Judith Butler et Catherine Malabou
Sois mon corps
Les textes qui suvent ont été dabordrédigés en
im 7 Unelecturecontemporaine
nglals, Flan Boyer a traduit le texte de Judith
Butler en frangas, Catherine Malabou sest t= dela domination et dela servitude
Auiteele-méme, ches HegelPréliminaire
Létude qui va suivre, consacrée au probleme du
corps dans la Phénoménologie de Pesprit, a une structure
dlialogique et une conclusion dialectque, méme si « dia
logue» et «dialectique ne sont jamais eonsidérés ick
‘comme des notions simples.
es commentateurs ont souvent remarqué que le
sujet protagoniste de la Phénoménologie de Fesprt de
Hegel soit n’a pas de corps (et se trouve ainsi désincarné
8s le debut), soit tee de renoncer son corps au fil de
son parcours (et le delégue ainsi aux autres sujets ou
mime aux autres objets). Lettre Sois mon corps et une
manire de porter la parole, sous la forme d'un impé:
ratifde substitution, cet acte de délégation.
La premitre occurrence de cette formule se trouve
apres 20 dans un essai de Judith Butler consacré & la section
et “Domination et servitude» dela Phenménloge deesprit La formule fait aparate be «mp cme
tele howe quis edoule quia Tv alles om
‘dann aire corps File permet dese deme
Sou Ln pri ae sib
Tier fini fouls nest pas plat Hew
auice type de telton complexe et contra Peet ke
corps selon cette relation, ce qui est Te but de a preseite
fue, revent & suggerer qui ext dela
corps tre hare de uemme et qu’en conséquevs et
impr, ou cal eigence™= 0s non corpe™
pet jamais tre que paridlement sats. De fai, ex
fence engendre tne perpéucle contain: bien ul
iy ait pas de corps qui soit mien sans le compe
autre i n'y a pas de désappropriation dine prs
sible de mon corps, non plas que appropriation df
nilve possible du comps de ute.
1a présente ude et corte de la maitre suivante
ale content deux esas et deux reponse. Les devs
cssais ott ért simultanément, puis les reponse
sont venus, elle de Cathrine Malabou abo, cll
SIS apni: dom ai we
Imei hens
dd Judith Butler ensuite. Chacune a pa la suite modifié
son essai la lumigre de la discussion engagee lors de cet
change,
Pour aborder la question du corps et de son « extério-
rité» nous avons suivi deux directions: Malabou a tout
bord tenté, dans son essai de situer facture de
Hegel proposée par Bulle par rapport alates inger-
prdtalions mgjeures (celles de Kojtve et_de Derrida)
pour se demander ensuite, conformément la démarche
proposte dans la Vie psychique du pouvoir, si le dernier
Foucault, malgré ses déelarations 4anti-hégelianisme,
ne finit pas par adopter au sujet du corps une positon
de structure hégsienne. Pour Foucault, tout sujet qui
tente de opposer & une forme de pouvoir ne découvre
pas seulement qu'll ou elle est conditionné par ce
pouvoir méme, mais développe en outre, sur la base
fe ce paradoxe consttutif — exactement comme le
dit Hegel —, une pratique du fagonnement de soi. Quel
Hegel Foucault reprend-il ii cependant ? Est-ce que le
Hegel de Ps attachement 2 soi» (compris comme att
chement aux conditions de la formation de soi) prend le
pas sur un autre Hegel, qui considére au contraire le
étachement — et toutes les significations extatiques
{qui en procédent — comme fondamental?
Butler retourne & la Phénoménologie pour examiner
‘comment les notions de vie, de forme et de désiritconscrivent chez Hegel le iew du comps, Hille wvte
sur le motif récurrent de Ja «forme » dans ce desl
ment, A mesure que les “formers se rencimtient, le
corps perd progressivement son staut objet et aleve!
relation contrarige, Gant et n’étant pas hrs ee lew
La discussion qui suit porte sur la question le save
comment et oit trouver le comps chee Hegel
comprendre la telation entre ig, forme gt fan
eso, Le soi doit il demeurer attaché 9 soi ain ale
former ? Doitil au contraire se détacher de si / Cn
‘ment devons-nous comprendre cette plasticité (sla le
terme utilisé par Malabou) ? Nest-lle pas une fits
savoir absola clairement en relation avec le cop, ae
condition essentele di devenir contenue dans ct cant
Te corps, qui est la fis ii et ailleurs, partiel
deux et jamais pleinement 'un ou Pautre?
Judith Butler et Catherine Mala
Catherine Malabou
« D&TACHE-MOI »INTRODUCTION
ans la Phénoménologie de Pesprit, les deus substan-
tifs «domination» gl wsgrvitude» sont les noms
conceptuels que Flegel donne a Pc attachement» 46 a
scdeaachement», Pour prouee quelle est une conience
Sermon une chose ow un objet — a une autre conscience,
la conscience devra «se montrer comme pure négation
de sa manitre dere objective, montrer[..] quvele nest.
aytachée & aucun étee-ta déterminé, pas plus qu’ Ta sin-
{glarité tniverselle de Tétrela en général, montrce
delle n'est pas attachée & la vies, Ce que Hegel
appelle « maniere d'etre objective » ne peut ie compris,
‘que comme vie corporelle, attachement au corps. Le
taitre est Pinstance qui se montre capable de rompre
‘et attachement. II prowve quil nes « pas attaché & a
vie: Pesclave en revanche est d'abord escave de som
indéfectible Hien & la vie, Cest-a-dire 4 son comps
HiseAu débat de la deuxitme grande section de la Phéno-
‘ménologie de Vesprit,intitul6e « Conscience de soi», les
consciences ne s¢ sont pas. vértablement encore
rencontrés, Elles sont uniquement préoccupées elles
‘mémes, attachées leur propre conservation, «enfon
bes dans Pétre dela vie, dit Hegel. Le terme allemand
que Jean Hyppolite traduit par «enfoncées» est plas éé
gant, il Sagit de « geknipfi», qui signifie « nowé », Les
consciences, avant de se rencontrer, sont « nouées > la
vie et ne elevent pas la tte, La rencontre va avoir eu,
soudainement, presque brutalement, comme Judith le
souligne plus bas: « Un individa surgit face & face avec
tun autre individ,»
Pour se reconnaltre mutuellement, comme des
consciences et non comme de simples choses «enfoneées»
‘dans la ve, nouées existence, les consciences devront
ddonc se prouver Pune a autre leur éte parla lutte pour
la vie et la mort. Elles devront montrer quelle peuvent
se detacher,
La question est la suivante : malré les dites de Hegel,
Ja dialectique peut-elle réllement a a fois admetire et
produire la possiblite d'un détachement absolu de la vie
st du comps gu Bien Tattachement (ervile)apparai-i
Toujours chet egel on fin de compte comme In vérté
‘de tout détachement
fi un sens a séponse de Hegel cette question est
ang Ou ets et Hl Oo pug emir
ae side mee seen fu. Now, parce q's la
Fe SS cunt a potion ds maitre ext dee
semen tenable et e voit dépasée ou tlevée pat
tale de Vesa. :
et on pour pus de dat transformer ce «ou et
ont ene oui eu non? La réponse st di et pa-
Tape encore elle aus abtnement ou et
qTavchement et bien posable puue[le corps selon
Hea jou hor de i» Caer ai)-Ce gi
TES Beds Te depareeac, expe
seaeinuus que Totem Le datachement di corps
Tours he i Pour ct raison mime, dans la
FE RSS ror, un tl detachment ct
(spl (du fw it een structure! de
1a conscieice 8 son corps) stimpossible (en tant_aue
structure posetstate, il ne peut plus avoir Hie, il ne
donc se
peut plus se produire de nouveau). Il dew
transformer, étre travail, ouvné
‘On remargue toutefois que Hegel n’emploie jamais le
mot «corps» dans la section «Domination et servi
tude ». Beaucoup de lecteurs ont tenté de !amener &
expliquer sur ce point et je confronterai ici sur ce
jt trae grandes tentatives explication, trois maniéres
{de faire parler Hegel, trois types de ventriloque. Laventrloquie — présence d'une voix « propre» dans un
autre corps, conguéte de soi-méme dans le vol de Fiden=
tité de Vautte — etant précsement ce qui est en je dans
‘atte section,
(Ces trois lectures sont respectivement calles de Kojéve
dans son Introduction la etre de Hegel celle de Derrida
dans « De économie générale &conomie resteinte!» et
‘elle de Judith Butler dans La Vie psyhique du pouvoir’
{A rai dite, i faut ajouter une quatréme voix. Nous ver
rons en eflet comment Judith Butler en vient Finalement,
«dans sa ventiloquie de Hegel, faire ass parler Foucault!
CChacune de ces lectures, comme je viens de le dit,
nd
pat vatchement» et «détachement 8 dite surtout ce
‘u'lfit du corps Elles présupposent toutes sans Fores
mont le dire que Hegel compeend ltachement et le
sachet gram des oan atin
conduit Hegel a sexpliquer, 2 préciser ce qu'il em
=D _dédoublement Gu corps. En effet, le geste qui conSiste 3
se détacher de la vie 1a de sens que pour un autre. t
implique toujours et_nécesaeement_ que Tautte_ cov
cfance,,émoin de ce détacheren, ou spat et
prope cong, ae Sache memvement dove ot
{Thon corps pour la conscience Tetachee,§ place.
Selor{Kojévesfe double mouvement
tachment t
dle decent provoque une sion au sein de Ia
conse denote i ap
dimension proprement hurine, Moniter que Fon
nest us attaché a la vi revient donc a libérer Vhumain
de sa gangue animale, Cette libsration condi la cons:
cence a user de sa voix, a ventriloquer pour ainsi die st
chair, puter & a fois en elle et pour ele, er an mot &
spivitualiser son corps. Pour Kojeve, les consciences
‘engagées dans la Jute pout la vie et fa mort sont néces:
sairement des consciences parkintes. Une laste silen
ciewse pour la reconnaissance est inimaginable. La
ide ce it déplace,
detache la vie da domaine de Vempirique et la condeit
Tiber st la voix méme de la ve,
au coneept. La conscience se ire et se detache de a vie
‘en Tui donant la parole, en transformant a sie en vie
du langage, en détachant ainsi la vie Welle-méme, A tr
vor le langage, lave et le désir deviennent des concepts,
Cesta-dite d'abord des instances « non biologique»
1a vie et Ie désir sont ainsi doubles, animaux (attachés}
‘et humains (detach).
Pourtant. comme on va le voir. le détachement sym.
bolique authentique est avéré par le travail de Pesclave,Le travail apparat en fin de compte comme Paccomplis-
seine nt qu certs, se coupe de a vie
rnais en méme temps ls prene. Vatachement a dane
demic mole
Derrida se livre 3 une double opération de ventrilo-
‘uie dans son interprétation de « Domination ot servi-
tude», Premigrement, il lit Hegel a travers Bataille.
Deuxitmement, il utilise Bataille comme un substitut
dlans le but de faire parler Hegel come Iuisménne, La
notion hégélienne ce «maitise» est doublée par la
notion bataillenne de « souverainet ». Selon_Batalle la
par Derrida, la souyerainesé serait Vatitude du détache-
ment authemtgfg, fads que la maltise ne serit que
Tutre nom de Vattachement servile a la vie, ce que
Hegel aurait reconn sil avait parle davantage du
corps!
Pour Kojeve comme pour Derrida, bien que pour des
raisons tes différentes, ces toujours Patachement qui
‘comme régulation nécessire, exerce pour fir sa ma
trise sur le detachement, la jouisanc, la depense et la
perte. Lesclave est celui qui apparait nalement comme.
cette figure dus pouvoir qui donne 8 la Mudie ct la
puissance anonymes de la vie a forme de la subjective,
En d'autees termes, pour Hegel, le détachement absolu
nie serait sien possible, purge le detachesnest et la
Tiberté eux-mémes sont en demiére instance yarantis,
conservés par Fesclave qui tavalle 4 Ta subsistance
Cette vie, dite encore « vie biologique », est
idemtfige plus loin & la vie corporelle, et Je désir« non
biologigne 3 a dimension langagiee de Vexistence.
Te «proprement humain» apparait alors comme
autre du corps biologique. Lhumain est assimilé au
‘concept », a «sens», en un mot A Pespit Le sens est
précisément ce qui peut xe détaché de tout contexte
Les mots peuvent étre séparés des choses empiriques et
matérelles quis désignent, ils peuvent étre combinés et
recombinés, se substitue les uns aux auttes. Is devien-
rent alors de véitables comps spirituels, ils incarnent
esprit et du méme coup cessent de vivre une vie sim-
plement naturelle: «tant que le sens (ou Tessenct, le
concept, le logos, Vidée, et.) est incarmé dans une entité
fexistant ompiriquement, sens ou cete essence, ainsi
+ ofraewenar
ue cette entité — vivent. Tat qu, par exemple, le sens
{ou Pessence) “chien” est incamé dans une essence sen
sible, ce sens (ou cette essence) vts cet le chien tél e
chien vivant qui cout, boit et mange. Mais lorsque le
sens (Vessence) passe dans le mot “chien”, cestadire
devient concept abstrat qui est diferent de la ral
sensible quil évtle par son sens, le sens (Pesence)
‘meurt: le mot “chien” ne court pas, ne bait pas et ne
mange pas. [a] Cest pourquoi ts comprétension
conceptele de la ealitééquivaut& un meu » Un,
mewtesaul eat le gage dune autre yie, qui nest plus
‘ing ie de chien, a
Cet bien Fanialté de ba conscience qui se trouve
‘xposée dans la lutte pour la reconnaissance. Cet elle
qui dot ete mise mort Ces lle ql faut se deta.
cher afin que Tautre vie soit possible. Le geifice de
animal coyncide avse-Lassomption du seehiel et
Torsque le symbolique est spars du biologique, la spo
tation elle-méme entee dans Texstence comme pouvoir
du langage.
Kojtve pousse Hegel & parler de Pshumains, de
Teanimal » du «sens», du «langage». Ces termes sont
effet totalementabsents de la tne dalectique de Ia
domination et dela servitude. lft pour permettre atcorps de se montrer un moment, 'apparaltre comme
chair animale, empirigue, biologique, avant de redispa-
raltreausitt et de prendre la forme de ce corps spirituel
snomimé « Livre». Kojbve interpre en effet — ventrilo-
aguie Lk encore — le savoir absolu comme Veruvre du
“Sage qui dri le « Live» de Fespet®. Sous effet de
Véeriture, le corps devient corpus. Dématérialisé dans le
langage, le corps spirituel se rematércise sous la forme
de cette mémoire objective quest le lire de la Phénomné=
nologie de Pesprit, qui retrace tout le parcours
Mais cest en fin de compte et paradoxalement
Vesclave qui, attaché 8 son corps, ineipable Cabord de
détachement symboligue, finit pour Kojéve par pro-
‘duit la substance du livre et rendre possible la perma-
rence de Iexistence. Une fois la sépuration accomplie
par le maitre, Cest le serviteur qui ht prolonge, Parce
‘qui ne travalle pas et se contente de consommer et de
jouir le maitre ne dépase pas la dimension « naturelle»
dda désir, il ne se détache pas, fnalement, de la vie ni de
son comps puisgu'l est pur plaisir. «Le mattre reste
Vesclave de la nature par son dsr (Boierde).» En ser
vant le maite, Pesclave accompliten fait lui aussi une
forme de détachement, plus durable, plus tenable, que
celle du risque de la vie: «en servant le maitre, eave
s oftacnenar ®
suitlaYolomté d'un ate; s conscience est matin,
I item fonetion de Tangie (humaine) «nom en
fonction dea Heine animale)» Parson weal . Ine peut y avoir pour Hegel de
‘emort pare et simple», de « mort sans rendement” »,
‘La mort du maitre est amorte par la dialecique. I n'y a
‘done aucun détachement dans a scéne du maltre et du
serviteur « Le comigue absoly,cest Tangoigye devant la
épense & fonds perdus, devant le Strifice absolu du
sens: sans détour et sis éserve. La notion d’Aufhebung
(le concept spéculatif par excellence, nous dit Hegel,
‘celui dort la langue allemande détient le privilege intra-
uisible) est risible en ce qu’elle signifie Tafairement
un discours sesoufflant se eapproprier toute néga-
tivitg, & laborer la mise en jew en investisement, &
‘amortr x dépense absolue, a se rendre du méme coup
aveugle au sans-fond du non-sens dans lequel se puise et
‘Sépuis e fonds du sens”. »
Pour Bataille, le détachement absolu implique dés
Jors nécessairement le détachement vis-a-vis de la dia-
Iectique. Un tel détachement 'aceomplit selon tne stra
tegie de la releve qui imite PAufkebung tout en la
redoublent. Aussi la soueraieté apparaitelle comme
tun mime ov un simulacre qui excédent la aitrise, La
souversineté ne pout étre intégrée au sein du systeme
non elevable, incalculable, sans réserve, elle est Ia
«ache aveupl™ » de la mars, tache que Hegel aust
persue, mais dont il n'aurait oes approcher. Ce Poi,
«Hegel Tv sans evo, P's monte en Te déeobat™ >»
1 sagit de cene liber qui n'est attachée & rien et ne
‘veut pas meme econserver® de Fimmédiateté delves
du phi, de la consommation, de a dépense, de P&-
sme: do ape en an mot. «Bcts ane de
Le conps est souversin. Cest cela que Heget autait
feint de ne pas voir. Toujours perdu dans Pexe®s de
dsr, sans possibilité de retour 8 une gueleongue i
rite, un queleonque foyer le corps nese préte pas 318
dialectique. «Ivese, efsion értique, effasion du
sacrifice, effasion postique, cole, absirdite®» ke SO™S
n'a pas ident. I «n'est pass, pours, vers so Ps
de 209» Het jamais hors de soi — comme seul Un
comps peut étte, i
Cet étre hors de soi se disperse en une multitude de
eux possible, des eux qui chaque fois maifestent leurabsence de sens, Le langage accampagne ces jeux. My
cher Bataille aussi tout une thématique de Péeritur,
riture souveraine, qui apparait pour cette raise”
comme le double monstrueux de P'ériture du Sage que
Kojéve voit consignée dans le livre du savoir abso.
Comme ily 4 maitrse et souveraineté ily a aussi éi
tute et éetitare, «cleus eritures"», « Le Livre hein
dont Kojéve avait fait son theme parle le langage de
Pesclave, som éeriture est celle du travilleur."» Lite
éeriture ne forme pas totalité, ne devient pas un live:
Tout comme le comps dont elle est Pexpression, elle n't
subordonnde a gn nia personne,
Ta promitre Griire et «Péeriture dela maltrise»
sla volonté veut se garder dans la trace, s'y fare recon
rate, et reconsttuer sa présence. Perture servile aussi
bien qe Hata, done, maps, [1a souversine
assige [ne ate gruel gal pit ee
ame tac, Calle west une ace he sen le I re
sever ST aasecatemem dais, ds sa promi pro
messe, et Welle se constinie comme la possibilité d'un
tfacement abla, Une ace ingle est pas une
Thal pte voix} Derrida pour die ce gue Hes
atari pas ace de dieu te hos dsl cont
Lif comps conduit Velacement de la dietiqu, a son
sdevenitrace, La trace ext ben a possiité de su
bijeabole cede snrcman ate
ug cele ds corR&,
MENTS QU Masque.» (8UTGER)
La Iectre de Butler, tout en insistant sur les ames
motifs fondamentaux que Kojéve et Derrida (Pattache-
ment ot le dtachement, a ventrloquie eta substitution),
engage ces questions dans une direction totalement now
velle. Tout dabord, Butler semble & premire woe p
get Tunalyse du scriice du corps telle que la développe
Kojeve. Le corps vivant est bien ce qui doit etre nig. En
iméme temps, Butler voit chez Hegel Pimpossibilité d'une
suppression definitive, pleine et enti¢e, du corps. Est
‘ce & dire que cette suppression-conservation comes
ponde i une spritualisation du corps? Ne reventons-nous
as ich alg
tout 3 Tanalyse de Kojéve, at sens que
confer selon lui au corps fe travail de Veslave? Butler
alfirme en effet: «TFandis que le serviteur Sasservit au
Iraval et prend conscience de sa propte signature st les
‘tyets gu il tarigue, i econrait dans a forme de objet
sins! fabriqué les marques de son propre Inbeur, des
argues qui sont formatriees de Tobjet Iui-méme, Son
travail produit un ensemble visible et lsible de marques
dans lexquelles if it sur Fobjet une confirmation de sapropre activité formateico”. » En autres termes, le seni-
{eu lit dans la chose comme dans un live! Vex! de
Fesclave hors de son propre corps (puis'l dot incarner
celui du maitte) ne se trouve-til pas dislectiquement
reevé parla réappropristion d'un autre corps qui tra
‘vers de a production, du service, du travail est devena en
effet coxpus, texte?
| ce point précis toutefois, analyse prend an now
‘yea tour. « Peuton dire enfin de compte que le travail
sini reflété soit celui du serviteur™?», demande Butler.
‘esclave apprend certes& ire sa signature sur la chose
{qu'il fagonne, Mais du fait que cette signature est en rea
Tite celle du maitre, la chose et le produit fabriqué
appartiennent done au maitre, «au moins nominale-
‘ment », Au moment méme oit elle Sappréte & devenir
lecture d'un «livre, lt relation de Fesclave au sens,
soutenue parle travail formateur, e déconstruit imine
diatement, Aucun besoin ii d'une « souveraineté» pour
redoubler ou mimer, du dchors, la domination ow la
Imattrise, aucun besoin dun acte extri-dialectiqne
effacement des traces. Les marques que le seriteur
apprend a lires'effacent dles-mémes a mesure quelles
ee ae
120 shia» snare fice ar ae
‘SE donné en retour av maite, qui y appose sor nom, le
Posse ou le consomme dune manire ou ne aute
T faut ainsi comprenge le travail de Vesclavecemme un
rmarquage qui régulitrement se démarque, un ate de
signature qui sexpose Vefacement ds quilcrule;
car ic la circulation est toujours affsie dexpetation
parle malte [..] La signature es toujours dh efface,
eect, exproprige, resigifie,[..] Ce qo) emerge
alors ext moins un objet-palimpeeste — dh genre des
topographies de Kafka — qu'une marque de propriate
produit par une sri Wefficementsconsécutig
eeriture sur la chose ne constitue done pas une ins-
ctiption esentelle ou spirituel. Cette écitut en effet,
procédant d'une substitution permanente, émanant
toujours dun autre corps, une autre ma, dane
autre dictée — ceux du maitre, lequel maniple et fat
patler, en ventriloque, le corps de Pesclave ~,consste
tn une série de traces qui ne vennent jamais la pré-
fence, ne connaisent ni permanence ni substan
1a manigre dont Butler fut parle Hepd court
ireite done 3a fois les letutes de Kojve ede Der-
tid Live et trace Cobitrent mutuellementf ve et
‘conta dened de ou En retour decors, ke
const ented je. Bo retort deonetaton‘mouventent de la tace-apparsissent comme compris
ans ot par la dilectigus.,
‘Cela veut dite que la substitution des comps ne pa
vient aucun résultat stable ? Quelle ne connait aucune
résolution autre que Feflacement de sa propre origin et
Ja eepétition vaine de sa propre signature? En relite,
Butler dstingue deux apes dans « Domination et ser
vitade leagues coreespondent précsément & une x0
Tution dialetique de la situation et del substitution des
corps. Ces deux étapes correspondent & une double rela
tion la moet. Au debut dela section, dans la late pour
[a vie et la mort, «la mort survenit parla violence d'un
autre; la domination était une maniere de contraindre
Tastee 8 mourie», La mort apparait Pabord comme
‘une menace venant de Pautre (du maitre). Mais une fois
aque Vesclave se découre comme conscience qui se
forme elle-méme & mesure qu'elle forme les chose, la
‘mot apparit comme cant son destin et non, ce quelle
ait avant, comme wn danger purementextrieu. Cet
seulement la fin que Pesclave devient une conscience
finie, morelle, Hegel clare: « La formation n'a pas
seulement cette signification positive selon laquelle
‘onscience servants, comme pur re pour si, devient &
soi-méme état, mate elle a aussi une signification
nngative & Tégard de son premier moment, la peur. En
effet, dans la formation dela chose, la négativité propre
de cette conscience, son étre pour soi, ne ui devient
objet que parce quelle supprime la forme existante qui
lui ext proposée. Mais cet emert négaif et object est
précisément Fssence étrangére devant laquelle la cons-
cience a tremble; or maintenant, ele se pose elle-méme
comme négative dans Téémert de la permanence
devient ainsi pour soi-méme quelque chose qui est pour
soi.» Ilya done bien deux temps dans a scéne.
Butler affirme alors: « Le comps travailleur qui_sait
raintenant qui a fespeé objet sit aussi gu'l est lui-
méme transite. Le servic re les chores (au sens
‘itil les transforme par le travail), il est Iuieméme
une activité négatice mais ise cécouvze en outre suist
Lune négation pline t dine dans Ia mort. Cete
conffontaton avec Ia mort a la fn du chapite rapplle
Ja lute pour a vie et la mort qui Vinaugursit. [1
{Cette fois), Péchec de la domination comme strategie
réitroduit la peur de la mort, mais la site comme ce
4uielle est, non plus comme une menace exereée par wn
autre, mais comme le destin inévtable de tout etre dont
Ja conscience est déterminge a svexister que dans un
comps®. =
TR rapt cig
PetcareAM
1a subilité de cette lecture apparait dans toute $3
laletique, qui ext Ia
Fined serie Loin de sachever parla eve de a
i a travers de la substitution dt ops
biologique par le comps spiritucl (Kojéve) ou par le
Ble
soutient que la théorie foucaldienne de la formation du
sujet — de Passujetissement — doit beaucoup a Hegel,
‘et co méme si Foucault rejtte expicitement tout rap-
port a Hegel dans V@aboration de cette théorie, Rappe-
Jons que Tc assujettssement» a deur sens la formation
lu suet (le devenir suet) la eégulation de cette forma-
tion par le pouvoir, « Assujetisement » mest pas trés
Join, on le remarquers, de «servitude».
‘Comment se tsse cette leture foncaldienne de Hegel,
‘qui est tout aussi bien une lecture hegétienne de Fou
cult? A Ia fin de « Domination et servitude », nous
avons vu, Pesclave se salt fini, sujet mortel. La dualité
dela conscience de soi n'est plus alors figurée par deux
consciences distinctes,existantes et combattantes, Elle
‘st maintenant intérorisée et recone comme la struc-
lure méme de toute conscience. Or intérioriser sa
Inde, c'est ausi faire droit a son comps. Lorsque Vesclave
iériorise sa finitude du fit de la « peur (Angst) »
ceteéme qu'il a ressentie dans son combat avec le maitre,
i echabilite du meme coup son comps.
Mais cette rehabilitation et cette inériorisation ne
sont que les prelude & une nouvelle substitution corpo-
vee, quia lea dans la section suivante dele Phénomé-
logic de Vesprit, la « Conscience malheureuse », «Le
it Butler, prond I place du maitre en
‘econnaissant sa propre capacité formatrice, mais désaoe le mats et sins gat, fe evr devin
ive pou ime, ls précnet mate den
opr coms cate forme exit marge Ps
vee bara 1 cpp malar He
iS jgane rie de on dea ppc ene te
a LUL—
Conscnce par tl corp ede ones diel
cing ma ob cate alee ot dorms
Sit pert emt. Le cogs et Pas a
isan tant guinstent de tv nas i deme
Spe den conse, Devens ui ener neu
chaps conte teers son dese, come cee
te onnenee dit content ne”
Ta nabatton des eomps — lonion conse
yds comine au bur de« Donnaton eee
oS —
trv Mase daeu do corsa ne coe ps
oven ome mine de cee commence dsm
-
sie).
ans cette section, nous voyons clarement que le
corps est une forme, 8 la fois heritée et fagonnée, wn
donné de nature et le résltat d'un tavail — une forne
« formée ». activité de individu en tant qu'il fagome
son corps, lui donne une forme (le «fait», dit Hegel,
inclu la fois le taal et le langage. Pew a peu, le comps
devient Pexpression de Vindivide, qu'il a lui-méme pro-
dite, Le corps se transforme,grce au travail et au lan-
‘gage, en un signe, le signe de sa propre plasticté est
ce qui est fut. Une euvre"
1 faudrait beaucoup de temps pour rendre compte Je
tout le mouvement de cette section, comsacrée aux orgares
et leur expression, ala chai et ses signes, Ia nata-
ralite premiere et la culture seconde du corps, par oi
se fagonne et se transforme en corps propre. Je ne
contenterai ici d'insster sur la relation plastique si
attache précsément Vindivdu 8 som corps, relation
ene tee empirgue, naturel, donng, du corps et son
dare spirtuelement fagonn ou seule
Encore une fois, Pidentté ds corps et dela forme est
paraitement reconnue par Hegel
avn queston, ja i, est: questce que former le
corps? Quite quest exactement forme par ete set
vit? Comment, et pour quel elt? Quel et nature
de Fatighement plastique du suet 3 san propre corps et
coniment compre a Tinverse fe dsr de dachement?
Ces questions nous renvoien directement, et de nou-
‘eau, au rapport entre Hegel et Pouca, Pour commen
ces, je voudais teformuler ta question, Jt en ces
termes, qui sont les miens (nouvel exerci de veal
Joque!):'«Pouvons-nows supposer_qu’enparlant de
forme et de cons (du corps consdesé comme une
forme), Hegel met au jou la prefguration conceptule
du “soi tel que Foucault le dint?» Plus exactement
« Pouvons:nous supposer que ous le norm de pass
“Hegel eri Lgranpe ce que Foucaullprésentea comme
Splsation ‘ou transformation desi?» La conception fou-
cakdienne dela sylsation de soi, développee dans L'Her-
iméneutique du sujet en partici, difere-elle vraiment
dela conception hegdienne de la plasticité da corps”?
SAE nc Cie A es‘Meme si Foucault rejetteclarement la dalectique, ne
peut-on considérer que ses definitions de la transforma-
tion de soi sont ts proches de la problématique exe
Jienne de la culture et de la formation? Lire Hegel en
insistant sur les notions de fagonnement, de forme, sur
la prise ou la dissolution de forme, ex accordant a la
plasticité un privilege ontologique (la reconnaissance de
4a primauté du fasonnement sur etre), neste pas ere
prét a considérer que la culture de so, tele que la déf-
nit Foucault, est dé comprise, dans tous ses aspects
ddans et par la Phénoménologe de Vesprit, qu'elle ext le
procés méme d'une Phénoménologie de Vesprit? Pai
Toujours été frappée, en effet, en lisantL’Herméneutique
du sujet précsément, de voir 3 quel poiat Foucault était,
sans le dire, proche de Hegel dans se description du
scsouci de soi», ensemble de pratiques «par lesquelles
‘on se transforme et on se transfigure” »,
Le comps et Vame deviennent, dans les pratiques de
soi, des instruments dont on peut jouer & Venvi, Les
‘exercices consistent ales fagonner come des matéiaux
ductles. Foucault postule « qu'il faut que le sujet se
modife, se trnsforme, se déplace, devienne, dans wne
certaine mesure et jusgu’a un certain >oint autre que
luizméme pour avoir droit & Paccés 8 la vérite ». Ne
sommes-nous pas ii tes prs dela délaration de la
Phénomenologie de Fsprirselonlaguelle le sujet nest pas
‘une instance Fixe et passive», qui accuile du dehors
ses accidents, mais bien une force plastique, qui se
prend a bras le corps en quelque sorte ct se donne la
forme qui teoit? Je ne peux nrempécher dre sensible
aux tonaiés incontestablement hégliennes des analyses
de Foucault. Diailleurs, dans L'Hermeneutiqus du suet,
Foucault ne déavoue pas eet étrange filtion, qui
place, au carur de la geese de la subjective rapport
tre write formation de a forme
I me semble, Judith, que lorsque tu dscutes avec
Foucault de a rsstaner, du détacherent et du rattar
chement, tu ne précises peut-étre pas sufisamment la
difference entre les conceptions hégéienne et foucal
icone dl formation desi of du Bemnegst do
corps. Méme si Foucaul efuse dé voir'en « Domination
servitude» Varchétype de tout assuetissement, il me
semble que nous pouvons, en forgant un peu le trait,