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L’émigration des mineurs entre le Maroc et l’Italie.

Analyse du contexte social et des itinéraires


Francesco Vacchiano

Une migration historique

Depuis plusieurs décennies, le Maroc est confronté au phénomène de la migration internationale, soit en tant
que pays classiquement « exportateur » de migrants, soit que pays de transit, et récemment d’établissement
de personnes provenant de l’Afrique sub-saharienne. L’histoire de la migration marocaine vers l’étranger, et
en particulier vers l’Europe, est marquée par des phases et des moments significatifs, avec d’importantes
variations dans ses proportions et ses modalités en relation aux événements historiques et aux politiques
migratoires des pays d’accueil. Si déjà au cours de la Première Guerre Mondiale est bien documenté en
France l’emploi de soldats recrutés au Maghreb colonial (principalement algériens, mais aussi marocains),
c’est avec la reconstruction de l’après guerre que s’est ultérieurement stimulé le recours à la main d’œuvre
étrangère provenant des pays du sud de la Méditerranée. En 1916, on assiste en France à l’institution d’un
bureau de coordination, ayant l’objectif de transférer des colonies vers la métropole les travailleurs pour les
industries minières et de guerre, ainsi que des combattants pour l’armée (estimés à presque 40.000
personnes) (de Haas, 2005a). Après la guerre, et à cause de la crise économique qui s’en suivit, la nécessité
de leur apport viens à manquer, et plusieurs d’entre eux, les premiers à être touchés par le chômage,
retournent à leurs pays d’origine. Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, la main d’œuvre des migrants
redevient nécessaire, en particulier dans le domaine militaire : on estime que 126.000 marocains ont servi
dans l’armée française, et presque 40.000 ont rejoint les troupes franquistes en Espagne.

La migration économique proprement dite reprend en mesure considérable à partir du 1954, quand, par effet
de la guerre de libération en Algérie, usines et mines en France font appel à nouveau à une main d’œuvre non
qualifiée pour la production à large échelle. En conséquence de ce processus, la population marocaine en
France passe, entre la fin de la deuxième guerre mondiale et le 1962, de 20.000 à 53.000 unités environ. Il est
cependant la décennie suivante qu’enregistre la plus importante croissance de migrants, non seulement vers
la France, mais aussi, et grâce aux accords bilatéraux, vers l’Allemagne, la Belgique et les Pays Bas en un
premier temps, et vers la Suisse, l’Autriche et les Pays Scandinaves par la suite. La demande en main
d’oeuvre est telle que la France inaugure des filiales de l’Office Nationale de l’Immigration à Casablanca et à
Tunis, et forme des agents de recrutements qui parcourent le territoire en proposant des contrats de travail
pour la mère patrie (Fadlullah, 1994).
Les pays de l’Europe méridionale restent jusqu’à ce moment marginalement touchés par ce phénomène,
subsistant chez eux les conditions qui favorisent principalement l’émigration des propres citoyens : en Italie,
l’inversion du rapport entre émigrants et immigrants ne se vérifiera que quelques années plus tard, à partir du
1973.

Si d’un côté il est donc possible d’observer la hausse de l’émigration du Maroc vers l’Europe à partir du
début des années soixante, de l’autre on ne peut ne pas remarquer comme la migration marocaine se définie à
partir d’une expérience amplement consolidée, caractérisée par des phases alternées, mais aussi d’une
significative consistance temporelle. Le tableau 1 illustre la tendance du phénomène relativement aux
principaux pays européens de destination : il met en évidence la croissance rapide des pays méditerranéens
au cours des années ’80 et ’90, qui porte à la fin du siècle à une distribution en Europe représentée par le
graphique 1.


Psichologue et anthropologue, Centre Frantz Fanon et Université de Turin. Consultant OIM, Counter-trafficking Unit, Rome.
Cette analyse a été réalisée dans le cadre du projet M’n’M (« Migration et mineurs ») de l’OIM (juin 2007).

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Tableau 1: Evolution du nombre de migrants dans quelque pays de l’Europe Occidentale (indépendamment de la
nationalité effective et inclusive de deuxième et troisième génération)

Année France Pays-Bas Belgique Allemagne Espagne Italie Total


1968 84,000 13,000 21,000 18,000 1,000 NA 137,000
1972 218,000 28,000 25,000 15,000 5,000 NA 291,000
1975 260,000 33,000 66,000 26,000 9,000 NA 394,000
1982 431,000 93,000 110,000 43,000 26,000 1,000 704,000
1990 653,000 184,000 138,000 62,000 59,000 78,000 1,174,000
1998 728,000 242,000 155,000 98,000 200,000 195,000 1,618,000
1,025,000 214,000 73,000 253,000
2005 316,000 397,000 2,278,000
(2002) (2002) (2004) (2004)
Source: de Haas, 2005a

Graphique 1: Répartition des citoyens marocains en Europe au 1/1/2000

Source: Eurostat 2001, cit. dans van der Erf e Heering, 2002

Les données actuelles du phénomène rapportent d’un nombre global de migrants réguliers supérieur à trois
millions d’individus, à savoir un chiffre qui représente presque le 10% de la population actuelle du Maroc
(tableau 2)

Tableau 2: Nombre total de marocains résidants à l’étranger, année 2004


Pays Nombre de ressortissants marocains
EUROPE 2.616.871
PAYS ARABES 282.772
ASIE ET OCEANIE 5.167
AFRIQUE 5.366
AMERIQUE 178.914
TOTAL 3.089.090
Source: Ministère des Habous et des Affaires Islamiques, Rabat

Les chiffres reportés ci-dessus montrent un cadre actualisé du phénomène : l’interprétation de celui-ci ne
peut pas se baser exclusivement sur les exigences économiques des pays de destination (ceux qu’en
littérature sont généralement définis en tant que “pull factors”), mais elle doit être enrichie d’éléments tirés
d’une prise en compte des changements sociaux qui ont caractérisé la période coloniale et post-coloniale au
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Maroc : croissance démographique, urbanisation (à savoir la migration interne de la campagne vers les villes,
surtout celle de la côte atlantique), augmentation de l’espoir à une mobilité sociale et à l’autoréalisation.

Ces importantes transformations à niveau de la structure sociale, s’accompagnent, de manière non toujours
clairement identifiable, à la progressive érosion des structures de sens (et de pouvoir) traditionnelles, qui
gardent leur propre empreinte surtout dans les contextes ruraux et qui se dissoudrent progressivement dans
les grands agglomérations urbains. La croissance des fluxes communicatifs, des produits de consommation et
des représentations de l’étranger, axes porteurs d’un changement constitutif d’une société de masse de type
moderne, ne coïncide pas pour des raisons d’ordre économique et sociale avec la croissance d’une classe
moyenne capable de produire (et d’en bénéficier) le bien être attendu et promis. À une rapide saturation des
emploies rendues disponibles avec la fin du protectorat, à suivi une stagnation de l’accès à l’emploi, avec la
pénalisation des classes défavorisées et une reproduction des structures hiérarchiques à travers du
clientélisme (Mesbahi, 2002). Les programmes d’ajustement structurel des années ’80, dictant notamment
une politique de privatisation, provoquèrent un désengagement de l’état du secteur publique et une ultérieure
diminution de la capacité d’emploi produite par celui. Le déficit publique baisse, l’inflation reste sous
contrôle et le revenu moyen par habitant croît, mais les bénéfices restent circonscrits aux classes sociales
déjà garanties : en fait, le taux de chômage augmente rapidement, effleurant le 20% dans les grandes villes et
atteignant dans certains contextes locaux des dimensions encore plus dramatiques (Idali, 2002)

Selon le recensement du 1982 et l’enquête ad hoc de la même année, le 72% des chômeurs à moins de 30 ans
et le taux officiel de chômage dans la population urbaine, âgée entre 15 et 24 ans est du 22,9%. À partir de la
fin des années ’80, une nouvelle donnée s’impose : le chômage commence à toucher de manière croissante
même les diplômés universitaires. Les travaux d’une commission gouvernementale, créée pour étudier le
phénomène après les révoltes des étudiants de la fin des années ’90, montrent qu’au 27 février 1991, 100.374
diplômés universitaires sont à la recherche d’un emploi, dont 61% hommes et 58% âgés entre 25 et 29 ans :
le 86% d’eux est célibataires, le 90% habite encore chez les parents et seulement le 62% des mariés a un
conjoint qui bénéficie d’un emploi (Bennani-Chraïbi, 1994). L’étude conclue que le diplôme n’est plus une
garantie automatique pour accéder à un emploi, et atteste que même ceux qui ont reçu une formation
spécialisée comme celle dans le domaine médical, se trouvent à risque de chômage. De la même analyse
résulte que le 75% des diplômés universitaires est à la recherche d’un emploi depuis plus d’un an, le 55%
depuis plus de deux ans, et le 38% depuis plus de trois ans. Leur age moyenne est de 28.3 ans. Ces derniers
ont été classiquement reproché d’une excessive sélectivité à l’égard de l’emploi, mais de l’enquête résulte
que le 71% des diplômés universitaires sont disposés à accepter n’importe quel type de travail (Bennani-
Chraïbi, 1994).

Ces résultats sont essentiellement confirmés par des récentes études qui signalent un taux de chômage estimé
autour du 19.5% dans les villes (Idali, 2002), avec un pourcentage de jeunes de moins de 30 ans du 68.5%
(Khachani, 2003) et font état de ce qui a été défini par Bourdieu « mise hors-jeu symbolique » de la
catégorie des jeunes (Bennani-Chraïbi, 1994). Cette condition d’inutilité et d’attente contribue à générer une
sorte de « sens de dépaysement », exprimé parfois avec l’expression « qnat » (désespoir, isolement, mais
aussi ennui), utilisée par les jeunes pour décrire la sensation de vide, de suspension, de malaise généralisé qui
caractérise leur condition existentielle. Devant cette situation d’échec et du conséquent « sentiment
d’insécurité et de désolidarisation » (Khatibi, 2003) qui caractérise le vécu de beaucoup d’eux, la migration
s’offre en tant que opportunité et possible issue : sa visibilité a augmenté au cours des dernières années,
acquérant ces caractères de possibilité et de potentialité par rapport à l’absence d’alternatives perçue dans les
contextes d’origine. En fait, soit les nouvelles provenant du kharîj (l’étranger), soit les visites régulières des
migrants en période de vacances, avec leur trousseau de nécessaires comportements ostensifs, fonctionnent
pour matérialiser de manière irréfutable la dimension du succès et de réussite sociale que la migration
renferme en soit (Sayad, 1999; Taliani et Vacchiano 2006).

À propos de ce point, il faut souligner qu’il ne s’agit pas seulement de fantaisie et que le rendement objectif
de l’entreprise migratoire est amplement prouvé par les chiffres. L’argent envoyé de l’étranger par les
migrants constitue une source de revenu de première importance pour le pays et un soutien considérable pour
beaucoup de familles. Entre les années ’80 et ’90 ces rentrées ont dépassé les revenues de l’exportation des
phosphates, le premier produit du pays, le rendement global des exportations des produits agricoles et le
volume d’affaires induit par le tourisme. En 2004, le Maroc était le cinquième pays à niveau mondial pour le

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montant des revenues des migrants, et en 2005 l’argent envoyé par eux représentait le 20,1% de toutes les
importations de biens et de services (de Haas, 2005b). Encore plus considérable: selon certaines estimations
du 2001, sans l’aide des familiers expatriés, presque 1.170.000 marocains se retrouveraient au dessous du
seuil de pauvreté, ramenant le taux global des « pauvres officiels » du 19,0 au 23,2% (de Haas, 2007).
Plusieurs territoires ont profité de cette source relativement stable de rendement, même s’il est nécessaire de
souligner que ces rentrées n’ont pas toujours généré sur les lieux d’origine des formes efficaces de
réinvestissement, et que le plus souvent ont donné lieu à une réutilisation finalisée à l’acquisition de biens de
consommation éphémères et/ou peu productifs. Toutefois, pour effectuer une correcte évaluation de ces
options, il est nécessaire de considérer l’ensemble des conditions sociales et politiques qui favorisent ou
entravent ces investissements, qui, comme quelque auteur a souligné, semblent s’être plutôt modifiés au
cours des dernières années (de Haas, 2007).

En ce sens et pour plusieurs années, des régions relativement démunies du point de vue économique,
notamment les zones montagneuses du Rif au Nord et les oasis au sud de l’Atlas, ont amplement profité des
ressources envoyées des pays d’accueil. D’autre part, il est à observer l’extension progressive des zones
touchées par l’émigration, qui ne concernent plus exclusivement les territoires à majorité berbère du Rif, de
l’Atlas et du Sousse, mais aussi et d’une manière importante les plaines centrales et les villes des côtes
atlantiques et méditerranéennes.

Principales zones intéressées par l’émigration

Source: de Haas, 2007, modifié

La migration vers l’Italie

À l’exception de cas isolés, l’Italie ne devient une destination pour les migrants marocains qu’à partir de la
deuxième moitié des années ’80, mais se positionne, au cours des vingt dernières années, aux premières
places en Europe pour nombre de présences, après France, Espagne, Pays Bas et Belgique (Ministère des
Habous et des Affaires Islamiques, Rabat 2004).
Le tableau 3 (et le graphique annexe), obtenus à partir de l’élaboration des données du Ministère de
l’Intérieur Italien, montrent l’augmentation importante des titres de séjour délivrés aux ressortissants
marocains en Italie, entre les années 1985 et 2000.

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Tableau 3: Augmentation des titres de séjour pour les citoyens marocains entre 1985 et 2000
1985 1990 1995 1997 1998 1999 2000
2.364 77.971 94.237 131.406 145.843 170.905 194.617
Source: élaboration de données du Ministre de l’Intérieur

Graphique 2: Augmentation du nombre de titres de séjour pour les émigrants marocains entre 1985 et 2000

200.000
180.000
160.000
140.000
120.000
100.000
80.000
60.000
40.000
20.000
0
1985 1990 1995 1997 1998 1999 2000

Source: élaboration sur les données du Ministère de l’Intérieur

À la fin du 2005, selon les données de l’Istat, les marocains qui résident régulièrement sur le territoire italien
sont estimés à 319.537 unités, avec des présences importantes surtout dans les grandes villes du Nord
(tableau 4).

Tableau 4: Villes principales pour


présence d’émigrants marocains

Province Total
Turin 16.654
Milan 14.480
Brescia 11.647
Bergame 10.527
Modène 9.806
Vérone 8.798
Bologne 8.615
Padoue 6.178
Trévise 5.600
Reggio Emilia 5.542
Sourcee: Caritas 2006

Le nombre des femmes a augmenté au cours des années, et avec ses 124.615 unités constitue le 39% des
citoyens de nationalité marocaine.

Un discours à part est celui relatif à la présence des clandestins, qui par définition est beaucoup plus difficile
à relever. Pour les adultes il faudra s’en remettre aux chiffres relatifs aux débarquements (qui ne constituent
de toute façon que presque le dixième de l’immigration irrégulière, Caritas / Migrantes, 2005), aux
dispositions d’éloignement (refoulements aux frontières et expulsions), aux détenus dans les Centres de
Permanence Temporaire (CPT) et aux demandes de régularisation (qui souvent sont effectuées au bénéfice
ou directement par les citoyens étrangers déjà présents sur le sol italien). Les chiffres relatifs à l’année 2005
indiquent un nombre de citoyens marocains destinataires de dispositions d’éloignement de 9.839 cas, les
débarquements font état de 3.634 unités et les détenus dans les CPT correspondent à 1.648 cas (De Marco,
2006).
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Le chiffre le plus représentatif des nouveaux arrivés est défini surtout à partir des débarquements, du moment
que, et sauf cas particuliers, les entrées par d’autres circuits restent encore méconnues. D’autre part, et du
moins dans ces derniers temps, les informations à titre officieux semblent indiquer que la majorité des
émigrants clandestins marocains utilisent des itinéraires qui passent par la Libye, pays qui a introduit le visa
d’entrée pour le Maroc depuis peu. Cette donnée semble être confirmée par les informations recueillies
auprès de la représentation de l’OIM sur l’Île de Lampedusa, qui a enregistré pour l’année 2006 un transit
total de 18.350 personnes, dont 5.852 marocains, première nationalité entre celles transitées : un chiffre qui
dépasse de 2.218 unités le nombre totale des marocains qui ont débarqué en 2005. Entre ceux-ci, les femmes
constituent le 4,8% et les mineurs, 147 en tout, le 2,5% du total (voir tableau 5).

Tableau 5: Migrants marocains débarqués à Lampedusa, année 2006


Hommes Femmes Mineurs Total % sur tot
5.419 286 147 5.852 29,5%
Source: OIM, janvier 2007

La migration des mineurs

La migration des mineurs, surtout lesdits « non accompagnés », se définie à partir de ces préliminaires, mais
avec des spécificités ultérieures : le chemin est déjà tracé par les adultes, qui constituent le réseau nécessaire
pour imaginer le départ (van der Erf R. et Heering L., 2002), et il est déjà structuré le contexte culturel de
référence qui organise les actions et les choix en terme de coûts et bénéfices attendus (« culture de
l’émigration »). Malgré cela, dans l’évaluation des itinéraires des mineurs rencontrés, le poids des
dynamiques familiales est prioritaire. Spécifions : sauf cas particuliers et à cause du type de structure sociale
du Maroc, la famille reste le lieu de prédilection à l’intérieur duquel tout projet de migration, pas seulement
des mineurs, voit, si non proprement sa formulation, au moins son aval. Il est au sein de la famille que la
sensibilité sociale envers les émigrés (partis, en visite, ou de retour) trouve sa médiation, c’est dans la maison
que les représentations du contexte d’appartenance et leur connotations émotives sont formulées (souvent
selon les catégories d’une « déprivation relative » qui contribue au sentiment d’aliénation sociale perçu); et
c’est au sein de la famille au sens large que s’identifient et se construisent activement les possibles liens
transnationaux imaginés en tant que support au projet. Si tout cela est vrai, donc, pour la définition de chaque
parcours migratoire, dans le cas relatif aux mineurs il faut ajouter, à ces dimensions, quelque caractéristique
particulière:

a) une représentation du mineur en tant que sujet productif;


b) une définition de ses spécificités en termes adultes (poussée à l’autonomie);
c) une conception des besoins individuels définie à partir de propriétés concrètes, en termes
d’acquisition de biens de confort;
d) une modélisation de la croissance à travers de la preuve et du défit;
e) une plus générale, même si non ubiquitaire, relation ambivalente avec les repères normatifs.

Evidemment il y a les différences, comme très différents sont ces parcours qui naissent dans des conditions
d’important malaise familial, à la base duquel la cassure du lien s’est déjà consommée dans le passé, parfois
à cause de divorces, de décès des parents, de violences, de fuite…etc. Dans telles situations, le rôle de la
famille se traduit plus par son absence à s’interposer aux représentations sociales plutôt que par la définition
d’un véritable projet.

À l’intérieur de cet ensemble de faits et représentations, un facteur significatif est constitué par le phénomène
de la déperdition scolaire, qui est en même temps cause et effet du potentiel migratoire : cause, parce que il
est à la suite de l’échec scolaire qu’il naît l’idée de mettre à profit une productivité alternative dans l’ailleurs;
effet, parce qu’il est la dimension de l’alternative à vider de son sens l’idée de l’engagement et de
l’investissement quotidien dans les études.

Selon une enquête du gouvernement marocain présentée en janvier 2004 au Ministère des Affaires Sociales,
de la Solidarité et de la Famille, presque 800.000 enfants ne fréquentent pas l’école: malgré un code du

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travail qui interdit l’emploi au dessous des 15 ans et d’une loi concernant l’instruction obligatoire (loi 04-00),
la majorité d’eux, en particulier dans les zones rurales, travaille pour contribuer aux besoins de la famille (Le
Journal Hebdomadaire, n. 171-2004). Les chiffres officiels du Ministère de l’Education et de la Direction de
la Statistique sont encore plus dramatiques: selon l’étude, dans l’année scolaire 1999-2000, presque deux
millions d’enfants âgés de 7 à 15 ans ne sont pas allés à l’école, soit puisque jamais inscrits, soit à cause de
l’abandon scolaire. Selon ces chiffres, le taux global de scolarisation dans cette tranche d’âge serait de
65,65% à l’échelle nationale, reparti entre 73,7% pour la tranche d’âge 7-12 ans (un enfant sur quatre ne va
pas à l’école) et 49,7% pour celle 13-15 ans (un enfant sur deux) (Lahlou M., 2002).

L’abandon scolaire est directement lié à l’emploi dans des contextes de travail non garantis et sous payés, où
assez souvent, selon les récits, les mineurs risquent d’être exposés à l’abus et à l’exploitation. Selon le
recensement du 1994, le nombre d’enfants de moins de 15 ans considérés en tant que « actifs » du point de
vue du travail s’est élevé à 356.530 unités, soit 4,3% du total des « actifs » et 5,1% de la population occupée
à l’échelle nationale (7% de filles, 3,5% de garçons). Les garçons sont les plus nombreux, autour du 65,5%.
Les enfants de moins de 15 ans employés dans les villes passent du 18,8% en 1982 au 26,3% en 1994 (aussi
comme résultat de l’urbanisation). Le pourcentage des occupés au-dessous des 10 ans baisse dans les années,
du 14,2% en 1971 au 6,9% en 1994 (59% de sexe masculin et 81% en zones rurales). Malgré cela, de
l’enquête du 1999 “Activité, emploi, chômage”, il en ressort notamment une inversion de tendance et une
augmentation du nombre d’enfants actifs à 517.800 unités (45,2% en plus dans les cinq années entre le
recensement et l’étude). Le 88% a été recensé dans les zones rurales et 66.900 unités dans les villes (Lahlou,
2002). Selon la dernière enquête de la Direction de la Statistique, les enfants de moins de 18 ans constituent
le 6,5% des effectifs du secteur informel, c'est-à-dire 123.741 mineurs, desquels 84.809 dans les zones
rurales et 38.932 dans les villes (Khachani, 2003).

Dans une partie très considérable des cas observés en Italie, l’échec scolaire et le travail des enfants dans le
pays d’origine constituent un élément commun au parcours des mineurs qui ont opté pour l’entreprise
migratoire, que ce soit par choix individuel ou par mandat de la famille. De manière significative, plusieurs
d’eux expliquent qu’il est la perspective de l’émigration, déjà présente depuis une âge précoce, à les avoir
démotivés pour l’engagement et l’investissement dans l’école.

Un autre élément relevé, bien qu’en nombre inférieur de cas, fait allusion à des situations d’important
malaise social et de désagrégation familiale, avec des histoires de divorce, d’abandon ou de violence au sein
de la famille, qui ont pu donner lieu à des fuites du domicile familial et vie de rue (atfâl ash-shawâri‘,
“enfants de rue”) avant la migration.

L’émigration de ces derniers est souvent effectuée dans des conditions à haut risque (a Casablanca “risker”
est tout-court synonyme de “émigrer”) pour l’impossibilité, due à l’extrême pauvreté, de payer pour le
voyage une organisation ou un “passeur” (simsâr, “agent”, “intermédiaire”). Dans ces cas, les enfants tentent
de se cacher sous un camion – dans une niche au dessus de l’axe-moteur où on peut se pelotonner, ou
d’entrer dans un container, ou encore de s’embarquer clandestinement dans un bateau en départ du port.
Plusieurs mineurs des quartiers populaires de Casablanca, interviewés en différentes occasions, admettent
d’avoir abandonné l’école depuis longtemps et de passer la grande partie de leur journée au port commercial,
où on peut les voir en petits groupes, dans la tentative d’escalader le mur, expressément élevé dans les
dernières années. Près du port de Tanger, il est assez normal d’observer des jeunes et des mineurs stationner
sur le mur d’enceinte, pour profiter d’une inattention des gardes et s’introduire dans les aires
d’embarquement. Encore, au cours des embarquements pour l’Italie, il est souvent possible d’observer un
grand nombre de jeunes qui se pressent sur le quai parallèle et qui tentent de passer le long du filet de l’eau
vers les navires au départ.

7
Tanger: Enfants sur le mur du port , mars 2007

Ceux qui en ont la possibilité, s’adressent à la famille, aux voisins ou à des « patrons » pour réunir l’argent
nécessaire pour payer le voyage clandestin; argent qu’il devront, par la suite et une fois arrivés, rembourser
aux bailleurs de fonds. Le voyage prévoit plusieurs options à des tarifs différents : la plus économique et plus
risquée, qui coûte entre 1.500 et 3.000 euro, prévoit le passage via mer (jusqu’en 2006, du nord du Maroc
vers Gibraltar; aujourd’hui, en ajoutant les frais de l’avion, on passe le plus souvent par la Libye, à partir
d’où on s’embarque vers Lampedusa, voir plus loin). Plus élevé est le coût du voyage et meilleurs sont les
« garanties » : en cas d’interception ou d’expulsion immédiate par les autorités, la deuxième ou troisième
épreuve sont gratuites. Le moyen le plus sûr est aussi le plus cher (6.000/7.000 euro environ) et il est valable
exclusivement pour les mineurs : celui-ci consiste à paraître, avec photo et documents falsifiés, sur les
papiers de l’accompagnateur, en se faisant passer pour son enfant régulièrement autorisé. Dans ces cas, le
transit des frontières se fait en voiture ou en bus, et comme observent certains, « le résultat est garanti, et ils
te déposent directement à destination ».

Dans le jargon marocain, les émigrants clandestins sont définis harrâga : le terme dérive de la racine arabe
h.r.q, qui rappelle au domaine sémantique du brûler. Le terme – harîg duquel harrâga est le pluriel – est un
participe actif qu’on pourrait traduire par “celui qui brûle”. Au Maroc, la formule « brûler », en plus de faire
aujourd’hui référence par antonomase à l’émigration, est souvent utilisée pour désigner les infractions à une
interdiction ou à une limite (assez fréquemment : « brûler un feu rouge » à un croisement, mais aussi et par
métaphore, brûler les frontières). Le terme, qui semble pouvoir faire allusion à l’action de brûler à l’arrivée
les papiers d’identité, pratique assez courante il y a quelques années chez les migrants clandestins, renvoie
toutefois par analogie à la vaste production narrative de l’histoire de l’expansion islamique, où le mythe du
conquérant, souvent un chef navigateur, s’associe toujours à l’exclusion volontaire de l’idée du retour, à
travers le geste symbolique de brûler les bateaux après le débarquement. C’est ce qu’on raconte de Tariq Ibn
Ziyad, le conquéreur de l’Andalousie au VIII siècle, pour ne pas être tenté par le retour, mais c’est aussi le
mythe de la conquête de Siqilliyya (la Sicile) par les troupes de Assad Ibn Al-Firat en 827.

Les mineurs marocains en Italie

Le pourcentage total des mineurs étrangers présents en Italie est assez difficile à évaluer, en absence d’un
registre unifié à niveau national. Les estimations, pour toutes les nationalités, font allusion à 586.483 unités à
la fin de l’année 2005, c'est-à-dire le 19,3% de la population d’origine non italienne (Ricucci, 2006). Les
données les plus crédibles, qui ne décrivent cependant que la dimension régulière du phénomène, remontent
au recensement du 2001, d’où il résultait une présence de 284.224 mineurs étrangers (le 21,3% des étrangers
présents en Italie), dont le 18,6% était constitué de mineurs marocains (plus de 52.800) (Marinaro et Nanni,
2005). Si on devait appliquer un pourcentage analogue (donc sous-estimé) aux données actuels, on
obtiendrait un chiffre total de mineurs marocains équivalent à 109.085 unités: cette donnée est bien entendu
partielle, mais peut être suffisamment utile pour définir un ordre de grandeur du phénomène, qui comprend
les nouveaux-nés en Italie et les nouveaux arrivés.

L’estimation du nombre de mineurs étrangers non accompagnés est encore plus complexe, puisque la source
officielle la plus crédible, le Comité des Mineurs Etrangers, est informé uniquement des mineurs pris en
charge par les administrations locales et, malgré les prescriptions de la loi, pas encore dans la totalité des cas.
Selon les données reportées par Marinaro et Nanni, les mineurs non accompagnés signalés au Comité au 15

8
avril 2005 étaient 5.573, dont le 20,1% de nationalité marocaine: cela équivaut à 1.120 unités, à savoir le
deuxième groupe par nationalité après les roumains (Marinaro et Nanni, 2005).

Les données dont nous disposons, actualisées au 28 février 2007, indiquent un total de mineurs marocains
signalés au Comité équivalent à 1.555 cas, dont 1.442 garçons et 113 filles (correspondant au 7,2%). La ville
de naissance au pays d’origine est reportée dans le tableau 6.

Tableau 6: Ville d’origine des mineurs marocains présents en Italie

Lieu de Naissance CAS IDENTIFIES CAS NON IDENTIFES TOTAL % TOTAL

CASABLANCA 51 113 164 10,55%


KHOURIBGA 76 63 139 8,94%
BENI MELLAL 15 80 95 6,11%
OULED AZZOUZ 41 41 2,64%
OULED YOUCEF 24 17 41 2,64%
RABAT 12 18 30 1,93%
FQUIH BEN SALAH 18 18 1,16%
OUED ZEM 17 17 1,09%
BOUJNIBA 11 11 0,71%
BENI AMIR EST 8 8 0,51%
BENI OUKIL 8 8 0,51%
BEZZAZA 8 8 0,51%
Donnée manquante 528 528 33,95%
Autre 208 239 447 28,75%
TOTAL 497 1058 1555 100,00%
Source: Comité Mineurs Etrangers, février 2007

Comme on peut observer, la partialité de cette donnée est considérable, à cause de la grande proportion de
cas non identifiés avec certitude (c'est-à-dire ceux qui n’ont pas pu fournir, eux même ou par la famille
d’origine, un document d’identité) et pour le nombre considérable de données manquantes (un tiers du total).
Malgré ça, l’information reste importante, puisqu’il montre une tendance d’ensemble, très utile pour définir
les territoires potentiellement intéressés par des projets de prévention.

Autant significative est l’évaluation relative aux lieux de destination, par rapport auxquels l’estimation
devient représentative en terme de mouvement et de distribution territoriale (tableau 7).

Tableau 7: Mineurs marocains en Italie: province de relevé

CAS CAS NON


PROVINCE TOTAL % TOTAL
IDENTIFIES IDENTIFIES

TURIN 197 106 303 19,49%


MILAN 83 188 271 17,43%
AGRIGENTE 160 160 10,29%
BOLOGNE 12 38 50 3,22%
MODENE 8 34 42 2,70%
GENES 1 37 38 2,44%
NAPLES 6 31 37 2,38%
PADOUE 5 23 28 1,80%
BRESCIA 5 22 27 1,74%
ROME 5 22 27 1,74%
CONI 6 20 26 1,67%

9
PARME 8 18 26 1,67%
CREMONE 15 6 21 1,35%
SAVONE 4 17 21 1,35%
LUCQUES 1 19 20 1,29%
VERONE 11 9 20 1,29%
PRATO 6 12 18 1,16%
ALEXANDRIE 1 16 17 1,09%
FORLI'-CESENA 7 10 17 1,09%
VERCEIL 9 8 17 1,09%
BIELLA 11 5 16 1,03%
FLORENCE 16 16 1,03%
LODI 2 13 15 0,96%
PLAISANCE 2 13 15 0,96%
TRENTE 3 12 15 0,96%
ASTI 6 8 14 0,90%
BERGAME 3 10 13 0,84%
PAVIE 2 11 13 0,84%
CATANE 1 11 12 0,77%
REGGIO EMILIA 7 5 12 0,77%
VARESE 12 12 0,77%
VENEZIA 1 11 12 0,77%
BOLZANO 3 8 11 0,71%
RAVENNA 6 5 11 0,71%
VERBANO-CUSIO-OSSOLA 6 3 9 0,58%
VARESE 9 9 0,58%
IMPERIA 3 5 8 0,51%
LECCE 8 8 0,51%
LECCO 5 3 8 0,51%
TREVISE 2 6 8 0,51%
CATANZARO 7 7 0,45%
ROVIGO 4 3 7 0,45%
PESARO URBINO 6 6 0,39%
AOSTE 4 1 5 0,32%
BARI 5 5 0,32%
COME 1 4 5 0,32%
PEROUSE 1 4 5 0,32%
RIMINI 4 1 5 0,32%
VICENCE 5 5 0,32%
ANCONE 1 3 4 0,26%
CALTANISSETTA 4 4 0,26%
FROSINONE 4 4 0,26%
MANTOUE 1 3 4 0,26%
NOVARE 2 2 4 0,26%
RAGUSE 4 4 0,26%
UDINE 4 4 0,26%
AREZZO 3 3 0,19%
CHIETI 3 3 0,19%
GORIZIA 1 2 3 0,19%
MASSA-CARRARA 2 1 3 0,19%
MONZA ET BRIANZA 3 3 0,19%
PISTOIA 3 3 0,19%
BRINDISI 2 2 0,13%
CAGLIARI 2 2 0,13%

10
CASERTE 2 2 0,13%
FOGGIA 2 2 0,13%
GROSSETO 1 1 2 0,13%
L'AQUILA 2 2 0,13%
PISE 2 2 0,13%
POTENZA 2 2 0,13%
TRIESTE 2 2 0,13%
VITERBE 2 2 0,13%
BENEVENT 1 1 0,06%
CROTONE 1 1 0,06%
ISERNIA 1 1 0,06%
LIVOURNE 1 1 0,06%
PALERME 1 1 0,06%
SALERNE 1 1 0,06%
SASSARI 1 1 0,06%
SYRACUSE 1 1 0,06%
TERAMO 1 1 0,06%
TERNI 1 1 0,06%
REGGIO CALABRIA 1 1 0,06%
RIETI 1 1 0,06%
AVELLINO 1 1 0,06%
MACERATA 1 1 0,06%
MESSINE 1 1 0,06%
ORISTANO 1 1 0,06%
TOTAL 497 1058 1555 100,00%
Source: Comité Mineurs Etrangers, février 2007

Comme on peut relever des données, ce sont les provinces du Nord de l’Italie, caractérisées par une présence
importante de marocains (voir tableau 4), qui semblent accueillir de façon significative aussi les mineurs,
confirmant l’importance de la chaîne migratoire et du réseau de référence pour orienter les parcours. La
province d’Agrigente, en troisième position parmi les provinces de grande affluence, est massivement sur-
représentée, en vertu du fait que l’Île de Lampedusa tombe sous sa juridiction territoriale et est devenue, au
cours de la dernière année, l’un des principaux lieux d’entrée de migrants en provenance via mer de la Libye.
En fait, les mineurs, en totalité non identifiés, y transitent le temps de s’orienter par rapport aux références,
réelles ou imaginaires, de leur réseau de contact en Italie, pour ensuite se déplacer, en des temps brefs, vers
ceux-ci. En ce sens, la donnée la plus fiable est celle qui fait référence aux mineurs identifiés (tableau 8),
puisque le processus d’identification suppose un travail social et éducatif qui peut être réalisé exclusivement
dans des conditions de continuité relationnelle, garantie seulement par une situation de stabilité. À ce propos,
il est important de signaler que seulement quelque administration (et par zones très diversifiées) montre un
nombre de mineurs identifiés supérieur à celui des non identifiés. Pour les considérations précédemment
exprimées, cela semble une mesure de l’attention au problème et du type d’interventions mis en acte.

Nous l’avons déjà souligné: la donnée ne mesure pas uniquement l’effective présence sur le territoire, mais
aussi l’action des administrations locales dans les projets d’accueil et d’insertion (en plus de la correcte
communication de ces données au Comité). Cela n’empêche pas de relever que, au moins dans le cas de deux
des villes principales, Turin et Milan, il y a une nette correspondance entre la population globale des
marocains et le nombre des mineurs signalés. Il est plutôt l’anomalie représentée par les territoires de Brescia
e de Bergame qui frappe, où les mineurs non accompagnés ne semblent pas présents de façon proportionnelle
à la présence générale des émigrés : Brescia et Bergame représentent respectivement la troisième et la
quatrième ville d’Italie par nombre de marocains résidants, mais ne se retrouvent qu’à la neuvième et
vingtième place pour présence de mineurs « non accompagnés ».

11
La donnée relative à la destination en Italie est importante, mais il le devient encore plus si analysée en
relation avec les cas identifiés, pour lesquels il est possible de remonter à la ville d’origine, en éclairant les
parcours de manière plus précise (Tableau 8)

Tableau 8: Mineurs identifiés par ville d’origine et province de destination

LIEU DE
BENI FQUIH
NAISSSANCE BENI OUED OULED
AMIR BEZZAZA BOUJNIBA CASABLANCA BEN KHOURIBGA RABAT AUTRES Total
/ PROVINCE MELLAL ZEM AZZOUZ
EST SALAH
EN ITALIE

TURIN 1 9 26 7 41 10 35 6 62 197
MILAN 2 4 7 7 8 2 2 51 83
CREMONE 1 2 2 2 8 15
BOLOGNE 2 1 3 2 4 12
BIELLA 3 2 1 5 11
VERONE 2 1 8 11
VERCELLI 3 1 2 3 9
MODENE 1 1 1 5 8
PARME 1 1 6 8
AUTRE 4 8 2 7 2 20 2 3 3 92 143
TOTAL 8 15 8 11 51 17 75 16 40 12 244 497
Source: Comité Mineurs Etrangers, février 2007

Comme on peut observer, la ville de Khouribga est la localité de provenance la plus représentée. Si à ce
chiffre, on ajoute aussi le nombre de mineurs en provenance de Boujniba, Oued Zem et Ouled Azzouz, situés
dans la même province, nous obtenons un total de 142 unités pour la province dans son ensemble. Même ici,
cette donnée ressent du fait que de cette région les mineurs se déplacent principalement vers Turin, où
l’administration est particulièrement active, soit dans l’élaboration des projets d’accueil, soit dans la
signalisation des cas. Cependant il reste que cette donnée est très utile, pour l’identification d’une région du
Pays d’origine principalement intéressée par des actions de prévention et pour la mise en acte d’actions
impliquant les administrations locales italiennes.

Une fois arrivés sur le territoire italien, les mineurs essayent de rejoindre leurs contacts adultes qui leur ont
promis l’aide ou qu’ils pensent peuvent le faire. La quasi-totalité des nouveaux arrivés se méfie des
opérateurs des centres d’accueil et s’enfuit, aussitôt qu’il est possible, vers les villes de référence. La réalité
de ces lieux peut être initialement accueillante, renvoyant un sens de liberté et de réussite personnelle, mais
avec le temps elle devient plus problématique, pour l’émergence de la raison même de l’ « être ici » dans la
capacité de produire et d’envoyer de l’argent. Plusieurs mineurs racontent avec fierté de l’investiture reçue à
distance par la famille (« maintenant tu es grand, tu dois penser à toi-même »), mais aussi au brusque sens de
responsabilité suscité par les fréquentes allusions à la situation de la famille dans le pays d’origine. Dans ce
contexte, des demandes explicites ne sont pas nécessaires, en étant suffisantes des insinuations à peine
voilées – à un électroménager tombé en panne, à la fatigue à se déplacer à pied, au coût des livres pour les
frères – pour signifier ce que tous savent déjà : que celui qui a eu la chance de partir, doit maintenant
répondre aux attentes collectives.

Il est en vertu de ses sollicitations que s’impose à l’évidence une réalité beaucoup plus complexe de celle
imaginée au pays : le travail est formellement interdit et les adultes qui ont garanti leur aide sont souvent
incapables de protection et, eux-mêmes, en situations de précarité. Les maigres possibilités sociales, par
rapport à l’exigence d’une rapide productivité imposée par la situation, poussent alors vers des activités qui
se réalisent dans l’informel (petit commerce de rue, parking abusif, nettoyage des pare brises aux feux) et qui
tôt finissent dans quelques cas par empiéter dans l’illicite. La comparaison avec les compatriotes était déjà
active avant le départ, mais elle devient maintenant encore plus marquée dans la compétition morale entre
celui qui est plus habile à gagner et à envoyer de l’argent. La marque de la valeur personnelle s’écarte
progressivement d’une force de caractère qui s’exprime dans la résistance et dans le tempérament vers une

12
capacité qui se mesure en terme de gain : c’est à ce moment que le flûss, l’argent, prend le dessus et devient
l’unité de mesure des choses et du sens de soi.

La possibilité d’échapper aux tensions de la réalité se trouve ainsi réalisée par le passage progressif à ce qui
est harâm (« illicite »), souvent mis en pratique en adhérant à la proposition d’un compatriote qui propose la
vente de stupéfiants en tant que stratégie de gain rapide et efficace. Avec les activités micro criminelles,
l’argent afflue rapidement, mais sa possession est vécue avec une profonde ambiguïté, parce qu’illicite, et
dans le fond dépourvue de perspectives. Le vide qui s’accompagne au sens de suspension et à l’absence
d’alternatives peut être comblé par la consommation des même substances vendues ou par le fréquent abus
d’alcool, puissante stratégie de l’oubli. C’est sous son effet qu’il peut arriver de se laisser aller à l’impulsion
de s’approprier de ce bien-être qui est tout autour, si proche, mais barré, et dans le fond impossible à
atteindre autrement.

Mineurs marocains et circuit pénal

La prépondérance des mineurs marocains dénoncés pour délits est confirmé par les données du Département
de Justice pour les Mineurs, desquels il ressort une croissance du phénomène du 2001 au 2003 (tableau 9),
période pendant laquelle les marocains ont constitué le deuxième groupe d’étrangers le plus dénoncés.

Tableau 9: Mineurs marocains dénoncés, années 2001-2003


Garçons Filles Tot.
2001 1.657 49 1.706
2002 1.759 63 1.822
2003 2.154 52 2.206
2004 n.d. n.d. 2.052
Source: Département de la Justice des Mineurs, 2007

Dans l’année 2004 les plaintes font allusion le plus souvent à des délits contre le patrimoine, presque la
moitié du total des 2.052 délits, dont la plupart pour vol (560, dont 20 filles). Ils sont suivis par des
infractions associées au trafic de stupéfiants (366 cas, dont 4 filles), recel (186), fausseté en actes et
personnes (faux document et fausse identité, qui impliquent 149 mineurs), rapine (145) et lésion volontaire
(141).
Si le pourcentage sur le nombre total de plaintes sur mineurs est encore relativement bas (entre 5 et 6 % dans
la période considérée), la présence dans les instituts de détention s’avère décidément plus significative.
Celui-ci constitue le vrai indicateur de la condition sociale plus générale (Dal Lago, 2001; Wacquant, 1999;
Wacquant, 2002) : le manque de ressources familiales et sociales d’appui ne permet pas au mineur marocains
de disposer de celles mesures alternatives à la détention qui s’offrent pour les italiens et pour les mineur
d’autres nationalités, en provoquant une sur-représentation d’eux dans les instituts pénitentiaires. Dans la
période 2001-2006, la présence moyenne journalière dans les instituts pour mineurs est entre 71 et 58 cas
chaque jour, presque exclusivement des garçons, constituant le 14% en moyenne de tous les mineurs détenus
(avec un chiffre en décroissance avec le temps).

Les données relatives aux mineures marocains qui ont séjourné dans les Centres de Premier Accueil (CPA)
en 2006 sont de grand intérêt. A partir de ceux-ci, il est possible de mettre en évidence la ville de naissance
et la ville italienne dans laquelle le délit a été commis. Le total des jeunes marocaines entrés dans les CPA
est de 288 unités, dont seulement 156 de provenance établie. La ville italienne où la concentration
d’infractions est la plus importante est Milan avec 39 cas, dont 14 enfants provenant de Beni Mellal, 10 de
Casablanca, 4 de Oued Zem et 3 de Ouled Youcef (province de Beni Mellal) : ces données confirment de ce
fait la relation particulièrement significative entre la province de Beni Mellal et celle de Milan. La deuxième
ville pour admissions dans les CPA est Turin avec 30 délits, dont la grande majorité commises par des jeunes
provenant de Casablanca (23 cas), avec seulement 2 cas de Khouribga (deuxième province par ordre de
présences) et 1 cas pour Beni Mellal, Loulad, Marrakech, Ouled Brahim et Rabat. Aux deux premiers chefs-
lieux suivent Gênes et Florence avec 19 présences chacune (avec des provenances amplement diversifiées,
entre lesquelles 4 cas de Krakra et 3 de Meknes à Gênes et 11 de Casablanca, 3 de El Kelaa et 3 de
13
Khouribga à Florence). La cinquième ville italienne est représentée par Bologne, avec 7 enfants en
provenance de Casablanca et 1 de Khouribga. De ces données, on observe que les jeunes en provenance de
Casablanca sont ceux majoritairement représentés dans les CPA avec 64 cas au total, suivi par la province de
Beni Mellal avec 22 cas et la province de Khouribga dans son ensemble avec 19 cas. La quatrième localité
par provenance est représentée par Krakra, avec des présences surtout dans la province de Gênes.

Ces données, quoique loin de l’exhaustivité, permettent de confirmer, même si partiellement, certaines des
lignes supposées pour l’émigration des mineurs entre le Maroc et l’Italie: on observe une présence
considérable de jeunes de Casablanca surtout à Turin, puis à Milan, Florence et Bologne, alors que les jeunes
de Beni Mellal, comme déjà observé, se trouvent principalement à Milan. Les jeunes migrants en provenance
de Khouribga, semblent concentrés surtout à Turin, même si la donnée est pas représentée par le pourcentage
relatif à la déviance (seulement 2 cas à Turin, et 4 et 3 respectivement entre Rome et Florence), quoique, le
rappelons, il s’agit de données très influencées par le maigre nombre de cas identifiés. Les autres localités de
provenance sont représentées en manière variable et en proportions négligeables.

Un approfondissement
Khouribga: notes sur démographie et territoire

Khouribga est le chef-lieu d’une région de 4.250 km2 qui regroupe 5 communautés urbaines (Kouribga,
Hattane, Oued Zem, Boujniba e Bejaad) et 26 communes rurales.
Des chiffres du dernier recensement (Haut Commissariat au Plan, 2004) il résulte que la population de la
province est évaluée à moins d’un demi million d’habitants, précisément 496.734 unités, dont 51,8% de sexe
féminin. Le pourcentage des jeunes est considérable : le 31,1% de la population a moins de 14 ans, alors que
presque le 40% est constitué de mineurs (195.648 unités, dont le 50,7% de sexe masculin). La répartition des
mineurs par classe d’âge est représentée dans le Tableau 10, alors que la donnée plus analytique entre 15 et
18 ans est reportée dans le Tableau 11.

Tableau 10: Répartition des mineurs par tranche d’âge


Age Garçons Filles Total
0-4 24.654 24,8% 23.771 24,7% 48.425 24,8%
5-9 26.420 26,6% 25.081 26,0% 51.501 26,3%
10-14 27.781 28,0% 25.081 26,0% 54.553 27,9%
15-18 20.405 20,6% 20.764 21,5% 41.169 21,0%
Total 99.260 50,7% 96.388 49,3% 195.648 100,0%
Source: CERED, Maroc, Elaboration des données du recensement, Avril 2007

Mineurs dans la province de Khouribga: répartition par


tranche d'âge

30.000
25.000
20.000
Maschi
15.000
Femmine
10.000
5.000
0
0-4 5-9 10-14 15-18

Tableau 11: mineurs à Khouribga entre 15 et 18 ans


Age Garçons Filles Total
15 5.300 5.271 10.571
16 5.154 5.197 10.350
17 5.023 5.149 10.172
18 4.928 5.148 10.076
Total 41.169
Source: CERED, Rabat, Elaboration des données du recensement, Avril 2007

14
La donnée concernant les mariages reflète le jeune âge de la population (44,7% des hommes et 31,2% des
femmes ne sont pas mariés), mais il faut relever que la moyenne d’age au premier mariage est décidément
différenciée par genre (31,4 ans pour les hommes et 25,8 ans pour les femmes). Même les pourcentages
relatifs à l’analphabétisme sont caractérisés par la dimension du genre, de l’ordre du 27,1% pour les hommes
et atteignant le 40,2% pour les femmes, alors que pour les études supérieurs (universitaires) la donnée
s’aligne pour les deux sexes sur des bas pourcentages, respectivement de l’ordre du 5,7 et du 3,2%.

La province de Khouribga se distingue dans la région de Chaouia-Ouardigha à laquelle elle appartient, par un
taux d’urbanisation assez élevé (65,6%) en comparaison avec les autres provinces (Settat et ben Slimane), et
par la densité de sa population qui équivaut à 116 habitants/km2 (à Settat et Ben Slimane sont respectivement
75 et 95, alors que la moyenne nationale est de 74.4 habitants/km2 ). Les familles sont au nombre de 95.643,
composées en moyenne de 5,2 personnes, avec un taux de fécondité égal à 2.4 enfants par femme, à peine en
dessous de la moyenne nationale (2,68), mais en dessus des autres provinces de la région (Ministère de
l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de l’Environnement 2004).

L’effectif de la population urbaine a été en progressive croissance dans toute la région, mais, comme ça a été
signalé, avec une nette prépondérance pour la province de Khouribga, où à côté de la croissance
démographique naturelle est venu s’ajouter le résultat de la migration rurale. En ce sens, un grand nombre de
communes rurales de la province sont confrontés à une décroissance démographique qui des fois atteint des
pourcentages élevés. Des 26 communes rurales, 20 communes ont vu le nombre de leur habitants décroître
du 1994 au 2004, avec une décroissance moyenne de 1,4%. Par contre, la population urbaine a diminué
seulement dans le cas de la municipalité de Hattane (-0,9%), alors qu’elle a augmenté en moyenne de 1,1%
dans les autres centres urbains (la ville de Khouribga a augmenté de 0,9%) (Haut Commissariat au Plan,
2004).
Le 6,2% de la population provinciale vit dans des habitations considérées “sommaires” (concentrées par la
majorité des cas dans les villes), alors que les deux tiers du total des habitations est sans salle de bain et le
tiers sans eau potable (Haut Commissariat au Plan, 2004). Selon les résultats d’une enquête sur l’habitat
réalisée en 2002, à Khouribga 1.381 personnes vivent dans des baraques et 11.839 (53% de toute la région)
habitent des quartiers dépourvus des infrastructures nécessaires (Ministère de l’Aménagement du Territoire,
de l’Eau et de l’Environnement 2004).

La population totale considérée “active” (15-59 ans) est composée de 169.489 unités. Laissant l’exploration
détaillée des potentialités du marché du travail à un approfondissement ultérieur, nous citerons
exclusivement les données disponibles pour quelques unes des aires productives du territoire: industrie,
commerce et services. En l’an 2001, on enregistre dans toute la région de Chaouia-Ouardigha presque 300
entreprises, qui réalisent le 4% de la production nationale et emploient 13.892 personnes. L’industrie agro-
alimentaire est prépondérante (31%), suivie de l’industrie chimique (30%) et de celle du secteur
métallurgique et mécanique (22%). Le travail du cuir et les entreprises du secteur électrique et électronique
représentent respectivement le 12 et le 5% (Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de
l’Environnement 2004). Toutefois, la plupart de la main d’œuvre est absorbée par la province de Settat, qui
couvre en 2001, le 84% des postes de travail. Nous renvoyons à une étude plus approfondie pour l’évaluation
des potentialités des industries minières, importantes surtout pour la province de Khouribga.

La forme prédominante des activités commerciales est liée à la présence de petites réalités peu spécialisées
dans les contextes urbains, avec presque 450 commerces qui emploient au total 1.500 travailleurs. Le souk
hebdomadaire représente un contexte important pour les échanges commerciaux dans certaines zones, en
particuliers dans les aires rurales. Il est par contre l’artisanat qui semble représenter une des ressources
spécifiques de la province, avec 47% des établissements de la région.

La région dans son ensemble est caractérisée par un taux de chômage qui du 1982 au 1994 est passé de 13 à
20%, dépassant le 38% pour les femmes et se concentrant spécialement dans les contextes urbains (23%)
(Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de l’Environnement 2004). L’économie de
Khouribga est traditionnellement liée à l’activité minière, avec l’importante présence de l’OCP (Office
Chérifien des Phosphates), une des principales industries du pays. La régression de l’activité et des services

15
liés au secteur de l’extraction a marqué de façon significative la dynamique locale, jouant un rôle non
négligeable dans la forte émigration qu’enregistre la province aujourd’hui.

Conclusions: les jeunes entre localité et exile

Les jeunes de la province reportent des difficultés à trouver des emplois adéquats, mais aussi une carence de
ressources d’affiliation et de socialisation. Les rapides mutations du style de vie conséquent à l’urbanisation
et aux changements sociaux en général ont fait ressentir beaucoup plus le manque d’opportunité de mobilité
sociale pour les familles et de réalisation personnelle pour les individus, contribuant ainsi à accroître la
visibilité sociale des migrants et la sensibilité à leur potentielle réussite. C’est à la haute performativité de
cette image que les jeunes semblent plus exposés, se retrouvant souvent vulnérables à une « logique du
désir » mûrie dans un contexte familial de longue période : à la base on retrouve l’idée de la rémunération de
l’« émigrer à n’importe quel prix », indépendamment du risque et des problèmes que cela peut comporter, en
particulier pour lesdits « mineurs non accompagnés ». Un faible sens de cohésion sociale et d’identité
communautaire ne permet pas de contrebalancer la représentation univoque de la migration à travers une
perception de la localité « sentie » et « vécue » au quotidien. C’est à partir de ses prémisses que prend forme,
déjà en âge précoce, l’idée du ghorba (exil) comme seule opportunité concevable de réalisation, pour soit
même et pour la propre famille, d’un futur différent de celui, ressenti comme inéluctable, de ceux qui restent.

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