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Partie 2 :
L’étude d’une économie ouverte
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Chapitre 1 :
Le cadre d’analyse
d’un modèle simplifié d’économie ouverte
Le modèle étudié dans cette partie étend le modèle IS-LM (d’économie fermée) étudié
dans la première partie de ce cours, en intégrant les échanges entre l’économie domestique
et ses partenaires internationaux, regroupés dans le terme “Reste du monde” (ou économie
extérieure). Ainsi, les hypothèses effectuées dans le cadre du modèle de la première partie
sont pour la plupart toujours valides, mais il faut définir et ajouter quelques concepts et
hypothèses propres à l’ouverture de l’économie domestique.
Une première section introduit quelques concepts propres à l’étude d’une économie ou-
verte. Une deuxième section présente les contraintes budgétaires des agents de l’économie
domestique (ménages, entreprises et Etat-Banque centrale) modifiées par la prise en compte
de l’ouverture, auxquels il faut ajouter un quatrième agent, le reste du monde. Enfin, une
troisième section définit les comportements propres à la prise en compte de l’ouverture.
b) Le taux de change réel coté à l’incertain est le prix du bien extérieur relativement
au prix du bien national, tous deux exprimés en monnaie nationale. Nous le noterons
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q : une unité de bien extérieur vaut q unités de bien national (en monnaie nationale). Il
mesure ainsi la compétitivité prix du pays national.
ePx
Si on note Px le prix du bien extérieur exprimé en devise, on a q = P .
Si les biens produits dans l’économie nationale et dans l’économie extérieure sont sub-
stituables et qu’il n’y a pas de barrières aux échanges de biens, ni de coûts de transports,
le prix des biens nationaux et le prix des biens étrangers, exprimés dans la même monnaie,
devraient s’égaliser et le taux de change réel devrait être égal à 1. On parle alors de Parité
des Pouvoirs d’Achats (PPA). Cependant, cette hypothèse n’est pas vérifiée en général et
nous supposerons donc que le taux de change n’est pas donné (et peut être différent de 1).
a) Le régime de change fixe suppose la définition d’une parité fixe entre la mon-
naie nationale et une devise, comme conséquence de la signature d’accords de fixité, qui
engagent les pays signataires à défendre cette parité, ou alors comme conséquence d’un
objectif de politique économique, comme la politique du “franc fort” par exemple. Dans
ce cadre, les banques centrales concernées doivent intervenir sur le marché des changes,
pour maintenir la parité fixée, soit en achetant de la monnaie nationale (contre des de-
vises) si la monnaie nationale tend à se déprécier relativement à la monnaie extérieure,
soit en achetant des devises (contre de la monnaie nationale) si la monnaie nationale tend
à s’apprécier.
Dans un régime de change fixe, la fixité peut être remise en cause de manière concertée
par les pays qui ont signé l’accord. Dans ce cas, si e augmente, on parlera de dévaluation,
et si e diminue, on parlera de réévaluation.
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La balance commerciale (BC) est donnée par la différence entre les exportations,
notées X (vente de biens nationaux au reste du monde) et les importations, notées IM
(achat de biens extérieurs par l’économie nationale). Exprimée en unité de monnaie na-
tionale, la balance commerciale est donnée par P X − ePx IM , et en unité de biens na-
tionaux, elle est donnée par BC = X − qIM .
On remarquera que les exportations correspondent à une offre de devise, ou à une
demande de monnaie nationale émanant de l’étranger, alors que les importations corre-
spondent à une demande de devises contre de la monnaie nationale de l’économie nationale.
La balance des paiements (BP ) correspond à la balance globale, auquelle on ajoute les
interventions officielles, c’est-à-dire les achats ou ventes de devises par la Banque centrale,
appelés les variations de réserves de devises détenues par la Banque centrale ∆R, libellées
en unité de monnaie nationale.
Remarquons que la balance globale mesure un excès d’offre de devise contre monnaie
nationale, tandis qu’une augmentation des réserves de devise détenues par la Banque
centrale correspond à une demande de devise contre monnaie nationale.
L’équilibre de la balance des paiements décrit l’équilibre entre offre et demande de
devise contre monnaie nationale.
On a alors BP = BC + BK − ∆R ∆R
P = 0, ou encore BG − P = 0.
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2.1 Les ménages nationaux
Les emplois des ménages nationaux sont constitués de leur consommation en biens na-
tionaux Cn et en biens étrangers Cx , exprimée en unité de monnaie nationale, du montant
des impôts, de la demande d’encaisses nominales (en monnaie nationale uniquement) et de
la demande de titres (nationaux ∆Bm,n et étrangers ∆Bm,x ). On suppose que les ménages
ne thésaurisent pas en devise, mais seulement en monnaie nationale. Leurs ressources sont
constituées, comme en économie fermée, de l’intégralité de la production domestique, qui
est distribuée par les entreprises nationales aux ménages nationaux. Ainsi, la contrainte
budgétaire des ménages nationaux est donnée par :
soit encore, si on note G = Gn + qGx le volume de dépenses publiques totales (en biens
nationaux et étrangers) :
∆R ∆Bg ∆Mg
G−T + = +
P P P
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vente de biens étrangers par le reste du monde à l’économie nationale, sont une ressource
pour le reste du monde. Le reste du monde achète des titres nationaux ∆Be,n (emplois du
reste du monde) et vend des titres étrangers aux ménages nationaux ∆Bm,x (ressource du
reste du monde). Enfin, les achats de devises par la banque centrale nationale sont une
ressource pour le reste du monde. La contrainte emplois–ressources du reste du monde
s’écrit donc :
P X + ∆Be,n = ePx IM + e∆Bm,x + ∆R
On remarque que ∆Be,n − e∆Bm,x correspond à la balance des capitaux (en unité de
monnaie nationale).
Ainsi, cette contrainte budgétaire peut se réécrire, en volume, comme :
∆R
X − qIM + BK =
P
On remarque que la contrainte budgétaire du reste du monde n’est rien d’autre que la
représentation de la balance des paiements (en volume).
3 Les comportements
Les hypothèses relatives aux comportements de consommation et de demande de monnaie
des ménages nationaux, ainsi que d’investissement des entreprises nationales restent iden-
tiques à celles du modèle IS-LM en économie fermée étudié dans la partie précédente. En
revanche, le comportement d’offre de monnaie de la banque centrale nationale diffère dans
le cadre d’une économie ouverte (à cause de la constitution des réserves de devises). De
plus, les fonctions d’importation, d’exportation et de mouvement de capitaux doivent être
définies.
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Le solde de la balance commerciale, noté BC, exprimé en unité de biens nationaux,
dépend alors du revenu étranger, du revenu national et du taux de change réel :
BC = X(Yx , q) − qIM (Y, q) = BC(Y, q, Yx ), BCY < 0, BCY x > 0, BCq ?
Une augmentation du revenu étranger ou une diminution du revenu national améliore
le solde de la balance commerciale (par un effet richesse).
On remarque, en revanche, que l’effet du taux de change réel sur la balance commerciale
est ambigu. Il y a deux effets qui jouent en sens opposé : un effet prix et un effet quantité.
A quantités exportée et importée données, quand q augmente, cela augmente la valeur des
importations en termes de bien national (qIM ) : le solde se dégrade par un “effet prix”.
Mais lorsque q augmente, on exporte plus et on importe moins, ce qui augmente le solde
de la balance commerciale par un “effet compétitivité” positif (dit encore effet volume).
Selon l’effet dominant, le solde de la balance commerciale va se dégrader ou s’améliorer.
Ces deux effets peuvent être résumés par ce que l’on appelle la “courbe en J” : on observe
souvent que la balance commerciale se détériore immédiatement après une dévaluation ou
hausse de q (effet prix) et qu’elle commence à s’améliorer seulement quelques mois plus
tard (effet compétitivité). L’évolution de la balance commerciale suite à une dévaluation
a alors un profil qui rappelle la forme d’un “J”.
Z
6
- t
- -
effet effet
prix volume
On suppose généralement que l’effet volume est plus important que l’effet prix : une
augmentation du taux de change réel entraı̂ne au total une amélioration du solde de la
balance commerciale. On dit que l’on se place dans le cadre du Théorème des élasticités
critiques, ou Théorème de Marshall–Lerner.
Le théorème des élasticités critiques revient à dire qu’il faut que le volume des ex-
portations et le volume des importations soient suffisamment sensibles au taux de change
réel pour qu’une augmentation du taux de change réel améliore le solde de la balance
commerciale :
Si |εX/q | + |εIM/q | > 1 ⇒ BCq > 0
où εX/q et εIM/q sont respectivement l’élasticité des exportations et des importations au
taux de change. En d’autres termes, l’effet volume domine l’effet prix.
Nous nous placerons dans la suite du cours dans le cadre du théorème des élasticités
critiques (BCq > 0). Nous supposerons donc que le solde réel de la balance commerciale
BC est une fonction croissante de Yx et de q, et décroissante de Y .
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3.2 Les entrées nettes de capitaux
L’arbitrage entre achats de titres nationaux et achats de titres étrangers dépend du
différentiel de taux de rendement des titres. Pour simplifier, nous supposons que les
taux de rendement sont donnés par les taux d’intérêt réels, r pour le pays national et rx
pour le pays étranger3 . Si le rendement des titres nationaux r est supérieur au rendement
des titres étrangers rx , les agents extérieurs demandent des titres nationaux, alors que si
le contraire se produit, ce sont les agents nationaux qui demandent des titres étrangers.
Le solde de la balance des capitaux, noté BK, c’est-à-dire les entrées nettes de capitaux,
est ainsi une fonction croissante de l’écart r − rx :
BK = k(r − rx ) k ≥ 0
S’il existe des entraves à la mobilité des capitaux de telle sorte que les capitaux sont
immobiles (on ne peut acheter des titres étrangers), alors quelque soit le différentiel de
taux, la balance des capitaux est nulle. Ce cas correspond à k = 0.
En revanche, s’il n’y a aucune entrave à la mobilité des capitaux, les arbitragistes
interviennent de telle sorte que l’on a forcément r = rx et les mouvements de capitaux
cessent. On parle de parfaite mobilité des capitaux. Dans ce cas, BK est extrêmement
sensible au différentiel de taux. Ce cas correspond à k → ∞. Attention, dans ce cas, la
balance des capitaux n’est pas forcément nulle.
Si la mobilité des capitaux n’est pas parfaite, les agents ne pouvant ajuster que pro-
gressivement la structure de leur portefeuille au différentiel de taux, en raison par exemple
d’un système de contrôle des changes, mais que les capitaux sont quand même fortement
mobiles, alors BK est assez sensible au différentiel de taux : k > 0 mais pas infini. Un
écart de taux peut alors subsister.
Les marchés financiers étant fortement intégrés, les hypothèses les plus pertinentes
d’un point de vue empirique sont celles de mobilité forte et de mobilité parfaite.
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Ainsi, la création monétaire a deux contreparties. La première, qualifiée de contrepartie
interne, concerne le financement monétaire du déficit public, alors que la seconde représente
les variations de réserves que la banque centrale utilise à des fins externes (intervention
sur le marché des changes).
Ceci s’interprète bien : quand la banque centrale acquiert des devises sur le marché
des changes (∆R > 0), elle émet de la monnaie en contrepartie, ce qui accroı̂t la masse
monétaire nationale. Lorsque, au contraire, elle alimente le marché des changes en devises,
c’est-à-dire quand elle diminue ses réserves de change (∆R < 0), elle récupère de la monnaie
nationale : la masse monétaire, c’est-à-dire la quantité de monnaie nationale détenue par
les résidents, tend à se contracter.
Cependant, cette relation entre flux de devises et masse monétaire n’est pas automa-
tique. La banque centrale a la possibilité de stériliser tout ou partie du flux de devises
acquis sur le marché des changes en agissant sur la contrepartie interne de la masse
monétaire, c’est-à-dire sur Bg . Autrement dit, elle peut limiter l’effet des modifications
de ∆R sur l’offre de monnaie en émettant ou rachetant des titres. On parle de politique
de stérilisation.
En régime de change flexible, la banque centrale n’intervient pas sur le marché des
changes. On a alors ∆R = 0 et on retrouve la contrainte budgétaire de l’État obtenue en
économie fermée : les instruments de politique économique sont donc les mêmes que ceux
étudiés dans la partie précédente.
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Chapitre 2 :
L’étude d’une économie ouverte
en régime de change flexible avec l’extérieur
Nous étudions d’une part le cas d’une petite économie domestique relativement au
reste du monde et d’autre part le cas d’une économie domestique d’influence comparable au
reste du monde. Dans chaque cas, nous étudions tout d’abord les conditions d’équilibre sur
chaque marché, hormis le marché du travail, où les conditions sont triviales : puisqu’il y a
du chômage, l’emploi est donné par la demande de travail, niveau d’emploi qui permet juste
de produire la demande de biens adressée aux entreprises nationales. Nous étudions ensuite
l’équilibre de l’économie ainsi que l’efficacité des politiques économiques et l’influence de
l’extérieur.
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1.1.1 L’équilibre au sens de la demande effective sur le marché des biens
Il y a équilibre sur le marché des biens domestiques, au sens de la demande effective, si la
production domestique Y est égale à la demande de biens domestiques, en supposant que
la demande de biens domestiques inclut maintenant les exportations (demande de biens
nationaux par le reste du monde). La condition d’équilibre est telle que Y s’ajuste à la
demande :
Y = Cn + In + Gn + X
Or, comme on l’a vu lors de la présentation des contraintes budgétaires des agents
nationaux, la consommation totale des ménages résidents C est définie par C = Cn + qCx .
On a de même I = In + qIx et G = Gn + qGx . D’autre part, la quantité de biens
importés est répartie entre les trois composantes de la demande domestique de biens.
Ainsi, les importations peuvent s’écrire IM = Cx + Ix + Gx . On obtient alors la condition
d’équilibre suivante :
Y = C + I + G + X − qIM
La condition d’équilibre sur le marché des biens peut être représentée graphiquement
par une courbe “IS” similaire à celle obtenue en économie fermée, à ceci près qu’elle inclut
maintenant la balance commerciale comme composante de la demande.
La courbe IS est alors définie par la relation :
On remarque que pour des valeurs données du taux d’intérêt et du taux de change,
1
le multiplicateur de dépenses publiques s’écrit 1−C −BC . Il est plus faible que le mul-
Y
1
tiplicateur keynésien élémentaire d’économie fermée 1−C . En effet, quand la production
Pour un niveau donné du taux de change, la courbe IS est définie par une relation
décroissante entre Y et r 4 . La pente de la courbe est différente de celle obtenue en
économie fermée à cause de l’influence de Y sur le solde de la balance commerciale. La
pente est maintenant donnée par :
dr 1 − C − BCY
=
dY I
En valeur absolue, la pente est plus forte que celle obtenue en économie fermée puisque
BCY < 0.
Il faut noter ici qu’une modification de la compétitivité ou du revenu étranger influence
le marché des biens. La courbe IS se déplace vers la droite quand Yx ou q augmente. En
effet, dans ces deux cas, à taux d’intérêt inchangé, le solde de la balance commerciale
s’améliore (par un effet richesse quand Yx augmente et par un effet compétitivité quand q
augmente), ce qui correspond à une augmentation de la demande adressée aux entreprises
nationales. Il faudra alors tenir compte des déplacements de IS suite à une variation du
taux de change q permettant de rétablir l’équilibre extérieur.
4
On pourrait aussi représenter la courbe IS dans le plan (Y, q) pour une valeur donnée de r, par une
courbe croissante.
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r
Excès d’offre
de bien
Excès de
IS
demande de bien
- Y
On retrouve donc la même courbe LM qu’en économie fermée, courbe croissante dans
le plan (Y, r).
r
LM
6
Excès d’offre
de monnaie
Excès de demande
de monnaie
- Y
43
1.1.3. L’équilibre extérieur
Pour qu’il y ait équilibre extérieur, ou équilibre sur le marché des devises, il faut que le
solde de la balance des paiements soit nul. Ceci est assuré par les mouvements du taux
de change puisque l’on est en régime de change flexible.
Ainsi, le taux de change va s’ajuster de manière concurrentielle pour égaliser l’offre de
devises contre monnaie nationale à la demande de devises contre monnaie nationale. Le
solde de la balance globale doit être nul à l’équilibre extérieur :
BC(Y, q, Yx ) + BK(r − rx ) = 0
Pour chaque niveau de taux de change réel, cette équation détermine le couple (Y, r)
qui correspond à l’équilibre sur le marché des changes. Il s’agit de l’équation d’une courbe
croissante dans le plan (Y, r), que l’on appelle EE (pour équilibre extérieur). La pente de
la courbe EE est donnée par :
dr −BCY
= ≥0
dY BK
En effet, à q donné, quand Y augmente, BC diminue. Pour restaurer l’équilibre extérieur,
il faut donc que BK augmente et pour cela que r augmente.
r
EE
6
Excédent
extérieur
Déficit
extérieur
- Y
A droite de la courbe EE, il faudrait un revenu plus faible, à taux d’intérêt donné,
pour qu’il y ait équilibre extérieur. Il y a donc trop d’importations, et il s’agit donc
d’une situation de déficit extérieur. A gauche de la courbe EE, à taux d’intérêt donné,
il faudrait un revenu plus élevé pour retrouver la condition d’équilibre, il n’y a donc pas
assez d’importations, ce qui implique que l’on est en situation d’excédent extérieur. On
peut raisonner aussi à partir du taux d’intérêt : à gauche, le taux d’intérêt est trop élevé,
il y a des entrées de capitaux et donc un excédent de la balance globale.
La pente de la courbe dépend du degré de mobilité des capitaux, mesuré par la sen-
sibilité de BK au différentiel de taux de rendement. Plus la sensibilité de la balance des
capitaux à l’écart de rendement augmente, plus les capitaux sont mobiles et plus la droite
tend vers l’horizontale. En effet, plus les capitaux sont mobiles et plus il suffira d’une
faible variation de r pour restaurer l’équilibre, en cas de modification de Y . On comprend
alors qu’une pente infinie ou forte correspond à une mobilité faible. On considérera alors
une pente suffisamment faible, notamment plus faible que celle de la courbe LM pour avoir
une mobilité des capitaux assez forte.
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crée une situation d’excédent commercial. Pour maintenir l’équilibre extérieur à r donné,
il faut que Y augmente : ainsi, quand q augmente, la courbe EE se déplace vers la droite.
On note aussi que EE se déplace vers la droite quand Yx augmente ou que rx diminue.
r
6
Exc
rx EE
Déf
- Y
Dans ce cas, l’équilibre extérieur se représente par une droite horizontale dans le plan
(Y, r), caractérisée par l’équation r = rx . En effet, le taux d’intérêt domestique ne dépend
plus du tout du revenu domestique, il se fixe au niveau observé dans le reste du monde.
Si le taux d’intérêt étranger augmente, cette droite se déplace vers le haut. On remarque
bien sûr que la droite EE ne dépend plus du taux de change, puisque l’équation de EE est
simplement donnée par : r = rx .
Si l’économie se trouve au dessus de la droite, cela signifie que pour un revenu donné,
il faudrait un taux d’intérêt plus faible pour équilibrer la balance des paiements. Par
conséquent, il entre trop de capitaux : il s’agit d’une situation d’excédent de la balance
globale.
(LM ) M
P = L(Y, r)
(EE) BC (Y, Yx , q) + BK(r − rx ) = 0
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Il s’agit d’un système de trois équations permettant de déterminer les trois variables
endogènes (Y, r et q). L’équilibre est représenté graphiquement à l’intersection des courbes
IS, LM et EE. En effet, les variables endogènes s’ajustent de telle sorte que les trois courbes
soient concourantes.
Pour résoudre l’équilibre, il est pratique de considérer l’équilibre simultané des marchés
de la monnaie, des changes et des titres (noté BB) au lieu du marché du bien. En effet,
l’équilibre extérieur implique BC = −BK, on peut alors réécrire l’équilibre sur le marché
du bien, conditionnellement à l’équilibre extérieur, comme :
soit encore
∆M D ∆M S
Y − T − C(Y − T ) + BK(r − rx ) − = I(r) + G − T −
P P
sachant que ∆M D = ∆M S . Cette équation correspond alors à l’équilibre du marché des
titres, puisqu’elle égalise la demande de titres à l’offre de titres.
Ainsi, les conditions d’équilibre se réécrivent comme :
(BB) Y − T − C(Y − T ) + BK(r − rx ) = I(r) + G − T
(LM ) M
P = L(Y, r)
(EE) BC (Y, Yx , q) + BK(r − rx ) = 0
Quand les capitaux sont parfaitement mobiles : r n’est plus vraiment endogène
puisque, quoi qu’il arrive, on a r = rx , y compris à l’équilibre. Le revenu d’équilibre YE
est alors la valeur du produit compatible avec l’équilibre du marché de la monnaie sachant
que rE = rx . Une fois que l’on connaı̂t YE , on peut déterminer la balance des capitaux
à l’équilibre BKE qui solde le marché des titres nationaux BKE = I(rx ) + (G − T ) −
[(YE − T ) − C(YE )]. On détermine alors le taux de change d’équilibre grâce à l’équation
BC(YE , Yx , q) = −BK(rE , rx ).
(BB) Y = C(Y − T ) + I(r) + G − BK(r − rx )
(LM ) M
P = L(Y, r)
(EE) r = rx
L’équilibre de ce modèle étant déterminé, il est possible d’analyser l’efficacité des poli-
tiques keynésiennes de relance de la demande dans le cadre d’une petite économie ouverte
en régime de change flexible.
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1.3 Effet d’une politique budgétaire financée par émission de titres
L’efficacité de la politique budgétaire sur le revenu national YE , présentée dans le cadre
d’une économie fermée, peut être totalement remise en cause dans le cadre d’une petite
économie ouverte. Plus précisément, elle dépend crucialement du degré de mobilité des
capitaux, comme nous allons le voir.
Quand on ne prend pas en compte l’ouverture de l’économie, une politique budgétaire
expansionniste (augmentation de G) provoque, pour les mêmes raisons que dans IS-LM,
un accroissement du revenu et du taux d’intérêt (déplacement de IS vers IS’, et donc de
l’équilibre E0 vers A). L’effet multiplicateur est cependant réduit relativement au cas
d’économie fermée à cause de la fuite par les importations.
Cependant, le point A, intersection des courbes IS et LM , correspond à une sit-
uation d’équilibre interne, mais pas d’équilibre extérieur. En effet, à taux de change
donné, l’augmentation de Y a dégradé le solde commercial en stimulant les importations.
L’augmentation du taux d’intérêt a entraı̂né, quant à elle, un excédent de la balance des
capitaux, en stimulant les entrées de capitaux, et ceci d’autant plus que les capitaux sont
mobiles.
L’effet total sur la balance globale est alors ambigu. L’ambiguı̈té peut être levée en
remarquant que cela dépend du degré de mobilité des capitaux.
Si les capitaux sont fortement mobiles, l’amélioration de la balance des capitaux suite
à l’augmentation du taux d’intérêt risque d’être supérieure à la dégradation de la balance
commerciale suite à l’augmentation du revenu Y . Ainsi, le point A (sur le graphique
ci-dessous, celui-ci illustrant un cas de forte mobilité des capitaux) correspond alors à
un excédent de balance globale, soit encore un excès d’offre de devises contre monnaie
nationale. La monnaie nationale va alors s’apprécier (e diminue, ce qui implique un
déplacement vers la gauche des courbes IS’ et EE). Ceci déprime la balance commerciale,
ce qui permet de rétablir l’équilibre extérieur (en réduisant le revenu Y ). On atteint alors
l’équilibre E1 .
Dans ce cas de forte mobilité des capitaux, la politique budgétaire conduit à une faible
augmentation du revenu national YE puisque le rééquilibrage du marché des changes passe
par une appréciation de la monnaie nationale, qui dégrade la balance commerciale5 .
r
6 IS’
IS”
IS LM
EE’
A
EE
r1 . .. . .. .. . .. . .. .. . .. .. . .. .E ...1
.
r0 . .. . .. .. . .. . .. .. . .. .. . .. ...
.. ..
E...0 ...
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. .. -Y
Y0 Y1
5
Dans le cas de faible mobilité des capitaux, l’efficacité de la politique serait accrue relativement au cas
d’économie fermée, et ceci grâce à la dépréciation de la monnaie nationale suite au déficit de la balance
globale (diminution plus importante de la balance commerciale que l’augmentation de la balance des
capitaux.
47
A l’extrême, quand les capitaux sont parfaitement mobiles, la parité des taux d’intérêt
implique que le taux d’intérêt ne va pas différer de rx . La courbe EE est horizontale et ne
se déplace pas puisque le taux d’intérêt étranger ne varie pas. Dans ce cas, la politique est
inefficace sur YE . En effet, l’excédent de balance globale provoque une telle appréciation de
la monnaie nationale, et donc une telle réduction de la compétitivité que l’accroissement
des dépenses publiques est totalement inefficace sur YE . L’effet d’éviction est total et
l’économie revient au point initial E0 , suite à l’appréciation de la monnaie nationale.
r
6 IS’
IS dG LM
de A
E0
r0 .. EE
..
..
..
..
..
..
..
..
. -Y
Y0
L’effet de la politique budgétaire peut être quantifié. Les multiplicateurs obtenus sont
donnés par :
dG
dYE =
1− C + I −BK
L LY
r
L dG
drE = − Y
Lr 1 − C + I −BK
L LY
r
BCY dY + BK dr
dqE = −
BCq
Quand les capitaux sont fortement, voire parfaitement mobiles, les variations des variables
endogènes sont telles que : dYE ≥ 0, drE ≥ 0, dqE ≤ 0.
Ainsi, en change flexible, la politique budgétaire est d’autant moins efficace sur YE que
les capitaux sont mobiles (que BK est élevé), et conduit à une appréciation de la monnaie
nationale et à une dégradation de la balance commerciale d’autant plus importantes que
les capitaux sont fortement mobiles.
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(interne) se situe au point A, à l’intersection de IS et LM’. Cependant, cet équilibre interne
correspond à un déficit de la balance globale : en effet, l’augmentation de Y , en stimulant
les importations, dégrade le solde commercial, et la diminution de r, en provoquant une
fuite des capitaux vers l’étranger, dégrade aussi la balance globale. Ainsi, le point A
correspond à un excès de demande de devises contre monnaie nationale. La monnaie
nationale tend donc à se déprécier (e augmente), ce qui provoque un effet compétitivité
favorable : déplacement de IS et de EE vers la droite, jusqu’au nouvel équilibre E1 . La
politique monétaire d’open market est donc plus efficace sur YE qu’en économie fermée,
car elle implique un effet compétitivité favorable (dépréciation de la monnaie nationale),
qui stimule le solde commercial.
r
6
IS’ EE EE’
IS
LM
LM’
r0 ........... E0 ...... ..
.. A ... E1
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. .. -Y
Y0 Y1
En outre, plus les capitaux sont mobiles et plus la politique monétaire est efficace sur
YE car plus grande sera la dépréciation nécessaire pour ajuster la balance globale (et donc
plus grands seront les déplacements à droite des courbes IS et EE).
r
6
IS’
IS
LM
LM’
E0 E1
r∗ .....
..
..
.. EE
.. ..
.. .
.. A ...
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
. . -Y
Y0 Y1
Les effets de la politique monétaire peuvent être quantifiés. Les multiplicateurs sont
donnés par :
dM
P
dYE = (1−C )Lr
>0
I −BK + LY
1 (1 − C ) dM
drE =
P
≤0
Lr 1 − C + I −BK
L L
Y r
BCY dY + BK dr
dqE = − ≥0
BCq
49
1.5. L’influence de l’extérieur
Les variables extérieures étant exogènes, nous pouvons étudier une variation de celles-ci
sur l’économie domestique, correspondant aux conséquences de chocs extérieurs sur la
petite économie ouverte considérée.
Comme nous l’avons déjà dit, en régime de change flexible, le niveau de la production
de l’étranger n’exerce aucune influence sur la conjoncture interne. En effet, la hausse du
revenu étranger stimule les exportations et donc la demande de bien domestique. Elle
implique alors une amélioration de la balance globale. Mais cette tendance suscite une
appréciation de la monnaie nationale et donc une diminution de la compétitivité du bien
domestique qui annule tous les effets positifs sur le revenu national.
On note que la même propriété vaut pour le prix étranger (on peut en effet vérifier que
le revenu d’équilibre ne dépend ni de Yx ni de Px ). Toute variation de Px est compensée
par une variation proportionnelle (inverse) de e, laissant invariant le taux de change réel, et
plus généralement l’état de l’économie nationale. Cette propriété est l’une des principales
vertus avancées par les défenseurs du régime de change flexible.
Mais, cette propriété doit être relativisée et c’est bien l’un des points qui explique
qu’une baisse des taux d’intérêt américains ait des conséquences sur les autres pays. En
effet, le taux d’intérêt étranger influence la conjoncture nationale (YE dépend de rx ).
Sa diminution tend à favoriser la balance des capitaux, ce qui suscite une appréciation
de la monnaie nationale (e diminue) et donc une diminution de la demande nationale.
On a alors une diminution du produit domestique. Ainsi, une relance étrangère de type
monétaire exerce, par le biais de la baisse du taux d’intérêt étranger, un effet défavorable
sur l’économie nationale, dû à la perte de compétitivité du bien national.
50
La détermination de l’équilibre consiste à résoudre simultanément l’équilibre sur tous
les marchés domestiques et étrangers (IS et ISx LM et LMx ainsi que EE), afin de
déterminer Y, Yx , r, rx , q :
IS : Y = C(Y − T ) + I(r) + G + BC(Y, Yx , q)
IS x : Yx = C(Yx − Tx ) + I(rx ) + Gx − BC(Y, Yx , q)
LM : M/P = L(Y, r)
LMx : Mx /Px = L(Yx , rx )
EE : BC(Y, Yx , q) + BK(r − rx )
Nous ne présenterons pas la détermination de l’équilibre des deux économies. Nous nous
contenterons d’étudier en quoi l’efficacité des politiques économiques de relance de la
demande est modifiée quand on suppose que les deux pays sont d’influence comparable
plutôt que de supposer que l’économie domestique est petite relativement au reste du
monde.
51
Conclusion
En régime de change flexible, quand l’économie domestique est petite relativement au
reste du monde, la politique budgétaire est peu efficace sur le revenu quand les capitaux
sont fortement mobiles, et elle est d’autant moins efficace que les capitaux sont fortement
mobiles car la monnaie nationale s’apprécie d’autant plus. En revanche, la politique
monétaire conduit à augmenter le revenu national, et cela d’autant plus que les capitaux
sont mobiles car cela conduit à une dépréciation de la monnaie nationale. L’extérieur
influence l’économie nationale via ses modifications de taux d’intérêt : une baisse des taux
d’intérêt à l’étranger réduit le revenu national.
Quand l’économie domestique est en régime de change flexible avec une économie
d’influence comparable, l’efficacité de la politique budgétaire est accrue, car la politique
budgétaire nationale profite à l’économie étrangère, et cela rétroagit sur l’économie na-
tionale. En revanche, la politique monétaire peut devenir inefficace sur le revenu domes-
tique, car l’effet sur l’économie étrangère est négatif, ce qui implique un effet de rétroaction
négatif sur l’économie nationale, qui peut annuler l’effet positif initial.
52
Chapitre 3 :
L’étude d’une petite économie ouverte
en régime de change fixe
Nous étudions le cas d’une économie ouverte en situation de change fixe avec l’extérieur.
Dans ce cadre, les pays se sont engagés à maintenir à une valeur qu’ils se sont fixés (par
un accord) la parité de leur monnaie, par exemple pour se prémunir contre les variations
de changes. Ainsi, le taux de change étant fixe, il ne peut plus s’ajuster pour équilibrer
l’offre à la demande de devises contre monnaie nationale, et ce sont les banques centrales
des pays qui doivent intervenir sur le marché des changes en cas de déséquilibre sur celui-ci
afin de maintenir fixe le taux de change. Pour cela, elles doivent constituer des réserves
de devises afin d’en offrir (contre de la monnaie nationale) en cas d’excès de demande de
devises contre monnaie nationale sur le marché des changes. Ce sont les interventions des
banques centrales au travers de ces réserves de devises qui vont assurer l’équilibre sur le
marché extérieur. Autrement dit, le taux de change n’est plus endogène, mais exogène, et
ce sont les réserves de devises qui sont endogènes. Or, comme nous l’avons vu, les réserves
de devises constituent une contrepartie de l’offre de monnaie. Celle-ci varie (sauf en cas de
stérilisation) quand les réserves de devises varient. Ainsi, c’est l’offre de monnaie nationale
qui devient endogène en régime de change fixe. Par exemple, lorsqu’un déficit extérieur
apparaı̂t, il y a alors excès de demandes de devises contre monnaie nationale, la banque
centrale va devoir offrir des devises contre de la monnaie nationale, ce qui va correspondre
à une restriction de son offre de monnaie nationale. Ainsi, l’offre de monnaie répondant
aux ajustements du marché des changes, n’est plus un instrument de politique interne. La
politique monétaire ne peut plus servir à relancer l’économie nationale. Dans ce cadre,
toute l’importance est donnée à la politique budgétaire.
Ce chapitre étudie la détermination de l’équilibre pour une petite économie en régime
de change fixe avec le reste du monde. Nous étudions dans ce cadre l’efficacité des poli-
tiques de relance de la demande, ainsi qu’une politique décidée de changement de la valeur
du taux de change.
Y = Cn + In + Gn + X
53
soit encore :
Y = C(Y − T ) + I(r) + G + BC(Y, Yx , q)
Ainsi, la courbe IS est la même que celle obtenue en régime de change flexible.
Une modification décidée du taux de change q ou une variation exogène du revenu
étranger Yx influence le marché des biens, en déplaçant la courbe IS (déplacement vers la
droite en cas de hausse de q ou de Yx ).
BC(Y, Yx , q) + BK(r − rx ) = 0
54
r
EE
6
Excédent
extérieur
Déficit
extérieur
- Y
55
2 Effet d’une politique budgétaire financée par émission de
titres
Quand on ne prend pas en compte l’ouverture de l’économie, une politique budgétaire
expansionniste conduit à une augmentation du revenu domestique et du taux d’intérêt
domestique, comme dans le modèle IS-LM d’économie fermée. L’effet multiplicateur est
cependant réduit relativement au cas d’économie fermée à cause de la fuite par les impor-
tations. La courbe IS se déplace vers la droite, et le point d’intersection entre la courbe
LM et la nouvelle courbe IS correspond, soit à un déficit de la balance globale (excès de
demande de devises) si les capitaux sont peu mobiles, soit à un excédent (excès d’offre de
devises) si ils sont très mobiles (même raisonnement qu’en change flexible).
Si les capitaux sont fortement mobiles (cas de la représentation graphique ci-dessous),
la banque centrale va alors demander des devises (∆R > 0), afin de restaurer l’équilibre
sur le marché des changes. Cette augmentation des réserves de devises vient accroı̂tre la
masse monétaire (déplacement de LM vers la droite), ce qui provoque une augmentation
du produit national. La politique budgétaire conduit alors à une augmentation du revenu
supérieure au cas d’économie fermée.
6
IS 3
LM
A R
EE
r1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . E0 . . . . . . . . . . . . .
r0 .. .. . .. . .. .. . .. . .. .. . .. ... E.1
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. ..
.. .. -
. Y
Y0 Y1
56
viennent financer partiellement la relance et atténuer la tension sur le marché des titres
domestiques.
r
6 IS LM
R LM’
I
E0 EE
r0 ....................
..
.. A
..
..
..
..
..
.. - Y
.
Y0
Les autorités monétaires perdent donc, en régime de change fixe, leur autonomie quant
à la politique monétaire. En effet, les variations de l’offre de monnaie sont un instrument
de politique extérieure.
MS ∆B̄g M0 ∆B̃g ∆R
=G−T − + − +
P P P P P
Il est alors clair que le gouvernement peut neutraliser, au moins temporairement, les
conséquences d’un accroissement des réserves de change en augmentant d’autant son
émission de titres, c’est-à-dire en réduisant le financement monétaire du déficit budgétaire.
Plus précisément, le gouvernement peut adopter la règle :
∆B̃g ∆R
=λ 0<λ<1
P P
57
de sorte que sa contrainte s’écrit :
MS ∆B̄g M0 ∆R
= G−T − + + (1 − λ)
P P P P
4 Politique de dévaluation
L’existence d’un système de change fixe n’exclut pas la possibilité de changements occa-
sionnels des parités, c’est-à-dire de la valeur du taux de change. En effet, lorsque le déficit
global est chronique, ou que le gouvernement décide de stériliser complètement ses réserves
de change, la situation n’est pas tenable et le gouvernement peut être amené à changer
son taux de change, c’est-à-dire en l’occurrence à dévaluer sa monnaie.
La dévaluation équivaut à une augmentation du taux de change réel, puisque les prix
du bien domestique et du bien étranger sont fixes. Ceci accroı̂t la compétitivité du bien
national, stimule les exportations et réduit les importations. Cette augmentation de la
balance commerciale correspond à une relance de la demande de bien domestique (la
courbe IS se déplace vers la droite). Dans le même temps, puisque la hausse de q améliore
la balance commerciale, EE se déplace vers la droite.
En partant d’une situation de déficit de la balance globale, il se peut que la dévaluation
permette de résorber le déficit et de restaurer l’équilibre extérieur, en ayant conduit à une
hausse du revenu national.
Il se peut aussi que la dévaluation soit telle qu’elle conduise à un excédent de la
balance globale (cas de la représentation graphique ci-dessous). L’intersection entre IS’ et
58
LM (point A ) correspond à un excès d’offre de devises, puisque A se situe au dessus de
la courbe EE’. La banque centrale va acheter des devises contre de la monnaie nationale,
ce qui va augmenter la quantité de monnaie en circulation. L’augmentation de l’offre de
monnaie (déplacement de LM vers la droite) va se traduire à la fois par une augmentation
du revenu et par une baisse du taux d’intérêt, jusqu’à ce que BC et BK aient suffisamment
diminué pour rétablir l’équilibre extérieur.
r
6 IS’ EE
IS
* EE’
s
LM
A’
LM’
A
E
- Y
5 L’influence de l’extérieur
Une augmentation du revenu étranger Yx augmente la production et le taux d’intérêt
domestiques en régime de change fixe, alors qu’elle n’avait aucun effet en change flexible.
En effet, quand le revenu étranger augmente, la balance commerciale nationale est
stimulée puisque l’économie étrangère va importer davantage de biens nationaux. Graphique-
ment, les courbes IS et EE glissent vers la droite. L’équilibre interne atteint correspond à
un excédent de la balance globale, ou à un excès d’offre de devises. La banque centrale va
alors demander des devises contre de la monnaie nationale, ce qui accroı̂t ses réserves et
donc son offre de monnaie. La courbe LM se déplace vers la droite, conduisant à augmenter
le revenu national.
Au total, la production nationale augmente, grâce à l’intervention de la banque centrale
et le taux d’intérêt diminue.
59
r
EE
6 IS’ EE’
LM
IS
LM’
E0 A
E1
- Y
Une diminution du taux d’intérêt étranger rx a des effets positifs sur l’économie na-
tionale en régime de change fixe, alors que ceux-ci étaient négatifs en régime de change
flexible.
Ceci résulte du fait que la tendance initiale à l’augmentation de la balance globale, loin
d’être corrigée par une appréciation de la monnaie nationale comme en change flexible,
implique ici une augmentation des réserves de change et donc à une expansion de la masse
monétaire, qui réduit le taux d’intérêt domestique. Il en résulte une augmentation de la
production et une diminution du taux d’intérêt.
C’est dans cette optique qu’ont été interprétés, par exemple, les effets récessifs de la
politique de hauts taux d’intérêt menée au sein du SME par la Bundesbank.
r
6 LM
IS ..
.....
... . EE
... ...............
.
.............
.. ..
-Y
Conclusion
Alors que la politique budgétaire était peu efficace en régime de change flexible, dans
le cas d’une petite économie ouverte quand les capitaux sont fortement mobiles, elle est
très efficace en régime de change fixe, car les interventions de la banque centrale afin de
rééquilibrer le marché des changes correspondent à une expansion monétaire.
En revanche, les autorités monétaires perdent l’instrument monétaire pour réguler leur
économie en change fixe.
L’économie domestique est influencée par l’extérieur, de manière positive quand le
revenu étranger augmente, mais de manière négative si les taux d’intérêts étrangers aug-
mentent.
60
Chapitre 4 :
Le cas de deux pays en Union Monétaire
Douze pays6 de l’Union Européenne ont constitué en janvier 1999 une Union Economique
et Monétaire, décidant alors d’adopter une monnaie unique, l’Euro et de déléguer la poli-
tique monétaire à une institution communautaire nouvelle et indépendante, la Banque
centrale européenne (BCE). En adoptant l’euro, les pays européens ont choisi un système
de change un peu particulier : les taux de change entre les monnaies des différents pays
de la zone euro sont fixés à des taux irrémédiablement fixes (pas de possibilité de changer
le cours des monnaies). Dans le même temps, l’euro est en situation de change flexible
vis-à-vis de l’ensemble des monnaies extérieures à la zone euro.
L’intérêt d’un tel système de change est qu’il élimine les transactions de change, et
permet au fonctionnement de l’économie de gagner en efficacité. En effet, les entreprises
n’ont plus besoin, lors de leurs échanges avec les pays de la zone euro, de prendre en
compte les fluctuations potentielles du taux de change (celui-ci n’existant plus). Dans le
cas de l’Europe, il poursuit l’œuvre du système monétaire européen (SME) et complète
le marché unique. Une conséquence importante de la création de l’euro est qu’il n’y a
plus de contrainte extérieure entre les pays participant à la zone euro. Les déséquilibres
commerciaux bilatéraux ont alors aussi peu de conséquences macroéconomiques qu’un
déséquilibre entre deux parties d’un Etat fédéral. Cependant, un tel système implique un
partage particulier des décisions politiques, entre la banque centrale commune qui gère
la politique monétaire, et les différents gouvernements des pays européens qui gèrent leur
politique budgétaire. En effet, en adoptant l’euro, chaque pays abandonne alors de fait
sa souveraineté monétaire au profit d’une souveraineté commune, et l’UEM donne aux
politiques économiques nationales, c’est-à-dire aux politiques budgétaires et fiscales, un
rôle essentiel : elles constituent en effet le seul levier dont disposent les Etats membres
pour faire face, d’une manière différenciée et décentralisée, à des chocs asymétriques (chocs
qui influencent positivement certains pays et négativement d’autres) et persistants (dont
les conséquences sont durables).
Il est alors essentiel, dans ce cadre, d’étudier les conséquences d’une politique budgétaire
mise en place dans un pays de la zone sur les autres pays. On peut se demander si la zone
euro ne doit pas adopter une stratégie concertée en matière de politique budgétaire, voire
même un budget européen de taille conséquente qui gérerait les fluctuations économiques
en parallèle à l’action centralisée de la Banque centrale européenne.
6
En 1999, 11 pays membres de l’Union Européenne forment l’Union Economique et Monétaire. Il s’agit
de l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Italie, l’Irlande, le Luxembourg,
les Pays-Bas, le Portugal. La Grèce ne remplissait alors pas les critères de Maastricht pour intégrer la
zone euro le 1er janvier 1999. Elle a donc intégré la zone euro plus tard, en 2001. Le traité de Masstricht
établit cinq critères que les Etats membres de l’Union Européenne doivent respecter pour pouvoir rejoindre
l’Union Economique et Monétaire (dite aussi zone euro). Ces critères concernent le taux d’inflation (qui
doit être au maximum supérieur de 1.5% à la moyenne des trois meilleures performances), le taux d’intérêt
à long terme (qui doit être au maximum supérieur de 2% à la moyenne des trois taux les plus faibles), le
déficit budgétaire (qui doit être inférieur à 3% du PIB), la dette publique (qui doit être inférieure à 60%
du PIB) et l’appartenance au mécanisme de change européen (monnaie contenue depuis plus de 2 ans, et
sans dévaluation, dans la bande étroite du SME).
61
1 Le cadre d’analyse en Union Monétaire
Nous supposons pour simplifier que le modèle ne comprend que deux pays, qui sont en
union monétaire, au sens où ils ont adopté une monnaie commune. Celle-ci est gérée
par une Banque centrale supranationale, qui fixe le montant du stock de monnaie. Ce
stock de monnaie se partage entre les deux pays, en fonction de leur demande respec-
tive d’encaisses réelles. Chaque pays conserve en revanche sa souveraineté en matière de
politique budgétaire.
Nous supposons que les seuls échanges internationaux existants ont lieu entre les deux
pays de l’union, et par conséquent, nous avons toujours que BCx = −BC.
Le système à résoudre pour déterminer l’équilibre macroéconomique de l’union monétaire
devient :
IS : Y = C(Y − T ) + I(r) + G + BC(Y, Yx )
ISx : Yx = C(Yx − Tx ) + I(rx ) + Gx − BC(Y, Yx )
LM : M/P = L(Y, r)
LMx : Mx /Px = L(Yx , r)
Mu = M + Mx
Etant en union monétaire, le taux de change disparaı̂t complètement de l’analyse. On
suppose de plus que les capitaux sont parfaitement mobiles au sein de l’union et comme
il n’y a qu’une seule monnaie, il n’y a qu’un seul taux d’intérêt. La dernière équation du
système caractérise l’union monétaire, en indiquant que l’offre de monnaie commune Mu
émise par la banque centrale supranationale, se partage entre les deux pays de l’union.
Nous avons donc un système de cinq équations à cinq inconnues : Y, Yx , M, Mx , r.
Les effets d’une modification de la situation d’un pays auront des implications sur
l’autre pays, via d’une part la balance commerciale, et d’autre part la quantité de monnaie
disponible pour l’autre pays (fonction de la demande du premier).
Nous avons considéré un modèle comportant uniquement deux pays en union monétaire,
mais pour comprendre l’efficacité de la politique monétaire sur les pays de la zone, il faut
aussi prendre en compte le fait que les pays de la zone sont en change flexible avec les
autres pays extérieurs à la zone. Il faut alors voir si l’effet positif n’est pas annulé par
la prise en compte des échanges entre l’Europe et les Etats-Unis. Il s’agit alors de re-
considérer l’efficacité de la politique monétaire dans le cadre d’un modèle à deux pays
en régime de change flexible, le premier pays étant la zone euro dans son ensemble (qui
62
répartira ensuite les effets de la politique équitablement entre les pays de la zone) et l’autre
pays étant l’extérieur de la zone euro (par exemple les Etats-Unis).
Comme on l’a vu dans le chapitre sur le taux de change flexible, la politique monétaire
conduit à des effets de rétroaction ambigus, qui peuvent annuler l’efficacité de la politique
monétaire pour celui qui la mène. Ainsi, il n’est pas évident qu’une politique monétaire
menée en Europe ait des effets positifs sur les pays européens.
De plus, une politique monétaire supranationale ne peut agir différemment sur chaque
pays. Ainsi, il importe de considérer ce qui se passe lors de chocs asymétriques dans
la zone euro, c’est-à-dire si certains pays subissent un choc négatif (qui requière une
politique expansionniste) alors que d’autres subissent un choc positif (qui requière plutôt
une politique modérée, prudente). C’est alors aux politiques budgétaires nationales, à la
charge de chaque pays, d’agir en fonction de chaque situation.
63
A et négativement B, les facteurs de production se déplacent du pays B vers le pays A, le
déséquilibre va se résorber.
La mobilité des facteurs de production à l’intérieur d’une zone est le principal critère
théorique (défini par Mundell) permettant de définir une zone comme une zone monétaire
optimale, c’est-à-dire qu’il est préférable pour elle d’être en union monétaire qu’en change
flexible. Un autre critère est qu’elle soit suffisamment intégrée, c’est-à-dire qu’elle fasse
davantage d’échanges commerciaux à l’intérieur de la zone que vis-à-vis de l’extérieur.
Dans ce cas, étant moins sujette aux variations du taux de change vis-à-vis de l’extérieur
puisque commerçant moins avec l’extérieur, il est préférable qu’elle soit en union monétaire
qu’en change flexible. Un dernier critère est celui de préférences homogènes : plus les
préférences, en termes de politique économique notamment, sont proches entre les pays
d’une zone et plus il est optimal pour eux de former une union monétaire.
Les niveaux de développement des différents pays constituant la zone euro sont encore
assez inégaux, ce qui engendre certainement une asymétrie des chocs perçus par ces pays
(problème de convergence en termes réels). Il est aussi parfois avancé que l’absence d’une
union politique suffisante occasionne elle-même des chocs asymétriques. La mobilité du
capital physique est en Europe assez satisfaisante, car on peut observer qu’avec le temps,
les investissements sont bien réalisés dans les régions où ils sont les plus productifs. La
mobilité du travail paraı̂t cependant moins forte. Si l’adoption d’une même monnaie
facilite certainement la mobilité de la main d’œuvre (moins de problèmes de transferts
de revenus d’une région à l’autre), il existe toujours certaines barrières, telle la langue ou
encore les systèmes de protection sociale qui sont très différents.
Au regard des critères définis par Mundell, la zone euro n’est sans doute pas une zone
monétaire optimale. Cependant, ces critères ne doivent sans doute pas être interprétés de
manière trop stricte. L’adoption d’une zone monétaire optimale ne résulte pas uniquement
de critères économiques, mais bien aussi de critères historiques et politiques.
64