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Élevage et territoires : INRA Prod. Anim.

,
2019, 32 (2), 189-204

quelles interactions
et quelles questions ?
Jacques LASSEUR1, Thierry BONAUDO2, Jean-Philippe CHOISIS1, Marie HOUDART3, Martine NAPOLÉONE1, Muriel TICHIT†2,
Benoît DEDIEU4
1
SELMET, Université Montpellier, INRA, Montpellier SupAgro, CIRAD, 34000, Montpellier, France
2
UMR SAD-APT, INRA, AgroParisTech, Université Paris-Saclay, 75000, Paris, France
3
IRSTEA-UMR Territoires, Aubière, cedex, France
4
INRA, Sciences pour l’Action et le Développement, Theix, Saint-Genès-Champanelle, 63122, France
Courriel : Jacques.lasseur@inra.fr

„ Les activités d’élevage sont régulièrement remises en question pour leurs impacts environnementaux mais la
demande mondiale en augmentation régulière nécessiterait de poursuivre le développement des productions
animales. En quoi mieux intégrer les dimensions territoriales des activités d’élevage contribuerait-il à redéfinir
les formes futures d’un élevage durable ?

Introduction Certaines recherches construisent des Pour interroger ce futur de l’élevage,-


argumentaires basés sur des critères Godard et Hubert (2002) ainsi que Zahn
d’efficience, sur la remise en cause et al. (2015) nous invitent à dépasser les
Les activités d’élevage sont régulière- des modalités d’usage de telle ou telle questions de durabilité « interne » des
ment remises en question en regard des ressource ou via l’évaluation multicri- modèles agricoles et à nous intéresser
grands équilibres écologiques de la pla- tères (Lairez et al., 2017). D’autres éta- aussi à la durabilité « étendue » à l’échelle
nète (émissions de Gaz à Effet de Serre, blissent des hiérarchies entre modèles territoriale. Pour ces auteurs, ce qui est
dégradations des terres…) (Steinfeld de production (industriel, à l’herbe) ou en jeu du point de vue de la durabilité
et al., 2006). La production de biens espèces animales (Godfray et al., 2018). interne concerne la capacité du système
animaux est ainsi associée au chan- Les analyses et les explorations des considéré à se maintenir en conservant
gement climatique, au changement leviers d’amélioration de l’efficience ses capacités productives, en renouve-
d’usage des sols, à la perte de biodiver- sont conduites en considérant des sys- lant les ressources dont il dépend et en
sité et à la pollution de l’air et de l’eau tèmes de production qui peuvent être répondant aux enjeux économiques
(Alkemade et al., 2013 ; Garnett, 2017). rattachés à des espaces aux caractéris- et de filières. L’espace d’inscription de
Dans le même temps, il s’agit aussi de tiques propres (potentialités ou handi- ces systèmes de production combine
satisfaire une demande mondiale en caps, liens à l’amont et à l’aval ; part de un ensemble d’éléments relatifs aux
augmentation régulière qui nécessite- l’herbe) et densité d’animaux (Hercule milieux et climats, à ces ressources, à
rait de poursuivre le développement et al., 2017). Ainsi à l’échelle planétaire, ces filières et aux politiques s’appuyant
des productions animales (HLPE, 2016). on pourra étudier les voies d’améliora- sur des zonages (handicap, montagne,
Quelles seront les formes à venir d’un tion des systèmes herbagers intensifs eau). La durabilité étendue porte, elle,
élevage durable ? localisés dans des bassins tropicaux sur la capacité de l’activité considérée à
ou à l’échelle nationale questionner contribuer à « la durabilité territoriale »
Le débat est alimenté par des le devenir des systèmes herbagers du qui implique la relation à d’autres por-
réflexions réalisées à l’échelle plané- Massif central (Cerles et al., 2017) ou teurs d’enjeux et la capacité de l’acti-
taire (HPLE, 2016) ou continentale l’efficacité des politiques de soutien de vité à intégrer les intérêts propres de
(ATF, 2016), autour de modèles tels l’élevage en zones défavorisées via les l’ensemble des porteurs d’enjeux (y
que celui de l’agroécologie ou de l’in- ICHN (Indemnités compensatoires de compris agricoles). Cet élargissement
tensification durable (Gill et al., 2018). handicaps naturels) (Hanus et al., 2018). de point de vue suppose de considérer

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les diverses dimensions (sociales, éco- troisième partie ce que ces approches de façon centrale un milieu, des activités
logiques, paysagères, identitaires…) amènent de perspectives de recherche et des acteurs (Manoli et al., 2011). Le
impliquées dans les débats et projets sur l’élevage. territoire est envisagé dans cet article à
collectifs locaux portant ou jouant sur la l’échelle locale, c’est-à-dire en lien i) avec
contribution de l’activité à la durabilité des systèmes d’interconnexions et d’in-
du territoire Ainsi, les perspectives de
1. Interactions terconnaissances entre acteurs, avec des
l’activité d’élevage seraient, au-delà des « Élevage et Territoire » : valeurs et des savoirs portés dans l’action
dynamiques propres au secteur et des de quoi parle-t-on ? collective, ii) avec des milieux supports
spécificités de milieux, dépendantes de de services écosystémiques, et iii) avec
la capacité à organiser des interactions des acteurs concernés par la contribution
avec d’autres acteurs qui font « commu- Le territoire est une notion du langage de l’élevage au développement durable.
nauté » à l’échelle territoriale, interac- commun. C’est aussi un concept et un Son contour peut être celui d’une entité
tions qui soient porteuses de nouvelles objet de recherche pour plusieurs dis- administrative et politique (par exemple
ressources pour son développement. ciplines de sciences humaines et tech- l’aire d’une communauté de communes,
niques. Nous précisons dans un premier d’un Parc Naturel Régional) ou celui d’un
Sans négliger les recherches por- temps de quelle définition du territoire ou de projets portés par des acteurs
tant sur les conditions d’une dura- nous nous rapprochons en tant que (l’aire d’une appellation d’origine, l’es-
bilité «  interne  » des systèmes de partie prenante de recherches pluri- pace d’un projet de développement
production dans les espaces ruraux, disciplinaires aux contours définis plus local, ou encore le bassin de collecte
recherches portées notamment par haut. Puis nous listerons les grandes d’un opérateur coopératif).
les zootechniciens et les économistes, questions qui jalonnent le domaine de
c’est cette deuxième acception, de la recherche des « interactions élevage- Le concept de territoire est particu-
durabilité « étendue », des interactions territoire » tel que nous l’avons défini lièrement mobilisé, depuis plusieurs
entre élevage et territoire mettant en en relation avec la notion de durabilité décennies, pour analyser les activités
jeu les acteurs hétérogènes concer- « étendue ». Enfin, nous évoquerons la productives en regard des enjeux de
nés par l’élevage et son devenir, qui question plus spécifique de la contribu- développement local. Il l’est, dans un
fait l’objet de cet article. Pour expli- tion des acteurs de l’élevage à la gou- premier temps, en alternative aux ins-
citer les façons dont ces interactions vernance territoriale. truments de marché comme moteur
sont traitées par les chercheurs, nous du développement lorsque le territoire
nous appuyons sur différents projets „ 1.1. Le territoire : est identifié comme «  un milieu d’in-
financés notamment le projet MOUVE définition et positionnement novation » (Lamara, 2009). Les acteurs
(Les interactions Élevage et Territoire concernés au sein d’un espace donné
dans la mise en mouvement de l’in- La notion de territoire fait l’objet peuvent impulser des dynamiques de
tensification écologique, Dedieu et al., d’une littérature très abondante dans développement spécifiques en valori-
2010) et les dispositifs d’animation-for- différentes disciplines : c’est un objet sant des ressources territoriales latentes
mation inter-organismes tels que central pour la géographie et essen- (Pecqueur, 2006). Ainsi, les paniers de
l’École Chercheur Élevage et Territoire tiel pour l’économie et les sciences de biens et des services (Dissart et al., 2014)
(Étienne, 2014) et le séminaire per- gestion. L’agronomie des territoires est déconnectent les produits locaux de
manent « Élevage et développement une déclinaison plus récente (Benoit et productions standard vis-à-vis desquels
durable des territoires  »1. L’ensemble al., 2009). La zootechnie des systèmes ces acteurs ne disposent pas d’avan-
de ces dispositifs ont mobilisé des d’élevage s’est emparée de l’objet, tages concurrentiels particuliers. Ces
chercheurs de disciplines différentes, depuis les années 1990, avec les travaux démarchent permettent de mettre en
zootechniciens des systèmes d’élevage, sur les indications géographiques et ce exergue certains services spécifiques
agronomes, géographes, écologues qu’elles portent d’interactions avec des (paysage ouvert, identité) liés aux modes
et sociologues et ont mobilisés des lieux, des pratiques et des savoirs faire de production. Plus récemment, les
données issues de régions variées en d’un territoire de projet collectif dans évolutions sociétales renforçant l’hété-
France et à l’étranger. Dans un premier les produits. Plus récemment, l’interac- rogénéité des acteurs (en particulier en
temps, nous spécifierons ce que traiter tion entre élevage et territoire a donné milieu rural) et la volonté d’implication
des interactions entre élevage et terri- lieu à d’autres développements consi- des populations mues par une aspiration
toire signifie lorsqu’il s’agit de rendre dérant les impacts de l’activité d’éle- à la « participation citoyenne », couplées
compte de l’idée de durabilité « élar- vage sur l’espace (Dedieu et al., 2010 ; à la multiplication des échelons de mise
gie  ». Puis nous présenterons quatre Balent et al., 2015) ou introduisant les en œuvre des actions publiques, ren-
illustrations de défis actuels de la points de vue des acteurs du territoire forcent l’enjeu d’analyser les activités et
recherche sur les interactions élevage sur cette activité (Dupré et al., 2015). leurs transformations en lien aux dispo-
et territoire et discuterons dans une sitifs de gouvernance territoriale. Cette
La définition que nous retenons de ter- dernière se définit comme un processus
ritoire identifie une « étendue terrestre impliquant les populations, et mouve-
1 https://umr-selmet.cirad.fr/seminaires/ utilisée et aménagée par des sociétés ments les représentant, à l’élaboration
seminaire-permanent-elevage-et-territoires humaines » (Brunet et al., 1992). Il relie de décisions, prises dans une imbrica-

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tion de niveaux du très local au global al. (2018), pour penser le futur des acti- écologiques spécifiques (biodiversité,
(Guiomar, 2011 ; Torre, 2011 ; Rey-Valette vités agricoles impliquant des dimen- dynamiques paysagère) (Shereen et al.,
et al., 2014). Ces auteurs soulignent ainsi sions territoriales, nous avons décliné 2015) ou plus distanciées du fait de la
les enjeux de réappropriation locale des plusieurs axes de recherche nécessaires nature des données à l’échelle Petite
questions agricoles, soit dans le cadre au meilleur traitement des relations Région Agricole (Ryschawy et al., 2017).
du développement des circuits courts élevage et territoire. Nous résumons ici
de produits alimentaires, soit en lien à leur expression générale. b. Analyser la diversité
des objectifs de réaffirmation de l’iden- et la dynamique
tité locale, souvent centrée sur l’activité a. Mobiliser de nouvelles des activités d’élevage
agricole, mené par de nombreuses col- métriques pour mesurer et les complémentarités
lectivités territoriales. les impacts des activités entre modèles d’élevage
d’élevage à l’échelle des et alimentaires pour relier
L’évaluation des dynamiques ter- paysages ou des espaces local et global
ritoriales des activités en regard de continus en vue d’alimenter Dès que l’on se situe à l’échelle terri-
leurs contributions à des processus de le débat entre acteurs toriale, la diversité des systèmes d’éle-
développement inclusif est un enjeu Il s’agit là de mieux identifier et vage est patente. Entre globalisation et
croissant pour l’analyse des actions caractériser, sur un territoire considéré territorialisation, cette diversité est en
publiques. Notamment pour l’UE dont comme un espace support d’activités, partie imputable à la complexité des
les enjeux de cohésion sociale et ter- les impacts des activités d’élevage, facteurs influençant les dynamiques
ritoriale ont été réaffirmés dans les seules ou en association, pour rendre d’élevage, depuis la demande des
accords de Lisbonne, en 2009. Dans le compte de fonctionnalités socioécolo- consommateurs jusqu’aux politiques
domaine scientifique, cinq dimensions giques qui dépassent la seule produc- publiques et lois du marché, en passant
sont proposées par Sanchez-Zamorra et tion de biens alimentaires et associer par les conditions naturelles de produc-
al. (2014) pour évaluer ces dynamiques ces évaluations à des dispositifs per- tion, et enfin par les dynamiques fon-
territoriales : économiques (accès aux mettant d’organiser des interactions cières et l’effet des autres opportunités
ressources, compétitivité, emploi…), sociales et contribuer à l’émergence de d’emploi de la main-d’œuvre familiale
sociales (sentiment d’appartenance à projets collectifs (Barnaud et al., 2018). que la spécialisation vers l’agriculture.
un collectif, inclusion et gestion de la Les contributions positives restent Mais ce qui fait diversité, ce que l’on
diversité), environnementales (gestion difficiles à quantifier. Elles n’ont pas va retenir comme critères de différen-
durable des écosystèmes et des res- de valeur marchande et sont généra- ciation est variable selon les études. Il
sources), institutionnelles (capacité à lement négligées par les décideurs et peut s’agir d’analyser les mécanismes
promouvoir l’agrément entre acteurs et mal appréhendées par les citoyens. La de différenciation des systèmes de pro-
la coopération), enfin la capacité du ter- caractérisation des services et de bou- duction sur des ensembles territoriaux
ritoire à promouvoir un développement quets de services rendus par l’élevage permettant aux acteurs (agricoles et
équilibré. Caron et al (2018) soulignent est alors une voie d’analyse des acti- non agricoles) de disposer d’une vision
le rôle crucial des approches territoriales vités qui peut permettre un état des élaborée de la diversité en lieu et place
pour redéfinir des politiques de déve- lieux plus fourni de ce à quoi contribue d’une approche par le système le plus
loppement permettant d’implémenter l’élevage mais aussi l’expression et la fréquent ou celui qui domine (espace,
des systèmes alimentaires durables. La concrétisation de projets concertés poids économique brut). Ces analyses
prise en compte des enjeux de terri- visant à faire évoluer les bouquets. portent sur les dimensions structurelles
toire élargit ainsi considérablement, en (y compris la pluriactivité), productives,
référence à des approches sectorielles, L’évaluation du degré de couplage économiques et d’insertion dans des
les éléments à considérer pour tracer entre l’activité d’élevage et d’autres dynamiques locales et de filières. Elles
les futurs des activités d’élevage. Trois activités est un autre enjeu de la carac- permettent d’accéder à une mise en
prérequis sont ainsi pointés par ces térisation des interactions auxquelles perspectives de ce qui a marqué les
auteurs pour impulser ces politiques : est associé l’élevage pour analyser sa différenciations entre systèmes d’éle-
l’adoption de nouvelles métriques d’ob- contribution au bouclage des cycles vage dans les territoires en s’intéressant,
servation des activités, une meilleure bio-géo-chimiques. Nous proposerons dans le cadre de diagnostics agraires,
mise en relation du local et du global deux illustrations des défis scientifiques à la transformation des systèmes de
et enfin le développement d’approches actuels dans la partie suivante. D’une production sur le temps long, tout en
territoriales pour conforter l’émergence façon générale, les acteurs sont souvent s’appuyant sur une analyse fine des faits
d’innovation dans les pratiques. peu présents dans la construction des techniques (Cochet et al., 2007).
métriques et la caractérisation des bou-
„ 1.2. Interactions quets ou des flux. Mais les démarches Une autre voie d’analyse vise à rendre
élevage – territoire : d’accompagnement de projets de ges- compte des interactions entre local et
quelles questions ? tion concertées multi acteurs y ont de global en analysant les dynamiques des
plus en plus recours. Les métriques systèmes agri-alimentaires à l’échelle
Sur la base de ces trois domaines peuvent être spatialement explicites, ce de bassins. Les questions portent alors
d’investigation, pointés par Caron et qui permet d’explorer des composantes sur ce que produisent la diversité et la

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coexistence de ces systèmes (ou des L’inscription du territoire dans l’éle- développement des territoires en alter-
modèles qui en rendent compte), à vage et dans ses produits a porté depuis native à des interventions publiques
l’échelle du territoire. L’analyse peut être plusieurs décennies des recherches « top down » souvent délégitimées dans
conduite pour rendre compte de l’en- contribuant à ces interactions avec leur promotion de chemins du dévelop-
semble des interactions entre systèmes les acteurs des territoires. Les plus pement pour le futur (Torre, 2018). Elle
techniques et diversité des ressources anciennes renvoient à ce que les signes repose sur un processus de confronta-
mobilisées dans l’espace, notamment de qualité véhiculent de terroirs, savoirs tion de points de vue contrastés et de
celles qui se révèlent socialement faire et ressources spécifiques ou ce que légitimation, conduisant à la définition
sensibles ou porteuses d’enjeux envi- les populations animales locales expri- de nouvelles formes d’activités (Caron,
ronnementaux. Elle peut également ment d’aptitudes en lien très direct 2017). Analyser et modéliser ces dyna-
s’intéresser aux circuits de transforma- avec le milieu, les agroécosystèmes miques non prédéterminées de transi-
tion – distribution et interroger ainsi et les pratiques d’élevage, incluant la tion vers des formes de développement
les modèles de systèmes alimentaires mobilité (Lauvie et al., 2015 ; Casabianca durable des territoires repose sur deux
et la façon dont ils contribuent à l’ap- et Millet, 2018). Ces travaux se pour- familles d’approches systémiques mul-
provisionnement local. Un enjeu fort suivent aujourd’hui notamment sur le ti-échelles, l’une se référant au champ
de ces travaux consiste en la mise en plan des tensions et enjeux d’adapta- sociotechnique, analysant les moda-
œuvre d’analyses comparatives de pro- tion des cahiers des charges des signes lités d’émergence des innovations en
cessus de développement permettant de qualité avec le changement global, privilégiant l’analyse des interactions
de dépasser le caractère éminemment les dynamiques (souvent d‘agrandis- entre société et techniques, tandis que
situé des observations réalisées sur des sement) des exploitations et les inno- l’autre se réfère au champ socio écolo-
études de cas locales. Nous propose- vations que souhaitent mobiliser les gique, privilégiant les interactions entre
rons une illustration de ces recherches agriculteurs (robot, monotraite…). Ils dynamique des activités humaines, des
dans la partie suivante. se renouvellent avec le développement écosystèmes et des ressources (Ollivier
des systèmes alimentaires urbains et les et al., 2018).
c. S’appuyer sur les interactions spécifications que les acteurs des terri-
entre acteurs des territoires toires urbains (collectivités territoriales, L’identification i) de la diversité des
pour favoriser groupes de consommateurs) adressent perceptions des institutions et acteurs
l’émergence d’innovations aux agriculteurs et éleveurs sur ce qui locaux vis-à-vis de l’activité, ii) des
dans les activités d’élevage fait « production locale », à proximité controverses et débats que suscitent
renforçant la durabilité et en relation avec les centres urbains ses évolutions devient alors un enjeu
territoriale (Delfosse et al., 2017). En retour ces pro- fort. Les cadres organisationnels et lieux
Il s’agit d’analyser les activités d’élevage duits spécifiques, ces races ancrées dans d’échanges permettant aux agriculteurs
et leurs inscriptions dans les dynamiques les territoires sont de forts marqueurs de mener un travail de légitimation des
locales pour renforcer les convergences identitaires au service du développe- pratiques pour peser dans ces débats,
aux attentes des acteurs. Celles-ci sont ment local. Ils contribuent aux paniers font souvent défaut (Compagnone et
souvent exposées par des acteurs locaux de biens et services qui supportent les al., 2015). Des questions portent sur
par opposition à des dynamiques des dynamiques économiques notamment l’élaboration des cadres conceptuels et
activités mues par des déterminants en lien avec le tourisme (Angeon et méthodologies permettant de favori-
économiques globaux qui s’impose- Vollet, 2008). ser l’explicitation des points de vue, la
raient sous l’effet de la mondialisation conception de dispositifs favorisant la
des échanges. Face à une fragmentation „ 1.3. L’implication gestion concertée entre acteurs hété-
de la profession agricole dans les socié- des acteurs de l’élevage rogènes. Cette gestion concertée peut
tés occidentales et un affaiblissement dans des dispositifs aussi bien concerner i) les « trade offs »
général des communautés rurales vis-à- de gouvernance territoriale entre activités de production et enjeux
vis des décisions portant sur le devenir environnementaux en associant des
des espaces ruraux, la capacité des agri- Au-delà de ces produits, les attentes acteurs agriculteurs, des ONG ou des
culteurs à nouer des alliances locales et des acteurs des territoires envers les collectivités (Parcs Naturels) (Lasseur
à inscrire leurs pratiques, leurs produits activités qui s’y déroulent (l’élevage en et al., 2010), ii) la gestion territoriale
animaux et les impacts de ces pratiques, ce qui concerne notre propos) sont de de la santé animale (Relun et al., 2015)
dans une dynamique associant un large plus en plus invoquées dans l’action en associant différents types d’acteurs
panel d’acteurs, est un gage de durabi- publique. Le territoire émerge ainsi (éleveurs, chasseurs, vétérinaires, méde-
lité de l’activité. Le processus de mise depuis quelques décennies comme lieu cins…) et de représentations spatiales
en œuvre de ces politiques territoriales de redéfinition de l’action publique, en ou la formulation de patrons paysagers
et les instances de gouvernance qu’il lien à l’affaiblissement de modes de pour rendre compte de la progression
instaure apparaissent ainsi comme des coordinations plus hiérarchiques. Il de maladies et progresser dans une épi-
lieux où s’inventent de nouvelles formes devient un espace de gestion concer- démio-surveillance plus participative, iii)
d’agricultures et les modalités d’interac- tée ou apparaissent de nouveaux les conditions de mise en œuvre de poli-
tions entre les acteurs agricoles et le acteurs. La gouvernance territoriale tiques impliquant l’élevage à l’échelle
reste de la société. s’impose alors comme un vecteur de territoriale (Lasseur et Dupré, 2017).

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L’autre versant des questions trai- le développement des ACV (Analyse (Ryschawy et al., 2015). Les services
tées concerne le développement de de Cycle de Vie), s’est intéressée aux écosystémiques sont définis comme
méthodologies d’accompagnement impacts négatifs de l’élevage sur l’en- « les avantages que les Hommes retirent,
des acteurs. La mise en œuvre de vironnement et le changement clima- directement ou indirectement, du fonc-
modélisations dédiées (Étienne, 2012) tique. Un corpus récent mais croissant tionnement des écosystèmes » ( Costanza
ou de jeux sérieux, par exemple le « jeu de littérature scientifique, mais aussi et al., 1997). Plus récemment, de Groot
de territoire » (Lardon, 2013) ont per- issu des différentes filières d’élevage, et al. (2010) élargissent cette définition
mis de grandes avancées dans ce volet cherche à mettre en lumière les nom- pour considérer les services écosys-
de recherches tout comme les renou- breuses contributions positives que témiques comme «  les contributions
vellements conceptuels (systèmes l’activité d’élevage fournit aux acteurs directes et indirectes des écosystèmes au
socio-écologiques, sociotechniques, des territoires, et plus largement à la bien-être humain ». Les services environ-
socio-patho-systèmes) permettant société de façon à accéder à une vision nementaux recouvrent une réalité diffé-
de reconnecter espace, diversité des équilibrée des services (positifs) et rente car ils sont rendus par des agents
modèles d’activités d’élevage et des impacts (négatifs) de l’élevage dans économiques ce qui implique une rela-
acteurs dans la conception et la mise les territoires. Les propositions de syn- tion d’intentionnalité entre un com-
en œuvre de projets territoriaux. thèse se développent comme celles de manditaire et un prestataire ou bien
la « grange » (Duru et al., 2017), cadre entre un fournisseur et un usager ou
d’appréhension des bouquets de ser- bénéficiaire (Aznar, 2014). Les services
2. Les défis scientifiques vices et impacts utilisés dans le cadre environnementaux se focalisent sur
actuels de démarches d’accompagnement de les composantes environnementales
transitions territoriales de l’élevage telles que l’eau, l’air et la biodiversité.
(Bergez et al., 2018). Dans la mesure où les Hommes retirent
Nous proposons d’illustrer quelques aussi des biens alimentaires et symbo-
défis actuels de recherches en réfé- Nous détaillerons ici plus spécifique- liques des écosystèmes, les services
rence à ces grandes familles de ques- ment ce qui a trait à l’estimation des écosystémiques relèvent d’un champ
tions traitant des interactions entre contributions positives de l’élevage. plus vaste qui embarque également
élevage et territoire. Le premier défi a Ces contributions vont bien au-delà de des services d’approvisionnement,
trait à la façon d’aborder les services la simple production de biens alimen- des services culturels, des services de
produits par l’élevage. Le deuxième taires et recouvrent les trois piliers de régulation et de soutien. Il n’existe pas
explore comment l’écologie territoriale la durabilité. Les ruminants conduits à ce jour de terminologie pour évoquer
est susceptible d’aider au raisonne- en système herbager convertissent conjointement ces deux catégories de
ment de territoires plus autonomes, en des biomasses non utilisables pour l’ali- services ; la notion de biens et services
partant des modélisations de flux de mentation humaine en produits à haute socio-éco-environnementaux a été
matières à cette échelle et des leviers valeur nutritionnelle. Ils contribuent proposée dans Ryschawy et al. (2017).
d’activités par les différents acteurs. Le à la fourniture de services écosysté- Le terme de « contributions positives »
troisième défi porte sur l’émergence miques et de biens publics hautement englobe ces deux types de services
d’une pensée de la complémentarité appréciés par les citoyens. Ils jouent un tout en étant suffisamment simple et
entre modèles agri-alimentaires et de rôle essentiel dans la préservation de compréhensible par des acteurs non
ce qu’elle implique en termes d’ac- paysages patrimoniaux, et de la bio- académiques.
tion publique et d’organisation visant diversité des milieux agricoles, dans la
à la maintenir. Enfin le quatrième défi prévention des inondations et des feux Appréhender le fonctionnement d’un
concerne les modalités de redéfini- et aussi à la vitalité rurale (Rodríguez- territoire rural en cherchant à expliciter
tion des activités d’élevage qu’impose Ortega et al., 2014). Ces nombreuses et mesurer les contributions positives
l’idée de coévolution entre les attentes contributions positives restent difficiles rendues par les activités d’élevage, c’est
des acteurs des territoires et les dyna- à quantifier. Elles n’ont pas de valeur faire l’hypothèse que l’activité d’élevage
miques des systèmes. marchande et sont généralement négli- est essentielle au bon fonctionnement
gées par les décideurs et mal appréhen- des territoires ruraux. En mesurant la
„ 2.1. Caractériser dées par les citoyens. fourniture de contributions jusqu’alors
les bouquets de services peu visibles, on apporte des argu-
rendus par l’élevage Appréhender ces contributions de ments pour le maintien de l’élevage
l’élevage demande un travail interdis- et la reconnaissance de ses multiples
L’élevage européen est sous le feu ciplinaire articulant des connaissances fonctions au-delà de la production de
des projecteurs tant dans la littérature en zootechnie, économie, écologie et biens alimentaires. Expliciter ces contri-
scientifique que dans les médias. Les sciences humaines et sociales. Rendre butions demande en premier lieu de
impacts de l’élevage sont en réalité visible ces contributions pour in fine les définir (i.e. énoncer verbalement)
plus complexes à appréhender. Une les quantifier nécessite d’articuler car on ne peut mesurer que ce qui
abondante littérature, notamment deux approches assez différentes  : est clairement défini. Se pose alors la
avec le rapport de la FAO «  Livestock celle des services écosystémiques et question de quels sont les acteurs qui
Long Shadow » (Gerber et al., 2013) et celles des services environnementaux définissent les contributions rendues

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par l’activité d’élevage aux acteurs du partir des préférences des acteurs. Un l’autonomie étant considérée comme
territoire et plus largement à la société. premier type concerne les méthodes un gage de durabilité. L’ET recouvre
Deux approches prédominent actuelle- dites consultatives qui capturent les deux volets, d’une part, l’analyse du
ment dans la littérature : une approche perceptions et les préférences indi- métabolisme territorial, c’est à dire
« externe » ancrée sur l’expertise d’in- viduelles (enquêtes individuelles, le recensement des flux et stocks de
dividus n’appartenant pas au territoire entretien approfondi). Au niveau du matières et d’énergie qui permettent à
et une approche «  interne  » ancrée territoire, les méthodes délibératives un territoire de fonctionner et, d’autre
sur les perceptions, connaissances et sont particulièrement adaptées en rai- part, l’analyse de la gouvernance de ces
croyances des acteurs des territoires. son de leur dimension collective : focus flux, leur inscription spatiale et socioéco-
group, questionnaire Delphi, évaluation nomique (normes, réseaux d’acteurs…).
L’approche externe est celle mise en participative, etc. Une revue de ces Les dimensions matérielles, sociales et
œuvre lors de la première étude fran- méthodes est proposée par Christie et économiques sont prises en charge
çaise sur les services rendus par l’éle- al. (2012). In fine ces méthodes rendent par une approche interdisciplinaire qui
vage (Ryschawy et al., 2015 ; Ryschawy visibles les arbitrages et les compromis combine sciences de la terre et de la
et al., 2017). L’explicitation verbale des entre contributions, liés à leur inter- vie (écologie, bio-géochimie, agrono-
services rendus par l’élevage au sein des dépendances. Cette mise en visibilité mie…) et sciences humaines et sociales
territoires a été réalisée par une dou- des interdépendances entre différents (gestion, économie, géographie…).
zaine d’experts de l’élevage. L’originalité types de services écosystémiques, par
de ce groupe d’experts est son caractère exemple, peut aider les acteurs à déve- Ainsi des premiers travaux sur les
interdisciplinaire et interprofession- lopper leur réflexivité et à construire un cycles d’azote, de phosphore et de
nel. Ainsi chercheurs zootechniciens, point de vue « partagé » sur ce qu’un potassium liés à l’élevage ont été réali-
agronomes, sociologues, économistes territoire d’élevage peut offrir comme sés à différentes échelles d’organisation
et représentants professionnels des services à la société. (communes, petites régions agricoles,
filières d’élevage (CNIEL, Interbev, départements et pays) en France, en
ITAVI, IDELE, IFIP) définissent une liste „ 2.2. L’écologie territoriale : Europe mais aussi au Brésil (Mignolet et
de services à quantifier en confrontant analyser le bouclage des al., 2001 ; Bonaudo et al., 2017 ; Dourmad
leur expertise. Cette liste, appliquée à cycles et le couplage et al., 2017). La figure 1 montre les
l’échelle de chaque département du agriculture-élevage principaux flux calculés. Des analyses
territoire métropolitain, guide le choix pour améliorer l’efficience de flux de l’élevage français montrent
d’indicateurs et la disponibilité des don- des activités une forte intensification de l’élevage
nées conditionne la possibilité de quan- combinée à une bonne autonomie en
tifier ou pas les indicateurs de services. L’Écologie Territoriale (ET) est un fourrage et un déficit en concentrés
Cette batterie d’indicateurs apporte champ de recherche né d’une réflexion principalement en tourteaux (Dourmad
une évaluation ex-post des bouquets sur la nécessité du bouclage des cycles et al., 2017 ; Domingues et al., 2018). À
de services qui montrent les similari- de matières et d’énergie pour améliorer l’échelle des petites régions agricoles
tés ou dissimilarités des départements les performances environnementales ces travaux montrent de fortes hétéro-
en termes de type de service présent et économiques des systèmes anthro- généités des productions animales et
et de niveau de fourniture. Mais pour piques. L’ambition de l’ET est de mieux des autonomies alimentaires suggérant
juger, comparer ces bouquets il faut comprendre et piloter les interactions des échanges nationaux et internatio-
un critère également externe. La multi- entre société et environnement dans naux importants donc une ouverture
fonctionnalité du bouquet est souvent la perspective d’une transition agro- des cycles de nutriments (Dourmad et
le critère privilégié. On considère alors écologique abordée sous l’angle du al., 2017). Au Brésil, l’étude des flux de N,
qu’un territoire durable est un territoire bouclage des cycles biogéochimiques P, K de l’industrie de l’élevage entre 1993
qui fournit à haut niveau le plus grand (Buclet, 2015). En quantifiant l’exploi- et 2013, montre une production en
nombre de services. tation des ressources, la production hausse accompagnée d’une utilisation
de biens et de déchets, cette approche accrue d’intrants (près de 4 % par an).
L’approche interne met l’accent sur permet d’évaluer simultanément l’effi- Une internationalisation des flux, avec
la demande sociale des acteurs. Elle cience productive et environnementale une augmentation absolue et relative
pose comme postulat que la demande d’un territoire considéré comme un sys- des importations et des exportations, a
sociale diffère en raison d’intérêts tème composé d’acteurs et de flux de aussi été mise en évidence. Entre 1993
divergents des acteurs, de leur moti- matières (figure 1). et 2013, les importations de N, P et K
vation, de leur expérience et de leur sont passées, respectivement de 6 à
connaissance des systèmes d’élevage. La finalité des approches d’ET est 16 %, de 25 à 45 % et de 25 à 37 % du
Dans cette approche la liste des ser- d’identifier des leviers d’action tech- total des intrants. Les exportations de
vices émerge des choix des acteurs. nique (de substitution, de réutilisation, N, P et K ont suivi la même évolution
Différentes études académiques ou de de bouclage de cycle…) et les modes avec une augmentation respective de
terrain utilisent des méthodes d’évalua- de partenariat entre acteurs territo- 12 à 22 %, de 6 à 17 % et de 6 à 11 % de
tion socio-culturelles (Martín-López et riaux (Erkman, 2001) permettant une la production nationale (Gameiro et al.,
al., 2012) pour expliciter les services à plus grande autonomie du système, 2018).

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Élevage et territoires : quelles interactions et quelles questions ? / 195

Figure 1. Représentation des flux de matière mobilisés par l’élevage (Méthodologie du XXe siècle (Correa et al., 2015). Les
GRAFS – Generic Representation of Agro-Food Systems, d’après Billen et al., 2014). conditions territoriales matérielles ont
Import permis le développement du bassin lai-
tier : vastes étendues herbagères favo-
Fixation Symb. rables à l’intensification des pratiques et
Prairies, parcours, Cheptel (UGB) situation du bassin au carrefour d’autres
Déposition atm.
fourrages (ha)

Alimentation
pays ayant favorisé les possibilités d’ex-

Production
Fertilisation
portation du lait en poudre. Dans ces

Production
Fertilisation Export
synth. conditions territoriales favorables, les
politiques publiques nationales ont
impulsé le modèle de production inten-
Volatisation Surplus Population sive en étant à l’origine d’une demande
Sol N
(Pers.) en produit exportable et ont fait émer-
Lexiviation
ger une organisation spécifique du
Cultures (ha)
conseil soutenant son développement.
Fertilisation

Production

En France, la région Poitou-Charentes


pour la production caprine, ou encore la
Export
Volatisation Surplus Bretagne pour le lait de vache, ont connu,
Sol N
Lexiviation
dans la seconde partie du XXe  siècle,
un développement s’inscrivant dans
la même logique d’intensification, de
concentration et de spécialisation de
l’agriculture et de l’agro-industrie. Dans
Des travaux sur l’analyse du couplage dynamiques sectorielles et territoriales, ces situations, le développement est
agriculture-élevage et la coexistence de globales et locales des activités laitières orienté vers la mise en adéquation d’un
différents modèles agricoles mobilisent se côtoient à l’échelle d’un territoire. Le type d’offre (produits standard, commo-
aussi l’écologie territoriale au travers devenir de ces activités peut influencer dité) pour fournir un tel marché (circuits
de l’analyse de flux de matières et de celui du territoire. Pour étudier ces pro- longs nationaux et export vers pays
leur gouvernance (Moraine et al., 2014 ; cessus, nous avons mobilisé la notion de émergents). Ce diagnostic est opéré par
Moraine et al., 2016 ; Madelrieux et al., modèle de développement, vu comme des décideurs, à l’échelle nationale, qui
2017). l’ensemble des interrelations entre les mettent en œuvre les mesures incitatives
systèmes d’élevage, le marché, le ter- pour orienter le développement de l’ac-
„ 2.3 Les modèles ritoire et les normes de production. tivité de la production à la distribution,
de développement Après avoir comparé l’évolution, sur le voire à la consommation.
dans les territoires : temps long, d’une dizaine de bassins
de la spécialisation laitiers à travers le monde (Napoléone La deuxième situation archétypique
à la coexistence et al., 2015), nous avons mis en évidence correspond à la permanence d’une
trois situations archétypiques quant au dynamique de territorialisation  : un
Les systèmes techniques, les res- modèle de développement (Napoléone produit qui valorise les spécificités du
sources mobilisées (races, aliments…), et Boutonnet, 2015). territoire de production et les acteurs
ou encore le fonctionnement de l’indus- investis dans l’activité laitière, et vendu
trie et les stratégies de ses opérateurs Une première situation archétypique à l’intérieur du bassin laitier pour satis-
sont autant de dimensions condition- correspond à la permanence d’une faire la demande intra-bassin. Le déve-
nant la structuration des activités d’éle- dynamique de globalisation tout au loppement du bassin laitier se fait dans
vage dans un territoire (Delfosse, 2007 ; long de l’histoire du territoire laitier : un ce cas dans une dynamique bottom-up,
Ricard, 2010). Afin de rendre compte de produit générique (poudre ou lait sans reposant sur les normes, valeurs et
la façon dont les processus territoriaux référence au territoire), élaboré dans savoir-faire des éleveurs, qui s’inscrivent
et les mécanismes liés à la globalisation le cadre de systèmes d’élevage inten- dans une culture alimentaire locale, par-
affectent, conjointement, les bassins de sifs inscrits dans un système agro-in- tagée entre les producteurs, les trans-
production, nous utiliserons, comme dustriel, distribué à des échelles de formateurs, les consommateurs. Cette
modèle, la production laitière. En effet, plus en plus larges (région, puis pays, culture commune renforce chemin
les processus de développement du puis continent). Le modèle en place faisant l’ancrage territorial des activi-
secteur laitier peuvent être orientés vers est issu d’une dynamique top-down tés. Le cas brésilien du bassin de Brasil
des enjeux agro-industriels puissants où les pouvoirs publics et l’agro-in- Novo illustre cette situation (Carvalho
d’envergure internationale, ou, a contra- dustrie imposent les normes en place. et Poccard, 2015). Depuis les années
rio, être portés par des acteurs locaux Un cas particulièrement illustratif de 1970, de nombreuses ressources terri-
inscrivant leurs activités dans une pers- cette situation est celui du bassin de toriales y ont été activées pour la mise
pective de développement local. Ces Salto, en Uruguay, depuis le début en place de ce modèle : savoir-faire et

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culture alimentaire d’éleveurs venus de proximité et de localité gagnent du l’un ou l’autre de ces modèles, ou à
de régions voisines mettant en place terrain et facilitent l’écoulement de ces maintenir leur coexistence sur un terri-
des systèmes techniques rustiques, produits au-delà des consommateurs toire. Le grand changement de ces der-
un marché urbain local captif, une res- locaux ; certaines parties de ces terri- nières années est le sens que donnent
source fourragère riche et abondante, toires ont été plus favorables à l’intensi- les acteurs locaux à l’ancrage territorial
des moyens de transport précaires fication des systèmes de production, à la de leurs activités avec la montée en
pour la collecte ayant favorisé la vente construction d’infrastructures permet- puissance du rôle prescripteur de cer-
directe ou la fabrication de fromages tant le développement industriel pour tains urbains et, de plus en plus, des
artisanaux. Dans cette situation, les la transformation de produits destinés collectivités territoriales. Il est moins
politiques publiques ont soutenu cette aux circuits longs. On assiste alors à une question de savoir-faire ancrés dans les
dynamique d’ancrage par la mise en diversité des normes de productions, systèmes agraires que de proximité (de
place de standards de transformation les unes implicitement partagées entre distance aux centres urbains, mais aussi
et de production ainsi que des normes producteurs et consommateurs dans le de contact avec les producteurs) et de
de qualité. Le modèle de développe- cadre de circuits courts ou valorisant les modèles agroécologiques ou biolo-
ment AOP français se rapproche de cet indications géographiques, les autres giques visant le respect de l’environne-
archétype, avec une valence forte du construites à une échelle plus large ment, du bien-être animal et le recours
côté des savoir-faire (de production, dans le cadre des politiques nationales à un minimum d’intrants domma-
de transformation) issues de traditions et internationales sur des produits plus geables à la santé humaine. En France,
locales, une valorisation forte, identi- standardisés. Ces situations de coexis- les plans d’alimentation territoriaux se
taire, des produits dans le territoire de tence semblent particulièrement favo- développent, donnant d’autres orien-
production mais également d’autres risées par différentes formes d’action tations aux formes de développement
lieux de consommation. collective et de gouvernance locale qui que celles sous-tendues par le secteur.
peuvent se mettre en place. Les terri- Toutefois nous ne pourrions supposer
La troisième situation archétypique toires, présentent des attributs et des le remplacement pur et simple d’un
correspond à la coexistence des deux ressources (sociales, matérielles, orga- modèle sectoriel par un modèle territo-
dynamiques précédemment évoquées nisationnelles) ayant favorisé la diver- rialisé impulsé par la demande urbaine.
(globalisation et territorialisation) et sité des modèles de développement. Une diversité de forme de demandes
des formes de développement qui leur La diversité des formes de demande existe et existera sans doute. La diversité
sont associées. Cette coexistence peut a contribué au développement d’une des agricultures et des circuits de distri-
prendre la forme d’une coprésence diversité de modèles. Notons enfin que bution sont des leviers pour répondre à
des deux modèles sur une période les valeurs accordées, par la société (des la diversité des demandes, ce qui néces-
donnée répartis spatialement, de la producteurs aux consommateurs), site des dispositifs de gouvernance
présence successive de l’un puis de aux modèles évoluent dans le temps croisant des approches sectorielles et
l’autre modèle, ou encore de la pré- et impactent le développement des territoriales. Il n’y a pas de recette uni-
sence de modèles hybridant ces deux territoires. verselle. Nos travaux soulignent l’inté-
dynamiques. Le développement de la rêt de reconnaître et mettre en valeur la
production laitière dans trois bassins Finalement, tout modèle de dévelop- diversité des ressources locales, dans un
français (les Quatres Montagnes, dans le pement d’un bassin de production (ici schéma de développement cohérent.
Vercors ; le Pélardon dans les Cévennes laitier) articule à la fois des attributs spé- Cette orientation nécessite la mise en
Méridionales, le Livradois-Forez en cifiques des territoires de production, place de moyens de suivi, d’analyses
Auvergne) est particulièrement illustra- des filières et des systèmes d’élevage. chemin faisant permettant de réguler
tif de ces dynamiques (Houdart et al., Aucun modèle n’est évidemment géo- la diversité de formes de développe-
2015 ; Madelrieux et Alavoine-Mornas, graphiquement prédéterminé et plu- ment garantissant dans le temps leur
2015 ; Napoléone et Boutonnet, 2015). sieurs composantes majeures rendent évolution harmonieuse.
Dans ces situations, en complément compte des capacités d’un bassin de
des ressources extraterritoriales (finan- production à aller dans une direction „ 2.4 Analyser la diversité
cements européens par exemple), une ou une autre  : la demande alimen- des activités d’élevage
grande diversité de ressources territo- taire, entre une demande en produits et leur dynamique au prisme
riales a été mobilisée par les acteurs des génériques destinés à l’exportation ou des interactions entre
territoires et des filières, de façon spé- aux circuits longs nationaux et celle de les acteurs du territoire
cifique en fonction de l’orientation du produits qui renvoient à une proximité
modèle de développement. Ainsi, l’en- avec le consommateur (proximité géo- Les remises en cause des activités
clavement du territoire et la présence graphique dans le cas d‘une demande d’élevage sont de plus en plus sou-
d’une forte culture fromagère locale intra-bassin ou proximité cognitive vent abordées dans des travaux de
ont contribué au maintien du savoir- pour des ventes hors bassin qui n’ex- recherche et par des institutions de
faire en lien avec la persistance d’une cluent pas les circuits longs de distri- développement en considérant des
demande de produits traditionnels bution)  ; la capacité des acteurs des controverses et des attentes envers
en zone. Avec l’évolution actuelle des filières, des territoires et des pouvoirs ces activités (Delanoue et al., 2015). Si
formes de consommation, les critères publics à l’échelle nationale à soutenir on peut clairement identifier les mises

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Élevage et territoires : quelles interactions et quelles questions ? / 197

en questions adressées aux échelles le territoire du Parc Naturel Régional Ces visions de l’activité sont évolu-
englobantes et aux échelles locales, du Vercors (Dobremez et al., 2015) tives, vectrices de remises en causes
la notion «  d’attente des acteurs des montrent une grande diversité de et de transformations futures. Ainsi,
territoires » tend à réifier un processus points de vue sur ce que devrait être les perceptions des activités d’élevage
incertain, dynamique et aux configura- l’élevage dans le territoire du parc. D’une par les acteurs du territoire du Verdon
tions « situées ». En effet, les modalités part, des visions sectorielles opposent i) (Alpes de Haute Provence), sur la base
de mise en débat et de redéfinition des une vision de l’élevage considéré avant d’enquêtes réalisées en 2012, font per-
activités à ces échelles reposent sur des tout comme une activité économique cevoir des clivages proches de ceux
alliances et accords temporaires n’écar- qui doit faire vivre les agriculteurs et observés dans le Vercors (Dupré et al.,
tant pas la subjectivité, s’appuyant sur qui de facto, en montagne, est positive 2017 ; Lasseur et Dupré, 2017). Toutefois
des connaissances partielles et frag- pour l’environnement et les paysages à les oppositions entre conduite de l’ac-
mentaires imparfaitement partagées ii) une vision considérant que cette agri- tivité et protection de l’environnement
entre des acteurs qui mobilisent sou- culture ne se différencie pas fondamen- ainsi que vis-à-vis d’une subordina-
vent comme cadre de référence la mul- talement de l’agriculture de plaine et tion de l’activité d’élevage à l’activité
tifonctionnalité de l’activité agricole, qu’elle doit être encadrée pour ne pas touristique ne se sont pas exprimées
«  fruit de constructions sociales mul- permettre la dégradation de la nature. de manière tranchée. Ceci est essen-
tiples et complexes  » à cette échelle D’autre part, dans une analyse plus por- tiellement dû aux orientations très
(Barnaud et Couix, 2017). Les espaces tée par des dimensions territoriales se pastorales de l’activité définies en
ruraux et les transformations des acti- distinguent i) une vision considérant convergence avec les acteurs de l’envi-
vités d’élevage sont peu fréquemment l’élevage comme le moteur du déve- ronnement et gestionnaires territoriaux
abordés sous cet angle (Eychenne, loppement économique et culturel du dès les années 1990 (Garde et al., 2014),
2012 ; Grison et al., 2015). territoire et ii) une vision le considé- laissant quelquefois penser que la
rant comme devant accompagner le mutation multifonctionnelle de cet éle-
Dans le cadre du projet ANR vrai moteur économique du dévelop- vage était opérée et la reconnaissance
«  mouve  », nous avons conduit un pement qu’est le tourisme. Ces quatre sociale acquise. Ces convergences de
ensemble de travaux visant à analyser idéaux types traduisent bien les opposi- vues ont alors elles-mêmes contribué
les enjeux et modalités de redéfinition tions entre des visions d’acteurs du sec- à reconfigurer les systèmes pour aller
des activités d’élevage sous l’effet de teur agricole, une vision portée par des vers une production renforcée de ser-
politiques territoriales dans des ter- acteurs de l’environnement (prônant vices environnementaux en particu-
ritoires d’élevage contrastés. Nous le contrôle d’une activité humaine de lier autour des enjeux de biodiversité
mettons ici en regard les principaux facto destructrice de nature) et enfin, et de maintien des milieux ouverts. Le
résultats publiés concernant deux ter- des visions plus intégrées qui posent développement récent de la population
rains français : Vercors (Dobremez et al., l’élevage comme pilier direct du déve- de loups a remis en cause ces visions
2015) et Haut Verdon (Lasseur et Dupré, loppement territorial voire comme convergentes. D’une part, en remettant
2017). Très globalement dans ces situa- inféodée à une activité touristique en cause l’idée initialement partagée
tions concernant essentiellement l’éle- pour laquelle l’élevage est un vecteur que la forme d’activité d’élevage mise
vage de ruminants, les problématiques d’image et d’identité du territoire. Enfin, en œuvre était « bonne pour l’environ-
impliquant l’élevage dans les politiques la plupart des acteurs décrivent l’éle- nement » alors qu’elle se révèlerait, pour
territoriales concernent explicitement vage comme une activité indifféren- certains, incapable de composer avec
l’usage du territoire, la conduite du ciée qui ne reflète pas la diversité des une espèce emblématique de biodiver-
pâturage et l’intensification fourra- systèmes présents. Ces divergences de sité sauvage. D’autre part, l’idée que cet
gère en lien à des dimensions plus vision et l’absence de représentation élevage confortait de facto l’évolution
implicites d’installation et d’inclusion d’une diversité des formes d’activité de l’économie locale vers la production
sociale. Nous analysons ici les points de d’élevage illustrent bien, d’une part, la d’un espace dédié au tourisme vert et
vue d’acteurs locaux sur l’élevage entre nécessité de formalisation plus poussée aux activités de pleine nature est sévè-
convergences et points en débat ainsi des formes de l’activité et, d’autre part, rement reconsidérée. La mise en place
que les remises en causes et les trans- d’espaces de confrontation de points de mesures de protection des trou-
formations de l’activité. Nous discutons de vues des acteurs. Elles soulignent peaux et la présence massive de chiens
ensuite des dispositifs dans lesquels toute l’importance pour les acteurs de protection déclenche des conflits
s’expriment les acteurs et ceux qu’il de l’élevage d’être présents dans les d’usage et une opposition frontale
conviendrait de mettre en place pour arènes où se tiennent ces débats. Les entre les deux activités. L’élevage n’est
conforter le futur de l’élevage dans le arbitrages réalisés entre des options alors plus seulement le support inerte
cadre des politiques territoriales. de contrôle de l’activité vs libéralisme de l’identité territoriale qui pouvait
économique, d’une part et d’autre part, être perçu par certains mais aussi une
Les points de vue des acteurs des activité vectrice de développement ter- activité qui doit s’assurer du maintien
territoires se distinguent souvent net- ritorial vs simple vecteur d’image iden- de ses capacités productives en s’adap-
tement de ceux des acteurs sectoriels. titaire « inerte » se traduisent, à terme, tant aux évolutions de ses conditions
Ainsi, les enquêtes conduites auprès en modalités d’actions de soutien à d’exercice. Ces dernières conduisent à
d’acteurs non agricoles et agricoles sur l’activité très différentes. une remise en cause d’un consensus

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local et à un travail de redéfinition des handicape l’émergence d’alternatives des transformations de l’activité nous
interactions aux acteurs locaux voire permettant de concilier gestion des semble deux enjeux particuliers pour
de redéfinition des formes futures des questions environnementales et l’affir- les recherches futures.
activités d’élevage. mation d’un secteur d’activité d’élevage
permettant l’inclusion sociale et la lutte „ 3.1. Le territoire :
Les capacités à intégrer les intérêts contre la pauvreté (Cialdella et al., 2015). un nouvel horizon
d’un ensemble de porteurs d’enjeux et En effet les alternatives émergentes de pluridisciplinarité
à défendre ses propres intérêts néces- largement promues par les éleveurs les entre zootechnie
sitent donc des lieux d’articulation plus capitalistiques sont basées sur de et sciences sociales
entre les acteurs locaux et les acteurs de fortes capacités d’investissement pour
l’élevage présents, dans leur diversité, relocaliser l’élevage et promouvoir une Les références au «  territoire  »
pour accompagner l’émergence d’alter- intensification fourragère selon une reposent sur l’identification d’une
natives permettant d’assurer renouvel- stratégie de «  land sparing  » et pro- nouvelle échelle d’évaluation ou de
lement de l’activité et sa contribution mouvant l’exclusion sociale de petits mesure d’impact des activités (le pay-
au renforcement de la durabilité terri- producteurs. En Uruguay, la mise en sage, l’espace par différence avec les
toriale. Les lieux et conditions de redéfi- œuvre de politiques de décentralisa- échelles plus usuelles en sciences bio-
nition de l’agriculture périurbaine dans tion remettant en question une poli- techniques – comme le système de
le cadre de politiques territoriales sont tique de développement agricole très culture à l’échelle parcellaire ou système
l’objet de travaux nombreux (Jarrige sectorielle basée sur l’agro-industrie et d’élevage à l’échelle du troupeau). Les
et al., 2006 ; Guiomar, 2011 ; Ruault et l’exportation est analysée par Sabourin dimensions territoriales sont dictées par
Vitry, 2017). Ces auteurs insistent, d’une et al. (2015). Cette analyse met en évi- des objets largement initiés et pilotés
part, sur la faible participation des agri- dence la forte opposition entre modèles par la recherche. Les questions portent
culteurs aux processus d’interaction agricoles familiaux et industriels ainsi alors sur la caractérisation des activités
dans les arènes locales liées aux poli- que la nécessité de mettre en place des et de leurs impacts à différentes échelles
tiques publiques de gouvernance et espaces d’échanges entre acteurs terri- spatiales que ce soit sur les émissions
planification territoriale. D’autre part, toriaux et éleveurs permettant d’éviter de GES, la consommation d’énergies
ils soulignent le caractère très fragmen- l’isolement des éleveurs familiaux, leur fossiles, l’érosion de la biodiversité,
taire de la connaissance des acteurs enfermement dans une logique iden- dimensions considérées séparément ou
du territoire des activités agricoles et titaire et de résistance, perçus par une combinées au travers d’analyses multi-
la prééminence d’images de ce que frange des acteurs locaux comme les critères. De tels travaux contribuent à la
devrait être l’agriculture au détriment défenseurs d’un modèle archaïque qui décision publique au travers de l’élabo-
de préoccupations sur les conditions se voit ainsi privé de pistes d’avenir. ration de normes contribuant à fixer les
de la pérennité de l’activité. Enfin, ils modalités des activités en réponse à des
pointent la faible vision d’une diversité problèmes souvent définis en amont de
des formes d’exercice de l’activité agri-
3. Les recherches ces recherches.
cole peu relayée par les acteurs agri- sur les interactions
coles et vectrice au sein de la profession élevage-territoire, Le territoire constitue un espace sur
de divergences de points de vue sur ce quelques perspectives lequel un ensemble d’acteurs, dont
qu’il convient de faire pour la conforter. ceux de l’élevage, définissent les moda-
lités des activités humaines (les res-
Des recherches conduites en S’appuyer sur des échelles intermé- sources sur lesquelles elles s’appuient et
Amazonie brésilienne (Cialdella et diaires entre l’exploitation agricole et les modalités de leur gouvernance). Ces
al., 2015), et en pampa uruguayenne le système terre permet de produire travaux se spécifient d’autant plus qu’ils
(Sabourin et al., 2015), où les enjeux de des argumentaires sur les activités considèrent l’élaboration de projets à
coupler développement de l’activité et d’élevage et accompagner les trans- l’échelle de territoires et que les activités
modèles de développement inclusifs à formations de l’activité dans une pers- des acteurs de l’élevage y sont référées.
l’échelle des territoires s’expriment forte- pective de conforter sa contribution à Les conditions de la convergence entre
ment, illustrent la nécessité de renforcer la durabilité territoriale. Ces approches ces dimensions collectives et transec-
de tel dispositifs concernant l’élevage s’accompagnent d’un élargissement torielles et la contribution des activités
et les conditions de ses redéfinitions du spectre des acteurs, des modalités et acteurs de l’élevage aux « attentes »
en milieu rural. Ainsi, en Amazonie, les de formalisation des connaissances, qui s’expriment dans ces projets sont
remises en cause de l’élevage de bovin des critères d’analyse et des dispositifs centrales. Ces recherches sont résolu-
et de ses interactions avec les espaces observés dans le cours des recherches ment situées. Elles composent avec la
forestiers conduit à la recherche d’al- en regard de ce qui est usuellement pra- subjectivité des acteurs des territoires
ternatives aux formes d’élevage pion- tiqué lorsqu’on se centre sur des enjeux et visent à caractériser diversité et
niers en place. La faiblesse des lieux agronomiques ou de filière. L’incidence transformations des formes d’activités
permettant l’articulation entre les de ce déplacement sur les formes de en regard d’attentes multiformes et
acteurs locaux et la diversité des types connaissances scientifiques produites dynamiques. Elles concourent à la gou-
d’éleveurs présents sur le territoire et les modalités d’accompagnement vernance territoriale en contribuant, à

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Élevage et territoires : quelles interactions et quelles questions ? / 199

différentes échelles, tant à la définition locale). L’adaptation à l’échelle de ter- rassurent les acteurs sur leur capacité
des problèmes à traiter pour l’action ritoires de la démarche de quantifica- de coordination et de gouvernance
publique que des solutions, dans un tion des emplois directs et indirects est sensible. Les transitions territo-
processus dynamique visant à favoriser liés à l’élevage, testée à l’échelle natio- riales, par exemple vers l’agroécologie,
la coévolution entre attendus sociétaux nale (Lang et al., 2015) serait une autre présentent des spécificités en termes
et formes des activités, dimension fon- contribution objectivant l’importance d’acteurs concernés (agriculteurs,
damentale de sa durabilité. du secteur dans l’emploi local et les filières, collectivités territoriales, ONG
perspectives selon le développement environnementales et/ou porteuses
Les recherches conduites sur le ter- de tel ou tel modèle d’élevage. Tous d’innovations alimentaires), de prise
ritoire sont ainsi en tension sur un gra- les modèles n’ont en effet pas le même en compte de la diversité des sys-
dient tiré, d’une part, vers des mesures impact sur l’emploi  : l’accroissement tèmes et des rapports à l’espace (proxi-
d’objectivation de l’impact des activités de la productivité du travail permis par mité, distance). Soulignons quelques
humaines dans un contexte de chan- l’agrandissement des exploitations que recherches récentes sur les options de
gement global et, d’autre part, vers l’on observe depuis plusieurs décen- gouvernance de l’intégration des acti-
une compréhension, intégrant toute la nies est associé à une perte régulière vités cultures et élevage qui mettent
subjectivité des acteurs de ce sur quoi de la main d’œuvre. De même, tous les en avant l’intérêt de la gouvernance
l’élevage est attendu à l’avenir. Ces deux modèles agricoles ne requièrent pas polycentrique (Moraine et al., 2017), la
types de recherche coexistent dans le les mêmes compétences et savoir-faire redéfinition du lien entre diversification
département de recherches Sad de (managériaux, technologiques, de rap- des productions agricoles et alimen-
l’INRA, un enjeu pour l’avenir est d’en port à la nature et aux animaux). Enfin, tation locale dans le cadre de « living
conforter les conditions de renforce- les dynamiques territoriales touchent labs » ouverts à des acteurs de la société
ment mutuel pour contribuer avec les les questions de reprise et d’installation civile (Coquil et al., 2018). De nouvelles
acteurs concernés à penser l’avenir de d’une part et de cessations anticipées, propositions conceptuelles émergent
l’élevage dans les territoires. d’autre part, notamment au travers des pour la conception de ce que pourrait
questions de politiques foncières tant être une transition agroécologique à
Un domaine relativement peu urbaines que rurales (Barrière, 2015), l’échelle d’un territoire, visant l’accrois-
exploré par la recherche et pourtant d’infrastructures mais aussi d’opportu- sement de la diversité et de la connec-
présent dans les débats d’acteurs est nités de reconversion professionnelle. tivité entre éléments du système et des
celui des interactions entre élevage, services produits par les écosystèmes
travail et territoire. Le terme travail „ 3.2 Accompagner (Duru et al., 2015) avec des proposi-
étant assez large (emploi, organisation, les transitions territoriales : tions d’outillage et d’accompagne-
conditions de travail, attractivité…), un nouveau défi scientifique ment du processus. Ces propositions
nous nous appuyons ici sur la synthèse portent notamment sur la définition
proposée par Servière et al. (2018) pour Si le territoire est une entité abordée collective de la problématique, le
décliner plusieurs pistes de travail. La du point de vue de la conception de choix des partenaires de terrains et des
première porte sur «  les réseaux pro- nouveaux projets concertés, un nou- acteurs participants, et la préservation
fessionnels, associatifs, familiaux ou veau courant de recherche s’intéresse de marges d’adaptation du dispositif
de voisinage dans lesquels les agri- aux «  transitions territoriales  » c’est à chemin faisant (Audouin et al., 2018).
culteurs trouvent une reconnaissance dire aux cadres théoriques et aux outil- Dans certains territoires, la transition
sociale et professionnelle ». Dufour et lages qui permettent d’accompagner agroécologique amène les chercheurs
al. (2016), interrogent leurs propres les acteurs d’un territoire dans un pro- à explorer plus finement la contribution
conditions de travail et les normes de cessus de changement radical quant à de systèmes ou de modèles agricoles
ce qui fait un travail vivable. Mais dans la conduite de l’activité d’élevage et vis- ou alimentaires « négligés » voire consi-
lesquelles ils trouvent également des à-vis des fonctions que doivent assumer dérés comme peu porteurs d’avenir par
ressources pour leur activité notam- l’activité d’élevage pour le développe- le monde socio-technique dominant,
ment pour développer des actions col- ment territorial (qu’il s’agisse de l’en- comme les formes très diversifiées et
lectives qui renouvèlent les formes de vironnement, de l’alimentation, de intégrées d’agriculture et d’élevage
travail en commun (Lucas et al., 2014) l’identité locale ou du développement des petites exploitations familiales aux
ou qui tissent de nouveaux rapports économique). Ce changement radical Antilles. Il s’agit alors de leur donner
entre producteurs et consommateurs est nourri de contributions à l’échelle une visibilité et un rôle dans un pro-
autour des produits locaux et des de l’exploitation agricole (Coquil et al., cessus de changement territorial qui
façons de produire qui conviennent. La 2018), des filières (Magrini et al., 2016) ne saurait reposer uniquement sur la
deuxième renvoie aux caractéristiques et des systèmes d’innovation (Touzard transformation (même vertueuse) d’un
des bassins d’emploi et leur impact et al., 2014). Ces travaux montrent que modèle dominant.
sur les combinaisons d’activités des les processus de changement ne sont
ménages et la nature des collectifs de pas linéaires, qu’ils sont marqués par Ces enjeux à mieux inscrire les acti-
travail (agriculteur seul permanent, le une relative incertitude sur l’effet des vités agricoles et d’élevage dans des
conjoint travaillant à l’extérieur ; oppor- actions et que le travail de reconstruc- territoires de projet, pose aussi des
tunité d’embauche de salariés d’origine tion de nouvelles normes d’action qui questions en termes de dispositifs

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d’action publique et de leur évaluation. conforter les activités d’élevage dans des modèles précisant le lien à l’aval
Ainsi, la politique agricole commune leurs contributions au développement (transformation distribution, consom-
constitue un soutien très structurant durable des territoires, un intérêt accru mation, ou type de circuits) ou des
des activités d’élevage et de leurs dyna- devrait être porté à l’évaluation des modèles reliant les dimensions tech-
miques. Dans le cadre des mesures de soutiens publics dans leur caractère niques, structurelles et de conception
développement rural, du second pilier incitatif à l’inscription des éleveurs du métier (Ploeg Van der, 1994 ; Lémery,
de la PAC, les dispositifs Leader sont dans des dispositifs de gouvernance 2003). Penser le territoire, c’est renoncer
explicitement orientés vers le soutien territoriale promouvant l’innovation. à considérer une exploitation moyenne,
d’initiatives territoriales, donc non sec- un modèle dominant (qu’on le sou-
torielles, de nature à conforter l’émer- tienne ou l’abhorre) pour s’intéresser
gence d’actions insérées dans des
Conclusion aussi aux modèles alternatifs à leur loca-
projets de territoires. Ces dispositifs lisation, aux ressources qu’ils mobilisent
auxquels ne sont réservés que 5 % de Le développement de l’élevage et aux propriétés que confère, ou non,
l’enveloppe du second pilier sont très peut être pensé en référence aux la coexistence des différents modèles à
marginaux en termes de montants dis- enjeux planétaires (environnement, l’échelle globale.
tribués en regard de dispositifs tels l’In- demande alimentaire) et à la nécessité
demnité Compensatoire de Handicap de renouveler nos modèles de pro- Ainsi «  penser global, agir local  »
Naturel, qui pour les régions concer- duction y compris en y ajoutant, dans nécessite d’associer, aux grands enjeux
nées est massivement orienté vers les sociétés occidentales, la question mondiaux, la reformulation de ceux-ci
un soutien à l’élevage. Ces dispositifs du bien-être animal. Notre proposi- dans un espace donné en considérant
Leader dans leur configuration actuelle tion est de compléter la réflexion en un système d’acteurs développant dans
restent limités quant à leurs capacités mettant à jour ce qui relie l’élevage son territoire une pensée « autonome »
à enrôler une large gamme d’acteurs. et les territoires, au-delà de l’idée que de la durabilité. Ceci implique aussi
Ils mériteraient d’évoluer pour soute- ce qui se décline de ces modèles en que les acteurs locaux, au-delà de ceux
nir plus efficacement des projets de Amazonie ou en Mongolie, mais aussi des filières, contribuent à la définition
développement local (Chevallier et en Bretagne et dans les Alpes ne sera des trajectoires de développement de
Dedeire, 2014). Ils constituent toute- pas identique. La notion de territoire, l’élevage qui iraient dans le sens de la
fois un des rares supports d’incitations autour du triptyque espace, acteurs et durabilité des territoires. Il y a donc des
financières intégrant spécifiquement activités, mais aussi comme objet de enjeux à intégrer, dans l’approche du
les activités agricoles qui soit explici- l’action publique et comme porteur changement, ce que peuvent appor-
tement dédié à favoriser l’inclusion des d’actions collectives permet d’abor- ter des processus de gestion concer-
activités aux territoires dans lesquelles der d’autres dimensions du futur de tée entre acteurs agricoles, de filière
elles s’inscrivent. Ce dispositif touche l’élevage. Certaines sont désormais et acteurs non agricoles explorant les
toutefois moins les agriculteurs, peu bien étayées comme l’estimation synergies et dépassant les « trade-off »
présents, que d’autres acteurs écono- des services écosystémiques rendus (Cramer et al., 2017). Le territoire est une
miques du monde rural (Berriet-Solliec par l’activité (Dumont et al., 2017) ou échelle d’action publique qui prend de
et Trouvé, 2013). On peut penser que l’incorporation de composantes du plus en plus d’importance, c’est égale-
les déséquilibres financiers entre des territoire dans des signes de qualité ment une échelle d’action collective et
dispositifs sectoriels, tel l’ICHN, relati- différenciés (Marie-Vivien et al., 2017). d’approche des transitions (Geels, 2002)
vement « conservateurs » en visant le entre acteurs du secteur de l’élevage et
maintien de l’activité, soient dissuasifs Mais parler du territoire suppose d’en- avec d’autres catégories d’acteurs qui
de l’investissement d’acteurs agricoles visager la co-construction du futur de semble de plus en plus pertinente à
dans des dispositifs transectoriels, tels l’élevage portée par la confrontation ou considérer.
ceux qu’impulsent les programmes la coordination d’acteurs hétérogènes,
Leader. En effet si l’élevage est claire- de la sphère agricole, des filières mais
ment perçu à l’échelle de nombreux également de la société civile et des
Remerciements
territoires pour son importance cultu- collectivités territoriales qui expriment
relle et comme vecteur d’identité, les ce que serait pour eux une durabilité Une partie des résultats présentés
débats peuvent être vifs sur les pers- élargie de l’élevage, congruente avec dans cet article sont issu du projet
pectives d’évolution de l’activité et les les enjeux de développement territorial. Mouve qui a reçu le soutien de l’ANR
différentes formes que celle-ci pour- C’est aussi intégrer ce qui fait diversité (Mouve : ANR-2010-STRA-005-01). Merci
rait (ou devrait ?) revêtir pour mieux et dynamiques des systèmes d’élevage aux départements SAD de l’INRA et ES
s’inscrire dans un développement ou des modèles qui en rendent compte du CIRAD pour le soutien au séminaire
durable et inclusif des territoires. Pour que ce soit des modèles techniques, permanent « élevage et territoire ».

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Élevage et territoires : quelles interactions et quelles questions ? / 201

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Élevage et territoires : quelles interactions et quelles questions ? / 203

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Résumé
Les leviers susceptibles de conforter la durabilité de l’élevage concernent i) la capacité du système considéré à se maintenir en conser-
vant ses capacités productives et en renouvelant les ressources dont il dépend, en répondant aux enjeux économiques et de filières :
l’efficience est alors au centre des évaluations ; ii) la capacité de l’activité d’élevage à intégrer au-delà de ses intérêts propres celle d’un
ensemble des porteurs d’enjeux qui l’environnent : les interactions à l’échelle des territoires sont alors au centre des analyses. À partir de
l’analyse transversale de travaux associant l’agronomie – zootechnie, la géographie et la sociologie sur des terrains français et étrangers
nous identifions trois dimensions particulières pour les recherches concernant les interactions entre élevage et territoire : i) la mesure
des impacts des activités sur des espaces continus, ii) l’analyse de la diversité des activités permettant de relier « local et global », et
iii) l’étude des interactions entre acteurs d’un territoire pour favoriser l’émergence d’innovations renforçant la durabilité territoriale.
Quatre études de cas illustrent ces défis actuels de la recherche sur les interactions entre élevage et territoire en ce que ces approches
amènent aux débats sur le futur des recherches sur l’élevage. Les recherches conduites sur le territoire sont en tension sur un gradient
tiré d’une part, vers des mesures d’objectivation de l’impact des activités humaines dans un contexte de changement global et, d’autre
part, vers une compréhension, intégrant toute la subjectivité des acteurs de ce sur quoi l’élevage est attendu à l’avenir. Il ne s’agit pas
pour nous d’opposer ces orientations de recherche, mais de faire jouer leurs complémentarités en les situant dans un nouveau courant
de recherche qui s’intéresse aux « transitions territoriales », c’est à dire aux cadres théoriques et aux outillages qui permettent d’accom-
pagner les acteurs d’un territoire dans un processus de changement.

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204 / JACqUES LASSEUR et al.

Abstract
Livestock and territory: which interactions and what questions?
Levers to consolidate sustainability deal with the following abilities: i) for the system to maintain its productive abilities and renew its related
resources while responding to expectations from the economic sector: efficiency is thus the question; ii) for the activity to cope, beyond its own
interests, with those concerns of other stakeholders surrounding it: at that time, interaction at the territory scale becomes central. By analyzing
pluridisciplinary research performed in France and abroad, we have identified three main dimensions dealing with livestock and the territory:
measuring the impact of livestock farming on landscape, analyzing diversity and dynamics of activities to connect local and global and, studying
the interactions among actors at the territory scale to foster innovation that will strengthen territorial sustainability. Four case studies highlight
challenges for research on relationships between livestock farming and territories. These studies are split on a gradient between the abilities to
deliver objective measures for the impact of human activities and a comprehensive approach, including the subjectivities of actors which is criti-
cal for livestock farming in the future. The main stake is to be able to bridge these two research perspectives and to include them in a “territorial
transition” research perspective that deals with theoretical frameworks and operating devices that accompany local actors in a changing process.

LASSEUR J., BONAUDO T., CHOISIS J.-P., HOUDART M., NAPOLÉONE M., TICHIT M., DEDIEU B., 2019. Élevage et territoires : quelles interactions
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INRA Productions Animales, 2019, numéro 2

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