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L E NOMBRE D'OR E T SON U T I L I T É

par

M. Fernand BARRÉS

Je crois préférable d'étoffer ce titre ainsi : Les trois principes


d'ordre, d'épargne et d'harmonie dans la nature et dans les arts.
Le nombre PHI.

Je me référerai tout d'abord à Spinoza qui affirme qu'il y a


deux sortes de natures : la naturante ou celle des causes (et je l'é-
carté ) , et la naturée ou celle des voies et moyens, et je l'adopte, car
elle me facilite mon propos.

Après Spinoza, voici Berlioz et son œuvre magistrale La Dam-


nation de Faust qui contient cette page maîtresse de l'Invocation
à la Nature, scène X V I , Forêts et cavernes, écrite en vers ardents,
où les rochers croulent, où les torrents précipitent leurs ondes, etc.
Dans ce magnifique tableau forestier, notre grand musicien roman-
tique a volontairement « chahuté » le décor d'une forêt qui, même
sauvage, devait être en ordre, d'un ordre naturel et souverain.
Ah ! cher Berlioz, en quittant cette forêt, que n'avez-vous
ramassé, vu et contemplé de près un simple cône d'épicea si sage-
ment ordonné dans sa structure... Il vous eût apaisé. Or, plus de
cent ans auparavant, M. de Fontenelle, faisant l'éloge de M. de
Tournefort, le grand botaniste d'Aix-en-Provence (né en 1 6 5 6 ) ,
disait ceci (je cite) : « En 1694 parut le premier ouvrage de M. de
Tournefort, intitulé « Elemens de botanique » ou méthode pour
connaître les plantes. Il est fait pour mettre de l'ordre dans ce
nombre prodigieux de plantes semées si confusément sur la terre
et même sous les eaux de la mer. Cet ordre si nécessaire n'a point
été établi par la nature qui a préféré une confusion magnifique à la
commodité des physiciens, etc. » Mon premier mouvement est de
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m'insurger contre cette assertion gratuite, et mon second, de dire


et démontrer par un exemple que non seulement la nature est
ordonnée, mais qu'elle est aussi économe ou épargnante. Ce qui
e
m'amène à remonter au xvn siècle avec Pierre de Fermât (1601-
1 6 6 5 ) . Celui que Pascal nommait «le premier homme du monde»
était, de son métier, conseiller au Parlement de Toulouse, mais
il était aussi un « amateur » de génie, et tenu, de son temps, pour
le plus grand géomètre de l'Europe. L'un de ses principes, hérité
de Pythagore et de Platon, est que « la Nature opère toujours
par les moyens et les voies les plus faciles et les plus aisés».
C'est ainsi qu'il a résolu, le premier et correctement, contre Des-
cartes, le problème du rayon réfracté. En écrivant que la somme
des temps mis par le rayon lumineux à parcourir d'abord l'air
à vitesse V, puis l'eau à vitesse U, doit être un minimum, et
trouvant ce minimum par annulation des dérivées, Fermât, dans
sa page immortelle dite « Synthèse pour les réfractions » aboutit
à la fameuse loi des sinus sin i / V = sin r / U , i et r étant les
angles d'incidence et de réfraction.
C'est par la même méthode de recherche d'un minimum (ici
économie de la cire) que M. de Rêaumur (en 1 7 3 4 ) , s'occupant
des abeilles, put calculer l'angle du fond des cellules hexagonales
de 70° % et vérifier sa justesse.

Voici donc, indiscutés, deux exemples fameux d'épargne


naturelle.
Ayant ainsi effleuré Vordre et l'économie de cette nature
naturée, voyons donc si, de plus, elle n'est pas harmonieuse. C'est
ici que le nombre d'or O (ou phi) intervient.
Nous avons tous appris vers notre seizième année, et dans
nos géométries élémentaires, au livre I I I , à partager une droite
en moyenne et extrême raison. Si a et b sont les longueurs des deux
segments de cette droite, on obtient la relation
a a+ b 1
= =
— = ou m 1 + —
b a m
C'est ce rapport m, à la fois économe et harmonieux, qui est le
nombre d'or dont la nature s'est, en de multiples occasions,
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emparée et dont elle est prodigue. On transforme tout de suite la


2
relation précédente en celle-ci : m = m + l . On voit tout de
suite aussi que m est la raison d'une progression géométrique :
2 3 3 2
1, m, m , m , etc., et additive à deux termes : m = m + m,
2
et mieux encore : m = m + 1. Elle donne l'équation remar-
2
quable m —m—1 = 0 dont la valeur positive est m V 5 + 1 = 1 , 6 1 8 .
2
C'est là la valeur numérique, arrêtée à la troisième décimale
suffisante, de ce rapport doré, harmonieux, dit aussi nombre d'or
et qu'on représente par la lettre <E> (phi).

La main. Son chef-d'œuvre, nous le portons en nous. En


effet, quand on regarde et qu'on mesure avec attention le squelette
d'une main humaine, on fait de la biométrie, et on constate, émer-
veillé, la progression d'or des os de nos doigts. Si l'on désigne
par 1 la longueur de la phalangette, on trouve O = 1,618 pour
2
la phalangine et O = 2,618 pour la phalange. Le métacarpien
3 2
suit cette loi harmonieuse et sa longueur O = O + <D = 2,618
+ 1,618 = 4,216. Vérifiez-le. C'est la plus belle des chiromancies.
Le nombril. Voici une autre partie du corps humain où ce
nombre d'or intervient, d'une manière à la fois ambulante et
asymptotique. Il s'agit du nombril. A sa naissance, l'enfant a son
nombril au milieu du corps de longueur supposée égale à 1, soit
0,5 au-dessus et 0,5 au-dessus. Mais peu après, le nombril monte
graduellement, et à l'âge adulte, les longueurs sont de 0,618 au-
dessous, et seulement 0,382 au-dessus. Et l'on a bien la relation
0,618
harmonieuse = <D.
0,382

La spirale logarithmique. Etant donné la simplicité de sa


formule, il est très facile de construire géométriquement un rec-
tangle d'or de dimensions 1 X O. Ensuite, par l'adjonction sur
le grand côté O d'un carré qu'on appelle un gnomon, on réalise
un second rectangle semblable à 1 X O, et ainsi de suite. On
obtient ainsi une enveloppante de ces rectangles d'or, qui est loga-
rithmique, le pôle de cette spirale étant le point de concours des
deux diagonales des deux rectangles adjacents. Ces deux diagonales
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sont d'ailleurs orthogonales. Tout cela, c'est de la géométrie élé-


mentaire. Les savants biomètres peuvent utiliser ces spirales expo-
nentielles par leurs pulsations, c'est-à-dire les rapports des rayons
vecteurs intéressant une même spire ou deux spires voisines. Mais
on peut aussi employer un schéma plus commode qui est comme
le reflet diophantin à nombres entiers de la progression O et qui
est la suite de Léonard Bonacci (géomètre italien), dit Fibonacci,
né à Pise en 1175. C'est la Série F = 0 1 / 1 2 3 5 8
13 21 34 55 89 144... qui est une suite additive à deux termes
et dans laquelle le rapport entre deux termes consécutifs tend
rapidement par + ou — vers le nombre d'or O. Cette série F
a une certaine prééminence en botanique ainsi que sa série frac-
tionnaire dérivée : 1/3, 2 / 3 , 3 / 5 , 5 / 8 , 8 / 1 3 , 1 3 / 2 1 , 2 1 / 3 4 ,
3 4 / 5 5 , 5 5 / 8 9 , 8 9 / 1 4 4 ; ainsi le terme 3 4 / 5 5 est utilisé pour la
fleur et les graines du tournesol ; 2 1 / 3 4 pour la grande margue-
rite ; 5 / 8 dans la plupart des pommes de pin ; 8 9 / 1 4 4 pour telle
qualité de graines à grand rendement.
Les ormeaux (haliotis tuberculata). Ce sont ces mollusques
gastéropodes ou coquilles monovalves qu'on trouve assez abondam-
ment à l'île de Bréhat (C.-du-N.). J'y ai fait dans un même
habitat de cette île et depuis une trentaine d'années des pêches
de ces coquilles de toutes dimensions, sur lesquelles on voit nette-
ment les spirales logarithmiques génératrices qui déterminent de
proche en proche les surfaces gnomoniques incurvées qui assurent
la continuité de l'homothétie.
Voici ce qu'en dit Paul Valéry dans «L'homme et la coquille»,
tandis qu'il tient en mains un haliotis tuberculata :
« Essayons de nous représenter cette formation mystérieuse.
Feuilletons de savants ouvrages sans prétendre les approfondir, et
sans nous priver, le moins du monde, des avantages de l'ignorance
et des caprices de l'erreur, etc. »
Et plus loin, en conclusion : « Cette coquille m'a servi, excitant,
tour à tour, ce que je suis, ce que je sais, ce que j'ignore. Et, comme
Hamlet ramassant, dans la terre grasse, un crâne, et l'approchant
de sa face vivante, entre dans une méditation sans issue, ainsi,
sous le regard humain, ce petit corps calcaire, creux et spiral appelle
autour de soi quantité de pensées dont aucune ne s'achève ».
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J'ajouterai ici les opercules de turbos qu'on voit au musée Risso


à Nice ; ils ont une face bombée extérieure et plane intérieure.
Sur celle-ci, figure leur état civil de croissance harmonieuse et
continue. La nature l'y a gravée elle-même par sa spirale loga-
rithmique. Le coquillage turbo est ainsi son propre archiviste. Au
musée de Marseille, j ' a i vu aussi sa salle dite de Provence, qui
est magnifiquement organisée pour ce qui concerne la conchylio-
logie. Il y a des vitrines de turbos : astralium, margariteceus, etc.,
avec opercules.
Voici, encore, comme illustration du nombre d'or :
a) La coupe êquatoriale d'une pomme : Dans le monde végé-
tale, parmi les Rosacées, la pomme est la dominatrice. Elle est
de structure pentagonale, elle est quasiment un dodécaèdre vivant.
Par sa coupe êquatoriale avec son pentagone étoile qui renferme
les logettes des graines, et sa « révélation » décagonale qui l'en-
toure, elle est vraiment l'écrin végétal du nombre d'or.
b) La carcasse d'un tourteau de l'île Bréhat. C'est le « cancer
pogurus ». Ces crustacés persistent à rester proportionnels à O X 1,
depuis les longues années que je les déguste en ne cessant de les
observer.
c) Les feuilles d'hortensias. Nombreux examens dans cette
île Bréhat qui est le paradis des fleurs et surtout des hortensias.
Les modules de leurs feuilles varient de 1,55 à 1,66 (O = 1,618).

Entrons maintenant dans le domaine de l'Art.


Architecture. La Pyramide de Chêops. En février 1 9 5 1 ,
nous étions, ma femme et moi, au Caire ; nous sommes restés
deux mois en Basse et Haute-Egypte. J'eus l'occasion de connaître
et fréquenter le chanoine Drioton, directeur général des Antiquités
de l'Egypte, et, par lui, à Saqqarah, M. Jean-Philippe Lauer, archi-
tecte égyptologue de ce site. Entre les deux guerres, il a participé
à tous les déblaiements accomplis dans les champs des Pyramides.
Il a, ainsi, de son propre chef, restitué les plans de la pyramide à
degrés de Saqqarah et du Temple haut de Khéops. C'est de lui que
j e sais l'essentiel et le vrai sur les particularités géométriques
ou numériques que recèlent ces monuments. Et pour la grande
Pyramide de Cheops, à base carrée, l'essentiel tient en deux nom-
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bres entiers. C'est le côté de la base et la hauteur qui ont respec-


tivement 440 et 2 8 0 coudées égyptiennes. L'apothème de chaque
2 2
face triangulaire isocèle s'en déduit aisément, c'est V ( 2 8 0 + 2 2 0 )
= 356 c.r.l. Cet apothème, on le sait, est la ligne de plus grande
pente de chaque face qui fait avec la base un angle a dont la sécante
trigonométrique voulue par le bâtisseur Imhotep est exprimée par
356
sécante a = = 1,618 exactement. Cette révélation, nous la
220
devons au premier chef à Pythagore ; et Platon, dans son dialogue
du Timée, l'a confirmée.
Ce rapport <D, de notre temps, le grand architecte Le Corbu-
sier, pour le mundaneum de Genève, s'en est servi dans l'ordon-
nance générale. Et depuis, il l'a intégré dans son fameux « mo-
dulor » : deux échelles de proportion y figurent toutes deux dérivées
des proportions du corps humains.
Au sujet de ce thème si prenant du rapport <D dans l'architecture,
je me dois d'abréger ; j'ajouterai toutefois encore ceci :
Dans le livre si fouillé de Carcopino, La Basilique pythago-
e r
ricienne de la Porte majeure, il est dit que, à la fin du I siècle
avant J.-C, les adeptes de Pythagore ralliés sous le signe du penta-
gramme, possédaient une église dans la Rome impériale sous
l'empereur Claude, ce qui permet de mesurer la grande influence
du pythagorisme sur le monde antique. Et dans ce domaine de
l'art de bâtir, on pourrait voir longuement : la transmission de la
géométrie ésotérique par l'architecture ; les corporations de bâtis-
seurs antiques et moyenâgeux ; le compagnonnage ; les pentagram-
mes dans les rosaces de N-D et à la Sainte-Chapelle à Paris ; ceux
des Roses nord de Saint-Ouen à Rouen et de la cathédrale d'A-
miens, etc. Et s'y ajouteraient tous ces signes lapidaires issus des
diagrammes pythagoriciens (monogrammes, polygones, etc.) réa-
lisés par les mains expertes des « imagiers » dans les bâtiments
civils et les édifices sacrés. Et à ce sujet, récemment, l'abbé Charles-
Y . Ledit et l'abbé Zeltz ont publié (Tetraktys), sous le sigle commun
de « l'art au départ du nombre », un beau livre richement illustré
dont les trois chapitres : Les chanoines de Pythagore ; une cathédrale
au nombre d'or ; Corés de chez nous, rendent visible, évident et
vivant le nombre harmonieux O pour ces édifices sacrés de Troyes.
112 L E NOMBRE D'OR

Et combien d'enquêtes semblables et de résultats heureux


pourrait-on énumérer !

Le nombre <D et les arts plastiques.

a) Le reliquaire de sainte Fortunata. Sa reproduction est un


buste de plâtre moulé que la patine du temps a fini par ivoirer.
L'ensemble de cet ineffable visage et de son coffret aux reliques
est inscrit dans un prisme droit idéal, de dimensions: base = 1 X 1 ;
hauteur = 1,618 = O.
L'harmonie de ce volume contribue à notre délectation (non
morose, bien sûr).
b) La Cène de Léonard de Vinci. Dans sa remarquable
« Introduction à la méthode de L. de Vinci », Paul Valéry, au
sujet de cette fresque à Milan, s'exprime ainsi : « A fond, il y
u

a trois fenêtres. Celle du milieu s'ouvre derrière Jésus. Elle est


distinguée des autres par une corniche en arc de cercle dont le
centre est sur le Christ. » Il y a là, sans doute, l'existence d'une
divine proportion que connaissait le peintre, ami du mathématicien
Luca Pacciolo, moine franciscain, qui la lui dévoila.
c) La Vierge aux Rochers de L. de Vinci. Cette peinture.,
qu'il vaut mieux définir comme étant « La Caverne du Clair
obscur » et qui est au Louvre, est typiquement tracée selon le
nombre O. Elle constitue une application particulière de la compo-
sition de forme ronde dans des rectangles allongés. Le groupe entier
des personnages peut aussi s'inscrire dans un décagone régulier
inscrit. L'index de l'un des quatre personnages semble donner la
direction où trouver le centre de la composition mystérieuse de
ces huit mains, dont le rythme donne « l'illusion parfaite d'un
quatuor vocal» (dixit Bérence).

Le nombre O et la musique.

En ce qui concerne les instruments à cordes, rappelons que


les facteurs de Crémone, puis de Mirecourt, façonnent la lutherie
suivant des épures nettement tributaires du nombre O. Pour le
violon et le luth, ces dessins sont clairs et nets. Mais beaucoup de
détails restent secrets.
L E NOMBRE D'OR 113*

Chants des oiseaux. Il existe, de Mozart, un sublime quintette


à cordes en mi bémol b n° K 614 qu'il a composé en 1791, l'année
de sa mort, où il joue, selon Henri Ghéon, « comme un jongleur,,
avec de l'or et des diamants ». C'est le quintette des oiseaux. Il y a
là dedans un mystère et une obsession de l'unité « oiseau » et
cependant tout est d'un classique très strict. Ainsi la quinte y
vaut 3 / 2 = 1,5.
Or, en 1958, notre grand musicien moderne et provençal
Olivier Messiaen traduisit pour le piano vingt-sept heures de vie
et chants d'oiseaux qu'il écouta dans les étangs, marais, bois et
champs de la Sologne et de nuit et de jour. J'ai entendu par le
disque, ou mieux, par le piano, les « restitutions » de ces chants
d'oiseaux, et n'en suis point satisfait comme avec le quintette à
cordes K 6 1 4 .
Il serait, à mon avis, intéressant de faire reprendre, par un
ingénieur du son, l'analyse, disons « immédiate » de ces concerts
d'oiseaux, et voir si ces musiques ne renferment pas une quinte
d'harmonie naturelle <D = 1,618 au lieu de la quinte dite juste
de 3 / 2 = 1,5. Après tout, il n'y a qu'une faible différence en
exhaussement de 0,118, soit 11,8 % . Un piano construit ad hoc
et ainsi accordé à la quinte <D nous amènerait peut-être à une
découverte heureuse, par exemple, manifestation de bénéfices har-
moniques.
Un musicographe savant suisse, M. A. Dénéreaz, a, il y a une
trentaine d'années, essayé d'introduire le nombre d'or dans la
gamme. Depuis et assez récemment, il a donné des aperçus plus
subtils encore et une justification troublante des intuitions musico-
astronomiques inspirées, du reste, du plus pur pythagorisme qui
firent d'ailleurs découvrir à Kepler (1571-1630) ses trois immor-
telles lois sur les planètes dont surtout la dernière (loi harmonique)
d'un intérêt capital. Kepler, d'ailleurs, a déclaré que les deux
joyaux de la géométrie sont : a) le triangle d'or 1 V O <ï> qui dort
dans la pyramide de Kheops, et b) le triangle 3, 4, 5 qui est
rectangle aussi et dort dans la pyramide voisine dite de Khephren,
révélés d'ailleurs tous deux à l'instigation de Pythagore.
Ceci m'amène, pour terminer, à rappeler opportunément quel-
ques noms prestigieux, par la pensée et le savoir et à qui l'huma-
nité doit être reconnaissante.
414 L E NOMBRE D'OR

Je viens de nommer Pythagore auquel on doit ajouter Platon.


On croit que le premier de ces deux-là n'est que l'auteur du
théorème intitulé le « Pont aux ânes » (avec son quatrain sur le
carré de l'hypothénuse). Mais ce contemporain de Boudha et de
Confucius est mieux que cela : il a médité et approfondi l'idée du
nombre dont la théorie a traversé les 2.500 ans environ qui nous
séparent de lui et dont le nombre d'or est « l'invariant » le plus
remarquable. Ces nombres se logent actuellement dans les cases
«d'un échiquier dit « matriciel » dans les laboratoires de recher-
ches de nos mathématiciens modernes, créateur entre autres des
calculatrices électroniques. Platon, qui a été, en somme, le plus
illustre de ses disciples, doit, à bon droit, partager sa gloire.
J'arrive ensuite à Léonard de Vinci (1452-1519, ce génie uni-
versel qui, bien avant Fermât et Maupertuis, avait énoncé le principe
de moindre action. Rappelons la phrase lapidaire de ses carnets :
« La nature n'enfreint jamais sa propre loi. Par cette loi suprême
et inexorable, chaque action naturelle obéit par le processus le
plus court. »
Ce principe rigoureux (ostinato rigor, disait-il), le grand Léo-
nard l'a mis en application dans tous ses travaux : peinture, archi-
tecture, sculpture, mécanique, art de l'ingénieur, hydraulique, etc.
Je redis ici que la Cène, la Vierge aux Rochers sont des toiles qui
ont, par lui, été préparées par la mise en équation harmonieuse du
nombre O. J'ajoute encore ceci. Il disait : Je veux être utile. Et,
à ce titre, notre Compagnie pourrait le nommer « vénérable cor-
xespondant ». Qui dit mieux ?
J'ajoute à son nom celui de son cadet nurembourgeois Albrecht
Durer (1471-1528). Ces deux contemporains étaient nourris du
mêmje symbole harmonieux et utile de Ô.
e
Viendrait ensuite notre grand Pierre de Fermât du xvn siècle
dont j ' a i déjà parlé. Il nous a laissé depuis presque trois cents ans
un problème de nombres jusqu'à ce jour irrésolu. Il s'agit de prouver
11 n n
qu'en nombres entiers l'équation x + y = Z est impossible à
résoudre si n est plus grand que 2. Et, cependant, Fermât a donné
de son énigme une solution qui a été égarée. Alors ? Que compte
faire la commission scientifique de notre Académie ?
Je ne puis avoir évoqué Léonard de Vinci sans songer à son
homologue français Paul Valéry (1871-1945). J'ai cité, de lui,
L E NOMBRE D'OR 115

un peu de l'homme et la coquille. Il faut lire, in extenso, dans


Variété, cette étude philosophique d'une vingtaine de pages de la
Bibliothèque de La Pléïade. Il dit encore que la vie ne sépare pas
sa géométrie de sa physique et qu'elle confie à chaque espèce ce
qu'il lui faut d'axiomes et d'invariants pour être ce qu'elle est ».
Et puis, dans un dialogue fort beau, celui de l'arbre, Valéry,
autour d'un hêtre, fait parler le pâtre Tityre, pris à Virgile, et le
savant Lucrèce. Ce dernier dit que « le hêtre s'accroît autour de
soi selon la symétrie, et la vie rayonne son nombre par branches,
brins, feuilles aux points mêmes marqués, selon la proportion dorée
dans le naissant futur ».
C'est ainsi que l'invariant <D a donné ce beau dialogue
poétique où alternent l'alexandrin et le décasyllable harmonieux,
issu lui-même du nombre d'or.

BIBLIOGRAPHIE
A. SOURCE ANGLAISE
1. A R C Y W . THOMPSON : Growth and Forms, Ed. Universited Press, Cam-
bridge.
2. T H . A. COOK : The Curves of Life, Ed. London Constable, 1914.

B. SOURCE F R A N Ç A I S E
3. MATILA C. GHYKA :
a ) Esthétique des proportions dans la nature et les arts ;
b) Tour d'horizon philosophique ; Ed. Gallimard, 1 9 2 7 .
4. D . NEROMAN : La leçon de Platon, Ed. Niclaus, 1 9 4 3 .
5. J . - P . LAUER : Pyramides d'Egypte, Ed. Payot, 1 9 4 8 .
6. DÉNÉRÉAZ : Uharmonie des nombres, Ed. Lausanne, 1 9 3 1 .
7. CHANOINE LEDIT, architecture sacrée : Visage de Troyes. L'art, au
départ du nombre, Ed. Tetraktys, 1 1 , du Paon, Troyes (Aube).

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