Sie sind auf Seite 1von 12

Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.

org/578

Centre d'enseignement, d'études et de recherches pour les études féministes

16 | 2008 :
Femmes, genre, migrations et mondialisation

Quelques notions pour penser


l’articulation des rapports
sociaux de « race », de classe et
de sexe
F !"#$" S" &!'&
p. 81-99

Texte intégral
1 Les recherches féministes en France sont en train d’approfondir la réflexion sur les
articulations entre les rapports sociaux de sexe, de « race » et de classe, alors que la
sociologie des migrations et des relations interethniques travaille à l’incorporation
des rapports sociaux de sexe dans ses enquêtes et ses formulations1. Ce texte se
propose de présenter quelques-unes des notions développées pour intégrer l’analyse
du racisme et de l’ethnicité aux études sur les rapports sociaux de sexe et la division
sexuelle du travail. Le texte se fonde sur cette prémisse théorique : le capitalisme, le
racisme et le sexisme2insistent sur des rapports de pouvoir qu’il convient de
considérer comme non réductibles les uns aux autres mais comme étant simultanés
et situés dans des relations d’imbrication ; ce qui empêche de les penser comme étant
simplement superposés les uns aux autres. Ces liens d’imbrication ne se limitent pas
d’ailleurs à cette triade ; ils incluent également l’âge, l’orientation sexuelle... Si ces
différents rapports de pouvoir ont des logiques propres, ils sont pourtant
difficilement séparables dans la réalité sociale et historique, mais aussi dans
l’analyse. L’ensemble des rapports sociaux de sexe, de « race », de classe correspond
d’une part à une division du travail, à un problème d’organisation matérielle de la
société. Les différentes formes de domination fonctionnent à l’appui d’éléments
communs qui les interconnectent, en faisant de l’une le véhicule de l’autre. D’autre
part, ces rapports sociaux insistent sur un travail symbolique de catégorisation

1 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

sociale des groupes et des individus.


2 Historiquement, les rationalisations légitimant ces dominations se sont constituées
de manière entrecroisée, les unes cherchant l’appui des autres : elles se basent pour
leur fonctionnement sur les mêmes mécanismes discursifs — notamment sur la
naturalisation des rapports sociaux.
3 C’est à partir des années soixante-dix que la question de l’imbrication des rapports
sociaux a commencé à être soulevée au sein des mouvements des femmes et dans la
recherche, notamment grâce à l’action du féminisme black3dans les pays
anglophones (Bhavnani, 1999). Ces militantes et intellectuelles dénonçaient le
racisme implicite dans l’analyse de la domination sexiste qui triomphait dans le
mouvement, où les femmes de classe moyenne et blanches étaient majoritaires. La
sensibilité théorique et politique pour les questions du racisme et des différences de
conditions de vie des femmes s’est développée et élargie au cours des années quatre-
vingts et quatre-vingt-dix : aux Etats-Unis cette production a entretenu des liens de
contigüité mais aussi d’opposition avec l’essor des théories poststructuralistes et
postmodernistes. Le débat sur les liens entre racisme, sexisme et capitalisme s’est
développé parallèlement à l’émergence des questions de l’« ethnicité » comme
catégorie d’analyse du conflit social, à partir des années soixante (Poutignat, Streiff-
Fénart, 1995).
4 Au fond, dans ce débat particulièrement vif dans les sciences sociales anglophones,
il s’agit de comprendre le changement historique de ces inégalités4, les conditions de
leur production, reproduction et transformation, dans les relations qui les
connectent. Il existe une variété de positions théoriques : alors que les approches
plus marxistes tendent à assumer que différentes formes de domination peuvent être
ramenées à une même source, d’autres penchent au contraire vers un plus grand
relativisme où différentes formes spécifiques de domination et d’exploitation sont
également déterminantes. Etant donné l’ampleur chronologique et géographique de
ce débat, il s’agira dans ce texte de présenter quelques pistes de recherche sur ces
thèmes, à partir d’enquêtes de terrain et de travaux théoriques. Les travaux présentés
relèvent de la production française et dans une moindre mesure de la production
anglophone, britannique et nord-américaine. Deux considérations, telles que les
énonce Colette Guillaumin (1997), vont guider cette présentation. D’une part, les
rapports sociaux de sexe et de « race » sont entrecroisés du fait de l’idéologie
naturaliste qui les apparente : dans les discours raciste et sexiste, la position inégale
que les individus visé-e-s occupent dans la société est expliquée et légitimée par une
vision essentialiste des relations sociales5. D’autre part, les rapports sociaux de
« race » et de classe sont articulés aux rapports sociaux de sexe puisqu’au sein de
toutes les sociétés et « groupes sociaux », les femmes sont appelées à accomplir le
travail de reproduction sociale, en se plaçant ainsi dans le cadre plus large des
rapports de pouvoir entre groupes dominants et dominés.
5 Cet article propose de s’arrêter sur les notions et processus permettant de penser
ensemble différents modes de classements sociaux et rapports de domination. Cette
présentation s’organise en trois temps qui articulent les débats théoriques à des
résultats de recherche empirique. Il s’agira dans un premier temps d’introduire la
notion de naturalisation et celle d’imbrication des rapports sociaux. Les concepts
d’altérisation raciste et de « rapports sociaux de “race” », combinés à leur dimension
de genre, seront ensuite définis, en les situant dans le contexte des migrations
contemporaines en Europe. Enfin, les liens entre les régimes de division sexuelle du
travail et les rapports sociaux de « race » ainsi que la dimension sexuée des processus
de mobilisation de la main-d’œuvre migrante dans les sociétés de l’Union
Européenne seront mis en évidence.

Naturalisation et articulation des

2 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

rapports sociaux
6 Dans le processus de naturalisation, les dominé-e-s sont catégorisé-e-s et assignés
à des « groupes sociaux » construits comme « naturels » et « différents » par rapport
à la norme. A travers cette opération, des individu-e-s sont assigné-e-s à une sphère
mi-sociale mi-naturelle, considérée comme distincte de la société. Le principe de
bi-catégorisation (Nous versus les Autres) et le principe hiérarchique ne sont pas
dissociés : classification et hiérarchisation sont les deux dimensions du mécanisme
naturalisant.
7 Dans le racisme, la « nature » des racisé-e-s incorpore des schémas de sexe : les
caractères culturels, mentaux et moraux qui sont attribués à la « race » sont des
métaphores de la différence de sexe. L’énergie, l’initiative, l’individualité s’opposent à
la passivité, à la sensualité, à la corporéité : autant de dualismes qui, dans l’histoire
des sociétés européennes, ont tracé la frontière entre masculin et féminin, mais aussi
entre humanité et animalité (Rivera, 2000).
8 Le racisme moderne, en tant que discours et doctrine savante, émerge en Europe
au XIXe siècle. C’est à partir de cette époque que le terme de « race » passe d’une
signification de « lignée, famille », à celle de « groupe humain », en brisant l’unité
jusqu’alors postulée du genre humain. Le racisme pré-moderne, antérieur au XIXe
siècle, tenait à l’étrangeté des Autres, et non à leur hétérogénéité radicale. Ces
« autres », rencontrés dans les voyages et dans l’occupation du continent américain,
faisaient partie d’une sous-humanité, tout en restant à l’intérieur de la création. Les
débats sur l’âme des femmes et des populations non européennes maintenaient donc
la croyance en l’unité du genre humain, qui trouvait en Dieu sa garantie (Guillaumin,
1972). Le racisme moderne fait appel à un principe déterministe et à l’idée d’une
Nature scientifiquement observable : dans ce discours, les dominé-e-s sont
naturellement et physiologiquement organisé-e-s en vue de la place qu’ils/elles
occupent dans la société. La division de l’humanité en « races » s’inscrit ainsi dans le
cadre de l’essor de la biologie et de l’anthropologie physique. L’émergence du
discours raciste moderne se situe également dans le cadre du développement
industriel, de la colonisation et de la croissance de la classe ouvrière.
9 Dans le racisme contemporain, comme on le verra, la logique de naturalisation
investit la notion de différence culturelle. Dans le cadre du phénomène migratoire
contemporain en Europe, ces processus d’altérisation affectent les migrant-e-s des
pays du Sud et leurs descendant-e-s, et plus particulièrement les migrant-e-s issu-e-s
des anciennes colonies. Employée pour rendre compte de ces processus, la notion de
« race » indique donc le résultat d’un travail symbolique de sélection, hyper-
exposition et naturalisation de traits physiques ou d’habitudes, styles de vie et traits
culturels divers (religieux, linguistique…) qui s’inscrivent dans le cadre de rapports
de domination qui sont historiquement situés et largement liés aux histoires
coloniales.
10 L’invention de la « nature féminine » en tant que catégorie biologique s’inscrit
aussi dans le paradigme positiviste, dominant dans la deuxième moitié du XIXe
siècle : les femmes étaient considérées par nature intellectuellement moins douées
que les hommes et destinées aux rôles d’épouses et de mères. Au XXe siècle, les
féministes ont montré que la domination d’un sexe sur l’autre se fonde sur une
division sexuelle du travail qui assigne prioritairement les hommes à la sphère
productive et les femmes à la sphère reproductive, s’appuyant sur la représentation
d’une séparation entre le domaine public et la sphère privée de la reproduction. La
sphère privée, familiale et domestique, est considérée comme non politique et régie
par un ordre naturel (Delphy, 1998).
11 Les bi-catégorisations public/privé et politique/apolitique, qui recoupent celle de
nature/société, ont été analysées par les féministes en tant que fondement de la
pensée libérale moderne et de la construction de la citoyenneté à l’âge moderne en

3 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

Europe. La pertinence cognitive, sociologique et juridique du clivage privé/public en


fait une « fiction » extrêmement significative et aussi contraignante pour les acteurs/
actrices sociaux. Le privé et le public sont une réalité sociologique en tant qu’ils sont
institutionnalisés dans la réalité sociale sous forme de droits et de catégories
politiques, juridiques et administratives. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, en Europe, les
femmes sont hors de la citoyenneté politique et en situation de tutelle civile vis-à-vis
de leurs époux et pères. Malgré le fait qu’elles aient aujourd’hui obtenu les droits
civils et politiques, l’assignation des femmes au travail domestique et leur
dépendance économique dans le cadre de l’institution du mariage sont encore
décisives quant aux modalités de leur présence dans l’emploi et dans l’espace
politique (Pateman, 1997). Ainsi, ces relations inégales se situent justement entre
privé et public, entendus comme opérateurs de l’organisation sociale.
12 La division sexuelle du travail est le pivot autour duquel s’organise l’articulation
des différents rapports sociaux. Le positionnement au sein d’un groupe dominant ou
dominé entraîne des conséquences spécifiques pour les femmes, du fait de leur
assignation au travail domestique au sein des groupes sociaux. Elles sont directement
confrontées et impliquées dans les rapports de pouvoir entre les hommes et entre les
groupes sociaux, qui sont dominés par les hommes. En ce sens, elles sont partie
prenante des rapports sociaux de classe et de « race » (Guillaumin, 1997).
13 La position à la fois extérieure/intérieure que tiennent les femmes par rapport aux
différents groupes sociaux (classes, nations…) fait donc en sorte que leur soumission
aux hommes d’un groupe n’implique pas nécessairement leur soumission aux
hommes des autres groupes. Appartenir à une certaine classe ou nationalité peut
permettre à une femme d’éviter d’être directement confrontée aux hommes des
autres groupes, mais pas pour autant aux hommes de son groupe. Par exemple, une
femme française de classe moyenne peut déléguer une partie du travail domestique
qui lui est assigné dans la division sexuelle du travail en employant une employée de
maison migrante. D’un côté, les hommes du groupe dominant — dans ce cas les
maris des employeuses — ont indirectement à leur service les femmes appartenant
aux groupes dominés, par l’intermédiation de leurs épouses qui gèrent la relation de
service. Ils profitent d’une relation de service qui réaffirme leur position, évitant au
moins en partie un conflit avec leurs épouses à propos du partage inégal du travail
domestique. De l’autre côté, les employeuses sont actrices dans le rapport de pouvoir
qui les oppose aux employé-e-s de maison migrant-e-s — qui peuvent être aussi des
hommes (Scrinzi, 2005).

Rapports sociaux de « race »,


migrations, ethnicité
14 L’expression « rapports sociaux de ‘race’ » décrit des processus de naturalisation
des relations sociales signalant la mise en place d’un travail de production d’une
différence absolue, d’une altérité radicale. A partir de la moitié des années
soixante-dix, les pays européens mettent en place une politique de fermeture des
frontières. Depuis, le durcissement des critères d’immigration légale et le
développement d’idéologies racistes différentialistes produisent une racisation des
rapports sociaux dans les sociétés européennes (Réa, 1998). Dans les années quatre-
vingt-dix, l’immigration s’impose comme « problème d’intégration » et aussi d’ordre
public dans l’agenda politique de plusieurs pays et dans les médias. L’Etat et les
institutions européennes, par les politiques d’immigration qu’ils adoptent, jouent un
rôle fondamental puisqu’ils sont à l’origine de la hiérarchisation des personnes,
auxquels ils accordent des droits différents selon leur nationalité : aujourd’hui, en
Europe, l’investissement de moyens et de forces militaires et de police pour interdire
les migrations est sans précédent (Palidda, 1999). Se produit ainsi une structure

4 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

hiérarchique à l’intérieur des territoires nationaux, qui s’accompagne d’arguments


essentialistes qui opposent les Européen-ne-s « de sang » (par exemple, les
Français-es dits « de souche ») aux Européen-ne-s issu-e-s des migrations. La
racisation des migrant-e-s et de leurs descendant-e-s passe ainsi par la représentation
généalogique de l’appartenance nationale.
15 Ce racisme contemporain exalte la différence absolue et incommensurable de
chaque culture par rapport aux autres. Ses référents tiennent aux catégories de
culture, d’« ethnie », de tradition, d’héritage et seulement de façon occasionnelle au
sang et à la « race », comme c’était le cas pour le racisme colonialiste moderne du
XIXe siècle. Le racisme différentialiste et culturaliste contemporain naturalise les
rapports sociaux inégalitaires dans le cadre desquels il émerge, en s’appuyant sur des
traits culturels qui se trouvent disponibles — en les travaillant dans le sens de
l’essentialisation. Il y a d’une part un principe naturaliste : l’idée qu’il est dans la
nature des êtres humains d’avoir une culture et de la défendre. D’autre part, il s’agit
d’une forme d’essentialisme : l’essence culturelle d’un-eindividu-e préexiste à la
constitution de sa personnalité et de ses conditions de vie. L’accent est placé sur les
relations entre les cultures : il existe des cultures distinctes, qui sont
incommensurables. Dans cette vision ce sont ces relations qui font problème, car
elles sont, « par nature », hostiles et destructives.
16 Le classement différentialiste ne renvoie pas directement à des traits physiques, à
savoir il ne considère pas ces traits physiques ou anatomiques comme étant la cause
directe de l’infériorité ou de la mise à l’écart de certain-e-s individu-e-s. Il attribue
l’infériorité ou la mise à l’écart à des causes désignées comme culturelles et mentales
(de « mentalité ») ou religieuses, qui sont pourtant naturalisées, soustraites au
devenir historique et associées à l’identification de traits somatiques ou
vestimentaires « typiques » ; il voit les individu-e-s comme étant des produits
déterminés par les cultures et non comme des producteur-e-s de cultures. Par
ailleurs, le racisme contemporain mobilise tant le registre somatique que le registre
culturel et symbolique, opérant une circulation permanente entre les deux.
17 Les articulations entre les différents rapports de pouvoir offrent une clé pour
analyser cette circulation. Par exemple, les hommes d’affaires japonais étaient
accueillis dans la République sud-africaine en qualité de « blancs honoraires », un
statut nié aux travailleur-e-s immigré-e-s chinois-es (Balibar, Wallerstein, 1997). Les
positionnements des acteurs vis-à-vis des rapports sociaux de sexe/« race »/classe
peuvent expliquer comment des identifications « dérogatoires » à la logique de
coupure radicale instaurée par le registre biologique (les Japonais comme « blancs
honoraires ») peuvent être légitimées grâce à d’autres rapports sociaux (dans ce cas
les rapports de classe).
18 La notion de rapports sociaux de « race » ne concerne donc pas des contenus
culturels mais les relations qui dérivent du travail d’organisation des frontières
sociales6— qui sont en même temps définies par les rapports sociaux de sexe et de
classe. Appréhender la production de la différence culturelle comme problème
d’organisation sociale impose de considérer l’opposition entre la contrainte des
structures sociales et l’action individuelle. Il importe ainsi de saisir comment les
rapports de « race » s’opposent à la construction d’une frontière symbolique
d’identification — un ensemble de pratiques sociales auxquelles on fait
référence par la notion d’ethnicité et qui se jouent dans l’espace
interactionnel.
19 Les catégories de « race » contiennent donc une dimension stratégique qui se joue
au niveau inter-individuel. Elles sont matière à manipulation dans la pratique sociale
quotidienne des acteurs, elles constituent des concepts pertinents dans l’ordre
interactionnel, utiles pour orienter l’action (Poutignat, Streiff-Fénart, 1995). Les
classements culturels ne sont pas seulement une injonction de différence mais ils
sont, dans une certaine mesure, agis par les acteurs sociaux. En tant qu’ensemble de

5 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

rapports sociaux matériels par contre, la « race » est inaccessible aux stratégies des
individus. En fait, le contexte structurel global ne laisse pas aux individu-e-s
dominé-e-s le choix de s’identifier à ce qu’ils/elles veulent mais leur impose un
éventail limité de possibilités toujours marquées par l’idée de leur différence.

Altérisation raciste et rapports sociaux


de sexe
20 La nationalité, les rapports Nord/Sud et le racisme sont une dimension cruciale
pour expliquer la multiplicité des positions et des expériences des femmes au sein
d’une même société. Les femmes ont souvent été mobilisées dans les projets
nationalistes — de domination mais aussi de résistance — en tant que reproductrices
biologiques et symboliques de la « communauté » ; elles ont été également actrices
des mouvements de libération des anciennes colonies, tout en conduisant une
bataille pour leurs droits de femmes (Yuval-Davis, 1997). De même que les hommes
des pays colonisés ont été construits par les colonisateur-e-s à la fois comme une
menace sexuelle et comme des hommes efféminés, les femmes ont fait l’objet tantôt
d’une érotisation tantôt d’une domestication (Savarèse, 2000). Ce travail de
construction des corps des femmes et des hommes colonisés les a par ailleurs
différencié-e-s selon leur classe, opposant au sein des sociétés coloniales les élites aux
autres classes sociales.
21 Les femmes ont représenté, dans les guerres coloniales, un enjeu matériel et
symbolique du combat entre les deux groupes. Elles ont pu être représentées et
mobilisées tantôt comme alliées des colonisé·e·s, comme gardiennes de l’honneur et
des traditions des dominé-e-s, tantôt comme alliées potentielles des colonisateur-e-s,
comme des femmes soumises face auxquelles ces dernier-e-s se représentaient en
tant que civilisateur-e-s (Clancy-Smith, 2006).
22 Comme l’ont mis en avant des travaux récents, l’altérisation du sexisme — à savoir
la surexposition du sexisme et des violences sexistes chez les populations immigrées
ou issues de l’immigration postcoloniale — constitue un élément central du racisme
contemporain7. Parler du sexisme des « autres » est aussi une façon de se taire sur le
sexisme qui est inhérent à la société française8.
23 De même, de nombreuses études montrent que le statut des femmes migrantes ou
issues de l’immigration est associé à la figure de la victime : l’altérisation des femmes
minoritaires passe par la construction de ces femmes comme opprimées par une
culture traditionnelle et patriarcale. La migration féminine est représentée comme
une opportunité d’émancipation de genre. L’assignation à la spécificité culturelle et
de classe des dominé-e-s passe donc par la construction de modèles sexués opposés à
ceux que l’on fait valoir pour les dominant-e-s. Par exemple, la définition dans un
registre culturaliste des « qualités féminines » dans la division sexuelle du travail est
un des éléments fondant l’altérisation des femmes migrantes : les pratiques de
recrutement et de formation des employées de maison migrantes s’appuient sur une
image de ces femmes comme étant culturellement plus patientes et plus humaines
que les Européennes, donc plus aptes au travail domestique et d’assistance (Scrinzi,
2003). La représentation de la compétence (ou de l’incompétence) des femmes
migrantes dans le travail domestique fonctionne comme un miroir dans lequel nos
sociétés européennes se reflètent, avec leur modèles de féminité et de masculinité. La
persistance des identités ethniques, auto-et hétéro-attribuées, repose sur des régimes
différents de division sexuelle du travail, qui affectent les femmes de manière
hétérogène.
24 C’est également en fonction de leur classe et de leur positionnement dans les
rapports Nord/Sud que les femmes sont affectées par le discours eugéniste ou

6 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

malthusien, ou par les politiques familiales (Krause, 2001). Dans les années vingt et
trente par exemple, une fois que les hommes ont réintégré leurs postes de travail
après la fin de la guerre, on assiste en Europe à des campagnes « familialistes » qui,
dans le contexte de la baisse démographique et de la reconstruction nationale,
poussent les femmes des classes moyennes à se retirer de l’emploi et à faire des
enfants ; en même temps, ces mesures visaient à promouvoir l’emploi des femmes
des classes populaires (Lagrave, 1992). Les approches essentialistes culturalistes,
rabattant les inégalités sociales sur le « choc des cultures », obscurcissent les
rapports de pouvoir existant entre les groupes où les femmes sont directement
impliquées. Par là, ces approches rendent invisibles les différences entre les
conditions de vie des femmes appartenant aux différents groupes sociaux.
25 On a vu que dans le racisme contemporain, le dualisme public/privé est central
dans le traitement social des migrant-e-s et de leurs descendants. Cela a des
implications importantes au niveau des rapports sociaux de sexe. D’une part,
l’altérisation raciste applique à l’espace national la métaphore de la communauté
domestique, dont les membres sont liés par des rapports généalogiques. Cette
rhétorique de la communauté domestique se fonde sur l’assimilation de la sphère
politique aux relations familiales, construites comme relevant de la sphère privée :
sur cette base elle assigne les étranger-e-s à une position de minorité, similaire à celle
occupée par les enfants dans la famille (Dal Lago, 1999). Ces mêmes éléments
caractérisent les anciennes approches primordialistes de la catégorie d’ethnicité en
sciences sociales, ainsi que leur renouveau récent (Poutignat, Streiff-Fénart, 1995).
D’où la mobilisation des métaphores de la maison, de la famille et de la communauté
domestique pour légitimer la solidarité « interne » d’une part et la stigmatisation des
migrant-e-s et de leurs descendant-e-s d’autre part.
26 D’autre part, en France, l’injonction qui est faite aux immigré-e-s à « s’intégrer »
leur impose également de ne pas envahir la « sphère publique » avec leurs pratiques,
considérées comme culturellement marquées. On assigne donc les migrant-e-s au
statut de représentant-e-s d’une tradition culturelle spécifique qui, si elle s’exprimait
dans l’espace public, risqueraient de pervertir l’ordre social (Sayad, 1999).
L’injonction à « s’intégrer » qui est faite aux immigr-e-s leur demande donc qu’ils
respectent le dualisme public/privé. Par ailleurs, cette injonction à « s’intégrer » ne
se restreint pas à la sphère publique : se basant sur une représentation normative des
modèles de genre et des rapports familiaux qui seraient caractéristiques de la société
d’immigration, elle commande aux étranger-e-s d’en respecter les règles dans le
cadre de la sphère privée9(représentant ainsi les migrant-e-s comme des
« déviant-e-s » du point de vue des pratiques de la vie familiale et conjugale).

Division sexuelle du travail et rapports


sociaux de « race »
27 La question des rapports entre capitalisme et sexisme et de la nature économique
de la domination sexiste a soulevé un débat qui a été central dans la théorie et la
politique féministes des années soixante-dix. Ses enjeux, loin de relever d’une
discussion purement théorique, concernaient les positions respectives du
mouvement féministe et du mouvement des travailleur-e-s. Concrètement il s’agissait
par exemple de soutenir, face aux organisations féministes, l’intégration des luttes
pour les droits des femmes dans les organisations marxistes de classe, ou bien de la
critiquer. Cette discussion a opposé des courants divers au sein du féminisme. Dans
ce cadre, certaines théories féministes ont tendu à rapprocher la relation d’esclavage
et la domination des femmes, en articulant les rapports de production domestique au
salariat (Guillaumin, 1992 ; Delphy, 1998). Pourtant, si le schéma public/privé,

7 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

production/reproduction se retrouve dans toutes les sociétés connues, les modalités


concrètes de la division sexuelle du travail varient fortement dans l’espace et le temps
et selon le positionnement des femmes dans une même société (Kergoat, 2005).
L’analyse des régimes de division sexuelle du travail et des structures familiales —
apport fondamental d’une bonne partie de la production féministe française des
années soixante-dix et quatre-vingts — demande à être localisée et historicisée. Le
racisme et le colonialisme influencent profondément ces structures, en modifiant
28 l’organisation des rapports sociaux dans la sphère privée. Les régimes de division
sexuelle du travail changent selon le mode de production existant, selon les
positionnements des acteurs dans les rapports sociaux de « race » et de classe, selon
les institutions — la famille, l’Eglise, le capital, l’Etat providence — à travers
lesquelles se réalise l’appropriation du travail des femmes (Juteau, 1999).
Aujourd’hui, par exemple, l’emploi croissant des femmes étrangères dans les services
aux personnes, accomplis dans l’espace domestique mais aussi dans le cadre des
systèmes de Welfare et dans les entreprises, définit les migrations comme un lieu de
transformation des arrangements sur la division sexuelle du travail10. Une partie de
la réflexion sur le travail domestique a tendu à généraliser l’expérience des femmes
de classe moyenne, critiques à l’égard de leur discrimination sur le marché de
l’emploi. Par contre, pour les femmes « noires », migrantes et mères seules « chefs de
famille » des classes populaires, le travail salarié a historiquement été central dans la
définition normative du rôle d’épouse, mère, fille, à côté de la charge de travail
domestique (Ngan-ling Chow, Wilkinson et al., 1996). Les expériences que les
femmes de condition sociale différente ont de la division du travail domestique sont
connectées les unes aux autres. Nombre d’études féministes ont au contraire assumé
le travail domestique comme une notion exprimant une expérience partagée par
toutes les femmes sans distinction. Bien qu’elles soient toutes concernées par des
charges de travail domestique, des femmes de condition sociale différente auront des
points de vue forcément divergents sur la division du travail domestique (Nakano
Glenn, 1992). Elles seront différemment affectées par cette division à l’intérieur et à
l’extérieur des familles, différente sera la signification qu’elles assignent à leur travail
gratuit et à leur travail rémunéré, différents les effets des politiques publiques de
« conciliation »11entre vie familiale et professionnelle, selon leur niveau de revenus et
selon leur condition juridique, si elles sont des migrantes, etc.. Par exemple, les
féministes black soutiennent que pour les femmes noires aux Etats-Unis, l’espace
familial et domestique a pu valoir comme un lieu de résistance à la domination
raciste (Davis, 1983 ; Bell hooks, 1982).

Racisation et féminisation du marché


de l’emploi
29 Les recherches féministes étudient l’emploi à la lumière des arrangements sur le
travail domestique et de la circulation entre famille et marché (Walby, 1995). La
notion de « féminisation » du marché de l’emploi fait référence d’une part à l’entrée
massive des femmes européennes dans le travail salarié qui, notamment à partir des
années soixante, s’ajoute et s’articule aux charges du travail domestique gratuit. Elle
se réfère, d’autre part, aux processus de réorganisation du marché en fonction de la
présence des travailleuses, selon deux logiques : la séparation (il y a métiers
d’homme et métiers de femme) et la hiérarchisation (les métiers d’homme sont
mieux rémunérés, protégés et socialement considérés que ceux de femme : lorsqu’un
secteur se féminise, il subit en même temps un déclassement en termes de
qualification et de niveau des salaires) (Kergoat, 2005). Des représentations sur
l’aptitude des femmes à certaines tâches et activités sont produites pour légitimer
cette division et organisation du travail salarié (Gardey, 2001).

8 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

30 L’expression « racisation du marché de l’emploi » fait référence à des processus


similaires. Cette expression désigne la concentration dans certains postes ou secteurs
de personnes migrantes ou issues de l’immigration, dans le cadre d’un marché de
l’emploi segmenté. On assiste en effet à une différenciation et à une hiérarchisation
de l’accès au marché du travail en fonction de la nationalité et de l’origine, au regard
des secteurs d’activité, des statuts, des rémunérations, des horaires et au niveau du
déroulement des carrières. Cette hiérarchisation est soutenue par des critères qui,
tout en s’inscrivant dans un espace formellement égalitaire et méritocratique, le
marché, incorporent en réalité des représentations sur des catégories sociales
stéréotypées (femmes, immigré-e-s) et la différence hiérarchisée de leurs
compétences. La catégorie d’« immigré-e-s » est en fait un amalgame de critères de «
race » (infériorisation sociale sur la base d’une différence culturelle naturalisée) et de
classe (travailleur-e-s non qualifié-e-s et précaires dans l’économie informelle) : c’est
une catégorie à signification multiple qui permet de hiérarchiser les racisé-e-s entre
celles-ceux qui sont « plus ou moins immigré-e-s » par rapport à d’autres (Balibar,
Wallerstein, 1997). La notion de racisation des rapports de travail implique donc
l’existence de hiérarchies internes au segment du marché de l’emploi en question,
selon les niveaux de salaire et les conditions de travail. Ces hiérarchies s’appuient sur
des constructions essentialistes, d’où la pertinence du terme « racisation », en
établissant la plus ou moins grande aptitude des travailleur-e-s à certaines tâches en
fonction de classifications construites en relation au sexe, à la couleur de la peau, à la
nationalité, à la religion, à l’apparence physique mais aussi au degré de revendication
possible, à la disponibilité à être flexibles, donc au statut juridique « régulier » ou
non, à la nature du titre de séjour (de longue ou courte durée), etc.
31 Les migrations ont d’ailleurs une place centrale dans les transformations actuelles
de l’organisation du travail, constituant un révélateur des recompositions de l’emploi.
Si les pays de l’Union Européenne se sont dotés de dispositifs juridiques qui visent à
restreindre l’accès au séjour et à l’emploi des migrant-e-s, ils pratiquent cependant
une politique économique qui a tendance à tolérer l’emploi illégal et à banaliser
l’emploi précaire, en contredisant l’esprit du Code du travail (Morice, 1997). Ainsi le
secteur agricole, le BTP, la confection et le tertiaire taylorisé — le nettoyage industriel
et l’hôtellerie-restauration — présentent à partir des années quatre-vingts une
nouvelle gestion du travail salarié. Ce sont précisément ces secteurs ainsi que le
service domestique — des activités à forte intensité de main-d’œuvre et très
dépendantes des variations de la demande — qui ont massivement recours au travail
des migrant-e-s, spécialement sans-papier-e-s. Dans ces secteurs, les changements de
l’organisation du travail amènent à une remise en cause des statuts et des droits
historiquement liés à l’emploi, s’appuyant parfois sur la sous-traitance en cascade
(Marie, 1999). L’emploi illégal — qui d’ailleurs ne concerne pas que les étranger-e-s —
n’est pas une anomalie mais plutôt une des stratégies de rentabilisation et de survie
pour nombre d’entreprises : le faible prix du travail non déclaré permet d’abattre les
coûts globaux de l’activité et de lui assurer une continuité. Les migrant-e-s et
spécialement les sans-papier-e-s participent donc de tendances qui traversent
l’ensemble de l’emploi. Elles/ils doivent leur maintien sur le marché au fait d’être
largement flexibles et exploitables : leur travail n’est qu’une forme particulièrement
précaire et illégale des emplois atypiques contemporains, dont d’autres formes ont
été légalisées.
32 Dans ce contexte, les femmes migrantes ont été un élément essentiel de
développement de la flexibilité, leur activité étant souvent restreinte — notamment
en raison de difficultés à « concilier » le travail domestique avec l’emploi — à des
emplois qui impliquent des horaires réduits et accomplis dans la sphère domestique.
Leur entrée dans les entreprises a été corrélative d’une extension de certaines formes
d’organisation et de contrat de travail — bien que ces modes de gestion ne leur soient
pas exclusifs (Merckling, 2003)12. La redéfinition actuelle des modes de gestion de la

9 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

main-d’œuvre se fait en fonction des rapports de sexe et de « race » et selon une


division internationale du travail. Selon qu’il s’agit de travailleurs ou de travailleuses,
et d’un pays du Sud ou du Nord, on observe des méthodes tayloriennes de contrôle
du travail, ou bien un mouvement de dé-taylorisation, où le contrôle ne passe pas
nécessairement par un rapport salarial classique de subordination, les salarié-
e-sétant soumis-e-s directement à la pression de la demande (Appay, 1996 ; Hirata,
1993).
33 Cet article a présenté quelques notions utiles pour penser l’articulation des
rapports sociaux de sexe, de « race » et de classe, s’appuyant sur quelques travaux
issus d’une production internationale et très ample. Le débat sur ce thème est en
plein essor dans la sociologie des migrations et des relations interethniques en
France et dans les études féministes, éclairant la diversité des positions et aussi les
divisions au sein du féminisme. Un des domaines de recherche qui reste peu
pratiqué, au moins pour le moment, concerne la place des hommes dans les
nouveaux équilibres des rapports sociaux de sexe, de « race » et de classe et les
processus de production des masculinités, appréhendés à la lumière de l’articulation
entre les différents rapports sociaux de domination. Par exemple, dans la production
récente sur les migrations des employées de maison et la « division internationale du
care », les études qui prennent en compte les pratiques des hommes sont rares : la
plupart des travaux se sont appuyés sur les femmes, et sur leurs pratiques de
« maternité transnationale ». Placer la crise du « care » dont souffrent certains pays
du Sud dans le contexte de la division sexuelle du travail est nécessaire aussi afin
d’éviter une idéalisation du rôle nourricier et maternel des migrantes — qui pourrait
d’ailleurs être vue comme une forme d’altérisation de ces femmes.

Bibliographie
Appay, Béatrice (1996), « Flexibilité et précarisation : vers la corvéabilité ? », in Senotier, D.,
Femmes et partage du travail, Paris, Syros, p. 119-136.
Balibar, Etienne ; Wallerstein, Immanuel (1997), Race, nation, classe. Les identités ambiguës,
Paris, La Découverte.
Barth, Frederick (1995 [1969]), « Les groupes ethniques et leurs frontières », in Poutignat P. ;
Streiff-Fenart, J., Théories de l'ethnicité, Paris, PUF, p. 203-249. (Ethnic groups and
boundaries. The social organisation of culture difference, Bergen Oslo Universitetsforlaget,
1969).
Bhavnani, Kum-Kum (ed.) (1999), Feminism and « race », Oxford, Oxford University Press.
Clancy-Smith, Julia (2006), « Le regard colonial. Islam, genre et identités dans la fabrication
de l’Algérie française, 1830-1962 », Nouvelles Questions Féministes, 3 (25).
Dal Lago, Alessandro (1999), Non-persone. L'esclusione dei migranti in una società globale,
Milano, Feltrinelli.
Davis, Angela (1983), Femmes, race et classe, Paris, Ed. Des femmes.
Delphy, Christine (1998), L'ennemi principal. Économie politique du patriarcat, Paris,
Syllepse.
Gardey, Nicole (2001), Travail et genre. Approches croisées, Paris, L'Harmattan.
Guillaumin, Colette (1972), L'idéologie raciste. Genèse et langage actuel, Paris, La Haye,
Mouton.
Guillaumin, Colette. (1992), L'idée de Nature. Race, sexe et pratique du pouvoir, Paris, Ed.
Côté-Femmes.
Guillaumin, Colette (1997), « La confrontation des féministes en particulier au racisme en
général. Remarques sur les relations du féminisme à ses sociétés », in Les féministes face à
l'antisémitisme et au racisme. Journée de l'ANEF du 14 juin 1997, Paris, p. 7-20.
Hirata, Helena (1993), « Division sexuelle et internationale du travail », Futur Antérieur, 16,
<http://multitudes.samizdat.net/Division-sexuelle-et.html>
Hooks, Bell (1982), Ain't I a Woman. Black women and feminism, London, Pluto Press.
Lagrave, Rose-Marie (1992), « Une émancipation sous tutelle. Education et travail des femmes

10 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

au XXe siècle », in Duby G. ; Perrot, M. (Dir.), Histoire des femmes en Occident. Le


XXe siècle, Paris, Plon, p. 431-462.
Jaspard, Maryse ; Brown, Elizabeth ; Condon, Stéphanie (2003), Les violences envers les
femmes en France. Une enquête nationale, Paris, La Documentation française.
Juteau, Danielle (1999), L'ethnicité et ses frontières, Montréal, Les Presses de l'Université de
Montréal.
Kergoat, Danièle (2005), « Penser la différence des sexes. Rapports sociaux et division du
travail entre les sexes », in Maruani, M. (Dir.), Femmes, genre et sociétés. L’état des savoirs,
Paris, La Découverte, p. 94-101.
Krause, Elisabeth L. (2001), « ‘Empty Cradles’ and the Quiet revolution : Demographic
Discourse and Cultural Struggles of Gender, Race, and Class in Italy », Cultural Anthropology,
16(4), p. 576-611.
Marie, Claude-Valentin (1999), « Emploi des étrangers sans titre, travail illégal,
régularisations: des débats en trompe-l’œil », in Dewitte, P. (Dir.), Immigration et
intégration, l'état des savoirs, Paris, La Découverte, p. 342-352.
Mauger, Gérard (2001), « Les politiques d'insertion. Une contribution paradoxale à la
déstabilisation du marché du travail », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 136-137,
p. 5-14.
Merckling, Odile (2003), Emploi, migration et genre. Des années 1950 aux années 1990,
Paris, L'Harmattan.
Morice, Alain (1997), « Quand la lutte contre l'emploi illégal cache les progrès de la précarité
légale », in Fassin, D. ; Morice, A. ; Quiminal, C., Les lois de l'inhospitalité. Les politiques de
l'immigration à l'épreuve des sans-papiers, Paris, La Découverte, p. 146-177.
Nakano Glenn, Evelyne (1992), « From Servitude to Service Work: Historical Continuities in
the Racial Division of Paid Reproductive Labor », Signs, 18(1), p. 1-43.
Ngan-Ling Chow, Esther ; Wilkinson, Doris, et al. (1996), Race, class, and gender : Common
bonds, different voices, Thousand Oaks, London, New Delhi, Sage.
Palidda, Salvatore (1999), « La criminalisation des migrants », Actes de la recherche en
sciences sociales, n° 129, p. 39-49.
Pateman, Carol (1988), The Sexual Contract, Cambridge, Polity Press.
Poutignat, Philippe ; Streiff-Fenart, Jocelyne (1995), Théories de l'ethnicité, Paris, PUF.
Rea, Andrea, (Dir.) (1998), Immigration et racisme en Europe, Bruxelles, Editions Complexes.
Rivera, Annamaria, (Dir.) (2000), Homo sapiens e mucca pazza. Antropologia del rapporto
con il mondo animale, Bari, Edizioni Dedalo.
Sayad, Abdelmalek (1999), « Immigration et “ pensée d'état ” », Actes de la recherche en
sciences sociales, n° 129, p. 5-14.
Savarese, Eric (2000), Histoire coloniale et immigration. Une invention de l'étranger, Paris,
Séguier.

Scrinzi, Francesca (2003), « ‘Ma culture dans laquelle elle travaille’.Les migrantes dans
les services domestiques en Italie et en France », Cahiers du CEDREF, (10),
p. 137-162.
Scrinzi, Francesca (2005), « Les ‘hommes de ménage’ ou comment aborder la féminisation des
migrations en interviewant des hommes », Migrations Société, n° 99-100, p. 229-240.
Walby, Sylvia (1995), « Analyses sociologiques de la division sexuelle du travail », in Actes du
séminaire européen GDR Mage, La division sexuelle du travail revisitée, p. 115-122.
Yuval-Davis, Nira (1997), Gender and Nation, London, Thousands Oaks, New Delhi, Sage
Publications.

Notes
1 Voir par exemple Cahiers du Genre n°39, 2005, « Féminisme(s) : penser la pluralité » et
Cahiers du Cedref, décembre 2006, « (Ré)articulation des rapports sociaux de sexe, classe et
“race” » : repères historiques et contemporains. Mémoires du séminaire du CEDREF
2005-2006.
2 Une des questions au centre du débat concerne justement l’homologie — ou la nature
diverse — des trois différents systèmes de rapports de pouvoir.
3 À l’époque de l’émergence du black feminism, le terme « black » était employé dans les pays

11 sur 12 28/11/2015 10:46


Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de « r... https://cedref.revues.org/578

anglophones pour indiquer l’expérience sociale partagée du racisme. Dans le contexte


nord-américain la catégorie « blanc-he-s » se comprend en relation à l’usage de « black ».
4 Ces rapports de pouvoir insistent sur différents modes de différenciation, basés sur des
constructions sociales se référant à l’inégalité (infériorité/supériorité), à la différence
(ressemblance/dissemblance) et à l’altérité (intériorité/extériorité).
5 Au XIXe siècle, la logique de naturalisation investissait aussi directement les rapports de
classe : les premières « races » à être inventées ont été les travailleur-e-s, les ouvrier-e-s, les
paysan-e-s. Dans la définition de cette catégorie d’« ennemis de l’intérieur », les conditions
socio-économiques se fondent sur des critères moraux : les travailleurs étaient « par leur
nature » destiné-e-s à la misère matérielle et spirituelle, à la saleté et à la criminalité
(Guillaumin, 1972). Aujourd’hui on ne parle plus d’une naturalisation des rapports sociaux de
classe, de la même façon qu’elle existe pour les rapports de « race » et de sexe. D’autres
logiques semblent être à l’œuvre : par exemple, les nouvelles pratiques d’organisation du
travail et de précarisation de l’emploi renvoient à la psychologisation et à la moralisation du
chômage (Mauger, 2001).
6 Dans une conception formelle, découlant du travail de Frederick Barth (1995 [1969]), la
production et l’usage des « catégories ethniques » coïncident avec un problème d’organisation
sociale.
7 Pour une discussion de ces questions, je renvoie aux deux numéros de Nouvelles Questions
Féministes, vol. 25, n°1, 2006 et vol. 25, n°3, 2006.
8 De la même façon, le sexisme est parfois rabattu sur les classes populaires. Par contre, les
violences contre les femmes ne sont pas une prérogative des hommes des classes populaires
mais un phénomène transversal à toutes les classes sociales (Jaspard et al., 2003).
9 Voir Tersigni, Simona (2003), Les frontières du partage : relations interethniques et
approches de l'Islam. Discours et pratiques de migrantes d'Afrique du Nord et de leurs filles,
thèse de doctorat de sociologie, université Paris Diderot Paris 7.
10 À ce propos voir l’article d’Eleonore Kofman dans ce numéro.
11 À propos du cas français, Christine Delphy met en avant la nature idéologique de
l’expression de « conciliation » : ces politiques se sont révélées discriminatoires. Le devoir de
concilier les temps de travail à la maison et à l’extérieur ne revient en réalité qu’aux femmes,
soutenues financièrement par l’Etat (par exemple à travers l’APE, Allocation parentale
d’éducation). Celui-ci n’interdit formellement aucun domaine d’activité salariée aux femmes,
mais il ne fait rien pour saper la division traditionnelle du travail domestique, qui est le
fondement matériel de l’inégalité. Ainsi, les femmes sont obligées de « concilier », alors que les
hommes, eux, peuvent concilier s’ils le veulent. Voir (Delphy, 1998).
12 À ce propos, voir l’article de Sabah Chaïb dans cet ouvrage.

Pour citer cet article


Référence électronique
Francesca Scrinzi, « Quelques notions pour penser l’articulation des rapports sociaux de
« race », de classe et de sexe », Les cahiers du CEDREF [En ligne], 16 | 2008, mis en ligne
le 29 mars 2011, Consulté le 28 novembre 2015. URL : http://cedref.revues.org/578

Auteur
Francesca Scrinzi
Sociologue, maîtresse de conférences à l’Université de Glasgow et membre associée de
l’URMIS (Unité de Recherche Migrations et Société).

Articles du même auteur


« Ma culture dans laquelle elle travaille ». Les migrantes dans les services
domestiques en Italie et en France [Texte intégral]
Paru dans Les cahiers du CEDREF, 12 | 2004

Droits d'auteur
Tous droits réservés

12 sur 12 28/11/2015 10:46

Das könnte Ihnen auch gefallen