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INTRODUCTION A L’OECUMENISME
ABBE DOCTEUR ETIENNE ETOUNDI ESSAMA
EDITIONS DU COVY
1
INTRODUCTION GENERALE
1- PRESENTATION
2- PLAN DU COURS
3- BIBLIOGRAPHIE
A- PLAN DU COURS
I/ LE CPPUC
1- Historique
2- But
3- Structure
4- Autres organismes
V/ OECUMENISME PASTORAL
1- L’œcuménisme spirituel (Prière)
2- L’œcuménisme théologique (Dialogue)
3- L’œcuménisme social (Collaboration)
2
VII/ OECUMENISME EN AFRIQUE CENTRALE
1- Les Eglises chrétiennes en présence
2- Les Organismes œcuméniques
3- La Collaboration œcuménique
4- Les Perspectives.
3
B- BIBLIOGRAPHIE
1/ DOCUMENTS DU MAGISTERE
- Concile Vatican II, Décret sur l’œcuménisme Unitatis Redintegratio,
1964.
- CPPUC, Directoire pour l’application des principes et des normes pour
l’œcuménisme (revu et corrigé), 1993.
- Jean-Paul II, Encyclique Ut unum sint sur l’engagement œcuménique de
l’Eglise catholique, 1995.
- IDEM, Lettre apostolique Novo Millennio Ineunte au terme du grand
Jubilé de l’An 2000, 2001.
- Cardinal Walter KASPER, La situation œcuménique en 2006.
(www.vatican.va/curia)
- Cardinal Kurt KOCH, L’unité des chrétiens et le service des pauvres,
2011.
2/ QUELQUES AUTEURS
- M. BAROT, Le mouvement œcuménique, « Coll. Que sais-je ? », PUF,
1967, 128 p.
- J. DESSEAUX, Vingt siècles d’histoire œcuménique, Cerf, 1983, 110 p.
- R. GIRAULT, Construire l’Eglise une, DDB, 1990, 222 p.
- GROUPE DES DOMBES, Pour la communion des Eglises. L’apport du
Groupe des Dombes 1937-1987, Centurion, 1988, 235 p.
- IDEM, Pour la conversion des Eglises, Centurion, 1991, 113 p.
- IDEM, Marie (en deux tomes 1995 et 1997).
- IDEM, « Vous priez donc ainsi » Le Notre Père, 2011.
- Le Monde des religions, La planète des chrétiens, Hors-série N° 21, 2013.
- M. N. ATEBA EDZANA, La justification du pécheur : enjeux
œcuméniques pour une communion ecclésiale, Imprimerie Saint-Paul,
Yaoundé, 2015.
4
- IDEM, Séminaire « Pastorale et Dialogues », UCAC, Master I, II &
Pastorale, 2019 (Inédit).
- IDEM, « Les enjeux et les défis œcuméniques de la célébration de
l’Année jubilaire en Afrique » in Annales de l’Ecole Théologique Saint
Cyprien de Ngoya, 2000.
- IDEM, « La pastorale œcuménique et du dialogue interreligieux dans
l’Archidiocèse de Yaoundé » in Annales de l’Ecole Théologique Saint
Cyprien de Ngoya, 2003, pp. 209-214.
- IDEM, « La situation du dialogue œcuménique entre Catholiques et
Protestants » in Annales de la Faculté de Théologie Protestante de
Yaoundé, 2005.
- IDEM, « Saint Paul et l’unité de l’Eglise » in Bulletin Paix et Joie,
Janvier 2009, pp. 8-12.
- IDEM, « L’Aspect œcuménique dans Verbum Domini de Benoît XVI » in
Conférences théologiques de l’UCAC n° 18, PUCAC, Yaoundé, Mars
2015, pp. 157-165.
- IDEM, « La Pastorale œcuménique du pape Jean Paul II », Conférence à
la Communauté sant’Egidio, Yaoundé le 30/08/2011 (Inédit).
- IDEM, « Le Paradoxe d’Ecclesia in Africa II », Conférence pour le 16e
Anniversaire d’Ecclesia in Africa », Douala le 15/09/2011 (Inédit).
- IDEM, « La situation du dialogue œcuménique et du dialogue
interreligieux aujourd’hui » in Bulletin Paix et Joie, Paris, juin-juillet
2012, pp. 5-13.
- IDEM, « L’œcuménisme en trois questions », Conférence à Pretoria
(RSA), le 16/05/2014 (Inédit).
- IDEM, « Les merveilles de Dieu dans l’histoire de l’œcuménisme »,
Conférence à Yaoundé, le 20/01/2016 (Inédit).
- IDEM, « Les Mariages œcuméniques », Conférence à Yaoundé, le
19/01/2017 (Inédit).
- IDEM, « L’œcuménisme en Afrique centrale », Conférence à Yaoundé
lors de la XIe Assemblée Plénière de l’ACERAC, le 10/07/2017 (Inédit).
- IDEM, « Marie dans l’œcuménisme », Conférence à Yaoundé, le
25/01/2018 (Inédit).
- IDEM, « L’accueil des déplacés internes Anglophones par les Eglises
chrétiennes à Yaoundé », Conférence à Yaoundé le 22/01/2020 (Inédit).
3/ REVUES SPECIALISEES
- Chrétiens en marche (Lyon)
- Foyers Mixtes (Lyon)
- Irénikon (Chevetogne, Belgique)
- Istina (Paris)
- Unité chrétienne (Lyon)
- Unité des chrétiens (Paris)
- Le Monde des Religions (Paris).
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C- WEBGRAPHIE
- http://www.vatican.va
- http://www.zenit.org
- http://www.eglise.catholique.fr
- http://www.oecumenisme91.eglise.catholique.fr
- http://www.la-croix.com (Urbi & Orbi)
6
CHAPITRE I – LE CPPUC
(CONSEIL PONTIFICAL POUR LA PROMOTION DE L’UNITE DES CHRETIENS) 1
1/ HISTORIQUE
L’origine du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens est
étroitement liée au Concile Vatican II. Le Pape Jean XXIII désirait que
l’engagement de l’Eglise Catholique dans le mouvement œcuménique
contemporain soit l’un des buts principaux du Concile. C’est pourquoi, le 5 juin
1960, il a créé un Secrétariat pour l’unité des chrétiens comme l’une des
commissions préparatoires au Concile et a nommé comme premier président le
Cardinal Augustin BEA. C’est la première fois que le Saint-Siège mettait en
place une structure consacrée uniquement aux questions œcuméniques.
La première fonction du Secrétariat a été tout d’abord d’inviter les autres
Eglises et Communions mondiales à envoyer des observateurs au deuxième
Concile du Vatican. Mais dès la première session (1962), par décision du Pape
Jean XXIII, il fut assimilé aux commissions conciliaires. Le Secrétariat a alors
préparé et présenté au Concile les documents sur l’œcuménisme (Unitatis
Redintegratio), les religions non chrétiennes (Nostra Aetate), la Constitution
dogmatique sur la Révélation divine (Dei Verbum).
En 1963, le Saint-Père a précisé que le Secrétariat serait composé de deux
sections chargées respectivement des relations avec les Eglises orthodoxes et les
anciennes Eglises orientales d’une part, et d’autre part avec les Eglises et
Communautés ecclésiales d’Occident.
En 1966, le Concile étant achevé, le Pape Paul VI a confirmé le Secrétariat pour
l’unité des chrétiens comme organe permanent du Saint-Siège. Le Cardinal BEA
l’a présidé jusqu’à sa mort en 1968. En 1969, le Cardinal Johannes
WILLEBRANDS était désigné pour lui succéder. Vingt ans plus tard, il se
retirait et devenait président émérite. Le Cardinal Edward Idris CASSIDY était
alors nommé président de ce dicastère. Il a été remplacé par le Cardinal
allemand Walter KASPER jusqu’en 2010. Le président actuel est le Cardinal
suisse Kurt KOCH.
C’est par la Constitution apostolique « Pastor Bonus » du 28 juin 1988 que le
Pape Jean Paul II a transformé le Secrétariat en Conseil pontifical pour la
promotion de l’unité des chrétiens (CPPUC), changement devenu effectif le 1 er
mars 1989.
7
2.1. AD INTRA
2.2. AD EXTRA
En même temps, le Conseil pontifical s’efforce également de développer le
dialogue et la collaboration avec les autres Eglises et Communions mondiales.
Aussi, dès sa création, il a établi une cordiale coopération avec le Conseil
œcuménique des Eglises (COE)2 dont le siège est à Genève ; depuis 1968, douze
théologiens catholiques sont membres à part entière de la Commission « Foi et
Constitution », département théologique du COE3.
Il appartient également au CPPUC de nommer des observateurs catholiques aux
différents rassemblements œcuméniques et d’inviter à son tour des observateurs
ou des « délégués fraternels » des autres Eglises et Communautés ecclésiales à
l’occasion des grands événements de l’Eglise catholique.
En ce moment, le CPPUC est engagé dans un dialogue théologique
international avec les Eglises et Communions mondiales suivantes pour
promouvoir une meilleure connaissance réciproque et des échanges d’opinions
permettant de surmonter les préjugés :
l’Eglise orthodoxe
l’Eglise copte orthodoxe
L’Eglise malankare
La Communion anglicane
La Fédération luthérienne mondiale
La Communion mondiale des Eglises réformées4
Le Conseil méthodiste mondial
L’Alliance baptiste mondiale
L’Eglise chrétienne (Disciples du Christ)
Des responsables des Eglises pentecôtistes.
2
Le COE est fondé en 1948 grâce à la fusion de deux organismes œcuméniques: « Foi et Constitution » (aile
théologique) et « Vie et Action » (aile sociale).
3
L’Eglise catholique romaine n’est pas membre du COE qui comprend environ 350 Eglises membres
protestantes, anglicanes et orthodoxes.
4
Cette nouvelle structure résulte de la fusion du 24 juin 2010 de deux grandes institutions réformées : l’Alliance
réformée mondiale (218 Eglises membres et 76 millions de croyants) et le Conseil œcuménique réformée (39
Eglises membres et 12 millions de protestants).
8
Le Conseil se préoccupe aussi de promouvoir des rencontres avec les
Evangéliques regroupés au sein de l’Alliance évangélique mondiale.
Pour faire connaître le plus largement possible les résultats de ses efforts en
faveur de l’unité des chrétiens, le CPPUC publie en français et en anglais une
revue trimestrielle intitulée Service d’Information.
3/ STRUCTURE
Le Conseil Pontifical est dirigé par le Cardinal Président. Il est assisté par un
Secrétaire, un Secrétaire adjoint et un sous-Secrétaire.
Les relations avec les autres Eglises et Communautés ecclésiales sont reparties
entre deux sections :
La section orientale, pour les Eglises orthodoxes de tradition byzantine et
les Eglises orientales orthodoxes (coptes, syriens, arméniens, éthiopiens,
malankars) ainsi que pour l’Eglise assyrienne de l’Orient.
La section occidentale, pour les différentes Eglises et Communautés
ecclésiales d’Occident, et pour le Conseil œcuménique des Eglises (COE).
9
fonctionnement. Pour la mise en œuvre des orientations données par le
deuxième Concile du Vatican, la Commission a publié des Orientations et
suggestions pour l’application de la Déclaration conciliaire « Nostra Aetate »
n°4 (1974) et des Notes pour une correcte présentation des juifs et du Judaïsme
dans la prédication et la catéchèse de l’Eglise catholique (1985). En 1998, la
Commission a publié La Shoah, nous nous souvenons (sur le génocide du peuple
juif par l’allemand Adolf HITLER et les nazis lors de la deuxième Guerre
mondiale).
10
CHAPITRE II – FONDEMENTS BIBLIQUES ET
MAGISTERIELS DE L’OECUMENISME
Nous présentons succinctement les fondements scripturaires d’une part et les
fondements du Magistère d’autre part.
1/ FONDEMENTS BIBLIQUES
Nous avons choisi les fondements bibliques de l’œcuménisme surtout dans les
Lettres de saint Paul5 et dans l’Evangile de saint Jean. Il faut déjà souligner
fortement que le mot « œcuménisme » n’existe pas dans les Saintes Ecritures
mais on y retrouve d’autres expressions telles que l’unité et son contraire la
division, la communion…
11
dialogue, entre catholiques, avec les autres chrétiens (dialogue
œcuménique), avec les non-chrétiens (dialogue interreligieux) et avec les
non-croyants (dialogue interculturel).
c) Concile Vatican II, Décret sur l’œcuménisme Unitatis Redintegratio,
21/11/64. Ce document conciliaire présente les principes catholiques de
l’œcuménisme. En novembre 2014, nous avons célébré le cinquantième
anniversaire du Décret qui constitue encore aujourd’hui un texte de
référence fondamental pour l’engagement œcuménique de l’Église
catholique. Ce document a permis de mettre en évidence que l’on ne peut
plus faire abstraction de l’œcuménisme. Il invite tous les fidèles
catholiques à reconnaître les signes des temps et à prendre le chemin de
l’unité pour surmonter la division entre les chrétiens, qui ne représente pas
seulement une franche opposition à la volonté du Christ mais aussi un
scandale pour le monde, qui porte atteinte à la plus sainte des causes, à
savoir la prédication de l’Évangile à toute créature (cf. UR, n.1).
d) Pape JEAN PAUL II, « Le dialogue œcuménique est irréversible »
(Entrez dans l’Espérance, p. 222), c’est-à-dire que l’Eglise ne peut ni
renoncer ni faire marche arrière. Elle doit continuer la recherche de l’unité
des chrétiens et poursuivre la marche vers la pleine communion visible en
purifiant la mémoire des blessures du passé.
IDEM, Lettre apostolique Orientale Lumen, 1995. Le pape invite les
catholiques à redécouvrir le patrimoine spirituel des orthodoxes.
IDEM, Encyclique Ut Unum Sint sur l’engagement œcuménique de
l’Eglise catholique, 1995. Il célèbre le 30e anniversaire du Décret
conciliaire et présente les fruits des dialogues théologiques.
IDEM, Ecclesia in Africa, 1995, n. 65. Le pape invite les catholiques à
collaborer avec les frères baptisés des autres confessions chrétiennes dans
plusieurs domaines en particulier celui de la traduction et de la diffusion
des Saintes Ecritures.
e) BENOIT XVI, Africae Munus, 2011, n. 89-91.
f) Conseil Pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens, Directoire
pour l’application des principes et des normes pour l’œcuménisme, 1993.
IDEM, La dimension œcuménique dans la formation de ceux qui
travaillent dans le ministère pastoral, 1997.
IDEM, L’œcuménisme spirituel, 2011. Le Conseil donne des orientations
judicieuses pour organiser le secteur de la prière.
12
CHAPITRE III - L’OECUMENISME FONDAMENTAL
Dans ce chapitre, nous allons aborder successivement les éléments de la
fondation de notre édifice à savoir l’étymologie, la signification et l’objectif de
l’œcuménisme. Cette partie semblera aspre à cause des fondements bétonnés.
1. ETYMOLOGIE
Le mot ‘‘ Œcuménisme’’ pour désigner l’effort et les tentatives vers l’unité
ecclésiale est d’un emploi récent dans le monde chrétien. Il provient du
mouvement œcuménique moderne, centré autour du Conseil œcuménique des
Eglises (COE).
1.1. L’origine
1.2. L’adjectif
13
1.3. Le substantif
2. SIGNIFICATION
14
L’œcuménisme n’est donc pas à confondre avec les efforts déployés pour attirer
à sa propre Eglise les personnes des autres confessions : on parle parfois de
prosélytisme, de conversion, de « réconciliation dans la pleine communion »
(UR n° 4, 4). C’est donc d’un « retour » corporatif de dénominations
chrétiennes à l’unité ecclésiale visible qu’il s’agit7.
Comme cette unité chrétienne ne pourra être intégralement réalisée que par un
mouvement général de toutes les corporations chrétiennes, il s’en suit que le
mouvement œcuménique postule, de sa nature même, à une ouverture
accueillante à l’ensemble des sectes ayant perdu le caractère chrétien
fondamental et qui ne rentre pas dans le sujet auquel s’adresse l’œcuménisme ;
et dans ce cas on ne peut pas parler d’exclusivisme. Ceci pourtant ne signifie
nullement qu’il faille adopter à leur égard une attitude purement négative.
Cette ouverture à l’universalité (catholicité) du monde chrétien n’empêche
cependant pas que le travail œcuménique puisse porter, selon les affinités et les
opportunités, dans un secteur déterminé plutôt dans tel autre, ou s’effectuait ne
fut ce qu’entre deux interlocuteurs.
Si l’on parle du « retour » à l’Eglise catholique, de quel retour s’agit-il et de
quelle Eglise catholique ? Les chrétiens désunis ne sont pas totalement étrangers
à l’Eglise catholique, puisque personne ne l’est pas, même les non chrétiens :
tous, en effet, sont appelés au salut, et la justification n’est possible que dans une
certaine communion, tout au moins invisible, à l’unique Eglise du Christ, qui
subsiste dans l’Eglise catholique (UR n° 4) ; spécialement ceux qui ont reçu le
baptême sont en communion visible et sacramentelle avec l’Eglise catholique
(UR n°3).
Bien que de façon imparfaite et non plénière du fait de la séparation, il ne peut
donc s’agir, en règle commune, d’un retour au sens strict. Les frontières de
l’Eglise catholique débordent celles de la collectivité institutionnelle catholique
romaine. L’unité dans la communion plénière n’implique ni un nivellement ni
une renonciation à des valeurs chrétiennes authentiques.
15
comme essentiels à l’unité ecclésiale. La diversité a aussi sa place dans l’unité,
qui elle-même appartient au mystère de l’Eglise, et la question qui se pose est de
savoir quels sont, selon l’optique propre à chaque Eglise, les facteurs ecclésiaux
considérés comme indispensables pour qu’il y ait communion ecclésiale. Nous
examinerons successivement le concept d’unité ecclésiale tel qu’il se présente
dans l’Eglise catholique romaine, et tel qu’actuellement on l’entrevoit dans le
COE.
Grâce aux progrès ecclésiologiques enregistrés par Vatican II (cf. LG n°8, 13 ;
UR n°2), on peut voir dans les meilleurs perspectives ce qu’on entend par
l’unité ecclésiale dans le catholicisme. Nous tâcherons ici d’exposer brièvement,
ses éléments constituants, ses facteurs constitutifs invisibles et visibles.
L’unité est une propriété essentielle de l’Eglise du Christ, qui fait qu’elle forme
un unique corps avec le Christ comme Tête. L’unité est à la fois terrestre et
céleste. Car elle marque l’Eglise toute entière qui est celle pérégrinante sur terre
comme celle triomphante du ciel. Elle n’est donc pas une donnée purement
terrestre, bien que certains facteurs d’unité soient valables uniquement sur la
terre, ou même uniquement dans le Nouveau Testament. Cette dimension trans-
historique et eschatologique indique l’ampleur de l’aspect mystère de l’Eglise :
l’unité a sa source dans la Trinité.
L’unité ecclésiale terrestre dans l’économie néo-testamentaire est une réalité à la
fois surnaturelle et visible, puisque l’Eglise doit constituer visiblement le corps
du Christ élargi aux dimensions de l’humanité rachetée. Cette unité du peuple de
Dieu peut être envisagée sous un triple aspect ontologique, historique et
sociologique.
Les facteurs dans lesquels l’unité ecclésiale consiste sont à distinguer des
facteurs qui effectuent l’unité. Car l’objet matériel n’est pas la cause efficiente.
Il s’agit ici de déceler quels sont les éléments constituants de l’unité, quels sont
les liens qui composent nécessairement la communion chrétienne intégrale ?
16
son Corps qui est l’Eglise, d’une façon toute au moins invisible quoique
réelle où le Christ affirme que « qui croit en lui aura la vie éternelle et
qu’il ne sera pas repoussé dehors » (Jn 6, 37).
2. Le Baptême ou unité ecclésiale initiale et officielle : il y a communion
ecclésiale visible que par le baptême qui incorpore sacramentellement au
Christ homme et rend membre visible de son Corps ; comme il n’y a
qu’un seul baptême, il n’y a qu’un seul effet d’incorporation visible avec
l’Eglise du Christ (UR n°3).
3. L’Eucharistie ou unité ecclésiale en vigueur sacramentelle : C’est
l’eucharistie qui signifie et réalise sacramentellement la consommation de
l’unité ecclésiale (UR n°2 ; 4, 3 ; LG n°3, 11). L’unité culmine dans
l’eucharistie. Car c’est par elle que les fidèles sont pleinement insérés
dans l’Eglise (PO n°5), et c’est elle qui constitue par la base la cellule
chrétienne organiquement insérée dans le corps total. L’eucharistie est
l’élément sacramentel à la plénitude terrestre de communion ecclésiale,
car elle forme la « koinonia au sang du Christ » et « au corps du
Seigneur » dans laquelle l’assemblée des croyants baptisés est unifiée
mystiquement « en un seul pain, pour former un seul corps » (1 Co 10,
16-17).
4. La Vie communautaire chrétienne ou unité ecclésiale en vigueur
institutionnelle : En plus de l’unité constituée par la vie théologale,
l’appartenance baptismale et la communion eucharistique, il faut aussi,
comme dit UR, « la confession d’une même foi, la célébration commune
du culte divin et la concorde fraternelle dans la famille de Dieu » (UR
n°23, #1), c’est-à-dire, l’intégration effective de la participation active à la
vie communautaire ecclésiale. Le chrétien ne peut pas vivre sa foi de
façon isolée ; il fait partie d’un corps vivant, visiblement et socialement
articulé sur la terre, la « koinonia de la foi », dans laquelle il doit vivre sa
foi publiquement, participer au culte et travailler à l’œuvre du Christ en ce
monde.
Les facteurs qui causent l’unité ecclésiale sont, dans l’ordre de l’efficience
principale, les facteurs divins et invisibles : l’unité ecclésiale est un don sublime
de Dieu aux hommes. Cette unité d’ailleurs entretient un rapport certain avec le
mystère de la Trinité (cf. Jn 17, 21). L’unité ontologique a été donnée par le
Christ dès le commencement, et l’unité historique accomplit sa croissance sous
l’action de l’Esprit Saint, « qui est principe de l’unité ecclésiale » (UR n°2, 2).
Dans l’ordre de la causalité instrumentale, les facteurs visibles de l’unité
peuvent se regrouper selon les grands aspects dans lesquels l’unité peut être
considérée.
17
Par rapport à l’unité ontologique, celle-ci sans doute provient d’en haut sans
médiations visibles, mais elle comporte certains facteurs visibles par rapport à sa
transmission et ses garanties d’intégrité. Ces facteurs peuvent se résumer dans la
parole vivante de l’Eglise, c’est-à-dire l’Ecriture et la Tradition.
Par rapport à l’unité historique, qui se réalise d’en bas, le développement
fonctionnel de l’unité est tributaire du ministère apostolique et pastorale, c’est-à-
dire du ministère dans son ensemble. C’est le fonctionnement « des apôtres et
des prophètes » grâce auquel l’unité s’édifie (Ep 2, 20) ; c’est grâce à « leur
parole » que les hommes se ressemblent dans l’unité du Christ (Jn 17, 2).
Par rapport enfin, à l’unité sociologique, les facteurs d’unité sur le plan des
communautés locales sont le ministère baptismale, qui se présente comme le
couronnement de toutes les tâches apostoliques et ainsi de la fécondité des
foyers chrétiens ; ensuite la liturgie eucharistique, conditionnée par le sacerdoce,
qui scelle la consistance des communautés des fidèles en cellules organiques
vivants de l’Eglise.
Et sur le plan de l’unité communautaire régionale ou universelle, c’est à
l’épiscopat qui intervient comme « cardo » de l’unité, comme pivot sur lequel
toute l’unité s’articule. C’est l’évêque qui fait l’Eglise particulière, c’est le
collège épiscopal avec le Pape qui fait l’unité institutionnelle de l’Eglise
universelle.
Il y a large place dans l’Eglise pour la pluriformité et la variété ; et l’unité à
rétablir doit porter sur les éléments et les facteurs absolument nécessaires : « Ce
Saint Concile réaffirme que pour établir ou maintenir la communion et l’unité,
il ne faut ‘rien imposer qui ne soit nécessaire’ (Ac 15, 28) » (UR n°18).
Et dans les dogmes eux-mêmes, il faut soigneusement distinguer les points
précis qui touchent directement le contenu révélé et leur contexte, leur
formulation, bref, entre la doctrine elle-même et sa manipulation par les
hommes (cf. UR n°4, 2).
18
ensemble, selon les circonstances, afin que les tâches auxquelles Dieu appelle
son peuple soient accomplies»8.
8
THURIAN Max, L’unité de New Delhi, Rythmes du monde, 1962, p. 33.
19
CHAPITRE IV – L’OECUMENISME HISTORIQUE
Si l’Eglise une fondée par le Christ est intacte, les hommes ont créé pour de
multiples raisons des Eglises qui ne sont pas en communion entre elles, donc en
désaccord avec l’Eglise Une.
21
En octobre 1517, en affichant les 95 thèses sur la porte de l’Eglise de
Wittemberg, il défend la foi et la gratuité du don de Dieu aux prédicateurs qui
laissent entendre que l’homme peut « acheter son salut » (question des
indulgences). Le désordre grandissant, la hiérarchie de l’Eglise intervient.
En 1520, devant certaines carences des responsables de l’Eglise, Luther en vient
à opposer l’autorité de la Bible à celle du Magistère. En conséquence, il remet
en cause des points essentiels de la foi. Il est excommunié par le Pape Léon X
en 1521.
En 1530, la Confession d’Augsbourg, profession de foi en 21 articles préparés
par Luther et ses disciples, devient le document fondateur des Eglises
luthériennes.
Les luthériens sont environ 70 millions : en Allemagne (30), dans les pays
Scandinaves (23), aux Etats-Unis (8,5), en Indonésie (2,2), en Tanzanie (1,5), en
Inde (1,3), à Madagascar (1,2), au Brésil (1) et en France (250 000 surtout en
Alsace, au pays de Montbéliard et à Paris).
L’organe suprême est la Fédération luthérienne mondiale.
22
Les influences de la Réforme ont introduit de nombreuses nuances qui ont donné
à la Communion anglicane son triple visage actuel :
23
Comme caractéristiques : l’accent est mis sur l’évangélisation et la conversion
personnelle. On compte aujourd’hui près de 30 millions, surtout en pays anglo-
saxons. L’organe suprême est le Conseil méthodiste mondial.
24
5.6. L’Armée du salut
William Boot, pasteur méthodiste, rejeté par son Eglise fonda en Angleterre la
« Mission Chrétienne » pour les pauvres à la moitié du XIXe siècle.
Comme caractéristiques principales, nous retrouvons:
-Organisation quasi militaire d’évangélisation, d’entraide et d’assistance
attentive d’abord à la situation de l’homme.
-Appel à la confession de foi explicite, mais un mouvement d’évangélisation
populaire.
Ils sont 2 millions dans le monde entier et surtout en Afrique australe. En
France, elle compte 145 centres et 1.500 militants.
25
CHAPITRE V : L’OECUMENISME PASTORAL
L’œcuménisme moderne présente trois axes distincts mais complémentaires,
puisque leur objectif concourt au même but, à savoir la restauration de l’unité
entre les diverses Eglises et communautés chrétiennes divisées.
Il s’agit de :
- L’œcuménisme spirituel,
- L’œcuménisme théologique,
- L’œcuménisme social.
Si le 1er et le 3è axes sont à la portée de tous les fidèles chrétiens, le second plus
complexe est réservé aux experts et aux spécialistes en la matière. Le dialogue
œcuménique serait aride et infructueux s’il n’était pas porté et soutenu par la
prière. « Le dialogue est au cœur de la collaboration œcuménique et
l’accompagne en toutes ses formes » (D.O. n°172).
Dans sa conférence au Congrès Mondial des Migrants en novembre 2003, le
Cardinal KASPER en parlant du dialogue œcuménique disait: «le dialogue
théologique est la tête; le dialogue spirituel est le cœur, et la collaboration dans
le contexte social, politique et caritatif représente les mains de l’œcuménisme»9.
1. L’OECUMENISME SPIRITUEL
L’œcuménisme spirituel est basé sur « la conversion du cœur, la sainteté de vie
et la prière considérées à juste titre comme l’âme de tout le mouvement
œcuménique » (UR n°8).
9
Propos recueillis dans le Revue du CPPMPD, « People on the Move » N° 96, décembre 2004.
26
évoquant son orientation de la prière pour l’unité, déclara : « Notre souci de
l’unité se mesure à la manière dont nous prions pour l’unité. Nous ne pouvons
pas attendre de Dieu qu’il nous donne cette unité, si nous ne nous préparons
pas à recevoir ce don par la vie de prière qui coûte et purifie. Prier ensemble
est déjà se rapprocher. Nous demandons instamment que l’on observe, partout
où cela est possible, la Semaine de prière pour l’unité chrétienne (18-25
janvier) pour témoigner publiquement que c’est la prière qui mène à l’unité. »
Ce texte est important, en ce qu’il date d’une époque où l’Eglise catholique
n’était pas partie prenante au Conseil Œcuménique, alors que depuis 1968 elle
est présente à la Commission « Foi et Constitutions » avec 12 membres10.
10
Le département « Mission et Evangélisation » avec sept catholiques, la « Commission Médiévale Chrétienne »,
le service de la bibliothèque, l’équipe des responsables de l’Institut Œcuménique de Bossey, près de Genève,
comptent des représentants de l’Eglise catholique.
27
enraciné dans l’action mystérieuse de la Providence du Père, par le Fils et dans
et dans l’Esprit, qu’il touche aux profondeurs de la spiritualité chrétienne ».
Le 25 mai 1995, le Pape Jean Paul II publiait l’encyclique « Ut unum sint »
(Qu’ils soient un) sur l’engagement œcuménique. Même si les mots
« œcuménisme spirituel » ne sont employés qu’une seule fois, la réalité
imprègne bien des pages entières du document.11 Celui-ci reprend les points déjà
mentionnés ci-dessus, pour souligner « la priorité de la prière », prière
commune qui exprime l’amour de tous les baptisés, qui « amène à porter un
nouveau regard sur l’Eglise » et qui ouvre le chemin « à la conversion
personnelle en même temps qu’à la conversion communautaire ».
En janvier 2006, le CPPUC a publié un document intitulé « Œcuménisme
spirituel ». Document qui donne des orientations à tous ceux qui veulent
organiser ce secteur.
28
(côté protestant), et celle de 1864 (côté Anglican, Catholique et Orthodoxe), la
formule gagnante fut celle de l’Abbé Paul Couturier en 1935 qui proposa de
prier pour l’unité telle que le Christ la veut et par les moyens qu’il voudra. De
l’Octave, on évolua vers la Semaine de l’universelle prière pour l’unité des
chrétiens. Les dates du 18-25 janvier se sont imposées à tous dans l’hémisphère
Nord. Ailleurs, le D.O propose aux numéros 109 et 110 autres périodes
favorables, par exemple, le Triduum pascal, la neuvaine de la Pentecôte et autres
occasions (jour de fête nationale ou deuil publique, …). Ces dates furent
proposées en 1908 par le prêtre anglican Paul Watson de manière à couvrir la
période entre la fête de saint Pierre et celle de saint Paul. Ce choix a donc une
signification symbolique.
1740 env. En Écosse, naissance d'un mouvement pentecôtiste avec des liens en
Amérique du Nord, dont le message pour le renouveau de la foi appelle à prier
pour toutes les Eglises et avec elles.
29
1926 Le Mouvement « Foi et Constitution » commence la publication de «
Suggestions pour une Octave de prière pour l'unité des chrétiens ».
1968 Pour la première fois, la Semaine de prière est célébrée sur la base des
textes élaborés en collaboration par « Foi et Constitution » et le Secrétariat pour
l'unité des chrétiens (aujourd’hui Conseil pontifical pour la promotion de l'unité
des chrétiens).
1994 Le groupe international ayant préparé les textes pour 1996 comptait entre
autre des représentants de la YMCA et de la YWCA.
30
2008 Célébration du centenaire de la Semaine de prière pour l’unité des
chrétiens (l’Octave pour l’unité de l’Église, son prédécesseur, fut célébrée pour
la première fois en 1908).
1975 La volonté du Père : tout réunir sous un seul Chef, le Christ (Ep 1, 3-10)
God’s purpose: all things in Christ
(Projet de texte élaboré par un groupe australien - Réunion préparatoire à Genève, en
Suisse)
31
1977 L'espérance ne déçoit pas (Rm 5, 1-5)
Enduring together in hope
(Projet de texte élaboré au Liban, en pleine guerre civile. Réunion préparatoire à Genève, en
Suisse)
1979 Soyez au service les uns des autres pour la gloire de Dieu (1 P 4,7 .11)
Serve one another to the glory of God
(Projet de texte élaboré en Argentine - Réunion préparatoire à Genève, en Suisse)
1981 Un seul Esprit - des dons divers - Un seul corps (1 Co 12, 3b-13)
One Spirit - many gifts - one body
(Projet de texte élaboré par les Pères de Graymoor, USA - Réunion préparatoire à Genève,
en Suisse)
32
1988 L'Amour de Dieu bannit la crainte (1 Jn 4, 18)
The love of God casts out fear
(Projet de texte élaboré en Italie - Réunion préparatoire à Pinerolo, en Italie)
1990 Que tous soient un... afin que le monde croie (Jn 17)
That they all may be one... That the world may believe
(Projet de texte élaboré en Espagne - Réunion préparatoire à Madrid, en Espagne)
1994 La maison de Dieu : appelés à n'avoir « qu'un cœur et qu’une âme » (Ac 4, 32)
The household of God: called to be one in heart and mind
(Projet de texte élaboré en Irlande - Réunion préparatoire à Dublin, en Irlande)
1999 Ils seront ses peuples et lui sera le Dieu qui est avec eux (Ap 21, 3)
He will dwell with them as their God, they will be his peoples
(Projet de texte élaboré en Malaisie - Réunion préparatoire au Monastère de Bose, en Italie)
33
2000 Béni soit Dieu... qui nous a bénis en Christ (Ep 1, 3-14)
Blessed be God who has blessed us in Christ
(Projet de texte élaboré par le Conseil des Eglises du Moyen-Orient - Réunion préparatoire
au Sanctuaire de La Verna, en Italie)
2006 Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux (Mt 18, 20)
Where two or three are gathered in my name, there I am among them
(Projet de texte élaboré en Irlande - Réunion préparatoire à Prosperous, County Kildare, en
Irlande)
2007 Il fait entendre les sourds et parler les muets (Mc 7, 37)
He even makes the deaf to hear and the mute to speak
(Projet de texte élaboré en Afrique du Sud - Réunion préparatoire au Château de Faverges,
Haute-Savoie, en France)
2010 De tout cela, c’est vous qui êtes les témoins (Lc 24, 48)
You are witnesses of these things
(Projet de texte élaboré en Écosse – Réunion préparatoire à Glasgow, en Écosse)
34
2011 Unis dans l’enseignement des apôtres, la communion fraternelle, la fraction du pain et la
prière (cf. Ac 2, 42)
One in the apostles' teaching, fellowship, breaking of bread and prayer
(Projet de texte élaboré à Jérusalem – Réunion préparatoire à Saydnaya, en Syrie)
2017 Nous réconcilier. L’amour du Christ nous y prenne (cf 2Co 5, 14-20)
(Projet de texte élaboré en Allemagne – Réunion préparatoire à Wittemberg, en Allemagne)
2020 Ils nous ont témoigné une humanité peu ordinaire (Ac 28, 2)
(Projet de texte élaboré à Malta – Réunion préparatoire à Rabat, à Malta).
« Il n’y a pas d’unité sans prière. La vie religieuse est une école de prière.
L’engagement œcuménique répond, en premier lieu, à la prière du Seigneur
Jésus et se base essentiellement sur la prière. Un des pionniers de l’œcuménisme
et grand promoteur de l’Octave pour l’Unité, le P. Paul Couturier, utilisait une
image qui illustre bien ce lien entre l’œcuménisme et la vie religieuse : il
comparait tous ceux qui prient pour l’unité, et le mouvement œcuménique en
général, à un « monastère invisible » qui réunit les chrétiens de différentes
Églises, de divers pays et continents. Chers frères et sœurs, vous êtes les
premiers animateurs de ce « monastère invisible » : je vous encourage à prier
35
pour l’unité des chrétiens et à traduire cette prière dans vos comportements et
gestes quotidiens »12.
12
Pape François, Discours aux Religieux lors du Congrès œcuménique au Vatican, le 25/01/15 in zenit.org du
26/01/15.
36
- Répartir les rôles et les interventions ;
- Rédiger un document écrit ;
- Choisir un cadre approprié.
13
Réflexions et suggestion concernant le dialogue œcuménique. Document de travail à la disposition des
autorités ecclésiastiques pour l’application concrète du Décret sur l’œcuménisme, 15 août 1970, Service
d’Information (SI) 11 (1970/IV), pp 1-11.
14
Ibid., p 5.
37
Le but poursuivi par le dialogue œcuménique, d’après les Réflexions revêt de
multiples aspects : progresser ensemble dans la compréhension du mystère du
Christ et de son Eglise, dégager les convergences qui existent entre les diverses
traditions chrétiennes, apprendre à témoigner la foi commune au Dieu un trine,
chercher ensemble les réponses aux nouveaux problèmes qui se posent à la foi
chrétienne dans le monde d’aujourd’hui, contribuer à transformer les mentalités,
les manières de se comporter, la vie quotidienne des communautés chrétiennes,
en un mot prépare la plénitude de l’unité voulue par Christ ; toutefois, celle-ci
demeure le terme ultime des pensées et des désirs des interlocuteurs qui se
préparent à accueillir comme le grand don que Dieu seul accordera, de la
manière et à l’heure qu’il voudra15. En outre, le dialogue n’est pas seulement
discours, c’est d’abord une façon d’être ensemble dans la charité qui recrée
progressivement le milieu vital nécessaire à une commune profession de foi.
D’autre part, le dialogue n’est pas à lui-même sa propre fin.
En résumé, dans le dialogue œcuménique, les Eglises et communautés
chrétiennes sont appelées à une conversion à Jésus Christ, et à un
approfondissement de leur foi. Le dialogue œcuménique n’est donc pas une
occasion, du côté catholique, de chercher la conversion des autres chrétiens au
catholicisme, ni la « phagocytose » qui entraînerait l’augmentation numérique
de la communauté catholique mais il vise plutôt l’enrichissement mutuel et la
koinonia (communion) dans l’Esprit avec ceux qui ne partagent pas notre foi.
Chaque Eglise chrétienne doit chercher sa propre conversion à une fidélité plus
grande à l’Evangile16. Ces propos sont défendus par le théologien Jacques
Dupuis17.
2.2. Méthodologie des dialogues
15
Cf. Sur le dialogue œcuménique, document préparé par le Groupe mixte de travail entre l’Eglise catholique et
le COE, n° 1/ si 1967/III, pp27-28.
16
Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Ut unum sint sur l’engagement œcuménique (UUS), 25 mai 1995, n° 15 :
AAS 87(1995), pp929-930.
17
J. Dupuis, article « Dialogue interreligieux » in AA. VV., Dictionnaire de Théologie Fondamentale,
Bellarmin/ Cerf, Paris, 1992, p 263.
38
Il faut de prime à bord noter qu’il ne s’agit pas d’une méthode monolithique ou
unique mais plutôt de méthodes parallèles, étant donné que chaque dialogue suit
son propre chemin, caractérisé par des points positifs et négatifs. Ainsi, la
méthode varie soit que le dialogue œcuménique se déroule dans le cadre général
ou de façon plus précise.
2.2.1. En général
Certains éléments sont indispensables pour mener à bien un dialogue18.
- L’échange des idées qui revêt un double aspect : un aspect d’information
et un aspect de témoignage. « Il existe de part et d’autre une décision de
franchise vis-à-vis de celui qu’on écoute »19 ;
- La comparaison d’idées : ici les dialoguants mettent à nu un esprit de
sympathie attentive aux personnes et aux idées ;
- La recherche par la réflexion et la discussion des positions communes ;
- La mise en lumière d’aspects encore inaperçus.
Cette méthode a été jusqu’ici suivie par le dialogue entre l’Eglise orthodoxe et
l’Eglise catholique romaine. Etant donné les tensions entre les deux Eglises-
sœurs, héritées du passé, la décision de commencer par l’étude des points
communs pour, ensuite seulement, étendre la recherche aux points de
divergences, fut sans doute une démarche sage.
18
La plupart des dialogues commencent par une brève recherche visant à découvrir exactement où existent une
réelle convergence et peut être un consensus entre les partenaires, afin d’aborder graduellement les questions qui
sont au cœur de la séparation et des divisions.
19
Réflexions et suggestions, op. cit., p 8.
39
en sommeil par l’une des communautés, intuitions religieuses justes et
autres ;
- L’exposé de sa propre doctrine de façon constructive et non polémique ;
- Un travail de synthèse constructive ;
- L’ouverture de nouvelles perspectives qui conduit les dialoguants « à une
recherche de plus en plus approfondie à partir des points d’accord qu’ils
ont reconnus, les aides à prendre en conscience des révisions qui
apparaîtraient nécessaires dans les comportements et les pensées20 ».
40
Mariage /Mariages mixtes : A-C ; A-L ; C-M ; C-OO ; GMT
Spiritualité : C-M ; A-L
Mariologie : B-C ; A-L ; A-VC ; B-C ; C-D ; C-L ; C-O ; C-P ; GMT
Ethique : A-C ; GMT
Témoignage chrétien : B-C ; GMT
Eschatologie : C-OO
41
l’Eglise24. Le contentieux entre l’Occident et l’Orient ne date pas
d’aujourd’hui mais remonte aux premiers siècles de l’Eglise 25. La
Commission mixte internationale examine en ce moment le rapport
entre l’autorité et la conciliarité dans l’Eglise. Ainsi les Eglises
orthodoxes soutiennent conserver leur autonomie juridico-
ecclésiale tandis que la papauté exprimerait son ministère dans le
domaine du témoignage de la vérité et la charité libérées de ces
structures institutionnelles accumulées tout au long des siècles.
« La primauté s’exercerait ainsi pour l’unité » comme la souhaite
aussi Jean Paul II26.
3. Un autre point chaud qui trouve un dénouement heureux est celui
du Filioque ou procession du Saint Esprit par le Fils. Les
formules « du Père par le Fils » ou « du Père et du Fils » sont toutes
les deux légitimes et orthodoxes. Elles sont considérées comme
theologoumena différentes, c’est-à-dire deux conclusions
théologiques diverses mais compatibles dans la foi.
4. Les convergences et les accords fondamentaux ont permis aux
catholiques et aux orthodoxes de redécouvrir l’Eglise : l’Eglise
une, existante déjà dans l’unité même si imparfaite car il n’y a
qu’un seul Corps du Christ ; l’Eglise koinonia (communion) à la
lumière de la Sainte Trinité : les « Eglises-sœurs » non identiques
mais chacune pleinement Eglise.
Le problème majeur reste la « réception » de ces convergences par les Eglises et
familles confessionnelles mondiales, et d’en tirer les conséquences
ecclésiologiques et canoniques nécessaires.
24
Cf. L’uniatisme, méthode d’union du passé et la recherche actuelle de l’unité, Document de Balamand, 1993,
dans EO3, n° 1871-1883.
25
Sur cette question voir W. DE VRIES, Orient et Occident. Les structures ecclésiales vues dans l’histoire des
sept premiers conciles œcuméniques, Cerf, Paris, 1974.
26
UUS, n° 95-96.
42
2.4.2. Entre l’Eglise catholique romaine et les Eglises de la Réforme
En général, catholiques et protestants conçoivent différemment l’Eglise et les
sacrements. Pour les protestants, Dieu ne se laisse pas emprisonner ni
apprivoiser par les rites et les gestes de l’Eglise catholique romaine. Les
sacrements sont utiles mais secondaires car ils ne sauvent et ne justifient pas
l’homme qui se réconcilie avec Dieu uniquement à travers la foi en la mort et
résurrection du Christ.
Pour les catholiques, l’Eglise a été voulue et fondée gratuitement par le Christ.
Les sacrements ne sont que la célébration ecclésiale de la justification par la foi.
A travers les sacrements, signes efficaces du salut, l’Eglise, dans la foi, se
purifie et se sanctifie réellement.
Protestants et catholiques divergent aussi sur la nature et la mission de l’Eglise 27.
Concernant les ministères, pour les premiers, la médiation du Christ se
manifeste uniquement dans le sacerdoce commun des fidèles tandis que pour les
seconds, cette médiation se manifeste efficacement et est rendue présente dans le
sacerdoce ministériel ou ordre28. Un autre terrain où les divergences sont
notoires est celui des questions d’éthique personnelle et sociale, nouvelles
sources potentielles de division29. La question du ministère d’unité de l’Evêque
de Rome est également posée différemment. Même si la nécessité d’un tel
ministère se fait de plus en plus sentir30.
27
Cf. Dialogue catholique romain-Réformé : Vers une compréhension commune de l’Eglise, 1984-1990, ch. III
dans SI 74 (1990/III), pp 108-116.
28
Cf. Vers une compréhension commune de l’Eglise, n°142a.
29
Cf. GROUPE MIXTE DE TRAVAIL, Sixième rapport, chapitre IIIA 1c) dans SI 47 (1991/III), p. 63 ; ARCIC
II, La vie dans le Christ : la morale, la communion de l’Eglise, 1993 dans SI 85 (1994/I), pp.55-78.
30
Cf. CONFERENCE MONDIALE D FOI ET CONSTITUTION, Rapport de la II section, Saint Jacques de
Compostelle, 1993 : Confessing the one faith to God Glory, n° 31,2 : Faith and order Paper n° 166, COE,
Genève, 1994, p. 32.
43
Toutefois, les Eglises sont parvenues à certaines convergences : le Baptême est
accepté par toutes si la doctrine est la même, la célébration reste encore
diversifiée31.
L’Eucharistie est étudiée par divers dialogues bilatéraux et multilatéraux dans un
climat de grande réconciliation sur la question de la présence réelle du Christ
dans le sacrement et celle du sacrifice32. Cependant deux points doctrinaux et un
point pastoral font encore difficulté. C’est, d’une part, la présidence de
l’Eucharistie et, la conservation et la vénération du sacrement au-delà de la
célébration eucharistique ; et d’autre part, l’intercommunion ou l’hospitalité
eucharistique entre les chrétiens qui ne sont pas encore en pleine communion.
Le débat sur le rapport entre la Tradition et les Saintes Ecritures est désormais
clarifié33. Sur le ministère ordonné, les uns et les autres se déclarent pour une
« réconciliation des ministères » en partant de l’ecclésiologie christologique et
pneumatologique34.
Le 31 décembre 1999 à Augsbourg en Allemagne, catholiques et luthériens ont
signé une Déclaration d’accord sur la justification par la foi. Ratification
identique en 2006 entre catholiques et méthodistes.
31
Les réactions officielles des Eglises au BEM ont monté un grand degré de convergence et d’abord sur le
baptême, l’Eucharistie et le Ministère.
32
Cf. GROUPES DES DOMBES, Pour la communion des Eglises, Centurion, Paris, 1988, p. 42 ; ARCIC 1,
Rapport final, Paris, Cerf, 1982, pp. 26-34 ; Dialogue catholique romain-Réformé, La présence du Christ dans
l’Eglise et dans le monde, 1997 dans DC 1978, n° 1737, pp. 206-223 ; Dialogue catholiques romain-luthérien,
Face à l’unité, Cerf, Paris 1986, pp. 61-138.
33
Cf. Dialogue romain-Réformé 1984-1990 ; Dialogue catholique-pentecôtiste, Rapport final, 1984 : EO 3, n°
2073-2076. Autorité de l’Eglise sur l’Ecriture ou autorité de l’Ecriture sur l’Eglise ? SESBOUE B., art. cit., pp.
65-66. Le même auteur soutien plus loin que « l’Eglise fait l’Ecriture, mais l’Ecriture fait l’Eglise » (ivi, p. 173).
34
Cf. FOI ET CONSTITUTION, Baptême, eucharistie et ministère 1982-1990. Rapport final sur le processus
« BEM » et les réactions des Eglises, op. cit., p. 171 ; GROUPE DES DOMBES, Pour une réconciliation des
ministères, Presses de Taizé, 1973, n° 38-47.
35
Cf. D.O., chap. V.
44
avec patience en des lieux appropriés. Par contre, nous pouvons brûler les étapes
en amour et être pleinement unis dès à présent36.
36
Père CANTALAMESSA R., Cf. Cinquième prédication de Carême 2016 in zenit.org du 18/03/2016.
45
1. L’étude commune des questions sociales et éthiques : Bioéthique et
génétique (manipulation des embryons humains) – avortement –
euthanasie - clonage.
2. Le domaine du développement, des besoins humains et de sauvegarde
de la création (démographie – écologie – migrants – réfugiés – droits
de l’homme).
3. Le domaine de la médecine : éthique médicale sur la génétique et la
santé publique (lutte contre le VIH/SIDA).
4. Les moyens de communications sociales37 (Presse – Radio – TV -
Internet) : « Evangéliser les médias et par les médias ».
Cette collaboration œcuménique est fortement recommandée dans « la
Charte œcuménique européenne » (Strasbourg, avril 2007).
37
Désormais appelés « nouvelles technologies de l’information et de la communication » (NTIC).
46
CHAPITRE VI : L’OECUMENISME AFRICAIN
1. QUELQUES DECLARATIONS
1.1. L’Eglise catholique romaine
Le Pape Jean Pau II interpelle les catholiques à collaborer avec les autres
chrétiens du continent. « Unis au Christ dans leur témoignage en Afrique, les
catholiques sont invités à développer un dialogue œcuménique avec tous les
frères baptisés des autres confessions chrétiennes, afin qu’advienne l’unité pour
laquelle le Christ a prié et qu’ainsi leur service des populations du continent
rendent l’Evangile plus crédible aux yeux de ceux et celles qui cherchent Dieu.
Un tel dialogue pourra se concrétiser dans les initiatives comme la traduction
œcuménique de la Bible, l’approfondissement théologique de certains aspects
de la loi chrétienne, ou encore en rendant de concert un témoignage
évangélique pour la justice, la paix et le respect de la dignité humaine »
(Ecclesia in Africa, n. 65).
Le Pape Benoit XVI invite aussi les Chrétiens africains à s’engager de plus dans
le dialogue oecuménique et à se mettre au service de la réconciliation, de la
justice et de la paix : « J’exhorte toute la famille ecclésiale – les Eglises locales,
les Instituts de vie consacrée et les associations et mouvements de laïcs – à
poursuivre ce chemin de façon plus résolue, dans l’esprit et sur la base des
indications du Directoire œcuménique, et à travers les diverses associations
œcuméniques existantes. J’invite par ailleurs à en former de nouvelles là où
cela peut représenter une aide à la mission. Puissions-nous entreprendre
ensemble des œuvres de charité et protéger les patrimoines religieux grâce
auxquels les disciples du Christ trouvent les forces spirituelles dont ils ont
besoin pour l’édification de la famille humaine » (Africae Munus, n. 89).
1.2. Le Conseil œcuménique des Eglises (COE)
Le COE a tenu deux Assemblées Générales en Afrique :
47
- La 5e AG de 1975 s’est déroulée à Nairobi (Kenya) sur le thème : « Jésus
Christ libère et guérit ».
- La 8è AG s’est tenue en septembre 1998 à Harare (Zimbabwe) sur le
thème : «Tournons-nous vers Dieu dans la joie de l’espérance » afin de
marquer et de célébrer ainsi les 50 ans du Conseil mondial. Une manière
claire de dire que l’avenir de l’œcuménisme est en Afrique.
48
Conférence des Evêques catholiques sud-africains dans la lutte contre
l’apartheid et un autre exemple bien connu. E 1970, MOBUTU au Zaïre,
contraint toutes les Eglises protestantes à converger dans une Eglise protestante
unie, « Eglise du Christ au Zaïre », qui est l’unique Eglise protestante reconnue
par l’Etat.
Un tel œcuménisme forcé a seulement une valeur limitée, dans la mesure où les
différences fondamentales restent intactes : quand la pression externe se
desserre, les groupes isolés en général se convertissent au dénominationalisme
ou au repli identitaire.
49
actuelles. Les Conseil, quoique, tous orientés dans le secteur des services,
devinrent des agences pour le développement perdant ainsi leur propre raison
d’être strictement œcuménique.
3. COLLABORATION OECUMENIQUE
Autres incarnations de l’esprit œcuménique dans le contexte africain sont les
sociétés bibliques, les associations médicales appartenant aux Eglises, les
groupes d’études œcuméniques et les associations littéraires chrétiennes, qui
promeuvent des publications conjointes, s’occupent de la distribution des
œuvres publiées et encouragent l’activité des autres locaux. C’est le rôle joué
jusqu’à présent et pendant 40 ans par les éditions CLE à Yaoundé.
50
5. ORGANISME OECUMENIQUES
Il existe de nombreux organismes œcuméniques au niveau régional et
continental. En voici les deux principaux :
5.1. La CETA
La Conférence des Eglises de toute l’Afrique (CETA) fut inaugurée en 1963 à
Kampala comme une organisation panafricaine de coopération. Au cours des
années, malgré des problèmes de mauvaise gestion, la CETA est devenue en
instrument opérationnel de collaboration ecclésiastique et d’influence politique.
Toutefois, cette institution évolue dans un contexte historique chargé d’un
héritage lourd :
1. Le foisonnement et la pauvreté des Eglises locales comme aussi la
profonde cassure entre les langues française, anglaise et portugaise ;
2. Concernant le style opérationnel, la CETA a copié celui du COE.
Actuellement, elle se bat pour acquérir son identité spécifique
d’organisme œcuménique africain.
5.2. L’AOTA
Fondée en 1977 avec siège à Yaoundé, l’Association Œcuménique des
Théologiens Africains tient des congrès et des conférences dans le but
d’emmener les chrétiens de toutes les confessions à relire la Bible ensemble,
avec les yeux neufs, sur la base de nos cultures africaines : en 1980 sur la
parole de Dieu et les langues des hommes ; en 1983 sur la théologie noire et la
libération en Afrique du Sud ; en 1984 sur le dialogue entre les théologiens
africains et européens sur la mission de l’Eglise aujourd’hui ; en 1985 sur
l’inculturation et le dialogue œcuménique. Les activités de l’AOTA sont en
veilleuse depuis l’assassinat en 1995 de son secrétaire général, le père Engelbert
MVENG.
51
6. PERSPECTIVES
L’œcuménisme trouve progressivement en Afrique sa direction et sa
configuration, avec la conscience confessionnelle très vive et présente. En plus,
il prend la forme de déclarations occasionnelles d’unité lors des assemblées,
mais il s’exprime aussi en de moments significatifs de collaboration concrète au
niveau national et international. On pourrait rétorquer que, dans le cadre du
mouvement œcuménique international, les Eglises africaines se trouvent en
position de désavantage, du moment où elles doivent régler les comptes avec
une structure et un style œcuménique tout à fait étranger à la grande partie
d’entre elles. Souvent les thèmes à l’ordre du jour ne sont pas choisis par elles
et, aussi quand ils le sont, les africains continuent à être l’objet d’attitudes
paternalistes. Certaines structures, par exemple, les Conseils d’Eglises, ne
semblent pas être enracinées en profondeur et les fonds destinés aux projets à
caractère œcuménique proviennent souvent d’outre-mer. Mais il ne faut pas
oublier certaines réalisations positives.
Durant les années 80, par exemple, le Conseil des Eglises de Pretoria a été
relancé comme instrument pour réaliser l’unité des Eglises locales dans leur
action au niveau social, comme dans les quartiers noirs. Le Conseil bouge à
partir d’une conscience claire de l’exigence de l’unité dans le monde chrétien et
d’une action sociale unitaire ; il défend les droits de ceux qui sont emprisonnés
sans procès ; il exerce des pressions sur les autorités et organise des formes
d’assistance légale. En outre, il a développé une stratégie qui prévoit l’emploi
pour assister à domicile les souffrants et les nécessiteux.
Egalement la koinonia réalisée en République Sud-Africaine est significative :
une tentative d’intégration et de réconciliation à travers la consommation
commune des repas dans les cases de l’un ou de l’autre, dans un pays où, au
contraire, il n’était pas normalement possible pour de personnes de races
diverses d’entretenir des relations amicales. Cette koinonia est entrain de
52
renforcer les liens entre les Eglises et entre les races, faisant croître un profond
sentiment d’engagement religieux et une politique plus mûre.
L’œcuménisme africain est fragile et montre de nombreuses limites. Malgré
ceci, les initiatives du mouvement œcuménique témoignent la conscience
croissante propre de l’Eglise africaine, la conquête d’une commune identité de
chrétien au-delà des différences de langue et de dénomination, la célébration de
l’unité, de la foi commune et de l’engagement, au-delà de chaque diversité.
53
CHAPITRE VII : L’OECUMENISME EN AFRIQUE CENTRALE
Pourcentage
Pays Populations Chrétiens Total
13 655 000
Cameroun 19 522 000 Catholiques : 39 70 %
%
Protestants : 26 %
Orthodoxes : 0.5
%
3 550 8666
Centrafriqu 4 422 000 Catholique : 29 % 80 %
e Protestants : 51 %
3 163 697
Congo 3 683 000 Catholiques: 48 % 85 %
Brazzaville Protestants : 37 %
Gabon 1 389 000 800 225 72 %
Catholiques: 67 %
Protestants: 5 %
667 000
38
Position soutenue par la Conférence Episcopale Nationale du Cameroun lors de son Assemblée plénière d’avril
2015 et par la Conférence Episcopale de la Province Ecclésiastique de Yaoundé (CEPY) le 8 mars 2017 à Kribi.
39
MESSINA J.P. , « Christianity in Central Africa” in Anthology of African Christianity, USA, 2016, pp. 238-
239
54
Guinée 676 000 Catholiques: 95 % 98 %
Equatoriale Protestants: 3 %
3 946 000
Tchad 11 274 000 Catholiques: 20 % 35 %
Protestants: 15 %
121 931
Sao Tomé et 160 000 Catholiques: 80 % 90 %
Principe Protestants: 8 %
Les catholiques sont majoritaires dans tous les pays de l’Afrique centrale sauf en
Centrafrique avec 29% contre 51 % des protestants. La grande majorité des
familles chrétiennes cohabite pacifiquement sans organiser des activités
œcuméniques concertées. Je qualifie cette forme d’œcuménisme de naturelle ou
de non structurée. Sauf au Congo Brazza où la forme structurée a vu le jour en
1970 avec la création du Conseil Œcuménique des Eglises Chrétiennes du
Congo (COEECC) sûrement à cause de l’influence du pouvoir marxiste.
Depuis octobre 2016, nous sommes en plein dans l’Année Luther qui
commémore le cinquième centenaire de la Réforme protestante. Pourquoi ne
profitons-nous pas de ce « Kairos », moment favorable pour organiser des
activités communes avec des pasteurs ou avec des communautés protestantes ?
2.1. LE CEPCA
Créée en 1951, la Fédération des Eglises et Missions Evangéliques du Cameroun
(FEMEC) est devenue en 2004 le Conseil des Eglises Protestantes du Cameroun
(CEPCA). Le CEPCA serait le plus ancien regroupement officiel d’Eglises
chrétiennes en Afrique centrale. Il calque son modèle de celui du Conseil
œcuménique des Eglises (COE) ou de la Conférence des Eglises de Toute
l’Afrique (CETA). Avec son siège à Yaoundé, il compte 11 Eglises membres
dont les plus influentes sont l’Eglise Evangélique du Cameroun, l’Eglise
Presbytérienne du Cameroun et la Presbyterian Church in Cameroon, plus deux
membres associés et trois demandes d’adhésion en instance40.
Pour son fonctionnement, le CEPCA dispose de trois organes institutionnels qui
sont : le Conseil Annuel, le Comité Exécutif et les Comités de gestion des
secteurs d’activités. Il dispose aussi de sept Départements : le Département de
40
Cf. MESSINA J.P. et VAN SLAGEREN, Histoire du Cameroun. Des origines à nos jours, Karthala-Clé,
2005, pp. 250-254.
55
l’Education qui supervise l’enseignement protestant, le Département du
Développement économique et social, le Département des Services Sociaux, le
Département des Femmes, le Département du Témoignage Chrétien et de la
Jeunesse, et le Département de l’Information et de la Communication. Son
Président actuel est le Révérend Robert Goyek de l’Eglise Fraternelle
Luthérienne du Cameroun tandis que le Secrétaire Général, qui travaille à plein
temps, est le Révérend Jonas Kemogne de l’Eglise Evangélique du Cameroun.
La nouvelle vision du CEPCA est de fusionner toutes les Eglises membres pour
former enfin « l’Eglise protestante unie du Cameroun » d’ici 2050.
L’œcuménisme pratiqué par le CEPCA est un œcuménisme inter-protestant qui
est appelé à évoluer pour s’ouvrir davantage aux catholiques et aux orthodoxes
afin de créer ensemble un Conseil National d’Eglises Chrétiennes au Cameroun.
2.2. L’AEC
L’Alliance des Eglises de Centrafrique fut mise sur pied en fin 1990. Les trois
principales confessions de l’AEC (qui se retrouvent dans presque toutes les
régions du pays, dans 15 des 16 préfectures à l’exception du Nord-Est, où la
seule véritable présence est celle de l’Eglise catholique) sont : la Communauté
des Eglises Apostoliques, l’Association des Eglises de la Coopération
Evangélique et l’Association des Eglises Baptistes Centrafricaines.
Selon Jimi Zacka, « on a remarqué l’impuissance des Eglises de l’AEC dans les
crises politiques récentes en République Centrafricaine »41.
2.3. LE COEECC
Créé en 1970, le Conseil Œcuménique des Eglises Chrétiennes du Congo
célèbre cette année ses 47 ans d’existence. Les confessions chrétiennes
fondatrices sont : l’Eglise Catholique, l’Eglise Evangélique du Congo et
l’Armée du Salut. L’Eglise Evangélique Luthérienne au Congo et l’Eglise
Orthodoxe Grecque au Congo ont adhéré au Conseil plus tard. Le COEECC ne
fonctionne pas comme une « super Eglise » et l’organisation des actions se fait à
partir des domaines œcuméniques, des services et des partenaires. Le 29 janvier
1995, le COEECC a fêté ses 25 ans de fondation. Mgr Anatole Milandou,
Archevêque de Brazzaville, a achevé son mandat de président du Conseil en
2012. La nouvelle équipe est présidée par le révérend pasteur Tchibinda
Mavoungou et secondé par Mgr Pantalémon pour un mandat de xxx ans.
Son histoire se déroule en quatre étapes principales :
1° De l’opposition à l’ouverture : l’ère des pionniers.
Les Eglises divisées et vivant dans la méfiance, le mépris, la haine et l’ignorance
mutuelle décidèrent de se mettre ensemble pour une juste cause, celle de l’unité
de l’Eglise. C’est l’ère des pionniers : pour l’Eglise évangélique (EEC) : les
pasteurs Raymond Buana-Kibongui et Jean Mboungou ; pour l’Eglise
catholique : nosseigneurs Théophile Mbemba, Lois Badila et le cardinal Emile
41
ZACKA Jimi, « Le Christianisme en Centrafrique » in Anthology of African Christianity, p. 525.
56
Biayenda ; pour l’Armée du Salut (ADS) : les officiers Pierre Hausdorff, Henri
Durand et Johan Baronowsky ; et pour l’Eglise Kimbanguiste (EJCSK) : le
pasteur David Nsomi.
2° Les premières démarches : 1963-1969
A l’initiative de l’Eglise évangélique du Congo, des rencontres ont eu lieu entre
les diverses Eglises protestantes pour une meilleure entente et collaboration ;
des contacts sont établis avec l’Eglise catholique. Suite à plusieurs invitations
d’Eglise à Eglise pour mieux se connaitre, le 5 novembre 1969, les responsables
des quatre communautés fondatrices se rencontrèrent pour la première fois
ensemble afin de préparer et de célébrer la Semaine de l’Unité du 18 au 25
janvier 1970.
3° La création du Mouvement œcuménique
Janvier 1970 marque la naissance du mouvement œcuménique au Congo. La
« Déclaration » de 1972 en fixe les objectifs. Fin 1972 est formé
« L’Association des Eglises chrétiennes du Congo » qu’on appelle aujourd’hui
« Le Conseil œcuménique des Eglises chrétiennes du Congo » (COEECC).
4° La Période des actions pour l’unité et pour la paix
-L’action au service de l’unité à travers célébrations œcuméniques, diffusion de
la Bible et initiatives sociales et caritatives communes. Cela permet au Conseil
œcuménique de se positionner comme un instrument de communion qui aide les
Eglises d’affirmer ensemble leur recherche d’unité et leur témoignage du Christ
Sauveur dans la réalité congolaise.
- L’action au service de la paix à travers de nombreux messages adressés aux
autorités politiques et aux âmes de bonne volonté. C’est un engagement que le
Conseil avait pris durant la Conférence nationale de 1991 et il entend l’assurer
dans la vérité et la fidélité à l’Evangile d’amour et de paix.
2.4. LE COVY
Le Cercle œcuménique de la ville de Yaoundé (COVY) a été créé en janvier
2001 par des prêtres catholiques et des pasteurs protestants. Il accueille
désormais des laïcs (hommes, femmes et jeunes). C’est un groupe privé qui
rassemble des baptisés catholiques, orthodoxes et protestants engagés
pour «créer une harmonie entre les différentes familles chrétiennes et œuvrer
pour la mise sur pied d’un Conseil d’Eglises chrétiennes au Cameroun »42.
C’est une association chrétienne apolitique et à but non lucratif. Trois périodes
d’activités couvrent toute l’année civile43 :
a) La Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens qui se déroule du 18 au
25 janvier avec le concours de la documentation officielle du Groupe
Mixte de Travail (GMT) entre l’Eglise Catholique Romaine et le Conseil
Œcuménique des Eglises;
42
Article 3 des Statuts du COVY.
43
Article 30 du Règlement Intérieur du COVY. Voir ETOUNDI ESSAMA Etienne, La pastorale des mariages
mixtes, Imprimerie Saint-Paul, Yaoundé, 2012, quatrième de couverture.
57
b) La cinquième semaine du Carême, avant la Semaine sainte en mi-mars,
afin de préparer les chrétiens à vivre spirituellement la mort, la
résurrection et la glorification de notre Seigneur Jésus Christ ;
c) La Neuvaine de la Pentecôte en juin afin d’accueillir ensemble les dons du
Saint-Esprit.
Les principales activités œcuméniques retenues sont : les veillées de prière, les
tables-rondes, les concerts de musique chrétienne et les visites aux personnes
vulnérables telles que les prisonniers, les enfants de la rue, les personnes du
troisième âge, les enfants sourds-muets, les enfants orphelins, les lépreux…
La Coordination, qui assure l’Exécutif au quotidien, est composée de 12
membres élus pour un mandat de trois ans renouvelable une fois. Le COVY
travaille en étroite collaboration avec les Sœurs Carmélites, les Focolari, la
Communauté Saint Egidio et l’Alliance Biblique du Cameroun dans le domaine
œcuménique et l’Association Camerounaise pour le Dialogue interreligieux
(ACADIR) dans le domaine interreligieux.
3. LA COLLABORATION OECUMENIQUE
Autres incarnations de l’esprit œcuménique dans le contexte sous régional sont
les sociétés bibliques, les associations littéraires chrétiennes et les instituts de
formation œcuméniques, qui promeuvent des publications conjointes,
s’occupent de la distribution des œuvres publiées et encouragent l’activité des
auteurs locaux.
58
- Le Programme « La Foi vient en écoutant » (FVE) est un programme d’écoute
de la Parole de Dieu sur des supports audio ;
- Le Programme Alphabétisation permet à chacun de lire la Bible dans sa
langue et entrer en dialogue avec Dieu ;
- Le Programme TAZI se réfère à la Loi, les Prophètes, les Psaumes et
l’Evangile de Jésus Christ ;
- Le Programme « Kidgames » est une olympiade biblique des enfants de 4 à 14
ans ;
- Le Projet Esther vise l’encadrement des adolescentes, des filles mères et des
filles victimes d’exploitation sexuelle ;
- Le Projet « Bible for Orphans » est un programme d’accompagnement des
orphelins.
4. LES PERSPECTIVES
45
Cf., MESSINA J.P. et VAN SLAGEREN, Histoire du Cameroun. Des origines à nos jours, p. 268.
46
Cf, Ibidem, p. 263.
59
Il est grand temps de structurer l’œcuménisme dans notre sous-région Afrique
centrale au niveau diocésain et au niveau national. Il faut « avancer au large »
Duc in altum, (Luc 5, 4) en formant les agents pastoraux (consacrés et laïcs)
appelés à animer ces structures car la bonne volonté seule ne suffit plus.
60
Congo (COEECC). En s’appuyant sur l’adage africain qui dit : « l’union fait la
force », cette structure permettrait de « mutualiser » les forces (l’expression est
à la mode). Avant de vous présenter ses différentes missions ou finalités,
d’abord une anecdote.
Il y a une dizaine d’années environs, Mgr Gregorios, Archevêque de la Sainte
Métropole orthodoxe du Cameroun et Exarque du Patriarche d’Alexandrie pour
l’Afrique centrale, m’avait demandé : « Père Etienne, pourquoi les Eglises
chrétiennes n’ont-elles pas de Télévision à Yaoundé ? ». Je répondis : « Belle
question et beau projet. Mais de quoi discutiez-vous entre Responsables
d’Eglises ? » Un tel projet, s’il voyait le jour, non seulement il ferait parler les
Eglises d’une seule voix, mais il serait défendu et porté par un conseil d’Eglises.
Les fonds, le personnel et les charges seraient partagés par toutes les Eglises
pour la seule gloire de Dieu et l’Annonce de l’Evangile.
CONCLUSION
J’achève ce septième chapitre en reprenant les paroles de l’Instrumentum
Laboris à la page 5 au n° 6: « Aujourd’hui, l’un des défis majeurs qui se posent,
sur le plan pastoral, aux Eglises de l’ACERAC, est le dialogue œcuménique et
47
Cf. Statuts du Conseil d’Églises chrétiennes au Grand-Duché de Luxembourg.
61
interreligieux, si l’on tient compte de l’actualité politico-religieuse du monde en
général, et de la sous-région en particulier »48.
Comme vous le constatez le dialogue œcuménique existe en Afrique centrale
mais il peut mieux faire et aller en eaux profondes en se structurant pour la
promotion de l’unité, de la paix, du vivre-ensemble et du respect mutuel.
Que cette XIe Assemblée Plénière de l’ACERAC ne soit pas une Assemblée
Plénière de plus. Cinquante après la promulgation du Décret conciliaire sur
l’œcuménisme Unitatis Redintegratio et la clôture du Concile Vatican II, les
Diocèses et les pays de l’Afrique centrale sont invités à passer à la vitesse
supérieure en prévoyant la mise en œuvre et le suivi des vives recommandations
qui émanent des Assisses de YAOUNDE 2017.
48
ACERAC, Instrumentum Laboris, XIe Assemblée Plénière, Yaoundé, 2017, p. 5, n° 6.
62