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DANS QUELLES MESURES LA ROTATION
EXTERNE DES CABINETS D'AUDIT ET LA
LIMITATION DES SERVICES AUTRES QUE
D'AUDIT AMELIORERAIENT-ELLES
L'INDEPENDANCE DE L'AUDITEUR ET LA
QUALITE DE L'AUDIT?
Je tiens à remercier tout particulièrement les personnes qui ont contribué, de près ou de loin, à
la réalisation de ce travail de fin d’études.
Je remercie également M. Alexis Palm et M. Michaël Focant, tous deux membres du jury en
qualité de lecteurs, pour leurs conseils et pour le temps qu’ils ont consacré à la lecture de ce
mémoire.
Je suis également reconnaissante envers mes proches qui m’ont soutenue et encouragée tout
au long de ces six années d’études, qui s’achèvent par la rédaction de ce mémoire. Ma
reconnaissance la plus vive revient à ma cousine et à mon papa, pour leurs relectures
pointilleuses.
TABLE DES MATIERES
8. DISCUSSION................................................................................................................................ 71
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................... 79
Contexte
Depuis plusieurs années, nous faisons face à de nombreux changements sur les plans
économique et financier. En effet, l’économie mondiale a été marquée par différentes crises et
par des bouleversements, semant le doute sur plusieurs marchés qui tentent encore
aujourd’hui de surmonter leurs difficultés.
L’« affaire Enron » est un de ces scandales. En 2001, cette prestigieuse entreprise américaine
s’est effondrée, ce qui a suscité par la suite énormément d’intérêt et de questions quant aux
causes principales de cette faillite. Le grand cabinet financier « Arthur Andersen », qui
auditait l’entité, a directement été pointé du doigt (Beaulieu & Pasquero, 2004). C’est ainsi
que le marché de l’audit légal est entré dans la ligne de mire des régulateurs et que la
confiance accordée par les investisseurs aux contrôleurs légaux des comptes a été ébranlée.
Par conséquent, de nos jours, ces derniers exigent que les directeurs d’entreprises s’assurent
que leur entité soit bien sous contrôle (Bertin & Godowski, 2010).
Dès lors, en novembre 2010, la Commission européenne1 a publié un Livre Vert « Politique
en matière d’audit : les leçons de la crise ». Dans ce dernier, elle fait part des difficultés
constatées sur le marché de l’audit externe et intègre le rôle de l’auditeur ainsi que
l’indépendance des cabinets de révision dans les débats. À leurs côtés, la concentration du
marché de l’audit, l’harmonisation des pratiques au sein de l’Union européenne2 et le système
de surveillance apparaissent également comme des matières destinées à d’importants
changements.
1
Ci-après « CE ».
2
Ci-après « UE ».
1
Après avoir consulté les différents avis recueillis au sujet des solutions suggérées dans ce
Livre Vert afin de résoudre les problèmes rencontrés, la CE a émis, en novembre 2011, une
proposition de directive3 ainsi qu’une proposition de règlement4. Après un accord entre les
États membres de l’UE et du Parlement européen survenu le 27 mai 2014, la directive et le
nouveau règlement sur l’audit légal ont été publiés au Journal officiel de l’Union européenne.
Ledit règlement sera applicable à partir du 17 juin 2016. Ces nouvelles règles permettront de
renforcer la qualité de l’audit légal, d’assurer l’indépendance des contrôleurs légaux des
comptes ainsi que d’améliorer la surveillance (Commission européenne [CE], s.d.).
Étant donné l’importance des changements évoqués dans ces deux textes législatifs, il nous
sera impossible d’en traiter l’entièreté. Par conséquent, nous avons décidé d’analyser deux
solutions destinées à améliorer l’indépendance du réviseur d’entreprises et la qualité des
audits des comptes d’entités d’intérêt public5. Nous étudierons plus précisément la rotation
obligatoire des cabinets de révision et la limitation des services autres que le contrôle légal
des comptes6.
But de la recherche
Depuis leur apparition dans la loi Sarbanes-Oxley7 et dans le Livre Vert, la rotation externe
obligatoire et la limitation des services non-audit ont provoqué énormément de controverses
auprès des différentes parties. Alors que certains se réjouissent de leur arrivée, d’autres
craignent qu’elles ne représentent un danger pour la profession.
3
Commission européenne [CE]. (2011b). Proposition de directive du parlement européen et du
conseil modifiant la directive 2006/43/ce concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des
comptes consolidés.
Récupéré du site : http://ec.europa.eu/internal_market/auditing/docs/reform/directive_fr.pdf
4
Commission européenne [CE]. (2011c). Proposition de Règlement du Parlement Européen et du
Conseil relatif aux exigences spécifiques applicables au contrôle légal des comptes des entités
d’intérêt public.
Récupéré du site : http://ec.europa.eu/internal_market/auditing/docs/reform/regulation_fr.pdf
5
Ci-après « EIP ».
6
Ci-après « services autres que d’audit ou services non-audit ».
7
Ci-après « Loi SOX » : « La loi Sarbanes-Oxley est entrée en vigueur dans la législation américaine
le 30 juillet 2002, à la suite des scandales financiers d’Enron et de WorldCom, pour protéger les
actionnaires et le grand public des erreurs de comptabilité et des pratiques frauduleuses, en améliorant
la précision et la fiabilité de la comptabilité des entreprises » (Palmes, 2006).
2
Étant donné l’importance des arguments concernant l’instauration de ces deux mesures, il
nous semble intéressant d’analyser les divers points de vue afin de déterminer les menaces et
opportunités découlant de leur mise en place.
Au terme de notre travail de fin d’études, nous aimerions être en mesure de déterminer
l’efficience réelle de la rotation externe obligatoire et de la limitation des services non-audit
dans l’UE. Cependant, ces règles n’étant pas encore d’application dans l’UE, il nous semble
nécessaire de préciser que nous ne pourrons pas émettre de conclusion définitive. Nous
tenterons toutefois d’émettre des suppositions concernant les effets liés à leur instauration.
Objet de la recherche
Le présent mémoire s’intitulant « Dans quelles mesures la rotation externe des cabinets
d’audit et la limitation des services autres que d’audit amélioreraient-elles l’indépendance de
l’auditeur et la qualité de l’audit ? », traitera des conséquences de la mise en place de ces deux
mesures dans l’UE.
Approche
3
La première partie sera consacrée à une revue théorique d’une part, qui traitera de l’auditeur,
de la mission légale et des concepts importants pour la compréhension du présent mémoire.
D’autre part, nous étudierons l’évolution des législations en matière de rotation externe et de
limitation de services non-audit dans l’UE et en Belgique. Nous nous pencherons finalement
sur les différents points de vue recueillis dans la littérature concernant ces deux mesures.
4
ANALYSE THEORIQUE
5
6
1. L’AUDITEUR ET L’AUDIT FINANCIER
1.1. Définition
La norme ISA8 200 (International Federation of Accountants [IFAC], 2012a, p.5), traitant des
obligations générales de l’auditeur indépendant lors de la conduite d’un audit d’états
financiers selon les Normes ISA, procure une définition claire du rôle de l’auditeur :
« Le terme “auditeur” est utilisé pour désigner la personne ou les personnes qui réalisent
l’audit, généralement l’associé responsable de la mission et les autres membres de l’équipe
affectée à la mission ou, le cas échéant, le cabinet. Lorsqu’une Norme ISA entend
expressément qu’une diligence requise soit effectuée ou qu’une obligation soit remplie
directement par l’associé responsable de la mission, le terme d’“associé responsable de la
mission” plutôt que celui d’“auditeur” est utilisé. Dans le secteur public, les termes “associé
responsable de la mission” et “cabinet” doivent s’interpréter comme désignant, le cas échéant,
leurs équivalents. »
L’ouvrage Le traité d’audit (Dries, Le Fevere De Ten Hove, Van Brussel & Willekens, 2005),
nous informe que, en pratiquant l’audit financier, l’auditeur doit, d’une part exprimer une
opinion sur des comptes annuels, et d’autre part, à l’échelle de la Belgique, vérifier le respect
du Code des Sociétés et des statuts de la société contrôlée.
En effet, en vertu de la norme ISA 200 (IFAC, 2012a), les objectifs de l’auditeur lors de la
conduite d’un audit d’états financiers sont les suivants :
• Afin d’être capable de formuler une opinion exprimant si les états financiers sont
réalisés conformément ou non à un référentiel comptable applicable, l’auditeur doit
obtenir l’assurance raisonnable que ces états financiers pris dans leur ensemble ne
comportent pas d’anomalies significatives provenant de fraudes ou d’erreurs. Ce
8
« International Standard on Auditing ».
7
niveau d’assurance raisonnable est atteint si le contrôleur légal des comptes a recueilli
suffisamment d’éléments probants dans le but de réduire le risque d’audit. Ce dernier
peut être défini comme étant le risque que l’auditeur exprime une opinion inappropriée
alors que les comptes annuels ou consolidés comportent des anomalies significatives
(Hayes, Dassen, Schilder & Wallage, 2005 ; Fank, 2014) ;
• Il est également tenu de produire un rapport sur les états financiers et de procéder aux
communications requises par les Normes ISA sur la base des conclusions de ses
travaux.
Dans tous les cas où l’auditeur ne serait pas en mesure d’obtenir une assurance raisonnable ou
d’exprimer une opinion avec réserve afin de communiquer aux utilisateurs des états financiers
les résultats de l’audit, les Normes ISA stipulent que l’auditeur doit formuler une
impossibilité d’exprimer une opinion ou de démissionner, lorsque ceci est possible aux termes
de la loi ou de la règlementation applicable.
L’objectif de la mission légale, visant à renforcer le degré de confiance des utilisateurs des
états financiers, est donc d’assurer la fiabilité que ces comptes annuels ou consolidés rendent
une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et des résultats de l’entité (Institut
des Réviseurs d’Entreprises [IRE], s.d.).
• « Etre ressortissant d’un État membre de l’UE (ou d’un Etat de l’Espace Economique
Européen) ou être domicilié en Belgique ;
• Etre âgé de 25 ans au moins ;
• Etre âgé de 65 ans au plus ;
8
• Ne pas avoir été condamné pour certaines infractions spécifiques (mentionnées au
point 3 de l’article 5) ;
• Etre titulaire d’un diplôme de master délivré par une université ou une institution de
l’enseignement supérieur belge de type long, d’un diplôme équivalent à l’étranger ou
encore répondre aux conditions de diplôme et/ou d’expérience fixées par le Roi ;
• Avoir réussi un examen d’admission au stage (les détenteurs d’un diplôme
universitaire/enseignement supérieur de type long peuvent obtenir des dispenses pour
certaines épreuves) ;
• Avoir accompli un stage de trois ans minimum ;
• Avoir réussi l’examen d’aptitude en fin de stage (constitué de deux épreuves, l’une
écrite, l’autre orale) ;
• Prêter le serment devant la Cour d’Appel de Bruxelles (le cas échéant de Liège) ;
• Etre lié à un cabinet de révision ou disposer d’une organisation qui permet de
respecter la loi du 22 juillet 1953 et ses arrêtés d’exécution. »
Au niveau européen, l’accès à la profession de contrôleur légal des comptes est régi par la
directive 2014/56/UE du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/43/UE
concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés. Les articles 6
à 14 de cette directive concernent les aspects relatifs à l’accès à la profession.
Comme stipulé dans les articles 15 à 17 de la directive du 16 avril 2014 (directive n° 2014/56
du Parlement européen et du Conseil), les États membres l’UE doivent veiller à ce que tous
les réviseurs d’entreprises soient enregistrés dans le registre public. Ce dernier est uniquement
disponible de façon électronique et devra être actualisé sans délai indu.
D’après l’IRE (s.d.), un commissaire aux comptes est nommé par toutes les grandes sociétés,
les très grandes associations sans but lucratif9 et également les fondations privées afin de
rendre un rapport à l’assemblée générale chargée d’approuver leurs comptes annuels.
9
Ci après « ASBL ».
9
En vertu de l’article 15 du Code des sociétés (2009), une société est considérée comme grande
si, à la date de bilan du dernier exercice clôturé, et ce pendant deux années consécutives, elle
dépasse au moins deux de ces limites : la moyenne annuelle de travailleurs occupés est de 50 ;
le chiffre d’affaires annuel est de 9.000.000 euros HTVA10 ; le bilan total est de 4.500.000
euros.
Selon les articles 17 et 37 de l’arrêté royal 25 aout 2012 modifiant certains articles de la loi du
27 juin 1921, les ASBL et fondations sont tenues de nommer un commissaire dès que celles-
ci comptent une moyenne annuelle de travailleurs occupés supérieure à 100, ou lorsqu’elles
dépassent deux des seuils suivants ou plus : la moyenne des travailleurs occupés, en
équivalents temps plein, est de 50 ; les recettes annuelles HTVA sont de 7.300.000 euros, et
ce lorsqu’elles sont autres qu’exceptionnelles ; le bilan total est de 3.650.000 euros.
Par ailleurs, en vertu de l’article 135 du Code des sociétés (2009), les entités ci-dessus
nomment un commissaire pour une durée de trois ans renouvelable.
En outre, d’après cette même loi, le commissaire aux comptes est chargé chaque année de
confirmer son indépendance et de communiquer les services additionnels fournis à l’EIP au
CA.
10
Hors Taxe sur la Valeur Ajoutée.
11
Directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006, concernant les
contrôles légaux des comptes annuels et consolidés, modifiée par la directive 2014/56/UE du
Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, Journal officiel de l'Union européenne.
12
Ci après « CA ».
10
1.5. Obligations
1.5.2. Déontologie
Comme nous l’indique l’IRE (s.d.) ainsi que son Vademecum (2009), le cadre déontologique
des réviseurs d’entreprises se base fondamentalement sur l’arrêté royal du 10 janvier 1994 se
rapportant aux obligations des réviseurs ainsi que sur d’autres dispositions déontologiques
telles que la loi du 22 juillet 1953, le Code des sociétés et diverses normes et
recommandations de l’Institut.
L’avant-projet de ce Code de déontologie stipule que ces dispositions sont appliquées aux
missions révisorales se tenant à partir de l’entrée en vigueur dudit Code, et concerneront les
missions en cours le 1er juillet 2014 au plus tard (IRE, 2012).
13
Ci après « IAASB ».
11
Selon cet avant-projet, le principe fondamental de déontologie précise que le réviseur
d’entreprises pratique sa mission dans le respect des principes fondamentaux d’intégrité,
d’objectivité, de compétence professionnelle, de confidentialité et de comportement
professionnel.
a) Intégrité
La notion d’intégrité fait référence au fait que le réviseur d’entreprises doit exercer sa
profession avec sincérité et honnêteté. Cela entend également que le contrôleur légal des
comptes « évite tout acte ou toute attitude qui serait contraire à la dignité, à la probité, à la
prudence ou à la délicatesse et ne peut pas sciemment être associé à des rapports, des
déclarations ou autres informations, lorsqu’il sait ou devrait savoir qu’ils comprennent une
prise de position substantiellement fausse ou trompeuse ou comprennent des prises de
position ou des informations inconsidérées. » (IRE, 2012, p.4).
b) Objectivité
14
Ci après « IESBA ».
12
et du temps nécessaire afin d’effectuer sa mission consciencieusement et avec le soin requis
(IRE, 2012).
d) Confidentialité
Le contrôleur légal des comptes a dans l’obligation de respecter le caractère confidentiel des
informations qu’il recueille dans le cadre de ses missions et par conséquent, il ne peut ni
divulguer quelconque renseignement à des tiers sans autorisation spécifique adéquate, à moins
d’avoir un droit ou une obligation légale ou professionnelle de le faire, ni utiliser ces
informations à des fins personnelles ou à celles d’un tiers (IESBA, 2009).
e) Comportement professionnel
Le 30 aout 2007, le Conseil de l’Institut des Réviseurs d’Entreprises a adopté une norme
relative à la formation permanente du réviseur d’entreprises entrant en vigueur le 1er janvier
2008.
Le § 1er de l’article 1 de cette norme énonce que « chaque reviseur d’entreprises doit
consacrer en moyenne au moins quarante heures effectives par an aux activités contribuant à
son développement professionnel continu par l’amélioration de ses connaissances
professionnelles. Cette moyenne doit être atteinte sur la base d’une période de trois années
civiles, avec un minimum absolu de vingt heures par année civile. » (IRE, 2007, p.2).
13
D’après l’article 4 de cette présente norme, le réviseur d’entreprises doit veiller à approfondir
sa formation permanente dans les domaines concernant directement les missions qu’il exerce,
à savoir le contrôle, la déontologie et la comptabilité. Une connaissance approfondie des
domaines suivants lui est également requise : le droit, la fiscalité, l’informatique, le
management, la communication, l’économie d’entreprise, ainsi que les relations sociales.
En outre, chaque réviseur d’entreprises est libre d’organiser son programme annuel de
formation permanente et doit être capable de prouver, lors d’un contrôle de qualité ou d’un
contrôle occasionnel, le respect des critères précisés au paragraphe premier.
Le contrôle de qualité est une procédure d’examen de l’activité professionnelle d’un réviseur
d’entreprises. Il a pour but notamment de vérifier que le contrôleur légal des comptes est doté
d’une organisation adéquate par rapport à la nature et à l’étendue de sa profession. Par
ailleurs, il garantit également au public et aux autorités de contrôle que les réviseurs
d’entreprises entreprennent leurs activités conformément à la loi, aux normes de révision et
aux règles déontologiques en vigueur (IRE, s.d.).
Au niveau belge, un projet de normes relatif au contrôle de qualité, adopté par l’IRE, a été
approuvé par le Conseil supérieur des Professions économiques15 et par le ministre ayant
l’Économie dans ses attributions le 11 avril 2008 et est entré en vigueur le 15 septembre 2008.
15
Ci après « CSPE ».
14
Comme stipulé dans l’article 8 de l’arrêté royal du 26 avril 200716, et conformément aux
articles 33 et 34 de la loi du 22 juillet 1953, il a été créé au sein de l’IRE, une commission
chargée de l’organisation du contrôle qualité, à savoir la « Commission contrôle de qualité ».
Comme le précisent les normes relatives au contrôle de qualité (IRE, 2008), les contrôleurs
légaux des comptes doivent soumettre leur activité professionnelle à un contrôle de qualité au
minimum tous les six ans. Toutefois, les réviseurs d’entreprises ayant parmi leurs clients des
EIP seront contrôlés au moins tous les trois ans. En vertu de l’article 2, §13 de la directive du
16 avril 2014 (directive n° 2014/56 du Parlement européen et du Conseil), les EIP sont
définies comme suit :
a. « les entités régies par le droit d’un État membre dont les valeurs mobilières sont
admises à la négociation sur un marché règlementé d’un État membre au sens de
l’article 4, paragraphe 1, point 14), de la directive 2004/39/CE ;
b. les établissements de crédit définis à l’article 3, paragraphe 1, point 1), de la directive
2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, autres que ceux visés à l’article 2
de ladite directive ;
c. les entreprises d’assurance au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la directive
91/674/CEE ; ou
d. les entités désignées par les États membres comme entités d’intérêt public, par
exemple les entreprises qui ont une importance publique significative en raison de la
nature de leurs activités, de leur taille ou du nombre de leurs employés ».
16
Arrêté royal du 26 avril 2007, organisant la surveillance et le contrôle de qualité et portant
règlement de discipline des réviseurs d'entreprises, M.B., 27 avril 2007.
15
Par ailleurs, l’activité professionnelle du réviseur d’entreprises est également soumise à
l’International Standards on Quality Control 117, norme mise au point et adoptée le 15
décembre 2009 par l’IAASB. C’est le 28 février 2014 que le Conseil de l’IRE a adopté ladite
norme, approuvée également par le CSPE le 11 mars 2014 et par le ministre de l’Économie le
29 juillet 2014, et ce, par le biais de la norme relative à l’application de la norme ISQC 1 en
Belgique.
Cette norme internationale ISQC traite des responsabilités d’un cabinet quant à son système
de contrôle qualité des missions d’audit et d’examen limité d’informations financières
historiques, ainsi que sur les autres missions d’assurance et de services connexes (IFAC,
2009).
Comme nous l’indique l’ISA 200 (IFAC, 2012a), lors de la conduite d’audit d’états
financiers, le contrôleur légal des comptes doit également faire preuve d’esprit critique et de
jugement professionnel.
Par esprit critique, cette présente norme impose au réviseur d’entreprises d’être attentif « aux
éléments probants qui contredisent d’autres éléments probants recueillis, aux informations qui
remettent en cause la fiabilité de documents et de réponses apportées aux demandes de
renseignements à utiliser en tant qu’éléments probants, aux situations qui peuvent révéler une
fraude possible ainsi qu’aux circonstances qui suggèrent le besoin de mettre en œuvre des
17
International Federation of Accountants [IFAC]. (2009). Norme internationale de contrôle qualité 1
: ISQC 1. Ci-après « ISQC ».
16
procédures d’audit en supplément de celles requises par les Normes ISA » (IFAC, 2012a,
p.15).
Le §4 de cet article nous informe que cet organe de supervision assume la responsabilité
finale de supervision. Il s’assure notamment de l’adhésion et de l’enregistrement des
contrôleurs légaux des comptes et des cabinets d’audit. Il veille au respect des normes
concernant la déontologie et le contrôle interne de qualité des cabinets de révision, ainsi que
des normes d’audit. Il supervise enfin la formation continue, l’assurance qualité, et les
systèmes disciplinaire et d’enquête.
17
18
2. CONCEPTS IMPORTANTS
2.1. Indépendance
En vertu de la norme ISA 200 (IFAC, 2012a), lors d’une mission d’audit, il est dans l’intérêt
général et exigé par le Code éthique de l’IESBA que les membres des équipes chargées
d’audit et les cabinets de révision soient indépendants de l’entité contrôlée.
Selon Ben Saad et Lesage (2009), « l’indépendance de l’auditeur est sa capacité à résister aux
pressions de l’entreprise pour révéler une erreur éventuelle ».
En 2009, Ben Saad et Lesage ont constaté avec surprise que l’indépendance perçue prime sur
l’indépendance réelle. En réalité, c’est la perception des utilisateurs qui permet d’accorder
plus ou moins de confiance en la qualité de l’audit. De fait, comme le souligne Richard (2003,
p. 121), l’auditeur doit « rendre son indépendance apparente pour susciter la confiance du
marché ».
Par ailleurs, selon l’article pionnier de De Angelo (1981), l’indépendance de l’auditeur est
fortement liée à la notion de qualité de l’audit. En effet, il va de soi que la qualité d’un rapport
d’audit sera remise en question si le réviseur d’entreprises n’est pas entièrement objectif lors
de la rédaction de ce dernier.
En 1981, De Angelo (cité par Charpateau, 2011) déclare que la compétence et l’indépendance
sont deux composantes importantes de la qualité de l’audit. De fait, celle-ci est définie comme
la probabilité simultanée qu’un contrôleur légal des comptes découvre une irrégularité
significative dans le système de comptabilité du client et qu’il mentionne effectivement cette
anomalie (Manita, 2008). D’une part, toujours en se référant à De Angelo (1981), la
probabilité qu’un réviseur d’entreprises découvre une irrégularité résulte de ses capacités
technologiques, des différentes procédures de contrôle qu’il a utilisées ainsi que de l’ampleur
de son échantillonnage. D’autre part, la probabilité conjointe de signaler cette infraction
repose sur l’indépendance du commissaire par rapport à son client.
20
leur importance est capitale. Tout au long de ce mémoire, nous allons nous intéresser à deux
concepts susceptibles de les renforcer, à savoir la rotation externe des cabinets de révision et
la limitation des services non-audit. Dès lors, ci-dessous, nous allons définir ces deux
méthodes en nous référant à la législation, ainsi qu’à leur évolution respective.
Le mandat de réviseurs d’entreprises auprès d’une EIP est conclu pour une durée minimale
d’un an. Cependant, les États membres de l’UE peuvent exiger que la mission initiale dure
plus d’un an. La durée maximale, quant à elle, s’élève à dix ans. Une fois de plus, différentes
options se présentent aux États membres :
18
Le nombre d’années « X » dépend des différentes législations applicables dans chaque pays.
21
• Prolonger de 2 ans la durée des mandats dans des cas exceptionnels et sur demande
émanant de l’entité contrôlée.
Après l’expiration des durées maximales visées ci-dessus, le contrôleur légal des comptes ou
le cabinet d’audit n’est pas autorisé à effectuer une mission d’audit dans la même EIP au
cours des quatre années suivantes.
Notons que ce présent règlement s’applique aux réviseurs d’entreprises et aux cabinets de
révision qui contrôlent les états financiers d’EIP et aux EIP elles-mêmes.
Selon certaines sources, lorsque les réviseurs d’entreprises ou les cabinets d’audit effectuent
le contrôle légal des comptes d’une société et fournissent en même temps à cette entité des
services autres que d’audit, leur indépendance peut être compromise. Par conséquent, depuis
2003, la Belgique dispose d’une liste limitative énumérant les sept prestations remettant en
cause l’indépendance du commissaire aux comptes (arrêté royal du 30 janvier 2001, article
183ter). Cette liste ne se limite pas aux EIP mais vaut pour toutes les entités contrôlées. Vous
retrouverez cet article à l’annexe II.
La règle « one-to-one », s’appliquant aux sociétés cotées ou aux sociétés qui font partie d’un
groupe tenu d’établir des comptes consolidés, a également été renforcée. Cette règle consiste
22
à interdire la fourniture des services autres que ceux confiés par la loi aux réviseurs
d’entreprises dans la mesure où le montant total des honoraires relatifs à ces services non-
audit dépasse le montant total des rémunérations se rapportant à la mission d’audit légal
(Code des sociétés, 2009, article 133, §5). Le règlement européen n° 537/2014 (2014) franchit
une étape supplémentaire pour les EIP.
En effet, d’après l’article 4 de ce présent règlement, « lorsque le contrôleur légal des comptes
ou le cabinet d’audit fournit à l’entité contrôlée, à son entreprise mère ou aux entreprises
qu’elle contrôle, pour une période de trois exercices consécutifs ou plus, des services autres
que d’audit, autres que ceux visés à l’article 5, paragraphe 1, du présent règlement, le total des
honoraires pour ces services se limite à 70 % maximum de la moyenne des honoraires versés
au cours des trois derniers exercices consécutifs pour le contrôle légal des comptes de l’entité
contrôlée et, le cas échéant, de son entreprise mère, des entreprises qu’elle contrôle, et des
états financiers consolidés de ce groupe d’entreprises ». Aux fins des limites précisées au
premier alinéa, les services autres que d’audit, autres que ceux visés à l’article 5, paragraphe
1, requis par la législation de l’Union ou la législation nationale sont exclus.
De plus, par le biais du § 3 de l’article 4, ce règlement vise à éviter que le contrôleur légal des
comptes ou le cabinet d’audit ne devienne trop dépendant d’une EIP qu’il contrôle. De fait, il
stipule que si les honoraires totaux que le commissaire aux comptes ou le cabinet de révision
perçoit d’une EIP contrôlée au cours de chacun des trois exercices consécutifs s’élèvent à plus
de 15 % du total de ses honoraires, il se doit d’en informer le CA de l’EIP concernée. Ce
second plafond peut également faire l’objet d’un renforcement de la part des états membres de
l’UE.
23
24
3. L’AUDIT, UNE PROFESSION PROMISE A D’IMPORTANTS
CHANGEMENTS
Ces scandales financiers ont créé une crise de confiance sur le marché américain et ont généré
un appel mondial afin de refaire le point sur l’efficacité de la profession d’audit dans le but de
protéger l’intérêt public (Bandyopadhyay, Chen & Yu, 2013). Afin d’atteindre cet objectif, les
États-Unis ont adopté la loi SOX en 2002 (United States [U.S.] Congress). Dans sa
section 207, cette loi requiert que le GAO20 réalise une étude concernant les effets potentiels
de la rotation obligatoire des cabinets de révision. Cette dernière a permis de conclure que
l’introduction obligatoire de la rotation externe des entreprises responsables du contrôle légal
des comptes annuels n’est pas la mesure la plus efficace pour accroitre l’indépendance de
l’auditeur et donc améliorer la qualité de l’audit (GAO, 2003). Dès lors, elle n’a pas été
retenue dans la version finale de la loi SOX de 2002. Toutefois, le GAO a laissé entendre que,
si les autres conditions de la loi SOX ne menaient pas à l’amélioration de la qualité de l’audit,
la rotation obligatoire des entreprises d’audit serait une question à revisiter.
Dans la section 203 de la loi SOX (U.S. Congress, 2002), les autorités américaines ont
introduit une rotation obligatoire interne, telle que celle introduite par la directive européenne
19
Ci après « SEC » : est l'organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés
financiers.
20
« United States General Accounting Office ».
25
d’audit de 2006 mise en place quatre années plus tard. De fait, l’article 42 de cette directive
stipule que les associés principaux effectuant un contrôle légal des comptes d’une entité
doivent être remplacés au plus tard sept ans après leur nomination et ne peuvent pas réviser
cette entreprise durant une période d’au moins deux ans.
Par ailleurs, en 2002, la loi SOX (U.S. Congress) a introduit dans sa section 201 une règle
interdisant aux cabinets d’audit de fournir des services non directement liés à l’audit. Les
auteurs de cette loi présument en effet que les services non-audit diminuent la qualité de
l’audit.
Suite aux crises financières des dernières années, l’Europe a également examiné les mesures
susceptibles de renforcer la confiance dans les marchés financiers et d’améliorer la qualité de
l’audit. Ainsi, en 2010, la CE a dévoilé son Livre Vert « Politique en matière d’audit : les
leçons de la crise ». Par le biais de cette publication, la CE désire lancer un débat afin de
clarifier les sujets suivants : « le rôle de l’auditeur, la gouvernance et l’indépendance des
sociétés d’audit, la surveillance des auditeurs, la configuration du marché de l’audit, la
création d’un marché unique pour les services d’audit, la simplification des règles applicables
aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux petits et moyens cabinets (PMC), et sur la
coopération internationale en matière de surveillance des réseaux d’audit internationaux »
(CE, 2010, p.5). Afin d’assurer l’indépendance de l’auditeur et d’accroitre la diversité du
marché de l’audit, Michel Barnier propose dans ce Livre Vert (CE, 2010) plusieurs solutions
dont la rotation obligatoire des cabinets d’audit et la limitation des services non-audit. La CE
(2010) aimerait étudier les avantages et les inconvénients de telles mesures. D’après elle, la
rotation des associés d’audit, tel que l’exige la directive d’audit de 2006, ne permet pas de
répondre aux normes d’indépendance souhaitables. Quant aux services non-audit, le but de la
CE serait de renforcer l’interdiction pour les cabinets de révision de fournir de tels services.
En effet, l’article 22 de la directive d’audit de 2006 a été interprété de différentes façons au
sein de l’UE. Dès lors, dans certains États membres, la prestation de services autres que
d’audit par des réviseurs d’entreprises à leurs clients reste monnaie courante.
Après l’analyse des réponses aux questions présentes dans ce Livre Vert, ces différentes
options ont été retenues : « l’interdiction de fournir des services autres que d’audit aux entités
contrôlées, voire l’interdiction de fournir de tels services en général, répondraient
efficacement au besoin de renforcer l’indépendance et le scepticisme professionnel des
26
auditeurs. En outre, des règles plus strictes applicables à la procédure de désignation des
auditeurs et l’instauration d’une rotation obligatoire des cabinets d’audit contribueraient à
améliorer la qualité des audits » (CE, 2011c).
Ainsi, en 2011, la CE a réalisé une proposition de règlement sur la qualité des audits des
comptes des EIP ainsi qu’une proposition de directive visant à améliorer le fonctionnement du
marché européen de l’audit légal. Ce règlement instaure une rotation obligatoire des cabinets
de révision après une période maximale de six ans qui peut, dans des circonstances
exceptionnelles, être étendue, ainsi qu’une « cooling-off period21 » de quatre ans (CE, 2011c,
section 3.3.3.). Dans l’article 9 de cette proposition de règlement, la CE dévoile également la
proposition des dispositions concernant la fourniture des services non-audit. Le 17 décembre
2013, les États membres de l’UE et le Parlement européen sont parvenus à un accord
provisoire sur la directive et le règlement de l’audit. Ces deux textes législatifs sont entrés en
vigueur le 16 juin 2014. Le règlement sera applicable à compter du 17 juin 2016 dans les
différents États membres de l’UE. Comme stipulé précédemment, vous retrouverez les règles
de 2014 relatives à la rotation obligatoire des cabinets d’audit et à la limitation non-audit dans
les annexes.
En 2011, aux États-Unis, James Doty, président du Public Company Accounting Oversight
Board22 a relancé le débat en suggérant que la rotation obligatoire des cabinets d’audit
pourrait être un moyen de renforcer l’indépendance et l’objectivité de l’auditeur (Doty, 2011).
Par conséquent, le PCAOB (2011a) a publié un document sollicitant des réactions publiques
sur la rotation obligatoire des entreprises d’audit et a également convoqué trois sessions
publiques en 2012 afin d’écouter les points de vue relatifs à l’application d’une telle mesure.
Toutefois, en 2013, ils ont abandonné l’idée d’introduire cette rotation externe obligatoire. De
fait, la Chambre des Représentants des États-Unis a ratifié un projet de loi interdisant la
rotation obligatoire des cabinets de révision.
21
Période suivant l’expiration du mandat du réviseur d’entreprises durant laquelle il lui est interdit
d’exercer ses fonctions au sein de l’entité contrôlée.
22
Ci après « PCAOB ».
27
Figure 1 : Ligne du temps de la réforme de l’audit en Belgique
28
4. REVUE LITTERAIRE
De nombreuses études ne trouvent pas de lien direct entre la longueur d’un mandat d’audit et
la qualité de l’audit (Ewelt-Knauer et al., 2013). Toutefois, lors de leur étude, Ben Saad et
Lesage (2007) ont identifié les facteurs ayant un impact sur l’indépendance de l’auditeur et
ont classé ces derniers au regard, soit de l’indépendance perçue, soit de l’indépendance réelle.
D’après ce schéma, nous pouvons conclure que la rotation interne, la durée du mandat et la
prestation de services non-audit influencent bel et bien l’indépendance du réviseur
d’entreprises. Nous constatons que la durée de la mission a un impact contradictoire sur les
29
deux types d’indépendance, alors que la prestation de services autres que d’audit a un impact
contradictoire sur l’indépendance réelle et un impact négatif sur l’indépendance perçue.
Une étude exploratoire auprès des préparateurs d’information financière (Falcy, Gonthier-
Besacier & Hottegindre, 2011) permet également d’identifier les critères à partir desquels les
directeurs financiers estiment la qualité d’un audit. Les indicateurs jugés les plus importants
pour les préparateurs se rattachent majoritairement au déroulement de la mission d’audit (la
connaissance du dossier par le cabinet de révision et la qualité de la communication de
l’équipe avec son client) et aux critères d’ordre général (la limitation des liens financiers et
personnels et l’obligation de rotation interne). Dans cette étude, les directeurs financiers
accordent une importance moindre à la séparation des services d’audit et de conseil.
Avant d’étudier les points de vue divergents des académiciens quant à la rotation des cabinets
d’audit, il nous semble opportun d’éclaircir la notion de long mandat d’audit. Plusieurs
recherches (Carcello et Nagy 2004 ; Johnson, Khurana and Reynolds, 2002 et GAO, 2003)
ont affirmé qu’un mandat d’audit est court lorsque le même réviseur d’entreprises contrôle les
comptes annuels d’une société pendant deux ou trois années consécutives. Par ailleurs,
Carcello et Nagy (2004), ainsi que Johnson et al. (2002), qualifient de long un mandat de neuf
années ou plus lorsqu’il est exercé par un seul contrôleur légal des comptes dans la même
entité.
Les partisans de cette mesure estiment que le potentiel de cette rotation est plus élevé que
celui de la rotation interne en vue de réduire la familiarité entre le réviseur d’entreprises et son
client, et par conséquent, améliorer l’indépendance de l’auditeur. Ces derniers défendent la
théorie selon laquelle un long mandat d’audit permet le développement de relations étroites
entre les deux parties et altère la capacité du réviseur d’entreprises à être indépendant (Shu,
2000 ; GAO, 2003 ; Public Company Accounting Oversight Board [PCAOB], 2011a & CE,
30
2011). En effet, certains soutiennent qu’un contrôleur légal des comptes pourrait être victime
d’un manque d’attention aux détails lorsqu’il s’empresse d’effectuer son travail pour satisfaire
le client, duquel il est trop proche. Ceci serait également dû au fait qu’il possède une
connaissance approfondie du dossier, qui peut donc lui paraitre redondant et banal (Arel,
Brody and Pany, 2005). Certains écrivains prétendent que même les commissaires aux
comptes les plus consciencieux peuvent commettre des erreurs en raison d’une relation trop
familière avec leurs clients (Bazerman, Loewenstein & Moore, 2002).
De plus, Antle et Nalebuff (1991) démontrent qu’une entité est plus susceptible de conserver
son réviseur d’entreprises lorsque ce dernier émet une opinion favorable (« clean opinion »).
Sous un tel scénario, les auditeurs font face à la menace du licenciement s’ils fournissent une
opinion qualifiée/modifiée (« qualified/modified opinion »). Les résultats des études de
Levinthal et Fichman (1988), et de Vanstraelen (2000), cités par Ewelt-Knauer, Gold et Pott
en 2013, confirment cette hypothèse puisqu’ils indiquent une diminution de probabilité
d’émission d’une opinion qualifiée de la part de l’auditeur à mesure que la relation entre lui et
le client perdure.
Par ailleurs, certains académiciens constatent qu’après plusieurs années de mandat dans la
même entreprise, les cabinets de révision désirent conserver le client en raison de motivations
économiques. Par conséquent, ceux-ci seraient plus enclins à accepter les demandes de
l’entité contrôlée. En revanche, dans un régime avec rotation externe obligatoire, le réviseur
d’entreprises serait moins disposé à émettre une opinion biaisée. En effet, étant donné que la
valeur des différentes rentes liées à chaque client est inférieure, le contrôleur légal a moins
d’incitations à émettre des opinions faussées en réponse à la pression de l’entreprise. La
rotation externe obligatoire atténue donc l’impact négatif potentiel de la dépendance
économique sur la décision du réviseur (Dopuch, King & Schwartz, 2001).
Les points de vue des opposants à la rotation externe des cabinets de révision sont nombreux.
La plupart d’entre eux soutiennent que cette mesure cause une perte de la connaissance
spécifique (opérations, systèmes de comptabilité et structures de gestion interne) du dossier
du client, qui est cruciale pour que les réviseurs d’entreprises soient en mesure de détecter les
erreurs matérielles (Carcello & Nagy, 2004 ; Falcy, 2011 ; Shu, 2000 et PCAOB, 2011a).
31
En outre, plusieurs études (Carcello & Nagy, 2004 ; Geiger & Raghunandan, 2002 ;
Daugherty, Dickens & Higgs, 2010) nous apportent des preuves empiriques sur la fréquence
plus élevée des échecs d’audit quand les contrôleurs légaux des comptes exécutent leurs
première et deuxième années de mandats. Effectivement, en raison du manque de
connaissance de l’entité contrôlée, le réviseur d’entreprises entrant est susceptible de compter
sur les évaluations et représentations réalisées par le client. Cela s’explique par la « learning
curve effect » (Lim & Tan, 2010), c’est-à-dire le fait que l’auditeur ne soit pas capable
d’effectuer des audits de qualité durant les années initiales du mandat, car son apprentissage
s’effectue en suivant une courbe ascendante. En d’autres termes, bien que les nouveaux
commissaires aux comptes soient susceptibles d’apporter « une perspective nouvelle » (CE,
2011c & PCAOB, 2011a) à l’audit, ils peuvent ne pas être aussi compétents ou expérimentés
que le réviseur antérieur, du moins à court terme (PCAOB, 2011a).
D’après l’IFAC (PCAOB, 2011c), la rotation interne des associés d’audit est un changement
qui n’est pas en place depuis assez longtemps pour permettre d’évaluer son impact
objectivement. Ils estiment donc judicieux d’attendre les résultats de cette mesure avant
d’introduire la rotation externe des contrôleurs légaux.
De plus, selon certains académiciens, la rotation externe est inutile, car les incitations
présentes sur le marché, telles que la menace de la perte de réputation ou de futurs revenus, ou
le cout d’éventuels litiges, l’emportent sur les bénéfices attendus par le contrôleur légal en
compromettant son indépendance (DeFond, Raghunandan & Subramanyam, 2002 ; Geiger &
Raghunandan, 2002 & American Institute of Certified Public Accountants [AICPA], 1992).
32
En outre, selon Gray et Manson (2008) et d’après le rapport du PCAOB (2011), lorsque la
rotation externe obligatoire est d’application, le commissaire aux comptes sortant n’a aucune
incitation le motivant à effectuer un audit de qualité étant donné qu’il ne pourra pas être
réengagé. Ceci représente donc un risque pour la qualité de l’audit durant les dernières années
du mandat.
Par ailleurs, l’IRE a également montré son désaccord face à l’introduction de cette mesure. En
effet, d’après Michel De Wolf, président de l’IRE du 23 avril 2010 au 26 avril 2013, la
concurrence est un principe européen important. Or, la rotation externe du cabinet de révision
et l’interdiction des services non-audit sont des mesures inadéquates par rapport à ce principe
(IRE, 2010).
Finalement, contrairement aux suggestions de la CE dans son Livre Vert de 2010, les
recherches de Cameran, Di Vincenzo et Merlotti (2005) annoncent que la rotation externe ne
résoudra pas le problème de concentration du marché. En effet, il s’avère que l’augmentation
des couts causera d’éventuelles fusions entre les petits cabinets afin que ces derniers puissent
survivre. Selon le Centre pour la Qualité de l’Audit (Center for Audit Quality), les couts
relatifs aux appels d’offres, à la documentation et aux personnels associés à la rotation externe
seront trop élevés pour les petits cabinets de révision. Dès lors, ils seront contraints
d’abandonner leurs mandats d’EIP (PCAOB, 2011b). Certains auteurs craignent également
que les « Big 4 »23 s’organisent entre eux afin de coordonner leurs acquisitions de mandats.
Nos lectures concernant les services non-audit nous permettent de constater l’existence d’un
débat au sujet de leur limitation.
D’une part, d’après Causholli, Chambers et Payne (2014), quelques études relatent que le
niveau des honoraires liés aux services autres que d’audit n’a pas de conséquence sur la
qualité de l’audit (DeFond & Francis, 2005 et Schneider, Church & Ely, 2006). En effet, selon
Nelson (2006) ceci peut s’expliquer par le fait que les incitations présentes sur le marché ou la
23
Le terme « Big 4 » désigne les quatre plus grands cabinets d'audit financier au niveau mondial, à
savoir Deloitte, EY, KPMG et PriceWaterhouseCoopers.
33
réglementation compensent l’effet négatif des incitations économiques sur l’indépendance du
réviseur d’entreprises.
D’autre part, Firth (2002) et d’autres littéraires estiment que la prestation de services autres
que d’audit permet au commissaire aux comptes d’améliorer sa connaissance du client et donc
d’effectuer un audit de meilleure qualité. Selon Rodríguez-Ávila et Monllau-Jaques (2013),
les études de Goldwasser (1999) et de Dopuch, King et Schwartz (2003) font apparaitre une
relation positive entre les services non-audit et l’objectivité de l’auditeur.
D’après De Angelo (1981), Reynolds, Deis et Francis (2004), plus la valeur des futurs
revenus liés aux services non-audit est susceptible d’augmenter, plus le réviseur d’entreprises
risque de compromettre son indépendance. Dès lors, les commissaires aux comptes ont plus
de risques de se départir de leur objectivité lorsqu’ils auditent des petites entreprises avec un
grand potentiel de croissance.
Malgré les avis mitigés concernant l’introduction de ces mesures, nous pouvons affirmer que
la littérature scientifique semble davantage opposée à la rotation obligatoire externe. De fait,
mis à part l’avis des législateurs et de quelques académiciens, la majorité des articles que nous
avons lus soutiennent l’idée que cette mesure engendrera plus de menaces que d’opportunités
dans le marché de l’audit. Au contraire en ce qui concerne la limitation plus stricte des
34
services autres que d’audit, nous remarquons que la plupart des académiciens sont en faveur
de cette mesure.
35
36
ANALYSE PRATIQUE
37
38
5. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Comme nous pouvons le constater dans la première partie de ce mémoire, les avis concernant
l’introduction de la rotation obligatoire externe et la limitation des services autres que d’audit
sont très divergents. Dès lors, la revue littéraire ne nous permet pas de conclure si ces deux
méthodes sont réellement efficaces afin d’assurer l’indépendance du commissaire aux
comptes.
Dans cette partie empirique, nous désirons étayer les différentes informations recueillies dans
la littérature afin de tenter de répondre aux hypothèses suivantes, émises à l’aide de la
première partie de ce mémoire :
Pour ce faire, nous articulons notre étude pratique en deux parties différentes. La première
sera consacrée à une analyse primaire des résultats de plusieurs études mondiales réalisées
dans certains pays ayant instauré la rotation obligatoire des cabinets de révision ainsi que la
limitation des services non-audit. La seconde présentera notre analyse secondaire qualitative
de cas pratiques. Dans la dernière partie, nous confronterons ces aspects pratiques aux points
théoriques développés lors de la première partie de ce travail. Ci-dessous, nous exposons la
méthodologie que nous avons adoptée afin de recueillir plusieurs points de vue concernant la
rotation obligatoire et la limitation des services autres que d’audit.
39
5.1. Présentation de la méthodologie
Afin de mener à bien nos recherches, il nous a semblé judicieux d’opter pour une analyse
secondaire qualitative plutôt que quantitative. En effet, l’analyse qualitative consiste
principalement en une démarche de collecte, d’analyse, de reformulation et d’explicitation de
données non chiffrées via des entretiens, des témoignages ou des études de cas (Muchielli,
1996, cité par Couturier, Lacourse & Mukamurera 2006). Cette méthode nous semble dès lors
appropriée pour notre recherche.
Il nous a semblé opportun de rencontrer plusieurs professionnels actifs dans notre domaine de
recherche, à savoir l’audit. L’objectif de ces différentes rencontres était de rassembler les
opinions des différentes personnes interrogées et de les comparer.
Selon nous, la réalisation d’interviews était le moyen le plus approprié en vue de dégager des
résultats précis concernant l’efficacité des deux nouvelles mesures. Nous avons donc établi
deux questionnaires distincts afin de recueillir les points de vue de différents professionnels et
d’adopter une méthode structurée. Le premier était destiné aux réviseurs d’entreprises et le
second aux EIP. Vous trouverez le détail de ces questionnaires aux annexes IV (réviseurs
d’entreprises) et V (EIP).
Nous avons choisi de développer notre analyse pratique au regard de ce que nous avons
découvert dans la partie théorique. Ci-dessous, sont cités les différents points abordés dans les
deux questionnaires, nous permettant de répondre aux principales questions de recherches qui
ont guidé le présent mémoire.
40
5.2. Choix de l’échantillon et collecte de données
Le choix de nos interlocuteurs nous semblait évident. En effet, afin d’apporter une réelle
valeur ajoutée à notre analyse, nous nous devions de prendre contact avec des experts dans le
domaine de l’audit externe et des membres du CA ou du département financier d’EIP dont la
Belgique est l’État d’origine.
Le recueil des informations auprès de toute la population nous semblant compliqué, nous
avons constitué deux échantillons pertinents de réviseurs d’entreprises et d’EIP.
Le site de l’IRE répertorie environ 880 réviseurs d’entreprises actifs en Belgique. Nous avons
donc invité une cinquantaine de réviseurs d’entreprises francophones à prendre part à cette
étude. Parmi eux, sept réviseurs ont répondu de différentes manières à notre analyse. La
moitié d’entre eux ont simplement complété notre questionnaire en expliquant que pour des
raisons de temps, il leur était impossible de nous rencontrer. En effet, dans le secteur de
l’audit, la période allant du mois de janvier au mois de mai est très intense et est connue sous
le nom de « busy ». Quatre autres réviseurs d’entreprises ont accepté de nous rencontrer afin
de débattre sur le sujet. Nous avons également jugé opportun d’interroger deux personnes
n’ayant pas la fonction de réviseur d’entreprises, mais dont l’avis quant aux deux mesures
étudiées nous semblait intéressant.
41
Les professionnels ayant participé d’une façon ou d’une autre à cette enquête qualitative sont
les suivants :
Quant à la deuxième partie de nos entretiens, nous avons contacté plusieurs EIP dont la
Belgique est l’État membre d’origine. Afin de réaliser notre échantillon, nous nous sommes
rendus sur les pages internet de la FSMA et avons contacté plus de dix sociétés. Notre objectif
premier était d’organiser un entretien avec l’un des membres du CA ou du conseil
d’administration de ces entités. En effet, comme indiqué dans notre partie théorique,
l’assemblée générale d’une EIP désigne le commissaire aux comptes sur base des propositions
du conseil d’administration, qui lui-même s’est fait conseiller par le CA. Par conséquent, une
24
Société privée à responsabilité limitée.
25
Société civile ayant emprunté la forme de société coopérative à responsabilité limitée.
26
Société civile ayant emprunté la forme de société coopérative à responsabilité limitée.
27
Société privée à responsabilité limitée, faisant partie du groupe BKR International.
28
Société civile ayant emprunté la forme de société coopérative à responsabilité limitée.
29
Société privée à responsabilité limitée.
42
rencontre avec un membre de ces organes nous semblait intéressante. Toutefois, une des
entreprises contactées n’a pas accepté de nous mettre en contact avec ces personnes. De ce
fait, nous avons interrogé le directeur du département financier de cette entité, qui est
également consulté concernant la nomination du commissaire aux comptes.
Les professionnels rencontrés font partie de cabinets de différentes tailles ainsi que d'EIP et
ont une certaine expérience dans le métier. Nous en déduisons donc que notre échantillon est
représentatif de la population visée.
Les interviews en face à face, les appels téléphoniques, et l’envoi de questionnaires ont
permis la collecte de données.
Nous avons eu la chance de recueillir les avis de ces professionnels sur les deux mesures
étudiées :
Dans les chapitres suivants, nous exposerons premièrement notre analyse primaire des
résultats de plusieurs études mondiales réalisées dans les pays ayant instauré la rotation
externe obligatoire. Ensuite, nous partagerons notre analyse secondaire sous forme d’une
synthèse des entretiens, décortiquée en fonction des différents points abordés, exposés ci-
dessus. Finalement, nous conclurons cette partie pratique en confrontant nos études aux points
théoriques développés dans la première partie de ce travail.
43
44
6. ANALYSE DE LA ROTATION EXTERNE OBLIGATOIRE SUR LE
PLAN INTERNATIONAL
Dans ce chapitre, nous analyserons les résultats de plusieurs analyses empiriques mondiales
réalisées dans certains pays ayant mis en place la rotation obligatoire des cabinets de révision
et la limitation des services non-audit.
6.1.1. Italie
En 1975, la rotation obligatoire des cabinets de révision a été adoptée en Italie. Cette loi
stipulait à l’époque qu’une rotation externe était obligatoire après neuf années consécutives
d’audit légal des comptes annuels de la même entreprise cotée. Après plusieurs années, cette
mesure s’est étendue aux compagnies d’assurance.
Dans leur étude empirique de 2015, Cameran, Francis, Marra et Pettinicchio ont utilisé un
échantillon de 204 EIP auditées par des « Big 4 » de 2006 à 2009. Les résultats démontrent
que l’introduction de la mesure de rotation externe mène à des honoraires anormalement plus
élevés pour l’auditeur entrant ainsi que pour l’auditeur finissant son mandat d’audit. Cela
suggère qu’il pourrait y avoir une tarification opportuniste, car ils n’ont pas remarqué d’effort
d’audit plus élevé durant la dernière année de mandat. Cette étude révèle également une
baisse de la qualité de l’audit durant les trois premières années suivant l’introduction de cette
mesure. Ceci est cohérent à la lumière du phénomène de « learning curve effect » abordé
antérieurement.
6.1.2. Canada
Avant d’être abolie en faveur de la rotation interne, la rotation externe des cabinets de
révision a été obligatoire au Canada jusqu’en 1991 pour les institutions financières.
Par ailleurs, 74 % des participants affirment qu’il existe des mesures plus efficaces que la
rotation externe afin de garantir l’indépendance de l’auditeur. Selon eux, la rotation des
associés tous les sept ans, mesure déjà en place dans le pays, en fait partie. Ils proposent
également des communications formelles et informelles entre les commissaires aux comptes
et leurs clients afin d’évaluer si la nature de leurs relations est compromettante.
6.1.3. Espagne
En Espagne, la loi d’audit de 1988 stipule que le mandat d’audit ne peut durer moins de 3 ans
et plus de 9 ans. Dès lors, la rotation obligatoire des cabinets de révision tous les neuf ans a
été instaurée de 1988 à 1995.
Dans l’ensemble, les résultats de cette étude soutiennent les arguments des opposants à cette
mesure. En effet, ils ne trouvent aucune preuve suggérant que l’obligation de la rotation des
cabinets d’audit est associée à une plus grande probabilité d’émettre une opinion qualifiée. Au
contraire, il s’avère que les réviseurs d’entreprises ont émis plus d’opinions modifiées durant
la période postérieure à l’obligation de cette mesure, bien que les situations financières des
46
entreprises étudiées étaient moins critiques pendant ces années.
En outre, leurs résultats affirment que les incitations du commissaire aux comptes pour
protéger sa réputation ont un impact positif sur la décision qu’il prend, et ce quelles que soient
les mesures de rotation en place. Toutefois, une telle association est plus forte entre 1995 et
2000.
Finalement, les résultats ne leur permettent pas de conclure que la rotation obligatoire des
cabinets de révision réduit les effets négatifs liés à la dépendance économique du réviseur par
rapport à son client. Inversement, l’obligation d’une telle mesure réduit la motivation du
commissaire aux comptes à protéger sa réputation.
6.1.4. Chine
Les caractéristiques institutionnelles uniques en Chine ont permis à Firth, Rui et Xi (2012) de
comparer les différentes formes de rotation présentes dans le domaine de l’audit. En effet, en
octobre 2003, certains régulateurs chinois ont introduit une condition visant la rotation interne
des associés d’audit effectuant le contrôle légal des comptes d’entités cotées après cinq ans.
Par ailleurs, en 2004, la SASAC30 a exigé que toutes les entreprises publiques chinoises
changent de cabinets de révision. Ensuite, en 2005, la SASAC a demandé que toutes les
entreprises publiques chinoises sous sa juridiction soient soumises à une rotation externe tous
les neuf ans.
Firth et al. ont étudié la propension des réviseurs d’entreprises à émettre une opinion modifiée
pour juger la qualité de l’audit. Leurs résultats démontrent que parmi les différentes formes de
rotation, seule la rotation volontaire des cabinets de révision est associée à une meilleure
qualité de l’audit. La rotation obligatoire interne est, quant à elle, uniquement associée à une
grande probabilité d’émettre une opinion qualifiée lorsque l’entité contrôlée est située dans
une région peu développée. Il apparait que les formes de rotation externe obligatoire et
volontaire interne n’ont aucun impact sur l’émission d’une opinion modifiée.
30
« State-owned Assets Supervision and Administration Commission of the State Council of China ».
47
6.1.5. Corée du Sud
De 2006 à 2010, le Financial Supervisory Services coréen a réclamé une rotation obligatoire
tous les sept ans des cabinets de révision effectuant le contrôle légal des comptes d’EIP. De
plus, durant cette période, le régulateur coréen a exigé que ces entreprises divulguent leurs
honoraires d’audit ainsi que les heures consacrées à leurs différents clients. Dans un pareil
contexte, Kwon, Lim et Simnett (2014) ont pu étudier les avantages et couts potentiels ainsi
que les améliorations de la qualité de l’audit associés à cette mesure de rotation.
En outre, les résultats des recherches mettent en évidence le lien entre l’introduction de la
rotation obligatoire des cabinets d’audit et une augmentation significative du temps consacré
par les commissaires aux comptes à la réalisation des audits. Celle-ci passant en effet par la
prise de connaissance du dossier du client.
6.1.6. Nigéria
En 2010, la Banque Centrale du Nigéria a exigé que toutes les banques de dépôt remplacent
leurs commissaires aux comptes lorsque ceux-ci sont en activité depuis plus de dix ans. Dès
lors, Olowookere et Adebiyi (2013) ont étudié l’impact de la rotation externe sur la qualité de
l’audit en distribuant 600 questionnaires à des régulateurs, des cabinets d’audit ainsi qu’à des
investisseurs.
D’une manière générale, les résultats de cette étude ne permettent pas de conclure que la
rotation externe obligatoire améliore sans aucun doute la qualité de l’audit. Au contraire, elle
pourrait avoir des conséquences néfastes sur la durabilité de la profession. Par conséquent, les
auteurs recommandent que la rotation externe s’effectue de manière volontaire.
6.1.7. Irlande
En 1999, Canning et Gwilliam ont réalisé une étude portant sur l’impact des prestations des
services non-audit sur la perception de l’indépendance du réviseur d’entreprises dans
l’environnement commercial irlandais. Afin de mener à bien cette étude, ils ont distribué des
questionnaires et interrogé des sociétés prêteuses, des gestionnaires en investissement ainsi
que des analystes financiers.
Les résultats de cette étude démontrent que deux tiers des personnes sondées s’accordent à
dire que l’indépendance de l’auditeur est diminuée lorsque les mêmes réviseurs d’entreprises
réalisent le contrôle légal des comptes et fournissent des services autres que d’audit.
Toutefois, les personnes interrogées ne prônent pas l’interdiction aux cabinets de révision de
fournir des services additionnels. En effet, ils pensent que la prestation de ces services
pourrait améliorer la connaissance et l’expérience du cabinet par rapport à l’entité contrôlée.
Cependant, ils s’accordent pour dire qu’une distinction doit être faite entre le personnel
réalisant la mission légale et celui qui fournit des services non-audit.
Patel, Prasad, et Saune étudient en 2010 l’influence des prestations de services non-audit dans
un contexte où les lois limitent la mise en place de ces services. Les résultats de cette étude
49
indiquent que les prestations de services autres que d’audit soutiennent l’argument d’expertise
du dossier du client. En effet, en transférant leurs connaissances de l’audit aux services non-
audit et inversement, les commissaires aux comptes maximisent leur efficacité. En outre, les
cabinets de révision sont en mesure de savoir si ces services compromettent ou non leur
indépendance.
6.2. Conclusion
D’une part, après avoir analysé ces diverses études mesurant la qualité de l’audit selon
différentes mesures, nous pouvons conclure en disant que les résultats relatifs à l’introduction
de la rotation obligatoire des cabinets de révision ne sont pas convaincants quant à la qualité
de l’audit. Nous pouvons même affirmer que ces résultats soutiennent les arguments des
opposants à cette mesure.
Effectivement, il ressort de ces diverses analyses que durant les années suivant la rotation du
cabinet d’audit, l’augmentation des heures consacrées aux dossiers des clients est
considérable. Par conséquent, les couts liés à l’audit sont anormalement plus élevés pour les
commissaires entrants et sortants ainsi que pour les réviseurs d’entreprises qui ne sont pas
directement concernés par la rotation externe. En outre, ces études ne permettent pas de faire
apparaitre des preuves suggérant que l’obligation de la rotation est associée à une meilleure
qualité de l’audit. Au contraire, nous remarquons une baisse de la qualité de l’audit durant les
trois premières années suivant l’introduction de cette mesure.
Finalement, les différents intervenants de ces études affirment que les jugements des membres
du CA, la rotation interne et les incitations du commissaire aux comptes pour protéger sa
réputation sont des mesures suffisantes afin de garantir l’indépendance du réviseur
d’entreprises.
D’autre part, les résultats des deux études concernant la limitation des services non-audit
affirment que la prestation de ces services pourrait améliorer l’expertise que le commissaire
aux comptes a de son client. Toutefois, nous comprenons que la séparation des équipes au
sein du cabinet effectuant l’audit et les services additionnels est très importante afin d’assurer
l’indépendance du commissaire aux comptes.
50
7. ETUDE QUALITATIVE
Les résultats obtenus à l’issue des divers entretiens qui ont été menés vont être repris dans ce
chapitre. Nous tenons particulièrement à remercier nos différents interlocuteurs d’avoir
accepté de nous rencontrer malgré leurs emplois du temps chargés. Pour des raisons de
confidentialité, nous ne citerons pas de noms dans les prochaines sections de ce chapitre et
nous mettrons en perspective les avis récoltés d’une manière générale. Ce chapitre
comprendra également mon analyse concernant les divers éléments étudiés.
Comme énoncé ci-dessus, nous avons divisé notre étude qualitative selon différents points
que nous avons déterminés sur base des éléments prépondérants de la revue littéraire.
L’avis des professionnels actifs dans le domaine de l’audit est unanime. Ils affirment en toute
honnêteté qu’il n’y a actuellement aucun manque d’indépendance de la part de l’auditeur en
Belgique. Ils s’accordent pour dire que, depuis les différents scandales financiers des
années 2000, notre pays connait une législation stricte en matière d’audit. Ils évoquent
notamment l’introduction de la mesure concernant les missions incompatibles, la règle « one-
to-one », la loi instituant un CA dans les entreprises cotées et les institutions financières, la
réalisation par l’IRE des contrôles de qualité, la norme relative à l’indépendance édictée par
l’IRE, etc.
Selon eux, l’introduction de ces différentes mesures législatives a déjà permis d’améliorer
l’indépendance de l’auditeur et dès lors la qualité de l’audit. En effet, par crainte des risques
encourus s’ils compromettent leur indépendance, la plupart des réviseurs d’entreprises n’osent
pas déroger à ces règles.
Nos différents interlocuteurs s’accordent avec les avis recueillis dans la littérature, et trouvent
désolant que l’indépendance perçue prime sur l’indépendance réelle du commissaire aux
comptes.
En concordance avec les avis mentionnés dans la section précédente, les membres d’EIP
s’accordent à dire que l’indépendance du réviseur d’entreprises n’est actuellement pas un
problème en Belgique.
Toutefois, ils insistent tous les trois sur le fait qu’il existe un risque considérable pour le
commissaire aux comptes de compromettre son indépendance. Dès lors, ils trouvent désirable
et important de mettre en place différentes mesures lui permettant d’assurer cette
indépendance vis-à-vis des entités qu’il contrôle.
Nous observons que nos différents interlocuteurs s’accordent pour dire qu’il n’y a
actuellement aucun manque d’indépendance de la part des auditeurs en Belgique. Nous
rejoignons également leur avis, car à notre sens les nombreuses règles implémentées ces
dernières années ont permis d’améliorer cette indépendance et d’en assurer un niveau
relativement élevé.
52
Ensuite, les nombreuses incitations présentes sur le marché (protection de la réputation, peur
de perdre des revenus futurs et couts d’éventuels litiges) font en sorte que le réviseur
d’entreprises est d’autant plus attentif à ne pas compromettre son indépendance.
Toutefois, trois interlocuteurs s’accordent tout de même à dire que la rotation, qu’elle soit
interne ou externe, pourrait améliorer la qualité de l’audit. Effectivement, selon eux, elle
permet d’apporter un regard neuf à la mission d’audit. Toutefois, étant donné qu’en Belgique
la directive de 2006 exige déjà un remplacement des associés principaux au plus tard sept ans
à partir de la date de leurs nominations, nos intervenants ne pensent pas qu’il soit justifié
d’instaurer également une rotation externe. Quant à l’idée d’apporter un regard neuf à l’audit
après dix ans, un de nos interlocuteurs souligne le fait que le problème persistera, car le
règlement européen (règlement n° 537/2014, 2014) donne possibilité aux pays membres de
l’UE d’incorporer des options dans leur législation nationale. Ces dernières permettraient de
contourner la limite des dix ans en prolongeant la durée des mandats consécutifs jusqu’à vingt
ans dans le cas d’un appel d’offres ou jusqu’à vingt-quatre ans dans le cas d’un co-
commissariat aux comptes. Notre intervenant trouve dès lors que l’argument de regard neuf
53
n’a pas de sens, car si l’indépendance est compromise après dix ans, le problème sera le
même voire renforcé dix ou quatorze ans plus tard.
100% 89%
80%
67%
60%
0%
Amélioration de la Amélioration de
qualité de l'audit l'indépendance du
réviseur d'entreprises
Un des professionnels interrogés nous a fait remarquer que pour les cabinets de révision ayant
des clients de longue date, la rotation externe n’aura pas un effet direct. Effectivement,
l’article 41 du règlement européen (règlement n° 537/2014, 2014) énonce des dispositions
transitoires. À titre d’exemple, il déclare que si une EIP X est auditée par le cabinet Y depuis
1997 jusqu’au 17 juin 2014, en ce compris l’audit de 2013, il accumule entre onze et vingt
années d’expérience dans cette entité. D’après le § 2 de l’article 41, « à compter du 17 juin
2023, une EIP n’accepte ou ne renouvelle pas une mission d’audit avec un contrôleur légal
des comptes ou un cabinet d’audit donné si ce contrôleur légal des comptes ou ce cabinet
d’audit a, à la date d’entrée en vigueur du présent règlement, fourni des services d’audit à
54
cette EIP pendant onze années consécutives ou davantage, mais moins de vingt années
consécutives ». Cela signifie que le cabinet de révision sera autorisé à renouveler le mandat
pour cette entité jusque 2023. Cette règle est selon lui insensée, car plus le client accumule de
l’ancienneté dans leur portefeuille, plus il dispose de temps avant d’effectuer la rotation. Or,
l’idée est de diminuer la longueur des mandats, car elle engendre des problèmes
d’indépendance.
Ensuite, l’un des participants à notre étude ajoute que la rotation externe occasionnera plus de
proactivité dans les démarches commerciales qu’entreprennent les cabinets d’audit. Il
explique que tous les cabinets mettent déjà en place des stratégies commerciales afin de
récupérer les mandats de la concurrence et de compenser l’éventuelle perte des leurs. Ces
démarches consistent principalement en des visites chez les clients étant sujets à la rotation
externe afin de se faire connaitre en vue de participer aux appels d’offres.
Par ailleurs, plusieurs réviseurs d’entreprises craignent que les cabinets de révision
s’arrangent entre eux pour effectuer chacun à leur tour trois mandats consécutifs. Dans ce cas,
55
après neuf ans de collaboration avec un cabinet d’audit, l’EIP est à nouveau contrôlée par le
cabinet de révision précédent, et ainsi de suite. En d’autres termes, seuls deux cabinets de
révision se chargeraient d’effectuer le contrôle légal des comptes de cette entité. Nos
intervenants estiment que l’objectif initial de cette rotation, qui est d’améliorer
l’indépendance du réviseur d’entreprises, est tout à fait biaisé avec cet arrangement.
De plus, ils déclarent que cette rotation des cabinets de révision engendrera une perte de la
qualité de l’audit au moins durant la première et la deuxième année du mandat. Comme nous
l’avons énoncé dans la première partie de ce mémoire, cette perte est due à la courbe
d’apprentissage. Effectivement, comme l’indiquent nos interlocuteurs, il est difficile, voire
impossible, pour une équipe effectuant le contrôle légal des comptes d’une entité, d’assimiler
et de connaitre l’activité de cette dernière en seulement un an. Ces deux premières années sont
donc dangereuses et notre panel ne garantit pas être en mesure d’effectuer un audit légal de
très grande qualité. Afin d’appuyer cette idée, un de nos interlocuteurs nous rappelle que des
études réalisées en 2001-2002 par Richard Frankel notamment, n’ont pas permis de trouver un
lien direct négatif entre la longueur des mandats d’audit et la qualité de l’audit.
Finalement, tous les professionnels interrogés ajoutent que la rotation externe engendrera un
surcroit de travail pour les cabinets de révision, que ce soit pour les réviseurs d’entreprises,
l’équipe comptable ou l’équipe financière. De fait, afin de limiter les risques encourus lors des
deux premières années du mandat, les commissaires aux comptes réalisent des centaines
d’heures supplémentaires sur les dossiers de leurs nouveaux clients afin d’accumuler assez de
connaissance pour réaliser un audit de qualité suffisante.
Cela nous amène à mentionner la dernière et la plus importante menace évoquée par nos
interlocuteurs : l’augmentation des couts causée par la rotation externe obligatoire. En effet, il
56
va de soi que les heures additionnelles passées à rédiger ou à comprendre un tout nouveau
dossier engendrent des couts considérables pour les cabinets de révision. Cela représente à
nouveau une perte de rentabilité pour les réviseurs d’entreprises. Selon nos interlocuteurs, ces
derniers prendront à leur charge cet investissement et il ne sera pas répercuté sur les
honoraires facturés à l’entité auditée. Ils argumentent cela par le fait que nous faisons
actuellement face à une baisse généralisée des prix de l’audit dû la crise. Afin de compenser
cette perte, le commissaire aux comptes va essayer d’améliorer sa productivité ; il convient de
se demander si une augmentation de la productivité ne comporte pas un risque de diminution
de la qualité puisqu’en général une augmentation de la productivité ne peut être obtenue qu’en
diminuant les ressources humaines consacrées à l’audit de l’entité contrôlée.
Toutefois, certains réviseurs d’entreprises estiment que l’EIP pourra subir une faible
augmentation de ces couts de personnel lorsque ce dernier prendra plus de temps que
d’habitude pour expliquer certaines différences ou fournir des documents aux nouveaux
commissaires aux comptes.
Figure 4 : La supériorité moyenne des couts des premières années d’un mandat
11%
Sur le graphique ci-dessus, nous pouvons remarquer que la majorité des personnes interrogées
estiment que la supériorité moyenne des couts initiaux du nouveau mandat d’audit pour le
cabinet de révision s’élève à 30 %.
57
7.2.2. Opinions des membres d’entités d’intérêt public
D’un côté, ils affirment qu’il est impossible pour le réviseur d’entreprises d’éviter une
certaine connivence avec l’entité qu’il contrôle. Selon eux, dès qu’un lien quelconque se crée,
l’indépendance n’est plus garantie. Par conséquent, la rotation des cabinets de révision
permettra de casser ce lien créé au fil des années de collaboration entre le réviseur et son
client.
De plus, comme évoqué antérieurement, elle apportera un regard neuf, neutre par rapport à la
situation et à l’évolution de l’entreprise révisée. En effet, d’après eux, la rotation des associés
principaux n’apporte pas un regard suffisamment neuf et impartial du commissaire aux
comptes.
Ensuite, notre panel mentionne que le fait que le réviseur d’entreprises sait qu’il précède un
autre commissaire aux comptes ou cabinet de révision le motivera à effectuer son travail avec
intégrité et objectivité.
Par ailleurs, un des membres des EIP évoque que l’une des opportunités est de profiter de
l’expérience acquise par les réviseurs d’entreprises dans d’autres entités. En effet, il considère
qu’après dix ans de mandat avec le même cabinet de révision, l’entité contrôlée a obtenu le
maximum de ce que le réviseur en place pouvait lui apporter.
D’un autre côté, nos intervenants estiment que l’introduction de la rotation externe n’aura pas
nécessairement un impact positif sur la qualité de l’audit tant les menaces sont importantes.
Comme les réviseurs d’entreprises et professionnels de l’audit, ils évoquent le travail
supplémentaire que le cabinet de révision et l’entité révisée devront fournir afin d’obtenir une
qualité de l’audit acceptable. Ils citent également le risque encouru lors des deux premières
58
années de mandat, la perte de temps liée à la transmission des dossiers, la perte d’expertise
concernant des entités complexes et encore l’augmentation des couts.
Tels que les réviseurs d’entreprises, les membres des EIP mentionnent que nous remarquerons
une augmentation des frais au niveau du client et au niveau du cabinet de révision, car ils
fourniront tous deux plus d’efforts durant les deux premières années au moins. Cependant,
comme les réviseurs d’entreprises, les trois personnes interrogées insistent sur le fait que les
couts supplémentaires rencontrés par le cabinet d’audit ne seront pas répercutés sur son client.
Effectivement, au vu du nombre de cabinets présents sur le marché, la concurrence est
importante et nous ne devons pas nous attendre à une pression oligopolistique trop marquée.
Sur base des opinions et des arguments de nos différents interlocuteurs, nous sommes d’avis
que la rotation externe pourra améliorer l’indépendance de l’auditeur, essentiellement
l’indépendance perçue, mais aura des effets négatifs sur la qualité de l’audit.
À nos yeux, les principales opportunités engendrées par cette mesure sont la dissolution du
lien immanquablement créé entre les deux parties et l’expérience acquise dans d’autres
sociétés par le commissaire aux comptes entrant dont profiteront les entités révisées. De plus,
l’apport d’un regard neuf et neutre permettra d’améliorer la qualité de l’audit.
Cependant, tout comme les réviseurs d’entreprises, nous craignons que la mise en place de
cette nouvelle mesure diminue la qualité de l’audit tant ses menaces sont importantes. Nous
retenons essentiellement la perte de connaissance spécifique du client, le surcroit de travail
effectué par le cabinet de révision et par l’entité révisée ainsi que les couts associés à ces
heures supplémentaires. Finalement, nous pensons qu’au vu de ces menaces considérables, le
risque d’obtenir une qualité de l’audit plus faible est important durant les premières années du
mandat.
Par ailleurs, nous regrettons que les États membres de l’UE aient la possibilité d’incorporer
les options citées précédemment dans leur législation nationale. En effet, ces dernières ne
59
soutiennent pas l’objectif de la rotation externe obligatoire, qui est d’éviter la création de
conflits d’intérêts survenant régulièrement après dix ans de mandat dans la même société.
Finalement, nous ne trouvons pas étonnant qu’il existe différentes opinions concernant
l’impact de la rotation externe et nous allons d’ailleurs tenter d’y apporter certaines
explications rationnelles.
Ensuite, chaque intervenant défend ses intérêts propres. D’un côté, nous retrouvons les
réviseurs d’entreprises et professionnels de l’audit, qui désirent effectuer un audit de
qualité élevée sans pour autant augmenter la charge de travail nécessaire et les couts qui
en découlent. De l’autre côté, les membres des EIP souhaitent obtenir la vision la plus
neutre qui soit sur les états financiers de leurs entités respectives afin d’être en mesure
d’identifier les risques auxquels leurs organisations sont soumises.
60
7.3. L’ampleur des impacts en fonction de la taille du cabinet
Non 22%
Oui 78%
Comme nous l’indique le graphique ci-dessus, la plupart des experts interrogés s’accordent
pour dire que les conséquences de la rotation externe obligatoire sur les cabinets de révision
diffèreront en fonction de la taille de ces derniers.
Premièrement, il semble évident que les cabinets d’audit disposant d’un plus grand nombre de
mandats soumis à la rotation externe risquent d’en souffrir davantage. Étant donné que les
cabinets de taille importante (« Big 4 ») ont le quasi-monopole des EIP, la rotation externe
obligatoire engendrera dès lors plus de conséquences négatives pour ces derniers. Cependant,
comme nous l’avons mentionné ci-dessus, ils auront l’occasion de récupérer les mandats
perdus par leurs concurrents et ne souffriront donc pas d’une grande perte de chiffre
d’affaires.
Par ailleurs, plusieurs intervenants affirment que les cabinets d’audit de petite taille effectuant
le contrôle légal des comptes d’EIP seront encore plus affectés par l’introduction de cette
mesure. Comme ils nous l’indiquent, afin d’obtenir des mandats d’EIP, les petits cabinets
doivent prendre le temps de participer aux appels d’offres de ces entités et travailler
consciencieusement afin de rendre une proposition intéressante. Étant donné que la rotation
engendrera davantage d’appels d’offres, les cabinets de révision de moindre taille refuseront
61
d’y participer, car cela représente pour eux un travail conséquent. S’ils se voient contraints
d’abandonner de tels mandats, les petits cabinets de révision auront moins de dossiers que les
cabinets plus importants pour compenser cette perte d’honoraires.
De plus, un réviseur d’entreprises exerçant sa profession au sein d’un cabinet de petite taille
craint une perte de chiffre d’affaires pour ce type de cabinets. D’après lui, étant donné que les
cabinets d’audit de taille plus importante risquent d’obtenir moins de mandats, ils essayeront
de compenser leur perte de rentabilité en intégrant le marché des entreprises non cotées. Cela
représente une menace considérable pour les cabinets de petite taille, étant particulièrement
actifs sur ce marché.
En résumé, contrairement à l’objectif énoncé par Michel Barnier dans le Livre Vert (CE,
2011a), la rotation externe obligatoire comporte le risque d’une plus grande concentration du
marché de l’audit. Les divers arguments mentionnés ci-dessus appuient cette idée. Toutefois,
un de nos interlocuteurs a énoncé deux raisons supplémentaires à cela.
D’une part, lorsque l’organe de gestion d’une entité contrôlée doit choisir un nouvel auditeur,
il va généralement essayer de prendre une décision qu’on ne pourra pas lui reprocher par la
suite. Or, opter pour un grand cabinet d’audit est difficilement reprochable. Il en résulte
qu’une entité contrôlée jusque-là par un cabinet de moindre taille devant choisir un nouveau
commissaire aux comptes va avoir une propension naturelle à désigner un grand cabinet. Les
cabinets de plus petite taille vont donc voir diminuer leurs parts de marché dans l’audit légal
des EIP, ce qui signifiera également un étiolement de leurs capacités techniques (notamment
en matière d’International Financing Reporting Standards31 dans les nombreux pays où seules
les EIP sont tenues d’établir leurs états financiers selon les IFRS).
31
Ci après « IFRS ».
62
marché et de l’interdiction pour les auditeurs légaux de fournir certains services aux entités
qu’ils contrôlent, les cabinets de plus petite taille verront probablement augmenter leurs
activités dans le domaine des services non-audit interdits.
Nous rejoignons l’avis des réviseurs d’entreprises. En effet, nous estimons que la rotation
externe obligatoire affectera plus négativement les cabinets de révision de petite taille.
Il est vrai que lorsqu’un cabinet de ce type audite une EIP, il réalise un travail conséquent afin
de participer à l’appel d’offres et de comprendre la structure de l’entité. Cela lui prend
énormément de temps. Dès lors, étant donné que la rotation engendrera davantage d’appels
d’offres, les cabinets de révision de moindre taille refuseront d’y participer, car ils ne seront
pas en mesure de supporter la charge de travail supplémentaire et l’augmentation des couts
qui en découle.
Figure 6 : Impact de la limitation obligatoire des services autres que d’audit sur
l’indépendance du réviseur d’entreprises et la qualité de l’audit
100%
67% 67%
80%
60% 33% 33%
40% Oui
20% Non
0%
Amélioration de la Amélioration de
qualité de l'audit l'indépendance du
réviseur
d'entreprises
63
À l’aide de cette figure, nous notons des avis mitigés concernant la limitation des services
non-audit au sein de notre panel.
Ils affirment qu’en Belgique, la liste limitative reprenant les sept prestations interdites et la
règle « one-to-one » ne font pas l’objet d’une contestation importante, cela provient sans
doute du fait que leurs fondements sont bien compris et respectés. Ils pensent dès lors qu’une
limitation encore plus restrictive pourrait davantage empêcher l’apparition de conflits
d’intérêts et assurer l’indépendance de l’auditeur.
D’après nos intervenants, les services remettant le plus en cause l’indépendance du réviseur
d’entreprises sont tous les services qui comportent un risque d’autorévision ; à savoir la
participation à l’élaboration des états financiers, l’évaluation des éléments des états financiers,
l’intervention dans la gestion, la tenue de la comptabilité de l’entité contrôlée, etc. Selon eux,
le service complémentaire représentant le plus de risques pour l’indépendance du
commissaire aux comptes est la participation à la gestion de l’entité contrôlée. Viennent
ensuite respectivement la prestation de services comptables et les services fiscaux.
Les opposants à cette restriction au sein de notre panel défendent l’idée que la prestation de
services autres que d’audit permet au commissaire aux comptes d’améliorer l’expertise qu’il a
de son client et donc d’effectuer un contrôle légal des comptes de meilleure qualité. De ce
fait, l’interdiction de fournir de tels services engendrerait une perte d’efficacité, de
complémentarité et de valeur ajoutée de l’audit.
De plus, il existe une polémique autour de cette mesure. Effectivement, l’un de nos
interlocuteurs déclare que les réviseurs d’entreprises sont susceptibles de s’organiser avec
leurs clients afin de contourner cette limitation.
64
Finalement, nos intervenants nous ont également fait part de leurs craintes concernant l’audit
de groupes internationaux. Effectivement, ils nous illustrent cet argument de la façon
suivante : imaginons qu’une entité internationale soit composée de plusieurs sociétés dans le
monde, dont quelques-unes en Europe. Rien qu’au sein de l’UE, le règlement européen
(règlement n° 537/2014, 2014) permet aux pays membres de renforcer les dispositions
énoncées concernant la limitation des services complémentaires en y ajoutant d’autres
prestations interdites non reprises dans ledit règlement. Si dans un pays la liste limitative est
importante, le réviseur d’entreprises devra se demander si cela vaut la peine de devenir le
cabinet de révision de ce groupe, car cela sera très difficile pour lui de décider s’il ne remettra
pas en cause son indépendance par rapport à l’ensemble du groupe contrôlé. Cependant, ces
difficultés vont à l’encontre de l’idée recherchée par ces EIP, qui est d’obtenir une cohérence,
une consistance dans l’approche et dans la qualité de l’audit et donc de faire appel à un seul
cabinet de révision pour l’ensemble du groupe.
Toutefois, être le commissaire aux comptes d’un groupe international reste possible, mais
risque d’être très couteux pour le cabinet de révision. Effectivement, cela va engendrer des
couts supplémentaires pour ce dernier, qui devra organiser un système de vérification des lois
des différents pays dans lesquels l’entité contrôlée est présente afin de s’assurer qu’il ne
compromettra pas son indépendance.
Une fois de plus, les opinions relatives à la limitation des services autres que d’audit des trois
membres des EIP se rejoignent. Ils estiment que cette mesure aura un impact positif sur
l’indépendance de l’auditeur ainsi que sur la qualité de l’audit.
Comme les professionnels du domaine de l’audit, nos interlocuteurs soulignent le fait que
lorsqu’un commissaire aux comptes fournit des services complémentaires à l’audit, il est
enclin à créer des conflits d’intérêts et à compromettre son indépendance. Le réviseur
d’entreprises ne peut être juge et partie, et la limitation des services non-audit sera notamment
utile à cette fin.
65
De plus, les membres des EIP mentionnent que la limitation plus stricte des services autres
que d’audit permettra aux cabinets d’audit de ne pas devenir trop dépendants de leur client,
car les honoraires relatifs à ces services sont très élevés. Cela impliquera que l’entité
contrôlée ne soit pas un client trop important du cabinet et qu’elle n’exerce donc pas
d’influence sur l’opinion de l’auditeur.
Un de nos intervenants reconnait tout de même que la prestation de services autres que
d’audit permet au commissaire aux comptes d’améliorer l’expertise qu’il a de son client et
donc d’effectuer un contrôle légal de comptes de meilleure qualité. Il se demande donc s’il est
nécessaire d’imposer une telle mesure ou s’il ne serait pas préférable de laisser à
l’appréciation de l’entité contrôlée de faire appel, ou non, au même réviseur pour certaines
missions.
Nous pensons que la limitation des services non-audit permettra de renforcer l’indépendance
du réviseur d’entreprises et d’améliorer la qualité de l’audit. Nous estimons en effet que
lorsqu’un réviseur d’entreprises effectue le contrôle légal des comptes d’une entreprise et
preste en même temps des services autres que d’audit pour cette entité, il court le risque de
remettre en cause son indépendance. Ceci peut s’expliquer par la notion de dépendance
économique, c’est-à-dire le fait que le commissaire aux comptes est susceptible d’accepter
des erreurs matérielles dans les états financiers étant donné les revenus importants liés aux
services non-audit.
66
7.5. Les solutions susceptibles d’améliorer l’indépendance du commissaire aux
comptes
Deux personnes interrogées estiment qu’il n’existe aucune autre solution susceptible
d’améliorer l’indépendance du réviseur d’entreprises. Ils déclarent que ce dernier doit en
toutes circonstances rester indépendant, quel que soit le mandat ou la mission qu’il effectue.
Ils ajoutent également qu’il existe assez de mesures permettant d’assurer l’indépendance de
l’auditeur au sein des législations européennes.
Toutefois, d’une manière générale, la plupart de nos intervenants ont donné leur avis sur la
question et ont proposé une solution leur semblant la plus appropriée. Par conséquent, nous
pouvons dire qu’il existe presque autant de solutions susceptibles d’améliorer cette
indépendance que de réviseurs ou professionnels ayant participé à notre étude. Ci-dessous,
nous allons vous faire part des différentes propositions émises par notre panel.
Tout d’abord, une des solutions évoquées serait de renforcer le contrôle de qualité réalisé par
l’IRE et d’effectuer un contrôle identique pour tous les cabinets de révision afin de garantir
une transparence et un audit de qualité.
Ensuite, l’ensemble de notre panel s’accorde pour dire qu’il est primordial de s’assurer qu’un
client ne représente pas une part trop importante des honoraires totaux du cabinet de révision.
Afin d’atteindre cet objectif, un de nos interlocuteurs propose l’introduction de barèmes
d’honoraires d’audit, ce qui demanderait une réforme complète de la profession. Il déclare
que cette introduction empêcherait la remise en cause de l’indépendance de l’auditeur, car il
lui serait impossible d’entretenir une relation malsaine de dépendance financière par rapport à
son client. Notre intervenant insiste sur le fait que même si la rotation externe des cabinets
diminue ce risque de dépendance, un renouvèlement de mandat est tout de même possible, ce
qui ne permet pas une indépendance financière totale.
67
savoir le contrôle légal, plutôt que d’obtenir un gain financier important. Cependant, il insiste
sur le fait qu’« il s’agit en réalité d’un vœu pieux ».
Mais encore, un expert déclare que l’opinion d’un second « partner » sur la fiabilité des
comptes de l’entité contrôlée et les mesures visant à la revue du dossier sont également des
solutions envisageables.
Selon plusieurs personnes interrogées, les aspects les plus importants afin d’assurer
l’indépendance de l’auditeur sont la formation, l’éthique et la personnalité du réviseur
d’entreprises. Ils déclarent que malgré l’existence de nombreuses normes et législations, les
notions d’esprit critique et d’objectivité ne sont pas toujours bien comprises. Par conséquent,
ils suggèrent plus de formations et de discours de professionnels au sein des cabinets d’audit
afin de transmettre l’idée qu’un réviseur d’entreprises doit à tout prix développer son état
d’esprit et organiser sa pensée de façon indépendante.
Les membres des EIP considèrent que la législation européenne a atteint un équilibre en ce
qui concerne les mesures permettant d’assurer l’indépendance de l’auditeur. Ils opinent que la
rotation externe et la limitation des honoraires relatifs aux services non-audit sont les
meilleures solutions à ce jour. Ils déclarent que tout élément mis en place afin de renforcer
l’indépendance de l’auditeur risque également de nuire à l’efficacité de l’audit.
L’un d’eux ajoute que malgré le fait que l’auditeur soit indépendant et le reste grâce à ces
différentes mesures, un problème persiste. D’après lui, le fait que le réviseur d’entreprises soit
payé par l’entité qu’il contrôle aura toujours des effets négatifs sur la qualité de l’audit. En
effet, le commissaire aux comptes est face à deux situations : client-fournisseur et auditeur-
audité. Il est donc susceptible de chercher à obtenir un gain financier important. Dès lors, il
propose que l’audit soit considéré comme un service public qui serait non plus financé par les
entreprises révisées, mais par l’État.
68
7.5.3. Analyse personnelle
Comme mentionné précédemment, nous estimons qu’il existe beaucoup de règles dans l’UE
visant à améliorer l’indépendance de l’auditeur et la qualité de l’audit. Il nous semble dès lors
difficile d’améliorer la situation actuelle.
Toutefois, nous désirons relever les solutions évoquées ci-dessus qui nous paraissent les plus
efficaces et les plus réalisables. Tout d’abord, nous pensons qu’un renforcement du contrôle
de qualité pourrait effectivement assurer un niveau élevé d’indépendance de la part du
réviseur d’entreprises.
Ensuite, l’opinion d’un second « partner » quant à la fiabilité des comptes de l’entité révisée
nous semble être un moyen efficace afin de confirmer l’indépendance complète du
commissaire aux comptes et d’améliorer la confiance des investisseurs.
Finalement, le plus important selon nous est de réaliser des formations portant sur les
concepts d’indépendance et d’éthique afin que ces notions soient bien assimilées par les
réviseurs d’entreprises.
69
70
8. DISCUSSION
L’analyse des différents points de vue explicités dans le chapitre antérieur, et exprimés par
différents intervenants quant aux divers thèmes faisant l’objet du présent mémoire, nous
permet de tirer certaines conclusions.
Premièrement, nous remarquons que depuis des années, les législateurs internationaux tentent
d’instaurer des mesures susceptibles de renforcer la confiance dans les marchés financiers et
d’assurer l’indépendance de l’auditeur. Cela est dû au fait que, selon eux, les scandales et
crises financières des dernières années ont permis de noter une faiblesse dans le marché de
l’audit et ont lancé un appel mondial afin de refaire le point sur l’efficacité de la profession.
Par conséquent, Michel Barnier propose en 2010, par le biais du Livre Vert, plusieurs
solutions visant à renforcer l’indépendance des réviseurs d’entreprises.
En revanche, les professionnels du domaine de l’audit et les membres des EIP ne partagent
pas cet avis et s’accordent pour dire qu’il n’y a actuellement aucun manque d’indépendance
réelle de la part de l’auditeur en Belgique. Ils soulignent qu’il existe d’ores et déjà de
nombreuses législations strictes dans notre pays permettant d’assurer cette indépendance et ils
craignent que l’introduction de mesures futures diminue la qualité de l’audit. Toutefois, les
membres des EIP reconnaissent l’importance des risques de compromettre l’indépendance de
l’auditeur. Dès lors, ils trouvent justifiable que l’UE désire mettre en place de nouvelles
mesures.
Ensuite, comme nous pouvons le constater dans le tableau ci-dessous, les académiciens,
réviseurs d’entreprises et membres d’EIP ne partagent en général pas le même avis
concernant l’introduction de la rotation externe obligatoire et de la limitation des services
non-audit.
71
Figure 7 : Mise en perspective de l’avis des académiciens et des praticiens
Indépendance
Renforcée Identique Renforcée Renforcée Renforcée Renforcée
du réviseur
Qualité de
Diminuée Diminuée Identique Renforcée Renforcée Renforcée
l’audit
En effet, les résultats de notre recherche qualitative suggèrent que l’introduction de ces deux
mesures peut entrainer à la fois un effet positif et négatif sur l’indépendance du réviseur
d’entreprises et sur la qualité de l’audit ; tout dépend de la personne interrogée et de la règle
évoquée.
D’une part, alors que la plupart des recherches littéraires et des réviseurs d’entreprises
semblent opposés à la rotation externe obligatoire, les membres des EIP rencontrés sont
persuadés que son instauration améliorera l’indépendance du réviseur d’entreprises, mais
n’évoquent aucune incidence spécifique sur la qualité de l’audit.
Les menaces sont nombreuses quant à la rotation externe. Elles ont notamment été énoncées
dans notre revue littéraire et lors de nos interviews avec les réviseurs d’entreprises. Certaines
d’entre elles ont également été évoquées par les membres des EIP que nous avons rencontrés,
mais avec moins d’insistance. Ils soutiennent l’idée que la rotation des cabinets de révision
entrainera plusieurs conséquences : une perte de connaissance spécifique du client, un surcroit
de travail pour les deux parties, une perte de rentabilité pour les commissaires aux comptes,
une augmentation conséquente des couts pour les cabinets d’audit et l’entité révisée, le risque
d’une moindre qualité de l’audit durant les deux premières années de mandat suivant la
rotation, ainsi qu’une amplification de la concentration du marché. En résumé, ils estiment
que la qualité de l’audit sera affaiblie par cette mesure.
72
Cependant, les membres des EIP mentionnent davantage d’opportunités que de menaces
engendrées par l’introduction de cette mesure. Ils soutiennent l’idée que cette dernière
améliorera l’indépendance du réviseur d’entreprises.
Effectivement, à l’instar des législateurs, ils affirment qu’un long mandat d’audit permet le
développement des relations trop étroites entre le réviseur d’entreprises et son client, ce qui
peut avoir une incidence sur l’indépendance du commissaire aux comptes. De plus, ils
estiment que les commissaires aux comptes sont intéressés, dû à des motivations
économiques, de conserver le client, et par conséquent seraient susceptibles d’émettre une
opinion biaisée dans le rapport d’audit. Selon eux, la rotation des cabinets de révision
permettra d’un côté de mettre un terme à cette connivence créée au fil des années entre
l’auditeur et l’entreprise révisée.
Par ailleurs, les membres des EIP mentionnent que le réviseur d’entreprises ressentira
l’obligation d’effectuer son travail avec intégrité et objectivité, sachant qu’il sera suppléé par
un autre commissaire aux comptes. En outre, ils évoquent que la rotation externe leur
permettra de profiter de l’expérience que les réviseurs d’entreprises ont acquise dans d’autres
sociétés.
Finalement, comme l’ont exprimé certains professionnels actifs dans le domaine de l’audit,
l’introduction de cette mesure apportera un regard neuf et neutre de la part du réviseur
d’entreprises entrant.
D’autre part, les observations sont plus homogènes en ce qui concerne l’impact de la
limitation des services non-audit. En effet, toutes les personnes interrogées ainsi que la
plupart des académiciens estiment que cette mesure aura un impact positif sur l’indépendance
du réviseur d’entreprises et sur la qualité de l’audit.
Ils défendent unanimement l’idée que la prestation de services autres que d’audit par un
réviseur d’entreprises à une entité pour laquelle il est également commissaire aux comptes
peut engendrer des conflits d’intérêts et nuire à son indépendance. Cette limitation plus
restrictive des services non-audit écartera le risque de dépendance financière entre les cabinets
d’audit et commissaires aux comptes, et leur client.
73
Toutefois, comme les académiciens, nos interlocuteurs estiment que la prestation de services
autres que d’audit permet au commissaire aux comptes d’améliorer la connaissance qu’il a du
client et donc d’effectuer un audit de meilleure qualité.
74
CONCLUSION GENERALE
Les données exposées dans la revue théorique et recueillies lors des deux étapes de notre
partie pratique nous ont permis d’apporter des éléments de réponse aux hypothèses
émises précédemment.
D’une part, notre revue littéraire ainsi que notre partie pratique, et plus particulièrement nos
rencontres avec les membres des EIP, révèlent que la rotation externe obligatoire améliorera
l’indépendance de l’auditeur. En effet, l’introduction de cette mesure permettra de casser les
liens trop intimes créés au fil du temps entre le réviseur d’entreprises et l’entité auditée. Cette
opportunité a également été exprimée par l’un des réviseurs d’entreprises que nous avons
contactés. Toutefois, selon lui, la rotation externe ne pourra qu’améliorer l’indépendance
perçue du réviseur d’entreprises, car l’indépendance réelle est un état d’esprit qui n’est pas
perfectible. En outre, ce dernier se verra disposé à assurer son indépendance, sachant qu’il
sera remplacé par un autre cabinet de révision. Par ailleurs, la rotation externe diminuera la
dépendance économique du réviseur d’entreprises par rapport à son client.
D’autre part, nos recherches nous dévoilent que la qualité de l’audit sera diminuée suite à
l’introduction de la rotation externe obligatoire. En effet, les résultats relatifs à l’introduction
de la rotation obligatoire des cabinets de révision dans certains pays ne sont pas convaincants
en ce qui concerne la qualité de l’audit. De plus, l’analyse de nos parties théoriques et
pratiques révèle qu’il existe énormément de menaces pesant sur la qualité de l’audit,
engendrées par cette mesure. Les principales menaces évoquées sont les suivantes : la perte de
la connaissance spécifique du client, le surcroit considérable de travail afin d’obtenir une
qualité de l’audit raisonnable, la fréquence plus élevée d’échecs d’audit, liée à la courbe
d’apprentissage, ainsi que l’augmentation conséquente des couts. Toutefois, nous tenons à
insister sur le fait que tous nos interlocuteurs ont mentionné le regard neuf apporté par la
rotation externe à la mission légale.
75
Quant à l’hypothèse 2, « les couts engendrés par la rotation externe sont plus importants que
les bienfaits qu’elle peut apporter », elle ne peut pas être réellement affirmée. En effet, tous
les acteurs interrogés s’accordent pour dire que l’augmentation des couts sera considérable
durant les deux premières années du mandat dans une nouvelle entité. De plus, d’après nos
analyses des résultats de diverses études concernant la situation dans les pays ayant déjà
adopté cette mesure, les bénéfices engendrés par cette rotation seront d’une moindre
importance que l’augmentation des couts. Toutefois, nous ne sommes pas en mesure de
confirmer une telle hypothèse à l’échelle européenne. De fait, étant donné que les États
membres de l’UE n’ont pas encore appliqué cette mesure, il est difficile de prouver que les
couts seront effectivement supérieurs aux opportunités engendrées. Nous désirons insister sur
le fait que selon les académiciens, les couts supplémentaires générés par les heures
additionnelles effectuées par les cabinets de révision seront transmis au client. Cependant,
d’après les professionnels du domaine de l’audit et les membres des EIP, ces couts
accessoires rencontrés par le cabinet d’audit ne seront pas répercutés sur les honoraires de son
client. Nous rejoignons cet avis, car nous pensons également qu’au vu de la concurrence sur
le marché de l’audit, les cabinets de révision reverront leurs honoraires à la baisse afin
d’acquérir le plus de mandats possible.
Enfin, nous pouvons également confirmer l’hypothèse 4, à savoir : « il existe un lien de cause
à effet entre la limitation des services non-audit et une meilleure qualité de l’audit ».
76
Effectivement, malgré le fait que les résultats des deux études sur la limitation des services
non-audit démontrent essentiellement que la prestation de ces services pourrait améliorer
l’expertise que le commissaire aux comptes a de son client, la plupart de nos recherches
théoriques et pratiques se révèlent en faveur de cette limitation afin de garantir
l’indépendance de l’auditeur. Même si les académiciens, réviseurs d’entreprises et membres
des EIP évoquent l’amélioration de la connaissance de l’entité contrôlée, ils insistent sur le
fait que lorsqu’un réviseur d’entreprises responsable de l’audit d’une entité lui fournit
également des services non-audit, il court le risque de se trouver en situation de conflit
d’intérêts et de compromettre son indépendance. Ils mentionnent notamment que la prestation
de services comportant un risque d’autorévision remet très fort en cause l’indépendance du
réviseur d’entreprises et que la dépendance financière du cabinet de révision vis-à-vis de son
client pourrait encourager le commissaire aux comptes à accepter plus facilement des erreurs
matérielles dans les états financiers. Dès lors, la limitation plus stricte des services autres que
d’audit permettra d’éviter ces deux menaces susceptibles de compromettre.
Nous répondrons en deux temps à la question : « Dans quelles mesures la rotation externe des
cabinets d’audit et la limitation des services autres que d’audit amélioreraient-elles
l’indépendance de l’auditeur et la qualité de l’audit ? »
D’une part, nous pensons que la rotation externe des cabinets d’audit renforcera
l’indépendance réelle et l’indépendance perçue du réviseur d’entreprises, mais risquera de
diminuer la qualité de l’audit. D’autre part, la limitation des services non-audit permettra,
selon nous, d’améliorer à la fois l’indépendance du commissaire aux comptes et la qualité de
l’audit.
Au terme de nos recherches, nous estimons d’une manière générale que le Livre Vert de
la CE ainsi que le règlement et la directive de 2014 ne se justifient pas. Même si les
membres des EIP que nous avons rencontrés s’accordent pour dire que l’introduction de
mesures supplémentaires est désirable afin d’assurer l’indépendance de l’auditeur, les
académiciens, les réviseurs d’entreprises et les professionnels du domaine de l’audit
77
déclarent qu’il n’y a actuellement aucun manque d’indépendance réelle de la part du
réviseur d’entreprises. Ils ajoutent qu’il existe d’ores et déjà de nombreuses législations
strictes permettant d’assurer cette indépendance dans notre pays. Ils font notamment référence
à la rotation interne des associés principaux et à la règle one-to-one. De plus, ils évoquent que
les incitations du commissaire aux comptes pour protéger sa réputation sont des mesures
supplémentaires pour le maintien de son indépendance. Certes, les règles sont essentielles afin
de réguler la profession de l’audit et de règlementer le principe d’indépendance, mais il
semble que ce secteur a tiré bon nombre d’enseignements suite aux crises des dernières
années. Il parait dès lors difficile d’améliorer la situation actuelle afin d’assurer davantage
l’intégrité du réviseur d’entreprises.
Lors de nos différentes rencontres, nos interlocuteurs ont tout de même recommandé d’autres
solutions susceptibles d’améliorer l’indépendance de l’auditeur. Ils ont notamment évoqué le
renforcement du contrôle de qualité réalisé par l’IRE, l’opinion d’un second « partner » quant
à la fiabilité des comptes de l’entité contrôlée, les formations relatives au principe
d’indépendance du réviseur d’entreprises, ou encore le fait que l’audit devienne un service
public qui serait non plus financé par les entreprises révisées, mais par l’État.
Les conclusions du présent travail résultent d’une combinaison de nos analyses théorique et
pratique. Toutefois, ces résultats doivent être interprétés prudemment compte tenu d’une part
de la taille relativement petite de notre échantillon, et d’autre part, que les divers arguments
évoqués ne sont que des suppositions qui pourront être confirmées ou infirmées dès que la
rotation externe et la limitation des services non-audit seront applicables dans l’UE. Nous
désirons tout de même signaler que selon les résultats de notre recherche empirique, la
rotation obligatoire occasionnera des effets néfastes sur la qualité de l’audit sur le marché
belge. Par conséquent, nous recommandons à certains organismes de poursuivre cette enquête
suite à l’introduction de cette mesure afin d’en confirmer les premiers résultats.
Grâce à la réalisation de ce travail de fin d’études, nous avons eu la chance de développer nos
connaissances personnelles sur les sujets de la rotation externe obligatoire et sur la limitation
des services non-audit, qui étaient auparavant des concepts dont nous possédions une
compréhension limitée.
78
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février 2001.
87
• Arrêté royal du 25 aout 2012, modifiant les articles 17, 37 et 53 de la loi du 27 juin
1921 sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but
lucratif et les fondations.
• Loi du 17 décembre 2008, instituant notamment un comité d’audit dans les sociétés
cotées et les entreprises financières.
88
• Règlement n° 537/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014, relatif
aux exigences spécifiques applicables au contrôle légal des comptes des entités
d'intérêt public et abrogeant la décision (CE) n° 2005/909 de la Commission,
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89
• Monsieur Didier De Sorgher, contacté le 02 mai 2016.
Directeur financier
Groupe Spadel
Avenue des Communautés, 110
1200 Woluwé-Saint-Lambert
90
• Madame Marie-Laure Moreau, rencontrée le 8 avril 2016.
Réviseur d’entreprises, Partner
Ernst & Young Réviseurs d'Entreprises
Boulevard d’Avroy, 38
4000 Liège
91
• Monsieur Thierry Dupont, contacté le 25 avril 2016.
Vice-Président de l’IRE du 26 avril 2013 au 22 avril 2016 et Président de l’IRE depuis
cette date
Boulevard Emile Jacqmain 135/1
1000 Bruxelles
92
TABLE DES ANNEXES
93
94
Annexe I : Article 17 du règlement n° 537/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16
avril 2014
Article 17
1. Une entité d'intérêt public désigne un contrôleur légal des comptes ou cabinet d'audit
pour une mission initiale d'au moins un an. La mission peut être reconduite.
Ni la mission initiale d'un contrôleur légal des comptes ou cabinet d'audit donné, ni celle-ci
combinée avec les éventuelles missions reconduites ne peuvent durer au total plus de dix ans.
b) fixer une durée maximale inférieure à dix ans pour les missions visées au paragraphe 1,
deuxième alinéa.
a) vingt ans lorsqu'une procédure d'appel d'offres public pour le contrôle légal des comptes est
menée conformément à l'article 16, paragraphes 2 à 5, et prend effet à l'expiration des durées
maximales visées au paragraphe 1, deuxième alinéa, et au paragraphe 2, point b) ; ou
b) vingt-quatre ans lorsque, après l'expiration des durées maximales visées au paragraphe 1,
deuxième alinéa, et au para- graphe 2, point b), plusieurs contrôleurs des comptes ou cabinets
95
d'audit sont simultanément engagés, à condition que le contrôle légal des comptes aboutisse à
la présentation d'un rapport d'audit conjoint, visé à l'article 28 de la directive 2006/43/CE.
7. Les associés d'audit principaux chargés de la réalisation du contrôle légal des comptes
cessent de participer au contrôle légal des comptes de l'entité sept ans au plus tard à compter
de la date de leur désignation. Ils ne peuvent participer à nouveau au contrôle légal des
comptes de l'entité contrôlée avant l'expiration d'un délai de trois ans après cette cessation.
Par dérogation, les États membres peuvent exiger que les associés d'audit principaux chargés
de la réalisation du contrôle légal des comptes cessent de participer au contrôle légal des
comptes de l'entité contrôlée plus tôt que sept ans à compter de la date de leur désignation
respective.
Le contrôleur légal des comptes ou cabinet d'audit doit pouvoir démontrer à l'autorité
96
compétente que ce mécanisme est bien appliqué et adapté à la taille et à la complexité de son
activité.
8. Aux fins du présent article, la durée de la mission d'audit est calculée à compter du
premier exercice sur lequel porte la lettre de mission d'audit dans laquelle le contrôleur légal
des comptes ou cabinet d'audit a été désigné pour la première fois pour effectuer des contrôles
légaux consécutifs des comptes de la même entité d'intérêt public.
Aux fins du présent article, le cabinet d'audit doit comprendre d'autres cabinets dont il a fait
l'acquisition ou qui ont fusionné avec lui.
S'il existe une incertitude quant à la date à laquelle le contrôleur légal des comptes ou le
cabinet d'audit a commencé à effectuer des contrôles légaux consécutifs des comptes de
l'entité d'intérêt public, par exemple en raison de fusions, d'acquisitions ou de changements
dans la structure du capital, le contrôleur légal des comptes ou le cabinet d'audit informe
immédiatement l'autorité compétente de ces incertitudes, laquelle détermine en dernier lieu la
date applicable aux fins du premier alinéa.
97
98
Annexe II : Article 183 ter de l’arrêté royal du 20 janvier 2001 énumérant les sept prestations
remettant en cause l’indépendance du commissaire aux comptes
99
100
Annexe III : Article 5 du règlement n° 537/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16
avril 2014
Article 5
1. Le contrôleur légal des comptes ou le cabinet d'audit procédant au contrôle légal des
comptes d'une entité d'intérêt public, ou tout membre du réseau dont fait partie le contrôleur
légal des comptes ou le cabinet d'audit, ne fournissent pas, directement ou non, à l'entité
contrôlée, à son entreprise mère ou aux entreprises qu'elle contrôle dans l'Union des services
autres que d'audit interdits:
Aux fins du présent article, les services autres que d'audit interdits sont:
101
vii) la fourniture de conseils fiscaux ;
f) les services d'évaluation, notamment les évaluations réalisées en rapport avec les
services actuariels ou les services d'aide en cas de litige ;
iii) l'exercice d'un rôle de défenseur dans le cadre de la résolution d'un litige ;
i) les services liés au financement, à la structure, ainsi qu'à l'allocation des capitaux et
à la stratégie d'investissement de l'entité contrôlée, sauf en ce qui concerne la
fourniture de services d'assurance en rapport avec les états financiers, telle que
l'émission de lettres de confort en lien avec des prospectus émis par l'entité contrôlée ;
2. Les États membres peuvent interdire des services autres que ceux énumérés au paragraphe
1 lorsqu'ils considèrent que lesdits services présentent un risque en matière d'indépendance.
Ils communiquent à la Commission tout ajout à la liste figurant au paragraphe 1.
3. Par dérogation au paragraphe 1, deuxième alinéa, les États membres peuvent autoriser la
fourniture des services visés aux points a) i), a) iv) à a) vii) et au point f), à condition que les
exigences suivantes soient respectées:
a) ils n'ont pas d'effet direct ou ont un effet peu significatif, séparément ou dans leur
ensemble, sur les états financiers contrôlés ;
b) l'appréciation de l'effet sur les états financiers contrôlés est documenté et expliqué
de manière complète dans le rapport complémentaire destiné au comité d'audit, visé à
l'article 11 ; et
4. Un contrôleur légal des comptes ou un cabinet d'audit procédant aux contrôles légaux des
comptes d'entités d'intérêt public et, lorsque le contrôleur légal des comptes ou le cabinet
d'audit fait partie d'un réseau, tout membre de ce réseau, peuvent fournir à l'entité contrôlée, à
son entreprise mère ou aux entreprises qu'elle contrôle des services autres que d'audit
différents des services autres que d'audit interdits visés aux paragraphes 1 et 2 sous réserve
que le comité d'audit donne son approbation après avoir analysé correctement les risques en
matière d'indépendance et les mesures de sauvegarde appliquées conformément à l'article 22
ter de la directive 2006/43/CE. Le comité d'audit émet des lignes directrices, le cas échéant,
en ce qui concerne les services visés au paragraphe 3.
Les États membres peuvent établir des règles plus strictes fixant les conditions dans lesquelles
un contrôleur légal des comptes, un cabinet d'audit ou un membre d'un réseau dont fait partie
le contrôleur légal des comptes ou le cabinet d'audit peut fournir à l'entité contrôlée, à son
103
entreprise mère ou aux entreprises qu'elle contrôle des services autres que d'audit différents
des services autres que d'audit interdits visés au paragraphe 1.
5. Lorsqu'un membre d'un réseau auquel appartient le contrôleur légal des comptes ou le
cabinet d'audit procédant au contrôle légal des comptes d'une entité d'intérêt public fournit
l'un des services autres que d'audit, visés aux para- graphes 1 et 2, à une entreprise enregistrée
dans un pays tiers et soumise au contrôle de l'entité d'intérêt public contrôlée, le contrôleur
légal des comptes ou le cabinet d'audit concerné apprécie si son indépendance serait
compromise par cette prestation de services du membre du réseau.
Si son indépendance est compromise, le contrôleur légal des comptes ou le cabinet d'audit
prend, le cas échéant, des mesures de sauvegarde afin d'atténuer les risques causés par cette
prestation de services dans un pays tiers. Le contrôleur légal des comptes ou le cabinet d'audit
ne peut continuer d'effectuer le contrôle légal des comptes de l'entité d'intérêt public que s'il
peut justifier, conformément à l'article 6 du présent règlement et à l'article 22 ter de la
directive 2006/43/CE, que cette prestation de services n'influe pas sur son jugement
professionnel ni sur le rapport d'audit.
104
Annexe IV : Questionnaire destiné aux réviseurs d’entreprises
Sophie MARQUET
2015-2016 HEC-ULg
smarquet@student.ulg.ac.be
0479/85.86.43
La question de recherche de ce travail de fin d’études est la suivante : « Dans quelles mesures
la rotation externe des cabinets d’audit et la limitation des services non-audit amélioreraient-
elles l’indépendance de l’auditeur et la qualité de l’audit pour les entités d’intérêt public ? »
Questionnaire
105
3. Quelles seraient, selon vous, les différentes conséquences de la rotation des cabinets
sur votre entreprise ?
5. Quelle est, selon vous, la supériorité moyenne des couts de la première année d’un
mandat d’un nouveau client par rapport aux années ultérieures ?
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8. Quels sont les services non-audit remettant le plus en cause l’indépendance de
l’auditeur ?
107
108
Annexe V : Questionnaire destiné aux entités d’intérêt public
Sophie MARQUET
2015-2016 HEC-ULg
smarquet@student.ulg.ac.be
0479/85.86.43
La question de recherche de ce travail de fin d’études est la suivante : « Dans quelles mesures
la rotation externe des cabinets d’audit et la limitation des services non-audit amélioreraient-
elles l’indépendance de l’auditeur et la qualité de l’audit pour les entités d’intérêt public ? »
Questionnaire
109
3. Après combien d’années changez-vous d’auditeur ? Et pour quelles raisons ?
6. Quelles sont selon vous les opportunités et les menaces que va engendrer la rotation
pour votre entreprise ?
110
7. Pensez-vous que les couts engendrés par la rotation des cabinets seront plus
importants pour votre entreprise ? Si oui, pour quelles raisons ?
8. Etes-vous pour ou contre la limitation des services non-audit dans le but d’améliorer la
qualité de l’audit ? Expliquez votre point de vue.
111
EXECUTIVE SUMMARY
The audit efficiency has been reconsidered since scandals came to light, such as Enron (2001)
and WorldCom (2002), along with the 2008 financial crisis, which also rose awareness about
the topic. Therefore, several countries have tried to establish measures in order to improve
auditor independence and audit quality.
This master thesis, entitled “To what extent would the mandatory audit firm rotation and the
limitation of non-audit services improve the auditor independence and the audit quality?”,
analyses theses various outlooks in order to determine threats and opportunities resulting from
these two measures. In other words, this survey evaluates the real efficiency of mandatory
audit firm rotation and the limitation of non-audit services in the European Union.
After clarifying different theoretical aspects, we will go deeper into the topic through
interviews with auditors and specialists in order to compare the theoretical part to the field.
On the basis of theoretical and practical analysis, our findings show that these measures
would have different impact on auditor independence and audit quality. On the one hand, the
mandatory audit firm rotation would strengthen auditor independence but would likely reduce
audit quality. Indeed, threats linked to this measure are legion and they might jeopardize audit
quality. On the other hand, the limitation of non-audit services would improve both auditor
independence and audit quality.