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CM Analyse – Semestre 4 – Le Bihan

Quelle visée pour l’analyse « catégorielle » d’œuvres ? Pourquoi


faire ça ? Quand ?
1. L’analyse d’un corpus de films
2. L’analyse d’un film tel qu’affilié à un corpus
Qu’est-ce qu’un corpus ? C’est la totalité des documents ou
œuvres d’une catégorie (catégorie ou sous catégorie), donnée ou
construite en vue de son étude. En gros soit la catégorie préexiste
(ex Film noir), soit on est dans une démarche de recherches et on
cherche à construire une nouvelle catégorie/un corpus.
Quels types de corpus ? On peut distinguer les corpus poétiques et
les corpus pragmatiques.
• Les corpus poétiques sont constitués via l’affiliation de films
ressemblants. S’il y a ressemblance c’est qu’il y a un objet
qui existe et qu’on va s’intéresse à lui avant tout.
• Les corpus pragmatiques sont constitués par
rassemblements d’œuvres relevant des mêmes conditions
de production et/ou modalité de réception. (ex films
produits par un même studio sur une période déterminée). Ils
sont élaborés de l’extérieur des films.
Pour ce cours, on adoptera une perspective poétique et non
pragmatique. (Pragmatique cf Le genre filmique. Cinéma,
télévision, internet – Chloé Delaporte)
De manière générale, on se souviendra qu’une catégorie peut
s’inventer à partir de critères soit poétiques soit pragmatiques, mais
ne pourra véritablement s’instituer que dans la conjonction d’une
poétique semblable et de conditions pragmatiques communes.
Quels types de catégories pour l’analyse filmique ?
I. Les genres : Les genres désignent des films relevant d’une
même formule scénaristique et/ou fictionnelle ;
II. Les styles : Les styles désignent des films relevant d’une
même forme esthétique
III. Les auteurs : Les auteurs désignent des instances qui
garantissent des effets de communauté entre des films qui leur
sont attribués. Ne pas automatiquement mettre un nom
derrière le mot « auteur », ici avant tout une instance dans un
sens abstrait.

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A. Qu’est-ce qu’un genre ?
Si les genres désignent des films relevant d’une même formule
scénaristique et/ou fictionnelle, on peut encore penser cette
catégorie selon deux perspectives poétiques opposées. Le terme de
genre peut désigner théoriquement :
a) Un ensemble de films partageant un « air de famille »
(Ludwig Wittgenstein)
Le genre, au sens large de « l’air de famille », est constitué par le
repérage pratique de ressemblances :
- Immanentes
- Multiples
- « Asymétriques »

« Immanent » : ce qui émane de la concrétude des choses ; le


transcendant vient du ciel des idées, tombe sur le réel, de l’ordre de
la métaphysique.
Wittgenstein : « Il y a la tendance à chercher qqch de commun à
toutes les entités que nous subsumons communément sous un
terme général. Nous avons tendance à penser qu’il doit par ex y
avoir qqch de commun à tous les jeux, et que cette propriété
commune justifie que nous appliquions ce terme commun à tous
les jeux, alors qu’en fait les jeux forment une famille dont les
membres ont des ressemblances de famille. Certains d’entre eux
ont le même nez, d’autres les mêmes sourcils, et d’autres encore la
même démarche ; et ces ressemblances se chevauchent. L’idée
qu’un concept général est une propriété commune à ses cas
particuliers se rattache à d’autres idées primitives et trop simples
sur la structure du langage. » (Ludwig Wittgenstein, Cahier bleu,
1958)
b) Un ensemble de films affiliés à un même « architexte »
(Gérard Genette)
Le genre, au sens restreint de l’architexte, est issu de l’élaboration
théorique d’un modèle transcendant. « Immanent » : ce qui
émane de la concrétude des choses ; le transcendant vient du ciel
des idées, tombe sur le réel, de l’ordre de la métaphysique.
L’architextualité « Le texte (ne) m’intéresse (que) par sa
transcendance textuelle, savoir qui la met en relation manifeste ou
secrète avec d’autres textes. J’appelle celui la transtextualité, et j’y
englobe l’intertextualité au sens strict (…) J’y mets cette relation
d’inclusion qui unit chaque texte aux divers types de discours
auxquels il ressortit. (Gérard Genette, Introduction à l’architexte,

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1979) : Il y aurait un modèle enseveli de texte, modèle qui ne se
traduit pas dans te ou tel film mais que l’ensemble des films
relevant d’un même genre, partageraient, seraient inclus dans
cet architexte, auraient en commun un modèle.

Ces deux manières d’envisager le genre rejoignent la manière dont


Rick Altman distingue deux manières de constituer les corpus
génériques, dans un texte intitulé « A semantic/syntactic approach
to film genre. » Il y a ajouté l’approche pragmatique. Rick Altman
différencie :
➢ Les genres sémantiques : désignent des ensembles de films
qui partagent des traits communs en termes de contenus
stéréo typiques ; cf Wittgenstein ; (types de personnages,
types de mondes fictionnels voire de décors, traits stylistiques
etc.)
➢ Les genres syntaxiques : désignent des ensembles de films
qui partagent essentiellement une même structure, un
même modèle, donc potentiellement d’architexte ; (un
même schéma narratif, un même schéma actanciel, une même
structure dramatique), autrement dit une « syntaxe ».
Selon Rick Altman encore, les genres sémantiques étant trop
inclusifs et les genres syntaxiques trop exclusifs, l’invention d’un
genre au sens fort, cad sémantico-syntaxique, dépendra :
1. D’une limitation du répertoire sémantique
2. D’une stabilisation de la structure syntaxique

Début Star Wars IV – Lucas – 1977 // 8 :30à 18 :52


On a pu qualifier SW de « Western galactique » : peut-on
qualifier SW de Western galactique ?
Selon une approche pragmatique, cet effet d’étiquetage du film
comme western galactique n’est pas encouragé par le paratexte
(Genette), et notamment l’affiche du film. Dans ce cas de figure,
une analyse catégorielle de perspective poétique permettra de
mieux comprendre le cadre générique le plus adéquat pour ce film.

B. Pour une méthodologie de l’analyse générique


L’analyse générique vise en premier lieu à identifier l’affiliation
générique principale du film et en second lieu à évaluer les
variations introduites vis-à-vis du cadre générique.
1) L’identification de l’affiliation générique principale
Elle suppose d’une part un repérage des signaux sémantiques qui,
corrélés au sein de structures syntaxiques, constitueront le cadre

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générique du film.
Le repérage de signaux sémantiques étant a priori plus simple que
la reconnaissance de structures syntaxiques, on procédera dans un
premier temps à une analyse sémantique (ou iconographique).
a) L’analyse sémantique (ou iconographique)
Elle portera dans un premier temps et de manière privilégiée sur les
scènes dites d’exposition, parce que ces amorces des films
configurent d’une part :
- Le cadre général (Jessie Martin) du film, lui-même établit sur
la base
- D’un cadre générique (l’architexte, au sens de Genette)
L’analyse iconographique des scènes d’exposition est d’autant plus
importante que la réception générique des films est très sensible à
ce que les psychologues cognitivistes nomment
- L’effet de primauté : il désigne un biais cognitif selon lequel
une première impression ou information reçue détermine
fortement la compréhension d’une situation en cours de
développement.
- L’effet de récence : il désigne un biais cognitif selon lequel les
dernières impressions ou informations reçues dans un
développement d’une situation seront mieux mémorisées.
David Bordwell : une interprétation doit manifester que son
champ sémantique est pertinent vis-à-vis de l’ouverture d’un film ;
l’interprétation prolonge la compréhension, car début texte = effet
de primauté des normes intrinsèques auxquelles seront
confrontés les dvlpts ultérieurs (Making Meaning, 1989) : on va
chercher dans les films des choses qui font cohérence avec le
début.
Analyse iconographique du début de SW IV (champ
iconographique) :
Planète à 2001 L’Odyssée de l’espace ; C3PO à Metropolis ; Dark
Vador à Samouraï ; Coiffure Leia à iconographie du Moyen Âge
occidental ; Tenue empireà tenues allemandes du régime nazi :
grand mélange des genres
La 1 scène d’exposition présente une profusion de signaux
ère

sémantiques organisés en structures qui renvoient à


l’iconographie :
- En termes de décors, de situations narratives, d’univers
fictionnel, aussi bien à la science fiction qu’au film de guerre
- En termes de personnages à des archétypes qui relèvent soit
• du genre cinématographique de la science fiction (2001,

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Metropolis)
• d’archétypes issus de l’imaginaire du Moyen Age
occidental et oriental mais encore de l’imaginaire attaché
à la 2GM
Extrait : film de John Ford, scène de La Prisonnière du désert,
1956 : Parallèle avec SW famille massacrée par un groupe
extérieur

b) L’analyse syntaxique
L’analyse générique syntaxique consiste à identifier,
- A l’échelle du film, le cadre générique (l’architexte) sur la
base duquel le cadre général s’élabore.
- A l’échelle des scènes, la scène « archétypique » sur la base
de laquelle le cadre situationnel (ou scénique) s’élabore.
Rappel (-Jessie Martin) :
- Le cadre général désigne les règles fictionnelles, esthétiques
et narratives telles que posées par le film
- Le cadre situationnel (ou scénique) désigne une
cristallisation reconnaissable : d’un environnement, d’une
situation narrative et d’une configuration filmique
Le cadre générale désigne donc la norme fictionnelle, narrative
et poétique gouvernant l’ensemble (ou une partie conséquente)
du film. Il est en règle générale déterminé dès les scènes
d’exposition du film (ou de telle partie, acte).
C’est à partir de ces scènes d’exposition que se déclenche :
- De manière générale, l’immersion fictionnelle
- De manière spécifique, l’induction sémantique (générique) (-
Christian Metz)
La scène de SW où R2D2 s’engage dans ce défilé rocheux :
- Un personnage de science fiction, cad un signal sémantique
- Dans une scène de western, cad une structure syntaxique
De manière générale dans le cas de SW, l’induction sémantique est
parasitée car :
- Les signaux sémantiques proviennent d’iconographie
culturelles très diverses (« nazi »/Moyen âge)
- Et se mélangent dans des cadres scéniques a priori référés à
différents genres (film de science fiction, film de guerre,
western)
Au delà de cet exemple-limite, beaucoup de films jouent de telles
hybridations génériques. Afin d’identifier leur affiliation
générique, il nous faudra donc adopter une méthode qui permettre
de trier et de hiérarchiser les signaux génériques pertinents via une

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analyse sémantico-syntaxique.
c) L’analyse sémantico-syntaxique
On cherchera à trier les signaux sémantiques de manière à
identifier une pertinence entre certains signaux et tel cadre
générique ou scène archétypique.
Lorsque plusieurs cadres génériques sont en concurrence, on
cherchera à trier entre :
1. Les signaux sémantiques prégnants : Ils réfèrent à un
architexte générique ou à un ensemble cohérent d’intertextes
et s’associent avec d’autres signaux sémantiques cohérents
dans des structures syntaxiques (scène, acte, film)

2. Les signaux sémantiques sous-jacents : Ils se manifestent


uniquement à l’échelle d’un cadre situationnel ou scénique (ils
sont non persistants) ou persistent à l’échelle du cadre général
mais sans pouvoir être corrélés avec d’autres signaux
sémantiques renvoyant au même architexte.
Extrait : Lawrence d’Arabie – David Lean (1962) : bédouin sur son
chameau// Stormtrooper sur la bête dans le désert
Maison Luke // Igloo // Hôtel Tunisien
On peut constater le mélange entre répertoires iconographiques
issus :
- De imaginaires coloniaux orientaux ou asiatiques
- Ou encore esquimau
Extrait SW : scène Cantina :
- Plans similaires à ceux de John Ford (celui où ils sont sur la
falaise)
- Scène similaire au saloon
Après analyse :
- Certains de ces signaux iconographiques resteront isolés et
confinés à tel ou tel cadre scénique (igloo, stormtrooper
bédouin)
- Tandis que d’autres persisteront à l’échelle du film ou d’un
acte
La majeure partie des scènes qui se déroulent sur la planète
Tatooine sont élaborées :
- Certes à partir d’un répertoire iconographique confus
- Mais sur la base de scènes archétypiques issues du Western
(errance, défilé, marchandage, scène référé La Prisonnière du
désert, saloon)
Dans ces conditions pourra-t-on dire de ce qu’il serait un western
galactique ? La formule semble adaptée pour le premier acte qui se

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déroule sur Tatooine mais Raphaëlle Moine, dans Les genres du
cinéma (2002) refuse l’étiquette. Pourquoi ? Parce qu’elle se fonde
sur une définition restrictive du genre qui suppose une cohérence
entre signaux sémantiques et structures syntaxiques.
2) Les genres établis, l’exemple du Western
Il existe de nombreuses déf du western que l’on peut différencier
selon qu’elles mettent l’accent sur :
a) Le répertoire sémantique (ou iconographique)
Il existe des défs (basées sur la constitution d’un répertoire
iconographique cohérent) :
- Thématiques : Jean-Louis Rieupeyrout distingue dans La
grande aventure du Western (1894-1964), différents thèmes
organisés en cycles :
1. Le peuplement
2. Les guerres indiennes
3. La guerre de Sécession
4. Le bétail
5. Le conflit mexico-texan
6. Le cycle du banditisme et de la Loi

- Historiques : Jean Mitry, dans son Histoire du cinéma : Le


Western comprend les films qui se déroulent :
1. Dans l’Ouest américain
2. Durant la période de la Conquête de l’Ouest, soit entre
1840 et 1895

b) Les structures
Defs syntaxiques de deux ordres selon qu’on cherche à décrire :
- Des formules narratives (basic story) : Certains spécialistes
en ont identifiées liées à des périodes historiques :
1. Moody C. Boatright, pour les westerns des années 1920 à
1950
2. William Everson, pour le western des années 1930 à 1940
3. Will Wright pour le western américain classique : 1931 à
1972
Il prend des westerns qui ont eu le plus de succès. Il va analyser la
structure du récit en termes de schéma narratif et actanciel. 3 types
d’agents : la société, un héros, des méchants. Il détermine un
système d’oppositions de manière générale : inside ≠ outside ;
bon ≠ mauvais ; faible≠ fort ; civilisé ≠ sauvage. Il différencie les
westerns classiques (le héros vient de l’extérieur, il a des
caractéristique commun avec le méchant, trajet d’intégration dans

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la société parce que c’est qqn de bon), les récits de vengeance (le
héros est fort mais cette fois il va quitter la ville et va devenir
mauvais), les westerns de transition (ici la société est méchante et
forte, les méchants sont faibles et aller-retour entre bon et mauvais,
le héros est bon, faible, sauvage et va quitter la société) et les
westerns professionnels (opposition entre les amateurs et les
professionnels et entre les amicaux, locaux et les compromis).

- Des systèmes mythiques :


1. Jim Kitses, dans Horizons West (1969) : s’appuie sur les
relations liant les éléments lexicaux, conception dialectique
de l’Ouest, système d’opposition systématique entre
Civilisation et Sauvagerie. (Les Genres du cinéma – R.
Moine Tableau de sa conception) Individu ≠ Communauté ;
Nature ≠ Culture ; Ouest ≠ Est
2. John Cawelti, dans The Six Gun Mystique (1970) : Il réduit
le genre à l’ensemble des films qui exploitent un même
thème : celui de la Frontière (=conquête de l’Ouest,
concernant l’ensemble des territoires qu’on considérait
encore comme sauvages), où l’homme est mis en présence
de son double non-civilisé. Lisière entre deux territoires,
deux époques, héros tiraillé entre deux systèmes de
valeurs.
(Grande période structuralisme, donc on pense beaucoup avec des
gens comme Barthes, Levi-Strauss)
Le point commun de leurs defs : le Western mettrait
systématiquement en opposition des personnages et des mondes
se situant des deux côtés d’une frontière.
Extrait début : Sur la piste des Mohawks (Drums along the
Mohawks) – John Ford (1939) : bien qu’il traite du thème de la
Frontière, il pose un problème d’identification générique. Il
pourrait être qualifié, selon le terme de Jean-Louis Leutrat de
« pré-Western » car :
1. Il raconte des évènements de 1776, cad bien avant l’ouverture
de la « piste de l’Oregon » et la Déclaration d’Indépendance
2. Corrélativement, son iconographie ne comporte que peur de
signaux sémantiques standards.
Ce que l’on nomme du seul mot de Western désigne en fait un
ensemble de films relevant d’un genre au sens fort, sémantico-
syntaxique, de Rick Altman et doublement déterminé par :
1. Un système syntaxique d’opposition (et une frontière)
entre Sauvagerie et Civilisation d’où s’originent les

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différentes formules narratives et donc « sous-genres »
2. Un répertoire sémantique ou iconographique qui se réfère
à un territoire et à une période historique devenus
mythiques, ceux de la dite Conquête de l’Ouest.
C’est pourquoi les éléments ou les évènements a priori
incompatibles avec le sémantisme ou avec la syntaxe d’un film de
ce genre, peuvent perturber la reconnaissance de l’affiliation
générique. Ces propriétés incompatibles peuvent être dites
« contre-standard » selon la proposition de Kendall Walton.
3) Le « jeu » du genre
Selon lui, la reconnaissance mais aussi l’appréciation d’une
affiliation catégorielle (générique ou stylistique) suppose la mise
en œuvre d’une perception catégorielle.
La perception catégorielle permettra d’apprécier au sein d’une
œuvre, relevant a priori de tel ou tel genre/style, des propriétés :
1. Standards : propriétés perceptuelles qui permettent
immédiatement son identification catégorielle, sans avoir à
réfléchir.
2. Contre-standards : propriétés perceptuelles qui choquent
dans le cadre de ce type de perception catégorielle, qui ne sont
pas à leur place, viennent parasiter et viennent nous faire
douter, et qui tendraient à exclure l’œuvre qui les comporte de
la catégorie en question.
3. Variables : propriétés perceptuelles qui ne permettent pas
l’identification catégorielle mais qui sont cohérentes avec les
propriétés standards. Elles sont, dans ce type de perception,
imperceptibles.

a) La perception catégorielle
La présence d’une automobile dans le décor d’un western :
propriété contre standard sur le plan sémantique. Car le répertoire
iconographique du Western s’élabore à partir d’un mythe qui
comprend le cheval et le train comme moyens de transports dans la
Conquête de l’Ouest, mais pas l’automobile, affiliée
thématiquement à la Révolution Industrielle. La présence d’un
lampadaire ne remettra pas en cause l’identification générique si
l’objet est catégoriellement perçu comme « variable » et non
« contre-standard ». Thomas Schatz donne un autre exemple de
« violation du contrat générique » en mentionnant le cas du film
Murder my Sweet (Edward Dmytryk, 1944), affiché comme
relevant du genre des « films policiers » qui a donné lieu à une
hésitation de la part du public de l’époque, car l’acteur vedette,

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Dick Powell, était une vedette de comédie musicale et y figure en
effet « à contre-emploi ».
Kendall Walton donne d’autres exemples de « traits » standards et
contre-standards dans l’appréciation catégorielle d’œuvres d’art :
- Standards : bidimensionnel et absence de mouvement : ordre,
stabilité, justesse d’une œuvre
- Variables : les couleurs, les traits
- Contre-standards : un objet saillant tridimensionnel ou un
tressaillement de la toile
Les traits standards sont souvent imperceptibles et participent
d’un effet unifiant. Il faut donc se pousser à chercher à les
identifier sinon on ne les voit pas. La récurrence de traits contre-
standards dans un même type d’œuvres conduira à l’aménagement
d’une nouvelle catégorie. La récurrence des mêmes traits
variables au sein d’une catégorie a priori unique conduire à la
reconnaissance d’une sous-catégorie.
Ce type d’analyse discriminant les propriétés standards, variables
et contre-standards permettra donc :
- Non seulement d’identifier l’appartenance catégorielle
principale d’un film
- Mais également de déterminer des catégories nouvelles ou
sous-catégories de films.
Au delà d’une première identification générique basée sur le
repérage de propriétés génériques standards en quelque sorte
affichées par le film, l’analyse peut se poursuivre en repérant des
propriétés variables mais communes à l’échelle d’un cycle,
d’une franchise ou d’un sous-genre.
Ces propriétés peuvent être :
- Soit standards dans une autre catégorie que celle
préalablement identifiée
- Soit en voie de standardisation
Le repérage de ces propriétés potentiellement standards permet
d’apercevoir ce qu’il en est de la « vie » des genres.
b) La genrification (- Rick Altman)
L’adjectif western accolé aux noms melodrama, comedy ou
romance, apparaît historiquement avant la naissance du genre
« Western ». Au temps du muet, les éléments permettant
d’identifier qu’un film se déroulait dans l’Ouest américain
n’étaient que des propriétés variables dans le cadre de films
d’abord affiliés aux différentes catégories narratives alors en usage.
Pour que le genre du western se constitue comme nouvelle
catégorie, il aura fallu :

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- Que ces propriétés variables mais récurrentes, traversant
des films relevant de catégories narratives différentes,
autorisent une adjectivation, cad une qualification
secondaire (désignant le lieu commun des fictions, l’Ouest)
- Que cette qualification secondaire devienne une
qualification primaire et permette l’identification d’un
corpus désigné par un nom commun sur la base d’un
même type de décors et d’univers fictionnel : le Western.
Au delà de cette logique générale de la substantivation ou du
nominalisme générique, le processus qui mène éventuellement à la
création d’une nouvelle catégorie générique a été décrit
théoriquement par Rick Altman pour ce qui concerne la fabrique
des genres hollywoodiens sous le néologisme de « genrification ».
Processus de genrification :
1. Un studio cherche à inventer une formule par aménagement
du genre ou mélange de genres dans un film.
2. Si le film a du succès, cette formule initie un cycle.
3. Si le cycle a du succès, d’autres studios tâcheront de l’imiter
4. Le cycle et ses imitations peuvent alors donner lieu à la
reconnaissance par les publics d’un nouveau genre
5. Une fois le genre reconnu, il sera exploité soit directement
selon une logique de reproduction de la formule (cas des films
dits de genre), soit à nouveau réaménagé ou mélangé en vue
de produire un nouveau cycle.
Dans sa description du processus de genrification, Raphaëlle
Moine ne distingue pas les deux voies de l’aménagement ou du
mélange des genres. Or ces deux voies sont assez distinctes et
auront un impact différent sur la potentielle transformation du
cycle en genre :
- L’aménagement suppose que des propriétés variables vont,
dans le cadre du cycle, devenir des propriétés standards, qui
feront la spécificité de ce cycle. Dans ce cas là, il n’y aura pas
création d’une nouvelle catégorie générique mais le cycle en
question participera d’une évolution du genre ou de la
création d’un sous-genre.
- Le mélange suppose que des propriétés standards de deux ou
plusieurs genres vont être couplées dans une formule
nouvelle. Le mélange des genres, plus risqué, s’accompagne
bien souvent d’un affichage du couplage, afin de ménager
l’horizon d’attente des spectateurs.
Dans le cadre du mélange des genres, il y aura éventuellement
« création » d’un genre nouveau si la formule du « couplage » est,

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ailleurs, reprise. Mais, bien plus souvent, les propriétés standards
de l’un des genres mélangés vont être aperçues comme dominantes
et le couplage ne participera éventuellement qu’à la création d’un
sous-genre par voir d’adjectivation.
Blade Runner – Ridley Scott, 1982 : Extrait début (à 13min)
Propriétés standards :
- Genre de la SF (dans l’architecture-même des décors et dans les
objets)
- Genre du film noir policier (narration + personnages + décors)
Sur l’affiche : à la fois des éléments qui renvoient à la SF + au film
noir (femme avec cigarette + policier avec pistolet). Le film résulte
donc d’un couplage affiché mais ne donnera pas lieu à
l’initiation d’un cycle. S’il avait généré un cycle, il aurait peut-
être amorcé un processus de genrification selon la logique « nom +
adjectif » par exemple « film noir d’anticipation ». S’il relève du
mélange des genres, il est pourtant très différent de SW, auquel
R.Moine refusait l’appellation « western intergalactique ». Blade
Runner associe des propriétés standards de deux genres qui
restent compatibles. Alors que SW associe des propriétés
standards de trois genres (de G, Western, SF) dont les deux
derniers sont a priori incompatibles. La formule du premier SW
n’a pas donné lieu à la création d’un genre, les films de la saga sont
en général :
- Soit affiliés à un genre très accueillant : le « space opera » dont
la propriété standard est le lieu fictionnel de l’espace.
- Soit identifiés à part, comme un cycle isolé et inimitable.
Une des manières de résoudre le problème de la catégorisation est
de changer de registre catégoriel et de considérer non plus
seulement les genres cinématographiques mais les grandes
catégories stylistiques.
On pourra alors affilier SW non plus à un genre cinématographique
canonique mais à un cinéma dit « postmoderne » et donc
considérer avant tout la catégorisation stylistique du film.

C. De l’analyse générique à l’analyse stylistique


La seule analyse iconographique et narratologique (ou sémantique
et syntaxique) du cadre général du film tel qu’il les déploie dans les
scènes d’exposition ne suffit pas toujours à l’identification
catégorielle et ne rendra pas compte de la multiplicité et de la
variété des affiliations catégorielles potentielles.
Une analyse catégorielle que l’on peut dire complète visera à
mettre en évidence un jeu d’appartenances catégorielles

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potentiellement multiples :
- en se prolongeant à l’échelle du film en son entier
- en élargissant le registre catégoriel.
Extraits :
- 3h10 pour Yuma par Delmer Daves
- Remake par James Mangold en 2007
Dans la reprise de cette même situation narrative de « l’attaque du
convoi » qui ouvre le 3h10 pour Yuma de Delmer Daves (1956) et
quelques minutes après seulement pour la version de Mangold, on
peut constater
- D’une part l’emphase stylistique de la scène (de Mangold)
qui s’étire et se déploie de manière spectacularisée, traitée
comme une scène d’action contemporaine
- D’autre part, l’insistance sur la caractérisation des
personnages selon un typage iconographique accentué des
protagonistes.
Ces effets d’accentuation iconographique et d’emphase stylistique
dans le traitement de la scène du film de Mangold sont
caractéristiques d’une esthétique maniériste.
L’analyse catégorielle comparée des deux films devra donc tenir
compte certes des effets de reprise d’une iconographie et d’une
narration mais également de ces variations stylistiques qui affectent
le remake.
Dans le cadre de cette analyse catégorielle élargie on ne cherchera
plus seulement à discerner des signaux iconographiques et à
repérer des situations narratives archétypiques mais on mettra
également en œuvre une analyse stylistique voire thématique.
1. L’analyse iconographique

- Identifier la présence « d’iconographèmes » selon le mot de


Jacques Aumont
- analyser la cohérence de leur articulation et de leur intégration
à l’œuvre

2. L’analyse narratologique

- Identifier la présence de « narrèmes » selon le mot d’Eugène


Dorfmann
- Analyser leur articulation nécessaire dans des formules
narratives d’ensemble

3. L’analyse thématique

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- Identifier la présence de « thèmes », cad des idées exprimées
métaphoriquement en paroles, situations, images
- Analyser leur intégration dans des domaines ou systèmes
thématiques

4. L’analyse stylistique

- Identifier la présence de « stylèmes » selon le mot de Georges


Molinié, cad des procédés de langage ou en cinéma des
figures cinématographiques
- Analyser leur articulation dans un registre stylistique
Historiquement la plupart des grands genres ciné canoniques
hollywoodiens : western, comédie musicale, mélodrame, film noir
etc, se sont élaborés durant la période du cinéma dit « classiques ».
Mis-à-part quelques stylèmes ou narrèmes particuliers à tel ou
tel genre et devenus des propriétés standards (l’éclairage du film
noir, les tailles de plans typiques du western ; le duel du western,
les duos dansés de la comédie musicale), la plupart des films
relevant de ces différents genres semble appartenir également
aux mêmes grandes catégories narratives et stylistiques.
Le cinéma de genre de cette époque dite classique relève donc
généralement :
1. En termes de catégorie narrative du drame
2. En termes de catégorie stylistique du classicisme

D. L’analyse esthétique
Dans l’analyse générique : relever les stylèmes standards
caractéristiques de la catégorie générique.
Mais l’analyse stylistique peut aussi se mener indépendamment et
viser non plus à l’identification de stylèmes standards propres à
une catégorie générique (le traitement expressionniste du film noir,
les choix scalaires dans le western etc) mais plutôt et d’emblée à
une catégorisation esthétique du film.

1) L’analyse esthétique : les catégories


Elles sont de deux ordres :
- Le style au sens restreint désignera ici un ensemble de
propriétés formelles communes à différentes œuvres
- L’éthos désigne l’effet affectif prégnant produit par une

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œuvre, ce que vulgairement on appeler l’atmosphère
Parfois les mêmes termes peuvent être utilisés pour qualifier le
style ou l’éthos (c’est le cas pour le « tragique » mais :
- Dans un cas, celui de la catégorisation esthétique le terme sera
utilisé pour nommer la catégorie d’appartenance principale
- Dans l’autre cas, celui de la qualification de l’éthos, de l ‘effet,
le terme sera utilisé sous forme adjectivale et pour nuancer la
catégorisation esthétique.

a) Les styles
Le style peut être défini au plus simple et selon les termes d’Henri
Focillon dans son Vie et formes comme « un ensemble cohérent
de formes unies par une convenance réciproque ».
Le style, s’il est souvent compris comme indexant la manière d’un
créateur, peut désigner des ensembles plus vastes. On parle ainsi
de : Styles d’époques / Styles d’écoles (ateliers, groupes) /
Nationaux
Lorsqu’on évoque en particulier les styles d’époque, on le fait à
partir d’un modèle dit biologique ou évolutionniste.
Henri Focillon a proposé que la vie des styles pourrait se décrire
selon une même progression, quel que soit l’art en question et
quelle que soit la période. Il décrit un modèle d’évolution des arts
qui fait se succéder :
▪ Une phase d’Archaïsme désordonné
▪ Une phase d’ordre Classique
▪ Une phase de libération Baroque des formes
En HDA, selon la périodisation couramment admise, l’ère dite
classique :
1. S’origine de la Prérenaissance du 14 ème

2. Naît avec la Renaissance du 15 ème

3. S’affirme au 16 tout en évoluant à la fois vers le maniérisme


ème

et l’académisme
4. Se libère au 17 , ouvrant une période baroque
ème

En Histoire du cinéma, la période dite classique :


1. S’origine d’une période dite primitive ou des premiers temps
dominée par un cinéma d’attraction (1895-1905)
2. Naît avec le déploiement des grandes formes narratives du
muet (1905-1927)
3. S’affirme avec le parlant tout en évoluant vers les formes
postclassiques du maniérisme, du baroquisme mais aussi de

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l’académisme (1927-1959)
4. Laisse place à une période moderne puis moderniste (1959-
1977)
5. Et enfin une période postmoderne (1977-…)
Il est à noter que ce modèle évolutionniste tel qu’appliqué à
l’ensemble de l’Histoire du cinéma peut être discuté. Jacques
Aumont, par exemple, a pu proposer de manière polémique dans
Moderne ? Comment le cinéma est devenu le plus singulier des
arts (2007), que le cinéma aurait été moderne avant d’être
classique. Et en effet dans les années 1920, certaines écoles
cinématographiques sont pleinement inspirées par la période
moderne des arts qui débute avec l’impressionnisme vers 1870 et
se prolonge jusqu’à l’avènement de l’art dit contemporain dans les
années 1950. Néanmoins, en dehors de cas d’écoles ciné qui
semblent en prise avec l’époque du point de vue d’une HDA,
l’histoire du cinéma peut tout de même globalement être décrite
selon le modèle évolutionniste, du moins en ce qui concerne la
succession d’une phase archaïque et d’une phase classique.
i. Le classicisme cinématographique
En matière de cinéma, on décrira à la suite de Pierre Berthomieu,
dans son livre Hollywood classique, le temps des géants (ed Rouge
Profond 2009), le classicisme (hollywoodien) comme présentant
les caractéristiques suivantes (pour la plupart d’entre elles déjà
spécifiées par Heinrich Wölfflin dans ses Principes fondamentaux
de l’histoire de l’art (1915).
a) Un monde fictionnel objectif et ordonné : ce à quoi on
accède comme monde fictionnel est un monde partageable et
objectivable au sens où on ne passe pas par la subjectivité
d’un perso
b) Une représentation dictée par un système mimétique et
donc un idéal de transparence : favoriser l’accès au monde
fictionnel au spectateur et faire en sorte que le système de
représentation en lui-même s’efface pour faciliter la plongée
dans le monde
c) Une narration close et auto-suffisante : close dans le sens
où le ciné classique obéit au schéma aristotélicien,
autosuffisant dans le sens où il est parfois compliqué de
comprendre ce qu’il se passe
d) Des formes privilégiant la linéarité et la clarté ou la
lisibilité
e) Des formes privilégiant la sobriété et l’extériorité : utiliser
à minima les vues subjectives et privilégier l’économie de

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moyens formels
f) Une composition harmonieuse et cohérente
Extrait 3h10 pour Yuma – 1957
ii. Un « baroquisme » cinématographique ?
Selon Henri Focillon, le baroquisme constitue une phase
postérieure et de libération vis-à-vis des formes classiques.
Selon Heinrich Wölfflin, la tendance baroque s’oppose à la
tendance classique non comme sa conséquence évolutionniste,
mais comme sa stricte contradiction contemporaine.
Pierre Berthomieu reprend à son compte la thèse de Wölfflin pour
nuancer le modèle évolutionniste et indiquer combien le cinéma
classique hollywoodien est, de tout temps, travaillé par d’autres
tendances qui l’innervent et en particulier le baroque.
S’il n’y a pas en matière de cinéma un style baroque aussi
fermement établi que le ou les styles classiques, on peut néanmoins
suivre les propositions d’Emmanuel Plasseraud qui, dans son
livre Cinéma et imaginaire baroque, décrit les caractéristiques
suivantes :
- La tendance à l’opacité ou à la mise en évidence du système
de représentation (vs idéal de transparence mimétique du
classique)
- La tendance à la subjectivation (vs objectivation)
- La tendance à l’enchevêtrement fictionnel ou narratif (vs
monde ordonné)
- Le goût pour la virtuosité, les figures complexes (vs formes
linéaires et claires)
- La tendance à l’ornementation et à l’emphase (vs sobriété)
- La tendance aux ruptures de ton, voire au mélange des
genres (vs cohérence et harmonie de la composition)
Extrait : Forty guns, 1957, Samuel Fuller (film classique à
tendance baroque)
Tendance baroque :
- Subjectivité : plans sur le regard, vision du shérif sans lunettes
- Virtuosité avec les chevaux au début
- Rupture dans le ton
- Emphase très forte avec une scène qui s’étire avec beaucoup
de plans. Parfois difficile de distinguer les films baroques et
les films maniéristes.
Que l’on considère le baroquisme comme une tendance
contemporaine et opposée à la tendance classique ou comme sa
postérité et son dépassement ; on devra également tenir compte
des autres formes para-classiques ou postclassique :

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L’académisme et Le maniérisme.
1. L’académisme
Elle s’origine de l’instauration du système des académies des
Beaux-arts ou s’enseignent la poétique des différents arts. Le terme
sert à désigner des œuvres résultat de l’utilisation des normes
d’un style plus que de la fructification de ses règles. Il prend
donc une connotation péjorative lorsqu’il désigne des œuvres
perpétuant la tradition, sans la renouveler ou sans en développer les
formes et les sujets. De plus si l’académisme n’est pas en soi un
style mais l’application scolaire d’un style, il peut y avoir
théoriquement un académisme résultant de la reconduite de formes
classiques mais aussi de formes modernes par exemple.
2. Le maniérisme
Il ne constitue non pas une contradiction systématique à la forme
classique comme le baroquisme, mais un style qui vise à imiter la
forme classique telle que parvenue à son apogée.
La différence entre maniérisme et académisme :
- L’imitation académique consiste en une conformation vis-à-
vis du modèle.
- L’imitation maniériste consiste en une déformation vis-à-vis
du modèle.
Extrait :
High Noon – Fred Zinneman (1952) tout ce qui fait la tension c’est
l’attente d’un perso Frank qui a des comptes à régler
Il était une fois dans l’ouest – Sergio Leone (1968) : on a une
même situation narrative qui est exploitée et étirée ; va vers le
grotesque : principe du maniérisme qui ré utilise des motifs pour
les transformer, utiliser un point de départ pour aller vers une
nouvelle création, un nouveau récit.
Claude-Gilbert Dubois dans Le Maniérisme (PUF, 1979) parle
d’imitation différentielle pour qualifier le style maniériste dans sa
relation au style classique. Le style maniériste se caractérise par :
- L’élection de motifs magistraux issus d’œuvres classiques
(en matière de cinéma : des scènes)
- L’exagération à la fois quantitative et qualitative de ces
motifs
- Par le biais d’un processus de déformation
Il compare les trois attitudes (classicisante/baroquisante et
maniérisante) du pdv de la logique de création.
Classicisante : transposer sur le plan de la création esthétique, le
principe capitaliste de la fructification de l’héritage. Il cultive
l’art de la synthèse et procède par imitation globale, en

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répartissant équitablement les problèmes de fond et de forme.
Baroquisante : comme le classique est un débiteur et un héritier :
goût de la dépense : il éparpille à pleines mains le trésor de son
esprit pour l’éblouissement éphémère de l’assistance. Il agit un
peu de la même manière que le maniérisme en faisant s’évanouir le
contenu dans une expression ambiguë, il introduit ce à quoi il veut
véritablement arriver : dissolution d’un message premier,
émergence d’un message second. Il cherche avant tout l’effet,
notamment en emphatisant, au détriment du contenu.
Maniérisante : attitude complexuelle à l’égard du modèle.
L’imitation maniériste est la résultante d’un conflit d’un côté une
déférence hyperbolisée à l’égard d’un maître (qui pourrait renvoyer
à un complexe d’infériorité) et de l’autre des revendications
indirectes d’autonomie. Il privilégie l’aspect formel du modèle,
la maniera étant un expressionnisme subjectif qui consiste à
broder sur une trouvaille stylistique magistrale. La partie
devient centre d’une nouvelle œuvre, dont le système de
création procède d’un détaillage initial. Pas de maniérisme sans
choix d’un motif principal : ex choisir une scène et la
décomposer/la forme pour devenir le centre d’une nouvelle œuvre.
iii. Modernisme cinématographique
Grande différence entre postclassique et moderniste : les
postclassiques sont dans l’héritage (même s’ils modifient etc)
alors que le moderne veut faire rupture avec l’héritage, rompre.
Les styles modernes, s’établissant avant tout sur le sol d’une
rupture vis-à-vis d’un ordre préexistant, il est difficile de résumer
les caractéristiques communes des modernismes autrement qu’ne
pointant à la fois
- Leur dimension historique : les styles modernes témoignent
d’une conscience de leur postériorité, conscience de venir
après quelque chose
- Leur dimension révolutionnaire : les styles modernes ont
pour vocation de périmer les styles précédemment
pratiqués
Ayant pour vocation de périmer le style classique, le moderne
cherche à rompre avec les normes établies. Il rompt aussi bien en
ce qui concerne :
• Les sujets (thèmes, histoires) : la rupture moderne suppose un
renouvellement des sujets et parfois le choix de sujets
auparavant délaissés par l’art classique à cause de leur
manque de dignité. L’art moderne peut donc se tourner vers les
traditions des arts populaires, afin d’en récupérer les sujets pour

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les traiter autrement. Lorsque la rupture moderniste ne récupère
pas des sujets issus des traditions populaires, le renouvellement
des sujets consistera à puiser

a) Dans la vie quotidienne contemporaine


b) Dans l’introspection personnelle
c) Voire à congédier la notion même de sujet ou d’histoire

• Les formes (stylistiques, narratives) : la rupture moderniste


consistera à faire table rase du système de représentation
consacré dans la phase classique pour tenter d’autres voies,
voire à ruiner toute logique de représentation (art abstrait).
Lorsque l’art moderne s’oriente vers d’autres voies pour son
système de représentation, il privilégiera celles :

a) Du réalisme
b) Du subjectivisme (impressionnisme, expressionnisme,
fauvisme…)
c) Du formalisme
En matière de cinéma, on retrouve ces tendances modernes dès les
années 20, avec les différentes formes d’un cinéma soit
expressionniste (cinéma allemand), soit impressionniste (avant-
garde française), ou encore abstrait (cinéma pur ou intégral) ;
Mais outre ce cinéma radicalement moderne, on retrouvera bien
plus tard des tendances modernistes dans les cinémas nouveaux
(NV, Cinéma Novo, Nouvel Hollywood) qui apparaissent entre le
début des années 60 et début 80. Dans le cadre du NH par exemple,
le modernisme a pu emprunter non les voies radicales de
l’abstraction ou du renouvellement des sujets mais celles d’un
refus d’un certain nombre de normes dans le traitement moral et
formel des genres hollywoodiens.
Extrait : La Horde sauvage (1969) – Peckinpah : début du film :
échanges coups de feux entre les méchants et les forces de l’ordre,
tout le monde tire sur tout le monde, violent : ce qui importe : aller
à l’encontre de tous les critères moraux.
iiii. Le post-modernisme cinématographique
(Fredric Jameson) Historiquement modernismes = révolution
industrielle et idéologie progressiste. Le post-modernisme lui naît
avec l’établissement d’une économie mondialisée au sortir de la
2GM et relève d’une logique culturelle différente.
L’idéologie moderniste opère une rupture vis-à-vis des systèmes de
représentation du classicisme dans l’idée de s’approcher au mieux

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d’une vérité de l’art. L’idéologie postmoderniste considère que
toute velléité de s’approcher d’une vérité de l’art est vaine et,
corrélativement, que toutes les formes artistiques s’équivalent
et peuvent s’échanger sur le marché de l’art. La culture est
devenue un produit à part entière dans le postmodernisme.
Extraits :
- Moderniste : The Shooting (1967) – Monte Hellman : épure de
la narration, récit de vengeance femme qui veut venger la
mort de son enfant, celui traqué est le jumeau du tueur à gages
engagé par la femme
- Postmoderniste : Wild Wild West (1999) – Barry Sonnenfeld
Avec ces deux exemples westerns on a une franche opposition
entre un moderniste et un postmoderniste.
Le premier épure progressivement la logique classique d’un récit
de vengeance et des décors et accessoires du western pour amener
le film vers un final équivoque et réflexif. Le second se joue des
frontières génériques comme des anachronismes et mélange
allègrement les personnages, décors et la période historique du
Western. (Monument Valley ; le train, les armes ; Président Ulysse
S.Grant) Le tout avec des accessoires improbables, revisités et
maquillés, issus du fantasmagorique Baron de Münchausen de
Terry Gilliam (1988), aussi bien que de la série des Star Wars, pour
proposer un spectacle ludique et hédoniste, superficiel.

Il résulte de cette logique culturelle du post-modernisme un certain


nombre de traits stylistiques qui le caractérisent :
- Irréalisme : question qu’évacue complètement le post-
modernisme. La réalité n’est plus le référent de l’œuvre. il
ne reste, en lieu et place de référent, que la culture, cad une
immense réserve d’images/représentations, à partir desquelles
les œuvres postmodernes se génèrent
- Anachronisme : La culture devient le seul référent possible
pour des œuvres qui n’ont plus à se confronter à la réalité,
mais cette culture est également déshistoricisée, si bien que
les œuvres peuvent juxtaposer des éléments pourtant
anachroniques.
- Eclectisme : des deux premières caractéristiques :
évanouissement de la réalité comme référent et
évanouissement de l’histoire comme système d’organisation
de la culture, découle une troisième grande caractéristique
(celle de l’éclectisme), cad d’une extraordinaire liberté
d’emprunt dans tous les secteurs culturels et dans toutes

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les périodes.
- Dévaluation : Cet éclectisme radical transgresse toutes les
frontières culturelles et catégorielles (genres, style…). Ainsi
l’œuvre postmoderne propose une entreprise globale de
dévaluation des hiérarchies esthétiques dans lesquelles
étaient pris les différents arts, genres et formes empruntés.
- Superficialité : l’art n’ayant plus pour vocation de restituer
une vérité, le postmodernisme affiche son contenu en surface
et évacue toute profondeur essentialiste. Ne cherche pas à
nous changer dans notre rapport à la réalité.

b) Les éthos
L’éthos désigne non pas une appartenance catégorielle de l’œuvre
mais l’effet esthétique globalement produit sur la sensibilité du
spectateur. On parlera ainsi souvent, après avoir nommé son genre
ou son style, du sentiment global qu’elle inspire. La désignation de
l’éthos s’accole sous forme adjectivale au nom désignant la
catégorie stylistique ou générique.
Etienne Souriau : le beau, le joli, le gracieux etc comprennent
d’abord une réaction sentimentale ; Au lieu de parler de drame ou
de tragédie, il parle de tragique. Concevoir l’ethos d’une œuvre
sous la même logique que pour la genrification : un terme
principal et un terme secondaire pour désigner plus
précisément l’œuvre comme Western & Western-comédie. Il est
rare de voir des tragédies. Par contre comme la tragédie a ses
propres règles, elle est à l’origine d’œuvre qui répondent de la
catégorie du drame mais qui répondent du tragique par des
schémas.
L’Analyse auteuriale
Autre catégorie : celle de l’auteur. Jusqu’à un certain point – celui
de l’investigation génétique et biographique – mener une analyse
auteuriale à partir du film en lui-même comme l’analyse
« catégorielle ».
Ainsi Jean-Pierre Esquenazi, dans « L’Auteur, une espèce
particulière de genre ? », souligne les proximités entre les deux
notions de Genre et d’Auteur, sous l’espèce commune d’une
catégorie permettant d’identifier des films et de constituer des
corpus. Il indique par ailleurs combien, dans le cadre de l’analyse
auteuriale, la recherche d’un film à l’autre de continuités
stylistiques et de continuités thématiques constitue une méthode
héritée de l’époque de la constitution de la politique des auteurs. Si
l’on revient sur cette notion, on se rendra compte que la méthode

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critique visant à repérer d’un film à l’autre « signés » d’un même
nom, les seules constantes et variations stylistiques et thématiques,
est issue d’une histoire qui se déroule en trois temps.

1. Années 1920 : invention de la critique cinématographique


La notion d’auteur ne s’impose pas de suite car elle est rattachée
symboliquement au champ littéraire. A ce moment là l’auteur dans
le générique ne peut être que l’auteur du roman ou de la pièce
adapté. Louis Delluc propose le terme de cinéaste, qui ne désigne
par encore les réalisateurs mais tous ceux qui, dans le champ du
cinéma, innovent.
2. Années 30 à 50
Dans les années 1930, la promotion de la notion d’auteur dans le
champ de la critique cinématographique s’accompagne d’une
revendication du titre par ces cinéastes, qui non seulement réalisent
mais écrivant également leurs scénarios et dialogues. Selon René
Clair, 1928, auteur : cinéaste qui fait le scénario, met en scène et
monte. La notion d’auteur est alors équivalente à la notion d’auteur
complet. La notion est donc réservée à un « petit » nombre et ne
s’adresse à des personnes qui travaillent dans un système de
production indépendant.
3. Depuis les années 1960
Fin années 50 cependant, une poignée de jeunes critiques va
inventer une nouvelle « politique des auteurs » avec cette volonté
de promouvoir non des auteurs complets mais des réals travaillant
pour la plupart dans le cadre du système de production
hollywoodien, caractérisé par son industrialisation et sa logique de
genrification. Or a priori à Hollywood, c’est le producteur qui a la
main sur tout. Néanmoins, la logique de cycle de ce système de
production permet, dans certains cas, à des réals d’imposer leur
nom comme une sorte de marque à un certain nombre de films,
même si ceux-ci restent pris dans la logique des genres. Cette
volonté d’une nouvelle politique va conduire à une méthode
critique rejetant dans les marges l’étude
- Des intrigues (déterminées dès le travail de scénarisation)
- Des sujets (déterminés par le choix d’un genre)
La méthode critique va donc placer au second plan l’analyse
narratologique et iconographique. Elle va privilégier l’analyse
stylistique (cohérence stylistique même si les catégories génériques
sont différentes) et thématique (cohérence thématique, grandes
idéologies qui se retrouvent dans les mêmes d’un auteur quelque
soit le genre, la forme ; ex la Loi chez Fritz Lang, la culpabilité

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chez Hitchcock). Même si cette analyse privilégie les propriétés
standards (thèmes et stylèmes), dans certains cas elle a recoure à
l’analyse des narrèmes et des iconographèmes. D’une part, dans le
cadre du ciné hollywoodien, certains auteurs auront pu œuvrer
leurs propres standard iconographiques (ex Hitchcock transformant
la « femme fatale » en « blonde hitchcockienne »). D’autre part
certains cinéastes ou auteurs auront pu se dédouaner des
contraintes fortes que fait peser la conception hollywoodienne du
genre sur les plans iconographique et narratif pour élaborer leurs
propres répertoires iconographiques et formules narratives.
Extraits film de John Ford. (Les Cheyennes, La Prisonnière du
désert et La Chevauchée fantastique)
- Les paysages « Monument Valley »

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