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A D
p. 312-357
Résumés
Français English
Cet article s’inscrit dans une réflexion engagée depuis plusieurs années, dans le cadre de mes
travaux académiques, sur le patrimoine (culturel et naturel) et les processus de
patrimonialisation au Sénégal. Cette présentation examine la trajectoire du patrimoine culturel
dans la construction de l’État sénégalais colonial et post-indépendance. Elle interroge les
politiques culturelles étatiques trop souvent déconnectées des réalités vécues par les populations.
Il s’agit ici d’essayer de comprendre la dualité dans l’appropriation de patrimoines culturels au
Sénégal. La discussion tourne autour des enjeux culturels ou politiques de mises en scène et de
normalisation du patrimoine. Elle tente de comprendre les logiques de patrimonialisation par les
différentes autorités politiques sénégalaises. Enfin, l’analyse interroge la représentation du
patrimoine culturel par les Sénégalais.
This article is part of an investigation initiated several years ago, as part of my academic research
into Senegal’s cultural and natural heritage and the process of heritagization in Senegal. The
paper examines the trajectory of cultural heritage during the construction of the Senegalese State
in the colonial and post-independence periods. It questions the government’s cultural policies,
which are all too often disconnected from the realities experienced by the population. The aim
here is to try to understand the duality in the appropriation of cultural heritage in Senegal. The
discussion focuses not only on the cultural or political stake-holders in the staging and legislation
of heritage, but also on the logic of heritagization pursued by various Senegalese political
authorities. Finally, the analysis looks at the Senegalese people’s representation of the concept of
heritage.
Entrées d’index
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6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
Texte intégral
1 Depuis la démolition volontaire des statues bouddhas de Bâmiyân en Afghanistan en
2001 (par les talibans du mollah Mohamed Omar), la problématique de la préservation
du patrimoine culturel ainsi que celle de l’irrédentisme religieux sont des questions qui
font l’actualité, et plus particulièrement dans les pays en crise politique comme le Mali,
l’Égypte, le Nigéria, la Somalie, le Soudan, la Syrie, l’Afghanistan, l’Irak, le Pakistan. Les
partisans d’un certain irrédentisme religieux instrumentalisent, à leur manière, la
question de la préservation du patrimoine culturel – qui est déjà un enjeu international,
politique, médiatique, commercial, voire identitaire – au centre des discours, réflexions
et débats des médias, des recherches académiques, des instances officielles, des
décideurs et faiseurs d’opinion (dirigeants et opposants politiques, assemblée des
Nations unies, OTAN, Unesco). Ailleurs, comme au Sénégal, suivant des enjeux socio-
économiques, des destructions irréversibles de sites archéologiques et de monuments
historiques sont provoquées par des phénomènes d’origine anthropique. Les problèmes
de la préservation du patrimoine culturel ainsi que les logiques de repli identitaire,
souvent complexes et transversales, paraissent avoir, le plus souvent, des racines dans
les mémoires historiques. Les traitements négatifs et défavorables que des individus
font subir à des éléments du patrimoine culturel matériel incitent à interroger,
brièvement, la notion de patrimoine1.
2 Étymologiquement, le patrimoine est l’ensemble des biens que l’on tient par héritage
paternel. Il s’agit, à l’origine, de la propriété transmise de génération en génération : les
biens publics, le trésor ou le chef-d’œuvre, les choses rares et somptueuses n’en font
alors pas partie. La notion de patrimoine correspond à un legs qu’il convient de
préserver et de transmettre. La conservation de témoignages sensibles de cultures
anciennes, qualifiés de « monuments historiques », devient un enjeu politique et social
en Europe à partir du XVIe siècle (Sinou 2001). Au lendemain de la Révolution
française de 1789 et de son cortège de destructions de biens, singulièrement
ecclésiastiques et nobiliaires, s’opère une nouvelle conception patrimoniale se référant
à l’histoire et aux arts. Ainsi, par-delà leurs propriétaires en titres, certains biens
historiques et culturels appartiennent au patrimoine collectif de la nation (Thiesse
2005). Cette forme de patrimonialisation est née d’une prise de conscience de la
nécessité de préserver les témoignages du passé, essentiellement matériels et
monumentaux, expression du bien commun de la nation et de sa grandeur. Elle se
développe en Europe aux XVIIIe et XIXe siècles, avec une importante évolution de son
acception (Thiesse 1998, Desvallées 1998). Le concept de « patrimoine », qui émerge
dans un contexte spécifique, est donc lié, à l’origine, à un système culturel très
particulier, et ne prétend pas alors à l’universalité. La notion de patrimoine connaît son
apogée au courant du XXe siècle. À l’échelle des organismes internationaux2, se forge
l’idée de l’existence d’un patrimoine à valeur universelle, dépassant le cadre des
nations.
3 Le patrimoine, c’est ce qui constitue le bien matériel ou immatériel dont l’une des
caractéristiques est de permettre d’établir un lien entre les générations tant passées que
futures. Le patrimoine culturel recouvre des manifestations diverses, tant matérielles
(tels les sites et monuments, les paysages culturels, les objets d’art) qu’immatérielles
(tels les langues, les savoirs et savoir-faire, les folklores). Le mot « patrimoine », dans
son acception récente, réunit un ensemble d’objets naguère désignés séparément
(notamment les monuments historiques, les œuvres d’art, les sites, les folklores). Et le
mot « patrimoine » qui permet de rassembler des éléments relevant des monuments
historiques, de la défense des traditions, de la protection des sites ou du cadre de vie,
n’est utilisé que depuis quelques décennies (Desvallées 1998). Le « patrimoine
culturel » est une notion relative et complexe de par sa composition et l’usage qui peut
en être fait.
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Il est établi dans chaque colonie, pays de protectorat ou territoire sous mandat,
relevant du ministère des Colonie, une liste de biens immobiliers, une liste de
monuments naturels ou de sites dont la conservation et la préservation présentent
un intérêt historique, artistique, scientifique, légendaire ou pittoresque14.
8 L’inscription sur ces listes est prononcée par arrêté du chef du territoire, sur
proposition de la Commission des monuments historiques et des arts indigènes. La liste
de classement des monuments et sites est publiée au Journal officiel de l’AOF.
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patrimoine et les stratégies de protection des biens culturels s’y associant obéissent aux
mesures et normes en usage dans la métropole26.Elle s’inscrit dans la dynamique
politique, scientifique et culturelle de la France et des nations européennes aux XIXe et
XXe siècles.
18 La notion occidentale de patrimoine – c’est-à-dire allant dans le sens du réflexe de
protection de biens collectifs ou privés comme patrimoine public – traverse ainsi les
frontières sénégalaises par le biais du colonialisme qui tente de construire une nouvelle
identité indigène, à l’image de celle de la mère patrie. L’émergence au Sénégal de cette
notion de patrimoine traduit la reproduction, dans la colonie, du modèle français de
politique culturelle et de protection patrimoniale. Outre la collecte et la conservation
des traditions et coutumes locales, la politique coloniale de sauvegarde du patrimoine
se décline sous diverses formes, telles que la préservation des archives (administratives
et scientifiques) et du patrimoine bâti, les fouilles archéologiques et la muséologie, les
mesures d’appui aux arts indigènes, la création d’institutions culturelles27. Cette notion
de patrimoine introduit de nouveaux éléments, à savoir les objets archéologiques, les
éléments architecturaux, les archives et les musées.
19 On peut prétendre que cette notion de patrimoine n’a de signification et d’intérêt que
pour ceux qui l’ont introduite dans ce territoire. Dans sa politique de préservation du
patrimoine sénégalais ou de l’AOF, il semble que le colonisateur n’ait pas pris en
compte les réalités culturelles locales ainsi que les contextes et milieux d’usage qui
déterminent la valeur sociale, religieuse ou politique de certains objets
ethnographiques. Cela laisse supposer un manque de considération des besoins et des
aspirations des communautés, en vue de la conservation de leur héritage culturel. Le
pouvoir colonial n’admet d’ailleurs, dans aucun domaine de sa politique, de liberté
réelle pour la population indigène, toute autonomie présentant un danger pour
l’entreprise que ce pouvoir entend mener (Mbembé 2006). Ce qui laisse imaginer que
les colonisés ne sont pas, a priori, impliqués dans la préservation de leur héritage
culturel, désormais devenu un patrimoine public. Il semble qu’ils n’ont pas pu faire
paraître, ni faire passer leurs choix, leurs désirs et leurs idées au sujet de la nouvelle
gestion patrimoniale imposée par le pouvoir colonial. Peut-on prétendre vouloir
conserver le patrimoine culturel de différentes communautés, sans les associer à la
gestion de celui-ci, et sans tenir compte de leur propre perception du patrimoine ?
20 La nouvelle notion de patrimoine accorde aux biens culturels une autre valeur,
différente de celle de leur contexte de production et de fonctionnalité, sans réellement
tenir compte des réalités et des pratiques socioculturelles existantes. Les sociétés
sénégalaises sont caractérisées par l’oralité dans la transmission des savoirs, des
techniques, des valeurs, des traditions et des symboles culturels. Les chefs de
collectivités, les griots, les féticheurs, les devins, les gardiens de lieux de culte, les
artisans, les marabouts, les penseurs et les personnes âgées représentent les sages, les
artistes et les intellectuels ayant le privilège de conserver et de véhiculer le patrimoine
communautaire28. Mais dans ce mode oral de transmission des connaissances et des
pratiques, très souvent, les paroles invoquent et commandent des objets usuels, des
gestes, des espaces et des espèces qui leur sont intrinsèquement liés. Ce qui fait que le
patrimoine oral ou immatériel renvoie à une multitude d’éléments tangibles qui
relèvent du patrimoine technique, artistique ou architectural29. Par ailleurs, dans les
sociétés sénégalaises, l’espace n’est pas conçu avec des structures architecturales
durables, mais plutôt avec des matériaux périssables (végétaux, terre, bois) et
renouvelables30. Le modèle occidental de patrimonialisation importé et mis en œuvre
au Sénégal par le colonisateur traduit, là encore, une méconnaissance de la signification
profonde ainsi que du fonctionnement des signes culturels autochtones. Ceci n’est pas
étonnant, car la notion de patrimoine est transférée dans le territoire sénégalais non
pas pour promouvoir les éléments d’une culture locale – d’ailleurs longtemps niée et
étouffée par le colonialisme –, mais pour satisfaire d’abord les besoins et les ambitions
de l’impérialisme colonial. La gestion patrimoniale menée au Sénégal par l’autorité
coloniale relève de stratégies et mécanismes d’exploitation de la colonie, d’imposition
de nouvelles valeurs et de déstabilisation des références culturelles autochtones. Pour
dominer les autochtones et assurer le prestige impérial, il fallait réajuster leurs espaces
et repères culturels, développer un dispositif permettant de les assujettir, de mieux les
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connaître, de les assimiler. En ce sens, la protection et les mises en scène des signes
culturels locaux ne sont pas sans liens avec les visées coloniales ; elles s’inscrivent dans
le programme politique, intellectuel et artistique de la France. Le colonisateur introduit
au Sénégal le concept de patrimoine suivant des préoccupations d’ordre économique,
politique, ethnographique et pédagogique. Dans cette logique, il sélectionne et
détermine ce qui doit être préservé, valorisé comme patrimoine public, et impose ses
propres normes. L’étude et la préservation des cultures locales permettent de mieux
connaître les populations locales, d’administrer les territoires, de favoriser l’attrait des
touristes, d’instruire l’élite urbaine indigène et de faire la propagande de l’idéologie
coloniale. Ce modèle de politique culturelle est-il poursuivi ou remis en cause au sortir
de l’ère coloniale, avec l’accession du Sénégal à l’indépendance, en 1960 ?
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celui des fouilles et découvertes. Le texte de loi de 1971 précise en effet, dans son article
V : « Les monuments proposés pour le classement ou classés ne peuvent être détruits
en tout ou en partie, ni soumis à des travaux de restauration ou de réparation, ni
modifiés sans l’autorisation de l’autorité administrative qui en fixe les conditions et en
surveille l’exécution. » L’article 7 stipule : « Aucune construction nouvelle ne peut être
édifiée sur un terrain classé ni adossée à un immeuble classé sans l’autorisation
expresse de l’autorité administrative compétente. » La Commission supérieure des
monuments historiques du Sénégal a-t-elle été consultée, tel qu’il est énoncé dans le
texte de loi de 1971, avant les travaux de construction du monument de la Renaissance
africaine ?
42 Le monument de la Renaissance africaine est fortement décrié par une bonne frange
de l’opinion publique sénégalaise – notamment par l’artiste sculpteur Ousmane Sow
(qui serait l’auteur d’une maquette initiale et aurait suggéré l’idée à Me Wade) et par
des politiciens, des économistes, des membres de la société civile, des religieux72. Parmi
les controverses, il y a la contestation sur la « propriété intellectuelle » de la statue et la
dénonciation, par la population, des 35 % (revendiqués par le président Wade sur les
recettes touristiques qu’aura générées le complexe monumental). À quoi s’ajoute la
polémique relative aux opérations foncière et financière, jugées opaques, ayant permis
l’édification de ce monument. En outre, le projet est considéré comme un inutile
« gaspillage » financier, dans un contexte où la pauvreté, la précarité et les coupures
d’électricité minent les ménages sénégalais. Pour beaucoup de Sénégalais, ce
monument très coûteux n’était pas une priorité dans un pays où les retraités, les veuves,
les jeunes chômeurs, les étudiants et les syndicats de travailleurs sortent constamment
dans la rue pour protester contre leurs conditions de vie. Les imams ou associations
islamiques qui protestent contre l’édification du monument de la Renaissance
s’appuient, eux, sur l’idée selon laquelle une statue constitue, en Islam, une œuvre
satanique et une source d’idolâtrie. Ils en déduisent que ce monument majestueux ne
doit pas être édifié dans un pays où près de 95 % de la population est musulmane.
D’autres critiques considèrent que la fonction symbolique du projet de Renaissance de
Wade n’est en phase ni avec les valeurs identitaires africaines (la vêture de la femme et
sa position en arrière-plan du monument) ni avec la réalité actuelle des pays africains
(près de 50 ans après l’indépendance du Sénégal). D’un coût estimé à 16 milliards de
francs CFA, le monument de la Renaissance africaine s’inscrit dans les grands chantiers
du président Wade. Dans un « pays pauvre très endetté », de tels projets ébranlent le
prestige d’Abdoulaye Wade, son ambitieuse politique panafricaine et celle de la
modernisation infrastructurelle73.
patrimoine à des questions de pouvoir et de relations au sein d’un territoire qu’il faut
valoriser à tout prix (Boursier 2010). Les expressions culturelles et artistiques
considérées comme confortant l’identité du groupe sont réappropriées et réinventées
par les communautés. Elles sont perçues et représentées comme un patrimoine culturel
qu’il convient de préserver et de transmettre. Cela amène à s’interroger sur la
signification de la notion de patrimoine culturel chez les Sénégalais. La réponse à cette
question n’est pas simple.
identitaires sont jugées particulièrement utiles, car elles ont des fonctions positives
dans la société et constituent des liens avec l’histoire, le passé et les ancêtres.
47 Ces symboles sont considérés comme emblématiques parce que révélateurs de
l’identité, de la culture et de l’histoire familiales ou communautaires. Ce patrimoine
culturel interpelle les consciences individuelles – sous la forme d’un contrat moral –
qui se l’approprient et ressentent le devoir de le transmettre aux générations suivantes
dans un but pédagogique et identitaire. Il permet de fixer une image et le passé idéalisé
d’une communauté. La notion de patrimoine couvre des significations en lien avec les
notions de tradition, de mémoire, d’héritage, de transmission et d’identité. Les
proverbes wolof (loo donnu mu dëgër), pulaar (ko rona’ka tiidata), sereer (mboxo tin),
manding (diŋo bee buka a faa ke ta), qui signifient littéralement « l’héritage acquis, de
ses ancêtres, s’enracine solidement », « transmettre l’héritage », « on s’approprie
profondément son héritage ancestral », ou encore « il n’est pas donné à tout enfant
d’hériter de son père », connotent l’importance de la transmission de l’héritage (ndono
en wolof, ndonu en pulaar, ke i lamna ou lamel en sereer, nke en manding) dans « la
philosophie morale » de ces communautés, et des Sénégalais globalement. De ce fait,
plusieurs aspects du patrimoine culturel sénégalais considérés comme héritages positifs
ont été fixés par les mémoires collectives comme « traditions » (aada ak cosaan, baaxu
maan).
documentaire
50 On est tenté de s’interroger sur l’appropriation et la préservation, par les Sénégalais,
des autres types de patrimoines, notamment ceux prescrits et institués par l’État (les
patrimoines architectural, archéologique, muséologique, archivistique), qui sont aussi
des composantes de l’héritage culturel du Sénégal. Le constat est que la mobilisation
des Sénégalais pour la protection et la sauvegarde du patrimoine, notamment dans son
aspect matériel et monumental, est loin d’être effective. Les déprédations et périls qui
pèsent sur la préservation de ce patrimoine culturel – pourtant théoriquement protégé
par la loi no 71-12 du 25 janvier 1971, complétée et mise en vigueur par le décret
d’application no 73-746 du 8 août 1973 – sont en partie liés à des processus d’origine
anthropique.
51 Les exemples les plus flagrants d’endommagement du patrimoine archéologique,
mobilier ou monumental du Sénégal ne peuvent être cités de façon exhaustive, mais
quelques cas pourraient édifier le lecteur sur les périls. Il y a les effets de l’urbanisation
et de l’aménagement du territoire (extension anarchique des villes ou des villages,
édification d’infrastructures routières ou civiles) qui ont entraîné la disparition de
plusieurs sites archéologiques, géologiques ou historiques, situés dans les zones de
secteurs sauvegardés. Des sites archéologiques localisés dans la vallée du fleuve Sénégal
ont été détruits suite à des travaux d’aménagement routier, tout comme ceux des
barrages ou l’exploitation agricole des périmètres irrigués (Thilmans 1979). Ceux de la
région du Cap-Vert (Médina, Bel Air, Hann, Cambérène, Bopp, cap Manuel, Pointe de
Fann, Ouakam, Mamelles, Ngor, cap des Biches), cartographiés par Corbeil, Mauny et
Charbonnier, ont été mis en péril par l’extension urbaine de Dakar et les spéculations
foncières dans la capitale sénégalaise92. Il y a aussi le cas de l’exploitation en carrières
de coquillages ou de sable s’effectuant sur des sites archéologiques classés patrimoine
national et dont certains sont actuellement inscrits sur la liste du patrimoine mondial
de l’Unesco : les amas coquilliers du delta du Saloum93 ou les sites de Diack et
Diakité94. Pour le cas des amas coquilliers95, nos enquêtes systématiques96 ont prouvé
que les jeunes des villages insulaires, confrontés à des difficultés financières et un
chômage accentué, se livrent à l’exploitation et à la commercialisation des coquillages
vers les marchés de Kaolack et Banjul (en Gambie) afin de subvenir à leurs besoins
économiques immédiats. Les amas coquilliers du delta du Saloum ne sont pas
considérés comme un patrimoine culturel par les exploitants de coquillages issus des
communautés locales (Djigo 2000), parce qu’il n’y a pas de continuum historique direct
entre les populations insulaires actuelles et ceux qui ont créé ces amas97. S’il y a bien
une appropriation foncière des sites98, la question de la préservation des amas
coquilliers en tant que ressource archéologique, historique et culturelle n’est pas encore
envisagée par les exploitants. À ces traitements défavorables à la préservation des amas
coquilliers, s’ajoutent les destructions, dénaturations ou rénovations anarchiques de
bâtis anciens dans les villes historiques comme Saint-Louis, Gorée, Dakar, Rufisque
(Guèye 1985 ; Diop 1987). Il y a également un manque de prise de conscience des
citoyens sénégalais sur la nécessité de collecter et de conserver soigneusement des
documents d’archives (Mbaye 2006). Ces contraintes sont renforcées par la
« diminution drastique » des fonds d’objets de certains musées, comme c’est le cas du
musée Théodore-Monod d’art africain de Dakar (Diaw 1997, Biaya 1999).
52 Cet état de fait traduit les dysfonctionnements dans la protection et la gestion du
patrimoine des sites archéologiques et monuments historique au Sénégal. Il laisse
apparaître les difficultés des services administratifs, chargés de la gestion et du contrôle
de l’architecture et des monuments historiques, pour faire appliquer une législation
bafouée par tous et quelquefois même par l’État. La situation révèle un manque de
reconnaissance, de la part des populations locales, de la valeur historique et culturelle
de l’architecture ancienne, tout autant que des sites archéologiques. Elle manifeste une
insuffisance d’appropriation, par les Sénégalais, du patrimoine culturel prescrit et
institué par les instances officielles ou scientifiques, en même temps qu’un problème de
prise en compte du patrimoine monumental, archéologique ou archivistique. La
population ne se reconnaît pas tout à fait dans la mémoire et le patrimoine public
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Conclusion
53 La construction de l’identité nationale sénégalaise et les préoccupations de
développement du pays ont mobilisé les ressources culturelles du passé. Les dirigeants
politiques de l’État sénégalais colonial et post-indépendance ont successivement
instrumentalisé le patrimoine culturel dans leurs stratégies de contrôle et/ou de
consolidation du pouvoir, de légitimation d’une idéologie et de développement du
tourisme culturel. Les politiques culturelles relèvent de l’État, elles ont été inscrites à
l’enseigne des priorités du moment, des idéologies des autorités, et de l’insuffisance des
moyens budgétaires. Le gouvernement colonial a prôné une culture élitiste et
centralisée dans les grands centres urbains, et surtout dans la capitale dakaroise. Les
dirigeants de l’État post-indépendance – malgré leur volonté manifeste de glorifier les
valeurs ancestrales et le passé négro-africain – ont eu du mal à se soustraire au modèle
de définition de la culture, au patrimoine culturel importé par le colonisateur et relayé
ensuite par les instances internationales. En conséquence, il n’y a pas eu de stratégies
cohérentes permettant une gestion patrimoniale efficace et associant les acteurs de
base, notamment la population. Même si les politiques culturelles ont produit des
artistes (dans le domaine des arts visuels et vivants) de renommée nationale et
internationale, elles n’étaient pas tout à fait très adaptées au système culturel et aux
conceptions patrimoniales des populations.
54 L’État jacobin et son modèle de représentation et d’administration, même s’ils ont
contribué à renforcer la coexistence pacifique d’identités plurielles, ont été influents
dans la dynamique déstructurantes et conflictuelle en Casamance (sud du Sénégal).
Malgré les tentatives d’investissements infrastructurels (routes et pistes, campements
touristiques, université) et de décentralisation relativement récentes, s’est développé en
Casamance un discours politique qui convoque et valorise le particularisme culturel
créateur d’une identité joola. En même temps, ce discours casamançais instrumentalise
la mémoire d’un territoire partagé par une diversité de groupes socioculturels. Le
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Notes
1 Il ne s’agit pas ici de revenir sur les notions générales de patrimoine et de patrimonialisation.
Le lecteur soucieux de tels détails peut se reporter aux nombreux travaux consacrés à ces
questions. Voir la bibliographie dans Djigo 2015.
2 On peut citer la Société des nations (SDN), la Commission internationale de coopération
intellectuelle (CICI), l’Office international des musées (OIM), l’Organisation des Nations unies
pour l’éducation, la science et la culture (Unesco).
3 Ce terme est emprunté à la littérature consultée (documents officiels ou académiques) ; il
désigne, comme l’a théorisé le président Léopold Sédar Senghor, un type de sénégalais « enraciné
dans les valeurs de sa culture originaire mais ouvert aux valeurs positives des autres continents et
civilisations » (voir Senghor 1980 ; Mbengue 1973 ; Tambadou 1996).
4 Comme l’a noté Diouf (2001 : 15), le Sénégal est un territoire produit par les logiques de la
conquête coloniale et de la formation de l’empire colonial français. Ce mode de production de la
colonie qui deviendra, en 1960, un État indépendant et souverain, s’est traduit par une pratique
administrative et un gouvernement des hommes et des choses dont les effets sont indéniables.
L’espace colonial a assemblé les terroirs discontinus des communautés précoloniales.
5 La première habitation fixe des Français à l’embouchure du fleuve Sénégal (l’île de Bocos),
construite par Thomas Lambert (un marchand qui, depuis 1628 au moins, voyageait en Afrique),
date de 1638. La construction de l’habitation définitive dans l’îlot de Saint-Louis date de 1659. Ce
nouvel établissement, de proportions assez vastes et aménagé en enceinte fortifiée, prend le nom
de fort de Saint-Louis. Il répond largement aux exigences du commerce atlantique de l’époque.
En 1677, le roi envoie dans l’Atlantique une flotte, en partie armée par son commandant, le vice-
amiral d’Estrées. Celui-ci s’empare de Gorée qui appartenait aux Hollandais (ces derniers y étant
établis à la date de 1588) ; il en rase les deux forts établis par les Hollandais cependant que
Ducasse, le futur gouverneur de Saint-Domingue, avec le navire L’Étendu, s’empare de Rufisque,
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 24/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
de Portudal et de Joal, et conclut avec les chefs du pays des traités qui assurent aux Français le
monopole du commerce, moyennant le paiement d’une coutume. En 1698, André Brüe (nommé
directeur de la compagnie du Sénégal en 1697) ordonne les travaux de réparation pour les forts de
Gorée. En 1780, les Français disposent au Sénégal de deux comptoirs principaux : Saint-Louis et
Gorée. Ces comptoirs font l’objet de convoitises entre puissances française et anglaise, et passent
alternativement sous le commandement des deux. Par le traité de Paris du 30 mai 1814, Saint-
Louis, Gorée et leurs dépendances sont restitués à la France. Mais ce n’est qu’en 1816 que la
France entreprend de s’installer effectivement au Sénégal, jusqu’à l’indépendance, en 1960, et y
met en place une administration de type européen. Nommé gouverneur le 25 avril 1816, le colonel
Schmaltz prend le commandement du territoire après l’épisode tragique du naufrage de la
Méduse au large du banc d’Arguin. Le drapeau français flotte à nouveau sur Saint-Louis le 25
janvier 1817. À cette date, on entend, par « Sénégal et dépendances », le Sénégal, c’est-à-dire
Saint-Louis, les dépendances étant Gorée et les établissements de la Petite-Côte, Rufisque, Joal et
Portudal. De part et d’autre de la colonie du Sénégal, l’espace comprend une diversité d’entités
politiques et sociales : les royaumes wolof comme le Walo, le Djolof, le Cayor et le Baol ; ceux,
sereer, du Sine et du Saloum ; celui, pulaar, du Tékrour ou le Fouta Tooro ; ceux, soninke, comme
le Khasso et le Gadiaga ou le Galam ; ceux, manding, comme le Niani, le Wouli, le Bambouk, le
Badibou ; et les différentes principautés de la Casamance : joola, manding, balant, baïnuk. Voir
Cultru 1910, Mbaye 1991, Diouf 2001.
6 La nomination de Faidherbe à la tête du gouvernement du Sénégal, le 16 décembre 1854,
marque une phase importante de la conquête du pays. Cette nomination n’est pas fortuite, car il
fallait « s’apprivoiser » les Noirs et les Maures du Trarza et du Brakna : ce gouverneur a étudié le
monde musulman pendant six ans en Algérie, a été en contact avec les Noirs pendant deux ans à
la Guadeloupe (où il a assisté à la proclamation de la liberté), et en deux ans, au Sénégal, il a
parcouru toute la colonie, il a fait partie de l’expédition du commandant Baudin à Grand-Bassam,
et s’est tenu informé des questions en instance. Faidherbe parvient à imposer la reconnaissance
de l’autorité française à des régions qui l’avaient jusque-là contestée (comme le Walo, le Fouta, le
Djolof, le littoral). Après le départ de Faidherbe (mai 1865), ses successeurs continuent la
politique expansionniste. Ils mènent des campagnes au Cayor, au Djolof, au Fouta, dans le Haut-
Fleuve, au Saloum et en Casamance. Le découpage administratif colonial parachève le
démantèlement des anciens royaumes précoloniaux et le remplacement des oligarques locaux. Un
nouvel ordre colonial se substitue à l’ancien, avec des hiérarchies revisitées (voir Brunel 1892).
7 Sur le plan démographique, Saint-Louis et Gorée présentaient la particularité d’avoir une
population hétérogène. Outre ceux qu’on appelait les « habitants » (les mulâtres, signares,
gourmets, musulmans, plus importants en nombre, à Saint-Louis, et comprenant plusieurs
identités sociolinguistiques), cette population compte des Européens (Français, Antillais ou
autres Européens) et des esclaves ou captifs libérés, selon les périodes. Au contraire, la
population des communes de Dakar et de Rufisque était beaucoup plus homogène dans sa
composition, majoritairement lebu et wolof, comptant notamment, aux côtés d’autres minorités
linguistiques, quelques Gourmets, Sereer, et Hal-pulaaren. La concentration des structures
coloniales dans les capitales administratives – de la colonie du Sénégal et de l’Afrique occidentale
française (AOF) – Saint-Louis puis Dakar favorisait le flux de migrants venus de contrées
voisines et lointaines (Fouta-Tooro, Walo, Djolof, Mauritanie, Sierra Léone, Niger, Maroc,
Antilles). Cette composition hétérogène de la population favorisait la production et le
développement d’une culture hybride avec des influences européennes, arabo-musulmanes,
africaines (voir Boilat 1984 ; Johnson 1991 ; Diouf 2001).
8 Le terme indigène est utilisé dans la littérature de l’époque coloniale pour désigner l’autochtone
et tout ce qui s’attache à lui ; jusqu’à la fin du XIXe siècle, il l’est souvent de façon péjorative, pour
justifier l’impérialisme français et sa politique d’assimilation culturelle.
9 Dans ces villes, nommées les Quatre Communes du Sénégal, la politique, selon le modèle
européen, s’implante dès le XVIIIe siècle. Saint-Louis et Gorée ont déjà des maires africains, au
moment de la Révolution française, et élisent un député à l’Assemblée nationale à Paris, en 1848.
La loi municipale métropolitaine de 1872 accorde aux centres urbains de Gorée et de Saint-Louis
le statut de communes. Rufisque et Dakar accèdent respectivement au statut de communes de
plein exercice en 1880 et 1887. Les habitants des Quatre Communes élisent un conseil municipal
et un député sénégalais à l’Assemblée nationale à Paris. Ils sont pourvus des mêmes droits civils
et politiques que les métropolitains, à condition de se soumettre aux codes culturels et civils
français (voir Johnson 1991).
10 Voir Djigo 2012.
11 On peut citer l’île de Gorée (elle fut, pendant la période de traite atlantique, briguée par les
compagnies commerciales portugaises, néerlandaises, anglaises et françaises), chargée de
mémoire pour les Français qui l’avaient prise sur les Hollandais en 1677. L’île de Gorée tout
entière avait été déclarée site historique et inscrite sur la liste des Monuments naturels et des
sites relevant du ministère des Colonies par l’arrêté no 2272 du 15 novembre 1944. Cette mesure
permettait à Gorée de sauvegarder son cachet colonial et de conserver le style XVIIIe-XIXe siècle
qui fait une bonne partie de son charme. D’autres monuments coloniaux, des sites naturels ou
archéologiques, des objets d’art et lieux de mémoire indigènes furent également inscrits sur la
liste officielle ou proposés au classement. Il s’agissait de la presqu’île dite « pointe des Almadies »
(classée par arrêté no 223 du 10 août 1942) ; d’une collection d’objets anciens en or de style
baoulé-ashanti du XVIIe ou XVIIIe siècle (acquise par l’IFAN de Dakar en 1945 et classée par
arrêté no 1791 du 14 mai 1946) ; de la tour de guet de Dialakhar (située à environ 40 km au sud-
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 25/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
est de Saint-Louis et construite en 1856) ; d’arbres sacrés et lieux de mémoire de la communauté
lebu à Dakar, de sites archéologiques découverts à Dakar et Saint-Louis. Voir Djigo 2012.
12 Du point de vue législatif, le décret du 25 août 1937, tendant à la protection des monuments
naturels et des sites à caractère historique, scientifique, légendaire ou pittoresque des colonies,
pays de protectorat et territoires sous mandat relevant du ministère des Colonies, étend en AOF
la protection du patrimoine historique monumental. Mais la récupération et la restauration, par
les Français, du patrimoine bâti ancien, pour les besoins du commerce ou de l’administration,
remontent à bien avant les mesures juridiques de protection patrimoniale : on peut citer, à titre
illustratif, les travaux de réparation des forts de Gorée en 1698 (ordonnés par André Brüe), ceux
du fortin de Portudal au XVIIIe siècle, la réappropriation, à Ziguinchor, des bâtiments ayant
abrité l’ex-maison de commerce Maurel et Prom ainsi que l’ex-hôtel de ville. Voir Djigo 2015.
13 Lettre de Théodore Monod (no 580/IFAN), adressée à Monsieur le Directeur des affaires
politiques, administratives et sociales du gouvernement français, datée du 26 février 1947.
Archives nationales du Sénégal, sous-série O 625 (31).
14 Journal officiel, article 2 du décret du 25 août 1937, tendant à la protection des monuments
naturels et des sites de caractère historique, scientifique, légendaire ou pittoresque des colonies,
pays de protectorat et territoires sous mandat relevant du ministère des Colonies (Journal officiel
AOF no 1744 du 16 octobre 1937 : 1063-1065) ; article 1er, loi no 561106 du 3 novembre 1956
ayant pour objectif, dans les territoires relevant du ministère de la France d’Outre-mer, la
protection des monuments naturels, des sites et monuments à caractère historique, scientifique
ou ethnographique, et la réglementation des fouilles. Journal officiel de l’AOF du 12 janvier 1957 :
53-57
15 Les langues, les coutumes, la littérature orale (contes, légendes, proverbes, récits épiques ou
initiatiques) avaient des fonctions pédagogiques, morales, identitaires et historiques. Ces
composantes du patrimoine culturel ont longtemps occupé une place de choix dans les sociétés
sénégalaises. Elles permettaient de former les individus en leur léguant les expériences, les
techniques et les valeurs tirées du passé. Elles étaient de ce fait appropriées et transmises
oralement de génération en génération. Voir infra.
16 Bien que l’objectif des recherches ethnographiques coloniales soit de connaître et faire
connaître les populations autochtones et leurs cultures (l’ethnographie descriptive et la
linguistique y ont occupé une place de choix) en vue de mieux les comprendre, de faciliter
l’administration pacifiée de la colonie (inventaire exhaustif des sociétés et des richesses
matérielles et humaines) et l’assimilation culturelle, elles traduisent aussi une nouvelle forme de
patrimonialisation de l’héritage culturel – la communication orale étant le moyen habituel de
transmission des règles de fonctionnement des sociétés, des faits du passé et des traditions
culturelles –, dans la mesure où des traditions historiques orales sont systématiquement
collectées, traduites en français, interprétées et relatées dans des manuscrits, voire vulgarisées
dans des revues scientifiques. « Patrimonialisation » renvoie ici aux nouvelles procédures
d’identification, de connaissance, d’inventorisation, de conservation et de valorisation (à travers
les publications) des éléments du patrimoine culturel qui sont ciblés.
17 Les représentants de congrégations religieuses, dotés d’un idéal d’évangélisation, sont envoyés
au Sénégal à partir du début du XIXe siècle, bien que la présence de prêtres soit attestée dans les
comptoirs dès le XVIIIe siècle. En accord avec l’administration coloniale, les congrégations
religieuses n’ont fait que peu ou pas de prosélytisme dans les zones fortement musulmanes. Les
missions d’évangélisation sont plus actives sur le littoral et à l’intérieur, chez les Sereer de la
Petite-Côte et ceux du Nord-Est, chez les Joola et autres communautés casamançaises, ainsi que
chez les Malinke et les Basari (Robinson 2004).
18 Cette collection de Faidherbe est constituée d’objets d’usage domestique, de parures et
d’armement appartenant aux guerriers et à l’aristocratie en place dans les royaumes voisins de
Saint-Louis ou situés en amont du fleuve Sénégal, et tombés sous le joug français à la suite de
multiples traités de paix et de concessions territoriales. Ces 62 objets faisaient partie auparavant
des anciennes collections du musée des Beaux-Arts de Lille, ils ont été acquis, depuis 1991, par le
Muséum d’histoire naturelle de Lille. Cf. Dembélé 2001.
19 En 1994, le khalife Thierno Mountaga Tall avait obtenu des autorités françaises la mise à
disposition de manuscrits de la bibliothèque omarienne, convertis et sauvegardés en microfiches.
Le sabre du combattant Cheikh El Hadj Omar fut exposé, en 1997, à Dakar, lors de la
commémoration du bicentenaire de la naissance de cette figure historique. Voir Diallo 2011.
20 Voir Mbaye 2006.
21 En France, plusieurs expositions nationales et universelles sont organisées à Paris (en 1855,
1867, 1878, 1895, 1889, 1900, 1907, 1931, 1937), à Lyon (en 1894, 1914), à Marseille (en 1906,
1922), et la plus triomphale est l’Exposition coloniale qui s’est tenue à Paris en 1931.
22 En France, Ernest Théodore Hamy crée, en 1879, le Musée ethnographique du Trocadéro à
Paris (il devient le musée de l’Homme en 1938). En 1931 est inauguré le Musée permanent des
colonies qui devient, en 1933, musée de la France d’Outre-mer, ensuite musée des Arts africains
et océaniens en 1960, puis Musée national des arts d’Afrique et d’Océanie (MNAAO) en 1991.
L’essentiel des collections du musée de l’Homme, ainsi que celles du MNAAO sont transférées,
entre 2002 et 2004, au musée du Quai Branly, à Paris, ouvert au public en juin 2006. Le MNAAO
est supprimé en janvier 2003 ; le musée de l’Homme a fermé ses portes en 2010 ; il a rouvert,
après avoir été rénové, le 17 octobre 2015. En Afrique occidentale française, Louis Faidherbe crée,
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 26/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
en 1863, à Saint-Louis (Sénégal), un Musée industriel, ethnographique et d’histoire naturelle.
Lorsque ce premier musée disparaît, les fonds sont transférés à Dakar, en 1869, et rassemblés
dans ce qui prend alors le nom de musée de Dakar. Ces collections sont intégrées à l’institut de
recherche scientifique nommé Institut français d’Afrique noire (IFAN), créé en 1936 à Dakar.
Elles sont par la suite enrichies de collections conséquentes provenant des différentes colonies
d’AOF et d’AEF ; des expositions temporaires sont régulièrement organisées. En 1954 est
inauguré le Musée historique de l’Afrique occidentale française à Gorée. Un nouveau musée
ethnologique, le musée Michel-Adanson, est aussi ouvert à Saint-Louis, en 1956.
23 C’est sous l’égide du gouverneur général Jules Cardes qu’est publié, en 1924, le Bréviaire du
tourisme en Afrique occidentale française, édité par les services du gouvernement général et
imprimé par les services centraux de l’AOF. En 1926, le gouvernement général de l’AOF a édité le
Guide du tourisme en Afrique occidentale française, Paris, Émile Larose. Ce guide fut
régulièrement réédité et augmenté puis relayé par les Guides bleus Hachette à partir des années
1950. D’après Dulucq (2009 : 28), l’activité touristique, difficile à quantifier en l’état actuel des
recherches et compte tenu de l’imprécision structurelle des sources, ne cesse de progresser tout
au long de la période coloniale, passant de quelques centaines de voyageurs dans les années 1920
à quelques milliers dans la décennie 1950.
24 Comme l’indique Dulucq (2009 : 42), l’émergence d’un patrimoine africain inventorié,
collectionné, étudié, éventuellement sauvegardé et mis en musées, est l’un des aspects culturels
que les guides de l’époque coloniale promeuvent dès qu’ils en ont la possibilité.
25 Les missions scientifiques d’Henri Labouret (1932-1936), de Lhote (1933-1941), de Georges
Waterlot (1935-1937), ainsi que celles de Marcel Griaule (principalement l’expédition
ethnographique de Dakar-Djibouti, en 1931-1933) ont occasionné des collectes importantes
d’objets du patrimoine culturel sénégalais et de l’Afrique francophone. Cf. Archives nationales du
Sénégal : sous-série O604(31). Voyages et missions scientifiques (1932-1942) ; sous-série
O606(31). IFAN, Musée et organisation de la recherche scientifique et ethnographique en AOF
(1933-1942) ; sous-série O625(31). Entrée des missions scientifiques en AOF (1945-1948) ; O626
(31). IFAN : missions scientifiques (1945-1953). Voir aussi les travaux de Féau 2001 et Doquet
1999.
26 La protection du patrimoine culturel et la régulation des fouilles archéologiques dans les
colonies ou protectorats français relevaient du ministère des Colonies. À part la question du
transfert des biens culturels indigènes hors de leur milieu, les mesures et normes de protection
patrimoniale étaient théoriquement calquées sur celles de la France. Du point de vue législatif, un
ensemble de textes réglementaires avait été adopté dans l’optique d’accompagner les mesures de
protection du patrimoine culturel. Pour de plus amples informations concernant l’ensemble des
dispositifs juridiques régulant le patrimoine culturel du Sénégal sous domination coloniale, se
référer à Djigo 2012 ; on retrouve, en annexes du document cité, les textes de loi.
27 Une des institutions les plus prestigieuses est l’Institut français d’Afrique noire (IFAN), fondé
en 1936 à Dakar, et qui rayonna en Afrique occidentale française avec des centres locaux créés
dans les capitales des colonies de la fédération. En 1942 est créé l’Office de la recherche
scientifique coloniale qui deviendra Office de recherche scientifique d’Outre-mer (ORSOM) puis
Office de recherche scientifique et technique d’Outre-mer (ORSTOM) en 1944-1953, rebaptisé
plus tard (en 1998) Institut de recherches pour le développement (IRD). Dans les années 1940,
des Français avaient mis sur pied, au Sénégal, des structures de promotion des artistes locaux :
en exemple, on peut citer les initiatives de Me Causson qui avait monté une sorte d’académie des
arts plastiques africains couvrant l’AOF ; celles de Paul Richez qui avait créé, en 1948, un
établissement privé d’enseignement artistique nommé Conservatoire de musique et d’art
dramatique de Dakar ; à la même époque existait également un institut pour la formation des
plasticiens africains. À partir de 1953, sous l’impulsion du haut-commissaire Bernard Cornut-
Gentil, les centres culturels se développèrent dans plusieurs localités du Sénégal. Voir Djigo 2015.
28 Nous reviendrons sur cette question dans la dernière partie.
29 Pour plus de détails concernant la relation entre le patrimoine immatériel et celui, matériel,
du Sénégal, voir l’analyse dans Djigo 2015.
30 Les concessions ou maisons entourent, le plus souvent, un espace à peu près circulaire, c’est la
grande place centrale. Cette place publique centrale, appelée penc en wolof et diŋgiral en pulaar,
structure l’espace, c’est le lieu de rencontre où se règlent les affaires sociales et culturelles de la
collectivité. Cet espace, en tant que lieu de convivialité et de dialogue, est important aux yeux de
la communauté. Il possède son arbre à palabre, ce lieu symbolique devenant celui d’un
enrichissement mutuel « réel ».
31 Ce couple de notions vise l’enracinement des Sénégalais dans leurs valeurs identitaires
ancestrales, allié à une ouverture aux autres civilisations.
32 À propos de la biographie et de la politique culturelle de Senghor, voir Mbengue 1973 ;
Senghor 1980 ; Vaillant 1990 ; Sylla 1998 ; Mbow 2003 ; Diagne 2007.
33 Le drapeau sénégalais est composé de trois bandes tricolores, verticales et égales, de couleur
verte, jaune et rouge ; il porte au centre de la bande jaune une étoile verte à cinq branches.
34 Pour plus de détails sur les significations de la nouvelle symbolique nationale sénégalaise, cf.
Djigo 2015.
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 27/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
35 Ces ensembles se chargent de la promotion et de la diffusion (au niveau national et
international) de la culture populaire, notamment les musiques, danses, chants et folklores du
Sénégal. Toutes les composantes ethnolinguistiques du pays y sont représentées et les artistes
choisis, issus de différentes régions du pays, sont solidement enracinés dans le terroir.
36 Cf. Rapport sur les résultats…, 1969.
37 Créée en 1968 sous le nom de Direction du patrimoine historique, ethnographique et
artistique, elle devient la Direction du patrimoine national (DPN) en 1970, puis la Direction du
patrimoine historique et ethnographique (DPHE) par le décret no 70-093 du 27 janvier 1970,
rebaptisée Direction du patrimoine culturel (DPC) par le décret no 2003-464 du 24 juin 2003.
38 À l’issue de ces missions, deux nouveaux textes de loi (abrogeant la loi coloniale no 56-1106 du
3 novembre 1956) régissent le patrimoine culturel : la loi no 71-12 du 25 janvier 1971 fixant le
régime des monuments historiques et celui des fouilles et découvertes ; le décret d’application no
73-746 du 8 août 1973 qui permet une inscription sur la liste nationale en fonction de l’intérêt
historique, scientifique, légendaire ou pittoresque. L’arrêté ministériel no 12619 MC-DPN-
DSMH-BE en date du 15 octobre 1979 porte publication de la liste des quarante-huit monuments
et sites historiques classés. Cf. Journal officiel de la République du Sénégal du 17 novembre
1979 : 1200.
39 L’île de Gorée est réappropriée et instrumentalisée par les autorités de l’État sénégalais
postcolonial en tant que symbole des préjudices subis par la race noire (la traite négrière et la
colonisation). Sur cette question, cf. Quashie 2009.
40 Le Festival mondial des arts nègres est organisé à Dakar en 1966, plusieurs colloques et
expositions, initiés par le président Senghor, sont tenus à Dakar.
41 Des critiques virulentes sont formulées par les adversaires politiques de Senghor et les
intellectuels marxistes. On peut citer Abdoulaye Ly (il a fait parti des dirigeants du Parti du
regroupement africain) ; Majhmout Diop (partisan du marxisme, il a été le secrétaire général du
Parti pour l’indépendance du peuple) ; Cheikh Anta Diop (égyptologue, marxiste et défenseur de
la littérature wolof, il a été le secrétaire général du Bloc des masses sénégalaises puis du Front
national sénégalais – ces deux partis politiques sont dissous par des arrêtés du gouvernement de
Senghor –, et enfin du Rassemblement national démocratique) ; le linguiste Pathé Diagne ; le
romancier et cinéaste Ousmane Sembène.
42 Par exemple, sur les sceaux de la République du Sénégal, on peut remarquer que le lion,
symbole de majesté, de dignité et de puissance, se retrouve dans le nom même de Diogoye (le
lion, en sereer), le père du président Senghor (Diogoye Basile Senghor était un riche propriétaire
terrien et un commerçant renommé qui recevait les visites du Buur – roi sereer – Sine Coumba
Ndofène Diouf). Léopold Sédar Senghor a fait du lion l’emblème de son parti, le Bloc
démocratique sénégalais (BDS), fondé en 1948. Plus tard, au cours de sa présidence de la
République, il institue l’ordre du Lion comme la plus haute distinction que le Sénégal peut
décerner. Quant à la symbolique du baobab, qu’on retrouve sur les sceaux de la République, on
peut dire qu’en milieu sereer (groupe d’origine du président Senghor), c’est un arbre sacralisé qui
matérialise, très souvent, un lieu de culte s’il est le réceptacle des pangool ou esprits ancestraux.
Chez les Sereer, le baobab symbolise aussi le lieu d’intronisation du roi et, selon la tradition, les
buur livraient, très souvent, des batailles autour de cet arbre sacré. Cf. Diouf et Diop 1990 : 11-12.
43 Dans l’entreprise de construction nationale, le poète-président incite la jeunesse, à travers
l’hymne de la jeunesse du Sénégal, à faire référence à « Nos ancêtres [qui], depuis leurs
tendresses noires – Ont tracé droit le chemin – Et forgé notre destin… Tel Lat Dior Ngoné Latyr –
Tendant nos jeunes cœurs vers ton soleil – Oui, s’il le fallait – Demain, nous offrirons notre
souffle – Pour te défendre – Ô notre patrie ! » En fait, le texte de l’hymne de la jeunesse est une
réadaptation par le président Senghor du chant traditionnel dont le titre est « Ñaani bañena ».
Cette chanson a été composée par Samba Coumba Kalado, qui jouait au xalam et la chantait en
l’honneur de Lat Dior, notamment lors de sa bataille contre le buur Ñaani (« roi du Ñaani », le
Ñaani était un royaume manding situé dans l’actuel Sénégal Oriental). Par la suite, elle a été
reprise par beaucoup de chanteurs et joueurs de xalam. Cf. Samb 1986 : 20.
44 De 1960 à 1970, l’université de Dakar est marquée par l’existence d’organisations
estudiantines fortes. Sous la poussée de pressions nationalistes des indépendances, le
mouvement estudiantin a inscrit son action dans le champ d’une lutte contre le
« néocolonialisme » et ceux qui sont considérés comme ses représentants locaux. La plupart des
membres de ces associations estudiantines sont imprégnés du marxisme et actifs dans le Front
culturel du Sénégal (FCS), un mouvement culturel révolutionnaire et patriotique (très actif à la
fin des années 1970) lié aux partis politiques clandestins, notamment celui, maoïste, And Jëf
(dont le secrétaire général, Landing Savané, est d’origine casamançaise et joola). Le FCS s’est
lancé dans la production, en wolof écrit en caractères latins, de poésies et chansons culturelles
révolutionnaires et patriotiques, et de textes de vulgarisation scientifique. Parmi les brochures en
langue wolof (l’usage de cette langue de communication au Sénégal, par le FCS, lui permettait
une meilleure diffusion de ses idées) du FCS, on peut citer : Teerebtannu taalifu xare Sénégal
(Anthologie de la poésie sénégalaise de combat), paru en mai 1977 ; et la parution, en juillet 1978,
de Tànn ci mbindum Maawo Se Tun (traduction de trois textes de Mao Tsé-Toung : De la
pratique (Ci mbiri jëf) ; Servir le peuple (Jariñ askan wi) ; D’où viennent les idées justes (Fan la
xalaat yu jub yi di sosoo ?). Le FCS avait aussi publié des brochures en langue française,
notamment « Lamine Senghor : vie et œuvres » et « Aliin Sitoé Diatta : vie et œuvres ».
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 28/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
45 Pour une biographie de Lamine Senghor, voir Sagna 1986 et la brochure publiée en juillet 1979
par le FCS.
46 À propos de ce personnage, cf. Girard 1969.
47 Sidya Diop est le fils héritier de la dernière souveraine du Walo, la reine Ndatté Yalla. Il a été
envoyé à l’« École des otages » de Saint-Louis (créée en 1856 par le gouverneur Faidherbe et
appelée par la suite « École des fils de chefs et des interprètes »), puis au lycée d’Alger, en 1861,
pour y effectuer ses études secondaires. À son retour d’Alger, il a passé quelque temps à l’école
des frères et s’y est fait discrètement chrétien ; Faidherbe a été son parrain et il a été baptisé
Sidya Léon Diop. Par une décision du 18 mars 1871, Sidya Léon Diop est nommé chef supérieur
du Walo. Devenu l’âme d’une résistance antifrançaise, il fut déporté au Gabon au début de 1876,
où il mourut, le 26 juin 1878, âgé de 30 ans. Cf. Bouche 1975 : 336-338.
48 L’une des crises politiques qui secoue le gouvernement est celle qui éclate le 17 décembre
1962, opposant les deux ex-compagnons : le président Senghor et le Premier ministre Mamadou
Dia. Voir Hesseling 1985, Mbaye 2012.
49 Avec l’ouverture politique de l’après-guerre, a été créé (en 1947) un mouvement politique
casamançais appelé Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC), animé par
des intellectuels casamançais, dont les principaux leaders ont été Émile Badiane et Ibou Diallo.
Plusieurs travaux ont été consacrés à la question casamançaise : voir, parmi les auteurs ayant
travaillé sur cette question : Darbon 1988 ; Barbier-Wiesser 1994 ; Foucher 2002 ; Awenengo
Dalberto 2005 ; Marut 2010 ; Diédhiou 2011 ; Manga 2012.
50 L’initiative et l’organisation d’une marche indépendantiste porte la marque de Mamadou Sané
dit « Nkrumah » (originaire du Blouf, dans le département de Bignona, il a quitté la Casamance
en 1964 pour la Mauritanie, puis le Maroc, avant de s’installer à Paris à partir de 1967), appuyé
par les leaders locaux de la contestation. Des réunions préparatoires ont lieu dans les bois sacrés
(de Bourofaye et de Diabir, en périphérie de Ziguinchor), où sont échangés les serments
traditionnels. Le 26 décembre, des centaines de personnes partent de Mangagoulak, sur la route
d’Oussouye, et marchent vers le centre-ville. Devant la gouvernance de Ziguinchor (siège de
l’autorité administrative), les manifestants – avec « des femmes nues en tête, suivies des hommes
armés d’arcs et de flèches empoisonnées et arborant des fétiches » – parviennent à hisser un
drapeau blanc (présenté comme emblème de la Casamance) à la place du drapeau du Sénégal
(Darbon 1984 ; Marut 2010).
51 Certains auteurs retiennent l’année 1949 comme étant celle de la création du MFDC historique
(voir Awenengo Dalberto 2005).
52 C’est l’argumentaire historique utilisé par les idéologues du MFDC pour légitimer leur
discours séparatiste.
53 À propos du bukut, voir Thomas 1959 : 697-709.
54 Voir, sur cette question, Diouf 2001.
55 Voir infra, p. 335.
56 En 1984, une réforme administrative a divisé le découpage colonial de la région de Casamance
en deux régions : celle de Ziguinchor (la ville de Ziguinchor était la capitale administrative de la
région de Casamance depuis 1909) et celle de Kolda.
57 Cf. Diop et Diouf 1990.
58 Cf. Enda 1991 ; Diouf 1992 et 2003 ; Havard 2005.
59 On revient sur cette floraison des journées culturelles.
60 Pour plus de détails, voir Tambadou 1996.
61 Le FESNAC est une manifestation biennale qui se déroule durant quatre jours dans une
capitale régionale différente en vue de faire découvrir et de valoriser le patrimoine et les
spécificités culturelles et artistiques de la région.
62 L’idéologie du sursaut national prône un enracinement aux valeurs dites sénégalaises.
63 Un ministère délégué chargé de l’Éducation de base et de la promotion des langues nationales
du Sénégal est créé en 1991.
64 C’est le cas, à Dakar, de la statue coloniale communément appelées « Demba et Dupont »,
représentant deux soldats : l’un français, l’autre sénégalais. Elle a été érigée en 1923 à la mémoire
des morts des troupes de l’AOF ayant participé à la Première Guerre mondiale ; elle se dressait au
rond-point de l’Étoile, ex-place Tascher, rebaptisée place Soweto. La mesure a concerné aussi la
statue représentant Faidherbe, qui se dressait devant le palais de la République. Ces statues sont
démontées dans la nuit du 13 au 14 août 1983 et transférées au cimetière catholique de Bel-air ;
celle représentant Faidherbe est actuellement conservée au musée des Forces armées (créé en
1997, il est devenu musée de la Direction des archives et du patrimoine historique des forces
armées du Sénégal). Celle de « Demba et Dupont » est récupérée sous la présidence d’Abdoulaye
Wade (je reviens un peu plus bas sur cette statue). À propos de l’histoire de ces statues, voir
Archives nationales du Sénégal, sous-séries 4P1501à 4P1507. Voir aussi « Les statues de la place
Tascher et de Faidherbe enlevées », Le Soleil du 17 août 1983, p. 3.
65 Diop (2013 : 38-42) remarque que « l’action d’Abdoulaye Wade a été structurée par une
logique puisant, selon ses intérêts politiques ou les opportunités qu’il savait si bien exploiter, ses
https://journals.openedition.org/africanistes/4617#text 29/33
6/2/2020 Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au Sénégal
références dans la “tradition” ou la supposée modernité. Sa prétention de soi insiste sur son
expérience : il est celui qu’on ne peut pas surprendre, tellement il est malin (naandite, muus,
baripexe). Elle recourt parfois aux valeurs dites traditionnelles wolof, comme on l’a noté au
travers de ses références fréquentes au courage (fit). Les valeurs guerrières, le grand courage, la
virilté (goor fit, fit mooy goor : c’est le courage qui fait l’homme) structurent ses propos […].
Mais ce recours aux vertus dites traditionnelles est sélectif. […]. Son territoire de prédilection
n’est pas l’Université ou le débat d’idées qu’affectionnaient Senghor, Mamadou Dia et le
majestueux Cheikh Anta Diop. Son souci majeur a été de fréquenter d’abord les lieux permettant
de renforcer son pouvoir, d’affiner sa technologie de commandement en vue de s’imposer, de
provoquer et d’anéantir ses adversaires ».
66 La posture du taalibe (disciple) et la récupération de la mystique du travail de l’idéologie
mouride.
67 Le budget est presque de 6 milliards de francs CFA en 2006 et d’environ 17 milliards de francs
CFA en 2009 ; ce gonflement est lié à l’organisation du Festival mondial des arts nègres
(FESMAN), plusieurs fois reporté, et qui s’est tenu du 10 au 31 décembre 2010 à Dakar.
68 Il y a eu différentes options pour le choix des appellations du ministère chargé de la Culture,
depuis 2000. Ainsi, on a eu successivement l’existence des ministères suivants : Culture et
Communication ; Culture ; Culture et Loisirs ; Culture et Patrimoine historique classé ; Culture,
Patrimoine historique classé, Langues nationales et Francophonie ; et fi Culture et Cadre de vie.
69 Le centre historique de la ville de Saint-Louis est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de
l’Unesco en décembre 2000 (la procédure de préparation du dossier de nomination du site est
entamée en 1998), le rituel initiatique manding ou Kankurang en janvier 2006, les cercles
mégalithiques de Sénégambie en juillet 2006, le delta du Saloum en juin 2011, les paysages
culturels bassari, peul et bedik en juin 2012.
70 Le « Parc culturel » devrait abriter les « sept merveilles architecturales » : la Bibliothèque et
les Archives nationales, la place de la Musique, l’École des arts, l’École d’architecture, le musée
des Civilisations noires et un Grand Théâtre (construit sur financement du gouvernement de la
République populaire de Chine, il est fonctionnel depuis avril 2011).
71 Cf. De Jong et Foucher 2010 : 187-204.
72 Source : Débats sur les chaînes de télévision sénégalaises publique (RTS) et privées (Walfadjri,
2STV), la presse écrite et Internet.
73 Abdoulaye Mbaye Pekh, le griot « officiel » du président Wade, l’a surnommé « Président des
inaugurés », une expression composée de mots français « wolofisés ». Ce surnom met en
évidence le développement infrastructurel mis en œuvre par Abdoulaye Wade, le « bâtisseur »,
qui lui-même préside pratiquement toutes les cérémonies d’inauguration largement médiatisées.
74 Sans prétendre épuiser les exemples de ce genre de manifestations culturelles, on peut citer les
Journées culturelles de Bakel, initiées par des responsables politiques (maires, conseillers
municipaux) et coutumiers issus de cette localité située dans le Sénégal oriental (région de
Tambacounda, ancienne capitale du royaume soninke de Gadiaga) ; le Festival des ethnies
minoritaires (Basari, Jalonke, Bedik) de Bandafassi (département de Kédougou, région de
Tambacounda), initié par le conseil régional ; les Journées culturelles sereer, organisées dans un
village (désigné) circonscrit dans le terroir sereer du Sine-Saloum par l’ONG Ndef Leng, qui
fédère plusieurs villages ; les Journées culturelles de Sédhiou (dans la région sud du Sénégal,
pays manding et balant ; localité inscrite dans l’empire précolonial du Gabou) ; le carnaval de
Ziguinchor (région sud du Sénégal), initié par les autorités municipales de cette région ; le
Festival des blues du fleuve à Podor (dans le terroir pulaar du Fouta, vallée du fleuve Sénégal),
initié par le chanteur Baaba Maal ; les Journées culturelles lebou, initiées par différentes
collectivités lebou du Cap-Vert et organisées à Ouakam, Rufisque, Yène. Ces manifestations font
revivre les traditions, les rites et les cultes du passé des terroirs précoloniaux. Des fresques
grandioses mobilisent des milliers d’acteurs, reconstituant les scènes du passé : circoncision,
initiation, mariage, lutte traditionnelle, rite funéraire, cérémonie de sacrifice dédiée aux ancêtres,
aux génies ou aux esprits du clan ; et cela, même dans des régions où certains rites et/ou
cérémonies restent d’actualité.
75 Les gamou, ziara, magal, thiant sont des manifestations culturelles, animées par des chants
soufis et des récits coraniques ou confrériques, tenues par des marabouts ou disciples d’une
confrérie religieuse musulmane du Sénégal (mouride, tidjane, khadre, layène, niassène).
Lorsqu’elles sont organisées dans les capitales confrériques (comme Touba, Tivaoune, Médina
Baye à Kaolack, Cambérène ou Yoff Layène à Dakar, Ndiassane, Thiénaba) ou les endroits
marqués par le passage de marabouts confrériques, elles donnent l’occasion aux fidèles ou taalibe
de visiter les zawiyya (chaque confrérie se rattache à une zawiyya, qui est à la fois la maison
mère de celle-ci et son siège social, un centre d’études coraniques et de litanies ou invocations
propres à la confrérie, et un lieu de pèlerinage), mosquées et tombeaux de leurs guides religieux.
76 Un groupe socioculturel renvoie ici à une communauté identitaire ethnique : Sereer,
HalPulaar, Joola, Soninke, Lebu, Manding et autres.
77 Dans le cadre de ma thèse, j’ai effectué deux voyages au Sénégal : du 18 juillet au 5 septembre
2003, puis du 19 janvier au 11 avril 2005. Dans cette thèse, la réflexion sur le patrimoine matériel
et immatériel s’est également servie des données de terrain (en mémoires de maîtrise et de DEA)
issues d’enquêtes systématiques auprès des populations riveraines des sites archéologiques et
historiques du delta du Saloum au Sénégal (Djigo 2001 et 2000). Du 23 mai au 7 juin 2015, lors
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d’un séjour au Sénégal, j’ai effectué des enquêtes complémentaires sur le patrimoine culturel en
langues wolof, pulaar, sereer, joola, manding et soninke, promues au rang de « langues
nationales » par le décret présidentiel no 71-566 du 21 mai 1971.
78 Si le wolof est une des langues nationales du Sénégal, à côté du français qui est retenu comme
étant la langue officielle, il est dans les faits la principale langue vernaculaire du pays. À ce titre,
j’ai utilisé le wolof, et parfois le français, au cours de mes entretiens avec des personnes
ressources, autour de la question du patrimoine culturel et naturel, dans le cadre de mes travaux.
79 Terme wolof, le aada renvoie à un rituel, une coutume qui remonte à un passé lointain, c’est-
à-dire le baax (une bonne valeur) ou baaxu maam (les bonnes valeurs des ancêtres) et qui est
reconnu, perpétué, respecté par les héritiers. L’importance du aada ou baaxu maam au regard de
la communauté, des individus adhérents, qui se l’approprient, en fait un mythe, au risque,
parfois, de l’entacher de superstition. Cosaan : origine, cause, substantif du verbe sos qui signifie
« créer ». Le cosaan renvoie, généralement, à une tradition, une valeur ou une pratique qui se
serait formée depuis le passé, par les ancêtres, et qui se serait fossilisée à un certain moment de
l’histoire à partir duquel elle aurait continué d’être transmise, jusqu’à devenir une habitude.
80 Terme wolof, le ndono est l’héritage reçu des ancêtres ; il englobe l’ensemble des aada ak
cosaan et va au-delà de ces champs.
81 Ces « monuments historiques » ou « richesses du passé » sont constitués d’un ensemble de
données que les sociétés ont tenté de conserver en les inscrivant dans l’espace ou en les
mémorisant dans les cadres de référence identitaires qu’elles ont mises en place : les
« traditions ». Elles relèvent de divers domaines : le droit (règles de succession, appropriation du
sol et règles de gestion foncière) ; l’histoire (généalogie des familles, histoire de lieux ou
d’événements) ; les techniques artisanales (art du cuir, tissage et teinture du textile, poterie,
vannerie, bijouterie) ; les traditions initiatiques diverses dans le cadre des rites de passage
(circoncision, initiations, excision, tatouages) ; les harmonies musicales (berceuses, chants
funéraires ou initiatiques, incantations) ; les jeux traditionnels (mbappat, lambi golo, baay gaal,
langaa buri, jal bi jalaan, yaa kabati kabati yaa, wure, tam). Le propos, ici, n’est pas de faire
une recension de symboles politiques ou mythiques, de la structuration socioprofessionnelle chez
certains groupes (Wolof, Manding, Pulaar, Soninke, Sereer du Sine), de traditions et référents
identitaires spécifiques de différentes communautés socioculturelles du Sénégal. Une large
analyse a été consacrée à la représentation et au fonctionnement de la notion de patrimoine
culturel à travers les mémoires historiques et traditions rituelles de divers groupes linguistiques
du Sénégal. Je renvoie le lecteur à Djigo 2015 pour des exemples précis à ce sujet.
82 Entretien avec Amadou Seydou Datt, agent de programmes, présentateur du journal pulaar à
la RTS, interrogé le 1er juin 2015 à la RTS.
83 Entretiens avec Abdoulaye Ndiaye, agent de programmes, présentateur du journal en sereer ;
Djiby Ndiaye, écrivain et auteur de plusieurs ouvrages en langues sereer et wolof, présentateur du
journal et d’émissions culturelles sereer à la RTS et à Radio Ndefl interrogés le 2 juin 2015.
84 Entretien avec Gaston Sambou. Formateur dans la transcription du joola, il a participé à
l’élaboration du dictionnaire joola-français ; il est agent de programmes et présentateur du
journal en joola à la RTS ; interrogé le 1er juin à la RTS et le 4 juin au quartier Ouest-Foire Dakar.
85 Entretiens avec Ousseynou Dianka et Ablaye Tandian, agents de programmes, présentateurs
du journal en soninke à la RTS, interrogés le 1er juin 2015.
86 Entretien avec Amadou Lamine Dramé, écrivain en langues française, manding, et wolof ;
agent de programmes et présentateur du journal en manding à la RTS, interrogé le 4 juin à la
RTS.
87 On peut distinguer différentes sphères : politique (comme les lieux d’intronisation des
dignitaires locaux, les anciennes capitales de royaumes précoloniaux, les champs de bataille),
religieuse et mythique (comme les bois, arbres, puits et forêts sacrés ; les mosquées et églises
anciennes ; les lieux de passage de saints musulmans ou chrétiens, les manuscrits produits par
des érudits musulmans), sociale (comme les places publiques, les lieux et arbres à palabre).
88 Voir, à ce propos, Ly 1966, Sylla 1978.
89 Il y a une implantation de la spiritualité chez les Sénégalais, une appropriation du patrimoine
religieux. Dans un pays où près de 95 % de la population est musulmane, l’Islam a inscrit ses
empreintes dans la société sénégalaise. Le système culturel arabo-musulman est ancré dans la
structure sociopolitique, les langues locales, les comportements, l’habillement, les cérémonies
(naissance, mariage, décès) et l’éducation familiale des Sénégalais. Voir Djigo 2015.
90 Dans le processus de constitution de l’État sénégalais postcolonial, la logique mise en œuvre a
privilégié le modèle wolof au détriment des logiques des autres communautés qui sont mises à
l’écart. Cette hégémonie wolof trouve sa source dans le système colonial qui, en déplaçant le
centre de l’autorité et du commandement vers les villes (les Quatre Communes), a accordé un
privilège au groupe des Wolof. La logique coloniale a procédé, volontairement ou non, à
l’affaiblissement des institutions rurales. Parmi celles-ci, seules les confréries ont pu résister. Ces
résistances ne peuvent s’expliquer, dans le cas des communautés wolof, que par les nécessités de
la consolidation de l’économie arachidière, culture qui s’est développée dans le pays wolof. Les
principales villes coloniales s’étant établies en zones wolof, ce phénomène favorisa, de fait, cette
communauté. « Langue hégémonique urbaine, le wolof est aussi l’instrument du commerce ; c’est
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la langue de l’arachide, de la radio, langue parallèle de l’administration et de l’école. » Cf. O’Brien
2002 ; Diop et Diouf 1990 ; Diouf 1994 ; Hilary 2011.
91 On peut citer l’exemple des rites de possession comme le ndëp chez les Lebu et le lup chez les
Sereer ; le xooy sereer (cérémonie au cours de laquelle des saltige – médiateurs entre le monde
des humains et celui des esprits dits supérieurs – de différents horizons sont invités à faire des
déclarations publiques et à dresser le bilan de l’année écoulée et des prévisions, pour l’année à
venir, sur l’hivernage et les risques de calamités) ; les rites de fécondité comme le kañalen chez
les Manding et les Joola, le gamond chez les Bedik ; les rites initiatiques des circoncis comme le
kankurang chez les Manding, le ndut chez les Sereer, le nitch chez les Basari, le bukut chez les
Joola, les Baïnuk et certaines autres communautés de la Casamance.
92 Cf. Corbeil et al. 1948 : 378-460 ; Bocoum 2002 : 185-213 ; Niang 2011 : 157-168 ; Sy et al. sd.
93 Les amas coquilliers sont des dépôts artificiels de coquillages de dimensions variables obtenus
par suite de l’accumulation de coquilles après consommation de la chair. Au Sénégal, ils sont
localisés le long du littoral atlantique, notamment dans les deltas du Sénégal et du Saloum mais
aussi en Casamance. Ils sont identifiés comme des sites archéologiques originaux. Les amas
coquilliers localisés dans le delta du Saloum sont très particuliers, du fait de la présence de
tumulus édifiés sur certains d’entre eux (tertres en coquilles renfermant un ou plusieurs défunts).
Les amas coquilliers du delta du Saloum constituent une des provinces les plus originales de la
protohistoire sénégambienne. Le delta du Saloum, avec ses paysages naturels et culturels (les
amas coquilliers) est classé sur la liste nationale, depuis l’arrêté ministériel no 12619 MC-DPN-
DSMH-BE en date du 15 octobre 1979 portant publication de la liste des monuments et sites
historiques du Sénégal. Le delta du Saloum est inscrit en tant que paysage culturel sur la liste du
patrimoine mondial de l’Unesco, le 24 juin 2011.
94 Il s’agit de gisements néolithiques situés dans la région de Thiès. Classés sur la liste du
patrimoine national, ils sont pourtant exploités en tant que carrières de sable par des riverains et
par la Direction des travaux publics. Cf. Corbeil et al. 1948 : 434-435 ; Kane 2001 : 28.
95 Cf. les travaux de Thilmans et Descamps 1982 ; Thilmans 1997 ; Thiobane 1998 ; Mbow 1999 ;
Boucal 2000 ; Djigo 2000 ; Mbaye 2000.
96 Dans le cadre de la réalisation d’un mémoire de maîtrise, une équipe de recherche –
supervisée par Marie-Amy Mbow (IFAN) et Paul Ndiaye (département de géographie UCAD),
financée par l’UICN –, constituée de deux géographes et d’une historienne, avait mené, en 1999
des enquêtes systématiques sur l’exploitation et la commercialisation des amas coquilliers dans le
delta du Saloum. À propos des résultats de cette équipe de recherche, voir Boucal 2000, Djigo
2000, Mbaye 2000.
97 Les vestiges archéologiques contenus dans les amas coquilliers du delta du Saloum ont prouvé
que ces derniers sont d’origine anthropique. Ils sont le résultat d’une activité de collecte de
mollusques effectuée par un peuplement ancien protohistorique. Alors que le peuplement actuel
des îles du Saloum serait issu d’une migration de Manding originaires du Gabou. Cf. à propos de
l’histoire de cette migration, Pélissier 1966 : 407-411 ; Martin et Becker 1979 : 722-772 ; Gravrand
1983 : 173-185.
98 Les sites exploités en carrière se trouvent dans le territoire villageois, et les exploitants
résident généralement dans la localité à laquelle les amas coquilliers sont administrativement et
historiquement rattachés. L’exploitation est libre pour tout natif du village, les amas coquilliers
étant considérés comme un bien commun à l’échelle villageoise. Dans le cas où l’équipe
d’exploitants d’un amas coquilliers (la compagnie) réside dans une autre localité, il faut au
préalable recueillir l’autorisation de l’autorité coutumière villageoise qui est supposée être le
garant du foncier.
99 Voir les travaux dirigés par Den Boer et Frihoff 1993 ; Chrétien et Triaud 1999, Gaultier-
Kurhan 2001 ; de Jong et Rowlands 2007.
Référence électronique
Adama Djigo, « Patrimoine culturel et identité nationale : construction historique d’une notion au
Sénégal », Journal des africanistes [En ligne], 85-1/2 | 2015, mis en ligne le 07 juillet 2016,
consulté le 06 février 2020. URL : http://journals.openedition.org/africanistes/4617
Auteur
Adama Djigo
Chercheuse associée à l’African Studies Centre Leiden (Pays-Bas)
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Droits d’auteur
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