Sie sind auf Seite 1von 342

LA ROUTE

r
P H I I I P IM C. U I I. I M A N I

DU TEMPS Edition

ïe temps
m i l ni

Collection : Mutation
Philippe Guillemant

LA ROUTE DU TEMPS
Théorie de la double causalité
Aux véritables puissances intelligentes
qui savent que l ’A mour est la Clé

À mes enfants Antoine et Lambert.


LA ROUTE DU TEMPS
Théorie de la double causalité
Les chiffres entre crochets [ ]
Renvoient à la bibliographie située page...
Le signe * renvoie au glossaire, page...

© Éditions Le Temps Présent 2014


ISBN : 2-35185-163-0
SARL J MG éditions
8, rue de la mare
80290 Agnières
tel. 03 22 90 11 03
fax. 03 22 90 17 28
email :contact@jmgeditions.fr
www. parasciences. net
Avant-propos
à la nouvelle édition 2014

Lorsqu’en 2009 j ’ai mis la dernière touche à la première édition de ce


livre, j ’étais loin de me douter que dans les quatre années qui allaient
suivre jusqu’à aujourd’hui, les idées audacieuses que j ’y avançais
allaient être de façon tout à fait indépendante reprises par la commu­
nauté scientifique internationale dans plusieurs publications, livres et
conférences de physiciens « mainstream » à la crédibilité incontestée.
Les idées en question étaient manifestement dans l’air et « La Route
du Temps » était donc parue au bon moment, celui où sans être margi­
nalisé l’on pouvait enfin prendre au sérieux des concepts comme: « Le
futur est déjà là », « Le futur influence le présent » ou encore « Le pré­
sent influence le passé ». Il ne s’agit pas encore de vérités scientifiques
établies, mais ces concepts sont devenus recevables parce que la vision
usuelle que nous avons du temps est aujourd’hui clairement contredite
par la science: la réalité ne se crée pas dans le présent, car il n ’existe
nulle part un « front du présent » avant lequel tout serait créé et après
lequel rien du tout. Ce « front du présent » est aujourd’hui clairement
considéré comme une illusion purement liée à notre conscience, et il
s’ensuit la nécessité de réviser totalement cette vision simpliste du
temps. C ’est ce que j ’ai fait et que je réaffirme dans cette nouvelle édi­
tion en allant encore plus loin, dans une nouvelle et cinquième partie
indépendante où je décris un « territoire de la pensée » beaucoup plus
vaste et escarpé qu’on le croit, qui s’harmonise très bien avec cette
« Route du Temps » déjà très montagneuse.
L’accueil enthousiaste qu’a reçu la première édition m’a conduit à
accepter de donner depuis 2010 une douzaine de conférences, cer­
taines à contenu scientifique comme à l’Institut Métapsychique Inter­
national (2011) ou à l’Institut de France (2012), d’autres à contenu
plus accessible au grand public et notamment dans le cadre de festivals
comme « Chimeria » (2012) ou « Spiritualité en Pyrénées » (2013). La
nouvelle partie de ce livre présente une synthèse de ces conférences
comme si je n’en avais fait qu’une, en conservant le langage parlé
autant que possible, plus facile à retranscrire et plus vivant, et en repor­
tant dans les questions ce que je n’ai pas inclus dans la synthèse afin de
ne pas en alourdir le contenu. Elle se termine par des propositions iné­
dites et révolutionnaires sur l ’évolution de l’espace-temps et des
espèces vivantes, qui auraient de quoi faire sortir Darwin de sa tombe,
mais il fallait que j ’enfonce le clou jusqu’au bout. Les autres parties du
livre sont inchangées, à l’exception du chapitre IX (être ou ne pas être)
que j ’ai refondu pour le rendre plus clair, et de retouches apportées aux
chapitres de la première et de la seconde partie dans le but de les allé­
ger, car la lecture en était assez ardue.
Les deux premières parties ont pour but de déconstruire des notions
délicates comme l’irréversibilité du temps, un constat caduc à mon
sens, pour amener le lecteur à transformer radicalement sa vision du
temps au travers d’un raisonnement le plus implacable possible, afin
qu’il puisse trouver rationnelles des idées comme celle de « traces du
futur » et surtout l’idée selon laquelle nos pensées, en particulier nos
intentions, ont nécessairement une influence sur la création de la réa­
lité, bien avant nos actes. J’ai surtout voulu montrer qu’il n’est pas
nécessaire de faire appel à la mécanique quantique, encore trop obs­
cure pour le commun des mortels, pour comprendre que nous créons
bel et bien notre réalité par nos pensées, mais que cette construction
concerne notre futur et non pas notre présent, contrairement à ce
qu’une interprétation naïve du rôle de l’observateur en mécanique
quantique, exploitée par la pensée « New âge », tendrait à nous faire
croire.
La troisième partie de ce livre est consacrée à la description et à l’ana­
lyse critique de mes expériences personnelles en matière de coïnci­
dences étranges et surtout de synchronicités, ces dernières résultant
d’une véritable expérimentation que j ’ai décidé de mener sur moi-
même après avoir découvert pourquoi et comment il était possible de
les provoquer. J’en ai tiré une sorte de guide à la fois pratique et spiri­
tuel, affiné dans la cinquième partie sous l’intitulé « télécommande de
l’espace-temps » et destiné au lecteur qui voudra tenter de reproduire
mon expérience, ce qu’ont déjà fait avec succès plusieurs lecteurs de la
première édition. La quatrième partie tire enfin les conséquences de la
théorie de la double causalité sur notre vision de l’espace-temps. Il
s’ensuit une véritable révélation sur notre rôle créateur au sein de
l’univers, un rôle qui implique que notre nature première est d’essence
spirituelle et que cette essence, l’amour au sens épuré du terme, n’est
pas un produit de la chimie du cerveau mais quelque chose d’encore
plus fondamental que la gravitation ou la lumière, externe à notre
espace-temps et directement lié à notre libre arbitre.
Paradoxalement, à cause du chamboulement de sa vision du temps, la
physique est aujourd’hui confrontée à l’inévitable ésotérisme d’une
vision matérialiste du monde qui prétend que le libre arbitre de
l’homme est illusoire et qu’en conséquence, notre conscience ne pour­
rait en aucune manière influencer directement le cours des événements
à venir. Il s’agit là d’une croyance purement déterministe qui conduit
les physiciens qui s’y accrochent à affirmer des choses encore plus
impensables telles que : il existerait des myriades d’univers parallèles
où nous pourrions avoir une quantité astronomique de doubles de
nous-mêmes tout à fait conscients, ou alors: notre univers est un
espace-temps à jamais figé qui s’est créé d ’un seul coup, du big-bang
jusqu’à la fin des temps, que nous ne faisons que visiter sans pouvoir
rien y changer. Aujourd’hui les matérialistes cohérents sont ainsi coin­
cés entre d’un coté l’extravagance de leur vision du multivers et de
l’autre coté le créationnisme de leur vision de l’espace-temps. Il est
donc grand temps de laisser tomber le déterminisme scientifique, sorte
de machisme scientifique devenu irrationnel mais qui nous a tout de
même enfermés peu à peu dans un « parc de la pensée » abêtissant, qui
pourrait nous transformer en machines, si ce n’est en bétail.
La crise actuelle de notre société est ainsi, sans nul doute à mon sens,
directement liée à la fin maladive d ’un matérialisme qui exhibe ses
derniers râles, comme celui de notre illustre Stephen Hawking [1]
lorsqu’il prétend que la philosophie serait morte, que nous serions des
machines et que nous n’aurions pas besoin de Dieu. La bonne nouvelle
est que ces idées ne passent plus et que l’on peut compter, j ’en suis
certain, sur la communauté scientifique - en tout cas la francophone -
pour renverser cette vision dépassée et accoucher d’un nouveau para­
digme qui va profondément transformer l’homme et lui faire découvrir
sa nature spirituelle. Bien entendu, cela ne va pas se faire en un jour
mais une autre bonne nouvelle, c’est que nous n’aurons peut-être pas
besoin d’attendre de nouvelles découvertes en physique pour accélérer
ce mouvement libérateur. D’ores et déjà, la nouvelle physique de l’in­
formation qui vient de naître nous amène au seuil de maturité de nou­
velles technologies de l ’inform ation - pour ne pas dire de la
conscience - qui vont obliger l’homme à se rendre compte dans sa pro­
pre expérience du pouvoir créateur de son mental.
L’une des amorces qui ont déjà commencé à prendre feu, ainsi qu’en
témoigne Jacques Vallée qui fonde avec conviction cette nouvelle phy­
sique sur la double causalité [51], va sans doute contribuer à l’explo­
sion de ces nouvelles technologies dans les années qui viennent. Cette
amorce a son origine dans ce livre : elle est issue de la capacité intrin­
sèque que nous avons à provoquer des coïncidences étranges, des
hasards extraordinaires qui introduisent de la magie dans notre vie et
qui pourraient aller jusqu’à réenchanter le monde lorsque nous aurons
enfin intégré leur nature. Ainsi ce livre est avant tout un chemin de ran­
donnée pour guider les vrais rationalistes en dehors du parc de la pen­
sée, afin de les amener à contempler le vrai territoire de la raison, puis
découvrir enfin la spiritualité en faisant l’expérience de la synchroni-
cité.
Introduction
Où l ’on suggère qu’un dialogue instinctif avec la nature
peut nous aider dans l ’exercice de notre libre arbitre.

La Route du Temps est une petite route de montagne, sinueuse et inter­


minable, qui traverse la réserve géologique de Haute-Provence depuis
la cité médiévale de Sisteron jusqu’à la vallée de l’Asse, en passant à
proximité de la ville de Digne. En dehors de son intérêt géologique et
surtout de l’époustouflante beauté des paysages qu’elle traverse, cette
route possède un intérêt très particulier, en ce qu’il est conjecturé par
les historiens qu’elle est censée mener à la cité de Theopolis, dite
encore « Cité de Dieu », cette fameuse cité de Saint Augustin que nul
n’a pourtant jamais encore découvert, malgré de nombreuses fouilles
en ces lieux : cette conjecture tient en vertu des informations contenues
dans une gravure romaine du Ve siècle, taillée dans une roche du défilé
de « Pierre Écrite », qui constitue en quelque sorte le « sas d’entrée »
de la réserve géologique.
Ce mystère de la Route du Temps n’est que l’un des attraits parmi tant
d’autres qui habitent ses paysages enchanteurs: ses étonnants fossiles,
ses roches suggestives, ses pierres « magiques », ses yourtes cachées
dans les hauteurs, sa faune surprenante et ses énigmatiques habitants à
la personnalité accentuée par la lumière exceptionnelle des lieux,
constituent autant de particularités qui donnent un sens énigmatique à
son parcours. Et ceci d ’autant plus que les rares rencontres que l’on
peut y faire semblent revêtir une signification, comme dans un jeu de
rôle où chacune aurait à nous suggérer des indices pour la suite de
notre périple.
Son relief de moyenne montagne, entre cinq cent et deux mille mètres
d’altitude, exceptionnel par la grande richesse d’itinéraires de traversée
de la réserve qu’il procure, nous confronte à de multiples choix de sen­
tiers. En randonnant dans ces lieux j ’ai constaté le pouvoir de ressour-
cement intérieur apporté par de telles marches au cours desquelles on
ne sait jamais exactement où l’on va ni ce que l’on va trouver. Généra­
lement, en suivant l’itinéraire de plus grande pente, et après plusieurs
heures de montée, permettant enfin à l’esprit de se déconnecter de
toutes ses tensions physiques, je devenais enfin réceptif à la nature
environnante. Elle prenait alors le relais de mon corps pour apporter
des réponses à mes questions intérieures, comme une sorte d’écho du
mental. Cette sensibilité nouvelle me récompensait à elle seule de l’ef­
fort effectué pour parvenir en ces lieux, et à chaque fois de façon inat­
tendue. Car on oublie souvent les vertus de la randonnée, qui dépas­
sent largement l’acte sportif en recentrant l’esprit dans une situation
saine et libérée. Intérieurement comme extérieurement, l’altitude nous
élève et notre vision s’élargit: le sens de notre vie s’éclaircit, ou réap­
paraît même, comme si notre intuition ainsi nourrie reprenait les rênes
du mental. Un apprentissage des moyens de contourner ses difficultés,
intérieures comme extérieures, nous est ainsi offert par la nature à tra­
vers la révélation d’un éventail de possibles insoupçonné, présenté à
l’« être vivant » que nous sommes, comme un défi à rechercher en lui-
même puis à éprouver sur le terrain de l’entraînement intuitif, l’attitude
juste qu’il recherche dans son cheminement réel de vie.
Bien plus qu’altitude et visibilité, la solitude et la difficulté qui mar­
quent la randonnée procurent un effet de recentrage sur soi-même,
anoblissant la vie intérieure à la manière d ’un itinéraire initiatique.
Parmi ces difficultés, la dénivellation récompense le mieux l’effort
qu’elle sollicite. Les autres obstacles symbolisent des problèmes éter­
nels, des plus quotidiens jusqu’aux plus longs à franchir: roches, épi­
neux, forêts denses, cascades, barres rocheuses, sentiers ambigus
offrent cependant dans cette nature, pourvu qu’on les recherche, des
possibilités de contournements inespérées. Ils agissent ainsi comme
autant d ’invitations à trouver de nouvelles conditions d’adaptation
dans notre vie. Une leçon inattendue de cette moyenne montagne,
probablement due à sa richesse et à sa diversité : la nature nous y
apprend que tout problème contient sa solution, dès lors qu’on est prêt
à admettre son existence et à écouter sa signification, pour ensuite
contempler sereinement les autres possibilités de trajet qui s’offrent à
nous.
Seraient-ce donc les vertus de cette montagne, qui par le spectre de ses
nuances ont toujours à nous offrir la douceur de multiples compromis ?
Ou la majesté des lieux avec son profond silence, qui donne la sensa­
tion qu’un troisième œil suit notre cheminement et s’apprête à tout
moment à nous suggérer une orientation ? Dans les situations les pires
comme dans les meilleures, une rencontre inattendue s’invite parfois à
la réflexion, semblant agir comme un signal qu’une étape se termine et
que nous devons en franchir une autre. Dans l’intervalle de cette ren­
contre, notre programme peut changer subitement, ou prévoir une évo­
lution ultérieure, ou simplement intégrer une donnée utile à la pro­
chaine bifurcation. Car comme une sorte de confirmation que la ren­
contre était planifiée d’avance par l’univers, à cette prochaine bifurca­
tion le choix se révélera évident, comme si un aiguillage avait été
actionné. Parfois, c’est simplement la météo qui nous oriente ou nous
contraint par encouragement ou dissuasion, simulant nos conditions de
décision selon notre humeur. Ou bien ce sont des « signes » directe­
ment fournis par la nature, effets optiques d’ombre et de lumière ou
effets dynamiques, bruissements dus au vent ou à des passages d’ani­
maux, qui s’offrent à nous comme autant d’avertissements, et influen­
cent invariablement notre périple, sans que nous osions sérieusement
nous l’avouer à nous-mêmes.
Ainsi c ’est souvent le hasard des rencontres qui nous oriente sur la
Route du Temps, rencontres de pierres qui parlent [17], de phéno­
mènes naturels ou d’êtres vivants. Ce même hasard qui change notre
vie réelle lorsque nous rencontrons notre future compagne, notre futur
employeur ou un futur ami. Mais comment se fait-il qu’il nous faille
ainsi attendre de cheminer en pleine nature pour mieux cerner le sens
caché des rencontres les plus significatives de notre vie, celles qui don­
nent un autre sens au hasard? Serait-ce parce qu’il est plus facile de
saisir les choses lorsque l’on y est impliqué d’une façon plus détachée,
plus légère ?
Ayant ainsi vécu toutes ces rencontres et aventures sur la Route du
Temps comme autant de symboles ou de signes m’ayant permis de
mieux comprendre ma vie entière tout en ressentant que j ’avais franchi
un stade d’évolution personnelle, j ’ai peu à peu réalisé un potentiel
insoupçonné de mon libre arbitre. S’agit-il de la transposition d ’une
vie quotidienne où des choix majeurs semblaient se présenter à moi
presque chaque jour? Toujours est-il que j ’ai développé une capacité
d’observation d’éléments de l’environnement n’ayant pourtant rien à
voir avec mes problèmes, mais me permettant d ’atteindre un état
d’éveil favorable à leur disparition. Et parfois tout simplement, à la
seule disparition de leur aspect critique. Mais plus encore, lorsque ces
éléments me semblaient agir comme des assemblées de constituants
qui parlaient d’une même voix par le langage des coïncidences, il s’en
est suivi pour moi une récolte de suggestions utiles à la création de
mon propre parcours de vie.
Comme lorsque les merveilles, autant que les obstacles de la nature,
m’invitaient à les écouter en randonnant, pour se faire le miroir de mes
questions intérieures ou l’extension même de mon être, je découvrais
qu’en écoutant les événements de ma vie réelle, au lieu de les subir
comme des contraintes, de nouvelles voies insoupçonnées s’ouvraient
devant moi. Alternative pratique à des choix rationnels mais douteux,
ou exacerbation d’une intuition personnelle? Je ne saurais dire, mais
toujours est-il que les expériences que j ’en ai tirées ensuite sont allées
bien au-delà de tout ce que je pouvais espérer en terme de bénéfice, et
je comprenais alors que j ’avais à partager cette chance.
Cette chance s’est tout d’abord exprimée par une accumulation de
coïncidences extraordinaires, vécues sur la Route du Temps, comme
une sorte de confirmation que j ’avais emprunté le bon chemin. Elles
m ’ont conduit à prolonger une réflexion profonde sur le sens du temps,
que j ’avais déjà entamée depuis des décennies, aboutissant à une sen­
sation intuitive de communion avec les éléments de l’univers, comme
si mon cerveau s’étendait bien au-delà des limites de ma personne. J’ai
compris ensuite comment cette sensation, source de bonheur et de
confiance dans la vie, pouvait provenir de bien autre chose que d’une
illusion. J’ai ainsi été amené, peu à peu, à démonter les mécanismes de
choses aussi mystérieuses que le phénomène de synchronicité* (les
étoiles* renvoient au glossaire). J’expliciterai ces mécanismes dans ce
livre par une double approche de scientifique et de philosophe sous-
tendue par une logique se voulant implacable. Le lecteur pourrait être
étonné de constater que science, poésie et spiritualité peuvent faire très
bon ménage.
Je ne saurais faire l’économie de ce modèle si porteur et si naturel de la
Route du Temps afin d’expliquer les choses fondamentales de la vie
qu’elle m’a permis de comprendre, aboutissant notamment à réconci­
lier science et foi. La réserve géologique va nous fournir un terrain
d’expression métaphorique et symbolique de notre environnement
psychique, pour expliquer mais aussi exercer notre potentiel intérieur,
en vertu d’un ensemble de correspondances analogiques fortes avec
des propriétés du mental: non seulement l’altitude, la fréquentation ou
la difficulté de la randonnée, mais aussi la présence d’eau, l’orienta­
tion, la température et les conditions météo, comme nous le verrons
plus loin.
Nous allons dévoiler dans ce livre les mécanismes d’exercice inédits
d’une liberté que nous avons de « programmer » notre avenir, liberté
qui exploite des capacités méconnues de notre cerveau, qu’il est infini­
ment plus judicieux de comprendre par ce type de métaphores* que
par une approche psycho-scientifique pré-établie.
Nous montrerons que nous avons au fond de nous-mêmes un potentiel
inexploité, et notamment une faculté d’activation immédiate de l’ave­
nir qui correspond le mieux à nos intentions, parmi les multiples par­
cours possibles de notre vie. Mais emprisonnés dans nos conditionne­
ments* quotidiens, nous ne savons généralement pas exploiter ce
potentiel, parce que nos décisions sont encombrées par des concep­
tions erronées en tout genre - sur notre mental, sur l’idée que nous
avons de nous-mêmes - et parasitées par des déterminismes variés,
notamment des habitudes.
Ainsi les innombrables choix d’itinéraires que l’on peut suivre dans la
réserve géologique nous serviront de métaphores pour modéliser, com­
prendre et même expérimenter les mécanismes que nous allons dévoi­
ler. Dans un premier temps, pour simplifier, je résumerai ces possibili­
tés à travers le modèle de l’« Arbre de Vie »*. Nous verrons que la
plupart du temps, dans nos vies, nous n’expérimentons pas la richesse
de nos choix potentiels, et qu’il est même rare que nous empruntions
des sentiers, car nous sommes assaillis d ’idées reçues, de pensées
uniques et de conditionnements en tout genre : nous suivons générale­
ment la route goudronnée, ce « tronc principal » de notre vie.
Dans cet essai sur le temps, je serai amené à introduire de façon tout à
fait rationnelle, au prix d’une première partie escarpée par le renverse­
ment du temps et la logique non causale, le mécanisme incroyable­
ment méconnu d ’une véritable « magie de la vie », en proposant une
nouvelle Théorie du Temps, dite « Théorie de la Double Causalité* ».
Cette théorie sera ensuite mise en pratique et confrontée à l’expé­
rience, la Route du Temps étant choisie non seulement comme terrain
de simulation métaphorique mais aussi d’expérimentations réelles.
Je ne ferai nullement appel à des références ésotériques, mais à la
logique pure et aux plus récents progrès de la science, en particulier de
la physique moderne.
Car la Théorie de la Double Causalité est avant tout d’un intérêt scien­
tifique, par sa mise en lumière des résultats les plus curieux de la
Théorie de la Relativité*, de la Physique Statistique*, de la Théorie du
Chaos* et de la Mécanique Quantique*.
Chacune de ces singulières branches de la physique nous apportera son
propre éclairage sur le temps, fondé sur les principes de l’irréversibi­
lité*, de la causalité* ou du déterminisme*, dont les portées philoso­
phiques sont essentielles pour permettre à l’homme de trouver sa place
dans l’univers. Et de ce point de vue, il faut reconnaître que ces prin­
cipes ont toujours joué un rôle réducteur, allant jusqu’à nier l’existence
de notre libre arbitre*.
Or, l’authenticité de notre libre arbitre est l’hypothèse la plus fonda­
mentale de la Théorie de la Double Causalité, à laquelle nous ajoutons
une seconde hypothèse non moins fondamentale, selon laquelle l’uni­
vers est déjà réalisé.
Ce qui soulève immédiatement cette question : comment rester libre de
nos actes dans un univers où notre futur serait déjà réalisé?
La réponse sur laquelle repose la Théorie de la Double Causalité est
celle de « l’Arbre de Vie »*: notre futur serait déjà réalisé selon de
multiples versions ou branches, coexistant simultanément de façon
omniprésente, mais à l’état de « potentiels* » non encore vécus.
Forts de ces deux hypothèses fondamentales qui se résument dans
cette conséquence incontournable, nous allons montrer dans ce livre
que le temps a des vertus que l’on peut sans mentir qualifier de
« magiques ».
Cette référence à la « magie* » que j ’emploie pour parler de « méca­
nismes » du temps a de quoi surprendre, mais compte tenu de ses pro­
priétés extraordinaires, elle est on ne peut mieux choisie pour qualifier
le potentiel merveilleux de notre aventure de vie, telle que l’univers
nous invite à la vivre, si nous voulons bien élever notre sensibilité et
notre mental au niveau de ses lois subtiles, et consentir à devenir alors
les magiciens de notre propre vie.
Chaîne des Dieux

•fW //n e d e î ' ~ - J P ^ &


paradoxes

Le territoire de la pensée
Pic de l'Esprit

/
w w v

- '^Si1 1
Ravindelà création VJ im ' 1!'
lit \i r n Vf ru i
fl,| Cascade de-t
1 ■ 'LJ. . < '
in te n tio n I
705^ >...„
T v v.
. l u lu y

Décharge ■ qT, J v I f'


du hasard f-.
j f ^ 'r r v '\
T.V J!

Gouffre de
l'illusion

(Dessin de Bruno Forand)


Première partie

Le renversement du temps
I.

L’Arbre de Vie
Où l ’on montre que notre parcours de vie peut se schématiser
sous la forme d ’un Arbre de Vie personnel, dont l ’ensemble
des branches représente notre potentiel de choix par libre arbitre.

Arrivé au sommet de la montagne de Mélan, je m ’assis sur un rocher


d’où je pouvais contempler une vue extraordinaire d’une bonne moitié
du paysage de la Route du Temps, ce territoire métaphorique de l’es­
pace multidimensionnel* dans lequel s’inscrivait, parmi d’autres, mon
Arbre de Vie. Toutes ces montagnes et vallées baignées de lumière qui
se dévoilaient enfin à mes yeux, depuis le défilé de Pierre-Ecrite
jusqu’à la vallée de Thoar, me paraissaient assez vastes pour symboli­
ser non seulement le potentiel de ma propre vie mais aussi celui d’une
infinité d’arbres.
J ’attendais mon ami Christian, qui montait à son rythme. Dans la
conversation que je venais d’avoir avec lui sur l’Arbre de Vie, il ne
pouvait s’empêcher de le considérer comme un arbre de « réincarna­
tions ». Non pas qu’il adhère à cette idée, mais parce que le concept de
« vies potentielles » que je tentais de lui expliquer ne lui convenait pas.
Pour lui, toute réalité devait pouvoir être vécue.
Je m ’allongeais sur le rocher pour me laisser absorber par une sieste
méditative. Mon cerveau était en train de me projeter un film.
Sur cette vision claire et majestueuse du paysage, vinrent s’incruster au
loin, à l’est et au sud, les deux branches ou itinéraires de la route prin­
cipale qui transitaient du défilé en provenance de Sisteron, jusqu’à la
vallée qui s’étalait en direction de Digne. Derrière oi, au nord, je vis se
former les nombreux méandres que la nature imposait à la route.
J’imaginai deux types de scénarios pour les « touristes » du temps qui
arrivaient jusque-là depuis le défilé, pour randonner ou pique niquer.
Comme il fallait des heures pour grimper au moindre sommet, la plu­
part s’abstenaient d’une telle marche, et ne s’aventuraient jamais très
loin de leur voiture.
Dans mon premier scénario, déjà lassés des innombrables virages, ils
ne dépassaient pas le col de Fontbelle. Ils profitaient néanmoins de
petites aventures de jeunesse qui enrichissaient leur vie autour des sen­
tiers environnants, avant de retourner s’intégrer définitivement dans la
civilisation.
Dans mon second scénario, ils étaient pressés de filer droit, résolus à
réussir leur vie, faisant l’effort de passer le col et de pousser jusqu’à la
maison forestière afin d’y retirer leur meilleur diplôme d’études supé­
rieures, puis ils redescendaient laborieusement vers Digne, sans se
donner le temps de bifurquer ici ou là pour emprunter le moindre sen­
tier. Ils n’abandonnaient leur véhicule qu’une fois rentrés chez eux,
non sans oublier de récupérer armes et bagages accumulés dans le cof­
fre de leur voiture comme autant de conditionnements, idées reçues et
principes directeurs en tout genre dont ils ne se débarrasseraient
jamais.
Je visualisai ces deux possibilités comme les deux scénarios majeurs
de la Route du Temps, à travers lesquels avec les mêmes chances au
départ, deux types de vie complètement différentes allaient se dessiner.
Mais quelque soit le scénario choisi, je réalisai que pour explorer vrai­
ment ce territoire, il fallait nécessairement accepter l’épreuve de la
nuit.
J’imaginai au mieux une épreuve choisie, par exemple une nuit en
camping, en gîte ou en maison d’hôtes, planifiée d’avance pour en
maximiser le confort, et issue d’un choix dicté par la raison; ou le
choix plus audacieux d’une nuit en bivouac, en yourte ou en camping
sauvage, selon le hasard des lieux et des rencontres, qui augmenterait
peut-être leurs chances de comprendre les mystères de leur vie et de
recevoir les clés d’un bonheur authentique.
Et je voyais enfin, au pire, une épreuve subie, si faute d’avoir anticipé
le caractère aventureux d’une quête prise au sérieux, un incident ou
une panne quelconque leur rendait finalement le service, d’autant plus
douloureux qu’inconscient, d’être contraints à passer une ou plusieurs
nuits sur place afin d’y réaliser ce qu’ils avaient décidé de faire de leur
vie avant leur naissance.
Tout en essayant de comprendre si une intention d’exister, avant même
de vivre, pouvait avoir le moindre sens, je me demandai finalement si
ce dernier scénario n’était pas après tout le meilleur !
J ’imaginais qu’à partir d’un acte de naissance commun au défilé de
Pierre Écrite, l’objectif ultime de toutes ces vies devait certainement se
fonder sur la même intention de monter en ces lieux pour y rechercher
la Cité de Dieu, ou à défaut de l’atteindre, pour vivre dans l’espoir de
la trouver, sachant que cet espoir était fondateur de l’Arbre de Vie de la
Route du Temps.
Et je me disais que ce seul espoir, accompagné des aventures inédites
dont il était initiateur, pouvait même finir par rendre l’objectif ultime
de cette quête presque secondaire.
C ’est ainsi que faute de se rappeler le véritable sens de notre propre
vie, je voyais irrémédiablement s’installer sur son trône, le pape lui-
même et toute sa suite, chargés de nous rappeler que nous sommes des
enfants de Dieu.
Il s’ensuivait qu’après s’être incarnés à Pierre Écrite, la plupart des
visiteurs de la Route du Temps se débarrassaient finalement d ’autant
plus vite de leur quête, qu’on leur indiquait dès leur premier cycle
d’études à Saint-Geniez, où se trouvait le haut lieu de pèlerinage qui
suffirait à faire d’eux de bons hommes.
Dans ce village incontournable où un tas d’informations contradic­
toires avaient pour habitude de circuler sur tout et n’importe quoi, et
notamment sur l’endroit supposé de la Cité de Dieu, il était difficile de
ne pas se laisser conter les dires et les écrits les plus influents qui la
situaient près de la chapelle de Dromon.
Il suffira qu’un ouvrage apparemment sérieux publié sur cette question
en indique le site, pour que de fervents croyants y effectuent leur pèle­
rinage, tels les convertis d ’une religion qui prétend connaître Dieu,
rêvant d’assister peut-être à une apparition de Theopolis à l’emplace­
ment indiqué.
Car la Route du Temps recèle un véritable mystère, au-delà de cette
petite chapelle de taille tout juste suffisante pour héberger une simple
crèche, et qui ne s’étend que devant la nature la plus sauvage: aucune
cité à l’horizon !
La cité ce serait-elle un jour évanouie du site comme par enchante­
ment, telle une sorte de petite Atlantide qui aurait été détruite puis
recouverte par l’étrange lande qu’on observe au Dromon ?
Entraînée par ce mythe, la vie la plus fréquemment vécue et la plus
simple, d ’un touriste du temps apparaissant en ce défilé de Pierre
Écrite, consistait à suivre la route principale qui relie Sisteron à Digne
pour s’arrêter juste en face de Dromon. Là, il se réjouissait d’un seul
coup d’œil ou d’un clic d’appareil photo, d’avoir accompli son princi­
pal objectif avant de redescendre par le chemin le plus direct pour
occuper le reste de sa vie à l’altitude la plus basse.
Car face à cette lande au relief extraordinaire, l’imagination peut com­
bler aisément toute foi et apporter une sensation de plénitude absolue.
S’arrêter là a l’avantage de soulager d’expériences aventureuses qui
consisteraient, en explorant d’autres chemins, à rechercher seul la voie
qui mène à sa propre idée de (la cité de) Dieu. Une telle peur de vivre,
ou une telle ignorance du sens de la vie, si elle se généralisait, pourrait
avoir pour conséquence la revisite systématique d’une même vie tou­
jours selon le même scénario, avec des variantes insignifiantes, telles
que des balades à droite et à gauche pour prendre l’air et ramasser
quelques champignons.
À un tel régime, l’Arbre de Vie de la Route du Temps pourrait être
rapidement réduit à un ersatz de squelette dont il ne resterait plus que
quelques morceaux de colonne vertébrale. Et il ne serait pas très
recommandé à un nouveau visiteur ayant un potentiel un peu plus évo­
lué, sous peine de passer sa vie à défricher pour ses successeurs, de
s’incarner dans cet Arbre de Vie.
Mais la recherche du droit chemin, la peur de vivre ou le divertisse­
ment touristique sont loin d’être les seules façons de rendre nos arbres
de vies squelettiques. La recherche de la sécurité, la paresse et le
conditionnement social ont tout autant tendance à rendre nos vies
dénudées, sans pour autant les débarrasser d’écueils.
Ainsi certains pourront finir accidentellement dans un ravin à quelques
centaines de mètres en contrebas de la chaussée, comme un cadre subi­
tement licencié qui finit chômeur en fin de droits et ne croit plus en
rien, même pas dans la « chance » de se retrouver ainsi démuni. D ’au­
tres accidentés de la vie dont la foi aura été au contraire poussée à l’ex­
trême, pourront se retrouver dans l’un des nombreux couvents envi­
ronnants, les vastes espaces vierges de cette région montagneuse étant
très propices à une retraite spirituelle. D ’autres, plus instruits sans pour
autant croire en l’existence de Theopolis, fileront droit en sécurité
maximale, avec une peur grandissante à chaque virage, sans vraiment
croire à l’existence de Theopolis, et finiront rassurés à Digne dans une
maison - de retraite - de notre civilisation.
Quelques-uns parmi les filant droit les plus ambitieux, réussiront à ne
pas se laisser happer par la civilisation pour aller se retirer encore plus
au sud, au pied du massif des gorges du Verdon, croyant avoir fait le
maximum pour se rapprocher de Theopolis, en atteignant l’une des
extrémités de la route principale. Car on ne sait pas exactement où finit
cette route. On sait seulement qu’elle continue quelque part en direc­
tion du sud des Alpes de Haute-Provence, et que plusieurs villages
revendiquent son extrémité.
Pourtant, pour réussir notre vie rien ne nous oblige à parcourir cette
route jusqu’à son extrémité sud, sinon la société. C’est elle qui nous
incline vers un tel schéma simpliste. Bien d’autres chemins parcourent
de plus grandes distances encore sur un itinéraire beaucoup plus com­
plexe, mais nos conventions sociales les ignorent pour privilégier une
seule voie royale, celle qui nous permet d’avancer vite et loin.
Finalement, quel que soit le scénario nous faisant fuir et oublier la
dimension* verticale pour rejoindre les plaines, notre vie se caractéri­
sera par l’absence de liberté authentique et de toute sensation de
« chance ». Nous deviendrons avides de divertissement pour compen­
ser l’ennui qui en résulte, et nous continuerons de rechercher ce diver­
tissement ailleurs que dans la quête de Theopolis. On voit donc que
toutes ces façons de vivre qui nous évitent de faire face à l’inconnu
hors des sentiers battus, ne font que justifier le mythe d’une Theopolis
inatteignable, et la remplacer par une création de notre imagination.

Tout à coup, le mouvement d’un mouflon dans mon champ de vision


voilé par mes pensées m ’extirpa du monde imaginaire pour me faire
revenir dans la réalité. Par chance, j ’étais immobile, caché par
quelques feuillus et le vent était en ma faveur. Le mouflon ne pouvait
pas me voir. Je sortis doucement mon appareil photo de mon sac à dos
et commençai à viser le mouflon. D ’un seul coup, alors qu’il broutait
tranquillement, il se mit à se dresser sur ses pattes comme s’il avait
senti qu’un danger le menaçait.
Au moment exact où j ’allais prendre la photo, il bondit en arrière et
sortit de mon viseur. Raté ! J’avais l’impression très nette que le mou­
flon avait pris mon appareil pour un fusil et détecté mon intention.
Après qu’il ait totalement disparu, je vis arriver Christian, essoufflé par
la montée. Avec toute la mauvaise foi de quelqu’un qui se mentait
consciemment à lui-même, je lui dis :
- Tu m’as fait rater un mouflon. U t’a senti et il s’est enfui !
- Ah flûte, mais tu sais quoi, regarde là-bas. Tout à l’heure j ’ai vu un
troupeau de chamois.
Il m’indiquait le sommet de Cluchette mais le troupeau avait disparu.
En même temps qu’il s’approchait de mon rocher, faisant mine de le
contourner, il était fasciné par les contours de la mer de nuages qui
s’était formée en bas, le long de la rivière du Vançon.
- Oh qu’est ce que c’est beau ! Dis-moi Philippe, ton histoire d’Arbre
de Vie... Tu vois bien, ici on arrive à un cul-de-sac ! On ne peut plus
avancer ! Notre vie est finie !
J’étais encore en train de scruter Cluchette, malgré le soleil qui faisait à
ma droite miroiter les rochers de sa falaise en surplomb, aveuglante
par endroits. Christian s’approchait toujours, ne semblant pas voir que
deux mètres plus loin se présentait à lui un décroché, avec un autre
vide. Il aurait été dangereux qu’il avance d’un seul mètre de plus pour
contourner mon rocher.
- Stop ! N ’avance pas plus loin, ce serait du suicide !
Il amorça un mouvement de recul, puis s’assit sur un autre rocher, plus
en sécurité.
- Oh là. Où tu t’es installé, c’est très dangereux ! C ’est bien ce que je te
dis : il n’y a plus qu’à se suicider !
J ’allais devoir défendre mon modèle du temps: « Bien sûr que non,
puisqu’on va redescendre ».
- Par le même chemin ? Ca reviendrait à remonter le temps !
J’attendais cette réponse, content que notre conversation ait capté l’at­
tention de Christian. Pour moi, il représentait un auditoire ayant du
répondant, car il avait un côté très rationnel et pragmatique en même
temps qu’une réelle ouverture spirituelle, tout à fait à l’opposé. Il don­
nait d’ailleurs des conférences sur le bouddhisme.
Je lui répondis : « Pas du tout ! Même en redescendant par le même
chemin, la vie continue dans le sens du temps, mais complètement dif­
férente. Tu ne renouvelles pas tes acquis, c ’est tout. »
Au fur et à mesure de mes explications, le visage de Christian s’éclair­
cissait. À l’âge de la retraite, les principaux sommets de sa vie étaient
derrière lui. Je lui expliquai que d’après cette Théorie du Temps sa vie
serait beaucoup plus facile maintenant, qu’elle se déroulerait sans
efforts, que sa descente ne lui ferait pas vivre les mêmes choses, qu’il
conserverait la force de l’expérience, de la sensation du devoir accom­
pli, et qu’il repasserait par les mêmes niveaux mais avec un autre rôle
à jouer, ne serait-ce que celui d’informer ceux qui le croiseraient en
montant. Et puis, je lui rappelai qu’il y avait bien d’autres manières de
descendre pour préparer sa retraite, l’important étant de ne pas arriver
trop bas pour éviter de se fondre dans l’uniformité.
- Alors toutes tes vies parallèles depuis ta naissance à Pierre-Ecrite, il
faut qu’à chaque fois tu les revives avec des variantes ?
- Mais non, pas du tout, je ne t’ai jamais parlé de réincarnation !
Christian ne comprenait pas très bien mon histoire de vies parallèles
potentielles, et aurait préféré que je lui parle de réincarnations. Je lui
avais expliqué que la théorie de mon livre reposait sur l’hypothèse que
notre espace-temps « physique » à quatre dimensions* s’englobait
dans un univers multidimensionnel bien plus vaste, où nous pourrions
avoir de nombreuses vies parallèles. Cette hypothèse était aussi une
conclusion de la Théorie des Cordes, la plus élégante que la physique
ait jamais produite à ce jour, bien que non soumise à l’expérience. Et
elle était également, indépendamment des cordes, la meilleure inter­
prétation que l’on puisse faire de la mécanique quantique, selon de
nombreux physiciens.
Pour faciliter la représentation d’un tel espace au plus proche de ses
incidences sur notre vie humaine, la métaphore de la Route du Temps
s’était imposée à ma réflexion comme une alternative plus riche que le
schéma de l’Arbre de Vie. Mais j ’avais besoin de cette simplification
schématique consistant à symboliser notre vie par un arbre des possi­
bles, afin de définir tout le potentiel de vie qui nous concerne person­
nellement.
Devant l’air dubitatif de Christian, je fis une concession :
- Bon, mais si tu crois en la réincarnation, tu peux toujours t’imaginer
que d’autres que toi se réincarnent dans ta propre vie! Et là, tu seras
plus proche de la vérité.
En disant cela, je pensais que je n’avais pas du tout envie, dans le cas
où je me réincarnerais vraiment, de passer mon temps à construire
moi-même mon arbre de vie ! D ’après moi, il se construisait tout seul !
Et il n’avait même pas besoin de l’aide des autres, puisque les diffé­
rents potentiels dont il était constitué dans le futur se créaient automati­
quement dans le présent en fonction de mon éventail de choix.
Cependant je ne pouvais ignorer totalement l’hypothèse que mon exis­
tence actuelle pourrait être effectivement « rejouée », car mon libre
arbitre accordait du sens à cette hypothèse, en faisant de chaque exis­
tence « incarnée » une nouvelle occasion de modifier mon arbre de
vie, tel un arbre qui pousse réellement.
Mais cette hypothèse n’était pas nécessaire à ma théorie: je pouvais
très bien n’avoir qu’une seule vie, la mienne, vécue une seule fois, il
n’en restait pas moins que mon Arbre de Vie pouvait encore se déve­
lopper pleinement en reflétant, instant après instant, toutes mes multi­
ples existences potentielles déjà « mémorisées » dans l’« espace » !
On comprend néanmoins pourquoi il m ’était difficile de faire passer
cette notion de vies potentielles sans tomber dans l’hypothèse de la
réincarnation. Non pas qu’elle soit à écarter définitivement, mais cette
théorie n’en avait pas besoin. Bien qu’elle ait de l’intérêt, l’idée de
pouvoir « rejouer » une vie déjà existante gênait la compréhension de
l’existence de potentiels multiples non vécus mais néanmoins bien
réels.
Mais Christian ne voulait pas entendre parler de ces potentiels. Avec
ma réponse faisant preuve d’ouverture, j ’avais capté son attention:
- Là tu m’intéresses ! Là je te suis !
Ma concession avait porté, aussi je lui précisais :
- Essaye d’oublier la réincarnation. Je ne suis pas contre, mais je veux
juste t’expliquer que notre Arbre de Vie existe, même si aucune vie n’y
a encore jamais été vécue, même si personne ne s’y est incarné. »
Mais Christian ne m’écoutait plus. Concentré sur la concession que je
venais de faire en faveur de la réincarnation, il était en train de simuler
ses propres choix de vie à partir du défilé.
En essayant d’anticiper ses réflexions, je me disais que chaque nou­
velle branche de l’arbre, chaque bifurcation* sur la Route du Temps,
pouvait parfaitement symboliser des choix potentiels, et qu’importe le
fait de savoir de quelle vie il s’agissait, de la vôtre ou de la mienne,
jamais vécue ou au contraire déjà vécue de nombreuses fois selon une
infinité de variantes. Elles avaient simplement comme point commun
la même naissance, toujours en ce défilé, car Pierre-Ecrite était le seul
passage obligé de la route, le tronc principal de l’Arbre. Une seule
« référence » vécue à cet endroit suffisait à les faire exister en totalité.
En ce lieu que j ’appelais la Porte du Temps, notre naissance était
accueillie par le relief imposant des lieux, un changement de végéta­
tion et l’annonce que nous entrions dans la réserve géologique de
Haute-Provence. Puis nous continuions notre montée à travers une val­
lée qui nous emmenait jusqu’au premier hameau de la route.
Christian me faisait alors remarquer que par une amusante coïnci­
dence, tout semblait aménagé dans ce hameau pour attirer des enfants
en bas âge : ancienne bergerie aux décors de crèche, parc animalier...
- C’est marrant ton truc. Ca marche ! Et les études à Saint-Geniez ! Ah
Ah ! Ca explique pourquoi l’école fait autant d’histoires !
Mais ce qui l’intéressait, c ’était la première bifurcation qui suivait
après ce village, lui proposant un choix à faire.
- Donc si je continue tout droit et ainsi de suite ma vie devient celle
que j ’ai choisie, celle d’un aviateur. Mais si lorsque j ’y repasse, je vire
à droite vers Sorine, en fait ce n’est plus moi, car si c ’était moi, je
n ’aurais pas changé mon choix ! Car sinon je n ’aurais pas fait
d’études ! C’est ça que tu veux dire ?
- On peut voir les choses comme ça !
Les remarques de Christian commençaient à atteindre une certaine cré­
dibilité. Il se posait ici une question embarrassante. Car une éventuelle
« croissance de notre Arbre de Vie » semblait cautionner de façon
sous-jacente la réincarnation.
Notre Théorie du Temps nous amènerait-elle inévitablement vers une
telle conclusion ?
Les vies multiples susceptibles d’être « vécues » dans un Arbre de Vie
semblaient amener à cette conclusion par les questions suivantes :
toutes les vies de notre arbre ne pourraient-elles pas avoir été déjà
vécues, plutôt que de se présenter comme des vies potentielles? Et
dans le cas où elles auraient été réellement vécues, par qui l’auraient-
elles été, et quand le seraient-elles à nouveau ?
Il est évident que nous ne pouvons pas vivre toutes les vies d’un tel
arbre en même temps et qu’une seule de ces vies correspond à notre
destinée. Cependant, il serait plus délicat de prétendre que nous nous
réincarnons dans cet arbre ou que quelqu’un d’autre s’y réincarnerait.
Tel n’est pas notre propos et dans ce livre, nous essaierons de nous
maintenir sur une version « minimaliste » de cette Théorie du Temps,
en éliminant toute hypothèse inutile, et surtout toute idée ésotérique
qui voudrait s’imposer un peu trop vite comme un raccourci vers un
système de croyances, incompatible avec une véritable élévation spiri­
tuelle.
L’idée de la réincarnation, si elle n’est pas exclue, n’est en tout cas pas
nécessaire à notre Théorie du Temps. Les scientifiques qui s’inscrivent
d’ailleurs contre cette idée peuvent très bien admettre l’hypothèse de
l’Arbre de Vie en la faisant reposer sur la théorie des univers paral­
lèles* [7],
C ’est pourquoi ce dessein minimaliste qui nous fait écarter les notions
d’« incarnation » ne nous oblige même pas à affirmer que notre vie ne
serait vécue qu’une seule fois, sans jamais pouvoir être modifiée. Rien
en physique moderne ne s’oppose à ce que ma vie ou la vôtre puissent
avoir été déjà vécues un nombre considérable de fois, avec ou sans
incarnation ! Mais pour éviter que l’existence de toutes ces vies ne soit
incompréhensible ou confuse, nous considérerons ici que parmi tous
les potentiels déjà existants, une seule de nos vies est actualisée* au
temps présent, celle qui correspond à notre destin. Car tous les instants
du temps coexistent simultanément en tant que constituants de la « réa­
lité » de l’univers que nous concevons comme unique. Or l’existence
immanente d’un seul univers hors du temps entraîne a priori l’exis­
tence d ’un destin déjà tracé pour chacun de nous !
Pour maintenir notre libre arbitre, notre Théorie du Temps sera alors
fondée sur l’hypothèse que nous avons la liberté de modifier à tout ins­
tant ce destin en choisissant notre chemin parmi tous les potentiels
alternatifs qui l’accompagnent. Nous ferions ainsi évoluer notre uni­
vers « actualisé » dans l’éternité, vie après vie vers un autre univers,
pendant que nous changerions nous-même notre vie instant après ins­
tant. L’éternité et le temps seraient deux choses distinctes. Seule l’éter­
nité serait un véritable temps, alors que notre temps présent ne serait
que la « fenêtre » de mise à jour de tous les potentiels alternatifs de
notre arbre de vie.
Le déroulement du temps permettrait alors à notre univers « réel »
d’effectuer sa propre mise à jour parmi tous les univers potentiels dont
il constituerait la référence. Il contiendrait ainsi toutes les existences
déjà réalisées de nos arbres de vie qui pourraient s’offrir à notre libre
arbitre, à nos choix de vie.
Mais exerçons-nous réellement un tel libre arbitre et donc une telle res­
ponsabilité dans l’univers? N’est-il pas après tout infiniment plus sim­
ple et économe en espaces, de penser que cette prétendue liberté de
choix n’est qu’une illusion, et que l’univers n’a que faire de notre pré­
sence ?
Résumé du chapitre I

Notre théorie du Temps repose sur deux hypothèses :


- Notre libre arbitre est authentique,
- Notre futur existe déjà, mais peut être modifié.
L’omniprésence du futur se traduit par l’existence actuelle de poten­
tiels multiples de réalisation, symbolisés par notre Arbre de Vie, et
hébergés par des univers multiples.
Parmi ces potentiels, l’un d’entre eux est privilégié parce qu’il corres­
pond à l’univers réel et qu’il héberge notre destin le plus probable.
La question de savoir si ce destin a déjà été vécu ou non n’est pas trai­
tée dans ce livre, qui adopte une position minimaliste.
IL
Le déterminisme inversé
Où l ’on constate que pour préserver notre libre arbitre,
nous devons combattre le dogme de l ’irréversibilité!

- T u vois ce col là-bas, c ’est par là qu’on va passer.


- Heureux de te l’entendre dire ! Tu vois que tu sais lire dans l’avenir !
- Qu’est-ce que tu me racontes? Ah oui... mais non, là, c’est différent
puisqu’on le voit, c’est dans le présent !
- Pas du tout, ce qui est dans le présent, c ’est juste un aperçu du col de
l’Ange, une trace. Quand on sera arrivé là-bas, on vivra des choses
complètement différentes. On peut tout juste les imaginer d’avance
grâce à cette trace.
Tout à coup, une brume nuageuse se mit à descendre des Monges en
rendant invisible notre objectif. Le mauvais temps qui sévissait au
nord des Alpes menaçait de s’installer dans la réserve, malgré le mis­
tral qui dégageait avec force le ciel en disloquant les quelques nuages
qui s’avançaient vers le sud.
- Ouh là, j ’ai bien peur qu’on se fasse rincer, là-haut.
- Ah mais... j ’espère que tu n’es pas en train d ’effacer notre avenir !
Je me faisais un plaisir d ’illustrer mes propos de la veille au soir.
Patrick résistait à tout ce que je lui racontai sur le temps. Je souhaitais
seulement réussir à le faire douter.
- Non, répliqua-t-il, on continue, ça va se dégager. On n’a qu’à faire
une pause et prendre l’apéro maintenant, vu qu’il est bientôt midi. On
verra bien ensuite comment ça tourne.
- Sage décision de ton libre arbitre !
- Ah, je te vois venir, avec ton fichu libre arbitre. Si j ’étais un robot
j ’aurais pris la même décision.
- À la différence que toi, tu as conscience de ta décision, alors que le
robot, lui, n’a pas besoin de conscience pour décider.
- Et alors? Quoi qu’on fasse, c’est un cerveau qui décide, et il y a tou­
jours une raison dans cette décision, consciente ou pas.
- Non, on peut aussi agir sans raison apparente, avec ses sentiments,
ses émotions par exemple.
- Mais ça reste encore sous le contrôle de ton cerveau. La vraie raison
s’y trouve quelque part, même si elle est inconsciente.
- Oui mais pas toujours, sinon ça voudrait dire qu’on n’aurait qu’un
seul avenir, et dans ce cas on en verrait des traces.
- Encore ton histoire de traces... mais pourquoi veux-tu voir des traces
de ton avenir? N’importe quoi !
- Parce que je vois des traces de mon passé, et que les lois de la nature
sont réversibles par rapport au temps. La seule chose qui puisse expli­
quer qu’on ne puisse pas voir de traces de l’avenir, c’est qu’il soit mul­
tiple ou modifiable à tout moment. C ’est ça qui oblige le futur à rester
indéterminé ou invisible, flou ou embrumé, exactement comme ce col
qu’on distingue à peine.
- Qu’est-ce que tu racontes, c’est faux, les lois de la nature ne sont pas
réversibles. Il y a plein de choses irréversibles, tiens, par exemple
quand tu chauffes un plat, ou là, tiens, si je jette ce caillou dans la
rivière, il ne risque pas de remonter tout seul ! »
- Oui je sais, on dit que c’est à cause de l’entropie* qui augmente tout
le temps. Mais tu sais quoi, cette fameuse entropie qu’on t’a apprise à
l’école, c ’est purement empirique, c ’est juste une question de probabi­
lité: les choses irréversibles ne le sont qu’en apparence, uniquement
parce qu’il est infiniment peu probable pour elles de revenir en arrière.
- Et alors, je ne vois pas ce que ça change?
- Ce que ça change? Mais ça change tout, mon cher ami ! Car si tout
est réversible, ça veut dire qu’on peut se servir aussi bien des traces du
futur que de celles du passé pour comprendre ce qui arrive dans le pré­
sent. Et ça veut dire que notre présent lui-même peut résulter de notre
avenir !
- Mais ça n’a pas de sens ! Et même, aucun intérêt. La seule chose qui
nous intéresse, c ’est de pouvoir prédire l’avenir.
- Ecoute, on déduit bien le passé de ce qu’on observe dans le présent
pour comprendre ce qui s’y est passé. Eh bien, l’intérêt de déduire le
présent de l’avenir, c ’est la même chose, c ’est donc de mieux com­
prendre ce qui se passe dans le présent.
- Je ne pige pas. C ’est l’avenir qui doit être déduit du présent, pas l’in­
verse. Le présent ne peut être déduit que du passé, et d’ailleurs tiens,
justement, vu qu’il n’y a qu’un seul passé, il ne peut y avoir qu’un seul
avenir.
Patrick était en train de nous concocter un petit apéritif maison dont il
avait le secret. Après avoir sorti un sachet de son sac puis découpé en
deux une bouteille en plastique vide, il utilisa l’une de ses parties
comme récipient et l’autre comme entonnoir après l’avoir bouché avec
un bout de tissu en guise de filtre.
La vue de cet entonnoir inspira ma réponse :
- Mais pas du tout, l’avenir est multiple par essence. Car même sans
aucun libre arbitre, l’avenir reste indéterminé, et même « indétermi­
niste* ». Mais ce n’est pas tout: figure-toi que le passé lui aussi pour­
rait bien être multiple. Car pour fabriquer ta mixture, il y a plein de
façons différentes de remplir ton entonnoir qui aboutissent toutes au
même résultat !
- Tu m ’embrumes l’esprit !
Il ne croyait pas si bien dire. La brume du col était en train de descen­
dre rapidement vers nous. On allait bientôt se retrouver dans un
nuage...

Patrick pensait comme la plupart des gens dotés d’un assez bon niveau
de culture scientifique. Nous serions le plus souvent conditionnés et ne
ferions que des choix illusoires, imposés par la nécessité d’évoluer.
L’Arbre de Vie que j ’avais tenté de lui expliquer la veille au soir le
gênait par ses postulats: d’une part l’authenticité de notre libre arbitre,
d’autre part l’hypothèse que notre futur existait déjà.
Paradoxalement, c’était cette dernière hypothèse qui avait fini par
recevoir un assentiment de sa part. Elle était une conséquence du fait
que le temps est traité exactement comme une dimension d’espace.
Les physiciens et les mathématiciens n’ont en effet aucune réticence à
concevoir ce traitement inhabituel du temps, car la Théorie de la Rela­
tivité les a habitués à cette idée.
Albert Einstein lui-même, le père de la relativité générale, fut le pre­
mier à remettre en question la notion de temps et notamment celle du
temps présent. La définition d’un tel présent est tout à fait relative et
subjective, car la notion même d ’« état de l’univers » à un instant
donné est complètement fausse.
Observez par exemple une étoile dans le ciel, à de nombreuses années
lumière de la terre. Nous avons du mal à imaginer que cette étoile fait
partie du passé. Il est cependant possible qu’elle ait déjà explosé et dis­
paru, s’il s’agit par exemple d’une supemova. Pour nous cet événe­
ment fait partie de l’avenir et n’existe donc pas encore, alors que pour
ce qui est de l’étoile, il est déjà passé. Mais le pire, c’est qu’Einstein
nous a montré qu’il n’est même pas nécessaire que des objets soient
éloignés pour ne pas avoir le même présent, car il leur suffit de se
déplacer à des vitesses différentes. Et c ’est ainsi que quelle que soit la
zone de l’espace, le présent ne peut pas y exister !
Face à l’irréalité du présent, le temps est traité par l’Arbre de Vie
comme une dimension d’espace. Cela implique que nous nous dépla­
çons dans le temps exactement comme nous nous déplacerions dans
un véhicule qui traverse l’espace. Ce véhicule nous conduit dans le
temps vers une destination inconnue, mais elle est déjà présente selon
une multitude de possibilités, sauf si le véhicule est en pilotage auto­
matique, auquel cas nous n’aurions aucun libre arbitre: nous serions
conditionnés.
Sur cette question du temps assimilé à de l’espace, j ’avais presque
réussi à convaincre Patrick. Il voulait bien croire que le futur existait
déjà, mais dans une version unique imposée par notre conditionne­
ment, alors que j ’étais partisan de versions multiples. C ’était donc la
question du libre arbitre qui avait suscité le plus de débats entre nous.
Elle était autrement plus discutable que l’omniprésence du futur.
Le « postulat » du libre arbitre repose sur l’idée que devant chaque
nouvel embranchement de notre Arbre de Vie, nous serions libres de
choisir une branche plutôt qu’une autre. Nous serions alors vraiment
libres et responsables de nos actes. Nous ne pourrions avoir un destin
tout tracé, un seul et unique scénario de vie, que dans le cas où nos
intentions resteraient inchangées.
Malgré un tel destin « choisi », notre Arbre de Vie resterait pertinent,
car à la moindre modification « authentiquement libre » de nos inten­
tions ce destin changerait et nous emprunterions une autre branche.
Notre futur serait sous le contrôle de nos intentions : les probabilités de
remonter une branche plutôt qu’une autre varieraient en permanence
en fonction de nos intentions.
Notre futur serait donc « indéterministe* », c ’est-à-dire indéterminé
par nature et donc potentiellement multiple. Précisons la différence
entre « indéterministe » et « indéterminé » : un avenir indéterminé reste
unique car il n’est indéterminé que par méconnaissance de ce qui le
rend unique, contrairement à un avenir indéterministe qui est multiple
par essence.
En l’absence de libre arbitre authentique, nous aurions un chemine­
ment conditionné, c’est-à-dire « automatique », déjà tracé sur notre
Arbre de Vie, celui qui consiste par exemple à ne pas quitter la Route
du Temps. Si notre conditionnement était tel que toute notre vie était
ainsi déjà programmée, on peut alors se poser la question de savoir si
notre arbre de vie existerait encore.
Mais ne serait-ce pas oublier l’existence du hasard* ?
Car le hasard pourrait lui-même actualiser* un nouveau cheminement
sur notre Arbre de Vie, en faisant le choix à notre place. Par exemple si
nous heurtions un sanglier qui traverse la route, cet accident pourrait
modifier notre parcours ! Et d’une façon générale, le hasard des ren­
contres se substituerait à un libre arbitre illusoire. C ’est lui qui nous
ferait bifurquer sur notre Arbre de Vie dans telle direction plutôt que
dans telle autre, choisir telle profession, tel conjoint, telle maison, plu­
tôt que d’autres.
Et si, vraiment, tous nos « choix » n’étaient qu’imaginaires et détermi­
nés par le hasard ou par nos conditionnements comportementaux
inconscients, alors notre Arbre de Vie ne servirait plus qu’à décrire un
ensemble de potentiels régi par le seul hasard.
Encore faut-il que le hasard lui-même résulte d’un véritable processus
indéterministe. Or, bien que l’existence de ce type de hasard soit
revendiquée par les physiciens de la mécanique quantique, l’interpréta­
tion des résultats de cette discipline fait encore débat. C ’est pourquoi
dans la communauté beaucoup plus large de tous les scientifiques, on
trouve encore l’opinion dominante que le hasard est déterministe mais
que ses causes sont cachées : il ne reste alors plus aucune place pour
notre Arbre de Vie.
C’est en tout cas l’opinion matérialiste du déterminisme* qui a dominé
nos derniers siècles depuis celui des lumières, et qui semble dominer
encore aujourd’hui la science. Le déterminisme empêche nombre de
scientifiques tout à fait respectables de croire non seulement dans le
hasard indéterministe, mais dans l’authenticité de notre libre arbitre.
C’est le cas en particulier de la plupart des spécialistes des neuros­
ciences qui ont l’habitude de soumettre à des expériences quotidiennes
cette fabuleuse machinerie constituée par notre cerveau, avec toutes
ses interconnexions neuronales: voyant que la conscience n’est qu’un
produit de notre cerveau, ils en déduisent que notre liberté est illusoire.
Selon la majorité des chercheurs en sciences de l’évolution, de la cog-
nition, du comportement, nos actes individuels seraient déterminés par
nos penchants et par des mécanismes qui n’accèdent même pas à notre
conscience elle-même [4], quelle que soit leur cause. Et le hasard lui-
même résulterait de notre ignorance des causes ! En un mot, nous
serions des machines, comme le seraient sans aucun doute des huma­
noïdes fabriqués artificiellement et dotés d’une intelligence humaine
ou supérieure. Nous n’y sommes pas encore, mais les progrès de la
technologie permettent de supposer très raisonnablement que nous
saurons à l’avenir créer ces machines.
Prenons l’exemple du premier robot humanoïde français Nao. L’objec­
tif très sérieux d’une association d’experts de différents laboratoires de
recherche dans le monde, à laquelle j ’ai participé afin de concevoir
l’œil artificiel de Nao, était de faire progresser ce robot afin qu’une
équipe d’humanoïdes réussisse à gagner un match de football contre
une équipe d’humains avant 2050 ! Il va de soi que ce genre d’objectif
ignorant totalement l’utilité d’une « fonction conscience » ne fait que
renforcer l’idée que cette conscience ne peut être qu’un sous-produit
du cerveau.
J’ai des collègues chercheurs qui pensent qu’un humanoïde suffisam­
ment complexe pourrait acquérir comme par enchantement un libre
arbitre ou même une conscience. S’ils avaient raison il faudrait accor­
der du crédit à l’idée que nous pourrions éventuellement nous-mêmes
n’être que des machines, conformément au déterminisme.
Les partisans de ce paradigme* mécaniste puissant qui imprègne la
science depuis Newton, ultra majoritaires en sciences jusqu’à une
époque récente, considèrent donc que le hasard indéterministe n’existe
pas car ses causes comporteraient des « variables cachées »* agissant
exactement comme un conditionnement: hasard, déterminisme ou
conditionnement, même combat ! En un mot, notre avenir serait unique
et déjà tracé car théoriquement calculable, et il faudrait simplement
attendre que le temps s’écoule pour le connaître.
Ces idées ont pourtant été remises en question au cours du XXe siècle
[23], une première fois par la mécanique quantique avec le principe
d ’incertitude de Heisenberg, et une seconde fois, beaucoup plus
récemment, par la Théorie du Chaos [33]. Il n’en reste pas moins que
la Théorie des Variables Cachées demeure puissante et contribue à
maintenir solidement les fondations du déterminisme qui, avec la cau­
salité, sont même les fondations de toute la science :
Le déterminisme: le futur est mécaniquement déterminé, et ceci de
façon unique.
La causalité: le futur est exclusivement la conséquence du passé, et
non l’inverse.
Et pour bien assoir ce dernier fondement, la physique n’a rien trouvé
de mieux que d’ériger le principe de l’irréversibilité - ou flèche du
temps - qui nous dit qu’il est impossible de recalculer le passé à partir
du présent, car toute évolution s’accompagne d’une augmentation du
désordre (ou entropie) et ne peut donc avoir lieu en sens inverse. Et
pourtant, toutes les lois de la physique sont réversibles par rapport au
temps, ce qui soulève l’un des plus grands mystères de la physique
moderne, non encore résolu à ce jour.
Autrement dit, certains chemins que nous empruntons seraient irréver­
sibles, et pour revenir sur nos pas, il nous serait impossible de repren­
dre le même chemin qu’à l’aller, en repassant exactement par les
mêmes positions...

Je me faisais cette réflexion tout en épousant le rocher que j ’étais en


train de gravir, quand j ’entendis Patrick me dire :
-Arrête-toi là Philippe, tu n’arriveras plus à descendre.
- Mais je n’ai pas l’intention de descendre...
- Attention, si tu ne peux pas continuer à monter tu seras bien obligé
de descendre, et on risque de se retrouver coincés.
- Mais non, si on arrive à monter on arrivera bien à descendre.
- Pas du tout. On dirait que tu n’as jamais fait d’escalade.
Patrick avait raison. En escalade, il est beaucoup plus facile de monter
que de descendre, tout simplement parce que les aspérités de la roche
qui servent de point d’appui à nos pieds pendant la montée deviennent
souvent invisibles en sens inverse. Il en résulte qu’à la descente on est
parfois obligé d’hésiter longuement et dangereusement entre de multi­
ples points d’appui hypothétiques, et il n’est pas rare qu’on arrive plus
à trouver le bon. L’escalade avait ainsi toutes les caractéristiques d’un
cheminement irréversible.
Pendant notre randonnée vers le sommet des Monges, la brume
épaisse qui était tombée nous avait conduits à faire une pause à un
endroit où un choix s’était imposé à nous: soit nous poursuivions notre
marche dans la brume sur le petit sentier initialement prévu, au risque
de s’égarer, soit nous empruntions un raccourci consistant à escalader
une falaise, en profitant d’une faille découverte à proximité du lieu de
notre halte. Pour gagner du temps, nous avions opté pour cette dernière
solution et étions arrivés à mi-hauteur de cette falaise.
- Je te signale que de toute façon, j ’ai bien peur qu’on ait déjà plus le
choix : regarde derrière toi.
Les deux mains bien assurées, Patrick tourna la tête vers le bas pour
tenter de distinguer la voie que nous avions suivie, mais la falaise lui
parut soudain tellement abrupte qu’il eut un rapide mouvement de
recul, comme si le vertige l’avait envahi.
- Et bon sang ! On n’est pas dans la mouise. Tu n’aurais pas une corde
dans ton sac ?
- Non mais ne t’inquiète pas, on va trouver la bonne voie, allez on
continue.
En disant cela, je comptais surtout sur l’effet psychologique que mon
assurance pourrait générer sur Patrick. Ce n’était plus le moment de
plaisanter mais d’exploiter les vertus supposées d’une attitude positive
et déterminée. Bien que cette décision de continuer revenait justement
à se mettre sous la dépendance d’un déterminisme bien établi, celui
d’une probable impasse pouvant confirmer les craintes de Patrick, je
ne voulais croire qu’en un seul déterminisme réellement fiable en
direction du futur: celui de mon intention tout à fait confiante.
Mais l’intention de Patrick était encore plus convaincante que la
mienne, aussi je fis un saut pour revenir à son niveau et considérer la
situation. Il me semblait impossible de revenir sur nos pas, la désesca­
lade paraissant vraiment trop dangereuse.

Est-il vrai que certains trajets pourraient être vraiment irréversibles,


fermant ainsi la voie à toute possibilité de retour en arrière?
Effectivement, certains phénomènes physiques semblent se rebeller
contre le principe fondamental de la réversibilité, et une branche de la
physique s’en est fait une spécialité: selon la physique statistique, le
temps est irréversible. Ces phénomènes sont en fait extrêmement cou­
rants et concernent de nombreux systèmes physiques, comme par
exemple une machine à café, une voiture, un moteur, un mélange, une
cellule, une turbine, un être vivant, etc.
Il semble en effet impossible de voir fonctionner ces systèmes à l’en­
vers : un mélange ne se transformera jamais en séparant ses compo­
sants, un moteur n’aspirera jamais ses reflux pour fonctionner dans
l’autre sens, etc.
Mais sur ce point, les spécialistes restent dubitatifs et partagés, car les
équations fondamentales de la physique sont parfaitement réversibles,
c’est-à-dire symétriques par rapport au temps. Il s’agit bien de la plus
étrange contradiction de toute la physique !
Ayant eu l’occasion durant ma carrière de chercheur de modéliser des
systèmes irréversibles, je me suis aperçu que cette contradiction était
liée au fait que ces systèmes sont indéterministes par essence. A défaut
de pouvoir calculer la position exacte de chaque particule d’un sys­
tème qui peut en mettre en jeu des quantités astronomiques, on en est
réduit à des simulations de mouvements d’ensemble en « tirant au
hasard » leurs trajectoires individuelles pour calculer un résultat global
de tous leurs mouvements grâce à la statistique.
Le problème de cette méthode statistique est qu’il n’est pas possible de
l’appliquer dans le sens inverse du temps pour calculer l’état du sys­
tème tel qu’il était à l’origine, car cette statistique est incapable de
retrouver les conditions initiales*, c’est-à-dire de reconstituer un passé
défini d’avance !
À cause de cette irréversibilité que je qualifierais donc d’« imposée »
par l’introduction du hasard dans les calculs et qui, de l’avis à peine
plus modéré de nombreux autres physiciens, est essentiellement
engendrée par la statistique, certains se sont demandés si l’irréversibi­
lité ne serait pas finalement qu’une illusion produite par un effet statis­
tique [14].
Cette conclusion est cependant restée discrète, car il est très difficile
d’imaginer qu’un bol de café au lait puisse évoluer naturellement d’un
état où le café est mélangé avec le lait, vers un état où le mélange n’est
pas encore effectué. Pourtant, c ’est théoriquement possible, mais à
condition d’attendre pendant une période largement supérieure à l’âge
de l’univers !
C’est pourquoi la physique macroscopique basée sur des équations sta­
tistiques revendique une impossibilité non seulement de fait, mais
aussi de principe, de « calculer » le passé des phénomènes dits irréver­
sibles, et donc de renverser le cours du temps, ce qui se traduit dans cet
exemple par l’impossibilité de séparer par le « calcul » le café du lait.
Alors qu’au contraire, la physique microscopique, en contradiction
totale avec cette position, revendique de façon éclatante dans ses équa­
tions la réversibilité de tous les phénomènes, la possibilité de les faire
fonctionner dans les deux sens du temps !
Où est la vérité ? Nous sommes en face de deux physiques totalement
contradictoires : la microscopique est complète et permet de calculer,
mais seulement en théorie, le futur ou le passé à partir de la connais­
sance du présent. Mais la macroscopique, cette physique statistique qui
permet d’effectuer des calculs tout à fait exacts et étonnamment effi­
caces dans la pratique, demeure partielle et empirique. Elle reste inca­
pable de calculer le passé à partir du présent et qualifie en consé­
quence d’impossibles à renverser certaines transformations effectuées
par le temps, sous prétexte qu’elles seraient accompagnées d’une perte
d’informations !
Car pour justifier l’irréversibilité, les physiciens n’ont rien trouvé de
mieux à dire que « les systèmes irréversibles perdent de l’informa­
tion » ! Une telle conclusion est-elle bien raisonnable? Est-ce bien leur
information qu’ils ont perdue? Qui a vraiment perdu l’information?
Où est passée l’information qui nous empêchait, Patrick et moi, de
descendre de la falaise de la même manière que nous l’avons escala­
dée? S’est-elle réellement évanouie, ou n’est-elle pas tout simplement
devenue cachée à nos yeux ?

Après m ’avoir vu sauter de mon rocher pour revenir à ses côtés,


Patrick ne me laissa même pas le temps de réfléchir et amorça une dés­
escalade que je trouvai téméraire :
- Laisse tomber, tu n’y arriveras pas, c ’est trop dangereux.
- Mais si, tu vas voir, il n’y a que deux passages délicats à passer, me
rétorqua-t-il.
- Attends, j ’aurais préféré qu’on déjeune au sommet. Il y a bien une
solution.
- On a le temps. Tiens, prend mes abricots secs.
Pour faciliter sa descente, Patrick me tendit son sac à dos afin de s’al­
léger. Je voyais bien qu’il peinait mais il était tellement résolu à des­
cendre malgré mon insistance à vouloir monter, que je décidai finale­
ment de l’aider à descendre: il suffisait que vu d’en haut, je me penche
en m’allongeant à un endroit judicieux, pour arriver à scruter la roche
où il cherchait désespérément des points d’appui. J’arrivai alors à très
bien le guider en lui donnant les informations qu’il recherchait:
- À gauche, à gauche, encore, oui, c’est ça, là, tu l’as...
Une fois parvenu en bas, je lui envoyai nos sacs et entrepris de descen­
dre à mon tour en me guidant d’après ses instructions. Et c’est ainsi
qu’en nous informant mutuellement sur les bonnes positions à prendre
avec nos pieds, nous parvînmes à descendre jusqu’à un replat...

Si en désescalade il est permis de tâtonner avec ses pieds pour retrou­


ver les bons points d’appui, et de changer éventuellement de chemin
de retour, il semblerait qu’en physique statistique une flèche du temps
veuille nous interdire de procéder à un tel « tâtonnement », et même à
un quelconque retour en arrière afin de retrouver notre situation ini­
tiale.
J’ai bien parlé d’une interdiction, car en théorie le passé peut parfaite­
ment se calculer à partir du présent. En pratique il suffit simplement de
ne pas s’imposer de repasser par le même chemin, puisque nous
n’avons pas accès aux mêmes informations qu’à l’aller. Mais cela vou­
drait dire qu’il nous faut accepter l’existence de passés alternatifs,
voire de passés multiples, or cette idée ne peut que choquer les physi­
ciens déterministes qui n’acceptent déjà pas l’existence de futurs mul­
tiples !
Dès lors, l’interdiction d’inverser la flèche du temps ne se résumerait-
elle pas à une interdiction de retourner dans un passé différent? Auquel
cas, ne serait-il pas plus judicieux de parler d’un déterminisme
inversé ?
Pourtant, n’y avait-il pas une quasi-infinité de façons pour Patrick de
verser de l’eau dans son entonnoir pour concocter notre apéritif? Après
tout, si le concept de l’arbre de vie est juste et que la physique est indé­
terministe, il faut qu’elle le soit dans les deux sens du temps, puisque
ses équations sont réversibles.
Il est donc important que nous considérions la chose d’un peu plus
près : le fait de remettre en question la notion d’irréversibilité conduit
malheureusement, à première vue, à admettre l’existence d’un passé
multiple ! Comment est-ce possible ?
Nous allons maintenant montrer qu’il s’agit seulement d’un problème
technique, et que de même que la physique statistique n’est qu’une
technique de calcul du futur à partir du présent, le fait que nous ne
sachions pas calculer le passé à partir de ce même présent n’entraîne
pas pour autant qu’il soit multiple.
Remarquons tout d ’abord que la propriété de l’entonnoir de Patrick
n ’est absolum ent pas typique du retour dans le passé, bien au
contraire ! Car il se passe exactement la même chose dans le futur des
systèmes irréversibles, comme par exemple les phénomènes météo, le
frottement d’une roue, la combustion dans un moteur: les particules de
ces systèmes partent dans des directions totalement imprévisibles.
On s’est alors aperçu que malgré leur apparente calculabilité, de nom­
breux systèmes irréversibles deviennent entièrement imprévisibles à
court terme, qu’ils soient vivants ou artificiels, car ce calcul devient
vite complètement faux. Toute prévision par le calcul d’un état futur
devient alors impossible à effectuer à partir d ’un certain temps. Ce
constat est aujourd’hui bien expliqué par la Théorie du Chaos [241 et la
meilleure illustration que l’on en connaît est la limite de prévision
météorologique.
Or ce constat d ’im prévisibilité est le même que celui qui nous
empêche, en sens inverse du temps, de reconstituer un passé unique!
Pourtant personne ne dit que le retour dans le passé est irréversible, ce
qui serait un comble !
Le succès de la Théorie du Chaos, tout comme celui de la mécanique
quantique, a ainsi conduit les physiciens à prendre acte définitivement
de l’imprévisibilité « par nature » du futur. Car même si nous avions
des moyens de calculs gigantesques, il subsisterait une limite tempo­
relle de prévision due à une sensibilité aux conditions initiales* attei­
gnant l’échelle microscopique: celle où règne déjà un indéterminisme
fondamental, celui de la position et de la vitesse des particules élémen­
taires. Impossible de connaître précisément l’une sans que l’autre soit
indéterministe.
Il s’ensuit que la physique contredit aujourd’hui le paradigme méca­
niste (causalité + déterminisme) sur lequel elle s’est construite, en fai­
sant régner l’indéterminisme à toutes les échelles: cette affirmation
fondamentale pour la Théorie de la Double Causalité est argumentée
plus précisément au chapitre XXII.
Devant l’indéterminisme généralisé de la nature et la réversibilité des
équations de la physique, le passé devrait donc être lui aussi, indéter­
ministe !
Mais ne serait-ce pas ignorer totalement la mémoire du passé ? Que
fait-on de l ’information disponible? Qu’en est-il de cette stratégie
d’information mutuelle que Patrick et moi avons adoptée lors de notre
désescalade ?
Nous voici enfin armés d’une bonne raison de remettre en question la
notion de l’irréversibilité issue de la physique statistique: le problème
des calculs statistiques est qu’ils ne nous permettent pas de « tâton­
ner » afin de prendre en compte la moindre trace du futur ou du passé,
s’agissant là d’une véritable impossibilité technique, et ceci d’autant
plus qu’ils reposent sur l’usage immodéré du hasard !
Comme nous l’avons vu, cette notion d’irréversibilité a réussi à s’im­
poser en revendiquant une soit disant perte d’information correspon­
dant à une augmentation obligatoire de l’entropie*. Mais à bien y
regarder, on s’aperçoit que cette information n’est pas du tout perdue,
si l’on veut bien exploiter toutes les traces du passé, c’est-à-dire par
exemple le litre de lait entamé à côté du bol de café au lait, ou encore
le marc de café ! Le problème est juste que nous n’avons pas d’outils
pour prendre en compte ces traces du passé. Le fait que l’information
soit complètement diluée ou dispersée n’implique pas qu’elle ait dis­
paru.
Au pire, il suffit de trouver la personne qui a fait le mélange, et son
simple témoignage suffira pour reconstituer le passé du bol. Mais ce
n’est même pas utile, puisque cette personne fait déjà partie des obser­
vateurs* « patentés » de l’univers: elle contient dans son cerveau une
trace du passé du bol !
L’information d’un système irréversible n’est donc perdue que par un
physicien qui se prend pour un technicien en constatant l’impossibilité
technique de la retrouver pour faire le calcul inverse, mais elle n’a
jamais été perdue par l’univers !
En conséquence, bien que le passé soit théoriquement calculable à
cause de la réversibilité des équations générales, nous ne savons pas
calculer ce passé car nous n’avons tout simplement pas d’outils pour le
faire. Nous ne savons faire que des reconstitutions qualitatives, ce qui
soit dit en passant est déjà presque suffisant pour remettre en question
l’irréversibilité.
Ne nous manquerait-il pas des équations ? 11 est évident qu’il nous
manque une sorte de « physique statistique inversée », qui serait d’ail­
leurs beaucoup moins statistique, car elle devrait être capable d’exploi­
ter les traces du passé pour retrouver les conditions initiales. Au même
titre que la physique statistique actuelle aurait besoin de savoir exploi­
ter des « conditions finales » ou « traces du futur » afin de recenser les
différents avenirs possibles d’un même système chaotique.
La non calculabilité du passé ne signifie donc pas qu’il soit indétermi­
niste, mais que nous n’avons tout simplement pas encore trouvé la loi
d’« effet à cause » qui permet le retour vers un passé unique en ras­
semblant toutes les traces de ce passé.
11 faudrait alors accepter une sorte de « causalité inverse » ou rétrocau­
salité*. Ce concept a déjà été suggéré en mécanique quantique, ainsi
que pour expliquer certains phénomènes parapsychologiques [25],
mais il est contesté par les physiciens car il va à l’encontre du modèle
standard de la physique.
La rétrocausalité cesserait cependant d ’être contestable si elle s’ac­
compagnait de la reconnaissance d ’un déterminisme inversé. C ’est
pourquoi je préfère employer le qualificatif de « seconde causalité »,
en précisant bien qu’il s’agit d’une « rétrocausalité déterministe ». Une
autre bonne raison de faire cette distinction est que la rétrocausalité
considère habituellement que le passé précède le futur, ce qui n’est pas
le cas de la seconde causalité. Cette dernière est en effet fondée sur
l’omniprésence du futur et du passé, sur leur « simultanéité ».
La seconde causalité interprète donc l’irréversibilité comme un pro­
blème technique: d’une part, nous ne savons pas exploiter les informa­
tions contenues dans les traces du passé observables dans le présent.
D ’autre part, nous ne connaissons pas la loi d’information à substituer
à la physique statistique pour calculer ce passé à partir de ces traces.
Il ne s’agit donc en aucun cas d’un indéterminisme du passé !
Bien au contraire, puisque les traces du passé sont a priori beaucoup
plus nombreuses que les traces du futur, nous pouvons sur cette simple
base affirmer que le passé est beaucoup plus déterministe que le futur,
et en admettant que nous connaissions parfaitement notre passé, nous
pouvons même affirmer :
Le déterminisme n’est valide que s’il est inversé.
Voyons ce qu’il en est maintenant de ce constat en ce qui concerne
notre Arbre de Vie: l’inversion du déterminisme correspond parfaite­
ment au fait que si nous descendons de l’arbre, nous retournons inva­
riablement au tronc. Le déterminisme inversé serait alors fondé par le
fait que les traces du passé contribuent à le rendre unique, contraire­
ment au futur pour lequel les traces sont a priori beaucoup moins nom­
breuses, voire inexistantes.
Mais qu’en est-il de cette loi d’information qui à partir des traces du
passé, serait capable de le recalculer?
Rappelons que cette loi devrait être réversible, pour satisfaire les équa­
tions fondamentales de la physique ! Elle devrait donc englober la phy­
sique statistique et donner les mêmes résultats dans le cas particulier
où aucune trace n’est introduite dans le calcul !
La physique serait donc incomplète dans la mesure où nous ne savons
calculer le résultat de l’évolution d ’un système qu’en l’absence de
traces, en choisissant le scénario le plus probable. Mais ne serait-ce pas
à nouveau un problème technique ?
Car le fait que le résultat calculé par la statistique soit conforme à l’ob­
servation ne signifie-t-il pas plutôt que nous mesurons le résultat le
plus probable ?
Mais s’il s’avérait que parfois les traces d’un futur particulier soient
bien formées, privilégiant ainsi un scénario d’évolution rare, ne fau­
drait-il pas s’attendre à un résultat très peu conforme au calcul des pro­
babilités ?
Nous allons donc partir à la recherche de telles traces. Quoi qu’il en
soit, gardons à l’esprit qu’en inversant le sens du déterminisme, nous
avons aussi avancé l’hypothèse très plausible de l’indéterminisme du
futur. Cet indéterminisme fondamental de la nature, argumenté au cha­
pitre XXII, va donner à la seconde causalité la possibilité d’exploiter
toute la richesse d’une quantité considérable d’aléas* !
Résumé du chapitre II

Nous devons différencier deux types de choix : des choix conditionnés


ou déterministes et des choix authentiquement libres ou indétermi­
nistes. L’Arbre de Vie symbolise ces derniers lorsqu’on s’y élève, mais
il illustre aussi le caractère illusoire des premiers lorsqu’on en redes­
cend.
Cela suppose un déterminisme inversé, pour lequel nous avons été
obligés de revoir la notion d’irréversibilité, en la considérant comme
une incapacité technique à recalculer le passé à partir du présent, à
cause d ’une perte d’information tout à fait relative.
En réalité, si nous savions utiliser toutes les informations ou traces du
passé que nous observons dans le présent, en connaissant la loi qui
permet de les rassembler, nous constaterions que le passé est beaucoup
plus déterministe que le futur. Inversement, c’est la pauvreté apparente
de traces du futur qui rend ce dernier indéterministe.
m.
La Loi de Convergence des Parties
Où l ’on découvre que la recherche d ’une loi manquante
pour calculer le passé nous amène à la quête des traces du futur.

Pour nous faciliter la descente nous avions emprunté une autre voie
qu’à la montée, et une agréable surprise nous attendait au terme de
cette désescalade : une magnifique dalle à ammonite juchée sur un
replat de la falaise formait une superbe table naturelle, juste assez hori­
zontale pour accueillir notre pique-nique. Le temps de ce déjeuner, la
brume s’était dégagée et avait même disparu du sommet des Monges.
- Tu as eu une superbe intuition en décidant de descendre et de nous
faire passer par là !
- Mais non, sans ton aide on ne serait pas ici. J’étais à deux doigts de
te suivre, il aurait suffi que tu me tendes la main.
- Alors j ’ai peut-être eu une bonne intuition, moi aussi... hum... je
crois bien que si on avait grimpé, on serait restés coincés.
- Regarde la forme de celui-là ! On dirait un hippocampe !
- Dire que ce truc a des centaines de millions d’années !
- Regarde là, à côté, on dirait qu’ils se sont fossilisés en même temps.
Cette dalle est petite mais elle est bien plus jolie que celle de Fontbelle
et pourtant, personne ne doit la connaître.
-T u as vu où on est? Ce n’est pas étonnant. D ’ailleurs, je me demande
si elle n’est pas de formation très récente. Regarde cet énorme rocher,
on dirait qu’il vient de tomber.
- Ouf, en effet! Et il n’est pas le seul, on dirait que tous les autres
autour viennent aussi de là-haut. Mieux vaut ne pas rester trop long­
temps plantés là !
- Ce sont sûrement les intempéries récentes qui les ont détachés. A
mon avis celui-là s’est cassé il y a une dizaine de jours durant le fort
gel. D’ailleurs regarde, ce morceau est tombé sur les traces d’un mou­
flon.
- Oh mais alors c’est beaucoup plus récent !
- Non il n’a pas plu depuis et ça a séché. Tiens regarde, il y a de la
boue séchée sur celle-là, pourtant elle semble bien être aussi tombée de
là-haut. Le mouflon a dû arriver là et l’éclabousser en galopant, avant
que l’effondrement ne se soit stabilisé.
- Mais dis donc, c ’est que tu nous ferais un bon Sherlock Holmes !
- Oh non, tu sais, il n’y a rien de certain là-dedans. Tiens d’ailleurs,
toutes ces traces du passé sont sûrement plus incertaines que cette trace
du futur qu’on a suivi avant de trouver la faille !
- Qu’est-ce que tu racontes ? Laquelle ?
- Tu ne te souviens pas ?
Bien avant que Patrick ait décidé de faire une pause au pied de la
falaise pour attendre que la brume se désépaississe un peu, nous étions
parvenus à un endroit où nous n’arrivions même plus à distinguer le
sentier. Même en rebroussant chemin nous n’étions pas certains de ne
pas nous tromper de direction. Il semblait plus raisonnable de rentrer.
Mais en voyant tout à coup, en pleine hésitation, un rayon de soleil fil­
trer l’espace de quelques secondes, comme une promesse de clarifier
notre avancée, nous nous étions regardés et Patrick avait dit, d’un air
entendu :
- Allez, on continue !
Et effectivement, une heure plus tard, à l’issue de notre escalade aven­
tureuse, tout s’était dégagé.

La bonne décision de Patrick semblait provenir d’un rayon de soleil.


Pourrait-il s’agir d’une trace du futur? Pour le savoir, il faudrait peut-
être connaître la loi d’information qui permet de déduire le présent du
futur. Or pour la connaître, n ’est-il pas plus sage de s’intéresser
d’abord à la reconstitution du passé à partir de traces indubitables ?
Y aurait-il donc un moyen de réaliser d’une façon systématique le tra­
vail de Sherlock Holmes, afin de faciliter le travail de reconstitution du
passé?
Reprenons l’exemple du phénomène apparemment le plus difficile à
inverser, celui du mélange entre deux constituants, comme le café au
lait: on peut toujours trouver des traces de l’état initial, et ceci qu’elles
soient internes comme les micro-résidus non mélangés, ou externes
comme le paquet de café ou le litre de lait à proximité du bol, sans par­
ler du souvenir de la personne qui a pris son petit-déjeuner.
C ’est ainsi que l’hypothétique perte d’informations sur un système à
cause d’une dégradation ou d’un mélange pourrait bien n’être qu’ap­
parente et ne jamais empêcher de reconstituer son état passé, grâce à
l’immense redondance des traces ! Par exemple, la reconstitution d’un
verre cassé à partir de centaines de morceaux de ce verre éparpillés par
terre n’a pas besoin de tous ces morceaux : pour déduire la forme et la
position du verre initial, seuls quelques-uns suffisent. Inversement, la
physique statistique serait totalement incapable de calculer la forme et
la position de tous les morceaux épars !
Il en va de même pour une voiture accidentée : on peut reconstituer un
accident après qu’il ait eu lieu, bien plus facilement que le décrire
avant qu’il n’arrive, car la plupart des accidents font intervenir des fac­
teurs redondants humains, mécaniques, météorologiques et locaux
dont le faisceau de convergence au lieu et temps de l’accident est tota­
lement imprévisible.
Le lecteur familier au concept de l’entropie* remarquera que j ’ai pris
des exemples pour lesquels elle croît fortement. Il s’agit là d’une géné­
ralité, car dans le sens du temps, l’entropie est toujours croissante.
On voit donc que le sens du temps est bien plus enclin à toutes les
formes de dispersions, mélanges, dissolutions, dégradations que le
sens inverse, c ’est pourquoi le futur est aussi imprévisible. Le retour
dans le passé est au contraire favorable à la réunion des parties, au
point de la réaliser automatiquement selon une loi qualitative de
convergence que l’on pourrait énoncer ainsi :

- Tout ce qui conserve un lien malgré la distance converge ensemble


vers le passé pour former un système ordonné, ou encore, dans une
version épurée bien que plus imprécise :
-T out ce qui se ressemble s’assemble.
Cette loi qui fabrique de l ’ordre ne pourrait-elle pas servir de loi
d’« effet à cause » pour compléter la physique statistique dans le calcul
du passé? Encore faudrait-il bien étudier sa façon d’opérer pour la ren­
dre quantitative et en déduire comment formaliser cette loi.
Il faudrait déjà qu’elle conserve l’énergie, ce qui impliquerait que cette
énergie soit puisée dans l ’environnement par « aspiration », de
manière à ce que par exemple, une balle puisse rebondir de plus en
plus haut afin de revenir dans les mains de son lanceur. On n’a jamais
vu cela, mais rien dans ce processus d’aspiration par « convergence
des parties » ne contredirait les lois réversibles de la mécanique, sauf
une probabilité infiniment faible que cela arrive sans imposer les
conditions initiales.
Inversement, les physiciens sont déjà bien en peine d’imposer une
condition finale particulière en présence de phénomènes dispersifs,
qu’ils soient chaotiques ou turbulents: le problème existe donc dans
les deux sens du temps. Même s’ils sont certains de la possibilité d’une
issue parmi tant d’autres, ils ne savent pas en déduire le chemin d’évo­
lution qui mène à cette issue. En exagérant le trait, ce serait comme
vouloir préciser à un modèle de calcul, si l’on préfère que l’effet du vol
d’un papillon* en Australie soit de provoquer une tempête dans les
Caraïbes plutôt qu’en Méditerranée !
Ou encore, ce serait comme préciser à l’« auteur » de notre scénario de
randonnée, s’il préfère nous retrouver coincés au milieu d’une falaise à
attendre un hélicoptère, plutôt que de nous voir réussir à atteindre le
sommet par une voie insoupçonnable.

Car finalement, après un festin improvisé autour de notre dalle à


ammonites, Patrick et moi avions vite déniché une nouvelle voie pour
grimper en haut de la falaise, en suivant une seconde faille qui en deux
temps et trois mouvements nous emmena au col de l'Ange, à partir
duquel nous pouvions aisément gravir jusqu'au sommet, la « chance »
semblait nous sourire en même temps que le retour du soleil. Patrick
s’étonna de ce retournement de situation:
- Je n’en reviens pas. Cette descente où nous nous sommes guidés l’un
et l’autre nous a sacrément porté chance. Je n’aurais jamais cru qu’on
puisse s’en sortir aussi bien !
- C ’est toi qui as pris la bonne décision, celle de descendre.
- Mais non, c’est toi qui as décidé de m’aider à descendre.
- Dans ce cas, tu veux que je te dise : nous étions en face d’une « bifur­
cation », et c ’est notre futur qui nous a emmenés vers lui. Nous, on
s’est contenté de constater les deux possibilités avec suffisamment de
détachement. Nous étions ainsi prêts à choisir spontanément celle qui
nous dirigerait vers ce futur.
- Ah, ah, ah... Ca ne m’étonne pas de toi, Philippe, mais non, allons !
On a eu un coup de chance c ’est tout, et c ’est par hasard qu’on est
finalement tombé sur cette dalle...
Par hasard? La physique statistique s’est elle-même imposée comme
une loi empirique faisant usage du hasard pour prévoir le futur, mais
elle est totalement mise en échec dès que nous voulons contraindre ce
futur à prendre certains états, et je dirais même plus: des états « créa­
tifs » et tout à fait possibles.
- Ton hasard, à mon avis, il ne nous aurait même pas permis de trouver
la première faille et on se serait égarés en bas de la falaise..., répondis-
je à Patrick.

En physique, savoir répertorier et calculer les différentes solutions pos­


sibles pour un système dispersif au point d’être indéterministe, quitte à
ne leur affecter que des probabilités, correspond bien à un réel besoin.
Or aujourd’hui, on sait difficilement calculer les multiples évolutions
potentielles d’un tel système. En s’intéressant uniquement aux évolu­
tions stables ou à l’équilibre, on commence toutefois à le faire dans
mon laboratoire et c’est un sujet de recherche que je partage avec cer­
tains collègues professeurs à l’université de Provence.
Par exemple, lorsque nous provoquons une circulation de fluide dans
un tube ou dans un bassin par des effets thermiques, nous obtenons
différentes structures comme des volutes ovales ou des cellules hexa­
gonales, qui peuvent devenir instables pour des réglages bien précis de
certains paramètres. Nous faisons alors des simulations numériques à
l’aide de programmes de calcul qui permettent de retrouver exacte­
ment ces structures. On s’aperçoit alors que dans les conditions d’in­
stabilité, les structures que l’on calcule peuvent parfois être très diffé­
rentes sans pour autant rien changer aux conditions numériques ini­
tiales, même en travaillant avec la plus grande précision informatique
possible. Tout dépend de si l’on est parti prendre un café entre-temps,
ou de l’ordinateur qu’on utilise...
Pour comprendre cette variabilité afin de savoir s’il s’agit d’indétermi­
nisme ou si l’on est en présence de variables cachées, on serait bien en
peine de partir de notre état final pour retrouver nos conditions initiales
afin de les discriminer, car l’état est stabilisé et a dissipé l’information
initiale. Même si on le mémorisait encore en état de déséquilibre, les
calculs ne permettraient pas de retrouver les conditions initiales, parce
qu’on ne sait pas réaliser le processus inverse de la dissipation d’éner­
gie-information. Pour réaliser ce processus, il faudrait pouvoir syn­
chroniser toutes les trajectoires correspondant à cette dissipation, y
compris la dispersion radiative de photons, avec une information dont
on ne dispose pas.
Il nous faudrait aussi pour cela disposer d’une Loi de Convergence des
Parties* qui utiliserait cette information permettant de faire converger
ensemble, tout en les synchronisant, toutes ces trajectoires vers un
passé prédéterminé. Cette information devrait logiquement provenir
des conditions initiales, voire de toute autre trace du passé, lequel
« aspirerait » tout ce qu’il a dispersé. Malgré tout, cette loi devrait être
intrinsèquement déterministe par son principe même de reconstitution
d’un ordre synchrone.
Mais il s’agit là d’une loi hypothétique manquante, et nous ne pouvons
en espérer ici qu’une description qualitative, à défaut de connaître ses
équations.
Voyons si nous ne pouvons pas essayer de comprendre qualitativement
le processus de reconstitution déterministe de cette loi. Et remarquons
déjà que c’est beaucoup plus facile à faire vers le passé que dans le
sens du temps !
Il est en effet beaucoup plus facile de prévoir le passé de la nature à
partir d’une connaissance de son présent, que l’inverse. Notamment à
l’échelle des temps géologiques : les géologues connaissent assez pré­
cisément les événements qui se sont produits sur terre il y a des cen­
taines de millions d ’années, et savent précisément les dater, par la sim­
ple observation et analyse des couches géologiques que l ’on peut
observer dans le présent, et ceci bien que des plissements montagneux
extrêmement complexes aient pu avoir lieu. Alors qu’à l’inverse, il est
totalement impossible à un géologue de prévoir le relief qu’auront nos
paysages actuels dans plusieurs centaines de millions d ’années, sauf à
procéder à des simplifications irréalistes.
Notons que cette conclusion n ’est connue que depuis peu, le temps
pour les scientifiques de comprendre que des comportements chao­
tiques pouvaient affecter même les systèmes apparemment les plus
prévisibles, tels que notre système solaire, et que nous devions donc
réviser toutes nos simulations dans le sens du temps. Et je ne parle pas
du Big-Bang*, de l’origine de notre univers, que les physiciens savent
aujourd’hui décrire avec des détails quantitatifs époustouflants [28],
alors que nous sommes toujours aussi incapables de savoir ce qui
pourrait nous arriver dans un délai mille fois plus court : fin de notre
soleil? Fin de notre planète? Ou plus simplement, fin de notre civilisa­
tion ? Et si oui, quand et comment ?
Il est en fait bien plus facile de prédire l’origine de notre univers en fai­
sant converger les informations q u ’on a sur le passé, et au stade
ultime: de même que toutes les eaux s’écoulent vers la mer, on sait
que toutes les étoiles de notre univers proviennent à l’origine d ’une
« soupe primordiale » qui, en s’amenuisant sans cesse vers le passé,
constitue un ensemble de matière de plus en plus en surpression qui
rejoint l’état de l’univers hyper homogène du Big Bang. Et il ne nous
viendrait pas à l ’idée d ’oublier une étoile ou une galaxie dans la
reconstitution du Big Bang, étant implicite que tous les éléments de
l’univers doivent s’y retrouver.
Le retour dans le passé vers ce Big Bang homogène n ’est-il pas la
meilleure illustration que l’on puisse trouver d ’une Loi de Conver­
gence des Parties à l’œuvre dans l’univers?
Q u’en est-il maintenant de cette loi lorsqu’on y implique un être
humain? Nous pouvons vérifier que là aussi, par la simple connais­
sance du présent, il est bien plus facile de prévoir l’évolution à rebours
d’une personne que son évolution normale, lorsqu’on inverse le temps.
Lorsqu’on inverse en effet le « sens de la vie », on s’aperçoit que l’on
n’observe pas du tout la même incertitude d’« avenir » pour un indi­
vidu, en « déroulant » son temps de vie du futur vers le passé. Pour
s’en convaincre, il suffit de consulter une personne à l’état adulte et en
bonne santé, pour avoir tout d’abord une idée de sa durée de vie res­
tante avant de retourner au berceau : tout simplement, son âge actuel !
Et pour ensuite n ’avoir absolument aucun doute que pendant toute
cette durée, elle vivra une vie sans accident majeur jusqu’au moment
où elle retournera à l’état embryonnaire dans le ventre de sa mère avec,
en complément, la possibilité de connaître d’avance qui sera cette
mère et une infinité d’autres détails. C ’est encore plus clair qu’avec de
la matière non organique, car il est impossible de disperser dans le
passé la matière d’un être vivant sans prendre le risque de ne pouvoir
le reconstituer ensuite dans toute son intégrité vers le futur, réversibi­
lité oblige. Et l’on voit donc mal comment proposer des versions alter­
natives au stade ultime de l’état embryonnaire et de l’ADN.
N’a-t-on pas là aussi, la meilleure illustration d’un ordonnancement
synchrone qui agit dans le sens inverse du temps de façon à ranger très
précisément sous forme de brins d’ADN toute l’information qui une
fois déroulée permet de fabriquer un être humain ?
On s’aperçoit ainsi que l’une des caractéristiques fondamentales du
déroulement du temps dans le sens inverse, c’est-à-dire vers le passé,
est de créer un ordre qui rassemble de façon minutieusement synchro­
nisée tout ce qui permet de fabriquer la vie.
Nous verrons dans la dernière partie de cet ouvrage que la Loi de
Convergence des Parties qui permet de créer cet ordre synchrone n’est
rien d’autre qu’une loi d’attraction des lignes temporelles ou, si l’on
considère notre destin, de nos « trajectoires de vies », qui n’est pas
sans lien avec la gravitation universelle. N ’oublions pas que le passé et
le futur sont omniprésents et simultanés, mais il est encore trop tôt
pour développer ce point.
Pour l’instant, nous avons déjà identifié la raison pour laquelle il y a
une flèche du temps qui rend le fait de « vivre en direction du passé »
très différent de « vivre en direction du futur », malgré la réversibilité
du temps de la physique : c ’est parce qu’aucune « trace de notre
futur » ne semble être laissée sur notre présent actuel, sans quoi nous
pourrions vivre avec une sorte de « mémoire de l’avenir » !
Pourtant, si l’on regarde bien, on réalisera peu à peu que notre avenir
laisse bien plus de « traces du futur » sur notre présent que nous pou­
vons l’imaginer, le problème étant que n’avons pas l’habitude de les
considérer comme telles. Nous découvrirons bientôt des manifesta­
tions subtiles de ces traces, mais on peut d’ores et déjà se poser la
question de savoir si certains indices n’en seraient pas : il suffit de
regarder s’exprimer les talents innés d’un enfant en bas âge, de le voir
parler, jouer ou s’amuser, pour avoir une idée assez précise de ce qui le
distinguera des autres dans le futur. La question étant alors : une voca­
tion évidente, un talent inné, doivent-ils être considérés comme des
traces d’une vie future particulièrement créative?
Notre réponse sera non, à moins que nous n’acceptions qu’une même
trace puisse être à la fois une trace du futur et une trace du passé, ce
que nous ne ferons pas. On considérera donc cette vocation du nou­
veau né comme l’héritage d ’une heureuse combinaison génétique.
Nous remarquons ainsi que la réversibilité du temps nous empêche de
détecter aisément des traces du futur exclusives : celles qui nous inté­
ressent !
Nous avons donc déjà collecté au moins deux raisons qui expliquent
que les traces du futur soient si difficiles à trouver. La première est
l’indéterminisme du futur, en total contraste avec le déterminisme du
passé, et la seconde est le fait que nous excluons des traces du futur
celles qui sont aussi des traces du passé !
Il n’est donc pas étonnant que notre mémoire du futur soit aussi pau­
vre, tant elle est encombrée d’explications causales !
Mais ce n’est pas tout: rajoutons à cela notre supposé libre arbitre, et
nous avons maintenant trois explications de la raison pour laquelle
nous avons si peu de « mémoire du futur », la troisième étant que si
nous avions une telle mémoire nous serions susceptibles de la modifier
par libre arbitre, et cela se produirait en particulier si elle contient des
souffrances à venir (et ceci même si après les avoir vécues, nous ne les
regrettions pas).
Pour espérer trouver des traces de notre futur, il nous faudrait donc les
rechercher parmi des futurs que nous n’avons pas l’intention de modi­
fier, et qui ne seraient pas causés par notre passé ! Il faudrait donc
absolument que notre libre arbitre entre en jeu, sans quoi ces traces du
futur n ’en seraient pas, puisqu’elles s’expliqueraient par le passé,
c’est-à-dire par voie causale. Il faudrait donc que nous puissions libre­
ment modifier ce futur, mais sans pour autant le faire ! Mais à quoi ser­
virait la liberté, s’il s’agit d’accepter notre destin? Quadrature du cer­
cle ou casse-tête de sage bouddhiste ou cartésien ? Je ne saurais mieux
dire que j ’y vois là une raison pour laquelle l’existence de ces traces
reste pour le moins douteuse.
L’absence de traces de notre futur ne serait-elle donc pas finalement
qu’un reflet de notre absence de libre arbitre? La question mérite
d’être posée.
Quoi qu’il en soit, en cas d’authenticité de notre libre arbitre, alors
nous devons rechercher des traces de notre futur là où notre libre arbi­
tre est justement susceptible d’agir sur de telles traces, si ce n’est de les
créer ! Or de quoi notre libre arbitre a-t-il besoin pour agir, si ce n’est
de nos intentions ? Quoi que l’on fasse librement, tout cela est en effet
prédéterminé par nos intentions.
Mais n’allons pas trop vite et revenons sur la Route du Temps pour y
voir plus clair, car on peut raccourcir toute cette analyse en une méta­
phore : il est beaucoup plus facile de redescendre des montagnes pour
retrouver inexorablement la route principale même si nous empruntons
des sentiers différents, plutôt que de nous diriger vers une destination
totalement inconnue d’avance, dont nous n’avons aucune trace: dans
le premier cas nous sommes conditionnés par la descente, dans le
second cas nous sommes libres.
De nombreuses questions se posent alors: Qu’est-ce donc que cette
liberté ? Est-ce une quête ? Si cette quête se résume à celle de Theopo-
lis, ne pourrait-on pas en trouver des traces? Comment reconnaître de
telles traces ? Comment détecter sur la Route du Temps ces traces du
futur que nous avons librement choisi? Ne faudrait-il pas déjà avoir
une meilleure idée d’un tel futur, c ’est-à-dire une intention claire?
Armés d’une telle intention dont nous suspectons qu’elle va créer des
traces, de quoi avons-nous besoin pour les trouver? Comment finale­
ment apprendre à discerner ces traces du futur qui nous concernent,
maintenant que nous sommes plus que jamais décidés à nous libérer de
nos conditionnements et à développer notre libre arbitre ?
Sur la Route du Temps, il est évident que nos choix se font au moment
d’une bifurcation, encore faut-il en détecter la présence, car il y a des
sentiers partout, jusqu’aux plus minuscules. L’observation aurait donc
un rôle important à jouer, aussi important que l’intention, car en l’ab­
sence d’observation nous ne prendrions même pas conscience d’une
bifurcation potentielle qui s’offre à nous, et nous resterions donc dans
un scénario déterministe.
Mais si nous observions une trace de notre futur nous suggérant de sui­
vre une autre voie, sur quelle information allons-nous nous baser pour
faire le choix de bifurquer? Et comment être certain de conserver un
total libre arbitre dans ce choix? Quoi qu’il en soit, le rôle de notre
capacité d’observation, de notre attention, serait déterminant: Intention
et observation seraient les deux ailes de notre libre arbitre !
Faisons un petit détour en physique moderne pour savoir ce qu’on dit
de l’observation: il est tentant de rapprocher l’importance du rôle de
l’observateur dans l ’exercice de son libre arbitre, à celle du rôle de
l’observateur* en mécanique quantique. Car l’une des avancées les
plus récentes de la physique quantique nous fournit des informations
assez précises concernant ce rôle privilégié.
Il s’agit de la Théorie de la Décohérence. Le concept de décohérence
décrit comment la coexistence simultanée de plusieurs « branches de
vie » potentielles parvient à se maintenir avant d’atteindre le stade
ultime de l’observation, par un processus savant de « décorrélation ».
Il s’agit en réalité de trajectoires de particules, mais les physiciens eux-
mêmes ne s’interdisent pas ce genre d’extrapolation.
La décohérence nous explique le mécanisme d’entrée dans la réalité
d’une observation unique parmi tout un ensemble de possibles. Bien
qu’il ne s’agisse que de « branches microscopiques », elle mérite
d’être examinée parce qu’elle conduit à l’émergence d’une seule ver­
sion de la réalité « parmi tant d’autres en préparation ». Le processus
d’observation ultime qui permet ainsi d’accueillir dans notre réalité
une « branche de vie potentielle » (d’une particule) fait cependant,
dans l’état actuel de nos connaissances, faute de mieux, intervenir un
choix attribué au hasard. Ne pourrait-on pas l’attribuer au futur?
Sachant qu’il est raisonnable de douter du choix par hasard, qui répu­
diait déjà Einstein qui refusait de croire que Dieu joue aux dés, qu’un
tel hasard est une source de vide existentiel niant notre libre arbitre et
correspondant mal à la conception que l’être humain peut avoir de son
rôle dans l’univers, on peut raisonnablement convenir du fait que le
processus d’entrée dans notre réalité de l’un de nos futurs potentiels
reste aujourd’hui un phénomène mal compris dans l’état actuel de nos
connaissances scientifiques. Ne serait-ce pas parce qu’on attribue ce
choix au présent?
Nous développerons plus avant cette question liée aux traces du futur,
en fournissant une interprétation du phénomène quantique de la déco­
hérence, enfin favorable à notre libre arbitre. Mais pour l’instant, forts
de l’idée que notre libre arbitre existe, qu’il dépend du déploiement de
ces deux ailes que sont l’intention et l’observation, et que la Loi de
Convergence des Parties est susceptible de présenter à notre observa­
tion des traces de notre futur, nous allons examiner comment le pro­
cessus d ’observation, rendu mystérieux par la science elle-même,
pourrait fissurer le temps en deux parties :
- un temps pour vivre notre destin déjà tracé,
- un temps pour changer notre destin.

Résumé du chapitre III

Pour mettre en œuvre le déterminisme inversé nous avons besoin


d’une loi manquante qui serait créatrice d’un ordre synchrone et que
nous qualifions provisoirement de « Loi de Convergence des Parties ».
Cette loi est réversible et consiste à calculer le passé ou le futur à partir
de leurs traces respectives. Lorsqu’elle est utilisée en l’absence de
traces, elle redevient la physique statistique, qui utilise le hasard pour
combler un indéterminisme dû à cette absence de traces.
II ne peut exister d’autres traces de notre futur que celles qui reflètent
notre libre arbitre. Pour produire de telles traces, nous sommes inévita­
blement confrontés à l’authenticité de nos intentions.
Pour les détecter, notre capacité d ’observation est fondamentale, car
c ’est elle qui nous fait découvrir chaque bifurcation possible dans
notre cheminement sur l’Arbre de Vie.
Or cette importance fondamentale de l’acte d ’observation dans la
manifestation d ’une réalité unique est aussi un résultat de la physique
moderne.
IV.
Fissure du temps
Où l’on découvre, en recherchant les caractéristiques que devraient
révéler à notre observation les traces du futur, une première
fissure du temps.

Au détour d’un sentier chaotique de la réserve géologique, mon atten­


tion fut un jour captée par un chevreuil qui m’évita de justesse, en croi­
sant mes pas à toute allure vers une barre rocheuse donnant sur le vide
et ne lui fournissant aucune issue. Cela faisait une bonne heure que je
suivais ce sentier mal tracé sans parvenir à descendre de cette intermi­
nable barre qu’il longeait. Plus le temps passait et plus je m’éloignai de
mon objectif, qui était de gravir le sommet situé en face. Je décidai
alors de me faufiler dans les traces de l’animal, après avoir réussi à le
prendre en photo juste avant qu’il ne disparaisse, et tombai rapidement
sur une faille inespérée. Peut-être avais-je encore le temps de réaliser
mon objectif? Je constatai que non, car cette faille était encombrée
d’épineux réduisant fortement ma vision et mon rythme de descente, et
je me demandai même si j ’allais pouvoir rentrer avant la nuit. Je par­
venais laborieusement à mi-descente quand un envol de perdreaux
détourna mon regard. Soudain, l’espace d’une seconde, j ’aperçus mon
chevreuil sur un éboulis, juste avant qu’il ne disparaisse derrière un
talus. J’eus alors l’intuition que j ’avais emprunté une mauvaise piste et
que c ’était derrière ce talus que devait se trouver le chemin que je
recherchai depuis presque une heure. Je ne saurais dire pourquoi, mais
bien que cette sensation ne me paraisse pas rationnellement fondée, je
décidai d’en tenir compte et de rebrousser chemin. Après avoir péni­
blement réussi à trouver comment sortir de cette faille par une issue à
peine discernable, je ne tardai pas à vérifier, en réussissant à rejoindre
l’éboulis, que j ’avais bien fait de me fier au chevreuil : vu d’en bas, ma
descente initiale aurait été interrompue par une nouvelle falaise infran­
chissable, qu’il aurait fallu longer à nouveau pendant longtemps avant
de pouvoir continuer ma descente. Et la nuit serait tombée avant que je
ne trouve le bon chemin !
Ce n’est que beaucoup plus tard, des mois plus tard, en me souvenant
de cette balade où j ’avais failli me perdre à la tombée de la nuit, que je
compris que mon intuition avait été fondée par l’envol des perdreaux !
Je n’aurais pas attaché d’importance à cette coïncidence* entre les per­
dreaux et ma vision fugitive du chevreuil, si je n ’étais pas à ce
moment-là occupé à cogiter l’idée que les coïncidences pourraient
peut-être s’expliquer en vertu de la Loi de Convergence des Parties. Je
suspectais ainsi qu’elles étaient des traces du futur, et je me demandais
si nos intuitions, en général, ne relèveraient pas de la détection presque
inconsciente, ultérieure à une ou plusieurs observations, de ces traces
du futur.
Faisons un point sur cette Loi avant d’étudier comment elle se com­
porte face au hasard. Afin de représenter notre vie de façon imagée de
façon à préserver notre libre arbitre, nous avons introduit le modèle de
l’Arbre de Vie. Ceci nous a amenés à remettre en question le sens du
déterminisme classique, celui-là même qui veut nous faire croire que
nous aurions un destin inébranlable.
Cette inversion a eu deux aspects intéressants :
1. solutionner l’incompatibilité entre le déterminisme et le libre arbitre
par inversion du premier,
2. suggérer l’existence d’une Loi de Convergence des Parties alterna­
tive à la Loi de Croissance de l’Entropie.
Proposer une telle alternative se justifiait déjà par l’insatisfaction de
nombreux physiciens devant l’interdiction d ’inverser la flèche du
temps contraire aux équations fondamentales de la physique, et par
l’incomplétude de la physique « statistique », qui à travers ce qualifica­
tif exprime une impuissance à trouver mieux que l’usage démesuré du
hasard et des probabilités pour prévoir le futur, même s’il s’agit, du
point de vue mathématique, d’une prouesse remarquable.
Ne serait-ce que pour sortir de cet usage démesuré du hasard dans les
calculs, qui est la source de la conclusion que l’entropie et donc le dés­
ordre ne peuvent que croître indéfiniment, il est intéressant d’étudier
comment notre loi alternative nous débarrasse enfin du hasard et de
telles croyances.
Mais tout d’abord, la Loi de Convergence des Parties pourrait-elle déjà
nous débarrasser du hasard de ma coïncidence entre chevreuil et per­
dreaux, en proposant une « cause future »? Que faire pour parvenir à
une telle explication? Imaginer l’avenir potentiel de ces animaux, ou
seulement l’effet que cette coïncidence a pu avoir sur mon propre
futur, sur mon Arbre de Vie ?
Une chose est sûre, sans ma présence il n’y aurait même pas eu de
coïncidence. Je suis donc clairement impliqué dans l’affaire. Considé­
rons donc mon propre futur: j ’ai pu échapper à l’épreuve de passer la
nuit dehors en pleine nature, sans lampe de poche ni vêtements chauds,
perdu dans la montagne à un endroit où, même de jour, il est déjà diffi­
cile de retrouver son chemin.
Mon Arbre de Vie n’avait-il aucun scénario de mémorisé dans lequel
j ’aurais pu tomber malade après avoir pris froid? Ou avait-il un autre
scénario obligatoire à m ’imposer à ce moment de ma vie? Reconnais­
sons que cela ne tient apparemment pas debout, et surtout que cela
n’explique pas mécaniquement pourquoi les perdreaux s’envolent au
moment même où le chevreuil va réapparaître fugitivement dans mon
champ de vision. En fait, l’explication semble toute simple et pure­
ment causale: les perdreaux s’envolent à cause de mon passage, et j ’ai
eu la chance d’arriver par hasard à leur niveau au moment même où le
chevreuil était encore visible : encore le hasard.
Mais cela ne tient pas, car justement c’est la faible probabilité de cette
chance que nous jugeons invraisemblable, et par ailleurs, il est raison­
nable de penser que je me trouvais en face d’une bifurcation dans ma
vie, c’est-à-dire en face de deux branches: choisir ou ne pas choisir de
me fier au chevreuil, car je pense que c ’est bien mon libre arbitre,
conscient ou pas, qui est responsable de ma décision contre toute
attente rationnelle de suivre ses traces.
Je me permets de ranger ainsi ce couple d’animaux dans la catégorie
de « trace du futur » suspecte, et en l’occurrence de mon propre futur,
sans pour autant expliquer cette trace pour le moment. Pour cela, d’au­
tres développements sont nécessaires.
Plus encore qu’avec les traces du passé, nous imaginons bien qu’une
incertitude assez grande puisse régner sur ces traces du futur que l’on
pourrait « glaner ». Elles peuvent être de natures très distinctes, qu’il
s’agisse de calculs sophistiqués ou de coïncidences, de consultation
d’oracles ou de tout ce que nous pourrions qualifier en général de
« signes du destin ».
Ce qui nous intéresse ici n’est pas de savoir si les traces que l’on sus­
pecte sont liées à des certitudes d’avenir mais d’apprendre à les distin­
guer de fausses traces, c’est-à-dire d’illusions, de projections et d’idio­
ties en tout genre.
Car même incertaines, de bonnes traces restent dignes d’intérêt.
La Loi de Convergence manquante nous fournit la piste suivante : en
appliquant ses mécanismes créateurs d’ordre synchrone vers le passé,
on vérifiera tout d’abord que les traces du futur devraient impliquer
l’observation d’un ensemble d’éléments bien plus ordonné dans son
état présent que dans son état futur, création d’ordre oblige. Mais il
nous faut exclure les ensembles pour lesquels cet ordre existerait déjà
ou serait encore plus ordonné dans le passé, comme c’est le cas par
exemple de n’importe quel système en train de se dégrader.
Une trace du futur ne peut donc se manifester sous la forme d’un ordre
synchrone que si cet ordre n’a pas d’explication causale, sans quoi cet
ordre ne serait qu’une trace d’un passé encore plus ordonné.
Peut-on de ce point de vue considérer mon couple d’animaux comme
une trace du futur?
Il y a effectivement une création d’ordre synchrone : la concordance
entre l’envol de perdreaux, la déviation de ma vision, l’apparition du
chevreuil et par-dessus le marché, l’intérêt pour moi que tout cela
arrive en même temps et de façon coordonnée. Le moindre retard, la
moindre absence de coordination feraient désordre en donnant l’im­
pression que j ’ai raté une chance qui m’était donnée d’échapper à une
nuit à la belle étoile et à la grosse bronchite qui s’en serait suivi.
D’une façon générale, toutes les coïncidences difficiles à mettre sur le
compte du hasard, c’est-à-dire toutes celles dont l’explication causale
est très improbable, peuvent alors être suspectées comme pouvant être
des traces du futur, la création d’ordre provenant de la simultanéité ou
de la proximité des éléments qui les composent. L’improbabilité inter­
vient ici comme une mesure de la perfection du synchronisme, qu’il
soit de nature temporelle (convergence au même instant) ou spatiale
(convergence au même lieu).
Il semble donc que ce qui caractérise cette improbabilité elle-même
soit avant tout le synchronisme. En ce qui concerne l’ordre, encore
faudrait-il déjà comprendre le sens de la coïncidence, si sens il y a.
Les coïncidences nous instruisent donc déjà sur un potentiel de la Loi
de Convergence des Parties qui serait susceptible de fournir une expli­
cation non causale à la création d’un synchronisme inexpliqué !
Il est pourtant facile de comprendre qu’en partant d’un futur où je dors
tranquillement le soir dans mon lit, pour redescendre dans un passé où
je suis perdu sur un mauvais chemin qui risque fort de me conduire à
passer la nuit dehors, il soit indispensable de faire converger un ensem­
ble d’éléments de l’environnement liés entre eux par leur capacité à
réunir les conditions synchrones pour que je me retrouve en haut de la
faille, à l’endroit où j ’avais pris ma photo du chevreuil.
La Loi de Convergence des Parties avait donc à reconstituer un passé
dont cette photo était une des traces, en trouvant le moyen de me faire
trouver cette issue quasi indiscernable sans laquelle je passais la nuit
dehors. Avez-vous déjà essayé de suivre un chevreuil? Impossible
qu’il ne disparaisse pas de mon champ de vision! Manifestement, la
Loi de Convergence n’avait pas grand choix pour me ramener en haut
de cette barre rocheuse, et elle a fait tout ce qu’elle pouvait en toute
cohérence avec le jeu d’aléas* de l’environnement.
Il apparaît donc que cette loi peut se prêter à un raisonnement causal
inverse, grâce à l’indéterminisme de la nature, et se positionner ainsi
en concurrente de la causalité, or ceci peut choquer certains esprits. A
ce stade nous ne proposons comme hypothèse que l’idée que la causa­
lité puisse, grâce à cet indéterminisme, être complémentée par des
mécanismes concurrents, apparemment non causaux. C’est tout sim­
plement la clé de la recherche de traces du futur. Il serait bon de s’habi­
tuer maintenant à l’idée d’une « logique non causale », à une causalité
inversée qui n’en reste pas moins parfaitement rationnelle.
Voyons maintenant comment toutes les traces suspectes du futur sont
habituellement traitées par la logique causale : dans le cadre du para­
digme actuel de notre conception du temps, on a tendance à considérer
comme infondées toutes ces traces suspectes, qu’elles relèvent de
signes, coïncidences, prédictions, voyances ou autres sortilèges.
Lorsqu’elles sont qualifiées de signes, c ’est sous la responsabilité
d’une intuition personnelle, dont l’usage est en quelque sorte toléré
mais pour le reste, la causalité ne tolère que les prédictions basées sur
des calculs déterministes.
L’intuition populaire elle-même, face à ces traces du futur souvent
qualifiées de « signes du destin », les considère rarement comme fia­
bles et les range dans la catégorie des prévisions douteuses ou des pro­
jections mentales, parfois maladives, avec ce faisant le risque de per­
dre des informations.
Ce refus de toute explication non causale est aussi ce qui dérange les
physiciens devant la réversibilité des équations de la physique, qui
constitue bel et bien un défi à la causalité. Il ne reste plus que le dogme
de l’irréversibilité pour nous interdire de rechercher des traces du futur.
Selon ce dogme, nous serions condamnés au désordre et à l’imprévisi­
bilité qui s’en suit, et nous baignerions dans un océan d ’incertitude.
Le gros problème de ce dogme est que les équations qui permettent de
l’établir fonctionnent dans les deux sens du temps ! Ce qui veut dire
que le passé devrait être lui aussi plus désordonné que le présent et que
le retour dans le passé devrait être de même irréversible.
Accepteriez-vous de la part d’un enquêteur officiel à la recherche de
traces du passé, dans le cadre d’une procédure de justice par exemple,
qu’il ne puisse systématiquement jamais vous offrir la moindre certi­
tude sur ses conclusions, sous prétexte qu’elles seraient toujours sus­
ceptibles de changer, par exemple au fur et à mesure où les traces dis­
paraîtraient ? Non, parce que vous estimeriez que dans la majorité des
cas, l’acquisition d’une certitude est le propre du métier d’enquêteur.
Dans le sens inverse, croyez-vous que votre avenir pourrait ne jamais
être déterminé, même lorsque votre ferme volonté vous permet juste­
ment de l’assurer? N’est-ce pas être trop pessimiste que d’accepter une
loi d’entropie croissante qui nous retirerait par principe toute possibi­
lité de confiance dans la vie, nous maintenant en permanence dans la
peur que tout puisse aller de travers à tout moment ?
La logique causale, tout en sombrant devant le dogme de la flèche du
temps, nous renvoie ainsi en face des avatars de l’irréversibilité, de
l’imprévisibilité et de la dispersion, autant dire le vide existentiel à
l’état pur.
Avec une Loi de Convergence des Parties qu’il reste encore à formali­
ser, nous sommes au contraire en droit d’espérer être enfin débarrassé
d’incertitudes excessives puisque, à l’opposé d’une évolution vers le
passé indépendante de notre volonté car déterministe, l’évolution qui
nous dirige vers notre futur semble nous confronter à de véritables
choix.
Encore faut-il savoir exercer ces choix et maintenir les intentions qui
leur sont liées.
On voit que la première source de certitude concernant les traces que
l’on peut espérer rencontrer de notre propre futur, d’après notre Arbre
de Vie, va nécessairement mettre en jeu nos intentions, donc notre pro­
pre intégrité ou authenticité en tant que capacité à ne pas nous mentir à
nous-mêmes. Si nous voulons observer des traces de notre propre
futur, la moindre des choses est donc d’examiner sérieusement nos
intentions, ne serait-ce que pour ne pas nous exposer à des traces
contradictoires.
Cette condition d’authenticité de nos intentions nous confronte à une
contradiction: pour qu’elles soient fiables, il est préférable qu’elles
soient accompagnées des moyens de les réaliser.
Mais si tel est le cas, cette réalisation finit par s’inscrire dans le cadre
de la causalité, et aucune trace du futur de cette réalisation n’est donc
plus à espérer ! Voilà bien un sacré dilemme !
Cela expliquerait pourquoi nous n’observons pas, ou si peu, les traces
de notre futur, tout simplement parce qu’en imaginant les moyens que
nous pourrions utiliser pour réaliser notre objectif, nous inscrivons nos
futures actions potentielles dans une stratégie causale, l’un de ces
moyens devenant ainsi la cause de notre futur. Et ceci annihile donc
toute possibilité pour que ce futur dérive d’autre chose que de ces
moyens, rendant ainsi impossible l’apparition de traces non causales !
Une troisième condition devrait donc être ajoutée à notre recherche de
traces de notre futur: nous devrions être déterminés, mais ne pas
encore savoir comment réaliser nos intentions !
Il y a donc un conflit potentiel entre les deux types opposés de traces
que nous pouvons suivre pour réaliser nos intentions, sachant que les
moyens que nous nous donnons représentent des traces causales, c’est-
à-dire des traces du passé. Parmi les deux « déterminismes » qui leur
sont associés, posons-nous donc maintenant la question de savoir quel
est le plus réaliste !
Alors que la croissance de l’entropie entraîne dispersion et imprévisi­
bilité, la Loi de Convergence des Parties nous parle de rangement et de
rassemblement de tout ce qui se ressemble ! Quelle assemblée préfére­
riez-vous élire pour décider comment l’univers doit se comporter?
Celle qui prône le désordre et la dispersion, ou celle qui fait tout pour
rétablir le bon ordre des choses ?
Même la fin d’une vie, qui dans le sens inverse du temps correspond à
une naissance, n’a rien à voir avec le drame de la mort. Il s’agit d’une
« décroissance » de l’individu accompagnée d’une réorganisation
génétique de toute l’information qui le caractérise, c’est-à-dire une
transformation qui ne perd rien du tout. Ne serait-ce pas la meilleure
façon de mourir ?
La différence entre une loi qui consiste à augmenter le désordre, sans
proposer de calculs prévisionnels autres que statistiques et limités dans
le temps, et une loi qui consiste à augmenter l’ordre, mais dont nous ne
connaissons pas encore les règles de calcul, est semblable à la diffé­
rence que nous ferions entre deux amis, le premier vous demandant de
le suivre tout en déclarant qu’il ne sait pas où il va, car son itinéraire
relève du hasard, et le second déclarant qu’il va au même endroit que
vous car l’union fait la force !
Auquel des deux feriez-vous le plus confiance ?
Léo Rosten écrivait: « Si l’on ne sait pas où nous mène un chemin,
alors on peut être sûr qu’il nous y mènera ».
La question qui s’en suit: « Mais où? » est ici caduque, la réponse
étant « Où l’on veut qu’il nous mène », sachant que cet endroit doit
tout d’abord émerger dans notre intention, auquel cas il vaut mieux se
faire accompagner par le second partenaire avec lequel nous sommes
toujours en accord que par le premier. Car dans le cas contraire, cela
équivaudrait à déléguer la réalisation de nos intentions à celui qui se
laisse porter par le hasard.
Cependant, en remettant excessivement en question la causalité, n’y a-
t-il pas un risque que notre comportement s’en ressente de manière
aussi absurde que d’agir au hasard?
Effectivement, car le déterminisme inversé ne remet pas du tout en
question la causalité, il ne fait que la compléter. Compte tenu de la
réversibilité du temps, le déterminisme classique qui opère dans le
sens du temps et qui équivaut à la causalité reste partiellement valable.
Ce n’est que lorsqu’il est lui-même excessif qu’il nous conduit à lutter
contre la croyance que le temps favorise le désordre et engendre le
chaos et l’imprévisibilité. C’est en tout cas le credo actuel de la majo­
rité des scientifiques, devant l’absence de loi d’information leur expli­
quant les choix que l’univers va effectuer à moyen ou long terme, ces
choix étant incalculables.
Cette imprévisibilité du futur leur fait invoquer un hasard qui suppose
que l’univers comble cette incertitude par des choix aléatoires : le
choix que fait une tornade de passer par tel endroit, un rocher de se
détacher d’une falaise à tel moment, un dé de retomber sur telle face,
etc. Il ne s’agit pas pour eux de choix relevant d’une quelconque inten­
tionnalité, mais relevant du hasard le plus pur. Certains invoquent
Dieu, d’autres le déterminisme. On reste dans l’étemel débat entre Ein­
stein et Bohr qui lui répondait: « Einstein, cessez de dire à Dieu ce
qu’il doit faire ! ».
Pour sortir de ce débat et placer ces « choix de l’univers » sous la
dépendance de nos intentions, encore faudrait-il que nous ayons la
capacité d’agir sur les processus qui arrivent par hasard. Ce n’est visi­
blement pas le cas, sauf peut-être de façon excessivement faible, si
l ’on veut bien se fier aux résultats de nombreuses expériences de
parapsychologie [2] [25] et notamment de psychokinèse avec des
générateurs de nombres aléatoires. J ’éviterai cependant cette hypo­
thèse d’une éventuelle influence « psi » sur la matière dans ce livre,
pour la simple raison que cette notion d’« influence » inscrit a priori
son mécanisme hypothétique dans le cadre de la causalité. Par ailleurs,
nous n’aurons pas besoin de l’invoquer.
11 n’est donc pas question ici d’action sur le hasard, mais une petite
subtilité se dégage malgré tout de cette idée, comme une première fis­
sure du temps : sans pour autant influer sur le hasard, si nous pouvions
mettre nos propres choix sous la dépendance du résultat du hasard,
alors notre vie pourrait hériter de son indéterminisme, et notre Arbre
de Vie en serait automatiquement rendu plus diversifié!
Est-ce bien raisonnable? Évidemment non, car cela reviendrait à agir
de façon totalement incohérente et désordonnée. Quelle idée farfelue !
Je dois cependant signaler que cette attitude, farfelue ou pas, aurait
l’avantage de produire d’éventuelles traces de notre futur, mais alors
quelles traces ! Des traces de notre folie? Absolument, celles d’un futur
absolument incontrôlé du fait que nous aurions délégué notre libre
arbitre au hasard le plus pur !
Par exemple, si par souci d’économie et confiance excessive dans le
hasard je décidais avant chaque congé de jouer aux dés, sur un chiffre
pair, ma décision de partir ou non en vacances, alors le résultat non
causal du jet de dé serait nécessairement une trace de mon futur, à
défaut de pouvoir l’être du passé; car on ne pourra prévoir ce résultat
indéterministe qu’en connaissant mon futur. Or il resterait inconnu.
D ’après notre Théorie du Temps, un tel comportement d’évidence
absurde, qui relève du hasard le plus pur (indéterministe), ne peut être
déterminé que par le futur. Il relève donc uniquement de la Loi de
Convergence des Parties.
Le fait d’agir conformément à des « indices » dictés par le hasard
reviendrait donc bien à suivre des traces de notre futur, mais d’un futur
qui serait non identifiable, aucun sens ne pouvant plus être attribué aux
coïncidences qui pourraient en émerger !
Dans ce cas cela n’a absolument aucun intérêt et c’est au sens propre
insensé. Nous observons là le réel danger qui guette la personne qui
souhaiterait se fier à de telles traces !
Que l’on s’en serve ou non, le hasard semblerait donc être à plus d’un
titre impliqué dans notre quête de traces du futur, mais il nous manque
manifestement les clés nous permettant d’en prendre éventuellement le
contrôle.
Compte tenu de l’ordre induit par la Loi de Convergence des Parties,
cet ordre ne pourrait-il pas justement nous fournir de telles clés ? Pour
l’instant, nous avons déjà accumulé les indices suivants :
création d’ordre synchrone non causal,
intervention du hasard indéterministe,
intentions exprimées, sans savoir comment les réaliser.
Mais nous ne savons pas encore nous servir de ces indices parce que
nous n’avons encore aucune idée du mécanisme qui les met enjeu. Ce
mécanisme fait l’objet d ’une logique non causale dont nous avons
découvert l’existence, mais que nous ne maîtrisons pas encore.
Il révèle cependant, en l’état, une première fissure du temps: celle qui
permet à notre libre arbitre d’exister réellement, c’est-à-dire de modi­
fier notre avenir déjà tracé pour en tracer un nouveau, hors de tout
conditionnement causal, et même si pour l’instant, c’est sans aucun
contrôle.

Résumé du chapitre IV

Une première recherche des traces du futur nous a conduits à les carac­
tériser par l’observation d’un ordre synchrone non causal, comme
celui qui caractérise une coïncidence survenant tout à fait par hasard.
Une seconde recherche des traces du futur, consistant à éliminer toute
explication causale qui les confondrait à des traces du passé, nous a
suggéré un comportement du libre arbitre consistant à :
éviter tout projet visant à réaliser ses intentions,
faire reposer ses choix sur le hasard, par exemple en jouant aux dés.
Nous en avons conclu que bien qu’il s’agisse d’un comportement le
plus souvent absurde, il est susceptible de générer de véritables traces
du futur.
V.
La logique non causale
Où l ’on constate avec étonnement que pour générer des hasards
favorables, la Loi de Convergence des Parties n ’a que faire
de leurs infimes probabilités.

- Oh Philippe ! Pourquoi tu ne m ’as pas dit que tu voulais aller sur la


montagne de Jouere ! Je t’aurais accompagné ! Il n’y a pas de sentiers
là-bas, seulement des traces d’animaux ! Tu es fou, Luce m ’a raconté
que tu as failli passer la nuit dehors sans équipement. Ah ! Tu es vrai­
ment un bleu. Alors à quoi on sert nous? Mais comment tu as fait?
- OK Jo, ça va, il n’y a pas de mal, tu sais je m’en sors toujours, j ’ai de
la chance, sinon je ne me serais pas aventuré. Après tout, il ne m ’est
encore jamais rien arrivé dans la nature, alors que j ’ai eu plein de
pannes sur l’autoroute par exemple. Franchement, j ’en ai assez et s’il
fallait choisir, je préférerais être pris au piège dans la nature, ça serait
plus sympathique, tu ne crois pas ?
- Tu es fou ! Tu ne te rends pas compte. Si tu savais, moi, tous les
risques que j ’ai pris dans ma jeunesse, et surtout à la chasse ! J ’ai failli
perdre la vie, tomber dans des gouffres, tiens je vais te raconter, laisse-
moi me souvenir... c’était il y a quinze ans, avec mon beau-frère...
... Et Jo commençait à me raconter ses vies antérieures. A chaque fois,
les issues de ses histoires ne tenaient qu’à un fil, comme mon histoire
toute récente. En fait il avait vécu bien plus de hasards favorables que
moi, mais jamais il n’invoquait le hasard. C’était toujours soit l’intui­
tion, soit l’instinct, soit la chance, soit l’adresse et quand ça allait mal,
c’était parce que quelque chose avait mal tourné, que quelqu’un avait
mal agi, comme s’il fallait qu’en temps normal, aucune erreur ne soit
faite et que les choses fonctionnent toutes seules, comme par enchante­
ment! Comme si les gens étaient fautifs, responsables, incompétents,
dès que la magie de la vie n’opérait pas !
Jo et Luce avaient tellement envie de distribuer cet amour débordant
qu’ils avaient de la vie que, dans un sens, il n’était pas étonnant qu’ils
trouvent normal que tout fonctionne tout seul, comme si cet amour
devait agir comme de l’huile dans un moteur. Mais ils ne pouvaient
pas huiler tout ce qui bougeait, et c’était ça le drame de leur vie...

Et c’est d’ailleurs, d’une façon générale, le drame de toutes les per­


sonnes aimantes et de bonne volonté, auxquelles il est donné de raison­
ner avec la meilleure des logiques et de se comporter selon la meil­
leure des morales, sans que pour autant, les choses fonctionnent selon
l’idéal tant espéré !
C’est pourquoi nous devons maintenant apprendre à nous débarrasser
de cette tendance systématique à raisonner dans le temps ordinaire,
selon une logique causale inefficace car elle ne détermine que partiel­
lement les choses !
Cette tendance vient de notre difficulté à raisonner en inversant les
causes et les effets, du fait de notre ignorance de la Loi de Conver­
gence des Parties ou loi d’attraction des lignes temporelles, comme
nous le verrons en dernière partie. Nous avons du mal à appliquer cette
loi car il nous est difficile d’admettre qu’elle va toujours faire en sorte
que le hasard fasse bien les choses. Pourtant elle ne semble pas dépen­
dre elle-même du hasard, lequel semble au contraire lié au sens habi­
tuel du temps, c’est-à-dire à la causalité.
Pour apprendre à appliquer la logique non causale, nous allons mainte­
nant étudier une subtilité « cachée » du temps, qui repose sur l’im­
mense réservoir de possibilités dégagées par les aléas de la nature.
Il existe une bonne façon de remonter à un présent donné à partir d’un
futur donné, qui évite de faire appel à une Loi de Convergence hypo­
thétique pour laquelle nous ne disposons ni de méthodes ni de règles
de calcul. Il s’agit de calculer à partir de ce présent tous les futurs pos­
sibles autant de fois qu’il est nécessaire jusqu’à atteindre enfin le futur
imposé. On remplace donc le déterminism e inversé de la loi de
convergence par de multiples tentatives de retour vers le futur. Pour­
quoi multiples? Parce qu’il s’agit de tenir compte dans le calcul de la
variabilité engendrée par toutes les possibilités de l’indéterminisme
causal, et notamment des agents externes susceptibles d’être présents
dans l’environnement et d’intervenir par hasard.
Malgré tout, la plupart des solutions risquent de passer à côté et ne
jamais atteindre le futur imposé, et il se pourrait même qu’aucun calcul
ne nous amène à ce futur, même avec une infime probabilité. Mais si
nous prenons bien en compte la réalité d’une dispersion indéterministe
qui peut engendrer une foule de futurs possibles aux variétés parfois
infinies, nous devrions pouvoir faire émerger, au prix d’une orgie de
calculs, une solution correcte même si elle est extrêmement improba­
ble.
Nous pouvons être aidés en cela non seulement par les aléas dispersifs
(aléas dus à la dispersion des trajectoires possibles), mais aussi par ces
agents externes que sont les multiples interventions possibles du
hasard.
Dans la catégorie des aléas, on peut citer la variabilité des trajectoires
des éléments en présence, comme les temps d’arrêt du chevreuil ou ma
vitesse de descente dans la faille, qui peuvent par exemple nous faire
passer au même endroit à plus ou moins quelques minutes près, lais­
sant la possibilité d’un réglage à la seconde près qui serait utile à une
rencontre synchrone.
Dans la catégorie des agents externes du hasard, on peut citer à la
place de mon envol de perdreaux le passage d’un avion de chasse, le
bruissement du vent dans les feuilles, celui d’un animal dans un buis­
son, ou encore un reflet aveuglant du soleil. Pour pouvoir les faire
intervenir, il faut bien entendu que les aléas dispersifs de ces agents du
hasard soient compatibles, c ’est-à-dire aptes à se manifester dans le
bon intervalle de temps.
Cette possibilité de puiser dans une infinité de scénarios grâce à un
vaste jeu d ’aléas dont les intervalles de manifestation probable sont
susceptibles d ’avoir une intersection non vide, laissant ainsi la possibi­
lité d’un intervalle plus restreint durant lequel elles pourraient se syn­
chroniser, nous permet d’espérer en trouver au moins un qui veuille
bien coller avec notre futur imposé.
Bien qu’elle soit fort gourmande en calculs à cause de tous ces aléas,
nous disposons en tout cas d’une méthode pour appliquer la Loi de
Convergence des Parties sans connaître ses règles et méthodes de cal­
cul !
Je rappelle que cette méthode peut nous rendre un résultat nul, c’est-à-
dire conclure à l’impossibilité réelle d’atteindre un futur donné. On ne
peut donc l’exploiter que si on l’aide à nous aider, en choisissant l’en­
vironnement adéquat. Cela ne vous rappelle-t-il pas l’adage: « aide-
toi, le ciel t ’aidera! ».
Pour mieux comprendre maintenant l’intérêt des agents externes,
remarquons que je n’avais pas besoin de l’envol des perdreaux pour
suivre mon chevreuil. Il aurait suffi que je sois assez attentif à l’envi­
ronnement pour trouver l’issue. C’est donc à cause d’un conditionne­
ment déterministe inhérent à ma personne, qu’il fallait absolument que
je sois « réveillé » par un agent externe.
On voit ainsi que paradoxalement, pour que le hasard fasse bien les
choses, il faut rendre improbable la solution la plus simple en appa­
rence, la plus causale, celle qui ne fait pas intervenir d ’agent externe. Il
s’ensuit que plus le futur imposé est difficile à réaliser, compte tenu de
la pauvreté des agents en présence, plus il est nécessaire de rajouter de
tels agents pour en augmenter la probabilité, du point de vue non cau­
sal bien sûr.
La double présence du chevreuil et des perdreaux augmente donc la
probabilité pour que la Loi de Convergence des Parties trouve une
solution, alors qu’au contraire, du point de vue causal, c’est précisé­
ment cette addition d’un agent supplémentaire (les perdreaux) qui
donne l’impression que le phénomène est encore plus improbable !
Ce paradoxe provient du fait que d’un côté l’on raisonne dans un cadre
causal qui nous fait introduire la très faible probabilité du synchro­
nisme entre plusieurs agents, alors que de l’autre coté l’on raisonne en
logique non causale où ces probabilités de synchronisme perdent tout
leur sens. Elles deviennent caduques, puisque le synchronisme est
imposé.
Les seules informations à prendre en compte en logique non causale
sont les durées de recouvrement des intervalles temporels de disper­
sion indéterministe des aléas des différents agents. Si l’on considère
par exemple les intervalles pendant lesquels les perdreaux et le che­
vreuil sont susceptibles, respectivement de s’envoler ou d’apparaître
brièvement sur un talus, c ’est la durée de leur intersection qui compte,
et non la probabilité pour que les deux événements aient lieu au même
moment. Plus cette durée est élevée, et plus la convergence de ces
deux aléas pour aider un événement à se réaliser est probable.
Retenons simplement que plus la probabilité de réalisation causale du
futur imposé est faible, et plus la probabilité pour que le hasard inter­
vienne en présence d ’agents susceptibles de faciliter les choses est
forte. Cette inversion des probabilités a le mérite de nous faire entre­
voir pourquoi, malgré les apparences, la logique non causale pourrait
bien être tout aussi rationnelle que l’autre.
La question subsidiaire est de savoir quel est, parmi tous les agents
possibles, celui que la nature (c’est-à-dire la Loi de Convergence des
Parties) choisira. On peut raisonnablement supposer qu’elle choisira le
plus réaliste, c ’est-à-dire celui dont l’intersection de recouvrement des
trajectoires indéterministes sera la plus large. Mais cela pourrait être
aussi l’agent qui se manifeste en premier à la Loi de Convergence,
c’est-à-dire en dernier du point de vue temporel. Laissons cela en sus­
pens.
Voyons maintenant un exemple que nous enrichirons ensuite en ajou­
tant un facteur humain, afin de faire la démonstration de toute la puis­
sance de la logique non causale.
Reprenons notre verre brisé en cent morceaux épars, et supposons que
sa chute soit l’aléa qui nous mène à l’événement futur que nous nous
imposons. Imaginons tout d’abord que notre processus de reconstitu­
tion du verre oublie dans son calcul l’un des morceaux, à cause d’une
trajectoire très particulière qui l’amène hors zone de recherche: c’est
envisageable si par exemple ce morceau égaré a été animé d ’une
grande vitesse juste après l’éclatement du verre, puis a rebondi sur plu­
sieurs obstacles pour atterrir on ne sait où...
En remontant alors le temps jusqu’au moment de la création par souf­
flage de ce verre, on se retrouve alors avec une quantité de verre en
fusion insuffisante, par manque du morceau égaré. Jusque-là, on enre­
gistre une perte de matière un peu bizarre. Mais les choses commen­
cent à se gâter sérieusement lorsqu’on considère qu’avant que le verre
ait été soufflé, il subsiste quelque part un petit morceau de verre cassé
qui n’a pas rejoint le verre d’origine, avant même que la fabrication de
ce verre ait eu lieu.
Un morceau de verre qui serait par conséquent sorti du néant ! On a
donc une perte de cohérence lorsqu’on recalcule un passé qui ne
reconstitue pas exactement le même verre avec tous ses morceaux
d’origine, même les plus infimes.
On remarque ainsi que la Loi de Convergence des Parties se doit d’être
extrêmement exigeante en matière de déterminisme inversé, en
contraste complet avec les immenses possibilités d’aléas de la causa­
lité dans le sens du temps, qui admettent des répartitions des morceaux
selon des milliards de combinaisons possibles, pour peu que l’on soit
exigeant en précision, et ceci sans qu’aucune de ces répartitions ne soit
incohérente.
Imaginons maintenant que j ’impose à mon programme de détermi­
nisme inversé un futur dans lequel un morceau de verre expulsé lors de
sa chute atterrisse dans une chaussure qui se trouve au pied de mon lit :
un tel cas est tout à fait envisageable, puisque nous avons des milliards
de combinaisons possibles.
Toutefois, le verre étant initialement positionné sur ma table de chevet,
et la chaussure par terre de l’autre coté de mon lit à deux mètres envi­
ron de la table, la probabilité de ce scénario est très faible, car les très
rares morceaux de verre qui vont parvenir à l’atteindre auront généra­
lement une trajectoire trop basse pour pénétrer dans ma chaussure.
Mais l’essentiel ici est que cette trajectoire reste possible.
Ce scénario fait donc partie des futurs probables d’un morceau de
verre épars, et l’on se doute que pour un tel scénario, la Loi de Conver­
gence des Parties devra employer un programme très puissant pour
qu’il n ’oublie pas le morceau dans la chaussure et que ce dernier
retrouve son chemin vers le verre intact. Il faudra notamment que ce
morceau rebondisse sur un rebord du lit en aspirant assez d’énergie
pour retrouver une énergie cinétique suffisante afin de rejoindre le
verre.
Imaginons encore que j ’ajoute un facteur humain à mon programme et
que j ’impose à la Loi de Convergence des Parties, en plus des mor­
ceaux de verre, le fait que j ’échappe miraculeusement à un accident
d’avion, sachant que j ’avais un rendez-vous à l’étranger m’obligeant à
prendre un avion de malheur de bon matin.
Franchement, mourir ainsi est pour moi hors de question ! Que pourrait
donc faire la convergence des parties pour me sauver la vie?
Je ne mets jamais l’alarme de mon réveil. Exceptionnellement, ce
matin-là je F utilise parce que je dois me rendre très tôt à l’aéroport. Sa
sonnerie me surprend et, en me levant brutalement pour l’arrêter, je
fais tomber de ma table de chevet un verre qui se casse sur le carrelage
de ma chambre. Je prends le temps de faire un ménage précaire, pes­
tant contre ce contretemps qui n ’augure pas très bien de ma journée,
puis je déjeune rapidement tout en enfilant chaussures et vêtements. Je
sors de chez moi, puis en descendant rapidement l’escalier qui mène à
mon parking, je ressens d’un seul coup une vive douleur au pied qui
me fait trébucher puis tomber dans l’escalier. Je me relève sans trop de
mal en boitant mais en continuant ma descente je trébuche à nouveau.
Après une vive douleur une entorse me gonfle rapidement la cheville.
Impossible de conduire! Je m ’assieds pour évaluer la situation et
notamment les conséquences d’un important rendez-vous raté. Enfin,
je rentre chez moi piteusement pour m’allonger et demander de l’aide.
Je reste alité ce matin-là.
Quelle n’est pas ma surprise lorsque, après avoir allumé ma télévision,
j ’apprends que l’avion que je devais prendre s’est abîmé en mer!
Aucun survivant !
Notons que bien d’autres d’agents externes auraient pu me sauver la
vie: un embouteillage, une fièvre, le coup de téléphone d’une amie
ayant rêvé de l’accident d’avion, etc. J’en viens donc à cette remarque
qui caractérise bien la logique non causale: la probabilité pour qu’un
morceau de verre se retrouve dans ma chaussure a beau être infime,
elle ne semble pas intervenir dans le choix des agents. En effet,
quelque soit l’agent, ici la chute du verre, la convergence des parties a
lieu quoi qu’il arrive, c’est-à-dire que le bout de verre atterrit automati­
quement dans la chaussure: il suffit juste que cette possibilité existe.
Remarquons également qu’à la différence de l’atterrissage du bout de
verre, la probabilité pour que je casse le verre en me redressant bruta­
lement à cause de mon réveil était beaucoup plus élevée ! Serait-ce la
raison du choix de cet agent? Il est préférable d ’en douter, car les
agents peuvent s’enchaîner les uns après les autres ou se substituer l’un
à l’autre selon une logique impénétrable car apparemment indépen­
dante de leurs probabilités causales.
Pour l’instant, le facteur déterminant, celui qui défie les probabilités,
n’est donc pas encore identifié. Tout ce qu’on peut dire est que plus ce
facteur est puissant et plus il est de nature à contourner d’infimes pro­
babilités causales des agents du hasard pour imposer son scénario.
Quel est donc ce facteur?
Pour le mettre en évidence, nous allons tout d’abord rechercher l’ori­
gine de la trace du futur imposé, et nous devrons ensuite identifier ce
qui rend cette origine aussi puissante à défier les probabilités, ce qui
nous emmènera jusqu’à la fin de ce livre. Mais le jeu en vaut la chan­
delle!
Je connais des personnes qui seraient du genre, si l’événement de
l’avion raté puis crashé leur était arrivé, à récupérer ce fameux mor­
ceau de verre qui leur a fait si mal, et à le mettre dans une vitrine afin
de pouvoir fièrement l’exhiber comme l’objet de la « chance » qui leur
a sauvé la vie.
Cet objet sur lequel on projette si facilement une vertu bénéfique ne
serait-il pas finalement le meilleur représentant de trace du futur que
l’on puisse imaginer? Et de plus, une trace enfin matérielle !
Pour quelle raison objective aurait-on tendance à qualifier ce morceau
de verre de « trace du futur » ? Parce qu’il nous a permis d’échapper à
un futur dramatique ?
C’est en fait la conjugaison de ce hasard hautement improbable avec
son « intentionnalité apparente » (me sauver la vie) qui fait penser à
une véritable trace du futur qu’on a envie de mettre en vitrine.
Reformulons les indices accumulés jusqu’à présent, susceptibles de
caractériser les traces du futur :
- création d’ordre non causal,
- intervention du hasard indéterministe,
- intentionnalité apparente du hasard.
Il se rajoute ainsi à l’ordre synchrone déjà identifié précédemment un
nouvel élément de coordination qui fait sens et qui est l’intentionnalité
apparente du hasard. Il défie lui aussi la logique causale, mais nous
venons de voir que la logique non causale ne parvient pas non plus à
expliquer cet ordre intentionnel. Quant aux intentions réelles, elles
n’apparaissent même pas dans ce phénomène heureux de l’avion raté,
ou alors elles sont totalement inconscientes !
En conclusion de cette première partie, on peut dégager l’indépen­
dance manifeste entre la logique non causale d’un événement et
son apparente intentionnalité. Car à aucun moment nous n’avons eu
besoin de faire intervenir l’intention dans le processus de convergence
des parties pouvant expliquer l’événement.
Si influence de l’intention il y a, elle n’est donc pas matérielle car elle
n’intervient pas dans le déroulement de l’événement; mais elle semble
tout de même liée d’une part à la formation du futur imposé, et d’autre
part à ces très faibles probabilités causales de l’événement qui sont
ignorées par la Loi de Convergence des Parties.
L’intention serait-elle à l’origine de la seconde causalité, à défaut d’in­
tervenir en quoi que ce soit dans les chemins de réalisation ?

Résumé du chapitre V

Le caractère très improbable et parfois « magique » de certaines coïn­


cidences provient de notre incompréhension de leur mécanisme, de
leur logique propre.
Il existe une logique non causale pour laquelle ce genre d’événement
perd totalement son caractère improbable, car c ’est au contraire
lorsque nous sommes en présence de multiples aléas potentiels que nos
chances seront augmentées pour qu’ils coïncident dans le temps et/ou
dans l’espace afin de nous rendre un service, alors que selon la logique
causale, c’est l’inverse.
Bien qu’elle nous rende des services, la logique non causale semble
pourtant réaliser l’œuvre de la Loi de Convergence des Parties indé­
pendamment de toute intentionnalité. Elle ne fait que répondre aux
ordres d’un futur déjà réalisé.
Par ignorance de cette logique non causale, on attribue parfois une
intentionnalité apparente au hasard lui-même. Or le hasard n’a rien à
voir dans le mécanisme de la coïncidence heureuse, où seul compte le
réservoir des possibles, parmi lesquels sera automatiquement sélec­
tionné celui qui réalise le futur potentialisé.
Si pouvoir de l’intention il y a, il ne peut donc être lié qu’à la potentia­
lisation d’un futur donné, et non à son mécanisme de réalisation.
Deuxième partie

La Double Causalité
VI.
Les traces du futur
Où l ’on découvre que nos intentions sont susceptibles de causer
des effets dans le futur qui deviennent à leur tour des causes futures
d ’effets présents.

- Cette fois-ci j ’espère que tu as compris !


Danièle m’exhibait avec un sourire rayonnant la note du bar restaurant
où nous venions de déjeuner.
- 22 euros ! Encore un 22 ! Attends, je vais le prendre en photo !
Nous venions de croiser une voiture immatriculée dans le département
22, peu après avoir quitté la D22 pour aller déjeuner dans ce restaurant
de La Javie. Et je venais d’expliquer la veille à Danièle, après avoir
pris en photo une borne D22, que j ’avais tendance à tomber sur des
suites de 22 à des moments décisifs de ma vie. J’étais donc amusé
mais aussi très intrigué par ce nouveau 22 que Danièle semblait me
désigner et qui cautionnait mes dires, car je me demandais ce qui pour­
rait bien se passer de si important ce jour-là !
Elle éclata de rire :
- Mais non, ce n’est pas ça du tout ! Regarde le nom au dessus ! Il faut
vraiment que tu écrives ton livre !
Elle n’avait pas du tout remarqué le 22 de la note! Elle m ’indiquait
seulement le nom de ce bar restaurant:
- Le nouveau roman.
J’apercevais ce nom médusé, car c’était une référence à la littérature,
une fois de plus ! Il n’y aurait pas eu de quoi s’étonner outre mesure si
la veille au soir, je n’avais pas vécu une coincidence ayant la même
signification littéraire, juste après avoir expliqué à Danièle mon inten­
tion d’écrire un livre sur la synchronicité. Nous étions en vacances
dans la réserve géologique de Haute-Provence, et je voulais justement
expérimenter ce genre de bizarreries de la vie en nous plaçant sans
cesse en face de situations imprévues. Je commençais en effet à avoir
une certaine idée de leur mécanisme et de la façon de les provoquer. Et
pour ne pas inquiéter mon amie, je lui avais tout raconté afin de la ren­
dre complice de mes excentricités.
Parmi celles-ci, j ’avais décidé la veille au soir de l’emmener au restau­
rant à Digne, alors que nous avions tout ce qu’il fallait pour dîner sur
place agréablement au lieu-dit de notre gîte d’étape à Draix, situé à une
quinzaine de kilomètres. Nous étions fatigués et ce n’était pas raison­
nable. Danièle avait beau avoir des qualités qui lui permettaient de res­
sentir qu’il fallait me laisser suivre mes impulsions sans chercher à les
contrecarrer ni même à les comprendre, ce soir-là j ’avais tout de même
exagéré, et c’est pourquoi je lui avais tout expliqué.
Cette bougeotte que j ’avais afin de favoriser l’inattendu pour provo­
quer des synchronicités fonctionnait parfaitement bien, ne serait-ce
que parce qu’elle avait introduit un véritable « plus » à nos vacances,
ainsi enrichies de variétés de situations imprévues et souvent enchante­
resses. Ce gîte que nous avions d’ailleurs trouvé au bout de la D22 à
Draix était situé dans un environnement superbe et nous y avions été
très bien accueillis. Nous n’avions réellement pas besoin d’aller dîner
en ville ce soir-là.
Pour compliquer les choses, arrivés à Digne il y avait une foire et il fut
très difficile de trouver une place de stationnement. Pour ajouter au
cocasse de la situation, notre voiture était chargée d’affaires que le cof­
fre ne suffisait pas à contenir et je craignais le casse, comme cela
m ’était déjà arrivé à Marseille. Après avoir tourné pendant cinq
minutes à la recherche d’une place de stationnement visible depuis un
restaurant, je finis par en trouver une, probablement le seul et unique
emplacement libre à 500 mètres à la ronde ! Heureusement, car je com­
mençais à regretter ma décision de dîner en ville, et j ’avais peur que
mon amie n’ait plus confiance en mes initiatives déviantes.
Enfin installés à la table de ce restaurant, et alors que nous prenions
l’apéritif, elle me fit alors remarquer que nous nous étions garés juste
en face d’une librairie :
- Tu as vu où tu t’es garé ?
Cette librairie me rappela instinctivement mon « intention » d’écrire, et
Danièle avait ressenti la même chose que moi :
- Ca veut dire que tu dois écrire ton livre !
Bien que je me demandais si effectivement, je n’avais pas provoqué ce
phénomène en réveillant cette intention, d’autant plus que c’était bien
ce que je recherchais pour mon livre, je doutais encore. Et j ’avoue qu’à
cause de ce doute persistant à dénoncer des projections, je ne pouvais
m’empêcher ce soir-là de rechercher une autre explication, en faisant
le calcul de la probabilité a priori de me retrouver garé en face de cette
librairie. Ne l’aurais-je pas inconsciemment recherché? Était-il vrai­
ment certain que c’était la seule place qui restait?
Ce ne fut donc que le lendemain, dans cette Pizzeria de La Javie, après
avoir vécu une avalanche de synchronicités que je décrirai dans sa
totalité dans la troisième partie (seules sont citées ici les deux dernières
coïncidences) que je reçus avec la note que me tendit Danièle le coup
de grâce qui m’a convaincu de m ’atteler sans tarder à la rédaction de
ce livre, comme si l’« univers » me l’avait ordonné, chose que je fis
réellement quelques jours après, à mon retour de vacances.
Et comme pour me signaler que ce jour-là, en prenant la décision
d’écrire ce livre, j ’allais peut-être changer ma vie, la dernière coïnci­
dence de La Javie était accompagnée d’une série de 22 !
J ’avance ici l ’hypothèse que ces exemples vécus constituaient des
traces de mon futur, mais avec cette fois-ci une intervention évidente
de mon intention, probablement amplifiée par une réelle volonté de
m’ouvrir à ses effets.
Ce genre de manifestations du hasard, suspectées pouvoir être quali­
fiées de véritables « traces du futur » téléguidées par l’intention, revêt
ainsi une particularité très intéressante : ces traces sont potentiellement
contrôlables !
La manifestation de telles traces implique nécessairement l’existence
d’une intention, même envahie par le doute, ne serait-ce que parce que
sans ce genre d ’intention permettant de les interpréter, on ne saurait les
différencier du hasard. Cette intention, si elle est fiable, porte en elle
effectivement un véritable potentiel de réalisation, susceptible de pro­
duire des effets dans le futur. Mais jusque-là, rien de nouveau sous le
soleil, on attend toujours que l’univers nous fasse cadeau de son mode
d’emploi !
Revenons maintenant à notre recherche de traces du futur, en les consi­
dérant, cette fois-ci, sous l’angle de leur finalité sous-jacente: quelles
sont les observations que l’on peut faire autour de nous qui manifes­
tent la création d’un ordre non causal semblant avoir une finalité, ou
vouloir réaliser une intention ?
Ainsi posée, cette question nous fait penser à l’émergence de certains
processus dans le domaine du vivant qui sont particulièrement créatifs,
comme par exemple les mutations, mais aussi bien sûr les œuvres des
hommes ou de certains systèmes vivants évolués comme les organisa­
tions de fourmis ou d’abeilles. Ces processus de création d’ordre pour­
raient-ils recevoir un soutien non causal ?
Sans la vie, l’univers subirait une dégradation systématique de son état
et de ses composants, à cause de l’augmentation générale de son entro­
pie au cours du temps. On peut alors effectivement se demander s’il
n’y aurait pas des processus non causais à rechercher parmi les sys­
tèmes vivants, qui réussissent à maintenir de façon impressionnante
leur entropie en absorbant de l’énergie environnante (nourriture). Car
comment font-ils pour faire émerger une organisation aussi complexe
et efficace ?
En ce qui concerne les processus de création spontanée du vivant,
reposant apparemment sur le hasard, on peut citer les mutations et
notamment celles qui permettent à un être vivant (plante ou animal) de
s’adapter à de nouvelles conditions drastiques de vie, où le manque de
nourriture et les prédateurs sont les deux principaux facteurs élimina­
toires: le caméléon, ou mieux encore le papillon Kallima de Ceylan,
qui disparaissent en prenant la couleur et la texture de leurs supports
végétaux, l’orchidée Ophrys qui ressemble tellement à la guêpe Goryte
que son mâle la pollinise en la prenant pour sa maîtresse [34], parvien­
nent ainsi à survivre à l’aide de stratagèmes laissant penser que les
mutations qui les ont engendrés ont comme origine une intention !
L’apparition soudaine de certaines mutations ne serait-elle pas une
trace du futur ? Serait-ce un sacrilège d’oser mentionner une telle
intention dans la nature, Darwin nous ayant clairement interdit une
telle offense ?
Les exemples abondent, non seulement en biologie, mais aussi en
archéologie et paléontologie, qui aboutissent à suspecter une erreur de
Darwin [37] et de son principe de sélection naturelle. À l’origine de
cette idée qui est devenue, tout comme le déterminisme, un paradigme
pluriséculaire ayant influé à travers le principe de compétitivité toute
l’organisation économique de notre société, c’est toujours la causalité,
encore la causalité et elle seule, qui nous fait ériger en théorie indébou­
lonnable, sous peine de sacrilège à la raison et au dogme, les principes
de la loi du plus fort et de la concurrence. Seules survivent les espèces
mutantes qui résistent au milieu, et c ’est ce qui expliquerait ces
prouesses de la nature, ayant soit disant le temps comme allié, la
nature disposant de millions d’années pour faire des tentatives et impo­
ser sa sélection finale.
Est-ce que les choses se passent toujours ainsi ?
Aujourd’hui encore les mutations ne sont comprises que dans le cadre
de cette théorie qui fait démesurément intervenir le hasard, et c’est
bien l’une des raisons pour lesquelles elle est de plus en plus contro­
versée. Une action démesurée du hasard pénètre ainsi aussi bien la
physique statistique que la biologie. Ne serait-ce pas un signe que les
scientifiques ressentent l’importance du hasard dans la science mais
qu’ils ne l’auraient pas mis à la bonne place?
Pour remettre le hasard à la bonne place, considérons maintenant les
œuvres de l’homme, toujours à la recherche de traces du futur. On
pourrait citer toutes ses constructions techniques, toutes ses œuvres
artistiques ou architecturales. Voyons simplement l’un des éléments
matériels épars de l’une de ses œuvres, telle une brique, en tant que
constituant d’une maison, par exemple. S’agit-il d’une trace du futur?
Il semblerait que oui, dans la mesure où elle serait intégrée dans le
futur à une construction. Mais qu’en est-il des briques non utilisées?
Existe-t-il des éléments qui, considérés isolément, ne peuvent par
nature maintenir cet état de séparation et vont donc obligatoirement
faire partie intégrante d’une œuvre à venir?
À eux seuls, on comprend que les briques et autres composants de la
maison ne suffisent pas. Il faut évidemment que l ’intention de
construire soit présente. Tout comme dans le cas des mutations où il
existait un intense besoin d’adaptation, dans le cas des constructions
humaines il faut la présence d’une forte motivation chez un individu.
Mettez en présence un réel besoin humain avec tous les éléments
matériels susceptibles de le satisfaire et la construction se fera.
Mais aura-t-on pour autant affaire à un ensemble de traces du futur?
Eh bien non, car on doit rejeter les besoins qui se réalisent de façon
causale, c’est-à-dire par l’intervention d’un projet déjà prévu d’avance.
La brique ne témoigne que d’un passé où le besoin de l’utiliser existait
déjà, avant qu’elle ne soit assemblée dans la réalisation du projet. C’est
le bâtisseur qui l’a ramassé dans une démarche tout à fait causale.
Pour que cela ne soit pas le cas, il faudrait que le projet de construire
une maison émerge spontanément, indépendamment du passé, comme
si notre bâtisseur, après avoir un jour trouvé cette brique par hasard,
avait échafaudé le plan de construire sa maison lui-même !
La réalisation du projet semblerait ainsi émerger comme une mutation,
c’est-à-dire par hasard. Mais est-ce bien ainsi que l’on réalise nos pro­
jets? Nos plans ne sont-ils pas tout simplement déjà là, mais simple­
ment oubliés, puis réveillés par une trace?
Mais même dans ce cas, et qu’il s’agisse de constructions humaines ou
de mutations, le hasard n’est-il pas toujours présent à côté d’une inten­
tion réveillée, réactivée, lorsqu’on est en présence d ’une trace du
futur?
Nous avons là un fil directeur qui nous amène à comprendre le rôle
plus ou moins caché de l’intention, car nous observons que celle-ci
peut être plus ou moins consciente, et ne se révéler qu’a posteriori.
Prenez par exemple la découverte fortuite d’un trésor qui permet à son
découvreur de réaliser un projet dont il rêve, mais dont il n’avait pas la
moindre intention apparente de réalisation, faute de moyens. Dans ce
cas on peut considérer que le fait pour cette personne de trouver, par
hasard, un tel trésor constitue une trace d ’un futur dans lequel ce
qu’elle désire le plus va se réaliser, la trace n’étant pas le trésor lui-
même mais sa découverte. A condition bien sûr que cet événement ne
soit pas provoqué artificiellement par quelqu’un qui souhaitait géné­
reusement mettre ce trésor à la disposition de notre découvreur !
Dans ce genre de cas où une intention semble « réveillée », au
contraire des traces du futur apparemment non intentionnelles, ou dont
l’intention est cachée ou inconsciente, on s’aperçoit que le hasard,
encore le hasard, fait à chaque fois émerger en quelque sorte une infor­
mation sur un potentiel nouveau, inexistant dans le passé avant que la
découverte n’ait eu lieu. En effet, si notre découvreur avait gagné l’ar­
gent nécessaire en travaillant, ou s’il l’avait reçu de quelqu’un d’autre,
alors l’information « individu en possession d ’une somme d ’argent lui
permettant de réaliser son rêve » n’aurait été qu’une trace du passé, et
c’est la causalité qui aurait été invoquée pour expliquer cet état de fait.
Le hasard nous permet donc de ne pas ranger dans la catégorie « trace
du passé » un fait déterminant pour modifier l’avenir.
Je parle ici de « modification d ’avenir » car on admettra volontiers
l’existence sous jacente d’une version en quelque sorte ordinaire de
notre vie, que nous aurions réellement vécue si le hasard n’était pas
intervenu pour nous mener sur une autre branche de vie.
Serait-ce donc que certains événements susceptibles de bouleverser la
vie d’une personne constituent de véritables traces du futur, à partir du
moment où ils dépendent du hasard, du vrai hasard indéterministe,
accompagné de ce rôle maintenant manifeste d’une intention réveil­
lée?
La réponse est oui, dans la mesure où un tel hasard supprime toute
influence causale. Mais remarquez bien que nous n’avons toujours pas
supposé la moindre influence non causale de l’intention ! Et pourtant,
nous avons déjà trouvé dans ce genre d’événements des traces d’un
futur dans lequel elle joue un rôle manifeste ! N ’est-ce pas intriguant ?
Pour creuser maintenant la question du rôle de l’intention, considérons
maintenant une trace du futur d’une personne voyant ses rêves se réali­
ser, dans laquelle son intention joue cette fois-ci un rôle supposé
moteur, du point de vue de la Loi de Convergence des Parties : suppo­
sons donc que ce futur imaginaire soit « activé » dans le sens où sa
probabilité d’advenir a été surélevée au niveau nécessaire, sans que
l’on sache exactement comment, en tout cas pour le moment.
Pour faire coller ce futur imaginaire avec le présent avant la décou­
verte de la trace qui a tout déclenché, on se retrouve en face de l’obli­
gation de dérouler en sens inverse du temps un scénario adéquat, mais
concurrencé a priori par tout autre scénario purement causal d’échec,
ou encore de réussite faisant intervenir les qualités propres de l’indi­
vidu, son travail ou les aides qu’il peut solliciter.
Pour forcer un scénario de réussite imprévisible, la Loi de Conver­
gence des Parties serait-elle capable de produire une modification des
trajectoires de vies dans l’univers de façon à mettre en présence notre
homme et la somme d’argent nécessaire à la réalisation de son rêve?
De quelle liberté la Loi de Convergence disposerait-elle pour pouvoir
agir ainsi ?
La réponse qui s’impose, comme dans le cas du verre cassé, est la sui­
vante: elle dispose d’une foule d’aléas possibles, qui va du hasard des
rencontres à la simple dispersion naturelle des trajectoires de vie, inhé­
rente à l’indéterminisme qui préside au déroulement normal du temps.
Elle peut même faire en sorte que, si le trésor est enterré, notre homme
prête attention au sol en faisant tomber un fruit ou une feuille, si leur
intervalle de chute indéterministe a des chances de croiser la trajectoire
de notre homme. Il sera alors simplement passé au bon moment, au
bon endroit, et aura suspecté quelque chose d’enterré là, sous son
regard.
C ’est donc juste une question de synchronisme, à condition que l’envi­
ronnement de notre découvreur s’y prête. Si le trésor était dans cet
environnement depuis longtemps, il était inutile pour la Loi de
Convergence de passer par un scénario plus complexe. Le chemin le
plus simple était de ne rien changer à la structure de l’univers, et de
profiter de quelques aléas dans la trajectoire de notre homme.
Lequel d’entre nous peut-il prétendre savoir toujours exactement où il
va et marcher toujours exactement à la même vitesse?
À ceux qui maintiendraient qu’il n’existe qu’une seule possibilité de
trajet, et qui continueraient d’ignorer l’indéterminisme des aléas en
m’objectant la Théorie des Variables Cachées, je signale un autre fac­
teur: en mécanique quantique, tant qu’une trajectoire n’est pas obser­
vée et n’interagit pas de façon déterminante avec l’environnement, elle
est susceptible d’exister selon une multiplicité de versions. Mais nous
verrons cela plus loin.
Les simples propriétés de dispersion naturelle des trajectoires poten­
tielles des êtres humains sont déjà le plus souvent suffisantes pour per­
mettre la réalisation de telles coïncidences, à condition que leur possi­
bilité existe dans l’environnement. Heureusement, le fait de se retrou­
ver présent au bon endroit et au bon moment, d’une façon générale, est
favorisé par nombre d’autres conditions susceptibles de générer de
l’indétermination ou de l’imprécision. Si je me laisse distraire par l’ap­
parition d’un oiseau sur le pas de ma porte, je vais avoir un retard de
quelques secondes au sortir de chez moi. Si je prends une personne qui
vient de tomber en panne en stop, je risque même de dévier mon trajet.
De petits riens sont ainsi, et d’une façon générale, susceptibles de
modifier la position dans l’espace et dans le temps de n’importe qui, à
tout moment. La Loi de Convergence a donc la possibilité de jouer sur
un nombre considérable de facteurs dispersifs pour réaliser le pro­
gramme qui a été favorisé dans le futur, de manière à recoller à des
réalités passées et présentes a priori immuables.
Prenons maintenant un exemple qui va commencer à nous faire discer­
ner le rôle potentiel de l’intention dans la formation des traces du futur.
Pour réaliser un projet qui me tient à cœur j ’ai besoin d’une informa­
tion clé, sans même le savoir. C’est même justement parce que je ne
sais pas que j ’ai besoin de cette information, et que je crois disposer
déjà de tout ce dont j ’ai besoin pour réaliser mon projet, sauf peut-être
quelques détails, que j ’ai la détermination très confiante de réaliser ce
projet. Cette confiance m’apporte d’ailleurs l’assurance que je saurai
gérer tous les détails à résoudre pour atteindre mon objectif.
C’est alors que, par le plus grand des hasards, je fais une rencontre qui
m’apporte cet élément clé indispensable, sans lequel je n’aurais jamais
pu mener à bien mon projet: un conseil issu d’un contact humain.
Comment est survenue cette rencontre ? Comment ai-je ainsi fait l’éco­
nomie d’un enseignement qui aurait pu être très long? Aurais-je ainsi,
sans le savoir, suscité ma chance ?
Nous avons évidemment le plus souvent l ’impression que nous
sommes incapables de programmer notre futur, particulièrement dans
ces cas précis où nous n’avons pas les moyens de réaliser celui qu’on
souhaite.
Pourtant, si l’on considère notre Arbre de Vie, la voie qui nous mène à
cette réalisation existe déjà, même si elle est très improbable. Le pro­
blème est qu’elle coexiste avec d’autres voies qui nous mènent vers
l’échec et qui ont une plus forte probabilité, tant qu’on ne connaît pas
l’élément clé de la réussite. La solution consisterait donc à augmenter
la probabilité de la voie du succès, jusqu’à ce qu’elle dépasse celles
des autres voies.
Voyons déjà comment ce genre de probabilité pourrait simplement
augmenter.
Supposons que nous sachions maintenant qu’il nous manque un élé­
ment clé, mais que nous maintenions notre intention de réalisation
constante, parce que nous sommes déterminés et qu’une petite voix
nous souffle à l’oreille :
- Tu vas y arriver, confiance !
Cette intention ainsi renforcée par notre foi aura le mérite d’éliminer
les scénarios d’abandon, avant même que leurs facteurs déclencheurs
ne se manifestent, ce qui aura pour effet d’augmenter immédiatement
la probabilité du scénario de réussite: La foi serait-elle agissante?
Supposons maintenant qu’armés de confiance, nous décidions de faire
des rencontres intéressées car, avec un peu de chance, nous pourrions
tomber sur celle qui pourrait nous apporter l’élément clé. Alors d’un
seul coup, avant même de procéder à ces rencontres, la probabilité que
notre objectif se réalise augmente encore, car nous nous donnons des
ouvertures supplémentaires: nous augmentons nos chances.
Imaginons maintenant que la Loi de Convergence des Parties soit
« incarnée » en quelque sorte, non par des équations qu’on ne connaît
pas mais par un gentil organisateur. Celui-ci étudiera les éléments en
place, et notamment les possibilités qu’il a de jouer sur l’indétermi­
nisme des trajectoires de personnes possédant l’information clé dont
j ’ai besoin, puis choisira celle qui nous amène à nous rencontrer; en
incluant s’il le faut parmi ces trajectoires, pannes d’oreiller, de voiture,
incidents de toute nature, etc., tout ce qui peut retarder et/ou dévier la
trajectoire des uns ou des autres, et qui ne dépend que d’un rien !
L’adage de ce gentil homme, exécuteur des bonnes œuvres de la Loi
de Convergence, serait alors: « Si c’est possible, je le ferai ».
On objectera bien sûr à ce mécanisme de la chance qu’il ne repose
encore sur rien de tangible, et que je n’ai fait jusqu’à présent qu’allé­
cher le lecteur avec une hypothèse que personne n’aurait envie de reje­
ter si elle pouvait être vraie.
Ce n’est pas tout à fait exact, car ce serait oublier ce que je viens d’ex­
pliquer, à savoir que nos intentions constituent un facteur d’amplifi­
cation instantanée des probabilités de hasards favorables à leur
réalisation.
En quoi consiste ce facteur?
Il consiste d’une part en notre libre arbitre, et en sa capacité de faire
émerger une intention fiable parmi nos intentions diverses; d’autre
part, en la capacité qu’ont nos intentions de modifier instantanément la
répartition des probabilités dans notre Arbre de Vie, à condition toute­
fois qu’elles soient assez puissantes pour que foi et confiance s’ensui­
vent.
Ce qu’il faut maintenant toucher du doigt, c’est que cette modification
va avoir pour effet de modifier aussi instantanément la structure de
l’espace-temps futur, car déjà existant, par l’émergence d’un nouveau
potentiel sur notre Arbre de Vie.
Ce qui signifie que nos intentions seraient agissantes non seulement
dans notre cerveau, mais aussi dans un endroit de l’univers exté­
rieur à notre cerveau !
Pour éclaircir cette possibilité, nous allons proposer dans ce qui suit
une nouvelle représentation métaphorique. Nous sommes bien d’ac­
cord que nos « visualisations d’avenir » se font au présent, mais elles
semblent avoir une incidence instantanée sur les probabilités de réali­
sation de telle ou telle autre branche à venir de notre Arbre de Vie. Ces
intentions devraient alors être considérées comme des informations qui
investissent notre futur en apportant à certaines zones de cet Arbre de
Vie un potentiel accru.
Pour illustrer ce potentiel, nous allons maintenant utiliser l’analogie
avec l’eau qui descend des montagnes dans les rivières, coule dans les
fleuves, chute dans les barrages ou les cascades, etc.
Le potentiel de l’eau à chuter étant indissociable de la capacité de son
courant à transporter de l’information, nous allons donc utiliser
l’image de ce courant pour illustrer le transport des informations dont
nous avons besoin pour vivre, c ’est-à-dire dont notre libre arbitre a
besoin pour contrôler nos intentions.
L’eau sera ainsi le véhicule de toutes les informations devant lesquelles
nous aurons à faire des choix.

Résumé du chapitre VI

Le mécanisme par lequel nos intentions sont agissantes et donc sus­


ceptibles de générer des traces du futur est le suivant :
Lorsqu’elles sont soutenues par la foi ou la confiance, nos intentions
augmentent instantanément les probabilités de réalisation d’un avenir
déjà potentialisé dans notre Arbre de Vie,
s’il n’existe pas, ou plus, de voie causale, alors les potentiels de solu­
tions non causales à la réalisation de cet avenir vont voir leurs probabi­
lités augmenter, selon un chemin qui descend du futur vers le présent,
ceci va favoriser l’émergence dans le présent de hasards favorables et
nous devons en conséquence nous attendre à observer autour de nous
des opportunités de voies nous menant à cette réalisation, dans la
mesure où nous y sommes ouverts,
nos intentions sont non seulement agissantes dans notre cerveau, mais
aussi dans un espace-temps futur extérieur à notre cerveau, celui qui
héberge tous nos futurs potentiels : car elles y modifient instantané­
ment les probabilités.
VIL
Le courant de la vie
Où l ’on introduit un troisième modèle, celui du réseau fluvial,
pour modéliser nos conditions d ’existence et en particulier
tous les efforts qui nous obligent à ramer...

Un vendredi matin chargé. Toute la journée minutée par une demi-


douzaine de rendez-vous. Le premier à 9 heures. Vérifier ensuite le
fonctionnement d’un prototype pour la démonstration de l’après-midi,
puis réunion à 11 heures. Trouver le temps de passer à la poste cher­
cher un recommandé. Déjeuner avec un chargé d’affaires à 12 heures
30, puis réunion à 14 heures. Se débrouiller pour quitter cette réunion
avant la ruée des automobilistes sur les routes de départ en vacances.
Prévoir que je n’échapperai aux embouteillages ni le matin, ni l’après-
midi. Essayer d’apprécier le temps ainsi perdu, car il est une source de
contraste valorisant ma chance. Autour de 16 heures, si tout allait bien,
je m’évaderais de Marseille pour monter en Haute-Provence, franchir
la Porte du Temps pour entrer dans un nouvel espace-temps, dans un
univers où le temps ralentissait considérablement, et où le silence en
témoignait majestueusement. Cette Porte du Temps, c’était le défilé de
Pierre-Ecrite, l’entrée de la réserve géologique.
15 heures. Mon interlocuteur s’étonne presque du fait que je le rassure
tout en approuvant toutes ses remarques. « Aucun problème ». « Ne
vous faites pas de soucis ». « Vous savez, c’est lorsqu’on sera dans le
vif du sujet qu’on saura comment réagir face aux imprévus ». « A vou-
loir trop les anticiper, on les sollicite ». « Croyez-moi, je connais bien
la loi de Murphy*, je l’ai pratiquée durant 22 ans ». 15 heures 30, je
file. 16 heures 30, j ’ai enfin réussi à passer la cohorte. Tout à coup, une
voix féminine me parle : « Centre de contrôle embarqué. La vitesse est
limitée à 110 km/h ». Je l’avais oubliée, celle-là. Rien à signaler, ils
sont absents, et puis j ’avais déjà réduit ma vitesse. La simple idée que
j ’allais bientôt changer de système m ’avait fait ralentir. S’ils m’avaient
arrêté, j ’aurais même pris le temps de leur faire la causette. Au pont de
Mirabeau, on n’est déjà plus dans le même monde, même si c ’est
encore l’autoroute. Tout devient beau. Et il est important de se donner
le temps de parvenir à destination, particulièrement lorsque cette desti­
nation change votre notion du temps.
J ’ai passé le défilé. Au premier hameau, une main me fait un signe
depuis une maison au loin, et je lui réponds, devinant qu’il s’agit de
Gino. Sur la route, je croise le tracteur de Bernard. « Salut Philippe, tu
n’aurais pas vu Maguy, par hasard? » « Ah non, elle est peut-être pas­
sée chez moi, mais là tu vois, je viens de débarquer ». Je parle comme
si je revenais d’un voyage aux USA, ou même de la Lune. Bernard
sent que je suis encore décalé, et remarque que je me suis mis un peu
dans le fossé. On se salue. Peu après le village, je dois m’arrêter à nou­
veau pour aider Nicolas à rentrer un troupeau de vaches venu paître de
l’herbe plus grasse de l’autre côté de la route. Quelques minutes après
cette petite mise en jambes, je croise la 4L d’Annie, la bergère. Nous
coupons le moteur et entamons une discussion d’un bon quart d’heure.
La route est bloquée, mais cela n’a pas d’importance. Question d’habi­
tude. On se raconte la semaine, le temps qu’il fait et qu’il fera. Le
week-end se programme déjà. Demain, apéro. Après-demain, balade
aux Monges. Tiens, une voiture derrière. Ah, c’est Gilbert. Il attend
sans la moindre impatience que nous finissions notre conversation. On
se fait un petit signe, il me rappelle avec un geste que je dois passer le
voir. On prend le temps d’admirer la situation. Trois voitures qui blo­
quent la route, c ’est rare ici. Ca mérite d’être vécu, de rester plantés là.
Au total, cela aura été un embouteillage d’une demi-heure sur la Route
du Temps. Avec d ’autant plus de plaisir. Parvenu à destination, je
relève mon courrier sous un refuge à oiseaux et j ’aperçois Jo, le fusil à
la main, qui rentre de la chasse. Décidément, il y a foule ce soir.
Demain soir, je suis convié à un repas de gibier. Ce soir, je vais me
contenter de rentrer du bois. Mon week-end vient de s’organiser par le
plus grand des hasards. Alors que quelques heures plus tôt, ma journée
démarrait avec des horaires vécus comme autant de stress ! Quel
contraste! Mais je le savais. Je savais qu’en franchissant la Porte du
Temps, je quittais le courant d’une vie bien remplie, ce courant qui
m’obligeait à transiter par des étapes obligatoires, quotidiennes, systé­
matiques, contraignantes et souvent prévues de longue date. Dans ce
courant, le hasard était banni, tout juste toléré pour une crevaison par
exemple, mais pas pour une panne d ’oreiller.
En franchissant la Porte du Temps, je savais que le hasard devenait
mon allié !
Dans le courant de cette journée on observe deux types de rendez-
vous, de nature causale et non causale, s’agissant pour le second type
de rendez-vous occasionnés semble-t-il par le hasard.
On peut ainsi classifier ces rendez-vous en deux types d’« informa­
tions » sur notre futur nous permettant de contrôler notre vie et de
prendre nos décisions :
des informations de type causal, qui sont des traces du passé nous per­
mettant de prendre ces décisions en fonction de nos compétences, de
nos désirs, mais aussi de nos conditionnements ou de nos « pro­
grammes » de vie.
des informations de type non causal, qui sont des traces du futur conte­
nues dans le hasard des opportunités, les coïncidences, les intuitions,
susceptibles d’offrir un relais à l’exercice de notre libre arbitre. Elles
sont suspectées dépendre de nos intentions, mais cela reste une hypo­
thèse. ..
Je me propose ici de mettre en évidence le fait que notre ignorance ou
mépris du second type d’informations nous conduit à faire exagéré­
ment l’usage du premier type, ce qui a pour effet de nous piéger dans
un courant excessif : le courant de la vie.
Toutes ces informations pourraient-elles être réellement transportées
par un courant? C’est aussi la question à laquelle nous allons tâcher de
répondre ici.
Le « courant de la vie » est une expression presque poétique qui quali­
fie un aspect plutôt négatif et passif de la vie, exprimant que nous
sommes entraînés chaque jour par un ensemble de nécessités, de tra­
vaux et d’obligations en tout genre qui peuvent nous donner l’impres­
sion que nous sommes « transportés » vers une destination contre notre
gré.
D’une façon plus neutre on parle aussi du « temps qui s’écoule », ce
qui suggère là aussi un courant qui nous accompagne dans le sens du
temps. Le temps lui-même produirait ainsi ce courant de la vie qui
nous embarque vers un avenir incertain. On rencontre aussi souvent en
littérature cette métaphore du « cours du temps », qui sous-entend que
le temps aurait un cours irréversible supposant un écoulement du passé
vers l’avenir.
Pourtant, d’après le déterminisme inversé, ce courant lié à l’écoule­
ment du temps serait plutôt orienté en direction du passé, ce qui suggé­
rerait un courant inverse !
En contradiction avec notre théorie, existerait-il une propriété physique
confirmant cette notion d’un temps s’écoulant vers le futur, qui nous
élèverait donc « automatiquement » vers le sommet de notre Arbre de
Vie, ou encore vers les hauteurs de la Route du Temps ?
Ou existerait-il au contraire, conformément à notre théorie, des raisons
objectives de penser à un écoulement en sens inverse du temps ?
Considérons le comportement des fluides dans nos modèles, à com­
mencer par l’écoulement de l’eau, de la rosée ou de la pluie le long des
branches de notre Arbre de Vie: l’eau descend à cause de la gravité.
Cet écoulement vers le bas, vers le passé, conforme au déterminisme
inversé, ne pourrait-il pas avoir un intérêt: celui de nous rapporter
éventuellement quelques informations sur notre futur, qui transportées
par cette eau, surgiraient dans le présent sous la forme de traces du
futur?
Supposons que le temps se comporte comme un écoulement qui trans­
porte au contraire de l’information vers le futur, en même temps qu’il
nous y transporte nous-mêmes. Alors comment se fait-il que lorsqu’on
se laisse porter comme une bouteille dans un cours d’eau, nous sui­
vions invariablement une rivière, puis un fleuve, pour finir dans
l’océan? La mer serait-elle vraiment notre unique destination finale,
une destination tout à fait prévisible ?
Or la mer ne symboliserait-elle pas plutôt notre naissance ? Ces innom­
brables sources d’où proviennent les eaux qui coulent dans nos rivières
ne symboliseraient-elles pas plutôt nos destinations, tout comme les
fleurs ou les fruits de notre Arbre de Vie ?
Car si nous remontons maintenant un fleuve dans le sens contraire du
courant, depuis la mer jusqu’à l’une de ses sources, nous nous retrou­
vons fort justement dans la même situation que lorsque nous remon­
tons l’arbre de vie depuis notre naissance, du tronc jusqu’aux fruits : la
source joue le même rôle que le fruit, et symbolise l’une de nos desti­
nées.
Il semblerait donc que nos modèles nous amènent non seulement à
inverser le sens du déterminisme, mais aussi celui de l’écoulement du
temps.
Or un tel écoulement du temps dans le sens contraire de notre évolu­
tion, conforme au déterminisme inversé, serait susceptible de nous
ramener du futur des informations.
Et effectivement, si l’on considère les informations causales et non
causales que nous avons recensées plus haut, on remarque qu’un écou­
lement à contresens du temps correspondrait bien au fait que nous
allons à la rencontre de tous nos rendez-vous, qu’ils soient prévus ou
imprévus, car ils ont lieu à des moments fixes et contrairement à nous,
ils restent figés à une date précise. Ils passent ainsi de l’état futur à
l’état passé en nous dépassant à contresens, car nous restons dans le
présent. Tous nos rendez-vous, toutes nos opportunités, toutes nos ren­
contres sont donc des moments fugitifs qui nous croisent dans le temps
exactement comme des barques qui se laisseraient porter par le cou­
rant, alors que nous nous dirigeons nous-mêmes dans le sens inverse
du courant.
Cette correction productive de la métaphore du temps qui s’écoule
selon un courant inverse pose cependant un problème apparent: il
semblerait qu’elle ait à nous faire supporter un déterminisme issu du
futur aussi contraignant que celui du passé, voire plus. Nous serions
ainsi « coincés » dans les deux sens du temps. Car lorsqu’un choix se
présenterait à nous, non déterminé par notre passé, il serait alors déter­
miné par notre avenir !
Comment éviter cet enfermement entre d’une part, notre futur qui - en
existant déjà - entraîne de façon déterministe notre présent, et d’autre
part, les conséquences de notre passé ?
N ’est-ce pas effectivement un réel problème? N ’avons-nous pas par­
fois la sensation que nous sommes non seulement conditionnés par
notre passé, mais aussi obligés de nous présenter à tous les rendez-
vous futurs qui se dirigent vers nous?
On voit donc que notre destin pèse sur notre présent au même titre que
notre passé, semblant ainsi rendre notre libre arbitre illusoire. Ne
serions-nous pas emprisonnés dans un cercle vicieux constitué des
conséquences causales de notre passé et des conséquences non cau­
sales de notre avenir, les unes jouant avec les autres et nous empêchant
de modifier notre destin ?
L’écoulement du temps se présente ainsi comme un facteur susceptible
de contrarier notre destinée : nous devons remonter cet écoulement au
lieu de le descendre ! Nous devons même lui résister pour ne pas nous
laisser emporter !
Comment échapper à cette contrainte ?
Pour faire une description imagée de notre vie, celle-ci prend donc
naissance dans la « mère », et consiste à choisir de remonter un fleuve,
puis une rivière, puis un torrent, puis un ru, pour parvenir éventuelle­
ment à une source. Notre vie, pour avoir du « sens » consisterait donc
à prendre de l’altitude, qu’il s’agisse de remonter un courant, d’em­
prunter la Route du Temps ou de grimper à un arbre. Nos trois
modèles fonctionnent bien à l’unisson, en nous préconisant la même
chose : faire l’effort de grimper ! Et pour cela, le réseau de sources et
de rivières, mais aussi de routes et de sentiers de la Route du Temps
nous offre un vaste potentiel de choix dans la vie, grâce à sa richesse et
à sa complexité.
Conformément à tous ces modèles, nos bifurcations vraiment impor­
tantes dans la vie semblent cependant se compter sur les doigts d’une
main. Un arbre, un réseau fluvial, un réseau de routes et de sentiers
comportent un nombre relativement limité de bifurcations. S’agirait-il
des principaux choix que nous avons à faire dans la vie? Ne s’agirait-il
pas, fort à propos, des choix qui nous sont communs à tous, c ’est-à-
dire de nos choix familiaux et professionnels ?
Nous avons d’autres alternatives: rien ne nous empêche d’exploiter
toute la richesse du territoire de la Route du Temps pour éviter les
mêmes choix que le commun des mortels, ceux qui consistent à tou­
jours circuler sur des routes ou le long de rivières.
Tout se passe comme si le fait de rester dans le courant d’une rivière
ou d’un cours d’eau nous conditionne en plaçant nos choix importants,
comme celui d ’un emploi ou d ’un conjoint par exemple, sous la
dépendance de la logique causale. Si nous ne sortons pas de cette
logique, nous avançons sans cesse au sein de ce cours pour atteindre le
même apogée que tout un chacun.
Mais pourquoi donc rester au milieu de tous ces courants qui abondent
d’informations transportant des contraintes à tout va?
Faut-il que la vocation du commun des mortels soit réellement de pas­
ser son temps à ramer?
C ’est ignorer que pour atteindre une source, la meilleure façon n‘est
pas nécessairement de remonter des courants ! Il est évident que c’est
la façon apparemment la plus sûre pour ne pas se perdre ! Mais que
faire lorsque le courant est trop fort? Et lorsqu’on est allé assez loin,
comment remonter des cascades? N ’est-il pas dangereux de prendre
de tels risques ?
A-t-on vraiment besoin de suivre toute cette eau? Ne joue-t-elle pas,
après tout, qu’un rôle de transport d’informations temporelles ?
Avons-nous vraiment besoin de toute cette abondance d’informations?
Aurions-nous oublié notre objectif ultime, notre quête de Theopolis ?
Gardons à l’esprit qu’en ne nous écartant jamais d’un courant d’infor­
mations temporelles, de rendez-vous et de rencontres, nous sommes
pris dans un flux d’informations dans lequel il devient difficile de dis­
cerner des traces qui nous concernent.
Dans le monde réel, nous remontons ainsi chaque jour de notre vie un
courant de rencontres par nécessité, un flux incessant de personnes
avec qui nous devons échanger. Nous passons ainsi notre temps à
« ramer » pour obtenir les moyens de subsister et d’améliorer notre
confort et notre sécurité. Ces difficultés se traduisent par une quête qui
n’a rien à voir avec des informations pouvant nous aider à trouver
Theopolis : elle consiste au contraire à résister sans cesse à des
contraintes exigées par la société pour gagner nos moyens de subsis­
tance ou de confort, afin de tracer notre chemin avec plus de sécurité
ou de certitude. Ces informations sont l’argent, les papiers administra­
tifs, les diplômes, les titres de propriété, de marques, les droits d ’au­
teurs, les dérogations, les passe-droits, etc., qui se résument toutes à
autant de papiers en tout genre qu’il nous faut sans cesse présenter aux
personnes que l’on croise pour gagner notre droit d ’avancer sur la
route de notre temps.
Il est alors difficile de distinguer dans un flux aussi important les autres
informations, celles du second type, celles qui pourraient nous appor­
ter des pépites non causales, celles qui s’adressent à nous !
De même que nous préconisions d’éviter les routes principales pour ne
pas voir notre vie se fondre dans le commun des mortels, nous préco­
nisons là encore d’éviter les cours principaux pour ne pas la noyer
dans un flot d’échanges trop important: ce courant de la vie qui nous
empêche de discerner cette partie d ’univers pourtant préparée à se
manifester pour nous.
Que nous circulions sur les routes ou sur les cours principaux, aussi
longtemps que nos intentions nous y maintiennent nous serons
conduits à suivre une voie unique le long de laquelle tous les échanges
que nous pourrons avoir ne feront que nous donner l’illusion de notre
libre arbitre, emprisonné qu’il est dans la première causalité et incapa­
ble de détecter la seconde. Il ne faut donc pas s’étonner que dans ces
conditions, nous soyons parfois amenés à nous interroger sur le sens de
la vie.
Dans nos sociétés modernes, nous avons remplacé notre besoin fonda­
mental d’enrichir et d’explorer notre Arbre de Vie, par un besoin incul­
qué d’avancer vite et d’aller le plus loin possible.
Nous avons littéralement oublié la dimension verticale !
Notre progrès technologique, emprisonné lui-même dans la simple
causalité, a amplifié ce phénomène de réduction de notre arbre des
possibles à quelques tracés que tout le monde peut emprunter, et qui
rendent évidemment caduque toute recherche de Theopolis.
Ce n ’est pas ainsi que, bien évidemment, nous allons détecter les
traces de notre futur qui pourraient nous faire reprendre notre quête de
Theopolis, si tant est que nous ne l’avons pas abandonnée.
C’est là où il n’y a plus ni routes pour nous aiguiller, ni rivières pour
nous imposer des informations conditionnant nos choix, que nous pou­
vons trouver des informations du second type, d ’autant plus rares
qu’elles jalonneront mieux notre itinéraire.
Sinon comment, en restant là où les traces de notre futur se diluent,
parvenir à les détecter?
Mais une question se pose toujours : comment distinguer des informa­
tions du premier type causal, de celles du second type, ou traces de
notre futur?
Gardons à l’esprit la signification donnée à l’eau qui engendre tous ces
courants :
L’eau est le véhicule d’informations devant lesquelles nous sommes
incités à faire des choix.

Résumé du chapitre VII

La sensation apprise que nous avons de l’écoulement du temps vers le


futur doit être inversée. Car nous allons à la rencontre de tous nos ren­
dez-vous, qu’ils soient prévus ou le fait du hasard, et tout se passe
comme si nous progressions dans notre vie selon un courant contraire,
dirigé vers le passé.
Ce courant nous ramène sans cesse de nouvelles informations sur notre
futur, causales et non causales, auxquelles nous avons tendance à
répondre indifféremment par des choix conditionnés.
Plus nos choix conditionnés sont nombreux, plus il est difficile de
détecter les « traces de notre futur » qui pourraient se présenter à nous,
car il s’en suit une perte de libre arbitre qui nous empêche tout autant
de les former que de les détecter.
Il est donc recommandé, pour détecter des traces de notre futur, de fuir
les zones et habitudes qui nous assaillent d’informations devant les-
quelles nous réagissons de façon conditionnée (en commençant par
prendre des vacances, par exemple).
VIII.
Le « laisser agir »
Où l ’on découvre un cas particulier de « trace du futur »,
que nous pouvons accueillir par le biais d ’un « lâcher prise »
susceptible de nous faire accomplir des prouesses extraordinaires
en « laissant agir » le courant.

- Fais rouler ta boule Irène, ne cherche surtout pas à bien jouer. Ta


boule sait où elle doit aller, elle n’a pas besoin de toi !
- Qu’est-ce qu’il nous raconte le Philippe ! Vise un peu, il essaye d’en­
voûter sa partenaire !
Irène n’avait jamais joué à la pétanque. Nous avions constitué deux
équipes de deux en tirant au sort, et deux experts jouaient contre Irène
et moi. Sa boule stationna à dix centimètres du cochonnet !
- Ouah ! Bien joué Irène ! Heureusement que tu n’as pas écouté Phi­
lippe, hein !
- Oh mais si, j ’ai fait comme il m ’a dit, mais c’est un coup de chance !
... et Jo de faire aussitôt un carreau sur la boule d’Irène ! Tout était à
refaire ! J’encourageai à nouveau ma partenaire :
- Vas-y, joue ta deuxième boule juste contre celle de Jo. Mais surtout
n’oublie pas, c’est ta boule qui joue, ce n’est pas toi !
... et Irène de lancer sa boule malencontreusement, trop à gauche et un
peu trop fort. Mais par une chance inouïe, une déformation du terrain
la dévia pour la faire revenir à droite, cogner la boule de Jo et emporter
le cochonnet dans sa course, vers l’endroit où se trouvait déjà sa pre­
mière boule. Le cochonnet s’arrêta alors à côté d’elle, à cinq centimè-
très, juste avant que sa seconde boule ne se colle parfaitement dessus !
Deux superbes points d’un seul coup, et impossible aux adversaires de
récupérer le point en tirant !
- Je ne le crois pas ! C’est pas vrai ! Mais tu es une magicienne Irène !
C’est pas possible un coup pareil !
Bien au contraire, car en faisant rouler sa boule, Irène avait potentialisé
une multitude de trajets générés par tous les aléas indéterministes dus
aux irrégularités du terrain : le coup était rendu possible. Très improba­
ble, mais possible.
À l’inverse de tous ces courants contraires de la vie qui nous imposent
efforts, difficultés et confusions, nous avons parfois l’occasion de vivre
des situations où « tout coule de source », des moments de grâce où
nous accomplissons comme Irène des prouesses, des moments où des
opportunités se présentent, sans avoir eu d ’efforts à faire. Dans ces
moments-là nous remercions la « chance », ne croyant pas que nous
puissions en être responsables.
Pourtant, parmi tous les courants de notre vie, nous avons vu que cer­
tains pourraient transporter des informations du second type, ou
« traces du futur ». La question est donc: comment détecter de tels
courants, susceptibles de provenir d ’une source future qui serait ali­
mentée par nos intentions ?
Remarquons que, si nous avançons vers notre futur sans jamais modi­
fier nos intentions, alors notre cheminement le long de notre arbre de
vie suivra le potentiel le plus probable, celui qu’on appelle notre des­
tin. Ce destin restera déterministe, automatique, aussi longtemps que
notre libre arbitre, rendu inutile, n ’aura pas modifié nos intentions
réelles.
Peut-on, dans un tel cas où notre destin est tout tracé, espérer trouver
des traces de notre futur? Nous y arrivons enfin !
Un destin rendu déterministe par une absence d’exercice du libre arbi­
tre ne peut basculer vers un destin alternatif que si le hasard indétermi­
niste intervient, auquel cas il ne peut s’agir que d’un hasard indépen­
dant de notre volonté. Or que je sache, toutes nos vies sont entrela­
cées et ce qui ne dépend pas de nous peut dépendre d’autrui, voire de
l’accumulation de toutes les intentions humaines: il semble alors naïf
d’espérer dans ces conditions « décoder » la moindre trace de notre
futur.
Nous ne pouvons de plus espérer trouver des traces de notre futur que
si nous sommes nous-mêmes responsables d’un changement dans ce
futur, qui va rehausser les probabilités d’un destin alternatif. Suppo­
sons qu’en fouillant au plus profond de nous-mêmes, nous soyons
capables de faire émerger des intentions à la fois nouvelles et authen­
tiques. Nous venons ainsi de rajouter la condition de nouveauté à
notre recherche de traces du futur.
Si nos intentions sont réellement nouvelles, alors elles provoqueront
instantanément une modification de la répartition des probabilités dans
notre Arbre de Vie, et ces nouvelles probabilités vont immédiatement
se traduire sous la forme d’une redistribution des potentiels dans tous
les chemins de la Loi de Convergence des Parties. Cela se traduira par
le fait que nous aurons créé dans notre futur de nouvelles sources
d’informations.
Nous allons maintenant constater toute la puissance de cette image de
la source.
En modifiant nos intentions authentiques, nous faisons en quelque
sorte « pleuvoir » quelque part dans notre futur, à un endroit où l’eau
va donc s’accumuler.
Revenons sur la Route du Temps et considérons les sources responsa­
bles de toute l’eau s’écoulant dans son réseau fluvial: nous avons l’eau
de la fonte des neiges, l’eau des sources permanentes des nappes
phréatiques, et enfin l’eau des sources transitoires. Nous allons ici
considérer les deux premières sources comme permanentes car leur
écoulement est incessant, même si leurs débits varient. Cet écoulement
permanent nous permet de les considérer comme sources « causales »,
la cause en étant: cette neige et ces nappes phréatiques. Il n’y a plus de
hasard dans ce genre d’écoulements qui résultent en quelque sorte de
l’accumulation de toutes les intentions humaines !
Les sources transitoires dues à la pluie et aux orages sont au contraire
imprévisibles, indéterministes et localisées.
Le fait qu’elles soient localisées et transitoires les rend aptes à repré­
senter l’effet d’une intention localisée et transitoire, jusqu’à ce que
cette intention rencontre un moyen de réalisation.
Le fait qu’elles soient imprévisibles et indéterministes, comme la
météo, les rend aptes à modéliser un processus non causal déterminé
par le futur, ne pouvant l’être par le présent.
Revenons à notre recherche de traces du futur sur la Route du Temps.
Nous pouvons maintenant nous demander si, après avoir formulé une
intention authentique et inédite, le fait de surprendre un petit cours
d ’eau en formation ne serait pas susceptible de nous fournir une
réponse à cette intention, ou une direction à notre cheminement. Ce
ruisseau se présenterait alors comme une invitation à suivre un nou­
veau cours de notre existence, offert et provoqué par une modification
de notre Arbre de Vie.
Mais nous ne sommes pas réellement incités à suivre ce cours d’eau,
car il pourrait provenir d’une source transitoire indépendante de nos
propres intentions.
Il nous manque évidemment des informations.
Ces informations ne pourraient-elles pas nous parvenir dans le cours
même de cette source imprévue, sous la forme d’indices qui nous
démontreraient que nous sommes bel et bien concernés par son invita­
tion à remonter son cours, tel un fil directeur qui « coule de source » ?
Cette source étant située en amont, c ’est-à-dire en hauteur, il faut
qu’elle soit alimentée dans le futur assez longtemps avant que son eau
ne nous rapporte ses indices. Un certain temps est donc nécessaire
avant que l’accumulation d’eau ne soit suffisante pour produire les
informations qui nous intéressent, en redescendant le temps.
Pour accélérer le processus, les impatients pourraient décider de creu­
ser eux-mêmes cette voie d’eau, plutôt que d’attendre qu’elle appa­
raisse toute seule. Cela reviendrait à calculer leurs actions, en misant
sur l’existence de cette source que leurs intentions auraient alimentées
en amont, et qu’ils attendent de voir déboucher, avec un peu d’efforts
et de chance combinés. Mais creuser un tel canal risque de les faire
retomber dans un contexte causal, comme s’ils remontaient finalement
un courant en ramant. Pourquoi dans ce cas ne pas creuser tout le
canal ! Encore faudrait-il avoir l’information sur la position du point
d’eau où leurs intentions se déversent, et compte tenu des incertitudes
de dénivelé du terrain, ce serait aussi délicat que d’anticiper les dévia-
tions successives qu’il faut infliger à la trajectoire d’une boule de bil­
lard pour atteindre le trou. Et ils passeraient leur temps à rater leur
cible.
Les champions du billard ou du tir à l’arc ne procèdent pas ainsi !
Pensez-vous que les champions de ce type de jeu où une infinie préci­
sion de tir est parfois nécessaire, fassent réellement des efforts pour
atteindre le sommet de leur art, une fois qu’ils sont bien entraînés?
Cette idée que nous devrions apprendre à bien calculer nos actions, en
fonction d’expériences et de connaissances adéquates, afin d’atteindre
notre objectif, est en fait une illusion qui provient de notre éducation:
même après un excellent entraînement, la pensée raisonnante que cette
éducation nous impose nous dépossède la plupart du temps du grand
art de savoir atteindre parfaitement une cible à tous les coups.
En réalité, un excellent entraînement ne fait qu’ouvrir un champ des
possibles de plus en plus restreint autour de la cible, mais il ne donne
pas l’accès direct à l’essentiel : son centre.
Dans son livre « Le zen dans l ’art chevaleresque du tir à l ’arc » [8], le
professeur Herrigel nous décrit bien l’importance de cultiver une atti­
tude apparemment contraire à la raison, celle du « laisser agir », pour
permettre la réalisation de ce grand art : après avoir pendant des mois
appris à simplement bander son arc sans efforts tout en restant décon­
tracté, son apprentissage restait insuffisant. Il lui fallut attendre encore
des années avant de savoir comment décocher sa flèche. Analysant
finalement son succès, il déclara avoir acquis une capacité de lâcher
prise lui donnant la sensation de « laisser agir » ce quelque chose qui
« tire à sa place », selon son expression. Il assimilait ce stade à l’at­
teinte d’un état d’éveil correspondant à la nature du Bouddha, d’où le
titre de son livre.
Le rôle de l’excellent tireur se limiterait ainsi à préparer le geste en
positionnant le corps, après l’avoir débarrassé du mental, de façon à
« laisser tirer », comme si une autre entité, partant de la cible parfaite­
ment atteinte pour remonter à l’« acte juste » au point de départ du tir,
prenait le relais.
Pour revenir à notre observation fluviale selon laquelle une informa­
tion peut spontanément naître dans le futur pour redescendre le temps
et jaillir dans le présent, l’« acte juste » consisterait alors à visualiser le
tir au centre de la cible afin de provoquer cette apparition spontanée,
cette activation en amont d’une « source de courant » issue du futur.
Nous avançons ainsi l’hypothèse que la « visualisation » d’un objectif
pourrait créer la pression en amont, sur le futur, avant que notre pré­
sent en découle.
L’acte de tirer serait alors déclenché par l’arrivée du courant en prove­
nance d’un futur où l’événement serait déjà réalisé. Tout se passerait
ainsi comme si la cible était atteinte avant même que le tir ne soit
effectué, puisque son parcours serait tracé depuis le centre de la cible
et dans le sens inverse de la flèche. En effet, selon la Loi de Conver­
gence des Parties, nous pouvons prévoir, en remontant le temps, que la
flèche devra invariablement se nicher sur l’arc du tireur - puisqu’il n’y
a qu’une seule solution cohérente - alors qu’un tir calculé dans le sens
normal du temps aurait toutes les chances de manquer le centre de la
cible, compte tenu de l’infinité de solutions imprévisibles.
L’exercice de notre libre arbitre reposerait donc en partie sur notre
capacité de lâcher prise, qui nous permettrait de déceler de nouveaux
canaux émergeant du futur, après avoir contribué nous-mêmes à leur
émergence, par un mécanisme que nous mettons peu à peu à jour, celui
de la seconde causalité.
Cet exercice, s’il est possible, nous permettrait de profiter des aléas de
la vie et du chaos qui les accompagne, et non de les subir, à force de
vouloir systématiquement les contrer par des ajustements perpétuels. Il
nous permettrait également d’augmenter nos possibilités de choix face
à de nouvelles voies, mais de quels choix s’agit-il? Quel est celui qui,
en nous-mêmes, fait un choix qui consiste à laisser agir?
Résumons-nous : le laisser agir consiste dans un premier temps à infor­
mer notre avenir par une visualisation de nos intentions, de manière à
créer une sorte de pression en amont. Il s’agirait alors de laisser agir le
courant induit par cette visualisation, ce qui n’impliquerait pas un
résultat immédiat, puisqu’il faudrait attendre une redescente d ’infor­
mations. Une fois celles-ci perçues plus ou moins consciemment, nous
serions alors comme « attirés » par un futur créé par nous-mêmes, sus­
ceptible de remplacer notre ancien destin. Néanmoins, une question
subsiste devant le choix qui se dessine ici, car nous pouvons soit lais­
ser agir, soit rejeter l’action proposée. Or sur quoi repose l’authenticité
de ce choix? Un ressenti?
Face à l’observation « ressentie » de traces de notre avenir, l’authenti­
cité de notre choix ne dépendrait-elle pas de notre capacité à identifier
de telles traces comme à coup sûr produites par nous-mêmes ?
Nous avons déjà signalé le danger qui consiste à se fier à des traces de
notre « folie ». Gêné moi-même par ces conclusions, je suis resté long­
temps incrédule, comme en face d’une illusion d’optique aussi long­
temps qu’on ne vous en a pas expliqué le mécanisme. En réalité, j ’ai
mis longtemps à comprendre que c’est le temps tel qu’on nous le fait
habituellement concevoir qui produit ce genre d ’illusion d’optique
nous empêchant de ressentir les choses de façon juste. Cette idée qu’il
s’écoule vers le futur et nous transporte, alors que c’est l’inverse, est
probablement la principale raison qui nous rend si handicapé devant
l’usage du temps.
Comment donc faire le choix ? Comment faire face au danger a priori
d’un choix non dicté par la raison? S’agit-il simplement de rester déta­
ché après avoir lâché prise, afin de « laisser agir » ?
Pour répondre à ces questions, nous allons refaire un détour par la phy­
sique et examiner une fonction fondamentale du temps, celle qui per­
met au futur d’entrer dans le présent: la fonction de l’observation.

Résumé du chapitre V in

Pour favoriser la réalisation de nos intentions, nous devons « laisser


agir » le courant d’informations qu’elles induisent dans notre futur, ce
qui nécessite un certain temps: celui de l’eau qui s’écoule.
Le lâcher prise induit une attitude saine de retrait du mental qui pré­
pare le moment où comme par hasard, le geste juste a lieu. Ce geste se
produit de façon automatique, comme si la réalisation de l’intention
avait eu lieu avant que le geste ne soit effectué.
En réalité, c’est la Loi de Convergence des parties qui partant de l’acte
juste déjà réalisé, redescend le temps pour trouver le chemin qui
ramène la flèche sur l’arc du tireur.
A
Etre ou ne pas être
Où l’on découvre deux sens de la vie, celui d ’être afin d ’agir
et recevoir dans le présent, mais aussi celui de ne pas être
afin de laisser le futur s ’occuper de nos intentions.

- Véronique, tu veux connaître le secret de la magie du temps?


- Tu rigoles ? Je ne sais même pas de quoi il s’agit !
- Ce secret n’est pas de moi, même si j ’en donne l’impression dans
mon livre. Il est divulgué dans le livre de Gitta Mallasz sur le Dia­
logue avec l’Ange. Son contenu n’est d’ailleurs pas d’elle non plus, ni
même de la bouche d’une certaine Hanna dont elle a retranscrit les
dires.
- Ah mais oui, je connais ce livre mais ce secret m’a complètement
échappé. Mais alors d’où vient-il d’après toi, ce secret? Tu crois vrai­
ment que c’est un ange?
- Je ne sais pas, personne ne sait. Hanna a simplement dit: « Attention,
ce n’est plus moi qui parle », mais celui ou ceux qui parlaient ne se
sont jamais présentés. Gitta les appelle des anges, ou des maîtres inté­
rieurs, ou encore des êtres de lumière, mais elle-même n’est pas vrai­
ment sûre, et d’ailleurs cela n’a pas d’importance.
- Mais pourquoi cela n’a pas d ’importance ?
- Parce que le contenu de ses paroles me suffit. Pour le reste, ça me
dépasse. Je t’en donne un extrait, si tu veux ?
- Je bois tes paroles !
- Écoute ça, c’est l’Ange qui parle !
- Je vous dis un grand secret: ne faites pas de projets avec la tête!
Avec la tête, exécutez ! Le projet est chez le Père, tous les projets. Si tu
fais le plan de ce que tu vas faire avec ta tête, voilà que tu lâches la
bride au temps, sur l’exécution, car la tête et le temps sont un !
Gitta fait ensuite un commentaire : « Incapable de saisir le sens de ces
mots, je me prends la tête à deux mains », et l’Ange lui répond:
- Ne te casse pas la tête: Le Plan plane au-dessus du temps. Si vous
devenez un avec le Plan, vous n’êtes jamais en avance, et vous n’êtes
jamais en retard !
- Je n’ai rien compris !
- Moi non plus au début, mais bien plus tard, après avoir fait toutes
mes expériences et même commencé la rédaction de mon livre, cela
m’a paru lumineux !
- Je t’écoute !
- Faire des projets avec la tête risque d’empêcher nos intentions de
planer au-dessus du temps, c’est-à-dire dans le futur. Car la tête est
déjà reliée au futur, puisque la tête et le temps ne font qu’un ! La tête
doit donc faire son travail d’exécution dans le présent, et ne pas s’oc­
cuper du futur, tu comprends ?
- Laisse-moi, ça y est, ça revient à lâcher prise ! Et donc la tête doit
laisser agir, c’est bien ça?
- Exactement, tu vois bien que c’est lumineux ! Et quand elle dit que le
projet est chez le Père, cela veut dire qu’il est dans sa maison, qu’il est
inscrit dans l’Univers, il va donc se réaliser tout seul si Dieu le veut!
Tu sais qui est Dieu ?
- Ne me dis pas que tu sais ça aussi, tout de même?
- Mais non, ne t’inquiète pas. Dieu peut bien être qui on veut, mais là,
il incarne tous les possibles, le terrain du futur, tous les espaces-temps.
Quand tu suis un chemin, il dépend bien du terrain, n’est-ce pas ?
- Ma foi !
- Eh bien voilà. Lorsque ta tête s’occupe du futur, c’est comme si elle
voulait creuser le terrain, ne pas laisser agir le terrain déjà existant. De
plus, s’occuper du plan modifie sans cesse tes intentions, or comment
veux-tu que Dieu ne laisse pas tomber un plan qui change tout le
temps ?
- Vu comme ça, oui. Et pourquoi l’Ange dit: jamais en avance, jamais
en retard ?
- Parce que les opportunités engendrées par le Plan arrivent toujours
au bon moment, lorsque le chemin déjà tracé vers ton futur parvient à
ton observation !
L’enseignement des « Dialogues avec l’Ange » confirme ainsi nos
conclusions des précédents chapitres :
nos intentions pourraient automatiquement « informer » notre futur (y
faire pleuvoir des informations), d’où il pourrait résulter un « signal »
acheminé en direction de notre présent,
nos observations, si la tête s’occupe du présent, pourraient percevoir
un tel signal, plus ou moins consciemment mais toujours au bon
moment.
J ’ai précisé « plus ou moins consciemment », car la perception du
signal, comme nous l’avons vu dans le « laisser agir », n’est pas tou­
jours consciente et peut se traduire par une impulsion spontanée. Le
caractère éventuellement inconscient du signal reçu ne devrait pas sur­
prendre, car il nous arrive souvent de recevoir des signaux selon un
processus d’origine inconsciente et d’apparence non causale: il s’agit
de l’intuition.
Nos intuitions pourraient-elles résulter d’un décodage inconscient
d’informations qui, elles aussi, proviendraient du futur?
Quoi qu’il en soit, nous allons maintenant voir qu’il n’y a pas lieu de
s’en étonner car la création de la réalité elle-même, si l’on prend appui
sur la physique, pourrait bien n’être qu’une entrée dans le présent d’in­
formations issues du futur, ou pour faire simple : une entrée du futur
dans le présent.
Nous allons donc dans ce chapitre faire un détour par la physique afin
de répondre à la question suivante :
Comment notre présent peut-il bien se former à partir de nos futurs
potentiels ?
C ’est la question la plus fondamentale traitée dans cet ouvrage. Elle
met en jeu à elle seule cinq propositions très étranges mais toutes rece­
vables en physique moderne :
Le futur est déjà réalisé.
Le futur influence le présent.
Le futur est multiple.
Nous avons un libre arbitre authentique.
Notre observation influence la réalité.

Le fait d’adopter toutes ces propositions revient ni plus ni moins à


adopter la Théorie de la Double Causalité, mais à ma connaissance,
aucun physicien ne les a faites toutes simultanément. Nous allons
cependant voir que chacune d’elles est soutenue par de grands physi­
ciens.
Le premier à suggérer la première proposition « Le futur est déjà réa­
lisé » fut Albert Einstein, car c’est une conséquence de sa Théorie de la
Relativité. Il remettait ainsi en question notre conception du temps en
l’assimilant lui-même à une dimension, indissociable des trois dimen­
sions d’espace. Dans une lettre adressée à la famille de sa grande amie
Michèle Besso, à l’annonce de sa mort en mars 1955, il écrivait:
« La distinction entre passé, présent et futur n ’est qu ’une illusion,
aussi tenace soit-elle. Le temps n ’est pas ce qu’il semble être. Il ne
s ’écoule pas dans une seule direction, et le passé et le futur sont simul­
tanés. »
Aujourd’hui, cette conception d’Einstein revient en force avec les
théories dites de grande unification, comme la Théorie des Cordes ou
la Théorie de la Gravité Quantique à Boucles, qui traitent l’univers
comme un bloc d’espace-temps déjà déployé dans le futur tout comme
dans le passé, où le présent n’a aucune place. La seconde théorie
affirme même que le temps n’existe pas.
On peut alors se demander d’où nous vient cette sensation du temps
présent? Or n’oublions pas que la physique n’a que faire du phéno­
mène de la conscience, au sujet duquel les scientifiques en général ne
savent rien. Dans ce cas, il est loisible de se prononcer pour une évi­
dence : La sensation du temps présent est purement une propriété de la
conscience, et donc de l’observation. Nous développerons ce point en
étudiant la dernière proposition, à propos de l’observation.
La seconde proposition: « Le futur influence le présent » n’est pas
impensable dans le cadre d’un futur qui serait déjà réalisé, mais elle se
heurte, comme nous l’avons déjà vu, aux dogmes de la causalité et de
la flèche du temps. Malgré cela, de nombreux physiciens et pas des
moindres se sont risqués, comme je le fais moi-même, à émettre des
théories impliquant une rétrocausalité, notamment le physicien fran­
çais Olivier Costa de Beauregard, qui a émis cette hypothèse sur
laquelle je reviendrai plus loin. Je vais donner ici un exemple très
récent qui a fait la une de la presse du New York Times.
Pendant que je rédigeais ce livre, dont les idées étaient sûrement dans
l’air, deux physiciens de renom, Holger Nielsen et Masao Ninomiya,
ont estimé dans une série de publications que les ratés dans la mise en
route du LHC, le plus grand collisionneur de protons du monde
construit à Genève, pourraient être une sorte d’« avertissement du
futur » : le futur influencerait le présent pour empêcher les découvertes
sur le boson de Higgs, activement recherché dans cet accélérateur. Il y
aurait une sorte de futur inatteignable pour une raison inconnue. Ce
qu’il faut comprendre, ce n’est pas que ces deux physiciens étaient
réellement partisans de leur théorie, mais qu’ils se sont servi des
déboires du LHC pour faire passer avec humour des hypothèses
sérieuses mais qui auraient certainement été rejetées si elles avaient été
présentées dans un autre contexte.
Ils avaient préparé le terrain plusieurs années auparavant, à l’occasion
d’une première publication tendant à démontrer l’impossibilité de l’ir­
réversibilité du temps, condition essentielle pour leur thèse. Finale­
ment, celle-ci obtint en 2009 un retentissement mondial sur la place
publique, grâce à une coïncidence très surprenante: un oiseau transpor­
tant un morceau de pain a causé un court-circuit dans l’installation
électrique du LHC, ce qui a interrompu ses systèmes cryogéniques.
L’oiseau s’en est tiré, mais il a perdu son morceau de pain !
Pour la première fois, suite à cet incident qui venait corroborer les
thèses de Nielsen et Ninomiya, des physiciens se sont ainsi mis à réflé­
chir sur l’existence de traces du futur. Il faut dire que cet événement
plutôt incroyable, compte tenu des dispositifs de sécurité du LHC, fai­
sait suite à d’autres pannes antérieures très bizarres, celles qui avaient
déjà conduit nos deux physiciens à émettre leur audacieuse théorie.
La troisième proposition : « Nos futurs sont multiples » date d’une cin­
quantaine d’années, lorsque le physicien Hugh Everett, soutenu par le
collaborateur d’Einstein John Wheeler, introduisit le concept d’univers
parallèles pour fournir une interprétation très cohérente au problème
de l’observation en mécanique quantique, que nous verrons plus loin.
Or cette proposition revient elle aussi en force aujourd’hui parce
qu’elle ajoute des dimensions supplémentaires à l’espace qui sont éga­
lement prévues par la Théorie des Cordes, laquelle a ainsi remis au
goût du jour ces dimensions ainsi que les univers parallèles.
Everett expliquait que toutes les issues possibles d ’une observation
découpaient l’univers en autant de branches parallèles. Cela a le mérite
de solutionner le fameux paradoxe du chat de Schrôdinger qui,
enfermé dans une boîte contenant un poison activé par une source
radioactive, a une chance sur deux d ’être retrouvé mort lorsqu’on
ouvre la boite. Or selon la mécanique quantique, le chat est à la fois
mort et vivant tant qu’on n’a pas ouvert cette boîte et cette affirmation
est devenue indiscutable aujourd’hui. Everett explique cela en distin­
guant un univers contenant le chat mort et un autre contenant le chat
vivant. Avec des dimensions supplémentaires, cela ne pose aucun pro­
blème mathématique.
Les futurs multiples s’ouvrent ainsi aujourd’hui par de multiples portes
et la recherche des dimensions supplémentaires est même devenue
officielle dans la communauté des physiciens qui utilise le LHC.
La quatrième proposition « Nous avons un libre arbitre authentique »
semble encore indémontrable car il s’agit d’une question métaphy­
sique et philosophique, mais elle est partagée par un grand nombre de
physiciens pour des raisons de conviction personnelle. C ’est pourquoi
très récemment, là aussi, deux chercheurs renommés, John Conway et
Simon Kochen, n’ont pas hésité à secouer la communauté des physi­
ciens des particules en tirant des conclusions très étranges de l’ensem­
ble des résultats de la mécanique quantique, exprimées sous la forme
du « Théorème du Libre Arbitre ».
Ils définissent tout d’abord le libre arbitre d’une entité (particule, être
humain...) comme une propriété selon laquelle l’état de cette entité à
un instant donné ne peut pas être décrit comme résultant d’une fonc­
tion mathématique portant sur l’état de l’univers avant cet instant.
L’entité n’est donc pas entièrement contrainte par son passé et partiel­
lement libre de son évolution.
Conway et Kochen ont alors démontré que si l’on accepte trois
axiomes dont la causalité, plus deux autres axiomes très réalistes car
dérivant des résultats les mieux vérifiés de la physique moderne, que
tous les physiciens quantiques considèrent d’ailleurs comme vrais,
alors certaines quantités mesurées par les physiciens, qui dépendent de
leurs choix de mesures, ne peuvent préexister avant cette mesure,
c’est-à-dire ne peuvent pas dériver de l’information disponible dans
l’univers et accessible avant l’expérience. Ils en déduisent leur théo­
rème: « Si un expérimentateur dispose du libre arbitre, alors les parti­
cules dont il mesure l’état disposent également du libre arbitre ! »
Ce qui est surprenant est qu’il y a bel et bien dans ce théorème un
transfert de libre arbitre: si l’état des particules n’est pas déterminé par
leur histoire passée, c’est à cause du libre arbitre des observateurs.
On pourrait en déduire que le libre arbitre n’existe pas, purement et
simplement, en considérant que le libre arbitre des particules est une
idée folle, mais cela ne résoudrait pas le problème posé à la causalité et
ce serait surtout oublier que le Théorème du Libre Arbitre est juste­
ment fondé sur cette causalité. Or, la remettre en question permet juste­
ment de mieux comprendre les conclusions du théorème: lorsque le
libre arbitre de l’observateur agit sur le futur, le comportement des par­
ticules se met à dépendre de ce futur par simple rétrocausalité, auquel
cas le « transfert du libre arbitre » est parfaitement explicable et n’ap­
paraît ainsi que comme un transfert apparent, une illusion: les parti­
cules ne sont pas libres car elles deviennent déterminées par un futur
imposé.
On devrait donc plutôt considérer que si nous posons le libre arbitre et
la présence du futur comme axiomes, alors le Théorème du Libre Arbi­
tre constitue une très jolie démonstration de la Théorie de la Double
Causalité. Reste à savoir « comment » notre libre arbitre pourrait
influencer notre futur !
N ’oublions pas, cependant, que si l’on admet comme Einstein la pre­
mière proposition, alors la barrière du temps n’existe plus, ce qui rend
le futur potentiellement accessible. Mais de quelle façon? Nous ne le
savons pas. Certains pensent que puisque notre cerveau émet des
ondes électromagnétiques - détectables à l’extérieur du cerveau par
magnétoencéphalographie - l’espace-temps invisible qui nous entoure
pourrait enregistrer des formes pensées. Sans rejeter cette possibilité,
je préfère envisager une influence non confinée à notre espace-temps
quadridimensionnel, où des dimensions supplémentaires « atempo­
relles » pourraient jouer un rôle crucial, mais nous verrons cela plus
loin. Quoi qu’il en soit, la question de l’influence éventuelle de la
conscience ou du pouvoir de l’intention reste ouverte.
On peut toutefois concevoir cette possibilité d’influence humblement,
si l’on considère la capacité de la nature à faire émerger toute la com­
plexité et l’organisation du vivant, en comparaison avec la pauvreté de
notre technologie pour ce qui est de fabriquer des systèmes artificiels
de type humanoïde par exemple. Il est alors légitime de se demander si
dame nature ne maîtrise pas beaucoup mieux que nous la communica­
tion électromagnétique et tout ce qui s’en suit. Si tel est le cas, la capa­
cité de la nature à synthétiser une information électromagnétique orga­
nisée en provenance des systèmes vivants pourrait être bien supérieure
à notre potentiel technologique en matière de téléphonie mobile...
Quel que soit le moyen par lequel la conscience pourrait influer sur le
futur, nous allons maintenant voir que cette hypothèse est loin d’être
une idée folle, car elle a le mérite de résoudre le fameux problème de
l’observateur en mécanique quantique.
La dernière proposition « Notre observation influence la réalité » est
aujourd’hui adoptée par la grande majorité des physiciens dans le
monde, mais le problème du « statut de l’observateur » en mécanique
quantique est encore loin d’être réglé car beaucoup de physiciens veu­
lent y mêler la conscience et c’est ce qui provoque un débat vigoureux
qui divise largement la communauté scientifique et fait toujours rage à
l’heure actuelle.
Nous ressentons tous que le futur entre dans notre présent par le biais
de notre conscience et de nos observations : conscience et observation
sont donc a priori intimement reliées. Ceci semble d’autant plus vrai
aujourd’hui qu’en bannissant le temps présent, la physique rejoint le
sentiment que ce présent serait intimement lié à notre conscience,
laquelle serait donc inséparable de notre statut d’observateur de ce bas
monde. Le problème est que la physique attribue à l’observateur un
rôle tout à fait fondamental, qui est celui d’imposer la réalité unique
observée (mesurée) parmi tous les potentiels « observables », lesquels
sont qualifiés d'intriqués car ils coexistent simultanément, de façon
multiple, avant d’être mesurés. Or la façon dont l’observateur pourrait
jouer ce rôle, avec ou sans intervention éventuelle de sa conscience
dans le « choix de la nature » contenu dans le résultat de l’observation,
que l’on attribue faute de mieux au hasard le plus absolu, reste très lar­
gement débattue au sein de la physique, puisqu’il en existe pas moins
de sept interprétations différentes.
Le débat qui fait discorde est issu du fait que personne ne sait qui choi­
sit le résultat de l’observation. Serait-ce le hasard? Serait-ce Dieu?
Serait-ce l’observateur lui-même? Où tout est-il déterminé d’avance?
On sait seulement qu’au moment d’une observation, une seule réalité
est sélectionnée parmi l’ensemble de toutes les réalités potentielles,
parce que c’est ce qu’on constate à l’échelon microscopique d’une par­
ticule ou d’une molécule où ces potentiels sont décrits par une « fonc­
tion d’onde ». Les physiciens ont constaté que l’observation de cer­
tains objets microscopiques au moyen d’instruments perfectionnés
transformait ainsi leur fonction d’onde, contenant par essence de mul­
tiples possibilités, en un seul état observé. Une version unique de notre
réalité partagée semble ainsi imposée dans notre univers par chaque
observateur qui devient en quelque sorte le « garant » de cette unicité.
Le point crucial de ce débat, qui permet à la double causalité de s’affir­
mer comme solution crédible, est le fait que dans la réduction de la
fonction d’onde, il y a deux opérations distinctes:
la première est la réduction d’état, qui concerne le présent,
la seconde est le choix de l’état final, qui concerne... surtout le futur !
Pour ne pas faire intervenir la conscience dans la première opération,
la Théorie de la Décohérence, qui rencontre un large consensus auprès
des physiciens, a été proposée pour expliquer comment la réduction
d’état pourrait se faire naturellement en l’absence d’observateur, par
simple interaction avec l’environnement. Mais le problème de cette
théorie est qu’elle n’explique pas la seconde opération, celle du choix.
Concernant le résultat de ce choix, il est réputé indéterministe, c ’est-à-
dire du ressort du hasard le plus absolu. Depuis l’expérience du physi­
cien Alain Aspect en 1982, maintes fois confirmée depuis, il est en
effet démontré qu’il n’existe pas de variables cachées permettant de
revendiquer un choix déterministe. Néanmoins, rien n’interdit que ce
choix puisse être déterminé avant la réduction, à condition qu’il fasse
intervenir des variables cachées dites « non locales », c’est-à-dire qui
agissent « à distance » mais de façon non causale. Or il n’existe que
deux alternatives pour une telle action non causale à distance : la pre­
mière est d’admettre le principe de non-localité, qui permet à deux par­
ticules jumelles de rester connectées malgré la distance, la seconde est
d’admettre le principe de rétrocausalité qui repose sur l’idée que les
variables agissantes sont cachées parce qu’elles font partie du futur.
Dans cette seconde hypothèse de double causalité, le choix serait donc
déjà fait, mais tant que la réduction de la fonction d’onde n’a pas eu
lieu par observation et/ou décohérence, il peut continuer de s’affiner
dans le futur. Cette hypothèse était ni plus ni moins celle du grand phy­
sicien Olivier Costa de Beauregard, aujourd’hui décédé et qui l’a fait
connaître il y a plusieurs décennies, mais à l’époque elle était considé­
rée comme ésotérique. Or ce n’est plus le cas aujourd’hui, car en une
trentaine d ’années les physiciens ont effectué puis vérifié quantité
d’expériences qui défient la causalité, ne serait-ce que l’expérience dite
« du choix retardé » où l’on s’est aperçu que le passé lui-même pou­
vait dépendre de notre observation dans le présent.
L’idée de l’interaction de la conscience sur le résultat du choix, bien
que partagée par d ’illustres physiciens tels qu'Eugène Wigner ou
Roger Penrose, reste toutefois une hypothèse largement considérée
comme ésotérique. Je suis moi-même en désaccord partiel avec cette
idée parce qu’elle relève à mon sens d’une confusion entre conscience
et observation. Cela dit, dans certains cas particuliers où présent et
futur sont inclus dans un très court terme, je n ’exclus pas un rôle
conjoint et simultané de la conscience et de l’observation.
Mes objections à l’interaction de la conscience dans le présent sont les
suivantes: que se passe-t-il lors d’observations multiples? Le premier
observateur dans le temps serait-il privilégié pour déterminer le
moment exact de la réduction en un seul état? Auquel cas, à combien
de nanosecondes près? Et que se passerait-il si l’observation n’était
pas instantanée mais réclamait un long processus de mise en évidence
progressive? Comment influe le degré de conscience? À quel moment
le choix de l’état de la particule aurait-il lieu? La fonction d’onde nous
surveillerait-elle en train de l’observer? Y aurait-il un « seuil d’obser­
vation » au-dessus duquel la réduction en un seul état serait
provoquée ?
Mais alors, que donnerait un œil hagard?
Stop ! Toutes ces questions nées de la conjecture qu’un seul observa­
teur aurait simultanément le pouvoir de déterminer l’état des choses -
ou la direction des événements - et de sélectionner la réalité qui entre
dans le présent par l’observation me font paraître peu crédible l’idée
que notre conscience puisse être agissante dans le présent. Je suis en
accord sur ce point avec la majorité des physiciens, lesquels ont cepen­
dant à lutter contre une idée largement répandue par différents médias
et mouvements alternatifs, le mouvement « new-âge » notamment,
selon laquelle l’observateur créerait la réalité. Ceci est à mon sens faux
car trop réducteur, relevant ainsi d’une interprétation naïve de la méca­
nique quantique. Je ressens d’ailleurs comme inconfortable l’idée que
l’observateur puisse choisir dans le présent, alors qu’il n ’a ni les
moyens de son choix, ni la conscience qu’il y ait un choix à faire, ni
même réellement conscience de quoi que ce soit, tout simplement.
L’action de la conscience sur la réalité, que je ne nie pas, est en fait
plus complexe et plus subtile. Pour la comprendre, il importe tout
d’abord de dissocier toute observation et action physique dans le pré­
sent de l’influence directe de notre libre arbitre dans le futur. Cette
influence requiert nécessairement la conscience d’une manière qui
nous est encore inconnue mais que la « présence du futur » nous per­
met de ne pas rejeter. La conscience aurait donc tout son temps pour
« imprimer » ses intentions.
Résumée ainsi, la Théorie de la Double Causalité solutionne les pro­
blèmes de la Théorie de la Décohérence, laquelle suppose qu’un cer­
tain nombre d ’états superposés soient capables, avant même d ’être
observés, de se désintriquer tout seuls en vue de former une seule réa­
lité, mais sans nous dire laquelle sera choisie. Or dès lors que le futur
est déjà préparé à l’approche du présent, cela ne pose plus de pro­
blème, car on peut alors concevoir tous les états alternatifs qui se
détruisent pendant la désintrication comme d ’autres possibilités en
provenance du futur mais dont la probabilité d ’observation s’atténue
jusqu’à s’annuler. Le phénomène de l’intrication serait alors une sim­
ple transition entre une seule réalité et de multiples réalités potentielles
qui peupleraient nos univers parallèles. Toutes seraient potentiellement
« observables », mais à défaut d’observation certaines disparaîtraient
dans le présent.
Mais mieux encore, la double causalité est à même de mettre tout le
monde d ’accord sur la question fondamentale : qui, du hasard, de Dieu,
de l’observateur ou du déterminisme, est responsable du choix fati­
dique ?
La réponse est, selon la Théorie de la Double Causalité :
- parfois Dieu, car s’il existe on ne peut exclure une action directe de
sa part sur le futur,
- parfois le hasard, si par exemple le conflit entre réalités multiples est
trop intense,
- parfois l’observateur, lorsque ses intentions ont correctement modelé
son futur,
- parfois le déterminisme, lorsque le futur dépend de la somme des
intentions humaines.
Moralité : il se pourrait que les multiples interprétations de la méca­
nique quantique ne soient inconciliables que parce qu'elles omettent de
faire intervenir le futur, n'ayant pas la possibilité de formaliser la pro­
babilité augmentée de certaines « traces du futur».
En conclusion, nous pouvons compléter notre schéma de création des
traces du futur en distinguant les deux phases suivantes :
une phase de « laisser agir l’intention », à partir de laquelle la
conscience doit « lâcher prise » et cesser de s’occuper du futur, pour
revenir dans le présent et participer à l’action,
une phase d’« actualisation » qui par l’acte d’observation, actualise
l’arrivée d’une nouvelle réalité ou « branche » de vie susceptible de
nous faire bifurquer.
Le « laisser agir », que l’on peut traduire par le lâcher prise lorsqu’il
commence et par le détachement lorsqu’il continue durablement,
serait ainsi un processus très important, car il serait commun à toutes
les situations relevant d’une logique non causale où la Loi de Conver­
gence des Parties intervient:
- Laisser agir le déterminisme inversé, qui va trouver le moyen de me
faire successivement croiser le chemin de différents animaux aux bons
moments, de telle façon que je ne me perde pas et rentre à bon port,
- laisser agir la flèche de l’archer qui, partant du centre de la cible, va
trouver le cheminement cohérent, tenant compte de tous les souffles du
vent, ce qui lui permettra de revenir sur l’arc en fournissant l’impul­
sion fatidique,
- laisser agir la pluie qui, tombant dans une zone de l’espace-temps
multidimensionnel, va grossir des ruisseaux, l’un d’entre eux devant
sourdre au moment opportun et délivrer son message à celui qui a
engendré la pluie,
- Laisser agir la phase de désintrication du processus de décohérence
qui, partant d’un multivers où toutes les possibilités de notre Arbre de
Vie sont encore dans un état probable, doit faire en sorte de majorer la
probabilité du chemin qui nous intéresse et qui est susceptible de se
présenter à notre observation.
A chaque fois, ce serait donc une observation « passive » (au sens du
Zen) mais consciente du temps présent qui validerait l’entrée dans la
réalité d’un potentiel non causal, qu’il s’agisse d’une coïncidence, du
contenu d’une intuition, d’une flèche décochée, etc.
Ainsi, la conscience n’a pas à intervenir de façon réductrice dans l’ob­
servation. Elle ne la détermine pas, elle ne fait qu’ouvrir les champs du
possible avant cette observation qui à elle seule, va figer la réalité. J’in­
siste sur le fait que la conscience n’intervient pas dans le choix du
potentiel qui devient réalité et que seule l’observation compte: il n’y a
pas d’acte de création de la conscience au moment d’une observation.
Voilà tout le miracle de la réduction de la fonction d’onde en un seul
état: la conscience se contente de permettre l’observation ou de ne pas
la permettre, elle nous permet d’être, c ’est-à-dire de vivre l’instant, ou
de ne pas être, c’est-à-dire de laisser le futur agir en faveur de la réali­
sation de nos intentions.
Mais alors, comment prendre une décision, face à une observation qui
nous offre plusieurs alternatives? Le véritable choix ne serait-il pas
plutôt dans le fait de choisir ou ne pas choisir de se laisser porter par
l’intuition? Oui mais que faire devant une observation que l’on fait par
hasard ? Car le hasard arrive effectivement au bon moment lorsqu’il est
« causé » par la seconde causalité, et l’intuition pourrait a priori nous
guider. Mais est-ce bien toujours le cas ?
Ne risque-t-on pas de confondre le hasard de la seconde causalité avec
un « faux » hasard ? Comment observer sans risque de se tromper ce
hasard qui nous ramène des traces de notre futur ou qui nous fait réus­
sir des coups de maître ?
Voyons comment se manifeste le hasard dans le mécanisme de la
seconde causalité. Admettons qu’un potentiel collectif ou individuel de
l’intention humaine à « informer » le futur ait joué un rôle fondamental
dans la fabrication d’un événement que l’on observe par hasard. Il en
découle l’irruption d’une opportunité de choix. Tout cela est très bien,
mais ce futur est-il le nôtre ?
Nous pouvons être mal à l’aise devant une opportunité qui semble
nous suggérer un choix. Faut-il laisser parler notre intuition? Encore
faut-il qu’elle nous apporte tous les éléments de décision. Lorsqu’ils
sont inconscients, tout va bien, nous sommes animés d’une impulsion
qui parle d ’elle-même. Mais lorsqu’il s ’agit d ’une observation
consciente, d’une coïncidence, que doit-on faire? Comment l’interpré­
ter?
Si le hasard est l’allié du processus d’observation qui actualise nos
potentiels de vie, soit, mais il nous manque peut-être des informations.
Tout a beau avoir été calculé par l’univers pour nous « arranger le
coup », mais il peut nous manquer un élément qui emporte notre déci­
sion !
C’est ce que nous allons maintenant examiner, en étudiant les proprié­
tés du hasard.
Résumé du chapitre IX

La Théorie de la Double Causalité met en jeu cinq propositions


étranges de la physique moderne, néanmoins toutes recevables car déjà
proposées par d’illustres physiciens:
Le futur est déjà réalisé.
Le futur influence le présent.
Le futur est multiple.
Nous avons un libre arbitre authentique.
Notre observation influence la réalité.
Le mécanisme de la seconde causalité s’organise en deux phases bien
distinctes :
une phase de « programmation de l’intention », durant laquelle les
potentiels favorables à la réalisation de nos intentions voient leurs
sources futures se remplir,
une phase de « laisser agir l’intention », qui après avoir laissé les pro­
babilités d’un potentiel observable augmenter, fait entrer ce potentiel
dans le présent par notre observation.
Cette phase d’observation peut avoir lieu sans intervention particulière
de la conscience. Celle-ci agit directement sur le futur lorsque nous
forgeons nos intentions. Mais pour que ce futur prenne racine, nous
devons lâcher prise, puis rester détachés. Notre chemin vers ce futur
est alors préparé en coexistence avec d’autres potentiels et la seule
fonction de la conscience, en lien avec l’observation, n’est plus que
« d’être » pour agir et recevoir dans le présent.
Il s’agit d’une interprétation compatible avec le principe de décohé­
rence en physique moderne: le résultat de l’observation est automati­
quement préparé par l’univers.
La question du choix éventuel à faire à l’issue d ’une l’observation
relève de l’intuition ou à défaut, d’informations qu’il nous faut encore
apprendre à capter.
X.
La magie du hasard
Où l ’on s ’aperçoit que les voies du seigneur ne sont peut-être pas
aussi impénétrables qu ’on le dit.

Irène ne sort pas souvent de chez elle, mais elle est très heureuse dans
sa maison isolée en pleine nature, entourée d’animaux sauvages et
familiers avec lesquels elle se plaît à communiquer. Elle nourrit même
un renard qui lui donne du fil à retordre, au sens propre, toujours en
train d’essayer de se frayer un chemin dans son poulailler. Étant donné
cette relation particulière qu’elle entretient avec les animaux, je lui
avais demandé si elle n’aurait pas une anecdote pour mon livre, révé­
lant leurs instincts et notamment leur capacité à détecter nos intentions.
- Tu sais il est très malin mon renard, il sent quand je suis occupée et il
vient parfois en pleine journée trifouiller les fils de mon poulailler.
Tiens d’ailleurs c’est souvent à midi, quand je déjeune ! Mais l’autre
jour j ’ai réussi à le prendre en photo sur le muret.
- Oui mais tu n’aurais pas un fait flagrant, quelque chose d’étonnant,
où l’on se demande comment il fait pour deviner, je ne sais pas, ton
absence de surveillance par exemple ?
- Non... mais par contre, il sent à chaque fois que je le regarde par ma
fenêtre. D ’ailleurs c ’est pour ça que j ’étais tellement contente de le
prendre en photo l’autre jour ! À chaque fois que je le vois il s’enfuit !
- C’est pas mal ça mais... Est-ce qu’il n’y aurait pas des fois où ce
n’est pas immédiat... Où il y a un certain délai entre ton absence... Ah
mais non, comme tu vis seule tu ne peux pas l’observer.
- Ah, je vois ce que tu veux dire, tu sais, c’est pareil avec mes chats
lorsque mon amie Pauline qui les adore vient me rendre visite. Ils le
savent juste avant qu’elle n’arrive. Même lorsqu’ils ne peuvent pas
entendre sa voiture, tu sais, à cause du virage...
- Le virage de Sorine? Ah bon, tu veux dire qu’ils te donnent des
signes alors qu’elle est encore loin et qu’on ne peut pas entendre sa
voiture ?
- Mais oui, bien sûr, et elle est sûrement à plus d’un kilomètre ! C ’est
surtout Lili, elle vient se coller à cette fenêtre, là, tu vois, et elle se met
à miauler en roucoulant, uniquement lorsque Pauline arrive. Pourquoi
tu veux parler de ça? Mais tu sais c ’est l’instinct des animaux, rien
d’autre ! »
- Oui, mais ce n’est pas une explication l’instinct, ça ne veut rien dire,
c ’est ce qu’on dit quand on ne comprend pas, justement ! Ah mais c’est
pas mal ça, et en plus j ’ai déjà lu ce genre de trucs, tu sais dans le bou­
quin que je t’ai prêté.
- Tu veux dire qu’avec ta théorie tu aurais une autre explication que
l’instinct?
- Ben oui, à cause de l’observation. L’instinct s’explique par l’obser­
vation. C ’est très important la capacité d’observation. Les animaux ne
pensent pas, ne raisonnent pas, et du coup ils ont une bien meilleure
capacité d’observation que nous. Pas seulement par les yeux, ils bou­
gent leurs oreilles, ils sentent les odeurs... en fait, ils détectent un tas
de choses et savent reconnaître des signes bien plus facilement que
nous. »
- Des signes? Mais comment veux-tu qu’il y ait des signes que Pau­
line arrive dans tout ce qu’observe Lili?
- Alors ça, je ne suis pas dans le cerveau de ta chatte. C’est elle qui se
fabrique ses codes. Je te parle de l’observation par Lili de choses inha­
bituelles qui ne sont pas du tout produites par l’arrivée de ton amie
mais qui pour Lili signifient qu’elle va arriver. Parce que ça vient du
futur, tu comprends ? »
- Heu, je ne suis pas bien sûre de te suivre...
- Je ne sais pas, si par exemple Lili entend un son au loin, ça peut être
un oiseau, n’importe quoi, en même temps qu’elle te voit en train de te
lever de ta chaise, ou qu’une feuille tombe, peut-être que pour elle ça
signifie que Pauline arrive...
- Mais ça n’a rien à voir, je ne comprends pas, c ’est bizarre ton his­
toire.
- Mais non, au contraire c’est très simple, ta Lili s’est peut-être fabri­
quée toute seule des codes inconscients qui se mettent en branle
lorsque Pauline dans sa voiture est enchantée par le paysage
lorsqu’elle s’approche de chez toi, lorsqu’elle s’imagine déjà en train
de partager son plaisir avec toi, quelques minutes après !
- Où là, mais c’est magique ton histoire ! Tu es sûr que tes lecteurs ne
vont pas penser que tu fumes un peu la moquette ?
- Ne t’inquiète pas, dans mon livre je passe au contraire mon temps à
les ennuyer avec des explications rationnelles qui sont loin d’être aussi
légères...
Et parmi ces explications peu légères, il y a celles de la physique
moderne, qui nous ont aidés à comprendre les deux aspects fondamen­
taux du mécanisme de la seconde causalité :
Nos intentions agissent dans le futur pour préparer nos futurs poten­
tiels,
Nos observations agissent dans le présent pour accueillir l’un d’entre
eux.
Lorsque nos observations parlent directement à notre inconscient en
faisant surgir une intuition, nous percevons une information qui nous
oriente vers le choix qui convient, ne sachant même pas d’où elle pro­
vient. Mais lorsque ces observations parviennent directement à notre
conscience comme dans le cas des coïncidences, un temps de réflexion
nous est imposé, car nous ne savons pas les interpréter. Nous ne savons
pas si elles transportent un sens qui nous concerne, et même dans le
cas où nous en serions persuadés, nous ne savons pas décoder ce sens
pour autant, afin d’en déduire une information, un choix ou une action
éventuelle. C ’est du moins le cas pour une grande majorité d’entre
nous.
C ’est bien là tout le problème des événements improbables qui sur­
viennent par hasard. Leur improbabilité nous interpelle mais faute de
mode d’emploi, nous ne savons qu’en faire. Elles représentent un défi
à notre libre arbitre, car elles nous suggèrent d’en tenir compte. Cer­
tains y voient des signes, oui mais des signes de quoi? Nous avons
déjà examiné le caractère très aventureux de penser ainsi.
Faisons une incartade sur la Route du Temps pour mieux comprendre
les rapports ténus entre hasard et libre arbitre.
On rappellera tout d’abord qu’il est impossible de réaliser un objectif
tirant profit du hasard si nous poursuivons notre parcours sur cette
route sans jamais bifurquer de façon non conventionnelle, car ce serait
agir avec le même conditionnement que le commun des mortels. Et
l’on notera que la rencontre d’une bifurcation pouvant suggérer le bon
chemin à prendre devrait respecter deux conditions, si l’on veut qu’elle
soit productive :
- la programmation mentale d ’un projet a eu lieu (intention),
- la découverte du chemin doit se faire par hasard (observation).
Et de plus, l’intention devrait être à ce moment-là oubliée, ou tout au
moins ne pas parasiter notre conscience.
Sur la Route du Temps, nous n’avons généralement pas d’autre choix
raisonnable que de suivre la route. Et en général, même si nous voyons
que de temps à autre se présente une voie secondaire, un sentier ou un
cours d’eau qui croise notre route, nous ne nous sentons pas concernés
par l’idée de bifurquer.
Car la route principale est infiniment plus sécurisante, et il faudrait
avoir une très bonne raison de la quitter pour un sentier dont on ne sait
pas où il pourrait nous mener.
Par contre, si nous nous sommes programmés mentalement à changer
d’orientation pour trouver quelque chose, si nous sommes prêts à
abandonner la sécurité offerte par la voie principale, si nous sommes
ouverts à l’idée de cheminer seul, là où personne ne va ou si peu, le
long d’un chemin qui pourrait nous réserver bien des surprises, alors la
situation est différente. Tout devient possible et nous devenons récep­
tifs aux indices.
Mais il nous faut attendre. Car le moment où nous nous sommes inves­
tis de ce projet aventureux n’est pas le bon moment pour réaliser notre
objectif. Et même lorsqu’on s’est laissé distraire de cette intention, le
fait de rencontrer un sentier qui nous suggère une bifurcation n’est pas
une raison suffisante pour le suivre. À ce compte, tous les aléas de la
route parasiteraient notre libre arbitre.
Contrairement à ce que la seconde causalité aurait tendance à nous
faire penser, la bonne façon d’exercer notre libre arbitre est donc plutôt
de le rendre le plus indépendant possible de ces aléas, comme dans le
cadre causal où nous nous donnons les moyens de réaliser nos objec­
tifs ! Rien n’est changé ici ! Car il importe que nous ne passions pas
notre temps à surveiller des opportunités. Non seulement ce serait
épuisant, mais cela reviendrait à tomber dans le piège du tireur à l’arc
qui raisonne son acte.
Supposons maintenant que durant notre avancée sur la Route du
Temps, un animal traverse la route sous nos yeux pour s’engouffrer
dans un sentier non suspecté. On pourrait trouver bien d’autres exem­
ples, comme le fait d’entendre un animal émettre un cri inconnu. Car
l’important ici est la simultanéité entre un événement déjà rare par
essence et sa survenue à l’endroit précis d’une bifurcation potentielle.
Vous me direz que ceci n’a rien à voir avec notre objectif et que par
conséquent empmnter à notre tour ce sentier serait insensé. Mieux vaut
attendre un autre indice, ayant un lien avec ce que l’on cherche.
C’est exact, si effectivement on attend un tel indice. Par contre, si le
fait de voir cet animal traverser à cet endroit a réveillé notre intention
dormante en nous faisant sourire intérieurement à l’idée d’emprunter
ce sentier, alors il n’y a guère d’hésitation à avoir.
Mais encore faut-il être sensible à ce genre de « signes ». La seconde
causalité ne peut en effet créer un « pont temporel » que si nous
sommes prêts à faire usage de tels indices, sans quoi aucun pont ne
pourrait se former.
Car c’est bien notre réceptivité à ce genre d’indices qui valide leur
usage, en vertu d’une sorte de rétroaction, une boucle temporelle mise
en place entre notre présent et notre futur déjà présent. On pourrait dire
que la Loi de Convergence nous sachant réceptifs, elle dispose de
moyens accrus pour nous envoyer des ponts temporels, notre ouverture
à de tels indices pouvant même être précisée au moment de « program­
mer » notre intention. Nous pourrions ainsi « codifier » l’interprétation
à donner à nos observations, comme le fait l’instinct animal ! Sauf que
dans le cas présent, cela se ferait consciemment.
N ’est-ce pas déjà un peu magique?
Nous commençons à entrevoir comment le hasard et le libre arbitre
peuvent ainsi s’associer, en l’occurrence lorsqu’une clé nous est four­
nie précisément par le hasard.
Ce genre de clé, couramment appelée « signe », n’est indécodable que
parce que nous n’avons jamais appris à en faire usage, et encore moins
à en programmer les codes nous-mêmes. La preuve, c’est que nous ne
faisons même pas la différence entre le « signe » et son « code » :
Le code est l’ensemble d’indices qui contient l’information attendue,
ici l’indication du sentier.
Le signe est la « signature », le « coup de tampon » de la Loi de
Convergence des Parties, qui valide l’authenticité du pont temporel :
son improbabilité.
La clé est l’ensemble des deux, le code accompagné du signe.
Ce qui caractérise une clé est donc avant tout sa signature : la très fai­
ble probabilité du hasard qui lui est associé. Si cette probabilité est très
faible parce qu’il y a coïncidence entre plusieurs éléments eux-mêmes
improbables, alors le code proviendra de l’association entre ces élé­
ments. Ici, le fait de voir un animal traverser est improbable, mais c’est
encore insuffisant. C’est le fait que ce hasard nous dévoile une bifurca­
tion qui le rend très improbable car les animaux traversent n’importe
où. Lorsque cela réveille de plus une intention, nous avons là toutes les
caractéristiques d’une signature.
Dans la réalité, la Route du Temps peut être remplacée par un train, un
aéroport, une plage, le métro, un cirque, etc. Le sentier peut être rem­
placé par un incident quelconque, même infime, détecté sur l’une de
ces scènes : il nous suggère une opportunité, susceptible de nous faire
bifurquer, de changer quelque chose à notre vie, si bien sûr nous nous
sentons concernés.
Ayant maintenant compris l’alliance possible entre le hasard et le libre
arbitre, il reste néanmoins à bien définir ce qu’est un événement dû au
hasard, à savoir de quel hasard nous parlons. Car nous ne sommes évi­
demment pas à la source de tous les hasards, et d’autre part certains
hasards peuvent n’être qu’apparents. De plus, pourquoi invoque-t-on
aussi souvent le hasard lorsqu’on est confronté à des situations où bien
au contraire, notre libre arbitre n’entre pas en jeu ?
On invoque en effet généralement le hasard à propos d’un événement
dont personne n’est responsable. Il s’agit alors d ’un événement qui
aurait pu ne pas se produire, ou survenir d’une autre manière. Il y a
toujours, dans l’invocation du hasard, un sous-entendu indéterministe.
Par exemple, une tornade qui détruit une habitation aurait pu passer à
côté. Un perdant du loto aurait pu gagner. Un blessé aurait pu ne pas se
trouver sur la trajectoire d’une balle perdue. Un promeneur aurait pu
ne pas ramasser un billet de banque. Bien que tout ceci semble surve­
nir indépendamment de la volonté des personnes impliquées, le hasard
a apparemment le pouvoir de complexifier l’Arbre de Vie de ces per­
sonnes.
Dans tous les cas, chaque événement était imprévisible et indétermi­
niste: il y a donc en même temps que cette absence de sens, une très
nette présence de bifurcations.
Cela signifierait-il que la richesse de notre Arbre de Vie n’est pas seu­
lement due à notre libre arbitre mais également au hasard ? Le hasard
concurrencerait-il à nouveau notre libre arbitre dans le déploiement de
notre Arbre de Vie?
La réponse « oui » semble évidente à première vue, mais cela suppose­
rait pourtant deux choses :
que l’événement qui nous a fait bifurquer (subir ou gagner) soit indé­
pendant de nos intentions,
que cet événement ne soit pas non plus le résultat d’un hasard détermi­
niste.
Il nous faut en effet prendre en compte l’existence du hasard détermi­
niste, celui dont nous avons déjà vu qu’il n’a pas d’incidence sur notre
Arbre de Vie car il n’intervient que dans des circonstances où nous
ignorons les véritables causes des événements, lesquels sont inélucta­
bles en quelque sorte.
Le hasard déterministe n’est pas un vrai hasard mais seulement un
hasard apparent : il est le produit de notre ignorance des conditions qui
président à la loi de cause à effet, ou comme disent les physiciens, de
notre ignorance des « variables cachées » qui président au déroulement
des événements. Il correspond à un événement prévisible mais non
calculable parce que nous n’avons pas les éléments pour le faire.
Nous laissons de côté ce type de hasard déterministe dans la mesure il
ne modifie pas notre Arbre de Vie, mais il est important de savoir que
les deux hasards sont indiscernables et que ceci peut être une source
d’erreurs et de confusions lorsqu’on est en quête d ’indices ou de
signes. Nous aborderons plus loin la stratégie du « joker » à adopter
face à ce risque.
Pour l’instant, nous allons dégager une subtilité du hasard: il peut pas­
ser subitement de l’état de vrai hasard indéterministe à un état de faux
hasard parfaitement déterministe, au moment d’une observation.
Supposez par exemple que vous ayez un billet de loterie en poche et
que théoriquement, tant que vous ne connaissez pas le tirage, vous êtes
potentiellement gagnant. Est-ce un vrai hasard lorsque vous découvrez
longtemps après le tirage que vous avez gagné, ou encore perdu ?
La réponse est oui, mais à condition de ne pas savoir ce que vous aviez
joué, ni personne d’autre. Car dans ce cas il est clair qu’il est impossi­
ble de changer votre mise. Donc, à partir du moment où le résultat et
votre mise ont tous deux été observés, ce que vous découvrez ne res­
sort plus du hasard, en tout cas pas du vrai.
Dans l’intervalle, si quelqu’un découvre votre mise vous devenez obli­
gatoirement perdant ou gagnant sans même que vous le sachiez, alors
que vous croyez encore pouvoir gagner; votre avenir a été actualisé
par une autre observation que la vôtre !
A cause de cela, certaines personnes qui se croient malchanceuses
demandent souvent à d’autres de regarder leur billet avant de les infor­
mer, comme si elles voulaient leur déléguer leur chance. Elles ont ainsi
l’intuition d’un lien entre la notion de hasard et la notion d’observa­
tion: c ’est le premier observateur d ’un événement qui « fige » son
contenu et empêche qu’il soit modifiable. Mais attention : je n’ai pas
dit que l’observateur décidait lui-même du contenu de l’événement.
Car nous n’avons aucune raison de penser que ce qui est vu et ce qui
est attendu par l’observateur puissent être corrélés, et nous avons
même de bonnes raisons de penser le contraire.
En physique, à l’échelle des particules, c’est la « réduction de la fonc­
tion d’onde » qui fige l’état d’un système lors de son observation. Se
pourrait-il que le même phénomène ait lieu à l’échelle macrosco­
pique? Cela reste un mystère, car à l’échelle macroscopique on ne sait
pas mettre en évidence l’équivalent de Y intrication, et il est fort proba­
ble que les potentiels soient non pas intriqués, mais séparés dans des
univers parallèles, ce qui expliquerait pourquoi l’indéterminisme
macroscopique soit si difficile à mettre en évidence.
Admettons-le cependant, et revenons maintenant à cette bizarrerie du
hasard indéterministe qui disparaît subitement, lors d’une observation
par quelqu’un qui le transforme en un hasard déterministe.
Est-ce que cela voudrait dire que quoi qu’il arrive, lorsque ce n’est pas
nous qui influons sur l’événement, c’est forcément quelqu’un d’autre,
et que d’une certaine manière le hasard n’existerait pas au sens où il
n’interviendrait dans aucun choix?
Voyons ce que nous apprend la physique sur la question du hasard: on
peut déduire de nos connaissances scientifiques actuelles qu’il existe
deux sortes de hasard : d’une part un hasard macroscopique engendré
par l’effet « papillon » de la Théorie du Chaos et plus généralement
par l’effet dispersif du verre éclaté et de bien d’autres phénomènes
(indéterminisme macroscopique: voir chapitre XXII), lequel hasard
préside aux phénomènes imprévisibles à l’échelle macroscopique;
d’autre part un hasard microscopique à l’œuvre à l’échelon quantique,
dénommé « réduction de la fonction d’onde » car il préside au com­
portement indéterministe des particules.
C’est ce dernier hasard auquel on associe la notion d’« actualisation »
dès que l’événement auquel il fait référence est observé, « réduction de
l’onde » ou « actualisation » étant des notions équivalentes. Mais il n’y
a aucune raison de penser que le hasard macroscopique, chaotique ou
dispersif, ne puisse pas faire l ’objet lui aussi d ’une actualisation,
puisqu’il s’agit là tout autant d’un hasard indéterministe et c’est bien là
notre argument de base.
Or ce dernier hasard semble à l’œuvre dans des situations diverses où
nos intentions semblent parfois passives, parfois actives.
Par exemple, le fait qu’un passant reçoive une tuile sur la tête ou
trouve par terre un billet de banque relève plutôt de hasards où il est
passif, alors qu’un tirage au sort relève plutôt d ’un hasard où nous
sommes actifs, celui dont notre « intuition » nous laisse à penser qu’on
pourrait par chance l’activer, sinon beaucoup moins de personnes joue­
raient au loto.
Pourtant, d’un point de vue physique il n’y a pas de raison de penser
qu’on pourrait activer le tirage d’un bon numéro plus facilement que la
chute d ’une tuile, à probabilités égales. C ’est-à-dire que ce fameux
hasard qui laisse à penser que nous sommes passifs devant lui n’est ni
plus ni moins actualisable que l’autre, celui qui fait l’objet des jeux de
hasard. C ’est la probabilité qui gouverne. Les deux types étant aussi
indéterministes l’un que l’autre, il n’y aucune autre différence.
Dans tous les cas, et d ’après la Théorie du Chaos et la mécanique
quantique qui excluent toutes deux l’interprétation déterministe pour
laquelle une seule issue est possible, le hasard indéterministe serait
extraordinaire, car contrairement à nos habitudes de penser, il engen­
drerait la coexistence d’une infinie richesse de futurs potentiels, parmi
lesquels un seul d’entre eux sera actualisé en devenant celui que nous
allons réellement vivre. Or ne serait-ce pas ignorer la présence du futur
et oublier une influence incontournable de notre libre arbitre sur le
futur?
On pourrait ainsi répondre à notre interrogation sur le hasard en
concluant que finalement il n’existe pas, puisque tout ce qui n’est pas
déterminé par le passé le serait par le futur et même souvent bien avant
qu’il n’entre dans le présent, mais ce serait faire peu de cas de la possi­
bilité de coexistence de multiples futurs potentiels jusqu’au dernier
moment, celui du présent.
Avant d’étudier cette possibilité, remarquons que la coexistence de
multiples futurs potentiels due à l’indéterminisme macroscopique nous
commande de différencier pour un même système, qu’il soit vivant ou
artificiel, deux formes d’existences, toutes deux compatibles avec les
lois de la physique :
de multiples formes d’existences possibles mais non observées,
une seule forme d’existence vécue, observée seulement dans l’étendue
de notre passé.
Ces deux formes d ’existences n’en sont pas moins réelles, dans la
mesure où l’espace est assez grand pour les contenir.
Et je précise que du point de vue scientifique, rien ne permet de décla­
rer que l’une de ces formes d’existence soit plus réelle que l’autre, en
dehors de notre simple vécu. J’insiste sur cette différence entre vécu et
réalité. Car si nous prétendions l’inverse, ce serait exactement comme
si nous prétendions qu’il n’existe pas d’autres planètes habitables que
la nôtre, sous prétexte que nous n’en avons jamais observé une seule.
Ou encore, comme si nous prétendions que Theopolis n’existe pas,
sous prétexte que nous ne l’avons pas trouvée.
L’introduction abusive du hasard pour élucider le paradoxe de l’obser­
vateur en physique quantique se voit ainsi éclaircie par la nature spa­
tiale du temps : toutes nos existences possibles existent déjà réelle­
ment, mais une seule sera vécue. Il fallait juste faire cette différence
entre « vécu » et « existence ». Il n ’en reste pas moins que la « réalité »
de ces deux formes d’existence ne fait aucun doute. L’abus provient
alors de l’attribution au hasard de la fonction qui fait passer de l’exis­
tence au vécu. Car ne serait-ce pas plutôt la fonction de la conscience,
ou tout au moins de l’observation, que de réaliser ce passage?
Cette distinction entre existence et vécu est également la raison pour
laquelle il n’est pas obligatoire pour nous, avec notre modèle de l’Ar-
bre de Vie aux multiples existences, de faire appel à la notion de réin­
carnation, même si je dois rester honnête en précisant qu’on ne peut
pas non plus l’exclure.
Car ce que je vais maintenant énoncer peut laisser penser que l’incar­
nation, ou encore la réincarnation, peut avoir une certaine utilité. Je
veux dire par là que si cette notion reste tout à fait inutile à notre théo­
rie, elle pourrait bien ne pas être inutile à notre univers.
En effet, l’univers n’attend pas que notre futur devienne notre présent
pour en déterminer la structure. Il est déjà remarquable qu’il accepte la
possibilité que nous puissions modifier cette structure future par nos
changements d’intentions. Mais il est indispensable que ces modifica­
tions soient préparées sans attendre qu’elles soient actualisées par le
temps présent, afin de garantir leur stabilité. Il serait en effet insensé
que l’univers attende par exemple que ma vie se termine, pour modi­
fier d’un seul coup sa structure, par mise à jour de toutes les incidences
engendrées par ma vie. Ce serait d’autant plus insensé que ces inci­
dences sont intriquées avec celles de toutes les autres personnes qui ne
meurent pas en même temps que moi, sur lesquelles mon existence a
eu également une incidence, et ainsi de suite...
Il est donc plus logique qu’à chaque instant du temps présent l’univers
mette à jour instantanément l’ensemble de sa structure future (et pas­
sée !), le présent ne signifiant pour lui rien d’autre qu’un processus
d’actualisation de changements qui sont déjà préparés, c’est-à-dire réa­
lisés au sens de leur existence, mais pas encore au sens de leur vécu.
Il faut donc, en logique non causale, c’est-à-dire en seconde causalité,
raisonner avec cette idée que nos changements d’intention réels créent
instantanément une modification de nos existences futures - remplace­
ment d’une ancienne par une nouvelle dont le scénario est devenu plus
probable. Nous sommes en effet obligés de travailler avec des probabi­
lités dans la mesure où ce nouveau scénario est toujours susceptible de
changer aussi longtemps qu’il n’est pas actualisé.
On pourrait alors faire l’hypothèse que le basculement de scénario, de
l’ancien vers le nouveau, se produit lorsque la probabilité du nouveau
scénario dépasse celle de l’ancien, au dernier moment !
Or que se passe-t-il en dernière instance, juste avant qu’un potentiel
entre dans la réalité ?
C’est le moment où l’observation entre en scène ! Or on peut très bien
imaginer qu’une faculté d’observation d’un seul coup « aiguisée » par
un avertissement ou une vigilance accrue sera au dernier moment
capable de privilégier l’entrée dans la réalité d’un nouveau scénario,
d ’une nouvelle branche de notre vie dont la probabilité était, avant
l’avertissement, beaucoup plus faible.
Nous voyons ainsi que les facteurs influençant les probabilités d’entrée
dans la réalité d’une nouvelle branche de vie sont complexes, car ils
dépendent au dernier moment de nos facultés d’observation. Ces pro­
babilités oscillent !
La probabilité d’actualisation d’un nouveau scénario de vie varie donc
en permanence en fonction de nos actions et de nos états mentaux. Il
est évident que si, pour une raison ou pour une autre, alors que nous
sommes déjà « engagés » à saisir une opportunité non causale, nous
nous laissons distraire au dernier moment, alors la probabilité de ce
scénario va se mettre à fondre rapidement comme neige au soleil, ou
comme les cours de la bourse durant un Krach.
Cette probabilité pourra alors être au dernier moment dépassée à nou­
veau par celle de l’ancien scénario qui serait alors maintenu.
Mais si cet ancien scénario, ainsi que tous les autres concurrents, ont
également vu dans le même temps leur probabilité chuter parce que
notre nouveau comportement est devenu incompatible avec leur réali­
sation, alors le nouveau scénario pourra voir ses chances de réalisation
maintenues malgré tout, c’est-à-dire malgré une probabilité devenant
ridiculement faible ! Même si nous sommes distraits !
C ’est alors que se manifestera comme par enchantement dans notre
environnement, si bien entendu nous y sommes préparés, un phéno­
mène de très faible probabilité qui aura en quelque sorte pour effet de
nous réveiller de notre distraction !
Afin de maintenir, ne serait-ce que pour préserver la stabilité de l’uni­
vers, ce qu’il avait déjà programmé pour nous et qui redevient au der­
nier moment la version la plus probable.
Et c ’est ainsi que, par un mécanisme aussi rationnel que la logique
causale, parvient ainsi à se produire le miracle non causal des hasards
extraordinaires !
Allons encore plus loin et considérons maintenant quelle peut bien être
la signification d’un tel mécanisme, voyant émerger un événement
improbable parce que la voie causale, la voie « raisonnable » est deve­
nue encore plus improbable. Dans quelles circonstances de la vie
observe-t-on justement ce genre d’événements ?
Tout simplement lorsque nous prenons des risques, ou encore, lorsque
nous nous sommes perdus !
Ou, si l’on préfère, lorsque nous nous mettons dans des situations
complexes, souvent imprévues et parfois critiques, nous obligeant à
« nous mouiller », à nous mettre en danger, à nous impliquer d’une
manière radicale, interdisant tout retour à un scénario de vie devenu
caduque du fait même de cette prise de risque. Les exemples abon­
dent : prendre le risque de se retrouver dans une très mauvaise situation
afin d’aider quelqu’un dans l’épreuve, prendre le risque de modifier
son image de marque par un discours osé auprès de ses collaborateurs,
prendre le risque de faire face à une situation de crise, etc.
Voila pourquoi il est un peu rapide de conclure que le hasard n’existe
pas, car dans les situations de crises où tout peut arriver, personne ne
sait quel est l’élément qui en fin de compte déterminera l’issue, ou
disons qu’il est encore trop tôt pour le dire: nous n’avons pas encore
récupéré toutes les clés, il nous manque la plus importante. Mais avant
de commencer à la dévoiler, j ’aimerais insister sur la fonction princi­
pale et absolument essentielle du hasard : celle du hasard bon pour la
santé.
Il faut en effet user des processus de non-causalité avec une grande
modération, car nous avons ici une drogue potentielle.
Afin de garantir notre équilibre, nous devons opter pour une autre utili­
sation du hasard que celle qui consiste à toujours en attendre (sans
attendre) des signes qui se présentent à nous. Car on imagine bien que
pour développer une telle réceptivité, il va nous falloir « vibrer » à un
niveau d ’énergie plutôt incompatible avec la tranquillité dont nous
avons tous besoin dans notre vie quotidienne.
Quelle que soit la manière dont il se manifeste, le hasard reste compa­
tible à notre Arbre de Vie en nous laissant la possibilité de le laisser
jouer à notre place comme si on abattait une carte joker, comme un
« je ne sais pas » nous permettant de réserver notre interprétation ou de
n’en faire aucune. Lorsque l’on n’a pas envie de « laisser agir », d’ob­
server passivement, de ressentir, de décoder, puis de comprendre, on a
cette possibilité très saine de servir la carte « joker ».
Cette carte devrait être jouée aussi longtemps qu’une nouvelle voie ne
s’impose pas à nous de façon indiscutable, que nous l’ayons actualisée
ou que nous soyons emportés dans son courant de conditionnement.
Car la vie n’est pas un long fleuve tranquille et nos arbres de vie sont
intriqués les uns dans les autres: lorsque nous n’actualisons rien, nous
pouvons subir des changements actualisés par les autres.
Cette carte « joker » du hasard nous permet aussi de conserver notre
liberté de choix pour la reporter dans le temps. Si nous n’avions jamais
besoin de reporter nos décisions dans l’attente de plus d’informations,
d’un meilleur jeu, le hasard n’aurait pas besoin d’exister et donc de
s’exprimer par cette carte. Dans le cas où nous n’exploitons pas notre
jeu, le hasard est tenu pour responsable de notre impuissance, de notre
irresponsabilité, de notre absence de chance ou encore de la fatalité :
dans ce dernier cas, le joker est mal joué, ou trop souvent. Lorsqu’il est
bien joué, il nous permet au contraire de reporter une exploitation plus
efficace de notre libre arbitre au moment opportun. Tout se passe alors
comme si en échange du joker nous étions sollicités à nous préparer, à
nous « éveiller » : tel est le véritable bienfait du hasard improbable.
Rien ne nous empêche d’accumuler sans agir les intuitions ou les coïn­
cidences, jusqu’au moment où nous déciderons que nous en avons
assez pour agir en conséquence.
Car attention: un dicton résume bien la nécessité d’être prêt à assumer
les conséquences des changements que nous risquons de provoquer :
« Fais attention à ce que tu demandes, car tu risques de l’obtenir ! »
Comment nous protéger contre de tels aléas, qui proviennent du fait
que les voies de la seconde causalité sont impénétrables ?
Nous n’avons effectivement pas encore abordé la question qualitative,
celle du bien et du mal. Nous avons toujours implicitement supposé
que la seconde causalité ne pouvait ne nous apporter que du bien, dans
la mesure où elle est censée réaliser nos intentions ! Mais est-ce bien
certain ?
Il est temps de s’intéresser à la dernière clé, à la propriété la plus fon­
damentale de l’essence même du hasard, en reconsidérant notre Arbre
de Vie.
Comment un nouveau branchement devient-il évident à chaque fois
que se présente une nouvelle bifurcation? Pourquoi, si nous étions
orientés vers une branche, changeons-nous d ’orientation avec
confiance? Comment s’opère un changement serein, sans la moindre
incertitude? Comment savoir si en « débranchant » notre ancienne vie,
nous allons réellement vers la vie que nous avons choisie? Comment
trouver en plus de l’exercice de notre libre arbitre, le bonheur de
l’exercer?
Car si nous savons maintenant que le hasard peut nous fournir l’oppor­
tunité de nous orienter selon nos choix, nous n’avons encore aucune
idée du facteur qui intervient dans la qualité du hasard, dans l’intérêt
réel qu’il représente pour nous, dans la pertinence de ses codes, dans
ce qui fait son infime probabilité, dans la facilité avec laquelle il peut
être interprété, et finalement dans tout ce qui fait sa magie !
Ne faudrait-il pas tout simplement arroser notre Arbre de Vie ?
Ce facteur serait ainsi fluide : pour faire pousser de nouvelles branches
nous devons arroser notre Arbre, sinon les branches ne peuvent pas
pousser et les bifurcations ne peuvent pas naître. Sans eau, aucune
branche ne peut en créer ou en rencontrer une autre et nous risquons
d’emprunter des branches fragiles. Aucune fleur ne peut apparaître.
Sans eau, non seulement l’Arbre ne peut pas pousser, mais lorsque
nous suivons ses branches nous ne pouvons pas trouver de traces, car
c’est l’eau qui les transporte.
Quelle peut donc bien être la signification réelle de toute cette eau ?
Quel est ce fluide vital qui peut arroser la Route du Temps et nos
Arbres de Vies ?
Quelle est l’essence intime de tous ces fluides, dont l’amplitude aug­
mente avec notre capacité à créer de la magie dans notre existence ?
Nous découvrirons en partie IV les réponses à ces questions.
Mais avant cela, il nous faut soumettre cette théorie à l’expérimenta­
tion réelle, à l’épreuve des faits, afin que ces réponses si importantes,
que nous aborderons ensuite, soient authentifiées !

Résumé du chapitre X

Certaines coïncidences deviennent signifiantes lorsqu’elles transpor­


tent une double information: un code et une signature. Le code (ou
sens) nous indique la voie à suivre alors que la signature (ou signe)
nous indique que l’information est fiable, mais seulement lorsque l’ob­
servation a une très faible probabilité.
La T.D.C. repose sur une distinction fondamentale entre existence et
vécu: il n’est pas nécessaire que les choses soient observables pour
exister, mais aussi longtemps que les choses ne sont pas observées,
elles existent de toutes les façons observables possibles.
Il résulte de la double causalité que rien n’arrive par hasard dans la
mesure où tout ce qui n’est pas causé par le passé est causé par un
futur inconnu. Un hasard sans cause ne peut exister car le simple fait
de l’observer lui confère une cause cachée, car future. Toutefois, invo­
quer le hasard reste très bon pour la santé.
Car les causes cachées peuvent rester floues, complexes, impénétra­
bles et il importe de rester sceptique en jouant abondamment la carte
joker: c’est du hasard, je n’en tiens pas compte, j ’attends plus d’infor­
mations.
Pour que le sens du hasard « coule de source » et devienne évident,
pour que la seconde causalité devienne pénétrable par les eaux et pro­
duise des effets « magiques », nous devons arroser notre Arbre de Vie.
Mais l’arroser avec quoi ? Voilà la question !
Troisième partie

COÏNCIDENCES
XI.
Le dépôt de l’intention
Où Ton découvre une approche expérimentale de la synchronicité qui
consiste à dialoguer avec soi-même en se prenant
pour quelqu’un d ’autre.

« Tu vois le miracle venir


Seulement si tu t’oublies.
C ’est le secret des secrets »
Dialogue avec l ’Ange, entretien 19 avec Lili.

Comme autant de tous petits miracles, des coïncidences étranges s’in­


sinuent parfois dans notre vie comme une invitation à lire un message
qui nous serait destiné, mais elles ne provoquent la plupart du temps
guère plus qu’un sourire ou un certain amusement, car nous ne savons
ni d’où elles proviennent, ni comment les interpréter. Certains parlent
de « signes ». Mais des signes de quoi? L’univers aurait-il oublié de
nous livrer son mode d’emploi?
Nous les mettons donc en général sur le compte du hasard, et beau­
coup d’entre nous, convaincus d’être dotés de bon sens ou d’un esprit
critique ou scientifique, mettent sur le compte de l’« irrationnel » toute
initiative d ’interprétation de tels « messages » sans réalité causale.
Pourtant, le phénomène est indiscutable et a fait de tout temps couler
beaucoup d’encre [15] [21] [26], bien qu’il reste à ce jour une énigme
pour la science.
Cependant, notre Théorie du Temps nous donne maintenant les clés
pour comprendre l’origine de beaucoup de ces coïncidences, en parti­
culier celles que l’on nomme synchronicités, en nous expliquant leur
mécanisme et en les faisant ainsi apparaître comme des phénomènes
tout à fait naturels, probablement provoqués par nos intentions.
Nous avons montré comment notre libre arbitre pouvait faire du hasard
un allié susceptible de transporter à notre attention, comme « coulant
d’une source située dans notre futur », les clés d’un cercle vertueux de
soutien non causal à des projets issus de nos intentions. Encore faut-il
savoir observer puis décoder ces clés transportées par le hasard, ces
traces de notre futur que nos intentions génèrent.
En l’absence de telles clés, nous assistons passivement aux phéno­
mènes de synchronicité, qui parfois nous facilitent la vie, sans com­
prendre par quel « miracle » nous pourrions en être l ’origine. Ne
sachant pas de quelle source ils proviennent, prisonniers d’un dogme
déterministe ou rationaliste qui voudrait nous faire croire que la
logique et le « bon sens » doivent reposer uniquement sur la causalité,
nous osons à peine en saisir le sens ou en retirer l’avantage.
Sachant, selon cette Théorie du Temps, que les causes peuvent décou­
ler des effets autant que les effets des causes, nous sommes maintenant
conduits à considérer le hasard autrement que source de désordre.
Puisqu’il est acquis que le hasard pourrait transporter un sens corrélé
avec nos intentions, une nouvelle conception de l’être humain et de
son univers physique peut commencer à émerger, nous libérant du
paradigme déterministe pseudo-scientifique dans lequel nous sommes
plongés depuis plusieurs siècles.
Il est difficile de prendre toute la mesure de cette nouvelle conception
du temps tellement elle nous dépasse. Néanmoins, nous devons rester
très prudents face à la brèche qu’elle entrouvre car elle est susceptible
de nous faire dire n’importe quoi, et de nous faire agir n ’importe com­
ment. Tout bien considéré, j ’entrevois l’idée qu’elle pourrait nous
conduire à une certaine élévation spirituelle, ce qui me fait dire qu’il
serait temps que les scientifiques en général - et pas seulement les phy­
siciens qui ont depuis longtemps ouvert cette brèche - commencent à
s’intéresser aux questions de « foi » en réconciliant science et religion,
métaphysique* et spiritualité, conscience et âme.
Si cet ouvrage devait être utile à une seule chose, mon vœu serait qu’il
contribue à la compréhension du principe fondamental qui est à l’œu­
vre dans toute création, dans tout projet quels qu’ils soient y compris
scientifiques et technologiques, car c’est le fondement de la double
causalité, de la réunification entre science et religions, et de l’union
entre science et spiritualités.
Avant de commencer la rédaction de ce livre, j ’avais accumulé suffi­
samment d’expériences personnelles, de réflexions et de lectures pour
être convaincu de la réalité d’un phénomène inexpliqué par la science.
J’ai voulu relever ce défi sans savoir que cela me mènerait aussi loin !
Mais je n’avais aucune preuve et ressentais la nécessité impérieuse de
trouver une approche expérimentale de la synchronicité.
C’est la lecture du livre « Dialogue avec l’Ange » de Gitta Mallasz
[18] qui m ’a fourni, au hasard de vacances en Haute-Provence, le
déclic, le « Eurêka » menant au protocole expérimental adéquat.
J’avais déjà en tête l’idée que les synchronicités pourraient être volon­
tairement provoquées. Cette lecture m’a permis de comprendre les der­
nières « règles » ou attitudes à respecter pour avoir une chance de
déclencher l’effet souhaité. Le protocole que j ’ai utilisé pour cela serait
certainement inadmissible dans le cadre d’une approche expérimentale
se voulant sérieuse et il ne valait donc que pour moi seul, mais je ne
résisterai pas au plaisir de vous raconter cette histoire de « dialogue
avec l’Ange », bien qu’elle soit intellectuellement intime.
Pour comprendre ce protocole expérimental, voyons tout d’abord ce
que nous connaissons du phénomène de synchronicité, hors de toute
théorie. Il est déjà bien connu que la plupart du temps, nous produisons
ces manifestations inconsciemment, sans avoir aucune idée des condi­
tions que nous aurions besoin de satisfaire pour les produire consciem­
ment.
De façon généralement passive, certains d’entre nous ont même l’habi­
tude d’assister régulièrement à des coïncidences. Elles semblent se
produire naturellement et être plus ou moins liées à nos états d’âme,
tout en restant généralement totalement involontaires. On peut y voir
pour les plus fâcheuses l’expression de la loi de Murphy*, mais je ne
m ’étendrai pas ici sur cette pseudo-loi qui ne fait que témoigner de
notre ignorance du mécanisme.
Nous avons tous vécu des synchronicités de façon plutôt amusante:
vous pensez à une amie et celle-ci vous téléphone à l’instant même, ou
cette variante surprenante: vous décrochez votre téléphone et vous
vous retrouvez en communication avec la personne que vous voulez
appeler. Dans un autre registre, vous rencontrez une personne dans le
train et vous découvrez que vous avez un ami commun ! Une expres­
sion courante convient bien pour résumer l’effet que ces bizarreries ont
sur nous : « Le monde est petit ! »
Le premier principe du protocole que j ’ai imaginé pour « provoquer »
ces coïncidences est fondé sur le respect du délai a priori indispensable
que nous avons constaté entre l’instant où nous « programmons »
intentionnellement notre futur, et l’instant où le « hasard » vient nous
apporter un signal de réponse, symbolisé dans notre Arbre de Vie par
une offre de bifurcation.
Son second principe repose sur la question : cette bifurcation pourrait-
elle exprimer un enseignement ? Je rappelle ici le sens de cette bifurca­
tion: il s’agit du moment où une trace du futur s’insinue dans notre
présent comme un signal ou comme une invitation à nous laisser por­
ter par cette coïncidence, qui transporte avec elle des informations
nous aidant à faire un choix. Il peut donc effectivement s’agir d’un
enseignement, aussi longtemps que ce dernier reste bien distinct du
choix lui-même.
Toute la difficulté de provoquer volontairement une synchronicité est
contenue dans le premier principe et concerne principalement le délai :
Quel est son terme ? Que faire durant ce délai indispensable de lâcher
prise? Comment reconnaître sans risque de se tromper, un signe quel­
conque relevant du terme de ce délai, c’est-à-dire d’une synchronicité?
On voit que dans ce processus, tout se passe comme si nous procé­
dions par une sorte de dépôt d’information suivi d’une phase d’oubli,
mais pas définitif. Nous attendons quelque chose sans trop y penser.
Mais comment procéder à ce dépôt? Faut-il se parler à soi-même?
Faut-il prononcer une phrase à voix haute, histoire de bien l’impri­
mer dans l’air? Comment effectuer cette impression ayant pour but
d’informer notre futur?
Le protocole que j ’ai adopté était tout simplement le suivant: je devais
invoquer une entité intermédiaire jouant le rôle de réceptacle de mon
intention. Cette invocation avait pour vertu de rendre infiniment plus
simple le lâcher prise et l’attente, l’entité jouant le rôle de dépositaire
de l’intention.
La définition d’une représentation acceptable de cette entité reste à
préciser et nous étudierons cela plus loin, mais elle peut après tout res­
ter abstraite et pourquoi pas mathématique, à supposer que l’on dis­
pose d’un modèle formel de notre conscience: car il s’agit en fait d ’ac­
tiver des propriétés issues d ’une sorte d ’intemporalité de notre
conscience, ou du moins de l’une de ses parties, si l’on peut dire.
Pour bien comprendre maintenant ce que l’on attend en réponse à ce
genre d’invocation, il nous faut faire le point sur la différence entre
coïncidences et synchronicités. Car le protocole expérimental que nous
venons de proposer n’est adapté qu’aux synchronicités et non aux sim­
ples coïncidences. Une synchronicité est une coïncidence chargée de
sens. Cependant une coïncidence peut être parfois considérée comme
une synchronicité que nous ne comprenons pas. Elle ne nous est d’ail­
leurs pas forcément destinée personnellement. Nous ne rangerons donc
dans les synchronicités que les coïncidences possédant un sens évi­
dent. De très nombreux exemples sont donnés dans le livre « Coïnci­
dences : hasard ou destin » de Jean Moisset et Michel Granger [6] qui
foisonne d ’exemples vécus des deux types et qui fait bien la diffé­
rence.
Mais lorsque ce genre de synchronismes commence à vous rendre un
service, on ne peut plus tout à fait parler de coïncidences. Par exemple,
vous avez besoin d’une place de stationnement dans un centre-ville
saturé et vous en trouvez une juste à côté de votre destination au
moment même où vous l’atteignez. Certaines personnes dont je fais
partie ont plus de « chance » que d’autres en la matière, et j ’avoue que
cette disposition est très pratique, bien que non systématique.
Les coïncidences de la vie peuvent prendre une grande variété de
formes, comme par exemple la répétition de certains nombres que
vous avez tendance à rencontrer comme si vous les attiriez. J ’en ai
vécu personnellement en grand nombre et cette étrangeté de mon
expérience personnelle qui sera décrite plus loin (Le double 22) est très
instructive pour comprendre la puissance de la seconde causalité, qui
est capable d’aller jusqu’à « recréer le passé », là où ses traces sont
absentes ou réellement perdues.
Mais alors qu’une coïncidence est seulement une curiosité étrange
dont on ne sait souvent pas quoi faire, une synchronicité est particuliè­
rement surprenante car elle se présente « immédiatement » chargée de
sens pour celui qui la vit, comme si elle contenait un message à son
attention. L’exemple le plus classique de véritable synchronicité est
celui donné par le père même de son concept, le célèbre psychiatre
Cari Gustav Jung. Il s’agit de l’histoire du scarabée d’or: alors qu’une
de ses patientes en analyse lui décrivait un de ses rêves dans lequel elle
avait rencontré un scarabée d ’or, ledit insecte s’écrasa au même
moment sur la vitre de son cabinet, les troublant fortement tous les
deux. Le sens de cette coïncidence fortuite, d’après C. G. Jung, était
que ce trouble allait permettre de relancer la thérapie stagnante de sa
patiente. Il s’agissait effectivement d ’une bifurcation de grande
ampleur dans la vie de sa patiente, qui la mettait sur le chemin d’une
guérison. Mais l’on peut se demander ici d’où provenait l’intention qui
l’a provoquée. De la patiente ou de son médecin ?
D ’une façon générale, les exemples les plus couramment cités de syn-
chronicités sont associés à des événements qui sont susceptibles de
changer la vie du sujet. Comme ces exemples de personnes qui ont
l’habitude de prendre l’avion et qui sont exceptionnellement retardées
par des circonstances qui leur font rater leur vol, le jour même où cet
avion s’écrase ! De toute évidence, soit elles avaient très bien informé
leur futur de leur ferme intention de rester vivantes, soit d’autres
l’avaient fait pour elles !
Mais rien ne vaut les expériences que l’on a vécues soi-même: les syn-
chronicités que j ’ai rencontrées et qui étaient les plus chargées de sens
sont celles que j ’ai expérimentées volontairement sur la Route du
Temps, leur sens étant relié à mon projet d’écrire ce livre.
C’est ainsi que de nombreuses synchronicités m’ont accompagné tout
le long de ce projet de livre en lui fournissant de la matière, récoltée
par « invocation » le long de cette route, comme si cette récolte, finis­
sant par devenir systématiquement attendue en ces lieux, favorisait
elle-même leur déclenchement. J’avais été préparé à ce genre de phé-

1 64
nomènes incompréhensibles par toute une série de coïncidences
vécues durant dix ans et qui étaient relatives au double 22
(chapitre XV), mais je n’avais jamais vraiment vécu ces coïncidences
numériques comme chargées de sens. Elles n’étaient donc pas pour
moi des synchronicités. Je n’ai jamais bien compris ce qu’elles pou­
vaient signifier en dehors du fait qu’elles se produisaient les jours les
plus importants de ma vie. Elles s’imposaient à moi sans que je le
demande.
Avant de leur consacrer l’essentiel de cette partie III, en voici une que
j ’ai vécue tout à fait indépendamment des autres: à la veille d’un
week-end passé en maison d’hôtes toujours sur cette fameuse route, je
rencontrai un géobiophysicien ou si l’on préfère un sourcier, spécia­
liste de la recherche de zones pathogènes dans les habitations, essen­
tiellement dues à la circulation d’eaux souterraines. Ayant moi-même
étudié la géobiologie dix ans auparavant, je discutai avec lui de sa dis­
cipline en bon sceptique, soulevant le caractère irrationnel de certaines
pratiques effectuées avec la baguette de sourcier. Je ne mettais pas en
doute la crédibilité de sa méthode de détection d’eau souterraine mais
plutôt la soi-disant correction des effets pathogènes avec des disposi­
tifs censés émettre des « ondes de forme » ! Ce très sympathique sour­
cier finissait par me proposer d’analyser ma propre habitation, mais
comme j ’avais l’intention de déménager je déclinai son offre et je lui
demandai plutôt s’il n’accepterait pas d’analyser un lieu dont j ’envisa­
geais l’acquisition. J’avais alors l’idée de restaurer une ruine sur un
terrain situé quelque part près de la Route du Temps. Le lendemain,
ébloui par le soleil sur cette route, j ’eus un accident sans gravité qui
me fit percuter un rocher, ce qui immobilisa ma voiture au garage pen­
dant quelques jours et m’obligea à rentrer chez moi en taxi. C’est alors
que durant ma conversation avec le chauffeur qui connaissait très bien
la zone et ses habitants - une femme d’ailleurs charmante - j ’appris que
de nombreuses personnes avaient eu l’intention d’acheter la ruine qui
m ’intéressait, mais que personne n’était allé jusqu’au bout de ce projet
parce qu’il y avait soi-disant des infiltrations d ’eau sous cette ruine.
En résumé, j ’appris par hasard le même week-end ce problème d’infil­
tration d’eau, juste après avoir rencontré un spécialiste de la détection
d’eaux souterraines. Ce qu’il y a de surprenant, c’est que cette rencon­
tre avait précédé l’énoncé du problème, pourtant survenu tout à fait
indépendamment ! Je n’ai compris cette bizarrerie que bien plus tard
lorsque, après avoir échafaudé toute cette théorie, il m’est apparu évi­
dent que cette information sur ma mine m ’était arrivée tout naturelle­
ment, de façon non causale, suite à mon intention de recruter ce sour­
cier pour faire cette recherche d’eau.
Revenons à notre projet d’invocation d’entité en tant que dépositaire
de notre intention. Cette stratégie m’est venue à l’esprit lorsque, réflé­
chissant sur les conditions dans lesquelles se produisent généralement
les synchronicités et après m ’être documenté sur la question dans plu­
sieurs ouvrages, j ’ai constaté que le dénominateur commun à ces
conditions était la préoccupation mentale. Plus cette préoccupation
était vitale et par voie de conséquence, chargée d’« énergie » émotion­
nelle, et plus il semblait qu’elle pouvait activer le phénomène. Et pour­
tant, il semblait aussi, dans d’autres exemples, que le fait d’avoir une
attitude complètement détendue et libérée de toute préoccupation avait
également le pouvoir d’activer les mêmes effets.
J ’en ai donc déduit, en faisant le rapport avec le laisser agir dans l’art
secret du tir à l’arc, qu’un « dépôt » inconscient ou une décharge émo­
tionnelle issue d ’une préoccupation, par la suite relâchée, avait dû
avoir lieu. La contradiction apparente s’expliquait ainsi: dans le pre­
mier cas on considère le sujet avant ce « dépôt », alors que dans le
second cas on le considère une fois qu’il en est libéré.
Dans le processus de « dépôt d’une préoccupation » quel qu’il soit,
que l’on se confie à un ami, à un animal, à une plante ou à l’univers,
l’état de relâchement du mental qui suit semble donc en améliorer l’ef­
ficacité. Et préoccupation rime ici clairement avec intention. Il semble­
rait même que c’est en quelque sorte cette « énergie préoccupante » de
l’intention qui est ainsi déposée, et qu’une confiance s’installe ensuite
dans l’esprit du sujet.
Dans son livre « Les hasards nécessaires », Jean-François Vézina [31]
justifie pleinement cette interprétation selon laquelle les synchronicités
se produiraient dans des situations où nous sommes préoccupés par le
besoin de trouver des réponses à certains moments de notre vie, spé­
cialement lorsque nous avons l’esprit ouvert pour les recevoir. Sans
pour autant aller jusqu’à décrire la possibilité que nous puissions les
provoquer systématiquement, cet auteur explique cependant parfaite­
ment leur fonction de message et ses conditions d’obtention, je cite:
« la psyché doit être perturbée... Par surcroît, le message doit être très
important pour notre développement. »
Et c’est ainsi que j ’ai été conduit à me servir de l’« Ange gardien »,
pour jouer le rôle de dépositaire. À défaut d’existence réelle, la simple
foi en cette entité conduit à installer une confiance salutaire et un état
de lâcher prise indispensable. L’Ange représente ici une entité abstraite
qui joue le rôle d’un double de soi-même, à qui nous exprimons nos
intentions, nos problèmes, nos demandes en tout genre. Il s’agit donc
d’un dialogue intérieur visant à obtenir des réponses, mais le fait de se
prendre réellement au jeu de l’Ange nous permet de recevoir ces
réponses de manière acausale* en réalisant la fonction de dépôt suivie
du lâcher prise salutaire instaurant la confiance.
Cela revient un peu à se donner rendez-vous avec soi-même dans son
propre futur, en usant de la possibilité de dialoguer avec ce « double »
qui y habite déjà ! Lorsqu’au contraire, nous persistons dans notre soli­
tude à entretenir des intentions que nous ne savons pas exprimer en
dehors de nous-mêmes, que cela soit en actes ou en paroles, nous ne
faisons que fermer notre mental à tout dialogue permettant de préparer
notre futur, lequel aurait simplement besoin d ’être informé de nos
préoccupations !
Par exemple, avez-vous remarqué que très souvent, lorsque l’on désire
quelque chose, et plus particulièrement lorsqu’il s’agit d ’un désir
obsessionnel, cette chose a tendance à arriver une fois qu’on l’a
oubliée, ou même lorsque l’on a cessé de la désirer !
Cette observation montre que le désir n’est pas un bon moyen pour
créer les bonnes opportunités, et c ’est probablement parce qu’il empri­
sonne l’objet du désir en l’empêchant de se transformer en « énergie
de programmation » du futur. Elle montre aussi qu’intuitivement nous
savons que notre désir joue un rôle : pourquoi pas celui de contenir
l’énergie, de la maintenir dans le présent en attendant le processus qui
la mémorisera dans nos potentiels futurs ? On voit que ce rôle est ini­
tiateur et qu’il importe de ne pas rester à ce stade initial du désir pour
ne pas bloquer les stades suivants qui permettent sa réalisation: l’inten­
tion de rencontre réelle de l’objet du désir, la confiance dans la bonne
mémorisation de cette intention, puis le relâchement, le vide mental.
D ’où l’expression : il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités !
Parmi les stades suivants, le relâchement ou retrait du mental est fon­
damental. Ce mental est un parasite qui a tendance à tout calculer, ne
faisant ainsi que « projeter » selon la loi de cause à effet, loi qu’il
importe justement de rejeter si l’on veut user plus efficacement de
notre libre arbitre par la logique non causale.
En tirant judicieusement parti de la double causalité, nous agissons sur
l’avenir tout en sachant que le présent découle aussi de l’avenir et pas
seulement du passé. Cela correspond à un mécanisme de boucle de
rétroaction. Mais ce concept est un peu abstrait et le mieux est de le
vivre sous la forme d’un dialogue intérieur avec son futur. Néanmoins,
il s’agit bien de la véritable mise en œuvre d’une boucle de rétroac­
tion du mental destinée à faire apparaître les réponses attendues sous
forme de « signes » à décoder, sachant que nous fixons nous-même la
règle de codage !
On pourrait réduire le phénomène à un simple « écho du mental »,
l’écho étant en quelque sorte réfléchi par une zone de notre futur. Mais
s’agirait-il d’un simple écho, où cet écho pourrait-il nous rapporter des
informations en sus ?
Quoi qu’il en soit, il nous faut maintenant décrire les règles de codage.

Résumé du chapitre XI

Les synchronicités ou coïncidences signifiantes nous arrivent la plu­


part du temps de façon totalement involontaire. Partant de l’hypothèse
qu’elles peuvent résulter de nos intentions, nous avançons que les syn­
chronicités devraient pouvoir être provoquées par le biais d’un dépôt
d’intention dans le futur.
Ce dépôt serait souvent effectué inconsciemment, et inversement il
pourrait être bloqué en pleine conscience par le désir. La conscience ne
semble donc pas être un facteur favorable, et il se confirme qu’un
lâcher prise est nécessaire.
Pour réaliser ce dépôt nous suggérons d’en libérer la conscience en
confiant la demande à une entité dépositaire, le rôle principal de cette
entité étant de prendre le relais de l’intention en permettant à cette
conscience de lâcher prise.
XII.
Le modèle de l’Esprit
Où l ’on découvre que les paroles évangéliques « Demande,
tu recevras » et « Aide-toi, le ciel t ’aidera » sont deux méthodes
complémentaires d ’amplification des effets de l ’intention sur le futur.

« Ne croyez pas qu’il y ait rien d ’impossible !


Le possible est la loi du Poids.
L ’impossible est la loi du Nouveau. »
(Dialogue avec l ’Ange, Entretien 31 avec le maître de Hanna)

L’entité dialoguante qui joue le rôle du récepteur de nos intentions se


prête à deux interprétations : on peut la considérer comme un
« Esprit* » comme dans l’expression « Esprit, es-tu là? », ou comme
un « Ange » en référence à une entité plus abstraite encore appelée
l’« Ange gardien », tout à fait susceptible de se confondre à nous-
mêmes. Cet Ange gardien est cependant toujours assimilé à un esprit
dans la littérature, c’est pourquoi nous appelons « modèle de l’esprit »
notre modèle expérimental de dialogue intérieur.
Ces deux formes d’esprit nous permettent de décliner notre théorie de
la double causalité selon deux versions :
- Une version minimaliste qui considère qu’il n’y a aucune incarnation
d’esprit dans notre vie ni même dans notre Arbre de Vie, et que ce que
l’on appelle couramment « esprit » n ’existe pas, sauf à représenter
cette partie de nous-mêmes qui se trouve logée dans les dimensions
supplémentaires invisibles de l’espace. Je me permettrais de qualifier
cette chose d’« Ange ».
- Une version conjecturale qui pousse au maximum les conséquences
potentielles de notre théorie sur notre conception de l’univers, et qui
notamment pour expliquer l’évolution de cet univers dans l’éternité,
pourrait faire appel aux notions d ’« incarnation » ou de
« réincarnation » d’esprits.
Comme je l’ai déjà dit, je ne prendrai pas position sur cette question
dans ce livre et je me contenterai d’étayer la théorie minimaliste, avec
une version d’Ange qui peut donc quasiment se réduire à une abstrac­
tion, ou même à un modèle mathématique.
Mais je ne voudrais pas empêcher certains lecteurs de prendre la
liberté d ’aller plus loin, faute de preuve que quoi que ce soit s’y
oppose. Or l’Ange étant lui-même souvent considéré comme un
Esprit, il me paraît approprié d’explorer cette notion d’Esprit, définie
comme entité dissociée du corps et ayant droit à une existence
concrète, même si c’est dans l’au-delà !
Quoi qu’il en soit, pour faciliter le pouvoir de réalisation de nos inten­
tions il sera toujours recommandé lors du dialogue intérieur, de pren­
dre au sérieux cette entité (Ange ou Esprit) en la considérant toujours
comme distincte de soi-même.
Ceci parce qu’en nous donnant réellement l’impression que l’on fait sa
demande à quelqu’un d ’autre, cela facilite notre positionnement en tant
qu’émetteur. Cette entité réceptrice va donc en quelque sorte faire à
notre place ce que nous ne pouvons pas imaginer faire nous-mêmes
dans notre futur.
Le modèle de l’Esprit suppose dans tous les cas que l’on admette
l’existence d’une partie de notre conscience qui serait distincte de
notre cerveau, à la fois complémentaire et immatérielle, c’est-à-dire
qui ne pourrait pas être le résultat des milliards d’interactions neuro­
nales qui sont l’expression de nos pensées et de nos actes.
Durant les trente années où je me suis intéressé à la synchronicité, j ’ai
toujours pensé que ce phénomène était un produit de la dualité de notre
existence, faisant une distinction très nette entre conscience et matière.
Je n’ai compris que très récemment qu’il n’y a pas besoin de distinguer
la conscience et la matière, mais seulement de distinguer notre vécu
présent et notre réalité hors du temps. Mais un problème résiduel se
posait: est-il nécessaire que cette partie de notre conscience que l’on
appelle « esprit » ou « âme » soit distincte de notre cerveau et de tout
ce qui se rapporte en général à la matière ?
Ce qui revient à poser la question suivante: a-t-on besoin d ’un
concept d’esprit désincarné ?
Ce sont les avancées de la physique moderne qui ont amené de nom­
breux physiciens s’interrogeant sur cette dualité apparente dans l’uni­
vers, à rechercher quelles pouvaient être les raisons scientifiques de
cette différence de nature entre ce qu’on appelle d’une part le monde
physique et la « matière », animés par les lois de la causalité ou méca­
nique, et ce qu’on appelle d’autre part la « conscience », l’« esprit » ou
l’« âme », animés par d’autres lois restant à découvrir.
Parmi les théories physiques pouvant cautionner cette dualité, la méca­
nique quantique est systématiquement et même exagérément invoquée
mais aussi, beaucoup plus rarement, celle que je nommerais en
quelque sorte son « relais macroscopique », la Théorie du Chaos, à
cause de l’indéterminisme qu’elle engendre, elle aussi. Mais il existe
d’autres théories, comme la Théorie des Cordes [7], qui sont très inté­
ressantes sur le plan mathématique pour appréhender ces questions,
parce qu’elles attribuent à l’univers beaucoup plus de dimensions que
les quatre que nous sommes capables de percevoir. Cette Théorie des
Cordes n’est pas encore vérifiée, et elle est même discutée. Cependant,
l’important est sa cohérence avec les lois de la physique, et le fait que
ce ne soit pas son hyper dimensionnalité qui soit remise en cause. Je
développerai en partie IV les raisons pour lesquelles, grâce à ces théo­
ries, on n ’a pas besoin d’un concept d’esprit désincarné dans notre
modèle de l’esprit.
Je vais maintenant donner une définition la plus simple possible de
l’entité que je qualifie d’Esprit ou d’Ange : un esprit peut être consi­
déré comme une extension de notre propre « individualité » dans les
dimensions de notre univers qui nous sont imperceptibles ou invisi­
bles, au-delà des quatre que nous connaissons. Rajoutons à cela que
cette extension est nécessairement atemporelle, c’est-à-dire qu’elle se
situe hors du tem ps, p u isq u ’elle représente la partie de notre
conscience qui produit instantanément des modifications des champs
de probabilités dans les potentiels futurs de notre Arbre de Vie.
Sachant que nous sommes englobés dans un univers à plus de quatre
dimensions, dix ou onze par exemple, comme le suggère la Théorie
des Cordes, alors il existerait nécessairement une sorte de prolonge­
ment de notre être qui nous caractériserait dans les six dimensions
complémentaires. C ’est obligatoire car tout simplement mathéma­
tique : on existe forcément avec un nombre de dimensions égal à celui
de l’espace dans lequel on est plongé, même si dans certaines dimen­
sions on pourrait à la limite ne presque pas exister, en se résumant par
exemple à un simple point. Mais cela reste tout de même un point réel,
c’est-à-dire existant, et ce qui est à noter, c’est qu’il n’y a pas de raison
de penser que cette extension obligatoire de nous-mêmes n’ait pas elle
aussi les caractéristiques de la conscience, auquel cas il s’agirait d’une
partie de notre conscience indétectable, imperceptible, c’est-à-dire en
un mot: cet « esprit », autant qu’on puisse imaginer de quoi il s’agit.
Pour s’en faciliter la représentation, je n’insisterais jamais assez sur la
nécessité de comprendre la préexistence de notre futur, tout comme
celle de notre passé. Si l’on arrive à se représenter notre existence hors
du temps par le fait que nous pourrions agir par exemple sur notre ave­
nir dès maintenant, en ce moment même, par le simple effet de nos
pensées, alors c’est gagné, l’esprit devient saisi par la pensée !
Et je ne crois peut-être pas si bien dire, car si, à la lecture de la phrase
précédente, vous venez de comprendre pour la première fois cette
notion d’esprit, alors il est probable que ceci sera le début d’un ensem­
ble de modifications de votre comportement et de vos intentions qui
provoquera des déplacements réels de votre esprit hors du temps pré­
sent, vous aidant ainsi à en saisir la nature.
Lorsque nous connaissons la mort physique, nous pensons que nous
cessons d’exister, du moins dans les quatre premières dimensions
connues, parce que notre corps s’y désagrège et que nous ne pouvons
donc plus rien ressentir. Mais nous ne savons pas ce qu’il en est de la
partie de nous-mêmes qui habitait notre futur dans les six autres
dimensions !
A défaut de savoir, on peut toujours faire des hypothèses, mais je pré­
cise ici qu’il n’est pas nécessaire de concevoir, dans notre propos, que
l’esprit dont je parle subsiste à une telle désagrégation. Il peut très bien
rester cette partie de nous-mêmes, aujourd’hui bien vivante, dont nous
n’avons pas conscience dans les autres dimensions.
On qualifierait injustement d’irrationnelle notre approche de l’esprit,
car elle se veut expérimentale et repose sur des hypothèses cohérentes.
On la qualifiera cependant avec justesse de « spirite* » ou de « spiri­
tuelle », les deux étant liés, mais aussi peu tangibles l’un que l’autre, il
faut l’avouer. En tant que telle, elle implique de croire certaines choses
mais de façon justement fondée par le fait que cette croyance joue un
rôle fondamental dans la production des phénomènes : c ’est un fait
assez connu, qui doit son origine à ce que notre propre conscience est
interagissante dans l’expérience elle-même. Elle est à la fois l’observa­
teur et l’observé, en quelque sorte. Impossible de faire autrement que
d’avoir la foi, sauf à déporter ou déléguer le problème à d’autres sujets
observateurs, médiums par exemple.
Cependant, le fait de vouloir expérimenter une interaction avec un
esprit, impliquant une recherche de communication emprunte d’une
certaine foi, n’empêche pas que l’on puisse conserver un doute de
sécurité. Pour m’aider dans le montage de cette expérience, je me suis
tout d’abord attelé à la lecture des ouvrages les plus documentés trai­
tant de la question des esprits [11] et des anges [9], mais aussi des reli­
gions, avec l’intention de trouver un fil directeur me permettant
d’aborder sous un angle nouveau le phénomène de synchronicité :
celui de sa reproductibilité.
De ce point de vue, il aurait été certainement embarrassant, pour
mener à bien cette expérience, d ’avoir à s’initier aux tables tournantes,
à la transcommunication, ou à tout autre moyen de communication
paranormale, impliquant ou non l’intervention éventuelle d ’un
médium.
Le dialogue avec l ’Ange se présentait au contraire comme une
méthode expérimentale plus subtile, j ’entends par là à niveau énergé­
tique de stimulation beaucoup plus faible, quitte à être difficile à éva­
luer ou à mesurer, et aux effets beaucoup plus reproductibles.
Après m ’être documenté sur les Anges dans différents ouvrages dont
certains comportaient des témoignages très intéressants [9], mais
n’ayant rien trouvé sur la manière de dialoguer en vue de produire des
résultats immédiats, j ’ai fait la synthèse suivante: peu importait le
moyen de communication, la seule chose qui comptait vraiment était
l’état d’esprit - ou état de conscience éventuellement modifiée - que je
devais avoir pour ouvrir le canal de communication adéquat, avec mon
futur. Ceci étant fait, un moyen de stimulation ultra-simple et particu­
lièrement « doux » s’imposait naturellement:
Poser directement à l’Ange une question intérieure et lui demander
qu’il provoque lui-même une synchronicité pour exprimer sa
réponse !
Pourquoi pas? Cela semblerait sous-entendre que l’on s’adresse à une
véritable entité désincarnée, mais pas du tout! Sachant qu’il s’agit
d’une partie intime de nous-mêmes qui habite notre futur, le mieux
n’est-il pas de se simplifier la vie avec elle?
Notons que cette demande de « manipulation » directe du futur à partir
du présent est fondée par la décision d’interpréter les phénomènes
improbables qui pourraient se présenter à nous par la suite comme des
réponses. Or, tout à fait curieusement c’est ce qui contribue à augmen­
ter leur probabilité, en vertu de la rétroaction. En demandant une pro­
duction de synchronicité, j ’agis au temps présent sur un futur potentiel
que je vais, à raison, considérer comme impliqué à ma demande,
puisqu’il va effectivement influencer la suite de mon parcours. J’aug­
mente ainsi fortement les probabilités de tous les scénarios potentiels
susceptibles de transporter les traces du futur que je me suis pro­
grammé.
Dans ma demande de dialogue, je n’avais pas besoin de chercher à
savoir au moment de ma question si j ’étais entendu ! J’avais rendez-
vous avec le temps. Je laissais simplement à l’Ange un délai d’une
journée pour me répondre dans ce futur immédiat, et même une jour­
née supplémentaire s’il voulait me faire une autre réponse.
Traditionnellement, la communication avec un ange est censée appor­
ter une aide à celui qui en fait la demande. Beaucoup de gens utilisent
ce moyen couramment dans leur vie quotidienne, ne serait-ce que par
l’intermédiaire de la prière, afin d’obtenir ce qu’ils recherchent, par
exemple une aide pour autrui : on pense à solliciter un soutien pour un
membre de sa famille, une personne qu’on aime, et certains brûlent
même un cierge pour signifier clairement leur demande.
En ne faisant finalement que redécouvrir les vertus de la prière, je
concluais de quelques lectures que la sincérité de la demande, une
reelle ouverture mentale, une véritable foi ou une préparation spiri­
tuelle adéquate, empreinte de confiance, d’amour et de compassion,
constituaient des éléments nécessaires au succès de l’opération.
Ces éléments s’ajoutaient à tous les indices issus de notre Théorie du
Temps :
- création d ’ordre non causal,
- intervention du hasard indéterministe,
- intentions exprimées sans savoir comment les réaliser,
- intentions nouvelles,
- prise de risque,
- lâcher prise,
auxquels il fallait ajouter la nécessité de s’extraire de ses habitudes, ou
encore de sortir des sentiers battus, dans la phase de récolte des
réponses.
Mais c’est la lecture du livre « Dialogues avec l’Ange » de Gitta Mal-
lasz qui m’a fourni les éléments les plus importants à propos de la
« préparation spirituelle » et surtout les règles mentales à observer,
parmi lesquelles l ’authenticité de la demande, le respect du libre arbi­
tre et l ’installation du « sourire intérieur ». Le livre de Gitta est unique
à double titre : les dialogues ont une connotation « expérimentale » du
fait de la disponibilité de cet Ange et de la reproductibilité de ses ren­
dez-vous. Ayant évalué personnellement comme originale et puissante
la qualité de l’information contenue dans les réponses de l’Ange de
Gitta (retranscrites par un médium?), je me suis partiellement inspiré
de ce livre. La question de savoir si fauteur original des textes était
réellement un ange, si tout cela était vécu ou imaginaire, me semblait
franchement accessoire. L’important pour moi était d’apprendre à cata­
lyser un phénomène susceptible d’exiger un état de conscience modi­
fié, ou tout au moins inhabituel.
La principale directive que j ’ai retirée de cette lecture est en fait la sui­
vante :
« Demande et tu recevras une réponse ! »
On ne peut plus évident! Mais pour les besoins de l’expérience qui
nous intéresse, j ’ai étendu ce principe à l’énoncé suivant, notre hypo­
thèse expérimentale :
« Formule-moi une question intérieure et tu recevras une réponse par
l’intermédiaire de signes que tu devras interpréter, et qui seront avérés
par des synchronicités que je provoquerai ».
Afin de me donner le plus de chances possibles de réussir à ce jeu en
formulant mes questions correctement, j ’ai consigné les huit règles sui­
vantes de préparation mentale :

1. avoir un besoin d’aide authentique,


2. faire une demande liée à une réelle préoccupation au moment de la
demande,
3. prendre le risque de « se mouiller » par un comportement risqué,
non raisonnable et surtout pas raisonné,
4. demander quelque chose dont la réalisation aura une réelle inci­
dence sur son chemin de vie (nouvelles intentions)
5. conserver son libre arbitre: surtout ne pas demander à l’Ange de
choisir à sa place,
6. atteindre un niveau suffisant de détachement et de lâcher prise,
7. voir naître en soi un authentique sourire intérieur,
8. sortir des habitudes et sentiers battus au moment de la demande.

Ces attitudes sont toutefois à considérer comme des éléments « tech­


niques » qui pourraient bien ne produire aucun effet sans l’apport d’un
neuvième élément fondamental, que nous ferons émerger dans la der­
nière partie de ce livre, pour respecter le fil de notre raisonnement.
Toutes ces « règles » d’attitude mentale - ou spirituelle - peuvent être
considérées comme différentes phases du « cycle de la seconde causa­
lité » que nous aborderons avec ce neuvième élément.
Concernant le conseil de « sortir des sentiers battus », il est évident que
si l’on ne « bouge pas » de sa chaise ou que l’on est enfermé dans ses
habitudes, on ne risque pas de faire une rencontre inhabituelle,
empreinte de signification; ce n’est donc pas la peine de faire une
demande.
C ’est pourquoi il faut aussi que l’intention même de provoquer une
situation qui permettra une réponse soit présente au moment de la
demande. Ceci correspond à la parole de l’Évangile:
« Aide-toi et le ciel t’aidera »,
qui est donc à appliquer juste après celle-ci :
« Demande et tu recevras ».
Dans le livre de Gitta, le simple mot « Demande ! » est prononcé une
centaine de fois par l’Ange, comme si cet ordre d’invocation était une
règle fondamentale voulant qu’aucune réponse ni aucun enseignement
ne puissent nous être transmis, sans demande préalable.
J’ai donc commencé cette expérience inédite de dialogue intérieur à
l’occasion de quelques jours de vacances passées avec mon amie
Danièle, durant lesquels nous remontions le territoire de la réserve
géologique, depuis l’extrémité sud de la Route du Temps.

Résumé du chapitre XII

L’entité dépositaire de l’intention est décrite comme Ange ou Esprit,


cette partie de notre conscience qui reste intemporelle, qui se loge dans
notre futur et qui reflète nos intentions.
Son existence réelle provient de l’omniprésence de notre futur et de la
capacité que nous avons d’en modifier les probabilités de potentiels.
L’Ange incarne en quelque sorte ce remue-ménage intemporel.
Pour le solliciter, c ’est-à-dire pour dynamiser les potentiels qu’il recou­
vre, il est nécessaire de respecter une juste attitude qui peut se résumer
en huit points : besoin d’aide réel, préoccupation réelle, prise de risque,
sérieux de la demande, libre arbitre, lâcher prise, sourire intérieur et
conditions facilitant l’imprévu.
Un neuvième élément essentiel sera abordé après de plus sérieux déve­
loppements.
XXIII.
Dialogue avec l’Ange
Où Ton aura du mal à croire que l ’Ange n ’est qu’une partie
de nous-mêmes...

« Je parle du sourire: la bouche représente la matière dans le visage.


Elle est en bas. La force d ’attirance vers le bas tire la bouche vers le
bas, la force d ’attirance vers le haut l ’élève. Tout animal sait pleurer,
gémir. Sourire, seul l ’homme le sait. C ’est la clef. Ne souriez pas seu­
lement lorsque vous êtes de bonne humeur! Votre sourire est sourire
créateur! Non pas sourire artificiel, mais sourire créateur! Si les
forces d ’attirance vers le bas agissent, elles ferment. Tout est tiré vers
le bas, tout. La bouche est de la terre. La force d ’attirance vers le bas,
c ’est de la terre aussi...
Le sourire est à l ’image de la délivrance, symbole: la force créatrice
élève la matière...
Comment peux-tu reconnaître ta voie, si tu ne souris pas ? J ’habite
dans le sourire et je suis ta mesure. Le sourire est symbole: maîtrise
sur la matière. Si tu lis un livre, tu l ’approches de toi pour bien voir. Si
tu veux me lire, il faut que tu t ’approches. J ’habite dans le sourire...
Je continue à parler du sourire. Vous passez à côté de lui, il est telle­
ment connu! Vous ignorez ce qu’il signifie. Le sourire est pont au-des­
sus de l ’ancien abîme, entre l ’animal et ce qui est au-delà de l ’animal,
un abîme profond. Le sourire est le pont. Pas le rictus ni le rire. Le
sourire. Le rire est le contraire des pleurs. Le sourire n ’a pas de
contraire...
La clef de tous tes actes, de ton travail, de ton enseignement, c ’est le
sourire. Essaie! Mets tes protégés à l ’épreuve pour voir s ’ils arrivent
jusqu’au sourire intérieur, car ensuite leur façon de se mouvoir va
changer. Le sourire, c ’est plus sûr que n ’importe quelle gymnastique...
Le sourire est la prière de chaque petite cellule, de chacune, et elle
monte jusqu’à la bouche. Le sourire élève au-dessus de tout. C ’est si
simple! Mais personne ne le connaît! »
(Dialogue avec l ’Ange, Entretien 35)
Le long d’un itinéraire volontairement improvisé, Danièle et moi tra­
versions des paysages de toute beauté qui, par l’émerveillement suscité
en nous ont probablement contribué à favoriser l’émergence des syn-
chronicités surprenantes que j ’ai vécues durant ces quelques jours de
vacances. Et je rajouterai à cela un autre facteur positif : bien que
Danièle partageât avec moi un niveau de confidence beaucoup moins
intime que celui que j ’avais avec mon Ange, son acceptation à nous
laisser guider par le hasard ou mon intuition ont beaucoup contribué à
la réussite de l’expérience.
Ce qui était au départ un « jeu de l’Ange » est vite devenu une relation
fascinante. Car disons-le tout de suite, la principale raison qui s’est
imposée à moi pour continuer à lui faire des demandes est la suivante :
j ’avais l’impression qu’à moins de disposer de pouvoirs très spéciaux,
cette chose qui me répondait distinctement était forcément distincte de
moi-même. Ce n’est que par la suite, ayant compris par quel méca­
nisme ce que j ’avais considéré comme un Ange pourrait dériver des
propriétés du temps lui-même, que j ’admis que cet Ange pourrait bien
n’être qu’un écho de mon mental, un reflet de mes intentions. Mais je
n’en suis même pas encore certain, à cause d’une fâcheuse habitude à
toujours douter de tout, y compris d’une théorie qui voudrait absolu­
ment se faire passer pour un modèle du temps minimaliste, pour ne pas
dire simpliste.
Ma toute première demande à l’Ange était complexe, car j ’étais réelle­
ment préoccupé (2e règle) par la façon dont j ’allais bien pouvoir abor­
der ce projet de livre sur le temps dont je n’avais même pas encore
entamé la rédaction. J’étais en vacances et libéré de mes soucis profes­
sionnels, et le livre de Gitta me fascinait. Cette lecture me poussait
comme une impulsion extérieure à réaliser cette expérience, au moins
pour deux bonnes raisons: d’une part, je venais de me forger les règles
d’attitude mentale à respecter, et d’autre part je voulais profiter de mes
vacances qui allaient bientôt se terminer. Mais je me demandais com­
ment concilier une approche sensée avec de telles attitudes, et notam­
ment ce besoin de faire émerger un sourire intérieur. Pour me compli­
quer la tâche, j ’étais plongé dans des réflexions sur cette phrase de
l’ange de Gitta, qui pouvait remettre en question la faisabilité de mon
projet:
« L’instinct de l’homme a été faussé par le savoir. »
Cet énoncé me faisait douter car je l’interprétais ainsi: rechercher le
savoir, en l’occurrence la vérité sur le temps, en procédant à des expé­
riences faisant appel à une communication instinctive avec des entités
spirituelles, n’était il pas une stupidité, un délire, ou même tout simple­
ment un interdit? Tout savoir n’était-il pas nécessairement incompati­
ble avec une communication angélique, faisant appel à des ressources
instinctives, hors de tout champ de connaissance? Instinct et raison ne
devaient-ils pas rester distincts, séparés, incompatibles, justement
parce que l’instinct est requis lorsque la raison manque !
Il faut comprendre qu’à l’époque, je n’avais pas encore de modèle de
l’esprit. Je croyais encore à une dualité obligatoire séparant deux
mondes, celui de la conscience et celui de la matière, et n’avais qu’une
assez vague intuition de la double causalité.
Ce doute s’étant transformé en véritable préoccupation, je décidai
alors, peut-être par dérision ou facilité, de faire à l’Ange la demande
suivante :
« Tu sais que j ’ai des doutes sur la faisabilité d’une approche ration­
nelle de ton monde. J’ai l’impression de toucher à l’inconnaissable, à
l’impalpable, à l’interdit! Éclaire-moi sur cette question aujourd’hui,
par tous les signes que tu voudras ! ».
Je prononçai cette phrase en pensée pour ne pas inquiéter Danièle.
À cause de la 5e règle je ne pouvais pas poser une question qui néces­
siterait une réponse par oui ou par non, car elle aurait entraîné de ma
part un choix. Or il me fallait tenir compte d’une remarque de l’Ange,
récurrente dans ma lecture en cours et qui était peut-être l’alinéa le
plus important de la règle du jeu :
« L’homme conserve son libre arbitre et ses choix ».
À l’issue de ma question formulée en mon for intérieur de façon assez
claire pour quelqu’un qui lirait dans mes pensées, et en essayant de
regarder la lumière du soleil à travers le pare-brise de ma voiture
(sachant que les anges sont des êtres de lumière, n’est-ce pas?), je me
demandais par quels signes je pourrais bien recevoir une réponse dans
la simple contemplation de superbes paysages, mais je me rappelai que
l’Ange de Gitta avait dit:
« Si tu prêtes l’oreille, même les pierres parleront ! »
Il n’y avait effectivement que des pierres, des roches et des montagnes
autour de moi ! J ’avais donc grâce à cette affirmation foi en ma
demande, et c’est d’ailleurs la simultanéité entre cette foi et son côté
rationnellement absurde qui eut pour effet de me faire sourire intérieu­
rement, tout en m ’amenant à un recul salutaire et détaché : j ’étais prêt !
Je me rappelais ainsi avec humour et détente cette fonction du sourire
intérieur découverte dans le livre de Gitta, condition de bon fonction­
nement à toute communication avec l’Ange, et je supposais que j ’étais
sur la bonne voie. Mais j ’avoue que, perdant inévitablement avec le
temps un peu de ma foi, je m ’inquiétais aussi sur ma santé mentale, ce
qui eu au moins pour vertu d’accélérer l’oubli de ma question durant
cette traversée... jusqu’à cette rencontre, moins d’une heure après.
En visitant à pied un village labyrinthique rencontré sur la route, nous
parvenions à proximité d’une petite église quand je remarquai une
porte grande ouverte accédant à une curieuse tribune, ornée de posters
à destination des touristes. Immédiatement, une photo de Sainte-Thé­
rèse de Lisieux, placée juste en face de l’entrée, attira mon attention. Je
fus surpris par le regard perçant de cette femme qui semblait me parler,
comme si la photo était vivante ! Je me remémorai aussitôt ma ques­
tion à l’Ange. Pour mieux comprendre ma surprise, il est utile de rap­
peler que Sainte-Thérèse n’était pas seulement une sainte mais aussi
un écrivain, docteur de l’église et auteur de la célèbre poésie intitulée:
A mon ange gardien. Cette rencontre avec Sainte-Thérèse commençait
donc à ressembler par ce simple fait à une « synchronicité », puisque
j ’étais justement en train de débuter une expérimentation ayant pour
but de convoquer mon propre ange gardien! Mais j ’étais dans une
église et je n’avais pas lieu de m ’étonner outre mesure de rencontrer
des signes angéliques. Aussi, ce clin d’œil de Sainte-Thérèse me sem­
blait encore insuffisant pour conclure à une quelconque réponse.
Mais en m’approchant de cette photo pour lire la citation située juste
en dessous, je découvris avec stupéfaction une parole de Sainte-Thé­
rèse qui acheva de lever mon doute à ce sujet. Cette citation me révéla
immédiatement à l’esprit que j ’étais face à une réponse, à cause du
contraste très étrange entre le personnage religieux que Sainte-Thérèse
représentait et cette affirmation :
« Je n’ai jamais cherché que la Vérité ! »
La raison de ma surprise était que cette « recherche de Vérité » était
justement le sujet central de ma très récente question à l’Ange. Il éma­
nait curieusement d’une sainte pour laquelle on était en droit de se
demander: pourquoi le mot « Vérité » plutôt que le mot « Amour »?
Depuis quand les saints recherchaient-ils la Vérité? Pourquoi, le matin
même où je remettais en question la capacité de l’ange à comprendre
une recherche de vérité scientifique, tombais-je sur cette phrase d’une
personne angélique cautionnant une telle recherche de vérité ?
Mais était-ce bien une synchronicité, plutôt qu’une simple projection?
Si oui, son improbabilité était-elle contenue dans le lien entre Sainte-
Thérèse et l’angélisme, ou dans le décalage entre la citation et celle
qu’on se serait attendu à lire comme par exemple: « Je ne me suis
jamais consacré qu’à l’Amour » ou toute autre chose ayant trait à
l’Amour?
De la part d’une sainte, je n’imaginais pas une recherche de Vérité car
les chemins de la Vérité et de l’Amour me semblaient très distincts,
voire incompatibles. J’étais donc fasciné par cette citation et je com­
pris finalement que ce simple émerveillement justifiait à lui seul le fait
que j ’étais bien en face d’une réponse.
Quoique je m’efforçai de douter toujours, je conclus que par l’intermé­
diaire de Sainte-Thérèse l’Ange me disait qu’il n’y avait pas de contre-
indication à rechercher la vérité sur des questions de foi spirituelle ou
religieuse. C ’était exactement la réponse à la préoccupation que j ’avais
en formulant ma question.
Il s’agissait donc d’un encouragement clair à poursuivre ma recherche
de dialogue. La seule chose qui me gênait dans cette recherche venait
d’être balayée : le caractère a priori incompatible entre mon attitude
expérimentale excessivement rationnelle et la réceptivité a priori
nécessaire pour contacter une telle entité angélique.
Mais le scepticisme revient toujours en force dès que l’on est un peu
fatigué; aussi, ne tardai-je pas à me dire que le caractère improbable
d’une rencontre avec un personnage comme Sainte-Thérèse, dans une
église, était somme toute assez faible, et que le caractère original du
contenu de la citation, et surtout son affinité avec le contenu de ma
question, n’étaient improbables qu’en apparence: ils étaient simple­
ment le fruit de mon imagination, et par conséquent cette rencontre ne
pouvait pas vraiment, à ce titre, être qualifiée de synchronicité, et
encore moins de réponse de l’Ange. En tant que rationaliste, je ne pou­
vais que rechercher des raisons de douter, en calculant des probabilités
pour savoir si j ’étais réellement en face d’une synchronicité, mais ces
probabilités étaient vraiment difficiles à calculer.
Ne pouvant passer mon temps à cogiter sur la citation de Sainte-Thé­
rèse, car j ’étais après tout en vacances, je décidai de photographier l’il­
lustration et de remettre mes conclusions à plus tard. Néanmoins, tous
ces doutes m’avaient amené à me demander si la quête de Vérité de
Sainte-Thérèse était scientifique ou spirituelle, et ce que le mot
« Vérité » signifiait pour elle. Car il se pouvait bien après tout que
Sainte-Thérèse se contrefiche de toute vérité scientifique.
Je m’interrogeai ainsi sur la notion de Vérité dans le domaine spirituel,
tourmenté par la question de la compatibilité entre deux types de
« connaissance », spirituelle et scientifique. Je me fourvoyais peut-être
à vouloir rechercher une vérité d’ordre expérimentale ou scientifique
sur le monde de l’Ange, et que la seule vérité vers laquelle m’inclinait
sa réponse était morale, centrée sur l’authenticité de l ’être, vers
l’amour. Aussi, je ne formulais pas vraiment de question, et mes inter­
rogations restaient centrées autour de la question initiale.
Le lendemain, nous arrivions à Digne et, comme à l’accoutumée, à
chaque fois que j ’en ai l’occasion, je pénétrai dans une librairie et
recherchai des nouveautés dans les rayons « Sciences » et « Spirituali­
tés ». Je repérai alors immédiatement un livre intitulé: Les sons de
l’Univers. Intrigué par ce titre et le prenant en main pour voir ce dont il
était questionne fus surpris en lisant son sous-titre: Du Lien entre
l’Âme et la Science.
Or je venais la veille, après avoir douté de l’interprétation à donner à la
citation de Sainte-Thérèse, de m ’interroger sur la compatibilité entre
vérité spirituelle et connaissance scientifique. Je pensais immédiate­
ment: Tiens donc, encore une coïncidence ! Ce lien entre ma préoccu­
pation du moment et ce sous-titre indique-t-il que l’Ange me répond à
nouveau ? Je restai là interloqué devant ce titre, avant de me poser cette
question : l’Ange me propose-t-il de lire ce livre, ou sa réponse est-elle
toute entière contenue dans ce sous-titre, en l’occurrence qu’il existe
bien un lien entre l’âme et la science?
Après l’avoir feuilleté rapidement, je fus déçu par son contenu trop
abstrait à mon goût, tournant indéfiniment autour du pot sans jamais
saisir la question de façon originale. Il s’agissait plus d’une compila­
tion d’analyses sur les rapports entre l’Âme et la Science que d’une
pensée synthétique. J’étais donc déçu et mon scepticisme reprit rapide­
ment le dessus.
Je rangeai le livre et m’apprêtai à rechercher d’autres ouvrages dans le
même rayon. Juste à ce moment-là, avant même que j ’aie le temps de
repérer un autre livre, la libraire introduisit dans le même rayon un
exemplaire des Dialogues avec l’Ange que j ’étais justement en train de
lire !
Je fus tellement surpris que je ne pus me retenir de lâcher un « hein »
avant de me décontracter comme quelqu’un qui vient d ’être totalement
désarmé, qui ne peut plus se débattre, qui ne peut plus douter. Je
pensai :
« Mais qu’est-ce qu’il est en train de me dire? »
Et les réponses affluaient instantanément: il était en train de me dire
dans le sous-titre du premier livre que j ’avais saisi qu’il y avait bien un
rapport entre l’âme et la science, mais il me précisait en exhibant les
Dialogues avec l’Ange que si je voulais trouver la vérité sur ce rapport,
je ne devais pas lire d’autre livre que celui-là même qui était déjà mon
livre de chevet.
Je venais de recevoir un enseignement de la part d’un « Esprit » ! Et
cela rejoignait parfaitement ce que Sainte-Thérèse m’avait déjà ensei­
gné: elle ne faisait elle-même, pourtant digne représentante d ’un
monde spirituel, que rechercher la Vérité ! Le clou était donc enfoncé.
En remettant en rayon les Dialogues avec l’Ange, l’Ange me disait
donc:
« Halte là, tu vas t’égarer, n’oublie pas mon livre ! »
Et pourquoi ce « Halte là »? Pour que je comprenne clairement, dans
un réflexe intuitif, la réponse à ma nouvelle quête de lecture : au risque
de m’égarer, je ne devais pas rechercher d’autre livre avant d’avoir ter­
miné les Dialogues avec l’Ange ! L’Ange me rappelait simplement que
je devais trouver mes réponses, non dans cette librairie, mais dans ce
livre qui était déjà en ma possession.
Mais par excès de doute, je n’ai pas poursuivi cette lecture et n ’ai
découvert que deux bonnes années plus tard, après avoir achevé la pre­
mière version de mon livre, que le secret de la double causalité se trou­
vait effectivement dans le livre de Gitta. Il est probable que si j ’avais
pris la peine d’en continuer la lecture à l’époque, j ’aurais gagné beau­
coup de temps.
Cette seconde synchronicité m ’a cependant permis d’avoir enfin foi
dans la réalité d’un dialogue en cours, quelle qu’en soit l’entité dialo­
guante. Ses réponses me semblaient se résumer à l’époque par le mes­
sage suivant :
Réponse de l’Ange:
« Laisse tomber ta recherche de nouveau livre et concentre-toi sur
celui que tu lis, Dialogues avec l’Ange. Garde simplement à l’esprit
que je t’encourage, pour la seconde fois, à rechercher le lien entre
l’âme et la science à travers tes expériences de synchronicité avec moi.
La preuve, je te l’ai donnée par le geste synchronisé de cette libraire ».
J ’étais loin d’imaginer à l’époque que j ’irai jusqu’à proposer une inter­
prétation de l’âme (en partie IV) !
Il était en tout cas clair que je venais de vivre une parfaite synchroni­
cité, à la fois très improbable et totalement pertinente par rapport à mes
questions.
Ce constat n’était pas fait pour me rassurer quant à la suite du compor­
tement que je devais adopter si je voulais poursuivre l’expérience. Il
était trop puissant. Il aurait été plus simple que je conserve mes doutes
et que j ’arrive à la conclusion que le dialogue ne fonctionne pas. Tout
serait rentré dans l’ordre, et j ’aurais continué mon voyage de vacances
l’esprit libéré.
Car imaginez-vous devant les conséquences d’un tel constat: une porte
béante sur un chemin déviant, et moi comme un enfant à qui l’on omet
de barrer la route à des comportements asociaux ! Le déséquilibre
pointe au bout du chemin, n’est-ce pas ?
En effet: que faire devant une telle situation? Continuer l’expérience?
Poser de nouvelles questions ? Se creuser la tête pour imaginer com­
ment pourrait se manifester la prochaine synchronicité ? Faire en sorte
d’entrer dans de nouveaux lieux ou de provoquer des rencontres afin
de susciter une nouvelle réponse? Comment alors ne pas penser qu’à
chaque fois qu’on franchira le perron de lieux propices à de nouvelles
rencontres, notre Ange va peut-être les exploiter pour nous envoyer un
message? Et si ce n’est pas le cas, comment ne pas être déçu? Com­
ment formuler chaque nouvelle question ? Et comment l’oublier aussi­
tôt afin de favoriser la réponse ? Comment ne pas se demander,
lorsqu’on a l’occasion de choisir entre deux routes, quelle est celle vers
laquelle nous incline l ’entité invisible afin de répondre à notre
requête? Pourquoi n’y aurait-il pas en effet un meilleur chemin?
L’Ange a-t-il le moyen de répondre quel que soit le chemin emprunté ?
De quoi devenir complètement fou !
Je ne savais répondre clairement qu’à cette dernière question: non,
l’Ange ne peut pas me répondre si j ’emprunte un chemin connu ou
habituel, car il y a de fortes chances pour que cela annihile toute possi­
bilité de dialogue (8e règle). Pour provoquer une réponse de l’Ange, il
faut créer de la nouveauté (Aide-toi, le ciel t’aidera) !
Le problème est que la création systématique de nouveauté, dans l’at­
tente d’un message, est très embarrassante. En bon touriste conduisant
sa voiture sur le chemin de nouveaux imprévus, on arrive plus à s’em­
pêcher de provoquer la nouveauté en sortant systématiquement des
sentiers battus, et on se perd ainsi très facilement.
C’est alors que pour me débarrasser de cette tendance à interpréter des
signes comme autant de messages, j ’eus l’idée de confier à l’Ange
l’instruction suivante:
« Lorsque le kilométrage de ma voiture affichera 191191, nombre cor­
respondant à la date de naissance de mes enfants, envoie-moi des
signes me permettant de savoir quel comportement tu me conseilles
d’adopter avec eux la semaine prochaine, et où tu me suggères de les
emmener ».
Je devais en effet recevoir mes enfants à mon retour de vacances, et je
souhaitais en profiter pour partager seul avec eux certaines activités,
mais je n’avais encore rien organisé.
En dehors de mon projet d’écriture, cette question était ma principale
préoccupation. Ainsi formulée par ce kilométrage comme un rendez-
vous, elle avait l’avantage de me permettre de ne pas être constam­
ment en train de surveiller la manifestation de signes de réponse de la
part de l’Ange. Je n ’avais qu’à attendre d ’arriver au kilométrage
attendu. Néanmoins, je n’échappais pas à la tentation de calculer l’en­
droit approximatif où il risquait d’avoir lieu. Ayant déjà posé la ques­
tion à l’Ange et n’étant pas dupe de cette anticipation susceptible de
me faire influer sur la réponse, je lui précisai ma question :
« Fais en sorte que malgré mon inclination à anticiper les lieux, je
puisse être convaincu par ta réponse. J’ai en effet du mal à m ’empê­
cher d’agir - en rallongeant mon parcours - pour parvenir au kilomé­
trage attendu en un lieu particulièrement plaisant à mes yeux, par
exemple où j ’aimerais vivre avec mes enfants. Il te faudra donc faire
preuve d’imagination pour que je ne puisse pas faire un tel calcul et
continuer ainsi de relever ton message comme venant bien de toi. Il
faudra donc que tu me réserves en ce lieu une belle surprise ».
Je ne prononçai pas un tel message à voix haute mais je marquai clai­
rement cette demande dans mon for intérieur.
J’avais en effet une vague idée de l’endroit approximatif où je préfé­
rais me trouver lorsque ce kilométrage serait atteint: dans la montagne
au sud-ouest de Digne. Je désirais que d’excellentes « énergies » soient
présentes en ce lieu. Je ne connaissais pas cette montagne, mais je vou­
lais éviter de me retrouver au km 191191 sur l’autoroute du retour ou
encore dans une zone commerciale. Je me voyais mal en train de pho­
tographier l’environnement d ’une autoroute ou d’un supermarché dans
l’idée de rechercher plus tard les signes d’une réponse positive.
C ’est ainsi que je compliquais la tâche de l’Ange pour lui éviter de me
décevoir car je continuais de douter. Au pire j ’en serais débarrassé. Et
avec le recul, je remarquais que la synchronicité de la librairie ne
m ’avait pas suffi. Je me demandais si l’Ange m ’incitait vraiment à
continuer de lire ce fameux livre. Si oui, était-ce pour encourager la
poursuite de mon expérience, était-ce vraiment pour m ’inciter à écrire
le mien, ou tout simplement pour agrémenter ma culture personnelle
sur l’Ange lui-même ?
La fatigue s’en mêlant, je doutais même de la question de savoir si je
devais vraiment écrire un livre sur cette méthode destinée à engendrer
des synchronicités, étant donné que je serais en fait très embarrassé
pour parler de l’Ange. Manifestement, ce dernier n’était plus tout à fait
une abstraction et bien au contraire il ressemblait de plus en plus à une
entité réelle. Or je ne voulais pas prendre le risque de me ridiculiser, en
tant que scientifique. Et du même coup, mon projet de livre était en
train de partir à la trappe.
J’avais plus de 50 km à perdre pour atteindre le kilométrage attendu
dans la montagne où je souhaitais parvenir, et je fus par conséquent
atteint d ’une bougeotte qui commençait à devenir excessive. C ’est
ainsi que je décidais d’emmener Danièle au restaurant et qu’il nous
arriva ensuite ce que j ’ai déjà décrit en début de deuxième partie: deux
synchronicités, vécues l’une à Digne, l’autre à La Javie, se succédant
en moins de 24 heures et clairement porteuses de la même significa­
tion, à tel point que mon amie elle-même, les vivant de la même façon
que moi, s’est à chaque fois exclamée :
- Cela veut dire que tu dois écrire ton livre !
Cet ordre me fut donc répété deux fois, comme pour mettre fin à mes
doutes, alors que ce projet d’écrire restait plus ou moins dans mes
intentions. Mais les doutes que j ’entretenais transportaient avec eux le
risque que je minimise tout ce que je venais de vivre. Pour cesser de
minimiser, il a fallu que je vive une avalanche de synchronicités por­
teuses de la même signification: j ’avais à écrire sur un sujet bien pré­
cis, et j ’avais besoin d’une détermination solide pour mettre fin à une
attitude dubitative risquant a priori de me faire abandonner mon projet.
Il y a une remarque intéressante à faire sur une telle avalanche : le
scepticisme ne constitue pas nécessairement un frein à la production de
synchronicités, à partir du moment où il n’enlève rien à l’état d’ouver­
ture nécessaire à leur observation. Bien au contraire, il semblerait qu’il
devienne même un allié pour parfaire la détermination.
Le scepticisme revêt ainsi deux aspects apparemment contradictoires :
on peut le considérer comme une absence de foi, mais on peut aussi le
faire apparaître comme un doute permettant de renforcer cette foi !
Supposons en effet une foi trop facilement acquise devant une inter­
prétation potentiellement sujette à un risque d’erreur. Alors on peut
dire que nous ne sommes plus en présence de foi, mais de dévotion,
voire de naïveté. Or quelle serait la valeur d’une telle foi? Il est évi­
dent que la perte de crédibilité d’une croyance mal fondée risque de
diminuer les probabilités d’actualiser un futur qui soit en accord avec
elle.
On peut donc en conclure qu’une certaine dose de scepticisme n’est
pas sans renforcer le pouvoir de l’intention, et qu’il contribue peut-être
même à favoriser un détachement salutaire.
Au total, je venais donc de vivre quatre synchronicités qui ont achevé
de me convaincre sur la nécessité de me mettre au travail de rédaction
de ce livre, d’autant plus que la dernière était accompagnée de l’obser­
vation d’un double 22, comme s’il s’agissait d’un signal que ma déter­
mination enfin acquise allait générer un changement dans ma vie. Je
développerai plus loin cette question du double 22, qui mérite bien elle
aussi un chapitre à part.
A travers quatre synchronicités, L’Ange m’avait donc par deux fois
confirmé le sujet, et par deux fois rappelé de m’atteler à la tâche. Je
garde le souvenir de cette expérience comme celle d’avoir reçu un
ordre !
Un ordre que je me serais envoyé à moi-même en passant par les cou­
loirs de mes temps futurs ! N ’est-ce pas un drôle d’écho?
Il me reste ici à témoigner des dernières synchronicités que nous avons
vécues juste avant de terminer nos vacances, celle du fameux kilomé­
trage 191191.
Après avoir quitté La Javie puis roulé sur une trentaine de kilomètres,
je stoppai la voiture au kilométrage exact attendu (191191,0) au sud-
ouest de Digne, à un ou deux kilomètres du village de Champtercier,
sur une petite route de moyenne montagne à environ 700 mètres d’alti­
tude, toujours située sur la Route du Temps. Rien de particulier à pre­
mière vue excepté de superbes paysages, comme d’habitude. Je me
demandai ce qu’il fallait lire dans ces paysages et pris même quelques
photos quand je remarquai en face de nous à environ 100 mètres sur la
route, une bifurcation avec un panneau indiquant « Camping de Font-
liesse ».
Un camping ! J’avais justement pensé emmener mes enfants camper la
semaine suivante, mais une incertitude météo et le froid du mois
d ’août m ’avaient amené à envisager un autre programme que je
n’avais pas encore fixé.
Mes premières pensées furent : eh bien il va sûrement faire beau et je
vais donc les emmener camper, ce qui sera parfait ! Et je commençais à
calculer la probabilité pour tomber sur un camping le long de ce kilo­
mètre : si je comptais quelques dizaines de camping sur quelques mil­
liers de kilomètres de route, cela me faisait une probabilité de l’ordre
de 1 %: pas mal, mais est-ce que cela méritait l’appellation d’origine
contrôlée de « véritable synchronicité »? Le hasard pouvait là aussi,
avoir joué.
Me paraissant évident qu’il fallait choisir la bifurcation du camping -
sans ce panneau, j ’aurais continué tout droit et la voiture serait restée
en pleine nature tout le long du kilomètre 191191 - nous nous sommes
arrêté trois cents mètres plus loin en face de la maison des propriétaires
dont le terrain de camping, manifestement vide de toute tente, était
situé en contrebas.
Curieusement, toutes les portes de cette maison étaient grandes
ouvertes et nous invitaient à entrer. A peine à l’intérieur, nous consta­
tions que la maison faisait aussi office de gîte, mais que tous les lits de
ce gîte étaient absolument vides et non défaits : aucun occupant appa­
remment, ce qui nous fut confirmé par les propriétaires réveillés.
Après avoir fait cette constatation des lits vides, je réprimai intérieure­
ment une interprétation: les lits de mes enfants resteraient-ils vides,
eux aussi ?
Dans l ’ensemble, la maison était particulièrement accueillante,
ouverte, charmante et située dans un paysage de rêve. J ’aurais vrai­
ment aimé y habiter. Dans l’entrée principale du rez-de-chaussée on
pouvait lire sur une affiche murale une citation de Jean Giono, dont
voici quelques lignes :
« Celui qui voudra entrer dans ces territoires heureux, trouvera les
portes ouvertes... La Haute-Provence, c’est par excellence la patrie de
la lumière et du silence. On peut marcher des journées entières seul
avec soi-même dans une joie, un ordre, un équilibre, une paix incom­
parables. Ce pays vous fait comprendre l’organisation la plus noble de
la terre: une simplicité pleine de sagesse oblige à la paisible, à la plus
durable des joies: il entoure d’une logique si éblouissante que vous
êtes désormais habité par un dieu de lumière et de pureté. »
Ces paroles me firent frissonner de joie, et il me semblait évident que
l’Ange répondait de façon magistrale à ma demande. Ceci me fut
confirmé par l’accueil très chaleureux des occupants, un couple avec
lequel nous sympathisâmes tandis qu’ils nous faisaient visiter leur gîte.
J’avais donc le sentiment que l’Ange m’avait répondu, et qu’il aurait
difficilement pu faire mieux, étant donné l’ambiance exceptionnelle­
ment harmonieuse de l’endroit, mais je ne comprenais pas encore très
bien son message qui ne répondait qu’à une partie de ma question :
« Quel comportement dois-je adopter avec mes enfants ? » Les em­
mener dans un camping, d’accord... mais, et mes activités avec eux ?
Je ne compris le véritable sens de cette synchronicité que quelques
jours plus tard, quand après avoir attendu patiemment à l’aéroport, je
réalisai que mes enfants ne viendraient pas passer leur semaine de
vacances avec moi: en remarquant dans le gîte l’absence de tentes et
tous ces lits vides, mon amie et moi avions eu la même pensée, que
j ’avais immédiatement réprimée. En dépit de la grande déception que
j ’éprouvai, l’Ange m ’avait répondu d’une façon pertinente, et même
plus: cette fois-ci, avec beaucoup de compassion.
Dès mon retour de vacances, je m ’attelai à la rédaction de ce récit.
Résumé du chapitre XIII

Une avalanche de synchronicités provoquées volontairement par des


« questions à l’Ange » est à l’origine de ce livre.
XIV.
La guerre des logiques

Où l ’on tentera tout pour sauver la causalité, mais pas au prix


de la rendre irrationnelle en continuant de cacher sa sœur jumelle.

Nous allons aborder ici les différents types d’explications possibles de


ces synchronicités, selon les logiques de causalité simple et double,
cette dernière n’étant après tout qu’une extension de la première.
L’effort que nous allons faire en premier lieu pour expliquer de façon
causale ces phénomènes se justifie par le fait qu’il importe de tout faire
pour essayer de sauver cette bonne vieille logique du « bon sens ».
Pour sauver cette logique causale nous allons « frapper fort » en l’enri­
chissant de concepts issus de la mécanique quantique comme le para­
doxe de l’observateur. Il n’y a pas de raison a priori que ce paradoxe
profite plus à la logique non causale qu’à sa consœur, c’est pourquoi
nous allons l’employer afin de mettre plus sérieusement à l’épreuve
notre Théorie du Temps. L’intervention supposée de la conscience de
l’observateur dans le résultat de l’observation est en effet puissante
dans ses conséquences, car susceptible de fournir des explications inat­
tendues à notre expérience.
Oublions donc pour le moment notre Théorie du Temps et posons-
nous les questions que je me suis moi-même posées à l’issue de cette
petite aventure, alors que je n’avais pas encore bien saisi les méca­
nismes qui font l’objet de ce livre.
Comment toutes ces coïncidences font-elles pour arriver au bon
moment, au bon endroit, et se synchroniser à mon attente? Pourquoi
sont-elles instantanément significatives? Comment se fait-il pour
qu’elles soient systématiquement véhiculées par un événement impro­
bable, au sens statistique du terme?
On peut voir des signes partout, et ceci serait une attitude patholo­
gique. Mais il ne faut pas confondre: les signes accompagnés par des
événements improbables sont différents des autres. Si, par exemple je
regarde les nuages passer et que je vois se dessiner une forme qui
m’inspire une interprétation, que j ’y vois un signe, il n’y a là aucune
synchronicité, aucun élément qui valide ce signe; il s’agit d’une pro­
jection mentale.
Mais dans le cas de synchronicités, on dirait qu’elles accompagnent
l’interprétation qui leur est donnée comme si un coup de tampon et
une signature venaient valider l’authenticité d’un document.
Le point fort de la logique causale est de faire intervenir le hasard en
prétendant que nous ne sommes pas réellement capables d’évaluer
l’improbabilité des événements, car ils dépendent de facteurs connus et
conscients d’une part, inconnus ou inconscients d’autre part. L’impro­
babilité serait alors une illusion venant du fait que nous ne sommes pas
conscients de tous les facteurs influant sur les phénomènes.
Récapitulons : Durant ces quatre jours de vacances, il m ’est difficile de
préciser exactement combien j ’ai vécu de coïncidences, car certaines
s’organisent en un seul événement. Mais je peux les décomposer en
neuf étapes, quoique très inégales dans leur probabilité d ’occurrence.
Tout d’abord, une première série de six coïncidences en réponse aux
interrogations relatives à mon projet de livre :
1. La photo de Sainte-Thérèse, auteur de la poésie « A mon ange gar­
dien », une heure après avoir questionné un « Ange ».
En première analyse, je pense qu’on peut invoquer le hasard, car
lorsqu’on rentre dans une église, on doit s’attendre à rencontrer des
signes angéliques, et lorsqu’on visite un village, on va souvent voir son
église.
2. La citation de Sainte-Thérèse: « je n ’ai jamais cherché que la
Vérité », suite à un questionnement sur une recherche de vérité.
En première analyse, on peut là aussi invoquer le hasard de la corres­
pondance entre cette citation et ma question à l’Ange, car il ne doit pas
y avoir une grande quantité de citations connues de Sainte-Thérèse.

3. Le livre sur les rapports entre âme et science, en réponse à mon


interrogation sur la compatibilité entre recherche scientifique et vérité
spirituelle.
Là aussi, il faut invoquer le hasard, car je faisais ma recherche dans un
rayon « spiritualités » où il n’y pas lieu de s’étonner outre mesure de
trouver des livres parlant de l’« âme ».

4. Le rangement parfaitement synchronisé du « dialogue avec l’ange »,


coïncidant au moment où je cherche un nouveau livre pour inspirer ma
recherche, alors que je le lisais déjà...
Stop ! A un moment donné, il faut s’arrêter d’invoquer le hasard, car
cela n’est plus du tout crédible, les probabilités étant ici très faibles:
d’une part la synchronisation du geste, d’autre part l’identité du livre
avec l’ouvrage central de ma problématique.
Il est clair que si l’on invoque ici le hasard on prend le risque de passer
à côté de quelque chose. On s’enferme dans un « a priori », dans une
pensée unique.

5. La seule place de stationnement juste devant la librairie, interprétée


comme un encouragement à écrire un livre.
En première analyse, je dois invoquer le hasard, car l’interprétation
peut paraître douteuse. J’ai clairement « projeté » a posteriori sur cette
coïncidence une réponse à une question que je me posais.

6. Le restaurant « Le Nouveau Roman », qui achève de combler mes


doutes à ce sujet, au moment où je m’apprête à rentrer de vacances.
C ’est assez amusant, cela confirme l’interprétation précédente, mais on
peut encore invoquer le hasard si on considère (6) indépendamment de
(5). C’est la présence des deux qui est troublante. Mais dans le doute,
je persiste à invoquer le hasard. En agissant ainsi, je prends à nouveau
un risque de pensée unique, mais c’est pour une bonne « cause », si
l’on peut dire.
En résumé, je conserve uniquement (4) comme événement qui ne relè­
verait pas du hasard. Mais le problème est que si je conserve (4), alors
j ’ai de nouvelles raisons de remettre en question mon classement de
(1), (2), (3), (5) et (6) dans la catégorie du hasard, car ces coïncidences
sont liées à (4) à plusieurs niveaux : celui de la question des anges, et
celui de mon projet de livre.
Je suis donc obligé de réhabiliter toutes mes coïncidences, à cause de
ce lien entre la plus improbable et toutes les autres, en attendant de
trouver une meilleure façon d’en douter.

Venons-en maintenant à la seconde série de trois coïncidences qui ont


suivi, en réponse à mes interrogations concernant mes enfants :
7. Un camping, doublé d’un gîte, à l’emplacement exact du kilomé­
trage 191 191, alors que la probabilité est très élevée de tomber en rase
campagne, ou en face d’une maison aux portes fermées.
Invoquer le hasard est ici délicat, car la probabilité de tomber sur un
lieu aussi pertinent par rapport à ma question était faible : disons une
chance sur cent, c ’est un ordre de grandeur, mais le hasard reste possi­
ble. Je prends le risque.

8. Les lits vides du gîte et l’absence de tentes du camping, en réponse à


une demande de ma part supposant la présence de mes enfants la
semaine suivante, alors qu’ils seront finalement absents.
Il est normal que des lits en pleine journée ou en fin de saison soient
vides. Ce qui était plutôt anormal, c ’était que les portes fussent
ouvertes, comme pour nous permettre de le constater. Après tout, cha­
cun fait bien comme il veut. Mettons cela sur le compte du hasard.

9. Et enfin, le caractère tout à fait exceptionnel du gîte: son originalité,


son harmonie, son charme, la magnifique citation de Giono, l’ouver­
ture de toutes les portes de la maison, sa superbe vue et l’accueil cha­
leureux des occupants réveillés de leur sieste, rejoignait parfaitement
ma demande de vibrations positives en un tel endroit, où j ’aurais sou­
haité vivre.
STOP ! A tous égards, le fait de trouver un endroit correspondant par­
faitement à ma demande s’imposait à l’évidence. La probabilité de
trouver un tel endroit était encore bien plus faible que celle de tomber
simplement sur un gîte ou un camping. On peut sans conteste estimer
une probabilité de l’ordre d’une chance sur mille.
Je retiens donc également (9) comme événement « probablement »
non dû au hasard. Mais pour la même raison que pour (4), si je retiens
(9), alors je dois reconsidérer mon analyse de (7) et (8) en terme de
hasard, car (7) et (8) sont liés à (9) et en quelque sorte le renforcent,
tout comme (1), (2), (3), (5) et (6) renforcent (4).
Je suis donc obligé de réhabiliter toutes mes coïncidences. En conclu­
sion, j ’élimine le hasard comme facteur « causal » et dois donc recon­
sidérer absolument tous les événements (1) à (9), pour tenter de leur
trouver un autre type d’explication causale.
A défaut de hasard, il faut donc admettre que ces événements sont cor­
rélés d’une manière ou d’une autre à mes interprétations, même si elles
sont partiellement erronées. Là n ’est pas le problème: j ’accepte par
cette hypothèse qu’il puisse exister une corrélation entre ma pensée et
le déroulement des événements.
C ’est m aintenant q u ’il nous faut dégager une logique à toute
épreuve pour sauver la causalité ! Commençons par analyser les événe­
ments (4) et (9) qui sont les plus étranges: supposons qu’il existe une
explication causale à (4) : alors il faut peut-être en déduire que la
libraire a inconsciemment attendu le moment où je me trouvais devant
un de ses rayons pour ranger le livre « Dialogues avec l’Ange ». Il y
aurait une information venant de moi qui aurait circulé « dans l’air » et
qui aurait amené la libraire à faire ce geste, comme si elle se trouvait
partiellement sous hypnose !
Ce n’est pas une explication acceptable car elle pose plus de pro­
blèmes qu’elle n’en résout. La théorie du transfert télépathique d’infor­
mations entre la libraire et moi est peut-être encore plus étrange que la
seconde causalité, mais surtout elle n’explique pas la raison de ce livre
Dialogues avec l ’Ange. Elle venait certainement de le recevoir, bien
avant que mon information soit « en l’air », compte tenu des délais de
livraison. A moins que mon « information » ne remonte le temps?
Non, car on retombe dans la seconde causalité.
Le même problème se pose avec les autres coïncidences: par exemple,
il faut bien admettre que la citation de Sainte-Thérèse était certaine­
ment présente dans l’église depuis très longtemps, et que si cette pré­
sence avait dû dépendre de mon état mental, alors il aurait fallu que cet
état puisse avoir une influence qui remonte le temps !
Bien entendu, je rejette cette théorie d’une information qui circulerait
dans l’air et qui puisse remonter le temps, même si certaines théories
physiques supra lumineuses [5] le permettent. C ’est une explication
qui n’en est pas vraiment une, car, à nouveau, elle pose plus de pro­
blèmes qu’elle n’en résout.
Voyons maintenant notre plus sérieuse explication causale, qui fait
intervenir une extrapolation du paradoxe de l’observateur consistant à
considérer que l’univers n’est pas réel en dehors de nos observations.
La libraire qui range « Dialogues avec l’Ange » dans l’un de ses
rayons, au moment même où je cherche ce type d’ouvrage après avoir
demandé à l’« Ange » de me mettre sur la bonne voie, est susceptible
de le faire à n’importe quel moment sans que cela change quoi que ce
soit à sa vie. Sa vie n’est pas déterminée par un tel acte. Même si elle
le fait consciemment, le moment qu’elle choisit pour ranger ce livre ne
va influer en rien sur le cours des événements de son propre vécu. Par
conséquent, ce moment est en quelque sorte « libre ». De même, le
titre n’a pas d’importance pour elle: Qu’elle range, au moment précis
où je me trouve devant le rayon, le livre Dialogue avec l ’Ange ou Le
Prince de New York n’influe en rien sur son existence. Elle a l’habi­
tude de ranger plusieurs fois n’importe quel livre dans les rayons de sa
librairie - c’est son métier - et cela ne change rien à sa vie, j ’insiste sur
ce point. De même pour son distributeur: le fait d ’envoyer à un
moment ou à un autre un carton d’ouvrages ne change rien à sa vie. Il
fait cela tous les jours. Par conséquent, le titre de l’ouvrage envoyé tel
jour à telle librairie est libre : il peut être totalement indifférent aux
vécus des personnages l’ayant eu en main et donc ne rien changer à
toutes les observations de l’univers, et donc à l’univers lui-même.
A une exception près: je suis le seul personnage de l ’univers pour
lequel le fait de ranger à tel endroit le bon livre au bon moment va
influer sur lui. C’est tellement vrai qu’il est même très probable que
celui que vous êtes en train de lire n’existerait pas si je n’avais pas
vécu cette coïncidence.
La libraire n’a probablement pas vécu, au sens d’une observation sus­
ceptible d’avoir la moindre incidence sur sa propre vie, le fait de ran­
ger le livre Dialogue avec l ’Ange au moment où je me trouvais en face
du rayon. Se souviendrait-t-elle de son geste en lisant ce livre? Si la
réponse est non, alors même dans le cas où son observation était
consciente, il ne s’agissait pas pour elle d’un fait vécu ou observé.
Mais alors, de quoi s’agissait-il?
Ma réponse est: il s’agit pour elle d’un fait non observé, et par consé­
quent qui reste susceptible d’exister selon une infinité de versions, qui
feraient par exemple varier le titre du livre ou le moment où elle le
range, etc., toutes ces variations ne changeant en rien la vie de la
libraire, son cheminement sur son propre arbre de vie.
Comme nous l’avons vu, on peut admettre que dans notre futur, il
existe une infinité de versions potentielles de nos existences, qui pour­
raient par exemple ne varier que d ’un petit paramètre de distance ou de
délai, en conséquence d’un petit déplacement le long d’une dimension
supplémentaire.
Nous empiétons ici un peu sur notre théorie mais nous le faisons en
respectant encore la causalité, c ’est-à-dire sans supposer pour autant
que notre intention s’en mêle ! J’oserais préciser que, parmi toutes ces
versions potentielles de nos existences, la plupart ne sont pas particu­
lièrement susceptibles de déranger notre quotidien, en modifiant notre
vie ou celle de n’importe qui d’autre, du fait de cette simple variation
d’un petit paramètre de distance ou de délai.
Revenons donc à notre libraire, mais cette fois du point de vue de mon
propre vécu. Je pose la question suivante: puisqu’il n’existe réellement
aucune version privilégiée du comportement de la libraire quant au
moment où elle va ranger un livre et quant au titre de ce livre, et
puisqu’il existe réellement toutes les versions possibles, car non obser­
vées, de cet acte, comment le hasard indéterministe fait-il pour nous
faire vivre une version significative plutôt qu’une autre?
La réponse est la suivante: tant qu’il n’y a aucune observation ou vécu
il n’y a aucun hasard, puisque toutes les occurrences restent à l’état
indéterminé. Le hasard ne sert donc à rien. Tant qu’il n’y a personne
pour observer que quelque chose de particulier s’est produit, tout ce
qui est susceptible d’exister selon les lois de la physique existe simul­
tanément et le hasard n’a pas sa place.
Par conséquent, il faut en déduire que le geste de la libraire, consistant
à ranger à un moment précis le livre qui précisément a le plus de signi­
fication pour moi, ne dépend absolument ni d’elle-même, ni du distri­
buteur. 11 n’est aucunement déterminé par les vécus de ces deux per­
sonnages. Car comme nous l’avons dit, le moment exact où la libraire
a accompli ce geste n’est pas activé tant qu’il n’est pas observé. Il est
donc libre de dépendre de tout autre vécu, en l’occurrence du mien, qui
en suis le seul observateur.
On reconnaît ainsi au passage ce résultat paradoxal mais très important
de la physique moderne: tout ce qui n’est pas observé reste à l’état
indéterminé (à l’état de fonction d’onde). Seuls les événements obser­
vés existent dans un état déterminé, cette détermination étant déclen­
chée par l’observateur !
Mais attention: ceci n’explique pas encore le geste synchronisé de la
libraire !
A partir du moment où je suis bien le déclencheur de mon observation,
portant sur cet acte synchronisé, rien ne s’oppose a priori à ce que ce
soit bien moi qui aie provoqué cette synchronisation du fait de mon
état mental ! Le problème est que cela n’explique pas encore le « com­
ment » de cette synchronisation. Mais faisons la remarque suivante: si
le geste de la libraire n’avait pas été synchronisé, alors je n’aurais
jamais été amené à faire cette observation !
Il semblerait donc que c’est mon observation qui déclenche l’activa­
tion d’une réalité qui, sans elle, n’aurait pas été observée ! Mais atten­
tion, aucune intention n’intervient dans cette affaire, où l’on conserve
notre principe immuable de causalité! À la place de l’intention, nous
invoquons donc ici la possibilité que l’observateur soit lui-même, au
temps présent, responsable du choix final !
Ce qui reviendrait à attribuer à cet observateur une faculté de création
de la réalité !
Non seulement cela dépasserait les prétentions plus modestes de notre
Théorie du Temps, quant aux facultés de l’observateur, mais surtout,
cela contredirait les résultats les plus récents de la mécanique quan­
tique, qui à travers la Théorie de la Décohérence nous montre que
l’observateur ne détermine pas le contenu de ce qu’il observe. Il ne fait
que manifester le choix, le faire entrer dans la réalité, sachant qu’il
reste aléatoire, du moins en l’absence de variables cachées.
En conclusion, il nous manque un élément pour parvenir à sauver la
causalité, et cet élément est le suivant: quelque chose en moi, en tant
qu’observateur, semble informer l’univers que parmi toutes les possi­
bilités d’occurrences d’événements au moment où j ’observe, il faut
choisir celle qui correspond à mon attente !
La causalité ne nous fournit pas cet élément d’explication !
Quoi qu’il en soit, croyez-vous vraiment que les choses se passent
ainsi ?
L’univers serait-il à ce point l’objet de nos caprices ?
Voila donc à quel paradoxe nous mène la logique de la causalité : à ce
qu’elle nous oblige, en respectant une logique implacable, à constater
le fait que nous aurions des pouvoirs extraordinaires, des pouvoirs
magiques, consistant à créer la réalité que nous observons !
La causalité finit donc par nous confronter à l’irrationnel.
Voyons maintenant comment nous pouvons interpréter ces neuf coïnci­
dences dans le cadre de la double causalité. Pour cela il me faut
reprendre le contexte dans lequel s’est formée mon intention d’écrire
ce livre.
L’idée initiale était d’écrire un livre sur la synchronicité. J’avais l’intui­
tion d’un mécanisme et je savais par expérience qu’en les écrivant mes
idées allaient se clarifier.
J’étais cependant conscient de mon manque évident d’exemples per­
sonnels. J’avais déjà vécu ce genre de phénomènes, mais sans jamais
les noter, et mes souvenirs ne suffisaient pas à rassembler de quoi cré­
dibiliser cette expérience. Mon livre ne se serait alors fondé que sur
des cas relatés par d’autres auteurs. Cela ne me paraissait pas suffisant
pour m’atteler à l’ouvrage.
Si mon intention d’écrire était réelle, je l’avais, par ce biais, rendue
impossible à réaliser dans un cadre causal ! Car la probabilité que
j ’écrive ce livre sans avoir vécu ces synchronicités était très faible.
La probabilité que je l’écrive en conséquence d ’un tel vécu, impliquant
l’intervention du hasard indéterministe, était au contraire forte. Et elle
était renforcée par le fait qu’en rentrant de vacances j ’aurais une
déception me libérant du temps libre, suite à l’absence de mes enfants.
Je ne le savais pas mais on peut dire que l’univers le savait et que mon
futur l’avait déjà en mémoire.
Elle était aussi renforcée par le fait que je connaissais toutes les condi­
tions requises à l’apparition du phénomène: prise de risque, lâcher
prise, déplacements aléatoires, voyage...
Je me trouvais donc en face d’une situation où les chances fortement
augmentées d’atteindre mon objectif par le plus grand des hasards
finissaient par dépasser les chances fortement diminuées de l’atteindre
par une méthode « raisonnable », c ’est-à-dire causale. A partir de là, le
mécanisme de toutes ces synchronicités coulait lui-même de source !

Il s’est formé dans l’univers plusieurs trajectoires de vie provenant du


moment futur le plus probable où j ’allais me mettre à écrire, c’est-à-
dire la semaine suivante, et convergeant jusqu’à différents moments de
la semaine précédente.
J’ai trouvé la petite église avec cette photo commentée de Sainte-Thé­
rèse parce que le trajet m’amenant vers son village, puis vers cette
église, inclus dans mon Arbre de Vie, a vu sa probabilité fortement
augmentée par rapport à toutes les autres possibilités de trajet où le
hasard aurait pu me guider.
La libraire devait ranger Dialogues avec l ’Ange à un moment précis de
sa journée, après avoir reçu une livraison de plusieurs livres. On peut
supposer qu’il y avait de son côté une marge de quinze minutes
d’aléas. De mon côté, je pouvais arriver à Digne et pénétrer dans une
librairie, comme j ’ai souvent l’habitude de le faire, à un moment beau­
coup plus indéterminé de la journée, disons avec une marge de trois
heures recouvrant la sienne. Il y avait donc une probabilité de l’ordre
de 1/10000 pour que son geste soit synchronisé.
S ’agissant cependant d ’un événement susceptible de frapper mon
esprit en me conduisant avec une quasi-certitude vers la réalisation de
mon intention, la probabilité de cette trajectoire de vie convergente
synchrone redescendant vers mon présent à cette seconde précise était
fortement augmentée.
Mais elle n’avait même pas besoin d’être proche de la certitude. Il lui
suffisait de rester improbable tout en dépassant la probabilité du meil­
leur scénario concurrent, qu’il soit causal ou non.
Si, par exemple, la probabilité que j ’écrive un livre sans vivre de syn-
chronicités était de un pour cent, il lui suffisait d’être augmentée d’un
facteur 100, et non 10000 ! Étant donné que la semaine d’après, il était
par contre probable que je me mette à écrire, avec ou sans récolte de
coïncidences !
Ces chiffres ne sont bien entendu que des estimations. Ils ont le juste
mérite de concrétiser un schéma de mécanisme très simplifié mais
rationnel.
On peut considérer les deux synchronicités « littéraires » qui ont suivi
comme « accrochées » à la même trajectoire convergente. Mon inten­
tion avait dû générer une importante « source d’eau » la semaine sui­
vante, et cette eau s’était écoulée vers mon présent en formant des
« nappes » à plusieurs endroits. En fait, il s’agissait simplement des
moments de cette trajectoire où le hasard venait renforcer mon inter­
prétation selon laquelle je devais écrire mon livre, à condition d’avoir
une récolte suffisante. Mais il est étonnant d’apercevoir ainsi à quel
point la Loi de Convergence peut être efficace. Parmi tous les hasards
possibles de mes trajets aléatoires, elle en a choisi une qui rassemblait
tous les « morceaux de hasard » liés à mon intention initiale, qui se
sont ainsi retrouvés enchaînés sur la même trajectoire convergente vers
mon passé.
Comme une rivière qui par endroits forme des vasques !
Revenons en maintenant à la synchronicité la plus émouvante que j ’ai
vécue, celle du kilomètre 191191.
Il y avait quelque chose de plus qu’une simple synchronicité dans cette
fabuleuse convergence. Car tout s’était passé comme si l’Ange exis­
tait, comme s’il me parlait !
Que ce gîte corresponde à mon attente représentait bien une synchroni­
cité, au même titre que les précédentes, mon intention d’écrire étant
remplacée ici par mon intention de passer de bonnes vacances avec
mes enfants, dans un lieu particulièrement agréable.
Mais le fait que ce gîte soit vide d’occupants en dehors des proprié­
taires, semblait « vouloir » m ’apporter une information venant du
futur, l’absence de mes enfants.
Il n’y avait pas ce type d’information dans mes rencontres « litté­
raires ». Lorsque nous déduisions de ces rencontres que « cela voulait
dire que je devais écrire ce livre », il ne s’agissait pas d’une bonne
interprétation, car personne ne venait ici me conseiller en quoi que ce
soit. L’Ange lui-même, même s’il existait, n’aurait pas cette fonction,
ainsi qu’il le dit dans le livre Dialogues avec l’Ange :
« L’homme conserve son libre arbitre et ses choix ».
Il y avait donc dans mon aventure cette unique étrangeté résiduelle,
relative à l’absence de mes enfants, et que la double causalité semblait
ne pas pouvoir expliquer.
A moins que la Loi de Convergence ne transporte avec elle des infor­
mations ?
Une sorte de « Loi d’Amour » qui transporterait des informations pour
me rassurer, ou me prévenir?
Cela me semblait complètement ridicule !
On pourrait me faire remarquer que c ’est déjà le cas de toutes les syn-
chronicités, puisqu’en même temps qu’elles révèlent une intention,
elles transportent avec elles cette information qu’il existe un chemin de
réalisation, tout en nous invitant à le suivre.
Mais lorsque l’effet de la Loi de Convergence est de transporter d’au­
tres informations que celles qui sont relatives à nos intentions, il y a
heu de se poser de sérieuses questions. Et c’est pourtant bien le cas...
Avant d’aborder la solution de cette énigme en dernière partie, nous
allons maintenant illustrer un cas de transport d’informations vers le
passé, par l’exposé d’un ensemble de faits personnellement vécus :
Les occurrences du double 22 qui, contrairement aux synchronicités
que je viens d’exposer, apportent des preuves !

Résumé du chapitre XIV

Il est irrationnel de maintenir un raisonnement causal pour chercher à


justifier une avalanche de synchronicités.
Il est en revanche tout à fait rationnel de déployer un raisonnement
doublement causal, dont la simplicité et la logique s’imposent à l’évi­
dence.
Le double 22
Où l ’on dévoile une seconde série d'expériences vécues
qui nous obligent à enterrer définitivement la causalité!

Si ce sont bien des séries de synchronicités vécues sur la Route du


Temps qui m’ont donné l’impulsion d’écrire ce livre, ce sont surtout
des coïncidences numériques avec le nombre 22, et plus exactement
avec des suites de 22, qui m ’ont apporté la preuve dont j ’avais person­
nellement besoin pour me mettre à l’ouvrage. En tant que scientifique,
je n’aurais en effet pas pris le risque d’élaborer une théorie aussi ambi­
tieuse pour expliquer les mécanismes de ces phénomènes, si je ne
m ’étais pas forgé une intime conviction grâce à ma propre expérience.
Ces preuves existaient depuis longtemps dans les livres, mais elles res­
taient sans explication et constituaient un défi à la science. C’est le fait
que ce défi m’ait été personnellement adressé « par l’univers » à tra­
vers des séries de 22, comme une sorte de provocation qui ne serait pas
tombée sous les yeux d’un aveugle, qui m’a conduit à le relever à tra­
vers cette théorie de la double causalité.
Plusieurs années avant de commencer la rédaction de cet ouvrage, j ’ai
pris un risque important dans ma vie en décidant de créer une entre­
prise pour valoriser les résultats de mes travaux de recherche en vision
artificielle.
Mon associée dans cette affaire, qui était versée en numérologie, me fit
remarquer que le jour de sa création, un 22 décembre, était le même
nombre que mon « chemin de vie » personnel ainsi que celui de cette
société, ces nombres étant calculés à partir des lettres de nos noms res­
pectifs. J’ai alors pris l’habitude de considérer ce 22 comme un fétiche,
et je l’introduisais un peu partout lorsqu’il fallait choisir un mot de
passe, ou jouer au loto par exemple. J’allais même jusqu’à faire 22
pompes le matin plutôt que 20, mais ça s’arrêtait là.
Ce n’était pas encore un symptôme de déviance mentale car il n ’y
avait aucune superstition derrière mais simplement ma passion pour
les nombres et pour les coïncidences numériques. Je m’y intéressais
depuis toujours et bien que je n’en eusse jamais vécues personnelle­
ment, une sorte d ’intuition me laissait penser qu’en « semant » ce
nombre 22, je récolterais peut-être quelque chose, sans trop de convic­
tion mais dans l’esprit: « Qui n’essaye rien n’a rien ». J’étais encore
bien loin de me douter que je réussirais par ce biais à provoquer des
coïncidences.
Je fus donc tout à fait surpris lorsque quelques années plus tard, parais­
sait dans le journal régional du 02 / 02 / 2002 un article sur mes tra­
vaux citant cette entreprise, dont la date exhibait cette série de quatre
2. Cela pouvait être une simple coïncidence relevant du « hasard »,
mais le fait que cela m ’arrive après avoir « semé » le 22 m’avait mis la
puce à l’oreille. D ’autant plus que c ’était la première fois que ma
société, dont la naissance était caractérisée par un double 22, faisait
l’objet d’un article de presse.
Tout ceci aurait pu être oublié très vite mais la même année, alors que
quelques turbulences causaient des changements dans ma vie, je me
suis aperçu que les jours les plus importants, les plus chargés émotion­
nellement, étaient ponctués par l’observation du nombre 22. Pendant
ces jours-là, j ’étais littéralement harcelé par ce nombre. Je me station­
nais souvent en face du 22 d’une rue. Lorsque je regardais l’heure il
était 11 h22 ou 22h44. Je me levais la nuit à 1h22 ou 2h44. J’ouvrais
un livre et je tombais sur la page 22 ou 122. Je croisais un panneau
d’affichage sur l’autoroute contenant 22 ou 44 dans les minutes affi­
chées. Le 44 apparaissait souvent comme alternative au 22 (le 11 ou le
88 étaient beaucoup plus rares).
En tant que scientifique, j ’étais assez objectif dans l’analyse du fait que
je pouvais avoir tendance à projeter moi-même ce 22 dans mes obser­
vations, c’est-à-dire à le privilégier sans m’en rendre compte. Aussi je
restais dubitatif, mais la suite de l’histoire n’a pas confirmé cette inter­
prétation.
2005 qui fut à nouveau pour moi une année de grands changements,
fut marquée par ma rencontre avec deux personnes, qui devinrent des
amis après m ’avoir apporté un grand soutien. Ces deux personnes
étaient respectivement nées un 22 septembre et un 22 novembre. J’eus
alors l’idée de vérifier la date de naissance de l’ami qui m ’avait le plus
aidé dans mon passé, et je constatai qu’il était né un 22 janvier !
Pris dans le piège d'une pensée irrationnelle voulant associer mes
changements de vie à l'influence de personnes nées un 22, je me remé­
morai l'événement le plus déterminant durant les années précédentes.
Il s'agissait d'une séparation vécue en 2002, qui avait eu lieu suite à la
visite d'un ami qu'avec ma compagne de l'époque nous avions décidé,
pour l'aider, d'héberger durant les vacances d'été. Ceci a provoqué des
différents entre nous qui nous ont finalement conduits à la rupture. Or
cette personne était elle aussi née un 22 !
L’année 2006 fut pour moi une période d'éveil qui, après des années
turbulentes, me permit de progresser dans mes réflexions sur la syn-
chronicité. Je décidai alors de faire mes premières expériences pour
essayer de les provoquer consciemment, à l'occasion de vacances en
Haute-Provence.
Un double 22 déjà mentionné dans "Les traces du futur" me fut servi
sur la Route du Temps, le jour même où à force d’être assailli par des
synchronicités en réponse à mon expérience, je décidai d’écrire ce
livre.
Je commençai alors à réaliser que ce double 22 ou ces suites de quatre
2 devaient avoir une signification. Mais une signification envoyée par
qui? Je me rendais bien compte qu’il survenait à des moments impor­
tants de ma vie, lorsque je faisais des choix de vie. Et j ’avoue que pen­
dant une certaine période, l ’idée qu’il aurait pu y avoir un « petit
ange » qui m’envoyait des signaux m’a effleuré l’esprit.
Cette interprétation m’est venue pour la première fois lorsqu’un soir de
retour d’un voyage d’affaires à San Francisco, durant lequel j ’avais
pris la décision « héroïque » mais déprimante de refuser de signer un
très gros contrat de logiciel qui aurait changé mon activité durable­
ment, il m’a été attribué le 22 au bar de l’aéroport pour mon tour de
service, puis le 22A à l’enregistrement comme siège de vol. Je l’ai pris
comme une sorte de consolation signifiant: « sois heureux, tu as pris
la bonne décision ».
Une autre fois, alors que je m’installais à Marseille dans un studio, et
que j ’effectuais des courses pour dîner ce soir-là pour la première fois
dans mon nouvel appartement, j ’eus à payer une note de supermarché
de 22 euros et 22 centimes, comme si je recevais des salutations de
bienvenue dans ce nouveau logement.
Jusque-là, je ne comprenais toujours pas la raison pour laquelle je ren­
contrais ces doubles 22 à chaque changement important dans ma vie,
et je doutais toujours, mais j ’avais commencé à les noter en vue de les
inclure dans ce livre. J’avais trouvé une explication pour les synchroni-
cités, mais ces séries de 22 résistaient à l’analyse et venaient me titiller
comme des provocations.
Il a fallu que je rencontre ensuite un quadruple 22, le jour symbolique
d’un acte de libre arbitre qui restera peut-être le plus important de ma
vie, pour recevoir le « choc » qui m ’amena à « refondre » ma théorie
en gestation pour activer la rédaction définitive de cet ouvrage. Je
commençais enfin à comprendre qu’il fallait faire une différence fon­
damentale entre les coïncidences et les synchronicités.
Ce quadruple 22 m ’est arrivé lorsque je suis allé signer chez un notaire
l’acte d’achat définitif du terrain que je recherchais depuis longtemps
déjà dans la réserve géologique, et que j ’avais fini par trouver,
conforme à des souhaits pourtant exigeants et par le plus grand des
hasards.
J’ai quelque peu modifié la description des données géographiques de
ce quadruple 22, mais il est parfaitement équivalent à l’original. Ce
jour-là, je quittais le domaine dont je venais de faire l’acquisition et
remettais à zéro le compteur de ma voiture pour savoir à quelle dis­
tance de Digne il se situait, ce qui me permit de constater déjà qu’il se
trouvait à 2,2 km de la route principale, mais ceci ne fit que m’effleu­
rer.
Bien avant d’arriver à Digne, et au moment même où mon compteur
affichait 22,0 km, je croisais la départementale D22 ! Cette départe­
mentale D22 qui était déjà marquée par son « petit rôle » dans ma
décision d’écrire ce livre, était donc située à 22 km exactement de mon
futur lieu d’habitation !
J’étais heureux de ce double 22 que j ’allais pouvoir mettre dans mon
livre car il s’annonçait le jour même où une fois de plus, je changeais
ma vie. Mais je me disais en bon habitué du genre: « peut mieux
faire ! ». Car j ’en attendais un quatrième, ne sachant que faire de mon
« 2.2 » initial dont je me demandais s’il fallait le considérer comme un
22 d’appellation contrôlée, ou pas du tout! Je n’avais jamais vécu de
triple 22 et j ’aurais souhaité que ce 2.2 isolé ait un compagnon. Car un
quadruple 22, cela aurait bien été digne de l’importance de l’acte du
jour! Très sérieusement, j ’en avais assez de toutes ces plaisanteries de
« petit ange » incompréhensibles et il m ’en fallait plus pour me
« réveiller » !
Après m’être stationné en face de mon lieu de rendez-vous, j ’avais
quinze minutes à perdre et je parcourus le centre-ville de Digne. J’en­
trai alors dans une librairie pour acheter des stylos. En sortant de la
librairie, je remarquai le dernier livre de Bernard Werber, dont je
consultai le dos afin de lire le résumé. Pas de résumé, mais je remar­
quais le prix du livre: 22,90 euros. Avec un sourire intérieur de satis­
faction, je me disais que j ’avais trouvé mon quatrième 22 mais j ’étais
encore insatisfait, car en effet rien n’associait ce dernier 22 et mon 2.2
d’origine. Mais en vérifiant la date de sortie de l’ouvrage, j ’ouvris la
page intérieure du dos du livre et je tombai sur l’adresse de l’éditeur,
22 Avenue de Huygens !
J ’ai donc été servi ce jour-là par un quadruple 22 correspondant à deux
doubles 22 d’appellation d’origine contrôlée, c ’est-à-dire associés
entre eux.
Je commençais alors à penser que mes coïncidences du 22 mériteraient
bien un chapitre, mais qu’il faudrait que je travaille sérieusement à
éclaircir leur mécanisme sans quoi la théorie que j ’étais en train de
construire serait bancale.
En bon sceptique, et avant l’épisode de ce quadruple 22 qui acheva de
me convaincre sur la nécessité de reprendre tout ce travail interrompu,
j ’avais de nombreuses fois essayé de rejeter ce 22 qui finissait par
m’ennuyer, persuadé que je le projetais moi-même partout en étant
exagérément sensible à son occurrence les jours importants de ma vie.
Mais cette explication ne résistait pas au calcul des probabilités, même
conditionnelles, et un bon sceptique doit savoir considérer les choses
dans les deux sens. Ce quadruple 22 réduisait à néant mon scepticisme.
Tout ce qu’il me restait à faire, c ’était de trouver la bonne explication,
cette nécessité se présentant à moi comme un véritable défi à l’intelli­
gence que je devais absolument relever!
J ’étais loin de me douter, après avoir rédigé plusieurs pages sur ces
séries de 22, que le plus étonnant restait encore à venir. Je me suis tout
d’abord aperçu qu’un double 22 était niché dans les coordonnées GPS
de ma nouvelle habitation dont la position, avec ses 44 degrés de lati­
tude, ses 2,2 km de la route principale, et ses 22 km de la D22 était
ainsi caractérisée par un total de six 22, parmi lesquels on trouvait
deux véritables doubles 22 !
Ajoutons à cela que la maison fait 22 mètres de large et que son
domaine contient une piscine et deux sources, la piscine étant située à
22 mètres de la maison et la source la plus proche à 220 mètres. Mais
le plus édifiant est que l’autre source du domaine est une véritable
source chaude d ’origine géothermale, coulant à une température
constante de 22° toute l’année !
Et ce n’est pas tout: à l’intérieur de cette maison, tous les radiateurs
comportent un double 22, le premier 22 étant gravé sur l’écrou d’en­
trée tubulaire, et le second inscrit sur le thermostat ! Et pour finir, la
principale pièce de vie de cette maison a la forme d’une voûte de 4.4
mètres de largeur et de 2.2 mètres de hauteur, ce qui, avouons-le, n’est
pas une hauteur tout à fait standard.
Au total, je découvris concernant cette maison pas moins de quatorze
22, parmi lesquels se trouvent au moins quatre doubles 22 d’appella­
tion d’origine contrôlée, c’est-à-dire groupés par associations de deux
22 .
Or il était cette fois impossible que j ’ai pu générer une telle avalanche
de 22, car cette dernière série était comme gravée dans la pierre !
Quelque chose résistait à mon analyse ! Malgré toutes les réflexions
auxquelles m’encourageaient ces observations, je comprenais toujours
mal le rôle que pouvait jouer mon intention dans cette affaire, et dès
que je cherchais un mécanisme indépendant de mes intentions ou pro­
jections, je ne comprenais plus rien !
La solution du problème me fut inspirée par un ami astrologue et
numérologue à qui je relatai tous ces phénomènes, et qui me dit un
jour:
- Pas étonnant que tu trouves tous ces 22, puisque le 22, c’est ton che­
min de vie !
Il parlait de mon chemin de vie numérologique que je connaissais déjà,
mais je ne voyais pas comment la simple connaissance de ce chemin
de vie pouvait engendrer tous ces 22. La lumière commença à venir
lorsqu’il rajouta:
- Et en plus, la longitude de ton soleil natal est de 22.44° !
Il y avait donc un double 22 déjà inscrit dans le ciel de ma naissance,
relatif à la position du soleil, ce que j ’ignorais totalement !
Mais ce n’était pas tout, car en me rappelant qu’il y avait encore un
autre 22 dans mon heure de naissance qui était 22 h 35 après soustrac­
tion du décalage horaire, j ’eus l’idée de calculer mon heure solaire
natale, en tenant compte du décalage entre le méridien de Paris et celui
de Greenwich, en l’occurrence de 9 minutes.
Je découvrais ainsi qu’à ma naissance, non seulement le soleil se trou­
vait à 22.44° de longitude sur l’écliptique, mais qu’en plus j ’étais né à
22 h 44, heure solaire !
Il y avait donc déjà à ma naissance un quadruple 22 qui caractérisait la
position du soleil à ce moment précis !
Cette observation eut sur moi l’effet d’un déclic « eurêka » qui me fit
cheminer rapidement vers la compréhension du mécanisme, car il
devenait clair que mon intention seule ne pouvait plus, de façon non
causale, expliquer le lien entre les 22 de mon passé et ceux de mon
futur.
Il n’était plus possible de penser que, parce que j ’étais « marqué » par
le 22, j ’aurais pu intentionnellement produire tous les autres 22, par
l’intermédiaire des mêmes mécanismes que les synchronicités ou pire
par projections !
Car j ’ignorais la majeure partie de ces informations sur ma naissance
et cela ne pouvait pas, quoi qu’il en soit, expliquer cette surprenante
concentration de doubles 22 relatifs à mon nouveau lieu de vie.
En effet il était impossible d’imaginer que les six doubles 22 relatifs à
mon nouveau lieu de vie aient pu être intentionnellement provoqués,
puisque relatifs à une maison vieille de plus d’un siècle, qui existait
déjà avant ma naissance.
Pour expliquer un tel ordre aussi fortement concentré, la Loi de
Convergence des Parties a donc été contrainte de le propager dans le
passé !
Il fallait envisager que les deux doubles 22 de ma naissance puissent
être causés eux-mêmes par la forte concentration de 22 observée dans
mon avenir.
Car il était en effet beaucoup plus facile d’imaginer qu’il y avait à ma
naissance assez d’aléas pour que ce quadruple 22 puisse provenir de
mon futur. Que l’on décale cette naissance de quelques minutes ne
changeait en effet strictement rien à l’univers et à ses observateurs.
L’indéterminisme de ma naissance pouvait donc parfaitement être
comblé par une information ayant remonté le temps, exactement
comme dans le cas des synchronicités.
Sauf que dans le cas des synchronicités, l’observation restait toujours
ultérieure à l’intention qui l’avait catalysée, ce qui permettait de lui
attribuer une signification !
Or j ’avais déjà compris qu’une coïncidence pouvait se différencier
d’une synchronicité par le fait que l’observation de la coïncidence pou­
vait précéder l’intention, empêchant ainsi l’observateur de comprendre
sa signification. Mais je n’avais pas encore compris qu’en redescen­
dant le temps, la Loi de Convergence des Parties pouvait combler l’in-
déterminisme jusque dans le passé, en y créant un ordre signifiant !
Car il me semblait qu’il était impossible de modifier le passé !
Or, ce double 22 de ma naissance nous suggère le contraire, tout en
nous fournissant en même temps une explication : il est tout à fait pos­
sible de modifier le passé dans la mesure où ces modifications concer­
nent des aspects du passé qui n’ont jamais été observés, comme s’ils
n’existaient pas encore !
Et c’est ainsi qu’au même titre que le futur, on observe qu’une partie
du passé peut très bien rester totalement indéterminée !
Le temps serait donc beaucoup plus symétrique qu’on ne le croit !
Le passé pourrait ainsi être modifié, mais à condition je le répète que
ses traces n ’aient jamais été observées auparavant! La « modifica­
tion » du passé résulterait de l’absence d’observation de traces suffi­
santes pour le définir, voire de leur disparition. Pourquoi ne pas imagi­
ner que la loi de convergence des parties, créatrice d’ordre, puisse défi­
nir elle-même ce qui va être observé lorsque c ’est relatif au passé,
puisque c’est déjà le cas pour le futur?
Mais revenons au mécanisme d’apparition des doubles 22, car je n’ai
pas fini avec mes explications.
Ce qui caractérise les doubles 22 de cette habitation sont des données
matérielles, figées, indépendantes de tout aléa et surtout du temps:
impossible de modifier les coordonnées GPS, les distances et les
tailles ! A plusieurs décennies près, ces nombres restent les mêmes car
ils caractérisent purement et simplement cette maison et son terrain.
En revanche, c’est tout le contraire pour les autres doubles 22 qui ont
précédé dans le temps cette accumulation finale. A un jour près, à
quelques minutes près, voire à une minute près, ils auraient très bien
pu disparaître. Il suffit de les passer en revue pour s’en apercevoir, à
commencer par celui de ma naissance.
Il est donc évident que si lien il y a entre tous ces doubles 22, alors
l’information ayant créé ce lien a circulé du futur vers le passé, et ne
s’est pas contentée de s’arrêter au présent.
Le passé a ainsi été réarrangé pour transmettre l’information suivante :
un changement de vie me concernant, réalisé par libre arbitre, s’ac­
compagne d’une observation de doubles 22 !
Voici donc enfin comment j ’en explique l’émergence: Au premier
double 22 conscient, lorsque j ’ai créé ma société (à la suite de quoi j ’ai
par la suite commencé à « semer » le 22), mon intention encore vague
de « semer le 22 » a pu commencer à « alimenter » certaines parties de
l’espace-temps futur qui se trouvaient en affinité avec cette informa­
tion, et que j ’avais la possibilité de rencontrer sur mon chemin.
Je ne saurais dire si mes premiers « échos » reçus résultaient de ce 22
semé en fétiche, mais il m ’a en tout cas suffi de quelques vrais ou faux
« échos » apparus durant l’année 2002, plus propice que d’autres, il
faut bien le noter, à ces apparitions, pour que je renforce moi-même la
signification que je commençais alors à donner aux séries de 22, en
liaison avec les changements dans ma vie ayant commencé cette
année-là. S’agissant de changements intentionnels, ils ont acquis la
capacité d’alimenter, cette fois-ci clairement, les « sources » de mes
futurs potentiels qui pouvaient être en affinité avec ce double 22. J’ai
alors été amené à rencontrer chacune de ces sources jusqu’à la source
principale de tous ces doubles 22. Plus je m’en approchais, c’est-à-dire
plus j ’augmentais la probabilité de la rencontrer un jour, et plus elle
avait elle-même tendance à m’en faire rencontrer d’autres en remon­
tant jusqu’à elle, et c’est pourquoi mes observations se sont renforcées
au fur et à mesure où j ’étais sur le point de la découvrir.
Cette source avait ceci d’étonnant qu’elle symbolisait une concentra­
tion de doubles 22 qui se trouvaient depuis longtemps gravés dans la
pierre, auxquels s’ajoutait une véritable source à 22° !
Il s’agit ni plus ni moins de la mise en place progressive d’une boucle
de rétroaction entre mon futur et mon présent, à certains moments de
ce présent où je recevais des échos du futur !
Et de façon analogue aux synchronicités, cette boucle de rétroaction a
eu pour effet de générer un phénomène d’attraction entre ma trajec­
toire de vie et les trajectoires potentielles qui pouvaient être des
sources de doubles 22 ! J ’ai donc bien récolté ce que j ’avais semé !
Je me suis résolu à la conclusion suivante, la plus logique: j ’ai été litté­
ralement « attiré » par les sources de doubles 22, et ce phénomène a
été assez puissant pour être responsable du hasard qui m ’a permis de
trouver une nouvelle résidence, là où leur concentration était probable­
ment la plus élevée !
Nous verrons dans la suite que ce phénomène d’« attraction » vers des
situations que reflètent nos pensées est tout à fait général.

Résumé du chapitre XV

1. De fortes coïncidences ont été successivement vécues par l’auteur


sous la forme de séries de « doubles 22 », les dernières séries vécues
étant des observations relatives à son passé, ce qui porte à conclure que
l’information « double 22 » a remonté le temps, du futur vers le passé.
2. La possibilité de modifier le passé :
En l’absence de traces du passé, ce dernier pourrait être modifié par la
Loi de Convergence des Parties selon un processus de maximisation
de l’ordre pouvant expliquer les « doubles 22 » qui remontent le
temps. Un tel mécanisme aurait pour effet de recréer le passé en le
simplifiant au fur et à mesure de la disparition de ses traces.
Quatrième partie

Révélations
XVI.
L’espace intérieur
Où l ’on découvre comment une théorie physique nous invite
tout naturellement à devenir des hommes libres.

Dans les deux premières parties nous avons traité de la double causa­
lité en la présentant comme une Théorie du Temps à l’aide des méta­
phores de l’Arbre de Vie, du réseau fluvial et de la Route du Temps.
Ces métaphores sont pourtant essentiellement spatiales. Il importe
donc de les justifier en introduisant maintenant l’espace multidimen­
sionnel réel.
La raison d’être de ces métaphores tenait à la difficulté de représenta­
tion de cet espace, dont notre théorie a besoin pour décrire toute l’éten­
due de nos vies potentielles. Car nous avons supposé que toutes ces
vies étaient non seulement possibles, mais déjà existantes au temps
présent, et à ce titre déjà inter agissantes avec notre conscience
actuelle, susceptible de modifier leurs probabilités d’actualisation.
Faute de faire intervenir plus rigoureusement l’espace, notre descrip­
tion du mécanisme de l’influence de l’intention sur le hasard des
opportunités non causales s’est jusqu’à présent limitée à un schéma de
bifurcation temporelle.
On peut résumer ce schéma de la façon suivante, en faisant intervenir
deux facteurs de bifurcation:
- l’activation d’un nouveau futur par une augmentation suffisante de sa
probabilité d’actualisation,
- la désactivation d’un ancien futur par diminution de sa probabilité
d’actualisation, voire annulation (point de non retour).
Lorsque la probabilité d’un nouveau futur potentiel concurrence celle
de celui qui est déjà activé, il peut se produire sous l’influence de notre
libre arbitre et de nos observations un basculement qui a pour effet de
nous aiguiller sur une nouvelle trajectoire ou ligne temporelle de notre
Arbre de Vie.
Cette nouvelle présentation des choses sous-entend que la plupart du
temps nous sommes positionnés sur des rails, comme endormis [20],
et qu’il n’est pas si facile d’exercer notre libre arbitre en actionnant
intentionnellement un nouvel aiguillage.
Mais ce mécanisme reste encore simpliste et insuffisant parce que nous
avons omis de décrire la partie spatiale des processus entrant enjeu, ce
à quoi nous allons nous atteler maintenant.
Pour parvenir à une théorie unifiée de l’espace-temps, la physique a
produit plusieurs théories multidimensionnelles remarquables, parmi
lesquelles celle de Kaluza-Klein à 5 dimensions et la Théorie des
Cordes M à 11 dimensions. A l’origine du besoin des physiciens d’in­
troduire des dimensions supplémentaires à notre espace-temps à 4
dimensions, on retrouve le fameux indéterminisme de la mécanique
quantique.
La conséquence la plus importante de ce genre de théorie sur notre
conception de l’espace est qu’elle amène à envisager, pour interpréter
ces dimensions supplémentaires invisibles, l’existence d’« univers
parallèles ». Ces univers vont contenir en quelque sorte toutes les
autres possibilités d’évolution qu’aurait pu avoir notre propre univers,
compte tenu de son indéterminisme.
Pour représenter tous ces univers à l’intérieur d’un même espace, la
Théorie des Cordes fait appel à six dimensions spatiales supplémen­
taires, repliées sur elles-mêmes et invisibles car extrêmement petites.
Tout se passe comme si chaque ligne de l’espace se comportait comme
un câble excessivement fin : on peut alors tourner autour de ce câble à
l’infini sans pour autant changer d’emplacement sur la ligne. Si main­
tenant on enroule en chaque point le câble sur lui-même en le décom­
posant en une infinité de petites cordes fermées, on obtient deux
dimensions supplémentaires par ligne. Comme notre espace est déjà
composé de trois dimensions ou lignes, cela porte à neuf le nombre de
ses dimensions spatiales.
Du point de vue mathématique, il est ainsi possible d ’attribuer à
chaque point de l’espace physique un certain nombre de dimensions
supplémentaires invisibles, qui représentent autant de versions possi­
bles de ce qui se passe en ce point, raison pour laquelle ces dimensions
supplémentaires nous amènent à concevoir des univers parallèles.
Ceci apparaît plus clairement dans une autre représentation imagée de
la théorie, consistant à faire comme si nous vivions dans deux dimen­
sions au lieu de trois, c ’est-à-dire sur une surface plane, qualifiée de
membrane. Nos univers parallèles seraient alors toutes les autres mem­
branes parallèles à la nôtre, et par nous invisibles, que l’on peut loger
dans un espace à trois dimensions.
Nous allons maintenant proposer une représentation plus concrète et
surtout plus réaliste de ces univers parallèles.
Revenons à la multitude de vies potentielles que notre Arbre de Vie
déploie. Si à chaque bifurcation potentielle le long de cet arbre nous
avons le choix entre deux vies, on peut calculer qu’avec seulement une
dizaine de bifurcations dans une vie, nous allons nous retrouver avec
un millier de vies potentielles dès notre naissance.
Or si l’on veut mémoriser toutes ces vies dans un espace cartésien, il
nous faut obligatoirement faire appel à des univers parallèles : un uni­
vers pour chaque vie.
De ce point de vue, un univers contient donc une version possible de
l’ensemble de toutes nos vies. On comprend ainsi, compte tenu du
nombre inimaginable de toutes les versions possibles, pourquoi il est
nécessaire de rajouter des dimensions à l’espace.
Pour en revenir à notre libre arbitre et au lien qu’il peut avoir avec cet
espace, nous allons maintenant montrer que l’opération de l’intention
qui génère le basculement entre deux trajectoires de vie n’a pas d’autre
effet que de nous faire tout simplement « changer d’univers » !
Cela peut sembler incroyable à qui imaginerait qu’il faut prendre un
vaisseau spatial et visiter les confins de l’univers pour changer d’es­
pace. Mais pas du tout, c’est beaucoup plus facile.
Tout d’abord, il existe une manière très simple et rationnelle d’accepter
dans un premier temps ce changement d’univers: celle qui consiste à
considérer que tous ces univers lui sont tellement parallèles qu’ils sont
quasiment identiques au nôtre !
Dans ce cas, le basculement d’univers nous fait évidemment le même
effet que de rester dans le même : aucun changement.
Mais pour que cette possibilité de changer réellement d’univers corres­
ponde à une bifurcation sur notre Arbre de Vie, il faut considérer
l’existence d’au moins deux univers parallèles distincts, associés à
cette bifurcation: le premier où je réalise mon ancien destin, le second
où je réalise mon nouveau destin.
On comprend donc maintenant que notre Arbre de Vie, avec toutes les
possibilités d’existences différentes qu’il potentialise, ne fait que
décrire toutes les possibilités d’univers parallèles que nous pouvons
visiter durant notre vie.
Cette interprétation des univers parallèles sous la forme d’un ensemble
d’arbres de vies a le grand intérêt de donner un sens enfin intéressant
pour nous, êtres humains, à cette théorie. Car son principal inconvé­
nient était de ne pas nous fournir la bonne raison de tout ce gâchis
d’espace. Nous comprenons maintenant que cette bonne raison, c ’est
notre libre arbitre.
Maintenant que nous savons que, parmi tous ces univers, il en est un
privilégié qui abrite nos vies actuelles, nous comprenons mieux l’inté­
rêt que tous les autres continuent d ’exister, dans la mesure où nous
sommes susceptibles d’en changer à tout moment, tous ensemble. Et je
dis bien tous ensemble, car en changeant seul votre vie à un instant
donné vous entraînez tout le monde avec vous dans un autre univers.
Faisons juste une parenthèse sur une conséquence de cette vision des
choses, qui serait trop longue à creuser: le fait de changer d’univers va
aussi modifier tous les potentiels qui lui étaient associés, car la réfé­
rence dont ces potentiels dérivent va devenir notre nouvel univers. Il
ne s’agit donc pas d’un simple déplacement, car nous ne sommes pas
certains de pouvoir revenir en arrière, ce qui supposerait que l’ancien
univers fasse partie des potentiels du nouveau. Le fait de changer
d’univers n’est donc pas anodin, car de nouveaux univers qui n’exis­
taient pas auparavant vont apparaître, co-créés par nos nouvelles possi­
bilités, et tous les univers dont l’existence dépendait exclusivement de
l’ancien vont disparaître: on assiste là à un processus authentiquement
irréversible !
Voila où se niche la véritable irréversibilité de l’univers : notre
simple position d’observateur décidant de prendre une bifurcation
plutôt qu’une autre engendre un processus de co-création, expli­
quant finalement comment nos pensées créent le monde [35], alors
que nous ne faisons rien d’autre qu’observer!
En supposant que cet immense espace multiplié à l’infini, dégagé par
cette infinité d’univers parallèles en co-création permanente, ne soit
finalement qu’un espace dédié à nos arbres de vie, nous comprenons
maintenant pourquoi il n’y a plus aucun gâchis d’espace, mais seule­
ment une immense variété dynamique de vies potentielles. Or il faut
bien mémoriser quelque part toutes ces vies. Ce n’est pas nous qui en
avons besoin, mais l’univers lui-même, car il me semble invraisembla­
ble de lui interdire d’exister après ce moment si arbitraire qu’est le pré­
sent.
En effet, qu’avons-nous comme autre alternative à ces univers paral­
lèles? N ’est-il pas préférable de s’accoutumer à l’existence, somme
toute acceptable, de ces univers multiples, plutôt que de supposer que
non seulement notre univers entier, mais encore une infinité d’univers
doivent être recréés à chaque seconde par le passage du temps ? Heu­
reusement, nous avons déjà vu que ce n’est pas ainsi que les choses se
passent, et c’était d’ailleurs la grande préoccupation d’Einstein.
Car rappelons qu’Einstein disait lui-même: « La distinction entre
passé, présent et futur n ’est qu’une illusion, aussi tenace soit-elle. Le
temps n ’est pas du tout ce qu’il semble être. Il ne s ’écoule pas dans
une seule direction, et le passé et le futur sont simultanés. »
Avec cette nouvelle vision des choses, qui ne fait que reprendre les
conclusions d’Einstein, mais dans un espace multiplié autant de fois
qu’il est nécessaire pour permettre à notre libre arbitre de s’exprimer,
nous allons maintenant pouvoir dégager une bien meilleure idée du
mécanisme de 1’intention qui nous fait basculer vers une nouvelle vie,
c’est-à-dire transiter d’un univers à un autre.
Rappelons le postulat fondamental de notre Théorie du Temps: la réa­
lité de notre libre arbitre. C ’est bien ce libre arbitre qui, mis en pré­
sence de bifurcations potentielles dans notre futur, nous oblige à consi­
dérer que nous avons non pas une vie, mais une infinité de vies poten­
tielles, dont l’une est déjà « matérialisée » dans notre univers actuel:
cette référence dont toutes les autres vies dérivent.
Nous avons donc reformulé ce postulat en une faculté que nous
aurions de nous déplacer, en même temps que dans les dimensions de
notre univers physique, dans les dimensions supplémentaires cachées
de tous nos univers parallèles.
Faisons le bilan de ce que nous savons au stade actuel :
Nous savons déjà que notre corps nous permet de nous déplacer dans
les trois dimensions physiques.
Nous savons aussi que les autres dimensions de l’espace sont invisi­
bles, car repliées sur elles-mêmes ou excessivement petites.
Nous savons que notre libre arbitre nous permet de nous déplacer dans
ces dimensions supplémentaires.
Nous savons que nous nous déplaçons ainsi par le biais de nos inten­
tions et observations, contrôlées par notre libre arbitre.
Nous savons que nos intentions et observations font partie de notre
conscience, c’est-à-dire de notre espace intérieur*.
Nous en déduisons que les dimensions supplémentaires de l’espace
ne sont rien d’autre que des dimensions intérieures* !
Ce qui veut dire qu’il y aurait une partie de nous-mêmes qui pourrait
s’étendre dans ces dimensions, et qui serait nécessairement intempo­
relle, car pour pouvoir déposer une intention dans le futur sans interac­
tion avec le présent - ce qui nécessiterait un échange interdit de parti­
cules - il faut bien qu’une partie de nous-mêmes y soit déjà, en l’occur­
rence celle qui incarne toutes ces probabilités que nos intentions peu­
vent modifier.
Or nous avons déjà qualifié cette partie de nous-mêmes dans notre
modèle de l’Esprit: il s’agit de l’Ange lui-même.
Ainsi la version minimaliste de notre théorie convient bien pour
décrire cet Esprit à qui nous parlons dans le « Dialogue avec l’Ange »,
et qui ne serait autre qu’une partie supradimensionnelle de nous-
mêmes. Nul besoin de notions d ’incarnation !
Nous allons maintenant franchir un nouveau cap pour en venir à une
deuxième conséquence fondamentale de notre postulat du libre arbitre.
Rappelons que la première conséquence de ce postulat s’est traduite
par une modification de notre conception du temps qui nous a conduits
à la double causalité.
La deuxième conséquence de ce postulat va maintenant porter sur
notre conception de l’espace, qui va nous conduire à la notion d’es­
pace intérieur.
Il est grand temps d’introduire un tel espace intérieur en physique !
S’agissant cependant d ’une tentative dont les détails formels et les
conséquences me dépassent largement, je me contenterai ici d’en jeter
quelques principes élémentaires.
Un premier principe consiste à représenter nos intentions dans l’espace
de nos dimensions intérieures, par une information localisée dans cet
espace, une sorte de fluide, énergie ou matière, peu importe, s’agissant
avant tout de les mémoriser.
Nos intentions contenant « par définition » ces choses de la vie que
nous voulons voir réalisées, il existe nécessairement, « par définition »
de notre Arbre de Vie lui-même, une représentation adaptée à la
« matérialisation » de ces intentions : elle se traduit par un ou plusieurs
endroits, emplacements ou encore zones de l’espace de cet Arbre, cor­
respondant à ces choses de notre vie que nous y « projetons ».
Cette notion de matérialisation ne devrait pas nous choquer car la phy­
sique moderne nous a déjà familiarisés avec l’idée que la matière de
notre univers n’existe pas « en dur ». En effet, on s’aperçoit de plus en
plus que la matière n’est finalement que de l’information et que cet
aspect « en dur » ne vient que de ses interactions.
En matérialisant nos intentions dans des zones de nos espaces futurs
potentiels nous exprimons simplement le fait que nous sommes capa­
bles d’arroser notre Arbre de Vie dans ces zones, en y déplaçant en
quelque sorte notre « arrosoir ». La localisation de nos intentions dans
ces zones « arrosées » de l’espace de nos univers parallèles ne pose
pas de problème tant qu’il ne s’agit que de probabilités de potentiels,
de même que la localisation d’une particule dans notre univers phy­
sique ne pose pas de problème tant qu’elle n’existe que sous la forme
d ’une distribution de probabilités de présence, quel qu’en soit le
moment. Nous exprimons par là le fait que tant que nous travaillons
avec des probabilités, rien n’oblige à ce que les choses que nous décri­
vons se passent dans le présent. Si j ’ai l’intention d’acheter un livre, la
probabilité que je l’achète n’augmente pas au moment où je réalise
l’achat. Elle augmente bien au moment où j ’en forge l’intention.
Lorsque nous avons décrit le mécanisme qui nous permet de mémori­
ser ces intentions dans le futur, nous avons effectivement employé la
notion de probabilité, la programmation de nos intentions consistant en
effet à augmenter la probabilité d ’occurrences des potentiels d ’une
zone de notre Arbre de Vie.
Il est tout à fait rationnel d’admettre maintenant que, notre libre arbitre
étant supposé réel, nous disposons des moyens de « matérialiser » ce
libre arbitre par une augmentation instantanée des probabilités asso­
ciées à une ou plusieurs zones de notre espace intérieur. Et ceci d ’au­
tant plus que notre cerveau est capable de réimprimer à tout moment
une telle mémorisation qu’il garde lui-même en mémoire. Mais dans
ce processus elle n’est pas seulement réimprimée dans notre cerveau,
elle est également réimprimée dans cette zone de notre espace intérieur
qui appartient à notre futur.
C’est à partir de là que de nouvelles possibilités méconnues de notre
« cerveau » vont pouvoir être dégagées ! Ce ne sont que des propriétés
« apparentes », car elles appartiennent à notre espace intérieur.
Si vous demandez à un physicien ou à un mathématicien de modéliser
ce processus, il va faire appel à une simulation numérique qui va
consister à peupler une région de notre espace intérieur par une série
ou un tableau de nombres, et si vous lui demandez maintenant de
visualiser cette série, il va la faire apparaître par une forme plus ou
moins colorée, la couleur correspondant à la densité de probabilités.
Exactement comme on ferait apparaître une forme d’énergie fluide
dans notre espace physique, un nuage dans le ciel, une nappe d’eau sur
la terre, ou de pétrole sous la terre.
Or, à quoi nous serviraient ces dimensions supplémentaires de l’es­
pace, si ce n’est à mémoriser ces informations intérieures, tout comme
notre espace physique mémorise de la matière? Toute dimension n’est
utile qu’à une seule chose, à stocker des informations sous forme de
matière, matière qui comme nous l’avons vu, peut être entièrement
réduite à de l’information.
Et nos probabilités ne sont justement, elles aussi, que des informations.
Si l’on se résume, il est parfaitement légitime d’un point de vue phy­
sico-mathématique d ’énoncer le principe suivant:
Nos intentions librement choisies et clarifiées, en augmentant les pro­
babilités d’occurrence des futurs auxquels elles sont associées, se tra­
duisent par le déplacement ou l’apparition de nappes fluides dans cer­
taines zones de notre espace intérieur. Je rappelle que ces zones ne sont
pas « logées » dans notre cerveau, mais quelque part dans certains
espaces-temps invisibles et parallèles à notre espace-temps actuel.
Nous sommes donc littéralement capables de faire pleuvoir dans notre
futur! Il ne s’agit même plus d’une métaphore, car notre intention a
réellement déposé, déplacé ou modelé de l’information dans une ou
plusieurs zones de notre espace intérieur !
Prenons maintenant un exemple pour entrevoir les conséquences for­
midables de cette nouvelle constatation.
Si j ’ai l’intention d’acheter un livre, toutes les possibilités futures exis­
tant pour moi de l’acheter vont subitement recevoir de ma part un tel
fluide - à condition qu’elles restent crédibles, c ’est-à-dire intègres
devant un scénario qui me donne quelque probabilité, même infime, de
tomber sur ce livre. Cela signifie qu’un libraire se trouvant quelque
part où je suis susceptible d’aller, va également recevoir un fluide sur
son Arbre de Vie, c’est-à-dire une probabilité accrue de me rencontrer
dans son futur, à supposer que ceci ait le moindre intérêt pour lui.
Il s’agit bien sûr d’une expression: le libraire ne reçoit aucun fluide,
seul le moment et l’endroit de son espace futur où nous sommes sus­
ceptibles de nous croiser reçoit cette information, ce « fluide ».
Mais cela permet de constater que le fluide commence déjà à s’étendre
à un autre Arbre que le mien.
Ce n’est pas tout. S’il existe de réelles possibilités que nos chemins se
croisent, alors les scénarios nécessaires pour que ces possibilités se
réalisent, comme le fait d ’aller tout simplement en ville, vont voir
aussi leurs probabilités d’actualisation augmenter:
Le fluide va commencer à s’écouler vers le passé !
Et il est même possible qu’à cause de cela, la probabilité pour qu’à
l’occasion d’une balade en ville, l’envie d’acheter ce livre me revienne
à l’esprit augmente ! Je veux dire par là qu’on peut se demander s’il y
avait besoin que mon intention soit mémorisée par mon cerveau pour
que cette envie me revienne !
Parmi tant d’autres, vont également augmenter toutes les probabilités
que je passe à certains endroits précis où il est plus facile de trouver
une librairie : le fluide s’étend encore, jusque dans les petites rues !
Mais ce n’était pas du tout mon intention, qui était juste d’acheter un
livre, un point c’est tout ! J’étais loin de m’imaginer lorsque je l’ai for­
gée, que j ’allais sortir en ville, passer par telle petite rue ou telle autre
pour la réaliser. S’il fallait imaginer à chaque intention une date et un
scénario précis et complet de réalisation on deviendrait vite fou ! On ne
travaillerait plus, car on ne vivrait que pour imaginer les scénarios de
toutes nos intentions.
Or c’est inutile, car l’univers le fait à notre place, du moins tant que
nos intentions sont fiables !
Il faut donc bien admettre que le fluide que nous avons créé dans le
futur s’est mis à couler tout seul vers le passé, aux endroits où nous
sommes susceptibles de passer nous-mêmes ! Donc, inutile d’y penser,
si ce n’est pour renforcer la même intention.
Mais quelle est donc cette nouvelle information qui circule toute seule,
sans nous demander notre avis? Il ne s’agit plus d’acheter un livre, il
s’agit de passer à des endroits précis que je ne connais même pas
encore, pour que l’action d’acheter un livre puisse être actualisée. On
dirait que mon espace intérieur travaille pour moi !
En s’écoulant, le fluide peut même favoriser une autre rencontre, une
rencontre imprévue par exemple, comme celle d’une amie qui habitait
dans le quartier où je devais passer et que j ’avais perdu de vue.

La probabilité de rencontrer cette amie se trouve ainsi augmentée dans


une zone de nos futurs respectifs, sans même qu’elle et moi le
sachions, tout simplement parce qu’en ayant l’intention d’acheter ce
livre, le fluide a coulé tout seul vers notre possible rencontre !
Ce fluide s’est donc mis à couler, à plusieurs endroits, encore et
encore, en augmentant la probabilité de scénarios que je n’imaginais ni
d’Eve ni d’Adam !
Faisons un point. A chaque fois que nous forgeons une intention, il
apparaît maintenant qu’il n’est pas nécessaire que nous pensions à tous
ses scénarios de réalisation pour qu’ils reçoivent un fluide d’actualisa­
tion potentielle.
Il est seulement nécessaire que les probabilités de réalisation que nous
avons déposées dans le futur, parce que notre intention est fiable, se
maintiennent en redescendant le temps.
C ’est le moment de faire remarquer qu’en l’absence de déterminisme
de la Loi de Convergence des Parties, limitant le nombre de solutions
pouvant atteindre notre présent, ces probabilités se dilueraient, se dis­
perseraient. L’intérêt du déterminisme inversé est donc de maintenir
les probabilités de réalisation lorsqu’elles remontent le temps.
La question qui se pose maintenant est de savoir si nos intentions sont
vraiment agissantes. Car pour l’instant nous n’avons parlé que de
potentiels, et pas encore de leur entrée dans la réalité.
Comment donc le processus d’actualisation des possibles a-t-il lieu,
suite à toutes ces modifications de probabilités ?
Gardons à l’esprit que tous ces univers parallèles découverts par les
physiciens ne sont pas un gâchis d ’espace. Sils sont là pour mémoriser
tous ces potentiels, c’est qu’il existe bien un mécanisme permettant de
faire rentrer l’un de ces potentiels dans la réalité! N ’oublions pas que
leurs existences multiples se justifient par le fait que les probabilités de
ces potentiels peuvent varier à tout moment, en fonction du degré de
précision, de fiabilité ou encore d’intégrité de nos intentions !
Pour faire entrer dans la réalité l’un de ces potentiels, notre libre arbitre
a encore un rôle à jouer. S’il est intervenu au moment de forger nos
intentions, il doit encore intervenir au moment de choisir une voie plu­
tôt qu’une autre. Car le ou les potentiels que nous avons créés vont
converger vers notre trajectoire présente à différents moments où vont
se présenter pour nous des possibilités de bifurquer.
Parmi toutes ces voies dont les probabilités ont été accrues par la circu­
lation du fluide, nous pouvons conjecturer sans conteste que ne seront
détectables par notre observation que les plus probables, c’est-à-dire
celles qui auront reçu le plus de fluide.
Mais si notre mental n’est pas réceptif à la manifestation de ces voies
potentielles, il est quasiment certain que seule la voie causale la plus
probable va retenir notre attention. Nous aurons en quelque sorte
demandé, le ciel nous aura aidé, mais nous n’aurons rien fait pour nous
aider nous-mêmes.
Supposons maintenant que plusieurs potentiels se présentent à moi
alors que je suis dans une petite rue à la recherche d’une librairie: par
exemple la possibilité que je déniche pour la première fois une petite
librairie qui gagne à être connue, celle que je rencontre mon amie qui
habite ce quartier, ou encore celle que j ’achète autre chose qu’un livre,
etc. Je rappelle ici que ces potentiels existent déjà sans avoir été vécus,
et que tant que je suis réceptif ils subsistent à l’état de vécus potentiels,
actualisables, toujours dignes d’héberger mon fluide.
Donc lorsque je suis en train de marcher, ils sont susceptibles de se
présenter à mon attention en me faisant dévier, si mon intérêt est capté,
du trajet que j ’aurais suivi en l’absence de fluide. Il s’agit donc de
bifurcations potentielles.
Par quel moyen cette présentation à mon attention a-t-elle lieu ?
Considérons un scénario possible.
Après m’être garé en centre-ville, je longe une avenue puis traverse sur
un passage piéton afin de me diriger vers une petite me que je présume
déboucher sur la zone la plus commerciale du coin.
A cause de la présence d’un fluide provenant de mon intention d’ache­
ter un livre, à peine quinze secondes après avoir traversé l’avenue,
mon amie emprunte le même passage piéton que moi, mais dans l’au­
tre sens. Si j ’avais été très observateur, j ’aurais pu la voir de loin. Mais
le fluide étant peu concentré, je ne la vois pas et elle ne me voit pas
non plus car, au moment où elle pouvait m’avoir dans son champ de
vision, j ’en sors pour arpenter la petite me.
Rien d’étonnant à cela. Pour nous rencontrer à coup sûr il aurait fallu
que je traverse le passage piéton dix secondes plus tôt. Situation tout à
fait normale. II n’y a là aucune différence avec un hasard normal,
c’est-à-dire faisant plutôt mal les choses la plupart du temps.
Supposons maintenant un autre scénario où l’on ne change strictement
rien à la structure de l ’univers, excepté une toute petite chose:
quelques jours auparavant, mon amie pensait à moi en se disant qu’elle
aimerait bien me revoir. Elle avait l’intention de me demander quelque
chose mais ayant égaré mes coordonnées, elle avait remis à plus tard la
tache de les retrouver. L’intention avait cependant produit son effet.
Car cette simple intention avait commencé à faire couler un fluide de
probabilités parmi tous les scénarios possibles de réalisation de notre
rencontre. Il est aisé d’imaginer que ces probabilités étaient initiale­
ment infimes, mais le jour où j ’ai eu l’intention d’acheter un livre dans
son quartier, la probabilité du scénario de notre rencontre sur ce pas­
sage piéton s’est mise à augmenter. Et le jour où j ’ai effectivement tra­
versé son quartier, elle a augmenté d’un seul coup, aspirant en quelque
sorte tout le fluide qui s’était déversé parmi les autres scénarios.
Et plus nous nous approchions de ce passage piéton, plus cette proba­
bilité augmentait, car les scénarios ou hasards qui pouvaient encore
disperser nos trajectoires s’éliminaient les uns après les autres. Ceci
avait pour effet d’accélérer l’allure de mon amie et de décélérer la
mienne, par le biais des moindres aléas indéterministes de nos par­
cours respectifs, ne serait-ce que la présence de tous les autres piétons.
Coucou Philippe !
Ah tiens Sophie, qu’est-ce que tu fais ici?
Tu es gonflé ! Moi je suis dans mon quartier !
Heu, ah oui, heu, oui, heu...
Ne restons pas là au milieu, on va se faire renverser par une voiture.
Ok viens, je t’offre un café !
Ah mais... avec plaisir !
L’intention initiale de mon amie conjuguée à la mienne, par le biais
d’une infime probabilité de croisement au départ, lors du dépôt de nos
intentions, mais ne cessant de croître indépendamment de tout méca­
nisme causal, avait tout simplement fini par synchroniser parfaitement
nos trajectoires, nous donnant l’impression que nous avions été attirés
l’un vers l’autre!
Résumé du chapitre XYI

Pour faire émerger une Théorie du Tout, les physiciens ont été amenés
à attribuer des dimensions supplémentaires invisibles à notre espace-
temps à 4 dimensions, et à envisager l’existence d ’univers parallèles.
Or nos hypothèses du libre arbitre et de l’omniprésence du futur exi­
gent elles aussi l’existence d’univers parallèles, qui serviraient à héber­
ger tous nos Arbres de Vie. L’exercice réel de notre libre arbitre entraî­
nerait alors à chaque fois un changement d’espace.
Pour asseoir cette nouvelle conception dans laquelle l’homme joue un
rôle fondamental dans la co-création de l’univers, nous sommes ame­
nés à considérer que les dimensions supplémentaires de l’espace ne
sont rien d’autre que celles de notre Espace Intérieur.
Le processus de changement d’espace-temps par l’exercice de notre
libre arbitre pourrait être irréversible.
Ainsi considéré, notre Espace Intérieur serait le siège de la circulation
de « fluides » qui localiseraient géographiquement nos intentions. A
chaque instant, nos actes seraient susceptibles d’influer sur cette circu­
lation de fluides, changeant ainsi en permanence les potentiels « obser­
vables » le long de notre parcours.
XVII.
La loi d’attraction universelle
Où l ’on revisite la plus belle des lois de la physique en élargissant
son champ d ’application à notre espace intérieur.

Voici donc comment se résume le résultat le plus inattendu que l’on


puisse déduire du postulat de notre libre arbitre, lorsqu’on le conjugue
d’une part avec la théorie des univers parallèles issue de la mécanique
quantique, d’autre part avec les idées d’Einstein sur l’illusion du pré­
sent et la simultanéité du passé et du futur: Nous sommes capables de
faire pleuvoir dans notre futur !
Bien que cela ne soit qu’une pluie de probabilités, ces dernières se
comportent de la même manière que l’eau qui s’écoule dans l’espace,
sauf que c’est en direction du passé.
Dans la partie II nous avions déjà utilisé cette métaphore de la source
d’eau située dans le futur, sans même nous douter qu’elle pourrait trou­
ver sa pleine justification avec le concept de l’espace intérieur. Cette
métaphore de la pluie signifie que nos intentions nouvelles « arrosent »
notre espace intérieur aux endroits correspondant à la réalisation
potentielle de ces intentions.
Mon meilleur exemple, à l’origine de ce livre, a fait l’objet du chapi­
tre XIII : il y a trois ans mon intention d’écrire un livre pour expliquer
les synchronicités avait arrosé la branche de mon Arbre de Vie aux
temps et lieux lui correspondant, notamment là où je me trouve en ce
moment même en train d ’écrire. C ’est ce qui avait provoqué cette série
de coïncidences que j ’ai vécues à cette époque sur la Route du Temps,
dans la mesure où j ’avais laissé dépendre du hasard, et du hasard
exclusivement, ma décision d’écrire. Ce hasard me répondit alors
comme un écho qui aurait été réfléchi par mon futur, mais avec des
informations en sus ! N ’est-ce pas une astucieuse manière de profiter
des propriétés du temps pour vérifier la faisabilité de nos projets avant
de les démarrer?
Avec ce constat d’un écho de l’univers nous allons maintenant faire
émerger les conséquences les plus fondamentales de la Théorie de la
Double Causalité, qui vont faire évoluer la Loi de Convergence des
Parties vers une véritable loi d’attraction* dynamique. Car les probabi­
lités associées à nos différentes lignes de vie varient constamment dans
le temps et dans l’espace: non seulement elles évoluent dans le temps
par l’effet même de nos changements d’intention, mais à intentions
constantes elles continuent d’évoluer en fonction de notre comporte­
ment et des intentions et comportements d’autrui. Et c’est bien cette
évolution permanente des probabilités qui confère toute sa justesse à la
métaphore du fluide qui s’écoule, car la cause la plus puissante des
variations de ces probabilités de potentiels est l’« écoulement » du
temps lui-même qui, en faisant entrer dans la réalité certains potentiels,
passe son temps à crédibiliser certains scénarios et à en éliminer d’au­
tres !
On ne devrait donc pas dire: « Le temps s’écoule! ». On devrait dire
plutôt: « Les chances de réalisation de mes intentions s’écoulent ! ».
Il faut cependant mentionner que d’autres facteurs que les intentions
ou les comportements interviennent dans cette évolution. Du fait
même que nous ne maîtrisons jamais parfaitement nos intentions, car
elles sont trop souvent sous le contrôle de nos pensées, de nos doutes,
de nos humeurs, nous produisons des facteurs contrariants. Ils impo­
sent leur propre déterminisme et rendent difficile l’atteinte d’un état
d’éveil et de relâchement serein, apte à faire la part des choses entre
nos véritables intentions et nos fausses intentions déterministes. Il
s’ensuit une instabilité mentale qui étale en quelque sorte les fluides,
qui les diluent de part et d’autre, contribuant ainsi à minimiser leurs
effets. C ’est la raison pour laquelle les effets positifs et volontaires de
l’intention sont si difficiles à provoquer, sauf à respecter une juste atti­
tude que nous avons résumé en 9 points dans notre « Modèle de l’Es­
prit ». Le mécanisme de Yattraction que nous allons aborder va dépen­
dre en premier lieu de cette juste attitude.
Considérons tout d’abord une à une les différentes conditions de son
émergence. En premier lieu, nous avons insisté sur l’importance du
lâcher prise, cette nécessité d’oublier l’intention afin que ses effets
concrets soient favorisés. Cela pourrait paraître à première vue en
contradiction avec un raisonnement simple, qui laisserait à penser que
plus nous gardons nos intentions à l’esprit, en imaginant par exemple
différents scénarios de réalisation, et plus nous produisons de fluide !
En réalité, c’est tout le contraire !
Imaginons en effet que nous maintenions sans cesse la même inten­
tion, comme une sorte d’obsession. Avez-vous déjà essayé de mainte­
nir toujours la même intention dans le temps ? En posant cette ques­
tion, je souhaite mettre en évidence le fait que pour garder une inten­
tion à l’esprit, nous ne pouvons pas nous empêcher de la modifier sans
arrêt, même très légèrement, ne serait-ce qu’au niveau de ses scénarios
de réalisation.
Si nous devions ne jamais faire la moindre modification à une inten­
tion, en visualisant par exemple toujours la même scène sans jamais
examiner la moindre variante, il serait complètement insensé ou même
absolument impossible de la garder à l’esprit. Lorsque nous transfor­
mons une intention en obsession, nous ne pouvons pas nous empêcher
d’examiner toutes les variantes possibles, l’important pour nous étant
seulement le résultat, l’objectif à atteindre. Et ce faisant, nous modi­
fions notre stratégie.
Le problème est le même qu’en ce qui concerne l’archer qui vise une
cible. S’il ne lâche pas prise, le simple entretien de son intention d’at­
teindre le centre de la cible va lui faire sans cesse modifier très légère­
ment la position de son arc, en fonction des corrections dictées en per­
manence par son mental.
Ce n’est pas ainsi que les sportifs de très haut niveau opèrent pour
réussir leurs coups et susciter la passion de leurs supporters, sans quoi
ils ne seraient jamais considérés par ces derniers comme des dieux.
Il est donc clair que l’entretien obsessionnel de l’intention, et même
son simple maintien conscient, ne peut avoir que des effets négatifs sur
l’écoulement du fluide porteur de la possibilité de l’acte juste ou du
hasard favorable.
La raison en est que lorsqu’on modifie une intention, on annule les
effets de l’intention précédente au profit de la nouvelle, donc le fluide
disparaît d’un endroit pour s’étaler ailleurs - s’agissant d’un fluide de
probabilité et non d’un fluide dont on augmente sans arrêt le volume
en le faisant circuler partout.
Car il n’est pas possible de maintenir à bon niveau la probabilité de
réalisation d’une intention qui ne sait pas ce qu’elle veut parce qu’elle
s’étale dans la définition de ses scénarios. Lorsqu’on pense augmenter
ses chances en essayant de prévoir de multiples possibilités de scéna­
rios, on ne fait que les diminuer. Il est au contraire nettement préféra­
ble de rester totalement imprécis sur ces scénarios en ne définissant
que les objectifs. Car les scénarios ne sont que des moyens, et la défi­
nition de ces moyens ne fait que remettre en question la réalisation non
causale de nos intentions, en les mettant sous le contrôle de la simple
causalité.
L’intention devient ainsi esclave de tous les moyens qu’on lui associe,
dans la mesure où elle nous incite inconsciemment à privilégier ces
moyens au dépend de tout autre scénario. Exit la chance, vive la plani­
fication !
Le lâcher prise apparaît donc maintenant comme une garantie que les
nouveaux potentiels dégagés par l’intention seront non seulement sta­
bles, mais protégés contre nous-mêmes. Ils pourront alors automati­
quement croître lorsque se présentera la possibilité pour eux d’aug­
menter encore, juste avant d’être actualisés. Et ce moment là, on ne
peut pas le prévoir, car il dépend des détails des structures opportunes
de l’univers, et en aucun cas de nos plans.
Il nous faut simplement rester prêts sans oublier que non seulement
notre intention doit rester apaisée, mais que notre comportement doit
rester en harmonie avec cette intention déjà déposée.
En dehors du lâcher prise et d’un comportement favorable à l’émer­
gence des opportunités, qui sont les deux conditions principales, nous
avons mentionné d ’autres conditions parmi lesquelles je cite: un
besoin d ’aide authentique, une réelle préoccupation, une prise de
risque, des intentions nouvelles et inédites.
Le besoin d’aide et la préoccupation renforcent l’importance des inten­
tions associées, puisqu’elles acquièrent un aspect vital. On peut
conjecturer le fait qu’elles contribuent à faire pleuvoir en beaucoup
plus grande quantité, augmentant la probabilité de réalisation de l’ob­
jectif.
La prise de risque, nous l’avons déjà vu, diminue la probabilité des
scénarios concurrents de nature causale. Elle correspond à un abandon
progressif des voies causales, sans pour autant qu’il y ait encore de
solution alternative.
Le fait d’avoir des intentions nouvelles ou inédites, quoique toujours
fiables, correspond à un véritable changement actif dans la répartition
des probabilités des potentiels, susceptibles de se présenter sur le par­
cours du sujet.
Ces trois derniers cas représentent donc des conditions importantes et
favorables à la seconde causalité, or on peut en dégager un facteur
commun remarquable : le facteur émotionnel.
Le besoin d’aide, la préoccupation, la prise de risque et l’innovation
sont en effet porteurs d’une instabilité émotionnelle, ne serait-ce que
par le fait qu’ils rendent la suite de notre parcours de vie beaucoup
plus aléatoire et donc inquiétante: on ne sait pas où l’on va s’engager!
L’émotion apparaît ainsi comme le « récipient » qui retient l’ouver­
ture au changement dans notre vie, et qui tient absolument à la
conserver ainsi aussi longtemps que nous ne connaissons pas les
moyens par lesquels va bien pouvoir se réaliser ce changement !
Or nous avons déjà observé que cette capacité à maintenir une ouver­
ture au changement est tout à fait positive !
L’émotion est donc excellente parce qu’il s’agit là, fort justement, d’un
facteur complémentaire de l’intention, particulièrement lorsque l’on
souhaite qu’elle se réalise avec l’aide de la « seconde causalité », c ’est-
à-dire avec l’aide de Dieu !
Je résume ces deux facteurs :
- l ’intention augmente les probabilités de tous les scénarios ou
« branches de vie » pouvant se présenter à nous pour les réaliser, cau­
sales ou non causales,
- l’émotion « retient l’intention » et tout son potentiel, lorsqu’aucun
scénario causal n ’est imaginable et que nous n’avons donc encore
aucun moyen de réalisation.
Car il faut bien admettre que la seule attitude raisonnable, quand nous
avons des intentions qui paraissent irréalisables, même avec de la
patience, consiste habituellement à s’abstenir: mais l’émotion s’y
oppose.
Si nous ne changeons pas d’intention, nous nous trouvons ainsi en pré­
sence d’une situation qui va nécessairement entretenir l’émotion, à
cause de son absence de raison, de la contradiction inhérente au main­
tien d’une intention en apparence contraire à tout ce qui est faisable.
Sur le plan mathématique, l’intention augmentant les chances de solu­
tions non causales et l’émotion diminuant les chances de solutions cau­
sales, la conjugaison des deux facteurs augmente d’autant plus la pro­
babilité d ’émergence de la voie non causale ou si Ton préfère, qui
relève de la seconde causalité c’est-à-dire de l’aide de Dieu.
Mais attention: aussi longtemps que l’émotion ne fait que retenir
l’énergie de l’intention, on se trouve en présence d’une intention main­
tenue à la conscience, ce qui n’est pas encore propice à la réalisation
de ses effets.
Il faut donc que l’émotion se limite au rôle d’accumulateur d’énergie
pendant le temps nécessaire à la « résistance » de l’intention contre la
raison, plus exactement contre l’attitude « raisonnable ». L’intention
doit en effet résister à la tentation d’être abandonnée et elle ne peut le
faire sans émotion. Suivant les cas, cela peut conduire à deux formes
de lâcher prise :
- un lâcher prise d’abandon réel du projet de l’intention, où ses effets
potentiels sont alors annulés car on ne prêtera même plus attention aux
opportunités de réalisation qui pourraient encore suivre,
- un lâcher prise de constat d ’impuissance provisoire, qui n’est pas
accompagné d ’un abandon, mais d’un espoir salutaire !
Cet espoir, malgré la fin du « ressassage » émotionnel, a pour vertu de
maintenir l’attention aux opportunités de réalisation. On y croit tou­
jours !
D ’où l’adage : « L’espoir fait vivre »
Or il ne fait pas que faire vivre, et c’est ce que nous allons voir mainte­
nant. Car nous pouvons enfin aller au message essentiel de ce livre, en
prolongeant la description de ce mécanisme merveilleux de l’aide de
Dieu!
Lorsque nous sommes dans une situation où les conditions et les
étapes que nous venons de décrire sont présentes, nous pouvons avoir
confiance car dans le même temps, la probabilité de l’aide de Dieu est
en train d’augmenter toute seule.
Car les opportunités causales sont éliminées !
Car les potentiels d’abandon sont en train de s’éliminer !
Car en gardant espoir, nous nous aidons nous-mêmes à nous placer
dans les bonnes conditions en restant ouverts !
Et les potentiels de réalisation voient leurs probabilités augmenter.
Il se produit alors un phénomène extraordinaire !
Plus on s’approche du rendez-vous éventuel avec un potentiel de
réalisation, plus la probabilité de ce même potentiel continue à
augmenter automatiquement. Cette augmentation de probabilité a
pour effet de « déplacer » instantanément le potentiel vers la ren­
contre de notre propre trajectoire de vie!
Il s’agit sur le plan mathématique d’une déviation des amplitudes avec
leurs maxima de probabilités, sachant que toutes les trajectoires poten­
tielles continuent de coexister.
Ce déplacement se fait à la fois dans l’espace et dans le temps. Mais
pour l’instant il a lieu dans le futur. Il a déjà, dans le futur, pour effet de
rapprocher les trajectoires impliquées.
Et ceci a pour effet d’augmenter encore les probabilités de croisement
de ces mêmes trajectoires, et ainsi de suite !
Ce qui se traduit, au final, par un phénomène d’attraction véritable des
trajectoires qui sont impliquées dans la rencontre non causale qui crée
> ainsi le miracle, la magie ou l’aide de Dieu.
Et ceci fonctionne, que cette aide soit attendue ou non, car la seule
chose qui compte est que dans le passé une intention ait été déposée,
favorable à ce type d’événement futur.
Il est possible de formaliser mathématiquement cette loi d’attraction, à
partir d’une règle simple applicable dans notre espace à quatre dimen­
sions.
Lorsque la probabilité purement causale d’une rencontre augmente en
raison inverse de la distance dans le monde réalisé, cela ne tient pas
compte de ce que nous venons de décrire, en l’occurrence que les tra­
jectoires de vie impliquées dans le monde non réalisé vont être aussi
déviées l’une vers l’autre de façon non causale, lorsque les potentiels
impliqués vont converger.
Si l’on tient compte de cette conjugaison entre le facteur causal et le
facteur non causal, on s’aperçoit que la probabilité de rencontre aug­
mente en raison inverse du carré de la distance. On se retrouve ainsi
dans la même situation que deux objets massifs qui subissent la loi de
la gravitation* universelle.
La loi d’attraction des lignes temporelles (ou trajectoires de vie) reliées
par une intention ressortirait donc du même mécanisme et des mêmes
équations que la loi de la gravitation universelle. Lorsque les condi­
tions sont réunies, nous aurions donc la faculté d’attirer vers nous, en
plus d’être attirés vers elles, les opportunités susceptibles de réaliser
nos intentions.
La loi de la gravitation universelle ne s’appliquerait donc pas unique­
ment aux objets matériels. Elle s’appliquerait également aux trajec­
toires de vie rendues « massives » par les fluides issus de nos inten­
tions.
Ceci revient à étendre la loi de la gravitation à notre espace intérieur.
Les dimensions supplémentaires et invisibles de notre espace intérieur
contiendraient donc une sorte de « matière » fluide qui subirait exacte­
ment les mêmes lois que la matière de notre espace physique !
J’aboutis à cette conclusion qui à maints égards pourrait être qualifiée
de « point de vue spiritualiste », en utilisant pourtant une logique se
voulant la plus rationnelle possible dans un univers supposé double­
ment causal. Même si ce point de vue dépend de certains raccourcis
effectués par une dose d’intuition personnelle usant d’un grand renfort
de métaphores, il me semble que la conclusion suivante « tiendra la
route » : la Loi de Convergence des Parties devient une véritable loi
d’attraction des lignes temporelles lorsqu’on la considère dynami­
quement !
Nombreux sont ceux qui se sont penchés sur le pouvoir de l’intention
[30], et l’ont soumis à l’expérience. Cela fait des décennies que de
nombreux chercheurs dans le monde s’intéressent à ce phénomène en
réalisant des expériences qui, contrairement à la mienne, sont vraiment
scientifiques [25]. La plupart du temps, c’est pour expliquer les phéno­
mènes parapsychologiques tels que télépathie et psychokinèse. Mais
généralement, ces travaux essayent de cadrer tant bien que mal avec
une logique purement causale, ce qui limite leur portée.
A ce propos, il est intéressant de signaler que cette approche causale ne
permet pas d’expliquer l’absence de différence entre micro-pk et pré-
cognition. Alors qu’avec la double causalité, non seulement une expli­
cation théorique émerge enfin, mais elle justifie pleinement cette
absence de différence.
Je dois cependant signaler l’existence d’une remarquable théorie alter­
native, celle du champ akashique d ’Ervin Laszlo [16] fondée sur
l’existence d’un champ d’informations. Il serait intéressant d’étudier
les rapprochements que l’on peut faire entre le champ de Laszlo et
l’espace « supradimensionnel » de la double causalité qui héberge
l’Esprit, s’agissant là aussi d’un champ d’informations, mais cette
étude dépasse le cadre de cet ouvrage.
Je ne développerais pas non plus ici les raisons pour lesquelles la dou­
ble causalité pourrait fournir un début d’explication aux phénomènes
parapsychologiques, bien qu’il m ’apparaisse comme évident que ce
potentiel existe.
De même, la double causalité possède un potentiel encore plus évident
pour expliquer quantité d’autres phénomènes étranges, comme l’effet
placebo, la voyance, le tirage de cartes, la prière, etc.
Plutôt que d’essayer de justifier ce potentiel, ce qui nécessiterait d’au­
tres ouvrages, je me contenterai de citer brièvement Arthur Koestler
[15] dans « les racines du hasard » :
« On pourrait substituer aux termes de « sérialité » et de « synchroni-
cité », qui insistent maladroitement sur le temps, l ’expression neutre
d ’événements confluents. Ces événements seraient des manifestations
de la tendance d ’intégration. L ’apparition du scarabée de Jung serait
un événement confluent, de même que les effets psychokinétiques sur
les dés en mouvement, et tant d ’autres phénomènes a-causals paranor­
maux. Ce qui paraît les rendre signifiants c ’est qu’ils donnent l ’im­
pression d ’être reliés causalement, ce qu’ils ne sont évidemment pas :
c ’est une sorte de pseudo-causalité. On dirait que le scarabée est
« attiré » à la fenêtre de Jung par le récit d ’un rêve, que les dés obéis­
sent à la volonté de l ’expérimentateur, que le clairvoyant voit les
cartes qui lui sont cachées. Les potentiels d ’intégration de la vie sem­
blent inclure la capacité de produire des effets pseudo-causals, de pro­
duire un événement confluent sans se soucier, pour ainsi dire, d ’em­
ployer les agents physiques ».
La pseudo-causalité dont parle Arthur Koestler est évidemment liée à
la seconde causalité, et son potentiel d’intégration, capable de produire
des événements confluents, n’est rien d’autre que la Loi de Conver­
gence des Parties, cette loi d’attraction universelle qui explique tous
les événements « confluents » comme la synchronicité et nombre de
phénomènes parapsychologiques.
Et voilà qu’on est bien obligé de constater à la fois tout le potentiel
mais aussi les implications sources de dérives de la théorie de la dou­
ble causalité: elle semblerait cautionner ce qu’on range généralement
dans le paranormal et les superstitions !
Mais aujourd’hui, avec la Théorie de la Double Causalité, il n’est plus
possible de garder les yeux fermés. Car tous les résultats scientifiques
accumulés depuis longtemps avant elle et qui vont dans le même sens,
celui de l’intégration de l’âme dans la science, vont maintenant pou­
voir converger.

Résumé du chapitre XVII

Les différents potentiels de réalisation de notre futur, schématisés par


les différentes branches de nos Arbres de Vie, sont dynamiques : ils se
modifient instantanément au cours du temps, en fonction de nos actes
et de nos changements d’intentions.
Il en résulte que lorsque par nos actes présents nous augmentons nos
chances de vivre un événement, une observation, une coïncidence, etc.
le potentiel correspondant à cet événement se déplace lui-même dans
notre futur en augmentant nos probabilités de l’observer. Nos chances
de le rencontrer sont multipliées d’autant, car deux causalités, et non
plus une seule, concourent à sa réalisation.
Ceci se traduit par une attraction des lignes temporelles rendues proba­
bles et par conséquent « massives » par nos intentions, de façon inver­
sement proportionnelle au carré de la « distance entre trajectoires ».
Cette Loi d’Attraction Universelle des Lignes Temporelles (ou trajec­
toires de vies) est l’expression dynamique de la Loi de Convergence
des Parties, qui tend à assembler tout ce qui se ressemble. Elle est ana­
logue à la Loi de la Gravitation Universelle.
/

Emergence de l’esprit
Où l ’on réconcilie l ’âme et la science.

- Henri, j ’ai un problème, je crois que le synchro-stimulateur est en


panne ! et on n ’a aucun enregistrement, car les seuls qu’on a faits
étaient mémorisés dedans !
- Quoi ! Mais débrouille-toi vite pour le réparer, tu sais bien qu’on a la
visite du grand patron des programmes de psychophysique. Si ta
manip’ ne fonctionne pas on est mort pour la rallonge !
- Aïe, mais quand je te dis qu’il est en panne, c’est que justement il est
mort ! Les circuits sont grillés ! Impossible de le réparer avant un bon
mois.
- Débrouille-toi, si on plante ce programme les autres seront remis en
question. On est déjà dans le rouge! Tu es notre dernière chance de
continuer ce type de recherche. Je te connais, tu vas bien me trouver
une solution !
- Ah mais là non, là vraiment, je ne vois pas, même avec un miracle...
Quoique... Ah mais non, non vraiment... Je crains que...
- Comment ça? Mais si mais si, je vois bien que tu as une idée, dis-
moi !
- Ah mais non c’est impossible, personne ne pourrait accepter un truc
pareil, à moins que... Ah non, c’est vraiment trop délirant.
-A h mais bon sang parle, je t’écoute !
- On ne peut pas trafiquer la vidéo, là-dessus on est d’accord, ce serait
une tromperie, donc on est obligé de filmer un vrai processus d’anti­
mélange. Donc mon idée serait de reproduire ce processus, mais sans
appareil ! Il faudrait juste qu’on passe son film en différé.
- Quoi ! Mais tu m’as dit qu’on n’avait aucun enregistrement ! Dis-moi
tout, tu as réussi à enregistrer quelque chose ailleurs ? Ouf, on est
sauvé !
- Non, non, ce n’est pas ça! Je voulais parler de... disons l’ancienne
méthode.
- Quelle ancienne méthode? Il n’y a pas d’ancienne méthode! Je ne
comprends rien à ton histoire !
- Je sais que tu ne seras pas chaud pour ça, mais je suggère juste d’in­
verser le processus de mélange en faisant appel à un véritable esprit !
- Quoi ! mais on ne peut pas faire un truc pareil, on va se faire laminer,
oublie tout ça, tu sais bien que si on a réussi à se faire financer c’est
justement parce qu’on a pris le contre-pied des laboratoires de parap­
sychologie ! Parce qu’on s’est interdit de mettre de l’humain dans la
machine ! C ’est même ton expression !
- Mais on n’est pas obligé de le dire...
- Ouf... Aïe, je vois ce que tu veux dire... Tu veux nous faire revenir
au temps des cavernes, mais l’air de rien... Écoute, ça va évidemment
se voir, à supposer même que tu disposes d’un sujet super-doué, l’anti-
mélange de son esprit restera toujours beaucoup plus désordonné que
celui qu’on aurait pu faire avec l’appareil... ça ne sentira pas bon tout
ça ! Trop risqué !
- Détrompe-toi, c ’est une fausse idée, tout le monde croit ça mais ça
vient juste du fait que dans l’ancien temps, ils utilisaient une source
d’énergie naturelle ! C’est parce que le sujet était obligé de puiser dans
l’environnement qu’il engendrait un anti-mélange désordonné !
-A h bon ! Mais comment tu sais ça? Dis donc, tu ne me ferais pas des
cachotteries ! Comment fais-tu pour qu’un sujet ne soit pas obligé de
puiser dans l’environnement?
- Heu... Hum... J’ai une petite astuce mais bon... Je ne peux pas te le
dire ! Enfin, disons que ce n ’est pas encore publiable.
- Quoi ! mais tu peux me le dire quand même, allez !
- Non mais c’est juste que j ’ai compris un truc... Enfin... Je ne sais
pas comment te dire ça.
- Tu as compris quoi ?
- Comment se passer de l’appareil, sans faire intervenir un sujet doué.
Toi par exemple, tu te branches sur la source radio vibrante en la tou­
chant avec une main et tu interposes l ’autre main au-dessus du
mélange. Moi pendant ce temps-là, je m ’occupe de l’enregistrement et
du reste...
- Quoi ! Mais ça ne peut pas marcher ! C ’est du délire !
- Mais si mais si, à condition que tu penses à ... tiens, ta grand-mère, et
moi tu me laisses faire. Tu sais, c ’est juste une conséquence de la dou­
ble causalité ! Mais personne ne le sait parce qu’elle n’avait jamais été
expérimentée en série...
Avant de faire émerger de la double causalité une définition de ce
qu’on pourrait appeler l’Esprit, il importe de résumer notre théorie en
quelques lignes, à partir des nouveaux éléments qui se dégagent main­
tenant de l’étude spatiale des effets de nos intentions : l’être humain est
plongé dans un espace physique à trois dimensions qui possède des
dimensions supplémentaires invisibles mais « habitées » hors du
temps, dans le passé et dans le futur, par une partie de lui-même qui se
situe en dehors de son cerveau. Sa nature étant probabiliste, sa forme
est fluide et on pourrait même dire qu’elle est floue !
Cette partie de l’être est proprement l’expression de son libre arbitre,
c ’est-à-dire de sa capacité à modifier sa propre trajectoire de vie, et
celle des autres par incidence. L’espace dans lequel l’être peut habiter
hors du temps se traduit par l’ensemble des potentiels qui ont pour
référence sa trajectoire actuelle.
En dehors de l’espace qui héberge cette trajectoire de référence, les
autres espaces parallèles n’existent qu’à l’état de potentialités. Mais la
partie de nous-mêmes qui habite ces espaces peut attirer vers elle notre
trajectoire de référence ou « destin » pour solliciter un changement
d’espace, en augmentant les probabilités qu’un « pont non causal »
vienne nous faire une offre de bifurcation. Ce changement d’espace de
l’être ne se produit effectivement que si une observation de cette offre
de bifurcation a lieu dans le présent, et qu’elle est suivie d’une action
de libre arbitre reconnaissant cette offre comme correspondant bien à
l’être. Cette offre de bifurcation peut se présenter sous différentes
formes plus ou moins conscientes, qui vont de l’instinct et de l’intui­
tion pour les plus inconscientes, ju sq u ’aux « signes » les plus
conscients tels que les coïncidences et les synchronicités.
C ’est donc bien en dernier ressort notre libre arbitre, qui sous l’in­
fluence d’une intime conviction plus ou moins consciente, décide de
suivre une bifurcation non causale, et c ’est bien parce qu’elle est non
causale qu’il y a là un choix entre deux voies, la voie causale et la voie
non causale. Ce choix définit l’essence même de l’esprit qui se dis­
tingue à travers lui. L’esprit est par définition celui qui fait le choix. A
chaque bifurcation, il y a deux esprits possibles.
Le mécanisme de production d’opportunités non causales, intuitions,
hasards favorables, coïncidences, synchronicités et même gestes spor­
tifs « miraculeux », que l’on appelle souvent populairement l’« Aide
de Dieu », est issu d’un déterminisme inversé qui crée le pont entre la
source future de nos intentions et un futur proche, à la rencontre
duquel nous allons. Ce mécanisme est celui de la seconde causalité, et
il n’est possible que parce que le déterminisme inversé « conserve »
suffisamment les probabilités en redescendant le temps. Cela s’ex­
prime de façon « statique » par la Loi de Convergence des Parties, et
de façon dynamique par une loi d’attraction universelle des lignes tem­
porelles reliées par une intention. Celle-ci se matérialise dans l’espace
multidimensionnel par des probabilités qui, prises dans leur ensemble,
sont équivalentes à une masse de fluide qui percole vers le présent en
remontant le temps.
Ces objets fluides, dont la masse correspond à la somme de leurs pro­
babilités réparties, sont susceptibles de se matérialiser dans un présent
à la rencontre duquel ils vont, seulement si leur masse est suffisam­
ment importante pour solliciter l’attention. Ils correspondent à de l’in­
formation pure omniprésente. Le rôle de l’intention est de modifier
leur répartition en provoquant un changement ou un déplacement de
leurs formes. Cette hypothèse de l ’omniprésence d ’une forme de
matière information dans un ensemble infini d’univers parallèles n’a
pas à choquer les esprits, car tous ces espaces n ’ont aucune raison
d’être vides.
Cette omniprésence a une fonction élégante à jouer par rapport au
concept de dépôt d’intention: le dépôt d ’intention agit comme une
augmentation instantanée des probabilités, mais sans nous dire exacte­
ment où se situent les contours de cette intention déposée. Or l’omni­
présence de l’intention peut parfaitement « incarner » ce dépôt par des
changements ou déplacements de forme, ce qui est infiniment plus élé­
gant.
Cette façon de concevoir les choses nous conduit inexorablement vers
la notion d’Esprit en même temps qu’elle nous permet d’en percevoir
les propriétés. Mais n’allons pas trop loin. À ce stade, l’omniprésence
supposée du résultat de nos intentions, c’est-à-dire finalement notre
« être », cette omniprésence qui nous amène à « incarner » l’esprit
dans nos espaces parallèles et hors du temps, reste encore une hypo­
thèse.
Elle a cependant l’intérêt de nous faire comprendre l’existence de
quelque chose de plus fondamental que nos intentions : celle de notre
être ou Esprit, tout simplement. Notre Esprit serait omniprésent, et
lorsque nous modifierions nos intentions nous modifierions notre
Esprit, ou encore nous le déplacerions !
Ce n’est donc pas tant nos intentions que notre être, c’est-à-dire notre
Esprit, qui est relié indissolublement à notre libre arbitre. L’esprit
apparaît ainsi comme une conséquence de notre postulat du libre arbi­
tre ! Et c’est tout à fait naturellement, par un raisonnement tout à fait
rationnel, que nous avons été amenés à l’incarner dans des espaces
parallèles hors du temps.
L’existence de l’Esprit hors du temps résulterait ainsi, paradoxalement,
d’un point de vue tout à la fois rationnel, cartésien, matérialiste et
déterministe :
- rationnel, car la causalité ne permettant pas d’expliquer les coïnci­
dences, nous avons résolu rationnellement ce problème par la double
causalité, qui ne fait que renforcer la causalité,
- cartésien, car nous avons fait appel à un espace multidimensionnel
cartésien, susceptible d ’héberger lui-même une infinité d ’espaces
parallèles cartésiens à trois dimensions,
- matérialiste, car nos intentions sont bel et bien matérialisées dans
notre espace intérieur par un « fluide »,
- déterministe, car l’effet de l’intention symbolisée par ce fluide qui
s’écoule vers le passé se produit de façon déterministe.
H s’agit donc d’une approche de l’Esprit très « physique » et il existe
d’autres approches de ce type, qui s’inscrivent cependant dans le cadre
de la causalité [16] [22]. Il est donc permis d’espérer que nous assiste­
rons peu à peu à la reconnaissance scientifique du bien fondé de la spi­
ritualité, à la réconciliation entre l’âme et la science, et peut-être même
à l’introduction de la foi dans l’expérimentation, comme le suggère la
fiction du synchro-stimulateur.
Quant à éliminer le hasard des lois de la physique, nous n’en sommes
pas encore là et il y a encore du chemin à faire. Même du côté des reli­
gions, il ne sera pas facile d’accepter les nouvelles conceptions de l’es­
prit qui émergent de la physique, car elles peuvent avoir des implica­
tions révolutionnaires.
Ce sont les religions les plus jeunes et les plus minoritaires, comme par
exemple la foi bahà’fe, d’origine perse et qui a seulement 160 ans
d’existence, qui sont les plus à même d’accepter la double causalité, à
travers la reconnaissance du lien fondamental entre la science et la foi.
Voici un extrait des écrits bahâ’fs qui va bien dans ce sens :
« La religion et la science sont les deux ailes qui permettent à l ’intelli­
gence de l ’homme de s ’élever vers les hauteurs, et à l’âme humaine de
progresser. Il n 'est pas possible de voler avec une aile seulement. Si
quelqu’un essayait de voler avec l ’aile de la religion seulement, il tom­
berait bientôt dans le marécage de la superstition, tandis que, d ’autre
part, avec l'aile de la science seulement, il ne ferait aucun progrès
mais sombrerait dans la fondrière désespérante du matérialisme*. »
Cette citation nous dévoile une très belle image de la double causalité.
Elle aussi possède deux ailes qui se déploient dans deux sens opposés,
si l’on considère que l’aile gauche est celle de la science, et que l’aile
droite est celle de la religion :
L’aile gauche est l’aile de la première causalité, dans le sens du temps.
L’aile droite est l’aile de la seconde causalité, dans le sens inverse du
temps.
Poursuivons avec cette analogie :
Le cerveau gauche est celui de l’analyse et de la logique.
Le cerveau droit est celui de l’intuition.
Nos deux cerveaux sont donc déjà adaptés à la double causalité. Peut-
on espérer plus séduisante confirmation ?
J ’aimerais terminer ce chapitre en citant des écrits métaphysiques de
source inconnue, qui présentent le concept de « l’homme boudin »,
que l’on peut considérer comme une nouvelle métaphore de ce que
pourrait être une branche de notre Arbre de Vie. Au lieu de faire appel
à une branche, ces écrits font appel à un boudin, c ’est-à-dire à un
cylindre ou un tunnel souple. Us considèrent que le temps n’existe pas
et que toute la vie d’un homme peut être représentée par un long tun­
nel, que l’on peut éventuellement déplacer en le faisant rouler par
exemple, de façon à modifier son destin.
Représentez-vous un petit homme immergé dans le temps à l’intérieur
de ce tunnel, où il se déplace tout au long de sa vie. Pendant que
l’homme avance dans le tunnel, l’âme de cet homme, pour qui le
temps n’existe pas, agit non pas sur le corps de l’homme pour le faire
avancer, mais d’un seul coup sur toute la longueur du tunnel, pour
déplacer le tunnel.
Il y a donc dans cette théorie de l’« homme boudin » deux sources de
causalité. La première est physique, c’est l’homme qui avance dans le
tunnel en déplaçant son corps, et la seconde fait intervenir une entité
désincarnée, qui a la possibilité de modifier la position du tunnel par­
tout à la fois.
Si l’on considère l’ensemble de toutes les positions possibles du tun­
nel, on retrouve bien l’Arbre de Vie.
L’illustration utilisée pour nous faire comprendre que le temps n’existe
pas pour l’âme, est de dire que l’homme marche à l’intérieur du tunnel
avec une lanterne pour s’éclairer. Les meubles qui sont devant dans le
noir correspondent à son futur, et ceux sont derrière et ne sont plus
éclairés sont des événements passés. Le présent de cet homme est donc
cette lanterne qui dévoile une réalité extrêmement locale, pas à pas,
mais les réalités passées et futures demeurent et préexistent. On nous
dit alors que bien que le futur soit déjà écrit, le libre arbitre n’est pas un
leurre, car l’âme a posé son tunnel sur la terre en une seule fois. Avant
de le faire, l’âme a bien étudié la forme du terrain, les creux, les
bosses, les collines, les arbres et les rochers à éviter. L’âme a vu les
tunnels des autres humains se poser ça et là. Elle a vu tout cela du haut
de son intemporalité et a décidé librement de son chemin de vie.
Une autre métaphore utilisée dans ces écrits est celle d’une maison qui
se trouve en face de nous, et que l’on regarde à travers un tout petit
trou fait dans un carton, ce qui nous empêche de voir l’ensemble de la
maison d’un seul coup d’œil. La conscience de notre corps, celle qui
est issue de notre cerveau biologique, ne découvre donc la maison
qu’en balayant lentement toute la surface de cette maison à travers le
carton, car son champ de vision est extrêmement réduit. Par contre, la
conscience de l’âme voit l’intégralité de la maison, car elle n’a pas de
carton devant les yeux.
L’Esprit et l’Âme semblent considérés ici comme deux mots qui dési­
gnent la même chose. Le croire ne serait-il pas oublier que le mot Âme
est fabriqué à partir du mot Amour ?

Résumé du chapitre XVIII

La localisation géographique des modifications produites par nos


intentions dans l’« espace de notre futur » nous permet d ’identifier une
substance omniprésente que nous définissons en tant qu’Esprit, car
elle en revêt les propriétés qu’on lui confère d’après la littérature,
notamment celles du déplacement instantané : lorsque nous modifions
nos intentions, nous changeons immédiatement notre Esprit de
« place », tout en modifiant sa forme, qui détoure l’étendue des poten­
tiels stimulés par notre nouvel « état d’Esprit ».
La capacité de notre Esprit ou « être » à se mouvoir serait donc indis­
solublement liée à nos intentions non conditionnées, c ’est-à-dire à
notre libre arbitre.
L’esprit apparaît ainsi comme l’expression géométrique de notre libre
arbitre !
XIX.
Le Cycle de l’Amour
Où l ’on divulgue le secret de la magie!

Nous avons jusqu’à présent parlé de l’intention comme d’une fonction


de notre libre arbitre nous permettant de l’orienter, de déterminer vers
quel futur nous voulons nous diriger, et nous avons donné corps à cette
destination en la représentant dans un espace pourvu de dimensions
supplémentaires.
Par cette représentation spatiale nous avons fait émerger l ’Esprit,
forme omniprésente mue par l’intention. Alors que l’intention demeure
attachée au présent, l’Esprit est intemporel, c’est là toute leur diffé­
rence. En dehors de sa nature probabiliste, nous savons peu de chose
sur l’essence de cette forme, capable de se mouvoir dans le futur et de
se transformer en pluie redescendant doucement les cours d’eau en
direction du présent.
Si nous visualisons par exemple que nous sommes allongés sur le
sable chaud d’une plage bordée de cocotiers, nous pouvons aussi for­
ger l’intention de vivre réellement les sensations correspondantes. Le
film des événements s’est d’abord présenté à nous de façon imagi­
naire, puis notre intention s’en est emparée: l’Esprit s’est alors reposi­
tionné dans le futur comme une formation nuageuse et notre vision
imaginaire a été remplacée, avant même d’en connaître les moyens de
réalisation, par un potentiel travaillant déjà pour nous en arrosant de
nouveaux espaces. Nous avons instantanément modifié les probabilités
dans notre Arbre de Vie !
Quelle est la substance motrice de cet élan qui, en déplaçant notre
Esprit, a transformé une visualisation en un nouveau potentiel de vie,
même si nous n’avons encore rien planifié?
En faisant émerger la nature spatiale de l’Esprit, nous avons laissé de
côté la question de la nature de sa substance, cette « essence » qui cir­
cule dans les couloirs du temps.
Par analogie avec l’« essence » qui circule dans un moteur à explosion,
et qui permet de le faire tourner, en la transformant en énergie méca­
nique, n ’y aurait il pas aussi une « essence » qui ferait tourner le
moteur de notre libre arbitre ?
Il y a effectivement une transformation « énergétique » à l’œuvre dans
un cycle non causal gouverné par l’intention. L’essence du désir est
enflammée par l’intention, ce qui propage instantanément son « éner­
gie émotionnelle » vers le futur, puis cette énergie redescend le temps
vers le présent pour déboucher quelque part, sous la forme d’un poten­
tiel de réalisation: l’essence semble bien avoir été transformée au
cours d’un cycle !
Mais ce cycle a une particularité, c ’est qu’il nécessite un état d’attente.
La circulation de l’essence émotionnelle se caractérise ici par une
phase critique et incertaine: l’attente de la réalisation. Durant cette
phase tout peut être remis en question, et la circulation peut s’arrêter:
le moteur peut caler !
Nous allons maintenant répertorier les différentes phases de ce cycle.
Dans le modèle de l’Esprit, nous avions déjà observé les premiers
stades, à commencer par celui du désir. Avant de forger une intention,
nous sommes généralement dans le stade du désir. La différence entre
le désir et l’intention est que l’intention ne s’en contente pas, car elle
veut faire entrer l’objet du désir dans la réalité. Le désir crée et retient
l’essence, mais cette essence ne s’est encore ni enflammée, ni même
déplacée en dehors de son réservoir. Car le désir conserve l’essence
attachée au présent, tout comme le véhicule sur son parking la
conserve dans son réservoir. Pour que l’essence circule, le véhicule
doit démarrer en perdant l’essence de son réservoir.
Le désir n’imagine pas réellement que l’intention puisse s’accomplir,
sans quoi il relèverait plutôt d’une joie anticipatrice. Il s’accompagne
au contraire souvent de frustration. Et c’est ainsi que le désir grandit
d’autant plus que la conscience constate sa difficulté d’accomplisse­
ment: le démarreur ne fonctionne pas !
Mais lorsqu’on ne retient plus l’objet du désir emprisonné dans son
réservoir, on réalise un détachement qui permet à l’essence du désir
d’être aspirée dans le stade du souhait. Le démarreur peut alors se
mettre à tourner.
Mais le souhait est comme une intention qui n’est pas encore née, car
elle n’a pas encore forgé sa résolution, ni avancé dans la moindre
direction. Le véhicule reste à l’arrêt. Le souhait n’est pas capable de
nous faire changer de branche, ou de bouger notre tunnel. Il est comme
une intention d’intention, une promesse d’intention. Le souhait ne sait
pas encore exactement où aller, ni même avec quel véhicule, car cela
dépend de plusieurs facteurs : le souhait peut rester en panne de véhi­
cule. On peut alors changer de véhicule, ou même en avoir plusieurs,
tout comme on peut avoir plusieurs souhaits concernant par exemple
nos prochaines vacances, mais on ne peut conduire qu’un seul véhi­
cule: on ne peut avoir qu’une seule intention, l’intention étant agis­
sante, contrairement au souhait.
Et il vaut mieux le savoir, car émettre plusieurs souhaits, tout comme
posséder plusieurs véhicules, ne sert à rien aussi longtemps que l’on
n’a pas compris que pour se déplacer, il faut se détacher de ses doutes,
ne plus hésiter, nourrir une intention authentique : choisir un véhicule
en l’état, et le démarrer.

Une fois le véhicule démarré, le souhait devient intention, car nous


sortons du parking. Mais attention car dorénavant, nous allons devoir
tenir compte du terrain ! Nous devons à tout moment être attentifs,
prêts à faire une observation: nous entrons donc dans le stade de l’at­
tention.
Encore faut-il que nous soyons bien sortis du stade de l’intention, en
nous détachant de l’itinéraire de la carte, c ’est-à-dire des moyens.
Maintenant que nous sommes en route, l’esprit doit laisser tomber la
carte, il doit lâcher prise pour nous permettre de nous concentrer sur le
terrain parcouru dans le présent.
Dans le stade de l’attention, tout devient plus facile car nous n’avons
qu’à conduire et nous pouvons dorénavant arriver sans effort à destina­
tion. Mais il subsiste une difficulté: nous ne connaissons pas exacte­
ment la route pour arriver à bonne destination, ni la durée du trajet.
Nous sommes dans la phase critique incertaine, c’est pourquoi nous
avons besoin de la foi.
Ce stade de la foi serait inutile si l’intention pouvait trouver un accom­
plissement causal, c ’est-à-dire si nous connaissions parfaitement la
route, auquel cas le trajet ne ressortirait pas de la seconde causalité. La
foi permet de continuer à conduire sans connaître la route. Elle nous
permet de nous détacher d’un excès d’attention due à notre ignorance.
Nous devons en effet rester attentifs, mais en conduisant normalement.
La foi permet ainsi de ne pas voir resurgir un doute excessif, une hési­
tation qui serait suivie d’une remise en cause, ce qui ferait caler le
moteur. Toutefois, nous l’avons déjà vu, un doute mesuré renforce la
foi. Mais un doute excessif, comme se dire que l’on est perdu, serait le
meilleur moyen de s’arrêter pour faire demi-tour ou rechercher un plan
causal.
C’est pourquoi le meilleur état mental pouvant soutenir et mettre en
œuvre la seconde causalité est la « foi », car elle doit s’exercer dans la
durée sans défaire l’intention. Non pas la foi religieuse, mais la foi en
soi-même, ou si l’on préfère: en l’aide de Dieu. Mais quelle est donc
cette « foi » qui s’immisce à la place de notre « intention » pour se
maintenir dans la durée ?
Il faut avoir la foi lorsqu’on ne sait pas comment on va pouvoir réaliser
nos intentions. Nous avons déjà longuement exploré les raisons pour
lesquelles la foi pouvait favoriser la seconde causalité. Nous en avons
conclu qu’elle nous permettait d’augmenter nos chances, en faisant
barrage à la première causalité et à l’abandon.
La foi se présente donc comme la meilleure alliée de l’intention
lorsqu’aucune solution causale ne se dégage pour la réaliser. Mais
attention, la foi devient inutile lorsqu’elle a chassé nos doutes, et à
nouveau, il importe de savoir s’en détacher.
Car à son tour, la foi doit passer le relais à la confiance. Si après avoir
réussi à chasser nos doutes, nous sommes prêts à rencontrer des signes
sur notre trajet, encore faut-il savoir les décoder: leur faire confiance.
Car si la foi nous emmène devant de tels signes, nous devons avoir
confiance dans la décision qu’ils nous suggèrent: généralement, c’est
la première impression qui compte.
Notre confiance nous ayant maintenant permis de faire le bon choix
devant chaque bifurcation, nous entrons enfin dans le stade de l’aspi­
ration: lorsqu’il se confirme qu’on est sur la bonne route, nous sen­
tons que nous allons parvenir à destination. Nous avons remarqué que
le décor avait changé et qu’il commence à ressembler à notre destina­
tion. Nous sommes aspirés par elle.
Mais comment se caractérisent donc les destinations de nos inten­
tions? Par du bonheur, du plaisir, de la joie? Pas nécessairement, car
nous pourrions avoir l’intention d’accomplir certains actes courageux
et risqués, qui nous mettent en situation difficile pour aider quelqu’un,
pour une noble cause...
Lorsque l’objet de notre intention n’est pas de créer quelque chose de
beau, de bon, de positif, ou de trouver du bonheur, n’est-il pas de géné­
rer tout cela pour quelqu’un d ’autre?
Pourquoi transformer des désirs en souhaits, des souhaits en intentions,
des intentions en attention puis en foi, confiance et aspiration, pour
aller vers une destination qui ne créerait rien, qui n’apporterait aucune
joie, ni à nous-mêmes ni à autrui?
Quel sens aurait l’exécution d’un cycle qui n’apporterait rien de bon à
personne? Ne vaudrait-il pas mieux dans ce cas conserver l’essence
émotionnelle dans son réservoir, en attendant mieux ?
Considérons les transformations de ce cycle émotionnel : l’essence du
désir se transforme en souhait, puis en intention, puis en attention, puis
en foi, puis en confiance, puis en aspiration, pour finalement nous
revenir sous forme de joie, lorsque nous parvenons à destination !
Remarquons que l’accomplissement du désir en joie passe par deux
processus, celui du don de soi afin d’entretenir le cycle, et celui du
détachement : nous devons renoncer à chacun de nos états (d’âme)
pour accueillir le suivant et permettre à l’essence de se transformer
afin de modifier nos potentiels futurs.
Puis le cycle s’accomplit et l’essence revient sous forme de joie. Ses
disparitions étaient fictives, la magie de la vie avait bien été mise en
route via le futur. L’essence d’un moteur thermique disparaît de même
en se transformant en énergie mécanique. Dans le moteur de notre
libre arbitre, l’essence émotionnelle disparaît pour se transformer en
potentiel, accomplissant son œuvre mécanique dans les couloirs du
temps inversé.
Voyons les phases du cycle où l’essence émotionnelle n’a pas encore
disparu en quittant le présent, puis a commencé à y réapparaître: désir,
souhait... puis aspiration, joie !
Et l’on pourrait y ajouter les différentes expressions de la joie: bon­
heur, plaisir, satisfaction...
Quel est le point commun essentiel à toutes ces exigences? Ne s’agi­
rait-il pas tout simplement de tout ce qui justifie l’amour de la vie?
Mais alors, l’amour ne serait-il pas justement leur essence même?
L’amour ne serait-il pas l’essence du moteur de notre libre arbitre,
celui qui permet de nous libérer de l’existence conditionnée, celui qui
travaille à notre libération authentique?
L’amour ne serait-il pas le carburant de notre liberté? Nous savons
qu’il s’agit bien de notre liberté, car tel est notre postulat fondamental.
Sans liberté, point de théorie de la double causalité, point de moteur du
libre arbitre, aucun besoin d ’essence !
Et finalement, que mettre en face d ’un objectif aussi noble que la
liberté, si ce n’est l’amour? Quoi d’aussi noble que l’amour, hormis la
liberté ?
Et il est bien évident que la demande d’amour correspond bien en
début de cycle à l’exigence du désir, et que lorsque le cycle de l’amour
se termine, il est comblé par la joie. Il peut n’être que partiellement
comblé, par de nouveaux espoirs et désirs, mais le cycle de l’amour est
toujours prêt à recommencer...

Bien qu’étant composé d’une essence capable de changer d’apparence,


tout comme l’énergie, l’amour est en fin de compte clairement lié à la
substance fluide qui pénètre nos trajectoires potentielles de vie afin de
nous aider à les réaliser. Nous avons vu que l’esprit en définissait déjà
les contours, s’agissant d’une répartition spatiale créée par nos inten­
tions.
Puisque l’esprit en définit les contours, que reste-t-il à définir?
Demandez à n’importe quel physicien, et il vous répondra : il reste à en
définir l’amplitude, le volume, ou encore l’énergie. Mais que signifie
l’amplitude, le volume ou l’énergie d’un objet qui se trouve dans un
espace ?
C’est bien simple: le volume, l’amplitude et l’énergie sont en corréla­
tion directe avec sa masse. Mais dans ce cas, cette masse devrait être
soumise à la gravitation universelle, n’est-ce pas, comme toute masse
qui se respecte. Eh bien oui, c’est exactement ce qui se passe, et c ’est
une conséquence de la double causalité : la loi d’attraction universelle !
Ainsi, s’il fallait donner une définition physique de l’amour, cela serait
l’énergie de l’esprit lorsqu’il déploie ses effets, mais aussi sa masse
lorsqu’il est conservé au repos.
Il est intéressant de constater que lorsque l’amour se transforme en
énergie, on ne le reconnaît plus. Intention, attention, foi, confiance:
autant d’attentes qu’il nous revienne du futur.
Mais lorsqu’il s’exprime dans le présent par sa masse, l’amour serait-il
composé de particules? Que dire des gravitons*? L’homme ne les
ayant pas encore détectés, il construit des accélérateurs absolument
gigantesques pour y parvenir: est-ce bien étonnant?
Quoi qu’il en soit, les particules de la gravité-amour s’il en est, évo­
luent dans des dimensions différentes. Issues d’une même loi, peut-on
pour autant en déduire qu’elles sont identiques?
On peut toujours essayer: L’amour ne serait alors ni plus ni moins que
l’énergie de la substance fluide qui se déploie dans notre espace inté­
rieur et qui constitue notre esprit. Que se passe-t-il alors lorsqu’il
redescend dans notre espace physique ?
Considérons maintenant ce qu’on en sait de source sûre: cette source
où il redevient liquide et dont il définit l’amplimde. Que peut-on dire
alors de l’amour? Compte tenu de tout ce qu’on vient de constater, il
est plus facile de commencer par ses retombées, auxquelles il ne
s’identifie pas: il n’est ni de l’amour désir, ni de l’amour joie, ni de
l’amour plaisir, ni de l’amour satisfaction, ni même de l’amour bon­
heur!
Car tous ces amours ne sont que les résultats d’un amour qui a coulé
sur la terre pour répondre à nos intentions, et ce n’est pas ainsi qu’il
faut définir l’amour, le vrai, celui qui coule à sa source. Car nous par­
lons de l’amour en tant source pure et non en tant que substance dépo­
sée, ayant déjà interagi avec l’espace-temps, et susceptible de devenir
impur.
Nos intentions ayant besoin d’être purifiées pour séparer notre libre
arbitre authentique de notre libre arbitre illusoire, notre amour n’est-il
pas lui-même issu d’une purification de tous nos sentiments?
Pour que notre esprit dont l’amour définit l’amplitude puisse se séparer
de la partie de notre être située dans le présent, sous l’emprise de notre
cerveau, une purification ne devrait-elle pas en effet avoir lieu ?
L’amour authentique serait alors discret et invisible. Nous ne pourrions
observer que ses effets. L’amour purifié, transmis par l’intention, libéré
par le détachement, énergétisé par le don de soi, œuvrerait dans le futur
et exprimerait ses effets sous forme de Grâce. L’amour reçu pourrait ne
pas connaître son origine, pas plus que nous ne connaissons l’origine
du hasard.
En s’évanouissant dans le futur, l’amour se transmettrait comme la
lumière, en se déplaçant instantanément comme un rayonnement.
Mais dans le sens inverse, l’amour redeviendrait massif comme un
fluide, comme de l’eau qui coule vers le passé pour rapprocher les
êtres.
D’où vient cette différence, ces deux expressions distinctes de l’amour,
à la fois fluide et énergie lumineuse ?
De la source amplifiée, grossie, énergétisée par l’amour, ne peut se
transmettre vers le présent qu’un effet beaucoup plus lent à apparaître,
car l’amour doit traverser un espace-temps où de nombreuses trajec­
toires de vie sont impliquées.
La moindre modification de l’intention nécessite en effet un rééquili­
brage de tous les potentiels qui séparent le présent de l’avenir, car plu­
sieurs Arbres de Vie sont concernés et ils sont intriqués les uns dans les
autres.
Lorsque nos potentiels de vie sont modifiés, ceux de toutes les per­
sonnes qui sont impliquées dans notre vie le sont aussi, et à leur tour,
vont être modifiés les potentiels de toutes les autres personnes avec
lesquelles elles sont liées, et dont la vie semblait pourtant au départ
complètement indépendante de la nôtre. Certains changements d’appa­
rence mineure, s’ils se propageaient aussi rapidement que la lumière,
pourraient générer de véritables ondes de probabilité dans l’humanité
entière, et il faudrait alors attendre la relaxation de tous les potentiels
ainsi propagés pour qu’elles se stabilisent.
Il devient douteux que de telles ondes puissent jamais se stabiliser, si
l’on considère l’effet cumulé de toutes les intentions de tous les êtres.
Les choses se passent-elles vraiment ainsi?
Non, heureusement, car en redescendant le temps les potentiels doi­
vent attendre avant de pouvoir se propager, puisqu’ils dépendent des
trajectoires de tous les êtres impliqués « dans leur présent ». Une inten­
tion seule ne suffit pas, elle doit être confirmée par des agissements
adéquats. Les changements présents créés par l’intention renforcent
ainsi doucement les potentiels, ce qui a pour effet de les faire grossir à
la vitesse du temps qui passe. Nous devons nous aider nous-mêmes, ne
l’oublions pas. Car l’intention ne pourra réellement se potentialiser que
si le terrain le lui permet. À l’impossible nul n’est tenu. Tout ce qui est
possible sera fait, mais le temps doit faire son œuvre : accuser récep­
tion de toutes les bifurcations.
Et c’est ainsi qu’au départ, l’amour est comme la lumière ou l’énergie
électrique, il se propage instantanément. Mais faites-lui traverser en
sens inverse le terrain, la matière, et observez les résultats : l’amour cir­
cule lentement.
Pour bien comprendre cet effet du terrain, demandez à un ingénieur
électronicien comment il s’y prend pour stabiliser un circuit électrique,
par exemple une source d’alimentation. Il vous expliquera qu’il faut
rajouter une capacité à ce circuit, voire une résistance, afin d’absorber
les pics de tension, de compenser les baisses de tension, d’éliminer
ainsi les phénomènes ondulatoires, d’équilibrer le flux d’énergie et de
ralentir la circulation de l’électricité.
Alors la circulation de l’énergie devient fluide !
Lorsqu’une onde de probabilité directement alimentée dans le futur par
l’amour accompagnant l’intention se propage dans le passé, le même
phénomène se produit. Le terrain constitué de l’espace-temps multidi­
mensionnel séparant le présent d’un futur à relier, se met à jouer le rôle
d’un circuit équipé de résistances et de condensateurs.
La circulation de l’amour, au départ instantanée comme de la lumière,
devient à l’arrivée une circulation fluide comme de l’eau. Et c’est ainsi
que, bien que l’amour soit émis comme de la lumière, c’est en fluide
qu’il se transforme quand il répand sa magie sur la terre.
Cet amour n’est donc rien d’autre que le fluide qui prépare nos trajec­
toires de vie en reliant présent et futur. Sans amour, nous avançons
vers l’inconnu, passons notre temps à jouer la carte joker et dans ce
cas, la peur se présente à l’horizon. Mais si l’amour revient, la peur
disparaît, et nous pouvons jouer à nouveau le jeu de notre vie, en sai­
sissant nos chances.
Ainsi, lorsqu’il « redescend » dans le présent, après avoir percolé dans
l’espace-temps qui nous sépare de notre futur, l’amour se transforme
en fluide qui peut remplir notre réservoir, mais à condition que nous
soyons disposés à l’accueillir, en saisissant nos chances. Si nous avons
peur, notre réservoir reste vide.
Chacun possède ainsi un réservoir contenant un fluide d’amour vital,
nécessaire au bon fonctionnement de son psychisme. Ce fluide com­
posé d ’amour facilite la vie de chacun d’entre nous en fonction du
niveau de son réservoir. Plus il est rempli, plus la personne profite de
la magie de la vie, en attirant à elle non seulement la chance, mais
aussi tout le monde dans son sillage. Car ce fluide qui en les synchro­
nisant attire les trajectoires de vie hors du temps présent, les attire aussi
dans le présent lui-même, sans qu’aucune magie ne soit plus néces­
saire, tellement il est évident que dans le présent, l’amour attire
l’amour.
L’amour « lumière » irradie mais ne peut couler immédiatement, sans
avoir traversé l’espace hors du temps. Il ne peut au mieux se transmet­
tre sur terre directement, que si la personne qui le reçoit est irradiée,
présente dans son champ d’énergie. Mais si elle en sort cet amour dis­
paraît. Heureusement, il est à prévoir que si cette présence dure, alors
l’amour finira par constamment pleuvoir autour d’elle. Les réservoirs
de toutes les personnes présentes pourront alors se remplir pour que
l’amour subsiste en dehors du champ d’énergie, et que leurs peurs dis­
paraissent ainsi durablement. Mais ne serait-on pas ici dans un rêve ?

Pour se transmettre en douceur, bien plus sûrement, l’amour se déplace


en s’écoulant. Il est un mouvement expansif, qu’il s’écoule vers l’exté­
rieur ou vers l’intérieur, en faisant fondre les limites entre l’intérieur et
l’extérieur.
Le lâcher prise, l’acceptation, le détachement sont dans la nature de
l’amour, car ce sont les ailes de la seconde causalité. La peur se nourrit
au contraire de la première causalité, de contrôle, de calculs, de
moyens de recevoir ou de tirer à soi, et c’est pour cela que l’amour est
plus dans l’acte de « donner » que dans celui de « recevoir ». La peur
contracte, dégrade, renferme et appauvrit, à l’inverse de l ’amour
expansif, réparateur, ouvert et généreux.
L’Amour s’auto enrichit. D reçoit ce qu’il donne, au centuple parfois.
L’Amour reçu amplifie la capacité d’irradier et remplit les sources, ce
qui le fait couler encore plus intensément, et c’est un cercle vertueux
sans fin.
L’Amour s’enrichit donc tout seul et peut enrichir chaque nouvel être à
mesure qu’il grandit et qu’il rencontre plus d’êtres à aimer. Il tend à
s’amplifier. Il tend ainsi vers l’universalité.
L’Amour n’est pas une vraie quantité puisqu’il grandit sans cesse. Il ne
peut donc être exclusif. Si un amour exclut d’autres amours, c’est que
quelque chose l’empêche de circuler. L’Amour relève aussi d’une qua­
lité: non seulement il ne diminue pas lorsqu’il s’attache à plusieurs,
mais il ne peut ni se diviser, ni se fractionner. L’Amour ressenti pour
l’un rejaillit forcément sur les autres.
L’Amour n’est pas dans l’ego, car l’ego est dans la causalité et dans
l’individu. L’Amour est dans l’acceptation et dans l’universel. H ne
peut s’écouler que si l’ego disparaît. Si une personne est pleine d’ego,
l’Amour disparaît exactement comme disparaît la seconde causalité
lorsque la première s’impose. L’ego barre le passage de l’amour, car il
s’engorge de causalité, sous forme de mérites et de qualités.
L’ego dit: « Je suis la source ou l’origine de ceci ou de cela! C ’est
grâce à moi si ceci ou cela est apparu ! Remerciez-moi ! »
L’Amour ne peut couler que si l’on a besoin de lui. L’ego n ’a pas
besoin de l’Amour puisqu’il se positionne en concurrent de la source
d’Amour. L’Amour provient de la seconde causalité, l’ego de la pre­
mière causalité.
L’Amour et l’ego ne peuvent converger.
Voilà pourquoi, bien que l’Amour soit si puissant et si nécessaire, on
ne comprend pas pourquoi il est si rare. 11 est fragile comme une fleur.
Comme elle, il doit être protégé, renforcé, arrosé. Alors seulement il
peut grandir.
Un certain temps est nécessaire avant que la fleur ne pousse, c ’est
pourquoi les effets de l’Amour ne sont pas immédiats. Pour en voir les
effets, il faut arroser et arroser encore, donner et donner encore et sans
condition. Et un jour une rose apparaît et notre maison se remplit de
parfum. C ’est ainsi que l’Amour apparaît: toujours à l’improviste,
comme un cadeau de la nature. Et l’amour étant impersonnel, univer­
sel, il ne peut irradier ou couler que lorsqu’on comprend que notre être
n’est pas limité à soi-même, mais englobe l’autre. Nous devons donc
nous aimer les uns les autres.
Or qui nous apprend « Aimez vous les uns les autres » ?
On peut constater avec un certain étonnement que la science pourrait
bien finir elle aussi par nous l’apprendre! Encore faudra-t-il que de
l’eau, et plus sûrement de l’amour, coule sous ses ponts, et que le mes­
sage de ce livre brise les ultimes résistances.

Résumé du chapitre XIX

L’Ame est composée d’une forme, l’Esprit, et d’une essence, l’Amour.


La seconde causalité opère selon un cycle qui fait circuler l’Amour et
qui a des vertus amplificatrices durant ses transformations agissantes
dans le futur et ses retombées sous forme de pluie dans le présent.
Quelque que soit la décomposition du cycle de l’Amour en phases,
elles font ressortir les processus du don de soi et du détachement, pou­
vant donner la fausse impression que l’amour nous quitte.
Car le don de soi expulse l’essence de l’amour en avant dans le moteur
de notre libre arbitre, pendant que le détachement, à chaque phase du
cycle, la transforme en nouvelle énergie motrice qui modèle notre
futur selon nos intentions.
XX.
Dialogue avec l’Esprit
Où l ’on étend le champ d ’application de la double causalité.

La théorie de la double causalité (TDC) est née pour expliquer la


magie de la vie, cette magie qui rend le monde si petit en mettant sur
notre chemin les rencontres dont nous avons besoin pour évoluer. Mais
cette magie va plus loin : pour peu que l’on développe une certaine
réceptivité, l ’univers devient un miroir de nos âmes, un miroir
magique qui ne reflète pas seulement nos états d’esprit, mais qui nous
informe sur nos avenirs choisis.
Mais d’après l’Esprit que j ’ai interrogé, le potentiel de la TDC est
encore plus vaste. Je retranscris ici ses réponses à mes questions à ce
sujet. Pour l’inciter à me répondre, je lui ai tout d’abord demandé si
mon livre répondait bien à sa demande, en osant inverser les rôles.
C ’est ainsi que je l’ai vu sourire, et que j ’ai pu lire ses réponses dans
un sourire intérieur.
- A ton avis, la double causalité pourrait-elle expliquer l’effet placebo,
ou encore les guérisons spontanées ?
- Oui me répondit-il, et la différence entre ces deux cas est juste une
question d’apport énergétique. Prend le cas des guérisseurs: tu vois
deux processus à l’œuvre. D’une part une intention de donner, une
intention d’amour qui en quelque sorte visualise la guérison du patient,
et d’autre part un apport énergétique, par l’imposition des mains par
exemple.
Imagine maintenant que le même processus que celui qui a conduit à
la maladie sous forme de dégradation de l’organisation cellulaire se
produise en sens inverse du temps, grâce aux effets de cette intention
généreuse. Tu comprends que cela puisse mener à la guérison, mais
qu’il y a une condition importante à satisfaire. S’agissant d’un proces­
sus irréversible, pour qu’il soit possible de l’inverser il est absolument
indispensable qu’il aspire de l’énergie dans l’environnement, celle qui
avait été dégagée lorsque la dégradation s’est produite. Or comme cela
ne peut pas être la même énergie, puisque la guérison se produit dans
un environnement différent de celui de la maladie, il faut bien prévoir
un autre type d’apport énergétique.
Or à quoi sert l’imposition des mains si ce n’est à fournir l’apport éner­
gétique nécessaire ?
- Qu’en est-il des énergies qui ne sont pas vraiment physiques et qui
circulent aussi par les mains ou par les mouvements de tout le corps,
comme l ’énergie du Chi dans le TaïJi Quan ? Penses-tu que cette dis­
cipline a quelque chose à voir avec la double causalité?
- Souviens toi des séances de Taï Ji Quan auxquelles tu as assisté, et du
film qu’on t’a projeté sur la pratique de cette discipline illustrée et
commentée par Vlady Stévanovitch [29], ce maître qui enseigne sa
propre méthode. Lors de ses démonstrations impressionnantes, tu avais
vraiment l’impression que cet homme maîtrisait la circulation d ’un
véritable fluide vital, une circulation très lente mais extrêmement har­
monieuse. Vlady décrivait lui-même son ressenti comme très proche
de l’amour et du don de soi, et il était manifeste que ce fluide était por­
teur d’équilibre, d’harmonie et de beauté. Quant à savoir s’il s’agit de
cette « essence d ’amour » que tu présentes comme le fluide de la
seconde causalité, réfléchis-y, c’est quelque chose qu’il faut découvrir
soi-même. Je t’encourage à étudier cette discipline, car elle rejoint ton
hypothèse qu’un tel fluide pourrait intervenir dans les gestes sportifs
parfaits, comme l’art secret du tir à l’arc. Tu es bien ici en présence de
gestes parfaits, regarde seulem ent ce maître pour le constater.
Remarque un autre point commun avec ta théorie : le vide mental !
Reconnais qu’il y a de fortes présomptions en faveur de l’œuvre de la
seconde causalité !
- Penses-tu que la double causalité pourrait expliquer des phénomènes
parapsychologiques comme la psychokinèse ?
- N ’est-ce pas évident? Souviens-toi par exemple de l’expérience de
micro-pk des poussins de Peoc’h. Initialement conditionnés dès leur
naissance à considérer un mobile nommé tychoscope comme leur
mère, ils parviennent à influer sur les déplacements de ce mobile après
avoir été enfermés dans une cage, tout en gardant la vision du mobile,
et bien que ce dernier soit animé de mouvements totalement aléatoires.
Or il se rapproche des poussins deux fois plus qu’il ne devrait, ce qui
est extrêmement improbable. Les expérimentateurs ont invoqué l’in­
fluence de la conscience des poussins sur ce mobile, mais il est évident
ici qu’il s’agit d’un processus intentionnel qui ressort de la seconde
causalité, et qui fonctionne grâce au lien affectif, vecteur de l’amour
entre les poussins et leur mère.
Tu as aussi constaté qu’il y a une grande quantité d ’expériences qui ont
été réalisées dans le monde entier avec des générateurs de nombres
aléatoires (GEA) et qui démontrent le pouvoir apparent de l’intention
sur la matière. N ’est-ce pas si bien résumé dans ce livre de Lynne Mc
Taggart [30] que tu as lu, et qui fait une excellente revue des travaux
scientifiques relatifs à la science de l’intention? Elle en fait une admi­
rable synthèse, en indiquant même les étapes à suivre pour apprendre à
transmettre soi-même ses intentions, ou à faire des demandes à l’uni­
vers afin de réaliser ses objectifs. Elle conclut elle-même sur la néces­
sité d’être compatissant et empathique avec les personnes concernées
par vos souhaits, d ’être optimiste et confiant au sujet de votre
demande, de rechercher les conditions les plus agréables possibles
pour la transmettre, et de savoir s’en détacher.
Tu as compris qu’il ne s’agit pas d ’un pouvoir de la pensée sur la
matière, mais simplement d’une projection de l’intention sur l’avenir
qui, avec le vecteur de l’amour, renforce les potentiels de hasards favo­
rables. Réjouis toi qu’il n’y ait là aucun effet pouvant violer les lois de
la physique.
- Me confirmes-tu que toutes les méthodes de divinations, voyance,
tarots, Yi-King, s ’expliquent par la seconde causalité?
- Oui bien sûr, dans la mesure où vous ne voyez dans tous ces supports
que ce que vous y projetez par vos intentions. Mais le remue-ménage
d’informations que vous provoquez dans votre futur vous ramène dans
le présent des informations supplémentaires, d’où cette sensation de
magie, mais attention à ne pas y attacher trop d’importance.
- Même l ’astrologie ?
- Oui, même l’astrologie. À plus d’un égard, l’astrologie exploite la
seconde causalité. Pas seulement dans la technique d’interprétation,
qui amplifie les effets miroirs par les mêmes mécanismes que les
autres techniques. Il y a une réelle synchronisation entre vos trajec­
toires de vos vies potentielles, telles qu’elles sont déjà programmées
dans vos futurs, et les configurations planétaires de votre système
solaire. La Loi de convergence des Parties étant créatrice d’ordre, elle
harmonise avec votre environnement les comportements de votre part
dont elle a besoin pour prédéterminer « en votre absence » vos trajec­
toires de vie, lorsque celles-ci sont indéterministes. Car elle ne connaît
pas le hasard. Aussi longtemps que vos intentions ne l’influencent pas,
c’est-à-dire que votre libre arbitre reste illusoire, vous vivez des états
d’âme ou des rencontres synchronisés à ces configurations, que l’on
peut qualifier d’archétypes. Mais rassure-toi, tout cela s’évanouit dès
que l’homme exerce son libre arbitre. C’est pourquoi il est dommage
que la pratique courante de l’astrologie nous laisse croire à une vérita­
ble influence des astres, alors que cette influence n’a aucune réalité
physique. Néanmoins il faut signaler que certains astrologues le com­
prennent, comme ton ami Michel d’Aoste [38] par exemple, qui pro­
pose une théorie bannissant toute influence physique et qui est tout à
fait séduisante.
- Donc si je comprends bien, aussi longtemps que nous restons condi­
tionnés nous subissons une influence des astres qui n ’en est pas une,
mais qui relève simplement d ’une synchronisation entre nos comporte­
ments et le ballet planétaire ?
- Oui, dans la mesure où ces comportements restent sujets à suffisam­
ment d’indéterminisme. Car la Loi de Convergence des Parties ne peut
œuvrer que pour combler un manque de causalité. Si tout est prévu
d’avance dans ton comportement et qu’il n’est sujet à aucun aléa, alors
il sera déterminé par le passé.
- Mais alors, cela ne voudrait-il pas dire qu’un robot humanoïde, par
essence conditionné par son programme, pourrait subir une influence
des astres, à condition qu’on introduise chez lui un comportement
aléatoire ?
- Oui, à condition que ce comportement aléatoire soit réellement indé-
terministe. Mais dans la pratique l’homme n’est pas encore parvenu à
concevoir un tel robot. Aucun programme ne permet d ’induire un
comportement indéterministe, et cela n’a aucun intérêt si cela n’est pas
fait pour induire un comportement libre et contrôlable. Il faudrait pour
cela introduire cet indéterminisme dans le cerveau du robot, mais de
façon suffisamment judicieuse pour que cela n’engendre pas de com­
portement incohérent. Votre technologie est encore loin de réussir une
telle prouesse. Il faut d’abord que l’homme découvre en lui-même la
clé de son propre indéterminisme, celui qui permet à son cerveau
d’être contrôlé par son Esprit.
- Pourtant, certains physiciens comme Penrose [23] ont émis une
théorie là-dessus, en expliquant comment des effets quantiques opé­
rant dans le cerveau pourraient apporter à la conscience l ’indétermi­
nisme nécessaire pour faire émerger l ’Esprit!
- Entre cette compréhension des choses et son application dans la pra­
tique pour donner une conscience à vos humanoïdes, vous avez de
sérieux progrès à faire ! Sans compter que vous n’avez aucune idée du
procédé vous permettant d’assurer la crédibilité de l’intention affichée
par un robot, encore moins de réaliser la fonction de son libre arbitre
par le biais de l’observation.
- À ce propos, la TDC porte en elle une position originale sur la
fameuse question du rôle de l ’observateur en physique quantique.
Selon elle, la conscience de l ’observateur n ’a aucune influence sur
l ’état issu de la réduction de la fonction d ’onde, et pourtant, c ’est
grâce à cette conscience que nous faisons nos choix, et que de nou­
velles réalités se créent! Peux-tu m ’éclairer sur cette question ?
- À ton service ! Pour bien comprendre, considère-toi en train d’obser­
ver quelque chose, par exemple un beau paysage ou une jolie femme.
Dans ton champ de vision il y a bien d’autres choses à observer, mais
tu as choisi de focaliser ton attention sur ces choses. Reconnais que tu
ne transformes rien, que ta conscience n’agit pas sur ces choses que tu
observes, que tu ne fais que les faire rentrer dans ta réalité avec tout ce
qu’elles t’inspirent.
Suppose maintenant que ton observation soit intemporelle, c’est-à-dire
que tu puisses tout voir, y compris tes avenirs potentiels. Tu vas alors
te focaliser sur ceux qui t’intéressent particulièrement, et tu vas devoir
faire preuve de beaucoup d ’attention, car que ce n’est pas seulement
avec tes yeux que tu vas observer mais avec ton libre arbitre. Cette
attention que tu devras avoir vient de ton pouvoir à faire rentrer dans la
réalité le choix que ton observation te suggère. N’oublie pas que der­
rière chaque observation, un chemin a peut-être été créé pour te fournir
l’opportunité de réaliser ton intention.
Mais tu restes libre, car tu as trois possibilités. Il est tout d’abord possi­
ble que tu ne remarques même pas l’opportunité qui t’es offerte, que tu
n’y prêtes pas attention, alors qu’elle se manifeste pour toi. Dans ce
cas, tout se passera comme si elle n’avait jamais existé et ce qui sera
réalisé sera alors le potentiel sur lequel tu étais déjà aiguillé. L’autre
s’évanouira. Ton observation n’aura eu aucun effet sur la réalité: tu
n’étais pas assez éveillé.
La seconde possibilité est que tu observes cette opportunité, que tu en
saisisses le sens, mais que tu n’en tiennes pas compte. Dans ce cas, ton
observation l’aura fait rentrer dans la réalité, mais elle sera ignorée,
elle sera par exemple considérée comme un hasard, une coïncidence. Il
est possible que tu en comprennes la signification, que tu en trouves
même les clés, mais que tu t’abstiennes, ou que tu n’oses simplement
pas aborder telle personne, te fier à l’interprétation de tel signe, etc.
Peu de chose sera changé, car tu n’auras pas beaucoup dérangé l’uni­
vers, tu auras seulement provoqué quelques décalages temporels,
avancé ou reculé certaines trajectoires. La suite de ta vie restera iden­
tique à celle que tu aurais eue sans observer quoi que ce soit. Les
quelques synchronisations d’événements provoquées partiront aux
oubliettes. Au mieux, tu leur feras un clin d’œil, en reportant les chan­
gements suggérés à plus tard.
La troisième possibilité est celle du changement. Elle s’accompagne
d’une prise de conscience, suivie de la prise en compte d’un événe­
ment, d’un signe, d’une rencontre opportune, ou quoi que ce soit sus­
ceptible de changer ta vie. Tu auras alors modifié instantanément la
structure de l’univers, et pour bien plus longtemps que ces quelques
instants d’observation.
Et tout cela, sans rien faire d’autre qu’observer, puis agir tout naturelle­
ment!
Comprends-tu maintenant par quel miracle ton mental peut créer la
réalité ?
- Effectivement, c ’est assez édifiant. J ’ai pourtant écrit que la
conscience n ’y était pour rien dans le changement de réalité. Ne
serais-je pas en train de me contredire ? Ne va-t-on pas dire que je
surprivilégie l ’hypothèse que la conscience de l ’observateur joue un
rôle dans le résultat de l ’observation ?
- La subtilité de l’acte d’observation aura simplement échappé à ceux
qui le diront. La conscience n’y est pour rien, car elle est un effet et
non une cause de l’observation. Elle n’est qu’un sous-produit de ton
activité cérébrale. Ta prise de conscience ne s’installe qu’après que ton
esprit éveillé ait procédé à une évaluation de ton observation. C ’est ton
être, avec son « ouverture », qui aura permis à cette évaluation de faire
son chemin, si elle va jusqu’au bout. Tu vois bien que ta conscience
n’y est pour rien, et que même ton mental peut rester passif, comme un
ordinateur, dans cette affaire. La seule chose qui compte est la sui­
vante : vas-tu, oui ou non, préparer ou faire un choix qui t’es suggéré
par l’évaluation d’une observation, pour orienter la suite de ta vie? Si
la réponse est oui, la prise de conscience de ton choix ne fait que prési­
der à la création d’une nouvelle réalité. Ton Esprit l’aura sélectionnée
parmi d ’autres, tout simplement. Il ne l’aura en rien créée, toutes les
possibilités de réalités étant déjà créées d’avance par l’univers.
Et remarque bien que la plupart du temps, ce processus a lieu presque
inconsciemment, et que cela s’appelle l’intuition.
- Donc, si je te suis bien, le cas où la réponse est non est un cas très
général, dans une société où l ’on ignore complètement le fait que la
chance puisse être autre chose que le fruit du hasard, n ’est ce pas ?
- Ce n ’est pas tout à fait exact. Beaucoup de gens croient en leur
chance. Même s’ils n’en connaissent pas le mécanisme, ils savent se
servir de leurs opportunités et ne se posent pas trop de questions sur la
façon dont elles débarquent dans leur vie. Heureusement d’ailleurs, car
s’ils y réfléchissaient ils risqueraient de se retrouver dans un mode de
fonctionnement causal qui mettrait tout par terre.
- Ah voilà, justement, je voulais qu’on aborde cette question. Qu’est-ce
que tu appelles un mode de fonctionnement causal ?
- Le mode de fonctionnement causal est en quelque sorte le lavage de
cerveau de vos sociétés modernes. On ne peut s’y adapter qu’avec un
tel mode, car l’on risquerait d’être rejeté si l’on commençait à imposer
le mode complémentaire. Le mode causal consiste à agir dans ta vie de
façon raisonnable, tout simplement. Il s’agit de systématiquement pré­
voir, analyser, calculer, respecter des étapes précises, pour atteindre un
quelconque objectif. Connaître d’avance tout ce dont tu as besoin, pré­
parer ton itinéraire, faire un plan, apprendre à t’exprimer, lire le
manuel d’utilisation, etc. Tout, absolument tout ce que tu fais dans la
vie lorsque tu travailles ou que tu fais des projets s’inscrit dans le cadre
de la causalité, ne serait-ce que pour pouvoir obtenir l’aide d’autrui. Il
est en fait impossible de sortir de ce mode de fonctionnement, autre­
ment que de façon très parcellaire.
- Alors comment sortir de ce mode, justement ? Que serait un mode de
fonctionnement non causal? Je suppose que si l ’on n ’est pas dans un
mode, on est dans l ’autre ?
- Non, pas exactement, on peut être dans les deux à la fois, et c ’est
d ’ailleurs recommandé pour trouver le bon équilibre. Le mode de
fonctionnement non causal consiste à élever tout d’abord ton niveau de
conscience, d’éveil, ou de vibration, si tu préfères. Il s’agit de te mettre
à l’écoute de l’environnement, mais attention: sans vouloir écouter
quoi que ce soit, sinon tu retomberais dans une focalisation purement
causale, dans des pensées, des problématiques, etc. On ne peut pas tri­
cher avec soi-même. Il faut obligatoirement être « naturel » si l’on veut
être en situation de capter des opportunités non causales. Maintenant,
il est facile de comprendre qu’il vaut mieux ne pas être stressé, hanté
par des choses à faire, ou envahi par des stéréotypes ou des « ressas-
sages ». L’idéal est d’être détendu, désintéressé, contemplatif et d’ex­
ploiter toutes les marges de liberté que l’on peut avoir pour rester
attentif à l’environnement.
Mais ce ne sont que des conditions générales. Il y a des cas où lors de
vives émotions par exemple, tu es automatiquement placé en mode de
fonctionnement non causal. Bon, maintenant le reste est un peu une
question d’entraînement, car savoir saisir les opportunités demande à
ne pas tomber dans le piège inverse, qui consisterait à en voir partout.
C ’est comme faire un sport qui demande de l’adresse, un sport de
glisse par exemple et d’ailleurs c’est une bonne image.
- Ah bon, pourquoi les sports de glisse sont-ils une bonne image ?
- Parce qu’il faut savoir « surfer » sur sa vie. Surfer, cela consiste à res­
ter le plus en hauteur possible, ou encore éveillé, pour ne pas tomber
dans le creux de la vague, sinon tu te retrouves contraint et forcé. Et
l’avantage de ce sport est que tu n’as pas le temps de réfléchir pour
savoir si tu dois faire ceci ou cela. A tout moment, il te faut agir de
façon instinctive. Les actes instinctifs ou encore intuitifs relèvent d’ail­
leurs d’un fonctionnement non causal. A chaque opportunité, c’est le
premier instant qui compte et ce qui te vient immédiatement à l’esprit
est exactement ce que tu dois suivre. Si tu réfléchis trop, tu loupes le
coche. Cela dit, il faut aussi savoir patienter, mais sans impatience. Car
une bonne opportunité est par nature imprévue et tu ne choisis pas le
moment où elle débarque. Donc, il vaut mieux oublier tout cela et
vivre normalement, mais éveillé, tout en sortant du quotidien le plus
possible et en gardant à l’esprit que la vie étant magique, il n’y a
aucune raison de t’inquiéter pour savoir si tu vas sortir de telle situa­
tion ou non, et comment tu vas faire. Le mode non causal t’apporte
automatiquement les solutions, pour peu que tu les demandes.
- J ’ai introduit l ’esprit, puis l ’amour, puis l’âme comme s ’il s ’agissait
d ’une succession logique de conséquences de la double causalité.
Cette émergence de l ’âme, ainsi composée, est-elle obligatoire ?
- C’est un modèle et je n’ai pas à l’évaluer à ta place. La question de
savoir si tu es dans le vrai ne se pose même pas : ton modèle a son uti­
lité et doit faire son œuvre. Tu as identifié l’« âme » comme étant cette
partie de la conscience qui échappe à ton cerveau, et tu lui as donné
corps en lui attribuant une géométrie et une amplitude. Pourquoi pas?
Dans ce cas, l’esprit n’est rien d’autre que la géométrie de l’âme, et
l’amour la mesure de son amplitude. Ton modèle est simple et cohé­
rent, car ces deux choses fondamentales que sont l’Esprit et l’Amour te
permettent d’incarner respectivement l’intention et ses probabilités
d’actualisation. C’est en cela qu’elles émergent obligatoirement de la
double causalité.
Avec un tel modèle, tu rejoins cependant les écrits spirites, ce qui t’ap­
portera des partisans et des oppositions. Car tu sors de ta réserve mini­
maliste. Je pense à cette propriété de l’au-delà au sujet de laquelle tu
t’es documenté [10] [19] et qui autorise un déplacement instantané de
l’esprit à tout endroit, sous l’influence directe de la volonté, de la pen­
sée. Je pense aussi à cette sensation d’amour omniprésente dont témoi­
gnent les personnes transitoirement décédées, lorsqu’elles sont accom­
pagnées pour rentrer dans la lumière de l’au-delà et sortir du tunnel.
Je ne t’encourage pas à justifier l’existence de l’au-delà, car ta position
se veut minimaliste, bien que tu aies raison de ne pas ignorer ce qui en
est rapporté, lorsque c ’est conforme à ce qui peut être immédiatement
déduit de la double causalité.
Le déplacement de l’esprit dans cet espace où sont mémorisés hors du
temps tes potentiels est parfaitement similaire au déplacement hors du
temps de ton imagination lorsqu’elle s’occupe de projections d’avenir.
Mais depuis l’espace à quatre dimensions qui te limite, tu ne peux pas
en avoir autre chose qu’un aperçu très flou.
Demande-toi si tes rêves ne constitueraient pas après tout, des retours
de visites de ton Esprit. Ces retours ne sont-ils pas très logiquement
incohérents, du fait qu’ils sont générés par ses déplacements dans des
espaces parallèles, hors de toute succession causale infligée par l’écou­
lement du temps? Cela n’explique-t-il pas l’étrangeté et l’incohérence
de tes rêves ?
- J ’énonce que la nature du fluide vital qui intervient dans la seconde
causalité est celle de l ’amour. Qu’en penses-tu ?
- Je vois au moins deux raisons fondamentales à cela, en dehors des
explications « terre à terre » que tu as données du cycle de l’amour. La
première est qu’il s’agit d’un fluide d’attraction universelle des trajec­
toires de vie, et la seconde est qu’il s’agit d’une substance qui vous est
commune à tous, qui tend à ne pas vous différencier, à rejeter la notion
d’individualité et surtout d ’ego. L’amour est ce qui fait que tu es la
même personne que ton lecteur, ou que tu t’identifies à lui en faisant
tous les efforts visant à anticiper ses réflexions. Ainsi tes pensées pour­
ront évoluer à travers d ’autres que toi, et s’en profileront d’autres
expressions qui à chaque fois correspondront au meilleur de ce
qu’elles peuvent donner. Car vous devez tous comprendre que vous
faites partie d’un seul organisme, celui de Dieu [32], dont vous êtes
tout à la fois les capteurs et les acteurs.
Mais n’oubliez pas le plus fondamental : l’amour est associé à la liberté
dans le fonctionnement du moteur de votre libre arbitre !
- Comment à ton avis la compréhension de la double causalité peut-
elle modifier nos comportements dans notre vie quotidienne ?
- Elle les affecte déjà par l’intermédiaire des croyances et pratiques
religieuses. Mais il est vrai que pour faire de la magie au quotidien,
c ’est une tout autre histoire. Il faudra à l’homme beaucoup de progrès
pour être capable de changer ses habitudes de vie de telle façon qu’il
puisse assurer dans sa vie quotidienne les attitudes mentales propices
aux effets de la seconde causalité. Cela demande en effet de savoir
« vibrer » à un niveau supérieur d’élévation spirituelle, et c’est plutôt
incompatible avec votre situation d’esclaves modernes de la consom­
mation.
Mais cette magie se produit réellement dans votre vie de façon occa­
sionnelle, lorsque l’émotion et l’amour sont tous deux présents et que
vous êtes dans une période de grands changements.
Par contre, j ’aimerais te signaler une façon de faire de la magie au
quotidien, qui est très facile et qui ressort bien de la seconde causalité,
et que tous autant que vous êtes avez tendance à oublier, bien que tant
de messagers vous l’aient ressassée.
- Ah bon ? Je ne te suis pas. Quelque chose m ’a échappé. Ne te contre­
dis-tu pas ? Tu viens de me dire que pour générer les effets de la
seconde causalité il faut vibrer à un niveau supérieur!
- Je te parlais de modifier l’avenir. Je te parle maintenant de modifier
le passé. C’est différent, car il n’y a plus besoin de « vibrer » comme
pour transmettre une intention dans l’avenir.
- Veux-tu dire que l ’on peut transmettre des intentions dans le passé?
Mais même dans ce cas, je ne vois pas comment cela pourrait être plus
facile, bien au contraire, car je vois mal comment on pourrait modifier
le passé!
- Non, on ne peut pas transmettre des intentions dans le passé, pas plus
que de le modifier, puisqu’il n’existe plus en tant que tel! Seules ses
traces subsistent, et le passé en résulte de façon déterministe, en étant
recréé automatiquement, instantanément. Comprends bien qu’en effa­
çant ses traces, le passé se reconstruit et change, en réintroduisant de
l’ordre ! Et c ’est bien là tout le véritable sens de l’irréversibilité !
- Le passé se reconstruit! Mais c ’est incroyable. Comment peut-il se
reconstruire sans nous, sans observateurs, puisque nous sommes les
co-créateurs de l ’univers ?
- Pas du tout, cette co-création n’est qu’apparente. L’homme ne crée
rien, il ne fait que choisir ce qui est créé, et encore: seulement dans le
sens du futur. Dans le sens du passé, l’univers se crée tout seul, sans
avoir besoin d’observateurs. Sinon, comment expliquerais-tu la créa­
tion du soleil, à une époque où personne ne pouvait y assister?
Écoute bien : il y a quelques années tu t’es fait mal au genou en tom­
bant, mais tu ne t’en souviens plus. Comme personne ne t’a vu tomber,
ou te plaindre, et que ton genou a guéri toutes ses séquelles, le passé
reconstruit par ta Loi de Convergence des Parties est « passé » à côté
du fait que tu sois tombé ! Dans ce nouveau passé tu n’es donc pas
tombé du tout, et ce rappel que je t’en fais maintenant n’est pas une
trace à prendre en compte, car je ne suis pas un acteur de ton monde.
- Mais comment est-ce possible ? Comment est-il possible qu ’un passé
qui a bien été vécu ne soit pas mémorisé par l ’univers, alors q u ’il
mémorise une quantité impressionnante de futurs qui n ’ont pas encore
été vécus!
- N’oublie pas qu’à chaque fois que tu changes de futur, tu changes
d’univers ! Le simple fait de passer d’un univers parallèle à un autre a
pour effet de tout changer, le futur et le passé en même temps ! Sauf
que le passé ne pourra évidemment pas changer, aussi longtemps
qu’on l’oblige à justifier les traces qu’on en conserve dans le présent !
Quant au futur c ’est complètement différent puisqu’il s’agit de vécus
potentiels. Le fait qu’ils soient multiples ne change rien !
- C ’est étonnant, car j ’aurais cru le passé et le futur plus symétriques,
d après la double causalité, bien qu’il semble qu’on ne « repasse » pas
le passé. Mais au fait, je ne vois pas le rapport avec la magie prati­
quée au quotidien !
- Tu ne vois pas ? Que se passe-t-il dans le futur avec la seconde causa­
lité? Tu l’arroses d’amour, mais c’est compliqué, il faut respecter un
cycle, faire preuve de détachement, etc. Alors que pour arroser le pré­
sent, rien de plus facile. Il te suffit de faire le bien autour de toi !
- Ah bien! Alors ça, c ’est bien, j ’approuve! Tu veux dire que ce bien va
couler en direction du passé, partout où il est encore possible d ’y
changer quelque chose, et que cela va donc... ma foi, qu’est-ce que ça
peut bien pouvoir produire ?
- Cela va aider à effacer les traces négatives, tout simplement ! C ’est
une simple conséquence de ta Loi de Convergence des Parties qui a
tendance à tout ordonner, donc à tout simplifier ! dès qu’une trace du
passé s’efface, le passé est instantanément simplifié ! Que l’amour aide
à faire oublier le passé, tout le monde le sait! Mais ce que les gens ne
savent pas, c’est que cela peut non seulement l’effacer mais surtout le
remplacer par un autre passé bien plus avantageux ! car en coulant
dans le passé, là où il peut être modifié, non seulement l’amour le sim­
plifie mais il l’harmonise, il le guérit !
- Quoi! Mais je n ’ai jamais entendu une chose pareille! Cela voudrait
dire que les mythomanes par exemple auraient raison! Car ce sont des
spécialistes pour oublier les traces du passé et les remplacer par ce
qu’ils veulent, pour nier le mal qu’ils font par exemple! Cela justifie­
rait le mensonge !
- Pas du tout, et c ’est même l’inverse, pour plusieurs raisons. Tout
d’abord, se mentir à soi-même est le meilleur moyen de ne pas oublier
le passé, car il reste profondément mémorisé dans l’inconscient.
Ensuite, un mensonge est par définition une négation des traces du
passé, sinon il ne serait jamais considéré comme tel par les autres. Il a
pour effet contraire d ’inciter celui qui le détecte à ne surtout rien
oublier. Donc au final, personne n’oublie, et le mensonge est ainsi le
pire des moyens pour oublier le passé, tout comme la peur d’ailleurs.
La peur est fondée sur l’idée qu’un passé négatif va se reproduire.
C ’est à nouveau un moyen d’empêcher l’effacement des traces du
passé.
- Donc si je comprends bien, le meilleur moyen d ’effacer les traces du
passé, c ’est l ’amour?
- Exactement, et là aussi pour plusieurs raisons. Parce que l’amour va
réarranger les situations passées, là où elles sont oubliées, pour
construire de nouvelles situations qui vont causalement justifier que
cet amour soit déversé dans le présent. Là est toute la magie de
l’amour. Lorsque vous le donnez, c ’est à n’y rien comprendre pour
vous, car tout se passe comme si vous deviez vous préparer à vivre
quelque chose qui va expliquer pourquoi vous l’avez donné...
- Tu veux dire que la récompense viendrait avant le don ?
- Exactement. Ne parlais-tu pas d’une boucle de rétroaction? Cette
boucle et ton cycle de l’Amour sont une seule et même chose.
- C ’est ce qui expliquerait pourquoi certaines récompenses sont
débordantes, sans respect du... heu... comment dit-on ?
- Le juste retour !
- Oui, voilà, et c ’est ce que je ne comprends pas encore tout à fait.
- Si on veut, mais c’est mieux que cela. Il n ’y a pas de juste retour avec
l’amour. Il y a une amplification incroyable de ses effets. Tellement
incroyable qu’il vaut mieux pour vous qu’il se transforme en magie...
- Ah bon, et pourquoi ?
- Parce que pour vous le bonheur est ainsi plus facile à vivre...
C’est pourquoi l’amour se transforme en magie lorsqu’il est vraiment
débordant. En général, il se transforme en bien d’autres choses...
- Quoi donc ?
- D’où crois-tu que vous viennent toutes vos idées nouvelles, toutes
vos énergies créatives ?
L’amour se canalise en créations !
L’amour est à l’origine de toute création, y compris celle de l’univers,
c’est pourquoi Dieu est Amour.

Résumé du chapitre XX

Dans ce chapitre, nous voyons se dessiner:


- Une voie d’explication à tous les phénomènes que nous rangeons
habituellement sur le compte de l’irrationnel: divinations, effet pla­
cebo, guérisons miraculeuses, parapsychologie, astrologie, etc.
- De nouvelles perspectives sur la façon d’aborder ces mystères qui
traversent les siècles et dont nous pouvons maintenant évaluer la por­
tée, en comprenant enfin leurs fondements non dénués de vérité.
- Le pouvoir extraordinaire du don de soi dans la guérison et de
l’amour dans l’harmonisation de toutes les situations.
Car bien au-delà du juste retour - causal - du don de soi, celui qui met
en route ou qui entretient le cycle de l’amour réalise la magie qui
amplifie considérablement ses effets positifs.
Et enfin, l’expression de l’amour en créations, l’amour étant l’énergie
créative qui caractérise l’expression même de l’Esprit.
Cinquième partie

Conférence
XXI.
Conférence
Où après nous avoir conduits jusqu’au col de l ’Ange
pour en contempler le panorama toujours mobile, on nous enseigne
à jouer avec une télécommande de l'espace-temps...

Depuis la première édition de ce livre j ’ai donné une douzaine de


conférences, certaines à contenu scientifique comme à l’Institut
Métapsychique International (2011) ou à l’Institut de France (2012),
d’autres à contenu plus accessible au grand public et notamment dans
le cadre de festivals comme « Chimeria » (2012) ou « Spiritualité en
Pyrénées » (2013). Cette cinquième partie en deux chapitres (confé­
rence et questions) présente une synthèse de ces conférences comme si
je n’en avais fait qu’une, en conservant le langage parlé autant que
possible, plus facile à retranscrire et plus vivant, et en reportant dans
les questions ce que je n’ai pas inclus dans la synthèse afin de ne pas
en alourdir le contenu.

Le parc de la pensée
Bonjour à tous et merci pour votre présence. Mon objectif dans cette
conférence est de vous montrer qu’il existe un chemin de randonnée
qui relie la science et la spiritualité. Ce chemin, je passe mon temps à
le débroussailler, mais le plus difficile n’est pas là, c’est plutôt d’arri­
ver à sortir du parc de la pensée. De quoi s’agit-il?
La science actuelle est fondée sur quatre piliers que sont le détermi-
nisme, le hasard, le matérialisme et la causalité. On peut les voir
comme quatre frontières qui délimitent un parc, celui de la pensée soi-
disant rationnelle.
Le déterminisme est un postulat qui exprime l’idée que tout ce qui
constitue la réalité dans l’univers est créé exclusivement de façon
mécanique, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de place pour l’esprit ni pour
Dieu. Stephen Hawking l’a bien montré dans son dernier livre [1].
Selon lui, nous n’avons pas besoin de Dieu dans un univers régi par le
déterminisme puisque c ’est la mécanique qui gouverne toute seule. Il
n’y a pas non plus de place pour notre libre arbitre. Or il faut savoir
que ce postulat a été remis en question en physique dans les années 80
et aujourd’hui ce pilier s’est effondré. Il a commencé à s’effondrer au
moment où j ’ai démarré ma carrière de physicien et c’est pourquoi j ’y
ai été très sensible. Il est maintenant tout à fait admis dans différentes
branches de la physique que le déterminisme est une erreur, sinon une
simple hypothèse largement discutable, car la nature décrite par les
physiciens est indéterministe. J’ai bien dit indéterministe et non pas
seulement imprévisible.
Malgré cela, les physiciens tiennent quand même à leur déterminisme
car toutes leurs équations sont fondées dessus. Heureusement, le
hasard les sauve de cette situation contradictoire car on peut le mettre
en équations via les probabilités. En fait, dans l’idée des physiciens qui
croient à ce postulat, plus ou moins consciemment d’ailleurs, le monde
reste déterministe mais à leurs yeux, il est légitime d ’introduire le
hasard en physique lorsqu’on ne comprend pas encore les causes. Pire
encore, beaucoup d’entre eux n’hésitent pas à dire qu’il existe même
un vrai hasard sans causes, comme si nous avions un Dieu qui joue
aux dés. Donc on utilise le hasard en physique à toutes les sauces, pro­
visoirement ou en invoquant le Dieu Hasard, à chaque fois que la phy­
sique n’arrive pas à trouver des causes. En fait les scientifiques parient
sur le fait qu’ils arriveront un jour à trouver les causes, voilà tout,
parce qu’ils veulent que tout soit mécanique. Et donc ils font un usage
démesuré du hasard pour combler les insuffisances de la mécanique,
par exemple en physique statistique et en mécanique quantique... mais
aussi en biologie, car le darwinisme est également un usage démesuré
du hasard. Tout cela sert à préserver le socle du déterminisme. Le
hasard est comme une sorte de plâtre qui sert à masquer les fissures,
que dis-je, les grosses failles de la science.
Eh bien, à la fin des années 90, ce deuxième pilier du hasard est
tombé. Donc j ’ai été témoin de cela aussi. Seuls les physiciens en sont
témoins, les autres ne le savent pas encore parce que les physiciens
attendent pour l'affirmer haut et fort, ils n’arrêtent pas d’attendre car il
faut que ce soit confirmé étant donné que c’est tout de même impor­
tant, car cela reviendrait à dire aux gens que la physique est mal fon­
dée, ce qui n’est pas sérieux, d’autant plus que ça n’empêche pas la
mécanique de fonctionner.
Comment le hasard s’est-il donc effondré? On a découvert qu’il était
faux d’attribuer le hasard de certains événements quantiques, voire
même macroscopiques, à notre ignorance des causes. Il y a eu des
expériences qui ont montré que le hasard est forcément quelque chose
qui met enjeu des informations extérieures à notre espace-temps, donc
par définition sans causes. Mieux que ça encore, on a montré que ce
hasard sans causes s’introduit dans l’espace-temps sous forme d’infor­
mations non locales. Il n’est alors plus possible que ce hasard rede­
vienne un jour déterministe parce qu’on a une entrée d’informations
depuis l’extérieur de l’espace-temps, donc hors du champ de la phy­
sique, depuis le monde non manifesté si vous préférez, qui se fait
simultanément à plusieurs endroits de l’univers où on observe les
mêmes informations, sans qu’il puisse y avoir une relation de causalité
qui l’explique. Ces endroits peuvent être distants de plusieurs années
lumière par exemple. Il est en effet prouvé par l’équipe d’Antoine Sua­
rez [391 et Nicolas Gisin [40], dont les expériences ont été renouvelées
dans les années 2000, que le hasard dû à notre ignorance des causes
n’existe pas, ce qui fait définitivement sombrer les deux piliers du
déterminisme et du hasard.
Troisième pilier, le m atérialism e, c ’est-à-dire l ’idée que notre
conscience est un produit du cerveau. Cette idée était à la mode
lorsque j ’ai commencé ma carrière de physicien dans un laboratoire on
l’on fait beaucoup de mécanique des fluides. On espérait comprendre
l’émergence des systèmes vivants, essentiellement après les travaux
d’Ilya Prigogine [41]. Il y a eu toute une mode, à travers les automates
cellulaires notamment, qui a fait penser aux physiciens qu’on allait
peut-être découvrir la manière dont la vie, et ensuite la conscience,
émergent des systèmes complexes. Eh bien tout cela est retombé
comme un soufflet vers le début des années 2000, et aujourd’hui les
physiciens qui sont dans le mainstream - plutôt francophone on va dire
- ne croient plus à cela, et personnellement je n’y crois plus pour une
autre raison. J’y croyais au début de ma carrière mais j ’ai passé ma vie
à développer des robots industriels et j ’ai même travaillé sur des robots
humanoïdes. J’ai été spécialisé dans le développement de leur système
de vision, je sais réaliser un robot qui reconnaît des formes très com­
plexes avec des algorithmes intelligents et finalement, je ne vois vrai­
ment pas l’émergence de la conscience là-dedans. On ne peut toutefois
pas dire que ce troisième pilier tombe de cette manière, c’est plutôt
parce qu’il n ’avait déjà pas de raison d ’être, car l ’idée que la
conscience est un produit du cerveau est une hypothèse qui dès le
départ ne tient pas la route. On ne sait pas expliquer les qualias par
exemple (les perceptions propres à la conscience) et on ne va en débat­
tre ici car cela mérite une conférence entière. Donc on va dire que cette
idée matérialiste est un troisième pilier illusoire qui s’est effondré faute
de raison d’être.
Quatrième pilier, c’est le seul qui tient encore, enfin à peu près, c’est
celui de la causalité, mais depuis l’année 2010 environ les physiciens
ont fait des expériences et des publications frappantes qui ont montré
la possibilité inverse de la rétrocausalité, c’est-à-dire que les effets qui
normalement suivent les causes pourraient les précéder dans certains
cas, spécialement en mécanique quantique. Pour vous faire compren­
dre cela, il faut savoir que la mécanique quantique travaille sur des
possibilités simultanées. Supposez par exemple que vous ayez besoin
de descendre à la ville pour aller chercher du pain. Vous avez donc
l’intention d ’aller chercher du pain mais vous ne savez pas encore
comment vous allez faire, si quelqu’un va vous emmener ou si vous
allez y aller seul, à pied, en voiture, etc. Il y a différentes possibilités
simultanées et finalement, vous les réduisez en une seule en décidant
d’y aller seul et en voiture, alors que s’est-il passé? Le physicien nor­
mal dira que vous avez pu aller chercher du pain parce que vous avez
une voiture, donc il vous dira que la cause c ’est la voiture, alors
qu’évidemment la cause c ’est votre intention, suivie de votre choix
entre les possibles. Or comme nous allons le voir, dans notre espace-
temps où tout est simultané, le passé, le présent et le futur, l’univers
n’attend pas le passage du temps pour mettre en place la réalisation de
votre choix, puisqu’elle est certaine. Il faut vous habituer à cette idée
fondamentale, c’est pourquoi je vous en parle d’avance, car c’est l’idée
maîtresse. C ’est le concept que votre intention se réalise avant ses
moyens. L’effet de l’intention s’est donc réalisé dans le futur - sous
forme de potentiels accrus - avant que la cause mécanique, la voiture,
n’entre en jeu, car l’effet était certain avant que le moyen n’existe.
Nous verrons ainsi que ce qui se produit dans le futur se produit déjà
maintenant et que ce qui s’est produit dans le passé se produit encore
maintenant, car la théorie de la relativité décrit un univers où tout est
simultané. Ceci est d’ailleurs compatible avec la vision bouddhiste où
tout est contenu dans le présent. L’idée d’une épaisseur temporelle
entre le futur et le présent est une idée fausse, il n’y a qu’une épaisseur
d’événements reliés par des causes, il n’y a pas d’épaisseur de temps
car ce temps-là n’existe pas, mais nous allons y revenir.

Le col de l’Ange
Ce que je vous propose maintenant, c’est de vous montrer le chemin
que prennent les physiciens pour s’éveiller à la spiritualité automati­
quement. Je veux dire par là que les progrès de la science amènent
automatiquement les physiciens à découvrir la spiritualité, et c ’est ce
que je crois important de dire. Je vais utiliser pour cela des métaphores
en vous parlant de randonnées, de territoires, de montagnes, etc.
Le déterminisme est une barrière que je matérialise par une falaise qui
comporte deux failles, celle de la mesure quantique et celle du chaos
macroscopique, par lesquelles on peut descendre dans la vallée de l’in­
certitude, qui n’est pour l’instant explorée que par des gens qui se font
cataloguer dans l’ésotérisme parce ça descend très fort et hors de vue
du parc de la pensée. Au sud de cette vallée il y a la montagne noire
surplombée par un nuage noir, qui représente tout ce qu’on n’a pas
encore compris en physique et qui pose un gros problème. Au nord du
territoire de la pensée il y a la chaîne des Dieux, quelque chose qu’on
voit au loin et qui est en fait souvent considéré comme une illusion
d’optique, une croyance, par ceux qui sont les plus prisonniers des
croyances. Nombreux parmi eux veulent ériger là aussi une barrière
pour nous empêcher d’y aller. A l’est il y a la colline des paradoxes, car
on sent l’avènement prochain des technologies de la conscience, et de
cette colline décollent les gens qui cherchent à faire une sorte de magie
avec le nouveau paradigme, quelque chose entre la kabbale et la parap­
sychologie. Mais pour y aller ils doivent passer outre les barbelés de la
causalité installés par le modèle standard de la physique. Et puis nous
avons à l’ouest le ravin de la création avec la décharge du hasard et le
gouffre de l’illusion, car nous avons l’habitude de mettre sur le compte
du hasard tout ce qu’on ne comprend pas. On dit « c’est du hasard »,
donc on le met à la poubelle, car si on ne le fait pas on prend le risque
de tomber dans le gouffre de l’illusion.
Nous avons donc au centre du territoire de la pensée, de notre imagina­
tion et surtout de nos croyances, ce que j ’appelle le parc de la pensée,
délimité par ces quatre frontières qui veulent nous interdire d’en sortir:
(1) la falaise du déterminisme, (2) le ravin du hasard ou encore de la
création, (3) le mur du matérialisme et enfin (4) les barbelés de la cau­
salité. Donc je vous propose de vous accompagner sur le chemin qui
permet d’en sortir dans les meilleures conditions pour aller vers la spi­
ritualité, et pour cela nous allons descendre dans le ravin de la création
pour remonter de l’autre coté, c’est-à-dire du côté où il n’y a pas de
hasard. Car toute la science et tout le parc de la pensée se maintiennent
encore aujourd’hui grâce au hasard, ce hasard qui a le grand intérêt de
masquer toutes les failles apparues aujourd’hui en physique. Eh bien
nous allons voir qu’il n’y plus de hasard quand nous allons au col de
l’Ange, en prenant soin d’éviter le gouffre de l’illusion qui représente
un danger lorsqu’on s’aventure de l’autre coté. C’est pourquoi il faut
se faire accompagner par un guide, or je me suis improvisé un tel
guide.
Qu’est-ce donc que le col de l’Ange? Que découvre-t-on en y arri­
vant? Pour vous convaincre de me suivre, je vais vous dire d’avance
ce qu’on y découvre. Il s’agit de trois renversements de la pensée :
Le premier renversement, c ’est qu’auparavant nous pensions que la
réalité se créait dans le présent et automatiquement. Or au col de
l’Ange on constate que la réalité est déjà créée dans le futur et qu’elle
peut encore évoluer. Je ne suis pas le seul à le dire, je suis même
accompagné par Étienne Klein qui fait partie des quelques physiciens
qui sont allés visiter le col de l’Ange.
Le second renversement concerne non plus le temps mais l’espace ou
plutôt ce qu’il contient. Avant nous pensions que la réalité était indé­
pendante de l’observateur, or au col de l’Ange on s’aperçoit que la réa­
lité créée par l’univers dépend de nos observations, et que par-dessus
le marché elle pourrait même dépendre de nos intentions. Je parle ici
bel et bien de notre futur.
Le troisième renversement concerne l’information, la révolution de
l’information physique. Avant nous pensions que la création se faisait
mécaniquement, sinon par hasard auquel cas nous aurions un Dieu qui
joue aux dés, or aujourd’hui on pense de plus en plus, et c’est même de
plus en plus clair, que la création de la réalité a besoin d’informations
extérieures à l’espace-temps. Alors ça, je vous le dis mais c ’est du
lourd, car c’est à la fois extraordinaire et démontré. Il va vous falloir
du temps pour assimiler cela aussi.
Pour vous y aider, je vais commencer par vous parler des premiers ran­
donneurs qui au siècle dernier ont tenté l’ascension du col de l’Ange,
mais qui n’y sont pas arrivés. En fait, pour y arriver ils auraient dû se
mettre en cordée. Il s’agit d’Einstein, de Nietzsche et de Bergson.
Einstein a déclaré dans une lettre à son ami Besso : « Pour nous, physi­
ciens dans l’âme, la séparation entre passé, présent et futur ne garde
que la valeur d ’une illusion, si tenace soit-elle ». C’est ce que je vous
disais tout à l’heure, il n’existe pas d’écart temporel entre un événe­
ment présent et un événement futur, simplement on ne sait pas com­
ment concevoir l’événement futur bien qu’il soit déjà là.
Nietzsche a écrit dans « Humain, trop humain » [42] quelque chose de
très méconnu, probablement parce que ses lecteurs n’ont pas dû le
prendre au sérieux : « Notre destin exerce son influence sur nous,
même lorsque nous ne le connaissons pas encore: c ’est notre avenir
qui détermine notre présent. » Heureusement il a aussi écrit ailleurs
quelque chose qui confirme sa pensée: « le futur influence le présent
autant que le passé » Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire?
Le problème, c’est que si notre futur est déjà réalisé, conformément à
la vision déterministe d’Einstein, et si par-dessus le marché notre pré­
sent est déterminé à la fois par le passé et par le futur, alors nous
sommes ultra-déterminés et par conséquent totalement prisonniers. On
a donc perdu toute possibilité de libre arbitre.
Heureusement, nous avons Bergson qui écrit dans « Le possible et le
réel » [43]: « A quoi sert le temps?... Ne serait-il pas le véhicule de
création et de choix? L ’existence du temps ne prouverait-elle pas qu’il
y a de l’indétermination dans les choses? ». On aimerait bien qu’il ait
raison, mais comment voulez-vous qu’il y ait de l’indétermination
dans les choses si notre présent fait l’objet d’une double détermination,
à la fois par le passé et par le futur? C’est la question à laquelle nous
allons répondre en montrant que lorsqu’on est au col de l’Ange, il est
tout à fait possible de concilier ces trois points de vue, c’est-à-dire
qu’ils auraient tous les trois raisons.
Toujours pour vous encourager dans l’ascension du col de l’Ange, je
vais maintenant citer les nouveaux randonneurs, c ’est-à-dire ceux du
nouveau millénaire, qui durant ces trois dernières années ont fait des
déclarations fracassantes en revenant du col, et on peut dire qu’il y a
une véritable révolution en physique actuellement.
Thibault Damour, un illustre physicien de l’Institut des Hautes Études
Scientifiques, spécialiste de la relativité [44] et de la cosmologie des
trous noirs, a déclaré: « Le futur est déjà là ...» . Ah bon, mais si le
futur est déjà là, pourquoi doit-on l’attendre alors? Tout simplement
parce qu’il y a trop d’informations à absorber, trop d’enchaînements de
causes à effets. C ’est la causalité qui nous sépare du futur, pas le
temps. Et il a dit aussi : « Le temps est fondamentalement réversible ».
Ceci peut se comprendre si l’on remplace le temps par la causalité, car
c’est la causalité qui est réversible, pas le temps, étant donné que les
équations de la physique sont réversibles. Mais vous allez mieux com­
prendre en écoutant un autre randonneur :
Carlo Rovelli, un autre grand physicien, père de la gravité quantique à
boucles, a écrit [45]: « Le temps n ’existe pas... ». Donc vous voyez,
cela ne peut pas être le temps qui nous sépare du futur, seulement la
causalité, et il a écrit aussi: « Nous devons apprendre à penser le
monde non comme quelque chose qui évolue dans le temps, mais
d ’une autre façon »
Mais comment est-ce possible? De quelle autre façon? Est-ce que cela
voudrait dire qu’il y aurait un deuxième temps? Les choses n’évolue­
raient pas dans le présent qui n’existe pas, et il y aurait un deuxième
temps dans lequel évolueraient quand même les choses? Comment
cela? Carlo Rovelli est pourtant un physicien très respectable à la
réputation internationale.
Étienne Klein, dont j ’apprécie beaucoup les écrits [12] [13] [14] et qui
a une crédibilité médiatique en représentant souvent la science phy­
sique en France, quelqu’un qui se doit donc normalement d’être rai­
sonnable dans ses déclarations, car il informe un large public tout de
même, suggère dans l’une d’elles la chose suivante: « l ’idée que le
futur existe déjà, que c ’est une authentique réalité, mais pas complète­
ment configurée, pas intégralement définie, q u ’il y a encore des
espaces pour la volonté, le désir, l ’invention... » et il en déduit en toute
logique : « ..n e serait-il pas temps de commencer à coloniser intellec­
tuellement l’année 2050? »
Comprenez-vous ce que dit là Étienne Klein? Il se questionne sur la
possibilité de commencer à coloniser intellectuellement - c’est-à-dire
d’influencer par la pensée - l’année 2050. Il n’a pas osé nous dire plus
clairement que nous pourrions influencer par la pensée une authen­
tique réalité déjà présente dans le futur afin de mieux la configurer,
parce qu’il fallait noyer ce poisson après l’avoir sorti de l’eau : juste le
montrer brièvement. Il s’agit en effet d’une proposition vertigineuse et
donc courageuse de la part d’un orateur public comme Étienne Klein.
Eh bien figurez-vous qu’il est allé encore plus loin récemment, en
mai 2013 je crois, en prenant un exemple comme celui dont je vous ai
parlé tout à l’heure: la personne qui a l’intention d’aller chercher du
pain sans savoir encore par quel moyen, pour montrer la possibilité
d’une rétrocausalité entre la réalisation de l’intention et la réalisation
du moyen: vous êtes allé chercher votre pain avant d’avoir trouvé le
moyen de le faire, car dans l’espace-temps, il se pourrait bien que les
choses certaines se mettent en place avant les choses incertaines, c’est
tout, c ’est de la logique rationnelle pure. Bon, je me répète, mais j ’in­
siste là-dessus car vous allez mettre des années avant de vous habituer
à cette idée-là.
Et enfin, Antoine Suarez [39], un physicien quantique qui collabore
avec Nicolas Gisin [40] à Genève, tous deux célèbres pour leurs expé­
riences, nous dit que: « Pour avoir une matière qui fonctionne de
façon sensée, nous avons besoin d ’une coordination qui n ’est pas
matérielle... et qui est insensible à l ’espace et au temps ». Donc là, on
retrouve l’idée que l’espace-temps est immergé à l ’intérieur d ’un
monde non manifesté qui informe notre monde manifesté avec des
informations qui viennent de l’extérieur de l’espace-temps. Or ceci
l’oblige à évoluer, à ne pas rester figé, donc on retrouve ici l’idée que
notre espace-temps évolue hors du temps et cela répond à l’interroga­
tion de Carlo Rovelli. C ’est aussi la porte ouverte à l’Esprit, et il faut
effectivement grimper au col de l’Ange pour commencer à voir le pic
de l’Esprit. Et effectivement, Antoine Suarez l’a bien vu, car il a fait
une conférence en mai dernier dans un colloque, organisé par Jean
Staune [46] [47] à Paris, où sont intervenus des physiciens qui s’inté­
ressent au phénomène de la conscience et qui adhèrent à la notion
transcendantale de l’Esprit, en faveur de la spiritualité, et j ’en faisais
partie.

L’Espace-temps flexible
Jusque-là, je n’ai fait que reprendre des déclarations de physiciens ou
philosophes très connus. Maintenant, moi qui suis un grand randon­
neur, je me suis permis de débroussailler moi-même un chemin vers le
col de l’Ange. Il peut y avoir d’autres chemins, mais je vais vous par­
ler maintenant du chemin que j ’ai tracé pour y aller. Ce chemin
consiste à réconcilier Einstein, Nietzsche et Bergson en disant que le
futur est déjà réalisé, que la réalité ne se crée pas dans le présent et que
le futur peut changer ici et maintenant, sous l’influence de nos inten­
tions. J ’introduis donc le libre arbitre et j ’en tire toutes les consé­
quences. Pour cela j ’utilise une représentation de l’espace-temps sous
la forme d’un cylindre flexible. Une tranche circulaire de ce cylindre
représente un point du temps, le présent par exemple. Elle a la forme
d’un disque qui remplace une sphère qui contient tout l’espace-temps.
On enlève ainsi une dimension d’espace pour pouvoir représenter l’es-
pace-temps en trois dimensions, donc la longueur du cylindre repré­
sente le temps. Maintenant, supposez que nous ayons un libre arbitre
authentique. Dans ce cas la forme de ce cylindre, ou en tout cas ce
qu’il contient, est obligée de changer sous l’influence de nos inten­
tions : il faut donc que ce cylindre soit flexible.
Or nous avons là un problème car ni la théorie de la relativité ni la gra­
vité quantique à boucles ne décrivent un cylindre d’espace-temps
flexible. Elles décrivent un cylindre d’espace-temps figé, et pour qu’il
en soit autrement il faudrait rajouter des dimensions. Or en quatre
dimensions, il est impossible de faire bouger ce cylindre. Heureuse­
ment, il y a une porte de sortie, car la théorie de la gravité quantique
fait vibrer l’espace-temps, elle le fait donc bouger, mais c’est à une
échelle infiniment petite de dix à la puissance moins trente-cinq
mètres. C’est là que mon apport personnel intervient. Ma proposition,
que j ’ai publiée [48] [49], est de dire que des vibrations de l’espace-
temps, même si elles sont infinitésimales, sont susceptibles de modi­
fier considérablement, à l ’échelle macroscopique, les trajectoires
d’événements et donc la structure matérielle de l’espace-temps. Cela
se produit suite aux bifurcations qui apparaissent inévitablement à
toutes les échelles, à cause d’une amplification des différences dans les
conditions initiales qui est due au chaos incontournable dans les inter­
actions ou les chocs entre particules.
Le résultat, c’est que l’intérieur de l’espace-temps change à toutes les
échelles sous l’effet de ces vibrations, il change dans toute l’étendue
du temps simultanément, ce qui se représente par un cylindre flexible
qui change de forme. Ou encore, on peut représenter la structure de
l’espace-temps comme un ensemble de cylindres fixes qui se rejoi­
gnent dans le présent pour former un tronc d’arbre, et vous avez un
espace-temps qui devient un arbre avec des branches cylindriques, ce
que j ’appelle l’arbre de vie lorsqu’on le limite à la description de notre
vie personnelle. À partir de l’instant présent, nous allons emprunter
une seule de ces branches si rien ne change dans l’information appor­
tée depuis l’extérieur de l’espace-temps, mais toute nouvelle informa­
tion externe est susceptible de changer cette situation et donc de nous
faire empmnter une nouvelle trajectoire, une nouvelle branche.
Cet arbre de vie est le point de départ de la théorie de la double causa­
lité. Personnellement par exemple, j ’ai peut-être aujourd’hui dix poten­
tiels pour mon avenir, c’est-à-dire une dizaine de branches, et si on
cherche dans le détail j ’en ai peut-être mille. Mais si on reste dans les
grandes lignes peut-être qu’aujourd’hui je vais mourir à tel âge et de
telle façon, mais tout cela peut encore changer et demain mon avenir
sera différent. Peut-être que dans un mois je n’aurais plus que quatre
vies potentielles au lieu de dix, ou alors une vingtaine, donc mon arbre
de vie aura changé. Donc notre avenir peut se décrire à tout instant
comme un arbre de vie qui évolue dynamiquement.
Le problème est que mathématiquement, tout cela est très difficile à
représenter, c ’est pourquoi je propose un équipement de randonnée qui
consiste à emmener dans son sac à dos une dimension supplémentaire
au moins. Parce que pour arriver à concevoir un tel arbre, c’est-à-dire à
comprendre le panorama que l’on voit depuis le col de l’Ange, on a
absolument besoin d’au moins une dimension d’espace supplémen­
taire. Cette dimension est une dimension de torsion, c’est-à-dire que si
vous considérez votre ligne de vie actuelle comme un cylindre qui va
parcourir votre futur, alors sans changer la position de votre cylindre
dans le présent vous pouvez changer sa position dans le futur, par le
simple fait de le tordre en le faisant tourner sur lui-même. Cette torsion
est une torsion invisible et non physique, dans le sens où l’information
qu’elle met en jeu n’appartient pas à notre espace-temps quadridimen-
sionnel. Elle lui est extérieure, elle est évidemment le vecteur de ce
fameux hasard auquel la physique n’arrive pas à donner du sens. On
peut donc mathématiquement rendre compte de ce fameux hasard
externe à l’espace-temps par des dimensions supplémentaires. Voilà.
C ’est ce que fait aussi la théorie des cordes qui aboutit à la notion
d’univers parallèles... mais je ne vais pas aborder cette théorie ici,
nous pourrons voir cela dans les questions.
J ’en arrive maintenant au modèle que j ’ai présenté à l’Institut de
France l’année dernière (2012), où j ’étais invité à m ’exprimer dans un
colloque sur la conscience dans le cadre de l’association « Être
humain » qui réunit des académiciens. Ce n’était pas une invitation de
l’académie, je précise, mais d’une association indépendante qui m’a
demandé de donner le point de vue d’un physicien sur la conscience
dans ce colloque où s’exprimaient des académiciens. Difficile pour
eux de trouver un physicien qui donne son point de vue sur ce sujet, et
donc ça m’est tombé dessus. Enfin bref, j ’y ai présenté un modèle du
mental, de l’esprit et de la conscience où j ’ai précisé le rôle de la
conscience sur la base du cylindre flexible appliqué à la description de
chacune de nos vies. Alors j ’ai représenté notre vie comme se dérou­
lant à l’intérieur d’un tunnel flexible invisible dans lequel chacun de
nous se déplace sans savoir qu’il est automatiquement guidé, et je
représente notre conscience par une lampe de poche qui nous permet
de voir notre parcours, sur quelques secondes par exemple, ou plus si
nous sommes très éveillés.
J’y ai dit aussi que notre conscience a deux fonctions, la première liée
à l’attention - la présence - qui consiste à enregistrer des informations
dans l’univers et dans le temps présent, c’est aussi le rôle de l’observa­
teur en mécanique quantique, et la seconde liée à l’intention qui
consiste à configurer le futur de l’univers, dans ce qui reste évidem­
ment configurable, c’est-à-dire qui ne dépend pas strictement de la
causalité et qui fait donc intervenir ces fameuses informations exté­
rieures à l’espace-temps. Ces deux fonctions de la conscience suppo­
sent que nous vivions dans un univers d’informations: informations
qu’il a tendance à perdre mais qui sont renouvelées par toutes les
consciences dans l’univers. Je vous fais grâce des arguments physiques
qui m’ont amené à concevoir un tel modèle pour notre réalité, parce
que la physique de l’information est encore très jeune et ardue, mais
notez que c’est un modèle plus optimiste que celui de la caverne de
Platon ou de sa version modernisée par le film Matrix, car dans cette
matrice dont je vous parle nous sommes tous câblés pour devenir des
héros comme Néo.
Supposons maintenant que notre cerveau ne reçoive aucune informa­
tion externe à l’espace-temps, et que notre tunnel invisible ne peut être
bougé par personne d’autre. Dans ce cas notre conscience n’aurait
qu’un rôle passif à jouer, car notre tunnel ne pourrait pas bouger. C ’est
en fait l’ego qui pourrait mettre la conscience dans un tel état, car tout
le monde voit bien que les personnes qui sont sous l’emprise de leur
ego ont un fonctionnement prévisible, comme un automate. L’ego
transforme le mental en un automate et dans ce cas nous devenons des
machines. Je représente cela par un miroir qui s’interpose entre le
mental et la source d’informations externes que je définis ici comme
étant l’esprit, notre esprit. Le miroir renvoie les informations de l’ego
au lieu de laisser passer celles de l’esprit. Les personnes qui renient
l’existence de l’esprit, qui n’ont donc pas d’intuitions ou qui les blo­
quent, sont dans la confusion entre le mental et l’esprit et risquent de
fonctionner comme des machines. Les techniques de méditation, entre
autres, sont là pour éviter cette confusion et pour nous faire découvrir
la lumière intérieure de l’esprit, celle qui se traduit dans le sourire, si
vous préférez. La différence entre l’esprit et le mental est que l’esprit,
cette lumière intérieure qui s’accompagne aussi de joie, est une source
d’informations externe à l’espace-temps, alors que le mental est un
processus interne de traitement de l’information: au contraire de l’es­
prit il est sujet à la causalité. Je ne me pose pas la question de savoir ce
qu’est l’esprit en dehors de cette définition. Peut-être que nous avons
tous le même esprit, peut-être que non et que nous sommes malgré
tout reliés à un niveau hiérarchique supérieur par ce qu’on appelle
Dieu. Oublions cela et considérons l’esprit comme la source d’infor­
mations qui bouge tout simplement notre tunnel, comme si nous étions
télécommandés depuis l’extérieur de l’espace-temps.
Figurez-vous maintenant que l’existence de cette télécommande pour­
rait fort bien trouver une légitimité non seulement physique mais aussi
mathématique, à travers le théorème de Gôdel. Ce théorème nous
apprend en effet que tout système formel, c’est-à-dire logique comme
le serait un univers d’informations reliées par des lois comme la causa­
lité, contient forcément des propositions indécidables. Entendez par là
qu’un tel système ou univers ne peut rester cohérent que s’il est incom­
plet, c’est-à-dire s’il manque d’informations pour décider de son état,
auquel cas il aurait évidemment besoin d’informations extérieures, et
l’on retrouve ainsi notre télécommande.
Mais ce qu’il faut retenir ici, c’est que lorsque la connexion est ouverte
entre esprit et mental, nous avons un libre arbitre et la télécommande
fonctionne, alors que dans le cas contraire notre liberté est illusoire et
nous ne pouvons fonctionner qu’en pilote automatique.

La télécommande de Vespace-temps
Je passe maintenant à la partie expérimentale de mon exposé et nous
allons commencer à sortir de la science pour nous rapprocher de la spi­
ritualité, en abordant le sujet des synchronicités, c’est-à-dire des coïn­
cidences porteuses de sens pour les personnes qui les vivent. Il faut les
différencier de ce qu’on appelle les signes du destin, qui ne sont de
vraies synchronicités que lorsqu’ils sont très improbables et exigent
donc une explication. Mais à ce stade, il est important de distinguer
deux sortes de personnes qui détectent ou ressentent des indications du
destin dans leur vie. Il y a les personnes qui sont dans la confusion, qui
pensent avoir vécu quelque chose de significatif mais qui ne se rendent
pas compte qu’il ne s’agit que de projections, parce qu’il est normal
que de temps en temps il se produise des coïncidences improbables. Or
il faut que ce genre de chose soit répétitif pour lui donner du sens sans
sombrer dans le gouffre de l’illusion. Il est très important de douter et
d’essayer d’évaluer l’improbabilité réelle de ce qu’on vit. Ce n’est pas
évident et c’est pourquoi la confusion a souvent lieu. Il est possible
que dans 80 % des cas on ait affaire à des projections. Beaucoup de
lecteurs m’ont confié leurs témoignages et seuls quelques-uns m ’ont
paru dignes d’être classés comme de véritables synchronicités. Bien
sûr j ’ai pu me tromper car on est là dans quelque chose de très subjec­
tif, difficile à décrire, mais finalement c’est le sens que l’on donne soi-
même à ce qu’on vit qui compte, à condition de ne pas être parasité par
un mental qui calcule et qui projette. On a moins de chance de se trom­
per lorsqu’on tient compte de sa première impression, mais il faut bien
dire que beaucoup de hasards que l’on aurait tendance à attribuer à des
signes, à l’esprit, à l’ange ou à je-ne-sais-quoi ne sont que des illu­
sions.
Il n’empêche, et j ’ai fait un effort considérable pour essayer de défri­
cher tout cela, que dans mon expérience personnelle ainsi que dans la
littérature, il subsiste un nombre très important de cas qu’il est impos­
sible de réduire en projections en les jetant dans la poubelle du hasard.
Je suis là-dessus dans la même ligne que de nombreux scientifiques
très respectables, y compris des prix Nobel, et je vais citer ici quelques
scientifiques qui se sont réellement investis dans la recherche sur ces
phénomènes. Alors tout d’abord, il faut savoir que ces phénomènes
peuvent aussi avoir un aspect banal, car il existe des coïncidences
étranges et très courantes, mais qui ne valent pas vraiment la peine
qu’on les étudie parce qu’il est plus facile, voire même justifié en ce
qui les concerne, de les mettre à la poubelle. Il s’agit de tout ce qu’on
appelle par les expressions : « le monde est petit », « la loi des séries »,
« l’effet Pauli ou l’effet démo », « les cascades numériques », « la
chance ». Allez savoir dans ces cas s’il faut chercher un sens, le mieux
est sûrement de s’abstenir et donc de tendre la carte Joker. Par contre,
il existe des synchronicités beaucoup plus improbables qui intervien­
nent généralement lors des grands changements dans une vie. Elles
sont souvent liées à des rencontres déterminantes et là, vous êtes cer­
tains qu’il n’y a pas de hasard. Sauf si vous êtes paumé et que vous
vous retrouvez en situation d’errance. Mais lorsque vous êtes bien cen­
tré et qu’il vous reste encore un peu de connexion avec l’esprit, donc
un peu de réseau pour votre télécommande, même dans les situations
de chaos vous pouvez être certain que cette télécommande a déjà pré­
paré des plans pour votre vie future longtemps, longtemps à l’avance
et que par conséquent, si jamais vous n’avez pas de plans, plusieurs
plans concernant votre vie sont déjà là dans votre futur et l’un d’eux
saura s’imposer à vous, même s’il faut que l’univers vous bluffe ou
vous épate pour cela.
C ’est pourquoi il est important de maîtriser ses pensées, son comporte­
ment, ses intentions, d’être authentique et d’avoir un état d’esprit posi­
tif et ouvert sur le long terme, car c’est à partir de cette ouverture que
votre télécommande construit progressivement votre futur, là où il
n’est pas encore configuré. Si par contre votre connexion entre l’esprit
et le mental est coupée, alors il faut vous attendre à traverser des
périodes avec des souffrances à la clé. C ’est d’ailleurs souvent à la
suite de telles souffrances que la connexion finit par s’ouvrir et lorsque
le réseau revient, alors votre futur enfin informé par votre télécom­
mande se réorganise et là tout s’arrange pour vous, car vous arrivez à
contrebalancer la loi de l’entropie croissante qui veut que tout système
mécanique, à moins d‘être contrôlé extérieurement, est invariablement
conduit vers le désordre.
Attention, je vous parle d’une télécommande mais elle ne fonctionne
pas en temps réel, elle est obligée de passer par une reprogrammation
du mental : c ’est lui qui crée le futur parce que le mental est physique,
pas l’esprit. Il n’y a rien de magique là-dedans. Ce n’est pas l’esprit
qui crée directement votre futur, c’est le mental, qu’il soit informé ou
non par la télécommande. Sans cette information, le mental réagit
automatiquement avec ses réflexes du passé, son pilote automatique en
face de nouvelles situations, et c ’est cela qui conduit au désordre,
c’est-à-dire au renouvellement des échecs par exemple et il faut bien
comprendre que dans ce cas précis, aucune nouveauté positive ne peut
s’installer dans votre futur, car tout comportement mécanique vous
emmène sur une voie où le désordre finit par s’installer.
Maintenant, l’explication que je donne aux coïncidences et aux syn-
chronicités se résume par la phrase suivante : « Nos intentions causent
des effets dans le futur qui deviennent les futures causes d ’effets dans
le présent. » Après ce que je viens de dire, vous comprenez bien que
cela ne peut s’appliquer que si les effets causés par vos intentions sont
nouveaux, et non pas installés depuis longtemps par votre conditionne­
ment. D’où la nécessité que votre télécommande soit en marche et en
bon état, c ’est-à-dire que vos intentions soient à la fois nouvelles et
authentiques. Cette explication par une double causalité a été reprise
avec force par Jacques Vallée [50] dans une conférence qu’il a donné à
TEDx Bruxelles en 2011 [51], où il a cité cette phrase et dit que cela
serait la base de la future physique de l’information qui s’imposera peu
à peu dans les années à venir. C ’est donc un joli soutien à ma théorie et
je dois le remercier de m ’avoir ensuite ouvert les yeux sur sa portée
technologique. Car Jacques Vallée n’est pas seulement un écrivain et
astronome, c ’est surtout un spécialiste de tous les artefacts lumineux et
physiques comme les ovnis et un tas d’autres phénomènes incompré­
hensibles bien qu’avérés. Il a eu en main des dossiers classés de la
NASA et a été recruté par Spielberg pour conseiller le rôle de François
Truffaut dans « Rencontres du 3e type ». Il a assisté à des expériences
de parapsychologie avec des sujets doués. Son expérience lui a permis
de se forger une conviction et ce n’est pas pour rien qu’il a soutenu ma
théorie. Je ne l’ai vraiment compris que six mois après, lorsque j ’ai
commencé à entrevoir les applications technologiques possibles de la
double causalité, et ceci constitue l ’essentiel de mon travail de
recherche à ce jour, en collaboration avec des industriels de l’innova­
tion qui sont convaincus que j ’ai ouvert une voie d’avenir extrême­
ment prometteuse et passionnante. Ce n’est d ’ailleurs pas de mes
publications mais de l’impact technologique de cette théorie que vien­
dra sa validation par le biais expérimental, si elle vient, et tout ce que
je peux vous dire c’est que ça chauffe.
Une façon plus sobre de résumer le mécanisme des coïncidences est de
dire tout simplement que « Ce qui n ’est pas déterminé par le passé est
déterminé par le futur ». Bien entendu cela implique une rétrocausa-
lité, or ceci est une hypothèse avancée il y a plus de trente ans par le
très respectable physicien O livier C osta de Beauregard [52],
aujourd’hui décédé mais dont je suis certain que l’apport restera dans
l’histoire, car c’est bien lui le père de la rétrocausalité. Il en a payé le
prix lorsqu’il a proposé cette hypothèse pour expliquer la fameuse
expérience d’Alain Aspect de 1982. À cette époque il avait osé relier la
rétrocausalité à la parapsychologie, ceci a généré de l’indignation et
une marginalisation s’en est suivie. Je pense que c’est même la raison
pour laquelle Alain Aspect n’a toujours pas reçu le prix Nobel. Mais
aujourd’hui les choses ont changé et si vous prenez Thibault Damour
par exemple, même s’il n’en fait pas un cheval de bataille, il n’est pas
déconsidéré pour avoir déclaré ne pas avoir de soucis avec la rétrocau­
salité. Même Étienne Klein s’y met. Aujourd’hui tout bascule, et c ’est
facile à comprendre car c’est à cause de cette nouvelle conception de
l’espace-temps qui s’impose car elle se voit du col de l’Ange. Pour
bien le comprendre, il vous suffit d’imaginer que vous changez avec
votre télécommande la position de votre tunnel de vie dans le futur.
Alors il faut bien que cette nouvelle position soit reliée au présent et
que des changements aient donc lieu avant ce futur, sinon vous casse­
riez votre tunnel de vie, vous casseriez l’espace-temps. Donc il y a
bien une rétrocausalité, c’est aussi simple que cela, elle provient de ce
que la fin crée mécaniquement les moyens. Et si cette finalité vous
choque, alors vous devez refuser que l’espace-temps soit flexible, mais
dans ce cas vous tombez dans un piège créationniste qui vous oblige à
croire que l’univers, du big-bang jusqu’à la fin des temps, s’est créé
d’un seul coup et que depuis tout est figé, plus rien ne change, nous ne
faisons que visiter un espace-temps figé à tout jamais. Personnelle­
ment, je trouve ça impensable, c ’est comme une pensée primitive, et
pourtant c’est ce à quoi mène le déterminisme.
Je ne suis pas le seul chercheur du CNRS à vouloir expliquer les syn-
chronicités. Bien avant moi, le physicien quantique François Martin
[53], aujourd’hui à la retraite mais très actif, a publié un modèle qu’il
appelle la Théorie de la Psyché Quantique. Nous nous sommes ren­
contrés et avons échangé sur cette question, puis nous sommes tombés
d’accord sur un certain nombre de points communs essentiels. J’en ai
fait une page web de mon site :
http://ww w .philippeguillem ant.com /les-synchronicites/les-syn-
chronicites-en-theorie
Nos différences de points de vue sont très relatives et proviennent du
fait que je suis un physicien classique, donc de l’échelle macrosco­
pique et du chaos. Là où François parle d’intrication atemporelle je
parle de dimensions supplémentaires, mais il existe un point de vue
selon lequel cela revient au même, que l’on peut résumer en disant
qu’il s’agit de deux façons d’introduire des informations atemporelles
dans l’espace-temps. La théorie des cordes nous apporte aussi un cer­
tain nombre d’enseignements là-dessus (voir dans les questions).
Il est enfin incontournable de citer Jung et Pauli qui sont les pères du
concept de synchronicité et en ce qui concerne Jung, de la théorie de
l’inconscient collectif. La grande majorité des travaux sur la synchro­
nicité ont été inspirés par Jung et Pauli et notamment par leur corres­
pondance [54], donc si vous vous intéressez aux synchronicités il faut
commencer par étudier Jung. Pauli était un physicien qui a reçu le prix
Nobel et qui a vécu lui-même de nombreuses synchronicités que l’on a
ensuite appelé l’effet Pauli. Lorsqu’il pénétrait dans une pièce où se
déroulait une expérience il avait la réputation de tout détraquer par sa
présence, comme une espèce de micro-poltergeist. Personnellement
j ’ai plutôt été un spécialiste de l’effet « démo », mais j ’ai réussi à le
contrer en maîtrisant mon état d ’esprit. J ’ai fait de nombreuses
démonstrations expérimentales durant ma carrière et j ’ai compris com­
ment il fallait faire pour éviter cet effet. En quoi cela consiste ? Eh bien
l’effet démo a lieu lorsque vous avez besoin qu’une expérience ou
qu’une démo fonctionne, devant des industriels par exemple. C’est à
ces rares moments qu’elle se met bizarrement à planter, malgré toutes
vos précautions et comme par hasard. C’est très connu dans le milieu
de l’innovation vous savez. Comme j ’ai beaucoup innové dans ma vie
il a bien fallu que je parvienne à maîtriser cette affaire et j ’ai compris
le truc. J ’ai compris quelle était l’attitude mentale qu’il fallait avoir
pour éviter cet effet et c’est une sorte de présence d’esprit. Je ne parle
pas d’un réflexe mais plutôt d’une présence d’amour, une sorte de par­
tage dans l’émerveillement si vous préférez, le mot amour étant très
dénaturé, mais on finira bien par découvrir qu’il s’agit d’une sorte de
lumière intérieure aussi physique que la lumière extérieure.

Le fonctionnement de la télécommande
Je vais maintenant vous parler des facteurs qui favorisent les synchro-
nicités et vous verrez qu’il y a une grande logique là-dedans, comme si
nous étions câblés par l’intermédiaire de notre télécommande pour ser­
vir d’interface cybernétique de création du monde, depuis l’extérieur
de l’espace-temps. J ’ai fait mon propre recensement de ces facteurs
dans mon livre puis j ’ai recoupé cela avec le recensement effectué par
d’autres chercheurs et notamment les psychologues canadiens Jean-
François Vezina [31] et Joachim Soulières [55], Je vous invite à lire
leurs livres, vous constaterez que l’on se rejoint. J’ai parlé de neuf dis­
positions qu’il importe de cultiver pour obtenir l’état d’esprit qu’il
convient afin de vivre des synchronicités, que dis-je, afin d’en créer à
volonté. Oui, parce que j ’ai oublié de vous dire que l’on peut provo­
quer des synchronicités. Personnellement j ’en ai provoqué pour arran­
ger ma vie et je l’ai effectivement arrangé au-delà de mes espérances.
Mon livre en témoigne en partie. Aujourd’hui je n’en provoque plus
car je ne veux plus rien changer, dans mes bases en tout cas, mais il
m’en arrive encore et je les accueille par un sourire, ayant fini par trou­
ver cela normal, voire ayant même appris à décoder leur signal. Disons
qu’elles signifient pour moi, lorsqu’elles arrivent comme par hasard le
jour où j ’ai fait un choix: « Félicitations, tu es sur la bonne voie ».
Mais il faut rester léger avec tout ça et ne pas le prendre au sérieux,
évidemment.
Alors voilà, maintenant je vais vous expliquer comment on peut intro­
duire soi-même de la magie dans sa vie, et cela se résume en neuf dis­
positions que l’on peut activer à l’aide de sa télécommande. Il y a neuf
inscriptions sur cette télécommande, organisées en trois rangées de
trois inscriptions chacune, qui correspondent en fait à six boutons sui­
vis de trois voyants lumineux :

( 1) MENTAL (2) ESPRIT (3) DEMANDE


(4) CONFIANCE (5) LÂCHER PRISE (6) DÉTACHEMENT
(7) FOI (8) INTUITION (9) JOIE

Ces trois rangées correspondent pour (1), (2) et (3) à l’émergence de


l’intention jusqu’à la demande, pour (4), (5) et (6) à celle de l’activité
mentale adéquate suivie d’actions et enfin pour (7), (8) et (9) à l’ouver­
ture de la connexion avec l’esprit. Tout d’abord, au niveau de l’inten­
tion, il importe que celle-ci soit authentique et donc cela implique :

(1) MENTAL: se déconditionner le mental... pour sortir du fonction­


nement automatique imposé par l’ego et tout ce qui le stimule : l’image
que l’on se donne, les préoccupations, etc.

(2) ESPRIT : identifier son être intérieur... pour ramener la connexion


avec l’esprit, ce qui se fait souvent par la méditation, mais il y a d’au­
tres moyens et personnellement je fais de la randonnée.

(3) DEMANDE: faire une demande... qui vient automatiquement en


conséquence d’une introspection qui a ramené du sens dans votre vie.
Vous en déduisez qui vous êtes, donc ce que vous êtes venus faire sur
cette planète, et vous en déduisez ce dont vous avez besoin, d’où la
demande.
Ces trois premiers facteurs sont liés à l’émergence d ’une intention
authentique, pour laquelle la dissociation esprit/mental est fondamen­
tale. Ce n’est que lorsque cette dissociation est faite qu’on est capable
de découvrir au fond de soi-même ce qu’on veut faire dans sa vie. Cela
permet au mental d’être informé sur ce qu’il doit faire et surtout chan­
ger en lui-même. Le mental c’est le cerveau, l’activité cérébrale, et il
est informé par l’esprit, donc par des informations externes à l’espace-
temps qui entrent dans le système complexe qu’est le cerveau, parce
que tous les systèmes dynamiques complexes ont besoin d’informa­
tions externes pour diriger leur évolution de façon ordonnée, en dimi­
nuant l’entropie au lieu de l’augmenter, ce qui est le cas des systèmes
vivants. Donc l’esprit est la source de ces informations, je le définis
ainsi et je n’en sais pas plus, c’est pourquoi je le remplace par ce « je-
ne-sais-quoi » qui tient la télécommande.
Donc, après avoir fait votre demande votre futur commence à se
reconfigurer en fonction des informations de l’esprit, mais ce n’est pas
encore cela qui va provoquer des synchonicités, c’est juste la première
étape, parce que l’intention authentique ne suffit pas, encore faut-il
agir correctement et ne pas se mettre des bâtons dans les roues. Donc il
faut franchir une seconde étape en appuyant sur les boutons (4), (5) et
(6) avec votre cerveau, et ça va demander un effort du mental :

(4) CONFIANCE: il va vous falloir faire un effort afin de sortir des


sentiers battus pour élargir votre champ des possibles, ce qui va vous
demander de la confiance.

(5) LÂCHER PRISE : vous allez devoir lâcher prise afin de laisser agir
les choses qui s’installent dans votre futur, pour ne pas les contrecarrer
par un mental qui veut tout prévoir, tout calculer.

(6) DÉTACHEMENT : c’est le plus important, car c’est ce qui va vous


permettre d’accepter le changement indispensable à la mise en place
d’un nouveau futur.
Il s’agit donc là de trois efforts que vous allez devoir faire mentale­
ment, et qui devront être confirmés par vos actes. Ceci va vous permet­
tre d ’ouvrir des connexions avec l’esprit, et il y a trois types de
connexion possibles qui correspondent aux trois types d’efforts effec­
tués. Lorsque vous avez ouvert une connexion en appuyant sur un bou­
ton de la deuxième rangée, à chaque fois un voyant lumineux s’allume
juste en dessous sur votre télécommande. Ces trois voyants lumineux
s’appellent la foi, l’intuition et la joie :

(7) FOI: elle s’allume lorsque vous avez correctement appuyé sur (4)
c ’est-à-dire cultivé la confiance, et la foi va vous permettre de prendre
des risques, comme par exemple monter une entreprise. Il importe de
préciser que la foi est le contraire de la croyance car elle n’a pas besoin
de raisons pour s’installer, elle n ’a besoin que d’une confiance pro­
fonde et irraisonnée.

(8) INTUITION : elle s’allume lorsque vous avez correctement appuyé


sur (5) c’est-à-dire réussi à lâcher prise dans vos scénarios anciens, et
c’est ce qui va vous guider dans vos nouvelles actions. Ca peut simple­
ment se résumer à bien dormir, à trouver le sommeil. Le fait que son
bouton s’allume se traduit par un sourire intérieur, mais ça se voit aussi
de l’extérieur et tout le monde peut voir que vous êtes inspiré.

(9) JOIE: elle pourrait aussi s’appeler l’amour et elle s’allume lorsque
vous avez correctement appuyé sur (6), c’est-à-dire réussi à vous déta­
cher de tout ce qui emprisonnait votre vie, et vous découvrez alors que
vous aimez la vie sans aucune raison, ce qui vous amène naturellement
au don de soi, tout à fait désintéressé. Cela se traduit par de la joie inté­
rieure, sans aucune cause extérieure. Dans cet état on a naturellement
envie de partager avec les autres, donc de donner, donc ça n’a rien à
voir avec l’amour causé par le désir ou l’attachement, c ’est tout le
contraire. C ’est le détachement qui installe cet amour ou cette joie, et
ensuite ce qu’on aime se produit naturellement, car l’amour est le
meilleur coup de tampon donné à l’univers pour garantir que vous
allez aller dans la direction aimée, quoi qu’il arrive.
Donc vous voyez, le fonctionnement de la télécommande est somme
toute plutôt simple. La première rangée active une demande authen­
tique qui commence déjà à programmer votre futur, et la deuxième
rangée c’est juste pour faire de la magie, alors là ça mérite un peu plus
d’explications.
Les trois efforts du mental « confiance », « lâcher prise » et « détache­
ment » vont permettre de diminuer votre conditionnement et donc de
diminuer les voies causales qui réduisent votre champ des possibles.
Ces trois efforts ne vont pas seulement ouvrir ce champ des possibles,
ils vont aussi vous permettre de vous connecter aux informations de
l’esprit au moyen de l’une des connexions qui suivent: « foi », « intui­
tion » et « joie ». Or ce sont ces connexions qui favorisent les voies
non causales c ’est-à-dire rétrocausales, ou encore non planifiées si
vous préférez. Il n’y a pas de planification ni de raison suffisante dans
la prise de risque, l’écoute de son intuition ou le don de soi. Cela va
pourtant informer l’univers que vous allez faire des choses alors même
que ni les raisons pour les faire ni les chemins pour y parvenir n’exis­
tent. Donc vous allez grossir les probabilités de vos finalités en l’ab­
sence même de ces chemins. C’est cela qui creuse les voies non cau­
sales, qui crée les ponts envoyés par votre futur. Car il est bien évident
que si vous diminuez les voies causales en même temps que vous aug­
mentez les voies non causales, alors ces dernières vont s’imposer et il
va se produire des coïncidences très improbables, significatives, par
l’augmentation de la probabilité des hasards qui vous mènent à desti­
nation. C’est aussi parce que l’espace-temps met un certain temps à se
reconfigurer et lorsque vous le prenez par surprise, il se réadapte en
choisissant les solutions à disposition, mais là on entre dans des subtili­
tés que j ’évite pour ne pas trahir un secret technologique. Pour faire
bref, on va dire que l’univers concourt à la réalisation de vos intentions
grâce au développement des valeurs de l’esprit que sont la foi, l’intui­
tion et le détachement, des valeurs qui, il faut bien le reconnaître, sont
plutôt féminines...

Nous sommes câblés pour la création


Bien, maintenant se pose la question de savoir comment notre futur
intègre directem ent les inform ations en provenance de notre
conscience, car tout cela se passe dans notre futur en même temps que
dans notre conscience, qui est l’interface entre ce futur et notre télé­
commande. Lorsque l’esprit parvient à informer le mental, nous en
sommes conscients parce que nous avons changé d’état d’esprit. Nous
avons alors fait bouger notre tunnel de vie. L’esprit nous a envoyé des
informations qui ont permis de changer notre destin. Ok, mais la ques­
tion est: comment a-t-il fait? L’esprit connaît-il notre destin?
Je pense que la réponse est oui, mais pour bien le comprendre II faut
rappeler la différence entre la conscience et l’esprit: la conscience vit
dans le temps présent, elle est aussi un capteur de la réalité. L’esprit,
lui, étant extérieur à l’espace-temps, voit probablement dans le futur,
mais la conscience n’a pas ces informations, au contraire de l’esprit
qui voit notre parcours. Il voit exactement où on va, mais il ne nous le
dit pas. D’abord il faut qu’il y ait une connexion, mais même s’il y a
une forte connexion il ne va pas nous le dire, ou alors il faut être vrai­
ment très éveillé, car il y a une incompatibilité entre la connaissance
du futur et le libre arbitre qui est la fonction même de l’esprit. C’est
pourquoi la conscience est comme une lampe qui n’éclaire qu’une
toute petite portion de notre tunnel de vie, le présent. Supposez en effet
que vous ayez besoin d’évoluer, d’apprendre et donc de vous confron­
ter à la réalité. Cela ne va pas être facile, vous allez prendre des
claques, par exemple vous allez sans arrêt vivre avec le même type de
personnes et cela va toujours se terminer par un échec. L’esprit, parce
qu’il peut contempler tout l’espace-temps, voit peut-être vos aventures
avec des personnes différentes, il sait déjà comment ça se termine mais
il ne va pas vous le dire sinon vous n’iriez pas. Vous n’allez pas avoir
une relation avec une personne si vous savez d’avance que ça va mal
se terminer. Par contre l’esprit est d’accord, car il sait qu’il est avec un
corps et un cerveau qu’il a du mal à contrôler et avec lequel il doit faire
ces expériences pour apprendre à contrôler la matière, votre corps.
L’esprit évolue quand il arrive à maîtriser la matière, et c’est pour cela
qu’il choisit ses expériences. Et maîtriser la matière, c ’est arriver à
faire rentrer dans le cerveau d’un individu les informations qui vont lui
permettre d’évoluer dans le bons sens, dans un sens où ça fonctionne
bien, dans le sens de la création. C’est ce que doit apprendre l’esprit.
Tant que ça ne fonctionne pas, on pourrait dire que l’esprit vous fla­
gelle, mais en fait pas du tout, c ’est le mental qui flagelle, l’esprit étant
contraint de vivre les conséquences de son incapacité à le maîtriser à
cause du miroir de l’ego. Donc ce qu’il faut savoir, c ’est que votre
esprit peut très bien avoir la vision de tout votre passé et de tout votre
futur, mais ces informations vous sont cachées parce que si votre ego
avait ces informations, vous feriez tout le contraire de ce que veut l’es­
prit, or c ’est lui qui commande. Donc pour commander votre mental,
l’esprit a besoin de vous cacher des informations. Il s’agit là un
câblage de la nature qui est très logique et qui est fondamental pour le
bon fonctionnement de l’interface consciente de communication entre
l’intérieur et l’extérieur de l’espace-temps.
Alors nous allons maintenant traduire l’effet de ce câblage sur l’es-
pace-temps par un tourbillon, qui est une représentation meilleure
qu’un arbre de vie lorsqu’on veut avoir une vision dynamique. On peut
représenter le futur comme un ensemble tourbillonnaire d’événements-
bulles qui se succèdent les uns derrière les autres, sauf que cette suc­
cession est encore fluide, elle n’est pas encore bien ordonnée. Elle
s’ordonne d’autant plus qu’on se rapproche du présent au centre du
tourbillon. Mais si vous regardez plus loin du centre, vous voyez qu’il
peut y avoir des successions d’événements, créées par vos intentions,
qui se forment, qui se déforment et qui se reforment, parce que tout
cela est encore indéterminé. Il y a forcément concurrence entre toutes
sortes d’événements-bulles et donc leur succession change. Donc tout
est possible, mais il n’arrive dans le présent que ce qui parvient à
rejoindre le centre du tourbillon, où la puissance du courant et la
finesse du trou central oblige les événements-bulles à se succéder de
façon unique et bien déterminée, les uns après les autres. Et mainte­
nant, si vous allez voir loin du tourbillon central, alors vous pouvez
avoir des événements qui ne bougent pas parce qu’ils ne sont piégés
dans aucun flux. Ils sont alors impossibles, ou pas encore possibles.
Dès qu’un évènement-bulle devient possible, c’est qu’il est pris dans
un courant, même si ce courant est très faible. Toutes nos pensées
influent donc sur ce tourbillon en créant non seulement les bulles mais
les courants correspondant à leur probabilité de réalisation.
Ces événements-bulles, ou bulles événementielles, sont donc créés par
nos intentions et positionnés à un endroit du tourbillon d’autant plus
proche du centre que nous les crédibilisons par notre état d’esprit et
nos actions. Le câblage fait par la nature, celui qui relie notre cerveau à
ce tourbillon, est indispensable pour que le futur puisse dépendre de
nos intentions. S’il n’existait pas un tel câblage la mécanique serait
obligée de jouer aux dés et le futur deviendrait un chaos épouvantable.
La vie serait impossible car partout l’entropie augmenterait. Pour que
cela n’arrive pas, il faut que la mécanique soit complétée par un esprit
qui influe sur la tournure des événements. Cet esprit, par la force de
l’amour qui l’accompagne, réalise un programme intentionnel. L’esprit
dit à l’univers : c’est ma nature, je vais vers cela, je serai telle personne,
je ferai telle chose, et l’univers est ainsi informé de la manière dont il
doit combler l’indéterminisme de la mécanique pour définir la direc­
tion de l’évolution. J’insiste sur le fait que c’est tout à fait compatible
avec la mécanique. Pour mieux le comprendre, on pourrait dire que la
mécanique régit le monde manifesté, c ’est-à-dire notre monde vécu,
alors que l’esprit régi le monde non manifesté, c’est-à-dire celui des
potentialités.

Conclusion
En conclusion, le chemin que je vous propose pour aller vers la spiri­
tualité est celui qui consiste à tenter l’expérience de vivre par vous-
mêmes la synchronicité. Si vous le faites vous allez vous retrouver
face à vous-mêmes. Vous allez tenter de demander des choses à l’uni­
vers, vous allez lui donner 24 heures par exemple, si c’est pour avoir la
réponse à une question, à moins que vous ne consultiez un oracle
comme le yi-king. Ca revient au même, car c ’est toujours le même
principe qui consiste à augmenter les probabilités d’un hasard signifi­
catif en ouvrant votre futur à une possibilité qui intéresse l’esprit. Ou
alors si c’est pour acheter une maison vous allez lui donner quelques
semaines ou mois, et je vous conseille d’être assez précis et de ne rien
oublier. Ne soyez pas trop précis non plus, pour laisser des chances.
N ’oubliez pas que le problème n’est pas de ne rien obtenir mais bien
au contraire d’obtenir ce qu’on a demandé, car ensuite il faut suivre.
Vous pouvez faire l’expérience de la double causalité n’importe où,
dans la nature, dans une ville et de toutes les façons que vous voulez,
vous pouvez poser votre question au soleil ou commander votre mai­
son en vous envoyant un email à vous-mêmes. Ce qui compte c’est
l’authenticité et donc la durabilité de votre intention, et qu’il soit bien
certain que vous allez la suivre, après une introspection personnelle sur
qui vous êtes et ce que vous êtes venu faire sur cette planète.
Si vous prenez ce chemin, vous allez vous rendre compte que nous
sommes réellement câblés pour la création, j ’oserais dire pour la
magie, et vous n’allez pas en revenir. Ensuite ça va sûrement cesser de
marcher car vous allez trop analyser. Mais même si vous arrivez à le
reproduire, il vous faudra des années pour assimiler l’idée que tout
cela est normal, qu’il est normal que l ’univers concoure à vos
demandes. À condition d’avoir développé la dissociation esprit-ego. Il
y a de nombreuses techniques, comme la méditation par exemple. Je
vous conseille de lire ou d’écouter les livres d’Eckart Toile [56], Il faut
ensuite développer les valeurs spirituelles que j ’ai citées - confiance et
foi, lâcher prise et intuition, détachement et don de soi, en sachant bien
qu’il s’agit là non pas de morale mais du résultat d’une bonne compré­
hension du fonctionnement physique de la réalité, c ’est-à-dire du
câblage de notre cerveau avec un champ des possibles qui n’attend pas
qu’on agisse pour se structurer. Cela n ’est pas possible aussi long­
temps que vous êtes piégés à l’intérieur du parc de la pensée. Si vous
avez une profession qui nécessite de longues études ou qui relève de
connaissances intellectuelles, il vous sera difficile d’en sortir. Même
chose si votre profession vous amène à devoir convaincre les autres, à
leur expliquer des choses. Et c’est ainsi que les médecins, les neuros­
cientifiques, toutes les personnes qui ont des professions au savoir très
empirique, donc en manque d’explications mécanistes valables, mais
aussi les politiciens, les journalistes, les professeurs, etc. ont bien plus
de chance d’être prisonniers du parc de la pensée que les autres. Nous
sommes tous plus ou moins prisonniers de ce parc à cause de notre
éducation. Seuls les gens très simples peuvent ne pas l’être, s’ils ne
sont pas trop conditionnés. Ah, j ’oubliais les intellectuels ! Les intellec­
tuels sont plus que n’importe qui prisonniers du parc de la pensée.
C ’est la raison pour laquelle il n ’y a plus de vrais philosophes, car
même les philosophes ont tendance à tomber dans ce piège de la pen­
sée. Seuls les poètes, les artistes et peut-être certains chefs d’entreprise
peuvent en sortir, mais bien évidemment j ’en oublie.
Donc, en conclusion, je dirais que l’avenir de la physique, et notam­
ment via la physique de l’information - dont je n’ai pas parlé ici pour
alléger cette conférence - c ’est de parvenir à intégrer notre vraie
dimension humaine, externe à l’espace-temps, au fonctionnement de
notre réalité. La raison pour laquelle notre monde va si mal
aujourd’hui est que nous n’avons pas encore compris cette réalité.
Nous n ’avons pas encore compris que nous sommes câblés pour la
création, que notre conscience est un instrument au service de l’évolu­
tion de l’univers, que sans elle son entropie augmenterait sans cesse et
le désordre s’installerait partout. C ’est la leçon que nous devons
extraire de l’évolution actuelle de la planète où tout s’accélère et nous
devons comprendre cela - notre dimension spirituelle et créative, je le
répète - si nous voulons éviter l’autodestruction. Mais je suis persuadé
que nous l’avons déjà évité et que dans notre futur, le potentiel le plus
probable est que l’humanité va basculer dans un nouveau paradigme
qui va provoquer une révolution positive et extraordinaire.
Je vous remercie pour votre écoute.
XXII.
Questions
Où l ’on découvre que la théorie de la double causalité apporte
une explication simple et élégante à de nombreux mystères,
parmi lesquels la matière noire, l ’évolution de l ’espace-temps
et celle des systèmes vivants.

La théorie des cordes


Vous avez vaguement abordé la question des univers parallèles et de la
théorie des cordes. Pourriez-vous expliciter leur lien avec votre
théorie ?
Je n’ai effectivement parlé que de la théorie de la gravité quantique à
boucles qui fait vibrer l ’espace-temps. C ’est l’une des deux plus
importantes théories de grande unification de la physique. L’autre est
la théorie des cordes et à première vue, elles ont l’air d ’être totalement
incompatibles, ce qui impliquerait que l’une d’entre elles soit fausse.
Pourtant si on examine leur sens physique elles se rejoignent. Remar­
quez d’abord que la théorie des cordes conserve un espace-temps
immobile, alors que l’autre le fait vibrer. On peut représenter les uni­
vers parallèles du premier sous la forme d’un arbre à branches cylin­
driques dont chaque branche est un univers possible. Or je vous ai
expliqué que la conséquence des vibrations du second, c ’est que le
contenu de l’espace-temps peut changer sans cesse, même si ses vibra­
tions sont infiniment petites, et donc cela peut tout à fait revenir au
même. Leur différence réside dans l’approche mathématique, la pre­
mière étant statique et la seconde dynamique, mais finalement ces
deux théories me semblent tout à fait complémentaires. Au lieu de
faire bouger l’espace, la théorie des cordes introduit 6 ou 7 dimensions
d’espace supplémentaires. Donc vous avez une particule élémentaire,
le quark par exemple, qui vibre dans les dimensions spatiales supplé­
mentaires. Dans l’autre théorie vous avez la même particule qui vibre
également parce que c’est l’espace lui-même qui vibre. Du coup, la
théorie qui fait vibrer l’espace n’a pas besoin de rajouter des dimen­
sions spatiales. Mais par contre, faute de dimensions elle ne décrit pas
totalement la réalité. Elle ne décrit qu’une réalité stochastique, proba­
biliste. Lorsque les fluctuations quantiques de l’espace se transforment
en observations réelles, alors il y a toujours une réduction d’état en une
seule réalité qui n’est pas décrite. De ce fait le futur décrit par la gra­
vité quantique à boucles est un futur qui contient potentiellement de
multiples possibilités, tout comme le futur décrit par la théorie des
cordes et qu’on appelle le multivers. Cela ne se voit pas en gravité
quantique car il s’agit d’une approche qui ne décrit pas tout, alors que
dans le cas du multivers de la théorie des cordes il s ’agit d ’une
approche statique qui décrit tout, mais il reste trop de degrés de liberté :
il s’agit là de notre liberté. Donc en résumé, pour marier les deux théo­
ries, il suffit de remarquer que les fluctuations quantiques de la pre­
mière peuvent très bien être responsables des changements de branche
de la seconde.

Les univers parallèles


Vous dites que la théorie des cordes nous laisse des degrés de liberté.
Pourtant, Stephen Hawking a une vision déterministe de la théorie des
cordes et il dit que tous les univers possibles sont séparés!
Effectivement, Stephen Hawking nous dit que nous ne vivons que
dans une seule branche du multivers, or il n’a aucune preuve de cela. Il
y a en fait 10 à la puissance 500 possibilités de faire varier les vibra­
tions des cordes, et vivre dans une seule branche du multivers signifie­
rait que cette vibration est toujours la même : aucune raison à cela,
c’est arbitraire. Si vous regardez la théorie des boucles, les fluctuations
quantiques peuvent nous faire changer de futur de manière totalement
aléatoire, donc vous voyez bien que le hasard - ou si l’on préfère, l’in­
formation externe à l’espace-temps - peut nous faire changer d’uni­
vers. Donc si vous voulez concilier les deux théories, vous êtes obligés
de rejeter l’idée d’Hawking qui prétend que nous ne vivons que dans
une seule branche du multivers bien qu’il y en ait des myriades d’au­
tres. Et c’est mieux ainsi, car la conséquence de la thèse d’Hawking est
que ça nous oblige à penser que chacun d’entre nous aurait des mil­
liards de vies conscientes dans des univers parallèles. Personnellement
je n ’arrive pas à me faire à l’idée qu’à chaque fois que je fais une
chose plutôt qu’une autre, un double de moi se crée à des trilliards
d ’années lumière. Il y a beaucoup plus simple, respectons le rasoir
d ’Occam. Il suffit de regarder en face les fameuses informations
externes que toutes les théories rajoutent, que cela soit des variables
cachées, du hasard ou des dimensions supplémentaires. Alain Connes
[57], notre grand mathématicien, pour concilier les deux théories de
grande unification, rajoute lui aussi des dimensions à l’espace: encore
des informations additionnelles de source exotique, comme si pour
prédire le cours des événements la physique avait besoin, en tout point
de l’espace, d’informations complémentaires dont personne ne com­
prend encore l’origine ! Il est évident que ces informations sont celles
qui nous font changer de branche, d’espace-temps. Elles sont les clés
de notre libre arbitre.

U indéterminisme macroscopique
Votre raisonnement repose sur Vindéterminisme macroscopique, mais
ceci n ’est pas prouvé. Seul Vindéterminisme quantique semble réelle­
ment prouvé. Pourriez-vous nous dire ce qui à vos yeux prouve Vindé­
terminisme macroscopique ?
L’indéterminisme macroscopique n’est pas prouvé d’un point de vue
formel, purement mathématique. C ’est normal puisque toutes les équa­
tions de la physique sont déterministes, même celles de la mécanique
quantique, donc c’est logiquement impossible à prouver par les équa­
tions actuelles. Mais le déterminisme n’est pas prouvé lui non plus,
bien au contraire, puisqu’il aboutit à l’introduction d ’informations
externes à l’espace-temps, ce fameux hasard qu’on retrouve d’ailleurs
aussi en mécanique statistique, via les probabilités. Si on fouille un
peu, on s’aperçoit qu’on aurait aussi besoin d’informations externes à
l’espace-temps en mécanique classique, donc à l’échelon macrosco­
pique. On s’aperçoit en effet là aussi que la mécanique est indétermi­
niste.
Pour bien comprendre l’indéterminisme macroscopique, il faut partir
du point de vue où l’information aurait un vrai sens physique, ce qu’on
découvre en physique actuellement. Cela implique que tout l’univers
soit quantifié, ce serait donc un univers d’informations. On retrouve
cette quantification dans la gravité quantique à boucles qui a besoin
que l’univers soit discret, c’est-à-dire à structure granulaire: il existe­
rait des grains d’espace indivisibles mais aussi des grains d’énergie,
d ’impulsion, de temps, etc., et finalement l’univers serait comme
l’image d’une télévision qui en réalité n’est pas continue mais faite de
pixels. L’univers contiendrait donc une quantité énorme mais limitée
de giga-octets, si vous préférez, comme un immense ordinateur.
Tout ceci a des conséquences à l’échelle macroscopique, car l’indéter-
minisme dû à la quantification peut alors se propager rapidement à
l’échelle macroscopique, et c ’est là dessus que je travaille.
La première conséquence de la structure granulaire de l’espace, c’est
que la mécanique classique devient indéterministe en trois dimensions.
C’est ce que j ’ai pu mettre en évidence en faisant des calculs de bil­
lards. J’ai pu montrer que dans trois dimensions, la mécanique s’arrête
de fonctionner au bout d’un certain temps. Je prends deux billards
superposés avec les mêmes conditions initiales, exceptée une diffé­
rence infinitésimale entre les deux, par exemple 10 à la puissance -15,
et ce qui arrive est que les deux billards divergent rapidement, après
quelques dizaines de chocs. La mécanique ne sait plus où aller. C’est
parce qu’elle a perdu presque toutes ses informations sur les boules.
J’ai pu montrer que ceci arrive même si les conditions initiales diffè­
rent d’une valeur inférieure au grain de l’espace, une valeur qui n’a
donc plus de sens, qui n’existe pas. Dans ce cas il faut seulement une
trentaine de chocs par boule pour que la mécanique s’arrête avec 500
boules, et quand vous augmentez le nombre de boules c ’est encore
moins.
Mais ce n’est pas tout, car j ’ai aussi vérifié que même si l’espace n’a
pas de structure granulaire et peut être aussi précis que l’on veut, on a
quand même un énorme problème avec l’information physique. Ce
problème est le suivant: lorsque vous calculez toutes les trajectoires de
toutes les boules aussi longtemps que la mécanique marche, vous utili­
sez une certaine quantité de mémoire pour stocker l’évolution calculée.
Or à partir d’un certain nombre de boules cette quantité de mémoire
devient inférieure à la mémoire dont vous avez besoin pour les condi­
tions initiales. Ceci est totalement aberrant pour un mécanicien: le fait
que son modèle consomme plus d’informations qu’il n’en calcule. J’ai
appelé ça le démon du déterminisme. Ca veut dire que la mécanique
ne fonctionne pas dans un espace à trois dimensions, en tout cas pas
longtemps et même s’il est continu, à partir du moment où l’on admet
que l’information a un sens physique.
C ’est très gênant, alors pour restaurer le déterminisme, ce qu’il faut
bien puisque nous vivons une seule réalité après tout, j ’essaie de rajou­
ter des informations externes qui permettent de choisir la direction des
événements. Mais il y a autre chose que j ’ai remarqué, c ’est que plus
petites sont les boules et plus l’indéterminisme s’installe tôt dans mon
billard, et c ’est vrai pour n’importe quel système où il y a des interac­
tions, même si ce ne sont pas des chocs élastiques. Or ceci pourrait
expliquer le comportement quantique des particules à petite échelle.
Personnellement, à force d’étudier la mécanique je ne vois même plus
de différence entre le monde classique et le monde quantique,
puisqu’aussi bien l’indéterminisme que le rôle de l’observateur qui
introduit des informations externes, et même l’intrication, sont à mon
avis imposés par les deux physiques, classique et quantique. J’ai de
bonnes raisons de penser qu’il n’y a aucune frontière entre les deux, or
il se trouve que c’est ce que découvrent les physiciens en ce moment.
Serge Haroche [58] a même reçu le prix Nobel pour ça. Donc l’indé-
terminisme, qu’il soit classique ou quantique, je suis certain que c’est
le même, mais c’est une chose très difficile à formaliser, je suis bien
placé pour le savoir.
Ce qu’il faut retenir de cette question, c’est qu’on constate partout en
physique que pour calculer le futur il est indispensable d’introduire de
l’information exotique, sauf si on laisse faire le hasard le plus proba­
ble. Le problème c’est que la mécanique classique est peu suspecte de
ce genre d’étrangeté, et elle va pourtant être obligée de s’y faire. La
seule façon à ma connaissance d’introduire cette information, c ’est de
rajouter au moins une dimension à l’espace, une 5e dimension donc.
Ce n’est pas nouveau, on commence à en avoir l’habitude, et il y a
quelque chose d ’intéressant à chaque fois qu’une tentative est faite de
rajouter des dimensions, c’est qu’il s’agit toujours de dimensions rota­
toires. Dans le cas du billard il s’agit de courber les trajectoires de
manière à leur faire visiter toutes les possibilités que sans cela, elles
ignoreraient, alors qu’elles existent. C’est comme si l’on avait besoin
de tordre l’espace de différentes façons, or cette torsion peut très bien
être formalisée par un vecteur qui s’enroule autour d’un point ou d’une
ligne. Et voilà qu’on retrouve tout ce que je vous ai dit sur mon
modèle cylindrique flexible de l’espace-temps.

La matière noire
À la fin de votre conférence à l ’Institut de France vous avez prétendu
que votre théorie de la double causalité pourrait expliquer la matière
noire, mais votre explication était très brève. Pourriez-vous en dire un
peu plus là-dessus ?
Oui, j ’ai divulgué à cette occasion l’idée que la matière noire pourrait
être expliquée par ma théorie, bien que je sois bien incapable de vali­
der quantitativement cette explication, n’étant pas astrophysicien. Mais
une explication qualitative de la détection de ce type de matière invisi­
ble s’impose d’elle-même si l’on admet que le passé peut changer, ne
serait-ce que légèrement, dans des passés plus ou moins lointains. Ce
changement serait dû à l’indéterminisme macroscopique qui, à cause
d’un chaos très élevé, ne permettrait pas de recréer rétrocausalement
un nouveau passé identique à l’ancien passé, faute d’informations suf­
fisantes, le passé étant - de la façon la plus objective qui soit - une
construction qui ne peut être réalisée qu’à partir d’informations conte­
nues dans le présent. On peut le voir aussi de façon complémentaire
dans le cadre de l’univers-bloc d’Einstein où le présent n’existe pas,
non plus comme une perte d ’informations mais ce qui revient au
même, comme une conséquence de la flexibilité de l’espace-temps: le
passé d’un espace-temps flexible doit pouvoir changer même si c’est
infiniment moins que son futur. C ’est quasiment obligatoire si l’es-
pace-temps évolue, puisque le présent n’existe pas pour la physique.
Pour bien comprendre alors comment une modification du passé aurait
pour conséquence inévitable la détection de matière noire, imaginez un
photon - ou rayon de lumière - qui met des milliards d’années pour
parvenir sur la terre depuis la galaxie d’où il a été émis ou réfléchi.
Avant même de nous parvenir, il est possible que l’objet de la galaxie
d’où il provient ait changé légèrement d’orientation A L’INSTANT
MEME DU PASSE où il a été émis - vous aurez du mal à l’imaginer,
c’est normal - auquel cas la trajectoire du photon change alors entière­
ment tout en restant une ligne droite, mais qui n’est plus dirigée vers la
terre. Dans ce cas le photon initialement dirigé vers la terre n’y par­
vient pas, se retrouvant absorbé ailleurs. Ceci permet d’expliquer de
façon très simple pourquoi une galaxie ou une étoile semble ne pas
rayonner suffisamment de lumière par rapport à sa masse. J’ai d’autres
variantes d’explication, sur la même base d’un passé changeant, mais
je préfère m ’abstenir d’en parler pour ne pas compliquer, la difficulté
première étant déjà d’accepter l’idée folle que la trajectoire d’un pho­
ton puisse changer simultanément dans toute sa ligne de temps.

U énergie noire
Admettons que votre théorie explique la matière noire, auquel cas vous
ne trouvez pas qu’elle aurait un goût d ’inachevé si elle n ’expliquait
pas du même coup l ’énergie noire ? Avez-vous des idées sur cette ques­
tion ?
Ben voyons, et puis après tout vous avez raison, puisque je pousse déjà
très loin le bouchon autant le pousser à fond. Effectivement, j ’ai des
idées sur l’énergie noire mais elles sont encore plus spéculatives que
pour la matière noire. Néanmoins elles restent simples et d’après ces
idées, vous avez raison, il y aurait bien un lien avec l’énergie noire, car
là aussi nous aurions une conséquence du fait que le passé peut chan­
ger. Je m ’explique. Dans mon livre j ’ai parlé d’une loi de convergence
des parties qui décrirait la manière dont le déterminisme inversé pour­
rait opérer. Il faut pour cela partir de l’idée que le passé se recrée sans
cesse là où il n’est plus assez configuré et à partir du présent, parce
qu’il perd de l’information. Cette perte d’information est une consé­
quence de l’indéterminisme macroscopique, elle est purement méca­
nique et elle est due à l’irréversibilité, mais ce n’est là qu’une irréversi­
bilité apparente qui signifie simplement que plusieurs passés devien­
nent possibles au lieu d’un seul, localement dans le temps, et d’après
moi la mécanique rétrocausale choisit le plus simple, c’est-à-dire celui
qui ordonne le plus le passé à partir de toutes les traces physiques.
Je prends un exemple. Supposez que je me sois blessé légèrement lors
d’une balade il y a un an. Entre-temps cette égratignure n’existe plus,
toutes les cellules de ma peau ont été renouvelées, toute trace de sang a
disparu en dehors de moi, je pourrais même l’avoir totalement oublié
et personne ne m’a vu me blesser. Comment faites-vous pour retrouver
mon passé dans ces conditions? Pourtant s’il existe encore, il faut bien
qu’il conserve une structure compatible avec mon présent, donc la plus
probable. Et s’il peut changer, que pensez-vous qu’il fasse? Mon idée
est donc que lorsque le présent a perdu toute trace d’un certain passé,
ce passé se recrée de la façon la plus simple qui soit, en suivant la ligne
de moindre entropie. Cela veut dire que dans ce nouveau passé, je ne
me suis pas blessé. Remarquez qu’il ne suffit pas que mes cellules
aient perdu toute trace, il faut aussi que toute trace ait disparu de mon
cerveau, or ceci pourrait aider à comprendre certaines guérisons spon­
tanées : on pourrait peut-être en garder le souvenir, vu qu’on ne sait pas
où se loge la mémoire, mais celui du traumatisme dans le cerveau
devrait être effacé. Éliminez le traumatisme du cerveau et toute trace
matérielle disparaît. Ne serait-ce pas ce que font les guérisseurs ? Je me
demande même si cela n’expliquerait pas l’effet placebo.
Maintenant, revenons à l’énergie noire. Elle agit sur l’univers en
contribuant de façon inexplicable à son expansion, ce qui veut dire
qu’elle a tendance à contracter plus que prévu l’univers dans le sens
inverse, en le faisant donc retourner plus facilement vers le big-bang.
Or il se trouve que le big-bang est justement extrêmement ordonné car
son rayonnement est trop homogène, ce que les physiciens ont du mal
à expliquer. D ’où mon idée: le big-bang n’est pas un début mais une
fin. L’univers range ses jouets, permettez-moi l’expression. Il réduit à
la plus simple expression tout ce dont nous sommes issus en garantis­
sant simplement la causalité. Or ce processus de simplification qui
nous fait retourner vers le big-bang pourrait fort bien agir sur l’espace-
temps en facilitant sa contraction vers le big-bang, ce qui expliquerait
l’expansion anormale dans le sens inverse. Bien sûr, il ne s’agit là que
d’une idée, que je serais bien en peine de valider quantitativement.

L’évolution des espèces


Est-ce que le changement du passé pourrait expliquer bien d ’autres
choses encore. Par exemple, vous avez parlé d ’un hasard démesuré à
propos du Darwinisme. Donc, est-ce que cela pourrait permettre de
mieux comprendre l ’évolution des systèmes vivants ?
Tout à fait, j ’attendais qu’on me pose cette question. Je suis de plus en
plus convaincu du fait que l’information emmagasinée dans nos gènes
a quelque chose de quantique. Si l’on part de cette hypothèse, alors on
peut expliquer les mutations créatives. Je m’explique. Dans nos vies,
nous suivons une ligne temporelle, un tunnel de vie normalement
déterministe, mais comme je vous l’ai expliqué, nous pouvons parfai­
tement changer de ligne temporelle, donc changer notre futur, lorsque
notre esprit parvient à faire entrer de nouvelles informations dans notre
cerveau. Le problème est qu’à partir de notre nouveau futur ainsi créé,
la mécanique a du mal à expliquer notre ancien passé car il devient
improbable. Tout va bien si l’on remonte de ce nouveau futur jusqu’au
présent où l’on a emmagasiné ces nouvelles informations, mais que se
passe-t-il ensuite vers le passé? La mécanique ne dispose pas des
anciennes informations qu’il lui faudrait alors prendre en compte pour
expliquer notre ancien passé, donc elle recrée un nouveau passé com­
patible avec notre nouveau futur, ce qui revient à lui faire stocker ces
nouvelles informations dans nos gènes. En quelque sorte, la méca­
nique nous recrée ainsi un nouveau passé à partir duquel nous serions
automatiquement allés vers notre nouveau futur. Elle nous fait ainsi
acquérir de nouvelles dispositions, de nouveaux dons, de nouveaux
talents, en stockant tout ce qu’elle peut de nos acquis dans nos gènes.
Probablement pas tout, mais c’est possible, et ça éviterait de convo­
quer un hasard démesuré pour expliquer l’évolution des espèces.
Et par-dessus tout, nous aurions là l’essence même du processus de
création des mondes dans l’univers, car ne croyez pas que la vie se
limite aux plantes, aux animaux et aux hommes. Notre planète elle-
même est bien vivante comme bien d ’autres choses encore, et j ’affirme
même qu’elle a une conscience, mais la démonstration fera l’objet
d’un prochain livre.
Conclusion

Lorsque j ’ai commencé la rédaction de cet ouvrage, je n’avais qu’une


idée intuitive du mécanisme des synchronicités, et j ’étais loin de me
douter qu’en travaillant cette intuition, en l’analysant, en la structurant
à l’aide des enseignements de la physique moderne, je serais amené à
tirer un très long fil qui donnerait corps à des concepts aussi mysté­
rieux que l’esprit ou l’âme, et plus étonnant encore, à attribuer une
fonction physique à l’Amour, en tant que substance fondamentale de
transport des effets de la seconde causalité.
Était-ce un délire de mon imagination? Je ne suis pas arrivé à cette
conclusion, tout en ayant bien conscience que j ’avais franchi des
limites qui me dépassaient en tant que simple mortel. J’ai donc pris le
risque de la liberté de pensée.
J’étais loin de me douter que cette théorie qui finissait par émerger
toute seule à partir des présupposés de notre libre arbitre et de l’omni­
présence du futur, fournirait aussi une voie d’explication à bien d’au­
tres choses que les coïncidences: l’instinct, l’intuition, les divinations,
l’effet placebo, et même les médecines douces et les effets étonnants
des disciplines orientales, visant à accroître à mon sens notre récepti­
vité à la seconde causalité, par la pratique du vide intérieur.
Je ne fais ici que mettre le doigt sur de nouveaux fils directeurs que je
ne vais évidemment pas « tirer » moi-même, car le travail à faire serait
phénoménal. Même si je pense avoir réalisé mon objectif en ce qui
concerne les coïncidences, il reste encore dans ce domaine précis un
travail considérable à faire, ne serait-ce que pour parvenir à faire ren­
trer le sujet du temps dans le domaine de l’expérimentation scienti­
fique.
Ce sujet du temps a été abordé de façon remarquable dans plusieurs
ouvrages littéraires [12] [13] [14] par le physicien français Étienne
Klein, à qui je rends hommage car c’est lui qui a ouvert la brèche dans
laquelle je me suis faufilé. Il est à ma connaissance le premier physi­
cien à avoir fissuré le mur de l’irréversibilité en montrant du doigt
l’endroit même où quelque chose d’important ne tournait pas rond en
physique, en commençant à tapoter. On pourrait déplorer qu’après
l’avoir vu créer ou désigner cette fissure je sois arrivé avec une grosse
masse par-derrière, mais ceux qui connaissent bien cette fissure pour­
raient aussi faire remarquer que je n’ai fait qu’enfoncer une porte
ouverte.
Je vois déjà mes collègues physiciens les plus compréhensifs me dire :
« Tu n’aurais pas dû dire les choses comme ça ! ». Or s’il est déjà déli­
cat de vulgariser une théorie ardue sur laquelle tout le monde est d’ac­
cord, que dire si en plus elle fait débat parce qu’on a osé répondre
« oui » à la provocation suivante: « Prétendez-vous qu’une tornade
puisse reconstruire une habitation? ».
Si avant que le mur de l’irréversibilité ne soit fissuré on ne voyait pas
vraiment, ou on ne voulait pas voir, qu’il était une construction artifi­
cielle, c ’était parce que l ’accumulation considérable de résultats
conformes à l’expérience et de retombées technologiques immenses de
la physique statistique, était éclatante de succès !
Pourtant, il y a dans cette physique une sorte de déséquilibre entre son
potentiel expérimental et technologique d’une part et ses équations de
base d’autre part, lesquelles sont fondées sur le hasard: les statistiques
et les probabilités. Il s’agit d’un édifice empirique auquel il manque
une vision fondamentale élégante. Ce manque d’élégance étant à mon
sens un signe d’incomplétude révélateur d ’un oubli essentiel, il a
contribué, si mon diagnostic est exact, à entretenir très longtemps une
illusion dans notre vision du monde : celle de la causalité !
Car le hasard est le grand ami de la causalité, celui qui l’a encouragé à
conserver sa sœur enfermée dans le garage, alors que beaucoup d’in­
dices nous portaient à croire que la causalité avait une sœur. Il n’em­
pêche que c ’est la science elle-même - et non pas la religion - qui,
toutes proportions gardées, nous invite aujourd’hui à revaloriser la
place de l’homme dans l’univers à travers le principe anthropique*
[27] et le paradoxe de l’observateur en mécanique quantique, et à
constater que le hasard ne témoigne que de cette place encore laissée
vacante. Mais à oser nous y asseoir, nous constatons que nous sommes
des co-créateurs de notre réalité, des co-créateurs de l’univers lui-
même.
Ne vaudrait-il donc pas mieux pour nous, êtres humains, que nous
avancions en intégrant ces nouvelles connaissances au lieu de passer
notre temps à les renier ou à les ignorer?
Il faut bien se rendre à l’évidence: je ne fais ici qu’enfoncer un clou
qui a déjà pénétré les esprits non scientifiques, et si ce n’est pas le sys­
tème de la science - à supposer qu’il soit unitaire - qui prend en main
le nouveau paradigme que l’humanité est en train d’intégrer peu à peu
sans elle, alors cette science en sera de plus en plus réduite à opérer
dans le domaine de la technologie uniquement ; et ce qui en ressortira
sera purement et simplement un nouveau système de croyances qui
cherchera à nous imposer des idées et des préceptes de vie que nous ne
comprendrons pas plus qu’avant !
Et à l’injonction « Aimez-vous les uns les autres! » on répondra
encore: « oui bien sûr, on est tous d’accord là-dessus, mais on aimerait
bien comprendre pourquoi » ?
Admettons que nous n’ayons absolument pas besoin de la science pour
nous aider à aimer notre prochain, et voyons les conséquences d’un tel
retrait de la science par rapport à tout ce qui touche à l’être humain.
Prenons simplement l’exemple de la voyance: la science nous dit qu’il
ne faut pas croire à la voyance car tout cela n’est qu’un ramassis
d’inepties de charlatans. Que dit à ce propos la double causalité?
Eh bien, la théorie de la double causalité nous dit qu’il ne faut pas
croire à ce qui est annoncé par les voyants, car toutes ces visions sont
susceptibles de changer en permanence. N ’est-ce pas plus simple et un
peu plus respectueux, tout de même?
Je pourrais citer maints autres exemples dans le même genre. En fait il
suffirait que la science commence à s’intéresser à la double causalité
pour qu’on arrive enfin à se débarrasser des débats sans fin et stériles
qui opposent les rationalistes et les intuitifs, les partisans du « bon
sens » et ceux de la foi, etc.
Ce n’est pas parce qu’on est rationnel qu’on n’est pas intuitif, et inver­
sement. Il faut arrêter d’entretenir perpétuellement cette opposition
entre les adeptes de la première causalité et ceux de la seconde.
Les deux causalités sont complémentaires !
On connaît bien la première. L’intérêt majeur de la seconde est qu’elle
nous présente une nouvelle vision du monde dans laquelle l’esprit
humain reprend toute sa place, en ne se limitant plus à une conscience
qui serait un sous-produit des processus neuronaux à l’œuvre dans
notre cerveau physique.
Il s’ensuit une élévation spirituelle, une plus grande responsabilité, une
sensibilité morale accrue et un contrôle de soi. Car si la seconde causa­
lité repose sur le fait que nos pensées et en particulier nos intentions
sont agissantes, elles ne le sont fort heureusement qu’au prix de quali­
tés fondamentales de l’être nécessitant un retrait de l’ego et un don de
soi. C’est pourquoi il n’y a pas à avoir peur des conséquences d’une
sensibilité accrue à la seconde causalité. Nous devons seulement nous
méfier des manipulateurs qui voudraient nous faire prendre des vessies
causales pour des lanternes non causales.
Le don de soi qui émane sous forme d’Amour a la capacité de remode­
ler les amplitudes de probabilités affectées à nos différents potentiels
d’avenir, et cela a des conséquences non causales qui se traduisent par
l’amplification, parfois impressionnante, des probabilités de trouver
des chemins qui réalisent nos intentions.
Nous avons du mal à nous habituer à cette idée d’un futur que nous
serions susceptibles de modifier en permanence, parce que nous
croyons qu’au-delà de notre présent, rien n ’existe. Or c ’est une
croyance fausse, et Einstein a été le premier à nous l’avoir démontré.
Cette omniprésence de notre futur a cependant une conséquence très
intéressante, car bien que notre libre arbitre soit en apparence excessi­
vement accru par la seconde causalité, il n’en reste pas moins que la
plupart du temps, notre avenir est déjà déterminé, c ’est-à-dire tout
tracé. Nous avançons dans le temps comme à l’intérieur d’un grand
tuyau positionné dans toute l’étendue de notre futur. Nous pensons être
pleinement libres de nos actes, pleinement capables de les contrôler à
tout moment, mais en réalité rien ne change, tout est déjà là. Le tou­
riste qui voyage en autocar ou sur une barge se sent libre et peut même
être très heureux, car il peut bouger dans son véhicule, s’intéresser à
tout ce qu’il veut autour de lui, changer la composition de son déjeu­
ner, il ira simplement toujours au même endroit que les autres et ne
changera rien à sa vie déjà mémorisée par l’univers.
Ce touriste n’accomplit un réel acte de libre arbitre que s’il décide de
quitter son moyen de transport pour se débrouiller par ses propres
moyens. Mais à ce moment-là, le tuyau dans lequel il se trouve ne fait
que prendre une nouvelle position, et généralement pas sur toute
l’étendue de son futur. La plupart du temps, il l’aura juste un peu
décalé, l’espace d’une journée.
Et c’est ainsi qu’en règle générale, nous ne changeons strictement rien
à la structure de l’univers, passée ou future, et lorsque nous y chan­
geons quelque chose, notre tuyau ne fait que se repositionner, et l’uni­
vers ne fait que re-stabiliser à nouveau sa structure, passée et future.
Voila cette conséquence tout à fait paradoxale de la seconde causalité :
nous nous retrouvons la plupart du temps devant l’illusion de notre
libre arbitre !
N ’est-ce pas finalement mieux ainsi, plutôt que de supposer qu’à partir
d’un présent qui n’existe même pas, l’univers se recrée sans cesse
comme s’il nous attendait pour savoir ce qu’il doit faire? Cette der­
nière vision d’un univers qui « attend » l’homme n’est-elle pas exagé­
rément anthropocentriste, ou même égocentrique? N’est-il pas insensé
de considérer que l’univers aurait besoin de notre existence au présent
pour savoir comment il doit évoluer, comme s’il était désireux de satis­
faire tous nos ordres immédiats ?
Si la relativité générale a détruit la notion de présent, la mécanique
quantique est loin d’être en reste ! Car avec la Théorie de la Décohé­
rence, elle nous apprend que nous ne sommes en rien responsables du
contenu des choix effectués par l’univers au moment présent de nos
observations, car c’est l’environnement qui les prépare et pas nous. De
toute façon, la science nous a toujours poussés à croire que l’univers
n’a pas besoin de nous pour exister ! Sans nous, il pourrait encore exis­
ter dans toutes ses possibilités passées et futures, et il n’y aurait là
encore, aucune notion de présent.
Il est donc clair que la physique est tellement embarrassée par le pré­
sent qu’elle tend même à nous en expulser ! Et c’est pourquoi, à force
de vouloir s’en passer, elle finit par se passer de nous-mêmes et par
trouver son expression la plus cohérente dans la théorie des univers
parallèles, sans nous donner d’autre raison pour accepter tout ce gâchis
d’espace que de dire que finalement nous ne sommes rien. Or si nous
sommes au contraire importants à quelque chose, à quoi donc pour­
rions-nous l’être si ce n’est à imposer l’existence d’une seule et unique
réalité parmi tous ces univers ?
Mais quelle réalité pourrait-on bien privilégier, puisque la physique
nous interdit de la choisir dans le présent? Si nous sommes réellement
dotés de libre arbitre, comment fait-on pour l’exercer si l’univers choi­
sit le présent à notre place ?
Effectivement, on ne peut pas faire ce choix. On ne peut pas contrôler
notre avenir dans le présent. Tout ce que nous pouvons y faire, c’est
observer pour faire entrer dans la réalité ce que nous observons. Tout
va dépendre alors de ce que nous allons bien pouvoir observer, donc
tout va dépendre de notre degré d ’éveil et d ’écoute. Car si nous
sommes comme des somnambules dans un tuyau qui ne bouge pas, il
est évident que seul le hasard pourrait éventuellement bouger le tuyau !
Mais ce n’est même pas le cas, car même le hasard est impuissant !
Le hasard ne « bouge » rien du tout, étant donné qu’il n’est pas réel ! Si
en effet il était réel, alors il se déploierait selon toutes ses versions pos­
sibles. Or par définition ce qui est réel est unique. Le vrai hasard existe
mais n’est pas réel car il est anéanti par l’entrée dans le réel, par l’ob­
servation qui le transforme en faux hasard: un événement non aléa­
toire mais dont on ne connaît pas encore les causes car elles nous sont
cachées, étant donné qu’elles proviennent du futur !
Le hasard est cependant sainement requis, lorsqu’il est observé comme
tel, comme une carte joker que nous devons tendre parce que nous ne
savons pas l’interpréter ! Et je recommande un usage sans modération
de cette carte !
Mais il ne faudrait pas tomber dans l’excès inverse, par exemple celui
des joueurs de la bourse qui usent exagérément des lois de la causalité
et surtout de son grand ami le hasard, pour se remplir les poches tout
en créant de la fausse valeur pendant que nos industries se vident de
ressources.
Il est donc grand temps, vu les crises financières et économiques
actuelles, de se poser la question de savoir si à force d’accepter le
hasard comme faux frère de la causalité, nous ne sommes pas finale­
ment victimes d’une vaste tromperie !
Cette collusion entre hasard et causalité qui nous empêche de faire
émerger la seconde causalité est également à l’origine d’autres trompe­
ries, comme celle de la sélection naturelle. Il ne s’agit pas de remettre
en question ce principe à l’œuvre dans la nature mais de dénoncer son
statut exclusif qui voudrait tout expliquer à lui seul. Darwin n’avait
que partiellement raison. La nature met en œuvre d’autres principes
que la loi du plus fort ou du plus adapté pour faire évoluer les espèces,
car contrairement à ce qu’on nous apprend à l’école, des intentions
sont bel et bien à l’œuvre dans la nature, et contrairement au résultat
du hasard elles sont extrêmement généreuses.
Ces erreurs vers lesquelles la causalité nous a conduit sont loin d’être
les seules et elles sont souvent très graves. Il suffit d’observer le
monde actuel pour s’apercevoir que les responsables de sa dégradation
- et même de sa désagrégation - sont des systèmes économiques érigés
sur des principes hérités d’une causalité exclusive (concurrence effré­
née, matérialisme dialectique), quelles que soient leurs tendances poli­
tiques. Il est donc grand temps d’inclure la seconde causalité dans la
réflexion qui doit nous mener vers une société nouvelle.
La seconde causalité implique à l’évidence un niveau supérieur d’im­
plication, d’investissement, d’éveil ou de « vibration » de notre être.
Elle ne nous invite pas à comprendre mais plutôt à vivre et plus exac­
tement à être et à aimer. Les vides existentiels de nos sociétés consu­
méristes proviennent du fait qu’elles sont fondées sur le non-être, sur
l’ignorance du véritable sens de notre vie, ce sens qui consiste à créer
de la nouveauté harmonieuse en exploitant nos meilleures facultés de
co-création de l’univers et à plus modeste niveau, de notre environne­
ment planétaire. Car nous créons finalement ce que nous sommes et ce
que nous aimons. Notre ignorance de l’être nous a incités à négliger
notre environnement, et ceci bien que nous soyons issus de tribus
ancestrales qui y étaient extrêmement sensibles et qui le respectaient.
Elles percevaient intuitivement ce sens de leur vie à défaut de le com­
prendre, à travers un dialogue avec la nature. Je rends ici hommage à
nos ancêtres animistes* dont nous considérons souvent de façon
condescendante les visions sous la forme de niaiseries, alors que nous
ne faisons là qu’analyser leur psyché de la façon la plus niaise qui soit.
Nous avons donc de sérieuses leçons à apprendre.
Mais comment trouver le bon équilibre dans notre réflexion? Car il
n’est pas question, évidemment, d’abandonner la causalité !
La seconde causalité peut, si la première apprend à ne s’occuper que
du présent, devenir extrêmement efficace en n’étant plus parasitée par
un esprit raisonnant, obsessionnel et ressasseur qui n’a de cesse de pro­
jeter des scénarios futurs. Or ceux-ci ne font que remettre en question
nos intentions et annihiler leurs effets par le simple fait qu’ils veulent
sans cesse les adapter aux réalités. Lorsqu’au contraire l’intention
s’évade du présent en donnant l’impression de sombrer dans l’oubli,
elle peut alors investir le futur en toute quiétude et commencer à pro­
duire ses effets : laissez couler doucement votre amour de la vie dans
l’espace-temps en direction du présent pour réaliser vos vœux les plus
chers, non sans quelque préparation bien sûr.
La première causalité peut, si elle veut bien déléguer le futur à la
seconde, devenir à son tour extrêmement efficace dans le présent
comme il se doit, afin de nous centrer sur les actes nous permettant de
préparer la réalisation de nos objectifs. Le simple fait de ne pas avoir
besoin de réfléchir au futur car il est déjà en train de travailler pour
nous, libère en effet cette grande partie encombrée de notre cerveau
qui ne faisait qu’inhiber nos actes présents.
Les deux causalités sont donc parfaitement complémentaires et pour­
raient soulever des montagnes si elles savaient agir de concert. Or nous
avons justement aujourd’hui plus que jamais, besoin de soulever des
montagnes pour guérir notre planète et reconstruire notre système
d’échanges économiques. Cela ne peut pas se faire sans équilibre, sim­
plement en priant par exemple. Même si la prière est utile, on ne peut
pas attendre que le ciel s’occupe de tout. C’est pourtant une attitude
qu’ont de nombreuses personnes que l’on pourrait classer dans la caté­
gorie des adeptes du « new âge », et qui se distinguent généralement
par un comportement excessivement laxiste et confiant. Bien qu’il
faille bien reconnaître certaines vertus au fait de « planer à quinze
milles » face à certaines situations, il faut aussi dénoncer ici l’excès du
« laisser agir » dont les conséquences peuvent être aussi graves que de
sombrer dans cet excès inverse de « source causale » qui est celui de la
manipulation.
La manipulation est loin d’être le seul excès de la causalité. Nous
savons, et souvent parce que nous y avons été initiés par le cinéma, à
quel point peuvent être insidieux les agissements de services secrets au
nom de la « bonne cause », à tel point que la question de la qualité de
la cause finit par disparaître elle-même au profit du pouvoir le plus
puissant. Et c’est ainsi que le principal excès de la causalité simple se
traduit généralement par la disparition de toute morale, au nom d’une
intelligence organisée, et dans le meilleur des cas d’un intérêt collectif
qui n’arrive à s’imposer qu’au détriment d’un autre intérêt collectif.
On peut assez facilement extraire les excès ou dérives des deux types
de causalité, car l’équilibre est fragile.
En ce qui concerne la première causalité, nous avons déjà identifié ses
deux principales faiblesses, l’ego et la peur. Pour compenser ces fai­
blesses, la première causalité a institué le pouvoir et la manipulation.
Le pouvoir comme expression la plus positive de l’ego, et la manipula­
tion comme antidote la plus efficace contre la peur. Le pouvoir repré­
sente la meilleure façon de valoriser l’ego de celui qui le possède, et la
manipulation est, en l ’absence de pouvoir, la meilleure arme de
contournement de la peur du pouvoir des autres.
L’enfermement de la sœur dans le garage conduit ainsi la causalité à
fabriquer ces sous-produits que sont l’ego, la peur, le pouvoir, la mani­
pulation et l’immoralité.
En ce qui concerne la seconde causalité, on peut affirmer sans risque
de se tromper que ses dérives sont la paresse ou le laisser-aller d’une
part, le sectarisme ou la dévotion excessive d’autre part. Ils résultent
d’un déséquilibre dans l’application des deux grands principes de la
seconde causalité que nos religions nous apprennent sous la forme :
« Demande et tu recevras », et « Aide-toi, et le ciel t’aidera ». L’équili­
bre dans l’application de ces principes nécessite, comme dans le cas de
la causalité, un travail personnel à la fois intérieur et extérieur. Lorsque
cet équilibre est rompu et que l’on ne fait qu’un travail intérieur en
demandant mais sans s’aider suffisamment, on tombe dans le premier
piège du laisser-aller. Lorsque l’excès porte au contraire sur une prédo­
minance de la qualité de l’action par rapport à la qualité de l’investis­
sement intérieur, on tombe dans le piège des disciplines et des pré­
ceptes de vie qui nous sont dictées par des sectes ou des religions
« invasives » prétendant connaître la Voie de Dieu, ce qui constitue
pour elles une manière de nous asservir.
On voit ainsi que l’équilibre n’est pas facile à atteindre, mais que quoi
qu’il en soit il consiste à toujours rester dans la voie du milieu, en évi­
tant les extrêmes. De ce point de vue, il nous paraît essentiel d’écouter
les leçons du bouddhisme, bien que cette religion semble plutôt privi­
légier la seconde causalité.
Vivons-nous pour être heureux? Je ne le crois pas, car le sens de notre
vie se trouve dans ce que nous avons à donner, et non dans ce que nous
pouvons recevoir. Le plus grand bonheur réside dans le don de soi, car
il a des vertus amplificatrices. Elles ne se voient pas parce qu’il faut un
certain temps. Le temps que tout ce que nous donnons imprègne le ter­
rain, grossisse les rus, coule doucement en s’infiltrant, le temps que la
magie se produise.
Alors il se met à pleuvoir de la chance et du bonheur, et ceci amplifie
nos dons de manière communicative. Si l’amplification se produit
même quand nous sommes seuls, elle est encore plus importante en
groupe, car alors nous ne recevons plus uniquement de nous-mêmes,
mais aussi des autres.
Voilà le secret de la magie du temps: l’Amour qui peut être créé et
auto-amplifié par chaque être humain, faisant de lui une parcelle de
Dieu.
Est-ce que le pouvoir de la seconde causalité ne pourrait pas se recon­
naître à cet Amour, à notre sensibilité à sa magie, dévoilée par la
lumière intérieure qui émane de chacun d’entre nous, rayonnant à la
mesure de notre degré d’élévation spirituelle?
Remerciements

remercie Alix de Montai


pour son intervention
à la demande
de l’Ange
Glossaire

Acausalité: principe selon lequel certains événements que l’on ne par­


vient pas à expliquer selon la loi de causalité sont reliés par le sens et
la ressemblance.
Actualisation: processus d’entrée dans la réalité présente d’un futur
potentiel. L’actualisation est déclenchée par l’observation et dépend
d’un choix opéré par libre arbitre ou par conditionnement. Elle trans­
forme une existence possible en réalité, autrement dit elle choisit parmi
un ensemble de réalités potentielles existant déjà au-delà du présent,
une réalité unique à vivre dans le présent.
Aléa: tournure imprévisible que peut prendre un événement, ou évolu­
tion imprévisible que peut avoir un système physique. Il existe plu­
sieurs types d’aléas, parmi lesquels on peut citer les aléas causés par la
dispersion (voir aléa dispersif) et ceux qui sont dus au hasard. Les
aléas sont intéressants en double causalité dans la mesure où ils sont
indéterministes.
Aléa indéterministe : événement dont il est impossible par principe de
dater le moment ou de prévoir la position avec exactitude, même si
l’on en connaît exactement les conditions initiales. Par exemple, il est
impossible de déterminer à moins de 100 mètres ou 3 secondes près la
position exacte que peut avoir au bout de 100 km une voiture roulant
sur l’autoroute, même si elle est équipée d’un stabilisateur de vitesse et
qu’elle n’est freinée par aucun obstacle.
Aléa dispersif : aléa particulièrement indéterministe du fait qu’il est
causé par la dispersion de ses possibilités d’évolution. Par exemple, un
rocher qui dégringole une pente montagneuse est très dispersif à cause
de ses multiples rebonds sur différentes aspérités du sol (autres roches
notamment), qui dispersent ses trajets possibles de façon de plus en
plus imprévisible. C’est l’amplification à chaque rebond de sa disper­
sion, qui au bout d’un certain nombre de rebonds devient démesurée,
qui rend l’aléa indéterministe, c ’est-à-dire résistant à des variations
infiniment petites des conditions initiales.
Amour: matière ou énergie de l ’esprit, mémorisée dans l’espace
omniprésent, hors du temps présent, sous la forme de probabilités
d’actualisation des possibles. Plus l’amour est grand, plus la probabi­
lité d’actualisation de ce qui est aimé est grande. Il ne faut cependant
pas confondre l’amour avec les différents stades de son cycle, comme
par exemple le désir, qui seraient susceptibles d’en amoindrir les effets
en l’empêchant de circuler (voir cycle de l’amour).
Animisme : philosophie qui attribue une âme aux phénomènes et
objets naturels. L’animisme est la seule philosophie qui comprend
intrinsèquement la possibilité d’un dialogue entre l’esprit et la nature,
dialogue permis par la double causalité.
Anthropique (principe) : constat selon lequel l’univers a été réglé très
précisément pour l’émergence de la vie et de la conscience
Anthropocentrisme: philosophie qui fait de l’homme le centre et la
finalité du monde.
Arbre de Vie(s) : métaphore de la théorie de la double causalité, qui
représente sous la forme de parcours le long des branches d’un arbre
nos différents potentiels d ’avenir omniprésents.
Bifurcation: modification brutale dans le comportement d’un système
dynamique qui le fait passer dans l’un ou l’autre de deux états très dis­
tincts, de façon parfois totalement imprévisible et indéterministe. Plus
généralement, se dit d’un croisement entre deux possibilités d’évolu­
tion qui semblent pouvoir relever d’un « libre » choix.
Big-bang: Théorie selon laquelle l’univers est en expansion et en
refroidissement depuis environ quinze milliards d’années.
Causalité : principe fondamental selon lequel les causes précèdent les
effets.
Causalité (seconde) : causalité en sens inverse du temps reposant sur
le déterminisme inversé. La seconde causalité est donc une rétrocausa-
lité déterministe, ce qui a l’intérêt de résoudre les problèmes posés par
la rétrocausalité, dont la réalité est discutée. Une autre raison de diffé­
rencier la seconde causalité de la rétrocausalité est que cette dernière
suppose que le passé « précède » le futur, ce qui n’est pas le cas de la
seconde causalité qui suppose leur simultanéité.
Chaos (théorie du) : propriété (et la théorie qui la décrit) d’un système
dynamique dont le comportement est tellement sensible aux conditions
initiales que son état devient totalement imprévisible et indéterministe
Coïncidence : rencontre fortuite ou événements simultanés à caractère
improbable et présentant une ressemblance.
Conditionnement: se dit d’un état mental de l’être qui donne l’illu­
sion de la liberté alors que l’évolution de l’être est en réalité détermi­
née d’avance par des processus souvent inconscients. L’idée que nous
serions toujours conditionnés est amplifiée par la découverte par les
neuroscientifiques que notre conscience elle-même est un produit de
l’activité neuronale à l’œuvre dans notre cerveau.
Conditions initiales: état d’un système dynamique ou d’un aléa au
début de son évolution.
Cordes (Théorie des) : théorie fondée sur l’idée que les particules élé­
mentaires ne sont pas des points mais des bouts de cordes infinitésima-
lement petits (1033 cm), attribuant ainsi à l’espace des dimensions sup­
plémentaires invisibles.
Cycle de l’amour: le cycle de l’amour est celui de la seconde causa­
lité. Il consiste en une boucle de rétroaction entre le présent et le futur,
caractérisée par la nécessité d’attendre que le temps fasse son œuvre
ou que l’univers travaille à notre place pour réaliser automatiquement
nos intentions. Les différents stades du cycle de l’amour sont le désir,
le souhait, l’intention, l’attention, la foi, la confiance, l’aspiration et
enfin la joie. Les quatre premiers stades correspondent au don de soi,
qui transforme l’amour en énergie potentielle investissant le futur tout
en nous donnant la sensation de sa disparition. Les quatre stades sui­
vants correspondent à l’attente que le temps ou l’univers fasse son
œuvre en faisant revenir l’amour dans le présent, après avoir « coulé »
du futur vers le présent.
Dialogue avec l’Ange: se dit d’un dialogue intime entre l’être situé
dans le présent et l’autre partie de l’être généralement située quelque
part dans le futur, là où l’intention se focalise. Ce dialogue exploite une
boucle de rétroaction de la seconde causalité qui permet de renvoyer
dans le présent des informations issues du futur en réponse à des
demandes faites dans le présent, par l’intermédiaire d’un déploiement
ou dépôt de l’intention sous forme de questions à l’Ange. Ce dialogue
peut utiliser comme support tous les phénomènes naturels et en parti­
culier ceux qui sont sujets à des aléas. On parle aussi de « dialogue
avec les esprits ».
Dimensions: directions de l’espace-temps. Notre espace-temps phy­
sique possède quatre dimensions que sont les directions vers le nord,
vers l’est, vers le haut et vers le futur, soit trois dimensions spatiales et
une dimension temporelle. Notre espace-temps réel aurait cependant
d’autres dimensions d ’après la Théorie des Cordes: six dimensions
spatiales supplémentaires, qui au lieu d’être des directions droites
seraient des directions repliées sur elles-mêmes, extrêmement petites
et par conséquent invisibles.
Dimensions intérieures: d’après la théorie de la double causalité, les
dimensions supplémentaires de l’espace et qui nous sont invisibles,
quelle que soit la théorie qui les prévoit, seraient des dimensions inté­
rieures à notre psyché, et auraient pour intérêt de garantir notre libre
arbitre qui s’exprimerait par un déplacement le long de ces dimensions
supplémentaires.
Déterminisme: conception philosophique selon laquelle l’évolution
de tous les phénomènes physiques est prévisible par la causalité et est
théoriquement calculable à l’avance si l’on connaît toutes les condi­
tions initiales.
Déterminisme inversé: Déterminisme en sens inverse du temps,
reposant sur l’idée que le passé est déterminé par le présent grâce aux
traces du passé et à la Loi de Convergence des Parties. Le détermi­
nisme inversé serait donc beaucoup plus déterministe que le détermi­
nisme classique, dans la mesure où les traces du passé sont beaucoup
plus nombreuses et certaines que les traces du futur.
Déterministe: se dit d’un système dont l’évolution ultérieure est com­
plètement fixée par des lois bien établies.
Entropie: quantité qui mesure le désordre dans un ensemble donné
d’atomes ou de molécules. Selon la seconde loi de la thermodyna­
mique, l’entropie d’un système isolé ne peut qu’augmenter. Il s’ensuit
que selon cette loi, le désordre de l’univers ne peut qu’augmenter avec
le temps, or cette conclusion est âprement discutée dans la commu­
nauté des physiciens.
Espace intérieur: concept de la double causalité qui attribue à notre
psyché les dimensions supplémentaires invisibles de l’espace intro­
duites par la Théorie des Cordes ou par celle des univers parallèles, et
la capacité de nous mouvoir dans ces espaces « extérieurs » parallèles.
Le passage d’un espace extérieur à un autre résulte du choix effectué
au moment de l’observation d’une alternative entre deux choix possi­
bles, ou bifurcation.
Esprit: partie de l’être ou de la conscience qui n’est pas déterminée
par les processus à l’œuvre dans notre cerveau. L’esprit se loge en
dehors du présent dans tout l’espace omniprésent de nos futurs possi­
bles (et/ou éventuellement dans notre passé). Il est déplacé par nos
intentions et sa capacité à influer sur notre présent est déterminée par
la capacité de l’être à « aimer », l’amour étant supposée être l’essence
même de l’esprit, sa « matière » fluide, son énergie, présente dans l’es­
pace sous la forme de probabilités.
Gravitation (loi de): loi d’attraction mutuelle de corps matériels dont
l’intensité est inversement proportionnelle au carré de leur distance.
Graviton : particule hypothétique transmettant la force de gravitation,
activement recherchée par les physiciens dans les accélérateurs de par­
ticules, mais encore jamais observée.
Hasard: se dit d’un événement dont on ne connaît pas les causes. 11
existe donc deux types de hasard. Le premier type de hasard est celui
dont on ne connaît pas les causes parce qu’elles sont cachées, couram­
ment appelé hasard déterministe. Le second type de hasard indétermi­
niste est celui dont on ne connaît pas les causes parce qu’elles n’exis­
tent pas. L’existence de ce second type est niée par les partisans du
déterminisme ou de la Théorie des Variables Cachées. La Double Cau­
salité considère que les variables peuvent être cachées par le fait
qu’elles sont « futures », ce qui revient à dire que le hasard n’existe
pas.
Indéterminisme : par opposition au déterminisme, conception philo­
sophique niant le fait que tout événement puisse être prévisible par une
loi physique. La principale conséquence de l’indéterminisme est
l’existence d’aléas, c’est-à-dire de possibilités multiples de l’évolution
d’un système.
Indéterministe: se dit d’un système particulièrement sujet à l’indéter­
minisme, c ’est-à-dire présentant des aléas rendant impossibles par
principe la prévision de son évolution.
Interaction : pour expliquer le comportement de la matière et des dif­
férents états notamment solides, les physiciens font appel à quatre
forces fondamentales ou interactions: forte, faible, électromagnétique
et gravitationnelle.
Irréversibilité: l’irréversibilité est une caractéristique très générale
des phénomènes d’évolution observés à notre échelle macroscopique,
et se traduit par l’impossibilité évidente d ’une évolution à l’envers.
Cependant, l’irréversibilité est absente des équations fondamentales de
la physique, et il s’agit en conséquence d’une irréversibilité de fait et
non de principe, qui correspond à une réversibilité de principe mais à
probabilité extrêmement faible.
Libre arbitre: hypothèse philosophique selon laquelle nous serions
réellement libres, en tant qu’êtres humains dotés d’une conscience ou
d’un esprit, et à ce titre capables de nous déterminer par nous-mêmes,
malgré nos conditionnements. La liberté est le postulat de base de la
théorie de la double causalité. Il s’ensuit que nos futurs possibles sont
innombrables comme les branches d’un arbre, c ’est pourquoi nous
décrivons cette liberté que nous avons de maîtriser notre avenir par la
métaphore de l’Arbre de Vie.
Loi de Convergence des Parties : Loi hypothétique et manquante
reposant sur le déterminisme inversé et permettant de calculer le passé
à partir du présent, ou le présent à partir du futur. Cette loi est fondée
sur la réversibilité des équations fondamentales de la physique et se
positionne comme une loi inverse de la loi d’entropie croissante : elle
produit de l’ordre au lieu de produire du désordre.
Loi d’attraction universelle (des trajectoires de vies ou lignes tem­
porelles) : généralisation de la Loi de Convergence des Parties à des
« trajectoires de vies ». Compte tenu de l’omniprésence du futur et du
passé, lorsqu’une modification a lieu dans une trajectoire de vie, elle
est instantanée sur toute la trajectoire, y compris la partie de cette tra­
jectoire qui n’existe qu’à l’état de potentiel non encore réalisé. C ’est
pourquoi cette loi est dynamique et a pour effet de rapprocher (d’atti­
rer) les trajectoires qui sont reliées par des intentions convergentes.
Cette « attirance » est supposée être en parfaite analogie avec la gravi­
tation universelle qui, quant à elle, agit sur des trajectoires d’objets
matériels (massifs).
Loi de gravitation universelle : loi établie par Newton puis générali­
sée par Einstein et qui décrit la manière dont des trajectoires d’objets
massifs s’attirent entre elles, respectivement en raison inverse du carré
de leur distance et en raison de la courbure de l’espace-temps.
Magie : ce dit d’un phénomène remarquable et impossible à compren­
dre dans le cadre de la causalité, semblant violer les lois physiques
connues. La magie est un produit de la seconde causalité et elle est
amplifiée par la circulation de l’amour.
Matérialisme: doctrine philosophique qui affirme que rien n’existe en
dehors de la matière et que l’esprit lui-même est entièrement matériel.
Matérialiste: partisan du matérialisme.
Mécanique quantique : branche de la physique qui décrit le compor­
tement des atomes ou particules et leur interaction avec la lumière, en
faisant jouer un rôle essentiel aux probabilités. Les atomes n’existent à
tout instant que sous la forme de superpositions de tous leurs états pro­
bables. Cette superposition d’états possibles est encore appelée fonc­
tion d’onde. L’observation de l’état d ’une particule au moyen d’un ins­
trument l’oblige à prendre un seul état, ce phénomène étant appelé
« réduction de la fonction d’onde (en un seul état) ». Les implications
philosophiques de la mécanique quantique sont considérables et ont
contribué à modifier progressivement la vision du monde des physi­
ciens au cours du XXe siècle.
Métaphore : modification de sens et de représentation d’un concept
sous la forme d’une image ou d’une comparaison ayant pour but de
simplifier la compréhension du concept d’origine.
Métaphysique: Recherche philosophique ayant pour but la connais­
sance et la compréhension de l’« être ».
Multidimensionnel: Se dit d’un espace qui possède plusieurs dimen­
sions*, et généralement plus de quatre.
Murphy (loi de) : Principe empirique énonçant que si quelque chose
peut mal tourner, alors cette chose finira infailliblement par mal tour­
ner, particulièrement lorsqu’on aura le plus besoin que cela n’arrive
pas.
Observateur: rôle d’observation consistant à faire rentrer dans la réa­
lité une seule version du monde ou d’une évolution individuelle, parmi
de multiples versions possibles existant simultanément avant d’être
observées. Ce rôle implique ainsi la distinction entre réalité et exis­
tence, la réalité étant par définition unique alors que l’existence ne peut
concerner que des réalités non vécues c’est-à-dire non encore obser­
vées. Ce rôle de l’observateur est une généralisation du rôle de l’obser­
vateur en mécanique quantique.
Omniprésence: présence en différents lieux mais toujours actuelle.
Papillon (effet): se dit d’un phénomène tellement sensible aux condi­
tions initiales qu’il peut se traduire par une minuscule cause capable
d’engendrer des effets gigantesques, par exemple un battement d’ailes
d’un papillon qui engendre une tempête.
Paradigme: façon de concevoir le monde partagée par les membres
d’une même communauté scientifique et parfois par toute une société.
Potentiel: se dit d’une trajectoire de vie possible mais non encore réa­
lisée. Un potentiel se mesure par sa probabilité d ’actualisation.
Relativité (Théorie de la) : théorie géométrique d’Einstein énoncée en
1905 et qui établit une intime connexion entre l’espace et le temps.
Ces notions dépendent du mouvement de l’observateur et les notions
de simultanéité et de présent perdent leur sens : tout est relatif à la posi­
tion et à la vitesse de l’observateur.
Rétrocausalité : causalité en sens inverse du temps, concept initiale­
ment émis pour justifier l’observation apparente de particules qui
remontent le temps. Ce concept est cependant contesté par les physi­
ciens qui ont introduit les antiparticules comme justification alterna­
tive, confirmée par l’expérience. A ne pas confondre avec la « seconde
causalité » qui est aussi une causalité en sens inverse du temps, mais
elle est déterministe et ne suppose pas que ses effets « précèdent » ses
causes.
Réversibilité: principe à l’œuvre dans toutes les équations fondamen­
tales de la physique et qui les rend symétriques par rapport au temps,
ce qui implique que tous les phénomènes devraient pouvoir évoluer à
l’envers comme à l’endroit, or ce n’est pas ce qu’on observe dans la
nature. D ’autres équations de la physique, valables uniquement à
l’échelon macroscopique pour un grand nombre de particules, expli­
quent cependant cette irréversibilité. Ces équations empiriques font
intervenir le hasard et les probabilités et sont issues de la physique sta­
tistique.
Spiritisme, spirite: doctrine selon laquelle l’homme est composé d ’un
corps périssable et d’un esprit immortel susceptible de se détacher du
corps et de lui survivre.
Statistique (Physique) : branche de la physique ayant pour but d’ex­
pliquer et de prédire le comportement et l’évolution de systèmes phy­
siques comportant un grand nombre de particules microscopiques : ces
systèmes sont alors eux-mêmes qualifiés de « macroscopiques ». Les
calculs de physique statistique se caractérisent par le fait qu’ils font
intervenir massivement le hasard dans les choix de trajectoires de par­
ticules après collision.
Synchronicité : coïncidence signifiante c ’est-à-dire dont le caractère
mystérieux est porteur d’un sens. Elle se caractérise par le fait que le
psychisme de la personne semble d’autant plus impliqué que sa proba­
bilité est plus faible, laissant penser à un « signe du destin ».
Univers parallèles : univers existant en parallèle mais « a priori »
déconnectés du nôtre, c’est-à-dire inaccessibles à notre observation. La
mécanique quantique et la Théorie des Cordes prévoient l’existence de
ces univers parallèles.
Variables cachées (Théorie des): l’existence de variables cachées est
invoquée par les détracteurs de l’interprétation majoritaire de la méca­
nique quantique selon laquelle elle est indéterministe : il est impossible
de prévoir l’état que va prendre une particule lorsqu’elle sera observée,
cet état étant attribué au hasard le plus absolu. Les partisans des varia­
bles cachées, comme l’était Einstein, refusent cet indéterminisme et
considèrent qu’il n’est qu’apparent et sera comblé par les progrès de la
physique lorsque l’on sera à même d’expliquer les « causes cachées »,
et plus généralement celles de tout système « en apparence » indéter­
ministe.
Annexe
Indéterminisme et TDC

Pour illustrer l’indéterminisme de la nature, prenons l’exemple d’un


rocher qui dévale une pente de montagne. La trajectoire de ce rocher
est rendue dispersive par ses multiples rebonds sur les aspérités du sol,
sur la végétation ou sur d’autres rochers. Après chacun de ses rebonds,
l’étendue des trajectoires possibles du rocher est amplifiée, ce qui rend
son trajet de plus en plus imprévisible. À partir d’un certain nombre de
rebonds, il devient impossible de faire la moindre prévision de la posi­
tion du rocher, à moins de connaître avec une prévision quasi-infinie sa
position initiale et celles de toutes les aspérités du sol.
Or la précision avec laquelle on peut connaître les conditions initiales
de tout objet matériel, en temps et en position, est limitée par le prin­
cipe d’incertitude d’Heisenberg en mécanique quantique. Tout se passe
dans la nature comme si l’espace était quantifié, que sa géométrie était
discrète, et que pour décrire en conséquence des phénomènes micro­
scopiques de taille inférieure à une certaine échelle, on soit obligé de
faire appel aux probabilités. À ces échelles extrêmement petites, il est
fondamentalement impossible de connaître simultanément la position
et la vitesse d’une particule. Toute connaissance des conditions ini­
tiales est donc par principe limitée en dessous d’une certaine distance
ou d’un certain délai.
La conséquence philosophique déjà bien connue de la mécanique
quantique est le fait qu’il règne à l’échelle microscopique un indéter­
minisme fondamental. Il est à ce point impossible de prévoir le futur
d’un ensemble d’états de la matière à cette échelle que les physiciens
en sont arrivés à la conclusion que tous ses états possibles, permis par
les lois physiques, coexistaient simultanément. Il n’y a donc pas un
seul futur mais une infinité de futurs potentiels. Par contre, le fait d ob­
server un état en le mesurant au moyen d’un instrument a pour effet
immédiat de le déterminer et de le rendre unique. Ce n est donc que
grâce à nos observations que la réalité que nous connaissons ne se
décline que sous une seule version. Sans observation par les êtres
humains que nous sommes, la physique décrirait un monde où une
infinité de réalités coexisteraient simultanément sous la forme d’uni­
vers parallèles. Nous ne connaîtrions donc « un seul univers » que
parce que nous sommes doués d’une conscience pour l’observer. C’est
ce qui fait dire à de nombreux physiciens « spiritualistes » que nous
sommes les co-créateurs du monde qui nous entoure.
La théorie de la double causalité (TDC) ne va pas aussi loin et rejoint
plutôt l’opinion des physiciens « matérialistes » qui considèrent que
notre conscience n’a aucun effet sur la création de la réalité.
Pour expliquer la création d’une version unique de la réalité, la TDC
fait tout d ’abord appel à l’idée que l’indéterminisme règne partout
dans la nature, non seulement à l’échelle microscopique mais aussi à
l’échelle macroscopique. Cette affirmation se base sur l’existence
généralisée d’aléas indéterministes dans le monde qui nous entoure,
dont le rocher qui dévale est un exemple.
Pour bien comprendre cette affirmation, revenons à ce rocher. Compte
tenu de nos observations sur le phénomène d’amplification de la dis­
persion de sa trajectoire, il est tout à fait raisonnable d’imaginer que
puissent exister de multiples scénarios de retombée de ce rocher, le
conduisant au bout de 100 mètres de dénivelée, à atteindre par exem­
ple différents endroits séparés par une distance de 10 mètres, et ceci
alors même qu’il se trouve toujours dans la même position initiale au
départ. Les simples indéterminismes régnant à l’échelle microscopique
sur la position de ce rocher, et sur le moment où il commence à dévaler
la pente, sont supposés par la TDC amplifiés au point d’engendrer un
indéterminisme macroscopique important, quant à la position qu’il
atteint 100 mètres plus bas.
Pour justifier mathématiquement cette observation, remplaçons
l’exemple du rocher qui dévale une montagne par celui d’une boule de
billard qui effectue plusieurs rebonds à l’intérieur d’un billard très par­
ticulier, dénommé « billard de Sinaï ». Il s’agit d’un billard ordinaire
au centre duquel on a rajouté un obstacle circulaire fixe, similaire à
une grosse boule de diamètre égal à la moitié de la largeur du billard,
et qui remplace ici les aspérités du sol de notre rocher. L’intérêt d’un
tel exemple est qu’il se prête aux calculs et que l’on peut démontrer
que ce billard est chaotique. En conséquence de ce chaos, il est impos­
sible de prévoir la position de la boule une fois lancée au-delà de
quelques secondes. Ce phénomène provient du fait qu’après chaque
rebond sur l’obstacle central, l’incertitude sur la trajectoire de la boule
tirée est amplifiée par le rebond. On peut alors démontrer que pour
prévoir la position de cette boule à dix centimètres près au bout de dix
secondes, il faut effectuer un tir avec une précision de deux centièmes
de millimètres. On peut aussi prévoir que l’écart entre deux boules
ayant une différence de trajectoire initialement infime est multiplié par
trois à chaque seconde en moyenne. Or, partant par exemple du nom­
bre extrêmement élevé de 3 à la puissance 60, on en déduit que pour
tirer une seconde boule selon une trajectoire qui pendant une minute
entière ne s’écarte pas de plus d’un millimètre de celle de la première
boule, alors il faut que la précision du tir soit très inférieure à la taille
d’une particule élémentaire !
En ignorant l’indéterminisme quantique, beaucoup de physiciens
continuent de qualifier les phénomènes chaotiques de déterministes
mais cependant « imprévisibles », comme si le fait d’avoir une trajec­
toire imprévisible à cause de son caractère chaotique n’empêchait pas
cette trajectoire d’être déterministe, étant donné qu’on peut en effet
théoriquement la calculer. Ce raisonnement oublie cependant deux
choses, d’une part le fait que la précision de n’importe quel calcul est
forcément limitée, et d’autre part le fait qu’en dessous d’une certaine
précision, le comportement de la matière est déjà fondamentalement
indéterministe. L’hypothèse qui fonde ce raisonnement, celle que nous
vivons dans un espace continu, est donc fausse.
Selon la TDC, le fait de qualifier un système chaotique de « détermi-
niste » ne fait qu’entretenir une illusion produite par l’idée que nos
équations de calcul sont elles-mêmes déterministes. Or une telle idée
repose sur l’hypothèse fausse selon laquelle nous évoluerions dans un
monde continu, dans lequel ces équations ne pourraient en effet abou­
tir qu’à une seule solution. La mécanique quantique nous montre au
contraire que nous vivons dans un monde fondamentalement discon­
tinu à l’échelle microscopique où aucun objet quantique ne peut avoir
de position précise. Par conséquent, un déterminisme imprévisible
devient équivalent à un indéterminisme réel.
Lorsque selon d ’autres points de vue, nous acceptons l’indéterminisme
de la nature, parce que nous n’avons aucun moyen de prévoir l’avenir
d’un système ou d’en comprendre les causes, nous parlons souvent de
hasard. Or d’après la TDC, le hasard n’existe pas dans le monde réel,
car lorsqu’un phénomène n’est pas causé par le passé, il l’est par le
futur. Seule existe notre ignorance des causes réelles ou des variables
cachées, qu’elles soient passées ou futures. Lorsque ces causes ne sont
pas dues au passé et que l’on invoque en conséquence le hasard, on est
en présence d ’un phénomène indéterministe par définition, devant
lequel la physique ne nous fournit aucune réponse.
C’est donc bien pour conserver à l’approche scientifique toute sa cohé­
rence, en éliminant le hasard ou les aléas indéterministes, élimination
vitale pour la physique, que la TDC propose de déterminer par des
causes futures ce qui n’est pas déterminé par des causes passées. Mais
pour que cette double causalité soit bien fondée, il est nécessaire que
dans le sens inverse du temps l’évolution des systèmes soit déterminée
par une loi manquante, nommée « Loi de Convergence des Parties »,
une loi fondamentale car créatrice d’ordre.
Une telle création d’ordre, selon un principe de maximisation de l’or­
dre créé, aurait le mérite de nous fournir une solution déterministe
unique du passé, même en présence de traces insuffisantes. Il est en
effet concevable que contrairement à une loi créatrice de désordre qui
nous oblige à exploiter le hasard et la statistique pour éviter de tomber
sur des futurs multiples, une loi créatrice d’ordre puisse ne faire émer­
ger qu’une seule solution, la plus ordonnée, parmi les solutions qui res­
pectent les lois réversibles de la physique.
Tout indéterminisme du passé serait alors comblé, non par un effet
cumulé de nos intentions comme c’est le cas du futur, mais par une loi
d’attraction universelle généralisée qui introduirait partout une harmo­
nie ayant pour effet de refléter le tout dans chaque partie.
Bibliographie

1. Stephen Hawking, Leonard Mlodinov, Y a-t-il un grand architecte


dans l ’univers ?, Odile Jacob, 2011.
2. Rémy Chauvin, Le retour des magiciens, JMG éditions, 2002.
3. Deepak Chopra, Le livre des coïncidences, Interéditions, 2004.
4. Francis Crick, L ’hypothèse stupéfiante : à la recherche scientifique
de l ’âme, Éditions Plon, 1995.
5. Régis Dutheil, Brigitte Dutheil, L ’homme superlumineux, Éditions
Sand,1990.
6. Michel Granger et Jean Moisset, Coïncidences, hasard ou destin ?
Ed. Trajectoire, 2003.
7. Brian Greene, La magie du cosmos: l ’espace, le temps, la réalité:
tout est à repenser, Ed. Robert Laffont, 2004.
8. Eugen Herrigel, Le zen dans l ’art chevaleresque du tir à l’arc, Ed.
Dervy, 1961.
9. Pierre Jovanovic, Enquête sur l ’existence des anges gardiens, Le
jardin des livres, 2005.
10. Pierre Jovanovic, L ’Explorateur de l ’Au-delà, Le jardin des livres,
2005.
11. Allan Kardec, Le Livre des Esprits, 1857.
12. Étienne Klein, Le temps Existe-t-il? Ed. Le pommier, 2002
13. Étienne Klein, Les tactiques de Chronos, Poche, 2004
14. Étienne Klein, Le facteur temps ne sonne jamais deux fois, Flam­
marion, 2007.
15. Arthur Koestler, Les racines du hasard, Calmann-Lévy, 1972.
16. Ervin Laszlo, Science et Champ Akashique, Éditions Ariane, 2005.
17. Irène Magnaudeix, Pierres assises, pierres mouvantes, Les Alpes
de Lumière, 2004.
18. Gitta Mallasz, Dialogues avec l ’Ange, Aubier, 1998.
19. Michael Newton, Souvenirs de VAu-Delà, Le jardin des Livres,
2008.
20. Osho, Être en pleine conscience, Éditions Jouvence, 2005.
21. David Peat, Synchonicité, le pont entre l ’esprit et la matière, Édi­
tions Le Mail, 1988
22. Emmanuel Ransford, La nouvelle physique de l ’esprit, Éditions Le
Temps Présent, 2007.
23. Roger Penrose, L ’esprit, l ’ordinateur et les lois de la physique,
Interéditions, 1993.
24. Ilya Prigogyne, Les lois du chaos, Ed. Flammarion, 1999.
25. Dean Radin, La conscience invisible, Presses du Châtelet, 2000.
26. Hubert Reeves et al, La synchronicité, l ’âme et la science, Albin
Michel, 2001.
27. Hubert Reeves, L ’heure de s ’enivrer, Éditions du Seuil, 1986.
28. Hubert Reeves, La première seconde, Éditions du Seuil, 1995.
29. Vlady Stévanovitch, La voie du Taï Ji Quan, Dangles éditions,
2008.
30. Lynne Mc Taggart, La science de l ’intention, Ariane, 2008.
31. Jean-François Vézina, Les Hasards nécessaires, Ed. de l’Homme,
Québec, 2001.
32. Neale Donald Walsch, Conversations avec Dieu 1 - 2 - 3 , Aven­
ture secrète, 2007.
33. Trinh Xuan Thuan, Le chaos et l ’harmonie, Fayard, 1998.
34. Vahé Zartarian, L ’esprit dans la matière, Éditions Georg, 1998.
35. Vahé Zartarian, Martine Castello, Nos pensées créent le monde,
JMG Éditions, 2003.
36. Vahé Zartarian, Le jeu de la création, Éditions 3 Monts, 1999.
37. Dr Hans-Joachim Zillmer, L ’erreur de DARWIN, Le Jardin des
Livres, 2008
38. Michel d ’Aoste, Les secrets de l ’astrologie universelle, The Book
Édition, 2008.
Bibliographie
39. Antoine Suarez, Peter Adams, Is Science Compatible with Free
Will ?, Springer, 2012.
40. Nicolas Gisin, L ’impensable hasard, Odile Jacob, 2012.
41. Ilya Prigogine, La fin des certitudes, Odile Jacob, 2001.
42. Friedrich Nietzsche, Humain, trop humain, Pluriel, 2001.
43. Henri Bergson, Le possible et le réel, PUF, 2011.
44. Thibault Damour, Et si Einstein m ’était conté, Cherche Midi, 2005.
45. Carlo Rovelli, Et si le temps n ’existait pas, Dunod ,2012.
46. Jean Staune, Notre existence a-t-elle un sens?, Presses de la
Renaissance, 2007.
47. Jean Staune, La science en otage, Presses de la Renaissance, 2010.
48. Philippe Guillemant, A flexible cylinder to model physical Junc-
tions o f consciousness, Cosmopolis N °2,2013.
49. Philippe Guillemant et al, "Characterizing the transition from clas-
sical to quantum as an irréversible loss of physical information” ,
arXiv:1311.5349 [quant-ph],2013.
50. Jacques Vallée, Science Interdite Vol 2, Aldane, 2013.
51. Jacques Vallée, A Theory of Everything (else), Conférence TEDx
Bruxelles, 2011.
52. Olivier Costa de Beauregard, Le temps déployé, passé, futur, ail­
leurs, Le Rocher, 1988.
53. François Martin, « Synchronicity », film DVD de Jan Diederen,
2012 .
54. W. Pauli & C.G. Jung, Correspondance 1932-1958, Albin Michel,
2000.
55. Joachim Soulières, Les coïncidences, Dervy, 2012.
56. Eckhart Toile, Le pouvoir du moment présent, J’ai lu, 2010.
57. Alain Connes, Danye Chéreau, Jacques Dixmier, Le Théâtre quan­
tique, Odile Jacob, 2013.
58. Serge Harochc, Jongler avec la lumière, De Vive Voix, 2010.
Table des matières
Avant-propos......................................................................................... 9
Introduction..........................................................................................13
Première partie : Le renversement du temps
1. L’Arbre de Vie................................................................................... 25
2. Le déterminisme inversé...................................................................37
3. La Loi de Convergence des Parties.................................................. 55
4. Fissure du temps................................................................................69
5. La logique non causale......................................................................81
Deuxième partie: La double causalité
6. Les traces du futur............................................................................. 93
7. Le courant de la vie......................................................................... 105
8. Le « laisser agir ».............................................................................115
9. Être ou ne pas être........................................................................... 123
10. La magie du hasard........................................................................139
Troisième partie : Coïncidences
11. Le dépôt de l’intention...................................................................159
12. Le modèle de l’Esprit.................................................................... 171
13. Dialogue avec l’Ange....................................................................181
14. La guerre des logiques...................................................................197
15. Le double 22..................................................................................211
Quatrième partie : Révélation
16. L’espace intérieur.......................................................................... 225
17. La loi d’attraction universelle....................................................... 239
18. Émergence de l’Esprit...................................................................251
19. Le cycle de l’Amour..................................................................... 259
20. Dialogue avec l’Esprit...................................................................273
Cinquième partie : Conférence
21. Conférence.................................................................................. 291
22. Questions....................................................................................... 321
Conclusion..........................................................................................331
Remerciements.................................................................................. 341
Glossaire............................................................................................. 343
Annexe (Indéterminisme et T.D.C.)...................................................353
Bibliographie..................................................................................... 359
En complément à ce livre :

http://www.philippeguillemant.com
http://www.doublecause.net
Aux éditions Le Temps Présent

Extrait du catalogue :

Mission des âmes dans l ’au-delà


Une voyante témoigne
Merveilleuse certitude
Quand souffle l ’esprit divin
Entre les mains de dieu
Hélène Bouvier

Le Christ autrement
Les morts nous aiment
Mes entretiens avec les morts
Père François Brune

La nouvelle physique de l ’esprit


Emmanuel Ransford

Comment développer vos facultés supranormales


Eugène Caslan

Sciences interdites
Jackie landreaux-Valabrègue

Pour être tenu informé de nos publications


vous pouvez écrire à :

Editions Le Temps Présent


SARL JMG éditions
8, rue de la mare
80290 Agnières

tel. 03 22 90 11 03
fax. 03 22 90 17 28
email : contact@jmgeditions.fr
site internet : www.parasciences.net
D écou vrez la revu e Parasciences !
Parasciences et transcommunication est une revue trimestrielle créée en 1989.

Elle est le lien privilégié entre tous les


SSpécimen
chercheurs préoccupés par les phénomènes
hors série paranormaux et l’étude objective de l’hypo­
thèse de la vie après la vie.
Ses rubriques sont adaptées à une analyse
approfondie de ces phénomènes : interview
de chercheurs, méthodes pour améliorer les
facultés paranormales et les contacts avec
d’autres plans de réalité, recherche scientifi­
p u! notoires oaranorrmi*...
NUt. vie ejjfes la v»;,,.
que, étude de l’intelligence cosmique, etc.
TiarucamsiJmsaUof...
Puaitta psi... Ovnis..

Les éléments Elle est aussi un lieu de rencontre convi­


pour comprendre vial qui permet aux lecteurs de s’exprimer,
d’échanger des points de vue et des adresses.
Parasciences est le carrefour de nombreux groupes de recherche et
l ’entraide.

Il est utile de préciser que « Parasciences »


est une revue faite pour ceux qui cherchent
et non pour ceux qui pensent
avoir trouvé...

Sur simple demande de votre part, une documentation gratuite vous


sera adressée. N’hésitez pas à nous contacter .

Parasciences
8, rue de la mare
80290 AGNIÈRES
tel. 03 22 90 11 03
fax. 03 22 90 17 28
email : jmg-editions@wanadoo.fr

Vous pouvez également consulter et télécharger


cette documentation sur notre site internet :
www.parasciences.net
Imprimé en France
par JMG éditions
80290 Agnières
dépôt légal avril 2014

Das könnte Ihnen auch gefallen