience M. Et la copule.
est a précisément pour rôle de distinguer l'unité objective des
). /)fdu<-f. (r<tnsc. (2' cd.). n° 19; cf. P/'oif~ 2* partif, n" 22, 28, etc.
~0 REVUE PHILOSOPHIQUE
1. Ji)H' n° i9; cf. Proleg., 2° partie, n" t9, 20, 22, etc.
111, sect. VII (particulièrement la note (t) Tr., p. 96-97).
Voir Treatise,
Déduction transcendantale (2'éd.), n° i9.
J. LAPORTE. [.E SCEPTICISME DE Hf.'ME 121
3. C'est apparemment afin d'éviter ce cercle que LarheHer. dans les pages du
/ndentf;)< de l'induction (p. 44-47), où, pour démontrer la loi de causatite. il part.
comme Kant, de t'un<t<' de la conscience, ramène cette unité à cej)e. non d'un
ac(< ma~s d'une forme. H fonde l'unité de la conscience sur l'unité de la nsturf.
rntendu~' romme une unité intrinséque, et, somme toute, indépendante de i'esprit,
qui consiste dans te m~cantsme des phénomènes. Une telle unité revient au fond a
l'identité (voir p. 46 ce-! deux existences ne sont plus afors que deux moments
distincts d'une seule, qui se continue en se transformant du premier phénomenc
au second -). Mais nous savons ce que pense Hume de l'identité.
"L23 REVUE PB!LOSÛPHK}CE
"n.. 1
'vertu de raisons foncièrement dinérentes des siennes) que la
t. Cf. les fameux articles du Mind ~iS84-fS85) &Mt A<Mnot OtMmercd Hume.
On a pu remarquer que la présente étude se place un tout autre point de vue.
2. Tf., p. t70-nt.
3. L p. M-SS; et surtout Dialogues, 2', ~< 12' parties, etc.
t. Voir la 2° et ta 3' partie des Dialogues.
S. 4° partie.
J. LAPORTE. ).E SCEPTICISME DE HUME 123
tel qu'il il s agit d'expliquer, i ordre des idées n'a pas moins besoin
d être expliqué que tordre des choses. Le monde idéal à son tour
doit u reposer sur un autre monde idéai )', dont il soit la et
copie;
ainsi (le suite. C'est, l'histoire du philosophe indien, avec son élé-
post-kantiens.
Leibniz tire toute la finalité observable dans le monde réel.
i. Dta<o9Mcs, 4° partie.
2. 7&M.
J. LAPORTE. LE SCEPTtCtSME DE HL'ME 125
pondance dont le vrai nom est encore nnaiité. Pour autant, donc,
JEAN LAPORTF,.
t~4 sUiL'r~. )
Notes et Documents
quand cette sensation a été vécue, c'est toute la vie à quoi cette
comme elle est en elle-même, n'a besoin de rien, qui trouve tout en
tielles de notre livre. Parmi les artistes de notre temps qui ont
ADRIANO TtLGHËR.
j. Cf. surtout les pages 1-80 du 2' vol. du Temps retrouvé, Paris, N. R. )-
I. Philosophie.
que cette ontologie, si elle se borne, comme elle l'a fait jusqu'ici,
au monde ambiant et à l'homme en tant qu'il est en rapport avec
le monde, ne pourra arriver à l'intelligibilité philosophique on trans-
cendantate des essences: « la philosophie une explicitation
exige
qui porte sur les nécessités essentielles dernières et les plus con-
crètes. Ce sont des lois essentielles qui déterminent la manière dont
le monde objectif plonge ses racines dans la subjectivité transcen-
dantale, c'est-à-dire à des lois qui, d'une façon concrète, rendent com-
d'après tous ces passages, tels du moins que j'essaye de les com-
.l-t~J.. l.
géoh~ie qui découvrirait suivant une stricte méthode, les .l;f<
sédiments
dont tes couches successives torment le terrain de la conscience.
\ous nous contentons ici de cette courte indication par son ampleur.
comme son obscurité, ce livre ne pourrait être analysé et dis-
par
cuté que très toua'uement.
Unr«<jnh<'f<ot<tf;)<t.ol.M:)r~<t~<u<'s.l,ondon,<ieorgeA)len,H)32,
in-8°. :!43 et '~2 pages.
pour Platon, il désigne une sphère de la réalité qui est aussi objective
bien un sens différent c'est du côté de Platon,
que l'aposteriori. qu'en
sans craindre la tant blâmée par Kant, que se range
Schwarmerey
M. Hartmann. Contre le criticisme kantien, il prétendqueles valeurs
L'idée de la
liberté, les arguments contre le libre arbitre, le détermi-
nisme, l'indéterminisme, la doctrine du libre arbitre du point de vue de
« l'idéal-réatisme », la « liberté formelle », la « liberté matérielle posi-
tive N, l'esclavage de l'homme, telles sont les traitées dans
questions
ce livre par le philosophe russe dont le volume La Macère, i'Ht~o/i
ht He fi928) est bien connu en France.
Dans ce livre, il part. pour développer sa théorie de la
positive
liberté, d'une métaphysique, l'idéal-réalisme concret, a exposé
qu'il
dans The t~orM as an organic W/to/c, et dont il rappelle ici les principes
cette métaphysique a surtout pour but de mettre en lumière l'exis-
tence dans le monde de causes libres et supraspa-
supratemporelles
tiales et se manifestant dans le temps et dans l'espace. Le réel, c'est la
ANALYSES ET COMPTES RENDUS 137
KARL JASPERS. Die ~<'t.s<;f/f .St<tM<tO~ (/< Zft<. 2'- éd.. Hertin et
Leipzig, )931. Watter de Uruyter etC"' Goschen. n" !W<
~Sammiung
)')) pages.
Dans )av;e théorique, tout comme dans la vie active, cest avant
tout )'individ!).l'étreproj)re de l'homme,.Scy&ii</tef<! qui doitétre sauve-
gardé, «l.a vérité delà counaissaucerationtteUe est. certes.la même
pour tous. mais la vérité <[ue l'homme est lui-même, et qu'il révèle
danssacroyance.risoleaip.70'.
La religion ayantperdu l'importance qu'elle avait ~estdaus
jadis,
et par la p))i)osophie que t'itomme essaye de survivre à la crise et
d'échapper àlaruinedétiuittve.t~'estunephilosopIneexistencteUe
's<f~/)/~<f);;o;</<t'f[u'itcl)erche. telle que nous la trouvons cl)ez le
vieux Scttetting.che7.ie)xsche et surtout chezKierkegaard'et. évi-
demment. chez Jaspers lui-même). Cette philosophie x est une pensée
qui s'approprie, tout en ta dépassant, toute connaissance de fait,
p'nsée par laquelle l'homme voudrait devenir lui-même').p. l'~i.
t-.Metl'apporte pas de résultats tout faits et définitifs, tnaisfaitappel
a la liberté de l'individu:elle réveille ce qu'elle ne sait pas. elle
éclaire et meut. mais ne fixe pas a (p. 1KT. Impossibilité d'une issue
qu'-tait entrevoir Jaspers n'est donc ni unique ni générale: ce n'est
que te retour à soi-même qui peut nous sauver, et ce retour ne
peut
s'effectuer que dans tes profondeurs de la personnalité de l'individu
Inunain. Dans son livre. en décrivant l'état de choses actuel, en fai-
~iut ressortir les dangers qu'il implique, en indiquant les possi))ilités
et tes issues qui s'y ouvrent. Jaspers ne poursuit au fond qu'un seu)
but:–«rappeler ttiomme à tui-mémeo~p.)9h.
n est tout a fait impossible de donner ici une détaiHée du
analyse
ti\re de M. Jaspers, livre fort curieux et dont )a tecture à
s'impose
quiconque s'intéresse à ta mentatité de rA!temaene m<~derne. car il
est non seutement très moderne mais aussi très aHemand. Son a;rand
succès 30 000 exemplaires en quelques mois confirme sa valeur
documentaire et en augmente encore t'intérét.
A.KojEVXtKOFF.
pénétrante quelques-unes
quelques-unes des
des tendances
tendances les
les plus
plus actives
actives de la philo-
philo-
sophie contemporaine oppose et à ce « modernisme a philosophique
la a grande tradition s classique. Le pragmatisme, l'évolutionnisme,
le néo-réalisme, l'intuitionnisme ont fait fausse route en rompant sys-
tématiquement avec le passé. La « métaphysique naturelle de l'esprit
humain e ne saurait être abandonnée sans danger; elle est la condi-
tion de toute intelligibilité et de toute communication entre les
H. FLATTKN. –Dte P/tttosop/n'g des H't~f~t fof) Cottc/tex. fn-8°. 194 pages.
Gones-Druckcrei,Koblenz.f9~9.
TOMECXV.–J933(~<lct2). 10
.f4.6 REVUE t'HtLOSOPtHQUE
III. Sociologie.
(Roumanie), 1?28.
« La », que le
professeur de l'Université de Cernauti a
Politique
dans sa série d'Éléments de Sociologie, forme la suite et le
publiée
d'une «Introduction à la sociologie » (1923) et d'une « Socio-
complément
)' (1926). S'appuyant sur les classifications qui y sont
logie générale
établies, elle veut nous donner une étude objective (voire explicative)
d'une série de faits sociaux série centrale au sens de l'au-
première
tgui. celle des politiques. L'Etat et l'ensemble des
phénomènes
c conditions dans cette forme sociale naît et se maintient .')
lesquelles
constituent ainsi l'objet du présent ouvrage (première partie).
Cet essai de M. B. s'y réclame spécialement
sociologie politique
des travaux de G. Mosca, de Y. Parcto et de MaxWeber– conçoit le
des faits correspondants comme naissant dans la société.
système
sous facteur du milieu ambiant exerce sur celle-ci.
l'impulsion, qu'un
D'ailleurs, dans la pensée de l'auteur, la société tout entière se forme,
psychologie (en tant que étude des modalités que certains tempéra-
ments individuels offrent comme milieu réfractaire ou favorable aux
IV. Psychologie.
sique est devenue aiguë. C'est ce conflit que nous présente, sous une
l'orme vivante et précise, chacun des chapitres du premier volume de
M. Quercy.
En général la foi de l'halluciné est absolue. Même quand il n'est
ANALYSES ET COMPTES REXDL'S i&l
tives. etc. Mais quand on a fait ta part des perceptions réelles et des
sur la 7'~eorx' de l'audition selon les auteurs, l'oreille interne est com-
selon la hauteur du son dans le second, elle serait dans son ensemble
P. GufLLAUME.
1 -l 1
et des comme celles
naturel élevé à des richesses complexités,
un l'ouverture du Cré-
pour prendre exemple
que présente
tiennent ensemble des liens
des Dieux; monuments qui par
puscule
à y
spir.tuels. Qu'on admire ce qu'il y a d'étonnant,
uniquement
centaines d'hommes réunis dans une
bien dans le fait de
songer,
avec et compréhension, à la
salle de concert pour assister, plaisir
solennelle d'une telle architecture sonore; qu'enfin,
présentation
on évalue en pensée la
à ce monde de l'art, rapidement
songeant
les plus connus et les
hauteur noétique des principaux sommets,
mettons fixer les idées, l'OEdipe
universellement salués; pour
plus
la cathédrale de Paris, le Retable de
à Colone, le Parthénon,
la aux rochers, t'~uro~ et le
la Divine Comédie, Vierge
Meneau,
les Pèlerins d'Emmaus, la S~~Ao~
Jugement dernier, ~am/~
et la Barque et l'on
avec cAee~-s, l'Iphigénie
raur/s du Da~e;
très sûre, d'une part la parfaite solidité
admettra comme une base
la réflexion sur les choses de ce
du d'appui que prend
point
le fait ce monde est la seule expression
monde; d'autre part, que
créatrices de la
nous ayons des puissances pensivement
pure que
cérébration humaine.
soit Issue exhaustivement de telles
Car, que la Représentation
nul prudent n'osera donner
c'est ce que philosophe
puissances,
une qu'on ne devrait oser
comme sûr. Bien plus, c'est hypothèse
avoir au moins tenté de prouver
présenter, pensons-nous, qu'après
exemple la seule
d'abord (ce qui serait plus favorable) que par
tout entière de telles spéculations con-
est bien sortie
musique
des sciences, auquel on pourrait
structives. Quant au monument
invention et sa construction ne peuvent
aussi, même son
songer
instauratives de l'esprit, d'une façon com-
démontrer ces puissances
du monde de
à la formation et à l'enrichissement régulier
parable
des sciences s'est étayé de toutes parts
l'art. En effet le monument
sur des qui lui ont fourni appui.
dans sa croissance expériences
foisonnement et création auto-
Il ne s'est formé par spontané
pas
tâtonnements et d'essais. Et, bi~n que
nome, mais au moyen de
bien ait eu sa part dans l'in-
l'inventivité, disons mieux, que l'art,
des sciences, cette part est toutefois minime, comparée
stauration
traire c'est avec les plus grands espoirs que certains logiciens ont
grès de la philosophie.
Est-il utile de poursuivre cette revue; d'évoquer Marsite Ficin
et Pétrarque, de remonter au cas obscur et troublant de R. Lulle'?
Non, sans doute. Nous en savons assez pour être sûrs, d'abord et
dès maintenant, que nous sommes là sur un des grands chemins
de la philosophie..
ment, que le chemin indiqué est jalonné avant tout par les con-
Il
ment d'une c'est la M~cf~~e d'un o~NHM/?!,
posé: façon géttérate
instatiratives de la pensée, a poussé tant de
pour /M opérations qui
à se jeter, si l'on ose dire, dans les bras de l'art, et à lui
penseurs
nécessaires, saisir réflexivement
demander les paradigmes pour y
dans des conditions ofgranu/n de succès
~s<aura/ cet
éprouvées
C'est donc bien comme solution éventuelle d'un problème réel,
d'une méthode demandée
<'t toujours instant, que l'idée se présente
de cette nature su/ generis éclate dans la
;j t'élude réflexive qui
du monde de l'art. 11 s'agit beaucoup moins
législation dialectique
formulée l'artiste, que d un appel lancé par
d'une prétention par
le philosophe.
H est deux voies la pensée, deux mouvements qu'on peut
pour
considérer elle comme constitutifs.
pour
cherche une en face d'elle, et s'appuie, de
Tantôt elle présence
les forces de l'<or intellectualis, sur ce quelle estime
toutes
constituer cette elle
s'y applique et cherche à
attester, présence;
en ce qu'elle a de plus foncier, de plus bathique; même
la ressentir
ctte ses rêves, les lui faire approuver ou récuser.
y confronte pour
'tantôt elle l'cnsembtu des points de cette présence, qui
jauge
lui sont attestés: elle très inégal à ses aspirations. Cet être,
le juge
se elle le insuffisant; elle
tel qu'il lui parait présenter, proclame
de elle-même, par ses propres moyens, quelque
essaye poser par
de de soit qu'elle tâche à remplacer
chose mieux, plus ample;
ou à le prolonger ou à
totalement cet être: perspectivement;
ou lui confère simplement ce plus qu'il
l'ordonnancer; qu'elle
dans l'être lucide, à l'être obscur.
semble y avoir, par rapport
Et l'un et l'autre de ces deux mouvements est la pensée.
Doutera-t-on l'un et l'autre soient également bons, égale-
que
en de la valeur de la
ment légitimes? Doutera-t-on, particulier,
constructive'? Ceci est une autre question.
pt-nsée
n'avons le choix. nous sommes embarqués, comme
Nous pas
Pascal. Heur ou malheur, sais-je? nous suivons alterna-
dit que
ces deux mouvements. Notre esprit oscille entre ces
tivement
limites où s'évanouirait la pensée soit une
deux pùles, également
obscure, contre la pré-
application intime, participante, bathique,
sans aucune; soit une
sence seulement ressentie, spécification
vers des de lucidité, d'une acuité hallucinatoire,
anaphore pointes
où tout est distinct et séparé.
spécifié,
~68 REVUE PHILOSOPHIQUE
). Essai, p. 2.
2. On sait que le physicianisme de Hehnhoitz est dès maintenant fortement
battu en brèche, au moins par un psychologisme; cela commence avec Stumpf.
Cf. Lionel Landry, Sensibilité musicale. Mais ce n'est
pas en faveur de la dialectique
hamelinienne. Le D;'etMan~ est évidemment justiciable d'une esthétique de la
mcdiete (c'est la question de la hauteur du mi) qui transforme une opposition
qualitative en harmonie tripartito. La notion de forme y intervient évidemment.
C'est plutôt Platon que Hegel. Un hametinien dira: do est la thèse, sol l'antithèse;
mi qui intervient et les concilie, est la synthèse. 5tab qu'est-ce qui rassemblera
et posera l'accord en sa quiddité? H apparaît que le fait est plus compliqué et
que la synthèse c'est la subsomption commune d'ut et de sol a la quiddité qua-
htative du Dr<i;hmg; laquelle exige pour apparaître, la fixation du mi média-
teur, à telle ou telle hauteur, selon la forme qui aura pouvoir de réaliser cette
synthèse.
3. Système d'Aristote, p. 90.
E. SOURIAU. ART ET VERH'É )69
t. Cf. Donson.
Df divis. nat.. [, n. 74 C'est celui qui assure fa '< conn<'xion universetjf*
3. Cf. Passions, H, LXXtX et LXXX L'amour est une émotion de t'âme, qui
i'fncite à se joindre de volonté aux objets qui paroissent lui être convenables.. >
Cette volonté, c'est le consentement par teque! on se considère comme des à
présent jomt a ce qu'on aune
}-;0 REVUE PHILOSOPHIQUE
de tel ou tel caractère, parmi ceux qui sont ainsi présentés comme
t. PHHf. XH, 1, 9.
2. Nous distinguons la philosophie de <'<tri. c'est-à-dire la vaste méditation
f'Xexive qui prend pour objet toute l'ampleur de I;art de ses activités, de ses fois..
de ses œuvres (ce n'est qu'une branche spéciale de la philosophie, laquelle peut
méditer à son gré sur toutes choses); et l'esthétique, discipline plus étroite et de
nature scientifique, ayant pour objet l'étude positive du fait c'est
esthétique;
nommément la forme, dont le fait intervient sans cesse soit dans l'art, soit dans
l'étude de la nature du point de vue de l'artiste. Et ce fait bien. scienti-
parait
fiquement, spécifique. H va de soi que philosophie de l'art et science esthétique
entretiennent les plus étroits et constants rapports, la grande différence'
matgré
des points de vue comme des méthodes.
Le fait esthétique prend des valeurs et des intérêts extrêmes, éciairé en profondeur
par la philosophie de l'art. La philosophie de l'art des des
acquiert précisions,
sécurités et des puissances remarquables, lorsqu'elle solidement sur-
prend appui
)e fait esthétique pur. Elles n'en ont que plus d'intérêt à bien leurs
distinguer
deux points de vue, leurs deux méthodes. Il va sans dire la philosophie de
que
fart exige aussi un appui solide sur l'histoire de l'art, sur la psychologie (tant
CfUe de l'artiste que celle du spectateur); sur la sociologie, car l'art met en action
une quantité de faits sociaux; enfin sur beaucoup de branches de la
spéciales
technologie; particulièrement en ce qui concerne la musique, l'architecture et
les arts décoratifs et industriels.
L'étude qu'on lit ici se place entièrement au point de vue de la philosophie
de l'art; c'est-à-dire au point de vue en général. L'auteur se
philosophique
permet de renvoyer à des travaux antérieurs, soit particulièrement a son ~Bent~
de l'Esthétique (Alcan, i929) pour l'examen du statut du fait
scientifique esthétique
pur; et à Pensée vivante et fer/echon/o-meMe de
(Hachette, 1925) comme exemple
l'emploi méthodique de l'appui sur le fait dans les problèmes
esthétique pur
généraux de la philosophie. Mais il usera ici du vocabulaire ordinaire de la
philosophie, en évitant l'emploi des termes spéciaux relatifs à l'analyse esthétique.
E. SOURIAU. ART ET VÉR!TÉ ~3
II
2.Hibut,'Hofr.fing.
~.ii.Poincarc. ·
4.Vnih!np'f'r.
~4. REVUE PHILOSOPHIQUE
sophiques.
Donc on dira d'abord il a instauration véritable, que de ce
n'y
demeure. II a architecture solide, que de pierres qui se
qui n'y
t. Nous sommes obligés aussi de laisser de côté faute de place et pour ne pas
surcharger cette étude, une objection pourtant bien sérieuse, mais qui détourne
un peu du point de vue ici adopte c'est celle qui consiste à présenter l'art,
comme un stade
dépasse du dévetppppment de ta pensée humaine. Opinion d'ori-
adoptons, qui est te point de vue artistisque, opère tri et décantation par rapport
au point de vue d'un Grec moyen à Olympie, vers 440 avant J.-C. C'est un repen-
sement complet de la chose artistique. Ott peut, on doit dire, qu'au stade pré-
togique il n'y a pas à proprement parier, d'art pur, d'art distinct: pas plus quu
de science. C'est par la suite, et au stade logique, que logique de l'art et logique
de la science se différencient en s'établissant et en se spécifiant, par delà teur
souche commune, la magie. Enfin 3° il y a a un certain stade de l'art une certaine
stvhsation équilibrée et cherchant le typique, qui accompagne nettement t'ap-
pantion d'une mentalité au stade logique. 1I y a collaboration. Nous renvoyons
sur ce point à notre livre Pensée vivante et pcr/fcHnn/ormcHe, chap. xv. Nous
ignorions, quand nous avons écrit ce chapitre, que Max Verworn avait déjà pré-
senté des idées analogues en t908 (Verworn, Zur Psychologie der primitivea
h'unst, notamment p. 33). Nous ajoutons la référence, et consolidons d'autant
notre point de vue. 11 y a des stades pré-esthétiques; il y a un stade esthé-
tique où fart du civilisé a des puretés, des exigences, et des spécia)!tés de
méthode, ~nconnuet- au primitif, dont les dessins ne coïncident que jusqu'à un
certain point /or<ut<efner« avec notre goût. Croyez bien que les enthousiastes de
l'art ne~re, en t02~i-t930 à Paris, le goûtaient pour d'autres raisons que les indi-
du Bénin. De même pour le récent succès de l'art péruvien antébisturique.
gènes
De méme, et sans vouloir chagriner personne, comparez l'état d'esprit de l'israé-
)ite amateur d'art qui a dans son salon et regarde avec plaisir une belle Vierge
Soit. Répondons.
sans cesse, veut du nouveau, et
H est bien vrai que l'art, que
rentielle sans cesse rénovée par cet excitant. Et c'est qu'en effet,
plastique.
Mais on trouvera ici un appui très sûr, et des preuves sans
a écoutée~?
a rien dans tout cela pour le vrai. Et du fait même qu'il n'y a
rien pour lui, tout e.st contre lui. Les illusions. les prestiges; les
rêves de fart s'y interposeront entre vous et le réel, et vous k
voileront. Tout deviendra suijjectif. C'est le nuage rosé, aux
reHets trompeurs.
Si vous ajoutez l'intérêt esthétique à votre œuvre, vous cor-
rompez sa vérité.
Si vous pensez votre œuvre en vue de l'Intérêt esthétique, vous
la créez entièrement dans le taux.
Si dans le monde même des idées vraies, vous choisissez seule-
ment celles qui ont l'intérêt esthétique, vous ne verrez qu'une
partie des choses.
Dans le menu détail. on a fait remarquer souvent, et à raison.
comme le désir de dire joliment ou curieusement ce qui devrait
être dit précisément: d'éviter le remploi des mêmes mots, ou tes
mots trop lourdement techniques: et ainsi de suite, peut arriver
a fausser ia pensée même. On sait ce que valent tous ces « sourires
de la raison dont abusèrent les penseurs et même les savants
du xvu!' siècle. Une pensée brillante peut-elle être une pensée
sur<?? Un trop évident désir de /?/a;'re est-il compatible avec les ten-
sions psychiques et tes sévérités envers soi-même dont doit s'armer
une pensée forte et digne d'être crue? Volontiers nous dirions de
toutes les hautes spéculations de la raison ce que Boilean disait
des '< mystères terribles H de la foi chrétienne: lesquels. à son
1. Hotbein; c'est pour cela que ses personnages ont le bout <&: ne; gros.
2. Ou pourrait songer aussi d'un autre point de vue à Courbet difant « Je
plante mon cbcvatet n'importe oit dans la campagne, et je peins ce que je trouve
devant moi. Mais l'a-t-il fait jamais vraiment?
3. Qu'on nous passe ce mot; nous appelons diacosmélique (de dta&osmetn,
arranger) cet espèce de travail d'art qui consiste a disposer les objets de la façon
la plus intéressante ou agréable; c'est, si ('on veut. fart de t'étatagiste; celui de
la maîtresse de maison déplaçant les bibelots de son salon; c'est aussi celui du
peintre qui pose le modèle; c'est encore celui du metteur en scène au théâtre ou au
cinématographe. Le fait est d'autant plus important qu'il échappe souvent à
l'olbservation. Le peintre, avant qu'il commence à peindre, a souvent déjà esquissé
diacosmétiquement son tableau, en régtant l'éclairage, les reflets, les acces-
soires, etc.
E. SOURIAU. ART ET VÉRITÉ igt
H[
). On n'dtU.-nd nous
pas nous
que expliquions ici sur le séuie. Il est boncepen-
<iant d~'
prt~'iser. que <'e n'est pas ce génie (hypothèse rend
paresseuse) qui
.'omntc de cette vérité, n~ même de la création artistique. Le ~'énie est un ensemhte
très complexe de forces. H est cette intelligence que servent des talents au moins
honorables dans l'ordre d'activité choisie; que gatvanisent toutes les forces d'une
ardente ambition de faire grand, d'accéder à la plus haute classe de production;
et que rend efficace (en outre des conditions extérieures favorables) un tempé-
rament physiologique remarquablement actif et vivace, toujours prêt a se
remettre en etat de
productivité et de tonus. Pourquoi? Parce que l'art est !on°-,
la vie courte, et peu nombreuses tes années où l'on est en état de produire une
grande œuvre. Le génie artistique, c'est toute une âme ardente et saa'ace, orgueil-
leuse et iaboneuse. agUe et robuste mise au travail pour la production d'une
grande œuvre d'art. Ainsi les capsules surrénales les mieux faiseuses de sthéni-
<'ité ne
dispensent pas l'activité ainsi produite de se mettre intégralement, res-
pectueusement et hahilement au service de <'ft;'t. Sur le génie, cf. évidemment
Brentano, Séaittes etc., mais surtout Thorndike (notamment le chap. xxxv; de
l'Educational psychology, t!)t8) Ktages: Cox: Terman et par ex. J. K. Fowter, The
.S~entM. t93U.
184 REVUE PHILOSOPHIQUE
faire vraies; parce qu'elles ont été (c'est ce qu'il faut montrer)
conçues et mises au monde respect selon
constant, un dans toutes
les démarches de leur création, pour la différence entre la vérité
et l'erreur dans ces mêmes démarches. Et ce souci d'éviter l'erreur,
de suivre la vérité, est constitutif, quant aux conditions de cette
définit dans une proposition qui porte avec elle la preuve de son
d'expérience ou de démonstration'.
Ce qui voile, pour les philosophes et les esthéticiens,
parfois,
« cette lampe de vérité » (comme disait Ruskin)2, qui luit dans
1. Ici le lecteur tant soit peu scolastique (et cette note s'adresse à lui seul) pen-
sera peut-être alors si les propositions artistiques, ne sont ni assertorique~. ni
apodictiques, elles sont pro6Mma<tg[Ms? Non; car t'idée de possible (du moins
c'est ce que nous pensons) n'est ni chaire ni distincte; mais Yéritabtement contra-
dictoire c'est le droit à t'être, sans l'être; c'est ce à quoi rien ne manqua pour
être, et qui pourtant n'est pas. On sent assez que le présent travail est tout entier
dirigé contre une position philosophique telle que celle qui subsume à une caté-
gorie de possibilité les inventions artistiques de l'esprit et qui sépare l'existence
en acte et le droit à l'être, dans l'explication du spectacle du monde.
2. Sept jE.ampf's de Mrc/M~ectttre. Mais c'est chose curieuse, comme Ruskin fait
une application grossière, matérialiste, de cette idée si juste en ette-mf'me de
E. SOURIAU. ART ET VÉRtTË t85 1")
vérité dans l'art. Il faut. par exemple, dit-H, éviter h'sstucages,ie faux marbre,
les matériaux artificiels et les placages. Comme sice qu'il y a, physiquement,
derrière tes surfaces dans le mur, imporlait à i'arctutccture, en tant qu'elle
diffère de l'art de l'ingénieur qui bâtit! Les Romains, ces bons bâtisseurs, ont
aussi bien que les Byzantins et que les romans enferme un noyau de blocageentre
des parements, t'roscnre tout cela, exiger que la vérité architecturate soit non
seulement spnitueUo mais matériette, c'est exagérer la p~~tée du principe, et le
prolonger ta ou il n'est plus nècessatre. C'est du purisme, du pietisme presque. Il
est vrai pourtant que l'amour profond de t'artiste pour je vrai le portera toujours
à adorer travaiiter en plein, dans des matériaux sincères. ti y comprend mieux,
d'aiHeurs. ce qu'il fait. it n'a plus besoin,quand ittrava]Ne ainsi, de séparer
l'art de bâtir et son '< aUegorie (comme dit ScheUing). Il n'a plus besoin
de distinguer la matière et l'esprit il est bien démiurge.
~6 REVUE PHILOSOPHIQUE
~ous pourrions etaionner tout ce tabteau par des exemptes tirés de l'art. Mais
il vaudrait mieux que de tels exemptes eussent l'appui d'un consentement <'oi-
ierUf. Un tel étatonnage serait bien intéressant à espérer du f'ocN<)u<<t;r<'d<'t'&st/M-
«'~ue, en préparation à la neuve Association pour t'Ktude des Arts, sous la prési-
dence de M. V. Base)).
188 REVUE PHILOSOPHIQUE
gent pas. Elles sont selon l'amour, elles procèdent d'un retourne-
ment réflexif et contemplatif vers l'oeuvre
Eros et non pas Apollon. Selon /'arif, d'autres puissances régu-
latrices interviennent dans leur acte.
Non, Lien entendu, que celles-ci, donc, n'aient pas d'importance.
Souvenons-nous qu'elles sont des épreuves, des contrôles a poste-
r/ort: non des régulations directes et des lois de l'acte.
Mais considérons l'artiste à l'œuvre: et c'est là que nous obser-
verons ces lois.
La glaise est sur la sellette. Des premières déterminations don-
nées, une ébauche d'être est née. Maintenant nouveau
chaque
coup du pouce, de l'ébauchoir (et le statuaire ne pas
regarde
l'ébauchoir c'est la statue qu'il regarde) ajoute plus d'être essen-
tiel à cette créature, l'approche davantage, à travers la masse con-
stante de la glaise, de son éclosion complète et de son existence
pointe de rose ici parmi tout ce vert, pas trop loin de ce bleu
toute l'oeuvre chante, s'exalte, se pose en joie dans la perfection.
La même touche un peu plus large, placée un peu plus bas: tout
est perdu, toH~est strapassé~! Et qu'il s'agisse du peintre, du
ou rl_- -1.- t
sculpteur du poète. qu'on songe à ces dernières touches ou
retouches, si prégnantes, si périlleuses, si singularisantes pour
l'a~uvre! Comme il faut qu'elles soient à la fois précises etyH(/
<CUSfS.
C'est, donc bien un jugement l'artiste, en de tels actes.
qu'opère
Et quelle raison a ce jugement, dans le moment même oit l'artiste
le porte: dans le moment où il veut. conçoit ou (car c'est
opère
tout un) l'adjonction de sa touche nouvelle: soit la pose en
qu'il
imagination, dans une expérience de pensée: soit en brouillon.
dans une esquisse, sur une ébauche: soit immédiatement et direc-
tement sur 1 œuvre? Quelle raison a ce jugement, ce choix, cette
décision d'adjonction: sinon le surcroît même, le saillissement
d'existence (je dis de puissance d'avoir lieu, d'être manifeste, d'être
réelle, d'une sorte plus éclatante, plus triomphante) qui survient
dans cet acte même, pour l'oeuvre l'art ainsi construit ? Surcroît
que
d'existence que peut vérifieraussitôt d'ailleurs, la sensibilité esthé-
tique réticxive, par son affection selon une quelconque des essences
del'e/Ao.s artistique car, que cette essence soit le beau, le sublime,
le tragique, le pyrrhique, il n'importe. Et cette essence être
peut
formulée, définie, reconnue pour ce qu'elle est; mais elle peut aussi
rester non étalonnée, etdésignée seulement comme
génenqaemeB~
le fait l'artiste (qui n'a pas besoin de préciser criliquemenl l'espèce)
lorsqu'il dit c'est amusant: c'est intéressant: c'est drôle. « C'est
drute »: il dit cela en mettant à la de trombone, avec un
partie
changement de clef enharmonique, le Tu~a /n~u/?! du Jugement
dernier. Et il frissonne.
Ainsi c'est l'art pris à rebours, que ces essences. C'est le cou-
rant anaphorique de l'art, remonté, ou plutôt rencontré, en choc
co~c/en~'g/, dans le sens contraire à celui où opéra l'esprit.
En ce qui concerne l'esprit et l'art, on voit assez l'extraordi-
naire solidité de trame, que peut donner à l'opération successive
d'instauration. l'attention soigneuse du poète ou du peintre, du
qui peuvent résulter, pour ce qui est déjà acquis d'anaphore, d'une
t. Nous prenons forme ici évidemment dans une acception technique esthétique
et philosophique; non dans un sens concret et vulgaire.
2. Il y aurait une curieuse spéculation, obtenue en confrontant dans Lacbetier
l'intervention du Beau, dans le Fondement de l'Induction, qui est analytique: et la
dialectique d'art, dont il se sert dans Psyc/to!o~te et Métaphysique, qui est synthé-
tique à partir du milieu. Or cette dialectique est assez conforme à ce qu'on vient
de lire. Notamment l'étape des échos symboliques, qui enrichissent le monogramme
primitif par des redoublements lointains, et lui donnent valeur cosmique, y est
curieux. Or il est à douter si Lachelier instaure autre chose que la phrase, l'être
est existant. Mais it est frappant qu'il l'instaure effectivement rigoureusement
selon la dialectique de l'art. Quant à savoir ce que la présence de l'art dans
une phrase (c'est alors un poème) tui donne de vertu gnoséotogique, c'est une
autre question celle même que nous examinons'dans ce moment.
3. Ette n'est pas informulable. Il nous serait facile de chercher dans les
mathématiques des symboles inscrivant des postulats* d'existence (c'est-à-dire des
indices de réussite instaurative) pour les entités qu'on vient de définir. Mais cette
recherche de philosophie très technique, ne rentrerait en rien dans les perspectives
de la présente étude. Nous comptons la donner ailleurs, dans un ouvrage bien
plus ample sur l'art, que nous avons en préparation.
E. SOURIAU. ART ET VÉRiTÉ ~9:)
Tu~Hcxv.–1933fK'3et4). 13
j9~. R.F.YL'E )'tttLOSO)')H~L'E
I~ ~·_·_
l'heure le cycte des valeurs: faisons à présent, le cvcle
comparaître
taHouedesArts(n~.2)~. 1,
Il v a deux degrés dans l'art. Toute une art ara-
série, musique,
besque. peinture pure (simple jeu musical des couleurs), etc.,
n'a aucune attention à la chose du dehors.
a"l;n,.c ;n~livionPlc
individuels. \`Macavnncwn
Kôusavonsvudèsie
nages, des personnages singuliers,
début de cette étude comme ces êtres être grands, instants
peuvent
et forts, dans leur architecture spirituelle; c'est-à-dire purement
selon selon la instaurative. Ils sont si réels, qu'ils
l'Esprit, pensée
ont d'émouvoir, de fasciner, de hanter, de passionner
puissance
diversement, comme des êtres humains et vivants. Et ces êtres-là
L'un fait chanter des couleurs, l'autre des sons. Le faiseur d'ara-
plus singulier, dans les êtres et dans les choses. II n'y a de science
qui est dedans, du seul fait que l'un soit dehors, l'autre dedans?
S'il ne peut s'agir, donc, d'identité entre la pensée et son si
objet;
d'autre part une simple équivalence pratique, aveuglée quant à
la réalité extérieure, laissant totalement ombreux le visage de la
chose du dehors, ne peut nous satisfaire et ne peut s'appeler
vraiment connaissance, que faire? S'il s'agit à travers des sym-
boles qui diffèrent peut-être, qui différent sans doute totalement
des choses symbolisées, d'arriver pourtant à quelque chose d'un
peu pareil à une ressemblance, fart seul n'y pourra-t-il pas pour-
voir ?
Beau risque. Risque, assurément. L ne chose est plus sûre.
S'il s'agit d'âmes; si l'objet, c'est l'âme d'un autre; ici l'art ne
Concluons.
Si tout ce qui précède est, ne fût-ce qu'en partie, juste, il est
permet la pensée constructive, dont l'art (en tant qu'il est une
_1 1 1~ _11'1 1- -«
Tout ce qu'H a ~a~né, ainsi soulevé, c'est l'art qui Fa fourni.
Cette sagesse de l'art, qui en cette tâche nous a ~uidé, a subvenu
en chaque étape de cette brève ascension, à la rendre possible.
Ainsi l'instant a oscillé, sans changer d'être, entre les deux potes
de l'existence profonde, panique, obscure: et de l'existence lucide,
éclatante, ait~ue.
Toute la pensée est dans ces deux mouvements: toute la pensée
est ce double mouvement. Qu'elle cesse d'osciller entre ces deux
Trois directions
grandes y sont déjà marquées. Jusqu'à nous. il
n'y en aura point d'autres. D'abord, chez les Ioniens, une tendance
a 1 observation de la nature. observation attentive à découvrir les
analogies qu'elle nous présente, et par suite les généralisations
auxquelles peut aspirer notre connaissance. C'est l'éveil de la
méthode expérimentale et des sciences de la nature, de la physique
/a~o sensu. de l'étude de la /)/!ys/s). La physique s'évade du mythe.
Elle s'en évade en le transiigurant, nous voulons dire en substi-
tuant à la figure du la figure de ce nous
mythe que appelons
aujourd'hui science. Elle s'en évade par le chemin mème qu'on
~mt encore de l'expérience, de la consultation des en choi-
faits,
stssant des fiuts privilégiés, à la généralisation évidemment bien
trop hâtive, et lointaine: il n'importe puis de la généralisation
à laquelle on s'est éievé par à l'explication
i'hypothèse inductive,
des faits par une marche descendante. Du feu de la
qui jaillit
tuyère du soufflet de forge, Anaximandre reçoit une <' nature » des
astres. Par là il en explique ensuite les particularités obsé-
les plus
dantes.
De ce qui semble le plus chaotique et le plus multiforme, le plus
deln bas
l.ae en
nn ~maf
haut,
m·eCri.n.·o
précisera ces
r,n~ discriminations
rlier,im.n.Winnc.nfr,r,F~ <' informantes "~F
et. .lo
de
même que nous entrevoyons au bout des spéculations sur le pre-
nne)' l'image de l'LTnivers et les sphères célestes, nous apercevons
au bout des utilisations du second les grandes tendances des élé-
ments. leurs qualités dynamiques Intrinsèques, la pesanteur, la
tendance du haut vers le bas, la légèreté, la tendance du bas vers
le haut et les localisations abstraites des éléments dans la repré-
sentation de la nature.
La notion d'éléments va d'ailleurs préciser, tout de suite après
la fin de notre période, et pour longtemps, les fondements de
cette physique. A prendre cette notion plus large encore, comme
le feront les atomistes. elle précise sinon la hase. du moins un
niveau de toute physique.
La technique du feu a joué aussi un rote primordial pour déter-
miner la tendance vers te haut d'abord la flamme monte. pour
définir ensuite un processus générât d'information et de transfor-
mation (qui se retrouvera dans les embrasements périodiques du
monde), processus bien plus précis dans le Pythagorisme l'unité
informante est le feu qui s'alimente de l'air indéfini du milieu.
A la fin de la
période que nous la méthode d'obser-
examinons,
vation qui remplit d'un seul la capacité de et fournit
coup l'esprit
ABEL REY. f.A JEt'XF.SSF. f)E LA SC)f.Cf: HF.LLEXf: 20T
Il
qu'il est à peu près atteint et qu'on s'y borne, on a pu aller vite
et en réalité on est allé'très vite.
Pour le reste, pour les autres aspects, et, disons le mot, pour les
l'ensemble de la documentation.
au degré où elle était poussée, suffisait à la
L'approximation,
technique. C'est donc en dehors de
technique la qu'il y a lieu
de chercher. Or, si deux grandes fées se sont penchées
peut-être
sur le berceau des sciences de la nature la mythique et la
celui de la
mathématique?
Le nombre a joué un grand rôle dans certains mythes. Il a joué
un rôle énorme dans la magie de l'Orierit. Ici nous avons des
certains. En Égypte nous le devinons, encore que
témoignages
notre documentation soit étrangement positive. Le départ avait
mais à faire ce
départ, et à abandonner à la technique ce qui est
1!!
mathématique.
Or cette mathématique de la nature, visée par la science,
science pour laquelle la méthode expérimentale n'est que l'exci-
tatrice et la dirigeante et ne fournit que la matière, qui
d'ailleurs est essentielle, les Pythagoriciens t'ont vue, et ont
commencé à la réaliser de façon entièrement valahle, en un tout
IV
Sur son berceau nous retrouvons encore nos deux fées la mys-
tique et la
technique.
La mystique du mot est encore plus ancienne et plus générale
que celle du nombre. La médecine incantatoire repose sur elle.
On pourrait sans doute voir dans cette mystique le pressentiment
de la théorie du Logos et du Verbe.
La technique du mot a suivi la mystique qui fixait l'attention
'.ur lui. La grammaire est de recherche ancienne, en Hindoustan
<~ussi bien qu'en Grèce. On ne saurait assez insister sur la floraison
étend pas a pas un Mince où loyer des faits. Ht par faits nous entendons tout ce
qui contraint plus ou moins notre connaissance, aussi bien les faits mathema-
nnues que les autres.
2} 6 REVUE PHILOSOPHIQUE
ÂBEL REY.
1. Cette conclusion d'ordre général n'est qu'une pierre d'attente. Dans ('ouvrage
suivra celui termineront ces pages, nous essaierons de préciser, en
qui que
revenant sur Ics conclusions de la Science orientale, les acquisitions méthodo-
et intellectuelles de toute cette période. La plupart jouent encore
logiques
comme facteurs dans notre actuelle pensée scientifique. Toutes
prédominants
ont contribué à former cette pensée telle qu'elle se développe en deux grandes
directions méthode de transformation et méthode d'implication ou de participa-
xvn* siècle. Si la science moderne de la matière a abandonné
tion, jusqu'au
i'unc de ces directions, celle-ci est d'ailleurs restée vivante dans la philosophie et
~ians ce qu'on a appelé, au xvm* et au xix" siècle, iës sciences morates ou les
sciences de l'esprit.
L'homme et le langagel
rotation d'être à être, en tant cette relation s'exprime par l'invocation d'un
que
<. lu ou Du participant au même univers objectif.
universif entend une essence a
Par weUhatt ou », l'auteur appartenant
un univers objectivé et identillé par le tangage, c'est-à-dire un univers qui ne se
ft.vete et ne se constitue en tant tel que que le langage le manifeste
que parce
en le transposant dans un autre mode d'existence.
(A'o<f du traducteur.)
-218 REVUE PHILOSOPHIQUE,
langage tout entier, avec toutes ses liaisons, soit présent en lui. s
suivre sur des points décisifs la voie indiquée par Herder dans son
depuis des milliers de siècles. Ce qui fait sa force, c'est cette puis-
sance de changer et de se déplacer. Dans le règne animal, il
voie de et la véritable du
s'opère par contagion compréhension
dit. Le mode de compréhension ne
discours proprement premier
mérite ce nom conduit à s'orienter et à se conduire
que parce qu'il
dans le mais il est fondé sur la contagion et
exactement milieu,
des en principe, il
sur l'imitation sentiments, par conséquent
est à tout ce saisir un objet. Votre
étranger qui s'appelle
ne saisit votre c'est votre chagrin qui se saisit
chien pas chagrin,
de et il « sympathise ') réellement avec lui, et
irrésistiblement lui,
sa conduite; n'êtes-vous en effet pour cet être vivant
adapte pas
un des facteurs décisifs du milieu qui le forme?
ciation même aller très loin. Que l'on pense par exemple à
peut
une circulaire administrative imprimée.
H maintenant de ramener ces conditions provisoires du
s'agit
fondamental du discours à l'existence réelle de l'homme.
phénomène
Sinon, nous donner que le langage n'est
pourrions l'impression
nous de recherche quelconque qui nous serait
pour qu'un objet
tombé sous la main et que nous aurions ramassé d'une façon pure-
ment arbitraire. Nous pourrions ici indiquer une sixième distinc-
_1- 1- 1
de la révélation. Ainsi, le discours avoir pour objet soit la
peut
destination d'un être
universif, par exemple un chat déterminé
dans l'espace « Il y a ici un chat » soit de révéler comment
telle matière est faite « Cette matière est brune. » Dans tous les
question ou encore qu'il est fait de telle ou telle façon, etc. Sinon,
il n'y a pas de discours. Le mot « chat en lui-
» par exemple, pris
même, ne devient un discours que s'il est accompagné et complété
tion elle-même. Plus les hommes ont réussi à dépasser les cadres
n.1~H 'Y'I.;l;D."
leur milieu aveco" LI'011i..£},C'
d'autres ;rI;ll'1C'
individus, ~~+
il est ~W,hlo
donc possible déjà
1.
que le
son expressif d'ordre purement vital devienne le signe de
général que le pouvoir d'expression, n'en est pas moins aussi peu
spécifiquement humain que ne l'est, d'après les recherches de
ment favorisée.
Mais s'il est assuré maintenant qu'un mot quelconque puisse
la valeur d'un gigne, il est aussi peu sûr que possible que
prendre
le discours soit par essence un simple signe ou un assemblage de
le nominalisme.H~rnp F.tc'fstJH
Et c'est là aussi
aussi nn'i)fnut faut
qu'il chercher
chercher son
son arsument
argument
le fort. Et ta faiblesse de la position nominaliste se
plus pourtant
trahit dans le fait cette théorie est contrainte de tenir
déjà que
les différences des langues pour purement accidentelles, et cela
point même que tout individu étranger au clan n'était même pas
considéré comme un homme et cela
parce qu'il ne faisait pas
partie du co-univers et que souvent il était poursuivi comme
un animal. Donc, sans avoir la prétention de décider en une
matière qui échappe à toute solution décisive, nous sommes enclins
à admettre non pas une langue-mère primitive qui serait en
particuliers qui représentent pour nous les formes les plus connues
selon lesquelles apparaissent ces fondamentaux du
phénomènes
langage. En effet, dans le sujet se trouve incluse une cer-
déjà
taine fixité de l'être, tandis que le « prédicat .< ne fait qu'ajouter
par )a suite un événement a avec ce (tes de
qui sujet rapports
tonporaHté, de spatialité ou de causalité. Il se produit donc ici
Il développement des fondamentaux, et cela
spécifique rapports
sur le plan d'une ontologie inconsciente, donne le au
qui pas
statique et favorise cette identification rationnelle vers quoi tend,
d'après Meyerson, la science européenne. Au surplus, il n'est pas
nécessaire que les deux éléments fondamentaux du discours soient
énoncés l'un et )'autre. Si je montre du un morceau de
doigt
charbon et que je dise « Charbon ",j'ai ainsi une
exprimé phrase
complète que l'on peut comprendre en tant que telle et qui même
ce ce
qu'il y ait des écritures figuratives. D'ailleurs, qui importe ici,
n'est du matériel employé dans chaque cas particulier
pas l'origine
révéler un contenu. L'élément proprement linguistique de
pour
('écriture une situation intermédiaire bien déterminée
occupe
entre l'élément reproductif et l'élément signe, et il est essentielle-
des de l'Extrême-Orient en
lorsqu'on traduit par exemple langues
tandis ces mêmes langues euro-
une langue européenne, que
ont formé entre elles des analogies extrêmement fortes
péennes déjà
se révèle la lente formation d'un univers commun
par lesquelles
ces Quant à savoir ce qu'est une
aux peuples qui parlent langues.
et comment des langues peuvent s'influencer réciproque-
langue
ment et se mélanger, ce sont là des très complexes. En
problèmes
P. LANDSBERG. L'HOMME ET LE LA~GA 245
se refuse à voir dans les créatures d'un autre clan des hommes et
n'apprend pas les langues mortes pour des raisons pratiques, mais
bien pour connaître et vérifier l'univers grec et l'univers romain,
dont provient l'univers européen. La philologie part des langues
pour reconstruire cet univers antique. C'est en effet en partant de
ce principe que le langage est constituteur d'univers, qu'il est
eux deux une unité complète, au point qu'il est très difficile de
poète nous révèle pour la première fois. C'est grâce à cette puis-
sance créatrice, qui ne s'exerce pas seulement, bien entendu,
dans la découverte de mots isolés, mais qui enrichit, le discours
lui-même de formes nouvelles, que l'on peut dire que le poète est
un des facteurs lesplus importants du devenir humain. Ce qu est
une langue? Ce n'est pas le singe ni même l'enfant qui nous
poète qu'il faut s'adresser. C'est chez lui que la puissance créa-
trice du discours apparaît comme une marche qui va toujours se
t. Comme il est à peu près impossible de trouver en français des mots aussi
proches du mot racine, il a paru preférabte de garder les exemples allemands.
248 REVUE PHILOSOPHIQUE
pratique l'univers
qui se découvre par le langage.
H me semble que nous avons maintenant complètement expliqué
pourquoi le langage ne peut pas être un pur système de signes,
bien que des mots évolués aient été inventés pour servir de signes,
et que l'humanité, utilise de plus en plus le langage comme sys-
tème de signes. Que l'humanité présente manque du pouvoir créa-
teur nécessaire pour former de nouveaux univers, et qu'ainsi elle
se meuve dans un univers déjà révélé, appauvri, un univers qu'elle
n'a pas encore su s'approprier spirituellement, c'est ce que nous
avons déjà vu. Le nominalisme serait la théorie de cette situation
il a pour auteurs des gens qui n'ont pas la moindre idée de ce
ponibilité dans les deux directions, et cela n'est possible que par
le langage. Si le langage appartient à la manière d'être essentielle
de l'homme, c'est que la à de l'univers du
disponibilité l'égard
230 REVUE PHtLOSOPHIQUE
IX
que pourriture et que mort. Tel est le sens des terribles paroles
de Luther « enim hominem suis diffidere et
Oportet operibus
vetut paraliticum, remissis manibus et pedibus gratiam operum
artificem implorari. o Tel est aussi le sens de sa doctrine de la
« loi H et de son « de servo arbitrio ». L' « expérience a de Luther
de même que l'expérience de Nietzsche correspondent si peu à ce
que nous sommes forcés d'aller les bras ballants à notre perte,
sans essayer même de lutter, de quels intérêts peut-il être encore
gere
Luther pouvait encore « gratiam operum artificem o.
implorari
Mais pour Nietzsche, à en juger d'après ce qu'il raconte dans ses
livres. les prières, de même que celui à qui Nietzsche adressait
ses prières, avaient cessé d'exister. Comment prier quand il n'y a
mn Iliam
Dieu n~Q.c.L.),
n'existe rT:1 -In.[~~ -_u- 1__1,
que pas ou, comme disait Nietzsche, que les hommes
ont tue Dieu!
Mais chose étrange, chez Nietzsche de même chez Luther
que
l'instant de la chute la plus fut suivi d'une iiïumination
profonde
toute -MouveHe. Lorsque Nietzsche sentit, la « sagesse o de
que
Socrate n'était que de sa « chute et
l'expression que l'homme.
tel un oiseau ensorcelé par un ne va où il veut mais
serpent, pas
est entraîne contre sa volonté une force
par incompréhensible
dans l'abîme de l'anéantissement et soudain
physique spirituel,
surgit devant lui l'idée de l'éternel retour, idée complètement
étrangère à sa pensée aussi bien qu'à la nôtre ce fut comme s'il
avait été brusquement transporté, à sur cette cime
pareil Moïse,
où « facie ad faciem cum ». Il découvrit là
Dec ioquitur que
face à face avec le mystère premier « tex et ratio nihil habent
negotii et se mit alors à parler de la volonté de de la
puissance,
mora)e des maîtres et de tout ce avait trouvé « par delà le
qu'il
bien et le mal ;). Je dirai encore une fois Nietzsche sentait
que
que lui aussi, tout comme Socrate, était un homme déchu. Les
lois de la raison et de la morale s'étaient incrustées
profondément
en lui, elles faisaient en sorte avec son être
corps quelque spiri-
tuet: les arracher sans tuer son âme lui semblait aussi impossible
que d'extraire squelette d'un lehomme sans avoir au préalable
tué cet homme. A ses yeux, de même ces lois
qu'aux nôtres,
exprimaient notre nature la plus profonde delà le bien et le
par
mal, par delà la vérité il n'y a que le vide, le néant où tout dispa-
rait. Et c'est là, cependant. qu'on peut, faut chercher cette
qu'il
toute-puissance. cette force qui sauvera l'homme de la mort'
So)a fide n de Luther le conduisait vers Celui dont il disait
Est enim Deus omnipotens ex nihilo omnia creans, » Mais alors
le « Witte zur Macht » de Nietzsche sous une
n'exprirne-t-il pas
autre forme la « sola nde » de Luther? Luther sur
s'appuyait
['autorité de i'Ecriture, sur les prophètes et les Tandis
apôtres.
que l'élan de Nietzsche vers les hauteurs de Sinaï naquit au
moment où la Bible avait perdu toute autorité à ses Au
yeux.
contraire, tout ce qui gardait encore pour lui une certaine auto-
rité. lui disait impérieusement que la « Votonté de »
puissance
était la pire des folies et qu'il n'y avait pas d'autre salut, d'autre
refuge pour l'homme pensant que tes « beatitudines ')
apportées par
286 REVUE PHILOSOPHIQUE
Socrate et par Spinoza. Cela, Nietzsche nous l'a assez dit dans
les livres qu'il écrivit Immédiatement "après sa crise. Et cepen-
dant, une force mystérieuse le repoussait de l'arbre de la science.
Luther, « bellua qua non occisa homo non potest vivere », c'est
une son à lui, Nietzsche, contre ce que nous
objection, objection
d'ordinaire le libre examen, contre ce que Spinoza
appelons
« philosophia vera ') et ce que Socrate avait proclamé
appelait
comme vérité et nécessaire. Mais peut-on opposer à la
générale
vérité et nécessaire la souffrance, même démesurée,
générale
la si ardente et puissante qu'elle soit? Et où irons-nous
passion,
chercher la réponse à cette question? Est-ce l'expérience qui
nous la fournira? Mais nous avons déjà vu que l'expérience ne
presque rien dit de cette idée de l' « éternel retour » que selon ses
orgueil », terme qui n'est pas tout à fait exact Nietzsche s'exprime
d'une façon plus heureuse dans Zarathoustra (après l'entretien
avec le nain sur t'éterne) retour), quand ce « quelque chose en
lui qui refuse d'accepter le réel, il l'appelle « mein Crauen. mein
Eckel. mein Erbannen, alt mein Gutes und Schlimmes schrie mit
einem Schrei aus mir. » Et la mémoire cède ce fut
qui n'a jamais
été. Dans Zarathoustra Nietzsche reprend ce thème « racheter
le passé et transformer tout cela fut en « je voulais cela
que
262 REVUE PHILOSOPHIQUE
que toutes tes choses sont périssables aiïn de ne pas les considérer
comme trop importantes et de vivre paisiblement au milieu d'elles,
mais à moi. au contraire, elles me paraissent trop importantes
pour pouvoir être périssables je cherche l'éternité pour tout
(id. 1063). M est hors de doute que Nietzsche s'est raccroché à
l'idée de l'éternel retour parce que à l'opposé non de Marc-Aurèle
mais du maître de Marc-Aurèle. du maître de tous ceux qui philo-
sophent, Socrate il cherchait à obtenir l'éternité ces
pour
choses qui. selon notre
conception de la vérité, sont condamnées
à l'anéantissement. Mais cela veut-il dire qu'il voulait l'éternité
<' tout »? Lui-même vient de nous dire que son « orgueil .) a
pour
264 REVUE PHILOSOPHIQUE
bellua » n'a pas été tuée; elle'afait semblant d'être morte seule-
ment. Le marteau de Nietzsche n'a pas brisé les prétentions de la
été n'ait, pas été. Parmi les choses qui ont été il y en a que l'on
peut conserver et d'autres que l'on peut anéantir. Dieu est des-
cendu sur terre. Il s'estfait homme, il a souffert non pour réaliser
peuvent se sauver par leurs propres forces: plus ils luttent plus ils
s'enlisent. Mais Luther n'est pas enchaîné par les « vérités éter-
nelles » de la raison; il voit en elles, au contraire, ce monstre,
bellua. qua non occisa homo non potest vivere ». Si ces vérités
sont appelées à triompher, il n'y a pas de salut pour l'homme.
Autrement dit. en langage philosophique en absolutisant la vérité
nous relativisons l'être.
Et Luther se décide à abandonner la vérité au pouvoir du
« Creator omnipotens. ex nihilo faciens omnia ». Si la vérité est
entre les mains du Créateur, le Créateur peut l'abroger, en tout
ou en partie. Il peut faire en sorte que le reniement de Pierre, les
jamais existé, mais que certaines choses parmi celles qui ont été.
se conservent dans les siècles des siècles. Dieu en effet n'est pas
cette vérité raisonnable qui étant elle-même privée de volonté peut
cependant paralyser la volonté humaine. Et Dieu n'a peur de rien,
car tout est en son pouvoir. Il ne craint même pas de transférer
sur son lils tous les péchés du monde ou plus exactement, de faire
de lui
le plus grand des pécheurs. Omnes prophetae, écrit Luther,
viderunt hoc in spiritu, quod.Christus tuturus esset omnium
maximus latro, fur, sacrilegus, homicidus, adulter, etc., que
266 REVUE PHILOSOPHIQUE
simples moines. Le mal existe sur terre, mais ce n'est pas Dieu
qui sous nos yeux avait fait de si héroïques efforts pour passer par
delà le bien et le mal, c'est-à-dire par delà toutes les louanges,
les encouragements et les approbations. Comment cela a-t-il pu se
qua non occisa homo non potest vivere » non dans les liens qui
enchaînent la volonté humaine, mais dans la volonté humaine
elle-même, dans ses élans vers la puissance. Aussi, tend-il toutes
ses forces non pour détruire ou réduire au moins son ennemi,
mais pour tuer en lui-même tout désir de lutte, pour apprendre à
voir sa tâche essentielle dans la soumission sans murmure,
il ne de il y a
a nécessité, il n'y a pas, peut y avoir liberté; quand
savoir il n'y a pas liberté. Il semble que Nietzsche était tout
donc,
de jeter un défi au savoir et d'aller chercher la vérité autre
près
Et non seulement de Socrate l'avait
part. parce que l'exemple
mis en contre les conséquences d'une confiance exagérée
garde
dans le savoir. Nietzsche connut certains instants qui montrent
qui vivaient il
y a des milliers d'années étaient beaucoup plus
proches de Nietzsche que la « vérité M de ses contemporains. Et
néanmoins, il présenta pour finir ses illuminations au tribunal non
des préjugés dont se nourrissait l'antique liberté qui n'avait peur
de rien, mais à celui du savoir qui a engendré l'indifférence, la
X!
pensent.
ni le premier ni le dernier les hommes
Kierkegaard n'est parmi
avec lui un secret aurait mieux valut laisser
qui ait emporté qu'il
sur la terre et pour la terre. Je nommerai Nietzsche par exemple.
sans cesse des « masques sous lesquels les
Nietzsche nous parle
leur « innere » (profanation inté-
humains dissimulent Besudelung
tout comme il craint d'appeler de son vrai
rieure). Et Kierkegaard,
le tourmente. Socrate avait lui aussi son « secret »,
nom ce qui
et même des saints comme
demeuré inviolé; Spinoza aussi; grands
de Clairvaux dont la vita » troublait tellement
Bernard perdita
On bien des idées sans effleurer
Luther. peut, entendu, parler
la vie des hommes dans l'âme ces idées ont germé.
même desquels
Partant de la maxime de Spinoza, « verum est index sui et falsi a, on
tourner vers les hommes, Or les hommes sont pires que les pierres;
de le silence, tandis que les
les pierres se contentent garder
rire. Aussi le cas échéant dire la vérité
hommes savent peut-on
mais aux hommes il est de la cacher.
aux pierres; préférable
hommes l'enfer doit transgresser les
Impossible de dire aux que
infernal Soren Kierkegaard et
lois éternelles de son être pour
tenir compte d'une circonstance
Régine Olsen (autrement dit,
Et d'ailleurs, on
particulière et, par conséquent, insignifiante).
hommes de l'enfer, surtout aux hommes
ne peut parler aux
ce mot n'existe eux. Ils savent
cultivés de notre époque pas pour
immuables déterminent la structure
qu'il existe des principes qui
n'admettent aucune et ne
de l'être, que ces principes exception
entre les dieux et le
font aucune différence Orphée inspiré par
Inutile aussi de aux hommes des
dernier des mendiants. parler
il apprit l'enfer ne lui
« souffrances de Kierkegaard quand que
Olsen. En il est inutile de parler des
rendrait pas Régine général,
si épouvantables qu'elles soient, peuvent-elles
souffrances
et connexio rerum » et cet « ordo et connexio
ébranler « ordo
notre se fonde sur lui? Le
idearum c'est-à-dire pensée, qui
» est aussi
« non ridere, non lugere nequedetestari, sed intelligere
les lois de toute discussion est vaine ici,
impitoyable que l'enfer,
accomplit une action sublime, qu'il '< sauve son âme et travaille
au salut des autres. Mais c'est alors se
précisément que produit
cette chose contre laquelle nous mettaient en garde Luther et
Nietzsche. en affirmant, le premier oportet enim hominem suis
gaard décide qu'il faut vivre dans les catégories dans lesquelles
on pense, et il tend la main vers l'arbre de la science du bien et
du mal dont les fruits, comme nous l'a expliqué Hegel, deviennent
les principes de la philosophie pour tous les temps. Kierkegaard
détestait et méprisait Hegel. Peu de mois avant sa mort il inscrit
dans son Journal « Hegel! Qu'il me soit de dire à la
permis
manière des Grecs comme les dieux ont dû rire! Pauvre pro-
fesseur qui a saisi la nécessité de tout ce qui existe et a. transformé
l'univers en un hochet! Oh, dieux! » Mais renoncer à l'idée que
notre vie doit être déterminée par notre pensée, avec
rompre
Socrate. Kierkegaard ne le put jamais. Même dans ses moments de
XII
ces événements qui aux yeux des gens n'ont aucune importance,
mais qui détermina la destinée de Kierkegaard Régina Olsen, son
ancienne fiancée, se fiança avec Schlegel. Pour tout le monde ce
gaard cela signifiait que Socrate était le plus sage d'entre les
hommes et qu'Abraham, le père de la foi, ne devait et ne pouvait
être accepté que pour autant que sa foi confirmait et exprimait la
de Socrate. Comme tout le monde sait, Dieu détourna le
sagesse
bras d'Abraham au moment où celui-ci levait le couteau sur son
pouvait encore ne pas s'y arrêter. Il appelait à lui toutes les hor-
reurs de l'existence (et du reste, comme nous le savons, elles
n'attendaient pas son appel pour accourir vers lui) non pas pour
apparaître comme un modèle de vertu et étonner les gens par sa
résistance et son héroïsme. Il fondait d'autres espoirs sur ses
tourments Dieu peut rendre à Abraham son fils Kierke-
égorgé
gaard espérait que les souffrances briseraient enfin en lui cette
confiance au donné, à l'expérience, que la raison inspire aux
hommes et en vertu de laquelle ils « acceptent H le réel comme
inévitable. Kierkegaard amassait et concentrait en quelque sorte
toutes ses forces, toutes ses facultés de désespoir le commence-
ment de la philosophie n'est pas l'étonnement comme l'enseignaient
les Grecs, mais le
désespoir, dit-il pour obtenir le droit de
« pleurer et de maudire M et d'opposer ses larmes et ses malédic-
tions aux exigences inimitées de la raison qui a enchaîné la volonté
humaine au moyen des vérités générales et nécessaires. « Le che-
oa
J
L. CHESTOV. DANS LE TAUREAU HH PHALARIS 281
cette réalité où
non asinus turpissimus H, il n'acceptera jamais
la raison et où la « beatitudo » humaine consiste à mettre
règne
sous la des vérités générales et néces-
joyeusement protection
saires Isaac son l'homme jeté par un tyran dans
égorgé par père,
le taureau de Phalaris.
Abraham leva son couteau sur son fils, Abraham est donc un
horrible criminel; d'après la Bible cependant, Abraham est un
jamais: tant ~ue la raison règne sur l'univers, il est aussi impos-
sible de le sauver que de faire que ce qui a été ne fût pas. Kierke-
également sur les bons et sur les méchants. Mais cela Kierkegaard
ne peut le supporter dans le monde de l'esprit il doit y avoir
286 REVUE PHILOSOPHIQUE
Xttt
lier de la foi, lui, sait au contraire que c'est une chose merveil-
jours seul, sans rencontrer jamais âme qui vive. Il sait bien com-
m. 1 Il
sible de Socrate, et pour y parvenir aisément il substitue
plus
AristoteàSocrate.
Abraham. comme je l'ai déjà dit, est avant tout pour Kierkegaard
un homme expulsé hors du et donc de la protection
générât privé
des vérités générâtes et nécessaires. « Le chevalier de la foi est
complètement abandonné à lui-même, et c'est en cela que consiste
l'horreur de sa situation. » Ses décisions il les lui-même, et
prend
toujours à ses propres risques et H ne conseil
périls. peut prendre
de personne, il ne peut même trouver dans « Le
d'appui l'Église.
héros de l'Église exprime par ses actes le générât; il n'y a per-
sonne dans t'Ëgtise qui ne le comprenne. Le héros de la foi est privé
de cela. S'it se trouvait un peureux, un lâche vouloir devenir
pour
un héros de la foi aux frais d'autrui, il n'aboutirait à rien. Car seul
l'homme particulier, en tant que tel, peut devenir chevalier de la
foi. C'est en cela que consiste sa grandeur bien
que je comprends,
que je ne puisse l'atteindre: mais c'est en cela également que con-
siste l'horreur de sa situation que je encore mieux. »
comprends
Ces aveux contiennent une vérité extrêmement importante.
Nous nous souvenons que Nietzsche nous disait la même chose
mais en d'autres termes quand il se vit de « sortir du
obligé
générât ou, selon son expression, de tuer la loi il faillit.
devenir fou de terreur. Mais il y a dans le cas de Kierkegaard une
particularité à première vue négtigeabte et qui produit cependant,
l'effet d'une dissonance et se révèle significative. Kierkegaard
parle non seulement de l'horreur mais aussi de la grandeur de la
situation du chevalier de la foi. Ce terme même. <' chevalier de la
foi sonne assez étrangement on dirait la foi la
que implore
bénédiction de ce même généra! qu'elle avait fui. Le « chevale-
A celui qui s'est voué à la foi, il ne reste que l' « horreur M, et il lui
faut renoncer à jamais à toutes » que distribuait
les « consolations
que parce que lui aussi était un sacrifice volontaire. Mais d'où
Kierkegaard sait-il que Dieu agrée les sacrifices volontaires plus que
les autres? Nous ne pouvons poser une telle à Socrate. Son
question
ignorance » lui fournissait une réponse déterminée; mais Kierke-
gaard n'avait-il pas répété maintes fois Socrate était un païen
que
et qu'il n'avait rien à apprendre de Socrate? Or il se trouve le
que
chrétien lui aussi ne peut se'passer de Socrate, de même ne
qu'il
peut se passer des vérités et nécessaires.
générales
En même temps que Furcht und Zittern écrivait
Kierkegaard
W/M~r/io/u~ où il s'agit non plus d'Abraham, mais de Job. Job
n'a pas tué volontairement ses fils, comme on le il n'a
sait, pas
dispersé volontairement ses richesses. Tous ses malheurs ont
fondu sur lui sans
brusquement, qu'il s'y attendît. Il n'a même
pas le droit de prétendre à la haute de héros
dignité tragique.
C'est tout simplement un vieillard misérable, à charge à lui-même
et aux autres, comme il y a en a A notre de
beaucoup. époque
guerres et de bouleversements sociaux on rencontre des Job
presque à tous les coins de rues. Hier c'était un roi, aujourd'hui
ce n'est qu'un mendiant couché sur un tas de fumier il gratte
ses plaies avec un tesson. Et le Job de la
cependant, Bible, qui
n'était ni un chevalier, ni un héros à attirer
tragique, parvient
l'attention de Kierkegaard et « mérite ') que-le lui con-
philosophe
sacre, comme à Abraham, tout un livre, On
W/e~erAo/u~. peut
dire de ce livre ce que lui-même disait de Furcht und
Kierkegaard
Zittern « Si les hommes sentaient le sombre pathétique qui
t'anime, ils seraient saisis d'horreur. » est écrit lui
W7ede/o~~
aussi dans la « terreur et le frémissement un homme
par sur
qui est tombé le terrible marteau et se demande
qui avec épou-
vante d'où lui vient ce est-ce « malleus Dei s ou bien
coup sim-
plement la force « naturelle » des vérités générales et nécessaires?
D'après la Bible, c'est Dieu qui tenta Job comme il tenta Abraham.
Mais nous ne pouvons pas le « savoir » « Quelle est la science
qui puisse être construite de telle sorte trouve
qu'il s'y place pour
la tentation, laquelle n'existe dans l'infinie de la
pas perspective
pensée; car elle n'existe que l'individu. Une telle
pour science
n'existe pas. une telle science ne exister. » Mais à
peut quel
propos Kierkegaard évoque-t-il le souvenir de Job et pose-t-il
toutes ces terribles questions? Le héros de tout
W/e~ey-Ao/H/ï~,
292 REVUE PHILOSOPHIQUE
celui-là aussi peut perdre fils et fille qui a perdu celle qu'il
aimait. Et celui-là peut se trouver couvert de plaies qui a perdu
son honneur et sa fierté et en même temps la force et le sens de
1. o. 1
ne connaissait pas la peur Dieu était avec lui, Dieu à rien
qui
n'est impossible. Et en Job l' « expérience o n'avait
quotidienne
pas encore complètement détruit le souvenir du temps où la
raison ne régnait pas en maître sur la terre. Ou plus exactement:
les malheurs qui s'écroulèrent sur Job réveillèrent en lui ce sou-
venir. Kierkegaard écrit <. de Job ne tient à ce
L'importance pas
qu'it a dit Dieu me l'avait donné, Dieu me l'a béni soit
repris,
le nom du Seigneur. Cette il ne l'a dite début; il ne
phrase qu'au
t'a plus répétée ensuite. L'importance de Job consiste en ce qu'il
surmonte les discussions qui ont lieu dans la région limitrophe
de la foi; cette formidable révolte des et irré-
passions sauvages
sistibles se déroule en lui. Autrement dit l'expérience quoti-
dienne ou les données immédiates de la conscience constituent
compte que l'homme qui parle ainsi n'est déjà plus pro « res cogi-
tante, sed asino turpissimo habendus », mais ils côntinuaient de
penser et de dire non pas ce que nous avons besoin de dire, mais
ce que nous sommes forcés de dire « ex legibus nostrse naturœ! »
olympiques.
XIV
voulons à toutes forces que l'esprit soit assoupi dans l'homme qui
ne connaît la différence entre le bien et le mal. Mais la Bible
pas
ne dit cela. La Bible dit au contraire que tous les malheurs de
pas
l'homme du savoir. Tel est aussi le sens des paroles
proviennent
de saint Paul citées tout ce qui ne vient pas de
par Kierkegaard
la foi est Par son essence même le savoir, d'après la Bible,
péché.
exclut la foi etestlepéchéxo:-c'~o/7)vou le péché originel. A l'inverse
pas non plus, car il n'y avait pas entre quoi choisir le mal
n'existait pas dans le paradis. Et ce n'est que lorsque l'homme
obéissant à la suggestion d'une force hostile et incompréhensible
pour nous. tendit la main vers l'arbre, c'est alors seulement que
son esprit s'assoupit et qu'il devint cet être faible, soumis à des
rapport ne fait pas exception comme nous l'avons vu. Selon lui,
comme suite au péché l'homme ayant appris à distinguer le bien
du mal, s'est réveillé de son assoupissement. Mais alors où serait
le péché.' ~e faudrait-il pas admettre en ce cas que ce n'était le
pas
serpent mais Dieu qui avait trompé l'homme, ainsi que le pensait
qu'il lui faut courir aussi vite que possible mais qu'une force
et de cette peur il
passa subrepticement aux terreurs
angoisse
de la vie réelle dont fut comblée son existence. Nous nous rappe-
lons ce nous a dit des horreurs qu'il a subies. Il
que Kierkegaard
semble qu'il aurait dû concentrer toutes ses forces pour extirpe) de
apportent. Tout cela il faut l'accepter, il faut vivre avec tout cela,
la religion et la philosophie ainsi que l'ordinaire bon sens sont
complètement d'accord là-dessus. La seule chose que peuvent nous
offrir la religion et la philosophie, c'est l'édification au
qui juge-
ment humain se trouve être
pire que les plus affreuses calamités.
Mais nous n'avons pas le choix. Le choix a déjà été fait pour l'homme
et pour Dieu. Et l'homme et Dieu « ex solis suae naturae
agissent
legibus et a nemine coacti sunt La loi de la nature humaine est
la Nécessité. La loi de la nature de Dieu est l'immutabilité, autre-
ment dit la nécessité transformée en catégorie éthique. Kierkegaard
n'avait-il pas aperçu dans ses avec Olsen cette
rapports Régine
même nécessité qui avait condamné Dieu à demeurer le spectateur
XV
que du bruit. L' eritis sicut dei H nous a séduits et I' « enchan-
tement et
assoupissement surnaturel dont parlait Pascal s'est
caché des paroles « eritis sicut dei '). A travers le calme apparent
de Socrate et de on saisit cette même angoisse des « lugere
Spinoza
enflammées
et detestari refoulés que l'on entend dans les paroles
Docte ignorance. On sait que la Docte ignorance f~t, à son apparition (1440),
fort diversement accueillie. Si, d'une part, un Bernard de Waging
et les Bénédictins du lac de Tegern y virent une expression profonde
et lumineuse de la divine, d'autres Johannes Wenck,
sagesse
l'avaient violemment attaquée. Non sans raison, à vrai
notamment,
dire. La Docte l'orthodoxie religieuse de son auteur-
ignorance malgré
Non même de
est avant tout une œuvre antiscolastique. pas que l'idée
docte soit chose d'inouï donc n'avait pas cité
la ignorance quelque qui
le fameux de S. que Deus melius scitur
et répété adage Augustin
-ni que l'idée de la coïncidence en Dieu de tous les pré-
nesciendo?
dicats soit une idée révolutionnaire qui donc ne savait pas
possibles
dans l'unité divine tout attribut est identique à son essence?
que
mais Nicolas de Cues, en fait, faisait de ces axiomes un usage profon-
dément nouveau. Il développait une nouvelle conception de la connais-
éloge.
A.KoYRÉ.
qui aura pris goût au passé de la chimie ne sera pas guidé par
M. Hoimyard pour poursuivre ses investigations, ni vérifier la véra-
cité de ce qu'il verra dogmatiquement imprimé. Nous espérons que
M. llolmyard qui a tant étudié et tant lu nous dévoilera dans ses
futurs travaux ou dans les prochaines éditions de cet ouvrage (qui
est beaucoup plus et mieux qu'un essai de vulgarisation) quelles sont
les sources de sa grande érudition qu'il s'est appliqué avec coquet-
terie à cacher à nos regards.
IIÉLÈNE
HÉLÈNE L~IETZGER.
METZGER.
3)2 REVUE PHILOSOPHIQUE
1 1 1
lection sont enveloppées dans te donné intensif. Le logique est une
transformation du psychique. Mais les formes de l'intellection ne
simplifier en disant qu'elle est tout entière fondée sur l'idée d'une
ressemblance partielle de structure entre la donnée mentale et la
forme objective. Sans doute, il y a tous les degrés concevables de
posent plus les unes avec les autres; elles se reproduisent les unes
les autres, et le cerveau, structure parmi
structures, des exerce une
fonction priviligiée qui ne se laisse pas ramener à un plus haut degré
de complexité dans la hiérarchie des formes ou dans leur superposi-
tion. Quand la conscience ne serait que « l'ensemble des images men-
tales qui mettent notre:organisme en relation avec le monde exté-
rieur », encore faudrait-il avouer que c'est là une forme qui ne s'ajoute
pas simplement aux autres, et que la connaissance est tout de même
« bifurcation de la
nature »; il devait chercher à montrer le con-
que
tenu de la connaissance est à
rigoureusement identique l'objet
connu, que la perception n'est pas une sorte de double mental de
l'objet. mais l'objet lui-même ou l'une de ses Ce fut la
qualités. pre-
mière phase de la révolte: elle correspond en au de
gros programme
MM. Perry. Holt. Montagne, etc. et l'on trouve la même attitude
chez MM. Alexander et Laird. Une seconde devait suivre: il
phase
s'agissait toujours de réfuter le dualisme, mais la tactique était toute
différente. Le relativisme objectif de Uewey, etc.
Murphy, Whitehead,
ne niait plus la relativité de la perception, mais il y trouvait la preuve
de son objectivité. Retournant la dialectique de l'hégélianisme. renon-
çant à l'extériorité des relations, utilisant à sa manière les nouvelles
théories des physiciens, il cherchait à montrer si
est perçu ce
quique
dépend de l'organisme qui perçoit, de sa constitution, de sa posi-
tion. etc. l'objectivité et la nature du devaient
physique percept
néanmoins être maintenues. Si les qualités sensibles n'existent que
par le concours de l'organisme et de son environnement, elles n'en
sont pas moins dans les objets: la couleur résultant d'une interaction
entre certains processus et les organes de la vision fait néanmoins
partie du monde physique au même titre qu'une interaction purement
physique entre deux facteurs spatio-temporels. Une est
perspective
un fait physique et toute est une
perception perspective.
L'ingéniosté des adversaires du dualisme s'est exercée de diverses
façons dans le sens que nous Un un
indiquons. Murphy, Whitehead,
un Russell ont consacré leurs efforts à défendre et à déve-
longtemps
lopper un monisme ou leur
épistémologique ontologique qui parais-
sait nécessaire au salut et à l'intégrité du réalisme. L'histoire ne prou-
vait-elle pas que le dualisme cartésien aboutit fatalement à un
idéalisme et à un subjectivisme dont on ne voulait plus?
M. Lovejoy ne pense pas que cette condamnation soit sans appel;
réaliste comme ceux qu'il combat, il veut établir en lieu
premier que
la distinction entre l'idée et la chose, le da/um saisi la conscience
par
et lectx/nosc~um objectif si l'on veut tenir de faits
s'impose compte
incontestables et inintelligibles dans toute autre hypothèse connais-
sance actuelle d'un fait passé, vitesse de la lumière, variations des
perceptions en fonction des variations de nos diversité des
organes,
perceptions d'un même objet pour plusieurs erreurs des
sujets,
sens, etc. La connaissance a une « référence transcendante »; elle
est essentiellement médiate: elle fait connaître sans se
l'objet jamais
confondre avec lui. Le dualisme ne peut être réfuté aucune des
par
deux formes de monisme nous venons de mentionner; il arrive
que
même que la philosophie de White head ou celle de Russell ne soit
pas autre chose qu'un retour au dualisme, avec une terminologie
nouvelle et impressionnante. 11 faut, ou renoncer au réalisme, ou
accepter le dualisme. M. Lovejoy et avec une
analyse critique péné-
tration remarquable les deux phases de la révolte moniste. C'est sur-
320 REVUE PHILOSOPHIQUE
complexe infantile. Elle n'est pas innée mais acquise, la seule pré-
disposition congénitale étant une intensité particulière de la vie
instinctive (84). La genèse du
complexe dépend essentiellement de
iraumatismes psychiques remontant à l'enfance (drames de famille
ou scènes de contenu érotique), dont le souvenir souvent
adjuvant au plaisir sexuel et que leur effet habituel est de lui faire
obstacle. Malgré la conviction de Stekel que tout le psychisme se
déroule sur un arrière-plan sadique, la méthode psychanalytique
328 REVUE PHILOSOPHIQUE
t. On peut présumer que ce qui pousse invinciblement les sadiques et les maso-
chistes à l'onanisme est précisément le fait que leurs pratiques spéciales remplacent
mal le plaisir sexuel. L'onanisme inséparable de ces perversions est, semble-t-il,
une des meilleures preuves que, malgré son pouvoir stimulant, la douleur n'est
pas lascive en soi ni particuUèrement propice à la volupté.
A. SPAIER. CRUAUTÉ, VIOLENCE ET COLÈRE 32&
que roulent bientôt tous nos projets, c'est à lui que se reporte l'en-
semble de la vie affective; une sorte d'empoisonnement gagne
progressivement le psychisme; si la tendance ne parvient pas à
obtenir satisfaction, elle engendre des parapathies et le supplice
tresses.
Mais celles-ci suscitent fatalement la concurrence parce qu'elles
sont très l'objet de leur convoitise ne se ren-
répandues, que
contre nulle part en quantité inépuisable, enfin à cause de leur
avec passion évincer ceux qui l'ont emporté sur lui, leur ravir leur
suré ?
Eh bien, la cruauté est presque toujours l'en'et d'une haine jalouse
ou momentanée ou durable, méprisante ou
(légitime injustifiée.
humiliée. haine du bien-être, du bonheur, du mérite,
peu importe),
334 REVUE PHILOSOPHIQUE
domination que par leur valeur et n'en font qu'un excellent, qu'un
bienfaisant usage. Pour en venir à la cruauté, il faut ou que l'on
se, sente menacé dans son pouvoir, ce qui est précisément l'occa-
1. On serait tenté d'objecter ici certains effets bien connus du désir de plaire
et de la coquetterie froide, deux variétés apparentées du besoin d'accaparer, de
se faire une position, d'assurer son pouvoir (par l'amabilité ou l'attrait sexuel),
quand ce ne sont pas purement des formes de vanité. L'une et l'autre sont
décevantes pour qui en est t'objet, et il n'est pas rare qu'on leur reproche d'être
cruelles. Mais est-ce juste ? L'homme désireux de plaire, le séducteur, la coquette,
pour égoïstes qu'ils puissent être, ne pensent guère au mal qu'ils font, et tant
qu'ils n'en éprouvent pas de plaisir, ils ne méritent pas l'accusation. Ce n'est
qu'à partir du moment où ils se réjouissent d'allécher sans satisfaire qu'ils font
preuve de cruauté. Et quand cette délectation apparait on peut supposer qu'elle
cherche à compenser des déboires qui ont suscité un ressentiment généralisé ou,
tout au moins, une pointe de ressentiment. En soi, la volonté de puissance n'est
pas nécessairement maligne. La malice vient de surerolt.
A. SPAIER. CRUAUTÉ, VIOLENCE ET COLERE 335
grand souffle passa sur la salle. Chose qui ne s'était jamais vue
qui. enviant tout et tous, s'en prennent à qui leur tombe sous la
main. Elles font autant de victimes qu'elles peuvent, agissant
avec une ruse effroyable et dépensent pour leurs proies des
trésors d'apparent dévoûment, tant pour mieux se
repaître de
leur agonie que pour détourner les soupçons. Le docteur Logre
leur a consacré un pénétrant feuilleton dans Le Temps. On rappro-
chera de ces cas celui des tueuses d'enfants qui semblent vouloir
Or, pour agir, toute tendance puise dans nos réserves. Mais à
1 1.. 1
arrêtée dans son cours habituel, contrariée un
par obstacle sou-
dain ? La pression intérieure s'accroît. d'autre il
Et, part, se pro-
duit un phénomène qui n'est sans avec les
pas analogie coups de
bélier que la brusque fermeture d'un robinet provoque dans les
conduites d'eau. Ces à-coups sont très Ce sont
désagréables. des
vexations. Elles ne consistent d'ailleurs seulement dans le
pas
heurt déterminé par l'arrêt, et il ne faudrait pas trop prendre à la
lettre notre image Ce qui, dans de tels
hydrodynamique. à-coups,
nous atteint le plus est en réalité la privation
péniblement qui en
résulte. Car toute tendance est essentiellement finalité. L'empêche-
ment nous éloigne de but, et voilà ce devient
qui vite f'S!~or-
table. En somme, une tendance refrénée est comme une artère
ligotée. Derrière elle il y a devant elle se
congestion, forme un
champ d'inanition. Ces phénomènes réunis constituent l'émotion
banale que nous appelons irritation.
Évitons d'ailleurs l'illusion matérialiste qui pourrait résulter de
nos comparaisons Pour mieux saisir
physiques. de quoi il s'agit en
réalité, représentons-nous un orateur viennent
que interrompre
des contradicteurs obstinés. Il s'est à son
préparé discours, il était
sous pression, il est le voici lancé dans un
parti, excellent déve-
loppement. Une exclamation le prive du succès
ironique escompté.
Le voici obligé de revenir en arrière. Une objection l'arrête encore.
Il faut qu'il détourne sa du fixé
pensée plan pours'engager sur un
terrain peut-être plein d'embûches. Et cela au moment
juste où il
espérait obtenir l'adhésion. 11 est troublé et déçu. L'assistance, au
contraire, s'amuse, et il en est humilié. Ses
diaboliques adver-
saires ne l'en persécutent mieux. Il se contient
que encore, mais à
chaque intervention il s'échauffe A moins
davantage. d'être un
vieux tacticien ou un homme d'une volonté
exceptionnelle il finira
bien par éclater. Alors il peut arriver deux choses ou bien il
perdra la maîtrise de soi et sortira vaincu de l'affaire, ou bien
trouvant dans son irritation de nouvelles un plus
forces, vigoureux
élan, il attaquera à son avec
tour, répliquera succès, rentrera en.
possession de ses moyens et, dans sa véhémence, trouvera des
accents qui conquerront l'auditoire.
Eh bien, c'est là l'office normal de la colère. Certes, elle peut
manquer son but. Mais quelle est la fonction biologique ou psy-
chologique qui n'en soit pas là? On déraisonne bien à force de
g.~ REVUE PHILOSOPHIQUE
cation concrète.
En second lieu, la fonction du technicien ne doit pas être
fique.
Or, la science est science, proprement et exclusi-
appliquée
vement au même titre et au même degré que la science
science,
ne constitue que le temps premier du rythme binaire,
pure, laquelle
caractéristique de l'activité scientifique.
de la science appliquée est la construction progressive
L'objet
rationnel sous-tendant
d'un univers abstrait, qui constitue le réseau
premières techniques.
M ne peut suffire, en effet, d'analyser la structure logique des
progressé
du tout au tout. Il n'en est pas moins certain que ce rôle
fait, cette vérité, une fois établie, demande encore à être sociale-
ment acceptée. Cette acceptation requiert, de la part de qui veut
bien se donner la mission de l'obtenir, non pas seulement l'effort
notre intelligence.
L. BASSO. LA SCtE\CE. LA TECHNIQUE ET LA SOCIÉTÉ 347
l'espèce.
Cette activité s'exerce à des étages en utilisant des
multiples,
collaborations de qualité variable, dont les plus humbles en appa-
rence ne sont pas les moins efficientes dans le succès global
Dirigée par une élite, l'activité scientifique doit plonger ses
racines dans la profondeur de la masse sociale. Elle ne peut pros-
pérer sans le concours spontané des éléments actifs de celle-ci,
non plus que sans la sympathie, ou si l'on préfère, sans un certain
entraînement affectif de la masse réceptive tout entière.
D'où l'importance du problème général de l'éducation scienti-
fique. Mais l'éducation ne comprend pas que l'instruction propre-
ment dite, qui n'atteint la masse que dans individualités
quelques
exceptionnelles; c'est ici que se révèle la fonction à tendance uni-
verselle de la vulgarisation qui, seule, possède le de sti-
pouvoir
muler les curiosités paresseuses et d'entraîner les bonnes volontés
et de la Technique.
philosophique.
C'est à ce que je me bornerai à rappeler encore l'une des
propos
considérations essentielles de mes études antérieures et qui se
1 1-~ 1 1 1
récente qu'il est malaisé d'en démêler dès à les circons-
présent
tances précises.
La pensée scientifique du souci utili-
explicative, émancipée
taire, a pu se sentir suffisamment forte dans son indépendance
pour admettre qu'elle constituait toute la science. Cette croyance
est à la base des relations qui se sont établies, au cours des âges,
entre les hommes de science et la société des autres hommes. Ces
relations, elle les conditionne encore. La signification philoso-
phique du retour à la synthèse réalisatrice dans t'abstrait le
par
développement des sciences appliquées, retour dont est issue la
Technique moderne, échappe à la plupart des analystes et des
savants eux-mêmes.
La science
appliquée postule, pour l'édification de ses syn-
thèses, une science pure à un d'avancement tel
parvenue deg'ré
qu'il est concevable que ce dernier progrès doive exclu-
accaparer
sivement l'attention spéculative, au d'une suite d'événe-
préjudice
ments dont le sens évolutif encore de d'obscurité.
s'enveloppe trop
Or, il est malheureusement facile de constater à quel
trop degré
la persistance du point de vue traditionnel contribue à entretenir,
pour ne pas dire à aggraver. la méconnaissance de la
générale
signification del'etïort scientifique.
La Science pure tend à s'éloigner de la
toujours davantage
compréhension du profane. Elle en arrive à revêtir, à de
l'égard
celui-ci. les apparences d'un jeu supérieur, d'une spéculation
détachée des buts sociaux à l'activité humaine normale,
assignés
ou encore d'une à tendances
philosophie purement égoïstes, apte
principalement à fournir aux esprits cultivés des arguments de
choix pour alimenter les discussions doctrinales.
Alors que la science paraît ainsi se dérober à la masse sous
l'ésotérisme des symboles, la Technique, recueille
par contre-coup,
tout le prestige qui va spontanément à l'action réalisatrice. D'où
la notion populaire d'une serait la science
technique qui utile,
pour tout dire la seule vraie science.
enseigne?
C'est d'ailleurs sous un tout dînèrent qu'apparaît la misère e
angle
des laboratoires. Si la science n'est dotée du matériel qui lui
pas
c'est administrative, ainsi qu'il arrive, encore ici,
convient, question
en mainte autre circonstance. Il est de règle que les grandes œuvres
titre.
convenablement rétribué, dispose d'instruments
Le technicien,
lui sont marchandés dans les
de travail qui ne pas
adéquats,
au dans ses bureaux ou
industries bien conduites. Tout plus,
est-il soumis à un contrôle quelque peu
laboratoires modernes,
à l'intérêt bien entendu de qui
méfiant, préjudiciable parfois
de travail et sa diligence ou
l'exerce. Mais est homme
l'ingénieur
mis en cause. La con-
son zèle ne sont qu'exceptionnellement
demeure de qualité haute et jalousement
science professionnelle
entretenue.
tenu en des honneurs et
Le savant, de la foule, marge
ignoré
les classes ne se plaint
des bénéfices de lucre par dirigeantes,
de son attitude s'inspire du sentiment
pas. La dignité
pourtant
de la de sa tâche; l'estime qu'il
ressenti grandeur
profondément l'attei-
des qui ne
universellement, en dépit mesquineries
inspire
à lui assurer le
contribue par ailleurs largement
gnent guère,
d'une mission hautement
réconfort qui naît de l'accomplissement
et intensément aimée.
il n'est de médiocrité matérielle.
Pour l'ingénieur, plus question
fort une
Son attitude est
n'en pas moins éloignée d'exprimer
tante.
rassemblent à inter-
Au cours des réunions corporatives, qui
les groupements et associations
valles plus ou moins périodiques,
des très révélatrices sont parfois pronon-
de techniciens, paroles
la prise de conscience d'un état de
expriment nettement
cées, qui
L. BASSO. LA SCIEKCE, LA TECHNIQUE ET LA SOCIÉTÉ 355
s'attacher, non
compte de la considération privilégiée peut qui
fonction en elle-même, mais à la personnalité
pas à la technique
et aussi bien à la possession d'un certain
de celui qui la remplit
d'ancien élève d'une certaine école, toutes cir-
titre, à la qualité
introductrices d'un facteur spécial, qui relève plutôt
constances
la notion de caste ou tout au moins de classe sociale.
de
réserves étant il est certain que trop souvent, dans
Ces faites,
en le savoir de n'est pas estimé à
l'industrie général, l'ingénieur
et que ses ne sont utilisées avec un
sa juste valeur capacités pas
discernement suffisant.
le du à l'égard de la
Il y a d'abord préjugé classique praticien
avoir été sérieusement battu en brèche, ne
théorie, qui, pour
à renaître de ses au incident. Il
tend pas moins cendres, premier
encore d'organisation,
y a encore cette indigence trop générale
confusion des dont le régiment
ce chaos et cette compétences,
nous a si longtemps une charge fort plaisante,
paru présenter
moins n'en n'est ailleurs que la
pour qui du pâtit pas, qui par
d'un état collectif assez dans tout
conséquence d'esprit répandu
social et encore lourdement sur notre vie natio-
l'ordre qui pèse
nale tout entière.
le technicien est à se voir traiter en
Trop fréquemment, exposé
à gages, dont la collaboration se jauge au même
simple serviteur
celle d'un commis ou d'un employé à la
étalon que voyageur
vente.
d'autre en vertu d'un système bureaucratique
Placé, part
et dans la haute direction ne se
plein de contradictions lequel
et nécessairement désireuse d'assumer osten-
montre pas toujours
de sa dans une
siblement les responsabilités charge, placé
assez fausse entre cette direction et l'ouvrier, il en est
situation
réduit à travailler dans des conditions morales et sociales, je
le celles-ci, qui n'ont rien de
ne retiens, pour moment, que
celles devraient en logique à l'uti-
commun avec qui correspondre
lisation rationnelle de la intellectuelle et scientifique
préparation
qu'il a reçue.
Il en arrivera à se mettre en contradiction avec
même, parfois,
les essentiels de cette dernière, sans devoir
les enseignements plus
être accusé autant, en toute de laisser aller ni d'indo-
pour équité,
si puissante en arrive à se manifester l'influence du milieu
lence,
L. BASSO. LA SCIENCE, LA TECHNIQUE ET LA SOCIÉTÉ 357
et des idées qui ont pris cours et s'affirment sans cesse parmi
l'élite de la profession technique. La prise de conscience que je
considère s'y précise par une notion très lucide des droits qui
doivent servir de contre-partie et de stimulant moral à l'accepta-
tion des
responsabilités sociales. Le technicien ne réclame aucune
naître.
Ce sentiment hautement moralisateur, à la fois soutien et syn-
thèse de la dignité et de l'honneur professionnels. comment le faire
position qui lui échoit par rapport aux activités concurrentes, rela-
tivement aux autres catégories d'hommes d'action.
Mais un tel souci n'est guère favorable à l'éclosion d'aspirations
suffisamment cohérentes et susceptibles de caractériser un idéal
commun à tous les membres de la profession, un idéal qui échappe
par sa nature à la compétition des intérêts purement matériels, ou
Jusqu'à une époque encore récente, son début dans la. vie profes-
sionnelle avait pour conséquence à peu près nécessaire d'amorcer
une solution de. continuité déconcertante entre la mentalité pre-
mière qui résultait de sa formation d'école et celle que son stage
à l'atelier ou au bureau de dessin allait tendre à lui faire acquérir.
On répétait à l'envi tout autour de sa jeune inexpérience des
maximes traditionnelles, d'autant plus susceptibles d'influencer sa
profession.
Dans l'état de nos institutions, la formation de l'homme de
crm1fa aerav
assez mSrl;n.o.o.,+ 7~s rl'~u.11- L -i~
goûte médiocrement l'appoint d'une collaboration technique
ou scientifique.
Les conclusions objectives, et réfléchies
scrupuleusement pesées
du rapport d'expert, lui à l'excès et par
apparaissent prudentes
elles-mêmes inaptes à convaincre un le plus ordinairement
juge,
fermé et même hostile au du raisonnement
principe scientifique.
L'expert n'est que le spécialiste, à qui l'on demande de répondre
par oui ou par non sur et
quelques questions déterminées, qui
demeure par définition même à et
étranger l'aspect juridique
social du litige en cause.
Ce rôle de dans le débat le
l'expert judiciaire, technicien
continue pareillement à le à l'égard des autres de
remplir agents
l'activité sociale. Oubliant ou méconnaissant le caractère essentiel
de sa fonction, qui étroitement à l'homme de
l'apparente science,
ne voulant retenir que sa participation aux activités directrices et
organisatrices, il est amené à s'égarer en d'illusions et
beaucoup
de conceptions fausses sur la répartition des compétences et la
conduite des affaires, aussi bien
publiques que privées.
Faute d'une prise de conscience mieux éclairée de la nature
scientifique de sa mission, cherche en vain à inter-
l'ingénieur
préter le sens d'aspirations confuses, sont
qui par elles-mêmes
très légitimes et il risque, s'il veut des désirs à l'action.
passer
d'aggraver un conflit de mentalités dont nos sociétés ressentent
déjà si intensément les effets.
Ce que le technicien ne
scientifique comprend pas assez,
comment l'élite le comprendrait-elle '?
non-scientifique davantage?
On ainsi mieux
peut s'expliquer que l'ingénieur, rétribué maté-
riellement, en tant des utilités et immédiates.
qu'agent pressantes
ne jouisse pas auprès des classes cultivées de la d'estime
qualité
qui va au savant, en dépit de toutes les oppositions de tendance
créées par l'éducation et entretenues la tradition
par de classe.
.r_ 1
époque, en réformant soit les préjugés vulgaires, soit les vues
théoriques d'une logique trop dédaigneuse du fait et
pur simple.
Dans nos sociétés de vieille civilisation, la Science n'occupe pas,
en somme, la place qui devrait revenir en raison à s.on et
progrès
à ses virtualités multiples.
En tant que pensée, recherche de la connaissance, c'est-à-dire
sous l'aspect que la philosophie prend exclusivement en considé-
ration. la science, ignorée de la masse, n'intervient très
que
accessoirement dans les préoccupations des élites et
dirigeantes
son influence sur la conduite politique et même des
économique
sociétés est pratiquement négligeable.
En tant qu'action, sous l'aspect réalisateur et constructeur
qui ne s'est pas encore imposé à la réftexion critique et dont celle-
ci ne perçoit que l'aboutissement c'est-à-dire la
extra-scientifique,
mise en œuvre à des fins utilitaires des résultats de la recherche
théorique, en tant qu'action, la science n'est en réalité acceptée
que dans une fonction strictement délimitée à un certain cadre
d'applications purement techniques. Toujours, la science demeure
serve la société ne veut attendre d'elle des utilités bien défi-
que
nies des fleurs pour sa des commodités matérielles
rhétorique,
et surtout des canons et des moyens de combat.
Et ceci peut conduire à entrevoir à quel point l'intervention du
facteur social est susceptible la base de tous les
d'élargir pro-
blèmes philosophiques qui sont à l'origine du développement
scientifique et, en particulier, celui-là même de sa moralité.
Les grands débats doctrinaux qui se sont élevés sur ce terrain
classique s'éclaireraient assurément d'une lumière du
féconde,
seul fait de l'intégration raisonnée du de vue de l'action
point
scientifique, faute de la considération l'activité de la
duquel
science demeure encore, au sentiment de tant d'esprits cultivés,
suprêmement égoïste et dédaigneuse des fins humaines.
L'ceuvre scientifique, étant définition collective et désinté-
par
ressé, ne peut échapper purement et aux
simplement apprécia-
tions de la morale.
fins scientifiques, ce sont les fins qui sont les conséquences logi-
d'un entraînement mystique séculaire, les fins en harmonie
ques
avec une histoire qui ne retient volontiers que les dates des
encore.
Le technicien les ressources de la
emploierait pareillement
science à des buts de préservation ou d'urbanisme sa technique
fique.
La recherche des principes, des lois, ou encore, si l'on préfère,
de l'explication, exclut-elle nécessairement l'intervention de-ce que
nous appelons communément le facteur moral? Cette exclusion,
certains se à proclamer à la façon d'un dogme, ne
que plaisent
tient-elle pas elle-même à l'étroitesse de nos conceptions tradition-
Au problème logique de la de
pénétration l'esprit scientifique
dans les méthodes d'étude, les habitudes de raisonnement et d'une
façon très générale dans les conduites d'ordre intellectuel. se
superpose en somme le problème vaste et
plus plus proprement
social de l'extension de l'action scientifique dans l'évolution
générale des civilisations.
A ce point où la pensée, la recherche de la connaissance se
transpose graduellement en réalisation, en synthèse systématisée,
In fonction technique occupe une place l'obser-
privilégiée pour
vateur philosophique, en lui révélant, nettement tout
plus que
autre processus d'activité collective, d'une les
part conséquences
certaines du progrès scientifique et, de l'autre, la nature et la
grandeur des résistances que ce progrès suscite et avec lesquelles
force est bien les de lutte
d'organiser moyens appropriés.
La science n'est pas une entité élaborerait ses abstrac-
pure qui
tions sur un plan d'idéalité sereine; elle consiste en la mise en
œuvre d'une méthode, dont le ressort réside essentiellement dans
l'adoption volontaire et systématique d'une certaine attitude
372 REVUE PHILOSOPHIQUE
Louis B~sso.
Correspondance de Descartes
Nouveau classement
page'.
1619.
1622.
1623.
1625.
1626.
1628.
1629.
18 D. à Ferrier (1,13).
juin,
18 juillet, de Hollande, D. au P. Gibieuf (I, 16):
septembre, D.àX (1,18).
8 octobre, D.àM. (1.22).
Amsterdam, D. à Ferrier (1,32).
2ti .Paris, Ferrier à D. (!,38).
13 novembre. Amsterdam. D.àFerrier (1,53).
fl3 ] D.àM. (I, 69).
M D.àM. (t,'76).
18 décembre. D.àM. 1, 82).
1630.
1631.
1632.
1633
7 février, Deventer, D. à Wilhem (I, 264).
25 juillet, D.àM. (1,266).
[fin novembre], D. à M. (I, 270).
12 décembre, Amsterdam, D. à Wilhem (I, 273).
[fin 1633], D. à Stanpioen 275 et 573).
1634.
1635.
16 avril, Utrecht, D. à Golius (I, 3t4)..
6 mai, La Haye, Huygens à D. (R., 1).
19 Utrecht, D. à Golius (I, 317).
[juin ou juillet], D. à X. (1,321).
28 octobre, Pandcren, Huygens à D. (!, 325, et R., 2).
l" novembre, Utrecht, D. à Huygens (I, 328, et R., 5).
5 décembre, Arnhen, Huygens à D. (1, 332, et R., 7).).
8 Utrecht, D, à Huygens (R., 9).
H D. à Huygens (I, 334, et R., 11).).
C. ADAM. CORRESPO\DA\CE t)E DESCARTES 3T7 7
1636.
1637.
t" janvier. Leyde, D. à Huygens, (R., 29).
:i La Haye. Huygens à D. (!, 345, et R.,
3(J).i.
15 février. M.àD. (R., 261).
255 La Haye. Huygens à D. (R., 32).
27 Leyde, D. à Huygens (R., 33).
[2-? .] D. à M. ~t, 347).
1* mars, La Haye, Huygens à D. (R., 35).
3 Leyde, D. à Huygens (R., 36).
D.ôM.' (1. 363).
D.àM. (1, 365).
D.àX. (1,332).
D.àX. (!,368).
22 Leyde. D. à Huygens (R., 38).
24 La Haye, Huygens à D. (R., 39).
29 Leyde, D. a Huygens (R., 4d).
20 avril, Leyde, D. à Huygens (R., 44).
20 mai. Atcmaer, D. à Huygens ~[, 371, et R.,
45).
2 juin. La Haye, Huygens à D (R., 48).
(entre 8 et i2). D. à Huygens (R., 49).
Leyde, D. à Wilhem (!, 386).
D.àM. (L374).
D. à M. (1,389).
12 Leyde, D. à Huygens (L384,etR.,5t).
14 Leyde, D. à Colvius (I, 379).
14 Leyde, D. à Balzac (I, 380).
[14 Leyde], D. au P. Noël (I,382).
27 La Haye, Huygens à D. (R., 53).
5 juillet, Alcmaer. D. à Huygens (R., 54).
30 août. D. à X. (I, 393, et Co-
hen, 486).
378 REVUE PHILOSOPHIQUE
'1637 (suite).
13 sept. Louvain, Fromond à D. (1,402).
18 Louvain, Plemp à D. (1,399).
18 devant Bréda, Huygens à D. et
(I. 393, R.,
SS).
3 octobre, D. à Plemp (!, 409).
3 D. à Fromond, (I, 412).
5 D.àHuygens (I, 431, et R..
58).
[5 ], D. à M. (I, 448).
[S ], D. à M. (I, 480 et 354).
[S ], D. au [P. Noël] (1,4S4).
[ ], D. au [P. Fournet ou Four-
nier] (1, 456).
[octobre 2], D.àDogen (1, 458).
23 novembre, La Haye, Huygens à D. (I, 461, et R., 60).
Toulouse, Fermat à M. (I, 463).
4 décembre, D. à Huygens (I, 506, et R., 62).
20 D. à Plemp (1,475).
[fin déc.], D. à M. (I, 477).
1638.
1638 (sut~).
1639.
1639(sHt<e).
30 avril D. M. (II, 829,et V.829).
[ L D. à [Debeaune] (II, 541 et V, 530).
6 mai, Santporte, D. à Huygens,
R., 89).
'S La Haye, à D.
Huygens (II, 846. etR., 90).
Utrecht, Regius à D. (II, 548).
28 Fort de Nassau, à D.
Huygens (II, 549, et R., 92).
6 juin, Santporte, D. à Huygens (II, 881, et R., 93).
[''S ], D. à [Desargues]
(II, 883).
~9 D. à M.
(II, 557).
14 juillet, Utrecht, RegiusàD.. (H, 868).
27 août, D. M.,
(11,869).
[septembre], j, D. à Schooten (11, 874).
mi-sept., Utrecht, Regius à D. (H. 882).
octobre, D. Huygens (I!, 583, etR..98).
t6 octobre, D. à Mersenne (II, 587).
[octobre] D. à
[Huygens?] (II, 600).
[oct-nov.], Utrecht, Regius à D. (H. 616).
[13nov.] D. M.
(11,617).
17 D. à
Santporte, Huygens (R.. 99).
19 Van Surck à Huygens (R., 264).
Huygens à Saumaise (R., et
310-333)
Cohen, 512).
Saumaise à D. (X. 887~.
26 Santporte, D. à Huygens (R.. 104).
26 D. à Van Surck (R., 366).
30 Van Surck à Huygens
Leyde (R., 268).
nov.-dec.. 4 pièces en flamand, (R.,
274-277-280-283).
3 dée.
déc. à D.
Regius
Ilegius (H, 642).
12 D. à
Leyde, Huygens (R., 107).
t3 La Haye, à D.
Huygens (R.,112).
i7 D. à
Santporte, Huygens (R., 114).
[20 .], D. à Van Surck (R.. 278).
21 Van Surck à Huygens
Leyde, (R., 272).
28 La Haye, à D.
Huygens (II, 638, etR.,118).
< 639, sur Comenius D. à M.
(Supplément, 97).
1 639. D.àX. (11,348).
1640.
1640~uf<e).
1_1_\
1640 (suite).
29 à D.,
octobre, Huygens (R., 145).
[11 novembre], D. à [Huygens?], (III, 229).
11 D. à M., et
Leyde, (111, 230, R., 146).
[~ ], D. à P. [Gibieuf], (III, 236).
D.àM., (111,338).
12 Leyde, D. à Huygens, et
(III, 241, R., 1.17).
r < D. à Colvius, et
(III, 247, X, 578).
[18 ], D. à M., (III, 243).
3 déc., D. à M.. (111, 248).
3 D. à son frère aîné, (III, 252).
[ .], D. à M.. 253).
(III,
21 D. à Bannius, (R., 293).
[M .], D. à M., (111, 262).
[31 .], D. à M., (III, 271).
[1640], D. à X., (V, 843).
1641.
1641 (sm<e).
1642
1642 (~t:).
1643.
[janvier], D. à Desmarets (Ht. 60S).
D.àM. (111.607). l.
5 Endegeest. D. à Huygens 18:J).
(R.,
7 La Haye, à D.
Huygens (R., 185).
Endegeest. D. à Huygens (R.. 187, et
Y.:j47).
février. D.àM. (111, M)).).
D. à l'Abbé Picot (111. 6~.). i.
'18 D. à Huygens
Endegeest, (III, 617, et
R.,189).
23 D.àM. (111,631). ).
23 mars. D.àM. 637).
(H!.
23 avril, D. à Colvius (HL 646).
M avril, D.àM.
Endegeest. (111,648).
D.àM. (111,683).
16 mai. Elisabeth à D. (III, 660).
[21 ], D. à Elisabeth (111. 663).
32 Egmond sur le Hoeff, D. à Huygens (R., 198).
2~ du Hoeff. D. à Huygens 669. et
(III,
R.,199).
30 Amsterdam. D. à M: fin, 672).
6 juin. Voorn. à D. et
Huygens (III, 676,
R.,202).
9 Dordrecht, Colvius à D. (111,680).
10 Bewerwick à D. (III, 682).
19 D. à Vorstius (III, 686).
~0 Elisabeth à D. (III, 683).
26 du Hoeff, D. à Huygens (R., 208).
S8 D. à Elisabeth (III, 690).
1~ juillet, Elisabeth à D. (IV, 1).i.
S Egmond du Hoeff, D. à Bewerwick (IV, 3).
C. ADAM. CORRESPOXDAXCE DE DESCARTES 385
1643 i.!M~).
5 juillet, Egmond du Hoeff. D. à Colvius 6).
(IV,
6 D. au d'Utrecht
Vroedschap
(IV,8et64j,R.,298).
«) Amsterdam. D. à Huygens et
(IV, 13,
R.,209).
'0 D.à[\ViIhem] (IV, 16).
18 Egmond of de Hoeff. D.àG.Brandt (IV. 17 et
649).
septembre, du Hoeff D. à Colvius la).
(s~p..
2"
D. à
Huygens (R..210).
i octobre. La Haye, à D.
Huygens (R., 214).
17 du Hoeff eu Egmond, D.à[Graswincket](IV,18).
D. à Pollot (IV, 23).
-17
i D. à Huygens (R.,216).
2' D. à Pollot (IV. 23).
23 D. à Pollot 28).
(IV,
27 Leyde, D. à [Van Surck] (IV, 31).
2 novembre, du Hoeff. D. à Huygens (R., 21&).
2 La Haye, à D.
Huygens (R., 219).
7 .du Hoeff, D. à Wilhem (IV. 32).
7 D. à l'Abbé Picot 36).
(IV,
[novembre], D. à Élisabeth (IV, 37).
1, D. à Pollot (IV. 43).
10 BrassetàD. (IV, 653).
1:' du Hoeff, D. à Huygens (R.,221).
17-d Du Hoeff, U.àPottot (IV, 50).
21 Élisabeth à D. (IV, 44).
[ 1, D. à Élisabeth (IV, 45).
M La Haye. Huygens à D. (R..226).
3" Du Hoeff, D. à Pollot (IV.53).
H décembre, D. à M., (IV, a6).
[1643?], D.àBuitendijck (IV, 62).
[1643?], D.auP.[?] (IV, 63).
[1643 ou1644?]. M. àD. (IV, 68).
[1643??], D.àX. X. (V.345).
1644.
TOMECXY.–1933(N~Set6).. 25
386 REVUE PHILOSOPHIQUE
1644 (suite).
1645
1645 (suite).
1645(stM<e).
1646
1646i~u:<e).
1647.
1647 (suite).
1648
1648fsm<e).
1649.
1649 (suite).
[23 avril], J, D.à Chanut (V,351).
[23 ], D. à Clerselier (V, 332).
23 D. à l'Abbé Picot (V, 357).
7 et 14 mai, Egmond, D. à l'Abbé Picot (V, 358).
[juin], D. à Élisabeth (V, 359).
[ J, D. à Freinshemius (V, 361).
M juin, D. à Carcavi (V, 36S).
9 juillet. Paris, Carcavi à D. (V, 369).
23 1 Cambridge, Morus à D. (V, 376).
17 août, La Haye, D. à Carcavi (V, 391).
[–], D. à Morus (V,401).
30 août, Egmond, D. à l'Abbé Picot (V, 403).
30 D. à l'Abbé Picot (V, 406).
30 D. à Hogelande (V, 409).
24 septembre, Paris Carcavi à D. (V, 412).
9 octobre, Stockholm, D. à Élisabeth (V, 429).
9 D. à l'Abbé Picot (V, 432).
[17 ], D. à Brasset (V, 433).
21 Cambridge, Morus à D. (V, 434).
4 novembre, La Haye, Brasset à D. (V, 444).
6 Stockholm, D. à Clerselier (V, 447).
27 La Haye, Brasset à D. (V, 449).
4 décembre, Élisabeth à D. (V, 451).
4 Stockholm, D. à l'Abbé Picot (V, 4S3).
18 D.àBrégy (V,45S).
ao D. à l'Abbé Picot (V, 461).
[1649 ou 16501, D. à [De La Mare] (V, 462).
[1649 ou 16SO], D. à X. (V, 464).
1650.
15 janvier, Stockholm, D. à Brégy (V, 466).
15 D. à l'Abbé Picot (V, 469).
10 février, D. à ses frères (V; 470).
s'excuse, une fois le reçu. Elle était motivée par une lettre
privilège
de Mersenne, nous n'avions pas; Léon Roth l'a retrouvée
que
dans la correspondance de Huygens, et l'a publiée (R., p. 261).
Descartes l'avait à celui-ci pour le mettre au courant de
renvoyée
l'acroche qui arrêtait l'octroi du privilège p. 36, 1. 3). Cette
(R.,
lettre de Mersenne est du 13 février 1637. Huygens, qui écrivit à
où se trouvait Pollot. H
envoyées « de La Haye », auparavant
s'adresser directement à Descartes,
n'avait pas osé, semble-t-il,
sans ce dont il s'excuse en lui écrivant
qui avait laissé réponse,
le 12 février une lettre de l'année précédente (t. I, p. 518,
1638,
recours cette comme intermédiaire, à un
I. 2-3). Pollot a donc fois,
Et celui-ci de la main à la main, le
ami commun, Reneri. remet,
au cette fois, écrit à
12 février, les objections philosophe, qui,
comme sa négligence. Il la
Pollot le jour même, pour réparer
en son répondre avec
répara mieux encore, prenant temps pour
aux celles-ci, dans notre édition,
force éclaircissements objections
les envoyées « il
n'ont que cinq pages (t. I, p. 512-517); réponses,
donc au mois de mai, sinon fin d'avril.
de trois mois
y a plus »,
19 ont du double, presque le triple,
dit Descartes le août, plus
Et Descartes les adresse au
jusqu'à treize pages (t. M, p. 34-47).
Reneri, eu connaissance des
même intermédiaire. qui, ayant
avait bien le droit de connaître aussi les réponses.
objections,
au nombre de visent le
que ces objections, quinze,
Ajoutons
Méthode la Dioptrique (deux), et
Discours de la (sept objections),
les Météores une dernière sur l'orthographe, qui
(cinq), plus
un étranger notre qu'un Français de
dénote plutôt parlant langue,
naissance. (Or Pollot était un Piémontais, réfugié en Hollande.)
En Pollot ne pas l'avoir eue
Rien sur la Géométrie. effet, paraît
encore entre les mains: il la demande, toujours par l'intermédiaire
Descartes. dans sa lettre du 12 février, promet de lui
de Reneri, et
réserver un des six qu'il conserve pour des géomètres
exemplaires
3S6 REVUE PHILOSOPHIQUE
le dimanche 24 juin 1640 (t. II1, p. 92). Wilhem avait deux filles
six ans et demi environ, l'autre un peu plus de cinq ans sans
doute. A cet âge, six ans et demi et même cinq ans, une fillette
'jorctc'so/Qs~~c~MS decet.
D'autre part, la lettre, de Sorbière nous apprend que Dogen est
un homme de guerre l'art de Pallas, Palladis artem
tjL pratique
tractas. Et c'est aussi un géomètre fera d'une habileté
preuve
consommée en géométrie, summam GecmMff~e Enfin
peritiam.
c'est un écrivain militaire Sorbière, qui ne recule devant les
pas
louanges outrés, le compare à Vitruve et à Archimède dans l'anti-
Dogen et
pourtant c'est bien de Dogen qu'il s'agit. Sans doute
encore Dôgen et Dozem diffèrent par la consonne médiane. d'un
côté et z de l'autre; mais les deux lettres z et g peuvent aisément
se confondre, et sait même si Leibniz n'a
qui pas écrit un g, qu'on
ADAM. CORRESPONDANCE DE DESCARTES 39~
C.
peut être consulté que sur place; on n'a pas pu en avoir ailleurs
communication.
4° Nous avions plusieurs lettres de Descartes à Florimond
Debeaune, « le Géomètre de Blois a. Mais surtout les Notes de
celui-ci sur la Géométrie du philosophe, ont été à la
imprimées
suite de cette Géométrie, dans les éditions latines de 1649 et 1659.
C. ADAM. CORRESPONDANCE DE DESCARTES 401
CH. ADAM.
de la sociologie et de la psychologie; de
plines rapprochement
cette dernière et de la physiologie; de la biologie et de la chimie
pas dissipé. Et même ceux à qui son nom n'estpas inconnu ont le plus
souvent des idées très values et incomplètes sur sa doctrine. R.
Avenarius? diront-ils, mais c'est « l'économiede la pensée a. Certes,
seulement E. Mach l'avait exposée beaucoup mieux. Et c'est vrai.
D'autres diront Avenarius? c'est « l'introjection '), explication un
1. H ft~ut dire pourtant que même HôCMing n'a pas su apprécier sa veritabte
originatite.
2. Les livres d'Avenarius où sa théorie de l'introjection est exposée Der
menschliche Weltbegriff et Bemerkungen zuin G~cnstctnd der Psychologie contiennent,
en effet, des choses excellentes et qui gardent tout leur intérêt.
DRABOVITCH. LA mO-PSYCHOLOGlE DE R. AVE\AR[US 405
l' 1 1 15.
à trouver l'une de ces « gnoséologies », l'un de ces
daient y
de métaphysique et de psychologie plus ou
mélanges logique
moins ou rationaliste, qui pullulent en Allemagne. Et
empiriste
ils trouvaient de la physiologie, de la biologie, de l'ethnologie,
y
de la et
comparative, tout, sauf ce jeu de
psychologie génétique
sauf la « méthode réflexive ». Petzold, qui fut
concepts habituel,
considéré, la mort d'Avenarius, comme chef de son École,
après
écrivait avec raison dans sa préface à la deuxième édition de la
Dès son premier travail, sa thèse (1868) sur Les deux premières
phases du panthéisme de Spinoza, Avenarius fit un essai d'inter-
(préface, p. vi).
Et Avenarius aborde immédiatement sa tâche par l'exposé de
deux axiomes empiriocriticistes » sur le contenu et les formes
de la connaissance. Il fait en somme ce que M. Lalande appelle
408 REVUE PHILOSOPHIQUE
Or. Avenarius déclare avec une netteté qui ne laisse aucun doute,
mentiogique".
II v a plus. Dans son livre, Der menschliche We/~6egrri'(1891),
Avenarius a donné une critique du parallélisme psycho-physique
comme théorie explicative, qui ne nous paraît pas moins forte que
celle de M. dans son célèbre article. En tous cas. pour
Bergson,
tout lecteur de bonne foi. il devient évident, après la lecture de
tenace.
Avenarius a présenté une théorie de la vie du cer-
physiologique
nous soit à ce de rappeler la phrase,
veau. Qu'il permis, propos,
tant de fois citée, de F. A. Lange sur l'absence d'une hypothèse géné-
l 1 1 1 _1~
préparer le terrain pour -ta théorie de la science, en paTtienlier
la et. en rapport avec elle, pour la pédagogie,
pour psychologie
la l'esthétique, la philosophie du droit, l'éco-
logique l'ethique.
nomie etc. Toutes ces sciences je les avais en vue en
politique.
ce travail. Bifn entendu, dans la Critique elle-même on
préparant
ne peut trouver ni la théorie de la science, ni la logique, ni la psy-
etc. Mon seul espoir était d'encourager tous ceux qui
chologie.
travaillent au
développement de ces sciences, les encourager
en leur fournissant un fondement général, pour ceux. du moins,
à
appuyer les biens suprêmes de l'humanité la
qui aspirent
morale, le droit, la science, l'État, sur la base solide, que, en fin
des
r~ae fnnn+inna
fonctions,
nac~
e<+h,i~,eo
ces
systèmes
,+;c,l~
partiels
r.+
sont conçus comme rl;Cf'bnn.,
différen-
ciés par les différents genres « d'exercices » (c'est le principe
d'excitation fonctionnelle). De même, selon leur rôle dans la vie
de l'organisme, ils peuvent être disposés en hiérarchie. Leurs
structures sont en partie héritées, en partie innées, en partie
acquises. Si on se représente deux ou plusieurs de ces systèmes
partiels liés fonctionnellement, appeleronce nouveau
peut grou-
pement « coordinateur » (§ 75). Le milieu et.
système physique
social provoque la dépense énergétique et, en même temps, fournit
à l'organisme les qui lui servent
substances à élaborer ses réserves
i) F(R)=-F(S)
2) S/(R)=–SF(S)'
parfait, état, certes, jamais réalisé dans la vie. Donc, dès qu'un
t. § )52-t57.
DRABOVITCH. LA BtO-PSYCHOLOOE DE R. AVE\'ARtUS 415 r>
peu pédantesque; parfois, après avoir peiné sur une des périodes
longues et lourdes, hérissée de termes techniques nouveaux, on
graphe 327
« Nos thèses sur les séries vitales exigent du lecteur quelque
chose lui paraître étrange, à sav oir penser tous les
qui peut
changements dans la conduite de l'homme au moyen desquels il
se maintient dans le milieu, d'abord sans aucune prémisse de la
« conscience ». Qu'on ne me demande pas la preuve que certains
conscience ».
De ces expériences connues de tout le monde, nous ne citerons
brusquement ses pattes qui passent entre les deux épingles. Le but
est atteint elle peut frotter l'une contre l'autre les plantes de ses
-n)\)RCXv.–1933(N~&et6). 2"
418 REVUE PHILOSOPHIQUE
elle employait les moyens les plus simples et les plus ingénieux.
Or, quoi de plus simple et ingénieux que ce principe? (note i.83,
vol. H.) Un renard attaché essaie d'atteindre un morceau de
viande hors de sa portée. Il étend d'abord Je plus loin possible ses
l'objet qui l'intéresse, et qui est placé trop haut. N'y parvenant
pas avec une canne, il pousse enfin une chaise contre le mur. y
grimpe et saisit l'objet. Un penseur spéculatif essaie d'abord
d'avancer ceci Dieu est ce principe inconditionné qui doit se
trouver à la base de tout le conditionné. Voyant la fragilité de
cette proposition, il la retourne et dit l'inconditionné qui se
trouve à la base de toutes choses conditionnées, je l'appelle Dieu.
Le mathématicien, ne réussissant pas à aboutir avec des idées et
des grandeurs auxquelles correspondent des intuitions sensibles,
paragraphe 310. ceci Les états terminaux des séries vitales peuvent
survenir non seulement à la suite des conditions habituelles. mais
aussi à la suite de toutes celles qui ont avec les conditions habi-
tuelles assez d'éléments communs. C'est assez vague, mais on
l. SecUon Vt,§328-:i5L
420 0 REVUE PHILOSOPHIQUE
dure « s'anastomosent » pour ainsi dire les uns avec les autres afin
de former un tout.
et du feu.
Telles sont les séries relativement simples. « Mais
dépendantes
toute notre vie. toute notre activité s'écoule ainsi en séries de plus
en plus complexes, ramifiées, formant des systèmes. Un besoin
[. P. t.'it)-2H. vo). U.
'~34 4 REVUE PHILOSOPHIQUE
t. 1..
et, bientôt, s'essouffle. Une jeune recrue, la
pour première fois,
fait un exercice d'équitation ou de sur
gymnastique appareils;
cela lui paraît extrêmement Un jeune en
fatigant. instituteur,
commençant son enseignement, donne ses cours dans une école
surpeuplée. Le soir, tous trois se sentent exténués. Le « boulot »
dépasse leurs forces, pensent-ils. Mais, à peu, ils s'habituent
peu
au bout d'un certain temps, c'est avec for-
plaisir que l'apprenti
geron fait un large mouvement avec son lourd la
marteau; que
recrue monte à cheval ou saute en hauteur; le jeune maître
que
aborde son cours. La « différence vitale », la diSférence entre le
le F(R), plus grand, au début que et ce s'est
F(S) dernier, éga-
)isée. Parallèlement, le plaisir s'est substitué au Le cas
déplaisir.
contraire, quand le F(S) > F(R), c'est par les
exemple lorsque
gens sains,et actifs sont brusquement réduits à l'inactivité ou à
l'immobilité; cela leur pèse fort. Mais à peu (dans des condi-
peu
tions normales) le F(S) diminue et ils « s'habituent à l'inactivité.
Quand il devient à peu près à le sentiment
égal F(R), pénible
fait place à une douce quiétude.
Cette femme nous tous
que voyons les jours, a changé de coiffure.
Cet homme a rasé ses moustaches. Ils sont devenus « tout autres ».
Ou bien nous revenons en ce pays que nous avons quitté depuis
longtemps. Les choses principales sont à leurs et
places, pourtant
tout nous paraît « autre », « étrange a et étranger. C'est « l'hétéroté H.
l'altérité. Après des années nous rencontrons notre vieil ami. II
doit avoir changé, pensons-nous. Mais, une fois les
échangées pre-
mières impressions, nous constatons qu'il est « le même ».
toujours
Sous les coutumes « bizarres », à première vue, d'un peuple et ranger
nous discernons « les mêmes » mobiles, et illusions
passions que
chez nous. Lavoisier découvre que la est à
respiration identique
la combustion. C'est la « tautoté », l'identification. La fameuse
« du vu H pourrait rentrer sous cette
impression déjà rubrique,
comme les identifications fantaisistes, certains des
par maniaques,
personnes qu'ils voient pour la première fois à celles connais-
qu'ils
sent. Au point de vue physiologique, selon nous avons,
Avenarius,
pour « l'hétéroté », la ~u!'a/!oy: de l'oscillation, par laquelle com-
mence une série vitale, de sa forme habituelle, pratiquée depuis
longtemps. Par contre, la « tautoté » signifie le /'<~oM/* à cette
forme habituelle. Sans doute, ces oscillations s'irradier
peuvent
DRABOVITCH. LA BtO-PSYCHOLOGIE DE R. AVENARIUS 425
f. Marcel Proust, qui sans doute n'a jamais entendu parler d'Avenarius, écrit.
dans ~l<&e<'<tn6disparue, quelques lignes tout à fait dans l'esprit de ce dernier
ie maniement habitue) des idées générales par un penseur isolé le prédispose.
dit-i), à l'idéalisme.
DRABOVITCH. LA mO-PSYCHOLUGtK t)E R. AVEXARtL'S 42'7
« déproblématisations ». Les « »
changements endosystématiques
qui constituent la phase médiane de la série vitale et qui doivent
amener la solution, la « déproblématisation », en
sont, langage
psychologique, des essais. Avenarius n'a pas employé l'expression
d' '< expérience mentale, mise en années
vogue, quelques plus
tard, par Mach. Mais ses « essais de plus en plus ont le
compliqués
même sens. Leur ensemble constitue le comportement 1.
théorique
Ce comportement a affaire à des des
perceptions, représentations,
des « traces » des représentations et à « une sorte
soulignons-le
de sentiment de de ce qui est entendu des
compréhension par
termes abstraits H Nachgedanke (§ S32), une sorte de « pressen-
timent » Fühlung (§ 530), le tout étant et soutenu
aiguillonné par
la tendance dominante. Le amène à for-
comportement théorique
muler les critères de la vérité. Ces critères sont très différents
depuis l'autorité des vieux jusqu'à la « coïncidence de la pensée avec
la réalité », en passant par « l'identité de l'être et de la pensée »,
« l'évidence », « la clarté et la distinction », etc. Mais le critère
principal, auquel l'auteur attribue la plus grande importance, est
le critère social. « A la suite de social et
l'échange d'impressions
d'expériences les E-valeurs (les complexus d'idées individuels.
W.D.) acquièrent de plus en plus le caractère inter-individuel ou
social » (§ M8). Sur quoi s'exercent-ils, ces critères? Sur les
« ?. Voici la de /'e.E/)e/e/:ce.
expériences c/ue
<- Aux premiers stades de la civilisation, l'individu peut exprimer
comme expérience, qu'un homme peut être entraîné dans la rivière
tiques (il s'essaya lui-même une fois dans l'art dramatique, mais
sans insister) et il recommande leur lecture, surtout celle des
I. P. 333-33S.
DRABOVITCH. LA BfO-PSYCHOLOGtE DE R. AVEXARtUS 433
ment t mfthr<r)!<rt]f
méthodique f~t
est )p
le si.o'nf
signe
f)!~t!n~t!f
distinctif df~s
des Sfi~nf~Q
sciences natm-f~X~Q
naturelles Pt
et
bio-psychologie d'Avenarius.
S~H~~M », X1H, 1897. Wundt, quels que fussent ses mérites, appar-
tenait à cette assez vaste, de savants et
de philosophes
catégorie,
à partir d'un certain âge, deviennent hermétiquement clos à
qui.
toutes les idées nouvelles tant soit peu différentes des leurs. On
l'exposé se
rapproche encore davantage de celui d'Avenarius.
Alfred Lehmann qui adopta, dans ses G~'unehnye der Psycho-
physiologie, la théorie du Biotonus, en donne un
exposé qui res-
semble singulièrement aux chapitres du premier tome de la
geable
d'autrp part, qu'on a essayé il y a longtemps déjà,
Rappelons,
de rattacher les « sentiments intellectuels a aux modifications de
classification des
psychologiques, faits celle en « éléments n et en
moment, M. Janet se leva pour tracer sur le tableau noir une ligne
devant représenter cette série d'actes. Il ne soupçon-
zigzaguante
nait cette ligne avait été déjà dessinée par Avenarius pour
pas que
1
crêtes des glaçons, les tranches de des cre-
glaces, séparées par
vasses plus ou moins profondes. Ces crêtes sont souvent très
étroites. On a tout juste la place de mettre un devant l'autre.
pied
Un demi-pas de côté et on glisse à droite ou à gauche.
Telle est, très souvent, la situation en politique, en philosophie
et dans les sciences. Il faut avoir une grande sûreté de démarche
l'adaptation, de la lutte contre les facteurs noci fs. A lire tels pas-
sages des « mécanistes » outranciers, on a l'impression que l'adap-
tation n'existe pas, ou qu'elle est négligeable, ou qu'elle est toujours
extrêmement grossière. Les deux groupes ont manifestement
à la et à ia bio-psychologie du principe de Le
l'application biologie
Châtelier ou loi de stabilité des équilibres chimiques de Gibbs-Le
Châtelier. « Cette loi, dit M. Le Châtelier, une des plus utiles pour
a passé complètement inaperçue dans l'œuvre
l'expérimentation,
de Gibbs. Elle consiste en ce que tout changement apporté à
46. Brtieke, dans un renvoi, cite son autre livre et l'article du physiologiste
Hofmann où l'idée de parente entre la théorie d'Avenarius et tes conreptinnN
mndcrnes est exposée en défaits.
~46 HEVUE PHILOSOPHIQUE
système neuro-végétatif.
Notre confrontation, nous semble-t-il, tourne à l'avantage d'Ave-
narius. Il fut le précurseur du behaviorisme et de la psychologie
moderne de la connaissance. Mais les behavioristes, les physiolo-
gistes, les psychologues se cantonnent encore trop souvent dans
leurs domaines de même
respectifs, que les sociologues. Ils trai-
tent avec méfiance ou dédain ce qui se passe dans le voisinage de
leurs fiefs. Avenarius et en cela consiste et la nou-
l'originalité
veauté de son œuvre présente une remarquable du beha-
~nfAése
viorisme, de la psychologie des « énonciations H, de la psychologie
introspective à la base d'une théorie hardie du fonctionnement céré-
bral, théorie qui, par des preuves, il est vrai, indirectes maJLsde
plus en plus nombreuses, se révèle comme de plus en plus pro-
bable 1. Elle est nettement suggérée par l'expérience. Et pourtant
certains critiques compétents traitent sa théorie de « scolastique
cérébrale », de « construction a priori », de « retour à Herbart ou
à Hegel. A part les causes de cette incompréhension dont nous
avons parlé plus haut, il y en a encore une il est impossible de
exemples concrets qu'il cite. C'est pour cela que Mach conseille
aux naturalistes de commencer leur initiation à ce philosophe par
la lecture des 80 pages environ de M notes » d'Avenarius, dont
la plupart auraient dû, sans doute, se trouver dans le texte Leur
renvoi à la fin de chaque volume de la Critique fut l'un des plus
grands torts d'Avenarius contre lui-même, car cela prédisposait
le lecteur à n'y accorder que le minimum d'attention.
1. Rappelons que nous ne nous occupons ici que de la Critique, qui selon
l'auteur lui-mème, n'est pas logiquement liée au menschliche H~'M&egrt~ Parmi
les psychologues modernes, Rivers, Kretschmer, Warren et Wood\vorth s'appro-
chent plus que personne, dans leurs théories synthétiques, du point de vue
d'Avenarius.
2. t) y a trente-cinq ans, M. H. Delacroix à consacré à Avenarius, dans la Revue
de .1létaphysique et de .Morate, un article extrêmement consciencieux, mais qui ne
donnait pas une idée juste de son système, parce que l'auteur n'a pas utiiisé le
riche trésor d'exemples concrets. Nous avons préféré être incomplet mais en citer
quetques-uns.
DRABOVITCH. LA ijtO-PSYCHOLOGŒ DE R. AVEXARtUS 447
philosophie, dit que son système est une des plus grandes tenta-
tives d'éviter le problème critique~. A cesujet, il est nécessaire de
des preuves indirectes qui jouent un si grand rôle dans toutes les
sciences complexes) L'activité philosophique, l'extrapolation,
qu'il s'agisse de la théorie de la réalité, de la morale ou de l'esthé-
Prédétermination
Prédetermination deià
déjà incluse
inf)usf à
A l'état
Tptat de
d~ f~nf)Hnf~
tendance Hone
dans )oc.
les
faits grammaticaux. Les idées communes de destin et de néces-
site a priori des faits et même des actes futurs ne tirent-elles pas
inconsciemment leur principale force d'une forme grammaticale
qui traite les événements à venir comme une chose en
déjà réelle,
ce quelle nous rend possible une énonciation au d'une cir-
sujet
constance à venir dont nous ne savons même actuellement
pas
quelle elle sera, comment elle tournera, comme si elle n'était
indéterminée qu'au regard de notre connaissance? Or avec la
négation de la contingence c'en est fait de ce tient le
qui plus
intimement à la nature du
temps.
~'ombreux sont les apports de divers ordres, introspectif, social,
linguistique. naturistique, par l'adjonction desquels s'est élaborée
la notion commune de Même si naturelle
temps. l'opération par
laquelle le temps ajouté à lui-même est comme durée et
conçu
celle-ci comme grandeur, le solidifie dans le spatial et dans le révolu.
C'est dans l'instant, ce midi de la et dans le
durée, présent
insaisissable que nous chercherons la vraie nature du et
temps
l'essentiel de sanction'. Voir seulement dans comme le
l'instant,
fait M. Bergson, la limite idéale entre deux fractions de la durée,
entre le passé et le futur, c'est donner le pas aux éléments ajoutés,
aux produits abstraits de l'élaboration réfléchie, sur l'élément pri-
mordial et concret. C'est dans la et aussitôt
nouveauté, fragile
flétrie. de l'instant que se révéle tout entière la loi de la généra-
tion et du dépérissement des choses et BOopct). L'arc-en-ciel
(y~etm
se régénérant de façon sur la poussière d'eau de la
ininterrompue
chute, suivant la belle de le de
image Schopenhauer, mythe
Chronos qui engendre et dévore ses le mouvement
enfants,
idéal de l'instant qui se détruit lui-même sont des
(Hegel),
représentations plus véridiques de la nature du temps que ne
peut l'être la figuration linéaire de la causation en marche du
présent par le passé, anticipation du déterminisme scientifique.
L'action propre du temps consiste dans cette du
apparition
nouveau qui est le présent et à faire du avec le présent.
passé
H va sans dire que ce nous le présent ou l'Instant
que appelions
t. /.<' choix intemporel dans la doctrine de Kant sur la fiberté. choix portant
i.ur l'ensemble de la conduite, est précisément choix en dehors du temps en ce
qu'il ne se situe en aucun instant déterminé de la vie de l'individu.
4S3 REVUE PHtLOSOPHtQUE
la donnée et de
spatiale qu'il n'est
la donnée pas ques-
temporelle
tion de nier et qui a le caractère d'un fait'. Déjà métaphysiquement
tersection.
tersection, l'espace à partir du lieu et en tant que distance ne se
conçoit qu'en fonction du trajet parcouru, par conséquent en fonc-
tion du changement et du temps. Mais le lieu, l'ici. cet à présent
de l'espace comporte une différenciation d'avec tout autre lieu qui
doit être fondée en « dénomination intrinsèque » pour
quelque
parler comme Leibniz. Comment une portion d'espace pourrait-
elle sans cela être discernable d'une autre? En d'autres termes le
lieu n'est rien de défini sans une certaine coïncidence avec un ins-
tant de la durée. Comme l'a dit le philosophe Gentile. « la multi-
~Yi
Cyon
rm!
qui
e:ït)i~
situe rlanc
dans Ï~
le Ïahvrinth~
labyrinthe de
ri~ l'oreille
ï~rtr~H~ le a~fy<
siège des notions
intérieur 1 différent du de la
espace à peine champ conscience,
mais nous caractériserons mieux en parlant d'un sensorium
que
auditif qui est l'apport distinct du sens de l'ouïe à la notion
t. [ntérieur en même sens que le temps est )a nuidite de notre vie intérieure »,
L'espace visuet est objectif, lié à un sentiment d'extériorité et d'opposition au
moi. L'espace auditif étant concentrique à notre corps, nous le vivons en quel-
que sorte, et nous en avons par là un sentiment qm s'apparente au sentiment
de la durée.
Revue critique
dispensent de réfléchir. »
II est trop commode aussi de mettre en tableau des textes
extraits des ouvrages publiés sur le suicide par Durkheim en
i. Donnons acte
à M. Achille-Delmas de ce qu'il y a une faute d'impression p. 60
et qu'il faut lire « à mesure du nord au midi (en Europe), la propor-
qu'on passe
tion des suicides de noyés tend à augmenter Mais comment peut-il dire qu'il est
impossible de savoir si c'est un lapsus? Cela saute aux yeux quand on regarde
le tableau. D'ailleurs, deux pages plus loin, on lit « cette répulsion pour t'eau
.(comme moyen de suicide), commune aux pays septentrionaux. De fait, on se
no;e davantage dans les pays méridionaux. (P. 62.)
MAX BONNAFOUS. LE SU!CH)E THESE PSYCHfATRtQUE 459
quant aux genres de morts choisis par ceux qui se suicident ').
Au sujet de quelques pays qui n'entrent pas dans de tels groupes,
lI. Halbwachs disait ce sont des exceptions qui confirment la
1 1 1 -1 r
M. Achille-Delmas dans la première partie de son ouvrage. La
tout, il n'est point de son état de les connaître. Mais il serait plus
de sa de ne point s'aventurer dans une région où le pied
sage part
lui manque à chaque instant.
qui restèrent Hdèle au culte traditionnel ». (Pp. 43-46.) (Il s'agit ici
sans doute, des cyclothymiques habituellement excités, des excités
les citadins se suicident que les paysans, c'est que les cyclo-
plus
thymiques (ici encore, évidemment. les excités constitutionnels)
sont attirés par les villes.
M. Achille-Delmas joue ici, de bien plaisante façon, de la double
suicide devrait donc être plus fréquent chez les catholiques que
chez les protestants De même, si les excités constitutionnels
émigrent vers les villes, les déprimés restent dans leur village le
suicide devrait donc être plus fréquent chez les ruraux que
chez les citadins
Devant les o qu'il attribuait aux '<
sophismes philosophes
et tout particulièrement au D'Charles Blondel, M. Achille-Delmas
~MECxv.M3(~'5~6~ 30
466 REVUE PHILOSOPHIQUE
dignité, perte d'argent, deuil, etc.), « sont des faits ou des cir-
constances, des sentiments ou des pensées, qui isolent l'homme
de la société ». (P. 4,19.) Or « les eux aussi, se tue-
psychopathes,
raient parce qu'ils sont en marge de la société, et qu'ils ne peuvent
plus trouver ailleurs qu'en eux-mêmes un point d'appui ». (P. 421.)
Ainsi « maladie mentale, perte d'argent, deuil, d'amour ')
peine
ne seraient que des motifs du suicide. Sous ces motifs divers on
retrouverait une cause unique le sentiment du « vide social »
in
que chez leurs malades les tentatives de suicide étaient tout à fait
Il ressort de ces faits que sur des centaines et même des milliers
d'aliénés musulmans, hospitalisés au Maroc à Ber-Réchid, en
Tunisie à Latékia, aucun n'a essayé de se donner la mort, aucun
qu'ils n'ont pas décelé chez un malade qu'ils ont examiné et suivi,
d'idées de suicide, nous savons qu'on peut avoir une grande
confiance dans leurs affirmations.
Or parmi les malades hospitalisés à Ber-Réchid ou
à Latékia,
comme parmi les malades d'un asile de Stamboul, il y a des cyclo-
coup plus ancien en Europe que dans la plupart des pays exotiques.
la se en Europe « cette maladie se
Lorsque syphilis propagea
manifesta, comme elle le fit plus tard chez les peuples exotiques,
des florides et des lésions osseuses H. Ce n'est que
par éruptions
plus tard que les formes nerveuses (paralysie générale, tabès)
sante semble-t-il, est confirmée ou infirmée par les faits. Elle doit
~ARM
t. A. Sézarv. La sy~Mi's neroeus)'. Paris, Masson. 1926. p. 64. ~5~
474 REVUE PHILOSOPHIQUE
ào "n
une .nn;llo
pareille
.W'flnmot;n"
affirmation :plnnC
alors n.
qu'on ne mPITF
peut
r,~e
pas
nnn
nous donner la
que l'occasion et non pas la cause des délires. Mais même si les
quie d'Asie. Nous avons parlé avec quelques-uns d'entre eux. Ils
savaient de quel mal ils étaient atteints. Aucun ne paraissait pour-
tant eftieuré par l'idée du suicide. (Le médecin qui les soignait nous
l'a d'ailleurs confirmé.) Ils n'avaient pas attaché toute la valeur de
la vie à la santé ou à la liberté. Ils suivaient la route que le sort
avait tracée pour eux, sans songer à abréger le voyage. Des occi-
MAX BONNAFOUS.
xt\d41 p.
CARDONE tD.). Il diritto e ~o S~<o. Citta di Castello, Il solco. Parta 2<
2 in-16 de 340 p.
DESCARTES <R.). Règles pour la direction de l'esprit, Trad. J. Sirven-
Paris. Vrin. In-16 de 1SO p.
DESCOQS iP.). S.-J. Pf'a~~c<)n~~ <~teo<o<7ta? naturalis. Cours de théo.
dicée. de Dei co<7ftosct&t/;<a<< Paris, Beauchesne, 1932. In-8 de 725 p.
DEVAUx iPh.L Lo~e et son influence sur la philosophie anglo-saxonne.
Bruxelles. Lamertin, t932. In-8 de 48 p.
DoMBROwsKi-RAMSAY ~N.t. Tu ne tueras point. Paris. Blondin, 1932.
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ment. 373
NOTES ET DOCUMENTS
REVUE CRITIQUE
Bonnafous (M.). Le
suicide. ~S6
Le gérant: RENÉt.tSBONNE.