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T r i b u n e

Dans un service où les individus sont interactifs, les relations


qui se créent entre eux augmentent naturellement
plus vite que leur nombre. Ce qui peut conduire à
des dysfonctionnements ou à l’incapacité de faire face à
un surcroît d’activité. Trois solutions sont alors possibles :
diminuer l’effectif, cloisonner les effectifs en redéfinissant
leurs attributions ou réduire la diversité des éléments
(chaque personne traitant l’ensemble du processus)…

Comment accroître
la performance
d’un service en évitant
les sureffectifs ?

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A
ttention à ne pas faire rerait tendue, il y aurait toujours de
de raccourcis impru- multiples actions à entreprendre avant
dents entre l’idée d’évi- de licencier (accompagner les volon-
ter les sureffectifs et taires à la création d’entreprise, profi-
celle de procéder à des ter des baisses d’activité pour former
licenciements en masse comme nous les salariés, formaliser les processus,
pouvons les constater ces derniers etc.). Bref vous l’aurez compris, l’ob-
temps. Pour certaines entreprises, jet de cet article n’est pas d’inciter les
ces licenciements sont vitaux. Pour entreprises à la réduction d’effectifs
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d’autres : la crise sert simplement ni même de leur permettre de justifier


d’excuse. Le licenciement écono- ceux qu’elles se préparent à réaliser.
Florent Fouque mique ne devrait jamais avoir lieu. Non, il vise à démontrer que dans cer-
Consultant Organisation Dans de nombreux cas, la défaillance tains cas, une mauvaise organisation
AXSOLU Conseil émane de mauvais (ou d’un manque peut amener un sureffectif qui lui-
ffouque@axsolu.fr de) choix stratégiques. Quand bien même entrainera une perte de perfor-
même la situation économique s’avé- mance du service.

N°35 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JUIN 2009


Le Taylorisme dans un entrepôt logistique, la prépa- côté la notion de « diversité des élé-
bien enraciné ration de la commande dans la plu- ments » et intéressons nous à celle
L’organisation scientifique du travail part des cas est réalisée par une seule des interactions. L’illustration ci-des-
(OST) de Taylor constitue le plus personne. L’employé prend son bon sus présente les deux types d’organi-
enraciné des héritages industriels que de préparation, part avec son chariot sation. Sur le premier schéma, nous
nous ayons. Aujourd’hui encore, la faire sa commande et revient chercher avons illustré un service cloisonné. Si
division du travail en tâche et le cloi- des bons de préparation quand il a fini nous reprenons l’exemple des prépa-
sonnement des fonctions s’illustrent son premier lot. Il n’y a alors pas d’in- rateurs de commandes, ceux-ci ont
parfaitement dans la plupart des teractions entre les individus, car chacun un seul interlocuteur : leur
entreprises. Il ne s’agit pas ici de dire l’employé gère le processus de prépa- manager. Ainsi pour une équipe de
que les entreprises travaillent toujours ration de commande dans son trois préparateurs, nous obtenons
avec une approche fordienne. Cepen- ensemble. trois interactions à double sens, soit
dant, nous sommes bien obligés de D’un autre côté, nous avons les ser- six interactions. Si nous ajoutons un
constater que le poids de l’histoire vices qui, du fait de la nature de leur préparateur dans l’équipe : nous obte-
transpire encore dans nos organisa- activité, vont nécessiter des échanges nons deux interactions de plus.
tions. Vient alors l’idée de rendement entre individus. Par exemple,
qui se cache derrière celle de la divi- dans un service client qui gère les
sion du travail en tâches. Plus une commandes depuis la saisie (ou
personne est spécialisée, plus son ren- leurs intégration dans le système)
dement sera important. Si l’activité jusqu’aux litiges, les individus
progresse, il ne reste plus qu’à sont « obligés » d’échanger entre
employer toujours plus de personnes eux pour traiter les problèmes
pour augmenter la capacité de pro- rencontrés (continuité dans le
duction. temps d’un litige, appel reçu d’un
Ces principes sont bien ancrés dans client affecté à un autre corres-
nos esprits. Et même si les organisa- pondancier, etc.). Donc dans ce
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tions sont beaucoup plus complexes cas, les équipiers sont en


qu’elles ne l’étaient au début du siècle constantes interactions pour se
dernier, les réflexes demeurent les tenir au courant des affaires qu’ils Dans la deuxième représentation,
mêmes. Quand l’activité bat son plein viennent de traiter sur un client qui ne relative à une organisation interactive, 79
et qu’un manager a le sentiment que leur était pas affecté afin que le col- pour le même nombre de coéquipiers
son service ne peut plus faire face, il lègue sache de quoi il retourne pour la nous obtenons beaucoup plus d’inter-
pourrait être tenté d’augmenter son suite du traitement du litige. connexions. Premièrement le nombre
effectif, ne serait-ce que temporaire- Cette distinction entre ces deux types de relation un à un double à chaque
ment, via l’intérim par exemple. Si de services peut paraître anecdotique, nouvel équipier. Ainsi un service de
dans certains cas cette solution est la mais elle est fondamentale dans la quatre personnes aura 12 relations
bonne, d’en d’autres cas : ce même détermination du nombre d’individus possibles (4x3). Soit pour N équi-
réflexe pourra entraîner des dysfonc- constituant le service ! Par la suite, piers, N x (N-1) relations. Mais il ne
tionnements importants. nous allons nous intéresser davantage s’agit que des relations un à un. Car
aux services qui nécessitent des inter- dans un service où les individus sont
Des services cloisonnés actions (du type service clients). décloisonnés, nous pouvons imaginer
ou interactifs qu’une personne puisse interagir avec
D’un point de vue L’organisation interactive, deux autres personnes (relations un à
purement organi- un système complexe deux) à la fois pour résoudre un pro-
sationnel, il y a Pour comprendre les mécanismes, blème et pourquoi pas trois personnes
deux types de ser- faisons référence à la théorie des (relations un à trois) si le client qui a
vices : ceux qui systèmes. Joël de Rosnay, dans son subi le litige a eu à faire aux trois per-
par nature cloi- irremplaçable livre « Le Macroscope » sonnes du service (Pour conserver la
sonnent les opéra- de 1975, nous explique que la com- lisibilité nécessaire à l’interprétation
teurs et ceux qui plexité d’un système dépend de la du schéma seules les relations un à
nécessitent des diversité des éléments qui le compo- deux et un à trois qui lient les coéqui-
interactions quasi sent et des interactions qui les lient piers aux managers apparaissent,
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constantes entre entre eux. celles qui lient les équipiers entre eux
eux. Par exemple Dans un premier temps, mettons de n’y figurent pas).

JUIN 2009 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE - N°35


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L’organisation face dire de traiter le même dossier de


au problème de litige. Ainsi enlever une seule per-
la rationalité limitée sonne peut grandement réduire le flux
Ainsi, le nombre d’interactions entre d’informations à traiter et apporter
les individus se démultiplie en fonc- ainsi une réponse aux problématiques
tion de l’effectif du service, ce qui organisationnelles rencontrées.
représente un risque de dysfonction- Attention car il y a un effet de seuil
nement pour son organisation. Car si sur la réduction de l’effectif. Si passer
les interactions potentielles et les flux de sept à six fait gagner beaucoup,
d’informations qu’elles induisent passer de quatre à trois induira des
sont décuplés, le temps et la rationa- gains imperceptibles. Par ailleurs, en
lité dont disposent les individus ne dessous de ce seuil, se posent d’autres
sont pas extensibles. problématiques comme la continuité
Pour le temps, il est clair qu’une jour- de la fonction, un volume d’activité
née ne fera jamais plus de 24 h (au par personne trop important, etc.
mieux pour les équipes qui travaillent Une autre solution consisterait à cloi-
en 3x8). Pour la rationalité, il nous sonner les individus. Imaginons que

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faut remonter à l’article d’Herbert dans notre service clients de huit per-
Simon « Theories of Decision- sonnes, nous faisions deux groupes
Making in economics and Behavioral avec des portefeuilles clients complè-
Science » publié dans l’American tement hermétiques entre les deux
Economic Review en 1949 où le groupes. Alors entre chaque groupe
brillant économiste nous présente le de quatre, les personnes pourraient
concept de rationalité limité par la une rationalité limitée (effet de seuil interagir et se substituer sans pro-
phrase suivante : « chaque organisme illustré par le trait en pointillé vert). blème. La taille des groupes faisant
humain vit dans un environnement Ainsi dans un tel service, à partir d’elle-même disparaître les pro-
qui produit des millions de bits de d’un certain nombre d’individus, les blèmes d’ordre organisationnels.
n o u v e l l e i n f o r m a t i o n ch a q u e dysfonctionnements vont apparaître Attention : nous parlons bien ici de
seconde, mais le goulot d’étrangle- de par la nature même du système. cloisonner les individus de manière
80 ment de l’appareil de perception Ces dysfonctionnements vont se mesurée et dans un contexte bien pré-
n’admet certainement pas plus de matérialiser par de la perte d’infor- cis : celui d’un service où les interac-
1.000 bits par seconde et probable- mations et déboucher sur des déci- tions existent par nature. Dans bon
ment moins ». Tout est dit, notre sions prises sur la base d’informa- nombre de cas (notamment pour les
cerveau n’est pas à-même de récep- tions partielles. Les symptômes de ce interactions interservices), c’est le
tionner et de gérer la quantité d’infor- type d’organisation s’illustrent sou- manque d’interactions qui fait défaut
mations que notre environnement vent par une multiplication des et entraîne des dysfonctionnements
nous envoie. réunions de recadrage et par un sen- organisationnels.
timent croissant de ne pouvoir faire La dernière solution consisterait à
face au volume d’activité. décloisonner, non pas les individus,
mais les tâches. Comme nous le
Trois solutions possibles disions un peu plus haut : la com-
La solution ne saura s’inscrire dans plexité d’un système se juge par le
une augmentation progressive de l’ef- nombre d’interactions entre les élé-
fectif. Dans certains cas, si nous ments constituant le système (nous
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constatons un sureffectif, il convien- avons déjà traité ce point) mais égale-


dra de redéployer les ressources excé- ment par la diversité des éléments du
Donc dans un service dont l’organi- dentaires sur des fonctions con- système. Ainsi dans notre service
sation est décloisonnée, le nombre traintes de l’entreprise. Si nous reve- client, si sur les huit personnes, nous
d’interactions, et par là même le flux nons à notre exemple initial : chaque en avons une qui ne fait que de la sai-
d’informations à échanger, évoluent groupe d’individus (travaillant sur le sie de commande, une qui ne fait que
plus fortement que le nombre de per- même portefeuille d’activité) d’un du traitement de courrier et enfin six
sonnes (flèche bleue qui se poursuit service client ne devrait pas compter qui ne traitent que les appels télépho-
en rouge) alors que les individus en plus de six ou sept personnes suscep- niques des clients, alors nous avons
charge de traiter l’information ont tibles d’être en interactions, c'est-à- trois éléments différents dans le sys-

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tème. Et même si les individus échan- ◆ Ou en réduisant la diversité des élé- échangerait moins avec ses coéqui-
gent entre eux et connaissent le travail ments (chaque personne traite l’en- piers pourrait augmenter le nombre
des autres, ils ne peuvent toucher du semble du processus). d’interactions futures par l’amplifi-
doigt les répercutions (et les interac- Il convient également de considérer cation du problème initial. Bref dans
tions) de leur travail sur celui des une variable importante dans le l’optimisation des processus organi-
autres. Donc décloisonner les tâches management : les Hommes ! Car si le sationnels, le facteur humain est tout
consiste avant tout à rendre les indivi- nombre d’interactions évolue en aussi important que l’organisation
dus maîtres et responsables de l’en- fonction du cloisonnement des pro- des individus elle-même. ◆
semble du processus. Une personne cessus, il dépend avant tout de la
qui sera à même de gérer le processus façon dont les individus du service Biblio
de A à Z aura besoin de moins d’in- échangent entre eux. Ainsi les com- « The Principles of Scientific
teractions avec ses collègues pour portements de chacun pourront éga- Management », publié en
traiter le litige et ce, même si elle n’en lement être à l’origine de la démulti- 1911, Frederick Winslow Taylor.
est pas à l’origine. plication ou de la réduction des inter- « Theories of Decision-Making
actions. Par exemple, un nouvel arri- in economics and Behavioral
Sans oublier vant dans l’équipe sera une source Science », publié dans
le facteur humain d’augmentation du nombre d’inter- l’American Economic Review
Autrement dit, aider un service à actions du fait de son besoin de for- en 1949, Herbert Simon.
gérer un surplus d’activité passe mation. Nous pouvons également « The Effective Executive »,
par la réduction du nombre d’inter- rencontrer des personnes qui « par- publié en 1967,
actions en : lent beaucoup pour ne rien dire » et Peter F. Drucker.
◆ Diminuant l’effectif, qui prendront ainsi plus de temps à « Le macroscope »,
◆ Cloisonnant les effectifs par une traiter une information. A l’inverse : publié en 1975, Joël de Rosnay.
redéfinition du portefeuille d’activité, quelqu’un qui, du fait de sa timidité,

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