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UNIVERSITE MOHAMMED V – RABAT

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES


ECONOMIQUES ET SOCIALES
AGDAL

MASTER S1 GFCF
COURS DE DROIT DE
L'ENTREPRISE

PROFESSEUR Chakib EL OUFIR

ANNEE UNIVERSITAIRE 2018 - 2019


2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

INTRODUCTION
Alors que l’économie est la science d’observation des phénomènes du
monde des richesses (modes de production et de circulation des richesses), le
droit est la discipline qui le réglemente.
Le droit est directement lié aux sciences économiques, car les activités
économiques ne peuvent s’exercer dans le désordre, il faut qu’elles soient
réglementées. Le droit va établir des règles qui vont régir les activités
économiques. Il sera au service des économistes puisqu’il va réglementer tout
ce qui concerne la production et la circulation des richesses.
Ce qui nous interesse directement de ces règles, ce sont celles qui
concernent la production et la circulation des richesses, les règles qui régissent
le monde économique, celui de la spéculation, de la recherche du profit.
L’ensemble de ces règles forme le droit commercial.
Qu’est ce que le droit commercial ? Quelles sont ses particularités ?
Quelles sont ses sources ? Et quelles en sont les juridictions compétentes ?

I - DEFINITION ET PARTICULARITES DU DROIT


COMMERCIAL
C’est un droit qui fait partie du droit privé qui régit les opérations de
production et de circulation des richesses effectuées par les commerçants soit
dans leurs relations entre eux, soit dans leurs rapports avec leurs clients.
Vu la nature du monde des affaires, le droit commercial se distingue du
droit civil tantôt par un certain formalisme, tantôt par une certaine souplesse.
A - LE FORMALISME DU DROIT COMMERCIAL
Ce formalisme est en effet très utile pour assurer la sécurité du crédit dans
les opérations commerciales.
Le crédit constitue le noyau de toutes les relations commerciales. Pour cela,
il doit être entouré d’un formalisme plus rigoureux que celui éxigé par le droit civil.
C’est ce qui explique le formalisme des institutions du droit commercial : celui
des effets de commerce, de la vente et du nantissement du fonds de commerce,
de la faillite, le formalisme rigoureux pour la constitution des sociétés
commerciales, etc.

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B - LA SOUPLESSE DU DROIT COMMERCIAL


Elle s’explique, quant à elle, par la rapidité que nécessite la réalisation
des opérations commerciales. Ainsi, et contrairement aux règles rigides du droit
civil, en droit commercial on admet le principe de la liberté de la preuve entre les
commerçants.
C’est ce qui permet à ces derniers de conclure leurs contrats par les
moyens les plus rapides (téléphone, fax ou même verbalement) sans avoir à se
soucier, au préalable, du formalisme des écritures qu’exige le droit civil.

II - LES SOURCES DU DROIT COMMERCIAL


Avec la rapidité de l’évolution du monde des affaires, on ne peut se
permettre de compter uniquement sur les sources écrites ; c’est pourquoi les
sources non écrites y jouent un rôle fondamental.
A- LES SOURCES ECRITES
Dans cette catégorie il existe des sources nationales et d’autres
internationales.
A - LES SOURCES NATIONALES

1/ Le code de commerce et la refonte du droit des affaires


Depuis le protectorat, la zone française du Maroc était régie par le code
de commerce du 12 août 1913. Après l'indépendance il a été généralisé à tout le
Royaume. Ce code était largement inspiré du code de commerce français de
1807.
Il fut enfin remplacé par un nouveau code de commerce par un dahir n°
1-96-83 du 1er août 1996 portant promulgation de la loi 15/95 formant code de
commerce1.
Le droit des affaires a connu une refonte dans son ensemble durant ces
dernières années, elle a concerné notamment : la comptabilité commerciale2, le

1
B.O. n° 4418, du 3 octobre 1996, pp. 568-634.
2
Dahir 25/12/1992 portant promulgation de la loi 9/88 relative aux obligations comptables des
commerçants (B.O. n° 4183 du 30/12/1992, p.623).

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domaine bancaire3, la bourse des valeurs4, le domaine des investissements5, les


sociétés anonymes6, les autres sociétés commerciales7, les tribunaux de
commerce8, la loi sur la liberté des prix et de la concurrence9, la loi relative à la
protection de la propriété industrielle10, etc.
2/ Le D.O.C. :
Le D.O.C. est notre code civil (Dahir formant code des obligations et
contrats également du 12 août 1913).
En tant que code de droit privé marocain, le D.O.C. constitue ce qu'on
appelle le droit commun. Par conséquent, en cas de lacune des règles
commerciales, ce sont ses règles qui s’appliquent.
À ce propos, le nouveau code de commerce stipule dans son article 2 : « il
est statué en matière commerciale, conformément aux lois, coutumes et usages
du commerce ou au droit civil, dans la mesure où il ne contredit pas les principes
fondamentaux du droit commercial ». Même les lois relatives aux sociétés
renvoient à l'application des règles du DOC lorsqu'elles ne sont pas
contradictoires avec elles.
B- LES SOURCES INTERNATIONALES

Il s’agit des conventions internationales qui constituent une source


fondamentale du droit commercial.

3
Dahir portant loi 1/93 du 6/7/1993 relatif à l’exercice de l’activité des établissements de crédit
et de leur contrôle, appelée « loi bancaire » (B.O. n°4210 du 7/7/1993, p.333).
4
Dahir portant loi n° 1-93-211 du 21 septembre 1993 relatif à la Bourse des valeurs (B.O. n°
4223 du 6/10/1993, p. 513).
5
La loi cadre n° 18/95 formant charte de l’investissement, dahir du 8/11/1995 (B.O. n° 4336 du
6/12/1995).
6
Ddahir n° 1-96-124 du 30 août 1996 portant promulgation de la loi 17/95 relative aux sociétés
anonymes (B.O. n° 4422, du 17 octobre 1996, pp. 661-704).
7
Dahir n° 1-97-49 du 13 février 1997 portant promulgation de la loi 5/96 sur la société en nom
collectif, la société en commandite simple, la société en commandite par actions, la société à
responsabilité limitée et la société en participation (B.O. n° 4478 du 1er mai 1997, p. 482).
8
Dahir n° 1-97-65 du 12 février 1997 portant promulgation de la loi 53/95 instituant des
juridictions de commerce (B.O. 15 mai 1997, n° 4482, p. 520).
9
Loi n° 06-99 promulguée par Dahir n° 1-00-225 du 5 juin 2000, Bulletin Officiel n° 4810 du
Jeudi 6 Juillet 2000.
10
Loi n°17-97 promulguée par Dahir N° 1-00-19 du 15 Février 2000.

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Ces conventions peuvent être bilatérales se limitant à régler certaines


questions entre deux États signataires ou entre un État et un groupement
économique régional (par exemple l’accord d’association entre le Maroc et la
CE).
Il existe aussi des conventions internationales, par exemple les traités
internationaux ratifiés par le Maroc tels que ceux sur les transports maritimes,
ferroviaire, routier et aérien ; les accords du GATT ; les conventions
internationales portant lois uniformes (les conventions de Genève du 7 juin 1930
sur la lettre de change et le billet à ordre et du 19 mars 1931 sur le chèque).
Le droit commercial n’a pas que des sources écrites, il en a d’autres
importants, mêmes non écrites.
B- LES SOURCES NON ECRITES
Il s’agit des usages et de la jurisprudence.
A- LES USAGES COMMERCIAUX

Bien que le droit commercial soit codifié, les usages commerciaux


continuent d’en constituer une source fondamentale ; car la législation, avec sa
lenteur, est incapable de suivre l’évolution rapide du monde des affaires.
Les usages sont des règles générales non écrites issues de pratiques
professionnelles constantes et tacitement acceptées par les commerçants à
l’occasion des négociations ou de l’exécution de leurs opérations commerciales.
Ce sont les pratiques qui créent des règles par la force de l’habitude
professionnelle.
C’est à l’occasion de la conclusion des contrats et de leur exécution que
le rôle des usages intervient, par exemple, en matière de ventes commerciales
ce sont les usages de chaque profession qui fixent les délais, les modalités et les
modes de paiement, les délais de livraison, la charge de la livraison et ses frais,
la charge des frais de courtage et leur taux, les risques des défauts des
marchandises, etc.
Les usages peuvent réglementer toute une institution nouvellement créée,
par exemple le leasing était, avant le nouveau code, presque exclusivement régis
par les usages.
B - LA JURISPRUDENCE

C’est la solution donnée par un ensemble de décisions concordantes


rendues par les juridictions sur une question de droit.

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Ce sont les précédents judiciaires qui servent de guide aux décisions des
juridictions à travers la pyramide judiciaire, l’unification de la jurisprudence se
réalise d’ailleurs par le biais des voies de recours.
Il n’est pas besoin d’insister sur le rôle de la jurisprudence en matière
commerciale ; c’est aux tribunaux qu’il revient d’interpréter les lois et les contrats
conclus entre commerçants, de fixer les usages auxquels ils se réfèrent, de
déterminer le statut des institutions nouvelles créées par la pratique.

III– LES JURIDICTIONS DE COMMERCE


Il n’existait pas au Maroc de juridictions spécialisées en matière
commerciale ; ce sont les juridictions de droit commun qui connaissaient des
affaires commerciales. Les juridictions de commerce n’ont été instituées que
récemment par le dahir du 12 février 1997 portant promulgation de la loi 53/95 ;
il s’agit des tribunaux de commerce et des cours d’appel de commerce.
A – LES TRIBUNAUX DE COMMERCE 11
A – COMPOSITION

A la différence de la France, où les juges des tribunaux de commerce sont


élus parmi les commerçants, le Maroc a opté pour des magistrats de carrière.
Le tribunal de commerce tient ses audiences et rend ses jugements par
trois magistrats, un président et deux assesseurs, le parquet y est représenté.
B – COMPETENCE

Les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions


relatives aux contrats commerciaux, des actions entre commerçants à l’occasion
de leurs activités commerciales, des actions relatives aux effets de commerce,
des différends entre associés d’une société commerciale et des différends à
raison de fonds de commerce.
Dans sa rédaction initiale, l'article 6 de la loi relative aux tribunaux de
commerce prévoyait que les tribunaux de commerce connaissent en premier et
dernier ressort des demandes dont le principal ne dépasse pas la valeur de 9

11
Il existe actuellement 8 tribunaux de première instance de commerce: Agadir, Marrakech,
Meknes, Fes, Oujda, Tanger, Rabat et Casablanca.

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000 dhs et en premier ressort de toutes les demandes d’une valeur supérieure à
ce montant.
Cet article a été modifié par une loi n° 18-02 promulguée par dahir du
13/6/200212. Désormais, cet article est ainsi formulé : "les tribunaux de commerce
sont compétents pour connaître des demandes dont le principal excède la valeur
de 20 000 dirhams…".
B – Les cours d’appel de commerce 13
A – COMPOSITION

La cour d’appel de commerce comprend un premier président, des


présidents de chambres et des conseillers, un ministère public composé d’un
procureur général du roi et de ses substituts, un greffe et un secrétariat du
ministère public.
Elle tient ses audiences et rend ses arrêts par un président de chambre et
deux conseillers, assistés d’un greffier.
B – COMPETENCE

La cour d’appel de commerce connaît des appels contre les jugements


rendus par le tribunal de commerce.
L’appel doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la date de
la notification du jugement du tribunal de commerce.

Plan du cour :

Première partie : La matière du droit commerciale


Deuxième partie : Les instruments du commerce

12
(B.O. n° 5030 du 15/8/2002)
13
Il existe actuellement trois cours d'appel de commerce: Casablanca, Fes et Agadir

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PREMIERE PARTIE :

LA MATIERE DU DROIT COMMERCIAL


Quelle est la matière du droit commercial ? Est-ce le commerçant ou l’acte
de commerce ? Autrement dit, que régit le droit commercial, le commerçant ou
les actes de commerce ?
C’est que nous sommes en présence de deux conceptions du droit
commercial : l’une subjective, l’autre objective.
Le système subjectif : Dans ce système, le droit commercial est le droit
des commerçants ; l’acte de commerce se définit par l’activité commerciale de
son auteur. Autrement dit, c’est le commerçant qui donne la qualification
commerciale aux actes accomplis par lui. Par exemple, lorsqu’un acte est
effectué par un commerçant, c’est un acte de commerce ; si le même acte est
exercé par un non-commerçant, il est civil.
Les actes de commerce sont donc, dans ce système, strictement l’œuvre
des commerçants et nul ne peut accomplir un acte de commerce s’il n’exerce pas
une profession commerciale.
Le système objectif : Dans ce système c’est l’inverse qui se produit, c’est
l’acte de commerce qui donne la qualité commerciale à celui qui l’exerce. Le droit
commercial est le droit des actes de commerce et non celui des commerçants,
on parle du code de commerce et non du code des commerçants ; lorsque la loi
qualifie un acte de commercial, toute personne, même un non commerçant, qui
accomplirait un tel acte serait assujettie au droit commercial.
Ce système repose exclusivement sur l’acte effectué, indépendamment
de la personne de son auteur.
La position du législateur : Le code de commerce de 1913, à l’instar du
code français de 1807, se voulait adopter les deux systèmes. Le nouveau code
de commerce de 1996 annonce la même position en disposant dans son article
1er que «la présente loi régit les commerçants et les actes de commerce ».
Mais malgré cette apparence qui laisse entendre que notre code adopte
les deux systèmes, il ressort des diverses dispositions de ce dernier que la
tendance objective y a le maître mot.

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Néanmoins, quelque soit le système adopté, nous pouvons considérer


que la matière du droit commercial est double : ce sont les activités commerciales
et les actes du commerce qui en constituent l’objet et le commerçant le sujet.
Plan de la première partie :
Chapitre I – L'objet du droit commercial
Chapitre II – Le sujet du droit commercial

CHAPITRE 1 - L’OBJET DU DROIT COMMERCIAL


Le législateur de 1996 a énormément élargi le champ commercial.
Il a, d’abord, consacré légalement certaines activités économiques que la
jurisprudence avait commercialisé comme le secteur des assurances,
l’exploitation des entrepôts et des magasins généraux, l’imprimerie et l’édition,
etc.
Il a même envahi les domaines sacrés du droit civil, à savoir les immeubles
et l’artisanat.
L’article 6 parle actuellement d’activités commerciales (section 1), qui se
distinguent de ce que le code de commerce appelle les actes de commerce
(section 2).

Section I - LES ACTIVITES COMMERCIALES


L’article 6 du nouveau code a énuméré un grand nombre d'activités
commerciales que nous pouvons ranger dans trois secteurs :
- les activités de production
- les activités de distribution ;
- et les activités de services.
§ 1 - LES ACTIVITES DE PRODUCTION
Ce sont des activités dont l’exploitation n’est pas précédées d’une
circulation antérieure, autrement dit les exploitants ne vendent que leur propre
production et ne spéculent pas sur des produits qu’ils achètent.
Actuellement, les seules activités de production de caractère commercial,
sont la recherche et l’exploitation des mines et des carrières (art. 6-4°), c’est à
dire les industries extractives.

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La recherche et l’exploitation des mines sont commerciales depuis le dahir


16 avril 1951, alors que la recherche et l’exploitation des carrières ne le sont que
depuis le code de 199614.
On remarquera que l’agriculture15 et la pêche, qui sont aussi des activités
de production, sont restées dans le domaine civil.
Il en est de même bien entendu de la production intellectuelle (les
créations de l’esprit). Restent donc encore régis par le droit civil les auteurs
d’ouvrages, les créateurs de nouvelles inventions (les inventeurs de nouveaux
logiciels par exemple), le compositeur d’une œuvre musicale, l’artiste peintre qui
vendent les produits de leur création.
§ 2 – LES ACTIVITES DE DISTRIBUTION
La distribution est l’ensemble des opérations par lesquelles les produits
sont répartis entre les consommateurs.
Deux activités de distributions peuvent se dégager de l'art. 6 : l’achat pour
revente et la fourniture.
A - L’ACHAT POUR REVENDRE
L'achat pour revendre peut avoir pour objet aussi bien les meubles
(corporels ou incorporels) ou les immeubles16.
Cet achat doit avoir lieu avec l'intention de revendre et quel que soit, en
l’état ou après transformation, c'est-à-dire qu'il s'agisse de meubles ou
d'immeubles, la revente constitue une activité commerciale qu'ils
soient revendus tels qu'ils ont été achetés ou après les avoir travaillés. Ainsi,
nous pouvons intégrer dans ce secteur non seulement les industries de
transformation, mais aussi certaines petites entreprises comme la menuiserie, la
boulangerie ou la pâtisserie.

14
- Exemples des mines : fer, cuivre et tous les métaux, phosphate, charbon, etc. Les carrières
sont de sable, de marbre, de pierres, d’ardoise, d’argile, etc.
15
- Il ne peut s’agir bien entendu que des exploitations agricoles traditionnelles ; les cultivateurs
et les éleveurs traditionnels ne sont pas des commerçants même s’ils achètent leurs produits
comme les semences, les engrais ou les animaux qu’ils revendent ; par contre, les exploitations
agricoles modernes (d’agroalimentaire ou d’élevage industriel) ne peuvent être exclues du
domaine commercial.
16
Par contre, la location des immeubles reste civile.

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Mais si le contrat de vente est un contrat à exécution instantanée, le


contrat de fourniture est un contrat à exécution successive.
B - LA FOURNITURE
C’est le contrat par lequel le fournisseur s’engage, moyennant un prix, à
délivrer des produits qu’il se procure (achète) préalablement aux livraisons ou à
effectuer des services à ses clients, de manière périodique ou continue. C’est
pourquoi le contrat de fourniture est un contrat à exécution successive.
Par conséquent, la fourniture peut concerner aussi bien les biens que les
services.
Par «produits» il faut entendre les denrées et les marchandises (produits
alimentaires ou industriels), mais aussi actuellement l’eau, l’électricité et le gaz.
La fourniture peut également concerner les services. Les services dont il
est question ici sont ceux qui sont fournis de manière périodique et régulière ;
exemples : les services d’entretien et de réparations des appareils, machines,
véhicules…ou le service de gardiennage.
Et, dans le cadre de la politique d’extension de la commercialité de
certains services publics, le législateur de 1996 a intégré dans les activités
commerciales même les services rendus en matière de postes et
télécommunications (art. 6-18°).
§ 3 - LES ACTIVITES DE SERVICES
Il s’agit d’activités qui consistent à exécuter un travail au profit des clients
ou de mettre à leur disposition l’usage temporaire de certains biens.
Trois catégories d’activités de services se dégagent de l’art. 6.
A - LES SERVICES DE L’INTERMEDIATION
L’objet de ces activités réside seulement dans l’information, le conseil et
l’assistance aux tiers cocontractants.
a - Le courtage
C’est l’activité par laquelle une personne (le courtier) met deux personnes
en relation en vue de la conclusion d’un contrat.
Par conséquent, le courtier n’intervient d’aucune manière dans le contrat
conclu entre les personnes qu’il rapproche.

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b - La commission
Le contrat de commission est une variété de mandat en vertu duquel le
commissionnaire s’engage à réaliser des opérations tels que des achats ou des
ventes pour le compte du commettant, mais en son nom personnel.
À la différence du simple mandataire qui traite au nom de son mandant,
le commissionnaire contracte avec les tiers en son nom personnel. Les tiers
(les cocontractants) ne connaissent que le commissionnaire.
Dans la pratique, les commissionnaires sont désignés par des
dénominations techniques suivant leurs domaines de spécialisation : les
intermédiaires de la bourse (ou agents de change en France), les
commissionnaires de transport, les transitaires de douane, les mandataires des
halles, etc.
c - Les bureaux et agences d’affaires
Ce sont des activités qui consistent à administrer les affaires des autres
et à gérer leurs biens, moyennant rémunération. Les agences d’affaires peuvent
même être spécialisées dans certains domaines ; ces spécialités ont même été
prises en considération par le nouveau code qui cite expressément les agences
de voyages, les agences de publicité17 et les agences d’information18.
B - LES SERVICES FINANCIERS
C’est l’ensemble des activités qui ont pour objet la spéculation sur l’argent.
L’alinéa 7 de l’article 6 mentionne la banque, le crédit et les transactions
financières, mais il faut aussi ajouter les assurances (al. 8) qui visent d’ailleurs
la spéculation sur l’argent (les primes d’assurance).
Que veut-on dire par activités de banque, de crédit et de finance ?

17
- Ce sont toutes les agences de publicité qui interviennent entre les annonceurs et les médias
(télévision, radio, journaux…)
18 - Les agences d’information sont appelées en pratique les agences de renseignements

commerciaux ; elles sont spécialisées dans l’ingénierie financière, le marketing et tous les
services destinés à faciliter la création et le développement des entreprises.
On ne peut bien entendu exclure du domaine commercial les agences de presse ou les organes de
presse (journaux et périodiques autres que les journaux d’opinion) dans la mesure où
l’information est devenue une véritable industrie avec des moyens financiers et techniques
considérables à visée commerciale incontestée.

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Les définitions sont désormais données par la loi bancaire19.


1 - La banque
D’après la loi bancaire, les principales activités bancaires sont :
- la réception de fonds du public ;
- la distribution de crédits ;
- et la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement ou
leur gestion.
2 - Le crédit
Il consiste, d’après l’article 3 de la loi bancaire, en trois opérations, qui
doivent toutes être effectuées à titre onéreux20. Ces opérations sont :
- met ou s'oblige de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne,
à charge pour celle-ci de les rembourser ;
- ou prend dans l'intérêt d'une autre personne, un engagement par
signature sous forme d'aval, de cautionnement ou de toute autre garantie.
3 - Les transactions financières
Il s’agit en fait de l’activité des sociétés de financements telles que définies
par l’article 10, al.3 de la loi bancaire, comme les sociétés de crédit à la
consommation. C’est donc pour ce genre d’établissements que l’article 6 du code
de commerce a réservé ce concept de transactions financières qu’il a
délibérément séparé des autres concepts de la banque et du crédit.
4 - L’assurance
Le code de 1996 parle des opérations d’assurances «à primes fixes »,
c'est-à-dire les assurances du secteur commercial, pour les distinguer des
assurances mutuelles21.

19
- Dahir n° 1-05-178 du 14 février 2006 portant promulgation de la loi n° 34-03 relative aux
établissements de crédit et organismes assimilés. B.O. n° 5400 du 2 mars 2006 p. 298.
20
- C’est une condition essentielle, car les prêts concédés à titre gratuit ne sont pas considérés du
crédit.
21
Telles que la M.A.E.M. (Mutuelle d’Assurances des Enseignants du Maroc), et la M.A.M.D.A.
(Mutuelle Agricole Marocaine d’Assurance) et des organismes de prévoyance sociale telles que
la M.G.P.A.P.M. (Mutuelle Générale du Personnel des Administrations Publiques du Maroc), la
M.G.E.N. (la mutuelle générale de l’éducation nationale et les organismes à caractère social telles
que la CNSS (caisse nationale de la sécurité sociale) et la CIMR (caisse interprofessionnelle
marocaine de retraite).

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C - LES AUTRES SERVICES


Quatre activités prévues par l'article 6 peuvent être rangées dans ce
cadre.
1 – L'activité industrielle
L’art. 6-5° parle d’activité industrielle. Il s’agit de toute activité qui consiste
à effectuer des travaux sur des biens meubles22 ou immeubles.
Mais à la différence avec l'achat pour revente après transformation où il y
a achat de la matière première qui sera transformée pour être revendue, l'article
6 désigne par activités industrielles celles où les produits ou matières premières
sont fournis à l'industriel par ses clients à charges pour lui de les leur restituer
après transformation.
Mentionnons enfin dans le cadre des autres services, l'extension de la
commercialité pour la première fois à l’artisanat23, l’imprimerie et l’édition, le
bâtiment et les travaux publics.
L’activité industrielle peut également avoir pour objet les immeubles (les
entreprises ayant pour objet d’effectuer des travaux sur des immeubles tels que
le nivellement et le terrassement et qu’on appelait les manufactures
immobilières).
2 - La location de meubles
La location est une activité de service en vertu de laquelle le bailleur met
à la disposition de son locataire la jouissance temporaire de certains biens.
En vertu de l’art 6 - 1° et 2° toute location des biens meubles corporels
(voitures, machines, bijoux,…) ou incorporels (des films) est une activité
commerciale quelle que soit l’origine de ces biens, qu’ils soient achetés ou
seulement loués.
Le législateur de 1996 est resté muet sur les opérations de location des
immeubles. L’achat d’immeubles en vue de leur location demeure donc une
activité civile.

22
- Certaines activités telles que la blanchisserie peuvent entrer dans cette catégorie.
23
- Ce qui inclue aujourd’hui tous les petits artisans comme le coiffeur, le tailleur, le plombier,
l’électricien, le maçon ; actuellement même les chauffeurs de taxis indépendants, qui étaient jadis
assimilés aux artisans, n’échappent pas au droit commercial.

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3 - L’exploitation de locaux à usage public


Au sein de l’article 6 on dénombre quatre sortes de ces établissements.
- La vente aux enchères publiques : Il s’agit de l’exploitation de salles de
ventes aux enchères publiques des marchandises.
- L’exploitation de magasins généraux : ce sont des entrepôts dans
lesquels les marchandises sont déposées contre remise de titres négociables,
appelés récépissés - warrants, qui permettent la vente ou le nantissement de ces
marchandises sans leur déplacement.
- L’exploitation des entrepôts publics : ce sont également des locaux de
dépôt de marchandises mais, avec remise de simples reçus qui ne bénéficient
pas des vertus des récépissés - warrants. Exemple : les entrepôts des ports ou
des aéroports, les entrepôts frigorifiques, les garde-meubles, les garages de
voitures, etc.
- L’organisation de spectacles publics : il s’agit de l’organisation de
spectacles offerts au public dans des salles ou locaux destinés à cet effet dans
un but lucratif (théâtre, cinéma, salles de conférences et lieux des manifestations
sportives professionnelles).
Quant à l’industrie hôtelière (l’hôtellerie et la restauration), on ne peut
soutenir qu’il s’agit d’une activité civile.
4 - Le transport
La commercialité du transport se base sur le fait qu’il participe à la
circulation des richesses, qu’il s’agisse du transport des personnes ou des
marchandises et quel que soit le mode de transport.

Section II - LES ACTES DE COMMERCE


Les actes de commerce sont ceux qui ne peuvent être exercés à titre
professionnel, et leur pratique, même habituelle, ne confère pas la qualité de
commerçant à celui qui en fait usage, néanmoins elle donne lieu à l’application
des règles du droit commercial.
Rentrent dans cette catégorie les actes de commerce par la forme (art.9),
les actes de commerce par accessoire (art.10) et les actes mixtes (art.4).
§ I - LES ACTES DE COMMERCE PAR LA FORME
Les actes de commerce par la forme sont des actes qui sont toujours
commerciaux quelle que soit la qualité des parties (commerçants ou non

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commerçants) et quel que soit l’objet de l’opération qui leur donne naissance
(commerciale ou civile).
Ces actes sont la lettre de change et les sociétés commerciales.
A - LA LETTRE DE CHANGE
Du fait que la lettre de change est un acte de commerce par la forme, il en
résulte les conséquences suivantes :
1°/ Les personnes qui s’obligent par lettre de change sont soumises aux
règles du droit commercial.
2°/ La lettre de change est commerciale quelle que soit la cause pour
laquelle elle a été signée (civile ou commerciale).
Ceci distingue la lettre de change notamment du chèque dont la nature
dépend de la nature civile ou commerciale de la créance sous-jacente.
B - LES SOCIETES COMMERCIALES
En principe, les sociétés devraient, comme les personnes physiques,
obéir aux mêmes critères de la commercialité, c’est-à-dire qu’une société serait
civile ou commerciale suivant l’objet de son activité.
Cependant, la SA, la société en commandite par actions et la SARL,
même ayant un objet civil, sont devenues des sociétés commerciales par la forme
depuis la législation du protectorat.
De son côté, la loi 5/96 a rendu commerciales par la forme même la
société en nom collectif et et la société en commandite simple.
§ II - LES ACTES DE COMMERCE PAR ACCESSOIRE
L’article 10 du nouveau code stipule : « sont également réputés actes de
commerce, les faits et actes accomplis par le commerçant à l’occasion de son
commerce » ; ce sont donc les actes de commerce par accessoire.
Ces actes sont en réalité de nature civile et, lorsqu’ils sont effectués par
un commerçant pour les besoins de son commerce, ils acquièrent la qualité
d’actes de commerce. Exemple, le commerçant qui achète un camion pour livrer

16
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ses marchandises, ou du mobilier pour son agence d’affaires ou des machines


pour son usine, etc.24
Ces actes ne constituent pas l’objet du commerce du commerçant ou son
activité, il n’y a pas l’idée d’achat pour revendre. Donc, l’acte d’achat est en lui-
même un acte civil, mais qui devient commercial par accessoire à l’activité
commerciale du commerçant, on dit qu’il est commercial par accessoire.
Signalons enfin que l’article 9 de la loi 53/95 a attribué au tribunal de
commerce la compétence pour connaître de l’ensemble du litige commercial qui
comporte un objet civil et, donc, des actes de commerce par accessoire.
§ III - LES ACTES MIXTES
Ce sont des actes qui sont commerciaux pour une partie et civils pour
l’autre. Exemple : un consommateur qui achète des produits ou de la
marchandise chez un commerçant ; cet acte a une double qualité : il est civil pour
le consommateur et commercial pour le commerçant.
C’est le cas pour toutes les ventes au détail ou ventes à la consommation :
l’acte est commercial pour le vendeur et civil pour le consommateur.
Devant le silence du code de 1913, c’est la jurisprudence qui a toujours
décidé des règles à appliquer aux actes mixtes avant que le code de 1996 ne les
consacre légalement. Son article 4 dispose en effet que «lorsque l’acte est
commercial pour un contractant et civil pour l’autre, les règles du droit commercial
s’appliquent à la partie pour qui l’acte est commercial ; elles ne peuvent être
opposées à la partie pour qui l’acte est civil sauf disposition spéciale contraire ».
Par conséquent, les solutions consacrées précédemment par la doctrine
et la jurisprudence en matière des actes mixtes resteront toujours applicables :
1 - La compétence judiciaire

24 - On peut encore citer les crédits que le commerçant contracte pour le développement de son
entreprise, les contrats d’assurance relatifs aux opérations commerciales (les assurances
contractées en vue de l’obtention de crédits bancaires, les assurances relatives aux transports
des marchandises ou du personnel), les contrats d’assurance relatifs aux biens de
l’entreprise (assurance incendie des magasins, entrepôts), les contrats de travail conclus entre le
commerçant et ses employés, l’achat ou la location d’immeubles pour l’exercice du commerce,
etc.

17
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Actuellement, avec la création des tribunaux de commerce, la loi a confié


au commerçant de convenir avec le non commerçant d’attribuer la compétence
au tribunal de commerce pour connaître des litiges pouvant les opposer à
l’occasion de l’exercice de l’activité du commerçant.
2 - La preuve
La jurisprudence a appliqué le principe suivant lequel le régime des
preuves s’apprécie en fonction de la personne contre laquelle la preuve doit être
faite.
Par conséquent, dans un acte mixte :
- le commerçant ne peut invoquer la liberté de la preuve contre le non
commerçant, il ne peut établir la preuve à l’égard de ce dernier qu’en se
conformant aux règles du droit civil (nécessité d'un écrit lorsque l’opération
excède 250 dhs).
- inversement, lorsque le non commerçant doit fournir la preuve contre le
commerçant, la preuve sera libre pour lui (c’est-à-dire même par témoins).
3 - La prescription
# Avant le code de 1996 il était fait application des règles du D.O.C. qui
prévoyait deux prescriptions :
- une prescription de 5 ans, s’agissant d’obligations contractées entre
commerçants pour les besoins de leur commerce ;
- la prescription en matière civile de 15 ans.
# Actuellement, avec le nouveau code, lorsqu’il s’agit des actes mixtes,
cette prescription est unifiée ; l’article 5 a prévu désormais une seule prescription
de 5 ans, qu’il s’agisse de relations entre commerçants à l’occasion de leur
commerce ou de relations entre commerçants et non commerçants.

CHAPITRE II - LE SUJET DU DROIT


COMMERCIAL
Si les activités commerciales et les actes de commerce constituent l’objet
du droit commercial, le commerçant reste le sujet de ce droit.

Section I - DEFINITION DU COMMERÇANT

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La définition du commerçant résulte expressément de l’article 6 du


nouveau code qui stipule que la qualité de commerçant s’acquiert par l’exercice
habituel ou professionnel des activités commerciales.
Toutefois cette condition est insuffisante pour définir le commerçant, une
autre condition s’impose, à savoir l’exercice des activités commerciales pour son
propre compte.
§ I - L’EXERCICE HABITUEL OU PROFESSIONNEL DES ACTIVITÉS
COMMERCIALES
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que le commerçant est celui qui
exerce les activités commerciales, mais de manière habituelle ou
professionnelle.
Qu’est-ce que l’habitude et qu'est-ce que la profession ?
- L’habitude : veut dire une répétition régulière de l’activité commerciale,
autrement dit, l’exercice par entreprise des activités de l’article 6 ; en
conséquence, l’exercice occasionnel de ces activités ne peut plus qualifier un
commerçant. D’ailleurs, il ne faut pas oublier la condition supplémentaire de
l’article 6 concernant la publicité au registre du commerce.
- La profession : doit consister dans l’exercice d’une activité qui procure le
moyen de satisfaire aux besoins de l’existence de celui qui l’exerce.
Celui qui exerce une activité commerciale de manière habituelle doit tirer
de cet exercice tout ou une partie importante de ses moyens d’existence.
Encore faut-il qu’il le fasse pour son propre compte.
§ II - L’EXERCICE POUR SON PROPRE COMPTE
Il s’agit là d’une règle qui connaît néanmoins des exceptions.
A – LA RÈGLE
La qualité de commerçant s’acquiert en définitif par l’exercice habituel ou
professionnel des activités commerciales, mais pour son propre compte.
Autrement dit, la règle en la matière est la suivante : celui qui exerce des activités
commerciales, même s’il en fait sa profession habituelle, n’est pas un
commerçant tant qu’il le fait pour le compte d’autrui.
Le commerce suppose une indépendance totale dans l’exercice de la
profession. Il suppose aussi un certain risque : le commerçant peut faire des
bénéfices mais il peut aussi subir des pertes ; d’où la règle : tous ceux qui

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exercent le commerce pour le compte d’une autre personne et ne subissent pas


de risque ne sont pas des commerçants.
Rentrent dans cette catégorie les employés, dans la mesure où ils sont
subordonnés à leurs employeurs par un contrat de travail et restent indifférents
aux risques du commerce, et les mandataires qui ne font que représenter leurs
mandants dans le commerce (exemples les représentants de commerce et les
administrateurs des sociétés commerciales).
B - LES EXCEPTIONS
Certaines personnes, bien qu’elles agissent pour le compte d’autrui, sont
considérées des commerçants alors qu’elles ne remplissent pas la condition
d’indépendance corrélative au risque.
a - Les commissionnaires
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que le contrat de commission est
une sorte de mandat ; à ce titre, le commissionnaire ne devrait pas, en principe,
être considéré commerçant puisqu’il est un simple mandataire qui traite pour le
compte d’autrui, son commettant.
Nous avons vu aussi que le commissionnaire, à la différence du
mandataire, traite en son propre nom. Cependant, ce n’est pas pour cette raison
que le commissionnaire est un commerçant, mais parce qu’il exerce une activité
commerciale à part entière prévue par l’article 6-9° : la commission.
b - Les prête-noms
Le prête-nom est celui qui prête son nom dans des actes où le véritable
cocontractant ne peut ou ne veut pas voir figurer le sien.
C’est donc en apparence seulement que le prête-nom exerce le
commerce, c’est en apparence qu’il contracte avec les tiers en son nom et pour
son compte alors qu’en réalité, il le fait pour le compte d’autrui ; à ce titre, il ne
devrait pas être considéré commerçant.
Pourtant, vu l’importance accordée en droit commercial à la théorie de
l’apparence, le prête-nom est, sans hésitation, qualifié commerçant.

Section II - LA CONDITION JURIDIQUE DU


COMMERCANT

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Un commerçant doit satisfaire à des conditions relatives à la capacité


commerciale et à des conditions ayant trait aux restrictions à l’exercice du
commerce.
§ I - LA CAPACITE COMMERCIALE
Désormais, en vertu de nos textes, l’incapacité d’exercer le commerce
frappe seulement le mineur et le majeur interdit, quant à la femme mariée, elle
ne fait plus partie des incapables25, l'article 17 du code de commerce prévoit en
effet que "la femme mariée peut exercer le commerce sans autorisation de son
mari. Toute convention contraire est réputée nulle".
Le mineur est celui qui n’a pas atteint l’âge de la majorité qui est
actuellement fixé à 18 années grégoriennes révolues26 27,
Bien que l’article 218 du code de la famille prévoit que le mineur qui a
atteint l’âge de 16 ans puisse être émancipé par le tribunal, cette émancipation
ne lui permet de gérer ses biens que dans le domaine civil ; pour pouvoir exercer
le commerce, le code de commerce exige, en plus, une autorisation spéciale de
son tuteur.
§ II - LES RESTRICTIONS A LA LIBERTE DU COMMERCE
La liberté du commerce est un principe fondamental de notre droit,
consacré désormais par la constitution28.
Toutefois, cette liberté du commerce est limitée par certaines restrictions.
Le non-respect de ces restrictions est puni, suivant les cas, par des
sanctions disciplinaires ou administratives et même, le cas échéant, pénales.
En outre, les opérations commerciales effectuées par le contrevenant sont
considérés valables et peuvent le soumettre aux règles du droit commercial,
notamment celles relatives aux procédures de redressement et de liquidation
judiciaires.

25
- V. à ce sujet notre article paru dans le journal L’opinion du 21 mars 1996, p. 1, intitulé : «La
restauration du droit de la femme mariée à la liberté d’exercer le commerce».
26
Sous le dahir du 14 mars 1938, l'âge de la majorité était fixé à 25 ans, sous le dahir du 25
janvier 1958 formant CSP il est passé à 21 ans, ensuite à 20 ans par dahir du 11 juin 1992.
27
Depuis la modification de l’ancien code de statut personnel par le dahir du 24 mars 2003 (B.O
.n° 5096 du Jeudi 3 Avril 2003) prévu actuellement par l’article 209 du nouveau Code de la famille.
28
- L’article 15 de la constitution dispose que le droit d’entreprendre demeure garanti.

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Cette règle est maintenant consacrée expressément par l’article 11 du


code de commerce qui dispose que «toute personne qui, en dépit d’une
interdiction, d’une déchéance ou d’une incompatibilité, exerce habituellement
une activité commerciale, est réputé commerçant ».
A - LES INCOMPATIBILITÉS
Il arrive que certaines personnes exercent certaines professions, et cela
ne les empêche pas d’exercer le commerce en parallèle. Mais cette faculté n’est
pas toujours possible, car le législateur estime, pour différentes raisons, que
certaines professions sont incompatibles avec l’exercice du commerce, par
exemple les médecins, les avocats, les adouls, les notaires, les fonctionnaires,
etc.
B - LES DÉCHÉANCES
Il s’agit d’une autre restriction à l’exercice du commerce qui vise les
commerçants ou les postulants au commerce, c’est-à-dire les personnes qui ont
fait l’objet de certaines condamnations pénales (pour vol, escroquerie, abus de
confiance, émission de chèque sans provision, infractions fiscales ou douanières,
banqueroute, etc.) ou d’une liquidation judiciaire.
En outre, la déchéance commerciale emporte interdiction de diriger, toute
entreprise ayant une activité économique (art 711 code de commerce).
Ces déchéances résultent de divers textes législatifs spéciaux29 (ce sont
des déchéances de plein droit) mais, dans certains cas, elles doivent être
prononcées par jugement.
C - LES INTERDICTIONS
Au titre de cette restriction, le commerçant n’a pas le droit de postuler à
l’exercice de certaines activités commerciales :
- lorsque ces activités sont interdites par le législateur : par exemple
l’interdiction du commerce de la fausse monnaie (art. 335 C.P.), l’interdiction du
commerce lié aux jeux de hasard (art. 282 C.P.), l’interdiction du commerce des

29- Par exemple la loi bancaire du 6/7/1993 (art 31), la profession d’agent d’affaires : dahir du
12/1/1945, les agences de voyages : dahir portant loi du 8/10/1977, les pharmaciens : dahir du
19/2/1960, les intermédiaires d’assurances : dahir portant loi du 9/10/1977, etc.

22
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objets et images contraires aux mœurs (art. 59 dahir 15/11/1958 formant code
de la presse), le commerce des stupéfiants ;
- ou lorsque ces activités constituent un monopole de l’Etat : par exemple
la recherche du pétrole et du gaz, l’exploitation et le commerce des phosphates,
le transport ferroviaire, etc.
D - LES AUTORISATIONS
Il s’agit de l’interdiction d’exercer certaines activités commerciales sans
autorisation préalable des autorités administratives.
En effet, dans certains cas, une autorisation administrative, sous forme
d’agrément ou de licence, est nécessaire avant l’ouverture du commerce ou
l’exercice de certaines activités commerciales, par exemple :
- la vente des boissons alcooliques (qui est soumise, suivant le cas, à une
licence ou à une autorisation),
- les activités cinématographiques (notamment les clubs vidéo soumis à
une autorisation du C.C.M.),
- les agences de voyages (qui doivent être autorisées par le ministère du
tourisme),
- le transport public des personnes (soumis à des agréments du ministère
du transport), etc.
Dans d’autres cas l’existence de ces autorisations s’explique par des
exigences de la profession, par exemple l’ouverture d’une pharmacie nécessite
d’être titulaire d’un diplôme de pharmacien, les banques et les sociétés
d’assurances doivent être inscrites sur les listes de ces professions, etc.
Il faut ajouter que certaines activités ne peuvent être exercées que par des
personnes morales, par exemple les activités bancaires.

Section III - LES OBLIGATIONS DU COMMERCANT


En plus des obligations communes à toutes les entreprises économiques
(les obligations sociales, les obligations fiscales…), le commerçant est soumis à
des obligations spéciales, les unes nouvelles, les autres traditionnelles.
§1 – LES OBLIGATIONS NOUVELLES
En effet, dans le but d’assurer un meilleur contrôle fiscal, le code de 1996
a institué de nouvelles obligations à la charge des commerçants, il s’agit de :

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- l’obligation pour le commerçant, pour les besoins de son commerce,


d’ouvrir un compte dans un établissement bancaire ou dans Al Barid Bank qui
est une filiale du groupe Poste Maroc depuis le 8 juin 2010. (art.18) ;
- et l’obligation de payer par chèque barré ou par virement bancaire, toute
opération entre commerçants pour faits de commerce d’une valeur supérieure à
10000 dhs. L’inobservation de cette règle est passible d’une amende qui ne peut
être inférieure à 6% de la valeur payée autrement que par chèque ou virement
bancaire ; les deux commerçants, c’est-à-dire le créancier et le débiteur, sont
responsables solidairement du paiement de cette amende.
Mais ici surgissent 2 problèmes pratiques:
Le 1er : Chèque barré
Le 2ème : Le fractionnement des factures
 Comment le 1er problème a été réglé?
C'est en se basant sur l'article 311 al. 2 du code de commerce que, depuis
le 1er février 2011 un règlement interbancaire (du GPBM) a instauré l'obligation
des chèques pré-barrés et non endossables pour les clients patentés des
banques (les personnes morales, les entreprises individuelles et les professions
libérales).
L'article 311 dispose que: "Tout établissement bancaire… peut délivrer
des formules de chèques barrés d'avance et rendues, par une mention expresse
de l'établissement bancaire, non transmissibles par voie d'endossement, sauf au
profit d'un établissement bancaire ou d'un établissement assimilé"
 Comment le 2ème problème a été réglé?
La loi de finance 2016 a modifié l’article 11 CGI relatif aux charges non
déductibles en prévoyant:
« Ne sont déductibles du résultat fiscal que dans la limite de 10 000 dhs
par jour et par fournisseur, les dépenses afférentes aux charges visées à
l’article 10 dont le règlement n’est pas justifié par chèque barré non
endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement,
virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec
une créance à l’égard d’une même personne… »

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§2 – LA PUBLICITE AU REGISTRE DE COMMERCE


Le R.C. a pour rôle de faire connaître les commerçants, son objectif est
d’organiser une publicité juridique (non commerciale) sur le commerçant ; il
fournit aux tiers, qui sont en relation avec le commerçant, des informations
relatives à sa situation juridique et à ses activités commerciales.
C’est pour cette raison que le code de commerce a fait du R.C. un
document public ; toute personne peut se faire délivrer une copie ou un extrait
certifié des inscriptions qui y sont portées ou un certificat attestant l’inexistence
d’une inscription ou qu’une inscription a été rayée.
A - LE FONCTIONNEMENT DU R.C.
Comment est-il organisé ? Quelles sont les personnes assujetties à
l'immatriculation ? Et quelles sont les différentes inscriptions ?
a - L’organisation du R.C.
Le R.C. est constitué par des registres locaux et un registre central :
Les registres locaux sont actuellement institués auprès de chaque tribunal
de commerce ou de première instance le cas échéant ; ils sont tenus par le
secrétariat-greffe et leur fonctionnement est surveillé par le président du tribunal
ou par un juge désigné par lui.
Le registre central du commerce est tenu à l’office de la propriété
industrielle à Casablanca. Il a pour but :
- de centraliser toutes les déclarations contenues dans les registres locaux
que lui transmettent les secrétaires greffiers des tribunaux ;
- et de délivrer les certificats relatifs aux inscriptions portées sur le registre.
b - Les personnes assujetties
Toutes les personnes physiques et morales (sociétés commerciales, GIE),
de droit privé ou de droit public, marocaines ou étrangères exerçant une activité
commerciale sur le territoire marocain sont tenues de se faire immatriculer au
R.C. du tribunal où est situé leur siège.
L’immatriculation est également obligatoire lors de l’ouverture d’une
succursale ou d’une agence d’entreprise marocaine ou étrangère.
c - Les inscriptions au R.C.
Ces inscriptions sont au nombre de trois :

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1 - Les immatriculations
Il existe trois sortes d’immatriculations.
1°/ L’immatriculation principale
Tout commerçant, personne physique ou morale, doit se faire immatriculer
au R.C.; la demande d’immatriculation doit avoir lieu dans les 3 mois de
l’ouverture de l’établissement commercial ou de l’acquisition du fonds de
commerce pour les personnes physiques, et dans les trois mois de leur
constitution pour les personnes morales.
Mais il ne peut y avoir qu’une seule immatriculation. Il s’agit de la première
immatriculation au R.C. qu’on appelle immatriculation principale.
Ainsi, un commerçant (personne physique ou personne morale) ne peut
avoir qu’un seul numéro d’immatriculation à titre principal car, l’immatriculation a
un caractère personnel, c’est-à-dire qu’elle est rattachée au commerçant, non à
son activité commerciale ou à ses établissements de commerce. S’il est établi
qu’un commerçant possède des immatriculations principales dans plusieurs
registres locaux ou dans un même registre local sous plusieurs numéros, il peut
être sanctionné et le juge peut procéder d’office aux radiations nécessaires.
2°/ Les inscriptions complémentaires
Si le nouvel établissement se trouve dans le ressort du tribunal où la
personne assujettie a son immatriculation principale, il y a lieu seulement à
inscription complémentaire, il ne s’agit pas d’une immatriculation mais
uniquement d’une inscription modificative.
3°/ Les immatriculations secondaires
Si le nouvel établissement se situe dans le ressort d’un autre tribunal que
celui de l’immatriculation principale, il y a lieu à demander une immatriculation
secondaire au tribunal du lieu de la succursale ou de l’agence ou de la création
de la nouvelle activité, avec indication de l’immatriculation principale. Dans ce
cas, une inscription modificative doit également être portée au R.C. de
l’immatriculation principale.
Ces inscriptions sont nécessaires à l’occasion, et dans les 3 mois, de
l’ouverture des succursales ou agences ou de la création d’une nouvelle activité
par le commerçant déjà immatriculé au R.C., c’est-à-dire ayant au préalable une
immatriculation principale.

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Quant à la succursale, agence de sociétés commerciales ou de


commerçants dont le siège social ou l’établissement principal se trouve à
l’étranger, et la représentation commerciale ou agence commerciale de
collectivités ou établissements publics étrangers, elles doivent requérir une
immatriculation principale au R.C. du tribunal du lieu où le fonds de commerce
est exploité (Art. 41) dans les 3 mois de leur ouverture (Art. 75). En cas de
pluralité de fonds exploités, il est procédé suivant le cas, à inscription
complémentaire ou à immatriculation secondaire (Art. 41).
2 - Les inscriptions modificatives
Tout changement ou modification concernant les mentions qui figurent sur
le R.C. doit faire l’objet d’une demande d’inscription modificative (art. 50) dans le
mois suivant le changement.
Par exemple, pour les personnes morales les décisions modifiant les
statuts de la société (l’augmentation ou la diminution du capital social, la forme
juridique de la société, la dénomination sociale), la nomination de nouveaux
gérants, des membres des organes d’administration, etc.
3 - Les radiations
La radiation est le fait de rayer l’immatriculation du commerçant du R.C.
par exemple en cas de cessation totale de l’activité commerciale, en cas de
décès du commerçant, en cas de dissolution d’une société, etc.30
Les radiations peuvent être requises par les intéressés eux-mêmes, soit
opérées d'office par ordonnance du président du tribunal.
B - LES EFFETS DE L’IMMATRICULATION
a - Les effets à l'égard des personnes physiques
L’absence d’effets de l’immatriculation en vertu du dahir du 1 er septembre
1926 avait poussé la jurisprudence à juger que «la seule inscription au R.C. ne
suffit pas pour donner à la personne inscrite la qualité de commerçant »31.
L’immatriculation au R.C. ne constituait nullement une présomption d’être
commerçant.

30
- V. art. 51 à 57 code de commerce.
31
- TPI d’Oujda, 24 mai 1961, Revue Marocaine de Droit du 1/11/1961, pp. 415 - 417.

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1 - La présomption de commercialité
Désormais, avec le nouveau code de commerce, toute personne
immatriculée au R.C. est présumée avoir la qualité de commerçant.
Néanmoins, il faut souligner que le nouveau code ne s’est pas «aventuré »
jusqu’à donner à l’immatriculation l’effet d’une présomption irréfragable (ou
absolue), il s’est contenté de lui accorder une présomption simple, c’est-à-dire
susceptible de preuve contraire.
Ce qui veut dire que, sous l'ancien code, il appartenait au commerçant de
prouver qu'il est commerçant ; actuellement, c'est à l'adversaire de démontrer
qu'il n'est pas commerçant.
2 - Les effets du défaut d’immatriculation
En vertu de la politique du nouveau code de commerce, lorsque le
commerçant n'est pas immatriculé au registre de commerce :
- d’une part, il se voit privé de tous les droits dont bénéficient les
commerçants, par exemples : il ne peut produire ses documents comptables en
justice pour faire preuve, ni invoquer la prescription quinquennale à l’égard des
non commerçants, ni revendiquer le droit à la propriété commerciale, etc.
- d’autre part, il se trouve soumis à toutes les obligations des
commerçants, par exemple, quand c’est dans son intérêt, il ne peut invoquer le
défaut d’immatriculation pour se soustraire aux procédures de redressement ou
de liquidation judiciaires qui sont spéciales aux commerçants.
Enfin, le code de commerce sanctionne d’une amende de 1 000 à 5 000
dhs :
1°/ Tout commerçant, gérant ou membre des organes d’administration, de
direction ou de gestion d’une société commerciale, tout directeur d’une
succursale ou d’une agence d’un établissement ou d’une société commerciale,
tenu de se faire immatriculer au R.C. qui ne requiert pas dans les délais prescrits
les inscriptions obligatoires.
Cette amende concerne toutes les mesures d’inscription : le défaut
d’immatriculations, d’inscriptions complémentaires ou modificatives et le défaut
de radiation.
2°/ La même amende est encourue lorsque l’assujetti prend plusieurs
immatriculations principales.

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3°/ Elle frappe aussi tout manquement à l’obligation de mentionner le


numéro et le lieu de l’immatriculation au R.C. dans les documents de commerce
(factures, lettres, bons de commandes…).
b - Les effets à l’égard des personnes morales
Dans notre ancienne législation, l’immatriculation au R.C. n’était pas une
condition pour l’acquisition de la personnalité morale, une société commerciale
jouissait de la personnalité morale dès sa constitution, indépendamment de
l’immatriculation au R.C.
Actuellement, avec les nouvelles lois relatives aux sociétés, celles-ci ne
jouissent de la personnalité morale qu’à partir de leur immatriculation au R.C.
§ 3 - LA TENUE D’UNE COMPTABILITE
L’utilité de la comptabilité n’est plus aujourd’hui à démontrer, tant dans
l’intérêt du commerçant (bonne gestion et moyen de preuve) que de celui des
tiers (informations sur la situation du commerçant) ou de l’Etat (contrôle des
déclarations fiscales).
La tenue des livres de commerce était réglementée par le code de
commerce de 1913, cette réglementation s’est révélée dépassée par l’évolution
des pratiques commerciales et comptables.
Pour se mettre à jour par rapport à cette évolution, le législateur a du
intervenir par la loi 9-88 relative aux obligations comptables des commerçants,
promulguée par dahir du 25 décembre 199232.
A - LES LIVRES ET DOCUMENTS COMPTABLES
Désormais, notre législation actuelle ne dispense plus aucun commerçant,
aussi modeste que soit son commerce, de la tenue de la comptabilité
commerciale. L’article 1er de la loi 9-88 impose en effet à toute personne,
physique ou morale, ayant la qualité de commerçant de tenir une comptabilité
dans les formes qu’elle prescrit.
Dans ce but trois livres comptables sont obligatoires pour tous les
commerçants, à savoir :

32 - B.O. 30/12/1992, n° 4183 bis, p. 623.

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- le livre journal : C’est un registre où sont enregistrées


chronologiquement opération par opération et jour par jour les mouvements
affectant les actifs et les passifs de l’entreprise. On y enregistre par exemple
toutes les ventes et tous les achats de la journée, les factures payées, les salaires
versés…
- le grand livre : C’est un livre où sont reportées les écritures du livre -
journal ; il a pour objet de récapituler et d’enregistrer ces écritures suivant le plan
de comptes du commerçant. Il s’agit en quelque sorte d’un recueil de tous les
comptes ouverts par l’entreprise commerciale.
- et le livre d'inventaire : L’art. 5 de la loi impose aux commerçants de
dresser un inventaire des éléments actifs et passifs de l’entreprise au moins une
fois par exercice ; à cette fin, le commerçant doit tenir un livre d’inventaire sur
lequel il doit transcrire le bilan et le C.P.C. (compte des produits et charges) de
chaque exercice.
En outre, elle oblige les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est
supérieur à 10.000.000 dhs33 d’établir un certain nombre de documents
comptables supplémentaires tels que le manuel, l’état des soldes de gestion
(l’E.S.G.), le tableau de financement, l’état des informations
complémentaires (ETIC) et les états de synthèse annuels (ES).
B - LES REGLES RELATIVES À LA TENUE DE LA COMPTABILITE ET
LEURS SANCTIONS
Analysons d’abord ces règles, ensuite leurs sanctions.
a - Les règles
Afin de veiller sur l’authenticité des écritures comptables et la sincérité des
opérations effectuées par les commerçants, l’article 22 de la loi exige que les
documents comptables soient établis «sans blanc ni altération d’aucune sorte »,
c’est-à-dire qu’il est interdit de laisser des blancs susceptibles d’être remplis en
cas de besoin ou de biffer des écritures, celles-ci doivent, le cas échéant, tout

33
Article 4 de la loi modifié par l'article 1er de la loi n° 44-03 promulguée par le dahir
n° 1-05-211du 14 février 2006 ; B.O. n° 5404 du 16 mars 2006

30
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simplement être rectifiées par d’autres écritures en sens inverse, autrement dit
procéder à la contre-passation.
C’est d’ailleurs pour les mêmes raisons que l’article 8 dispose que le livre
journal et le livre d’inventaire sont cotés et paraphés sans frais par le greffier du
tribunal du siège de l’entreprise. Chaque livre reçoit un numéro répertorié par le
greffier sur un registre spécial. Ne sont pas tenues à cette obligation les
personnes physiques dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas deux millions
de dirhams (2.000.000 DH), à l'exception des agents d'assurances34.
Par ailleurs, l’article 22 exige des commerçants de conserver leurs
documents comptables et leurs pièces justificatives pendant 10 ans. L’article 26
du code de commerce les oblige, de son côté, de classer et conserver pendant
10 ans, à partir de leur date, les originaux des correspondances reçues et les
copies de celles envoyées.
 Pourquoi la conservation de 10 ans ?35

Ce délai s’explique par le fait que pour effectuer un contrôle fiscal,


l’administration peut souvent remonter au-delà de 4 ans pour vérifier les
justificatifs concernant un crédit de TVA, un déficit fiscal ou encore la variation de
stocks car il y a toujours un lien entre les exercices .

 Que faut-il garder?

 Les doubles des factures de vente ou des tickets de caisse


 Les pièces justificatives des dépenses et des investissements
 Les fiches des clients et des fournisseurs, ainsi que tout autre document
prévu
par la législation ou la réglementation en vigueur

34
Loi n° 44-03
35
Cette partie a été mise à jour grâce à la généreuse contribution de madame BOUYCHI NOURA
(fonctionnaire à la DGI Direction Générale des Impôts Rabat) dans le cadre du séminaire du
master S1 GFCF comptant pour l'année universitaire 2018/2019), avec mes remerciements à
cette valeureuse dame du terrain.

31
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 Tout document nécessaire au contrôle fiscal ou peut servir comme preuve


commerciale.

 Où les garder?

Les documents comptables doivent être gardés au siège social pour les
personnes morales ou le domicile fiscal pour les personnes physiques.

 La perte des documents comptables :

En cas de perte des documents comptables, pour quelque cause que ce


soit, les contribuables doivent en informer l'inspecteur des impôts, selon le cas,
de leur domicile fiscal, de leur siège social ou de leur principal établissement, par
lettre recommandée avec accusé de réception, dans les quinze (15) jours suivant
la date à laquelle ils ont constaté ladite perte. Ce délai est porté à trente (30)
jours, en cas de force majeure (Art 211 du CGI).

a-1 Compatibilité entre l’application des règles juridiques et la


comptabilité informatisée :

 Tenue d’une comptabilité électronique :

Selon l’article 145 du CGI, les contribuables doivent tenir leur comptabilité
sous format électronique selon les critères fixés par voie réglementaire. Ainsi, Ils
sont tenus de délivrer à leurs acheteurs ou clients des factures ou mémoires pré-
numérotés et tirés d’une série continue ou édités par un système informatique
selon une série continue.

Les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur le


revenu au titre des revenus professionnels déterminés selon le régime du résultat
net réel ou du résultat net simplifié ainsi que ceux assujettis à la taxe sur la valeur
ajoutée, doivent se doter d’un système informatique de facturation qui répond
aux critères techniques déterminés par l’administration.

Les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur


le revenu, au titre des revenus professionnels déterminés selon le régime du

32
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résultat net réel ou du résultat net simplifié ainsi que ceux assujettis à la taxe sur
la valeur ajoutée, doivent détenir une adresse électronique auprès d’un
prestataire de service de certification électronique, conformément à la législation
et à la réglementation en vigueur, permettant l’échange électronique entre
l’administration fiscale et les contribuables.

a-2 Présentation et conservation des documents comptables


sous format électronique

En cas de tenue de comptabilité par procédé électronique conformément


aux dispositions de l’article 145-I du CGI, les contribuables doivent conserver les
documents comptables précités sur support électronique.
Cette obligation est applicable essentiellement en cas de contrôle fiscal.
Elle concerne les contribuables qui tenaient déjà leur comptabilité sous format
électronique avant le 1er janvier 2018, de même que les contribuables assujettis
à cette mesure en 2018
Les documents comptables à présenter sur support électronique sont ceux
nécessaires au contrôle fiscal - visés à l'article 211 du CGI, le grand livre, le livre
d'inventaire, les inventaires détaillés non recopiés intégralement sur ce livre, le
livre-journal et les fiches des clients ainsi que des fournisseurs, aux côtés de tout
autre document prévu par la législation ou la réglementation en vigueur.
Soulignons que, par support électronique, la Direction Générale des
Impôts entend tout dispositif de stockage de données numérisées: CD, clé
USB,…

a-3 La tenue des livres côtés et paraphés est elle nécessaire


à l’ère informatisé?

Donc, après la généralisation des télé-procédures depuis 2017 et


l’obligation de tenir une comptabilité informatisée, le livre coté et paraphé devrait
être logiquement supprimé pour être remplacé par une application informatique
en ligne qui assure le même niveau de sécurité et d’authentification que la télé-
déclaration .

33
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b - Les sanctions
Les sanctions de ces formalités sont d’ordre fiscal et pénal.
1 - Les sanctions fiscales
Comme les documents comptables servent de base à l’établissement des
déclarations fiscales, ils peuvent faire l’objet de vérification de la part des
inspecteurs des impôts. Aussi, lorsque ces documents ne respectent pas les
normes prescrites par la loi 9-88, l’article 23 de cette dernière laisse la faculté à
l’administration des impôts de les rejeter et d’établir une imposition forfaitaire.
Elle peut même appliquer, le cas échéant, des sanctions pécuniaires
(majorations, indemnités de retard, etc.)
 Amendes fiscales :

Est punie d’une amende de 5000dhs à 50000dhs, toute personne qui utilise
l’un des moyens suivants :

• Délivrance ou production de factures fictives,

• Production d’écritures comptables fausses ou fictives,

• Vente sans facture de manière répétitive,

• Soustraction ou destruction de pièces comptables légalement exigibles,

• Dissimulation de tout ou partie de l’actif de la société, ou augmentation


d’une manière frauduleuse de son passif en vue d’organiser son
insolvabilité.

En cas de récidive :
• Avant l’expiration d’un délai de 5 ans, qui suit un jugement de
condamnation à l’amende précitée, ayant acquis l’autorité de la chose
jugée, le contrevenant est puni, outre de l’amende ci-dessus d’une peine
d’emprisonnement de (1) à (3) mois.

 Rejet de comptabilité

L’administration fiscale peut rejeter les comptabilités qui ne sont pas


tenues dans les formes prescrites par la loi, Article 23 de la loi 9-88 relative aux
obligations comptables des commerçants.
 Sanctions pour fraude ou complicité de fraude

Une amende égale à 100% du montant de l'impôt éludé est applicable à


toute personne ayant participé aux manœuvres destinées à éluder le paiement

34
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de l’impôt, assisté ou conseillé le contribuable dans l’exécution desdites


manœuvres, indépendamment de l’action disciplinaire si elle exerce une fonction
publique.
 Sanctions pour infractions aux dispositions relatives à la
présentation des documents comptables sur support
électronique

Une amende égale à 50 000 dhs, par exercice, est applicable aux
contribuables, qui tiennent une comptabilité par procédé électronique, et qui ne
présentent pas les documents comptables sur support électronique, dans le
cadre du contrôle fiscal (Art 191 bis du CGI)

2 - Les sanctions pénales


S’il s’avère que le commerçant a falsifié les livres et documents
comptables, il peut être poursuivi pour banqueroute ou pour fraude fiscale ou
pour faux en écriture du commerce.
D’un autre côté, en cas d’ouverture d’une procédure de traitement, les
dirigeants d’une entreprise individuelle ou à forme collective risquent d’être
poursuivis pour banqueroute36 lorsqu’il se révèle qu’ils ont tenu une comptabilité
fictive ou fait disparaître des documents comptables de l’entreprise ou de la
société ou s’ils se sont abstenus de tenir toute comptabilité prescrite par la loi.
Par ailleurs, la loi de finances 1996-1997 a, pour la première fois, incriminé
la fraude fiscale ; cette loi prévoit cinq faits qui peuvent constituer la fraude
fiscale, parmi lesquels la production d’une comptabilité fausse ou fictive et la
soustraction ou la destruction des documents comptables37.

36
- La sanction encourue est l’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de 10 000 à 100000
dhs ou l’une de ces deux peines seulement. Ces peines sont portées au double lorsque le
banqueroutier est dirigeant d’une société dont les actions sont cotées en bourse.
37
- La sanction prévue est l’amende de 5 000 à 50 000 dhs qu’il s’agisse de l’IS, de l’IGR ou de
la TVA (Art. 12, 13 et14 LF) ; en cas de récidive, le contrevenant est passible, en plus de cette
amende, d’un emprisonnement de 1 à 3 mois. (Il faut rappeler que l’emprisonnement ne peut être
prononcé que contre les personnes physiques, s’il s’agit d’une personne morale, il s’appliquera
à ses dirigeants). Ajoutons que ces infractions doivent être constatées par deux inspecteurs des
finances par procès-verbal.

35
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C - LA PREUVE PAR LES DOCUMENTS COMPTABLES


L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et non
des moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des autres
commerçants.
Si les principes techniques de la comptabilité ont été réglementés par la
loi 9-88, les règles relatives à la preuve sont demeurées prévues par le code de
commerce dans ses articles 19 à 26.
Deux sortes de questions se posent à ce sujet : l’une relative à la force
probante des documents comptables, l’autre concerne les modes de production
de ces documents en justice.
a - La force probante des documents comptables
En ce qui concerne la preuve, il y a lieu de distinguer deux hypothèses,
suivant que les documents comptables sont invoqués contre le commerçant qui
les tient ou qu’ils sont invoqués par lui contre les tiers.
1 - Les documents comptables sont invoqués comme preuve contre le
commerçant qui les tient
Cette hypothèse se présente de la manière suivante : un détaillant achète
de la marchandise de chez son fournisseur mais il prétend ne pas l’avoir reçue,
pourtant, dans les livres de ce détaillant, il est fait mention de sa réception. Dans
ce cas, le fournisseur peut-il invoquer les livres du détaillant comme preuve
contre ce dernier d’avoir reçu la marchandise ?
En réalité, ces écritures constituent un aveu du commerçant. C’est
pourquoi l’article 20 du nouveau code de commerce a prévu expressément que
les tiers peuvent opposer au commerçant le contenu de sa comptabilité ; mieux
encore, cette comptabilité peut servir de preuve contre lui alors même qu’elle soit
« irrégulièrement tenue ».
2 - Les documents comptables invoqués comme preuve par le
commerçant qui les tient
L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et non
des moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des tiers.
Néanmoins, il convient de distinguer, suivant que le tiers est un commerçant ou
un non-commerçant.

36
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

2-1/ La preuve est dirigée contre un commerçant


Des dispositions de l’article 438 DOC38 on a déduit une règle générale
suivant laquelle nul ne peut se constituer une preuve à soi-même.
L’article 19 du code de commerce déroge cependant à cette règle en
admettant qu’une comptabilité régulièrement tenue est admise par le juge pour
faire preuve entre les commerçants à raison des faits de commerce.
Par conséquent, en cas de litige entre commerçants à propos de leurs
affaires commerciales, chacun peut invoquer ses propres documents comptables
pour faire preuve contre l’autre, à condition qu’ils soient régulièrement tenus.
2-2/ La preuve est dirigée contre un non commerçant
Contrairement à l’hypothèse précédente où les commerçants se trouvent
à égalité des preuves, les documents comptables d’un commerçant ne peuvent,
en principe, revêtir une force probante à l’égard d’un non-commerçant. En plus
du fait que ce dernier n’a pas de moyens de défense pour faire face aux
documents du commerçant, il faut rappeler qu’en matière d’actes mixtes les
règles du droit commercial, notamment celle de la liberté de la preuve, ne
peuvent être opposées au non-commerçant (art. 4) ; ceci sans oublier que les
documents du commerçant sont des preuves de sa propre création.
Néanmoins, on peut trouver une atténuation à ce principe dans la
disposition de l’article 433 DOC qui a été reprise par l’article 21 du code 1996
suivant laquelle « lorsque les documents comptables correspondent à un double
qui se trouve entre les mains de la partie adverse, ils constituent pleine preuve
contre elle et en sa faveur ».
Il faut déduire de cet article qu’il suffit que le non-commerçant détienne
une copie de ces documents, pour que celle-ci constitue une preuve contre lui ou
en sa faveur39.
La question se pose en pratique à propos des relevés de comptes établis
par les banques à l’intention de leurs clients non commerçants. La jurisprudence

38
- V. art. 433 et suiv. D.O.C.
39
- Rappelons cependant que les tiers, commerçants ou non, peuvent invoquer en leur faveur la
comptabilité d’un commerçant sans avoir à en détenir un double (art. 20 code de commerce).

37
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

tantôt leur refuse la force probante, tantôt y puise un commencement de preuve,


tantôt enfin elle leur reconnaît une force probante40.
Mais le législateur, par principe, n’a pas fait d’exception à la règle de l’art.
4 relative aux actes mixtes ; bien au contraire, il a adopté une position explicite à
ce sujet en décidant que les relevés de comptes établis par les établissements
de crédit ne sont admis comme moyens de preuve qu’entre eux et leurs clients
commerçants.
b - Les modes de production en justice
Les documents comptables peuvent donc être invoqués en justice comme
preuve de leurs allégations soit par le commerçant qui les tient, dans ce cas il les
mettra de sa propre volonté entre les mains de la justice, soit par les tiers, et la
loi met à leur disposition deux procédés : la communication et la représentation.
Mais le juge peut ordonner d’office l’un ou l’autre de ces procédés, c’est-à-dire
sans que ce soit requis par les parties.
1 - La communication
« La communication est la production intégrale des documents
comptables ». Elle consiste donc pour le commerçant de mettre toute sa
comptabilité à la disposition de la partie adverse. L’article 24 laisse toutefois aux
parties de décider de la manière dont la communication doit être établie -
notamment la remise des documents à un expert - et à défaut d’accord, de les
déposer au secrétariat-greffe du tribunal.
C’est dire le danger que présente la communication pour le commerçant
qui verra tous les secrets de son commerce dévoilés à son adversaire.
C’est pourquoi l’article 24 du code de 1996 a prévu des cas exceptionnels
où la communication peut être ordonnée en justice, à savoir « les affaires de
succession, de partage, de redressement ou de liquidation judiciaire et dans les
autres cas où ces documents sont communs aux parties ».

40
- V. dans ce dernier sens, à titre d’exemple, TPI Casablanca, section commerciale, du
15/10/1987, aff. BCM c/ Barich Omar, n° 2547, RMD, 1987, n° 15, p. 306 qui a jugé que dans la
mesure où le relevé de compte établi par la banque est extrait de ses livres et registres
régulièrement tenus, sa contestation non appuyée par des moyens de preuve est insuffisante à lui
retirer sa valeur probante.

38
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

On remarquera donc que la communication se justifie dans ces affaires


par deux raisons : soit que les adversaires ont le même droit sur ces documents
(succession, partage de société, etc.), soit par la cessation de l’activité du
commerçant (redressement ou liquidation judiciaire, le commerçant ne courant
plus aucun danger à dévoiler sa comptabilité).
2 - La représentation
« La représentation consiste à extraire de la comptabilité les seules
écritures qui intéressent les litiges soumis au tribunal » (art. 23 code commerce).
Aussi, la représentation se distingue-t-elle de la communication en ce
que :
- seules les parties de la comptabilité qui concernent le litige en question
sont produites en justice ;
- les documents sont examinés par le juge lui-même ou par un expert
nommé par lui afin d’y extraire les écritures concernant le procès, ils ne peuvent
donc être confiés à l’adversaire ;
- enfin, et par conséquent, la représentation n’est pas limitée aux situations
énumérées par l’article 24.
Il reste à signaler que si le commerçant refuse, sur injonction du juge, de
produire sa comptabilité, ou s’il déclare ne pas avoir de comptabilité, le juge peut
déférer le serment à l’autre partie pour appuyer ses prétentions (art. 25).
Si cette dernière prête ce serment dit supplétoire41, elle sera alors crue sur
sa parole et gagnera son procès au détriment du commerçant qui a refusé de
produire sa comptabilité ou qui a déclaré ne pas en avoir.

Une nouvelle catégorie de commerçants est désormais dispensée de


l'obligation de tenir une comptabilité et de l'obligation de s'inscrire au registre de
commerce, ce sont les nouveaux auto–entrepreneurs.

Section IV – L'auto-entrepreneur

41
- Ce serment est appelé ainsi dans la mesure où il supplée à la production de preuve en faveur
de celui auquel il est déféré ; autrement dit, en cas d’absence de preuve, le serment lui est déféré.

39
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La loi 114/1342 a instauré un nouveau statut des auto-entrepreneurs. Son


objectif est de lutter contre l'informel pour deux raisons: limiter la concurrence
livrée par l'informel et surtout élargir l'assiette fiscale.
Au sens de la loi, l'auto-entrepreneur est toute personne physique
exerçant, à titre individuel, une activité industrielle, commerciale ou artisanale, ou
prestataire de services, dont le chiffre d'affaires annuel encaissé ne dépasse pas
:
• 500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales ;
• et 200.000 dirhams pour les prestations de services.
La liste des activités industrielles, commerciales et artisanales et la liste
des prestations de services sont fixées par voie réglementaire.
Plusieurs avantages sont associés à ce régime, notamment:
- du côté social, la population concernée devrait bénéficier d'une
couverture sociale;
- du point de vue formel, un allègement est prévu concernant la
contrainte de la domiciliation, puisque les auto-entrepreneurs peuvent
exercer leurs activités dans leur propre lieu de résidence ou dans un
local partagé entre plusieurs entreprises;
- sur le plan comptable, l'auto-entrepreneur est dispensé des lourdes
obligations comptables classiques, il est seulement tenu à une
comptabilité simplifiée de caisse, càd de tenir un registre des achats et
des ventes qui doit être visé par le responsable du service d'assiette
du lieu de son domicile fiscale43 ;

42
- Dahir n°1-15-06 du 29 rabii II 143 6 (19 février 2015) portant promulgation de la loi
n° 114-13 relative au statut de l'auto-entrepreneur. B.O. n° 6344 du 19 mars 2015.V.
aussi le décret n°2-15-257 du 10 avril 2015 fixant la composition et les modalités de
fonctionnement du conseil national de l'auto-entrepreneur; le décret n°2-15-258 du 10
avril 2015 pris en application des articles 5, 6 et 8 de la loi n°114-13 relative au statut de
l'auto-entrepreneur fixant les modalités d'inscription au registre des auto-entrepreneurs
et le décret n°2-15-263 du 10 avril 2015 relatif à l'exclusion des contribuables exerçant
certaines professions, activités et prestations de service du bénéfice du régime fiscal
applicable à l'auto-entrepreneur, B.O. n°6358 du 7/5/2015.
43
- V. la circulaire de la direction générale des impôts concernant le régime fiscal 2014 appliqué
aux auto-entrepreneurs, L'ECONOMISTE du 30 janvier 2014, P. 16

40
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

- sous l'angle fiscal, déjà la loi de finances de 2014, càd avant l'adoption
du projet de loi par le parlement, a prévu un taux de taxation très allégé
(1% du chiffre d'affaires pour le commerce, l'industrie et l'artisanat et
2% pour les prestations de services44;
- du point de vue juridique l'auto-entrepreneur est désormais dispensé
de l'obligation d'immatriculation au registre de commerce, ce dernier
est remplacé par un registre national des auto-entrepreneurs; la
gestion de ce registre est confiée à Barid Al Maghrib pour le compte
de l'Etat. Poste Maroc est chargée des inscriptions mais aussi de la
réception des déclarations du chiffre d'affaires, de collecter les impôts
et les cotisations sociales45.
 On constatera cependant que le texte n'évoque nulle part les
effets juridiques de l'inscription au registre national des auto-
entrepreneurs à l'instar du code de commerce concernant le
registre de commerce ! La question reste, faute d'inscription au
registre de commerce est-ce que l'auto-entrepreneur est quand
même un commerçant ? En tout cas puisqu'aucune réponse à
cette question ne figure dans le texte, légalement parlant, l'auto-
entrepreneur ne peut guère prétendre au statut de commerçant.
 cependant, en cas de dettes liées à son activité, tous ses biens
meubles et immeubles peuvent faire l'objet d'une saisie à
l'exception de sa résidence principale.

La radiation de l'auto-entrepreneur doit être opérée dès le dépassement


des seuils fixés par la loi46 durant deux exercices.
Dans ce cas, l'auto-entrepreneur devra muter en entreprise individuelle ou
en S.A.R.L. à associé unique avec toutes les contraintes que cela comporte.

44
- Il convient de noter que c'est un impôt libératoire de l'impôt sur le revenu.
45
V. L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2
46
- 500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales et
200.000 dirhams pour les prestations de services.

41
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Un observateur nous fait remarquer que "certains seront tentés de faire


en sorte de revenir au plafond pour continuer à payer des taux réduits, on
poussera encore les gens vers le noir"47

Une fois tous les actes de commerce et les activités commerciales étudiés
en tant qu’objet du croit commercial et la question relative au sujet du droit
commercial élucidée, une interrogation se pose automatiquement dans notre
esprit : pourquoi distinguer le domaine commercial du domaine civil ? C’est toute
la question de leur régime juridique.

Section V – LE REGIME JURIDIQUE DU DOMAINE


COMMERCIAL
Étudier le régime juridique des activités commerciales revient à relever
leurs particularités par rapport aux activités civiles.
§ I - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FOND
Les particularités des règles de droit commercial dans ce domaine sont
diverses. A ce niveau de notre étude, on dégagera seulement certaines règles
générales, à titre d'exemple, du droit commercial qui se distinguent foncièrement
de celles du droit civil.
1°/ La capacité
Les règles de la capacité en matière commerciale se distinguent
fondamentalement de celles du droit civil.
Pour exercer le commerce, le mineur ne doit pas seulement être
émancipé, mais aussi être autorisé à faire le commerce.
2°/ La solidarité
Il y a solidarité entre les débiteurs lorsque chacun d’eux est
personnellement tenu de la totalité de la dette. Face à plusieurs débiteurs d’une
même dette, le créancier a le choix de réclamer à chacun d’eux, individuellement
ou collectivement, le paiement de la totalité de la dette.

47
- L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2.

42
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En droit commun, c’est-à-dire dans les contrats civils «la solidarité entre
les débiteurs ne se présume pas » (art. 164 D.O.C.), elle doit être expressément
stipulée dans le contrat.
Mais en matière commerciale la solidarité est de droit : l’article 335 du
code 1996 dispose : « en matière commerciale la solidarité se présume » (V.
aussi art. 165 D.O.C.). Par conséquent, et contrairement au droit civil, pour
écarter l’application de la solidarité entre les commerçants une clause spéciale
doit être stipulée dans le contrat.
§ II - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FORME
Les règles de forme sont celles qui gouvernent l’organisation judiciaire, le
fonctionnement de la justice, les actes de procédure, le déroulement du procès,
la preuve, les décisions judiciaires, les recours, etc. Les règles du droit
commercial se distinguent aussi dans ce domaine par rapport à celles du droit
civil à bien des égards.
1°/ La compétence judiciaire
La compétence judiciaire en matière commerciale appartient désormais
aux tribunaux de commerce48.
2°/ La preuve
En droit civil, la règle en matière de preuve est clairement exprimée par
l’article 443 D.O.C. qui exige la preuve par écrit pour toute demande en justice
qui dépasse la somme de 250 dhs.
En droit commercial, le principe est la liberté de la preuve. C’est-à-dire
que dans les affaires qui opposent les commerçants, il n’est pas nécessaire
d’établir la preuve par écrit (article 334 du code 1996).
Cependant, si une disposition législative ou une clause conventionnelle
l’exige, la preuve doit être rapportée par écrit, par exemple la loi exige un écrit en
matières de vente et de nantissement du fonds de commerce, des contrats de
sociétés commerciales, des effets de commerce, etc.

48
V. Introduction les juridictions de commerce.

43
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

3°/ Le redressement et la liquidation judiciaires


Ces procédures sont particulières au droit commercial. Elles ont
remplacé la procédure de la faillite prévue par l'ancien code de commerce. Elles
constituent une garantie qui a pour but de protéger les créanciers contre leurs
débiteurs commerçants défaillants.
Lorsque la cessation de paiement du commerçant est dûment constatée,
ses créanciers doivent engager à son égard une procédure collective ; ils ne
peuvent poursuivre le débiteur de manière individuelle. Ils doivent se grouper
dans leur action et se faire représenter par un syndic. Tout d’abord, une
procédure de redressement est tentée et, en cas d’échec, il est procédé soit à la
cession (vente de l’entreprise), soit à la liquidation des biens du commerçant.
Par contre, un non commerçant qui refuse de payer ses dettes, ne peut
être assujetti à ces procédures collectives, il est déclaré en état de déconfiture.
Chaque créancier exerce son action de manière individuelle. Celui qui l’assignera
en paiement le premier, sera payé en priorité, après avoir exercé ses droits sur
le patrimoine du débiteur (c’est pourquoi on parle dans ce domaine du prix de la
course).

4° / La prescription
Dans le domaine civil, le délai de prescription est de 15 ans.
Mais en matière commerciale ce délai n’est que de 5 ans. Ce court délai
s’explique :
- d’une part, par l’application du principe de la liberté de la preuve entre
les commerçants ;
- d’autre part, par le fait que, par la tenue de leur comptabilité, les
commerçants sont en mesure de se rendre compte de l’état de leurs créances.
Par conséquent, le délai de 5 ans est largement suffisant pour pouvoir les
réclamer.

44
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

DEUXIEME PARTIE :

LES INSTRUMENTS DU COMMERCE


Il s'agit des effets de commerce et du fonds de commerce.

CHAPITRE 1 – LES EFFETS DE COMMERCE


Il s’agit de la lettre de change, du billet à ordre et du chèque.

Section 1 – LA LETTRE DE CHANGE


La lettre de change (ou traite) est un écrit par lequel une personne (tireur)
donne l’ordre à l’un de ses débiteurs (tiré) de payer une certaine somme à une
date donnée à une troisième personne (bénéficiaire) ou à son ordre (c’est-à-dire
à une personne qu’elle désignera ultérieurement).
A l’origine, la lettre de change était un moyen de change, c’est-à-dire un
instrument de transport d’argent dans le commerce international49.
Elle devient ensuite un instrument de paiement par lequel les débiteurs
payaient leurs créanciers ; mais elle n’est pas une monnaie car elle n’est
libératoire que si elle est effectivement payée.
Actuellement, la lettre de change est devenue un instrument de crédit car
le tireur peut l’escompter, c’est-à-dire la céder à un banquier qui lui en versera
par anticipation le montant principal sous déduction d’une retenue correspondant
à la commission (prix du service) et aux intérêts restant à courir jusqu’à
encaissement du titre. L’escompte est un des moyens que les commerçants
utilisent pour renflouer leur trésorerie en évitant l’attente du paiement à terme.
Contrairement au chèque et au billet à ordre, la lettre de change est un
acte de commerce par la forme, c’est-à-dire qu’elle est commerciale quelles que

49
- C’est le cas d’un commerçant qui veut se rendre à l’étranger pour conclure des opérations
commerciales ; il va fournir les fonds nécessaires à son banquier (en monnaie locale) contre
lesquels il lui remet une lettre adressée à son banquier correspondant dans le pays où le
commerçant compte se rendre. Une fois sur place, ce dernier présente la lettre à la banque
destinataire pour se faire payer la somme mentionnée dans la monnaie de ce pays. D’où le nom
de lettre de change.

45
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soient les personnes qui l’utilisent (commerçants ou non) et quel que soit l’objet
de la créance pour laquelle elle a été émise (civile ou commerciale).
La lettre de change est actuellement réglementée par les articles 159 à
231 du code de commerce de 1996.
Nous étudierons successivement l’émission de la lettre de change,
l’acceptation, les garanties de paiement, la circulation, le paiement, les obstacles
au paiement, enfin les recours faute de paiement.
§ 1 – L’EMISSION DE LA LETTRE DE CHANGE
Pour émettre une lettre de change, il faut respecter ses conditions de
validité qui sont soumises à des sanctions.
A – CONDITIONS DE VALIDITE
a – La capacité
La faculté de souscrire une lettre de change est soumise à une condition
de fond : tout signataire doit avoir la capacité de faire le commerce car, en vertu
de l’article 9 du code de commerce, la lettre de change est toujours un acte de
commerce.
b – Les mentions obligatoires
Titre solennel, la lettre de change n’est valable comme telle que si elle
contient un certain nombre de mentions obligatoires :
- La dénomination «lettre de change» insérée dans le texte,
- Le mandat pur et simple de payer une somme d’argent : « Payez »,
- L’indication de la date et du lieu où la lettre est créée,
- La signature du tireur,
- Le montant à payer,
- L'échéance,
- Le nom du tiré,
- Le lieu de paiement,
- et le nom du bénéficiaire.
Signalons que la domiciliation n’est qu’une mention facultative qui rend la
traite payable au domicile d’un tiers et qui permet de faire effectuer le paiement
des échéances d’un prêt, d’un achat à crédit ou même les factures périodiques
par la banque.

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B – SANCTION DE LA VALIDITÉ DE LA LETTRE DE CHANGE


a – Les omissions dans les mentions obligatoires
A défaut de contenir les mentions obligatoires, le titre est nul (article 160)
et ne vaut que comme un engagement ordinaire (telle qu’une cession de créance
ou une reconnaissance de dette s’il en remplit les conditions). Le porteur de
bonne foi perd ainsi toutes ses garanties cambiaires de paiement.
b – L’incapacité
L’article 164 code de commerce prévoit que «la lettre de change souscrite
par un mineur non commerçant est nulle à son égard, sauf les droits des parties
conformément au droit commun», c’est-à-dire le droit de le poursuivre civilement
dans la mesure où il reste tenu de son enrichissement.
Mais la signature du mineur sur une lettre de change ne porte pas atteinte
à la validité des autres signatures en raison du principe de l’indépendance des
signatures.
§ 2 – L’ACCEPTATION
A – FORMES ET MODALITES
L’acceptation est l’engagement du tiré donné sur la lettre par signature de
payer son montant à l’échéance à la personne qui en sera le porteur légitime
auquel il ne pourra opposer aucune exception (par exemple défaut de provision,
compensation50 à l’égard du tireur ou d’un précédent porteur, etc.).
L’acceptation est exprimée par le mot « acceptée » et la signature du tiré
au recto, mais souvent elle résulte de sa simple signature.
En principe, la présentation de la lettre de change à l’acceptation n’est pas
obligatoire ; cependant, une lettre sans acceptation est difficilement négociable
car le tiré pourrait refuser de payer.
Le plus souvent, elle est présentée à l’acceptation par le tireur lui-même
pour pouvoir la négocier facilement puisque, à l’égard du porteur, elle constitue
une garantie d’être payé à l’échéance.

50
- La compensation est l’extinction réciproque de deux dettes.

47
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B – CONSEQUENCES DE L’ACCEPTATION
a – Provision et valeur fournie
1 – Constitution de la provision
La créance du tireur sur le tiré s’appelle la provision. La provision est une
créance en somme d’argent ou en marchandises que le tireur détient sur le tiré.
Celui-ci est débiteur de la provision dès son acceptation (sa signature).
L’absence de provision ne frappe pas le titre de nullité, mais le rend
inopérant. Dans la pratique, c’est l’existence de la provision qui détermine
l’acceptation du tiré.
2 – Propriété de la provision
La remise du titre par le tireur au porteur confère à ce dernier la propriété
de la provision, laquelle peut être à nouveau transmise par endossement à un
nouveau bénéficiaire, et ainsi de suite, jusqu’à présentation de l’effet pour
escompte ou encaissement.
3 – La valeur fournie
Si le tireur a émis la traite au profit du bénéficiaire, c’est que ce dernier a
une créance chez le premier ; autrement dit, le tireur est débiteur du bénéficiaire,
celui-ci a du lui fournir une valeur en échange de laquelle le tireur lui a remis la
traite. Cette créance s’appelle «la valeur fournie».
b – Inopposabilité des exceptions du tiré au porteur
Le tiré accepteur ne peut pas opposer au porteur les exceptions que lui-
même aurait pu opposer au tireur ou aux porteurs précédents (article 171).
Exemples :
- l’exception de compensation à l’égard du tireur ou d’un porteur antérieur,
- l’exception basée sur l’absence de cause (inexécution de l’obligation du
tireur), etc.
Dans tous les cas, le porteur ne peut se prévaloir de l’inopposabilité des
exceptions que si le tiré a accepté la traite.
c – Les exceptions opposables au porteur
Cette règle de l’inopposabilité des exceptions n’est cependant pas
absolue ; autrement dit, il existe bien des exceptions que le tiré peut opposer au
porteur. Tels sont les cas lorsque :

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- le tiré a une exception personnelle contre le porteur (compensation par


exemple) ;
- le tiré prouve que le porteur « a agi sciemment » à son détriment ; par
exemple, sachant que le tiré lui opposerait une exception de
compensation, le tireur, en connivence avec un tiers, endosse la traite au
profit de ce dernier, ce nouveau porteur serait de mauvaise foi, car il aurait
agi sciemment au détriment du tiré ;
- le tiré découvre des exceptions résultant du droit cambiaire (défaut d’une
mention obligatoire, une incapacité, etc.).
d – Les effets de complaisance et de cavalerie
Cette règle suivant laquelle la provision n’est indispensable qu’à
l’échéance a donné naissance à des pratiques contraires au but recherché par le
législateur.
Une première pratique consiste en ce qu’on appelle «les tirages en l’air» :
c’est le fait de tirer des lettres de changes sur des personnes imaginaires, c’est
une pratique susceptible de sanctions pénales.
Mais la pratique la plus répandue pendant les périodes de crises
financières est celle des effets de complaisance et de cavalerie.
La pratique de la traite de complaisance se résume de la manière
suivante : un commerçant qui a un besoin urgent de liquidités tire une lettre de
change et la présente à un ami commerçant, le tiré qui est insolvable mais qui
accepte da la signer « par complaisance » bien qu’il n’ait aucune dette à son
égard. Aussitôt, le tireur la fait escompter par son banquier et bénéficie ainsi d’un
crédit à court terme.
A l’échéance, aucun problème ne se poserait si le tireur verse au tiré les
fonds nécessaires, ou si le tiré solvable paie la traite en consentant ainsi un crédit
au tireur. Dans ces cas la traite de complaisance est tout à fait licite, c’est ce
qu’on peut appeler les «bons effets de complaisance».
Mais la situation risque de se compliquer si, à l’échéance, le tireur ne
dispose pas de fonds à verser au tiré. Dans ce cas, il tire une autre lettre qu’il fait
accepter par le même tiré ou par un autre commerçant et la fait escompter pour
obtenir les fonds à fournir au premier tiré et ainsi de suite... Par ce

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chevauchement, ces effets de complaisance deviennent ce qu’on appelle « des


effets de cavalerie ».
Le plus souvent, durant les périodes de difficultés économiques, ces
tirages se font de manière réciproque, c’est-à-dire que les commerçants tirent
indéfiniment les uns sur les autres ; on est alors en présence de ce qu’on appelle
« les tirages croisés ».
§ 3 – LES GARANTIES DE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
Pour une efficacité nécessaire au paiement du titre, le législateur prévoit
des mesures de garantie qui font tout l’intérêt de la lettre de change ; il s’agit du
principe du transfert de la propriété de la provision, de la solidarité et de l’aval.
A – LE TRANSFERT DE LA PROPIETE DE LA PROVISION
«La propriété de la provision est transmise de droit aux porteurs successifs
de la lettre de change» dit l’article 166 alinéa 4.
C’est le fameux principe de «la propriété de la provision» qui constitue une
garantie solide de paiement. Il résulte en effet de ce principe qu’une fois la lettre
émise, le tiré (qui en a connaissance par l’acceptation) ne peut plus valablement
payer le tireur (son créancier) ; sinon, il sera tenu à l’échéance de payer, une
seconde fois, le porteur.
En outre, en vertu de ce principe :
- le décès ou l’incapacité du tireur après l’émission sont sans influence sur
le droit du porteur sur la propriété de la provision ;
- le redressement ou la liquidation judiciaire du tireur n’ont pas d’effet sur
le droit du porteur de la lettre de change qui devient créancier direct du
tiré ;
- les créanciers du tireur ne peuvent former une saisie-arrêt entre les
mains du tiré sur la somme de la lettre de change ;
- enfin, le tireur ne peut former opposition au paiement de la lettre qu’en
cas de perte ou de vol de celle-ci ou de redressement ou de liquidation
judiciaire du porteur (article 189).
B – LA SOLIDARITE
C’est un principe général du droit commercial qui s’applique à la garantie
de paiement de la lettre de change. Tous ceux qui ont tiré, accepté, endossé ou
avalisé une lettre de change, c’est-à-dire tous les signataires, sont solidairement

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tenus de son paiement envers le dernier porteur qui, suivant ce principe légal,
peut réclamer à l’un ou plusieurs d’entre eux son montant total.
Le signataire poursuivi ne peut opposer au porteur les exceptions fondées
sur ses rapports avec le tireur ou avec les porteurs antérieurs .
Ce même droit (la solidarité) appartiendra à celui qui a remboursé la lettre
de change.
C – L’AVAL
Le donneur d’aval (avaliseur ou avaliste) est celui qui se porte caution de
la créance. Il garantit personnellement le paiement de tout ou partie de la lettre
de change.
L’aval est donné sur la lettre avec la mention «bon pour aval» et la
signature ; il peut être donné aussi sur une allonge ou par un acte séparé.
L’avaliseur est la caution solidaire du signataire en faveur duquel il s’est
engagé (l’avalisé). Il doit préciser pour quel signataire il s’engage, à défaut il est
réputé donné au tireur (article 180).
S’il a payé pour l’avalisé défaillant, il a un droit de recours non seulement
contre lui, mais contre tout autre signataire de la lettre en vertu du principe
cambiaire de la solidarité.
§ 4 – LA CIRCULATION DE LA LETTRE DE CHANGE
En tant que titre à ordre, la lettre de change est un effet destiné à circuler
en permettant la circulation de capitaux sans risque. Cette circulation s’opère par
la technique de l’endossement, c’est-à-dire par une mention écrite portée au dos
du titre et la signature.
Mais l’endossement ne permet pas seulement de transférer la propriété
de la lettre, il peut servir aussi pour donner la traite en garantie ou la remettre
pour encaissement par procuration.
A – L’ENDOSSEMENT TRANSLATIF DE PRORIETE
Cet endossement a pour effet de transférer la propriété de la lettre de
change de l’endosseur à l’endossataire (créancier de l’endosseur). Il se fait par
simple signature au dos. L’endossement peut être :
- nominatif : il porte la mention « payez à l’ordre de X », le nom du
bénéficiaire est alors précisé ;
- ou en blanc : il résulte de la simple signature au dos du titre, sans
indication du bénéficiaire et permet le transfert par tradition manuelle,

51
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c’est-à-dire par simple remise matérielle du titre. Le porteur peut remplir le


blanc en y inscrivant son propre nom ou celui d’un nouveau bénéficiaire
(souvent le banquier) ;
- ou encore au porteur : il vaut comme un endossement en blanc51.
Cependant, il convient de préciser que le tireur a la possibilité d’exprimer
sa volonté de ne pas transmettre la lettre ; il lui suffit d’insérer dans la traite les
mots : « non à ordre » ou « non endossable », auquel cas le titre ne peut se
transmettre que par cession de créance selon l’article 195 DOC, il sera alors
dépourvu des effets du droit cambiaire.
Comme l’endosseur est aussi garant de l’acceptation et du paiement, il
peut également interdire un nouvel endossement.
B – L’ENDOSSEMENT PAR PROCURATION
Il résulte de l’endossement accompagné de la mention «valeur en
recouvrement» ou «pour encaissement» ou «par procuration». Il donne mandat
à l’endossataire, qui est le plus souvent un banquier, de recouvrer le montant de
l’effet. Il laisse subsister les exceptions opposables à l’endosseur.
Il faut bien distinguer l’encaissement de l’escompte. A l’encaissement, la
banque ne paie le porteur qu’après avoir encaissé l’effet, alors qu’à l’escompte
la banque crédite le porteur avant échéance du titre. Dans le premier cas, il s’agit
d’un encaissement sans risque pour le banquier et dans le second cas, il s’agit
d’un crédit qu’il consent au bénéficiaire.
C – L’ENDOSSEMENT PIGNORATIF
On le reconnaît à la mention «valeur en garantie» ou «en gage» suivie de
la signature. Il permet de donner la lettre au porteur, à titre de gage, c’est-à-dire
en garantie de la créance. L’endossataire n’est que le possesseur du titre, il ne
peut l’endosser car il n’en a pas la propriété, et s’il le fait, il ne sera considéré que
comme un endossement à titre de procuration (article 172 al. 4).
D’un autre côté, selon l’article 172, l’endossataire peut exercer tous les
droits dérivant de la lettre de change, ce qui veut dire que si son débiteur

51
- Rappelons que s’il est possible d’endosser une lettre de change au porteur, il est interdit de
l’émettre au porteur.

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(l’endosseur) ne lui règle pas la dette à son terme, il peut présenter la lettre au
tiré à l’échéance pour se faire payer de sa créance. Le tiré ne peut lui opposer
les exceptions de l’endosseur.
§ 5 – LE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
A – L’ECHEANCE
L’échéance est la date de paiement de la lettre de change. Celle-ci peut
être tirée :
- «à vue» ou sans indication d’échéance : la traite est payable à la
présentation, c’est-à-dire dès le jour de son émission ; dans ce cas, elle
doit être présentée au paiement dans le délai d’un an à partir de sa date,
le tireur peut abréger ce délai ou en stipuler un plus long, quant aux
endosseurs, ils ne peuvent que l’abréger (article 182).
- A un délai de vue : elle est payable après un délai préfixé qui court de
l’acceptation, par exemple : dans 5 jours, 2 semaines, 2 mois, etc. de
l’acceptation par le tiré.
- A un délai de date : le délai court de la date d’émission de l’effet, par
exemple : payez dans 20 jours.
- A jour fixe : elle est payable à la date indiquée.
Le juge ne peut accorder de délais de grâce (article 231).
B – LA PRESENTATION AU PAIEMENT
a – Lieu et date de la présentation
La présentation doit être effectuée au lieu désigné, au jour de l’échéance
ou l’un des 5 jours ouvrables qui suivent. Sans mention particulière de lieu, c’est
le domicile du tiré qui détermine le lieu de paiement.
La mention de domiciliation, très fréquente, permet de fixer le lieu de
paiement à un endroit convenu, autre que celui du tiré. Dans la pratique, il s’agit
le plus souvent du domicile de la banque, celle-ci n’acceptant l’escompte que
lorsque le titre est domicilié.
b – La perception du montant de la créance
Tout porteur en apparence régulier peut se présenter pour obtenir
paiement de la lettre de change. Corrélativement, il suffit que le payeur soit de
bonne foi pour qu’il soit libéré. Le tiré doit simplement s’assurer de la régularité

53
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des endossements en leur forme sans qu’il soit contraint de vérifier les signatures
(article 186).
§ 6 – LES OBSTACLES AU PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE
A – L’OPPOSITION AU PAIEMENT
La loi interdit l’opposition, sauf dans trois cas : perte ou vol de la traite et
la situation de règlement judiciaire du porteur (article 189).
Il appartient au porteur ayant perdu le titre de faire opposition auprès du
tiré afin d’empêcher le paiement du titre à tout porteur illégitime : celui qui aura
trouvé le titre. Le paiement à qui de droit ne pourra alors se faire que :
- sur autorisation du président du tribunal,
- après avoir fait opposition aux mains du tiré,
- donné caution,
- et justifié de sa propriété de la lettre de change (article 192).
Dans le deuxième cas, le syndic du porteur en règlement judiciaire pourra
faire opposition au tiré et se faire payer à lui-même pour intégrer la créance dans
l’actif de la procédure collective.
B – LE REFUS DE PAIEMENT
En cas de refus de paiement du tiré, le porteur qui bénéficie de garanties
étendues peut exercer un recours contre tous les signataires de la lettre de
change tenus à en garantir le paiement. Il doit faire dresser un protêt «faute de
paiement».
a – Le protêt
C’est un acte authentique dressé par un agent du greffe du tribunal qui
constate officiellement le refus de paiement et les motifs du refus.
Le protêt doit contenir la transcription littérale de la lettre de change, de
l’acceptation, des endossements et des recommandations qui y sont indiquées,
la sommation de payer le montant de la lettre, les motifs du refus de paiement et
indiquer la présence ou l’absence de celui qui doit payer.
Celui qui a fait dresser protêt avise également son endosseur dans les 6
jours, lequel avise à son tour son endosseur dans les 3 jours et ainsi de suite
jusqu’au tireur. Aucun formalisme n’est requis pour l’avis. De son côté, l’agent
notificateur doit, dans les 3 jours qui suivent le protêt, prévenir le tireur par la
poste et par lettre recommandée.

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b – Le cas de dispense du protêt


Cependant, si la lettre porte la mention «retour sans frais» ou «sans
protêt», le porteur est dispensé de la procédure du protêt. S’il le fait quand même,
il en supporte les frais. Cette clause évite au porteur les lenteurs et les coûts non
négligeables de cette procédure.
§ 7 – LES RECOURS
Il convient de distinguer le porteur diligent du porteur négligent. Le premier
est celui qui présente la lettre de change dans les délais légaux et fait dresser à
temps un protêt en cas de non-paiement ; le second est celui qui n’a pas observé
ces prescriptions.
A – LES RECOURS DU PORTEUR DILIGENT
A l’échéance, le porteur diligent, qui a présenté la traite et fait dresser
protêt, peut obtenir remboursement du montant de la lettre, des intérêts, des frais
de protêt et des avis en actionnant les signataires ou l’un d’eux devant le tribunal ;
le même droit de recours appartient à tout signataire qui a remboursé le porteur ;
B – LES DECHEANCES DU PORTEUR NEGLIGENT
Le porteur négligent perd tous les recours cambiaires contre tous les
signataires de la traite (article 206), sauf :
- contre le tireur qui n’a pas fourni provision : la déchéance à son égard
n’aura lieu que s’il justifie avoir constitué provision ;
- contre le tiré accepteur car, ayant reçu provision, il ne peut se dérober
de son engagement sous prétexte de la négligence du porteur ;
- enfin, contre l’avaliste qui a donné aval pour le compte du tiré car, sans
cette précision, il est censé l’avoir donné pour le compte du tireur.
C – LES PRESCRIPTIONS DES RECOURS
Ce sont des délais très brefs fixés par le législateur en dehors desquels
aucune action cambiaire ne peut plus être exercée ; on dit qu’elle est prescrite.
En matière de lettre de change :
- l’action cambiaire contre le tiré accepteur se prescrit par 3 ans à compter
de l’échéance,
- celle du porteur contre les endosseurs et contre le tireur par 1 an à dater
du protêt,
- enfin les actions des endosseurs entre eux et contre le tireur se
prescrivent par 6 mois à dater du jour du paiement de la lettre.

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Section 2 – LE BILLET A ORDRE


§ 1 – SPECIFICITES
A – DEFINITION
Le billet à ordre est un titre par lequel une personne, le souscripteur,
s’engage à payer à une certaine date une somme déterminée à une autre
personne, le bénéficiaire, ou à son ordre.
À la différence de la lettre de change, le billet à ordre met en rapport
seulement deux personnes : le souscripteur et le bénéficiaire. Le souscripteur est
en même temps tireur et tiré dans la mesure où il se donne l’ordre à lui-même de
payer le bénéficiaire à l’échéance. La spécificité du billet à ordre découle des
conséquences qui résultent de cette différence fondamentale.
Le billet à ordre est également un moyen de paiement et de crédit dont le
régime s’apparente à celui de la lettre de change, mais il est beaucoup moins
utilisé dans le commerce.
B – NATURE DU BILLET A ORDRE
L’article 9 du code de commerce dispose dans ce sens que :
« Indépendamment des dispositions des articles 6 et 7, sont réputés actes de
commerce :
- la lettre de change ;
- le billet à ordre signé même par un non-commerçant, lorsqu’il résulte
d’une transaction commerciale ».
De la sorte, le législateur laisse entendre que le billet à ordre est un acte
de commerce par la forme. Ce qui aurait été vrai si la phrase avait pris fin au
niveau de «même s’il est signé par un non commerçant», mais le même article
d’ajouter «lorsqu’il résulte d’une transaction commerciale».
Par conséquent, le B.O ne sera commercial que si la dette à l’occasion de
laquelle il est souscrit est commerciale ; par a contrario, le B.O sera civil si
l’opération est civile.
Par l’insertion de cette condition, toute la théorie de la commercialité du
B.O par la forme a été détruite. Sa nature commerciale ou civile continuera de
dépendre de la nature de l’opération en vertu de laquelle il est souscrit ; donc, le
droit applicable au B.O restera, comme par le passé, déterminé en fonction de
sa nature civile ou commerciale.

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C – REGIME CAMBIAIRE
La plupart des règles de la lettre de change sont applicables au billet à
ordre, notamment en ce qui concerne l’endossement, le paiement, le recours
faute de paiement, le protêt, les prescriptions, etc. C’est pourquoi le billet à ordre,
régi par les articles 232 à 238 du nouveau code de commerce, ne comporte que
peu de dispositions qui lui sont propres. Le code, en ses articles 234 à 236,
renvoie pour les règles communes aux dispositions de la lettre de change.
§ 2 – CONDITIONS DE VALIDITE
Elles sont pratiquement les mêmes que celles de la lettre de change, sauf
pour quelques originalités qu’il convient de signaler.
A – LES CONDITIONS DE FORME
Comme pour la lettre de change, pour être valable le billet à ordre doit
comporter un certain nombre de mentions obligatoires : les date et lieu de
souscription, la clause à ordre, le lieu de paiement, le nom du bénéficiaire, la
signature du souscripteur, etc.
Le billet à ordre se distingue cependant par :
a – La dénomination «billet à ordre»
Alors que la lettre de change doit comporter la dénomination «lettre de
change», qui implique automatiquement la clause à ordre, le billet à ordre doit
contenir au choix : soit la dénomination «billet à ordre», soit tout simplement «la
clause à ordre» insérée dan le texte du titre (je paierai à l’ordre de M. X.)
b – La promesse pure et simple de payer
Comme dans le billet à ordre il n’y a pas un mandat de payer donné à un
tiers (le tiré), cette promesse de payer (je paierai...) remplace le mandat de la
lettre de change.
B – LES CONDITIONS DE FOND
C’est à ce niveau que nous rencontrons le plus de différences par rapport
à la lettre de change dues à la nature du billet à ordre et à l’absence du tiré.
a – La capacité
La capacité de faire des actes de commerce n’est requise que lorsque
l’acte est commercial.
Dans le cas contraire, si le mineur contracte une affaire civile (et c’est là
que le billet à ordre n’est pas commercial par sa forme), le billet sera civil et le

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mineur devra seulement être émancipé, sans avoir à être autorisé à faire le
commerce. (Sa signature sur le billet à ordre ne sera pas nulle puisqu’il s’agit
d’un acte civil qui nécessite seulement l’émancipation du mineur).
b – Absence de la notion de provision
En matière de billet à ordre, il ne peut être question de provision qui est
normalement une créance du tireur sur le tiré ; alors que dans le billet à ordre le
souscripteur cumule ces deux qualités.
Partant, la théorie de la provision ne peut être appliquée au billet à ordre.
Il n’y a donc pas de provision, qui est une créance du tireur sur le tiré, pour que
le souscripteur du billet à ordre puisse en transmettre la propriété au bénéficiaire.
Il lui transmet seulement la valeur fournie qui demeure la propriété du premier
bénéficiaire.
La conséquence de cette différence de régime juridique avec la lettre de
change est que le porteur négligent conserve ses recours cambiaires contre le
souscripteur (alors qu’il perd ce droit en matière de lettre de change lorsque le
tireur prouve avoir fourni provision).
c – Absence de la notion d’acceptation
L’acceptation n’a pas de raison d’être en matière de billet à ordre puisque
le souscripteur, par sa signature à l’émission, s’engage juridiquement à payer à
l’échéance entre les mains du bénéficiaire ou à son ordre ; c’est pourquoi l’article
237 précise que «le souscripteur d’un billet à ordre s’engage de la même manière
que l’accepteur d’une lettre de change».
Cependant, la présentation du billet à ordre au souscripteur pour visa est
nécessaire lorsque le titre est payable à un certain délai de vue, ce délai court de
la date du visa signé du souscripteur (article 238).

Section 3 – LE CHÈQUE
Nous envisagerons d’abord, les aspects techniques, ensuite, les systèmes
de protection du chèque.

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§ 1 – LES ASPECTS TECHNIQUES


A – NATURE ET FONCTION DU CHÈQUE
Le chèque est un effet par lequel le tireur dispose de ses fonds déposés
chez le tiré (qui est obligatoirement une banque), en effectuant des retraits à vue,
soit à l’ordre de lui-même, soit à l’ordre du bénéficiaire.
Obligatoirement tiré sur un banquier, il est payable à vue (dès sa
présentation) et à ce titre il ne peut comporter une mention d’échéance de
paiement.
Néanmoins, le chèque n’est pas une monnaie ; sa remise n’est pas
libératoire tant qu’il n’est pas encaissé et n’opère pas novation de la créance52.
Par ailleurs, contrairement à la lettre de change, il n’est pas commercial
par la forme ; il est commercial ou civil suivant la nature de l’opération en
exécution de laquelle il a été émis.
B – LES CONDITIONS FORMELLES
Pour être valable, le chèque doit remplir des conditions de forme exigées
par la loi (voir spécimen suivant).
a – Les mentions obligatoires
Les mentions obligatoires que doit comporter le chèque sont :
- la dénomination de «chèque» ;
- l’ordre de paiement pur et simple (payez) ;
- la somme à payer en chiffres et en lettres ;
- le nom du tiré (la banque) ;
- le lieu du paiement (adresse de l’agence bancaire) ;
- le lieu et la date de création ;
- le nom et la signature du tireur.
Suivant l’article 240 est nul le chèque qui ne correspond pas aux formules
délivrées par les banques ou dans lequel l’une des mentions obligatoires fait

52
- Le chèque n’est pas novatoire (art 305 code 1996), c’est à dire que la remise d’un chèque en
paiement d’une dette ne remplace pas l’obligation qui lui a donné naissance ; celle-ci subsiste
avec toutes ses garanties jusqu’à ce que le chèque soit payé.

59
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défaut, mais il peut être considéré comme un titre ordinaire pour servir de preuve
à une créance lorsqu’il réunit les conditions de ce titre.
b – Les mentions facultatives
Ce sont les mentions que les parties demeurent libres de porter sur le
chèque :
- Le nom du bénéficiaire : Contrairement à la lettre de change, il n’est pas
obligatoire de mentionner le nom du bénéficiaire sur le chèque (article 243), car
le chèque peut être émis au porteur ou en blanc, sans aucune indication, il est
alors considéré émis au porteur ; il peut aussi être stipulé payable à personne
dénommée ou à son ordre (chèque nominatif), dans ce cas le bénéficiaire ne
peut le transmettre que par endossement ;
- La clause non endossable ou non à ordre : Cette clause ne peut être utile
que lorsque le chèque est nominatif ; puisque le chèque au porteur ou à blanc
est transmissible par simple tradition. Le chèque qui porte la mention non
endossable ne peut être transmis que comme un titre civil ;
- Le barrement : Il consiste à tracer sur le recto du chèque deux barres
parallèles, il ne sera alors payé qu’à un banquier ou à un client du banquier. Ainsi,
le porteur d’un tel chèque ne pourra se faire payer qu’en l’endossant par
procuration à son banquier qui approvisionnera son compte du montant du
chèque encaissé par ledit banquier. Les banques effectuent entre elles les
paiements des chèques en procédant à leur compensation et donc par monnaie
scripturale, ce qui évite les mouvements numéraires.
Comme il ne peut être payé qu’à une banque, le chèque barré a été conçu
pour éviter les risques de perte ou de vol des chèques ; mais l’effet de cette
technique reste limité puisqu’il est possible d’endosser le chèque barré au profit
d’un bénéficiaire de bonne foi.
Le barrement est général lorsqu’il ne comporte aucune mention entre les
deux barre, il est spécial, se le nom d’une banque y est mentionné.
- La certification : (le chèque certifié) Elle remplace l’acceptation en
matière de lettre de change. Comme le chèque est payable à vue, il n’a pas
besoin d’être accepté ; l’article 242 interdit expressément l’acceptation du
chèque. La certification est faite par la banque tirée qui porte au recto du chèque
la mention « certifié » et sa signature. Elle doit alors bloquer la provision

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correspondant au montant du chèque au profit du porteur, mais seulement


jusqu’au terme du délai de présentation qui est de 20 jours suivant l’article 268
du nouveau code.
C – LE CHÈQUE, INSTRUMENT DE PAIEMENT FACULTATIF
Malgré l’usage répandu du chèque qui constitue, au Maroc, le second
moyen de paiement après les espèces, le droit n’oblige nullement l’acceptation
du chèque comme mode de paiement, à l’exception de certains cas très rares
dans notre législation. Tout commerçant ou particulier peut fort bien le refuser et
exiger la monnaie officielle ayant cours légal.
En effet, par dérogation au principe de l’usage facultatif du chèque, l’article
306 du nouveau code de commerce a rendu obligatoire le paiement par chèque
barré ou par virement bancaire toute opération entre commerçants pour faits de
commerce d’une valeur supérieure à 10 000 dhs C’est pourquoi d’ailleurs, le
législateur a fait obligation aux commerçants d’ouvrir un compte chèques (article
18).
D – LA PROVISION DU CHÈQUE
La provision est une somme d’argent mise à la disposition du tireur chez
le tiré au moment de la création du chèque.
a - Le contenu de la provision
La provision du chèque peut être constituée par le dépôt de fonds chez la
banque (c’est-à-dire par le versement de sommes d’argent), la remise d’effets de
commerce à l’encaissement, elle peut aussi résulter d’une ouverture de crédit.
b - Le moment de l’existence de la provision
Contrairement à la lettre de change dont la provision n’est exigible qu’à
l’échéance, suivant les termes de l’article 241 le chèque doit avoir provision dès
le moment de la création du titre.
Or, cette disposition exigeant l’existence de la provision au moment de la
création du chèque se trouve être, sinon en contradiction, du moins dépassée
par la nouvelle tendance de la politique pénale du même code de commerce qui
ne requiert la constitution de la provision qu’au moment de la présentation du
chèque au paiement (art. 316). Par conséquent, la loi n’exige plus une provision
préalable à l’émission du chèque.

61
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c- Le transfert de la propriété de la provision


L’émission du chèque a pour effet de transférer la propriété de la provision
détenue par le banquier au bénéficiaire du chèque. Cette propriété passera
ensuite à tout nouveau porteur, que ce soit par tradition ou par endossement.
L’article 256 dispose en effet que l’endossement transmet tous les droits résultant
du chèque et notamment, la propriété de la provision.
E – JUSTIFICATION D’IDENTITE
L’article 251 a consacré officiellement l’obligation pour toute personne qui
« remet » un chèque en paiement de justifier de son identité au moyen d’un
document officiel portant sa photographie.
Comme le texte parle de « toute personne » qui remet un chèque en
paiement, il serait judicieux de savoir de quelle personne il s’agit ?
S’agit-il du tireur, qui doit justifier de son identité, lorsqu’il remet le chèque
en paiement à son créancier ?
Ou est-ce qu’il s’agit du porteur lorsqu’il présente le chèque à la banque
pour recouvrement ?
Nous pensons qu’il ne peut s’agir que du tireur pour les raisons suivantes :
- d’une part, parce que le texte parle de la personne qui « remet » le
chèque en paiement dans le sens de l’émission car, si le législateur avait
l’intention de viser le bénéficiaire, il aurait parlé de « toute personne qui
présente un chèque au paiement » ;
- d’autre part, ce qui conforte encore cette position, c’est que l’article 251
figure parmi les dispositions du chapitre I relatif à la création du chèque
et non pas dans le chapitre IV relatif à la présentation et au paiement du
chèque.
F – LA CIRCULATION DU CHÈQUE
Rappelons que le chèque au porteur ou à blanc se transmet par tradition.
S’il est nominatif, il convient de distinguer :
+ s’il est non à ordre ou non endossable, il ne peut se transmettre que par
cession de créance ;
+ s’il est à ordre, il est transmissible par endossement :
- soit par endossement translatif de propriété : dans ce cas
l’endosseur a le choix de l’endosser au porteur ou à blanc (auquel
cas il peut circuler par tradition) ou même nominatif.

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- soit par endossement à titre de procuration, exactement comme


pour la lettre de change (en pratique, en cas de remise à
l’encaissement par la banque).
Mais l’endossement du chèque ne peut jamais être fait en garantie (à titre
pignoratif).
§ 2 – LES SYSTEMES DE PROTECTION DU CHEQUE
En tant qu’effet de commerce, le chèque bénéficie naturellement de la
protection du système cambiaire, mais il se distingue en outre par une protection
traditionnelle et spéciale d’un système pénal auquel s’est greffé récemment un
autre système, mais bancaire cette fois.
A – LE SYSTEME CAMBIAIRE
Le porteur impayé peut en effet exercer ses recours cambiaires contre
tous les signataires du chèque (e) ; mais pour cela il doit se montrer diligent et
accomplir certaines obligations de vigilance que la loi lui impose, à savoir
présenter le chèque au paiement (a) et, à défaut de paiement, faire dresser protêt
(b), donner les avis (c) tout en respectant les délais de prescription (d).
a – La présentation au paiement
Elle peut se faire dès le jour de l’émission puisque le chèque est payable
à vue. Le porteur dispose néanmoins d’un certain délai pendant lequel il doit
présenter le chèque au paiement sous peine de perdre son droit au recours
cambiaire.
Les délais sont actuellement de 20 jours de l’émission pour les chèques
émis au Maroc, et de 60 jours pour les chèques émis à l’étranger (article 268).
Après l’expiration du délai de présentation, s’il a provision, le tiré est tenu
quand même de payer (article 271) sous peine d’une amende de 5000 à 50 000
dhs (article 319). Les peines étant délictuelles, la prescription d’une telle
infraction est donc délictuelle (5 ans).
Si la provision est insuffisante, le tiré a désormais l’obligation de proposer
au porteur le paiement jusqu’à concurrence de la provision disponible ; dans ce
cas, ce dernier ne peut pas refuser ce paiement et doit délivrer une quittance au
tiré et mention de ce paiement partiel doit être faite sur le chèque (art. 273).
Il faut dire qu’actuellement dans la pratique, les banques refusent tout
paiement, même s’il ne s’agit que d’une insuffisance dérisoire. Et comme cette

63
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obligation, à la différence de la précédente, est dépourvue de sanction, elle n’a


pas beaucoup de chance d’être appliquée.
b – Le protêt
A défaut de paiement, le porteur doit faire dresser protêt, comme en
matière de lettre de change, pour pouvoir exercer son recours cambiaire.
Le protêt doit être fait avant l’expiration du délai de présentation ; et si
celle-ci a lieu le dernier jour du délai, il peut être établi le premier jour ouvrable
suivant.
c – Les avis
Le porteur a ensuite un délai de 8 jours ouvrables qui suivent le jour du
protêt pour donner avis du défaut de paiement à son endosseur et au tireur. En
cas de clause de retour sans protêt, ce délai court du jour de la présentation.
Chaque endosseur doit aviser son endosseur dans les 4 jours ouvrables
qui suivent la réception de l’avis en remontant jusqu’au tireur.
De son côté, le secrétariat – greffe du tribunal est tenu de prévenir le tireur
des motifs du refus de paiement par lettre recommandée dans les 4 jours du
protêt, à condition, dit le texte, que le chèque contienne le nom et l’adresse du
tireur53 !
d – Les délais de prescription
Il s’agit de la prescription des recours cambiaires qui est une prescription
extinctive ou libératoire, c’est-à-dire qui éteint l’action cambiaire qui résulte de
l’engagement par chèque.
L’article 295 a prévu trois délais de prescription en fonction des parties en
présence :
- Pour les actions du porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres
obligés la prescription est de 6 mois à partir de l’expiration du délai de
présentation.

53
On sait que, en pratique, à la rigueur certains commerçants marquent le numéro de la carte
d'identité nationale et le numéro de téléphone du tireur sur le dos du chèque, mais jamais
l'adresse de ce dernier n'est marquée ni par la banque, ni par les commerçants.

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- Pour les actions des divers obligés les uns contre les autres la
prescription est également de 6 mois à partir du jour où l’obligé a
remboursé ou du jour où il a lui-même été actionné en justice.
- Enfin, pour l’action du porteur contre le tiré le délai de prescription est
devenu d’1 un à partir de l’expiration du délai de présentation (au lieu de
3 ans précédemment prévu par le dahir de 1939).
e – Les recours cambiaires
Lorsque le porteur aura accompli ses obligations de vigilance, il peut alors
exercer ses recours cambiaires contre toutes les personnes obligées en vertu du
chèque. Celles-ci sont en effet tenues solidairement envers le porteur (art. 287).
Ce dernier peut agir contre ces signataires individuellement ou collectivement et
sans avoir à respecter l’ordre dans lequel ils se sont obligés.
Cependant, en cas de déchéance, le porteur négligent ne perd pas tous
ses droits, il conserve :
- une action de droit commun contre les différents obligés ;
- une action cambiaire contre le tiré qui a provision ;
- une action cambiaire contre le tireur qui n’a pas fait provision. Or, celui-
ci reste passible du pénal. Mais il convient de signaler que ces règles ne
s’appliquent que pour l’exercice de l’action cambiaire car, pour l’exercice
de l’action pénale :
- le porteur n’a pas besoin de faire dresser protêt ;
- et l’action publique ne s’éteint pas par les délais de prescription de
l’action cambiaire. Étant donné que nous sommes dans le domaine
délictuel, l’infraction ne s’éteindra que par la prescription correctionnelle
de 5 ans.
En pratique, tous les porteurs de chèques sans provision préfèrent
recourir au pénal vu son caractère répressif par rapport au système cambiaire,
mais actuellement le système bancaire s’est imposé préalablement au système
pénal.
B – LE SYSTEME BANCAIRE
Ce système s’est désormais greffé sur le système pénal avant sa
consécration officielle par le législateur. Il est appliqué au Maroc depuis le 1 er juin
1990, date de la mise en vigueur de la fameuse convention interbancaire du 29

65
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novembre 1989. Les différences techniques et répressives mises à part, l’esprit


du code de 1996 ne se distingue guère de celui de la convention interbancaire.
a – Les obligations des banques
1 – Lors de l’ouverture des comptes
Nos textes actuels obligent désormais les banques, préalablement à
l’ouverture des comptes, de vérifier l’identité des postulants (personnes
physiques ou morales) par le moyen de documents officiels.
L’établissement bancaire doit ensuite, et préalablement à la délivrance du
premier chéquier, consulter Bank Al-Maghrib (B.M.) sur les antécédents
bancaires du postulant (les incidents de paiement et leurs suites).
2 – Lors des incidents de paiement
En cas d’incident de paiement, c’est-à-dire de refus de paiement d’un
chèque pour défaut de provision suffisante, la banque tirée doit adresser une
lettre d’injonction au tireur par laquelle, elle l’invite :
- à lui restituer, ainsi qu’à toutes les banques dont il est le client, les
formules de chèques en sa possession et en celle de ses mandataires ;
- et de ne plus émettre pendant 10 ans des chèques autres que les
chèques de retrait et les chèques certifiés.
La banque doit aussi en informer les mandataires du titulaire du compte
et, s’il s’agit d’un compte collectif, les autres titulaires du compte ; car ces derniers
subissent aussi, de plein droit les mêmes mesures tant en ce qui concerne le
compte objet de l’incident qu’en ce qui concerne les autres comptes collectifs
(art. 315).
Le tiré qui a refusé le paiement doit alors déclarer l’incident à B.M.
L’article 309 al. 1 oblige les banques, lorsqu’elles refusent de payer un
chèque, de délivrer au porteur un certificat de refus de paiement.
b – La réparation de l’incident
La loi permet au titulaire du compte qui reçoit l’injonction de retrouver la
faculté d’émission des chèques à condition de régulariser l’incident et de payer
une amende forfaitaire.
1 – La régularisation
Pour recouvrer sa faculté d’émission, le tireur a le choix entre deux
procédés de régularisation :

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- soit la régularisation directe : c’est-à-dire le règlement du montant du


chèque impayé entre les mains du porteur, il doit alors présenter le chèque
acquitté au tiré ;
- soit la régularisation indirecte : en constituant une provision suffisante et
disponible pour le règlement du chèque par les soins du tiré.
2 – L’amende forfaitaire
Après la régularisation, le tireur doit s’acquitter d’une amende forfaitaire
dont le taux dépend du nombre de répétition des incidents de paiement : (art.
314)
- à la 1ère injonction, le taux de l’amende est de 5 % du montant du chèque
impayé.
- à la 2nde injonction, ce taux est de 10 %.
- et, à partir de la 3ème injonction, il est de 20% 54.
Mais, la régularisation n’empêchera pas le tireur d’être poursuivi
pénalement.
Néanmoins, pour assurer le respect de ce système bancaire, le législateur
a assujetti les banques à un véritable système de responsabilité.
c – La responsabilité des banques
Cette responsabilité est assortie de deux sortes de sanctions, des
sanctions pénales et des sanctions de garantie.
1 – Les sanctions pénales
Les violations des obligations bancaires sont érigées en infractions
passibles d’une amende de 5000 à 50 000 dhs, notamment :
- le défaut de déclaration à B.M. des incidents de paiement et des
émissions au mépris de l’interdiction ;

54
- V. arrêté du ministre de l'économie et des finances du 12 août 1998 fixant les modalités
d'acquittement de cette amende. (B.O. n° 4618 du 3/9/1998, p. 497). Suivant ce texte, l'amende
forfaitaire doit être acquittée par l'intéressé à la perception de son choix au vu de l'injonction à
lui faite par la banque tirée. Cette injonction tient lieu de bulletin de versement, elle doit
comporter un certain nombre de mentions notamment le rang de l'injonction. Cette dernière doit
être établie en double exemplaire dont l'original est destiné à justifier la recette réalisée et le
second exemplaire est remis à l'intéressé après paiement pour justifier l'acquittement de l'amende
auprès de la banque.

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- le refus de délivrer le certificat de refus de paiement ;


- la délivrance de formules de chèques à un interdit bancaire ou judiciaire
ou à son mandataire ;
- le défaut d’adresser une injonction en cas d’incident de paiement invitant
son auteur à restituer les formules de chèques et de ne plus émettre de
chèques pendant 10 ans.
Il appartient alors à B.M. de centraliser les renseignements concernant
ces infractions commises par les banques et de les communiquer au procureur
du Roi.
2 – Les sanctions de garantie
A défaut pour le banquier de respecter ses obligations, il devient garant
des émissions sans provision. Il doit payer jusqu’à concurrence de 10 000 dhs
par chèque malgré l’absence ou l’insuffisance ou l’indisponibilité de la provision :
- tout chèque qu’il a délivré à un interdit bancaire ou judiciaire, ou à un
nouveau client avant d’avoir consulté B.M. ;
- et tout chèque dont il n’a pas réclamé la restitution suite à un incident.
Le banquier tiré qui a payé le chèque est alors subrogé dans les droits du
porteur à concurrence de la somme avancée.
d – Le rôle de Bank Al-Maghrib
Elle exerce son rôle par une sorte de « casier bancaire » (à l’instar du
casier judiciaire) détenu par le Service Central des Incidents de Paiement (le
S.C.I.P.). Car, en vertu de l’article 322, les banques sont tenues de déclarer à
B.M. tous les incidents de paiement survenus dans leurs agences. Il en est de
même pour les tribunaux lorsqu’ils prononcent une interdiction d’émettre des
chèques.
Ainsi, le S.C.I.P. centralise tous les antécédents des clients ayant fait
l’objet d’une déclaration et se charge de les communiquer aux banques.
Ce service détient d’ailleurs aussi tous les renseignements sur les
violations par les banques de leurs obligations de contrôle et de leurs obligations
de sanction.

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C – LE SYSTEME PENAL
a – Les infractions en matière de chèque
1 – L’omission de constituer ou de maintenir la provision
Il s’agit de la fameuse émission de chèque sans provision du dahir de 1939
qui est l’infraction la plus courante en matière de chèque. Par sa nouvelle
formule, le législateur de 1996 a complètement modifié la physionomie de cette
infraction.
Alors que les articles 70 dahir de 1939 et 543 du code pénal
sanctionnaient celui qui, de mauvaise foi, a émis un chèque sans provision
préalable et disponible ou avec une provision inférieure au montant du chèque,
l’article 316-1° du nouveau code incrimine le tireur qui a omis de constituer ou
de maintenir la provision du chèque en vue de son paiement à présentation.
2 – L’opposition irrégulière
L’opposition est l’acte par lequel le tireur fait défense au tiré de payer un
chèque qu’il a émis.
Sous le dahir de 1939, l’opposition était permise dans seulement deux
cas : la perte du chèque et la faillite du porteur. L’article 271 du code de 1996 a
ajouté trois autres cas légaux d’opposition : le vol, l’utilisation frauduleuse et la
falsification du chèque. Par conséquent, celui qui fait opposition en dehors des
cas prévus par le législateur encourt les mêmes peines de l’émission sans
provision.
3- L’acceptation et l’endossement des chèques de garantie
L’article 316-6°/ sanctionne «toute personne qui, en connaissance de
cause accepte de recevoir ou d’endosser un chèque à la condition qu’il ne soit
pas encaissé immédiatement et qu’il soit conservé à titre de garantie».
On notera enfin que pour faire respecter les interdictions bancaire et
judiciaire par les titulaires de comptes interdits, le code de 1996 a incriminé
l’émission de chèque au mépris d’une interdiction d’un emprisonnement d’un
mois à 2 ans et d’une amende de 1.000 à 10. 000 dhs malgré l’existence de la
provision. Et si la provision fait défaut, ces peines sont portées au double (art.
318).

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b – Les sanctions pénales


L’article 316 prévoit des sanctions communes à toutes les infractions en
matière de chèque à savoir, l’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de
2.000 à 10.000 dhs sans qu’elle puisse être inférieure à 25% du montant du
chèque ou de l’insuffisance de la provision.
En outre, le tribunal peut prononcer une interdiction d’émission de chèque
de 5 ans avec injonction de restituer les formules de chèques au banquier (art.
317).
Il peut aussi ordonner, aux frais du condamné, la publication des extraits
de la décision d’interdiction dans les journaux.
En ce qui concerne la récidive, toutes les infractions en matière de chèque
sont considérées comme constituant un même délit (art. 323).
Le sursis ne peut être accordé que pour les peines d’emprisonnement (art.
324), il n’est donc pas applicable à l’amende.
Le tireur d’un chèque sans provision ne peut bénéficier des circonstances
atténuantes que s’il constitue ou complète la provision dans les 20 jours de la
présentation.

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CHAPITRE II - LE FONDS DE COMMERCE


Le fonds de commerce (F.C.) est désormais défini par l’art. 79 du code de
commerce de 1996 comme étant « un bien meuble incorporel constitué par
l’ensemble des biens mobiliers affectés à l’exercice d’une ou de plusieurs
activités commerciales ».
Nous examinerons, d’abord, les éléments du F.C., ensuite les contrats qui
portent sur le F.C. et les règles destinées à le protéger.

Section I - LES ELEMENTS DU F.C.


Ces éléments sont traditionnellement divisés en deux catégories, suivant
leur nature, en éléments corporels et d’autres incorporels.
§ I - LES ELEMENTS CORPORELS
Il s’agit du mobilier commercial, des marchandises et du matériel et
l’outillage.
1 - Le mobilier commercial : c’est-à-dire tous les objets mobiliers comme
les bureaux, les fauteuils, les chaises, les salons de réception, les comptoirs …
2 - Les marchandises : C’est l’objet même du commerce, il s’agit de tous
les produits et objets destinés à la vente. Mais, en cas de vente du F.C., les
marchandises font normalement l’objet d’un inventaire et leur prix est fixé
séparément.
3 - Le matériel et l’outillage : Ces deux termes sont synonymes, ils
désignent tous les biens meubles, autres que le mobilier commercial, qui servent
à l’exploitation du fonds, exemple : les appareils et machines, les moyens de
transport…
Il faut noter cependant que ces éléments corporels n’ont pas toujours une
importance dans un F.C., sauf par exemple les appareils et machines dans
l’industrie, le mobilier dans l’hôtellerie ou les véhicules de transport (bus et cars)
dans le commerce de transport…
Par conséquent, bien que ces éléments corporels fassent partie du F.C. :
- le vendeur du fonds reste libre de les exclure de la vente et les vendre à
une autre personne ;
- de son côté, l’acquéreur du F.C. peut parfaitement se passer du matériel,
outillage et mobiliers anciens.

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Par ailleurs, il existe bien des F.C. qui n’ont pas de marchandises tels que
les fonds des courtiers et agents d’affaires…
Il reste que, ce sont les éléments incorporels qui confèrent son importance
au F.C.
§ II - LES ELEMENTS INCORPORELS
Ce sont les éléments les plus divers du F.C. et les plus importants.
1 - La clientèle : C’est l’élément le plus important du F.C. ; d’ailleurs, en
vertu de l’art. 80 du code de commerce, la clientèle est devenue un élément
obligatoire du F.C.. Ce dernier ne peut en effet exister sans la clientèle.
La clientèle est la faculté de grouper les clients habituels au commerce.
Il ne s’agit donc pas de l’ensemble des clients d’un commerce, car le commerçant
ne possède pas la clientèle, il n’en a pas le monopole et il suffit d’une mauvaise
gestion pour la perdre.
Cependant, bien que la clientèle soit l’élément le plus important du F.C.,
cet élément reste insuffisant pour constituer à lui seul un F.C. ; la clientèle elle -
même n’existe que parce qu’elle est attachée à certains éléments du F.C., ce
sont ces éléments qui servent de support à la clientèle, ce sont eux qui sont en
mesure de grouper la clientèle. Ces éléments vont varier suivant le type de
commerce.
2 - Le nom commercial : C’est l’appellation empruntée par le
commerçant pour l’exercice de son commerce.
# Il peut s’agir du nom patronymique du commerçant (ou nom civil), exp.
Établissement Ben Chekroun55, ou d’un pseudonyme, exp. Garage El Bahja, ou
d’un nom de fantaisie, exp. Hôtel Yasmine.
# En ce qui concerne les sociétés commerciales, le nom commercial est
dit dénomination sociale qui est généralement désignée par l’objet de l’activité
de l’entreprise56.

55
- Le nom patronymique est hors du commerce, c’est-à-dire ne peut être cédé.
56
- La nouvelle loi sur les sociétés commerciales a supprimé la raison sociale, en ce qui
concerne les sociétés de personnes, qui était désignée, non par l’objet social, mais par
le ou les noms d’associés.

72
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Cependant, en cas de cession du F.C., le vendeur peut, par une clause


expresse, interdire à l’acquéreur d’user de son nom commercial, cette clause
aura pour effet d’exclure la cession du nom commercial avec le F.C., dans ce
cas, le vendeur n’a plus le droit de céder l’usage du nom à un autre commerçant,
sous peine de concurrence déloyale.
# Le nom commercial fait par ailleurs l’objet d’une protection particulière
par le législateur.
3 - L’enseigne : C’est un signe distinctif qui sert à individualiser un
établissement commercial.
- L’enseigne peut prendre la forme d’un emblème figuratif, exp. la
coquille de Shell, le petit homme de neige de Michelin…
- Ca peut être une dénomination de fantaisie, exp. Hôtel au Lion d’Or,
1000 chemises, Au Rabais…, ou un nom d’une personne exp. Chez Bahaa’,
Chez Smaïl… ou le nom du quartier de l’emplacement du commerce, exp. Café
des Oudayas, Hôtel de la Tour Hassan…
- Souvent l’enseigne reprend le nom commercial présenté sous une
forme graphique originale, exp. le signe graphique de la CTM …
L’usage d’une enseigne semblable à celle d’un commerçant du même lieu
et faisant le commerce de produits semblables de manière à détourner sa
clientèle constitue une concurrence déloyale qui peut donner lieu à une action en
dommages-intérêts (Art. 84-2° DOC).
4 - Les licences : L’art. 80 parle des licences, mais il s’agit aussi des
autorisations et des agréments. Elles sont accordées par les autorités
administratives concernées pour l’exploitation de certains F.C., suivant le
domaine d’activité : tourisme, transport, hôtellerie, restauration, cinéma, vidéo,
boissons alcooliques…
5 - Le droit au bail : Ce droit n’a d’intérêt que dans le cas où le
commerçant n’est pas propriétaire du local dans lequel il exerce son commerce.
Il est désigné dans la pratique par l’expression de « propriété commerciale », ce
qui exprime la protection accordée par le législateur aux locataires de locaux à
usage commercial contre les éventuels abus des propriétaires des murs qui
pourraient avoir des conséquences néfastes sur le commerçant. De plus, il est
difficile de concevoir une vente d’un F.C. sans local.

73
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Le droit au bail est demeuré réglementé par le dahir du 24 mai 1955, ses
règles assurent au commerçant le droit au renouvellement du bail et, à défaut, le
droit à une indemnité.
6 - Les droits de propriété industrielle :
L’art. 80 dresse toute une énumération de ces droits ; il s’agit des brevets
d’invention, des licences, des marques de fabrique, de commerce et de service,
des dessins et modèles industriels « et, généralement, conclue cet article, tous
droits de propriété industrielle, littéraire ou artistique qui y sont attachés ».
Ces droits continuent à être protégés par des textes spéciaux : les droits
de propriété industrielle sont réglementés par le dahir du 23 juin 191657, quant
aux droits de la propriété littéraire et artistique, qui sont assimilés aux droits
industriels, ils restent régis par le dahir du 29 juillet 197058.
Ces droits constituent un monopole du commerçant dans son exploitation
commerciale et, comme ils font partie du F.C., ils peuvent être cédés avec ce
dernier, mais pour les exclure il faut prévoir une clause expresse dans le contrat
de vente du F.C..

Section II - LES CONTRATS PORTANT SUR LE


FONDS DE COMMERCE
Le F.C., en tant qu’une universalité, c’est-à-dire de nature distincte des
éléments qui le composent, peut être vendu (§ I), affecté en nantissement (§ II),
des règles communes ont cependant pour but la protection des droits du vendeur
et du créancier nanti (§ III), enfin le FC peut être mis en location (§ IV).
§ I - LA VENTE DU FONDS DE COMMERCE
La vente du F.C., à l’instar de tout contrat, est d’abord soumise aux règles
générales du DOC et surtout à celles relatives au contrat de vente prévues par
ses articles 478 à 584.

57
- B.O. du 10/7/1916, p. 690.
58
- B.O. du 7/10/1970, p. 1378.

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Vu ses particularités commerciales, la vente du F.C. a fait l’objet d’une


réglementation spéciale qui fut contenue dans le dahir du 31 décembre 1914 59.
Cette réglementation a été reprise par le code de 1996 dans ses articles 81 à
103 tout en subissant des modifications substantielles.
Elle prévoit en effet des conditions particulières au contrat de vente du
F.C. et partant, des effets spéciaux.
A - LES CONDITIONS DE LA VENTE
La vente du F.C. est soumise à des conditions de fond et de forme.
a - Les conditions de fond
Comme tout contrat, la vente du F.C. doit obéir aux règles générales en la
matière : le consentement des parties (protection contre les vices tels que
l’erreur, le dol et la violence), la capacité commerciale (les opérations portant sur
le FC étant des actes de commerce), l’objet de la vente (les éléments du FC) et
le prix de la vente.
b - Les conditions de forme
Afin de protéger l’acquéreur, l’article 81 code de commerce oblige le
vendeur d’insérer certains renseignements dans l’acte même de vente. Par
conséquent, la rédaction d’un écrit s’impose d’autant plus que l’omission de ces
mentions rend l’acte annulable.
Mais l’écrit ne doit pas prendre obligatoirement la forme authentique, il
peut être seulement sous seing privé.
B - LES EFFETS DE LA VENTE
Si la vente du F.C. fait l’objet d’une réglementation spéciale, c’est parce
qu’elle produit des effets particuliers en dehors des effets généraux de toute
vente.
Cette réglementation a justement pour effet de protéger tous les intérêts
en présence ; les droits de l’acquéreur, ceux du vendeur qui consent une vente
à crédit et ceux des tiers, en l’occurrence les créanciers du vendeur.

59
- B.O. du 11/1/1915, p. 14.

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a - Les règles protectrices des droits de l’acquéreur


En dehors des règles générales à toute vente, l’acquéreur du F.C.
bénéficie d’une protection spéciale par le code de commerce.
1 - Les règles générales
Il s’agit des règles de droit commun de la vente qui posent certaines
obligations à la charge du vendeur.
- Tout d’abord, celui-ci s’oblige à transférer la propriété du F.C. à
l’acheteur.
- Ensuite, le vendeur est obligé, comme dans toute vente, de garantir
l’acheteur contre les vices cachés du F.C.
- Enfin, le vendeur est tenu envers l’acquéreur de l’obligation de non
concurrence.
2 - Les règles spéciales
Désormais, le code de 1996 a institué d’autres règles de nature formelle,
spécialement destinées à la protection de l’acquéreur.
L’art. 81 a, en effet, prescrit des mentions obligatoires à la charge du
vendeur.
L’acte doit donc obligatoirement mentionner :
le nom du vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition, le prix
de cette acquisition en spécifiant distinctement les prix des éléments incorporels,
des marchandises et du matériel ;
l’état des inscriptions des privilèges et nantissements pris sur le fonds ;
s’il y a lieu, le bail, sa date, sa durée, le montant du loyer actuel, le nom
et l’adresse du bailleur ;
l’origine de la propriété du fonds de commerce60.
b - Les règles protectrices des droits du vendeur
En tant que meuble, le FC obéit normalement aux règles de droit commun
relatives à la vente des biens meubles; à ce titre, l’acheteur du FC a pour
obligation principale le paiement du prix convenu.

60
- C'est-à-dire les propriétaires successifs du fonds de commerce.

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Devant l’importance de l’investissement, un crédit est souvent consenti


par le vendeur à l’acquéreur du FC ; aussi, le législateur offre des garanties
légales au vendeur du FC : le privilège du vendeur (Art. 91 et 92 c. com.) et
l’action résolutoire (Art. 99 à 103 c. com.). Le vendeur peut même opter pour leur
cumul.
1 - Le privilège du vendeur
Pour pouvoir bénéficier de ce privilège, le vendeur doit l’inscrire au RC.
Le vendeur doit, à peine de nullité, procéder à cette inscription dans les 15
jours de la date de l’acte de vente. Cette inscription n’a pas besoin de
publication dans les journaux.
L’inscription de ce privilège fera alors bénéficier le vendeur d’un droit de
suite et d’un droit de préférence (V. infra § III).
2 - L’action résolutoire
Au moment de l’inscription de son privilège61, le vendeur peut, en plus,
opter pour l’action résolutoire dans la perspective de récupérer son FC dans le
cas où il y verrait un intérêt. A défaut de paiement, elle lui permettra d’obtenir
l’effacement rétroactif du contrat de vente du FC pour inexécution par l’acquéreur
de son obligation de payer le prix.
Pour pouvoir exercer cette action, le vendeur doit la mentionner et la
réserver expressément lors de l’inscription de son privilège.
c - Les règles protectrices des droits des créanciers du vendeur
Lors de l’exercice de son activité, il est naturel que le commerçant soit
amené à recourir au crédit, que ce soit dans ses relations avec ses fournisseurs
ou avec les établissements de crédit. Il est donc normal qu’il doit procéder,
préalablement à la vente de son FC, à l’apurement de sa situation vis- à- vis de
ses créanciers ; ce qui n’est pas toujours le cas. C’est en prévision de certaines
pratiques malhonnêtes que le législateur a instauré des règles pour protéger ces
créanciers. Ces règles sont normalement destinées à sauvegarder les intérêts
des créanciers chirographaires, mais rien n’empêche, en droit, les créanciers

61
- C'est-à-dire dans les 15 jours de l'acte.

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gagistes de s’en prévaloir ; alors que leur protection est assurée par le droit de
suite, il leur est inutile de recourir à l’application de ces règles62.
Dans le but de protéger les droits des créanciers, trois mécanismes
complémentaires sont mis au point par le législateur : la publicité de la vente du
FC, l’opposition et la surenchère.
1 - La publicité
- Dépôt : Pour que les créanciers soient mis au courant de l’opération de
vente du FC, l’art. 83 du nouveau code impose tout d’abord, une fois l’acte de
vente enregistré, de déposer une expédition de l’acte notarié ou un exemplaire
de l’acte sous seing privé dans les 15 jours de sa date au secrétariat-greffe du
tribunal dans le ressort duquel est exploité le fonds ou le principal établissement
du fonds si la vente comprend des succursales.
- Publication au RC : Ensuite, un extrait de cet acte doit être publié au
RC.
- Publications au BO et journaux d’annonces légales. : Enfin, une
double publication doit être entreprise :
* Une première publication de tout l’extrait inscrit au RC est effectuée sans
délai par le secrétaire-greffier au BO et dans un journal d’annonces légales aux
frais des parties.
* Cette publication doit être renouvelée par l’acquéreur entre le 8ème et
le 15ème jours après la première insertion.
- La sanction : Etant destinés aux créanciers, le défaut de dépôt et de
publicité a pour conséquence que la vente du FC leur est inopposable et
l’acheteur reste tenu des dettes du vendeur (Art. 89). La jurisprudence est claire
à ce sujet, elle considère que l’acquéreur du fonds « n’est pas libéré vis-à-vis des
tiers créanciers. Il demeure susceptible d’être actionné par les créanciers du
vendeur »63. En outre, il reste redevable même à l’égard de l’administration
fiscale.

62
- Cass. civ. 21 décembre 1937, D.H. 1938, p. 65.
63
- Trib. Casablanca, 27 février 1937, G.T.M. 10/4/1937, p. 111.

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2 - L’opposition
Une fois la seconde publicité accomplie, les créanciers du vendeur, même
si leur dette n’est pas encore exigible, ont un délai de 15 jours pour former
opposition au tribunal.
Il ne s’agit pas d’une opposition à la vente du FC, mais au paiement de
son prix au vendeur. Par conséquent, le prix de vente doit rester consigné entre
les mains de l’acheteur pendant le délai de l’opposition et même après ce délai
au cas où des oppositions seraient formées; s’il passe outre cette consignation
et paie quand même le vendeur, il ne sera guère libéré vis-à-vis des tiers (Art .
89).
Afin de remédier à cette situation de blocage du prix de vente, l’art. 85
permet au vendeur, après l’écoulement d’un délai de 10 jours de l’expiration du
délai des oppositions, de saisir en référé le président du tribunal afin de l’autoriser
à percevoir son prix à condition de verser à la caisse du tribunal une somme
suffisante, fixée par le président, pour désintéresser les créanciers opposants.
3 - La surenchère
Tout créancier, qui se rend compte que le prix de vente déclaré est
insuffisant pour désintéresser les créanciers opposants ou inscrits, a la possibilité
de formuler son désir d’acheter lui-même le FC en se déclarant surenchérisseur64
et proposer de payer le prix déclaré majoré d’un sixième du prix des éléments
incorporels.
Lors de la surenchère, à défaut d’un plus fort enchérisseur, le fonds est
adjugé au créancier surenchérisseur du sixième.
§ II - LE NANTISSEMENT DU FC
Le code de commerce réglemente le nantissement du FC sans
déposséder le commerçant qui continue de l’exploiter.
Du reste, pour que le nantissement du FC puisse produire pleinement ses
effets, ses conditions (A) et ses formalités (B) doivent être rigoureusement
respectées.

64
- En réalité, cette procédure a pour objectif de lutter contre les pratiques de
dissimulation du prix réel de la vente.

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A - LES CONDITIONS
Tous les éléments du FC énumérés à l’art. 80 sont susceptibles d’être
compris dans le nantissement à l’exclusion des marchandises, le législateur
entend garder cet élément du fonds aux créanciers ordinaires.
B - LES FORMALITES

Exactement comme pour l’acte de vente, le nantissement du FC doit être


dressé par un acte authentique ou sous seing privé et déposé au tribunal dans
lequel le fonds est inscrit dans les 15 jours de sa date.
Ce dépôt sera suivi de l’inscription d’un extrait de l’acte au RC, mais
aucune publication dans le BO ou les journaux n’est exigée.
Cette inscription du nantissement au RC doit, à peine de nullité, être prise
à la diligence du créancier gagiste dans les 15 jours de l’acte constitutif,
autrement dit, à défaut de cette inscription, le nantissement sera purement et
simplement inopposable aux autres créanciers du propriétaire du FC. Cette
inscription conserve le privilège pendant 5 ans et doit être renouvelée à
l’expiration de ce délai, sinon son effet prend fin et il est procédé à sa radiation
d’office par le greffier (Art. 137).
§ III - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT
DU FC
En dehors de l’action résolutoire qui est propre au vendeur du FC, le
législateur a institué des règles communes à la vente et au nantissement qui ont
pour effet de protéger les droits du vendeur et du créancier nanti ; il s’agit en
l’occurrence du droit de suite et du droit de préférence.
A - LE DROIT DE SUITE
En vertu du premier alinéa de l’art. 122 c.com. « les privilèges du vendeur
et du créancier gagiste suivent le fonds en quelques mains qu’il passe ».
Il s’agit donc de ce droit qui permet aux créanciers privilégiés inscrits et
non payés de saisir le FC entre les mains de n’importe quelle personne et à
quelque titre que ce soit, qu’il s’agisse du propriétaire ou d’un nouvel acquéreur
en vue de le faire vendre aux enchères publiques.
B - LE DROIT DE PREFERENCE
Ce droit permet aux créanciers privilégiés, suite à la vente du FC aux
enchères publiques, de se faire payer sur le prix de la vente par priorité sur les
autres créanciers.

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§ IV - LA GERANCE LIBRE
La gérance libre (ou gérance location) permet au propriétaire de donner la
gérance du fonds à une personne en vertu d’un contrat de location moyennant
un loyer qui peut prendre parfois la forme d’une participation aux bénéfices. Dans
ce cas, le gérant locataire bénéficie de la qualité de commerçant et assume seul
les risques de l’exploitation.
Le code de commerce de 1996 a réglementé pour la première fois la
gérance libre (articles 152 à 158) ; cette réglementation traite de la publicité du
contrat tout en veillant à la protection de tous les intérêts en présence.
A - LES REGLES RELATIVES À LA PUBLICITE
Ayant la qualité de commerçant, le gérant libre doit bien entendu satisfaire
à toutes les obligations du commerçant et notamment se faire immatriculer au
RC (art. 153 al. 1 c. com.). Mais la publicité dont il est question au chapitre relatif
à la gérance libre est de toute autre nature, elle a pour objectif de faire connaître
aux tiers que la propriété du fonds n’appartient pas au gérant.
Pour ce faire, le législateur prévoit trois procédés de publicité :
# Tout d’abord, un extrait du contrat de gérance libre doit être publié dans
les 15 jours de sa date au BO et dans un journal d’annonces légales. Il reste qu’il
est dans l’intérêt du bailleur du fonds d’effectuer cette publicité dans la mesure
où il demeure, jusqu’à la publication et pendant les 6 mois qui suivent,
responsable solidairement avec le gérant des dettes contractées par ce dernier
à l’occasion de l’exploitation du fonds (art. 155).
# Il appartient, en outre, au bailleur du fonds de procéder aux formalités
relatives au RC ; il a le choix entre deux inscriptions :
- soit demander sa radiation du RC ;
- soit requérir la modification de son inscription personnelle avec la
mention expresse de la mise en gérance libre.
Autrement, le bailleur reste solidairement responsable des dettes de son
locataire tant qu’il n’a pas requis ces inscriptions (art. 60 et 155).
# Enfin, quant au gérant, il doit indiquer sur tous ses documents
commerciaux ainsi que sur toutes les pièces signées par lui ou en son nom, son
numéro d’immatriculation au RC avec mention du tribunal où il est inscrit et sa
qualité de gérant libre du fonds sous peine d’une amende de 2 000 à 10 000 dhs.

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B - LES EFFETS DE LA LOCATION-GERANCE


Il s’agit en l’espèce, des effets du contrat de location qui mettent certaines
mesures à la charge du locataire et du bailleur.
- Le premier doit payer le loyer qui peut consister en une participation aux
bénéfices, exploiter le fonds dans les meilleures conditions, ne pas en changer
la destination, c’est-à-dire continuer le même commerce que le bailleur.
En outre, n’étant pas propriétaire du fonds, le gérant ne peut le vendre ni
le donner en nantissement ; il ne peut non plus en sous louer la gestion sans le
consentement du bailleur étant donnée la nature intuitu personae du contrat.
- En contrepartie, le bailleur a pour obligation de mettre tous les éléments
du fonds à la disposition du gérant et ne doit pas en troubler la jouissance,
notamment par la concurrence…

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3EME PARTIE – LES SOCIETES COMMERCIALES


Il n'est pas de doute que les commerçants, personnes physiques, jouent
un rôle considérable dans notre vie économique, mais le pouvoir économique
des entreprises individuelles reste très limité en comparaison avec celui des
sociétés qui puisent leur force de la réunion des associés et de leurs capitaux,
avec des projets économiques plus ambitieux et des bénéfices souvent plus
avantageux.
Les sociétés commerciales sont non seulement plus puissantes dans le
commerce et l'industrie, mais des secteurs d'activités des plus importants ne
peuvent être exploités que par des sociétés anonymes, tels que la banque et les
assurances du secteur commercial.
II – LÉGISLATION
Notre législation des sociétés commerciales est désormais contenue dans
deux lois :
- la loi n° 17/95 relative aux SA, promulguée par dahir du 30 août 199665 ;
- et la loi n° 5/96 relative aux autres sociétés, promulguée par dahir du 13 février
199766.

65
- BO n° 4422 du 17/10/1996, p.661. Cette loi a été modifiée par la loi 20-05 promulguée par
dahir n° 1-08-18 du 23 mai 2008, B.O. n°5640 du19/06/2008 ; la loi 21/05 promulguée par dahir
du 14 février 2006 modifiant la loi 5/96, B.O. n° 5400, du 2 mars 2006 et son article 19 a été
modifié par la loi 23-01 promulguée par dahir n°1-04-17 du 21/4/2004 modifiant la loi relative
au CDVM du 21/9/1993, B.O. du 6/5/2004.
66
- BO n° 4478 du 1/5/1997, p. 482.Cette loi a été modifiée par la loi 21-05 du 14/2/2006 BO
n° 5400 du 2/3/2006 et par la loi 24-10 du 2 juin 2011 BO n° 5956 bis du 30/6/2011.

83
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CHAPITRE 1 - LE CONTRAT DE SOCIÉTÉ


Section 1 – LES CONDITIONS DE FORMATION
DES SOCIÉTÉS
§ 1 – LES CONDITIONS DE FOND
En vertu de l’article 982 «la société est un contrat par lequel deux ou
plusieurs personnes mettent en commun leurs biens ou leur travail, ou tous les
deux à la fois, en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter».
Il se dégage de cet article que le contrat de société est soumis à trois
conditions de fond qui concernent les associés, les apports, le partage des
bénéfices.
A – LES ASSOCIES
S'agissant d'un contrat, les associés doivent d'abord remplir les conditions
relatives à la capacité avant de s'intéresser au nombre d'associés exigé par la
loi.
a - La capacité
Il s’agit bien entendu de la capacité de s’obliger, à savoir l’aptitude à
contracter société.
Pour la souscription ou l'acquisition des parts ou actions de sociétés, les
mineurs incapables67 doivent être représentés par leur tuteur légal (père ou mère)
ou, après autorisation du juge, par leur tuteur testamentaire ou datif, puisque
l'acte de société est considéré par le D.O.C. comme un acte de disposition (art.
11 al. 2).
A l'âge de 16 ans, le mineur émancipé peut être actionnaire d'une SA ou
d'une commandite par actions, commanditaire dans une commandite simple, ou
associé d'une SARL.
Cependant, dans les sociétés de personnes qui nécessitent la qualité de
commerçant, l’entrée d’un mineur, même émancipé, est subordonnée aux

67
Qui n'ont pas atteint l'âge de la majorité légale qui est actuellement de 18 années grégoriennes
révolues.

84
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conditions spéciales du droit commercial. Le mineur ne peut donc être associé


dans une société en nom collectif, ou commandité dans une société en
commandite simple ou par actions que s'il est autorisé à faire le commerce.
b – Le nombre d'associés
Selon le principe posé par l'article 982 D.O.C. une société peut être
constituée au moins par deux associés.
Quant aux sociétés commerciales, le nombre minimal d’associés varie
selon le type de société : 5 pour la SA, 3 commanditaires au moins et un ou
plusieurs commandités pour la société en commandite par actions, deux pour la
SARL et un seul pour la SARL à associé unique et ce, et deux associés pour la
SNC.
B – LES APPORTS
On distingue trois types d’apports.
a. Les apports en numéraire
Ce sont les espèces (argent) apportées par les associés pour constituer
la société. Chaque associé remet aux fondateurs sa quote-part financière lors de
la constitution de la société.
b. Les apports en nature
Ils sont constitués par différents types de biens, autres que le numéraire,
susceptibles d’être capitalisés.
Ces apports peuvent prendre la forme d’immeubles (bâtiments, terrains,
etc.) ou de meubles corporels (ordinateurs, bureaux, machines, véhicules, etc.),
ou incorporels (brevets, fonds de commerce, logiciels, etc.)
Ces apports doivent faire l’objet d’une évaluation. Pour cela les associés
doivent, dans les sociétés autres que les sociétés de personnes, faire appel à
des commissaires aux apports chargés de donner, sous leur responsabilité, une
valeur à ces apports.
c. Les apports en industrie
Ils sont constitués par le savoir-faire de certains associés et ne sont
possibles que dans les sociétés de personnes et, dans certaines conditions, dans
les SARL. N’étant pas saisissables, ils n’entrent pas dans la constitution du
capital social (ce sont des apports non capitalisés).

85
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En revanche, ils donnent droit à une part des bénéfices et rendent leur
titulaire responsable des dettes de la société à concurrence de l’évaluation de la
valeur de son apport.
C – LE PARTAGE DES BENEFICES
La société est constituée dans le but de faire des bénéfices ou de profiter
d’une économie. Ainsi, chaque associé recevra une part des bénéfices au prorata
de ses apports. Ces règles s’appliquent également à la contribution des associés
aux pertes.
§ 2 – LES CONDITIONS DE FORME
Pour exister, une société doit remplir des conditions de forme
particulières ; elles sont identiques, à peu de chose près, pour toutes les sociétés.
A – LES STATUTS
C’est l’acte fondateur de la société ; il consiste dans la rédaction et la
signature des statuts.
En principe, en vertu de l’article 987 D.O.C., le contrat de société est
simplement consensuel, c'est-à-dire que seul le consentement des parties est
nécessaire pour constituer une société ; cependant, s'agissant des sociétés
commerciales, il est obligatoire que les statuts soient établis par écrit.
Les statuts peuvent prendre la forme d’acte sous seing privé ou d’acte
authentique. Ils contiennent des indications sur :
- l’identité de la société (forme, objet social, siège social, durée, capital
social, etc.),
- celle des associés apporteurs (nom, domicile, types d’apport, montant,
etc.),
- ainsi que les règles de fonctionnement qui la régissent (gérance, tenue
des assemblées, partage des bénéfices, etc.).
B - SOUSCRIPTION DU CAPITAL ET LIBERATION DES APPORTS
Une société ne peut être constituée que si tous les titres émis sont
souscrits par les associés.
a - La libération des apports en numéraire
La libération est l’exécution de la souscription par la réalisation de l’apport
promis, soit en numéraire, soit en nature.

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En principe, la libération des apports se fait en totalité dès la constitution


des sociétés. Cependant, les actions en numéraire des S.A. et les parts en
numéraire des SARL (si capital il y a) doivent être libérées lors de la souscription
au moins du quart de leur valeur nominale, mais il peut être prévu que la libération
doit être intégrale dès la souscription.
Sinon, s'agissant de la S.A., la libération des 3/4 restants doit intervenir en
une ou même en plusieurs fois suivant la décision du conseil d’administration ou
du directoire dans un délai qui ne peut dépasser 3 ans à compter de
l’immatriculation de la S.A. au RC.
Et pour la SARL, la libération du surplus peut intervenir en une ou
plusieurs fois sur décision du gérant dans un délai qui ne peut excéder 5 ans à
compter de la date d’immatriculation.
b - La libération des apports en nature
Les apports en nature doivent être intégralement libérés lors de la
constitution de toute sorte de société commerciale.
Ces apports doivent être transférés à la société en formation, mais après
avoir été vérifiés.
S'agissant des S.A., les fondateurs désignent un ou plusieurs
commissaires aux apports qui établissent un rapport sur l'évaluation des apports
en nature.
S'agissant de la SARL les commissaires aux apports sont obligatoires:
- quand la valeur d’un des apports dépasse 100 000 dh;
- et si le total des apports en nature est supérieur à la valeur de la moitié
du capital social (article 53).
Concernant les sociétés de personnes, l'évaluation des apports ne pose
pas de problème vu la responsabilité illimitée des associés.
C - LE DEPÔT DES FONDS EN BANQUE
Cette formalité n'est prévue que pour les sociétés qui exigent un capital
minimum, notamment la S.A. (art. 22) ; la SARL n’est actuellement soumise à
cette formalité que lorsque le capital prévu par les associés dépasse 100 000 dhs
selon la loi 24-10) (art. 51). Cette formalité a pour objectif d’éviter la création de
sociétés à capitaux fictifs.

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En effet, les fonds provenant des souscriptions en numéraire doivent être


obligatoirement déposés par les fondateurs au nom de la société en formation,
dans les 8 jours de leur réception, dans un compte bancaire bloqué avec la liste
des souscripteurs indiquant les sommes versées par chacun d’eux.
D - LA DECLARATION DE SOUSCRIPTION ET DE VERSEMENT
Cette formalité ne concerne que les S.A. Lorsque le capital est
intégralement souscrit et les versements exigés sont effectués de manière
régulière, les fondateurs doivent établir une déclaration constatant ces opérations
soit par acte notarié, soit par acte sous seing privé ; dans ce dernier cas, l’acte
doit être déposé au greffe du tribunal du lieu du siège social68.
E – LES FORMALITES DE DEPÔT AU TRIBUNAL
Les fondateurs de la société doivent déposer au tribunal du lieu du siège
social un certain nombre de pièces notamment :
- deux copies ou deux exemplaires des statuts certifiés conformes par le
représentant de la société ;
- les actes de nomination des premiers dirigeants,
- le cas échéant, le rapport du commissaire aux apports etc.
F – LA PUBLICITE DE LA CONSTITUTION
Afin d’assurer une plus grande transparence de la vie des sociétés et de
protéger leurs partenaires commerciaux, des conditions de publicité ont été
rendues obligatoires.
Après le dépôt des statuts et autres pièces au tribunal, les fondateurs
doivent faire une demande d’immatriculation au registre du commerce qui
permettra à la société d’acquérir la personnalité morale.
Ensuite, dans les 30 jours de l'immatriculation de la société au registre du
commerce, les fondateurs doivent faire publier un extrait des statuts dans un
journal d’annonces légales et au bulletin officiel. Cet extrait doit mentionner les
renseignements essentiels sur la constitution de la nouvelle société (forme,

68
- On constatera que, contrairement à l’article 1 alinéa 9 de la loi de 1922, la DSV n’est plus
obligatoirement notariée.

88
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dénomination, siège social, durée, montant du capital, etc.) ; il doit également


contenir le numéro de l'immatriculation de la société au registre de commerce69.

Section 2 – ATTRIBUTS DES SOCIÉTÉS


Il s’agit d’étudier successivement les caractéristiques de la société.
§ 1 – LA DENOMINATION SOCIALE
Comme toutes les personnes juridiques, les sociétés s’identifient par un
nom ; c’est la dénomination sociale, qui peut être choisie sans limitation de
possibilités.
Certaines sociétés ont une raison sociale telles que les sociétés civiles. Il
s’agit d’une identification qui comprend tout ou partie des noms des associés
suivis de «et compagnie», exemple : société BENCHEKROUN, BENJELLOUN
et compagnie.
Actuellement les sociétés de personnes ne sont plus obligées d'adopter
une raison sociale ; quant aux autres sociétés commerciales, elles doivent,
obligatoirement, avoir une dénomination sociale.
§2 – LE SIEGE SOCIAL ET LA NATIONALITE
L'intérêt de la question est double : au niveau national et au niveau
international.
A – AU NIVEAU NATIONAL

Le siège social, qui doit être mentionné dans les statuts, représente le
domicile de la société :
- il permet de la localiser pour accomplir certaines opérations
(correspondances, impôts, etc.),
- les actions en justice contre la société doivent être intentées devant le
tribunal de son siège social,
- il permet aussi de déterminer le lieu des formalités de dépôt et de
publicité.

69
Loi 21/05 promulguée par dahir du 14 février 2006 modifiant la loi 5/96, B.O. n° 5400, du 2
mars 2006 et loi 20/05 concernant la S.A.

89
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- il détermine en outre la nationalité de la société qui est celle du pays où


se situe son siège social. L’importance de la nationalité est considérable
puisqu’elle définit les lois applicables à la société (formation, fonctionnement,
etc.).
B – SUR LE PLAN INTERNATIONAL : SOCIETES INTERNATIONALES ET SOCIETES

multinationales
Il existe cependant des sociétés qui ne sont régies par aucune loi
nationale, il s'agit des sociétés internationales qui sont comparées par certains
auteurs aux personnes physiques apatrides, avec cette différence qu'elles sont
créées par des conventions internationales (entre Etats) et régies par leurs seuls
statuts sans être rattachées à une loi nationale. On peut citer comme exemples
le S.A.S. (Scandinavian Air Lines System), la S.F.I. (Société financière
Internationale) etc.
A la différence des sociétés internationales, les sociétés multinationales
ont plusieurs nationalités. Ce sont des sociétés qui forment un groupe
(comprenant une société mère et des filiales70) implanté sur le territoire de
plusieurs Etats et chaque unité du groupe bénéficie d'une autonomie juridique. Il
s'agit en fait d'une seule personne morale à laquelle les différents États attribuent
la nationalité.
En réalité, malgré ces différentes nationalités, presque toutes les
multinationales sont des sociétés qui n'ont qu'une seule nationalité, celle de la
société dominante dont les dirigeants possèdent le pouvoir réel de décision ; c'est
le groupe (composé de toutes les unités) qui est qualifié de "multinationale". On
citera comme exemples General motors, I.B.M., Nestlé, Air Afrique, etc.
§3 – LE PATRIMOINE
Le patrimoine de la société se compose de l’actif, constitué par les apports
en numéraire et en nature des associés et par les biens acquis par elle à
l’occasion de son activité (meubles et immeubles), ainsi que du passif, qui

70
Alors qu'une filiale n'a pas de personnalité morale distincte de la société, une succursale est
une annexe de l'entreprise gérée par la société mais qui a une personnalité morale propre.

90
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comprend l’ensemble des dettes de la société (les emprunts, les créances des
fournisseurs, les impôts, etc.)71
La société a un patrimoine qui lui est propre. On parle d'autonomie du
patrimoine, car il ne se confond pas avec celui des associés. Ainsi, l’actif de la
société n’appartient pas aux associés qui sont seulement titulaires de droits
pécuniaires et non pécuniaires envers la société par la possession de parts ou
d’actions.
Les créanciers personnels des associés ne pourront en aucun cas saisir
le patrimoine social pour éteindre leurs créances. D’autre part, le passif de la
société ne peut être imputé sur le patrimoine des associés à l’exception des
sociétés de personnes dans lesquelles la responsabilité des associés est
indéfinie.

Section 4 – CLASSIFICATION DES SOCIÉTÉS DE


DROIT PRIVE
La classification des sociétés de droit privé nécessite de nombreuses
distinctions. Outre la distinction entre les sociétés civiles et les sociétés
commerciales, au sein de ces dernières s'opposent les sociétés de personnes
aux sociétés de capitaux ; et les SARL y occupent une place particulière.
§ 1 – SOCIÉTÉS CIVILES ET SOCIÉTÉS COMMERCIALES
Les sociétés sont civiles ou commerciales selon la nature de leur activité.
Sont civiles, les sociétés dont l’activité est de nature civile (agriculture,
pêche etc.) et commerciales, celles qui exercent l’une des activités commerciales
prévues par l’article 6 du code de commerce.
Toutefois, le législateur a décidé que toutes les sociétés qui prendraient
une des formes juridiques suivantes seraient considérées des sociétés
commerciales quel que soit leur objet : SA, SARL, Société en Nom Collectif

71
- Il ne faut pas confondre patrimoine social et capital social. Alors que le premier comprend et
l’actif et le passif de la société, le capital social représente le montant des apports effectués par
les associés au profit de la société, il peut être augmenté par de nouveaux apports ou par
incorporation de réserves, il peut même parfois être réduit.

91
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(SNC), Société en Commandite Simple (SCS) ou par actions (SCA). On dit


qu’elles sont commerciales par la forme.
§ 2 – SOCIÉTÉS DE PERSONNES ET SOCIÉTÉS DE CAPITAUX
A – LES SOCIETES DE PERSONNES (SNC ET SCS)
Ce sont des sociétés qui se caractérisent par :
- la prédominance du facteur personnel (l’intuitu personae) dans leur
constitution et leur fonctionnement ;
- l’engagement des associés au-delà de leurs apports, leur responsabilité
sera illimitée, c'est-à-dire solidaire et indéfinie ;
- en contrepartie de leur apport, les associés reçoivent des parts d’intérêts
ou parts sociales, qui sont des valeurs non négociables, c'est-à-dire qu’elles ne
sont cessibles que par la voie civile.
B – LES SOCIETES DE CAPITAUX OU PAR ACTIONS (SA ET SCA)
Dans ce type de sociétés :
- la considération de la personne est indifférente, la somme des apports
individuels compte plus que la personne des apporteurs ;
- chaque associé n’est tenu que jusqu’à concurrence de son apport ;
- les associés reçoivent des actions qui sont négociables.
§ 3 – LA SARL
C’est une société à mi-chemin entre les deux groupes précédents :
- comme dans les sociétés de capitaux, les associés ne sont engagés que
jusqu’à concurrence de leurs apports ;
- comme dans les sociétés de personnes, les associés se connaissent
(intuitu personae) ;
- et les parts sociales ne sont pas négociables.

TABLEAU COMPARATIF DES CARACTERISTIQUES DES SOCIETES


COMMERCIALES
LES SOCIETES DE LES SOCIETES DE
PERSONNES LA SARL CAPITAUX
S.N.C. + SCS S.A + SCA
Intuitu personae Intuitu personae Les apports (capital)
Responsabilité illimitée Responsabilité limitée Responsabilité limitée

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Parts sociales Parts sociables Actions


(non négociables) (non négociables) (négociables)

§ 4 – LES SOCIÉTÉS SANS PERSONNALITE


Dépourvues de la personnalité juridique, ces sociétés ont la qualité civile
lorsqu’elles ont pour objet une activité civile, mais lorsqu’il est commercial, elles
sont régies par les dispositions relatives à la SNC. Il s’agit de la société en
participation et de la société créée de fait qu'il ne faut pas confondre avec la
société de fait.
A – LA SOCIETE EN PARTICIPATION
Réglementée par la loi 5/96 (articles 88 à 91), la société en participation
est la plus simple des sociétés dans la mesure où la loi n’exige pour sa
constitution aucune condition de forme, ni de publicité ; de plus, elle n’a pas de
personnalité morale puisqu’elle n’est pas soumise à l’immatriculation (art 88), elle
est donc dépourvue de dénomination ou raison sociale, de siège social et de
patrimoine social.
La société en participation n'est pas destinée à être connue des tiers, elle
n'a d'existence que dans les rapports entre associés.
Elle peut être créée de fait72.
L'intérêt de cette société est grand pour les personnes qui ne désirent pas
dévoiler leur société.
La société en participation peut être utilisée de manières très diverses,
allant de l'achat d'un objet déterminé (coûteux) jusqu'à l'association entre des
sociétés industrielles très puissantes (par exemple pour la réalisation d'un projet
commun nécessitant des fonds très importants); cette structure est utilisée même
par les banques pour former un pool entre elles afin de financer une transaction
sollicitant des fonds considérables.

72
C'est-à-dire sans avoir l'intention de créer une société en participation.

93
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"La pratique montre bien que la société en participation est


essentiellement utilisée sur des projets à durée déterminée sur une courte
période ou limités à une opération spécifique"73.
Selon l'article 89 de la loi 5/96, l'objet, les droits et les obligations des
associés et les conditions de gérance de la société sont convenus librement par
les associés, à condition de respecter les dispositions de contrat de société
prévues par le D.O.C.
Les apports des associés, qui sont censés rester la propriété des
apporteurs, ne deviennent pas la propriété de la société, ils sont simplement
remis au gérant, de même les bénéfices tombent dans le patrimoine du gérant
qui devient le débiteur des associés.
Le gérant traite les affaires de la société en son nom personnel ; toutefois,
la société peut être connue des tiers (ostensible) et dans le cas contraire, elle est
occulte74.
Étant donné le caractère occulte de la société, les associés ne peuvent
pas tous assurer la gérance de la société, ils ne peuvent accomplir que des actes
de gestion interne. Le gérant, étant censé agir en son nom personnel, il est seul
engagé à l'égard des tiers. Mais si les associés agissent en leur qualité
d'associés avec les tiers, ils révèlent ainsi leur société (par exemple ouvrir un
compte au nom de la société ou faire révéler un nom social sur les documents
de la société, etc.), la société devient alors ostensible.
Dans ce cas, si l'objet social est commercial, la société en participation se
transforme en société en nom collectif avec la responsabilité indéfinie et solidaire
des associés ; sinon, elle est civile.
Les associés sont donc liés par un contrat de société qu’ils doivent
respecter de la même façon que dans les autres sociétés.

73
Mamouni D. thèse précitée, n° 40.
74
- C’est pourquoi le législateur n’en exige aucune formalité de publicité. Ce caractère occulte
ne joue qu’à l’égard des tiers et non pas vis-à-vis de l’administration fiscale ; la société doit se
faire déclarer. En effet, les bénéfices réalisés sont soumis à l’impôt sur les sociétés si un seul
associé est une personne morale, et à l’impôt sur le revenu si tous les participants sont des
personnes physiques; néanmoins ces derniers peuvent décider de soumettre leur société à l’impôt
sur les sociétés.

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B –SOCIETE CREEE DE FAIT / SOCIETE DE FAIT


- La société de fait est une société dont les associés ont voulu agir en tant
qu’associés, mais dont la société a continué de fonctionner tout en étant
entachée d’un vice de constitution, par exemple défaut d’un élément constitutif
essentiel qui entraîne l’annulation du contrat de société.
Avant sa nullité cette société a pu prendre une des formes des sociétés
(par exemple une SA, une SARL, etc.), elle a pu être immatriculée au registre de
commerce et partant avoir déjà acquis la personnalité juridique.
Cette nullité n'a cependant d'effet que sur l'avenir, les actes
antérieurement effectués sont valables, cette nullité étant inopposable aux tiers.
Cette théorie jurisprudentielle qui a pour utilité de valider les actes
antérieurement accomplis par la société75, a perdu tout son intérêt depuis la loi
17/95 relatives aux S.A. qui dispose dans son article 346 que "lorsque la nullité
de la société est prononcée celle-ci se trouve de plein droit dissoute sans
rétroactivité". (Cet article est applicable à toutes les autres sociétés par renvoi de
l'article 1 de la loi 5/96)
- La société créée de fait est une société dont les associés se sont
comportés, en fait, comme des associés sans qu’ils en soient conscients, c'est-
à-dire sans avoir voulu créer une société. C’est une société dont tous les
éléments fondamentaux du contrat de société sont réunis mais, contrairement à
la société de fait, elle n'a jamais acquis la personnalité morale.
"Si la preuve de l’existence d’une société créée de fait peut se faire par
tous les moyens conformément à l’alinéa troisième de l’article 88 de la loi 5-96,
dans la pratique, cette fiction ne trouve d’intérêt à être percée à jour, que dans
deux situations. En premier lieu lorsque la relation entre les partenaires devient
conflictuelle et que l’un d’entre eux a intérêt à prouver l’existence d’une société
créée de fait pour en obtenir la liquidation et le partage du boni qui en résultera.

75
Voir cour d'appel de Casablanca 10-XIII- 1985, GTM, N;S;, 1986, n°45, p. 422 qui avait jugé
que "l'une des conséquences de ce jugement (prononçant la nullité) est qu'il en fait une société de
fait"

95
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Dans ce cas, le partenaire doit prouver l'existence de toutes les conditions


constitutives de la société.
En second lieu lorsque la demande vient de la part d’un créancier qui
souhaitant être désintéressé recourt à cette technique de la société
créée de fait qui « entraine une véritable responsabilité collective »
des partenaires se retrouvant ainsi solidairement tenus aux dettes
sociales"76. La jurisprudence a estimé en effet que " Si l’existence effective
d’une société de fait exige la réunion des trois éléments constitutifs de toute
société (existence d’apports, intention des parties de s’associer, vocation des
parties à participer aux bénéfices et aux pertes), l’apparence d’une société
de fait s’apprécie globalement, indépendamment de l’existence apparente de
chacun de ces éléments77 ».

Après sa découverte, cette société sera considérée comme société de


droit commun, mais si elle exerce une activité commerciale, elle sera considérée
comme une société en nom collectif entraînant la responsabilité indéfinie et
solidaire des associés.

CHAPITRE 2 – LES SOCIÉTÉS DE PERSONNES


Il s'agit de la société en nom collectif et de la société en commandite
simple.

Section 1 – LA SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF


La SNC est régie par les articles 3 à 18 de la loi 5/96.

76
Mamouni D. La liberté contractuelle en droit des sociétés", Thèse de doctorat, Université
Mohammed V, FSJES Rabat
77
Civ. 1ère, 13 nov. 1980, D. 1981. 541, note Calais-Auloy, Com. 3 nov. 1988, Bull. civ. IV, no 289.

96
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§ 1 – LES CARACTERES GENERAUX


A – LE CAPITAL ET LA RESPONSABILITÉ
Elle ne nécessite pas de capital minimal. Les apports peuvent être faits en
numéraire, en nature ou en industrie ; ils donnent droit à l’attribution de parts
sociales d’égale valeur choisie par les associés.
Toutefois, la responsabilité des associés constitue une contrepartie à la
faiblesse de ce capital ; en effet, ces derniers sont responsables indéfiniment et
solidairement des dettes de la société.
B – LA CAPACITÉ DES ASSOCIÉS
L’article 3 de la loi 5/96 considère que tous les associés de la SNC ont la
qualité de commerçant. Partant, la capacité commerciale est requise des
associés. De fait, certaines catégories de personnes ne peuvent être associées
dans la SNC ; ce sont :
- les mineurs, même émancipés, s’ils ne sont pas autorisés à faire le
commerce ;
- les majeurs interdits ;
- les personnes dont la profession n’est pas compatible avec la qualité de
commerçant (avocat, fonctionnaire, etc.) ;
- les personnes dont l’activité commerciale se trouve interdite à raison
d’une incapacité ou d’une déchéance.
§ 2 – LA GESTION DES SOCIÉTÉS EN NOM COLLECTIF
A – LES CONDITIONS DE LA GERANCE
Le fonctionnement de la société est assuré par un ou plusieurs gérants
nommés dans les statuts (gérant statutaire) ou par acte ultérieur.
Sans stipulation des statuts, tous les associés sont gérants78.
Si le gérant est associé, sa nomination requiert l’unanimité ; dans le cas
contraire, les statuts fixent librement les conditions de sa nomination.

78
Il faut par exemple mentionner dans les statuts que "la société sera dirigée par un ou deux ou
trois…gérants nommés par assemblée générale…" ; à défaut d'une disposition de ce genre, tous
les associés seront considérés des gérants.

97
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Le gérant peut être une personne physique ou morale, dans ce dernier


cas, la personne morale doit désigner son représentant qui sera responsable de
la même manière que les personnes physiques.
Le gérant doit avoir la capacité de faire le commerce, qu'il soit associé ou
non ; mais n’est pas obligatoirement commerçant dans le cas où il ne ferait pas
partie de la société (il n'est dans ce cas que mandataire).
Il lui est possible de cumuler plusieurs mandats de gérant dans plusieurs
sociétés ; mais il lui est interdit d'exercer une activité similaire à celle de la
société, sauf s'il est autorisé par les associés.
Sa rémunération est fixée par les statuts ou par décision ultérieure des
associés.
B – LES POUVOIRS DU GERANT
Il est habituel de distinguer les pouvoirs du gérant dans ses rapports avec
les associés et dans ses rapports avec les tiers.
a - Les pouvoirs du gérant face à ses associés
Dans les rapports avec les associés, le gérant peut accomplir tous les
actes de gestion dans l’intérêt de la société ; toutefois, les statuts prévoient
souvent une limitation de ses pouvoirs en soumettant certains actes à
l’autorisation préalable des associés (vente d’immeubles, dépenses excessives,
constitutions de sûretés, etc.).
b - Les pouvoirs du gérant face aux tiers
Dans ses rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes
qui entrent dans le cadre de l’objet social, par conséquent, et contrairement à la
SARL, la société n'est pas tenue par les actes du gérant qui dépassent l'objet
social. Les clauses statutaires limitant les pouvoirs des gérants sont
inopposables aux tiers.
§ 3 - LES REGLES CONERNANT LES ASSOCIÉS
A – LA CESSION DES PARTS
L’associé qui veut vendre ses parts sociales doit obtenir l’autorisation de
tous les autres associés. En effet, dans les sociétés de personnes où les
associés sont peu nombreux, ces derniers doivent se protéger contre l’intrusion
de personnes indésirables dans la mesure où «l’intuitu personae» est très fort.

98
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Lorsque l’agrément est refusé, l’associé doit rester dans la société ou


provoquer sa dissolution par une décision de justice pour "justes motifs".
B - LA RESPONSABILITÉ DES ASSOCIÉS
En cas de non-paiement des dettes par la société et 8 jours79 après la mise
en demeure de celle – ci par acte extrajudiciaire80, les créanciers peuvent
poursuivre les associés en paiement de l’intégralité du passif.
La responsabilité étant solidaire et indéfinie, les associés peuvent être
tenus de payer l’ensemble des dettes sur leurs biens personnels et un associé
risque, s’il est solvable, de payer les dettes des autres associés insolvables
(c'est-à-dire toute la dette sociale). Il aura toutefois par la suite la possibilité de
se retourner contre eux pour récupérer les sommes payées indûment (action
récursoire).

Section 2 - LA SOCIÉTÉ EN COMMANDITE SIMPLE


La société en commandite simple est réglementée par les articles 19 à 30
de la loi 5/96 et par certaines dispositions qui régissent la SNC.
§ 1 - LES CARACTERES GENERAUX
A- LES ASSOCIÉS
La société en commandite simple (ou société par intérêt) est une société
de personnes qui se caractérise par la coexistence de deux catégories d'associés
:
 des commandités qui ont le statut d'associés en nom collectif
 et des commanditaires qui ne répondent des dettes sociales qu'à
concurrence du montant de leur apport et qui n'ont pas, à ce titre,
la qualité de commerçant (article 20 loi 5/96).
Pour être valablement constituée, elle doit comprendre au moins deux
associés : un commandité et un commanditaire. Pour être commanditaire, il suffit
donc d'avoir la capacité civile.

79
- Ce délai peut être prolongé par ordonnance du président du tribunal, statuant en référé, une
seule fois et pour la même durée (article 3 alinéa 2).
80
- Il s’agit d’un acte dressé par un auxiliaire de justice (avocat, huissier de justice, etc.) en
dehors de toute procédure, c'est - à - dire avant toute action en justice.

99
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

B - LES APPORTS ET LE CAPITAL


Les commandités ont la possibilité de réaliser toute sorte d'apport, y
compris en industrie ; par contre, il est interdit aux commanditaires de faire des
apports en industrie.
La société en commandite simple ne nécessite pas non plus de capital
minimum puisque les commandités sont responsables solidairement et
indéfiniment ; ce qui constitue une garantie suffisante pour les créanciers
sociaux.
§ 2 - LA GESTION DE LA SCS
En ce qui concerne la gestion, ce sont les mêmes règles de la société en
nom collectif qui s'appliquent à la société en commandite simple 81. Dans la
mesure où les commandités sont les seuls à être responsables indéfiniment et
solidairement des dettes sociales, seuls leurs noms peuvent figurer dans la
dénomination sociale et ils sont les seuls à pouvoir s'occuper de la gestion de la
société.
Quant aux commanditaires, ils ne peuvent jamais être chargés de la
gestion puisqu'aux termes de l'article 25 "l'associé commanditaire ne peut faire
aucun acte de gestion engageant la société vis-à-vis des tiers, même en vertu
d'une procuration" sous peine de répondre solidairement et indéfiniment avec les
commandités des dettes sociales qui résultent des actes prohibés ou même de
l'ensemble des dettes si ces actes sont nombreux ou importants. Leur pouvoir se
limite donc aux décisions collectives.

81
Y compris la question relative au dépassement de l'objet social et des limites statutaires.

100
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

CHAPITRE 3 – LA S A R L
Actuellement, elle est régie par les articles 44 à 87 de la loi 5/96.
La SARL est considérée comme une société hybride dans la mesure où
elle possède certaines caractéristiques des sociétés de personnes et d’autres
des sociétés de capitaux.
Depuis la loi 5/96, il est devenu possible de créer une SARL à «associé
unique».

Section 1 – CARACTERES GENERAUX


§ 1 – CAPITAL ET RESPONSABILITE
Fixé par la loi 5/96 à 100 000 dhs, le capital minimum de la SARL a été
réduit à 10 000 dhs en 200682 "afin de lutter contre l’informel". Malgré la modicité
de ce capital, la loi 24-10 a estimé qu’il « constitue une barrière à l’entrée pour
les entrepreneurs qui souhaitent formaliser leur activité sous la forme sociétale »,
raison pour laquelle elle a carrément supprimé le capital social. "Le capital de
la société à responsabilité limitée est librement fixé par les associés dans les
statuts", prévoit le nouvel art. 46.
Comme dans les sociétés de personnes, lorsqu'un capital est prévu, les
apports sont représentés par des parts sociales égales, dont le montant nominal
était fixé initialement à 100 dh, ensuite à 10 dh. La loi 24-10 prévoit seulement
que le capital social est divisé en parts sociales à valeur nominale égale, ce qui
veut dire qu’il appartiendra désormais aux associés de déterminer la valeur
nominale.
Tout en supprimant le capital social, la loi 24-10 continue quand même à
interdire les apports en industrie dans la SARL (Art. 51 al. 3). Cependant, dans
notre système juridique si l'on interdit les apports en industrie dans une société,
c'est à cause de la responsabilité limitée des associés ; en plus du fait qu'ils ne
sont ni capitalisables ni saisissables.

82
Depuis la loi 21/05 promulguée par dahir du 14 février 2006, B.O. n° 5400 du 2 mars 2006.

101
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Or, actuellement si la société est constituée sans aucun capital, les


associés n’y feront aucun apport, ni en nature ni en numéraire ni, bien sur en
industrie, on se demandera alors à quoi va se limiter leur responsabilité ?
Malgré l’interdiction des apports en industrie dans la S.A.R.L., la loi 5/96
a quand même adopté une exception qui est d'ailleurs assorties d'un certain
nombre de conditions : l'apport en industrie ne peut être effectué dans la SARL
que s'il est lié à un apport en nature, par exemple lorsque l'apporteur apporte
un fonds de commerce à la société qui fait partie de l'activité de la société, il
pourra continuer à le gérer et l'on considérera cette gestion du fonds de
commerce comme un apport en industrie.
L’avantage de ce type de société consiste dans la responsabilité des
associés qui est limitée au montant de leurs apports. En cas de difficultés, leur
patrimoine personnel ne sera pas mis en cause comme dans les SNC.
Cependant, en pratique, cette limitation de responsabilité est souvent mise
en échec par le mécanisme du cautionnement bancaire demandé aux associés,
qui subordonne les prêts octroyés aux entreprises à la mise en œuvre d’une telle
garantie.
§ 2 – CAPACITE ET OBJET SOCIAL
A – LA CAPACITÉ DES ASSOCIÉS
Le nombre d’associés est limité à 50 ; au-delà de ce seuil, la SARL doit se
transformer en SA. À défaut de régularisation dans les deux ans, la SARL sera
dissoute de plein droit.
Pour devenir associé, la capacité civile suffit, contrairement à la SNC dans
laquelle la qualité de commerçant est indispensable.
B – L'OBJET SOCIAL
Certaines activités sont interdites à la SARL, l'article 44 al. 2 de la loi
dispose à ce sujet que les sociétés notamment de banque, du crédit, de
l’assurance, etc. ne peuvent adopter la forme de la SARL. Cette dérogation au
principe libéral s'explique par une certaine crainte du législateur quant au crédit
et à la solvabilité d'une telle société.

Section 2 – LA GESTION DE LA S.A.R.L.

102
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

§ 1 – LE GERANT
A – LES CONDITIONS DE LA GÉRANCE
La SARL est dirigée par un ou plusieurs gérants, qui est obligatoirement
une personne physique83, associé ou non84.
D’autre part, certaines professions sont incompatibles avec la fonction de
gérant (les fonctionnaires par exemple).
Le cumul de mandats de gérant dans deux ou plusieurs SARL est
possible. Mais il est interdit au gérant d'exercer une activité similaire à celle de la
société, à moins qu'il ne soit autorisé par les associés.
La durée des fonctions de gérant relève des statuts ou de l’acte de
nomination, à défaut, elle est légalement fixée à 3 ans.
Sa rémunération est fixée par les statuts ou par décision ultérieure des
associés.
B – LA CESSATION DES FONCTIONS DE GÉRANT
Le gérant de la SARL a la possibilité de démissionner et les associés
peuvent le révoquer par décision représentant au moins trois quarts des parts
sociales (art. 69).
§ 2 – POUVOIRS DES GERANTS
Ils sont identiques à ceux des gérants de la SNC (v. art. 63).
Il existe toutefois une différence quant à l’engagement de la société vis-à-
vis des tiers. En effet, si pour la SNC la société est engagée dans la limite de
l’objet social, la SARL se trouve tenue de tous les actes de gestion du gérant
même s’ils dépassent l’objet social.
Les limites statutaires des pouvoirs du gérant sont inopposables aux tiers.

Section 3 – LA SITUATION DES ASSOCIÉS

83
- On verra plus loin qu'il en est de même en ce qui concerne les SA pour le président du conseil
d'administration, le directeur général, les directeurs généraux délégués, le président et le vice-
président du conseil de surveillance ainsi que pour les membres du directoire.
84
- Cette possibilité de nommer un gérant étranger est très utile lorsque tous les associés sont
des personnes morales.

103
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

§ 2 – LES POUVOIRS DES ASSOCIÉS


A l’occasion des assemblées générales, les associés vont pouvoir
pleinement exercer leur pouvoir. En effet, leur vote permettra d’orienter l’activité
de la société comme ils le souhaitent. Il existe deux types d’assemblées
(ordinaire et extraordinaire).
A – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE ANNUELLE
Elle doit se tenir dans les 6 mois qui suivent la clôture de l’exercice.
L’assemblée est convoquée soit par le gérant, soit par un commissaire
aux comptes en cas de problème.
Elle a pour fonction principale l’approbation des comptes annuels, mais de
nombreuses autres décisions peuvent être prises par les associés à cette
occasion (nomination et révocation du gérant, etc.).
Le nombre de voix dont bénéficie chaque associé est équivalent au
nombre de parts détenues85 et les décisions sont prises par un ou plusieurs
associés représentant plus de la moitié des parts sociales.
B – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EXTRAORDINAIRE
Ce deuxième type d’assemblée permet de modifier les statuts.
L’assemblée générale extraordinaire concerne toutes les décisions
importantes qui doivent être prises à une forte majorité. Toute modification des
statuts sera décidée par les associés représentant au moins les trois quarts du
capital social (article 75).
Cette majorité est nécessaire car les décisions prises peuvent entraîner
des conséquences graves pour la société, et par conséquent pour les intérêts
des associés (changement de dénomination, de siège social, fusion, dissolution,
etc.).
§ 3 – LA RESPONSABILITE DES ASSOCIÉS
Contrairement à la SNC, la responsabilité des associés est limitée à leurs
apports. Dans ces conditions, le montant de leurs pertes ne peut dépasser ce
qu’ils ont engagé dans la société.

85
C'est-à-dire que chaque associé dispose d'un nombre de voix égal à celui des parts sociales
qu'il détient.

104
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Dans la pratique, les dettes étant reportées chaque année sur l’exercice
suivant, cette responsabilité ne sera réellement mise en jeu qu’à la dissolution de
la société ou après le paiement des dettes (l’apurement du passif social) ; chaque
associé retrouvera alors tout ou partie de son apport (ou même quelque fois rien),
mesurant ainsi l’étendue de sa responsabilité.

CHAPITRE 4 – LA SOCIETE ANONYME


La SA représente l’archétype des sociétés de capitaux. Apparue au XIXème
siècle à une époque d’expansion économique due à la révolution industrielle, où
la recherche et la mise en commun de capitaux importants étaient indispensables
afin de créer des entreprises de grande taille rendues obligatoires par les
avancées technologiques générées par le progrès scientifique.
Actuellement nous disposons d’une loi spéciale consacrée à la seule SA,
il s’agit de la loi n°17-95 promulguée par dahir n° 1-96-124 du 30 août 199686.

Section 1 – LES CARCTERES GENERAUX


Comme pour toute société, la S.A. obéit pour sa constitution à des
conditions de forme (V. pour ces dernières, chapitre 1) et des conditions de fond.
1 – La qualité d’associés : Le nombre des associés d’une SA doit être au
minimum de 5 ; il n’existe pas de maximum comme pour la SARL. La capacité
civile suffit : de fait, toute personne physique ou morale, marocaine ou étrangère
peut acquérir des actions d’une SA.
2 – Le capital social : Le montant des apports doit être au moins égal à
300 000 dh lorsque la société ne fait pas appel public à l’épargne et à 3 millions
de dh lorsqu’elle fait appel public à l’épargne, c'est-à-dire quand les fondateurs
utilisent des moyens publicitaires pour inciter des personnes à devenir leurs
associés.
Le capital social est divisé en actions dont le montant nominal ne peut être
inférieur à 50 dh, et à 10 dh pour les sociétés dont les titres sont cotés en bourse
(art. 246 al. 3 modifié par la loi 20/05). Alors que la valeur nominale était de 100

86
- B.O. n° 4422 du 17/10/1996, p. 661.

105
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

dh, les pouvoirs publics ont expliqué cette baisse par le fait de rendre les S.A.
accessibles à un large éventail d'épargnants et donc de redynamiser le marché
boursier marocain.
Or, dans la réalité, le droit de souscription aux sociétés nouvellement
introduites à la cote de Casablanca n'a jamais atteint ce niveau de prix (10 dh) !
3 – Les apports : Les associés qu’on nomme des actionnaires peuvent
faire des apports en numéraire et en nature 87, les apports en industrie étant
interdits.
La contrepartie des apports est représentée par des titres négociables
qu’on appelle des actions ; ces dernières peuvent être cotées en bourse. Par
conséquent, toute personne peut acheter ou céder librement les actions qu’elle
détient sur ce marché par l’intermédiaire des sociétés de bourse88.
4 – L’objet social : La forme de la SA est imposée pour certaines activités
économiques : l’activité bancaire, les entreprises d’investissement, les
entreprises de crédit immobilier.

Section 2 – LA GESTION DE LA SA
La nouvelle loi offre désormais un choix entre deux types de gestion de la
SA : un mode traditionnel avec un conseil d’administration et son président, et un
type nouveau, avec un directoire et un conseil de surveillance, repris sur la
législation française elle-même inspirée du droit allemand.
En introduisant ce nouveau type de gestion, le législateur français avait
pour but de faire introduire dans le directoire (qui est - contrairement au conseil
d’administration ouvert aux non – actionnaires) les salariés de l’entreprise et plus
particulièrement les hauts cadres. Il est cependant étonnant qu’en France plus
de 99% des SA utilisent le mode traditionnel d’administration et moins de 1% ont
recours au nouveau système avec directoire et conseil de surveillance.
Les SA ont le libre choix entre ces deux modes de gestion.

87
V. introduction
88
La loi 20/05 a interdit de soumettre la négociabilité des actions cotées en bourse à l'agrément
des actionnaires (art.255).

106
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Nous envisagerons donc dans cette section d’abord, le type traditionnel


d’administration, ensuite, le type moderne.

§1 - LA SA AVEC CONSEIL D’ADMINISTRATION


A- LE CONSEIL D’ADMINISTRATION
a – Composition
Le nombre des membres qui composent le conseil d’administration est
fixé entre 3 et 12 administrateurs ; toutefois, dans les sociétés dont les actions
sont inscrites à la cote de la bourse des valeurs, ce maximum est porté à 15
administrateurs.
Les membres du conseil font partie de la société, ce sont donc des
actionnaires.
Ils doivent posséder la capacité civile sans avoir la qualité de
commerçant ; néanmoins, comme pour les gérants, d’autres conditions sont à
respecter.
Ce sont des personnes physiques ou morales qui, dans ce cas, doivent
se faire représenter par un représentant permanent; il n’est pas obligé que les
administrateurs soient de nationalité marocaine ; ils peuvent cumuler, sans limite,
plusieurs mandats d’administrateur.
Un salarié de la société peut être nommé administrateur, à condition que
son contrat de travail, stipule l’article 43, corresponde à un emploi effectif 89 sous
peine de nullité de sa nomination, d’autant plus qu’il ne doit pas perdre les
bénéfices de son contrat de travail, autrement dit, il doit continuer à percevoir son
salaire, d’acquérir l’ancienneté.
Mais le nombre des administrateurs salariés de la société, en vertu d’un
contrat de travail, ne peut toutefois pas dépasser le 1/3 des membres du conseil
d’administration ; on remarquera cependant que la loi ne prévoit pas de sanction

89
- C’est-à-dire qu’il faut qu’il y ait un lien de subordination entre le salarié et la société et,
suivant la jurisprudence française, le contrat de travail doit être « sérieux et sincère ». Mais,
comme le législateur n’a pas exigé un délai minimum d’ancienneté du contrat de travail, rien
n’interdit à l’intéressé de décrocher de la société un contrat de travail juste avant sa nomination
au poste d’administrateur.

107
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

en cas de dépassement ! Il y a lieu de penser que les nominations excédentaires


peuvent être frappées de nullité.
b – Les pouvoirs du conseil d’administration
Actuellement, le conseil d'administration se contente de :
- déterminer les orientations de l'activité de la société et veiller à leur
application ;
- régler, par ses délibérations, les affaires de la société ;
- et procéder aux contrôles et vérifications qu'il juge opportuns.
- peut se saisir de toute question intéressant la bonne marche de la société.
Il est actuellement possible pour les administrateurs de participer à
distance aux réunions du conseil d'administration par les moyens de
visioconférence90 et même de prendre part au vote de certaines décisions (art.
50)91.
B – LA DIRECTION GENERALE DE LA SOCIETE : LE PDG OU LE DG
Dans sa nouvelle rédaction l'article 67 laisse le choix au conseil
d'administration, et dans les conditions fixées dans les statuts92, de confier la
direction générale de la société soit au président du conseil d'administration
(sous le titre de président directeur général), soit à une personne physique : le
directeur général93.
a – Le directeur général et ses directeurs généraux délégués
1. Statut
Le directeur général est une personne physique nommée par le conseil
d'administration parmi les actionnaires ou à l’extérieur de la société. Il peut donc

90
Surtout pour les sociétés qui ont plusieurs filiales.
91
En effet, certaines décisions importantes ne peuvent être prises par voie de visioconférence,
telles que l'élection du président du conseil d'administration ou du conseil de surveillance, la
nomination du directeur général et des directeurs généraux délégués ou du directoire ainsi que
leur révocation, l'établissement du rapport annuel de gestion.
92
- En cas de silence des statuts, stipule l'article 67dans sa nouvelle rédaction, la direction
générale est assurée par le président du conseil d'administration.
93
- Une fois le choix fait, le conseil d'administration doit en informer la prochaine assemblée
générale et procéder aux formalités de dépôt, de publicité et d'inscription au registre de
commerce.

108
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

être un salarié de la société. La durée de sa fonction et sa rémunération sont


fixées par le conseil94.
Le directeur général peut se faire assister d'un ou plusieurs directeurs
généraux délégués (personnes physiques) mandatés par le conseil
d'administration.
La révocation du directeur général ou du directeur général délégué peut
intervenir à tout moment, mais elle peut donner lieur à des dommages intérêts si
elle est décidée sans juste motif. Cependant, cette révocation ne donne pas lieu
à la résiliation de leur contrat de travail s'ils sont en même temps salariés de la
société.
2 - Pouvoirs
Le directeur général assume sous sa responsabilité la direction générale
de la société. Il la représente dans ses rapports avec les tiers.
Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir au
nom de la société. Il engage la société même pour les actes qui dépassent l’objet
social. Les limites statutaires ou celles fixées par le conseil d'administration sont
inopposables aux tiers.
L'étendue et la durée des pouvoirs des directeurs généraux délégués
vis-à-vis de la société sont déterminées par le conseil d'administration sur
proposition du directeur général. Mais à l'égard des tiers, ils disposent des
mêmes pouvoirs que le directeur général.
b – Le président du conseil d'administration
1. Statut
L’article 63 exige que le président soit élu par le conseil d’administration
exclusivement en son sein ; il doit donc obligatoirement, à peine de nullité de sa
nomination, être un administrateur de la société et être une personne physique ;

94
- Si le directeur général est un administrateur, la durée de ses fonctions ne peut pas excéder
celle de son mandant.

109
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

la durée de sa présidence ne peut excéder celle de son mandat d’administrateur,


mais il est rééligible95.
Il peut également être révoqué "ad nutum" par le conseil d'administration.
Comme il est administrateur, il peut aussi être révoqué en tant que tel par
l'assemblée générale et il sera indirectement mis fin à sa fonction de président.
La révocation ou la cessation de fonction du président, pour être
opposable aux tiers, doit faire l'objet d'une inscription au registre de commerce.
2. Pouvoirs
Le président du conseil d'administration, s'il n'est pas en même temps
PDG, il n'est plus investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes
circonstances au nom de la société, il ne représente plus la société dans ses
rapports avec les tiers ; il se contente désormais de :
- représenter le conseil d'administration ;
- organiser et diriger ses travaux, et en rendre compte à l'assemblée
générale ;
- veiller au bon fonctionnement des organes de la société et de s'assurer
que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission.
Ce n'est que dans le cas où les statuts gardent le silence sur le choix laissé
au conseil d'administration relatif à la formule de gestion, c'est-à-dire le recours
à la nomination d'un directeur général, que le président se charge de la direction
générale de la société, mais dans ce cas, sous le nom de Président Directeur
Général (PDG).
Et lorsque le président assure la direction générale de la société, ce sont
alors les mêmes dispositions concernant les pouvoirs du directeur général qui
s'appliquent.

95
- A la différence de la loi française qui fixe à 2 le nombre de mandats que le président peut
exercer simultanément dans des SA, la loi 17/95 n’interdit guère le cumul de mandats, elle ne
prévoit non plus aucune limite d’âge, alors qu’en France cette limite est de 65 ans à défaut de
disposition statutaire.

110
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

§ 2 – LA S.A AVEC DIRECTOIRE ET CONSEIL DE SURVEILLANCE


A – LE DIRECTOIRE
a – Conditions
Le directoire ne peut comprendre plus de 5 membres appelés directeurs,
7 si les actions de la société sont cotées à la bourse, mais lorsque le capital ne
dépasse pas 1 500 000 dh, les fonctions du directoire peuvent être exercées par
un directeur unique.
Ils sont nommés par le conseil de surveillance pour une durée de 4 ans à
défaut de dispositions statutaires (art. 81).
Ce sont obligatoirement des personnes physiques (sous peine de nullité
de leur nomination) qui, à la différence des administrateurs, peuvent être choisies
en dehors des actionnaires. Ils peuvent donc être choisis parmi les salariés de la
société, c'est d'ailleurs l'essence même de ce mode d'administration.
Afin d’assurer l’indépendance du directoire par rapport au conseil de
surveillance, une règle est posée par la loi sur les SA : le non-cumul de fonctions
dans les deux organes. L’article 86 interdit formellement, en effet, aux membres
de ce dernier de siéger au directoire et s’il arrive qu’un membre du conseil de
surveillance soit désigné au directoire, sa nomination ne serait pas nulle, mais il
serait simplement et automatiquement mis fin à son mandat au sein du conseil
de surveillance dès son entrée en fonction.
Et, lorsqu'une personne morale membre du conseil de surveillance est
représentée par une personne physique, il est interdit à cette dernière de faire
partie du directoire.
C’est l’acte de nomination établi par le conseil de surveillance qui fixe le
montant et le mode de rémunération de chacun des membres du directoire.
Lorsqu’un salarié devient membre du directoire, il ne perd pas le bénéfice
de son contrat de travail, par conséquent, rien n’empêche à ce qu’il perçoive un
salaire en plus de sa rémunération en tant que membre du directoire.
b – Cessation des fonctions
Par dérogation à la règle du parallélisme des pouvoirs, les membres du
directoire, qui sont nommés par le conseil de surveillance sont révoqués par
l’assemblée ordinaire des actionnaires ; ils ne peuvent cependant être révoqués
par le conseil de surveillance que si les statuts le prévoient.

111
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Contrairement encore aux administrateurs, qui peuvent être révoqués ad


nutum, la révocation des membres du directoire donne lieu à des dommages
intérêts si elle n’intervient pas pour justes motifs.
c – Pouvoirs du directoire
Ils sont identiques à ceux du directeur général (étendue, dépassement de
l’objet social, engagement de la société, limitations statutaires).
La société est représentée par un président du directoire nommé et
révoqué en tant que tel par le conseil de surveillance.
B – LE CONSEIL DE SURVEILLANCE
a – Conditions
Les mêmes règles gouvernent le conseil d'administration et le conseil de
surveillance en ce qui concerne la capacité, la rémunération, le nombre minimal
et maximal de conseillers (entre 3 et 12), les conditions de nomination, la durée
de leur mandat, la tenue des réunions…
Comme les administrateurs, les membres du conseil de surveillance
peuvent être révoqués à tout moment par l’assemblée générale ordinaire. Ils ont
aussi le droit de démissionner dans les mêmes conditions.
Les membres du conseil de surveillance peuvent être des personnes
morales, à condition d'être représentées par une personne physique.
b – Pouvoirs
La fonction principale du conseil de surveillance réside dans le contrôle
permanent de la gestion de la société par le directoire (art. 104). Il peut, à toute
époque de l’année, demander communication et copie de tous les documents
qu’il juge utiles afin de les consulter ou de les vérifier.
Il reçoit un rapport trimestriel et des documents annuels (notamment l'état
de synthèse) du directoire et possède des pouvoirs spécifiques (autorisations
spéciales, nominations des membres du directoire, répartition des jetons de
présence, etc.).

Section 3 - LA SITUATION DES ASSOCIÉS


§ 1 – LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES
Afin de lutter contre l'absentéisme lors des assemblées générales et de
surmonter les problèmes de l'éloignement géographique, la loi a prévu la

112
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

possibilité pour les statuts de considérer présents, pour le calcul du quorum et de


la majorité, les actionnaires qui participent aux assemblées générales par
visioconférence. Mais il n'empêche qu'il est possible pour tout actionnaire de se
faire représenter par un autre actionnaire, par son conjoint ou par un ascendant
ou un descendant.
D'un autre côté, il est désormais possible de prévoir dans les statuts que
les actionnaires puissent voter par correspondance.
A - L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE
a – Convocation
Elle se tient, comme pour toutes les sociétés, dans les 6 mois qui suivent
la clôture de l’exercice. Les conditions de quorum sont de un quart des actions
sur première convocation ; lorsque l’assemblée ne peut valablement délibérer, il
doit être procédé à une deuxième convocation, auquel cas, aucun quorum n’est
requis.
b – Déroulement
Les décisions sont prises à la majorité des voix (la moitié plus une). Tout
associé peut participer aux assemblées, mais quelque fois les statuts exigent un
minimum d’actions qui ne peut être supérieur à 10.
c – Attributions
Les attributions de l’assemblée générale ordinaire sont importantes. Elles
concernent notamment l’approbation des comptes, le partage des bénéfices, la
nomination et la révocation du conseil d'administration et du conseil de
surveillance, éventuellement la révocation du directoire, etc.
B – LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES EXTRAORDINAIRES
a – Principales attributions
Elles ont pour objet la modification des statuts, ce qui concerne aussi bien:
 l’identité de la société (dénomination, siège social),
 que les règles de son fonctionnement (pouvoirs des dirigeants, tenues des
conseils, des assemblées, etc.),
 ou encore ses possibilités de transformation (augmentation ou réduction du
capital, fusion, scission, etc.),
 voire même sa dissolution.

113
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b - Quorum et majorité
Il est de la moitié des actions ayant droit de vote sur première convocation
et du quart sur deuxième convocation ; sinon, comme la loi ne permet pas de
réduire ce quorum, cette deuxième assemblée est reportée à une date qui ne
peut dépasser les deux mois de celle à laquelle elle avait été convoquée.
La majorité des deux tiers des voix dont disposent les actionnaires est
nécessaire pour prendre une décision.
Enfin, comme pour les SARL, la responsabilité des associés est limitée
aux apports et ne devient effective qu’à la dissolution de la société.
§ 2 - LES TITRES EMIS PAR LES SA
Ce sont les valeurs mobilières ; elles sont en principe négociables, c'est-
à-dire qu’elles peuvent être cédées librement et sans formalités particulières,
sauf exceptions prévues par les statuts96.
On distingue essentiellement les actions et les obligations, sans oublier
les nouveaux certificats d'investissement.
A - LES ACTIONS
Ce sont des titres qui permettent à l’actionnaire d’être titulaire de droits
pécuniaires (dividendes, boni de liquidation) et non pécuniaires (droit de vote, de
communication, d’information, etc.).
On distingue plusieurs catégories d’actions telles que :
- les actions à vote double : qui confèrent à leurs titulaires le double des
voix accordées aux actions ordinaires, ces actions ont pour but de récompenser
les actionnaires fidèles, c'est-à-dire dont les actions sont entièrement libérées et
pour lesquelles il est justifié d'une inscription nominative depuis deux ans au
moins au nom du même actionnaire. Ce droit de vote double est attribué soit par
les statuts, soit par une assemblée générale extraordinaire (art. 257);
- les actions à dividende prioritaire sans droit de vote : dont les titulaires
ont une priorité par rapport aux titulaires d’actions ordinaires pour la distribution

96
Rappelons que les statuts ne peuvent soumettre les actions cotées en bourse à l'agrément de la
société.

114
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d’un premier dividende97 et, en contrepartie, ils sont privés du droit de participer
aux assemblées générales et d’y voter ;
- les actions d’apports : c'est-à-dire des apports en nature ; etc.
B - LES OBLIGATIONS
Ce sont des titres négociables qui représentent une créance à long terme
sur la société et donnent droit à la perception d’intérêts (alors que les actionnaires
ne sont pas assurés de toucher un dividende annuel). La valeur nominale des
obligations ne peut être inférieure à 50 dh, et à 10 dh pour les sociétés dont les
titres sont cotés en bourse (art.292 al.2)98.
Leurs titulaires ne disposent pas du droit de vote.
Les sommes obtenues par la société au moyen de cette technique
particulière de crédit, lui permettent d’investir.
L’obligation joue donc un rôle important dans la vie financière des
sociétés ; c’est pourquoi, afin d’attirer des capitaux, les sociétés ont été conduites
à créer des types d’obligations donnant droit à des avantages spécifiques.
Ainsi, certaines obligations ne donnent droit qu’à un intérêt fixe, d’autres
offrent, en plus, une participation aux bénéfices (obligations participantes), de
même qu’il existe des obligations convertibles en actions et des obligations avec
bons de souscription d’actions, qui permettent à leur titulaire de devenir
actionnaires de la société émettrice99.
- Les obligations convertibles en actions (OCA) : ce sont des obligations
qui permettent à leurs titulaires de demander, à tout moment ou à certaines
périodes déterminées fixées par le contrat d'émission, à les convertir en actions.
C'est la raison pour laquelle leur taux d'intérêt est plus faible que celui des
obligations ordinaires.

97
- Il s’agit d’un dividende qui est prélevé sur le bénéfice distribuable de l’exercice avant toute
autre affectation. Ce dividende se situe donc au 4ème rang après les prélèvements de frais de
constitution, l'augmentation du capital, la réserve légale et les pertes des exercices antérieurs.
98
Le même argument des pouvoirs publics vu supra à propos de la valeur nominale actuelle des
actions vaut pour les obligations, surtout concernant les obligations convertibles en actions, nous
dit la note de présentation du projet de loi.
99
- Ces nouvelles obligations, bien que non réglementées par la loi, elles sont susceptibles de
connaître un grand essor en pratique.

115
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- Les obligations à bons de souscription d'actions (OBSA) : ce sont des


obligations auxquelles, lors de leur émission, sont attachés des bons qui donnent
droit à la souscription à un certain nombre d'actions, dans des conditions et des
délais fixés préalablement. Le bon de souscription a une autonomie par rapport
à l'obligation ; il peut non seulement permettre la souscription d'actions, mais il
peut être cédé à un tiers. Leur taux est également inférieur à celui des obligations
ordinaires.
À la différence des obligations convertibles, les titulaires des OBSA ne
sont pas obligés, à l'arrivée des délais de libération des actions, d'opter entre la
conservation de leur situation d'obligataire et l'acquisition de la qualité
d'actionnaire. Autrement dit, les OBSA ne prennent pas fin avec la libération des
actions objet des bons de souscription ; dans les délais fixés, le titulaire des
OBSA reste obligataire même après avoir acquis la qualité d'actionnaire en
cumulant ainsi les deux qualités jusqu'à la fin du délai de remboursement des
obligations.
Dans les deux cas (OCA ou OBSA), il y a augmentation du capital, la
valeur des actions étant celle de la date des libérations, elle est généralement
prévue dans le contrat d'émission.
C - LES CERTIFICATS D’INVESTISSEMENT
De nos jours, on trouve sur le marché de nombreux titres utilisés par les
sociétés afin de se procurer des capitaux ; parmi ces titres on peut citer les
certificats d’investissement.
Ce sont des actions démembrées qui ont pour fonction de procurer des
dividendes à de nouveaux actionnaires qui ne possèdent pas de droit de vote, ce
dernier étant représenté par des certificats de vote, ils sont répartis entre les
anciens actionnaires pour éviter des changements de majorité.

Section 4 - LES MOYENS DE CONCENTRATION


Ces opérations intéressent tous les types de société ; néanmoins, étant
pratiquées essentiellement dans les SA, nous les traiterons dans ce chapitre.
Elles concernent l’ensemble des techniques de concentration utilisées par
les sociétés dans le but d’améliorer leur capacité de production.
Il existe essentiellement trois :

116
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

* La fusion : constitue un des moyens le plus utilisé ; on distingue deux


procédés :
- la fusion pure et simple qui consiste pour deux sociétés à associer
leurs actifs pour se fondre juridiquement dans une nouvelle société,
- et la fusion - absorption qui permet à une société de s’approprier
le capital d’une autre société qui disparaît juridiquement (il s’agit du cas le
plus fréquent).
* La fusion - scission : c’est lorsqu’une société se scinde en deux ou
plusieurs autres sociétés nouvelles.
* L’apport partiel d’actifs : c’est une technique, enfin, qui consiste pour une
société à apporter une partie de son patrimoine à une autre société tout en
conservant sa structure juridique d’origine.
Remarque sur la dissolution des S.A.:
Outre les causes communes à toutes les sociétés, les SA doivent être
dissoutes :
- si le nombre des actionnaires devient inférieur à 5 pendant plus d’un an,
- lorsque le capital devient inférieur au minimum légal,
- ou enfin si les capitaux propres deviennent inférieurs au quart du capital
social et qu’ils ne sont pas constitués dans les deux ans à hauteur au moins du
quart du capital social (article 357).

ANNEXE 1

LE CONTROLE DES COMPTES SOCIAUX : LES


COMMISSAIRES AUX COMPTES
Les dernières réformes des sociétés commerciales ont considérablement
accru le rôle des commissaires aux comptes.
Elles ont non seulement élargi leur domaine d'intervention, puisqu'ils
interviennent dans toutes les sociétés commerciales d'une certaine importance
économique (I), mais elles ont énormément développé leurs missions au sein de
ces sociétés (II), ce qui ne pouvait ne pas être accompagné d'une lourde
responsabilité (III).

117
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

I – PRESENCE DES COMISSAIRES AUX


COMPTES DANS LES SOCIÉTÉS
COMMERCIALES
En effet, grâce aux textes actuels (B), la présence des commissaires aux
comptes est devenue bien plus étendue dans les sociétés commerciales que
dans le passé (A), avec de nouvelles conditions de nomination (C).

A – UNE PRESENCE ETENDUE


Jadis, la présence du commissaire aux comptes n'était obligatoire que
dans les SA.
Actuellement, leur présence obligatoire dépend de l'importance
économique de la société commerciale. On peut dire aujourd'hui qu'il s'agit d'un
organe que l'on rencontre dans toutes les formes de sociétés commerciales.
La désignation est désormais obligatoire dans :
* la société en nom collectif, la société en commandite simple et la
SARL : si le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions de dh hors taxe. Et,
même si ce seuil n'est pas atteint, un commissaire aux comptes peut être nommé
:
- dans la société en nom collectif et la société en commandite simple :
# soit à la majorité des associés ;
# soit à la demande d'un associé faite au président du tribunal statuant en
référé.
- dans la SARL :
# soit à la majorité des associés représentant les 3/4 du capital social ;
# soit à la demande faite au président du tribunal par un ou plusieurs
associés représentant au moins le 1/4 du capital social.
* la SA : un commissaire aux comptes titulaire est obligatoire.
Dans le cas des SA faisant appel à l'épargne public, des sociétés de
banque, de crédit, d'investissement, d'assurance, de capitalisation et d'épargne
: deux commissaires aux comptes titulaires obligatoires.
* la société en commandite par actions : un commissaire aux comptes
titulaire est obligatoire.

118
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

B – LES TEXTES APPLICABLES


* Société en nom collectif : art. 12 + art. 13 qui renvoie à l'application
des dispositions de la loi 17/95 sur la SA relatives :
- aux conditions de nomination des commissaires aux comptes,
notamment en matière d'incompatibilité ;
- à leurs pouvoirs ;
- à leurs obligations ;
- à leur responsabilité ;
- à leur suppléance ;
- à leur récusation ;
- à leur révocation ;
- et à leur rémunération.
* société en commandite simple : art. 21 renvoie à l'application des
dispositions relatives à la société en nom collectif compatibles avec la société en
commandite simple et notamment les art. 12 et 13 (règles de la SA).
* SARL : art. 80 + art. 83 qui renvoie à l'art. 13 (règles de la SA), en plus
de quelques dispositions contenues dans certains articles dont les plus
importants : art. 71, 79, 81, 82 al.3.
* société en commandite par actions : art. 34 qui prévoit la désignation
obligatoire du commissaire aux comptes par l'assemblée générale ordinaire des
actionnaires et renvoie à l'application de l'art. 13 (règles de la SA).
Donc, les dispositions relatives à la SA concernant les commissaires
aux comptes sont applicables à toutes ces sociétés.
En outre, même l'art. 104 al.1 de la loi 5/96 relatif aux infractions et
sanctions applicables aux commissaires aux comptes, renvoie à l'application des
art. 404 et 405 de la loi sur les SA.

C – CONDITIONS DE NOMINATION
a - Sous les dispositions de la législation ancienne relatives à la SA
Les premiers commissaires aux comptes étaient désignés par l'assemblée
constitutive (art. 25). Ensuite, les renouvellements de leurs mandats et les
nominations ultérieures sont faits par l'assemblée générale annuelle (art. 32).
La durée de leur mandat : un an renouvelable.

119
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

En vertu de l'article 32 al.3, à défaut de nomination des commissaires aux


comptes par l'assemblée générale, ou en cas d'empêchement ou de refus d'un
ou de plusieurs des commissaires nommés, il est procédé à leur nomination ou
à leur remplacement par ordonnance du président du tribunal, à la requête de
tout intéressé, les administrateurs dûment appelés.
La nomination des commissaires aux comptes n'était soumise à aucune
condition de compétence, il n'était requis des commissaires aux comptes aucune
exigence d'inscription sur une liste d'experts-comptables ou d'experts agrées.
b – Actuellement
1. STATUT ET INCOMPATIBILITES
L'art.160 dispose que "Nul ne peut exercer les fonctions de commissaire
aux comptes s'il n'est inscrit au tableau de l'ordre des experts-comptables"
De plus, la nouvelle réforme a tout mis en œuvre pour assurer
l'indépendance des commissaires aux comptes et éviter de faire dépendre le
contrôle des sociétés aux relations familiales ou amicales.
Aussi, l'art. 161 énumère un grand nombre de cas d'incompatibilité avec
l'exercice de la fonction de commissaire aux comptes en disposant :
" Ne peuvent être désignés comme commissaires aux comptes :
1. Les fondateurs, apporteurs en nature, bénéficiaires d'avantages
particuliers ainsi que les administrateurs, les membres du conseil de
surveillance ou du directoire de la société ou de l'une de ses filiales ;
2. Les conjoints, parents et alliés jusqu'au 2ème degré inclusivement des
personnes visées au paragraphe précédent ;
3. Ceux qui reçoivent des personnes visées au §1 ci-dessus, de la société
ou de ses filiales, une rémunération quelconque à raison de fonctions
susceptibles de porter atteinte à leur indépendance ;
4. Les sociétés d'experts-comptables dont l'un des associés se trouve
dans l'une des situations prévues aux § précédants.
Si l'une des causes d'incompatibilité ci-dessus indiquées survient en cours
de mandat, l'intéressé doit cesser immédiatement d'exercer ses fonctions
et en informer le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, au
plus tard 15 jours après la survenance de cette incompatibilité"
De son côté, l'art. 162 ajoute toute une série d'interdictions à l'exercice de
cette mission en stipulant que " les commissaires aux comptes ne peuvent être

120
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désignés comme administrateurs, directeurs généraux ou membres du directoire


des sociétés qu'ils contrôlent qu'après un délai minimum de 5 ans à compter de
la fin de leurs fonctions. Ils ne peuvent, dans ce même délai, exercer lesdites
fonctions dans une société détenant 10 % ou plus du capital de la société dont
ils contrôlent les comptes.
" Les personnes ayant été administrateurs, directeurs généraux, membres
du directoire d'une SA ne peuvent être désignés commissaires aux comptes de
cette société dans les 5 années au moins après la cessation de leurs fonctions.
Elles ne peuvent, dans ce même délai, être désignées commissaires aux
comptes dans les sociétés détenant 10 % ou plus du capital de la société dans
laquelle elles exerçaient lesdites fonctions".
2. RECUSATION
En outre, les actionnaires minoritaires (représentant au moins le 1/10 du
capital social) peuvent, lorsqu'ils justifient de justes motifs, requérir du président
du tribunal la récusation du ou des commissaires aux comptes désignés par
l'assemblée générale et demander la désignation d'autres commissaires qui
exerceront leurs fonctions en leurs lieu et place (art. 164). Si la société conteste
cette désignation, elle dispose alors d'un délai de 30 jours de cette désignation
pour saisir le président ; sa demande doit alors être motivée. S'il y est fait droit,
les commissaires aux comptes désignés par le président restent en fonction
jusqu'à la nomination des nouveaux commissaires par l'assemblée générale.
3. NOMINATION
Comme il n'existe plus d'assemblée constitutive, les premiers
commissaires aux comptes sont désignés soit par les statuts, soit par acte
séparé faisant corps avec les statuts ; dans ces cas, leur mandat ne peut excéder
un exercice.
Durant la vie de la société, ils sont nommés par l'assemblée générale
ordinaire pour trois exercices.
À défaut de nomination des commissaires aux comptes par l'assemblée
générale, il est procédé à leur nomination par ordonnance du président du
tribunal, statuant en référé, à la demande de tout actionnaire, les administrateurs
dûment entendus (art. 165).

121
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

II – LES MISSIONS DU COMMISSAIRE AUX


COMPTES
Rappelons que la présence des commissaires aux comptes n'était
obligatoire que dans les SA en application des dispositions du dahir du 11 août
1922 qui a rendu applicable au Maroc la loi française du24 juillet 1867.
Sous cette législation, la mission du commissaire aux comptes était limitée
et dans le temps et dans son contenu. Il avait deux fonctions principales :
- la préparation d'un rapport destiné à l'assemblée annuelle sur la
situation de la société sur la base du bilan et des comptes qui lui sont présentés
par les administrateurs relatifs à l'exercice écoulé ;
- Ses pouvoirs d'investigation étaient non permanents : ils étaient limités
au trimestre précédant l'assemblée générale annuelle pendant lequel, s'il le juge
utile dans l'intérêt social, il prend communication des livres et examine les
opérations de la société et, en cas d'urgence, il pouvait toujours convoquer
l'assemblée générale (art. 33).
Ce n'est que 40 jours avant l'assemblée générale que le commissaire aux
comptes pouvait prendre communication de l'inventaire, du bilan et du compte
des profits et pertes.
Désormais, on peut affirmer actuellement que le commissaire aux
comptes est investi de deux sortes de missions, une mission de vérification
permanente, et d'autres missions spéciales.

A – MISSION DE VERIFICATION PARMANENTE


La mission du commissaire aux comptes est en effet devenue
permanente, mais elle se limite à la vérification qui a des conséquences très
importantes sur le plan de la vie sociale.
a – Mission permanente
La permanence de la mission du commissaire aux comptes est soulignée
à deux reprises. Le législateur ne s'est pas contenté de prévoir dans l'art. 166
que la mission des commissaires aux comptes est permanente, il y a insisté
dans son art. 167 en précisant que : "à toute époque de l'année, le ou les
commissaires aux comptes opèrent toutes vérifications et tous contrôles…"
Ces textes nous invitent à comprendre :

122
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- que le contrôle des commissaires aux comptes s'étend tout au long de


l'exercice, il ne se limite pas à une vérification annuelle ;
- le rôle du commissaire aux comptes ne consiste guère à refaire la
comptabilité de la société, mais à contrôler les comptes sociaux de l'exercice afin
de fournir aux associés une information fiable sur la situation comptable de la
société, indépendamment des informations rassurantes des dirigeants sociaux ;
- le contrôle du commissaire aux comptes doit s'exercer à l'exclusion de
toute immixtion dans la gestion : ce qui veut dire qu'il n'a pas à apprécier les
décisions de gestion ou de porter un jugement de valeur sur la politique
poursuivie par les organes de gestion.
- le commissaire aux comptes doit s'assurer du respect de l'égalité entre
les associés (art. 166 al.2) : notamment vérifier si tous les associés bénéficient
des mêmes droits (la répartition des dividendes, le droit de vote etc.)
Donc, le commissaire aux comptes a principalement pour rôle la
vérification.
b – Mission de vérification
La mission du commissaire aux comptes est une mission de vérification ;
mais en quoi consiste cette vérification100 ?
1. Elle consiste tout d'abord, non pas à vérifier l'exactitude des comptes101
(ce qui est exclu de sa mission vu la complexité de cet exercice), mais à vérifier
la régularité ou la conformité de la comptabilité aux règles en vigueur ; il vérifie
si les comptes sont établis conformément aux règles définies par la loi
(notamment la loi 9-88 relative aux obligations comptables des commerçants,
promulguée par dahir du 25 décembre 1992 102 et le plan comptable).
2. Elle consiste, ensuite, à vérifier si les comptes sont sincères : c'est-
à-dire que les comptes sont établis de manière claire, avec loyauté et bonne foi 103.

100
- Comme on le verra plus loin, cette notion de vérification consiste pour le commissaire aux
comptes à certifier et à attester les documents qu'il a pour mission de consulter.
101
- V. JEANTIN (M.), Droit des sociétés, Paris, MONTCHRESTIEN, 2ème éd., 1992, n° 278.
102
- B.O. 30/12/1992, n° 4183 bis, p. 623.
103
- V. GUYON (Y.), "L'information prévisionnelle", JCP 1985, éd. E, 14608, n° 380.

123
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3. Le commissaire doit, en outre, vérifier la concordance, avec les états


de synthèses, des informations données dans le rapport de gestion du conseil
d'administration ou du directoire et dans les documents adressés aux associés
sur le patrimoine de la société, sa situation financière et ses résultats.
4. Enfin, le commissaire doit vérifier si les comptes sociaux donnent une
image fidèle de la société : il s'agit là d'une notion qui renforce les critères de la
régularité et de la sincérité, elle a été introduite dans notre droit par la loi 9-88
relative aux obligations comptables des commerçants et reprise par l'art. 175-1°
de la loi sur la SA. Elle a été définie comme étant le résultat concret de l'ensemble
des chiffres constituant le bilan, le compte de résultat et l'annexe".104
Ces investigations du commissaire aux comptes peuvent être accomplies
tant auprès de la société que des sociétés mères ou filiales.
Elles peuvent être étendues même aux tiers qui ont effectué des
opérations pour le compte de la société afin de recueillir des informations utiles
à l'exercice de sa mission. Mais pour se faire communiquer les pièces, contrats
et documents détenus par les tiers, que s'il y est autorisé par le président du
tribunal statuant en référé.
Pour accomplir sa mission, le commissaire aux comptes peut, sous sa
responsabilité, se faire assister par des experts ou des collaborateurs de son
choix, à condition de les présenter à la société.
c – Les conséquences de la vérification
Le but de ces vérifications est double : la certification et l'information.
1. LA CERTIFICATION
Après la vérification, dans son rapport à l'assemblée générale, le
commissaire aux comptes a le choix entre trois solutions :
- soit de certifier que les comptes sont réguliers et sincères et donnent
une image fidèle du résultat de l'exercice écoulé ainsi que de la situation
financière et du patrimoine de la société à la fin de cet exercice ; il importe de

104
- Rapport COB, in Le commissariat aux comptes : renforcement ou dérive, ouvrage collectif,
CREDA, Litec, 1989, p. 104, cité par EL HAJJAMI (A.), "Regard sur les nouvelles missions du
commissaire aux comptes", RMDED, p. 159.

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préciser, note un auteur, que la certification ne garantie pas l'exactitude des


documents vérifiés. Il s'agit tout simplement de l'opinion d'un professionnel sur la
qualité de l'information comptable et financière résultant des documents
produits105;
- soit de certifier les comptes mais assortir sa certification de réserves ;
- soit tout simplement de refuser la certification.
Dans ces deux derniers cas il doit préciser les motifs de ses réserves ou
de son refus afin d'informer et d'éclairer les associés sur les décisions à prendre.
Le commissaire doit également dans ce rapport faire état de ses
observations sur la sincérité et la concordance avec les états de synthèse des
informations :
- données dans le rapport de gestion de l'exercice ;
- et dans les documents adressés aux associés sur la situation financière
de la société ainsi que sur son patrimoine et ses résultats.
Il faut noter enfin que, en cas de pluralité de commissaires aux comptes,
ils peuvent remplir séparément leur mission, mais ils établissent un rapport
commun. En cas de désaccord entre eux, le rapport indique les différentes
opinions exprimées (art. 171).
2. L'INFORMATION
L'objectif de la mission du commissaire aux comptes est justement
d'informer de ses investigations les dirigeants et les associés.
1.1/ Tout d'abord, le commissaire doit informer les dirigeants sociaux
aussi souvent que nécessaire sur (art. 169) :
- les contrôles et vérifications auxquels ils ont procédé et les différents
sondages auxquels ils se sont livrés ;
- les postes des états de synthèse auxquels des modifications leur
paraissent devoir être apportées, en faisant toutes observations utiles sur les
méthodes d'évaluation utilisées pour l'établissement de ces états ;
- les irrégularités et les inexactitudes qu'ils auraient découvertes ;

105
- Id. p. 160.

125
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- les conclusions auxquelles conduisent les observations et rectifications


ci-dessus sur les résultats de l'exercice comparés à ceux du précédent exercice;
- tous faits leur apparaissant délictueux, dont ils ont eu connaissance dans
l'exercice de leur mission. Il convient de noter que le législateur a supprimé de la
loi sur la SA la disposition qui figurait dans le projet suivant laquelle le
commissaire aux comptes doit révéler au procureur du roi les faits délictueux106.
Cette disposition s'expliquait fort bien puisque le commissaire aux comptes est
le mieux placé pour connaître les infractions commises. Actuellement, au lieu de
révéler ces infractions au procureur du roi, le commissaire doit en informer
pourrait-on dire les propres auteurs de ces infractions !
1.2/ Le commissaire aux comptes est tenu de présenter de nombreux
rapports aux associés sur ses investigations :
- art. 115 a.2 : lors de l'assemblée générale annuelle, il doit relater dans
son rapport l'accomplissement de sa mission et faire part de ses conclusions ;
- art. 172 al.1 : le commissaire aux comptes établit un rapport dans lequel
il rend compte à l'assemblée générale de l'exécution de la mission qu'elle lui a
confiée ;
Notons que pour toutes les sociétés commerciales les rapports du
commissaire aux comptes doivent être communiqués aux associés au moins 15
jours avant la date de l'assemblée107.
- art. 175 : dans son rapport à l'assemblée générale le commissaire aux
comptes soit certifie, soit émet des réserves, soit refuse la certification…
De la sorte, le commissaire aux comptes doit donc informer les associés
de la situation comptable et financière de la société afin de prendre leurs
décisions lors des assemblées générales en connaissance de cause.

B – LES MISSIONS SPECIALES

106
- Cette disposition avait été prise de l'art. L. 233 al.2 de la loi française où elle figure toujours.
107
- SA art. 140, société en nom collectif : art. 10 al 2, société en commandite simple : art. 26,
société en commandite par actions : art. 31 qui renvoie à la loi sur la SA, la SARL : art. 70 al.2.

126
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À côté de sa mission permanente de contrôle, le commissaire aux


comptes est investi de deux sortes de missions spéciales : le contrôle de la
régularité juridique et le devoir d'alerte.
a – Contrôle de la régularité juridique et financière
Le contrôle de la régularité juridique et financière de la vie sociale
nécessite l'intervention du commissaire aux comptes à de multiples occasions
notamment :
1. LA DETENTION DES ACTIONS DE GARANTIE
En vertu des art. 47 et 85 le commissaire aux comptes doit veiller, sous
sa responsabilité à l'observation des dispositions statutaires relatives à la
détention par les dirigeants des actions de garantie108. En l'occurrence, il doit
dénoncer toute violation à ces dispositions dans son rapport à l'assemblée
générale ordinaire.
2. LA CONVOCATION DE L'ASSEMBLEE GENERALE
S'agissant de la SARL, la convocation à l'assemblée générale est faite par
le gérant ou, à défaut, par le commissaire aux comptes, le cas échéant (art. 71
loi 5/96)
Quant à la loi sur les SA, elle prévoit que le commissaire aux comptes peut
convoquer l'assemblée générale dans deux cas :
- En cas de défaillance des dirigeants, c'est-à-dire de refus ou d'omission
de convoquer l'assemblée générale annuelle (art. 116) ; dans ce cas, il ne peut
convoquer l'assemblée, qu'après avoir vainement requis sa convocation par le
conseil d'administration ou le conseil de surveillance (art. 116 al.2);
- ou toujours en cas d'urgence (art. 176).
Dans les deux cas les dispositions de l'alinéa 3 de l'art. 116 doivent être
respectées, c'est-à-dire, en cas de pluralité de commissaires aux comptes, ils
agissent d'accord entre eux et fixent l'ordre du jour. Mais s'ils sont en désaccord
sur l'opportunité de convoquer l'assemblée, l'un d'eux peut demander au
président du tribunal, statuant en référé, l'autorisation de procéder à cette

108
- art. 44, 45 et 84.

127
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convocation, les autres commissaires et le président du conseil d'administration


ou du conseil de surveillance dûment appelés.
Dans le cas où il est donné droit au commissaire concerné, le président
du tribunal fixe l'ordre du jour et son ordonnance n'est susceptible d'aucun
recours.
En outre, les commissaires aux comptes doivent être convoqués à toutes
les assemblées d'actionnaires et aux réunions du conseil d'administration ou du
directoire qui ont pour objet d'arrêter les comptes de l'exercice écoulé ; et, s'il y a
lieu, ils doivent être convoqués aux autres réunions du conseil d'administration
ou du conseil de surveillance (art. 170).
3. EN CAS DE CONVENTIONS CONCLUES ENTRE LES DIRIGEANTS ET LA SOCIETE
Dans ce cas le président du conseil d'administration (art. 58) ou le
président du conseil de surveillance (art. 97) doivent en aviser le commissaire
aux comptes qui doit présenter un rapport spécial sur ces conventions à
l'assemblée générale qui statue sur ce rapport. (V. pour la SARL art. 64 de la loi
5/96)
4. EN CAS DE MODIFICATION DU CAPITAL
En cas d'augmentation du capital, le commissaire aux comptes doit
indiquer dans son rapport à l'assemblée générale extraordinaire si les bases de
calcul retenues par le conseil d'administration ou le directoire lui paraissent
exactes et sincères (art. 194).
En cas de réduction du capital, le rapport du commissaire aux comptes
doit faire connaître à l'assemblée ses appréciations sur les causes et les
conditions de la réduction (art. 211 loi sur la SA et 79 loi 5/96 à propos de la
SARL).
5. EN CAS DE TRANSFORMATION DE LA SOCIETE
Toute décision de transformation de la SA en une société d'une autre
forme, précise l'art. 219, ne peut être prise que sur rapport du commissaire aux
comptes attestant que la situation nette est au moins égale au capital social.
6. EN CAS DE FUSION
Les dirigeants de chacune des sociétés participant à l'opération de fusion
doivent en communiquer le projet au commissaire aux comptes au moins 45 jours
avant la date de l'assemblée générale qui doit décider de la fusion.

128
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Il peut alors obtenir auprès de chaque société communication de tous les


documents utiles et procéder à toutes vérifications nécessaires.
Il vérifie que la valeur relative attribuée aux actions des sociétés à
fusionner est pertinente et que le rapport d'échange est équitable.
Son rapport doit alors indiquer la ou les méthodes suivies pour la
détermination du rapport d'échange proposé, si elles sont adéquates en l'espèce,
et les difficultés particulières à l'évaluation s'il en existe.
Il vérifie notamment si le montant de l'actif entreprise apporté par les
sociétés absorbées est au moins égal au montant de l'augmentation de capital
de la société absorbante ou au montant du capital de la société nouvelle issue
de la fusion. La même vérification est faite en ce qui concerne le capital des
sociétés bénéficiaires de la scission.
b – Le devoir d'alerte
La mission d'alerte est confiée au commissaire aux comptes non en vertu
de la loi sur la SA, mais par le code de commerce dans le livre V relatif aux
difficultés de l'entreprise (art. 546 et suiv.). Cette procédure passe par plusieurs
étapes :
La première étape :
Le commissaire aux comptes, s'il en existe, sinon tout associé, informe le
chef de l'entreprise des faits de nature à compromettre la continuité de
l'exploitation dans un délai de 8 jours de la découverte des faits par lettre
recommandée avec accusé de réception, l'invitant à redresser la situation.
La seconde étape :
- En l'absence d'exécution par le chef d'entreprise, qui a pour ce faire un
délai de 15 jours de la réception de la lettre ;
- ou s'il n'arrive pas personnellement ou après délibération du conseil
d'administration ou du conseil de surveillance, selon le cas, à un résultat positif ;
 le chef d'entreprise est alors tenu de faire délibérer la prochaine
assemblée générale pour statuer à ce sujet sur rapport du commissaire aux
comptes.
La troisième étape :
- En l'absence d'une délibération de l'assemblée générale à ce sujet ;
- ou s'il a été constaté que malgré les décisions prises par cette
assemblée, la continuité de l'exploitation reste compromise,

129
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

 le commissaire aux comptes ou le chef d'entreprise en informe le


président du tribunal (art. 547).
Par ailleurs, l'art. 81 de la loi 5/96 prévoit un genre spécial de droit d'alerte
au profit des associés non gérants d'une SARL ; ces derniers ont le droit, deux
fois par exercice, de poser des questions au gérant sur tout fait de nature à
compromettre la continuité de l'exploitation. Dans ce cas, la réponse du
gérant doit être communiquée au commissaire aux comptes, le cas échéant,
lequel, nous estimons, doit entamer la procédure d'alerte.
De son côté, l'art. 82 de la même loi qui donne le droit aux associés
représentant le 1/4 du capital de demander au président du tribunal de désigner
un expert chargé de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de
gestion, ce même article exige que ce rapport soit adressé au commissaire aux
comptes.

III – LA RESPONSABILITE DU COMMISSAIRE


AUX COMPTES
Les nouvelles réformes ont considérablement alourdi la responsabilité du
commissaire aux comptes, aussi bien dans le domaine civil que dans le domaine
pénal.

A – RESPONSABILITE CIVILE
Les commissaires aux comptes sont responsables, selon les cas, à l'égard
de la société ou des tiers, des dommages qui ont eu pour cause une faute ou
une négligence des commissaires à l'occasion de l'exercice de leurs missions
(art. 180 al.1).
Par contre, leur responsabilité civile n'est pas engagée à l'occasion des
infractions commises par les dirigeants sociaux, sauf si, en ayant eu
connaissance à l'occasion de l'exercice de leur mission, ils ne les ont pas
révélées dans leur rapport à l'assemblée générale.
Les actions en responsabilité contre les commissaires aux comptes se
prescrivent par 5 ans.

D – RESPONSABILITE PENALE

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2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Il s'agit des infractions relatives au contrôle telles que prévues par les art.
403 à 406 de la loi sur la SA. D'ailleurs ces dispositions sont applicables même
aux autres sociétés commerciales en vertu de la loi 5/96, le cas échéant.
Parmi ces infractions, les unes sont imputables aux commissaires aux
comptes, les autres aux dirigeants.
a – Les infractions imputables aux commissaires aux comptes
Il s'agit des art. 404 et 405 :
* L'art. 404 prévoit une peine d'emprisonnement de 1 à 6 mois et une
amende de 8 000 à 40 000 dh pour toute personne qui, soit en son nom
personnel, soit au titre d'associé dans une société de commissaires aux comptes,
a intentionnellement :
- accepté,
- exercé,
- ou conservé les fonctions de commissaires aux comptes en dépit des
incompatibilités légales.
* De son côté, l'art. 405 sanctionne d'un emprisonnement de 6 mois à 2
ans et / ou d'une amende de 10 000 à 100 000 dh tout commissaire aux comptes
qui, soit en son nom personnel, soit au titre d'associé dans une société de
commissaires aux comptes, a intentionnellement :
- donné ou confirmé des informations mensongères sur la situation de la
société ;
- ou n'a pas révélé aux organes d'administration, de direction ou de gestion
les faits lui apparaissant délictueux dont il aura eu connaissance à l'occasion de
l'exercice de ses fonctions.
D'un autre côté, si les commissaires aux comptes et leurs collaborateurs
sont astreints au secret professionnel pour tous les faits, actes et
renseignements dont ils sont pu avoir connaissance à l'occasion de leurs
missions (art. 176), l'art. 405 al.2 déclare les dispositions de l'art. 446 du code
pénal applicables aux commissaires aux comptes. Il s'agit des sanctions
applicables en cas de violation du secret professionnel (emprisonnement de 1 à
6 mois et une amende de 120 à 1 000 dh).
b – Les infractions imputables aux dirigeants
* D'une part, l'art. 403 sanctionne d'un emprisonnement de 1 à 6 mois et /
ou d'une amende de 10 000 à 50 000 dh les dirigeants qui :

131
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

- n'ont pas provoqué la désignation des commissaires aux comptes de la


société ;
- ou ne les ont pas convoqués à toute assemblée d'associés.
* D'autre part, l'art. 406 sanctionne d'un emprisonnement de 1 à 6 mois
et/ou d'une amende de 6 000 à 30 000 dh les dirigeants qui ont intentionnellement
:
- mis obstacle aux vérifications ou contrôles des experts ou des
commissaires aux comptes ;
- ou qui leur ont refusé la communication sur place de toutes les pièces
utiles à l'exercice de leur mission, et notamment de tous contrats, livres,
documents comptables et registres de procès-verbaux.

132
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

ANNEXE 2

LES DIFFICULTES DE L’ENTREPRISE

Le traitement des difficultés de l’entreprise passe tout d’abord par une


phase de prévention, qui consiste en une prévention des difficultés que pourra
rencontrer l’entreprise, puis leur traitement si possible par les moyens propres de
l’entreprise à travers ses organes.

Ce n’est qu’en cas d’échec des deux procédures de prévention interne


puis externe, que le chef de l’entreprise se verra dans l’obligation de déposer
bilan auprès du président du tribunal de commerce afin que son entreprise soit
soumise à une procédure de traitement des difficultés.

Section I – PRÉVENTION DES DIFFICULTÉS DE


L’ENTREPRISE

Le nouveau code de commerce, à travers son livre V, distingue entre deux


types de prévention, à savoir entre, en premier lieu, une prévention interne et, en
second lieu, une prévention externe, qu’on étudiera successivement dans cette
première section.
§ I - LA PREVENTION INTERNE
La prévention interne est une sorte d’auto-prévention, elle a lieu par les
organes de l’entreprise et n’a pas besoin de recourir à l’autorité judiciaire afin de
régler la situation défaillante ou difficile dont est sujette l’entreprise.
La prévention par l’information ou alerte renferme en effet un double
aspect, tout d’abord elle permet un dépistage des difficultés puis leur révélation
au chef d’entreprise, afin de permettre à ce dernier de réagir à temps.
Une fois une menace de quelque nature qu’elle soit ou tout fait détecté de
nature à compromettre la continuité de l’exploitation, le commissaire aux
comptes, s’il en existe, ou tout associé dans la société doit en informer le chef de
l’entreprise.

133
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Cette information doit se faire dans un délai de 8 jours de la découverte


des faits par lettre recommandée avec accusé de réception, invitant le chef de
l’entreprise à redresser la situation109.
Dans le cas où le chef d’entreprise n’intervient pas pour remédier à cette
situation dans un délai de 15 jours de la réception de la lettre, ou s’il n’arrive pas
personnellement ou après délibération du conseil d’administration ou du conseil
de surveillance à un résultat positif, il est tenu de faire délibérer la prochaine
assemblée générale pour statuer à ce sujet.
À défaut de délibération de l’assemblée générale à ce propos, ou s’il a été
constaté que malgré les décisions prises par cette assemblée, la continuité de
l’exploitation demeure compromise, le président du tribunal doit être informé par
le commissaire au compte ou par le chef de l’entreprise.
Remarquons enfin que l’alerte préventive demeure, en pratique, très
souvent d’un effet utopique en raison de l’optimisme exagéré ou de
l’acharnement illusoire des dirigeants d’entreprise sur une amélioration future110.
§ II - LA PREVENTION EXTERNE
La prévention externe intervient après que le recours à la méthode de
prévention interne est épuisé sans pouvoir aborder sur quelques résultats.
Cette deuxième étape de prévention se caractérise également par sa
nature non conflictuelle ou non contentieuse. Elle constitue une procédure
judiciaire dénuée des pouvoirs naturels du juge de dire le droit et de prononcer
des sanctions.
A. Déclenchement de la procédure de prévention externe

Lorsque l’assemblée des actionnaires ne réussit pas à prendre une


décision permettant de redresser la situation ou en cas d’échec des mesures
prises lors de la procédure de prévention interne, la continuité de l’exploitation
demeure compromise, le commissaire aux comptes ou le chef de l’entreprise est
tenu d’informer le président du tribunal de la situation.

109
V. article 546 du code de commerce.
110
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Droit commercial fondamental au Maroc, Imprimerie
de Fédala, 2006, p. 533.

134
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Il convient de noter, à cet égard, qu’aucun délai n’est prévu pour la saisine
du président du tribunal. D’après la doctrine, il est possible d’en déduire, compte
tenu de l’urgence censée caractériser ces situations, que cette saisine doit être
faite immédiatement et sans délai111.
Une fois saisi, le président du tribunal convoque le chef de l’entreprise
pour envisager des mesures propre à redresser la situation de l’entreprise. À
l’issue de cet entretien, le président du tribunal peut, malgré toute disposition
contraire, obtenir communication des renseignements susceptibles de l’informer
sur la situation économique et financière de l’entreprise débitrice. Et ceci à travers
le commissaire aux comptes, les administrations (Impôts, Douanes..),
organismes publics (CNSS, Bank Al Maghrib,..), par le représentant du personnel
ou par toute autre personne.
Soulignons enfin que le président du tribunal est seul compétent pour
déclencher la procédure de prévention externe, soit sur saisine du chef de
l’entreprise ou du commissaire aux comptes, soit d’office.
B. Désignation d’un mandataire spécial

Si le président du tribunal juge que les difficultés de l’entreprise peuvent


être aplanies grâce à l’intervention d’un tiers pouvant réduire les oppositions
éventuelles des partenaires habituels de l’entreprise, il désigne, d’office ou sur
demande du chef de l’entreprise, ledit tiers en qualité de mandataire spécial et
lui assigne une mission et un délai pour l’accomplir.

Il convient de remarquer en ce sens que la loi ne prévoit aucune mesure


de publicité pour la désignation du mandataire spécial. Ce qui se justifie
probablement par la volonté du législateur de maintenir l’information sur les
difficultés de l’entreprise dans un cercle fermé, de manière à préserver les
chances de sa sauvegarde112.

111
EL HAMMOUMI (A.), Droit des difficultés de l’entreprise : La prévention des difficultés,
le redressement judiciaire, la liquidation judiciaire, Librairie Dar Assalam, 3e éd., Rabat,
2008, p. 30.
112
Id, p. 33.

135
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

C. Le règlement amiable

La procédure de règlement amiable tend à permettre au débiteur de


négocier avec ses principaux créanciers, sous les auspices d’un conciliateur
désigné par le président du tribunal de commerce, afin d’assurer la mise en
œuvre des mesures de redressement aptes à remédier à la situation compromise
de l’entreprise.
1. Ouverture de la procédure de règlement amiable
La procédure de règlement amiable est ouverte à toute entreprise
commerciale ou artisanale qui, sans être en cessation des paiements113,
éprouve une difficulté juridique, économique ou financière, ou des besoins ne
pouvant être couverts par un financement adapté à ses possibilités.
Le chef d’entreprise doit en ce sens adresser une requête au président du
tribunal où il expose sa situation financière, économique et sociale ainsi que les
mesures de règlement qu’il envisage, les délais de paiement ou les remises de
dettes qu’il estime nécessaires pour ce redressement. Dès réception de la
requête, le président du tribunal fait convoquer dans son cabinet, par le greffier,
le chef de l’entreprise pour recueillir ses explications.
Le président du tribunal peut à cet effet charger un expert d’établir un
rapport sur la situation économique, sociale et financière de l’entreprise. Il peut
aussi obtenir tout renseignement, de la part des établissements bancaires ou

113
Le code de commerce marocain ne donne malheureusement pas de définition de la
notion de cessation des paiements, il se limite à fixer sa date, contrairement au code de
commerce français qui la définie expressément, dans son article L. 631-1 comme suit «
Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur
mentionné aux articles L.631-2 ou L.631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au
passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements.». Le même
article dans sa rédaction nouvelle depuis le 15 février 2009 ordonnance n° 2008-1345
ajoute «... Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il
bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec
son actif disponible n'est pas en cessation des paiements. »
 (Acte par lequel un créancier accorde une réduction totale ou partielle de la dette à son
débiteur)

136
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

financiers, de nature à donner une exacte information sur la situation de


l’entreprise.
Ce droit de communication peut être exercé nonobstant toute disposition
législative contraire, de sorte qu’aucune des personnes ou organismes énumérés
ci- dessus ne peut opposer le secret professionnel à l’enquête du président. Cela
implique aussi que le fisc sera appelé à déclarer sa créance qui entre en ligne de
compte dans le cadre de cette procédure114.
Ainsi, s’il apparaît que les propositions du chef de l’entreprise sont de
nature à favoriser le redressement de l’entreprise, le président du tribunal ouvre
le règlement amiable. Il désigne, à cet effet, un conciliateur et le charge de cette
mission pour une période qui ne peut dépasser 3 mois, passible d’une
prorogation d’un mois au plus à la demande de ce dernier.
2. Accord conclu entre le débiteur et ses créanciers
En application des dispositions de l’art. 554, le rôle du conciliateur sera de
favoriser le fonctionnement de l’entreprise et de rechercher la conclusion d’un
accord avec les créanciers. Le président du tribunal communique au conciliateur
les renseignements dont il dispose et, le cas échéant, le rapport d’expertise visé
dans l’art. 552 (sur la situation financière de l’entreprise).
Le conciliateur peut en ce sens saisir le président du tribunal s’il estime
qu’une suspension provisoire des poursuites serait de nature à faciliter la
conclusion dudit accord. Après avoir recueilli l’avis des principaux créanciers, le
président du tribunal rend une ordonnance115 fixant la suspension pour une durée
n’excédant pas le terme de la mission du conciliateur.
Si un accord est conclu avec tous les créanciers, il est homologué par le
président du tribunal et déposé au greffe. Au cas où il y aurait un accord conclu
avec les principaux créanciers, le président du tribunal peut également

114
CHERKAOUI (H.), Droit commercial, Imprimerie Najah Al Jadida, 3e éd., 2010, p. 274.
115
L’ordonnance rendue par le président du tribunal suspend et interdit toute action en
justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement à
ladite décision et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme
d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
Elle arrête et interdit également toute voie d’exécution de la part de ces créanciers tant
sur les meubles que sur les immeubles.

137
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

l’homologuer et accorder au débiteur les délais de paiement prévus par les textes
en vigueur pour les créances non incluses dans l’accord.
L’accord entre le chef de l’entreprise et les créanciers est constaté dans
un écrit signé par les parties et le conciliateur. Il est déposé au greffe.

3. Effets du règlement amiable


L’accord suspend pendant la durée de son exécution, toute action en
justice, toute poursuite individuelle tant sur les meubles que sur les immeubles
du débiteur dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet. Il
suspend également les délais impartis aux créanciers à peine de déchéance ou
de résolution des droits afférents à ces créanciers.
Si l’accord n’est pas exécuté, le tribunal prononce sa résolution ainsi que
la déchéance de tout délai de paiement accordé.

Section II - TRAITEMENT JUDICIAIRE DES DIFFICULTES DE


L’ENTREPRISE
Au cas où les procédures de prévention s’avéreraient infructueuses, le
chef de l’entreprise se verra dans ce cas dans l’obligation de demander
l’ouverture d’une procédure de traitement des difficultés auprès du président du
tribunal de commerce.
Les procédures de traitement des difficultés se déroulent en deux phases.
Tout d’abord une période d’observation s’impose afin d’établir un diagnostic, puis
celle-ci est suivie de l’exécution soit d’un plan de redressement sous forme de
continuation ou de cession, soit la liquidation judiciaire de l’entreprise.
§ I - Ouverture des procédures
D’après les dispositions de l’art. 560 du code de commerce « les
procédures de traitement des difficultés de l’entreprise sont applicables à tout
commerçant, à tout artisan et à toute société commerciale, qui n’est pas en
mesure de payer à l’échéance ses dettes exigibles, y compris celles qui sont
nées de ses engagements conclus dans le cadre de l’accord amiable. »
A. Les conditions d’ouverture des procédures

Ces procédures de traitement qui sont le redressement judiciaire et la


liquidation judiciaire, obéissent à des conditions de fond (a) et à des conditions
de forme (b).

138
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

a) Conditions de fond d’ouverture des procédures

Les conditions de fond se rapportent au débiteur et à l’entreprise personne


morale débitrice en tant que tel. Elles se rapportent également à l’état de
cessation des paiements.
1. Le débiteur

Les procédures de traitement des difficultés sont ouvertes contre tout


commerçant, tout artisan et à toute société commerciale. Ces procédures sont
aussi ouvertes à l’encontre du commerçant ou de l’artisan qui a mis fin à son
activité ou qui est décédé en état de cessation des paiements. L’ouverture de la
procédure est demandée dans ce cas dans l’année de la retraite ou du décès du
commerçant ou 116de l’artisan.
L’article 564 nous informe que la procédure peut être de même ouverte
contre l’associé en nom qui s’est retiré de la société en nom collectif dont la
cessation des paiements est antérieur à cette retraire.
Soulignons que dans le cas du commerçant qui n’est pas inscrit au registre
du commerce, la situation de ce dernier ne l’empêchera pas d’encourir une
procédure de redressement ou de liquidation, sous prétexte qu’il exerce le
commerce sans être inscrit. Les tiers peuvent se prévaloir contre lui de sa qualité.
Les sociétés commerciales forment quant à elles le champ d’application principal
des procédures de traitement117.
2. L’état de cessation des paiements

Les procédures de traitement ne sont ouvertes qu’à l’encontre des


commerçants, artisans ou sociétés commerciales qui ne sont pas en mesure de
payer à l’échéance leurs dettes exigibles. L’article 560 du code de commerce
décide en ce sens qu’une entreprise est réputée être en état de cessation des

116
Dans le cas de société membre d’un groupe, le principe de l’indépendance juridique
des filiales, à l’égard de la société mère et dans les rapports des filiales entre elles,
impose que des procédures distinctes soient ouvertes. Les groupements d’intérêt
économique (GIE), qu’ils soient civils ou commerciaux, sont également soumis à un
régime identique à celui des sociétés commerciales. V. à ce propos CHERKAOUI (H.),
Op.cit., p. 280.
117
Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 278 et s.

139
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

paiements, si cette dernière n’arrive pas à acquitter son passif exigible avec son
actif disponible. La cessation des paiements ne doit toutefois pas être confondue
avec l’insolvabilité118.
La loi précise, en outre, que la procédure peut être ouverte sur
l’assignation d’un créancier " quelle que soit la nature de sa créance ". Le défaut
de paiement d’une créance civile ou commerciale permet donc de déclencher les
procédures.
Un autre caractère de la créance, fixé par la jurisprudence, veut que l’état
de cessation des paiements ne puisse être déclaré que si le commerçant ne paie
pas une dette certaine, liquide et exigible.
Précisons enfin que la cessation des paiements doit être prouvée par le
créancier qui demande l’ouverture de la procédure. La preuve119 peut être faite
par tous les moyens quand il s’agit d’une créance commerciale. S’il s’agit d’une
créance civile, la preuve est faite dans ce cas suivant les règles du D.O.C. L’arrêt
matériel des paiements peut être établi par tous les moyens car il s’agit de
questions de fait.

b) Conditions de forme d’ouverture des procédures

Les conditions de formes quant à elles sont relatives à la saisine du


tribunal (2) et à la détermination de celui compétent (1) pour connaître de la
procédure de traitement, ainsi qu’elles se rapportent au jugement d’ouverture (3)
et à son contenu.
1. Tribunal compétent

118
La cessation de paiements se distingue de l’insolvabilité. En effet, l’insolvable est le
débiteur qui ne paie pas, sous-entendu qu’il ne peut pas payer car son passif dépasse
son actif. Au contraire, le commerçant ou la société peut être solvable en ce sens que
son actif est supérieur à son passif.
119
Soulignons qu’en pratique, comme le défaut de paiement ne peut être relevé que
pour des dettes certaines, liquides et exigibles, les preuves apportées sont toujours les
mêmes : protêt des effets de commerce, impossibilité de payer les dettes des emprunts
obligataires, disparition du commerçant et fermeture de ses magasins...etc. ; Cf.
CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 282.

140
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Le tribunal compétent est celui du lieu du principal établissement du


commerçant ou du siège social de la société.
Soulignons cependant que cette disposition légale remonte à une date
antérieure à la promulgation de la loi sur les tribunaux de commerce 120 de 1997.
C’est pourquoi elle ne précise pas qu’actuellement le tribunal compétent en
matière de difficultés d’entreprise est le tribunal de commerce121.
Ce même tribunal qui a ouvert la procédure reste compétent pour toutes
les actions qui s’y rattachent. S’il se révèle que la procédure doit être étendue à
une ou plusieurs autres entreprises par suite de confusion de leurs patrimoines,
le tribunal initialement saisi reste compétent122.
2. Saisine du tribunal

Le tribunal peut être saisi par le débiteur ou sur assignation d’un créancier,
comme il peut se saisir d’office ou sur requête du ministère public.
*La déclaration du débiteur
Le chef de l’entreprise qui se trouve dans l’état de cessation des
paiements doit demander l’ouverture d’une procédure de traitement par écrit au
greffe du tribunal dans le délai de 15 jours après le constat de cet état de
cessation123. Cette demande qui énonce les causes de la cessation des
paiements doit, en outre, être accompagnée de certains documents énumérés
dans l’article 562.
La déclaration de l’état de cessation des paiements incombe aux
dirigeants de droit124, ou de fait, ainsi qu’aux représentants permanents des
personnes morales dirigeantes. Ces personnes s’exposent à la déchéance

120
Dahir n° 1-97-65 du 4 chaoual 1417 (12 février 1997) portant promulgation de la loi
n° 53-95 instituant des juridictions de commerce, B.O n° 4482 du 15/05/1997, p. 520.
121
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Op.cit., p. 550.
122
Article 570 du C.com.
123
V. article 561 du C.com.
124
Il s’agit des présidents (PDG), administrateurs, membres du directoire, directeurs
généraux et des gérants.

141
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

commerciale125 au cas où elles auraient omis de faire la déclaration dans le délai


prescrit126.
*L’assignation des créanciers :
Tout créancier de l’entreprise a le droit de demander l’ouverture des
procédures quelle que soit la nature de sa créance, compte tenu des dispositions
de l’article 563 du code de commerce. Ainsi, le défaut de paiement d’une dette
qu'elle soit civile ou commerciale permet de déclencher les procédures de
traitement.
L’action du créancier revêt un caractère particulier, elle tend au fait à
constater l’état de cessation des paiements du débiteur. Le créancier n’a donc
pas besoin d’un titre exécutoire. Le créancier qui agit ne peut prouver cet état
que par voie d’assignation, son action n’est enfermée dans aucun délai. Elle peut
donc être exercée tant que cette situation d’insolvabilité dure.
*La saisine d’office du tribunal :
L’article 563 dispose dans son deuxième alinéa que le tribunal peut aussi
se saisir d’office ou sur requête du ministère public, notamment en cas
d’inexécution des engagements financiers conclus dans le cadre de l’accord
amiable.
Ce droit reconnu au tribunal d’ouvrir d’office une procédure de traitement
ne signifie pas que le tribunal ne doit pas entendre le débiteur avant de statuer.
En effet, le législateur, à travers l’article 567, a posé une règle selon laquelle le
tribunal statue sur l’ouverture de la procédure après avoir entendu ou dûment
appelé le chef de l’entreprise en chambre du conseil. Comme il peut entendre
toute personne dont l’audition lui paraît utile.

125
V. articles 711 à 720 du C.com.
126
Remarquons, qu’outre leur exposition à la déchéance commerciale, les dirigeants de
l’entreprise peuvent se voir ouvrir à leur encontre une procédure de redressement ou de
liquidation judiciaire. C’est ce qu’on appelle l’extension des procédures aux dirigeants.
Comme ils peuvent encourir dans les cas les plus graves les peines de banqueroute qui
arrivent jusqu’à 5 ans d’emprisonnement en plus d’une amende. V. articles 721 à 723
du C.com.

142
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Cette réserve posée par l’article 567 peut être également comprise dans
un sens d’éviter qu’une décision soit rendue à la suite d’une information
insuffisante127.
3. Le jugement d’ouverture

Le jugement d’ouverture de la procédure fixe la date de cessation des


paiements (a). Dans le même jugement, le tribunal désigne (b) le syndic et le
juge-commissaire. Ce dernier se chargera de nommer un à trois contrôleurs
parmi les créanciers de l’entreprise. Ce jugement qui ouvre la procédure doit être
publié (c) dans un délai fixé par la loi, et peut faire l’objet de recours (d).
a) La fixation de la date de cessation des paiements

L’article 680 nous informe que la date de cessation des paiements est
fixée par le jugement d’ouverture de la procédure. Elle ne peut être antérieure de
plus de 18 mois à la date d’ouverture de la procédure.
Le même article ajoute que dans le cas où le jugement ne détermine pas
la date de cessation des paiements, cette dernière sera réputée être intervenue
à la date du jugement même.
Cette date peut être reportée une ou plusieurs fois à la demande du
syndic. La demande de modification de date devant être présentée au tribunal
avant l’expiration du délai de 15 jours à partir du jugement qui arrête le plan de
continuation ou de cession, ou, dans le cas de liquidation judiciaire, après le
dépôt de l’état des créances.
b) Les organes de la procédure

*Le juge-commissaire : C’est un juge du tribunal. Il est chargé de veiller au


déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en présence.
Dans ce cadre, il statue par ordonnance sur les demandes, contestations et
revendications relevant de sa compétence ainsi que sur les réclamations
formulées contre les actes du syndic. Ses ordonnances sont immédiatement
déposées au greffe. Elles font l’objet d’un recours devant la Cour d’appel 128.

127
MOTIK (M.), Droit commercial marocain, Imprimerie El Maarif Al Jadida, Rabat, 2001,
p. 249.
128
V. article 697 du C.com.

143
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Il a, en outre, le pouvoir d’ordonner ou d’autoriser un grand nombre d’actes


qui dépassent la compétence du syndic ou du débiteur.
Pour permettre au juge-commissaire de remplir sa mission, la loi prévoit
également que le procureur du Roi lui communique, sur sa demande ou d’office,
tous les renseignements qu’il détient et qui peuvent être utiles à la procédure.
*Le syndic : La fonction de syndic est exercée par le greffier. Toutefois, le
tribunal peut, le cas échéant, la confier à un tiers129. Il est chargé de mener les
opérations de redressement ou de liquidation judiciaire à partir du jugement
d’ouverture jusqu’à la clôture de la procédure.
Compte tenu des dispositions de l’article 642, le syndic a seul la qualité
pour agir au nom et dans l’intérêt des créanciers. À l’égard du débiteur, le rôle du
syndic varie suivant la nature de la procédure:
* Dans le redressement judiciaire, l’article 576 précise que le jugement qui
désigne le syndic, le charge de :
- soit surveiller les opérations de gestion ;
- soit d’assister le chef de l’entreprise pour tous les actes
concernant la gestion ou certains d’entre eux ;
- soit d’assurer seul, entièrement ou en partie, la gestion de
l’entreprise.
* Dans la liquidation judiciaire, le débiteur est représenté par le
syndic du fait du dessaisissement qui l’empêche d’accomplir un acte
juridique de quelque nature qui soit opposable aux créanciers.
À tout moment, le tribunal peut modifier la mission du syndic à sa demande
ou d’office. Il peut même le remplacer à la demande du juge-commissaire, soit
d’office, soit sur réclamation du débiteur ou d’un créancier.
*Les contrôleurs130 : Le juge-commissaire désigne un à trois contrôleurs
parmi les créanciers qui lui en font la demande, dont au moins un parmi les

129
V. article 568, al. 3 du C.com.
130
En pratique, la fonction de contrôleur est assurée par le chef de fil des créanciers qui
est généralement une banque qui détient la créance la plus importante à l’encontre de
l’entreprise débitrice. Remarquons également dans le même sens que les fonctions de
contrôleur sont gratuites. Le contrôleur peut se faire représenter par l’un de ses préposés
ou par un avocat. Cf. EL HAMMOUMI (A.), Op.cit., p. 77 et s.

144
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

créanciers titulaires de sûretés et un autre parmi les créanciers chirographaires.


Ils peuvent être des personnes physiques ou morales.
Dans le cas du redressement judiciaire, les contrôleurs assistent le syndic
dans ses fonctions et le juge-commissaire dans sa mission de surveillance de
l’administration de l’entreprise.
Dans la liquidation judiciaire, leur mission se limite au contrôle des
opérations de liquidation.
Les contrôleurs peuvent prendre connaissance de tous les documents
transmis au syndic. Ils rendent compte aux autres créanciers de
l’accomplissement de leur mission à chaque étape de la procédure. Ils peuvent
être révoqués d’office par le tribunal, sans qu’une proposition lui soit faite dans
ce cadre par le juge-commissaire ou le syndic.
c) Publicité du jugement d’ouverture

Le jugement d’ouverture prend effet à partir de sa date, il est mentionné


sans délai au registre du commerce de l’entreprise contre laquelle la procédure
est ouverte. De plus, dans les 8 jours de son prononcé, un avis de la décision est
publié dans un JAL et au BO.
Cet avis invite les créanciers à déclarer leurs créances au syndic désigné.
Il est affiché par les soins du greffier au panneau réservé à cet effet au tribunal.
Il convient de noter en ce sens que la loi ne prévoit pas de notification du
jugement à tout créancier demandeur, conformément à la règle de droit
commun131. Il ne prévoit cette mesure qu’à l’égard de l’entreprise soumise à la
procédure à laquelle le greffier notifie le jugement sans délai132.

d) Les voies de recours

Les jugements et ordonnances rendues en matière de procédures de


traitement des difficultés et de liquidation sont exécutoires de plein droit133, ce qui
écarte l’effet suspensif qui est attaché, selon le droit commun, à l’appel.

131
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Op.cit., p. 558.
132
V. article 569, al. 3 C.com.
133
Il faut noter que l’effet exécutoire du jugement d’ouverture de la procédure se justifie
par la nécessité de prendre d’urgence, dans l’intérêt des créanciers, des mesures qui

145
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

L’opposition et la tierce opposition sont formées contre les décisions


rendues en matière de redressement et de liquidation et de déchéance
commerciale par déclaration au greffe du tribunal dans le délai de 10 jours à
compter du prononcé de la décision ou de sa publication au BO si cette
publication est prescrite.
Ces mêmes décisions sont susceptibles d’appel et de pourvoi en
cassation, et ceci dans le délai de 10 jours à compter de la notification de la
décision ou de l’arrêt134.
Ces recours peuvent être exercés par le débiteur ou l’un des créanciers et
même par le ministère public si ce dernier est partie principale135 à la procédure.

§ II - La période d’observation
La période d’observation est une période d’immobilité où l’entreprise
bénéficie d’une suspension des poursuites susceptibles d’être intentées contre
elle, c'est-à-dire d’une sorte de moratoire général.
Il s’agit ici d’une période préparatoire pendant laquelle l’exploitation
continue, et au cours de laquelle le syndic commence par établir un rapport sur
la situation de l’entreprise. D’après ce rapport le tribunal décidera soit un plan de
redressement, soit la liquidation judiciaire.
A. Préparation de la solution

Le syndic avec le concours du chef de l’entreprise, et éventuellement


l’assistance d’un ou plusieurs experts, dresse dans un rapport le bilan financier,
économique et social de l’entreprise. Sur la base de ce rapport, le syndic
proposera soit un plan de redressement sous la forme de continuation de
l’entreprise ou sa cession à un tiers, soit sa liquidation judiciaire.
Ces propositions sont remises par le syndic au juge-commissaire à
l’expiration d’un délai maximum de 4 mois à compter de la date du jugement

empêchent le débiteur de compromettre ou de faire disparaître ce qui reste de son actif.


Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 289.
134
V. articles 728 à 732 du C.com.
135
V. article 6 du code de procédure civile.

146
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

d’ouverture de la procédure. Ce délai ne peut être renouvelé, à la demande du


syndic, qu’une seule fois.
B. Plan de la solution

Le tribunal décide136, sur la base du rapport du syndic et après avoir


entendu le chef de l’entreprise, les contrôleurs et les délégués du personnel, soit
la continuation de l’entreprise, soit sa cession, soit sa liquidation judiciaire.
Remarquons à cet égard que le tribunal dispose d’un pouvoir souverain. Il
peut en effet approuver ou rejeter les conclusions du rapport du syndic, qui peut
lui-même proposer un redressement ou une liquidation. Le tribunal peut
également, quand le syndic propose une liquidation, décider la prolongation de
la période d’observation si celle-ci n’est pas expirée, afin de permettre
l’établissement d’un plan de continuation.
La décision du tribunal donne au plan un caractère définitif.
Il ne faut, toutefois, pas confondre le jugement qui a arrêté le plan ou
prononcé la liquidation judiciaire, avec celui qui a ouvert la procédure. Les
décisions prises dans le jugement qui arrête le plan sont irréversibles.
Précisons enfin, que les personnes qui exécuteront le plan, même à titre
d’associé, ne peuvent pas se voir imposer des charges autres que les
engagements qu’ils ont souscrits au cours de sa préparation137.

§ III - Modalités du traitement


Compte tenu des dispositions de l’art. 568, le redressement judiciaire est
prononcé (A) s’il apparaît que la situation de l’entreprise n’est pas
irrémédiablement compromise. Dans le cas contraire, la liquidation judiciaire sera
prononcée (B).

136
La décision fixant le sort de l’entreprise est prise par le tribunal seul, mais afin de
respecter le principe du contradictoire, le tribunal ne peut statuer qu’après avoir entendu
ou dûment appeler ces organes. V. à ce propos GUYON (Y.), Droit des affaires, tome
2 : Entreprises en difficultés, redressement judiciaire – faillite, ECONOMICA DELTA, 9e
éd., Paris, 2003, p. 210 et s.
137
V. article 591 du C.com.

147
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

A. Le redressement judiciaire de l’entreprise

Sur la base du rapport établi par le syndic, le tribunal décide soit la


continuation de l’entreprise (a) s’il existe de fortes chances de redressement, soit
sa cession (b) à un tiers.
a) Le redressement par la continuation

La continuation de l’entreprise est prononcée lorsqu’il existe des


possibilités sérieuses de redressement et de règlement du passif.
1. Le plan de continuation138

Le plan de continuation arrêté par le tribunal indique les conditions et les


moyens de la continuation. Il indique ainsi, le cas échéant, les modifications
apportées à la gestion de l’entreprise selon les modalités d’apurement du passif.
Le tribunal peut arrêter le plan, même si la vérification des créances n’est pas
encore terminée, en raison des contestations portées devant la justice. La durée
du plan est fixée par le tribunal sans pouvoir excéder 10 ans.
Le plan mentionne également les modifications des statuts nécessaires à
la continuation de l’entreprise. Le syndic convoque à cet effet l’assemblée
compétente pour les mettre en œuvre.
Aussi, la continuation est accompagnée, s’il y a lieu, de l’arrêt, de
l’adjonction, ou de la cession de certaines branches d’activités. Remarquons ici
que l’adjonction reste peu probable car l’entreprise se trouve déjà en difficulté,
sauf dans le cas où certaines branches peuvent constituer un complément
nécessaire et avantageux pour celles déjà existantes139.
Lorsque l’entreprise a fait l’objet d’une interdiction d’émettre des chèques
en raison de faits antérieurs au jugement d’ouverture, le tribunal peut prononcer
la suspension des effets de cette mesure pendant la durée d’exécution du plan
et du règlement du passif.

138
Dans la pratique française, la continuation reste la solution retenue par un peu plus
de la moitié des plans de continuation, ce qui ne représente toutefois que 3 % des
procédures, puisque la plupart des temps celles-ci se terminent par une liquidation ; Cf.
GUYON (Y.), Op.cit., note 7, p. 294 ; Infostat Justice n° 19, janv. 1991.
139
Cf. CHERKAOUI (H.), Op.cit., p. 314.

148
2018-2019 Professeur Chakib El Oufir

Le tribunal peut, par ailleurs, dans le jugement qui arrête le plan ou le


modifie décider que les biens qu’il estime indispensables à la continuation de
l’entreprise ne pourront être aliénés sans son autorisation, pour une durée qu’il
fixe. L’inaliénabilité est inscrite au registre du commerce de l’entreprise. Tout acte
passé en violation de cette inaliénabilité sera annulé à la demande de tout
intéressé présentée dans le délai de 3 ans à compter de la conclusion de l’acte
ou de sa publication140.
Précisons enfin, qu’une quelconque modification dans les objectifs et les
moyens du plan ne pourra être décidée que par le tribunal à la demande du chef
de l’entreprise et sur rapport du syndic.
2. Apurement du passif dans le plan de continuation

Le tribunal donne acte des délais et remises accordés par les créanciers
au cours de la consultation menée par le syndic141; ce qui allège le passif de
l’entreprise et permet son maintien. Le cas échéant, le tribunal pourra réduire ces
délais et remises afin de rapprocher les sacrifices consentis par les créanciers;.
Les créanciers qui n’ont accepté ni délai ni remises, ne pourront, pour leur part,
se voir imposer par le tribunal de remise contre leur gré.

En revanche, le tribunal peut imposer à tous les créanciers qu’ils soient


privilégiés142 ou chirographaires des délais uniformes de paiement, sous réserve
pour les créances à termes, des délais supérieurs stipulés par les parties avant
l’ouverture des procédures. Ces délais peuvent même excéder la durée du plan.
Le premier paiement doit intervenir dans le délai d’un an143.

En cas de vente d’un bien grevé d’un privilège spécial, d’un nantissement
ou d’une hypothèque, les créanciers bénéficiaires de ces sûretés ou titulaires
d’un privilège général, sont payés sur le prix après le paiement des créanciers

140
Article 595 du C.com.
141
V. à cet effet articles 585 à 589 du C.com.
142
Les privilèges généraux portent sur l'ensemble des biens du débiteur, tandis que les
privilèges spéciaux ne concernent que quelques biens spécifiques.
143
V. article 598 du C.com.

149
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qui les priment. Ce paiement anticipé s’impute sur le principal des premiers
dividendes à échoir et les intérêts y afférent sont remis de plein droit.

b) La cession de l’entreprise

La cession a pour but d’assurer le maintien d’activités susceptibles


d’exploitation autonome, de tout ou partie des emplois qui y sont attachés et
d’apurer le passif. Elle peut être totale ou partielle.
La cession est opérée suivant certaines modalités (1) fixées par la loi. Elle
produit des effets (2) tant bien à l’égard du cessionnaire qu’à l’égard des
créanciers.

1. Modalités de la cession

Les offres de cession sont communiquées au syndic dans le délai qu’il a


fixé. Il en informe les contrôleurs. Toute offre doit indiquer : 1° les prévisions
d’activité de financement ; 2° le prix de cession et ses modalités de règlement ;
3° la date de réalisation de la cession ; 4° le niveau et les perspectives d’emploi
justifiés par l’activité considérée ; 5° les garanties souscrites en vue d’assurer
l’exécution de l’offre ; 6° les prévisions de vente d’actifs au cours des deux
années suivant la cession144.
Le juge qui examine cette offre en audience peut, à cet égard, demander
des explications complémentaires. Le syndic donne au tribunal tout élément qui
permet de vérifier le caractère sérieux de l’offre. Le tribunal retient, par la suite,
l’offre qui permet dans les meilleures conditions d’assurer le plus durablement
l’emploi attaché à l’ensemble cédé et le paiement des créanciers.
Le syndic exécute le plan de cession arrêté par le tribunal, sa mission dure
jusqu’à la clôture de la procédure. Lorsque le paiement du prix de cession est
effectué et le montant réparti entre les créanciers, le tribunal prononce la clôture
de la procédure.
2. Effets de la cession

144
Article 604 du C.com.

150
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La cession produit bien des effets tant à l’égard du cessionnaire qu’à


l’égard des créanciers de l’entreprise. L’article 610 dispose en effet que tant que
le prix de cession n’est pas intégralement payé, le cessionnaire ne pourra, à
l’exception des stocks, aliéner, donner en garantie ou donner en location gérance
les biens corporels ou incorporels qu’il a acquis. Tout acte passé en violation de
l’interdiction est annulé à la demande de tout intéressé présentée dans le délai
de 3 ans à compter de la conclusion de l’acte ou de sa publication.

Le cessionnaire rend compte au syndic de l’exécution des dispositions


arrêtées par le plan de cession. Au cas où le cessionnaire n’exécute pas ses
engagements, le tribunal pourra, d’office ou à la demande du syndic ou d’un
créancier, prononcer la résolution du plan.
Quant au sort des créanciers dans la cession, l’article 615 décide que le
prix de cession est réparti par le syndic entre les créanciers suivant leur rang. Le
jugement qui arrête le plan de cession totale de l’entreprise rend exigible les
dettes non échues.

Lorsque la cession porte sur des biens grevés d’un privilège spécial, d’un
nantissement ou d’une hypothèque, une quote-part du prix est affectée par le
tribunal à chacun de ces biens pour la répartition du prix et l’exercice du droit de
préférence.

Les créanciers titulaires de sûretés ne pourront également exercer leur


droit de suite contre le cessionnaire. Jusqu’au paiement complet du prix qui
emporte purge des inscriptions grevant les biens compris dans la cession, les
créanciers bénéficiaires d’un droit de suite ne pourront l’exercer qu’en cas
d’aliénation du bien cédé par le cessionnaire145.

145
V. article 617 du C.com.

151
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B. La liquidation judiciaire146 de l’entreprise

La liquidation judiciaire est prononcée lorsque la situation de l’entreprise


est irrémédiablement compromise (art. 619), c'est-à-dire qu’il n’existe plus de
chances de redressement. Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire
emporte dessaisissement du débiteur (1) de l’administration et de la disposition
de ses biens.
La procédure de liquidation judiciaire consistera en la réalisation de l’actif
disponible (2) en vue d’apurer le passif exigible (3).
a) Dessaisissement du débiteur

Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit


dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses
biens, voire même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la
liquidation judiciaire n’est pas clôturée.
Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés,
pendant toute la durée de la liquidation, par le syndic.
La loi permet cependant au débiteur d’exercer les actions purement
personnelles comme la paternité, la nationalité ou le divorce. Il peut aussi se
constituer partie civile dans le but d’établir la culpabilité de l’auteur d’une
infraction pénale dont il serait victime, sans qu’il puisse toutefois encaisser les
dommages-intérêts et indemnités. Celles-ci bénéficieront à la liquidation147.
b) Réalisation de l’actif

Les ventes d’immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière
de saisie immobilière. Après avoir recueilli les observations des contrôleurs, le
débiteur et le syndic entendus ou dûment appelés, le juge-commissaire
détermine la mise à prix, les conditions essentielles de la vente et les modalités
de la publicité.

146
Remarquons que plus de 90 % des procédures se terminent par une liquidation et les
chirographaires (créanciers) touchent rarement plus de 5 % du montant de leur créance.
V. GUYON (Y.), Ibid., note 1, p. 329 ; Infostat Justice n° 19, janv 1991.
147
DRISSI ALAMI MACHICHI (M.), Op.cit., p. 592.

152
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En outre, dans les mêmes conditions, si la consistance des biens, leur


emplacement ou les offres reçues permettent d’envisager une cession amiable
plus avantageuse, celle-ci peut être autorisée par le juge-commissaire, soit sous
forme d’adjudication amiable sur la mise à prix qu’il fixe, soit même de gré à gré
aux prix et modalités qu’il détermine148.
Il convient de noter, par ailleurs, que des unités de production composées
de tout ou partie de l’actif mobilier ou immobilier peuvent faire l’objet d’une
cession globale. Le syndic suscite à cet effet des offres d’acquisition et fixe le
délai pendant lequel elles sont reçues. Le juge-commissaire choisit l’offre la plus
sérieuse permettant d’assurer l’emploi et le paiement des créanciers 149. Quant
aux autres biens de l’entreprise, le juge-commissaire ordonne leur vente aux
enchères publiques ou de gré à gré après avoir entendu le chef de l’entreprise et
recueilli les observations des contrôleurs.
c) Apurement du passif dans le plan de cession

Dans le cas où plusieurs distributions de sommes précèdent la répartition


du prix des immeubles, les créanciers privilégiés et hypothécaires admis
concourent aux répartitions dans la proportion de leurs créances totales.
Après la vente des immeubles et le règlement définitif de l’ordre entre les
créanciers hypothécaires et privilégiés, ceux d’entre eux qui viennent en rang
utile sur le prix des immeubles pour la totalité de leur créance ne perçoivent le
montant de leur collocation hypothécaire que sous la déduction des sommes par
eux reçues. Les sommes ainsi déduites profitent aux créanciers
chirographaires150.
Dans le cas de créanciers privilégiés ou hypothécaires, non remplis sur le
prix des immeubles, ceux-ci concourent avec les créanciers chirographaires pour
ce qui leur reste dû.
Enfin, le montant d’actif, distraction faite des frais et dépens de la
procédure, des subsides accordés par le juge-commissaire au chef de

148
Article 622, al. 3 du C.com.
149
Article 623 du C.com.
150
Article 630 du C.com.

153
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l’entreprise ou aux dirigeants ou à leur famille et des sommes payées aux


créanciers privilégiés, est réparti entre tous les créanciers au marc le franc de
leurs créances admises. La part correspondant aux créances sur l’admission
desquelles il n’aurait pas été statué définitivement et, notamment, les
rémunérations des dirigeants sociaux tant qu’il n’aura pas été statué sur leur cas,
est mise en réserve151.
Enfin, à tout moment, le tribunal peut prononcer, même d’office, le chef
d’entreprise appelé sur rapport du juge-commissaire, la clôture de la liquidation
judiciaire lorsqu’il n’existe plus de passif exigible ou que le syndic dispose des
sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers, ou lorsque la poursuite
des opérations de liquidation devient impossible du fait de l’insuffisance d’actif.

151
V. article 634 du C.Com.

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160
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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION............................................................................................................. 2
I - DEFINITION ET PARTICULARITES DU DROIT COMMERCIAL ................................ 2
A - LE FORMALISME DU DROIT COMMERCIAL ................................................................ 2
B - LA SOUPLESSE DU DROIT COMMERCIAL .................................................................... 3
II - LES SOURCES DU DROIT COMMERCIAL.................................................................... 3
A- LES SOURCES ECRITES ........................................................................................... 3
a - Les sources nationales ............................................................................................................ 3
1/ Le code de commerce et la refonte du droit des affaires .................................................... 3
2/ Le D.O.C. : ........................................................................................................................ 4
b- Les sources internationales ...................................................................................................... 4
B- LES SOURCES NON ECRITES .................................................................................. 5
a- Les usages commerciaux ......................................................................................................... 5
b - La jurisprudence ..................................................................................................................... 5
III– LES JURIDICTIONS DE COMMERCE ........................................................................... 6
A – LES TRIBUNAUX DE COMMERCE ........................................................................ 6
a – Composition ........................................................................................................................... 6
b – Compétence ........................................................................................................................... 6
B – Les cours d’appel de commerce ................................................................................ 7
a – Composition ........................................................................................................................... 7
b – Compétence ........................................................................................................................... 7

PREMIERE PARTIE : ................................................................................................................ 8

LA MATIERE DU DROIT COMMERCIAL ........................................................................... 8

CHAPITRE 1 - L’OBJET DU DROIT COMMERCIAL ......................................................... 9

SECTION I - LES ACTIVITES COMMERCIALES .................................................................. 9


§ 1 - LES ACTIVITES DE PRODUCTION ...................................................................... 9
§ 2 – LES ACTIVITES DE DISTRIBUTION .................................................................. 10
A - L’ACHAT POUR REVENDRE .......................................................................................... 10
B - LA FOURNITURE .............................................................................................................. 11
§ 3 - LES ACTIVITES DE SERVICES ............................................................................ 11
A - LES SERVICES DE L’INTERMEDIATION ..................................................................... 11
a - Le courtage ..................................................................................................................... 11
b - La commission ............................................................................................................... 12
c - Les bureaux et agences d’affaires ................................................................................... 12
B - LES SERVICES FINANCIERS .......................................................................................... 12
1 - La banque ................................................................................................................. 13
2 - Le crédit ................................................................................................................... 13
3 - Les transactions financières ...................................................................................... 13
4 - L’assurance .............................................................................................................. 13
C - LES AUTRES SERVICES .................................................................................................. 14

161
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1 – L'activité industrielle ............................................................................................... 14


2 - La location de meubles ............................................................................................. 14
3 - L’exploitation de locaux à usage public ................................................................... 15
4 - Le transport .............................................................................................................. 15
SECTION II - LES ACTES DE COMMERCE .......................................................................... 15
§ I - LES ACTES DE COMMERCE PAR LA FORME ................................................... 15
A - LA LETTRE DE CHANGE ................................................................................................ 16
B - LES SOCIETES COMMERCIALES .................................................................................. 16
§ II - LES ACTES DE COMMERCE PAR ACCESSOIRE ............................................. 16
§ III - LES ACTES MIXTES .......................................................................................... 17

CHAPITRE II - LE SUJET DU DROIT COMMERCIAL .................................................... 18

SECTION I - DEFINITION DU COMMERÇANT ................................................................... 18


§ I - L’EXERCICE HABITUEL OU PROFESSIONNEL DES ACTIVITÉS
COMMERCIALES ........................................................................................................................ 19
§ II - L’EXERCICE POUR SON PROPRE COMPTE ................................................... 19
A – LA RÈGLE ......................................................................................................................... 19
B - LES EXCEPTIONS ............................................................................................................. 20
a - Les commissionnaires..................................................................................................... 20
b - Les prête-noms ............................................................................................................... 20
SECTION II - LA CONDITION JURIDIQUE DU COMMERCANT ...................................... 20
§ I - LA CAPACITE COMMERCIALE ........................................................................... 21
§ II - LES RESTRICTIONS A LA LIBERTE DU COMMERCE ..................................... 21
A - LES INCOMPATIBILITÉS ................................................................................................ 22
B - LES DÉCHÉANCES ........................................................................................................... 22
C - LES INTERDICTIONS ....................................................................................................... 22
D - LES AUTORISATIONS ..................................................................................................... 23
SECTION III - LES OBLIGATIONS DU COMMERCANT .................................................... 23
§1 – LES OBLIGATIONS NOUVELLES ........................................................................ 23
§2 – LA PUBLICITE AU REGISTRE DE COMMERCE ............................................... 25
A - LE FONCTIONNEMENT DU R.C. .................................................................................... 25
a - L’organisation du R.C. ................................................................................................... 25
b - Les personnes assujetties ................................................................................................ 25
c - Les inscriptions au R.C. .................................................................................................. 25
1 - Les immatriculations ................................................................................................ 26
1°/ L’immatriculation principale ............................................................................. 26
2°/ Les inscriptions complémentaires ...................................................................... 26
3°/ Les immatriculations secondaires ...................................................................... 26
2 - Les inscriptions modificatives .................................................................................. 27
3 - Les radiations ........................................................................................................... 27
B - LES EFFETS DE L’IMMATRICULATION ....................................................................... 27
a - Les effets à l'égard des personnes physiques .................................................................. 27
1 - La présomption de commercialité ............................................................................ 28

162
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2 - Les effets du défaut d’immatriculation ..................................................................... 28


b - Les effets à l’égard des personnes morales ..................................................................... 29
§ 3 - LA TENUE D’UNE COMPTABILITE ................................................................... 29
A - LES LIVRES ET DOCUMENTS COMPTABLES ............................................................. 29
B - LES REGLES RELATIVES À LA TENUE DE LA COMPTABILITE ET LEURS
SANCTIONS ............................................................................................................................................. 30
a - Les règles ........................................................................................................................ 30
b - Les sanctions .................................................................................................................. 34
1 - Les sanctions fiscales ............................................................................................... 34
2 - Les sanctions pénales ............................................................................................... 35
C - LA PREUVE PAR LES DOCUMENTS COMPTABLES .................................................. 29
a - La force probante des documents comptables ................................................................ 36
1 - Les documents comptables sont invoqués comme preuve contre le commerçant qui
les tient .......................................................................................................................................... 36
2 - Les documents comptables invoqués comme preuve par le commerçant qui les tient ............. 36
2-1/ La preuve est dirigée contre un commerçant .................................................... 37
2-2/ La preuve est dirigée contre un non commerçant ............................................. 37
b - Les modes de production en justice ................................................................................ 38
1 - La communication .................................................................................................... 38
2 - La représentation ...................................................................................................... 39
SECTION IV – L'AUTO-ENTREPRENEUR.................................................................................... 39
SECTION V – LE REGIME JURIDIQUE DU DOMAINE COMMERCIAL ........................... 42
§ I - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FOND .............................................. 42
1°/ La capacité ............................................................................................................... 42
2°/ La solidarité ............................................................................................................. 42
§ II - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FORME ........................................... 43
1°/ La compétence judiciaire ......................................................................................... 43
2°/ La preuve ................................................................................................................. 43
3°/ Le redressement et la liquidation judiciaires ............................................................ 44

DEUXIEME PARTIE : ............................................................................................................. 45

LES INSTRUMENTS DU COMMERCE ................................................................................ 45

CHAPITRE 1 – LES EFFETS DE COMMERCE .................................................................. 45

SECTION 1 – LA LETTRE DE CHANGE ............................................................................... 45


§ 1 – L’EMISSION DE LA LETTRE DE CHANGE ....................................................... 46
A – CONDITIONS DE VALIDITE .......................................................................................... 46
a – La capacité ..................................................................................................................... 46
b – Les mentions obligatoires .............................................................................................. 46
B – SANCTION DE LA VALIDITÉ DE LA LETTRE DE CHANGE ..................................... 47
a – Les omissions dans les mentions obligatoires ................................................................ 47
b – L’incapacité ................................................................................................................... 47
§ 2 – L’ACCEPTATION ................................................................................................. 47
A – FORMES ET MODALITES ............................................................................................... 47

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B – CONSEQUENCES DE L’ACCEPTATION ....................................................................... 48


a – Provision et valeur fournie ............................................................................................. 48
1 – Constitution de la provision ..................................................................................... 48
2 – Propriété de la provision .......................................................................................... 48
3 – La valeur fournie ..................................................................................................... 48
b – Inopposabilité des exceptions du tiré au porteur ............................................................ 48
c – Les exceptions opposables au porteur ............................................................................ 48
d – Les effets de complaisance et de cavalerie..................................................................... 49
§ 3 – LES GARANTIES DE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE ...................... 50
A – LE TRANSFERT DE LA PROPIETE DE LA PROVISION ............................................. 50
B – LA SOLIDARITE ............................................................................................................... 50
C – L’AVAL .............................................................................................................................. 51
§ 4 – LA CIRCULATION DE LA LETTRE DE CHANGE ............................................. 51
A – L’ENDOSSEMENT TRANSLATIF DE PRORIETE ........................................................ 51
B – L’ENDOSSEMENT PAR PROCURATION ...................................................................... 52
C – L’ENDOSSEMENT PIGNORATIF ................................................................................... 52
§ 5 – LE PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE .................................................... 53
A – L’ECHEANCE ................................................................................................................... 53
B – LA PRESENTATION AU PAIEMENT ............................................................................. 53
a – Lieu et date de la présentation ........................................................................................ 53
b – La perception du montant de la créance ......................................................................... 53
§ 6 – LES OBSTACLES AU PAIEMENT DE LA LETTRE DE CHANGE ..................... 54
A – L’OPPOSITION AU PAIEMENT ...................................................................................... 54
B – LE REFUS DE PAIEMENT ............................................................................................... 54
a – Le protêt ......................................................................................................................... 54
b – Le cas de dispense du protêt .......................................................................................... 55
§ 7 – LES RECOURS ..................................................................................................... 55
A – LES RECOURS DU PORTEUR DILIGENT ..................................................................... 55
B – LES DECHEANCES DU PORTEUR NEGLIGENT ......................................................... 55
C – LES PRESCRIPTIONS DES RECOURS ........................................................................... 55
SECTION 2 – LE BILLET A ORDRE....................................................................................... 56
§ 1 – SPECIFICITES ..................................................................................................... 56
A – Définition ............................................................................................................................ 56
B – Nature du billet à ordre........................................................................................................ 56
C – Régime cambiaire ................................................................................................................ 57
§ 2 – CONDITIONS DE VALIDITE ............................................................................... 57
A – LES CONDITIONS DE FORME ....................................................................................... 57
a – La dénomination «billet à ordre» ................................................................................... 57
b – La promesse pure et simple de payer ............................................................................. 57
B – LES CONDITIONS DE FOND .......................................................................................... 57
a – La capacité ..................................................................................................................... 57
b – Absence de la notion de provision ................................................................................. 58
c – Absence de la notion d’acceptation ................................................................................ 58
SECTION 3 – LE CHÈQUE ...................................................................................................... 58

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§ 1 – LES ASPECTS TECHNIQUES .............................................................................. 59


A – NATURE ET FONCTION DU CHÈQUE .......................................................................... 59
B – LES CONDITIONS FORMELLES .................................................................................... 59
a – Les mentions obligatoires .............................................................................................. 59
b – Les mentions facultatives ............................................................................................... 60
C – LE CHÈQUE, INSTRUMENT DE PAIEMENT FACULTATIF ....................................... 61
D – LA PROVISION DU CHÈQUE ......................................................................................... 61
a - Le contenu de la provision .............................................................................................. 61
b - Le moment de l’existence de la provision ...................................................................... 61
c- Le transfert de la propriété de la provision ...................................................................... 62
E – JUSTIFICATION D’IDENTITE ......................................................................................... 62
F – LA CIRCULATION DU CHÈQUE .................................................................................... 62
§ 2 – LES SYSTEMES DE PROTECTION DU CHEQUE ............................................. 63
A – LE SYSTEME CAMBIAIRE ............................................................................................. 63
a – La présentation au paiement........................................................................................... 63
b – Le protêt......................................................................................................................... 64
c – Les avis .......................................................................................................................... 64
d – Les délais de prescription .............................................................................................. 64
e – Les recours cambiaires ................................................................................................... 65
B – LE SYSTEME BANCAIRE ............................................................................................... 65
a – Les obligations des banques ........................................................................................... 66
1 – Lors de l’ouverture des comptes .............................................................................. 66
2 – Lors des incidents de paiement ................................................................................ 66
b – La réparation de l’incident ............................................................................................. 66
1 – La régularisation ...................................................................................................... 66
2 – L’amende forfaitaire ................................................................................................ 67
c – La responsabilité des banques ........................................................................................ 67
1 – Les sanctions pénales............................................................................................... 67
2 – Les sanctions de garantie ......................................................................................... 68
d – Le rôle de Bank Al-Maghrib .......................................................................................... 68
C – LE SYSTEME PENAL ....................................................................................................... 69
a – Les infractions en matière de chèque ............................................................................. 69
1 – L’omission de constituer ou de maintenir la provision ............................................ 69
2 – L’opposition irrégulière ........................................................................................... 69
3- L’acceptation et l’endossement des chèques de garantie ........................................... 69
b – Les sanctions pénales ..................................................................................................... 70

CHAPITRE II - LE FONDS DE COMMERCE ..................................................................... 71

SECTION I - LES ELEMENTS DU F.C. .................................................................................. 71


§ I - LES ELEMENTS CORPORELS ............................................................................. 71
§ II - LES ELEMENTS INCORPORELS ........................................................................ 72
SECTION II - LES CONTRATS PORTANT SUR LE FONDS DE COMMERCE .................. 74
§ I - LA VENTE DU FONDS DE COMMERCE ............................................................ 74
A - LES CONDITIONS DE LA VENTE .................................................................................. 75

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a - Les conditions de fond .................................................................................................... 75


b - Les conditions de forme ................................................................................................. 75
B - LES EFFETS DE LA VENTE ............................................................................................. 75
a - Les règles protectrices des droits de l’acquéreur ............................................................ 76
1 - Les règles générales ................................................................................................. 76
2 - Les règles spéciales .................................................................................................. 76
b - Les règles protectrices des droits du vendeur ................................................................. 76
1 - Le privilège du vendeur............................................................................................ 77
2 - L’action résolutoire .................................................................................................. 77
c - Les règles protectrices des droits des créanciers du vendeur .......................................... 77
1 - La publicité............................................................................................................... 78
2 - L’opposition ............................................................................................................. 79
3 - La surenchère ........................................................................................................... 79
§ II - LE NANTISSEMENT DU FC ................................................................................ 79
A - LES CONDITIONS ............................................................................................................. 80
b - Les formalités ....................................................................................................................... 80
§ III - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DU FC .... 80
A - Le droit de suite ................................................................................................................... 80
B - Le droit de préférence .......................................................................................................... 80
§ IV - LA GERANCE LIBRE .......................................................................................... 81
A - LES REGLES RELATIVES À LA PUBLICITE ................................................................ 81
B - LES EFFETS DE LA LOCATION-GERANCE .................................................................. 82

3EME PARTIE – LES SOCIETES COMMERCIALES........................................................... 83

CHAPITRE 1 - LE CONTRAT DE SOCIÉTÉ ....................................................................... 84

SECTION 1 – LES CONDITIONS DE FORMATION DES SOCIÉTÉS ................................. 84


§ 1 – LES CONDITIONS DE FOND ............................................................................. 84
A – LES ASSOCIES.................................................................................................................. 84
a - La capacité ...................................................................................................................... 84
b – Le nombre d'associés ..................................................................................................... 85
B – LES APPORTS ................................................................................................................... 85
a. Les apports en numéraire ................................................................................................. 85
b. Les apports en nature ....................................................................................................... 85
c. Les apports en industrie ................................................................................................... 85
C – LE PARTAGE DES BENEFICES ...................................................................................... 86
§ 2 – LES CONDITIONS DE FORME ........................................................................... 86
A – LES STATUTS ................................................................................................................... 86
B - SOUSCRIPTION DU CAPITAL ET LIBERATION DES APPORTS ............................... 86
a - La libération des apports en numéraire ........................................................................... 86
b - La libération des apports en nature ................................................................................. 87
C - LE DEPÔT DES FONDS EN BANQUE............................................................................. 87
D - LA DECLARATION DE SOUSCRIPTION ET DE VERSEMENT .................................. 88
E – LES FORMALITES DE DEPÔT AU TRIBUNAL ............................................................ 88
F – LA PUBLICITE DE LA CONSTITUTION ........................................................................ 88

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SECTION 2 – ATTRIBUTS DES SOCIÉTÉS .......................................................................... 89


§ 1 – LA DENOMINATION SOCIALE .......................................................................... 89
§2 – LE SIEGE SOCIAL ET LA NATIONALITE ........................................................... 89
a – au niveau national ................................................................................................................ 89
B – SUR LE PLAN INTERNATIONAL : SOCIETES INTERNATIONALES ET SOCIETES multinationales90
§3 – LE PATRIMOINE................................................................................................... 90
SECTION 4 – CLASSIFICATION DES SOCIÉTÉS DE DROIT PRIVE ................................. 91
§ 1 – SOCIÉTÉS CIVILES ET SOCIÉTÉS COMMERCIALES ...................................... 91
§ 2 – SOCIÉTÉS DE PERSONNES ET SOCIÉTÉS DE CAPITAUX ............................. 92
A – LES SOCIETES DE PERSONNES (SNC ET SCS) .......................................................... 92
B – LES SOCIETES DE CAPITAUX OU PAR ACTIONS (SA ET SCA) .............................. 92
§ 3 – LA SARL ................................................................................................................ 92
§ 4 - LES SOCIETES SANS PERSONALITE………………………………….....91

CHAPITRE 2 – LES SOCIÉTÉS DE PERSONNES .............................................................. 96

SECTION 1 – LA SOCIÉTÉ EN NOM COLLECTIF ............................................................... 96


§ 1 – LES CARACTERES GENERAUX ......................................................................... 97
A – LE CAPITAL ET LA RESPONSABILITÉ ........................................................................ 97
B – LA CAPACITÉ DES ASSOCIÉS ....................................................................................... 97
§ 2 – LA GESTION DES SOCIÉTÉS EN NOM COLLECTIF ........................................ 97
A – LES CONDITIONS DE LA GERANCE ............................................................................ 97
B – LES POUVOIRS DU GERANT ......................................................................................... 98
a - Les pouvoirs du gérant face à ses associés ..................................................................... 98
b - Les pouvoirs du gérant face aux tiers ............................................................................. 98
§ 3 - LES REGLES CONERNANT LES ASSOCIÉS ....................................................... 98
A – LA CESSION DES PARTS ................................................................................................ 98
B - LA RESPONSABILITÉ DES ASSOCIÉS ......................................................................... 99
SECTION 2 - LA SOCIÉTÉ EN COMMANDITE SIMPLE ..................................................... 99
§ 1 - LES CARACTERES GENERAUX .......................................................................... 99
A- LES ASSOCIÉS ................................................................................................................... 99
B - LES APPORTS ET LE CAPITAL .................................................................................... 100
§ 2 - LA GESTION DE LA SCS .................................................................................... 100

CHAPITRE 3 – LA S A R L.................................................................................................. 101

SECTION 1 – CARACTERES GENERAUX ......................................................................... 101


§ 1 – CAPITAL ET RESPONSABILITE ....................................................................... 101
§ 2 – CAPACITE ET OBJET SOCIAL ........................................................................ 102
A – LA CAPACITÉ DES ASSOCIÉS..................................................................................... 102
B – L'OBJET SOCIAL ............................................................................................................ 102
SECTION 2 – LA GESTION DE LA S.A.R.L. ........................................................................ 102
§ 1 – LE GERANT ........................................................................................................ 103
A – LES CONDITIONS DE LA GÉRANCE .......................................................................... 103
B – LA CESSATION DES FONCTIONS DE GÉRANT ........................................................ 103

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§ 2 – POUVOIRS DES GERANTS ............................................................................... 103


SECTION 3 – LA SITUATION DES ASSOCIÉS ................................................................... 103
§ 2 – LES POUVOIRS DES ASSOCIÉS ....................................................................... 104
A – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE ANNUELLE ............................................. 104
B – L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE EXTRAORDINAIRE ...................................................... 104
§ 3 – LA RESPONSABILITE DES ASSOCIÉS ............................................................. 104

CHAPITRE 4 – LA SOCIETE ANONYME ......................................................................... 105

SECTION 1 – LES CARCTERES GENERAUX .................................................................... 105


SECTION 2 – LA GESTION DE LA SA................................................................................. 106
§ 1 - LA SA AVEC CONSEIL D’ADMINISTRATION .................................................. 107
A- LE CONSEIL D’ADMINISTRATION .............................................................................. 107
a – Composition ................................................................................................................. 107
b – Les pouvoirs du conseil d’administration .................................................................... 108
B – LA DIRECTION GENERALE DE LA SOCIETE : le pdg ou le dg ................................. 108
a – Le directeur général et ses directeurs généraux délégués ............................................. 108
1. Statut........................................................................................................................ 108
2 - Pouvoirs ................................................................................................................. 109
b – Le président du conseil d'administration ...................................................................... 109
1. Statut........................................................................................................................ 109
2. Pouvoirs ............................................................................................................... 110
§ 2 – LA S.A AVEC DIRECTOIRE ET CONSEIL DE SURVEILLANCE ..................... 111
A – LE DIRECTOIRE ............................................................................................................. 111
a – Conditions .................................................................................................................... 111
b – Cessation des fonctions................................................................................................ 111
c – Pouvoirs du directoire .................................................................................................. 112
B – LE CONSEIL DE SURVEILLANCE ............................................................................... 112
a – Conditions .................................................................................................................... 112
b – Pouvoirs ....................................................................................................................... 112
SECTION 3 - LA SITUATION DES ASSOCIÉS ................................................................... 112
§ 1 – LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES ...................................................................... 112
A - L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE .................................................................... 113
a – Convocation ................................................................................................................. 113
b – Déroulement ................................................................................................................ 113
c – Attributions .................................................................................................................. 113
B – LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES EXTRAORDINAIRES ........................................... 113
a – Principales attributions................................................................................................. 113
b - Quorum et majorité ...................................................................................................... 114
§ 2 - LES TITRES EMIS PAR LES SA .......................................................................... 114
A - LES ACTIONS ..................................................................... Error! Bookmark not defined.
B - LES OBLIGATIONS............................................................ Error! Bookmark not defined.
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................ 155

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