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R. GAGNÉ, L. LINGER
Résumé
L’ambiance hivernale rigoureuse n’est pas spécifiquement définie dans les princi-
paux documents normatifs et techniques internationaux. Dans le cadre de cet
ouvrage, l’ambiance hivernale rigoureuse correspond à un environnement de gel
sévère où le béton est exposé à des conditions de saturation forte ou modérée
avec ou sans exposition aux sels de déverglaçage. La durabilité des bétons en
ambiance hivernale rigoureuse dépend des caractéristiques physico-chimiques
du matériau et de la sévérité de l’exposition au gel (température minimale, satura-
tion en eau, fréquence des épandages de sels fondants). L’action des cycles de
gel-dégel peut produire deux types de détérioration du béton : la fissuration interne
et l’écaillage des surfaces en présence de sels fondants. Ces deux types de dété-
rioration ont pour origine des processus différents et ne surviennent pas nécessai-
rement en même temps. La mise en relation des propriétés thermodynamiques de
la phase liquide, des propriétés de la structure poreuse de la pâte de ciment hy-
draté et des caractéristiques de l’exposition environnementale ont conduit au dé-
veloppement de modèles plus ou moins détaillés permettant d’expliquer, de
prévoir et de quantifier l’endommagement des bétons soumis aux cycles de gel-
dégel. Les résultats de très nombreuses expérimentations en laboratoire et d’étu-
387
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
388
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
1. INTRODUCTION
Les gestionnaires d’ouvrages sont souvent confrontés aux conséquences, quel-
quefois très pénalisantes, des cycles gel-dégel sur la durabilité du béton. Les
structures construites dans des régions froides ou en altitude sont évidemment les
plus exposées, mais l’utilisation de plus en plus intensive et systématique de sels
de déverglaçage en préventif dans les réseaux structurants nécessite de prendre
des précautions adaptées pour les régions classées en gel modéré. Il est donc fon-
damental de définir le plus précisément possible cette agression climatique afin
de la prendre en compte dans le dimensionnement des ouvrages.
La sévérité de l’exposition au gel est fonction de certaines caractéristiques clima-
tiques et géographiques. De nombreux pays nordiques ont développé des docu-
ments normatifs et des guides techniques qui définissent la sévérité de
l’exposition au gel en fonction, notamment, du nombre de cycles de gel-dégel an-
nuel, de la température minimale atteinte, de l’altitude et de la fréquence de
l’épandage de sels de déverglaçage (norme française NF EN 206-1, norme cana-
dienne CSA A23.1). Par exemple, la norme NF EN 206-1 définit trois classes
d’environnement de gel (faible, modéré et sévère) sur la base des températures
moyennes annuelles (voir la carte de la zone de gel en France au paragraphe 5.2.1,
figure 10.43). Un environnement de gel faible ne comporte pas plus de deux jours
ayant atteint une température inférieure à – 5 °C. Un environnement de gel sévère
comporte plus de dix jours ayant atteint une température inférieure à – 10 °C.
L’environnement de gel modéré est une condition intermédiaire entre les niveaux
faible et sévère. En plus des températures minimales atteintes, la sévérité du gel
dépend aussi de la condition de saturation du béton et de la fréquence des épan-
dages de sels de déverglaçage [LCP 03]. Les conditions de forte saturation sont
plus agressives (surfaces horizontales de béton exposées à la pluie et au gel, sur-
faces verticales exposées au gel et directement exposées aux projections humi-
des), en comparaison avec les conditions de saturation modérées (surfaces
verticales de béton exposées à la pluie ou au gel). Le salage est considéré très fré-
quent lorsque le nombre n de jours de salage est supérieur ou égal à 30 ; il est mo-
déré lorsque n est compris entre 10 et 30; il est faible lorsque n est inférieur à 10.
L’ambiance hivernale rigoureuse n’est pas spécifiquement définie dans les prin-
cipaux documents normatifs et techniques internationaux. Dans le cadre de cet
ouvrage, l’ambiance hivernale rigoureuse correspond à un environnement de gel
sévère où le béton est exposé à des conditions de saturation forte ou modérée avec
ou sans exposition aux sels de déverglaçage.
Ce présent chapitre s’attache à dresser un état de l’art des connaissances actuelles
sur le sujet et proposer des recommandations pour la réalisation de bétons dura-
bles au gel. Les mécanismes fondamentaux responsables des dégradations asso-
389
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
ciées aux cycles de gel-dégel sont décrits en mettant en évidence l’influence des
différents paramètres impliqués dans la fissuration interne et l’écaillage de surfa-
ce, associée à l’utilisation des sels de déverglaçage. Une seconde partie s’attache
à analyser l’entraînement d’air dans les bétons qui reste globalement la meilleure
parade pour formuler des bétons résistants aux cycles de gel-dégel sévères et à
l’écaillage. L’aspect normatif est ensuite abordé en mettant l’accent sur les textes
européens et français, mais également canadiens.
390
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
bétons [MAR 96, YAN 06]. Elle peut diminuer la performance du béton d’enro-
bage en augmentant sa perméabilité et en diminuant sa résistance à la pénétration
des agents externes potentiellement agressifs.
Parmi les deux principaux types d’attaque par le gel, la fissuration interne est re-
lativement peu fréquente en raison des mécanismes d’attaque particuliers qui ne
produisent des dommages significatifs que dans les bétons les plus sensibles aux
effets des cycles de gel-dégel.
2.2. Écaillage
Comme son nom l’indique, l’écaillage des surfaces est un mode de dégradation
qui n’affecte que les surfaces de béton exposées à un environnement externe com-
portant des cycles de gel-dégel et des sels fondants. En l’absence de sels fondants,
l’écaillage du béton ne se produit pas.
L’écaillage se manifeste par le détachement progressif de petits fragments ou de pe-
tites écailles de pâte ou de mortier dont l’épaisseur ne dépasse pas quelques milli-
mètres. La surface d’un béton attaqué par l’écaillage n’est endommagée que sur
quelques millimètres de profondeur (figure 10.2). Par conséquent, la problématique
des surfaces de bétons qui s’écaillent est principalement d’ordre esthétique. Toute-
fois, dans les cas les plus sévères, les surfaces horizontales peuvent devenir raboteu-
ses et très inégales, ce qui peut engendrer un inconfort pour les piétons. Un écaillage
sévère peut aussi diminuer significativement l’épaisseur du béton d’enrobage
La dégradation de la pâte de ciment et du mortier de surface contribue à exposer
les gros granulats localisés tout juste sous la surface exposée aux sels fondants.
L’aspect visuel de ce type de dégradation peut, à tort, suggérer que l’écaillage est
essentiellement causé par l’utilisation de granulats de mauvaise qualité. Dans cer-
391
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
tains cas, les granulats peuvent effectivement jouer un rôle dans les mécanismes
d’écaillage. Cependant, l’écaillage peut aussi se produire en présence de granulats
d’excellente qualité. L’écaillage ne doit pas être confondu avec la délamination
de surface. La délamination est principalement associée à la corrosion des aciers
d’armature qui, en gonflant, forcent le détachement de gros fragments de béton
d’enrobage de plusieurs centimètres d’épaisseur.
Sous les climats nordiques rigoureux, l’écaillage se produit principalement à la
surface des structures de béton associées aux réseaux de transport routier (ponts
et viaducs, pavages en béton, trottoirs, etc.). En hiver, ces structures sont les plus
fréquemment atteintes car elles sont souvent exposées à de grandes quantités de
sels fondants utilisés pour le dégagement des voies de circulation. L’écaillage est
parfois très localisé dans des zones de quelques m2 alors que les surfaces de béton
avoisinantes sont en parfait état. Ce phénomène est généralement dû à la variabi-
lité, au niveau local, des caractéristiques de surface du béton (porosité, réseau de
bulles d’air, microfissuration) et des conditions d’exposition (saturation, niveau
de contamination par les ions chlorure).
L’écaillage des surfaces est le type de destruction par le gel le plus fréquent car
les mécanismes spécifiques d’attaque sont relativement sévères. Sous des condi-
tions d’exposition rigoureuses, l’écaillage peut endommager la surface de la plu-
part des bétons qui ne sont pas spécifiquement formulés et protégés contre ce type
d’attaque.
Figure 10.2 : aspect visuel typique d’un élément de béton attaqué par l’écaillage
en présence de sels fondants (photo R. Gagné).
L’écaillage des surfaces et la fissuration interne sont les deux principaux types
de dégradations associés aux cycles de gel-dégel. Ces deux types de dégradations
ne surviennent pas nécessairement en même temps lorsque le béton est exposé à
des cycles de gel-dégel.
392
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
393
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
tains processus physico-chimiques dont les plus importants sont: transport par
diffusion et perméabilité, dissolution/précipitation dans la solution interstitielle,
nucléation, pressions osmotiques, abaissements cryoscopiques du point de congé-
lation et dessiccation de la pâte de ciment hydraté.
3.1.1. La gélivité de l’eau dans la pâte de ciment
C’est la phase liquide interstitielle contenue dans la porosité de la pâte de ciment
qui est principalement à l’origine des mécanismes d’attaque par les cycles de gel-
dégel. Par conséquent, la pâte de ciment sèche (ou faiblement saturée) n’est pra-
tiquement pas affectée par les cycles de gel-dégel [RAM 81].
3.1.1.1. Eau gelable
La progression du front de gel dans la pâte de ciment plus ou moins saturée engendre
la formation de glace dans le réseau poreux. La quantité et la localisation des sites de
nucléation est notamment fonction de l’état de l’eau dans la pâte de ciment hydraté.
L’eau libre contenue dans les pores capillaires (et sur les parois internes des bulles
d’air) est qualifiée de « gelable ». Cette eau se transforme en glace à une température
qui dépend, notamment, de la dimension du pore [KUB 32, DEF 66]. Plus le pore est
petit, plus la température de fusion de la glace est basse. Dans le cas de l’eau très
structurée contenue dans des pores de quelques nanomètres (pores des C-S-H), la
température de cristallisation sous forme de glace est de – 78 °C (figure 10.3). En pra-
tique, l’eau des pores de C-S-H est donc qualifiée de « non gelable ».
– 0,1
10– 7 10– 5 10– 3 1
Rayon (mm)
Température (°C)
–1
– 10
– 100
394
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
La proportion d’eau gelable (eau gelable/eau évaporable) dans la pâte de ciment est
fonction de son rapport E/C (figure 10.4). L’eau évaporable est l’eau contenue dans
les pores capillaires et les pores du gel de C-S-H. À une température de – 55 °C, la
proportion d’eau gelable passe d’environ 80 %, pour un rapport E/C de 0,60, à en-
viron 60 % pour un rapport E/C de 0,35 [BAG 80]. Les pâtes ayant un faible rapport
E/C contiennent une plus faible proportion d’eau gelable, d’une part, parce que le
volume total du réseau poreux est plus faible et d’autre part, parce que le réseau po-
reux est constitué de pores plus petits [FAG 93]. Des mesures calorimétriques sur
des pâtes de ciment soumises à un refroidissement lent indiquent que la formation
de la glace est un processus graduel qui s’amorce à une température d’environ – 5
°C (figure 10.5). Les courbes de la figure 10.5 démontrent que la quantité totale de
glace formée à – 50 °C diminue très significativement lorsque le rapport E/C passe
de 0,45 à 0,25 [MAR 99]. Ce phénomène est confirmé par le fait que les bétons à
hautes performances peuvent avoir une bien meilleure résistance à la fissuration in-
terne que celle des bétons ordinaires (§ 3.1.6.5)
Le béton sans air entraîné, comme de nombreux matériaux poreux, augmente de
volume en gelant. Avant de décrire ce phénomène plus en détails, il est bon de
rappeler les quelques faits suivants :
– en gelant, le volume massique de l’eau augmente de 9 %. Cet effet n’est cepen-
dant pas la cause principale des gonflements observés ;
– la thermodynamique montre que, sous l’effet d’un gel suffisamment lent pour
que l’on soit à chaque instant proche de l’équilibre, la glace se forme à l’exté-
rieur du corps poreux. La conséquence est alors une contraction de ce corps
poreux, liée au départ d’eau (figure 10.6) ;
– le gonflement du béton n’est pas lié directement à la baisse de température
sous zéro degré, mais à la vitesse à laquelle cette baisse se produit ;
– la dilatation volumique apparente liée au refroidissement est utilisée comme
critère servant à apprécier la résistance au gel des bétons dans certains essais de
durabilité aux cycles de gel-dégel.
395
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
0,4
0,2
0,0
0,35 0,40 0,45 0,50 0,60
Rapport E/C
Figure 10.4 : eau totale et eau non gelable dans une pâte de ciment hydraté,
traitée à la vapeur, d’après [BAG 80].
Une partie de l’eau d’une pâte, qui varie avec le rapport E/C mais qui est toujours importante, ne gèle
pas lorsque la température est abaissée jusqu’à – 55 °C. Le rapport (eau gelable/eau totale) passe
de 80 % pour un rapport E/C de 0,60 à environ 60 % pour un rapport E/C de 0,35. L’eau totale cor-
respond à l’eau évaporable (pores capillaires + pores du gel de C-S-H).
Capacité calorifique apparente (J . °K– 1 . gssd– 1)
3,0
2,0
E/C = 0,45
1,5
E/C = 0,35
1,0
E/C = 0,25
0,5
0
– 60 – 50 – 40 – 30 – 20 – 10 0 10
Température (°C)
396
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Dilatation relative
(.10– 4)
Pâte normale
10
2
– 30 – 20 – 10
0
Température (°C)
–2
Contraction thermique –4
(calculée)
–6
397
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
398
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
(.10– 4)
100 %
Dilatation
98 %
2
Déformation relative 93 %
–2
Contraction
90 %
–4
–1 88 %
Vitesse du gel : 2,8 °C.h
–6
+ 20 + 10 0 – 10 – 20
Température (°C)
Figure 10.7 : influence du degré de saturation d’un mortier (rapport E/C = 0,6)
sur son comportement dimensionnel au cours du gel, d’après [RAM 81].
Les mortiers ayant un degré de saturation inférieur ou égal à 90 % subissent une contraction régulière
pendant tout le refroidissement. Par contre, les mortiers saturés à plus de 90 % se dilatent dès que
l’eau gèle dans les capillaires. Ceci indique qu’un mortier ou un béton, lorsqu’il est abrité des venues
d’eau extérieures, est naturellement résistant à un régime de gels lents.
399
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Figure 10.8 : aspect visuel typique d’un réseau de bulles d’air entraîné dans un béton.
Cette photo a été obtenue à partir d’une plaque de béton polie observée à l’aide d’un microscope op-
tique sous un grossissement de 100 ×. Les bulles d’air de forme sphérique sont réparties dans le mor-
tier qui enrobe les grains de sable.
400
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
2 000
1 800
1 600
1 200
1 000
800
600
400
0
0 1 2 3 4 5 6
Teneur en air (%)
Figure 10.9 : influence du volume d’air entraîné sur la résistance du béton face aux
cycles de gel-dégel, d’après [KOS 04].
Ces résultats ont été obtenus avec des bétons fabriqués avec des ciments, des dosages en ciment
et des rapports E/C différents. La durabilité des bétons est exprimée par le nombre de cycles de gel-
dégel nécessaires pour produire une diminution de 50 % du module d’élasticité dynamique. Plus ce
nombre de cycles est élevé meilleure est la durabilité au gel du béton. Les résultats démontrent que
l’augmentation du volume d’air entraîné améliore la résistance au gel des bétons.
Les bulles d’air entraîné offrent des interfaces gazeuses (vases d’expansion) per-
mettant à la phase liquide en mouvement de s’y accumuler ou d’y geler sans
créer de dommage. Pour protéger la pâte, il faut que les bulles d’air soient suffi-
samment rapprochées pour faire en sorte que les contraintes internes générées
par le gel soient inférieures à la capacité ultime de la pâte. On peut moduler l’es-
pacement des bulles d’air en variant le volume d’air entraîné dans le béton.
3.1.3. Le modèle des pressions hydrauliques
Ce modèle a été proposé par Powers en 1949 [POW 49] alors que l’efficacité de
l’air entraîné comme moyen d’accroître la durabilité des bétons soumis à des cy-
cles répétés de gel-dégel était déjà reconnue.
Lorsque l’eau commence à geler dans un pore capillaire, son volume augmente de
9 %, de sorte que l’eau en excès est expulsée. Lors de l’abaissement de la tempé-
rature, la formation de la glace est graduelle à cause de la présence d’ions dissous
dans la solution interstitielle. La vitesse de refroidissement détermine la quantité
d’eau poussée à l’extérieur du pore sous l’effet de l’expansion de la glace. Il s’éta-
blit une pression hydraulique qui est fonction de la résistance à l’écoulement. Cette
401
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
rb Lmax 2L
a) Bulle de rayon rb recouverte d’une coquille b) Distance 2 L séparant deux bulles voisines.
de pâte d’épaisseur Lmax.
Figure 10.10 : modélisation simplifiée des bulles d’air dans la pâte de ciment.
Si la distance à parcourir par l’eau est supérieure à cette valeur Lmax, la pression
hydraulique surpasse la résistance à la traction de la pâte de ciment. La pâte se fis-
sure et on mesure alors une dilatation résiduelle. L’intensité de la dilatation rési-
duelle permet de déterminer le degré d’endommagement (figure 10.6).
Suite à ces travaux, la notion de facteur d’espacement des bulles d’air L a été
adoptée. Elle est définie par la norme nord-américaine ASTM C457 comme étant
402
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
la demi-distance moyenne qui sépare les parois de deux bulles d’air adjacentes ap-
partenant à un réseau supposé régulier (4.2).
L’intérêt majeur de cette théorie est d’avoir permis le calcul des dimensions à
donner à un réseau protecteur efficace d’air entraîné. Les valeurs calculées par
Powers sont tout à fait comparables à celles retenues par les normes les plus ré-
centes. L’inconvénient est que Powers accordait beaucoup d’importance à l’ex-
pulsion de l’eau hors des capillaires, alors que l’expérience a établi que la majorité
des transports d’eau se font des pores des C-S-H vers les pores capillaires, et que
le gel d’une pâte bien protégée s’accompagne d’un retrait (figure 10.6). Powers a
alors essayé de tenir compte de ces observations expérimentales et il a proposé,
en association avec Helmuth, le modèle des pressions osmotiques [POW 53].
3.1.4. Le modèle des pressions osmotiques
Comme on l’a vu précédemment, la solution interstitielle d’un pore gèle à des
températures d’autant plus basses que celui-ci est petit. Il en résulte que l’eau gèle
en premier dans les gros capillaires. La formation de glace dans un gros capillaire
engendre une augmentation de la concentration ionique de la solution non gelée
en équilibre avec le cristal de glace. La solution interstitielle des pores voisins,
lorsqu’ils sont plus petits (par exemple les pores des C-S-H), n’a pas encore gelé.
Par conséquent, la concentration ionique de la solution interstitielle des petits po-
res n’a pas augmenté et est alors largement inférieure à celle du gros pore. Ceci a
pour effet de créer un afflux d’eau des petits pores vers les plus gros suivant les
lois de l’osmose. Ces transferts, s’effectuant par des cheminements déjà saturés,
vont créer des pressions qualifiées d’osmotiques (figure. 10.11). De plus, à mesu-
re que l’eau arrive dans les gros pores, la concentration de la solution diminue, ce
qui entraîne la formation de glace supplémentaire.
Là aussi, lorsque ces pressions surpassent la résistance à la traction de la pâte elles
fissurent cette dernière. Le rôle des bulles, selon les auteurs, est d’entrer en compé-
tition avec les plus gros pores où la glace s’est formée. Les bulles d’air comportent
un peu de solution interstitielle adsorbée sur les parois internes. En raison de leur
grande taille, la glace s’y forme très tôt lorsque la température s’abaisse sous 0 °C.
La glace étant constituée d’eau pure, la solution non gelée sur la paroi des bulles
devient plus concentrée en ions et elle attire l’eau des pores plus petits. Si les bulles
sont suffisamment rapprochées, elles offrent une bonne protection contre le gel car
elles peuvent accueillir l’eau qui arrive sans créer de contraintes trop importantes.
Cette théorie est bien adaptée à la description des phénomènes de gel en milieu
enrichi en sels (cas de l’écaillage, sous l’action des sels fondants) et explique le
retrait observé lors du gel des pâtes bien protégées par des bulles d’air rappro-
chées.
403
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Cristal de glace
et solution saline
Cristal de glace
et solution saline
404
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
405
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Béton 10
gélif
Pas de
Protection protection
efficace
Béton
non gélif 0
200 400 600 800
Facteur d'espacement des bulles L (μm)
406
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
407
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
1 000
600
400
200
0
2 4 6 8 10 12
Vitesse de refroidissement (°C / h)
408
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Ce sont les parties d’ouvrages dont le béton a le plus fort degré de saturation qui
se dégradent le plus : elles correspondent soit à des parties qui, fonctionnelle-
ment, sont au contact de l’eau, soit à des parties qui, par leur géométrie, retien-
nent préférentiellement les eaux de précipitation (surfaces horizontales).
100
Bétons résistants
Résistance au gel (%)
80
60
40
Bétons attaqués
20
0
60 70 80 90 100
Degré de saturation (%)
409
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
E/C aussi élevé que 0,80. Pour parvenir à un niveau de durabilité acceptable, il
faut abaisser le rapport E/C à des valeurs plus faibles, voisines de 0,50.
100
60
20
0
0 10 20 30 40 50 60
Il faut noter que l’air entraîné n’est pas toujours justifié dans le cas des bétons en
ambiance hivernale non rigoureuse. Les caractéristiques d’un environnement de
gel non rigoureux (gel modéré) sont notamment définies dans le guide technique
Recommandations pour la durabilité des bétons durcis soumis au gel [LCP 03].
Pour ce type d’exposition, l’air entraîné peut inutilement pénaliser la résistance à
la compression tout en contribuant à augmenter les coûts de production et de con-
trôle de la qualité du béton.
En ambiance hivernale rigoureuse, la durabilité au gel des bétons ayant un rap-
port E/C relativement élevé (0,7-0,8) est inacceptable, même lorsqu’ils contien-
nent un réseau de bulles d’air entraîné. Pour parvenir à un niveau de durabilité
acceptable des bétons à air entraîné, il faut abaisser le rapport E/C à des valeurs
plus faibles, au moins inférieures à 0,50.
Le volume d’air requis pour protéger un béton contre les cycles de gel-dégel en am-
biance hivernale rigoureuse est aussi fonction de la proportion volumique de pâte
dans le mélange. Puisque le rôle des bulles d’air est de protéger la pâte de ciment
410
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
durci contre les effets du gel, les bétons contenant un plus grand volume de pâte re-
quièrent donc un volume d’air entraîné plus important. D’un point de vue pratique,
la proportion volumique de pâte dans un béton est surtout fonction de la dimension
maximale du gros granulat. En général, lorsque la dimension maximale augmente,
la fraction volumique de pâte diminue, tout comme le volume d’air nécessaire pour
protéger le béton contre le gel. La figure 10.16 présente des relations entre l’expan-
sion d’un béton après 300 cycles de gel-dégel et la dimension maximale du gros
granulat [KLE 52]. Chacune des courbes permet d’identifier un volume d’air opti-
mal. Pour un volume d’air inférieur à la valeur optimale, l’expansion après 300 cy-
cles évolue très rapidement vers des valeurs inacceptables (> 0,02 %) alors qu’un
volume d’air supérieur à la valeur optimale ne produit pas d’amélioration significa-
tive de la tenue au gel. Plus la dimension maximale est grande, plus le volume d’air
requis est faible. Puisqu’en pratique, il est assez rare que l’on fabrique des bétons
dont la dimension maximale du granulat soit inférieure à 10 mm, on constate que
les volumes d’air optimaux sont généralement compris entre 4 % et 9 %. Le para-
graphe 5 présentera plus en détails certaines exigences normatives (européennes et
canadiennes) concernant le volume d’air entraîné nécessaire pour assurer la protec-
tion des bétons contre les effets des cycles de gel-dégel.
0,20
0,16
0,14
64 19 5
0,12
0,10
38 10
0,08
0,06
0,04
0,02
0
0 2 4 6 8 10 12 14 16
Teneur en air (%)
Figure 10.16 : relation entre l’expansion au gel, la teneur en air et la dimension maximale
du granulat, d’après [KLE 52].
Chacune des courbes permet d’identifier un volume d’air optimal. Pour un volume d’air inférieur à la
valeur optimale, l’expansion après 300 cycles évolue très rapidement vers des valeurs inacceptables
(> 0,02 %) alors qu’un volume d’air supérieur à la valeur optimale ne produit pas d’amélioration signi-
ficative de la tenue au gel. Plus la dimension maximale est grande, plus le volume d’air requis est faible.
411
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
412
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
100
k
Traproc
60
ite
an
40 Gr
cke
wa
au
20 Gr
mie
Dolo
h.m
0
20 40 60 80 90 95 98 99
Lorsqu’un granulat poreux et saturé gèle, il s’y développe des pressions hydrau-
liques internes qui peuvent le fissurer. Le gel des granulats dans un béton se ma-
nifeste avec plus d’intensité en surface : il se traduit par des éclatements locaux et
par la formation de petits cratères (popouts des Anglo-Saxons) (figure 10.18). La
présence de granulats gélifs peut aussi occasionner de la fissuration dans la masse
des bétons.
G G
1 2 3
413
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
particule. À l’inverse, une pâte de ciment plus perméable et à air entraîné a des
effets positifs sur la durabilité au gel du granulat. Ces deux exemples indiquent
que la plupart du temps, des interactions importantes entre les deux phases inter-
viennent dans le comportement global. On peut retenir trois cas de figure d’après
les granulats considérés.
Granulats à forte porosité et forte perméabilité (gros pores)
Ils peuvent inclure la famille des grès et des calcaires crayeux. Par eux-mêmes,
ils ne sont pas gélifs puisqu’ils expulsent rapidement l’eau absorbée. Par contre,
ils rendront le béton gélif, car la pâte sera envahie par un grand volume d’eau qui
ne pourra se déplacer que de quelques centaines de micromètres dans la pâte sans
créer de tensions néfastes.
Granulats à faible porosité et faible perméabilité (par exemple les granites)
Ils ne peuvent emmagasiner que de très faibles quantités d’eau. Ne se saturant pas,
ils ne rejetteront donc que très peu d’eau dans la pâte. Ils n’affectent généralement
pas la durabilité au gel des bétons. En général, les granulats possédant une poro-
sité totale inférieure à 0,015 cm3/g (absorption totale inférieure à 1,5 %) n’altèrent
pas la durabilité au gel des bétons [KAN 80].
Granulats à porosité et perméabilité intermédiaires
Ces roches ne sont généralement pas saturées si elles sont enrobées d’une pâte de
bonne qualité. Si elles sont saturées, les risques qu’elles feront courir à la pâte de
ciment dépendront de la granularité des granulats, les plus grossiers étant les plus
nocifs puisqu’ils amènent à l’interface pâte/granulat le plus grand volume d’eau
par unité de surface. De plus, si la pâte est de bonne qualité et très compacte, elle
ne pourra pas accueillir facilement l’eau provenant des granulats, même si elle
contient de l’air entraîné.
3.1.6.5. Influence du rapport E/C
Parmi tous les paramètres de formulation du béton, le rapport E/C est certaine-
ment un de ceux ayant la plus grande influence sur la résistance à la fissuration
interne du béton. L’influence du rapport E/C découle principalement de ses effets
sur la quantité d’eau gelable (§ 3.1.1.1) et sur la perméabilité de la pâte. La baisse
du rapport E/C engendre une diminution de la quantité d’eau gelable consécutive
à la diminution du volume poreux total et au raffinement de la taille des pores.
C’est cette plus faible quantité d’eau gelable qui tend à diminuer l’intensité des
pressions internes dans les bétons ayant un faible rapport E/C.
La baisse de la perméabilité consécutive à une diminution du rapport E/C s’oppo-
se, d’une part, aux transferts internes de l’eau dans le volume poreux et d’autre
part, à l’absorption d’eau externe lors des cycles de gel-dégel. Ces deux phéno-
mènes ont des effets opposés sur l’intensité des pressions internes engendrées par
414
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
les cycles de gel-dégel. Une pâte faiblement perméable peut contribuer à augmen-
ter l’intensité des pressions internes car les mouvements d’eau vers les bulles d’air
sont plus fortement empêchés. À l’inverse, cette même pâte faiblement perméable
peut contribuer à abaisser l’intensité des pressions internes en diminuant l’absorp-
tion d’eau externe et, par conséquent, le degré de saturation du réseau poreux.
Globalement, l’influence du rapport E/C sur la résistance à la fissuration interne
du béton est donc relativement complexe en raison des effets superposés de plu-
sieurs mécanismes physico-chimiques mis en jeux lors des cycles de gel-dégel.
L’analyse de l’influence du rapport E/C sur le facteur d’espacement critique per-
met de mieux comprendre son influence globale sur la résistance à la fissuration
des bétons. Le tableau 10.1 présente quelques valeurs du facteur d’espacement cri-
tique de différents bétons, avec et sans fumée de silice, soumis à des cycles accé-
lérés de gel-dégel dans l’eau [PIG 87]. Ces valeurs s’appliquent à des bétons
conservés 14 jours dans l’eau avant la première exposition aux cycles de gel-dégel.
Le rapport E/C est la caractéristique de composition ayant la plus grande in-
fluence sur la résistance à la fissuration interne du béton. D’une part, la baisse
du rapport E/C engendre une diminution de la quantité d’eau gelable consécu-
tive à la diminution du volume poreux total et au raffinement de la taille des po-
res. D’autre part, lorsque le rapport E/C diminue, les résistances mécaniques
augmentent, ce qui produit un béton plus résistant aux contraintes internes en-
gendrées lors du gel.
Les données du tableau 10.1 indiquent que le facteur d’espacement critique d’un
béton sans fumée de silice avec un rapport E/C de 0,5 est de 500 µm. Rappelons
que cette valeur indique que pour être durable, ce béton doit être protégé par un
réseau de bulles d’air dont le facteur d’espacement est au moins inférieur à
500 µm. Le facteur d’espacement critique du béton avec un rapport E/C de 0,30
est de 400 µm. Cette valeur plus faible montre que, dans ce cas, l’abaissement du
rapport E/C de 0,50 à 0,30 a provoqué une légère diminution de la durabilité au
gel. Selon Pigeon et al. [PIG 87] cette baisse de la résistance à la fissuration in-
terne est probablement due à la forte baisse de la perméabilité de la pâte. Dans ce
415
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
cas, les effets favorables de la baisse de la quantité d’eau gelable ont été proba-
blement partiellement ou complètement annulés par les effets défavorables de la
plus faible perméabilité de la pâte.
Considérons maintenant le cas du béton sans fumée de silice ayant un rapport E/C
de 0,25. Le facteur d’espacement critique de 750 µm indique que ce type de béton
possède une bien meilleure résistance à la fissuration interne que celle du béton de
rapport E/C de 0,50. La forte baisse du rapport E/C a probablement engendré une
très forte baisse de la quantité d’eau gelable. Dans ce cas, les mouvements d’eau
lors du gel sont très limités, si bien que les effets défavorables de la faible perméa-
bilité deviennent alors mineurs.
Les données du tableau 10.1 montrent que le facteur d’espacement critique des
bétons avec 8 % de fumée de silice est systématiquement inférieur à celui des bé-
tons sans fumée de silice. Par conséquent, l’utilisation de 8 % fumée de silice con-
tribue à diminuer la résistance à la fissuration interne du béton. Selon les auteurs,
cette plus faible durabilité est due au fait que la fumée de silice diminue relative-
ment peu le volume poreux total mais diminue fortement la perméabilité de la pâ-
te. Lors du gel, les mouvements d’eau vers les bulles d’air sont plus lents, ce qui
diminue la protection offerte par les bulles d’air et augmente l’intensité des pres-
sions internes.
Marchand et al. [MAR 96] ont réalisé une importante revue de la documentation
technique sur l’influence du rapport E/C sur la résistance à la fissuration interne
des bétons. Cette synthèse regroupe de nombreux résultats de durabilité obtenus
à partir de bétons avec ou sans fumée de silice fabriqués avec des rapports E/C
compris entre 0,25 et 0,55. La figure 10.19 présente l’ensemble des résultats qui
regroupent des bétons à air entraîné ayant des facteurs d’espacement inférieurs à
250 µm et des bétons sans air entraîné ayant des facteurs d’espacement supérieurs
à 500 µm. Globalement, les résultats peuvent être regroupés en deux grandes fa-
milles. Une première famille regroupe des bétons courants ayant un rapport E/C
supérieur à 0,40 (zone II). Les résultats démontrent que ce type de béton doit tou-
jours être protégé par un bon réseau de bulles d’air entraîné pour pouvoir déve-
lopper une bonne résistance à la fissuration interne.
La seconde famille regroupe les bétons ayant un rapport E/C de 0,40 ou moins
(zone I). Les résultats montrent que l’utilisation d’un rapport E/C faible (≤ 0,35)
tend à améliorer la résistance à la fissuration interne puisque certains bétons de
cette famille peuvent avoir une durabilité au gel acceptable malgré l’absence d’air
entraîné. Il faut cependant noter que la résistance à la fissuration interne des bé-
tons à faible rapport E/C sans air entraîné est très variable. Certains sont parfaite-
ment durables alors que d’autres ne le sont pas. Pour un même rapport E/C, la
durabilité au gel des bétons sans air entraîné peut varier fortement en fonction du
416
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Zone I Zone II
120
100
Facteur de durabilité (%)
80 L < 250 μm
L > 500 μm
60
40
20
0
0,20 0,25 0,30 0,35 0,40 0,45 0,50 0,55
Rapport E/C
Figure 10.19 : influence du rapport E/C sur la résistance à la fissuration interne du béton,
d’après [MAR 96].
La durabilité au gel est exprimée à l’aide du facteur de durabilité calculé après 300 cycles accélérés
de gel-dégel selon la procédure ASTM C666 (gel et dégel dans l’eau). La durabilité est considérée
non satisfaisante lorsque le facteur de durabilité est inférieur à 60 %.
417
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
418
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
En général, les fumées de silice, les cendres volantes et les laitiers n’améliorent
pas significativement la résistance à la fissuration interne du béton. Dans le cas
des bétons de résistance normale, exposés aux cycles de gel-dégel sans sels fon-
dants, on peut généralement profiter des nombreux avantages offerts par les ad-
ditions minérales en imposant une limite sur le taux de remplacement du ciment,
en s’assurant d’un niveau de maturité suffisant avant la première exposition au
gel et en prévoyant toujours un réseau de bulles d’air entraîné de bonne qualité.
L’influence des laitiers sur la résistance à la fissuration interne a fait l’objet d’un
relativement petit nombre d’études. Quelques études ont démontré que des bétons
à air entraîné fabriqués avec des liants composés uniquement de laitiers activés
par des silicates de sodium peuvent développer une bonne résistance à la fissura-
tion interne [DOU 92, GIF 96]. Ces performances satisfaisantes suggèrent que le
laitier est en mesure de produire des bétons durables lorsque adéquatement proté-
gés par un bon réseau de bulles d’air. Quelques études en laboratoire tendent à
monter que le remplacement du ciment Portland par des laitiers a relativement peu
d’effet sur la résistance à la fissuration interne des bétons à air entraîné. Saric-Co-
ric et Aïtcin ont étudié la résistance à la fissuration interne de bétons à hautes per-
formances à air entraîné fabriqués avec un rapport E/L de 0,35 et des liants
ternaires contenant tous 5 % de fumée de silice mais des teneurs variables en lai-
tier (20 %, 30 %, 50 % et 80 %) [SAR 03]. Tous ces bétons ont pu développer une
excellente résistance à la fissuration après 300 cycles de gel-dégel en laboratoire.
Au Canada, des ciments ternaires contenant environ 25 % de laitier et 3 % de fu-
mée de silice sont commercialisés depuis la fin des années quatre-vingt-dix. Les
performances en service de ce type de liant indiquent une excellente résistance à
la fissuration interne des bétons à air entraîné protégés par un bon réseau de bulles
d’air [BOU 05, HOO 00].
3.1.7. Résistance à la fissuration interne des bétons spéciaux
La résistance à la fissuration interne des bétons spéciaux (bétons autoplaçants et
bétons à hautes performances, etc.) est, tout comme celle des bétons courants,
gouvernée par les mêmes principaux paramètres de formulation soit : les caracté-
ristiques du réseau de bulles d’air, le rapport E/C et le type et le dosage des addi-
tions minérales. Les bétons spéciaux sont généralement fabriqués avec les mêmes
matériaux cimentaires que ceux qui peuvent être utilisés pour la fabrication des
bétons conventionnels : ciment Portland, cendres volantes, laitiers, fumées de si-
lice, etc. Cependant, leur formulation se distingue généralement de celle des bé-
tons conventionnels au niveau du dosage des matières cimentaires, du rapport Eau
/Liant (E/L) et des adjuvants. Les effets des matériaux cimentaires et du rapport
E/L sur la résistance à la fissuration interne des bétons spéciaux sont fondamen-
talement les mêmes que ceux qui ont déjà été présentés aux paragraphes 3.1.6.5
419
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
420
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
100
60
Valeur minimale acceptable
20
Facteur d’espacement
0
0 100 200 300 400 500 600 700 800
Figure 10.20 : influence de deux types d’agents de viscosité sur le facteur d’espacement
critique de bétons autoplaçants, d’après [KHA 95].
Deux types de bétons autoplaçants ont été fabriqués avec des agents de viscosité à base de polysac-
charides (Welan gum) et à base de cellulose (HPMC). La durabilité est considérée non satisfaisante
lorsque le facteur de durabilité est inférieur à 60 %.
Plusieurs types de bétons autoplaçants à air entraîné fabriqués avec des liants ter-
naires contenant des fumées de silice (3 %) et des cendres volantes (20 %) ou des
fumées de silice (3 %) et des laitiers (40 %) ont fait l’objet d’une étude très dé-
taillée comportant notamment la mesure de leur résistance à la fissuration interne
[KHA 00]. Les dosages en matières cimentaires et les rapports E/L étaient respec-
tivement compris entre 340 et 535 kg/m3 et 0,41 et 0,50. Les résultats montrent que
des teneurs en air comprises entre 4,0 % à 8,0 % ont permis de produire des fac-
teurs d’espacement inférieurs à 220 µm. Tous ces bétons autoplaçants à air entraî-
né ont pu développer une excellente résistance à la fissuration interne. D’une
manière plus générale, ces résultats suggèrent que les bétons autoplaçants sont en
mesure de développer une résistance à la fissuration interne similaire à celle d’un
béton conventionnel ayant le même rapport E/L et les mêmes caractéristiques du
réseau de bulles d’air entraîné. Ils montrent également qu’il est possible de stabi-
liser le réseau de bulles d’air malgré la grande fluidité des bétons autoplaçants
(§ 4.5.2).
3.1.7.2. Bétons à hautes performances
La résistance à la fissuration interne des bétons à hautes performances a fait l’ob-
jet d’un très grand nombre d’études. Une synthèse détaillée de Pigeon et Pleau
421
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
422
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
qu’une procédure d’essai moins sévère est utilisée (gel dans l’air et dégel dans
l’eau selon la procédure P18-425), tous les BHP sans air entraîné sont alors en
mesure de résister à l’attaque de ce type de cycles de gel-dégel.
En pratique, avant d’autoriser la mise en place d’un béton sans air entraîné forte-
ment exposé aux cycles de gel-dégel, il convient de valider la durabilité au gel par
des essais de laboratoire. Dans le cas des bétons à hautes performances ayant un
très faible rapport E/L (0,25), il apparaît prudent de recommander un volume d’air
entraîné minimal (3 à 4 %) afin d’éviter d’obtenir un facteur d’espacement supé-
rieur à 600 ou 700 µm. Ce faible volume d’air entraîné aura peu d’effets défavo-
rable sur les propriétés mécaniques. Il procure cependant une garantie
supplémentaire contre l’attaque par les cycles de gel-dégel, tout en améliorant si-
gnificativement la maniabilité du béton frais.
100
80
60
L < 250 μm
40 L > 500 μm
20
0
20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120
423
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
424
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
ment associée à une attaque physique plutôt qu’à une attaque chimique [VER 57].
Cependant, certains sels fondants contenant des sulfates solubles peuvent chimi-
quement endommager les éléments en béton.
Les sels fondants (NaCl) sont hygroscopiques, car ils abaissent la pression de va-
peur saturante de la solution interstitielle. Par conséquent, en pénétrant dans la po-
rosité capillaire des bétons, ils contribuent à augmenter le degré de saturation du
réseau poreux, ce qui accroît l’intensité des mécanismes de destruction par
écaillage [PIG 95, MAC 79]. Les sels fondants en solution dans la solution inters-
titielle ont aussi pour effet de diminuer la température de formation de la glace
(figure 10.22). Les sels fondants peuvent donc produire des effets favorables et
défavorables en regard des principaux mécanismes de destruction par écaillage.
–5
Température (°C)
– 10
– 15
– 20
0 5 10 15 20 25
Concentration de la solution de NaCl (%)
425
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
5
Chlorure de sodium
4
Béton sans air entraîné après 25 cycles
Sévérité de l'écaillage
1
Béton avec air entraîné
après 50 cycles
0
0 4 8 12 16
Concentration de la solution saline (% massique)
Figure 10.23 : influence de la concentration en NaCl sur l’écaillage, d’après [VER 57].
La sévérité de l’écaillage est exprimée à l’aide d’une cote visuelle. Une cote de 0 indique qu’il n’y a
aucun écaillage. Une cote de 5 indique un écaillage très sévère.
426
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Hydraulique + osmotique
Pression
Hydraulique
Osmotique
Rösli et Harnik ont émis l’hypothèse que l’écaillage pourrait être engendré par un
mécanisme de choc thermique [RÖS 80]. Lorsque le sel est appliqué sur une surface
déjà glacée, il provoque une fusion brutale de la glace. C’est une réaction endother-
427
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
mique (335 kJ/kg) qui va puiser sa chaleur dans le matériau au contact, c’est-à-dire
dans la peau du béton. Celle-ci se refroidit brutalement et il apparaît un important
gradient thermique. En laboratoire, on a enregistré des chutes de température de 3,5
à 7,5 °C dans la peau de dalles de béton recouvertes de 1 à 4 mm de glace, et ceci
dans les cinq minutes suivant l’application du fondant (NaCl) [BER 71]. Des me-
sures effectuées in situ ont établi que ces chutes de température existent bien dans
les ouvrages mais que leur amplitude est plus faible. Dans la région de Zurich, les
chutes de température s’échelonnent de 0 à 4,3 °C [RÖS 77].
L’existence de ce gradient de température entraîne, puisque les raccourcissements
différentiels sont quasiment empêchés, l’apparition de contraintes internes répar-
ties suivant le schéma de la figure 10.25 [RÖS 80]. Dans ces conditions, des con-
traintes de traction atteignant 1,1 à 1,4 MPa peuvent s’établir en surface, et sont
susceptibles de créer des microfissures.
y
– 'T
y
Tension
Gradient thermique
Contraintes
internes
b=
1
Compression
Tension
428
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
sont situées, d’une part, tout près de la surface et, d’autre part, plus en profondeur.
Par conséquent, il existe une couche intermédiaire qui, à cause de sa forte teneur
en ions, gèle après les deux autres. Ce phénomène peut provoquer des tensions in-
ternes en raison de la dilatation différente des couches gelées et non gelées. De
plus, lorsque le gel parvient à la couche intermédiaire, une certaine quantité d’eau
ne peut être expulsée en raison de la faible perméabilité des deux couches voisines
qui sont déjà gelées.
Ce modèle du gel couche par couche n’explique pas tous les mécanismes associés
à l’écaillage. Il propose cependant une explication plausible qui fait intervenir la
présence prépondérante des ions en solution. Cependant, comme le modèle du
choc thermique, il ne parvient pas à expliquer le rôle protecteur des bulles d’air
entraîné.
0 Concentration en Cl–
§FP M
Profondeur
429
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
sels fondants. De nombreuses études en laboratoire ont montré que les bétons nor-
maux doivent toujours être protégés par un bon réseau de bulles d’air entraîné
pour pouvoir développer une bonne résistance à l’écaillage.
Les courbes de la figure 10.27 présentent des relations typiques entre le volume
d’air entraîné et la résistance à l’écaillage de bétons fabriqués avec un rapport E/C
compris entre 0,43 et 0,47. Ces données démontrent que la résistance à l’écaillage
du béton augmente avec le volume d’air entraîné. Un volume d’air entraîné compris
entre 4 % et 6 % est nécessaire pour pouvoir développer une résistance à l’écaillage
acceptable.
10
A
B Type d’agent
C entraîneur d’air
8
D
Écaillage après 56 cycles (kg/m2)
0
2 3 4 5 6 7
Les courbes de la figure 10.27 indiquent que, pour un même volume d’air entraî-
né, la protection offerte par le réseau de bulles d’air peut varier en fonction du
type d’agent entraîneur d’air. Les agents entraîneur d’air les plus efficaces (types
A et B de la figure 10.27) produisent des bulles d’air plus petites. Le réseau de
430
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
bulles d’air offre alors une meilleure protection contre le gel, car les bulles d’air
sont plus nombreuses et plus rapprochées les unes des autres.
Le facteur d’espacement permet de prendre en compte la taille des bulles, car il ca-
ractérise la demi-distance moyenne séparant les bulles d’air. Comme dans le cas
de la fissuration interne, le facteur d’espacement est le meilleur indicateur du ni-
veau de protection du réseau de bulles d’air entraîné contre l’attaque par les sels
fondants. La figure 10.28 présente la résistance à l’écaillage des bétons de la figure
précédente en fonction du facteur d’espacement. On constate qu’il existe une rela-
tion beaucoup plus nette entre le facteur d’espacement des bulles d’air et la résis-
tance à l’écaillage : plus il est faible, meilleure est la résistance à l’écaillage.
Les données de la figure 10.28 montrent également que, dans le cas de l’écaillage,
il n’existe pas de facteur d’espacement critique en deçà duquel la destruction ne
se produit plus. On observe plutôt que l’efficacité de la protection augmente gra-
duellement à mesure que le facteur d’espacement diminue. Cependant, aussi fai-
ble soit-il (< 150 µm), l’écaillage n’est jamais nul.
7
6 1
Écaillage après 56 cycles (kg/m2)
2 Type d’agent
entraîneur d’air
5 3
0
0 50 100 150 200 250 300
Pour des valeurs usuelles du rapport E/C (0,40-0,50), on trouve qu’un facteur
d’espacement inférieur à environ 200 µm offre généralement un niveau de protec-
tion suffisant pour prévenir la destruction par écaillage. En pratique, la validité de
cette limite de 200 µm a déjà été confirmée par de nombreux relevés de terrains
(figure 10.29).
431
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Détruit
5
4
Échelle de dégradation
12 Béton sain
2 8
4
1
0 0
Intact 200 400 600 800 200 400 600
Facteur d'espacement des bulles (μm) Facteur d'espacement des bulles (μm)
Il faut noter que, dans le cas des bétons normaux (rapport E/C = 0,40-0,50), la pro-
tection contre l’écaillage requiert un facteur d’espacement inférieur à 200 µm
alors que la protection contre la fissuration interne requiert un facteur d’espace-
ment inférieur à 400 µm (tableau 10.1). Cette différence démontre, d’une part, la
plus grande sévérité des mécanismes d’attaque par écaillage et, d’autre part, que
la protection contre l’écaillage requiert généralement un réseau de bulles d’air de
meilleure qualité que celui requis pour la protection contre la fissuration interne.
Pour des valeurs usuelles du rapport E/C (0,40-0,50), un facteur d’espacement
inférieur à environ 200 µm offre généralement un niveau de protection suffisant
pour prévenir la destruction par écaillage. La plus grande sévérité des mécanis-
mes d’attaque par écaillage fait en sorte que la protection contre l’écaillage re-
quiert généralement un réseau de bulles d’air de meilleure qualité que celui
requis pour la protection contre la fissuration interne.
432
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
433
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
4 2
0 0
0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60
Rapport E/C
Figure 10.30 : influence du rapport E/C et de l’air entraîné sur la résistance à l’écaillage
du béton, d’après [GAG 93].
La résistance à l’écaillage des bétons sans additions minérales est exprimée par la masse des débris
après 50 cycles de gel-dégel en présence de sels fondants. La résistance à l’écaillage est considérée
acceptable lorsque la masse de débris est inférieure à 1 kg/m2. Les bétons à air entraîné sont regrou-
pés en deux familles définies selon la qualité du réseau de bulles d’air entraîné :
L < 250 µm : bon réseau de bulles d’air entraîné ;
L > 250 µm : moins bon réseau de bulles d’air entraîné.
434
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
0,25 et 0,30 peuvent développer une bonne résistance à l’écaillage sans la protec-
tion d’un réseau de bulles d’air entraîné (figure 10.31) alors que ce n’est pas le cas
des bétons similaires mais ne contenant pas de fumée de silice (figure 10.30).
> 10 kg/m2
Masse des débris (kg/m2)
0
0,20 0,25 0,30 0,35 0,40 0,45
Rapport E/L
Figure 10.31 : influence du rapport E/L et de l’air entraîné sur la résistance à l’écaillage
de bétons, avec fumée de silice [GAG 93].
La résistance à l’écaillage des bétons avec 8% de fumée de silice est exprimée par la masse des dé-
bris après 100 cycles de gel-dégel en présence de sels fondants. La résistance à l’écaillage est con-
sidérée acceptable lorsque la masse de débris est inférieure à 1 kg/m2. Ces résultats expérimentaux
indiquent que plusieurs bétons avec fumée de silice ayant un rapport E/L compris entre 0,25 et 0,30
peuvent développer une bonne résistance à l’écaillage sans la protection d’un réseau de bulles d’air
entraîné alors que ce n’est pas le cas des bétons similaires mais ne contenant pas de fumée de silice
(figure 10.30).
De nombreuses études en laboratoire indiquent que les bétons avec cendres vo-
lantes (ASTM C618 Type F – obtenues de la combustion de l’anthracite ou du
charbon bitumineux ou ASTM C618 Type C – produites à partir de lignite ou de
charbon sub-bitumineux) ont une moins bonne durabilité à l’écaillage que les bé-
tons de référence ne contenant pas de cendres volantes [WHI 87, BIL 91,
KLE 87]. Une étude exhaustive de Bouzoubaâ et al. a montré que les taux de rem-
placement de 25 % et 35 % produisent une durabilité à l’écaillage inacceptable
(débris > 2,5 kg/m2) lorsque les bétons sont soumis à l’essai d’écaillage en labo-
ratoire selon la norme ASTM C672 (figure 10.32) [BOU 03]. Leurs résultats mon-
trent aussi que la méthode d’essai en laboratoire a une grande influence sur la
résistance à l’écaillage des bétons avec cendres volantes. Par exemple, la méthode
d’essai accélérée de la norme québécoise B NQ 2621-900 (§ 5.3.1) produit une
durabilité à l’écaillage satisfaisante, même pour des teneurs en cendres volantes
de 25 % et de 35 % du liant [BOU 03]. L’étude de Bouzoubaâ et al. a clairement
435
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Produit de cure
Écaillage après 50 cycles (kg/m2)
3
2
Limite de 0,8 kg/m2
(Ontario, Canada)
0
Béton 25 % 35 % 25 % 35 %
de cendres cendres laitier laitier
référence volantes volantes
Les causes de la moins bonne résistance à l’écaillage des bétons avec cendres vo-
lantes ne sont pas encore parfaitement comprises. Deux principales hypothèses
ont été proposées pour tenter d’expliquer cette moins bonne durabilité. Les essais
accélérés normalisés en laboratoire (ASTM C672) recommandent une durée de
mûrissement humide relativement courte (14 jours) ne permettant pas aux cendres
de participer à la densification de la pâte avant la première exposition au gel et
aux sels fondants. Par conséquent, au cœur du béton et particulièrement près de
la surface, seul le ciment Portland participe à l’hydratation durant les premiers
jours ou les premières semaines. Lorsque le taux de remplacement dépasse envi-
ron 25 %, il semble que l’hydratation du ciment Portland, à lui seul, ne permette
pas de produire une pâte de ciment en mesure de développer une bonne résistance
à l’écaillage, même en présence d’un bon réseau de bulles d’air. L’allongement
de la période de mûrissement (28 jours) avant la première exposition aux sels fon-
dants ne produit pas nécessairement une amélioration significative de la résistan-
ce à l’écaillage [BOU 03]. Cependant, un mûrissement humide de 180 jours
436
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
437
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
438
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
L’influence des produits de cure sur la résistance à l’écaillage peut être très varia-
ble en fonction du type de produit et du type de bétons sur lequel ils sont appli-
qués. Les travaux de Bouzoubaâ et al. ont montré que dans le cas d’un béton
normal, l’utilisation d’un produit de cure engendre une masse des débris environ
deux fois plus importante que celle obtenue avec un mûrissement humide de
14 jours (figure 10.32). Comparativement au mûrissement humide, il diminue
également la durabilité à l’écaillage des bétons avec laitiers. À l’inverse, le pro-
duit de cure peut avoir des effets très favorables sur la résistance à l’écaillage des
bétons avec cendres volantes [BIL 98, KLE 87].
3.2.3. Résistance à l’écaillage des bétons spéciaux
La formulation des bétons spéciaux se distingue généralement de celle des bétons
conventionnels au niveau du dosage des matières cimentaires, du rapport E/L et
des adjuvants. Les effets des matériaux cimentaires et du rapport E/L sur la résis-
tance à l’écaillage des bétons spéciaux sont fondamentalement les mêmes que
ceux déjà été présentés aux paragraphes 3.2.2.1 à 3.2.2.3. Quelques résultats spé-
cifiques permettant de mieux comprendre la résistance à l’écaillage des bétons
autoplaçants et des bétons à hautes performances sont présentés ci-après.
3.2.3.1. Bétons autoplaçants
Comme nous l’avons déjà écrit au paragraphe 3.1.7.1, la formulation des bétons
autoplaçants a comme principale particularité de comporter une plus grande pro-
portion volumique de pâte. Cette caractéristique de formulation n’est pas un pa-
ramètre majeur des mécanismes fondamentaux de destruction par écaillage. Par
conséquent, la durabilité à l’écaillage des bétons autoplaçants n’est pas fonda-
mentalement différente de celle des bétons d’usage courant [PER 03, KHA 00].
Il faut cependant noter que certains agents de viscosité peuvent diminuer légère-
ment la résistance à l’écaillage de bétons autoplaçants fabriqués avec un ciment
Portland normal [KHA 95].
Des études en laboratoire ont confirmé que des bétons autoplaçants à air entraîné
fabriqués avec différent types de liants (ciment Portland normal, liant avec 3 %
de fumée de silice, liant avec 3 % de fumée de silice et 20 % de cendres volantes)
possèdent une excellente résistance à l’écaillage lorsque le rapport E/L est infé-
rieur à 0,41 [KHA 00, BEA 99]. Depuis 1997, le ministère des Transports du Qué-
bec a utilisé de nombreuses formulations de bétons autoplaçants pour la
construction d’ouvrages routiers en béton armé exposés aux cycles de gel-dégel
en présence de sels fondants [HOV 00]. Tous les bétons autoplaçants avaient une
résistance à la compression à 28 jours d’au moins 35 MPa et un volume d’air en-
traîné compris entre 5 % et 8 %. Le facteur d’espacement des bulles d’air était in-
férieur à 250 µm. Les rapports E/L étaient compris entre 0,35 et 0,40. Plusieurs
439
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
types de liants ont été utilisés dont notamment un ciment Portland normal, un liant
avec 8% de fumée de silice, un liant avec 5 % de fumée de silice et 30 % de laitier
et un liant avec 5 % de fumée de silice 20 % de cendres volantes. Tous les bétons
autoplaçants contenant de la fumée de silice ont développé une excellente résis-
tance à l’écaillage selon la procédure ASTM C672. Seul le béton autoplaçant fa-
briqué avec le ciment Portland normal s’est fortement écaillé en laboratoire
(débris = 1,8 kg/m2). En service, tous ces bétons ont développé une excellente du-
rabilité à l’écaillage [HOV 00].
3.2.3.2. Bétons à hautes performances
Les bétons à hautes performances ont un rapport E/L plus faible qui contribue à
produire une pâte de ciment peu poreuse et imperméable généralement en mesure
de développer une très bonne résistance à l’écaillage. La résistance à l’écaillage
des bétons à hautes performances à air entraîné (rapport E/L ≤ 0,35) est habituel-
lement excellente [GAG 93, GAG 91, BAR 05].
L’effet bénéfique de la baisse du rapport E/L sur la résistance à l’écaillage a déjà
été présenté au paragraphe 3.2.2.2. On a notamment montré qu’un facteur d’espa-
cement inférieur à 200 µm est généralement nécessaire pour protéger un béton
d’usage courant (rapport E/C = 0,45) contre l’écaillage. Pour un rapport E/L de
0,30, un facteur d’espacement de 500 µm peut être suffisant pour obtenir une du-
rabilité à l’écaillage acceptable (figure 10.33). Certains bétons à hautes perfor-
mances, notamment ceux contenant de la fumée de silice, sont même en mesure
de résister à l’écaillage malgré un facteur d’espacement supérieur à 750 µm
[GAG 96, GAG 90].
La durabilité à l’écaillage de plusieurs types de BHP utilisés pour la construction
d’ouvrages d’art en France a fait l’objet d’une étude approfondie par le groupe
« Durabilité BHP 2000 » [BAR 02, BAR 99]. Les résultats indiquent que, dans la
plupart des cas, les BHP ne nécessitent pas l’utilisation d’un entraîneur d’air pour
présenter un bon comportement vis-à-vis des cycles accélérés de gel en présence
de sels de déglaçage (procédure XP P18-420). Cependant, certaines formulations
de BHP sans air entraîné se sont avérées non durables. Ces résultats tendent à con-
firmer le caractère non systématique de la durabilité à l’écaillage des BHP sans air
entraîné [BAR 05]. La comparaison de la durabilité à l’écaillage de BHP sans air
entraîné en condition in situ avec celle obtenue par des essais normalisés en labo-
ratoire (XP P18-420) a montré que le comportement (classement) en laboratoire
correspond plutôt bien à celui observé après cinq ans en condition in situ
[BAR 00].
440
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
8
E/L = 0,30
7 E/C = 0,43-0,47 [Petersson, 1993]
Masse des débris (kg/m2)
6
0
0 250 500 750 1 000 1 250 1 500
Facteur d’espacement (μm)
En pratique, avant d’autoriser la mise en place d’un béton sans air entraîné forte-
ment exposé à des cycles de gel-dégel en présence de sels fondants, il convient de
toujours de valider la durabilité à l’écaillage par des essais de laboratoire.
Figure 10.33 : influence du rapport E/L et du facteur d’espacement sur la résistance
à l’écaillage de bétons avec sans fumée de silice [GAG 96].
Les bétons à hautes performances ont été fabriqués avec un rapport E/L de 0,30. Certains bétons à
hautes performances ont été fabriqués avec un ciment contenant 8% de fumée de silice. La résistance
à l’écaillage, mesurée selon la procédure ASTM C672, est considérée comme acceptable lorsque la
masse des débris après 50 cycles est inférieure à 1 kg/m2. Pour un rapport E/L de 0,30, un facteur
d’espacement de 500 µm est tout à fait suffisant pour obtenir une durabilité à l’écaillage acceptable.
441
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
E/C = 0,70
Volume d'air en % du volume total
40
30
E/C = 0,50
20
10 E/C = 0,40
0
0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
442
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
– – – –
– – + – –
+ +
–+ C –
+ Air
Air + + –
– – – –
– –
– – – – –
– ++ + + –
+ + – Air
– –+ C + –
C
– + +– – ++–
+ –
– –
Figure 10.35 : bulles d’air ancrées aux grains de ciment sous l’action des molécules
d’un adjuvant entraîneur d’air anionique, d’après [KRE 67].
443
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
L’autre mécanisme de stabilisation des bulles d’air se fonde sur le principe que
certains types d’adjuvants entraîneurs d’air produisent, au contact de la solution
interstitielle de la pâte de ciment, un précipité insoluble et hydrophobe, qui forme
une membrane à l’interface eau/air [MIE 58]. Les bulles d’air sont alors recouver-
tes d’un film suffisamment épais et solide pour engendrer un effet stérique qui fa-
vorise la dispersion et qui s’oppose à la coalescence des bulles.
La formation d’un film continu et plus ou moins imperméable à la surface des bul-
les pourrait également favoriser la formation des plus petites bulles d’air (5 à
10 µm de diamètre). Ces très petites bulles d’air sont thermodynamiquement plus
instables car leur petit diamètre engendre une forte pression capillaire qui favorise
la dissolution du gaz dans la solution interstitielle. Ramachandran a calculé que
les bulles d’air ayant un diamètre de moins de 4 µm ne peuvent exister car elles
sont complètement dissoutes dans la solution [RAM 95]. La formation d’un film
à la surface des bulles diminue la perméabilité et ralentit la diffusion du gaz au
travers de la paroi de la bulle. Les très petites bulles d’air sont alors thermodyna-
miquement plus stables. L’analyse microscopique du béton durci tend à confirmer
que les plus petites bulles d’air ont un diamètre de l’ordre de 5 µm.
4.2. Caractéristiques du réseau de bulles d’air
4.2.1. Principales caractéristiques du réseau de bulles d’air
Nous avons déjà vu que la qualité d’un réseau de bulles d’air entraîné peut être
évaluée à partir de trois paramètres principaux : le volume total, la surface volu-
mique moyenne et l’espacement des bulles d’air dans le réseau. La mesure du vo-
lume total des bulles (V), exprimé en pourcentage du volume total du béton,
permet d’apprécier la qualité générale du réseau de bulles d’air entraîné. Des mé-
thodes d’essais normalisées peuvent être utilisées pour déterminer le volume d’air
total à partir d’échantillons de béton frais ou durci (§ 4.2.2). Par exemple, avant
la mise en place du béton au chantier, l’utilisation d’un aéromètre permet de vé-
rifier rapidement si le volume d’air contenu dans le béton frais est conforme aux
exigences du devis. Le volume d’air contenu dans un béton sans air entraîné est
généralement inférieur 3 % du volume total. Celui des bétons à air entraîné est va-
riable en fonction des exigences spécifiques de durabilité. Il est généralement
compris entre 4 % et 10 %.
Le volume total d’air ne donne aucune mesure directe de la dimension et de l’es-
pacement des bulles d’air. Par exemple, un vide de 50 litres rempli d’air situé au
centre d’un cube de 1m de côté ne protège évidemment pas ce m3 de béton contre
les effets des cycles de gel et dégel. L’espacement des bulles d’air est un paramè-
tre très important gouvernant l’intensité des pressions internes engendrées par le
gel de la pâte de ciment (§ 3.1.5). La mesure du facteur d’espacement des bulles
444
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Bulle d'air
–
L
– –
L L –
L
Pâte de ciment
445
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
50
40
Surface volumique D (mm–1)
30
–
DPP–1 L 200 μm
20
10
0
0 200 400 600 800
–
Facteur d’espacement des bulles d’air L (μm)
Le facteur d’espacement d’un béton sans air entraîné est généralement supé-
rieur à 700 µm. Celui d’un béton bien protégé par un bon réseau de bulles d’air
entraîné est généralement compris entre 100 et 200 µm.
446
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
sure du volume d’air total qui exclut l’air pouvant être contenu dans la porosité
connectée des granulats. Elle est fréquemment utilisée pour mesurer le volume
d’air dans les mortiers.
Certaines caractéristiques du réseau de bulles d’air (surface volumique, facteur
d’espacement) ne peuvent être obtenues directement à partir d’un échantillon de
béton frais. On peut cependant les déterminer à partir d’observations au micros-
cope de sections polies taillées dans le béton durci (environ 100 × 100 × 20 mm).
En général, un béton âgé d’au moins trois jours permet de produire des surfaces
polies adéquates pour l’observation microscopique. La procédure normalisée
ASTM C457 décrit le mode opératoire et les méthodes de calcul du volume d’air
total (V), de la surface spécifique moyenne des bulles d’air et du facteur d’espa-
cement des bulles d’air ( L ). L’observation microscopique des sections polies doit
être effectuée par un opérateur confirmé. Celui-ci doit pouvoir identifier rapide-
ment, de manière objective et répétitive, les différentes phases du béton (pâte de
ciment, granulats et bulles d’air) apparaissant derrière un repère gravé dans un des
oculaires du microscope. La qualité du polissage a une importance majeure sur la
fiabilité des résultats. L’ouvrage de Pigeon et Pleau [PIG 95] présente en détail le
principe de la mesure, le mode opératoire, les procédures de calcul ainsi qu’une
discussion sur la variabilité et la reproductibilité des résultats.
Cette brève revue des méthodes d’essais montre que deux types d’approches peu-
vent être utilisés pour déterminer le volume d’air entraîné : les méthodes pressio-
métriques, à partir du béton frais, et la méthode microscopique à partir du béton
durci. Les travaux de Saucier et al. ont permis de comparer les volumes d’air me-
surés dans le béton frais et dans le béton durci [SAU 91]. Les données de leur étu-
de proviennent de plus de 80 formulations de bétons fabriqués en laboratoire et
en chantier (rapport E/C = 0,45). Les données de la figure 10.38 montrent qu’il
peut exister fréquemment des écarts de 2 % entre les valeurs mesurées dans le bé-
ton frais et dans le béton durci. L’écart tend à s’accroître lorsque le volume d’air
devient supérieur à environ 8 %.
447
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
16
lité
'éga
Volume d'air du béton frais (%)
ned
12 Lig
0 4 8 12 16
Figure 10.38 : comparaison des volumes d’air entraîné mesurés sur le béton frais,
puis sur le béton durci, d’après [SAU 91].
La courbe moyenne (M), obtenue par la méthode des moindres carrés, coïncide assez bien avec la
ligne d’égalité dans le domaine le plus courant (5-7 %), mais peut s’en écarter notablement aux va-
leurs extrêmes.
448
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
449
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
800
600
I II III
400
200
0
0 3 4,5 6 8,5 9 12
Le type et le dosage de l’adjuvant entraîneur d’air ne sont pas les seuls paramè-
tres contrôlant la production du réseau de bulles d’air. Deux groupes de facteurs
ont une influence décisive : les paramètres de composition du béton et les condi-
tions de fabrication.
450
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
10
222 kg/m3
6
306 kg/m3
4
388 kg/m3
2
0
10 14 20 28 40 56
Diamètre maximal du gros granulat (mm)
451
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Pour certains auteurs, ce n’est pas le dosage en ciment qui importe, mais le rapport
E/C (figure 10.34). L’influence du rapport E/C est notamment reliée à la consis-
tance du béton. La baisse du rapport E/C provoque une augmentation du seuil de
cisaillement et de la viscosité de la pâte. Selon Du et Folliard, l’augmentation du
seuil de cisaillement et de la viscosité de la pâte engendre une « barrière énergique
» qui s’oppose à la formation des bulles d’air [DU 05].
4.3.1.3. Consistance et superplastifiant
Dans le cas des bétons sans superplastifiant, les variations de consistance sont es-
sentiellement dues aux modifications du rapport E/C. À quantité constante d’ad-
juvant entraîneur d’air, le volume d’air entraîné augmente lorsque l’affaissement
passe de 75 mm à 150 mm. Au-delà de 150 mm, il peut diminuer en raison de
l’instabilité croissante des grosses bulles d’air qui remontent vers la surface
[DOD 90].
Les superplastifiants peuvent augmenter ou diminuer le volume d’air entraîné en
fonction de la nature chimique de l’adjuvant et de l’affaissement du béton. Les su-
perplastifiants à base de naphtalène tendent à augmenter le volume d’air alors que
ceux à base de mélamine peuvent diminuer ou n’avoir pas d’effet sur le volume
d’air entraîné [KOS 04]. Des essais de chantier ont montré que certains superplas-
tifiants à base de polycarboxylates possèdent une fonction secondaire d’entraîne-
ment d’air. Ils peuvent augmenter très fortement le volume d’air entraîné
(> 10 %), notamment lors de l’agitation durant le transport [GAG 04].
Les superplastifiants tendent généralement à augmenter la dimension moyenne
des bulles d’air entraîné [PIG 89, PLA 89]. Par conséquent, pour un volume d’air
donné, l’ajout de superplastifiant tend à augmenter le facteur d’espacement du ré-
seau de bulles d’air. Pour certaines combinaisons ciment/adjuvant entraîneur
d’air, le facteur d’espacement peut passer de moins de 200 µm, avant l’ajout de
superplastifiant à près de 400 µm, après l’ajout de superplastifiant [PLA 89]. Cela
confirme bien que des études préalables en laboratoire ou des essais sur le site de
production en usine sont indispensables.
4.3.1.4. Addition minérales
L’influence des additions minérales sur la production du réseau de bulles d’air en-
traîné varie considérablement en fonction de la dimension des particules, de leur
réactivité, de leur composition chimique et de leur taux d’addition dans le béton.
La fumée de silice, lorsque utilisée à des dosages de 5 % et 10 % de la masse du
liant, a relativement peu d’effet sur la production du réseau de bulles d’air entraî-
né [PIG 89]. La fumée de silice peut provoquer une légèrement augmentation de
la surface volumique (bulles plus petites) et une légère augmentation du volume
452
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
453
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
du gros granulat engendre une diminution du volume d’air entraîné (figure 10.40).
Pour un dosage constant en ciment et en adjuvant entraîneur d’air, le volume d’air
entraîné augmente avec l’accroissement de la proportion de granulats fins dans le
béton. Les particules ayant un diamètre compris entre 160 µm et 630 µm ont un
effet favorable sur l’entraînement d’air. L’augmentation de la proportion de parti-
cules de moins de 160 µm diminue significativement le volume d’air entraîné
[DU 05]. Les granulats fins contaminés par des huiles ou des matières organiques
peuvent engendrer d’importantes variations du volume d’air entraîné (§ 4.3.1.6).
4.3.1.6. Eau de gâchage et contaminants
L’eau potable, utilisée comme eau de gâchage, n’a pas d’effet significatif sur l’en-
traînement d’air car elle contient relativement peu d’impuretés. En revanche, les
eaux de gâchage contenant certaines impuretés organiques ou inorganiques peu-
vent avoir des effets favorables ou défavorables sur l’entraînement d’air. Par
exemple, les eaux contenant des algues favorisent l’entraînement et la stabilisa-
tion des bulles d’air alors que les fortes teneurs en ions Ca2+ et Mg2+ que l’on re-
trouve dans les eaux de lavage des camions malaxeur et dans les eaux très dures
nuisent à l’entraînement d’air [DU 05].
Les réseaux de bulles d’air partiellement ou entièrement produits par des conta-
minants (dans l’eau de gâchage ou dans les granulats) offrent généralement une
mauvaise protection contre les cycles de gel-dégel. Malgré un volume d’air par-
fois acceptable (> 5 %), ces réseaux de bulles d’air sont constitués de grosses bul-
les d’air instables et dont le facteur d’espacement peut être très supérieur à la
valeur de 200 µm généralement recommandée pour la protection contre les effets
des cycles de gel-dégel. Dans un tel cas, il faut commencer par désentraîner ces
grosses bulles pour ensuite entraîner de petites bulles.
4.3.1.7. Autres adjuvants
Les adjuvants entraîneur d’air peuvent entrer en interaction physico-chimique
avec d’autres adjuvants du béton (réducteur d’eau, superplastifiant, retardateur et
accélérateur de prise). Les interactions sont souvent associées à l’apport d’élec-
trolytes inorganiques ou de molécules organiques polaires contenus dans les ad-
juvants pouvant être utilisés simultanément avec l’entraîneur d’air [DU 05]. Les
travaux de Pigeon et al. [PIG 89], Plante et al. [PLA 89] et Saucier et al. [SAU 91]
ont démontré que des incompatibilités chimiques peuvent diminuer très significa-
tivement l’efficacité de l’adjuvant entraîneur d’air, tant du point de vue de la pro-
duction que de la stabilité du réseau de bulles d’air. La grande complexité et la
diversité des structures moléculaires des adjuvants ne permettent pas de formuler
des recommandations spécifiques permettant d’éviter les combinaisons incompa-
tibles. Néanmoins, les fiches techniques des adjuvants peuvent indiquer des in-
454
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
455
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
4.3.2.2. Température
L’augmentation de la température du béton engendre une diminution du volume
d’air entraîné. Pour pouvoir maintenir le volume d’air constant, il faut augmenter
le dosage de l’adjuvant entraîneur d’air. Le facteur d’espacement tend alors à di-
minuer. Par contre, si le dosage de l’adjuvant est diminué pour tenir compte d’une
diminution de température du béton, le facteur d’espacement risque d’augmenter.
Des mécanismes physico-chimiques relativement complexes ont été proposés
pour tenter d’expliquer la perte d’efficacité des adjuvants entraîneur d’air consé-
cutive à une augmentation de la température [DU 05]. Ce phénomène, encore mal
compris, fait l’objet d’explications parfois discordantes.
4.4. Stabilité du réseau de bulles d’air entraîné
La stabilité est une caractéristique importante du réseau de bulles d’air initiale-
ment entraîné lors du malaxage. L’agitation durant le transport du béton frais, les
ajouts d’eau et d’adjuvants sur chantier, le pompage et la vibration peuvent pro-
voquer l’échappement des bulles vers la surface et le fusionnement des petites
bulles pour en former de plus grosses. La perte d’air et la formation de grosses
bulles diminuent la protection offerte par le réseau de bulles d’air en augmentant
le facteur d’espacement des bulles. En pratique, pour pouvoir assurer une protec-
tion au gel adéquate du béton en place, il est important que les caractéristiques du
réseau de bulles d’air (volume total, surface volumique et facteur d’espacement)
soit stables, de la fin du malaxage jusqu’à la prise du béton.
4.4.1. Influence du transport du béton frais
L’agitation et les chocs imposés lors du transport du béton frais peuvent engen-
drer des variations du volume et du facteur d’espacement du réseau de bulles d’air
entraîné. Les agents entraîneur d’air commerciaux sont conçus pour pouvoir pro-
duire et stabiliser le réseau de bulles d’air durant les opérations normales de trans-
port et de mise en place du béton. Saucier et al. ont mesuré l’évolution des
caractéristiques du réseau de bulles d’air de bétons à air entraîné entre la fin du
malaxage à la centrale de béton prêt à l’emploi et la mise en place sur le chantier
[SAU 90]. Les caractéristiques du réseau de bulles d’air ont été mesurées dans le
béton durci après 15, 25, 70 et 90 minutes suivant le premier contact eau/ciment.
Les bétons ont été produits dans un malaxeur stationnaire ou dans des camions
malaxeurs. Deux types d’adjuvants entraîneur d’air, deux types de superplasti-
fiants et trois ciments ont été étudiés. Leurs résultats montrent qu’en l’absence de
superplastifiant, les deux types d’adjuvants entraîneur d’air ont produit des ré-
seaux de bulles d’air stables durant le transport (malaxage à vitesse lente) et la
mise en place. L’ajout de superplastifiant à l’usine peut parfois déstabiliser le ré-
456
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
7 400 Superplastifiant A
Facteur d'espacement (μm)
Superplastifiant B
Volume d'air (%)
6 Sans superplastifiant
Superplastifiant A
5 300
Superplastifiant B
4
Sans superplastifiant
3 200
0 15 30 45 60 75 90 0 15 30 45 60 75 90
Temps d’échantillonage (min) Temps d’échantillonage (min)
457
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
le béton frais et durci indiquent que les méthodes de mise en place ont relativement
peu d’effet sur le volume d’air. Les variations du volume d’air sont exprimées par
rapport au volume d’air mesuré dans le béton prélevé à la chute du camion malaxeur.
Le pompage à l’aide d’une configuration permettant la chute libre du béton dans la
dernière section verticale engendre une perte d’air comprise entre 0,5 % et 2 % (va-
leur absolue). L’utilisation d’un conduit souple, formant une demi-boucle à l’extré-
mité de la partie verticale du conduit de la pompe, permet de diminuer la perte d’air.
L’utilisation d’une benne engendre une perte d’air comprise entre 0,5 % et 1 %. La
perte d’air associée à l’utilisation d’un convoyeur est comprise entre 1 % à 1,5 %.
L’arasement de la surface à l’aide d’une règle vibrante ajoute une perte d’air d’en-
viron 0,5 %. Malgré ces pertes, dans tous les cas, le réseau de bulles d’air dans les
dalles de béton possédait un facteur d’espacement inférieur à 200 µm.
Lessard et al. ont montré qu’une configuration de pompage utilisant des tubes repo-
sant sur un sol horizontal n’affecte pas significativement le volume d’air et le facteur
d’espacement [LES 96]. L’utilisation de tronçons verticaux, permettant une chute li-
bre du béton dans le tube, engendre des pertes d’air relativement faibles (1 %) mais le
facteur d’espacement peut fortement augmenter en passant de 180 µm à plus de
300 µm. L’utilisation d’un étranglement à l’extrémité du dernier tronçon vertical em-
pêche la chute libre du béton dans le tube. Cette approche permet de diminuer consi-
dérablement l’accroissement du facteur d’espacement lors des opérations de
pompage. L’augmentation du facteur d’espacement mesuré avec les configurations
comportant des tronçons verticaux résulte principalement de la coalescence des bulles
et des forces d’impact générées lors de la décompression et de la chute libre du béton
dans la section verticale du tube de pompage. De plus, les fortes pressions de pompage
favorisent la dissolution des plus petites bulles d’air dans la solution interstitielle
[PLE 95].
Les bulles d’air entraîné d’un réseau stable sont en équilibre dans le béton frais.
Le pompage et les méthodes de mise en place peuvent créer des pressions, des
vibrations et des déformations qui modifient l’état d’équilibre des bulles d’air.
Des bulles peuvent alors fusionner ou s’échapper vers la surface, ce qui diminue
la protection offerte par le réseau de bulles d’air en contribuant à augmenter son
facteur d’espacement.
Le volume d’air entraîné diminue avec la durée de vibration interne
(figure 10.42). La perte d’air est plus importante dans les bétons ayant un plus
grand affaissement et un plus grand volume d’air initial. Une vibration bien utili-
sée engendre généralement une perte d’air relativement faible. Dans ce cas, l’air
perdu résulte de l’échappement de grosses bulles habituellement indésirables du
point de vue de la résistance mécanique et de la durabilité au gel-dégel. La perte
458
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
des grosses bulles a relativement peu d’effet sur le facteur d’espacement des bul-
les d’air.
9
7
Volume d'air entraîné (%) Affaissement 140 mm
6
5
95 mm
4
3
45 mm
2
1
0 10 20 30 40 50
Durée de la vibration (s)
Figure 10.42 : relation entre l’affaissement, la durée de vibration et la teneur en air
du béton, d’après [KOS 04].
Les bétons à air entraîné ont été consolidés à l’aide d’un vibrateur de 25 mm de diamètre. Ils ont tous
été fabriqués avec le même dosage d’adjuvant entraîneur d’air. Plus la durée de vibration est longue,
plus la perte d’air est importante. La perte d’air s’accroît avec l’affaissement.
459
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
sont nécessaires pour déterminer les dosages et vérifier la compatibilité des adju-
vants (entraîneur d’air, superplastifiant, retardateur de prise). Les dosages d’adju-
vants entraîneur d’air peuvent être de 2 à 3 fois plus élevés que ceux qui sont
normalement recommandés dans les bétons de résistance courante. L’agent entraî-
neur d’air doit être introduit en même temps que le sable et l’eau, au tout début de
la séquence de malaxage. L’ouvrage de Aïtcin contient de nombreuses recomman-
dations sur la production des bétons à hautes performances à air entraîné [AÏT 01].
Aïtcin et Lessard ont suivi la production de deux bétons à hautes performances à
air entraîné utilisés pour construire deux ponts au Québec [AÏT 94]. Les bétons
ont été dosés en usine puis malaxés dans des camions à toupie. Dans les deux cas,
la résistance caractéristique spécifiée était de 60 MPa. Les bétons ont été fabri-
qués avec un liant contenant 8 % de fumée de silice et avec un rapport E/L com-
pris entre 0,29 et 0,30. Les résistances moyennes à 28 jours sont comprises entre
75 et 81 MPa. Les spécifications incluaient notamment un volume d’air entraîné
de 5,5 ± 1,5 %, un facteur d’espacement moyen inférieur à 230 µm (aucune valeur
supérieure à 260 µm) et un affaissement de 180 ± 40 mm. L’analyse des résultats
porte sur 23 échantillonnages pour le premier pont et 43 pour le second. Pour les
deux projets, toutes les spécifications préconisées ont pu être respectées. Les fac-
teurs d’espacement moyens étaient de 190 µm et 185 µm avec des coefficients de
variation de 17 % et 19 % respectivement.
4.5.2. Bétons autoplaçants
De nombreuses études en laboratoire et plusieurs projets de construction ont dé-
montré qu’il est possible de produire des bétons autoplaçants à air entraîné com-
portant un réseau de bulles stable et pouvant offrir une protection adéquate contre
l’attaque par les cycles de gel-dégel [KHA 95, KHA 00, HOV 00]. Cependant,
certaines formulations de bétons autoplaçants peuvent produire un réseau de bul-
les d’air instable en raison de leur grande fluidité et d’une viscosité parfois trop
faible [KHA 02]. L’agitation (durant le transport) ou le pompage favorisent
l’échappement ou le fusionnement des bulles, ce qui peut produire un facteur
d’espacement supérieur aux spécifications habituelles.
Khayat et Assaad ont démontré qu’il est possible de stabiliser un réseau de bulles
d’air entraîné dans différents types de bétons autoplaçants produits avec ou sans
agents de viscosité [KHA 02]. La stabilité a notamment été évaluée durant une pé-
riode de 95 minutes suivant le premier contact eau ciment. L’utilisation d’un
agent de viscosité peut augmenter par un facteur de 2 à 4 la demande en adjuvant
entraîneur d’air nécessaire pour produire un facteur d’espacement stable et infé-
rieur à 200 µm. Les liants contenant des cendres volantes peuvent aussi contribuer
à augmenter la demande en adjuvant entraîneur d’air. Des réseaux de bulles d’air
instables ont été obtenus avec les bétons contenant un dosage en matières cimen-
460
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
5. DISPOSITIONS NORMATIVES
De nombreux organismes internationaux et nationaux (CEN, Comité européen de
normalisation; CSA, Association canadienne de normalisation; ACI, American
Concrete Institute; ASTM, American society for testing and materials) établissent
des normes pour la construction des structures en béton encadrant la conception
structurale (EN 1992, CSA A23.3, ACI 318), la formulation, les spécifications et
le contrôle du béton (EN 206-1, CSA A23.1), l’exécution des structures en béton
(ENV 13670-1) et les matériaux et procédures d’essais (EN, CSA A23.2, ASTM).
Toutes ces normes contiennent notamment de nombreuses exigences et recom-
mandations spécifiques pour la conception et la construction des structures en bé-
ton exposées à une ambiance hivernale rigoureuse. L’ensemble des dispositions
normatives applicables à la durabilité au gel des structures en béton peut être re-
groupé en trois familles :
1) des normes de conception qui formulent des exigences et des recommandations
sur la géométrie des éléments structuraux dans le but de minimiser l’action de
l’environnement sur la structure ;
2) des normes matériaux qui comprennent des recommandations spécifiques sur
la formulation du béton, la spécification, la production et le contrôle de la qualité
des bétons exposés au gel ;
3) des normes d’essais permettant de vérifier certains critères clés de la perfor-
mance des bétons exposés à des cycles de gel-dégel (gélivité des granulats, volu-
me d’air entraîné, essais normalisés de durabilité, etc.).
5.1. Normes de conception, disposition constructives
Une structure en béton mal conçue peut avoir une durabilité déficiente malgré
l’utilisation de matériaux durables et de bonne qualité. La durabilité vis-à-vis du
461
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
gel d’une structure de béton peut être influencée par des paramètres de conception
liés à la géométrie des éléments structuraux. Par exemple le choix du type, du
nombre et du positionnement des joints de dilatation peut influencer la durabilité
au gel des éléments en béton de la sous-structure. Les joints de dilatation sont des
composantes relativement fragiles. Ils sont soumis à des sollicitations mécaniques
et environnementales importantes qui peuvent engendrer des pertes d’étanchéité.
Les joints de tablier qui fuient peuvent permettre à l’eau et aux sels de déglaçage
de saturer et de contaminer le béton des poutres chevêtres, des poutres caisson,
des piles et des murs de soutènement. Ces éléments en béton, fortement contami-
nés par les chlorures et maintenus dans un état de saturation plus élevé, sont plus
fortement attaqués par les cycles de gel-dégel (fissuration interne et écaillage). La
norme canadienne de conception des ponts (CSA S6) recommande de minimiser
le nombre de joints structuraux et de les concevoir en fonction de la durabilité de
la structure.
La conception des systèmes de drainage des eaux de fonte contaminées par les
chlorures peut aussi influencer la durabilité au gel des éléments de béton. Des dé-
pressions mal drainées à la surface des tabliers ou à la surface des ailes inférieures
des poutres caisson contribuent à maintenir le béton saturé et fortement contaminé
par les chlorures. Ces zones sont alors plus fréquemment dégradées par l’écaillage
de surface. Pour diminuer la saturation et la contamination des éléments de sous
structure, les conduits d’évacuation des eaux de ruissellement et de fonte doivent
se prolonger à une distance d’au moins 150 mm sous la surface du tablier (norme
CSA S6). Le positionnement des drains doit être conçu pour que les eaux éva-
cuées n’entrent pas en contact avec le béton.
5.2. Normes sur le matériau béton
La durabilité au gel du béton est fortement influencée par plusieurs de ses para-
mètres de composition et de mise en œuvre. Des normes nationales adaptées à
chaque contexte climatique national encadrent précisément le choix des consti-
tuants, la formulation, la mise en œuvre et le contrôle de la qualité des bétons ex-
posés à des cycles de gel-dégel. De nombreuses exigences normatives peuvent
s’appliquer au prescripteur, au producteur et à l’utilisateur du béton.
5.2.1. Norme NF EN 206-1
En ce qui concerne la production du béton, la norme européenne EN 206-1 indi-
que les tâches et responsabilités techniques respectives du prescripteur, du pro-
ducteur et de l’utilisateur, dans les différents types de spécifications qu’elle
prévoit. Le tableau 1 de la norme EN 206-1 définit ainsi quatre classes d’exposi-
tion concernant le gel (tableau 10.2).
462
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
463
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
Station météorologique
Figure 10.43 : carte des zones de gel en France (norme NF EN 206-1, figure NA.2).
Pour chaque classe d’exposition, la norme NF EN 206-1 définit des limites appli-
cables à la composition et aux propriétés du béton. Cette approche impose, pour
chaque classe d’exposition, un rapport E/Léquivalent maximal (le terme « liant
équivalent » correspond à la masse de (ciment + k × additions minérales), une
classe de résistance minimale, une teneur minimale en liant équivalent et une te-
neur en air minimale. Ces paramètres, qui ont une influence directe sur la quantité
d’eau gelable, la perméabilité et le niveau de protection du réseau de bulles d’air,
permettent de moduler le potentiel de durabilité du béton en fonction de la sévé-
rité des conditions d’exposition au gel. Il faut noter que le facteur d’espacement
des bulles d’air ne fait l’objet d’aucune spécification dans la norme. Il est toute-
fois possible de déroger à certaines limites imposées (notamment le volume d’air
entraîné) si des essais de validation démontrent l’équivalence de performance.
Le tableau 10.3 résume les limites de composition de la norme française. Certai-
nes limites imposent notamment une proportion maximale d’additions minérales
dans le liant. Ces proportions sont variables en fonction du type d’addition et de
la sévérité des conditions d’exposition au gel. Des essais de validation de la dura-
bilité sont également recommandés dans le cas des expositions au gel les plus sé-
vères. Dans le cas des classes d’expositions XF3 et XF4, il est notamment suggéré
de mesurer le facteur d’espacement des bulles d’air entraîné.
464
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Tableau 10.3 : valeurs limites applicables pour la composition et les propriétés du béton
soumis au gel-dégel en fonction de la classe d’exposition. D’après la norme NF EN 206-1.
NF EN 206-1 (valeurs limites applicables en NF EN 206-1 (valeurs limites applicables en
Norme applicable France pour les bétons coulés en place) France pour les produits de béton
selon tableau NA.F.1 préfabriqués en usine) selon tableau NA.F.2
Classe d’exposition
XF1 XF2 XF3 XF4 XF1 XF2 XF3 XF4
au gel-dégel
Rapport E/C maximal – – – – – – – –
Rapport Eeff/liant éq
0,60 0,55 0,55 0,45 0,50 0,50 0,45 0,40
maximal
Classe de résistance
C25/30 C25/30 C30/37 C30/37 C35/45
minimale
Teneur minimale en
– – – – – – – –
ciment (kg/m3)
Teneur minimale en
280 (2) 300 315 340 – – – –
liant éq (kg/m3)
Teneur minimale en
air (%)
– 4 (3) 4 (3) 4 (3) – 4 (8) 4 (8) 4 (8)
Essai(s) de perfor-
– – – – – – (1) (4) (1) (4) (5)
mances
Absorption d’eau
maximale (%)
– – – – 6 5 (7) 5 (7) 4 (7)
Cendres
0,15 (6) 0,15 (6)
Rapport maximal A/(A+C)
465
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
(7) L’exigence d’absorption maximale est retenue uniquement lorsque le béton doit respecter les
seuils associés aux essais de performance (XP P18-424, XP P18-425, XP P18-420) et qu’il est réa-
lisé sans agent entraîneur d’air. Lorsque le béton est réalisé avec un agent entraîneur d’air, il n’y a
pas d’exigence sur l’absorption d’eau maximale, compte tenu du fait qu’une teneur en air élevée
peut conduire à une absorption d’eau plus importante.
(8) Le respect de cette valeur nécessite l’utilisation d’un agent entraîneur d’air. Il est possible de
déroger à la teneur minimale en air en utilisant les essais de performance (XP P18-424, XP P18-
425, XP P18-420) et les seuils correspondants (allongement relatif, fréquence de résonance, perte
de matière) définis dans les recommandations pour la durabilité des bétons durcis soumis au gel.
N.B. Dans le cas des produits de structure préfabriqués, le préfabricant a la possibi-
lité d’utiliser au choix les exigences de l’un ou de l’autre des deux tableaux. Pour
chaque type de produit préfabriqué, une procédure documentée doit mentionner le
tableau auquel il est fait référence.
5.2.2. Fascicule 65A
En ce qui concerne la mise en œuvre du béton, le fascicule 65A applicable aux
ouvrages d’art, en cours de révision (au moment de la publication de cet ouvrage)
afin de le rendre cohérent avec l’ensemble du contexte normatif dont la norme NF
EN 206-1, précise des exigences complémentaires, notamment en ce qui concerne
les bétons soumis aux cycles de gel-dégel avec ou sans agents de déverglaçage,
en se référant notamment aux recommandations pour la durabilité des bétons sou-
mis au gel du LCPC de 2003 (qui stipulent des exigences en terme de respect du
réseau de microbulles d’air ou de performances vis-à-vis d’essais de gel-dégel)
[LCP 03].
5.2.3. Approche canadienne : la norme CSA A23.1-04
Certaines prescriptions de la norme CSA A23.1-04 Bétons : constituants et exé-
cution des travaux méritent d’être citées car elles concernent un pays où les con-
ditions climatiques font que les agressions hivernales, aussi bien par le nombre et
la sévérité des cycles de gel-dégel que par l’utilisation intensive de sels fondants
durant quatre ou cinq mois par an, sont beaucoup plus dommageables pour les
ouvrages qu’elles ne le sont en France. Cette norme, disponible en français, a fait
l’objet d’une modification majeure en 2004.
Depuis le début des années 1980, la norme CSA A23.1 prescrit une composition
de béton qui dépend du type et de la sévérité des conditions d’expositions. Tout
béton soumis à des cycles de gel-dégel et/ou à l’action des sels fondants ou des
ions chlorure doit :
– développer une résistance à la compression minimale à 28 ou 56 jours ;
– être caractérisé par un rapport E/L inférieur à une valeur imposée (les additions
minérales conformes à la norme CSA A3000 sont permises et prises en compte
dans le calcul du rapport E/L) ;
466
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
467
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
C-XL 0,37 50 (56 jours) < 230 6-9 5-8 4-7 3 < 1000
C-1 0,40 35 < 230 6-9 5-8 4-7 2 < 1500
(a) Pour un rapport E/L supérieur à 0,36, le facteur d’espacement moyen doit être inférieur à
230 µm sans qu’aucune valeur n’excède 260 µm. Pour un rapport E/L égal ou inférieur à 0,36, le
facteur d’espacement moyen doit être inférieur à 250 µm sans qu’aucune valeur n’excède 300 µm.
(b) Type de cure 1 : 3 jours à une température 10 °C ou pendant le temps nécessaire pour atteindre
40 % de la résistance spécifiée.
Type de cure 2 : 7 jours à une température 10 °C et pendant le temps nécessaire pour atteindre
70 % de la résistance spécifiée. Lorsqu’on utilise du béton à la fumée de silice, on doit recourir à
des méthodes de cure additionnelles.
Type de cure 3 : Période de cure par voie humide de 7 jours. Les types de cure acceptables sont les
suivantes : nappe d’eau, arrosage continu, matériau absorbant ou toile maintenue continuellement
mouillée.
468
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
469
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
470
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
471
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
2
Degré de détérioration
6 1
0 0
10 20 30 40 60 100 120
Âge de l'ouvrage (année) Nombre de cyles/an
(a) (b)
Figure 10.44 : relations entre l’âge d’un ouvrage et son degré de détérioration (a),
et entre le nombre de cycles de gel-dégel et l’état de détérioration (b), d’après [GEB 96].
On rapporte ici le résultat d’observations faites sur des ouvrages subissant tous les ans un hiver ri-
goureux. La détérioration augmente régulièrement avec l’âge de l’ouvrage (a), sans qu’il soit possible
de la corréler avec le nombre de cycles (b).
472
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
3
État de détérioration
0
0 50 100
Produit : nombre de cycles x S
Figure 10.45 : relation entre le degré de détérioration d’un ouvrage, le nombre de cycles
de gel-dégel et le coefficient climatique de saturation, d’après [GEB 96].
Cette figure est la transformée de la figure 10.43b où l’on a porté en abscisse, non plus le nombre de
cycles de gel-dégel, mais son produit par un coefficient climatique de saturation, S (rapport de la hau-
473
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
teur des précipitations affectant l’ouvrage à la valeur moyenne de l’ensemble du district étudié). On
obtient une assez bonne corrélation.
Les différentes parties d’un ouvrage peuvent être exposées à des conditions de mi-
lieu variables par l’humidité (air, eau, aspersions) ou par la température (ombre,
soleil, orientation nord ou sud). Une illustration en est fournie par les résultats
d’une étude du comportement de bétons de barrages canadiens dont les durées de
service s’échelonnaient de 13 à 52 ans [BOU 03]. Les conclusions indiquent que
les surfaces verticales des ouvrages poids et des superstructures sont généralement
en excellente condition. Les surfaces horizontales des superstructures où l’eau
peut s’accumuler sont fréquemment détériorées (béton sans air entraîné et non ex-
posé aux sels fondants). La conduite plus uniforme des bétons à air entraîné, com-
parativement à celle des bétons sans air entraîné, est évidente. Les bétons exposés
à l’air montrent systématiquement un peu moins de dégâts que ceux au contact de
l’eau, ou les problèmes les plus sérieux sont un écaillage modéré. Les auteurs ci-
tent aussi, pour ces mêmes barrages, l’influence possible de l’orientation par rap-
port au soleil sur la gravité des dégradations. On peut effectivement supposer avec
d’autres auteurs, comme Hudec et al. [TOU 04], que les cycles de mouillage/sé-
chage sont plus marqués sur les faces exposées au soleil : ils y induisent une fissu-
ration superficielle plus dense qui favorise les attaques ultérieures par
accroissement du degré de saturation et affaiblissement de la pâte interstitielle.
Il n’est pas possible d’exprimer, à l’aide d’une seule cote, la sévérité d’une expo-
sition aux cycles de gel-dégel. L’évaluation de la sévérité de cycles de gel repose
donc sur une approche qualitative basée sur la comparaison avec des environne-
ments reconnus comme sévères ou modérés. Considérons les caractéristiques des
cycles de gel-dégel d’un environnement reconnu comme très sévère du point de
vue de la durabilité au gel. L’expérience pratique canadienne démontre que le cli-
mat des régions du sud est du Canada (Ontario, Québec et Provinces maritimes)
est très agressif du point de vue de la durabilité au gel. Pour êtres durables au gel,
les bétons exposés aux précipitations climatiques (environnement humide) doi-
vent clairement faire l’objet de règles de composition spécifiques dont notam-
ment comporter un réseau de bulles d’air entraîné de bonne qualité ( L < 230 µm).
Des mesures de températures in situ dans des poutres et des dalles exposées dans
la région de Kingston au Canada ont montré que les températures minimales
moyennes mensuelles (janvier) à 50 mm sous la surface du béton sont de – 24 °C
dans une poutre et de – 14 °C dans une dalle sur sol [NOK 04]. Le nombre de cy-
cles de gel-dégel annuel varie en fonction de la température minimale atteinte lors
d’un cycle, de la profondeur sous la surface du béton et du type d’exposition. Pour
fin de comparaison, le climat de la région de Kingston (Ontario) comporte en
moyenne 96 cycles annuels de gel-dégel (nombre de fois où la température de
474
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
l’air est passée sous 0 °C). Dans le cas d’une poutre dont toutes les faces sont ex-
posées à l’air, le nombre de cycles de gel-dégel annuel (température minimale des
cycles au moins inférieure à – 5 °C), varie de 30 à une profondeur de 50 mm à 8
à une profondeur de 300 mm. Dans le cas d’une dalle sur sol, le nombre de cycles
varie de 12 à une profondeur de 50 mm à 4 à une profondeur de 100 mm [NOK
04]. Les mesures de Cortez et Gerlach [COR 90] ont montré que le nombre de cy-
cles de gel mesuré immédiatement à la surface de pavages en béton est environ
deux fois plus élevé que le nombre de cycles mesuré à environ 50 mm de profon-
deur. Le taux de gel médian mesuré à 50 mm de profondeur dans des éléments en
béton de la région de Kingston varie de 0,88 °C/h (dans une poutre) à 0,34 °C/h
(dans une dalle sur sol). Des taux de gel supérieurs à 2 °C/h ont été mesurés dans
moins de 30 % du nombre total de cycles. D’autres études effectuées au Québec
[PIG 81] ont permis de dégager des conclusions similaires.
L’évaluation de la sévérité de l’exposition au gel doit prendre en compte la pré-
sence d’ions chlorure d’origine marine ou apportés par les sels fondants. Les ions
chlorure sont la principale cause de l’écaillage des surfaces de bétons exposées
aux cycles de gel-dégel. Dans le cas des structures routières, les eaux de fontes
contenant les sels fondants peuvent fortement contaminer les dalles, les tabliers,
les trottoirs et les parapets. Des éléments de la sous-structure (piles, poteaux, che-
vêtres, extrados des poutres et des dalles) peuvent aussi être contaminés par les
projections générées par le passage des véhicules. En milieu côtier, les surfaces
de bétons peuvent être soumises au contact des chlorures présents dans l’eau de
mer ou dans les embruns marins.
Il n’est pas possible d’exprimer, à l’aide d’une seule cote, la sévérité d’une expo-
sition aux cycles de gel-dégel. L’évaluation de la sévérité de cycles de gel repose
donc sur une approche qualitative basée sur la comparaison avec des environne-
ments reconnus comme sévères ou modérés.
475
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
476
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
Dans le cas d’une exposition à un gel sévère, les formulations spécifiées dans les
normes imposent un volume d’air au moins supérieur à 4%. L’air entraîné diminue
la résistance à la compression. Pour obtenir la résistance spécifiée, tout en satisfai-
sant le volume d’air minimal, il peut être nécessaire de prévoir un rapport E/L re-
lativement faible (< 0,35), ce qui rend parfois le béton difficile à produire en
centrale. Par exemple, dans certaines régions, la production d’un béton C60/70
avec 5 % d’air entraîné relève d’un « pari impossible ». Dans ce cas, une approche
de formulation basée sur la performance pourrait démontrer qu’un volume d’air
entraîné plus faible (< 4 %) ou qu’un facteur d’espacement plus élevé (> 250 µm)
peuvent être adéquats pour assurer une bonne protection contre l’attaque par les
cycles de gel-dégel.
Dans le cas d’une exposition à un gel modéré, il est plus difficile d’utiliser l’ap-
proche de formulation basée sur la performance. Par exemple, un environnement
de gel modéré peut n’engendrer que très rarement des températures inférieures à
– 5 °C à quelques mm sous la surface exposée ; le béton n’est généralement pas
saturé lors du gel ; les sels fondants ne sont pas systématiquement utilisés à cha-
que saison froide. Dans le cas d’un gel modéré, les essais accélérés utilisés com-
me indicateurs de performance (§ 5.3.1) sont tous considérés comme très sévères
et peu représentatifs des conditions réelles d’exposition. Il est par conséquent dif-
ficile de les utiliser pour spécifier des niveaux de performance au gel-dégel. Des
travaux de recherche sont nécessaires pour pouvoir développer de nouveaux es-
sais de laboratoire mieux adaptés pour la spécification de critères de performance
au gel de bétons exposés à un environnement de gel modéré.
L’atteinte du niveau de performance spécifié vis-à-vis du gel d’une formulation
de béton est basée sur le choix du rapport E/L, du type et due dosage en additions
minérales et des caractéristiques du réseau de bulles d’air.
477
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
soit parce qu’une mauvaise organisation du chantier aboutit à une attente prolongée
du transporteur avant qu’il ne déverse le béton peut déstabiliser le réseau de bulles
et diminuer l’efficacité de la protection contre les cycles de gel-dégel.
Les bétons à air entraîné peuvent être mis en place par vibration. La vibration, si
elle est effectuée correctement, a l’avantage d’éliminer les grosses bulles d’air
(inefficaces pour la protection au gel et pénalisantes pour les résistances mécani-
ques). Il faut éviter un excès de vibration qui risque de déstabiliser le réseau de
bulles d’air, notamment au niveau de la peau du béton.
Une finition trop poussée des surfaces est à proscrire car, plus encore que ne le
fait une vibration prolongée, elle favorise le ressuage et crée une couche superfi-
cielle riche en eau, fissurable, qui résistera très mal à l’écaillage. Une finition trop
poussée risque aussi de détériorer le réseau de bulles en surface. Les truelles ou
les taloches métalliques sont à proscrire car elles ont un effet encore plus défavo-
rable sur le réseau de bulles à la surface du béton.
La cure est un paramètre clé de la durabilité des bétons exposés aux cycles de gel-
dégel. La méthode de cure doit notamment permettre à la peau du béton de déve-
lopper tout son potentiel de durabilité. Par temps normal ou chaud la cure doit
protéger les surfaces de béton contre une dessiccation excessive et trop rapide. Le
fascicule 65A contient plusieurs recommandations sur la méthodologie de cure
des bétons.
S’il y a des risques de gel, le béton doit en être protégé durant une période suffi-
sante. Le béton ne doit pas être exposé à des températures négatives avant d’avoir
atteint une résistance à la compression égale ou supérieure à 15 MPa. Une longue
période de maturation avant exposition aux conditions hivernales est souhaitable
pour que la résistance au gel du béton ait atteint son meilleur niveau (degré d’hy-
dratation élevé qui a rempli la porosité capillaire par des hydrates, diminué la per-
méabilité et accru la résistance à la traction).
La peau des éléments en béton (0-50 mm) est la plus fréquemment et sévèrement
exposée aux cycles de gel-dégel. Les caractéristiques de la peau sont étroitement
dépendantes de nombreux paramètres de mise en œuvre du béton (vibration,
mûrissement, finition de surface).
L’expérience pratique montre que la fissuration n’a pas ou peu d’effet sur la du-
rabilité au gel des éléments en béton exposés à des cycles de gel-dégel. Par exem-
ple, au Canada, de très nombreuses structures en béton à air entraîné présentant
des fissures (retraits empêchés) sont en bonne condition malgré plus de 20 années
d’exposition à de nombreux cycles de gel-dégel en présence de sels fondants.
Dans ce type d’environnement, la fissuration du béton d’enrobage a surtout des
effets défavorables sur la corrosion des aciers d’armature. Du point de vue de la
478
La durabilité des bétons en ambiance hivernale rigoureuse
durabilité au gel, les fissures ont pour effet d’augmenter localement le degré de
saturation et la profondeur de pénétration des ions chlorure. Un béton conçu pour
résister à une ambiance hivernale rigoureuse (air entraîné, matrice cimentaire
compacte) est normalement durable même lorsque la pâte est complètement satu-
rée. Dans le cas des bétons à air entraîné, les pressions engendrées par l’expansion
de la glace contre les parois internes des fissures ne semblent pas suffisantes pour
endommager localement le béton au voisinage de la fissure.
7. CONCLUSION
Il ne faut pas exagérer l’importance des agressions en ambiance hivernale, même
rigoureuses, sur les ouvrages en béton courant. On constate, en effet, que les sur-
faces verticales des ouvrages, lorsqu’elles ne sont pas au contact direct de l’eau,
ne présentent pas de détérioration particulière dans la mesure où le béton a été for-
mulé et mis en oeuvre suivant les règles de l’art. Pour les autres parties d’ouvra-
ges, notamment les surfaces horizontales ou à contact prolongé avec l’eau,
l’obtention d’une durabilité convenable demande que le béton renferme de l’air
entraîné. Pour des parties d’ouvrages peu sollicitées mécaniquement et/ou, sur-
tout, sans contact avec des sels fondants, une simple incorporation d’entraîneur
d’air, au dosage requis, dans la bétonnière, conduit à livrer un béton satisfaisant,
sans aucune complication de fabrication. Par contre, pour les situations les plus
sévères, celles des surfaces horizontales en contact avec des sels fondants, la pro-
tection par entraînement d’air dans le béton n’est assurée que si des conditions
supplémentaires de malaxage, de mise en place et de cure sont scrupuleusement
respectées.
L’obtention de bétons résistants aux cycles de gel-dégel éventuellement associés
à l’action des sels de déverglaçage nécessite l’implication de tous les acteurs in-
tervenant dans la construction des structures : prescripteur, producteur de béton et
entrepreneur. Outre une conception adéquate, il est primordial de définir des for-
mules de béton adaptées et validées par le biais d’essais, notamment en ce qui
concerne la quantité d’agent entraîneur d’air permettant de garantir l’obtention
d’un réseau de bulles d’air adéquat dans le béton durci, ou une valeur du rapport
Eau/Liant permettant une résistance aux cycles de gel-dégel pour les bétons ne
comportant pas nécessairement d’adjuvant entraîneur d’air (BHP).
Les mécanismes de dégradation des bétons ont été largement étudiés ces dernières
années, notamment au Canada, et ont conduit à la rédaction de normes et de re-
commandations pertinentes pour la définition de béton adaptés à des ambiances
hivernales rigoureuses.
En revanche, même si les normes et règlements en vigueur (telle que la NF EN
206-1 et le fascicule 65A) définissent des règles de formulation pour les bétons
479
LA DURABILITÉ DES BÉTONS
soumis à des gels faibles ou modérés avec ou sans sels de déverglaçage, les essais
performantiels actuellement disponibles (gel-dégel et écaillage), par nature accé-
lérés, ne sont pas adaptés à la qualification de formules de béton destinées à des
ambiances hivernales peu rigoureuses et des besoins de recherches existent sur ce
sujet.
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