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UCL-FOPM 2000 Hervé Pourtois

2012-2013

Ethique de l’éducation et de la formation


La liberté

1. La liberté comme question philosophique


Plusieurs niveaux d’interrogation philosophique sur la liberté.
• La liberté comme caractéristique anthropologique (essentielle) :
‘L’homme est libre’ (>< il est intégralement déterminé par des
conditionnement naturels, sociaux,…).
• La liberté comme idéal de vie personnelle : ‘pour mener une vie
pleinement humaine, un individu doit, à travers ses actions, viser la
réalisation de sa liberté, notamment en s’émancipant du poids des
traditions’.
• La liberté comme idéal politique : ‘une société juste doit garantir à
chacun de ses membres (ou à tout être humain) un statut qui
garantisse sa liberté’.

C’est cette acception politique qui retiendra notre attention. Elle soulève la
question de la définition de la liberté politique et de la détermination des
conditions qui la garantissent.
• Quelle forme de liberté l’Etat ou la société doivent-ils garantir en
priorité ? Par rapport à quel type d’action ? Par rapport à quel obstacle
éventuel ?
• Faut-il garantir la même liberté pour tous ?
• Quels moyens l’Etat a-t-il le droit d’utiliser pour garantir la liberté des
individus ?

2. La liberté dans la philosophie politique libérale classique


La doctrine philosophique moderne qui a le plus mis l’accent sur la liberté
comme idéal politique est le libéralisme politique.
2.1. On trouve une bonne définition de la conception libérale de la liberté dans
le Léviathan (1651) de Thomas Hobbes (qui n’est toutefois pas comme tel est
un libéral) :
« Un homme libre est celui qui, pour les choses que selon sa force et
son intelligence il est capable de faire, n’est pas empêché de faire ce
qu’il a la volonté de faire » (Léviathan, ch. 21).
On caractérise souvent cette conception de négative (I. Berlin).
2.2. Dans cette perspective, la notion de liberté est indissociable de celle de
‘droits fondamentaux’ ou ‘libertés fondamentales’ (au pluriel). Ces droits (ex. :
la liberté de circulation) sont définis comme des prérogatives de l’individu, des
actes qu’il doit pouvoir accomplir sans dépendre de la volonté d’autrui, et qui
sont des conditions essentielles de sa liberté.

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2.3. Selon la doctrine libérale, l’Etat de droit est essentiel à la liberté (Cf. John
Locke, Two Treatises of Government, 1690). C’est grâce à la protection
juridique que l’individu peut être libre. Cette protection juridique est destinée à
le protéger contre les interventions arbitraires, qu’elles viennent d’un autre
individu ou de l’Etat lui-même. L’Etat de droit implique la forme générale de la
loi, la séparation des pouvoirs, l’indépendance et l’impartialité des juges.
2.4. La liberté implique le refus du paternalisme, en particulier de la part de
l’Etat : Le paternalisme consiste à contraindre ou empêcher un individu
d’accomplir un acte et ce, en vue de promouvoir son bien-être ou d’éviter qu’il
se nuise à lui-même. Contre ce paternalisme, la position libérale affirme que
la seule contrainte légitime est celle qui vise à garantir la liberté d’un individu
à l’encontre des (risques de) dommages infligés par autrui.
« La seule fin pour laquelle l'humanité puisse être justifiable,
individuellement ou collectivement, d'enfreindre la liberté d'action de tel
ou tel de ses membres, est la légitime défense. [..] Le seul but en vue
duquel on puisse à juste titre recourir à la force à l'égard de tout
membre d'une communauté civilisée, contre sa propre volonté, c'est de
l'empêcher de faire du mal aux autres. Son propre bien, physique ou
moral, n'est pas une justification suffisante. [..] Sur lui-même, sur son
propre corps et son propre esprit, l'individu est souverain. »
(J.S. Mill : On Liberty, 1859)

3. La liberté dans le libertarisme contemporain


Cf. Robert Nozick, Anarchy, State and Utopia, 1974.

3.1. La liberté comme propriété de soi


Principe fondamental : respect de l’individu comme fin en soi, c’est-à-
dire comme un être capable de se déterminer par lui-même.
La liberté = la propriété de soi-même = faire ce que l’on veut de soi-
même. Impératif moral inconditionnel de respect des droits que chacun
possède sur lui-même (droits de veto = on ne peut utiliser qqn comme
un moyen sans son consentement).
Le respect de la liberté individuelle est un devoir absolu que l’on doit
respecter quelles qu’en soient les conséquences pour le bien-être
individuel ou collectif. (déontologisme libertarien >< conséquentialisme
des utilitaristes).
Les trois seules restrictions légitimes à la liberté :
• On n’a pas le droit d’aliéner de manière irréversible sa liberté
(l’esclavage volontaire) ;
• On peut être paternaliste à l’égard des enfants : réduire leur liberté
présente en vue de les mettre en position d’exercer leur liberté dans
le futur ;
• L’Etat peut restreindre la liberté de ceux qui violent la liberté des
autres (mais pas ceux qui représentent une menace potentielle).

3.2. Une conception propriétariste de la justice : la propriété des choses.


On devient le légitime propriétaire d’un bien

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• soit en l’acquérant grâce à une transaction volontaire avec la
personne qui en était auparavant le légitime propriétaire ;
• soit en le créant sans utiliser autre chose, outre soi-même,
que des biens acquis de cette manière.
Dès lors, une distribution de biens est juste si et seulement si elle
respecte le droit de propriété de chacun.
Remarques :
- Une conception purement procédurale de la justice (Cf. la fable de
Wilt Chamberlain) ;
- La distribution inégale des dotations naturelles est aléatoire mais
non pas injuste. Chacun est propriétaire de ses talents et des
bénéfices qu’il en retire.

3.3. Une conception minimaliste du rôle de l’Etat


Protéger la liberté et le droit de propriété contre les interférences
d’autrui en sanctionnant les violations et en arbitrant les conflits.

4. Au-delà du libertarisme : une conception complexe de la liberté


Le libertarisme repose sur une conception trop étroite de la liberté. Il ne prend
pas en considération :
• l’importance de moyens nécessaires à l’exercice effectif de la
liberté par un individu ;
• L’importance de l’autonomie personnelle dans la formation
des choix.
• L’importance de la participation à l’élaboration des normes
ou décisions collectives.
Pour prendre au sérieux ces trois aspects, il importe d’adopter une conception
complexe de la liberté intégrant trois distinctions.

4.1. Liberté formelle et/ou liberté réelle.


• La liberté formelle (négative) : l’absence d’interférence d’autrui (ou de
l’Etat) dans mon existence et dans mes choix. Cela suppose un Etat de
droit (Cf. Nozick)
• La liberté réelle (positive) : la capacité effective d’agir d’une certaine
manière (ex. se déplacer), de réaliser ses choix.
Celle-ci suppose la jouissance de ressources matérielles et la
disponibilité d’une diversité d’options que l’Etat doit garantir (soit en les
fournissant lui-même soit en veillant à ce qu’elles soient fournies). Cet
interventionnisme étatique peut exiger une plus grande limitation de la
liberté formelle (notamment dans le domaine économique).
Cf. Karl Marx : critique des libertés formelles ‘bourgeoises’
Cf. John Rawls, A Theory of Justice (1971) : la justice exige liberté
formelle et liberté réelle, mais pour les libertés fondamentales, priorité
des libertés formelles.
Pour les libertariens, l’Etat doit se limiter à protéger la liberté formelle :
« empêcher d’empêcher ». Pour d’autres, notamment les égalitaristes
libéraux, l’Etat doit en outre assurer une liberté réelle en veillant à garantir
l’accès aux moyens nécessaires.
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Ex. : la liberté d’enseignement : l’Etat ne peut empêcher personne d’ouvrir
une école et/ou l’Etat doit garantir les ressources nécessaires à ceux qui
veulent ouvrir une école (liberté subsidiée).

4.2. Indépendance et/ou autonomie


Emmanuel Kant (fin du 18e s.) distingue
• La liberté-indépendance : pouvoir faire ce que je veux (liberté
extérieure);
• La liberté-autonomie : pouvoir me donner à moi-même ma propre loi,
former ma volonté par moi-même, former des choix raisonnés (liberté
intérieure).
L’une n’implique pas nécessairement l’autre.
On peut avoir la capacité d’accomplir ses désirs alors que ceux-ci sont
conditionnés, non formés de manière autonome.
On peut être autonome dans la formation de ses choix alors que l’on
est empêché de les réaliser.
Mais les deux formes de liberté semblent essentielles.

Elles peuvent être garanties formellement et/ou réellement.


Ex. : Importance de l’éducation scolaire pour l’indépendance et l’autonomie
réelles.
Celui qui est plus/mieux scolarisé
• dispose d’un éventail plus large d’options de vie et de carrière et de
moyens pour assurer sa subsistance
→ liberté-indépendance réelle ;
• dispose de plus d’informations et d’une meilleure capacité de jugement
qui lui permettent de mieux évaluer les différents choix d’action
possibles
→ liberté-autonomie réelle.

4.3. Liberté privée et/ou liberté-participation


Benjamin Constant (1819) distingue
• la liberté des modernes : « la jouissance paisible de l’indépendance
privée »
Pour les libéraux des 18e et 19e s., la liberté réside dans la pleine
souveraineté de chaque individu sur lui même. Toute règle sociale est
perçue comme une limitation de cette liberté
• la liberté des anciens : la participation du citoyen à la vie publique et à
la décision politique.
Pour les anciens, comme pour Jean-Jacques Rousseau (Contrat
social, 1762), les hommes ne peuvent être authentiquement libres que
lorsqu’ils participent à l’élaboration des règles qui régissent la vie en
société, vivent dans une société dans laquelle les lois sont l’expression
de la volonté générale. Les règles sociales ne sont contraires à la
liberté que si elles n’ont pas été élaborées par ceux auxquels elles
s’imposent. La vraie liberté suppose la souveraineté populaire.

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Il y a tension entre ces deux formes de liberté.
• La prévalence de la liberté privée risque de conduire à une situation où
domine la liberté du plus fort et où le désintérêt pour les affaires
publiques implique une absence de contrôle du pouvoir politique.
• La prévalence de la liberté-participation conduit à valoriser une
conception particulière du bien-vivre, centrée sur la participation
politique, et risque d’engendrer une oppression de la liberté privée par
la « tyrannie de la majorité ».
Les deux formes de libertés sont pourtant essentielles.

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Repères bibliographiques

ARNSPERGER Christian & VAN PARIJS Philippe, Ethique économique et


sociale, Paris, La Découverte (Repères, 300), 2000, pp. 29-42.
BERLIN Isaiah (1958), « Deux conceptions de la liberté » in Eloge de la
liberté, trad. J. Carnaud et J. Lahana, Paris, Calmann-Levy, 1988, pp.
167-218.
CONSTANT Benjamin (1819), « De la liberté des anciens comparée à celle
des modernes » in Ecrits Politiques, Gallimard (Folio-essais, 307),
1997, pp. 589-619.
METAYER Michel, La philosophie éthique. Enjeux et débats actuels, Saint-Laurent
(Québec), Editions du renouveau pédagogique, 2e éd., 2002, Ch. 7 «
L’éthique des droits », pp. 165-189.
POURTOIS Hervé, « Comment peut-on (ne pas) être libéral ? », La revue
nouvelle, t.120/n°10 (octobre 2005), pp. 14-24.
SWIFT Adam, Political Philosophy. A beginner’s Guide for Students and
Politicians, London, Polity, 2001, pp. 51-89.

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