Histoire de l'Asie

Discours de Georges Périn

23 décembre 1887

« Oui, nous devons quitter le Tonkin, et notre intérêt le plus réel et le plus certain nous le
commande. » Cette phrase est prononcée par Georges Périn, né en 1838, député de la Haute Vienne
député de la Haute-Vienne depuis 1876, le 23 décembre 1885.
Cette phrase est extraite du discours dont nous avons à étudier la retranscription, que Georges Perin
a prononcé à la Chambre des députés.
Ce discours intervient au cœur de débats difficiles lors des journées du 21 au 24 décembre
1885 où il a été justement question de l'évacuation du Tonkin et des crédits à donner. Cette
controverse s'inscrivent dans un débats plus large et déjà ancien puisque ligne 2-3, « la Chambre,
pendant sa dernière législature, s'est débattue dans des discussions continuelles sur ce sujet ». Perin
fait ici référence à deux choses, d'abord les élections législatives qui ont eu lieu en octobre, et les
débats et discours de Jules Ferry et Clémenceau de juillet 85, entre autres bien sur, lors de la
précédente législature, donc. Le Tonkin est la partie Nord du Vietnam actuel.
La France est en guerre en Indochine contre la Chine depuis 1883, et un traité de paix, compromis
historique, selon les mots de Brocheux et Hémery est signé le 9 juin 1885. A ce moment de l'année
1885, la chambre se divise en deux entre Tonkinois et anti-colonialistes. Périn est de la deuxième
catégorie. Le Tonkin est sous protectorat depuis le 6 juin 1884.
Le discours de Périn se divise en deux parties : tout d'abord, il démonte les arguments de
ceux qui sont pour la colonisation du Tonkin et dans un second temps, il expose sa vision de la
colonisation de l'Indochine, ses souhaits pour le Tonkin.
Ce texte nous permet d'étudier une autre position, un autre point de vue sur la politique
coloniale menée par la France
La première partie est consacrée à la dénonciation de la politique actuelle et la seconde à la
vision de Perin sur cette colonisation du Tonkin.

Tout d'abord, Georges Perin entend dénoncer la colonisation du Tonkin. Pour cela, dans son
discours, il prend un à un les arguments et les réfute.
Le premier argument est celui qui revient est celui de l'honneur : ligne 9 à 10 « Evacuer le Tonkin,
c'est laisser entre les mains de la France un drapeau déshonoré. ». L'honneur est un des principaux
arguments qu'utilisaient les pro-colonisations pour justifier la colonisation. La France voulait
assurer sa place dans le monde et son honneur par un empire colonial vaste. Ici, Perin reprend la
phrase de l'un des ses interlocuteurs qui dit que la France perdra son honneur si on évacuait le
Tonkin à cause du sang versé. Le sang versé fait ici référence aux guerres qui se sont déroulées au
Tonkin depuis 1883 entre la France et la Chine pour le contrôle du Fleuve Rouge, ou les pertes
furent d'environ 2000 pour les Français et 10000 pour le camp adverse.
Dans la même veine, à la ligne 15, Perin fait référence au « souci de l'existence des
Tonkinois » Cela fait partie toujours de l'idéologie colonialiste, où la France apporte la civilisation
et le bien aux populations indigènes.
Enfin dernier argument qu'il réfute c'est le fait de respecter le traité ligne 15. Il fait ici
référence au traité de TienTsin, mettant fin au conflit précédement cité. La France renonce à ses
indemnités et à ses conquêtes insulaires, et la Chine reconnaît le protectorat francais sur l'Annam
Tonkin, et accepte l'ouverture commerciale et ferroviaire de la région.
Toujours dans cet esprit de dénoncer la colonisation, Perin aborde la question du droit . À
t'on oui ou non le droit de coloniser les peuples, est ce bien moral ?Ligne 31 &32 « il me sembel
qu'il faut un oeu se préoccuper de la question du droit. Perin donne dans ce discours sa définition de
la colonie de peuplement et de la colonie d'exploitation. Pour lui, la colonie de peuplement, c'est
prendre possession d'un pays ou les autochtones ne savent pas tirer parti du sol « comme nous le
faisons en Algérie », ligne 50. La colonie d'exploitation est le contraire: c'est une colonie où on se
substitue aux systèmes déjà en place. Pour Périn, on a le droit et c'est moral, s'il s'agit d'une colonie
de peuplement, mais pas s'il s'agit d'une colonie d'exploitation. Nous pouvons ici formuler une
critique à ce discours. En effet, alors que l'on pourrait penser que Georges Perin est anti colonialiste
et qu'il n'approuve pas la politique colonialiste de la France, cette phrase ligne 49-50, nous montre
bien qu'en réalité tous les parlementaires en cette année 1885 étaient colonialistes, simplement, c'est
leur vision des choses qui les distinguaient.

Après avoir vu que Perin réfute tous les arguments des Tonkinois et compris, par sa
distinction entre colonie de peuplement et d'exploitation, qu'il est quand même colonialiste, il est
intéressant d'étudier sa vision de la colonisation du Tonkin.

Perin, dans son discours adopte une vision économique, économiste voire même utilitariste
de la colonisation du Tonkin. Il exprime très clairement sa position dans les lignes 20 à 23.: « Notre
intérêt nous le commande », « coûterait » « recette ». Il faut quitter le Tonkin que pour des raisons,
économiques. Il propose la solution, après la guerre, d'évacuer pour limiter les dégats au Tonkin. Il
dit, ligne 4 que c'est la solution qu'il a « défendue devant le corps éléctoral ». On peut donc penser
que, puisqu'il est député, qu'une partie de la pouplation est du mêm avis que lui, est favorable à une
évacuation. Ces débats concernant l'évacuation on été très agités. Pour lui, le Tonkin est une colonie
d'exploitation, donc source de dépenses pour maintenir l'activité. En 1885, la conquête du Tonkin
est à peine achevée, et les activités économiques ne se mettront en place que quelques années plus
tard, comme par exemple la culture de l'hévéa, qui débute en 1897. Perin anticipe ainsi pour étayer
son propos et mieux faire passer son message.
Au Tonkin, la France prend la place du système déjà installé; se substitue au au système d'impôts
déjà en place. On ne fait qu'exploiter et tirer de l'argent sur le dos des indigènes.