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Virginie Rousseau
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Bienvenue à Pearl City
Une main se posa sur son épaule et elle tourna son visage vers la
silhouette en contre-jour.
— Nous y voilà.
— Quelle tête ? Celle d’une fille qui a tout perdu et qui se retrouve sur
une île paumée au milieu de nulle part ?
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jusqu’à l’aéroport lui-même. Durant ce court trajet, Jordan regardait
par la vitre du bus, voyant ce paysage atypique défiler devant ses
yeux : des palmiers, des cocotiers, des plages à perte de vue, une eau
cristalline et turquoise. Oui, tout ceci en aurait probablement fait
rêver plus d’un. Seulement, pas elle. Non, pour Jordan Travis, cette île
était synonyme d’un changement de vie qu’elle n’avait pas demandé.
Qu’est-ce qui pouvait être pire pour une adolescente que de quitter
son quotidien new-yorkais bien calibré entre son lycée, ses amis, ses
sorties et ses lieux favoris ? Central Park lui manquait déjà, ainsi que
les lumières de Times Square et son effervescence. Même l’odeur
caractéristique des hot-dogs planant dans les rues semblait déjà être
un lointain souvenir.
Cependant, Jordan, du haut de ses dix-sept ans, ne voyait pas les choses
ainsi : le jour où son père avait réuni toute la famille au restaurant,
elle avait su que quelque chose se tramait. Non pas que ses parents
n’avaient pas l’habitude de se réunir pour des occasions ponctuelles,
mais l’air solennel qu’avait arboré son père lorsqu’il s’était levé en
faisant tinter son verre, et la fierté qui s’était affichée sur son visage
lorsqu’il avait annoncé qu’il avait une grande nouvelle, tout ceci avait
été pour la jeune fille un indice que quelque chose allait se passer.
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qui était la meilleure ville au monde selon elle.
Et tout cela, elle le quittait au profit de Pearl City, une des plus grosses
villes que comptait Hawaï. C’était une blague, n’est-ce pas ?
— Nous voilà chez nous, lança avec une joie non dissimulée le chef
de famille. Si j’ai bien tout saisi, il y a trois chambres à l’étage et deux
salles de bain…
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que ses deux fils laissèrent
tomber leurs sacs pour se ruer dans leur nouveau nid, certainement
afin de s’accaparer la plus grande chambre.
— Jordan…
La jeune fille hâta le pas, préférant éviter une énième dispute avec
son père, disputes trop fréquentes à son goût depuis l’annonce de
leur départ. Elle entra et se dirigea aussitôt vers les escaliers en
colimaçon afin de trouver ce qui deviendrait à présent sa chambre.
Elle arpenta les pièces : ici une première chambre de taille modeste,
certainement la future suite parentale, avec sa salle de bain attenante,
puis une pièce plus petite, potentiellement un bureau pour son père,
puis la chambre qui serait, à coup sûr, celle de ses frères à en croire
leur enthousiasme.
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— Hey pas touche, celle-ci, c’est la nôtre ! cria Luke.
Pour toute réponse, Jordan haussa les épaules et passa son chemin
avant de trouver leur salle de bain commune : assez grande avec une
baignoire d’angle et un immense miroir qui prenait tout un pan de
mur. Elle continua son inspection des lieux et tomba finalement sur
la dernière pièce, au bout du couloir.
Cette pièce, éloignée des autres, semblait être coupée en deux avec
une sous-pente enfoncée dans le mur, comme une petite niche, et une
partie illuminée par une énorme baie vitrée donnant sur un petit
balcon. Elle esquissa un sourire, son premier depuis son arrivée ici,
et posa son sac au sol.
— Ce serait parfait !
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d’anniversaires ou de vacances entre copains. Dieu que ces moments
allaient lui manquer. Évidemment, il serait possible pour elle de
revenir à New York de temps en temps, pourtant, elle le savait, cela
ne se ferait pas avant un long moment et à dix-sept ans, tout était
atrocement long.
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La rentrée
Jordan grimaça : dévoiler ses jambes n’était pas quelque chose dont
elle était coutumière. Et puis il fallait bien avouer que sa peau était si
blanche qu’avec le soleil, elle finirait par éblouir les gens.
— Bof, pas génial. J’opte pour la chemise certes, avec un jean long.
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— Comme tu veux, mais dépêche-toi, tes frères sont prêts.
— Étonnant…
— Chérie, je sais que tout ceci est nouveau et déstabilisant pour toi,
je suis sûre que dans quelque temps, quand tu repenseras à tout cela,
tu…
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— Mouais, peut mieux faire, on s’en contentera.
Comme si les choses n’étaient pas déjà assez pénibles en soi, pensa-t-
elle. Que pouvait-il lui arriver de pire après cela ?
Elle fixa la bâtisse devant elle : une sorte d’immeuble en « U » aux
murs crème. D’énormes palmiers bordaient le lycée, dont un au
centre du « U ». Elle soupira et jeta un œil à sa montre : elle avait
encore quinze bonnes minutes avant le début des cours. Elle devait,
selon sa lettre d’admission, se rendre dans le bureau de la directrice
du lycée. Elle serra la bandoulière de son sac et avança, d’abord en
fixant le sol, essayant de passer inaperçue. Seulement, lorsqu’elle
leva son regard, elle tomba nez à nez avec un petit groupe de jeunes
filles, habillées de couleurs vives, à la chevelure claire, au teint hâlé…
Tout ce qu’elle n’était pas finalement. Elle leur sourit, poliment. Ces
dernières la fixèrent étrangement, puis retournèrent bien vite à leur
conversation.
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Elle lâcha ce souffle qu’elle n’avait pas eu conscience de retenir tout
ce temps et, sans s’arrêter, traça tout droit pour s’engouffrer dans
le bâtiment. L’effervescence l’aida à passer inaperçue. Bien qu’elle
aurait aimé trouver son chemin tout de suite, il semblait que le destin
lui aussi se moquait d’elle. Elle dut se rendre à l’évidence : elle était
perdue. Et comme si son comportement ne laissait place à aucun
doute, une voix s’éleva derrière elle :
— Excuse-moi ?
Jordan détestait dépendre des autres. Elle était de ceux pour qui
l’adage « On n’est jamais mieux servi que par soi-même » était un
credo quotidien. Et reconnaître avoir besoin d’aide l’écorchait au
plus haut point, encore plus lorsqu’il s’agissait de flatter l’ego d’un
autochtone à qui tout souriait certainement.
— Ah ! T’es pas loin. Toujours tout droit, la salle à la porte vert pâle.
— Merci.
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Et alors qu’elle allait s’éloigner, il posa sa main sur son avant-bras, ce
qui lui valut un regard d’abord surpris et ensuite choqué de la part de
la jeune fille, tant et si bien qu’il se ravisa aussitôt.
— Excuse-moi ?!
— Génial…
— Vous désirez ?
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Jordan se tourna vers une femme assez âgée au visage bonhomme.
La jeune fille se sentit tout de suite en confiance et lui sourit :
— Ah… oui ?
— Très bien.
La vieille femme lui donna son emploi du temps, ainsi qu’un plan de
l’école et quelques noms à connaître.
Puis elle sortit et soudain… le vide. Elle ne sut quoi faire. Le plan dans
une main, son emploi du temps dans l’autre, elle resta là quelques
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secondes : que faire ? Où aller ? Elle regarda l’heure, puis son
planning : elle devait avoir cours de français, une des options qu’elle
avait choisies, avec « Arts ». Puis elle regarda son plan : il fallait qu’elle
se rende au premier étage.
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— Je, désolée, Jordan.
Jordan opina.
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du professeur s’arrêter avant de lancer un « Entrez » qui semblait
agacé.
— Ou… oui.
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Quand vint la fin du cours, Jordan ne fut même pas surprise que le
jeune homme l’ayant aidée plus tôt se pointe devant elle avec un
regard goguenard :
— Thomas, rectifia-t-il.
— En quelque sorte. Non pas que l’on t’attendait comme le Messie,
mais l’arrivée d’une nouvelle venue d’ailleurs, c’est un petit
événement ici, même si ce n’est pas la première fois.
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— Je suis ravie.
— Vraiment ?
La jeune fille sourit et lorsqu’il lui tendit sa main, elle l’accepta avec
un peu moins d’appréhension :
— Jordan, enchantée.
— Rien ne t’échappe.
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— Quel honneur !
Et, effectivement, il y avait bien pire, car, pour le coup, Jordan avait été
chanceuse : Thomas lui montra les recoins du lycée, lui présenta son
groupe d’amis dans lequel elle devrait certainement faire un effort
pour s’intégrer. Et bien qu’elle se sentît encore comme un poisson
hors de l’eau, loin de son environnement quotidien, loin de sa zone
de confort, elle devait admettre que les choses avaient été moins
terribles que ce qu’elle avait imaginé. Elle n’osait pas revenir chez elle
et raconter à ses parents un quart de ce qu’elle pensait actuellement,
sous peine de sermons et de « je te l’avais dit ».
— Tiens, voilà mon adresse. Passe quand tu veux pour prendre les
cours.
— OK, merci.
— Ah, Jordan ! Alors ce premier jour ? Ton père m’a dit que tu avais
refusé qu’il vienne te chercher.
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— Ouais, je suis assez grande.
— Là n’est pas la question. Tu ne connais pas encore bien les lieux
et…
— Maman, stop. Je m’en suis sortie. Et autant m’y faire de suite, dit-
elle en haussant les épaules avant de se diriger vers l’escalier.
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Moira Travis était peinée, plus que ça, elle était blessée. Elle sentait sa
fille lui échapper jour après jour. Elle se souvenait à peine du temps
où ils jouaient en famille, à New York, se baladaient le dimanche ou
juste restaient ensemble sur le canapé à regarder un bon film. Tout
ceci était déjà bien trop lointain et elle s’imaginait ne pas pouvoir
retrouver cette cohésion familiale. Même son mari paraissait dépassé
par les événements, seulement, lui au moins avait un job qui pouvait
lui faire penser à autre chose en journée. Elle, elle restait chez elle,
aménageant leur mobilier, agençant leur futur jardin et potager.
Pourtant, au-delà de ça, elle ressassait sans cesse l’annonce de leur
départ et tout ce qui en avait découlé : l’éloignement avec la famille,
un nouvel environnement à dompter, et les sautes d’humeur de sa
fille à gérer. Elle regarda la pile de pancakes qui resta désespérément
intouchée et soupira : les choses seraient longues à aplanir et elle
espérait qu’un jour sa fille ait un déclic, sous quelque forme que ce
soit.
Jordan n’avait guère envie de mettre son nez dans ses cours. À voir
tous ceux qu’elle avait eus aujourd’hui, il lui semblait que, sur cette
île, ils avaient un train de retard. Elle soupira alors : elle qui pensait
que son esprit serait occupé par ses leçons, elle se trompait.
Elle jeta un coup d’œil à son chevalet et, finalement, sortit de sous
son lit une toile vierge qu’elle posa dessus. Elle se mit devant, prit
quelques pinceaux et de la peinture et soudain, une vague de chaleur
l’envahit, caractéristique des premiers gestes qui dirigeraient le
reste de la toile. Elle sourit faiblement avant d’apposer une première
esquisse bleu azur, avec le bruit du frottement des poils du pinceau
comme une douce musique dont elle était la chef d’orchestre. Car
dans les méandres tumultueux de sa vie en ce moment, s’il y avait
bien une seule chose qu’elle maîtrisait, c’était sa peinture. Elle
dessina une bonne partie de la journée devant sa baie vitrée et la
plage qui s’offrait à elle.
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Quand les portes claquèrent, deux grosses heures plus tard, elle sut
que le calme et la sérénité étaient finis : ses frères étaient rentrés et
semblaient bien plus enthousiastes qu’elle de cette première journée.
Et quand son prénom fut crié, elle pensa quelques secondes à faire
semblant de n’avoir rien entendu… Jusqu’à ce qu’un de ses frères ne
tape frénétiquement à sa porte.
— Tant mieux pour elle si elle pense qu’elle doit faire des efforts.
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— Tu parles… Vous semblez bien vous adapter pourtant.
— On ne va pas leur en vouloir non plus. Tu les punis déjà assez pour
pas qu’on en rajoute une couche.
Jordan aurait voulu lui mentir, lui dire qu’ils l’avaient tous mise de
côté, mais la vérité était qu’ils avaient été accueillants et souriants.
Elle baissa le regard et haussa les épaules.
— Ça, j’en doute, hoqueta Jordan, amusée. Y’a rien qui me retient ici
et quand j’en aurai fini avec le lycée, je repartirai à New York pour
l’université.
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il fronça les sourcils et la fusilla du regard.
— Ah ouais ? Y’a rien qui te retient ici ? Bah tant mieux pour toi…
T’en as de la chance de ne pas tenir autant à ta famille qu’elle ne tient
à toi.
— Ouais, laisse tomber. Vaut mieux te taire si c’est pour dire pire
encore. Reste ici seule et aigrie. Moi, je retourne avec des personnes
souriantes et qui aiment être ensemble.
— T’as raison en fin de compte, vaut mieux que tu partes au plus vite
si notre présence t’insupporte autant.
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Ce n’est que lorsque sa mère vint toquer à sa porte pour lui
signifier que le repas était prêt que Jordan consentit à descendre,
abandonnant sa toile. Avant de suivre sa fille, Moira remarqua l’œuvre
d’art, dissimulant un sourire : peut-être était-ce annonciateur de
changement ?
— Ah Jordan ! Il ne manquait plus que toi ! Tes frères m’ont chanté les
louanges de leur école, qu’en est-il de ton lycée ?
— Et ta classe ?
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— Nous aussi on l’a remarqué, on dirait qu’on est bien plus intelligents
du coup ! lança Tom.
— Oh ? Intéressant. Ça devrait donc aller pour cette fin d’année, non ?
Elle ne nota pas l’échange de regard entre Moira et Peter, signe qu’il
ne fallait plus trop lui en demander pour la soirée. Le père de famille
comprit et enchaîna sur sa prochaine mission : visiter un zoo local
afin d’en faire la pub pour les tour-opérateurs.
—Jordan ?
— Hum… J’en sais rien. J’ai des cours à rattraper. Et puis voir des
animaux en cage, c’est pas trop mon truc.
— Oh… Oui, je vois… Bien, tu nous diras. Sache que ce zoo est avant
tout un refuge pour les animaux en voie d’extinction et un lieu de
reproduction d’espèces menacées. Ils sont bien traités.
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calme entre le récit de Tom et Luke sur leur première journée et leur
prochaine visite au zoo. Jordan, quant à elle, resta silencieuse, pensant
que le lendemain serait un autre jour. Elle n’avait simplement pas
idée d’à quel point…
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Kayla
Quatre jours. Quatre jours étaient passés depuis que Jordan avait
intégré son nouveau lycée. Le quotidien avait pris une place qui surprit
même Jordan. Elle avait l’habitude, maintenant, que Thomas l’attende
à la sortie de son bus pour la conduire en classe. Elle déjeunait avec
lui et sa bande d’amis. Et même si elle n’était pas encore tout à fait
à l’aise, elle essayait au moins, ce dont elle ne pouvait se vanter à la
maison : elle minimisait toujours ses interactions avec ses parents et
le dialogue était définitivement rompu avec Luke. L’ambiance était
si détestable qu’elle préférait s’enfuir dès qu’elle le pouvait, ce qui
lui avait donné l’occasion de visiter un peu les environs. Elle avait
pu constater que la ville n’était pas ce qu’elle imaginait : Pearl City
était loin de la représentation d’une ville typique d’Hawaï avec ses
cocotiers, ses plages infinies ou encore ses autochtones en chemises
à fleurs et chapeaux de paille, bien qu’elle ait pu en voir quelques-uns
quand même.
Non, Pearl City était comme New York avec un climat plus chaud et
un paysage plus agréable à regarder que d’immenses buildings faits
de béton et de verre. Elle flânait souvent dans le quartier touristique,
visitant les diverses boutiques, se surprenant même à apprécier faire
du lèche-vitrine.
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— OK, répondit simplement la jeune fille, car tous les prétextes étaient
bons pour être le moins souvent possible chez elle en ce moment.
Elle nota la gêne visible du jeune garçon et dans son for intérieur,
elle en était flattée. Cependant, si elle avait été franche avec lui, à cet
instant, elle aurait pu éclaircir la situation, lui dire que c’était loin
d’être possible. Elle le connaissait à peine et qui sait ce que pensaient
les gens d’ici de ce genre de… situation. Alors elle ne répondit rien et
ils continuèrent leur chemin jusqu’à leur prochain cours.
— Pourquoi tu souris ?
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— À quoi ?
— À toi.
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Ils entrèrent et ce que suggéraient les baies vitrées était à présent
sûr : une décoration moderne noire et blanche, digne d’un catalogue
en papier glacé. Une immense cuisine américaine en marbre blanc
laissait imaginer une cuisinière attitrée ou encore une femme de
ménage.
— Waouh ! Impressionnant.
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elle repensa au sien qu’elle avait dû laisser à New York. Il n’aurait
probablement pas supporté les heures d’avion en soute. C’était la
raison principale invoquée par ses parents. Elle supputait pourtant
qu’ils ne voulaient simplement pas avoir à s’en occuper dans leur
nouvelle vie. Encore une chose que ses parents lui avaient enlevée.
— Garfield ? Sérieusement ?
— Un chat, gros et roux… C’était logique. Alors, voilà, ce sont les
cours qu’on a en commun.
— Tu sais que ce que tu fais est pour la forme parce que votre
programme est bien plus en retard que le nôtre.
Jordan prit une grande inspiration. Elle était qui elle était. Elle était
déjà passée par là à New York et tout s’était bien passé finalement. Si
cela devait en être autrement ici, alors elle aurait bien eu raison les
concernant.
— Ce que je voulais dire c’était que… Tu es le mec idéal pour les
filles… hétéros.
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— Parce que t’es lesbienne ?! Je serais bien le dernier à te repousser
pour ça.
— À demain.
— Eh ben, mon vieux… S’il s’agit de Kyle, s’il voit ce dessin, il va se la
raconter un moment !
— Excuse-moi ?!
—…
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remettre son sac sur le dos. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’elle prit
conscience de l’apparence de son interlocutrice : petit short de bain,
débardeur rose pâle, les cheveux ondulés en un chignon anarchique
et une planche jaune poussin sous le bras. Une surfeuse, il fallait s’en
douter : des sportifs avec peu de cerveau sous le capot.
— Hey, où tu vas ?
— Pas vraiment.
— Jordan !
— Tu as vu l’heure ?
Le ton peu enjoué de son père indiqua à Jordan que, quelle que soit la
réponse, cela ne lui conviendrait pas. Elle jeta un rapide coup d’œil à
sa montre et se crispa : elle n’avait clairement pas vu l’heure passer.
— Je suis allée chez un camarade pour prendre des cours. Je suis
revenue en marchant. Je n’imaginais pas que ça prendrait autant de
temps.
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Ses parents échangèrent un regard et Jordan soupira en s’approchant
et en ouvrant son sac :
Bien entendu, elle ne parla pas de son petit arrêt sur la plage et
encore moins de ce qu’elle y faisait. Elle imaginait que ses parents
attendaient des excuses, pourtant, pour le coup, elle ne voyait
absolument pas de raison d’en donner.
— Viens manger.
Elle posa son sac et, en silence, vint s’asseoir à côté de Tom. Sa mère
lui servit des pâtes et Jordan ne tarda pas à manger. Elle imaginait
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bien que l’ambiance à table devait être un poil plus enjouée avant
son arrivée.
Jordan leva les yeux au ciel : sa mère était aussi délicate et subtile
qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine.
— Oui assez.
— Ah oui ?
— Pourquoi ?
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— Papa… Je suis désolée, j’aurais dû appeler.
— Excuses acceptées.
Elle soupira et se leva du canapé, la tête basse, avant que son père ne
l’alpague :
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Peter la fusilla du regard, ce qui glaça le sang de Moira.
Moira fronça les sourcils et jeta son torchon au visage de son mari :
— Tu es censé le faire tout comme je le fais moi ! Oui, tout cela est
difficile pour tout le monde, mais à aucun moment tu n’as essayé de
te mettre à la place de ta fille. Elle a dix-sept ans bon sang ! Rappelle-
toi comment tu étais à son âge. Et pour ta gouverne, si je ne tenais pas
cette maison comme tu dis, je me demande bien qui vous nourrirait ?!
—…
— Moira, pourquoi ne pas m’avoir dit que tu ne voulais pas venir ici
alors ?
Doucement, le soleil avait fait place à une nuit étoilée. Elle ouvrit son
sac et en sortit son calepin qu’elle feuilleta pour tomber sur le dessin
qu’elle avait commencé sur la plage, et soudain les paroles irritables
de cette inconnue lui revinrent en mémoire : ce corps était-il bien
trop musclé ? Avait-elle idéalisé la chose ? Elle ne s’en formalisa pas
et ferma les yeux en repensant à la scène : ces surfeurs sûrs d’eux
qui s’élançaient sur les vagues, ne semblant avoir peur de rien. En
un sens, elle les admirait, même si l’idée de monter sur planche de
surf un jour ne l’enthousiasmait pas du tout. Pourtant, c’était le sport
national ici et tout le monde, ou presque, était déjà monté une fois
dessus. Tout ce qui lui sautait aux yeux, c’était qu’ils étaient heureux
de faire ce qu’ils voulaient.
Puis, plongée dans ses pensées, elle ne se rendit pas compte que son
père avait entrouvert la porte.
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— Oui.
—…
— Tout cela est compliqué et nous avons tous une façon personnelle
de vivre le changement. Tes frères sont plus petits, ils aiment la
nouveauté, ta mère nous a suivis par amour, et j’ai cru que cela serait
suffisant pour nous tous. Ta mère a raison : je n’ai pas essayé une
seule seconde de me mettre à ta place. Et j’en suis désolé.
— Je n’en sais rien chérie. Ce job est une occasion en or, mais je sais
qu’une fois le lycée fini, tu pourras y repartir, et je n’aurais rien à dire
à ce moment-là.
Peter dissimula mal son sourire et posa sa main sur celle de sa fille.
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— Merci.
— Mer… Merci.
***
— Sérieusement…
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— Bah tiens… Quelle surprise hein !
Devant elle, la jeune fille blonde de la veille, celle qui avait jugé son
dessin sans cérémonie sur la plage.
— Euh non, je… Je venais voir Thomas. Il était absent aujourd’hui et…
— On est vendredi. Tous les vendredis, il est sur Honolulu avec mon
père. Le lycée est au courant.
— Oh… OK…
— Oui je…
— Pas grave.
—…
Jordan n’en revenait pas : s’il existait effectivement une destinée, elle
se fichait bien d’elle. Cette fille sans vergogne était la sœur de son
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camarade de classe attentionné et gentil. Sa première réaction aurait
été de faire demi-tour et de partir sans se retourner, seulement
quelque chose dans l’attitude suffisante de cette jolie blonde la
poussait à lui faire face, à lui répondre, à avoir le dernier mot.
— Oh, je vois.
— Ah oui ?
— Ton frère est au courant que tu lui casses ses coups comme ça ?
— De ce qu’il m’a dit, il avait peu de chances de toute manière, railla
la jeune fille en s’avançant sur le perron.
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— De… De quoi tu parles ?
— Tu sais bien de quoi je parle, j’ai aucun souci avec ça, clairement.
—…
—…
Jordan serra les lanières de son sac à dos, jusqu’à enfoncer ses ongles
dans ses paumes sans s’arrêter pour autant. Elle traça son chemin,
n’osant se retourner par peur de se retrouver nez à nez avec cette
jeune fille blonde. Comment a-t-elle dit qu’elle se prénommait déjà ?
Clara ? Non… Kaylie ? Quelque chose comme ça…
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Et sans le vouloir, ses pensées ne furent tournées que vers elle : son
air suffisant, son sourire irritant, son allure vulgaire avec ses mini
shorts et ses débardeurs serrés, ses attitudes emplies de certitudes,
comme si jamais rien ne lui échappait. Elle détestait ça, elle détestait
déjà cette fille alors même qu’elle se souvenait à peine de son prénom.
— Hey, doucement !
— Jordan, tu sais ce que ton père a dit : il s’agit de bien plus que ça,
ceci est une réserve, une des plus grandes de l’île.
— Ça doit pas être bien difficile ici… railla-t-elle d’un sourire mesquin.
— Ne fais pas ta rabat-joie, je suis certaine que tu vas apprécier, car,
quoique tu en penses, tu es ma fille et peu importe le contexte, je sais
ce que tu aimes et ça, tu vas aimer.
— Je pourrais te dire que cela nous regarde… Je sais que tu ne t’en
contenteras pas. Disons que nous devons encore effectuer un travail
de communication, je crois que nous devons tous le faire, n’est-ce
pas ?
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Jordan reprit la direction de sa chambre et se laissa tomber sur son
lit, face enfoncée dans son oreiller. Elle soupira de frustration : contre
son frère, contre ses parents, contre cette sortie au zoo et contre
cette irritable blonde au sourire vainqueur imbuvable. Peut-être que
sa mère avait raison : une journée hors de la maison ne pourrait lui
faire que du bien, même si c’était un zoo.
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Changements
Sa mère leva les yeux au ciel et la prit par les épaules afin qu’elle
avance et ne reste pas en retrait. Après avoir passé les guichets, Peter
Travis déplia l’immense plan qui lui avait été remis et chacun émit un
souhait : Tom voulait absolument voir les singes, Luke les oiseaux et
Moira avait une passion pour les tortues. Quand il se tourna vers sa
fille, cette dernière resta silencieuse avant que l’insistance du regard
de son père ne la force à faire un choix :
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— Les félins, répondit-elle sobrement.
— Bon, nous en avons déjà fait pas mal… Nous pourrions nous arrêter
pour manger, non ?
Moira prit sa fille par les épaules et l’entraîna à part pendant que
les hommes cherchèrent le restaurant idéal parmi la dizaine que
proposait le parc.
— Oui.
Jordan avait une sainte horreur du fait que sa mère lisait en elle
comme dans un livre ouvert, c’était un don, non… une malédiction !
— Pourquoi fais-tu croire que tu n’es pas heureuse d’être là ? Tu dois
en dépenser de l’énergie à feindre la tristesse.
Jordan haussa les épaules sans répondre, puis, soudain, une voix bien
particulière capta son attention. Une voix qu’elle ne connaissait que
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trop bien. Elle se figea et sa mère vit instantanément son changement
d’attitude :
— Jordan ? Ça va ?
— On y va !
— Tu la connais ?
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Jordan grimaça et fit un rapide salut. Ce qui l’interpella fut l’uniforme
dont était affublée la jeune fille : short et chemise de couleur kaki,
casquette de la même couleur estampillée au logo du parc, une sorte
de carnet de bord dans ses mains.
— Sa… Salut…
— Tu viens faire un tour dans ma réserve ? Alors, t’en penses quoi ?
— Tout comme : depuis que je suis née, j’y viens, avec mes frères et
mon père. Je la connais par cœur !
— Super…
— Enchantée.
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— Moi de même. Alors, que pensez-vous du parc ?
— Je bosse ici, lança Kayla. Je connais ce parc, tous ses recoins et ses
astuces comme ma poche.
Jordan se raidit, la fixa avec des yeux ronds et son sang se glaça : son
pire cauchemar se matérialisait aujourd’hui. Elle qui commençait à
se relaxer, voyait arriver cette fille antipathique et irritante dans son
entourage.
— Les félins, elle adore les félins ! lança Luke, comme s’il savait que
cela mettrait sa sœur dans l’embarras.
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— Et là, nous allons ouvrir une section pour les perroquets. Nous
allons bientôt en recevoir qui viennent d’Australie. Nous avons un
partenariat pour la préservation des animaux. Nous allons agrandir
l’enclos des éléphants et, dans quelques années, nous espérons être
inclus dans le programme chinois pour la sauvegarde des pandas et
accueillir un couple pour s’essayer à la reproduction.
— Je l’espère.
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Jordan fulminait : cette blondinette semblait avoir conquis le cœur
de tout le monde : ses frères, ses parents… Il n’y avait guère qu’avec
elle que la magie ne semblait pas prendre.
— Jordan, nous allons faire les boutiques du parc, tu peux rester avec
ton amie et nous rejoindre après.
Jordan voyait aussi clair dans les paroles de sa mère qu’au travers du
cristal. Elle n’eut même pas la possibilité de répondre que sa famille
s’était déjà éloignée, la laissant seule à la merci de Kayla.
Jordan la fixa et s’éloigna sans un mot. Bien sûr, c’était mal connaître
Kayla Jackson. La jolie blonde la rattrapa et se posta devant elle :
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— Je n’aime simplement pas les personnes qui prennent les gens de
haut.
Kayla éclata de rire et lui barra une nouvelle fois le passage afin ne de
pas la laisser filer.
—…
— Attends… Est-ce que ça ne serait pas parce que j’ai remis en cause
tes talents de dessinatrice ?
—…
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—…
— Fais-moi confiance.
— Approche.
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— On regarde quoi ?
— Chut, patience.
Jordan fronça les sourcils, peu habituée à ce qu’on la fasse taire ainsi.
Tout à coup, sa frustration fut remplacée par la surprise quand une
forme s’avança vers elles, une forme sombre, massive… Et soudain,
juste devant elles :
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— Yep ! Il reste un coup de peinture par-ci par-là à mettre et ça sera
prêt pour le jour J. Viens voir.
— Ah oui ?
— Oui.
— T’es sérieuse ?
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Pleine de fierté, Jordan prit les marqueurs et commença à rectifier les
lignes, les courbes, accentuant certains traits, effaçant d’autres… Et,
finalement, au bout d’une dizaine de minutes, elle recula, admirant
son travail, satisfaite.
— Pourquoi pas ?
67
— Tu pourras revenir le finir quand tu veux, lui assura Kayla.
En voyant Jordan dans ses pensées, les yeux plongés dans le bleu de
l’eau en face d’elle, elle vint se poster à ses côtés.
— Dis… Est-ce moi ou est-ce que tes parents et toi, ce n’est pas le
grand amour ?
— Dans ce parc ?
— Oh…
68
— En quoi est-ce compliqué ?
Jordan se tourna vers elle et aurait voulu lui dire qu’elle n’y connaissait
rien, qu’elle n’était certainement jamais sortie de son île, seulement
elle se ravisa. Cette jeune fille qu’elle avait traitée plus mal qu’un
chien était là, lui prodiguant conseils et écoute, sans la juger. Juste là,
lui montrant son aquarium, partageant ses secrets. Elle soupira alors
et sourit :
— Sûrement…
— Oh, crois-moi, je suis sûre que ni toi ni ton père n’avez vu ça.
69
— Te kidnapper ? répéta Kayla en se rapprochant. Pour ça, il faudrait
que tu sois contre l’idée. Pourtant, j’ai l’impression que ça pourrait
être tout le contraire, non ?
—…
— Si seulement.
70
— Je vais te laisser ici, j’ai encore du boulot.
Kayla sourit, amusée que Jordan soit curieuse, essayant tant bien que
mal de ne rien montrer.
— Ça dépend.
— De toi.
— En quoi ?
— Alors ?
— Alors quoi ?
71
— Tu veux qu’on se revoie après la fermeture ?
Kayla dut le sentir alors, car elle recula et défit rapidement sa main
du visage de la belle brunette pour l’enfouir dans sa poche. Ce fut à
ce moment précis que Jordan entendit son nom au loin. Lorsqu’elle
regarda par-dessus l’épaule de Kayla, elle vit sa mère lui faire de
grands signes.
72
— On se dit à plus tard alors ?
— Kayla, hein…
— Arrête maman…
Jordan leva les yeux au ciel, dissimulant très mal un sourire avant
d’emboîter le pas à son père et ses frères. Plus un mot ne fut prononcé
par la jeune fille, et pourtant, dans la voiture, tous ne firent que
l’éloge du parc et de Kayla, vantant les mérites d’une telle entreprise
et du savoir-faire de l’île. Lorsqu’elle rentra chez elle, Jordan ne put
s’empêcher de repenser à Kayla, à cet endroit encore secret de tous
et dont elle seule avait eu la primeur.
Allongée sur son lit, les yeux rivés au plafond, son cerveau fonctionnait
à mille à l’heure et le sommeil ne vint que très tard, trop peut-être,
car lorsque son réveil sonna, Jordan eut l’impression d’avoir à peine
fermé les yeux. Elle s’extirpa de son lit avec douleur et paresse et
se traîna littéralement vers sa salle de bain où le reflet du miroir
confirma ses craintes : elle avait une tête à faire peur, d’importants
cernes noirs creusant son visage et un regard vitreux trahissant une
fatigue extrême. Elle pensa quelques secondes à se faire porter pâle
et rester au lit… Sauf que c’était idiot, après tout, cette Kayla pouvait
juste être une amie, au même titre que son frère.
— Hey, salut !
— Salut.
— Comment ? Oh…
74
— Tu ne pouvais pas savoir, mea culpa. Je n’imaginais pas que tu
viendrais chez moi. Tu as donc rencontré ma folle de sœur, dit-il.
— Ah ! Elle a toujours eu une passion pour les animaux : elle les
recueillait dans le jardin, mon père devenait dingue.
— Tu rêves ?
— Ma sœur a été élevée avec deux garçons. Ceci est généralement sa
réponse quand on lui demande pourquoi elle est comme elle est.
75
— J’ai aussi deux frères, des jumeaux de dix ans.
— Leo, l’aîné, a vingt-et-un ans. Il vit sur le continent pour ses études.
Kayla est la seconde et moi le dernier. Nous avons tous une passion
commune : le surf. Nous sommes montés sur un surf bien avant de
savoir marcher. Kayla est même classée au niveau national.
— Ah oui ?
— Oui. Elle nous dame le pion dans l’eau. Une véritable brêle sur tous
les sports sur terre par contre, ironisa-t-il.
— Oui, j’ai pu voir qu’elle semble avoir une relation fusionnelle avec
les animaux marins.
— Oui, répondit Jordan. Elle parle de lui comme si c’était son fils.
— Elle en est fière. Elle était là lorsqu’il est né, et les soigneurs lui ont
donné l’opportunité de lui donner un nom, ce qui est sacré ici.
— Bah, dis donc, t’as dû sacrément lui taper dans l’œil pour qu’elle te
montre son bébé.
76
— Pardon ?
— Ouais, elle montre très peu son jardin perso. Je suis même pas sûr
qu’elle montre son antre à ses possibles conquêtes, ça pourrait être
le genre de truc qui marche généralement…
— OK.
***
Kayla alla dans le jardin, suivie par Thomas qui déposa son sac près
du canapé et se rendit sur la terrasse où il vit sa sœur relancer son
frisbee pour que ce dernier puisse atterrir dans un cerceau placé au
sol à environ 25 mètres de distance.
78
— Ton coach est trop exigeant. Ta visée est parfaite.
— Pardon ?
— Et alors ?
—…
79
— Hey, j’te jette pas la pierre : elle m’a mis un vent. Toi, tu as toutes
tes chances.
— Bah quoi ? Elle m’a explicitement fait comprendre que les mecs
l’intéressaient pas…
— Et donc ça veut dire que c’est champ libre pour moi ? T’es nul, tu
le sais ça… Ça m’étonne pas que t’aies pas de copine, tu ne connais
pas les filles.
— C’est tout ?
— C’est tout. Faut pas croire que, parce que je suis lesbienne, je vais
sauter sur toutes les filles qui croisent mon chemin.
— Dit quoi ?
— Quel con !
—…
81
—…
Kayla leva les yeux au ciel et se laissa tomber dans le large hamac
pendu entre deux poteaux de leur véranda ouverte.
— Elle est… jolie… Et même si elle semble être une pimbêche new-
yorkaise, je ne sais pas, j’ai l’impression que si on gratte la surface,
on trouve quelque chose de moins superficiel que ce qu’elle laisse
suggérer.
82
Elle soupira alors et envisagea une autre approche : il fallait
absolument que Jordan ne s’imagine pas qu’elle était une parmi
tant d’autres… Pourquoi avait-elle à cœur que la jolie brune pense
cela ? Avait-elle un réel coup de cœur pour elle, vraiment ? Elles se
connaissaient à peine… Était-ce un coup de foudre ?
Elle se redressa et tandis que Thomas avait disparu, elle fixa la grosse
tortue qui avançait lentement sur la terrasse :
83
Confiance
— Kayla ?
— Oh… Pourquoi ?
84
Kayla leva la main, coupant tout élan à la jeune fille, et glissa du capot
pour se poster devant Jordan, les bras croisés :
Kayla opina pour lui assurer que ce serait le cas et lorsque Jordan
raccrocha, elle sourit :
— Des potes ?
— Ouais, c’était plus simple. Si j’avais dit à ma mère que c’était toi,
elle… Enfin, elle se serait fait des idées.
— Allez, monte !
85
Sans attendre, la jolie brune s’exécuta et après avoir mis son sac à
l’arrière, profita du cabriolet de luxe de la jeune fille.
— Ta voiture ?
— Yep.
— Classe.
— Merci.
Sur ce, Kayla fit vrombir le moteur et la musique résonna. Ce fut sur
le son de Pink que les deux jeunes filles s’échappèrent. Kayla roula à
vive allure, sortant de la ville, longeant un long moment la mer avant
de s’enfoncer dans les montagnes et sa forêt aux routes escarpées et
tortueuses. Jordan se demanda soudain où l’emmenait la surfeuse.
Encore plus lorsque cette dernière gara sa voiture au milieu de nulle
part.
86
Kayla commença à grimper, précédée de Jordan, et au bout de cinq
minutes de montée, la belle brune commença à haleter. Elle leva les
yeux pour se rendre compte qu’elles grimpaient la montagne sur
un flanc assez escarpé. Elle souffla, espérant que ce calvaire prenne
fin bientôt : la chaleur était étouffante, sa peau collait et il semblait
que les moustiques se délectaient de ça. Elle bénissait le fait d’avoir
choisi des baskets le matin même, puis regretta soudain d’avoir pris
son gilet, même fin, avec elle.
— Tu suis ?
Soudain, elle vit une main devant elle et lorsqu’elle leva les yeux,
Kayla était là, le sourire aux lèvres. Cela aurait pu être pris pour un
geste de faiblesse, sauf que Jordan, à ce moment précis, s’en fichait
bien. Elle attrapa avec plaisir cette main tendue et la belle blonde
l’aida à gravir les mètres suivants qui semblaient interminables.
87
— Fais attention, lui lança-t-elle.
— Ouais, désolée.
— Wow…
— Ceci est mon jardin secret, lança Kayla avec fierté. En fait, c’est un
volcan, en sommeil depuis des centaines d’années.
88
— Par hasard. J’étais avec mon père et notre chien. La laisse a lâché et
il s’est enfui… Mon père lui a couru après, j’ai essayé de les suivre tant
bien que mal et nous sommes tombés sur ce lieu… On n’en a jamais
parlé à personne, de peur qu’il soit envahi par les touristes.
— Fais gaffe de ne pas tomber, je n’ai pas prévu qu’on prenne un bain
aujourd’hui.
— De rien.
— Pourquoi ?
— Pourquoi quoi ?
89
— Pourquoi l’avoir partagé avec moi justement ? Tu me connais à
peine et on ne peut pas dire que j’ai été tendre avec toi lors de notre
première rencontre.
— Tu fais ça avec toutes les filles que tu rencontres ? plaisanta Jordan.
— Je te plais ?!
Jordan était étonnée avec quel aplomb Kayla s’ouvrait à elle. Soit
elle était sûre d’elle et n’imaginait même pas se prendre une veste,
soit elle était inconsciente et se disait que, foutu pour foutu, autant
foncer, la vie était trop courte.
Pour toute réponse, Kayla sourit et se leva pour enlever son débardeur
et laisser apparaître un haut de maillot de bain de type sportif. Elle
s’approcha du bord de l’eau et inspira profondément :
90
— Hey Kayla ! Kayla? Arrête, tu n’es pas drôle !
— Merde !
— Je suis née dans l’océan, j’ai appris à nager bien avant de savoir
marcher. Il n’est pas arrivé le jour où il m’arrivera quelque chose
dedans.
—…
— Hey…
91
— Je suis désolée, j’ai un humour parfois… limite.
— Viens…
— Si c’est une manœuvre pour séduire les filles, c’est un peu tiré par
les cheveux.
— Quoi donc ?
— Te séduire.
92
— On ne se connaît même pas.
Jordan fut amusée. Il y avait chez cette jeune fille, quelque chose qui
l’attirait, quelque chose d’indéfinissable.
— Jordan Travis. Je suis née et ai vécu à New York, j’ai deux petits
frères, des jumeaux qui sont des terreurs, pourtant je les adore, mais
si tu le répètes, je nierai. J’ai un chat, Mozart, qui est resté à New York
avec ma grand-mère.
— Kayla…
— Oui ?
— Tu… J’ai noté que ton frère et toi évoquiez souvent votre père…
jamais votre mère.
93
presque instantanément sa curiosité. Elle aurait voulu lui dire de
ne pas répondre, qu’elle ne lui devait rien, pourtant Kayla soupira
doucement :
—…
— Et pourtant, non. Elle est juste partie quand j’avais huit ans. Elle
nous a quittés sans un mot, du moins pour nous, pour repartir sur le
continent, où mon père l’avait trouvée. Il faisait un voyage étudiant
pour le Spring Break, ils se sont rencontrés, se sont aimés, il l’a
convaincue de venir sur l’île… Ils se sont mariés, ont eu trois enfants
et au bout de quelques années, elle s’est rendu compte que ce n’était
pas la vie qu’elle voulait vivre jusqu’à la fin. Elle est partie…
— Oui, mais à quel prix ? Je l’ai vu tellement mal. Il a failli faire couler
sa boîte parce qu’il s’était enfoncé dans une dépression dont nous
n’arrivions pas à le sortir. Et finalement, c’est un banal accident qui
l’a sorti de sa torpeur.
94
— Un accident ?
— Le mien.
— Exact. Depuis, il est limite trop protecteur, mais au moins lui, il est
là. Et toi, ton père, il est comment avec toi ?
— Il est…
Jordan aurait aimé lui dire que c’était un tyran autoritaire, sévère et
indifférent à sa vie, sauf que c’était tout le contraire. Alors elle soupira,
et pour la première fois depuis longtemps, elle regarda Kayla et lui
dit la vérité.
95
— Et pour toi ?
— Pour moi… Il est un exemple. Il a réussi sur tous les points : il a une
carrière, une famille… Tout lui a souri et ça met la barre très haute
pour nous.
— Complètement.
— Pas toi.
96
Jordan sourit et fixa la cascade devant elle, le lagon turquoise à ses
pieds, cette végétation luxuriante et ce ciel bleu. Puis son regard se
posa sur Kayla, assise à ses côtés, le nez au vent et les yeux fermés,
semblant se délecter de la légère brise chaude les enveloppant. Ses
cheveux dorés l’éblouissaient presque et sa peau tannée trahissait de
longues heures passées au soleil.
Jordan sentit un petit frisson envahir son estomac, une petite crampe
comme lorsqu’on a le tract. Cela aurait pu être douloureux ou
dérangeant, mais au contraire, ce fut agréable.
97
— J’y connais rien en surf.
98
— Ouaip, c’était carrément l’idée !
— Pa… Pardon ?
Pour toute réponse, Kayla lui envoya un clin d’œil avant de s’éloigner :
— Excuse-moi.
99
—…
— Tu as raison. On n’agit pas ainsi à New York. Faut croire que ce
n’est que l’apanage des îles paradisiaques.
—…
— Et ?
— Je viendrai.
100
Kayla sourit de plus belle, presque prête à sauter de joie à bord de
son cabriolet, attitude enfantine qui plaisait à Jordan.
Kayla, elle, n’aurait jamais imaginé tomber dans les filets d’une
personne vivant au-delà de l’océan qui était le sien depuis toujours.
Sur cette île, Kayla avait l’habitude d’être elle, cependant, elle venait
de se rendre compte avec Jordan que ses certitudes et ses habitudes
pouvaient être mises à mal. Ce qu’elle avait pris pour acquis allait
devoir être mis à jour et adapté pour conquérir une étrangère, et
le challenge n’en était que plus attrayant. Pourtant, bien mal lui en
prendrait de ne prendre Jordan que pour un challenge, une épreuve.
Non, Jordan était bien plus que cela, et, elle ne savait pas pourquoi
ni comment, mais elle savait que cette jeune fille jouerait un rôle
important dans sa vie bien rangée.
— Absolument.
101
— C’était pas la fille du zoo ? lança Luke.
Devant cette bombe qu’il venait de lâcher, Jordan savait qu’elle était
prise au piège et qu’elle devrait rendre des comptes à sa mère. Et
c’était exactement ce que Moira attendait, au vu de son expression
surprise.
— Exact.
102
— Hum… Charmante, il est vrai.
— Arrête…
103
— Te faire quoi ?
— Maman, ça n’a rien à voir, tu le sais. Je ne voulais pas dire que j’ai
honte, je connais mes frangins et mon père et… je n’ai pas envie qu’ils
m’enfoncent. Ils sont du genre à faire des boulettes ou dire des trucs
idiots comme des anecdotes…
104
Sa mère sourit et la prit dans ses bras. D’un côté, elle était rassurée
que sa fille se sente enfin assez bien ici pour commencer à s’ouvrir
aux autres, et de l’autre, elle savait que l’amour était parfois un
investissement dans lequel on pouvait perdre des plumes. Pourtant
c’était ainsi. Ne disait-on pas que « l’amour a ses raisons que la raison
ignore » ?
105
Rencard
106
— Hey salut !
— Soudoyé ?
— Cool ! J’ai hâte de les revoir. J’ai d’autant plus la pression maintenant.
107
— Hein ?
— Je me fous des filles… Y’a que ton avis qui importe.
— Bien, chef !
108
l’avouer un jour, sa rencontre avec Kayla était certainement le début
d’une belle aventure.
Ce fut donc avec son téléphone serré dans sa main et son ordinateur
ouvert sur une page d’un article sur Kayla, que Jordan s’endormit. Et
c’est Moira qui la réveilla le lendemain avec un petit-déjeuner au lit.
— Maman ?
— Hein ? Quoi ?
— Je… J’en sais rien… J’imagine qu’il y aura des indications quelque
part, non ?
109
— Sûrement.
Jordan tendit le cou et vit une affiche arborant une planche de surf
jaune poussin sur laquelle était inscrit en lettres orangées « Wind &
Surf 2018! Waikiki beach ». Son cœur bondit dans sa poitrine et elle
sourit sans pouvoir s’en empêcher.
—…
— Je n’ai pas envie que tu te braques. Je veux simplement te dire que
je suis contente de revoir enfin ma fille.
110
— Ne doit-on pas ce changement d’attitude à une belle blonde ?
— Maman !
— Arrête maman !
Puis Moira s’éloigna, laissant Jordan devant la vitrine. Elle fixa les
bougies au travers de la vitrine, et ses lèvres formèrent un sourire
malicieux.
***
111
Jordan était complètement perdue. Bien qu’elle eût étudié la question,
vu plusieurs compétitions sur Internet, elle était entourée d’une
centaine de personnes et ne savait où regarder, où chercher. Soudain,
une main lui attrapa l’avant-bras, la faisant se retourner :
— Hey !
— Kayla ! Comment as-tu fait pour nous trouver dans cette foule ?
— Oui. Il y a, par classe d’âge, les amateurs et les pros. Ici, tu as les
tonnelles par sponsors, et là, le podium. Regarde…
— Oui.
— Et tu les soustrais si tu fais des erreurs, expliqua Kayla. J’ai bien
l’intention de prendre quelques bonnes vagues et de me faire un
rouleau.
112
— Un rouleau… Quand la vague forme un tunnel, c’est ça ?
— OK, merci.
Jordan se raidit et lorsque Kayla éclata de rire, elle fronça les sourcils :
— Marché conclu !
Sur ce, Kayla disparut dans la foule et Jordan entendit une voix
masculine l’appeler. Lorsque son regard balaya la plage, elle reconnut
Thomas, accompagné de plusieurs personnes.
113
— Hey, salut ! Thomas, je te présente mes parents et mes frères. Papa,
maman, voici Thomas un camarade de classe. C’est le frère cadet de
Kayla.
— Euh… Ah…
— Ne sois pas gênée, ça veut dire que tu comptes beaucoup pour elle.
Elle a l’air joviale et ouverte comme ça, pourtant elle accorde peu son
attention aux gens qui n’en valent pas la peine pour elle. Ceci est un
gage de valeur.
114
— Ça va commencer, viens, tu verras mieux de là.
— Oh OK…
— Le tour de Kayla arrive. Elle est la meilleure dans sa catégorie. Elle
a sa petite réputation sur l’île.
Jordan n’était pas peu fière et se mit à sourire en voyant une crinière
blonde au bord de l’eau.
115
bain de sport rose fluo. C’était, d’ailleurs, la première fois que Jordan
voyait Kayla aussi dénudée. Son regard s’était appesanti bien plus
que de rigueur sur ses abdos et ses muscles saillants.
Elle fut obnubilée par tous les mouvements de la jeune fille, si fluides
lorsqu’elle monta avec grâce sur sa planche et lorsqu’elle surfa
quelques mètres avant de revenir à plat ventre. Jordan aurait voulu
l’encourager, crier sa ferveur, pourtant elle resta muette, envoûtée
par la grâce de la belle blonde.
— Le rouleau…
Jordan restait aux aguets, fixant la vague arrivant droit sur une
Kayla qui semblait prête à la prendre. Puis le top départ fut donné
et en quelques coups de bras, elle atteignit le spot. Elle se leva sur sa
planche et s’engagea dans la vague.
116
quelques figures, avant que le rouleau ne se forme.
— Mauvais signe ?
Soudain Jordan fronça les sourcils et fixa le rouleau dans lequel Kayla
venait de disparaître. Son cœur se serra et sa respiration s’accéléra :
elle retint son souffle, sans le vouloir, jusqu’à ce qu’elle voie Kayla
ressortir, de longues secondes plus tard, sous les hourras du public,
ce qui la fit sursauter.
117
— Wow, elle a envoyé du lourd !
— Comme tu veux…
Alors que son père allait finir sa phrase, Jordan fronça les sourcils :
— Quoi ?
118
— Je me fous des compliments… Kayla s’approcha d’elle. Je ne veux
entendre que les tiens.
— Mon baiser ?
— Il faut croire que ce baiser est la seule chose que tu attends de
moi ?
— J’espère que ce n’est pas le cas, sinon je me suis très mal exprimée.
Ce baiser serait le début de bien d’autres choses. J’ai tellement de
choses à te montrer sur cette île, mon île. Je te la ferai aimer, je te
montrerai une autre facette de ses habitants.
Kayla s’approcha alors, encore et encore, et, tandis que leurs lèvres
n’étaient qu’à quelques centimètres, Jordan retint son souffle et
plongea son regard dans celui émeraude de Kayla. Plus rien ne
comptait et la foule les entourant n’était plus qu’un brouhaha lointain.
Kayla jeta un furtif coup d’œil vers les lèvres qu’elle réclamait à
présent, et ce fut Jordan qui combla les derniers centimètres, dans
un baiser d’abord timide et chaste.
119
— Tu n’aurais, quoiqu’il arrive, pas eu besoin de ça.
Kayla sourit de plus belle et initia le second baiser, plus franc, plus
langoureux aussi, le bout de sa langue demandant celui de Jordan. Et
ce n’est qu’au bout de longues secondes qu’elles se séparèrent, sous
les raclements de gorge des parents de Jordan, ainsi que du père de
Kayla.
Les deux jeunes filles grognèrent de gêne avant que tous éclatent de
rire. Des rires francs et sincères, des rires que Jordan ne retenait plus
à présent. Parce qu’elle avait bien des raisons d’être heureuse. Kayla,
avant tout, et tout ce qu’elle avait à offrir et qu’elle rêvait de vivre : de
longues balades dans la forêt dense hawaïenne, de belles heures près
de leur lagon à nager, pique-niquer, rire, des marches éternelles sur
les plages de sable fin à regarder le soleil couchant, colorant le ciel
d’un ton orangé… Jordan retrouverait l’inspiration auprès d’elle et la
dessinerait dans leur quotidien : quand elles nageraient dans l’eau
turquoise, quand elles resteraient des heures ensemble, lovées l’une
contre l’autre, lorsque la jolie blonde serait sur sa planche… Planche
à laquelle serait initiée la New-Yorkaise.
120
***
À présent, Jordan avait trouvé sa place et c’était dans les bras de Kayla
qu’elle regardait presque tous les soirs le soleil se coucher. Était-ce
un rêve ou la réalité ? Jordan aimait à croire que c’était un savant
mélange des deux. Elle coulait désormais des jours heureux sur cette
île, entourée de sa famille, de ses amis et de sa petite-amie. Hawaï lui
avait apporté bien plus qu’une nouvelle vie.
Sa relation avec Kayla l’avait aussi aidée à apaiser ses relations avec
ses parents. Eux aussi avaient fini par trouver leurs marques et
n’imaginaient plus vivre ailleurs.
121
— Salut. Ta semaine ?
— Ai-je le choix ?
— Comme si je pouvais.
— Prête ?
122
Une fois au bord du lagon, elles ne tardèrent pas à se couvrir de
baisers et de caresses : une semaine, c’était une éternité pour elles à
chaque fois. Elles savaient pourtant que ce n’était qu’une question de
temps avant que Jordan ne finisse ses études pour entamer un cursus
plus précis à Pearl City.
— Ouvre.
— Kayla…
123
Elle se retourna pour lui faire face et se heurta à un sourire éclatant
de la part de sa jolie blonde.
— Ton père m’a aidée pour trouver un petit bijou, rien qu’à nous.
— Notre chez nous, confirma Kayla. Nous avons vue sur la plage et un
petit jardin pour accueillir quelques… animaux ?
FIN
124
Romance par Reines de Coeur est une collection déposée par les
éditions Reines de Coeur
www.reinesdecoeur.com
ISBN : 978-2-37838-049-6
125
Également disponible dans la
collection Romance
Seconde Chance est le premier roman lesbien écrit par Marie Parson.
Elle y dresse avec finesse et humour le portrait de femmes à la fois
fortes et maladroites.
À New York, Elena Vega est une femme d’affaires à succès propriétaire
d’un magazine de mode. Mère célibataire, elle élève seule son
adorable fils de trois ans, Lucas.
127
Sa vie amoureuse, par contre, est désertique et ses proches aiment
bien le lui faire remarquer. Face à l’insistance de sa meilleure amie,
Elena accepte à reculons de participer à des rendez-vous arrangés.
Sa seule condition : trouver une baby-sitter respectable pour Lucas.
128
Décidée à percer les secrets de Parker & Associé, Kristen ne laisse
que peu de répit à sa mystérieuse patronne. Ne dit-on pas que les
apparences sont souvent trompeuses ?
Élisabeth et Julie, c’est une histoire que tout le monde connaît. Tout
les oppose : l’une est feu, l’autre est glace ; l’une se cherche, l’autre
est désabusée. Lorsque la joie de vivre rencontre le pessimisme, cela
crée forcément des étincelles. Un entretien d’embauche, un premier
contact, un simple regard au travail provoquent un éclair au milieu
du champ de bataille que sont les relations amoureuses.
Le grand jour arrive enfin. Leela, élevée dans un internat sur Terre, va
rencontrer Jenok, le commandant à qui elle est promise. Elle ignore
tout de cet individu dont elle espère secrètement pouvoir tomber
amoureuse.
129
Malheureusement, l’arrivée de la jeune femme dans le vaisseau ne
se passe pas comme prévu. Prise d’un coup de panique, Leela décide
de fuir et de reprendre sa vie en main. Dans la tourmente, la jeune
terrienne tombe sur Rajaya, une Lindoriënne prête à l’aider. Mais à
quel prix ?
Angelina est une lycéenne de dix-sept ans bien éloignée des réalités
des adolescentes de son âge. Embauchée pour l’été dans le seul café
présent à New Heaven, la ville où elle habite, la jeune femme partage
sa vie entre son travail temporaire et Noah, son neveu de quatre ans
qu’elle élève comme son propre fils.
Après avoir une fois de plus joué les taxis pour sa meilleure amie
Madison, Angelina croise le chemin de Samantha dont la voiture est
en panne sur le bord de la route. Les deux femmes s’engagent dans
une conversation animée où priment l’ironie et le second degré.
130
De la même auteure
Lors d’une soirée pluvieuse, Abigail Gaylord arrive sur la petite île de
Genova. La jeune citadine originaire de Seattle se rend au manoir des
Sullivan où elle vient d’être engagée. Elle y découvre la lugubre bâtisse
qui semble tout droit sortie d’une autre époque, comme son emploi
de dame de compagnie. Quand elle découvre la demeure en ruine, la
jeune femme se demande si elle a fait le bon choix en acceptant ce
travail. Mais une telle opportunité ne se refuse pas surtout lorsque
l’on souhaite tirer un trait sur son passé.
C’était sans compter sur les rumeurs courant dans le village qui
vont mettre à rude épreuve la relation naissante entre Abigail et sa
131
patronne. La dame de compagnie va rapidement prendre conscience
que chacune de ses actions a des conséquences…
132
Table des matières
La rentrée 9
Kayla29
Changements55
Confiance 84
Rencard106
133