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L'ANALYSE STRATÉGIQUE ET LA CONFIGURATION DE VALEUR

Xavier Lecocq et Saïd Yami

Lavoisier | « Revue française de gestion »

2004/5 no 152 | pages 45 à 65


ISSN 0338-4551
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2004-5-page-45.htm
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O R G A N I S AT I O N S
PAR XAVIER LECOCQ,
SAÏD YAMI

L’analyse stratégique
et la configuration
de valeur
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Dans cette recherche

L’
étude des interactions concurrentielles entre
les auteurs analysent
firmes est souvent considérée comme un élé-
la validité des modèles
stratégiques traditionnels
ment central dans la recherche en manage-
dans l’analyse de la réalité ment stratégique. Aussi, la stratégie est essentiellement
économique actuelle, abordée comme une question de relation à la concur-
caractérisée par les rence, puisque « les firmes, voire toutes les organisa-
réseaux de coopération
tions, sont en concurrence, en concurrence pour les
interorganisationnels, la
concurrence multimarché et
inputs, en concurrence pour les clients et finalement, en
l’intervention des autorités concurrence pour des revenus qui couvrent le coût de
de régulation. Ils proposent leur survie » (Rumelt et al., 1991, p. 6). Cependant, le
de concevoir la développement des réseaux interorganisationnels a
configuration de valeur amené les auteurs à s’intéresser au processus coopéra-
(les interdépendances
tif. Les récentes contributions en management straté-
génératrices ou non de
valeur pour une entreprise
gique sur les réseaux interorganisationnels ont bien sou-
donnée) dans un champ vent proposé des réflexions sur le choix des partenaires
organisationnel. À cet dans les alliances, le management des coopérations ou
égard, ils identifient quatre encore l’apprentissage entre partenaires comme source
rôles tenus par les
d’avantage concurrentiel. Cet intérêt pour les interac-
organisations (facilitateur,
complément, parasite et
tions concurrentielles, d’une part, et pour les interac-
substitut) en fonction des tions entre partenaires, d’autre part, mène à une dicho-
interdépendances et de tomie dans la littérature du champ, au regard de
l’influence, en termes de contributions qui s’inscrivent généralement soit dans
création de valeur, vis-à-vis une perspective concurrentielle, soit dans une perspec-
d’une entreprise focale.
46 Revue française de gestion

tive coopérative. En effet, les auteurs qui se tions organisationnelles et l’émergence du


sont interrogés sur la nécessité d’un renou- paradigme du réseau en management straté-
veau des paradigmes stratégiques l’ont fait gique, et portons une attention particulière
le plus souvent dans une logique coopéra- aux limites des modèles stratégiques tradi-
tive, en proposant le niveau de la dyade ou tionnels pour une analyse projective dans
du réseau comme le plus pertinent pour l’environnement des organisations. Dans
comprendre la création de rentes par les une seconde partie, en partant d’une inter-
entreprises (par exemple, Dyer et Singh, rogation sur les limites du vocabulaire stra-
1998). Si l’apport de ces travaux est indé- tégique traditionnel pour rendre compte des
niable, puisque ces derniers mettent en réalités économiques actuelles, nous propo-
exergue l’intérêt des partenariats pour l’ac- sons de passer de la notion de chaîne de
quisition des ressources pertinentes valeur à celle de configuration de valeur et
(Afuah, 2000) ou pour la création de nous posons les prémisses d’un modèle
« rentes relationnelles », force est de d’analyse stratégique.
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constater que ce changement de perspec-
tive (le passage d’une logique de concur- I. – LES INTERACTIONS
rence à celle de partenariat) inscrit et INTERORGANISATIONNELLES
enferme les entreprises dans un modèle ET L’ANALYSE STRATÉGIQUE
coopératif limitant du même coup le champ
et la portée de l’analyse stratégique. 1. L’émergence du paradigme du réseau
L’objectif de cet article est de s’interroger Si la concurrence est un phénomène étudié
sur la pertinence des modèles stratégiques depuis bien longtemps1, l’idée de coopéra-
actuels dans une économie caractérisée par tion s’est tout d’abord développée en éco-
les réseaux interorganisationnels, mais nomie, notamment avec l’émergence de la
également par la concurrence multimar- théorie des jeux coopératifs, sous l’angle de
ché, l’hypercompétition ou encore l’inter- la collusion et des pratiques jugées anti-
vention d’autorités de régulation ou de concurrentielles, limitant le processus de
groupes de pression dans un contexte glo- destruction créatrice à la base de la dyna-
balisé. On peut en effet constater que les mique du capitalisme. De même, en straté-
réflexions portant sur la stratégie des orga- gie, les auteurs ont, dans un premier temps,
nisations se limitent généralement aux essentiellement envisagé le processus de
interactions (concurrentielles ou coopéra- compétition entre entreprises jusqu’à
tives) entre entreprises. Nous pensons l’émergence de la problématique des
qu’il est nécessaire, pour l’analyse straté- réseaux interorganisationnels en théorie des
gique, d’aller au-delà de celles-ci en pre- organisations (Emery et Trist, 1965). En
nant en compte les interdépendances entre effet, comme le souligne Fréry (2001), les
organisations. logiques de réseau d’entreprises ont amené
Afin d’étayer notre argument, nous abor- à reconsidérer la scission traditionnelle
dons dans une première partie les interac- entre théorie des organisations et stratégie.

1. On oublie souvent que l’idée de concurrence a été abordée par Smith (1776) au sens de rivalité (voir Stigler, 1957)
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 47

Dans cette logique de réseau, « la structure le réseau comme une « unité multiple » ;
n’est plus seulement le reflet de la stratégie, c’est-à-dire à prendre conscience de la
elle en devient également le support » nécessité de considérer l’inscription de l’en-
(Fréry, 2001, p. 27). Pour de nombreux treprise dans un ou plusieurs réseaux inter-
auteurs (par exemple, Miles et Snow, 1986), organisationnels mais également l’indépen-
et dans la lignée d’Emery et Trist (1965), dance de celle-ci, à un autre niveau, lorsqu’il
c’est l’accroissement de la turbulence, et s’agit de décrire son environnement et d’éla-
par là même de l’incertitude, qui est à l’ori- borer les choix stratégiques fondamentaux.
gine de ce changement de point de vue, Cette complexité soulève alors la question
menant les entreprises à envisager d’autres de la pertinence des modèles stratégiques
formes d’interactions que la rivalité, et actuels pour analyser l’environnement d’une
notamment la coopération. De nouvelles entreprise dans une économie caractérisée
représentations des relations interorganisa- par la complexité des interactions et des
tionnelles donnant lieu à des formes d’orga- interdépendances.
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nisation réticulaires étudiées sous diffé-
rentes appellations sont directement issues 2. Les principaux modèles d’analyse
de ces bouleversements. stratégique et leurs limites
Cet intérêt récent pour la notion de réseau a Le paradigme du réseau est entré de plain-
été identifié par Boltanski et Chiapello pied en stratégie puisque ces dernières
(1999). Dans leur étude sur l’évolution de la années marquent l’orientation de celle-ci
littérature managériale destinée aux cadres vers des logiques relationnelles où alliances
entre les années 1960 et les années 1990, ils et coopérations viennent supplanter les stra-
constatent que les publications dans les tégies concurrentielles (Durieux et alii,
années 1990 sont centrées sur le modèle du 2000). Les modèles stratégiques ont accom-
réseau. La littérature managériale, considé- pagné cette évolution passant d’un modèle
rée comme l’expression normative du capi- dominant, qui considère essentiellement la
talisme, amène les dirigeants à accepter et à rivalité, à des modèles qui abordent unique-
diffuser à leur tour ce modèle, plongeant ment la dimension coopérative (les
toujours un peu plus leur entreprise dans le approches relationnelles). Toutefois, l’ap-
paradigme du réseau. Comme l’affirme proche fondée sur les ressources (Resources
Castells (1998), la logique de réseau qui se Based View) mobilisée dans un premier
généralise est un changement fondamental temps pour fournir une nouvelle vision de
car, pour la première fois dans l’histoire, la rivalité, tend de plus en plus à être mobi-
l’unité première de l’organisation écono- lisée dans le cadre des relations partena-
mique n’est pas un sujet, ni individuel (tel riales. Nous nous attardons ici sur trois
que l’entrepreneur) ni collectif (tel que la modèles stratégiques dominants qui per-
classe capitaliste, la firme ou l’État). Cette mettent d’expliquer la performance2 des
considération, centrale et pourtant large- entreprises : l’approche de l’économie
ment mésestimée dans la littérature des industrielle, l’approche fondée sur les res-
sciences de gestion, nous amène à envisager sources (RBV), et l’approche relationnelle,

2. Car c’est bien là l’objectif de la stratégie selon Rumelt (1991).


48 Revue française de gestion

née d’une critique des deux premières. Cha- limitée à l’imitation du leader ou à la
cun de ces cadres a eu un impact important recherche de l’intégration permettant
en stratégie. Nous soulevons leurs apports d’augmenter la taille de la firme et du même
et leurs limites pour la construction d’un coup son pouvoir de négociation. Ensuite,
modèle d’analyse stratégique dans un parce que le secteur constitue de moins en
contexte internationalisé marqué par les moins l’unité pertinente pour l’analyse stra-
réseaux interorganisationnels et la concur- tégique. La nécessité d’intégrer à l’analyse
rence multimarché. stratégique les syndicats et associations
professionnelles ou encore les divers orga-
L’approche de l’économie industrielle nismes de régulation et les groupes de pres-
L’approche de l’économie industrielle, et sion invite à une lecture de l’environnement
notamment celle de Porter, situe son ana- qui ne se limite pas aux seules entreprises
lyse au niveau du secteur. Ainsi, Porter d’un secteur et aux pouvoirs publics. De
(1980) distingue cinq forces concurren- plus, on peut se demander si les frontières
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tielles 3 et propose le concept de « rivalité du secteur ne constituent pas, aujourd’hui,
élargie ». Cette concurrence génère l’af- une barrière à l’intelligence stratégique des
frontement entre les différentes parties en organisations. Peut-on encore différencier
présence et seule cette relation est envisa- distinctement les secteurs de l’informa-
gée4. En 1985, Porter va développer une tique, de l’audiovisuel ou des télécommuni-
analyse embryonnaire des relations interor- cations ? Ajoutons que les entreprises sont
ganisationnelles en intégrant à son modèle parfois impliquées dans différents réseaux
les relations d’interdépendance en amont et interorganisationnels relevant d’activités
en aval générées par la création de valeur. Il complètement différentes. Un prestataire
développe alors les notions de « chaîne de logistique peut être à la fois le partenaire
valeur » et de « système de valeur »5. Les d’un fabricant automobile et d’une carrière
coalitions interentreprises sont alors un de minerai. Ainsi, il convient d’exploiter les
moyen d’agir sur le pouvoir de négociation apports considérables de l’économie indus-
des clients et des fournisseurs. Cependant, trielle tout en cherchant à dépasser les
malgré ses apports indéniables, ce modèle limites de ce modèle pour l’analyse straté-
ne favorise pas une analyse stratégique per- gique dans le contexte économique actuel.
mettant d’identifier les gisements de perfor- Porter a ainsi mis l’accent sur les interdé-
mance dans un environnement structuré en pendances entre entreprises, en montrant
réseaux. D’abord parce que, dans le cadre par exemple l’importance des produits de
porterien, l’environnement y est donné. La substitution dans la performance d’une
structure du secteur détermine largement la firme. Cependant, le niveau d’analyse sur
stratégie des entreprises et la marge de lequel il s’attarde (le secteur) s’avère
manœuvre de ces dernières est bien souvent aujourd’hui insuffisant face aux nouvelles

3. La rivalité entre les concurrents présents sur le marché, le pouvoir de négociation des clients, le pouvoir de négo-
ciation des fournisseurs, la menace des produits de substitution, les entrants potentiels.
4. Comme le note Koenig (1996), Porter ne fait aucune allusion aux pratiques de coopération dans son ouvrage de
1980, ce n’est qu’en 1986 que plusieurs chapitres de l’ouvrage qu’il coordonne abordent les coalitions.
5. Cette dernière, intégrant la valeur créée par les fournisseurs et les distributeurs.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 49

réalités stratégiques des organisations La capacité de projection est ici relative-


(concurrence multimarché, réseaux interor- ment faible puisque l’analyse se réduit à
ganisationnels, multiplication des associa- identifier les ressources détenues ou non
tions professionnelles de régulation). par le réseau. Les options stratégiques
concernent donc uniquement la définition
L’approche fondée sur les ressources des frontières du réseau (Faut-il intégrer un
L’approche fondée sur les ressources consi- nouveau partenaire qui dispose de res-
dère, quant à elle, que l’entreprise, plus que sources dont le réseau ne dispose pas ?). Le
l’industrie, constitue le niveau pertinent modèle risque alors de ne plus permettre la
d’analyse pour expliquer la performance prise en compte de l’autonomie stratégique
(Barney, 1991 ; Rumelt, 1984 ; Wernerfelt, des entreprises ; ce qui, paradoxalement,
1984). L’organisation est réhabilitée en tant remet en cause le niveau d’analyse retenue
qu’acteur. Dans cette perspective, les firmes par l’approche fondée sur les ressources.
sont capables d’accumuler des ressources et
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des compétences qui se transforment en L’approche relationnelle
avantage sur les concurrents si elles sont Cette approche (Dyer et Singh, 1998)
rares, créatrices de valeur, non substituables considère que les coopérations et les
et difficiles à imiter (Barney, 1991 ; alliances peuvent accroître les perfor-
Dierickx et Cool, 1989). Ce type d’ap- mances des organisations et réduire les
proche s’est originellement intéressé aux coûts et les risques. Ces arrangements
ressources d’une entreprise en particulier. constituent des « avantages relationnels »
Les arguments de complémentarité de res- qui devraient être considérés, au même titre
sources et de capacités entre firmes, ainsi que les avantages physiques et financiers,
que la disponibilité sur le marché de cer- dans la détermination de la valeur du mar-
taines ressources, justifiaient alors les stra- ché d’une entreprise (Preston et Donaldson,
tégies de coopération. Depuis, certains tra- 1999). Dans cette perspective, les dimen-
vaux empiriques sont allés plus loin en sions de l’avantage concurrentiel emprun-
développant l’étude des ressources au sein tent à la fois à la conception traditionnelle
du réseau interorganisationnel pour finale- de la structure industrielle et aux approches
ment considérer celui-ci comme étant le fondées sur les ressources. Si elle constitue
niveau pertinent pour appréhender la locali- une démarche très intéressante pour appré-
sation des ressources et compétences hender les relations interorganisationnelles,
(Afuah, 2000). Si l’idée semble intéres- on peut reprocher à l’approche relationnelle
sante, on peut s’interroger sur sa véritable de ne considérer que la dimension coopéra-
dimension stratégique. Il nous semble, en tive des interactions. En effet, le modèle de
effet, que seul un modèle favorisant une performance dans cette perspective repose
démarche prospective et projective peut être sur le partenariat : c’est celui-ci qui permet
qualifié de stratégique. Or, traiter le réseau de générer des profits exceptionnels. De
interorganisationnel comme unité perti- plus, comme le constatent Preston et
nente limite l’analyse à l’observation d’une Donaldson (1999), seules les relations avec
situation (le réseau) dans laquelle l’entre- d’autres entreprises sont considérées ; les
prise est, de toute manière, déjà impliquée. organisations de nature différente (institu-
50 Revue française de gestion

tions, autorités de régulation) ne sont pas tion. Or, même si l’on considère d’autres
prises en compte. contributions en stratégie que les princi-
Cette revue des grands modèles straté- paux modèles évoqués plus haut, on
giques nous permet d’observer leurs constate qu’elles prennent rarement en
apports mais aussi leurs lacunes pour abor- compte les deux types de situation. Ainsi,
der simultanément les interactions coopéra- certains auteurs s’attardent sur la modifica-
tives et concurrentielles entre organisations tion des caractéristiques de la concurrence,
dans une approche projective (tableau 1). vers une intensification (l’hypercompéti-
Ainsi que le suggère ce tableau, toute la dif- tion ; D’Aveni, 1994) ou vers de nouvelles
ficulté est de permettre, à l’aide d’un formes (la concurrence multimarché ou
modèle, l’analyse stratégique de situations multipoint ; Karnani et Wernerfelt, 1985) et
d’affrontement et de situations de coopéra- développent, le plus souvent, des modèles

Tableau 1
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LES PRINCIPAUX MODÈLES STRATÉGIQUES ET LEURS LIMITES
POUR L’ANALYSE STRATÉGIQUE
L’approche de L’approche fondée L’approche
Modèle l’économie industrielle sur les ressources relationnelle

À l’origine, la firme. Plus La dyade ou les


L’unité d’analyse L’industrie
récemment, le réseau. réseaux de firmes.

Pouvoir de négociation. Ressources physiques, Connaissances


Collusion. technologiques, interfirmes (partage
Principales sources financières, humaines des routines).
d’avantage et intangibles. Résolution collective
concurrentiel des problèmes.
Gouvernance effective.

Le poids de Le rôle déterminant des Les relations de


l’environnement sur la ressources dans la coopération sont
Apports à l’analyse performance d’une performance de susceptibles de
stratégique entreprise. l’entreprise, et plus générer une valeur
Les interdépendances le récemment du réseau. supplémentaire pour
long de la chaîne de les entreprises.
valeur.

Déterminisme. Inexistence d’outils Seule la dimension


L’industrie est de moins pour l’analyse coopérative des
Limites pour en moins l’unité stratégique. interactions est prise
l’analyse stratégique pertinente pour l’analyse Analyse non projective. en compte.
des situations stratégique. Seules les relations
économiques La coopération est avec d’autres firmes
actuelles essentiellement envisagée (relations de marché)
sous l’angle de la sont prises en compte.
collusion.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 51

qui considèrent uniquement la rivalité entre comportements dont la justification s’avère


organisations et intègrent difficilement les délicate et les implications difficilement
pratiques coopératives. De la même mesurables. Cette remarque montre l’inté-
manière, les modèles d’interaction (Chen, rêt d’une démarche qui mobilise d’autres
1996) restent essentiellement focalisés sur concepts. Il s’agit ainsi, plutôt que de quali-
la seule dimension concurrentielle. À l’op- fier les interactions entre firmes, d’analy-
posé, certains auteurs en stratégie n’explo- ser dans un premier temps les interdépen-
rent que la dimension coopérative entre dances entre organisations avant d’adopter
organisations. La littérature sur l’analyse une stratégie adéquate. Nous utilisons le
stratégique reste donc assez dichotomique. terme « interaction » pour qualifier les rela-
On peut d’ailleurs constater que malgré tions d’échange, les liens entre organisa-
l’affirmation, devenue commune, d’une tions. Les interdépendances, elles, existent
dialectique permanente concurrence-coopé- lorsque les actions d’une organisation ont
ration entre organisations dans l’interaction des répercussions sur une autre organisation
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économique, les points de vue sur la nature alors que celles-ci n’ont pas forcément de
de la relation entre ces comportements sont relations d’échange entre elles.
loin d’être consensuels6. Cette dialectique
n’est d’ailleurs pas prise en compte dans les II. – VERS UN MODÈLE D’ANALYSE
modèles stratégiques qui restent alors rela- STRATÉGIQUE BASÉ SUR LA
tivement démunis pour analyser l’environ- CONFIGURATION DE VALEUR
nement et favoriser l’action des organisa-
tions. L’une des explications que l’on peut 1. Des interactions aux
avancer à ces insuffisances relève des interdépendances entre organisations
concepts autour desquels s’articulent les
modèles. Comme nous l’avons vu, concur- La nécessité de nouveaux concepts
rence et coopération sont des modes d’in- pour l’analyse stratégique
teraction qui ont été fréquemment opposés Les limites des modèles stratégiques et la
dans la littérature alors même que de nom- difficulté des approches basées sur la
breux auteurs soulignent qu’ils sont fon- « coopétition » à appréhender les interac-
damentalement imbriqués. Lado et al. tions stratégiques nous amènent à partager
(1997) soulignent ainsi que ces deux avec Brandenburger et Nalebuff (1995)
notions diffèrent considérablement d’un l’idée selon laquelle les concepts tradition-
point de vue philosophique et que leur nellement utilisés dans le monde des
représentation même relève du paradoxe. affaires pour définir les relations entre
Autrement dit, le recours aux concepts de acteurs (concurrence et coopération) sont
« concurrent » ou « partenaire » apporte peu insuffisants. Les auteurs proposent d’aban-
à la lecture stratégique de l’environnement donner les qualifications de « partenaire »
d’une firme, voire la limite en induisant des ou de « rival » et d’identifier les acteurs

6. Bien que ce ne soit pas l’objet de cet article, on peut par exemple noter les points de vue divergents de Thomp-
son et McEwen (1958), de Gomes-Casseres (1994), de Nalebuff et Brandenburger (1997), de Teece (1992), de Per-
roux (1973), ou encore de Das et Teng (2000) concernant l’articulation entre concurrence et coopération.
52 Revue française de gestion

impliqués dans le « maillage de valeur » le cadre des modèles stratégiques actuels,


(value net, cf. figure 1) d’une entreprise, on peut se demander si le développement
c’est-à-dire les organisations qui contri- de concepts capables de rendre compte de
buent ou limitent la création de valeur et/ou la complexité des interdépendances entre
sa capture par l’entreprise focale. En effet, organisations ne permettrait pas d’amélio-
avec le vocabulaire traditionnel, mener une rer la capacité de celles-ci à appréhender
analyse stratégique relève aujourd’hui de la leur environnement avant d’envisager des
gageure, notamment dans certains secteurs choix stratégiques ? Brandenburger et Nale-
où les interactions entre organisations ne buff (1995) ont ainsi proposé un modèle
peuvent être étudiées avec les grilles de lec- d’analyse stratégique qui repose sur de
ture actuelles. Ainsi, Hamel et Prahalad nouveaux concepts.
(1994) notent qu’à n’importe quel moment
AT&T peut considérer Motorola comme un Le modèle proposé par Brandenburger
fournisseur, un acheteur, un concurrent ou et Nalebuff
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un partenaire. Cet exemple illustre l’idée de En plus des fournisseurs et des clients (pré-
Lane et Maxfield (1996) selon laquelle la sents dans le système de valeur de Porter),
stratégie définie comme l’identification de Brandenburger et Nalebuff (1995) suggè-
l’action la plus satisfaisante possible parmi rent d’introduire les notions de substitut
un certain nombre d’options aux consé- (substituor) et de complémentaires (com-
quences prédéterminées est dépassée. Les plementor) dans l’analyse stratégique. Il
entreprises créent des réseaux, assurent leur s’agit d’entreprises avec lesquelles une
présence sur différents marchés et gèrent organisation focale est interdépendante
des projets relevant d’échelles temporelles mais ne réalise pas de transactions (pas
différentes. Bref, on assiste de plus en plus d’interactions).
à une dilution de l’unité d’action, de temps Les organisations substituts constituent des
et d’espace qui caractérisait l’organisation. alternatives pour les clients et/ou pour les
La complexité rend alors difficile, voire fournisseurs de l’entreprise focale. Autre-
périlleuse, l’anticipation. L’horizon de pro- ment dit, l’existence d’un substitut diminue,
jection7 (Lane et Maxfield parlent de fore- pour les clients ou les fournisseurs, la
sight) est réduit et les conséquences pos- valeur accordée à l’entreprise donnée.
sibles des actions entreprises sont difficiles Comme l’ont souligné Desreumaux et Bré-
à évaluer. La solution la plus fréquemment chet (1998), la valeur est une notion polysé-
préconisée est de constamment surveiller et mique en gestion. Dans le cadre de Bran-
évaluer son environnement. Cependant, denburger et Nalebuff, la valeur prend un
comme c’est le cas pour AT&T et Moto- sens particulier puisqu’elle repose sur les
rola, la perception réciproque des acteurs interdépendances entre les organisations du
évolue en permanence et la signification champ et plus seulement (comme c’est le
même du terme « stratégie » se pose. Pour- cas dans le modèle porterien) sur les inter-
tant, si ce constat alarmiste est valable dans dépendances entre firmes impliquées dans

7. Nous définissons l’horizon de projection comme le degré avec lequel l’analyse stratégique permet d’anticiper les
actions des organisations de l’environnement.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 53

la chaîne de valeur. Selon les auteurs, la pétillante sa célèbre boisson et Tyson Foods
valeur pour le client repose sur l’attrait de pour congeler des aliments. Or, les avan-
l’offre d’une firme par rapport à celle des tages financiers ou les efforts commerciaux
autres entreprises (la valeur est donc liée au garantis à Coca-Cola par ses fournisseurs
marketing), tandis que pour le fournisseur il sont autant de valeur perdue pour Tyson
s’agit de l’intérêt de satisfaire un client par Foods (qui peut plus difficilement obtenir
rapport aux autres clients (la valeur est alors des prix, etc.). Remarquons que, dans le
plus stratégique). La capacité à augmenter cadre de l’analyse stratégique de Porter, ces
la valeur générée pour le client ou pour le deux entreprises seraient considérées
fournisseur permet à une entreprise d’aug- comme n’ayant aucune interdépendance
menter ses profits. Ainsi Coca-Cola et Pep- entre elles dans la mesure où elles ne relè-
sico sont, bien sûr, des substituts vis-à-vis vent pas de la même activité. Or, la relation
des clients. Cependant, la notion de substi- décrite ici crée effectivement une forte
tut dépasse celle de « concurrent direct » interdépendance entre Tyson Foods et
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identifiée comme l’une des cinq forces du Coca-Cola. En poussant un peu plus loin
marché par l’analyse porterienne et ne cor- l’analyse, on peut ainsi identifier de nom-
respond pas vraiment non plus à la notion breux substituts par rapport à un certain
de produits de substitution. En effet, nombre de ressources, et notamment les
comme le précisent les auteurs, Coca-Cola plus rares (par exemple, certaines catégo-
et Tyson Foods (une firme agroalimentaire ries de personnel).
américaine spécialisée dans les produits Les complémentaires sont des entreprises à
congelés) sont également des substituts par qui les clients achètent des produits com-
rapport à leurs fournisseurs car les deux plémentaires ou à qui les fournisseurs ven-
entreprises utilisent du dioxyde de carbone dent des ressources complémentaires.
et s’approvisionnent auprès des mêmes Ainsi, les firmes de hardware et de software
fournisseurs ; Coca-Cola pour rendre sont classiquement des complémentaires.

Figure 1
LE MAILLAGE DE LA VALEUR (VALUE NET)

Source : Brandenburger et Nalebuff (1995).


54 Revue française de gestion

L’interdépendance entre Intel et Microsoft, conditions qui amènent à considérer une


par exemple, est de cette nature : les micro- organisation comme partenaire ou comme
processeurs plus puissants permettent de concurrente. L’identification des rivaux et
créer des applications toujours plus riches des alliés se fait alors, le plus souvent, en
et suscitent ainsi l’intérêt des consomma- s’appuyant sur l’existence ou non de rela-
teurs pour un renouvellement fréquent du tions d’échanges (de transactions) entre les
hardware et du software. La relation de entreprises concernées, ou sur l’existence
complémentaires permet de décrire l’inter- d’un certain parallélisme (mêmes clients
dépendance entre certains acteurs notam- ciblés avec le même type de produit). Fina-
ment dans les industries en réseau (télé- lement, l’analyse stratégique avec les
communications, informatique, etc.). modèles stratégiques actuels est limitée par
On retrouve, sur la figure 1, le maillage de un cadre où les organisations de l’environ-
valeur qui reprend verticalement la chaîne nement sont qualifiées, a priori et de
de valeur (fournisseurs, entreprise, clients) manière arbitraire, de partenaires ou de
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comportant l’ensemble du cycle de produc- concurrentes (ou de concurrentes suscep-
tion et de distribution. Cependant, pourquoi tibles de devenir partenaires). Par contre,
ne tenir compte que de la chaîne de valeur dans le modèle proposé par Brandenburger
alors que d’autres organisations, avec les- et Nalebuff, le comportement à adopter à
quelles l’entreprise focale n’est pas en rela- l’égard des substituts et des complémen-
tion, viennent diminuer ou augmenter la taires et la création de partenariats satisfai-
valeur captée par cette dernière ? Le recours sants relève d’un choix (lié à la création ou
aux concepts de substituts et de complé- la captation de valeur) plus que d’un
mentaires (représentée horizontalement) constat. Comme le notent les auteurs, « si
permet l’identification de certains acteurs, on appelle un acteur « concurrent », on a
interdépendants d’une entreprise donnée, tendance à privilégier la compétition plutôt
qui créent ou récupèrent la valeur suscep- que la recherche d’opportunités pour la
tible de revenir à celle-ci. En d’autres coopération. » (p. 60). La question est, en
termes, la valeur créée dépasse les seules effet, moins de savoir si on est en présence
interactions soulignées par la chaîne de ou non de concurrents que celle de repérer
valeur. Cette conception de la valeur, consi- les similitudes ou les complémentarités des
dérée comme le résultat d’interdépendances acteurs vis-à-vis des clients et des fournis-
(qu’il y ait interactions ou non) entre seurs et ce afin de choisir le comportement
acteurs plutôt que comme celui d’interac- adéquat face à ceux-ci en fonction d’une
tions favorise la lecture, à des fins straté- stratégie choisie.
giques, de l’environnement d’une entre-
prise. Or, les concepts proposés par Les limites de cette approche
Brandenburger et Nalebuff (1995) permet- En intégrant simultanément création de
tent cette nouvelle approche, plus riche, de valeur et « forces du marché » (par l’identi-
la création de valeur. fication des interdépendances), le maillage
En effet, comme nous l’avons évoqué, les de la valeur présenté ici rend évidente la
modèles stratégiques traditionnels permet- relation entre ces deux éléments. Cepen-
tent difficilement de s’interroger sur les dant, malgré son intérêt considérable, la
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 55

démarche présente plusieurs limites. États-Unis) plus fort encore que celui de la
D’abord, les auteurs s’attardent uniquement collusion alors qu’elle avait toujours été
sur l’identification des entreprises, laissant fondamentale. De la même manière, on
de côté le rôle fondamental d’autres organi- peut constater que les syndicats profession-
sations, telles que les institutions publiques nels jouent un rôle fondamental dans le
ou des entités hors marché, dans la création transfert d’informations entre organisations
ou la répartition de la valeur entre entre- d’un champ (Pfeffer et Salancik, 1978). Si
prises du marché. Ensuite, en utilisant les des propositions allant dans le sens de l’in-
entreprises comme unité d’analyse, Bran- tégration de ces acteurs en stratégie ont été
denburger et Nalebuff ne peuvent s’intéres- faites dans le cadre de la théorie des stake-
ser qu’aux firmes monoactivités. Enfin, holders (ou « détenteurs d’intérêts »),
puisque le modèle considère que les substi- notamment à travers les contributions de
tuts et les compléments sont des entreprises Rowley (1997) et de Preston et Donaldson
avec lesquelles l’organisation focale ne réa- (1999), on constate tout de même que cette
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lise pas de transactions, les seules relations dernière se base souvent sur une démarche
interorganisationnelles identifiées sont normative et morale (Jones et Wicks, 1999)
celles d’achat et de vente de produits et de plutôt qu’à des fins d’analyse stratégique.
services (avec les fournisseurs et les Ajoutons que la plupart des propositions
clients). Les relations d’une autre nature, faites dans le cadre de cette théorie souli-
telles que les accords R&D, fréquents dans gnent la légitimité des attentes des stake-
les réseaux interorganisationnels, ne peu- holders (Donaldson et Preston, 1995 ; Mit-
vent être pris en compte. chell et Agle, Wood, 1997). Notre objectif
Les limites décrites plus haut doivent être n’est pas d’évaluer la légitimité des organi-
dépassées pour mener à bien une analyse sations de l’environnement d’une firme
stratégique qui permette d’identifier les mais d’identifier celles qui comptent vrai-
interdépendances mais également les ment (pour faire un parallèle avec le Who
réseaux qui structurent l’environnement. Le and what really counts de Freeman, 1994)
modèle de Brandenburger et Nalebuff doit d’un point de vue stratégique sur la base de
donc être complété pour permettre l’identi- la valeur susceptible d’être générée (ou
fication des principales organisations qui détruite) par ces organisations. Nous pen-
créent, partagent ou influencent la valeur sons que ce type d’approche doit s’appuyer
susceptible de revenir à une entreprise don- sur un modèle intersubjectif.
née. Il s’agit d’ouvrir l’analyse stratégique
(comme le propose Freeman, 1984) à l’en- 2. L’approche fondée sur la
semble des acteurs pertinents, mettant l’ac- configuration de valeur
cent sur les accords R&D, sur les parte- L’intersubjectivité au centre de l’analyse
naires associés dans une joint-venture ou stratégique
encore sur le rôle des pouvoirs publics, des
La stratégie est, pour nous, avant tout une
collectivités territoriales, des syndicats ou
question d’intersubjectivité. Weber souli-
des associations. Chatov notait en 1981 que
gnait, en 1922, que dans tous les types de
la coopération entre gouvernement et entre-
structure sociale (y compris le marché) les
prises restait un tabou (notamment aux
56 Revue française de gestion

acteurs doivent être capables de prendre en modèles d’interaction concurrentielle pro-


compte, d’une façon ou d’une autre, leurs posent souvent une conception atomisée et
actions réciproques. Comme le remarque décontextualisée des relations entre organi-
Swedberg (1993), l’intersubjectivité est sations.
caractéristique de l’approche sociologique, L’élaboration d’un modèle d’analyse straté-
constituant même parfois la seule diffé- gique au cœur duquel on trouve l’intersub-
rence entre économie et sociologie (les jectivité des acteurs soulève alors plusieurs
objets d’étude étant souvent les mêmes). Il questions, communes à tout développement
semble alors intéressant de noter que, tradi- d’un modèle d’analyse stratégique : Quel
tionnellement, la stratégie a été beaucoup est l’univers pertinent d’une organisation ?
plus proche de l’économie que de la socio- Quel est l’outil de représentation adéquat
logie8. Pourtant, l’intersubjectivité est à la de cet univers pertinent ? Quelle est l’unité
base de l’analyse stratégique. Il apparaît, en d’analyse adéquate pour cette représenta-
effet, nécessaire pour une organisation de tion ? Ces trois éléments que sont : l’univers
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pouvoir évaluer les opportunités et les pertinent (scope), la méthode de représenta-
marges de manœuvre des entreprises de son tion et d’interprétation des informations
environnement. Cette nécessité est encore (outil) et l’unité d’analyse (focus), repris
renforcée par la multiplication des réseaux dans la figure 2, sont détaillés tour à tour.
interorganisationnels car, d’un point de vue
stratégique, il semble pertinent d’identifier L’univers pertinent dans le modèle
les alternatives relationnelles de ses parte- de la configuration de valeur
naires. Schelling (1960) souligne ainsi que, La qualification de l’univers pertinent
dans un processus d’interaction, il ne s’agit constitue un point fondamental dans la
pas de deviner le comportement de l’autre démarche d’élaboration d’un modèle d’ana-
dans une situation objective, mais d’évaluer lyse stratégique. L’univers pertinent consti-
ce que ce dernier devinera de notre évalua- tue l’espace décrit par un modèle. Il s’agit
tion de ses possibilités d’action, et ainsi de dans un premier temps de définir les « fron-
suite. Sans tomber dans un processus intel- tières de l’arène ». Par exemple, dans le
lectuel récursif qui paralyserait toute action, modèle porterien le secteur constitue l’uni-
l’intersubjectivité soulève l’importance du vers pertinent pour une firme donnée.
recours à une approche qui contextualise Cependant, comme nous l’avons évoqué, il
l’ensemble des acteurs constituant l’univers s’agit d’une frontière, parfois obsolète,
d’une entreprise. Pourtant, en restant ancrés pour circonscrire l’environnement d’une
à un seul niveau d’analyse (par exemple, la firme. Nous proposons plutôt de retenir le
firme pour Rumelt, 1984 ; la dyade pour champ organisationnel comme univers per-
Chen, 1996 ou encore le secteur pour Por- tinent. Nous appelons « champ organisa-
ter, 1980), les modèles stratégiques ou les tionnel » une configuration9 d’organisa-

8. Cf. le numéro spécial du Strategic Management Journal, vol. 12, 1991, consacré aux relations entre management
stratégique et économie.
9. Par configuration, nous entendons les interdépendances entre organisations.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 57

Figure 2
LES TROIS DIMENSIONS D’UN MODÈLE D’ANALYSE STRATÉGIQUE
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tions. Notre définition s’inscrit dans la (Weick, 1977) conduit à l’institutionnalisa-
lignée de celle proposée par Fligstein tion du champ organisationnel et à sa stabi-
(1990), a quelques exceptions près toute- lisation. Nous considérons, avec Lane et
fois. Il s’agit d’un espace d’interdépen- Maxfield (1996), que les champs sont struc-
dances (plutôt qu’uniquement de concur- turés et organisés autour « d’artefacts » (des
rence) entre firmes délimité par les individus ou objets sur lesquels l’attention
initiatives que prennent les organisations et du champ est focalisé), en particulier des
par la représentation qu’elles se font produits et des services conçus, produits et
d’elles-mêmes et de leurs interdépen- échangés par les organisations, mais égale-
dances ; autrement dit par la perception de ment des lois ou des cadres réglementaires.
leur insertion dans leur environnement. Le L’existence des champs organisationnels
champ organisationnel a un caractère objec- est établie par la reconnaissance mutuelle
tif qui tient aux ressources détenues par les des interdépendances entre les différentes
firmes et à la nature des outputs, mais il a organisations. Les acteurs partagent une
aussi un caractère subjectif, ou plutôt inter- même conception de l’action légitime et de
subjectif, puisqu’il est construit par les la place de chaque organisation dans le
comportements d’acteurs cherchant réci- champ. Le champ organisationnel a donc
proquement à évaluer leurs actions poten- pour fonction principale de promouvoir la
tielles. En identifiant les acteurs « impor- stabilité. Cependant, force est de constater
tants » (c’est-à-dire ceux avec lesquels elle que les frontières des champs organisation-
s’estime fortement interdépendante) et en nels sont susceptibles d’évoluer sous la
agissant par rapport à ces derniers, une pression d’organisations de différentes
organisation force ceux-ci à la reconnaître natures (firmes, organismes de régulation,
également. Ce phénomène de sensemaking pouvoirs publics, etc.). L’exemple du rap-
58 Revue française de gestion

prochement puis de l’imbrication progres- Nous appelons « configuration de valeur »


sive des champs des télécommunications et les principales interdépendances, en termes
de l’audiovisuel, par exemple, est à ce titre de valeur créée, capturée ou au contraire
édifiant. limitée, entre une firme focale et les entités
La notion de champ organisationnel pré- qui peuplent son champ. L’identification de
sente un intérêt considérable pour désigner la configuration de valeur permet, à partir
l’espace socio-économique (et symbolique) d’un processus d’analyse stratégique en
pertinent pour une organisation. En effet, le trois phases (identification, attribution et
champ constitue une entité basée sur des action stratégique), d’aboutir à la constitu-
critères à la fois structurels et cognitifs. tion d’un « réseau de valeur ».
D’une part, ses frontières ne sont pas déli-
mitées de manière arbitraire et définitive, Outils d’interprétation et unité d’analyse
constituant alors une entité réifiée (comme dans le modèle de la configuration
c’est le cas, par exemple, du secteur dans de valeur
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l’approche de Porter). D’autre part, il ne Comme nous l’avons souligné, l’approche
constitue pas une pure abstraction comme, fondée sur le réseau de valeur est basée sur
par exemple, le concept de marché (Barber, un processus en trois étapes :
1977 ; Coase, 1988). 1) identification des interdépendances entre
L’univers pertinent d’une firme (c’est-à-dire une firme focale et les organisations de son
son champ organisationnel) est donc com- champ ;
posé des principales organisations avec les- 2) qualification de la nature des interdépen-
quelles elles sont interdépendantes ainsi dances entre la firme focale et les princi-
que des principales entités avec lesquelles pales organisations de son champ. Il s’agit
ces dernières sont elles-mêmes interdépen- de déterminer si ces entités influencent
dantes. En effet, nous défendons ici l’idée positivement ou négativement la valeur
que les rentes n’émergent pas uniquement captée par la firme focale (quelle est la
des transactions ou des relations entre une configuration de valeur ?) ;
firme et son environnement (comme c’est le 3) action stratégique en termes d’interac-
cas dans le modèle de Dyer et Singh, 1998). tions. Il s’agit de développer des interac-
Elles émergent également des interdépen- tions créatrices de valeur avec les acteurs de
dances, générées par les actions de l’en- l’environnement (constitution du réseau de
semble des organisations du champ (d’où la valeur).
nécessité d’une approche intersubjective). Une démarche de représentation structu-
Ceci suggère que la pertinence de l’analyse rale, proche du mapping, est adéquate pour
stratégique (c’est-à-dire l’horizon de pro- identifier les organisations du champ qui
jection qu’elle offre) dépend largement de peuplent le monde d’une firme (étape 1).
la compréhension des interdépendances Les organisations pertinentes sont celles qui
entre les entités du champ. On rejoint ici produisent des artefacts (produits, textes
l’idée de Wilensky (1967) selon laquelle le réglementaires, etc.) sur lesquels les acteurs
véritable levier concurrentiel et stratégique du champ (clients, fournisseurs, etc.) se
relève des compétences d’interprétation focalisent et qui sont créatrices ou destruc-
(interpretation skills). trices de valeur pour une entreprise donnée.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 59

En prenant en compte les organisations, conjointe, co-branding, etc.) À l’aide de


mais aussi les artefacts qu’elles produisent, ces éléments nous présentons dans la figure
nous voulons souligner le rôle fondamental 3, la configuration de valeur d’une organi-
joué par des entités individuelles (hommes sation, ou plus précisément celle d’une de
politiques, responsables de syndicats, etc.), ses activités. Il nous semble, en effet, que
collectives (associations de protection de les interdépendances entre organisations
l’environnement et de la nature, autorités de doivent être identifiées au niveau des acti-
régulation, Sénat, etc.) ou par des objets vités afin de rendre compte de leurs spéci-
(produits, lois, livres, etc.) pour influencer ficités. La configuration de valeur complète
la valeur générée ou captée par une firme. d’une organisation correspond à la super-
Pour attribuer un rôle aux entités identi- position des configurations de valeur de
fiées (étape 2), en termes de création ou de toutes ses activités.
destruction de valeur vis-à-vis d’une entre- La configuration de valeur comprend les
prise donnée, il convient d’identifier la fournisseurs et les clients, mais aussi les
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configuration de valeur. Comme nous complémentaires, les substituts, les para-
l’avons argumenté plus haut, la proposition sites et les facilitateurs.
de Brandenburger et Nalebuff d’opter pour Les substituts sont des organisations avec
les termes «complémentaire» et « substitut » lesquelles l’entreprise focale n’est pas en
est intéressante mais demeure insuffisante interaction, mais qui réduisent la valeur
puisque les auteurs estiment qu’une entre- captée par cette dernière.
prise n’entretient des relations qu’avec des Les complémentaires sont des organisations
clients et des fournisseurs. Nous proposons avec lesquelles l’entreprise focale n’est pas
donc d’introduire deux nouveaux attributs : en interaction, mais qui augmentent la
les « facilitateurs » et les « parasites » avec valeur captée par celle-ci.
lesquels la firme considérée entretient des Les parasites sont les organisations avec
relations de différents types (R&D lesquelles la firme analysée est en interac-

Figure 3
LA CONFIGURATION DE VALEUR
60 Revue française de gestion

tion et qui réduisent la valeur captée par nement et croire en un avantage concurren-
cette dernière. tiel irrésistible débouchant sur ce que les
Les facilitateurs sont les organisations avec auteurs qualifient de « perspective autocen-
lesquelles la firme analysée est en interac- trée ». Les « trous noirs » (blind spots) sont
tion et qui réduisent la valeur captée par un autre biais qui mène à une prise en
cette dernière. compte insuffisante des actions des autres
Toutes les organisations jouant un rôle organisations. Analyser les interdépen-
important, positivement ou négativement, dances réciproques (et pas seulement les
dans la valeur captée par une firme, doivent interactions) limite ces deux risques.
être qualifiées à l’aide des concepts de la La troisième étape du modèle de la confi-
configuration de valeur (substituts, complé- guration de valeur consiste à envisager la
mentaires, facilitateurs, etc.). L’analyse constitution d’un réseau de valeur. Il s’agit
peut dès lors inclure, par exemple, les orga- alors, à partir de l’identification de la
nismes de régulation susceptibles de configuration de valeur, d’interagir avec
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prendre des décisions ayant une portée les organisations créatrices de valeur pour
considérable pour une entreprise et un la firme, et ce en fonction des interdépen-
client particulier, jouissant d’une bonne dances dans le champ (figure 4). L’objectif
réputation, peut être considéré comme étant pour une entreprise est, en effet, de déve-
un facilitateur (créant de la valeur) puisqu’il lopper un jeu de relations dont la spéci-
valorise l’offre de la firme vis-à-vis d’autres ficité est la création de valeur (nous avons
clients. De plus, ce modèle de la configura- souligné que c’est l’un des apports du
tion de valeur permet de prendre en compte modèle de Dyer et Singh, 1998). Ces rela-
les phénomènes d’externalités de réseau (ou tions sont loin de se limiter à des transac-
rendements croissants), centraux dans de tions d’achat ou de vente (comme c’est le
nombreux secteurs. Ainsi, dans le domaine cas avec les clients et les fournisseurs).
des télécommunications chaque nouveau Les alliances, les accords R&D, le lob-
client est également un facilitateur puisqu’il bying ou encore l’échange d’informations
augmente la taille de la communauté utili- avec un syndicat professionnel peuvent
sant un standard donné. De même, dans les être envisagées.
communautés virtuelles chaque nouvel La figure 4 rappelle les définitions des dif-
adhérent contribue à rendre plus attractive férents attributs (facilitateur, parasite, com-
la communauté gérée par l’entreprise. L’ad- plémentaire et substitut) et présente, selon
hérent est donc client et facilitateur. le profil des différentes organisations du
En identifiant les organisations du champ champ en termes de création de valeur pour
(étape 1) avant de procéder à l’attribution la firme focale, les actions stratégiques
en termes d’influence sur la valeur (étape envisageables par celle-ci. Ces logiques de
2), la démarche proposée évite certains création de valeur entre organisations (rou-
biais perceptuels mis en évidence par Zajac tines interfirmes, partage de connaissances,
et Bazerman (1991), pouvant conduire à de etc.) ont notamment été mises en évidence
grossières erreurs stratégiques. Ainsi, une par Dyer et Singh (1998) et conduisent à la
organisation qui dispose d’une forte identité constitution d’un réseau générateur de
peut avoir tendance à négliger son environ- valeur.
L’analyse stratégique et la configuration de valeur 61

Figure 4
CONSTRUCTION D’UN RÉSEAU DE VALEUR À PARTIR
DE LA CONFIGURATION DE VALEUR

Avec interactions
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CONCLUSION tanément par le développement des
réseaux, les contacts multimarchés ou
Le modèle de la configuration de valeur
encore les pratiques de lobbying face à la
permet de favoriser à la fois l’analyse et
multiplication des autorités de régulation.
l’action stratégique, en superposant le
Le dépassement d’un vocabulaire straté-
réseau des interactions sur la « carte » (la
gique centré sur les notions de concurrence
configuration des interdépendances). En
et de coopération, c’est-à-dire définissant a
effet, au-delà des facteurs de performance
priori les interactions, au profit de concepts
largement discutés dans la littérature, c’est
identifiant les interdépendances (pour per-
la question de l’analyse et de l’intelligence
mettre ensuite le choix des interactions per-
stratégique qui se pose aux modèles tradi-
tinentes pour la création ou la captation de
tionnels. Ces derniers peuvent, en effet,
valeur) permet d’aboutir à une perspective
difficilement rendre compte de l’espace
plus adaptée à la formulation et à la mise en
organisationnel actuel, caractérisé simul-
œuvre d’une stratégie.
62 Revue française de gestion

Ainsi, l’identification de la configuration de ganisationnel déjà constitué (Afuah, 2001).


valeur permet à une entreprise d’appréhen- Le modèle de la configuration de valeur est
der le cadre dans lequel elle évolue, notam- par nature multiniveau : l’unité d’analyse est
ment en termes d’interdépendances, avant l’activité de l’entreprise et l’univers perti-
de constituer un réseau créateur de valeur. Il nent est le champ. Il favorise ainsi une lec-
s’agit alors de dépasser l’analyse des rela- ture au niveau organisationnel mais insiste
tions bilatérales (fréquente dans les modèles également sur le rôle des réseaux qui se
d’interaction concurrentielle) qui, malgré constituent et se désagrègent. Le modèle
leur importance, ne rendent pas compte de proposé va plus loin que la définition tradi-
la complexité des multiples interdépen- tionnelle du réseau dans la mesure où elle
dances entre organisations (coalitions, inter- intègre tous les acteurs susceptibles d’in-
ventions d’agents hors-marché, etc.). Il fluencer la valeur créée ou captée par la
s’agit également de dépasser les approches firme (acteurs du marché ou hors-marché) et
qui proposent de créer de la valeur à partir pas seulement les entreprises qui intervien-
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des interactions au sein d’un réseau interor- nent dans la chaîne de valeur.

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