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Un écoulement mamelonnaire révèle le plus souvent une pathologie bénigne. L’exploration repose sur une
synthèse clinique distinguant tout particulièrement les écoulements unipores des écoulements multipores.
Ces derniers ont le plus souvent une origine exogène ou sont en rapport avec une pathologie mammaire
dystrophique bénigne, alors que l’écoulement unipore fait rechercher un obstacle intragalactophorique qui
nécessite une exérèse chirurgicale. La découverte d’une anomalie échographique ou mammographique
justifie de réaliser des prélèvements. L’imagerie par résonance magnétique mammaire a actuellement
une place grandissante dans l’exploration des écoulements unipores. Une chirurgie est réalisée à titre
diagnostique et thérapeutique lorsqu’une lésion papillaire ou maligne est détectée. La pyramidectomie
reste indispensable en cas d’écoulement unipore persistant ou de type hémorragique, même lorsque
l’imagerie est négative.
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A B
C D
Figure 1. Caractéristiques d’un écoulement mamelonnaire.
A. Écoulement multipore séreux, lactescent et brunâtre.
B. Écoulement unipore séreux.
C. Écoulement unipore brunâtre.
D. Écoulement unipore sanglant.
caractère uni- ou multipore, uni- ou bilatéral. Les notions de mani- rouge (hématique). Il faut particulièrement identifier le carac-
pulations répétées du mamelon pouvant entretenir l’écoulement tère sanglant de l’écoulement et le distinguer d’un écoulement
et le déclenchement par un événement récent comme une mam- brunâtre car la signification pathologique est totalement diffé-
mographie seront recherchées. rente (Fig. 1C). Le caractère sanglant élève le degré de suspicion
(Fig. 1D).
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Conduite à tenir devant un écoulement mamelonnaire 34-810-C-10
caractère suspect ou non d’un écoulement sont résumés dans le peut être rassurée, elle est invitée à stopper ses manipulations si
Tableau 1. On classe les écoulements en trois catégories : physiolo- nécessaire. Les galactorrhées sont également considérées comme
gique, galactorrhée hors du contexte de la grossesse et écoulement physiologiques pendant et après une grossesse, et jusqu’à un an
pathologique. Les écoulements physiologiques sont multipores après un allaitement [4] .
plus ou moins bilatéraux colorés (non hémoragiques), le plus sou-
vent provoqués par des manipulations répétées du mamelon. Ils
ne justifient d’aucune exploration chez la femme âgée de moins de
40 ans et, au-delà, un bilan mammographique et échographique Conduite diagnostique devant
est recommandé [3, 4] . Parfois ces écoulements sont en rapport avec
une pathologie mammaire dystrophique bénigne. Si l’imagerie un écoulement non physiologique
est négative ou en faveur d’une pathologie bénigne, la patiente
(Fig. 5)
Écoulement unipore
Son exploration comporte différents examens afin de recher-
cher une étiologie à ce dysfonctionnement canalaire pouvant être
d’origine obstructive ou sécrétoire. Les examens réalisés ont pour
objectif de rechercher une lésion sous-jacente et d’en appréhender
sa nature.
Écoulement
Galactorrhée (hors
Physiologique Pathologique
contexte grossesse)
Tableau 1.
Écoulement mamelonnaire, signes cliniques en faveur de la bénignité ou de la malignité.
Mode de survenue Latéralité Fréquence Couleur
Non suspect Provoqué Bilatéral Ancien, intermittent Lactescent, crémeux,
marron ou vert foncé
Suspect Spontané Unipore (unilatéral) Persistant Clair
Séreux
Sanglant
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34-810-C-10 Conduite à tenir devant un écoulement mamelonnaire
Écoulements pathologiques
Galactorrhée (hors
Unipore
contexte grossesse)
IRM cérébrale
Figure 5. Arbre décisionnel. Stratégie des examens devant un écoulement mamelonnaire pathologique. TSH : thyroid stimulating hormone ; IRM : imagerie
par résonance magnétique.
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A B C
Figure 8. Mammographie.
A. Papillomes, masse ovalaire de contours lisses
avec macrocalcifications (flèche), ectasies galac-
tophoriques (tête de flèche).
B. Papillome, masse ovalaire de contours lisses
avec microcalcifications (flèche).
C. Carcinome canalaire in situ, foyer segmentaire
de microcalcifications polymorphes.
D. Papillome, signes indirects avec ectasie cana-
laire borgne (flèche).
E. Papillome, signes indirects avec asymétrie et
distorsion (fléche).
D E
et leur fréquence relative n’est pas rapportée dans la littéra- des lésions, de leur faible contraste par rapport à l’environnement
ture [10] . L’objectif de l’analyse mammographique est de repérer ou encore en l’absence de calcifications associées. Ainsi, dans
une lésion et, pour tout classement supérieur ou égal à Breast l’exploration d’un écoulement mamelonnaire, la sensibilité des
Imaging-Reporting And Data System 3 (BI-RADS 3), de réaliser des examens mammographique et échographique reste faible et il faut
prélèvements. poursuivre les investigations afin d’expliquer le symptôme car la
Le bilan est toujours complété par une échographie réalisée clinique prime sur l’imagerie [11] .
même si la mammographie est normale. L’échographie explore
l’ensemble des aires mammaires et axillaires. Elle recherche des
signes directs, tout particulièrement une lésion de siège endocana- Galactographie
laire responsable d’une obstruction galactophorique. Cette étude Cet examen est réservé aux écoulements unipores per-
est facilitée par des plans de coupe radiaires autour de l’axe du sistants, sans point d’appel clinique, mammographique ou
mamelon. Les structures canalaires sont alors explorées selon leur échographique. Des clichés mammographiques comportant une
grand axe (Fig. 9A, 9B). L’examen peut être aidé par une étude incidence de profil sont réalisés avant toute opacification.
Doppler qui apporte un argument supplémentaire sur le carac- Cette technique consiste à opacifier avec un produit de
tère tissulaire de la lésion endocanalaire en repérant le pédicule contraste iodé le réseau galactophorique incriminé en injectant
vasculaire de la masse ; à l’inverse, l’absence de flux Doppler ne directement un produit de contraste iodé. Cela nécessite la mise
permet pas d’infirmer la nature solide de l’image détectée (Fig. 9B). en confiance préalable de la patiente en lui expliquant le déroule-
Parfois, c’est un syndrome de masse adjacent à des ectasies galac- ment de l’examen, en l’installant de façon confortable en position
tophoriques qui est repéré (Fig. 10) ou encore seuls des signes demi-assise permettant un bon accès visuel à la PAM. Un très bon
indirects d’ectasies galactophoriques sont relevés. Ces dernières éclairage est indispensable (lampe orientable, voire loupe éclai-
ont une valeur diagnostique si elles sont localisées, de distribution rante). La galactographie consiste à repérer le pore incriminé et à y
segmentaire et corrélées en topographie au secteur anatomique positionner sans chercher à le cathétériser la pointe d’une aiguille
correspondant au pore incriminé d’où émane l’écoulement. Le à bout mousse (cathéter de sialographie). Cette dernière aura été
classement BI-RADS des lésions est établi et des prélèvements réa- au préalable reliée, via une tubulure (purgée sans bulle d’air), à
lisés sur toute lésion classée BI-RADS 3 et plus, compte tenu du une seringue (5 ml) à piston remplie d’un produit de contraste
symptôme clinique écoulement associé. Enfin, la mammographie iodé hydrosoluble. L’injection du produit de contraste, très fluide,
et l’échographie peuvent être en défaut en raison de la petite taille s’effectue doucement en prévenant la patiente d’une sensation
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A B
Figure 9. Échographie et papillomes.
A. Masse échogène hypervascularisée (flèche) dans un canal ectasique.
B. Contenu échogène non vascularisé d’un canal ectasique (flèche).
progressive de tension mammaire. Ce ressenti et surtout le reflux Figure 11. Galactographie et mastopathie fibrokystique (incidence de
du produit de contraste signifient que le remplissage galactopho- face). Ectasies canalaires régulières avec images d’addition (flèche) cor-
rique est optimal. Le cathéter est alors retiré et l’obturation du respondant à des kystes (mastopathie fibrokystique bénigne). Ectasies
pore assurée en déposant une goutte de collodion afin de per- galactophoriques non remplies de contraste (tête de flèche).
mettre la réalisation de clichés comportant des incidences de face
et de profil, complétées par des agrandissements.
L’objectif de la galactographie est de repérer un défect intra-
luminal (défaut de remplissage) justifiant et guidant l’exploration en T2 et des séquences dynamiques après injection de sels de gado-
chirurgicale mais également une modification de calibre des galac- linium peut être une alternative pour explorer un écoulement
tophores, une anomalie de leur paroi ou de leur distribution ; ces mamelonnaire suspect, c’est-à-dire unipore et unilatéral, lorsqu’il
éléments diagnostiques sont en faveur du développement d’une y a un échec de la galactographie ou si la patiente refuse cet exa-
pathologie endocanalaire. À l’inverse, la visualisation d’un galac- men [13] .
tophore normal ou ectasique, d’images d’addition correspondant Une anomalie du signal du contenu galactophorique (hyper-
au remplissage de kystes, plaident en faveur d’une pathologie protidique, sanglant) concerné peut être observée sur les
dystrophique bénigne (galactophorite ectasiante ou mastopathie séquences non injectées en pondération T1 et T2, et c’est par-
fibrokystique) (Fig. 11) [12] . fois le seul signe (Fig. 12). Après injection de sels de gadolinium,
Cet examen d’imagerie dont la pratique est délicate nécessite les prises de contrastes décrites sont majoritairement des rehaus-
un apprentissage, il est donc de moins en moins réalisé. Sa sensi- sements sans masse (RSM) et plus rarement des masses même
bilité et spécificité restent faibles, évaluées respectivement à 33 et en cas de papillome (Fig. 13) [14] . Aucune caractéristique spéci-
47 % pour Jain et al. [11] . Son intérêt est d’ordre topographique, il fique aussi bien morphologique que dynamique n’a été décrite
aide également à minimiser le volume de tissu mammaire excisé concernant ces rehaussements [10] . Les caractéristiques du RSM
par le chirurgien. Actuellement, la galactographie apparaît de plus ayant la valeur prédictive positive la plus élevée sont sa distri-
en plus remplacée par l’IRM mammaire mais la réalisation de cet bution spatiale segmentaire et son caractère micronodulaire ou
examen est également discutée [4] . « en anneaux » (Fig. 14) [14] . L’échographie de seconde intention,
ciblée sur la prise de contraste IRM, est particulièrement perfor-
mante [15] . Une absence d’anomalie de signal sur les séquences T1
Imagerie par résonance magnétique mammaire et T2, ou de rehaussement après injection, ne permet toutefois
D’après les recommandations européennes de l’EUSOMA, l’IRM pas d’écarter une lésion maligne [16] . Différentes approches tech-
comportant des séquences non injectées fortement pondérées niques ont été étudiées dans la littérature pour explorer en IRM un
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“ Point important
Prise en charge d’un écoulement
• Le raisonnement diagnostique repose sur le caractère
multipore ou unipore de l’écoulement.
• Mammographie et échographie sont indispensables
sauf en cas d’écoulement multipore lactescent.
Figure 13. IRM, exploration d’un écoulement unipore latéralisé à • Toute lésion focale détectée en imagerie nécessite la
droite. IRM, coupe axiale, en imagerie T1 avec saturation graisse et
réalisation de prélèvements.
après injection de sels de gadolinium. Rehaussement de type non-masse,
• La galactographie et maintenant l’IRM sont réservées
régional hétérogène, unique, traduit en échographie : microbiopsies
échoguidées : papillome (flèche). à l’exploration des écoulements sans anomalie mammo-
échographique.
• Tout écoulement unipore persistant ou sanglant justifie
une exploration chirurgicale.
écoulement mamelonnaire, telles que l’injection directe intraca-
nalaire de produit de contraste IRM dilué (galacto-IRM), pratique
non autorisée en France. Cette technique est sans supériorité
réelle par rapport à la galactographie conventionnelle, de même
que l’utilisation d’antennes sein dédiées de haute résolution [14, 17] .
D’autres auteurs ont développé des séquences spécifiques de Stratégie diagnostique et prise en charge
type galacto-IRM en très forte pondération T2 (équivalente à une d’un écoulement mamelonnaire suspect
séquence type cholangio-IRM), où les images sont fusionnées à
celles obtenues après injection de sels de gadolinium. La dernière Une exérèse chirurgicale (pyramidectomie) est recomman-
publication sur le sujet a rapporté une sensibilité et une spécificité dée devant tout écoulement pathologique persistant. Elle a
de 88 % [16, 18] . une valeur diagnostique et thérapeutique [1] . Cette chirurgie
Parmi tous les examens précités, aucun n’a de supériorité évi- consiste en l’exérèse de tout l’arbre galactophorique concerné par
dente d’après les données de la littérature [19] . Pour Lorenzon et al., l’écoulement ; le repérage s’effectue au bloc opératoire après injec-
le couple mammographie–échographie n’a pas une sensibilité tion de bleu au niveau du pore incriminé et l’exérèse porte sur le
supérieure à l’IRM seule [15] . En revanche, l’IRM a la sensibilité territoire coloré [1, 4] .
et la spécificité les plus élevées, respectivement de 94,7 % et de Au préalable, mammographie et échographie sont systémati-
78,9 %, pour détecter les lésions malignes dans l’exploration d’un quement réalisées.
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Figure 18. IRM, écoulement séreux unipore gauche. IRM, coupe sagit-
tale imagerie T1 avec saturation graisse et après injection de sels de
gadolinium. Rehaussement à type de masse dans un canal ectasique
(flèche). Échographie de seconde intention positive permettant la biopsie
diagnostic de papillome.
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Figure 20. Galactographie et cancer canalaire in situ. Images lacunaires Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts en
avec multiples zones de striction et de dilatations monoliformes étendues. relation avec cet article.
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Chopier J, Thomassin Naggara I. Conduite à tenir devant un écoulement mamelonnaire. EMC - Radiologie
et imagerie médicale - génito-urinaire - gynéco-obstétricale - mammaire 2014;9(4):1-11 [Article 34-810-C-10].
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