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DOSSIER

TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN
DOSSIER ÉLABORÉ
SELON LES CONSEILS
SCIENTIFIQUES
DU PR FRANÇOIS
DESGRANDCHAMPS
Service urologie,
hôpital Saint-Louis,
Paris, France
francois.
desgrandchamps
@aphp.fr

F. Desgrandchamps
déclare avoir
des liens ponctuels
avec Mylan.

© CAVALLINI JAMES / BSIP

Biopsie d’une tumeur du rein droit (tomodensitométrie abdominale).

L
a prise en charge des cancers du rein a beaucoup évolué récemment, à la fois pour la prise en
charge locale de la tumeur et pour la prise en charge d’éventuelles métastases. Une mise au point
était donc nécessaire.
Pour la prise en charge locale, la pression se fait de plus en plus forte pour ne plus traiter sur un
simple diagnostic d’imagerie : la biopsie à l’aiguille de la tumeur pour un diagnostic histologique précis
est de plus en plus recommandée en préalable au traitement.
Localement l’exérèse tumorale doit être préférée à l’ablation complète du rein lorsque celle-ci est pos-
sible et, dans certains cas, l’opération peut être évitée par la destruction in situ sous anesthésie locale
de la tumeur par cryothérapie.
Enfin, en cas de métastases, les nouveaux traitements par inhibiteurs de la néo-angiogenèse ou par
immunothérapie permettent d’améliorer le pronostic. François Desgrandchamps
SOMMAIRE

f P. 42 Biopsie rénale préalable f P. 45 Cryothérapie f P. 48 Néphrectomie partielle ou totale


f P. 52 Cancer du rein métastasé : immunothérapie

Vol. 68 _ Janvier 2018 41

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TRAITEMENT DU CANCER
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Ne plus traiter un cancer du rein sans une biopsie préalable

Des bénéfices supérieurs aux


risques et des conséquences
sur la prise en charge

L
ÉRIC LECHEVALLIER es tumeurs rénales sont probablement parmi en évitant les zones de nécrose. Pour les tumeurs avec
Service urologie les dernières tumeurs à être prises couramment plusieurs contingents radiologiques, les contingents
et transplantation en charge sans diagnostic histologique certain. radiologiques différents doivent être prélevés. Une ai-
rénale, hôpital Le dogme de traiter toute masse solide rénale guille fine coaxiale (18 gauges) est utilisée pour protéger
de la Conception, comme un cancer est encore largement appliqué. Une le trajet de ponction d’une contamination tumorale.3 Il
Marseille, France tumorectomie d’une masse solide rénale de moins de est recommandé que le patient soit à jeun pour prévenir
eric.lechevallier 4 cm, une néphrectomie d’une masse solide de plus 7 cm, les nausées et vomissements réflexes éventuels. Un
@ap-hm.fr ou la surveillance d’une tumeur rénale chez un sujet contrôle tomodensitométrique post-biopsie est réalisé
fragile sont encore souvent réalisées sans histologie. avant le départ du patient pour vérifier l’absence de
Il existe cependant une littérature médicale fournie saignement rénal. Un rendez-vous de consultation est
É. Lechevallier concernant la biopsie des masses solides rénales et, à ce programmé avec l’urologue référent pour la communi-
déclare des liens sujet, les choses ont un peu évolué : le comité de cancéro- cation du diagnostic et la décision de la réunion de
ponctuels avec logie de l’Association française d’urologie a précisé en concertation pluridisciplinaire d’oncologie.
Astellas, Janssen, 2016 les indications des biopsies des masses rénales (v. ta-
Ipsen, Sanofi bleau).1 La biopsie est actuellement recommandée lorsque Quelle est la morbidité de la biopsie ?
et Zambon. le diagnostic histologique est susceptible de modifier la
prise en charge thérapeutique d’une tumeur du rein. Les La morbidité liée à la pratique d’une biopsie percutanée
recommandations européennes et nord-américaines re- des masses rénales est faible.1, 4 Les complications les plus
prennent cette notion.2, 3 Peut-on aller plus loin ? La bonne fréquentes sont les hématomes périrénaux (< 5 %), les
question à poser aujourd’hui devrait être : pourquoi ne douleurs lombaires (< 3 %) et l’hématurie (< 3 %).1, 5 Les
pas faire de biopsie à une tumeur solide rénale ? complications majeures (faux anévrismes, choc, pneu-
mothorax) sont rares mais possibles. Elles font partie de
La technique de biopsie est-elle l’information du patient avant la biopsie par l’urologue
standardisée ? et le radiologue. Il n’a pas été rapporté de contamination
du trajet par la tumeur en cas de carcinome rénal.2
La biopsie des masses rénales est actuellement bien
standardisée et codifiée. Elle est généralement réalisée Quelles sont les contre-indications
par un radiologue, sous anesthésie locale, en externe de la biopsie ?
ou en ambulatoire. Le guidage classique est un guidage
tomodensitométrique (fig. 1). Certaines masses rénales La biopsie est contre-indiquée, comme toutes les biopsies,
faciles d’accès peuvent être biopsiées sous guidage écho- chez les sujets ayant des troubles de la coagulation, sous
graphique. Au moins deux prélèvements sont réalisés anticoagulant ou en cas d’infection en cours, notamment

RECOMMANDATIONS 2016-2018 DU COMITÉ DE CANCÉROLOGIE DE L’AFU : INDICATIONS DE BIOPSIE DES MASSES RÉNALES
Avant la décision de surveillance active d’une petite tumeur rénale (grade C)
Avant de faire un traitement ablatif percutané (grade C)
Avant tout traitement systémique s’il n’y a pas de preuve histologique (grade C)
Dans le cas d’une néphrectomie partielle techniquement difficile pour éliminer une tumeur bénigne (grade C)
En cas d’incertitude diagnostique sur l’imagerie : lymphome, sarcome, « pseudotumeur » du rein, métastase rénale d’une autre tumeur (grade C)
Tableau. D’après la réf. 1. AFU : Association française d’urologie.

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urinaire. Après analyse du rapport bénéfice-risque une


biopsie peut être réalisée sous aspirine 75 mg.
La biopsie est contre-indiquée en cas de suspicion
de carcinome urothélial compte tenu du risque de conta-
mination du trajet de la biopsie par la tumeur. Ce risque
n’a pas été décrit pour les carcinomes rénaux.
La biopsie ne doit pas être indiquée ni réalisée en
cas de suspicion clinique et radiologique d’angiomyo-
lipome. L’angiomyolipome typique, tumeur bénigne,
a un risque hémorragique et son diagnostic, dans les
formes typiques, est uniquement radiologique.

Dans quels cas la biopsie a-t-elle


peu d’intérêt ?

Le diagnostic d’angiomyolipome typique est radiolo-


gique (échographie, tomodensitométrie [TDM], imagerie
par résonance magnétique [IRM]) et ne nécessite pas
de biopsie.
La biopsie a peu d’intérêt clinique et peu de renta- Figure 1. Biopsie avec guidage tomodensitométrique d’une masse
bilité pour les tumeurs kystiques rénales simples. En rénale droite (patient en décubitus ventral).
revanche, pour les kystes rénaux atypiques (Bosniak 3
ou 4), une biopsie de la composante solide peut être
discutée.3
Pour les très petites tumeurs rénales (< 1,5 cm), la
biopsie peut être difficile à réaliser ou à risque (tumeur
antérieure, pôle supérieur rénal gauche). Le taux de biop-
sies non contributives des très petites tumeurs rénales
(< 1,5 cm) est plus élevé.6 De plus, ces très petites tumeurs
sont rarement agressives. Dans notre centre nous propo-
sons en première intention, après une imagerie complète
(TDM, IRM), une surveillance radiologique tous les
6 mois et une biopsie en cas d’augmentation de taille sur
deux examens d’imagerie.
La biopsie a peu d’intérêt clinique chez un patient
fragile chez qui le diagnostic histologique ne changera
pas la prise en charge, notamment en cas d’abstention et
de surveillance.2, 3 Figure 2. Carotte d’une biopsie percutanée d’un carcinome rénal.

Quels sont les résultats de la biopsie ?

Il a longtemps été reproché à la biopsie percutanée des Le taux de biopsies non significatives (échec, biopsie
masses rénales une faible performance. Actuellement blanche) avec la technique de biopsie actuelle est de
il est reconnu que la biopsie standardisée a une perfor- moins de 10 %.5 Dans ces cas, une seconde biopsie peut
mance, une sensibilité (99 %) et une spécificité (99 %) être proposée et réalisée en fonction du contexte clinique
élevées pour le diagnostic de malignité (fig. 2).1, 2 et radiologique, avec une rentabilité de plus de 80 %.5
La biopsie a une performance de 90 % pour le sous-
type histologique, et de plus de 95 % pour les tumeurs La biopsie améliore-t-elle la prise
solides de moins de 4 cm. en charge du patient ?
Pour la détermination du grade tumoral la perfor-
mance de la biopsie est de 43-93 %. Pour les tumeurs La biopsie permet dans la majorité des cas un diagnostic
de moins de 4 cm, la biopsie peut déterminer un faible ou fiable des masses rénales (bénignité ou malignité, sous-
un haut grade avec une fiabilité de plus de 85 %.1, 5 La déter- type tumoral, grade tumoral) au prix d’une faible mor-
mination du grade (faible grade, par exemple) peut influen- bidité. Ce diagnostic peut être fait et communiqué au
cer la décision d’une surveillance d’une petite tumeur, patient avant toute décision thérapeutique.
d’une tumorectomie chez un patient insuffisant rénal, d’un Avec la biopsie la décision thérapeutique ou de prise
traitement ablatif chez un patient à risque opératoire. en charge peut être discutée et validée en réunion de

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concertation pluridisciplinaire (RCP) avant d’être matoïde peut remettre en question un abord cœlios-
proposée au patient. Puis le patient, avec le résultat copique. Une modification de l’attitude thérapeutique
de la biopsie et l’avis de la RCP, est informé au mieux en raison du résultat de la biopsie a été rapportée dans
du projet thérapeutique. 10 à 40 % des cas.7, 8
L’attitude thérapeutique doit être adaptée aux ré- Il est actuellement difficile de proposer des traite-
sultats de la biopsie : une tumeur bénigne peut ne pas ments chirurgicaux (tumorectomie, néphrectomie)
nécessiter de traitement chirurgical ; un carcinome sans diagnostic fiable et sans validation en RCP. La
papillaire, à risque de multifocalité significatif, impose chirurgie des masses rénales ne doit plus être à la fois
un examen de toute la surface rénale en cas de chirurgie diagnostique et thérapeutique.
conservatrice ; une tumeur de haut grade peut remettre Les bénéfices de la biopsie des masses rénales sont
en question un traitement conservateur et faire discuter supérieurs aux risques. Elle doit être discutée et propo-
une lymphadénectomie lors de la chirurgie ; une tumeur sée à tous les patients ayant une masse rénale
agressive, de haut grade ou avec une composante sarco- indéterminée. V

RÉSUMÉ NE PLUS TRAITER risques, la biopsie des masses rénales doit être discutée et the multidisciplinary oncologic round. The patient can be
UN CANCER DU REIN proposée aux patients ayant une masse rénale indéterminée. properly and fully informed about the planned management.
SANS UNE BIOPSIE PRÉALABLE Because the benefit/risk ratio is in favor of renal tumor
L’imagerie ne peut établir un diagnostic histologique fiable SUMMARY NO TREATMENT biopsy in most of cases, renal tumor biopsy must be dis-
des tumeurs du rein. Un diagnostic histologique doit per- OF A RENAL CANCER WITHOUT cussed and proposed to patients harboring an undetermined
mettre une prise en charge appropriée des tumeurs rénales. BIOPSY ANYMORE renal mass.
La biopsie percutanée des tumeurs rénales est une technique Imaging modalities are not accurate for histological diagno-
fiable avec une faible morbidité, réalisée sous anesthésie sis of renal masses. An histological diagnosis helps to
locale sans hospitalisation. L’attitude thérapeutique est choose the optimal management of a renal mass. Percu- MOTS-CLÉS
discutée et validée en réunion de concertation pluridiscipli- taneous biopsy of renal mass is an accurate procedure with tumeurs du rein, biopsie des masses rénales.
naire avant d’être proposée au patient. La biopsie permet low morbidity. It is performed with local anesthesia in an
d’apporter au patient une information adaptée. Les bénéfices outpatient setting. The biopsy results and optimal manage- KEY-WORDS
de la biopsie des masses rénales étant supérieurs aux ment of the renal mass are discussed and validated during renal masses, renal tumor biopsy.

RÉFÉRENCES 3. Ljunberg B, Albiges L, Bensalah K, diagnostic accuracy of clinical role of fine needle
1. Bensalah K, Albiges L, Bernhard JC, et al. EUA Renal cell carcinoma. percutaneous renal tumor biopsy. percutaneous biopsy with
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du CC-AFU: cancer du rein. renal-cell-carcinoma/ et al. Percutaneous kidney masses. J Urol 2004;171:1802-5.
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Cryothérapie sous anesthésie locale des tumeurs rénales

Une alternative à la
chirurgie partielle
dans certaines conditions

L’
incidence du cancer du rein localisé et de avec des tumeurs multiples de volume limité ; ÉRIC DE KERVILER*
petite taille est en permanente augmentation – dans les situations impératives (rein unique ou insuf- LOÏC COLLETER*
depuis plusieurs décennies. Cela s’explique fisance rénale préexistante) avec risque d’insuffisance ALEXANDRA
en partie par l’essor de l’imagerie médicale rénale terminale après néphrectomie partielle. MASSON-LECOMTE**
puisque plus des deux tiers des cancers du rein sont Pour la cryothérapie, on peut rajouter les contre- FRANÇOIS
découverts fortuitement au cours d’un examen d’ima- indications à l’anesthésie générale ou à la sédation DESGRANDCHAMPS**
gerie réalisé pour une autre raison.1, 2 Le traitement de profonde puisque le geste peut être réalisé sous anes- * Service de radiologie
référence de ces petites tumeurs rénales de stade T1a thésie locale.5 Il n’y a pas d’âge seuil mais, classiquement, et ** service
(< 4 cm) est la chirurgie lorsqu’elle est possible. Le la cryothérapie est réservée à des patients ayant plus d’urologie, hôpital
nombre de petites tumeurs traitées par néphrectomie de 75 ans ou des comorbidités importantes. Saint-Louis, AP-HP,
élargie est en nette diminution, au profit de la néphrec- Contrairement à la chirurgie au cours de laquelle on Paris, France,
tomie partielle et des ablations percutanées.3 Cependant, procède à l’exérèse de la tumeur qui est ensuite analysée eric.de-kerviler
la néphrectomie partielle n’est pas dénuée de compli- en anatomopathologie, la cryothérapie laisse en place @aphp.fr
cations et reste complexe pour certaines tumeurs, une tumeur présumée détruite. Il est donc fondamental
en particulier les tumeurs centrales. Les techniques de disposer au préalable d’une biopsie de la lésion afin
ablatives percutanées sont une option thérapeutique de connaître sa nature précise. Idéalement, la biopsie É. de Kerviler déclare
intéressante chez les patients qui ne sont pas de bons doit être réalisée dans une autre session, avant la cryo- être consultant
candidats à la chirurgie : lésions difficilement extir- thérapie, afin de disposer du résultat le jour du traite- pour Galil Medical.
pables, patients les plus fragiles. Elles ont pour objectif ment. Si certaines équipes réalisent la biopsie dans le
de traiter les patients en diminuant la morbidité liée même temps que la cryothérapie, il existe toujours un L. Colleter déclare
à une chirurgie conventionnelle. Elles consistent en risque de biopsie négative. Enfin, le fait de réaliser la n’avoir aucun
la destruction du tissu tumoral in situ soit par échauf- biopsie sous tomodensitométrie dans la position de trai- lien d’intérêts.
fement (radiofréquence ou micro-ondes), soit par refroi- tement sert de répétition et à identifier les éventuelles
dissement tissulaire (cryoablation). Une des limites difficultés (proximité d’une structure vitale, variante A. Masson-Lecomte
de ces traitements ablatifs par le chaud est leur caractère anatomique) et de vérifier la bonne tolérance et le degré déclare des
douloureux, nécessitant leur réalisation sous sédation de coopération du patient. interventions
consciente, voire sous anesthésie générale. La cryoabla- ponctuelles (activités
tion percutanée permet, en revanche, de traiter les Procédure de conseil ou
patients avec une anesthésie locale exclusive. conférences) pour
Pour chaque patient, un bilan d’hémostase est systéma- Ipsen et Janssen.
Critères d’inclusion tiquement réalisé avant la procédure. Pour les patients
prenant des anticoagulants oraux, un relais par héparine F. Desgrandchamps
Tous les patients éligibles à la cryothérapie sont présen- de bas poids moléculaire est réalisé. Pour les antiagré- déclare avoir
tés en réunion de concertation pluridisciplinaire réunis- gants plaquettaires, seul le clopidogrel doit être inter- des liens ponctuels
sant urologues, radiologues et oncologues afin de valider rompu 5 jours avant. Le patient reçoit une prémédication avec Mylan.
l’indication de la procédure. La place des traitements par 1 g de paracétamol intraveineux 30 minutes avant la
ablatifs a été rappelée dans les dernières recomman- procédure. Il reste hospitalisé une nuit, mais une prise
dations de l’Association française d’urologie ; ils sont en charge ambulatoire est possible.
recommandés :4 La cryothérapie est réalisée sous anesthésie locale à
– pour les patients ayant des petites tumeurs rénales l’aide d’un mélange de lidocaïne et de ropivacaïne.
(< 4 cm) et plusieurs facteurs de comorbidité (dont l’âge) ; Contrairement à la radiofréquence ou aux micro-ondes
– lorsqu’il y a une contre-indication à la chirurgie ; où une seule électrode est insérée, la cryothérapie néces-
– dans certaines situations de cancer du rein héréditaire site de mettre en place plusieurs aiguilles (cryoprobes)

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est de 3, avec des extrêmes entre 2 et 5. Une injection


de CO2 (carbodissection) ou de sérum physiologique
(hydrodissection) est parfois nécessaire entre le rein
et les organes adjacents afin de les éloigner de la zone
d’ablation et les protéger.
Les aiguilles sont mises en place sous tomodensito-
métrie et on vérifie leur bon positionnement. La dose
délivrée lors d’une cryoablation rénale est inférieure aux
niveaux de référence de dose recommandés pour une
tomodensitométrie abdominale. Le traitement consiste
en deux phases de cryoablation de 10 minutes entrecou-
pées d’une phase de réchauffement passif de 10 minutes
également. L’effet cryogénique est obtenu par expansion
d’un gaz (l’argon) dans une chambre de décompression
de 2 à 4 cm de long située à l’extrémité de l’aiguille. Les
températures minimales obtenues au contact de l’ai-
guille sont proches de -100 °C, en sachant qu’en moyenne
la température de la tumeur se situe à -40 °C. La tomoden-
sitométrie permet une excellente visualisation de la
boule de glace, ce qui permet de monitorer l’ablation
Figure 1. Planification de la procédure et résultat obtenu en fonction de la taille tout au long de la procédure. La boule de glace ainsi créée
de la tumeur. La taille de la boule de glace dépend du nombre d’aiguilles introduites. doit englober en totalité la tumeur et la dépasser de 5 mm
Dans cet exemple, 2 aiguilles ont été utilisées pour une tumeur de 2 cm, 3 aiguilles pour afin d’avoir des marges de sécurité (fig. 2).6 En effet, le bord
une tumeur de 3 cm et 4 aiguilles pour une tumeur de 4 cm. de la boule de glace est à l’isotherme 0 °C, qui n’est pas
létal pour les tissus.
Après traitement, le suivi des patients s’effectue
par tomodensitométrie ou par imagerie par résonance
magnétique (IRM), typiquement à 1 mois, 3 mois, 6 mois
et 1 an, puis tous les ans. La zone d’ablation se rétracte
progressivement et se fibrose, sans tumeur résiduelle
visible (fig. 3). Pour les tumeurs de moins de 2 cm, le zone
d’ablation disparaît parfois en totalité, laissant juste une
encoche à la surface du rein (fig. 4). Les effets secondaires
sont rares, la cryoablation étant mieux tolérée que
les techniques d’ablation fondées sur le chauffage
des lésions, en particulier pour les lésions proches de
la voie excrétrice.7

Résultats

Si la néphrectomie partielle reste le traitement de réfé-


Figure 2. Traitement d’une petite tumeur de 18 mm chez un patient de 63 ans
rence des petites tumeurs du rein, la cryoablation peut
ayant de nombreuses comorbidités contre-indiquant une anesthésie générale.
être proposée pour le traitement des petites masses
La tumeur (flèche) est bien visible (A) sur la tomodensitométrie et (B) sur l’imagerie
rénales chez les patients âgés ayant de multiples comor-
par résonance magnétique (IRM). Décision de traitement par 2 aiguilles de cryoablation.
Représentation de la boule de glace obtenue dans l’eau (C). Aiguilles en place montrant bidités.4 Le taux de traitement incomplet ou de récidive
le caractère mini-invasif, sans cicatrice (D). Contrôle de la position des aiguilles et locale à distance de la cryothérapie (5 %) est supérieur à
de la boule de glace par tomodensitométrie pendant la procédure (E). Contrôle par IRM celui de la chirurgie partielle (3 %) mais semble inférieur
à J1 montrant des marges d’ablation satisfaisantes entourant une tumeur détruite (F). à celui de la radiofréquence (13 %).4, 7 La cryoablation
génère moins d’événements morbides que la radiofré-
quence ou la chirurgie partielle.4, 8, 9
espacées au maximum de 15 mm afin de couvrir la totalité Concernant le risque de récidive ou de traitement incom-
de la tumeur (fig. 1). Plus la tumeur est grosse, plus le plet, les facteurs favorisants notés dans la littérature sont
nombre d’aiguilles à introduire est important. Il existe le type histologique, la taille de la tumeur et les marges
des abaques permettant de déterminer le nombre d’ai- d’ablation insuffisantes. Ainsi, les tumeurs à cellules
guilles optimal en fonction de la taille de la tumeur. Néan- claires, surtout de grades 2 et 3 de Furhman seraient
moins, l’indication principale étant des tumeurs de stade associées à un risque de récidive plus élevé que les
T1a (< 4 cm de diamètre), le nombre moyen d’aiguilles autres types de tumeurs.10 L’explication pourrait être le

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caractère très hypervasculaire de ces lésions qu’il serait


plus difficile de refroidir, l’effet de la cryoablation étant
contrebalancé par une perfusion tumorale importante.
Les chances de succès diminuent avec la taille de la
lésion, puisqu’il a été montré que les lésions de plus
de 4 cm, surtout de localisation centrale, récidivaient
plus souvent.11 Les lésions centrales sont au contact du
pédicule rénal et de la voie excrétrice qui exercent
un effet de réchauffement de la tumeur. En revanche,
la cryothérapie présente l’avantage de préserver la
Figure 3. Suivi par IRM d’une tumeur de 3 cm traitée matrice collagénique de la voie excrétrice et expose
par cryoablation. La zone d’ablation se rétracte et se fibrose à moins de complications de type fistule ou sténose
progressivement. Aucun reliquat tumoral n’est visible. que la radiofréquence ou les micro-ondes. Enfin, des
marges d’ablation inférieures à 5 mm seraient associées
également à un risque de récidive plus élevé.12

CHEZ LES PATIENTS FRAGILES


La cryoablation percutanée sous tomodensitométrie
est une bonne alternative à la chirurgie partielle ou à la
surveillance simple pour les petites tumeurs du rein de
stade T1a chez les patients à risque. À la différence de la
radiofréquence ou des micro-ondes, elle est parfaitement
réalisable sous anesthésie locale exclusive au prix d’une
faible morbidité, puisque cette technique diminue les
risques opératoires et anesthésiques. V

RÉFÉRENCES cryoablation under local tumor histology and grade


1. Lipworth L, Tarone RE, anaesthesia. Cardiovasc on treatment success of
Figure 4. Suivi par IRM d’une petite tumeur du rein droit McLaughlin JK. The epidemiology Intervent Radiol 2014;38:672-7. percutaneous renal cryoablation.
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percutanées comme la cryoablation a anesthesia. for t1a renal cancer substratified procedures. J Vasc Interv
permis de proposer une alternative à la by size: “Less is more”. Radiol 2012;23:48-54.
surveillance et à la chirurgie chez les J Urol 2016;196:1000-7. 9. Georgiades CS, Rodriguez R.
patients fragiles nécessitant une préser- 4. Bensalah K, Albiges L, Efficacy and safety of
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sous anesthésie locale. anesthésie locale. du CCAFU : Cancer du rein. prospective, single-arm, 5-year
Prog Urol 2016;27:S27-S51. study. Cardiovasc Intervent
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OF RENAL TUMORS cryoablation, percutaneous access, of percutaneous renal Dufour CA, et al. Impact of
The incidence of small renal tumors is local anesthesia.

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

Néphrectomie totale ou partielle dans le cancer du rein ?

Bien que plus complexe, la


néphrectomie partielle s’impose
pour les petites tumeurs
ALEXIS SANTY, Pourquoi la chirurgie partielle ? étude suggérant un avantage significatif pour la néphrec-
ALEXANDRA tomie partielle dans la survenue d’une insuffisance ré-
MASSON-LECOMTE, Le traitement des masses rénales localisées est chirur- nale modérée ; cet avantage n’est pas significatif pour la
FRANÇOIS gical et consiste en leur exérèse complète via l’ablation survenue d’une insuffisance rénale sévère ou terminale.7
DESGRANDCHAMPS du rein dans son ensemble (néphrectomie totale) ou Une autre étude note, en revanche, une diminution cu-
Service d’urologie, l’exérèse élective de la tumeur en préservant l’organe mulée du risque de survenue d’insuffisance rénale sévère
hôpital Saint-Louis, (néphrectomie partielle). de 61 % en cas de néphrectomie partielle.8
Paris, France Pendant de nombreuses années, la néphrectomie to-
francois. tale élargie a été le traitement de référence des tumeurs ré- Quelles limites à la chirurgie rénale
desgrandchamps nales en termes carcinologiques. Cependant, il a été établi conservatrice ?
@aphp.fr qu’elle entraîne à long terme une altération significative
de la fonction rénale, source de comorbidités notamment L’état des lieux sur la néphrectomie partielle dans les
métaboliques et cardiovasculaires, avec dans certaines centres experts réalisé en 2008 montre qu’au début des
A. Santy déclare études une incidence négative sur la survie globale. années 2000 seulement 30 % des patients bénéficiaient
avoir été pris En conséquence, la néphrectomie partielle s’est im- d’une chirurgie conservatrice, alors qu’une très large
en charge lors de posée progressivement comme stratégie chirurgicale majorité des tumeurs rénales diagnostiquées (> 80 %)
congrès par Astellas. conservatrice. Cette technique répond aux mêmes objec- sont des incidentalomes de petite taille (pT1).9
tifs carcinologiques d’exérèse tumorale en marges saines Les limites d’accès à la néphrectomie partielle sont
F. Desgrandchamps que la néphrectomie totale, et permet une préservation multiples. Sur le plan technique, il s’agit d’une chirurgie
déclare avoir du capital néphronique, et donc de la fonction rénale pos- difficile qui exige une bonne expérience de l’opérateur,
des liens ponctuels topératoire. La néphrectomie partielle est actuellement dont le geste doit être à la fois rapide et précis. Pour ob-
avec Mylan. le traitement de référence des tumeurs rénales de moins tenir un bénéfice en termes de fonction rénale postopé-
de 4 cm, et doit être privilégiée lorsqu’elle est possible ratoire, le clampage vasculaire nécessaire pendant la
A. Masson-Lecomte pour des tumeurs de plus gros volume.1 tumorectomie ne doit pas excéder 20 à 30 minutes.10 De
déclare des En termes carcinologiques, les études ont montré que plus, l’obtention de marges chirurgicales saines reste un
interventions la néphrectomie partielle est au moins équivalente à la né- impératif carcinologique.
ponctuelles phrectomie totale en termes de récidive locale (de l’ordre La nécessité de réaliser une chirurgie ouverte par
(activités de conseil de 8 à 12 %), de survie spécifique et de survie globale.2-4 lombotomie dans la chirurgie partielle a pendant long-
ou conférences) pour Certaines études suggèrent une diminution de la temps conduit les chirurgiens à en limiter les indications,
Ipsen et Janssen. mortalité par événement cardiovasculaire chez les pa- préférant réaliser une chirurgie totale élargie cœliosco-
tients ayant bénéficié d’une néphrectomie partielle, ce pique, moins invasive.
qui peut expliquer la diminution observée de la mortalité Depuis une dizaine d’années, le développement de la
globale, en particulier pour les petites tumeurs (< 4 cm).5, 6 chirurgie robot-assistée dans la néphrectomie partielle
Concernant le déclin de la fonction rénale, des don- apporte un support technique qui permet de réaliser une
nées sont en faveur de la néphrectomie partielle car elle chirurgie mini-invasive, ce qui est susceptible ainsi d’en
permet à la fois une meilleure clairance de la créatinine élargir les indications.
postopératoire (+12 mL/min en moyenne), une diminu-
tion du déclin de la fonction rénale (sans préciser à quelle Quelles indications ?
échéance, -8,6 mL/min), et une moins grande probabilité
de survenue d’une insuffisance rénale chronique (tous Il n’est pas nécessaire d’évaluer la fonction de chaque
stades confondus). rein par scintigraphie avant une chirurgie partielle. En
Pour ce qui concerne le stade de l’insuffisance rénale, revanche, cela peut être intéressant s’il s’agit d’une tu-
les données sont partiellement contradictoires, avec une meur sur un rein hypotrophique ou au cortex aminci

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

à la tomodensitométrie. Si la fonction relative du rein topératoires, et une durée d’hospitalisation et de convales-


tumorale est faible (< 20 %), une chirurgie conservatrice cence moindre que par voie incisionnelle classique.13, 14
n’est plus indiquée. Cela représente une grande minorité Cependant, pour les tumeurs très volumineuses, la
des situations. chirurgie ouverte par voie sous-costale reste privilégiée.
Il existe trois types d’indications de chirurgie conser- La lombotomie a été pendant longtemps la technique
vatrice du rein : de référence de la chirurgie conservatrice du rein. Ses
– une indication impérative ou de nécessité, en cas de indications tendent à diminuer et sont, dans certains
cancer sur un rein unique, anatomique ou fonctionnel ; centres, réservées aux indications de nécessité ou aux tu-
– une indication relative, lorsque la fonction rénale est morectomies complexes ainsi qu’aux tumeurs kystiques.
susceptible d’être compromise à moyen ou long terme, et Une étude prospective récente montre la supériori-
dans les formes familiales de cancer du rein ; té de la voie laparoscopique robot-assistée en termes de
– une indication élective, en cas de rein controlatéral pertes sanguines et de durée d’hospitalisation. Dans cette
sain avec une fonction rénale normale chez un patient étude, les voies ouvertes et laparoscopiques robot-assis-
de moins de 70 ans ou plus de 70 ans sans comorbidités. tées sont équivalentes en termes de durée d’ischémie
À l’inverse, la néphrectomie partielle n’est pas re- chaude, durée opératoire, complications postopératoires
commandée dans les situations suivantes : précoces, variation du taux de créatininémie, et survenue
– lorsque le volume de parenchyme rénal sain restant de marges chirurgicales positives.15
est insuffisant pour maintenir une fonction d’organe La difficulté technique et la courbe d’apprentissage
correcte ; de la chirurgie laparoscopique classique limitent son
– en cas de thrombose de la veine rénale ; emploi dans la chirurgie partielle à des opérateurs entraî-
– lorsque la localisation de la tumeur est défavorable, au nés, surtout depuis l’avènement de la chirurgie robotisée.
contact du pédicule vasculaire rénal ; Dans tous les cas, l’expérience de l’opérateur et la
– si le patient a une indication impérative d’anticoagu- disponibilité du matériel sont des éléments déterminants
lation curative. dans le choix de la voie d’abord.

Techniques chirurgicales Principes chirurgicaux


Néphrectomie totale élargie
La chirurgie partielle du rein est techniquement plus Elle consiste à emporter la totalité du rein après contrôle
complexe que la chirurgie radicale, et la difficulté tech- et ligature des vaisseaux et de l’uretère ; avec la graisse qui
nique peut être prédite à l’aide de scores pronostiques l’entoure et éventuellement la glande surrénale, en parti-
susceptibles de modifier les indications. culier en cas de nodule surrénalien suspect de métastases,
Le score R.E.N.A.L. est le plus utilisé et classe la com- associé dans certains cas à un curage ganglionnaire.
plexité du geste chirurgical en faible, modérée ou élevée,
en fonction de la taille de la tumeur, de son caractère Néphrectomie partielle
endo- ou exophytique, de sa proximité avec les cavités Dans la néphrectomie partielle, le rein est dégraissé, ex-
excrétrices, et de sa position antérieure ou postérieure cepté en regard de la tumeur, et mobilisé pour n’être fixé
et polaire ou médiorénale (v. tableau).11 Un score RENAL plus que par son pédicule vasculaire.
supérieur à 7 est significativement associé à un risque L’exérèse tumorale à proprement parler est réalisée
chirurgical plus élevé, avec des durées d’ischémie rénale après clampage artériel et ne doit pas excéder 20 à 30 mi-
per-opératoire allongées, davantage de marges chirurgi- nutes afin de limiter l’ischémie chaude du rein et ses
cales positives, et un taux de complications post-opéra- conséquences délétères sur la fonction rénale postopé-
toires augmenté.12 ratoire.10 Il faut réséquer un liseré de tissu sain péritu-
moral de quelques millimètres.
Voies d’abord Les cavités excrétrices et la tranche de section du
La chirurgie carcinologique rénale peut se réaliser par parenchyme rénal sont suturées afin d’assurer une bonne
voie incisionnelle classique : la voie sous-costale est la étanchéité des voies excrétrices ainsi qu’une hémostase
voie d’abord ouverte préférentielle de la néphrectomie satisfaisante.
élargie, tandis que la néphrectomie partielle est le plus Outre les complications pariétales et hémorragiques
souvent réalisée par lombotomie. identiques à la chirurgie radicale, il existe des complica-
Le développement des techniques laparoscopiques et tions spécifiques de cette chirurgie :
robot-assistées permet d’obtenir des résultats carcinolo- – la brèche pleurale est la complication peropératoire la
giques et fonctionnels comparables à la voie ouverte, avec plus fréquente de la néphrectomie partielle par lombo-
une morbidité per- et postopératoire moindre. tomie (5,1-11,5 %) ;
La cœlioscopie est devenue la voie d’abord de référence – la totalisation de la néphrectomie en cas de difficulté
de la néphrectomie élargie. Les patients qui bénéficient technique peropératoire ;
d’une néphrectomie élargie cœlioscopique ont moins de – la fistule urinaire est la complication postopératoire
pertes sanguines peropératoires, moins de douleurs pos- la plus fréquente (1,4-17 % selon les séries). Elle évolue

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

SCORE NÉPHROMÉTRIQUE RENAL


1 point 2 points 3 points
R : rayon (diamètre maximal en cm) ≤4 > 4 mais < 7 ≥7
E : propriétés exophytiques ou ≥ 50 % < 50 % entièrement endophytique
endophytiques
N : nearness (proximité) du collecteur ≥7 > 4 mais < 7 ≤4
ou du sinus en mm
A : antérieur ou postérieur Pas de points attribués. Masse
affectée d’un descripteur de
a, p ou x
L : localisation de la tumeur par Entièrement au-dessus de la Lésion croisant la ligne polaire > 50 % de la masse croise la
rapport aux lignes polaires* ligne polaire supérieure ou ligne polaire (a) ou croise la
au-dessous de la ligne polaire ligne médiane (b) ou la masse
inférieure est entièrement située entre
les lignes polaires (c)

Tableau. D’après la réf. 11. http://


www.nephrometry.com/Table.html *
Le suffixe « h » indique si la tumeur
est au contact direct avec une
artère ou une veine principale. Ligne
pointillée : ligne médiane. Lignes
noires : lignes polaires. Les nombres
en dessous des images sont les
points attribués à chaque catégorie
de tumeur.

le plus souvent favorablement après drainage de la voie sordres métaboliques et d’événements cardiovasculaires
excrétrice supérieure par sonde urétérale ; font de la néphrectomie partielle le traitement de première
– le faux anévrisme artérioveineux est une complication intention des tumeurs du rein localisées. Il n’y a pas d’éva-
classique mais rare (0,5 % des cas), qui se traduit clini- luation récente du pourcentage de néphrectomie partielle.
quement par la survenue d’une douleur lombaire asso- Il était de 30 % environ dans les années 2000 ; des données
ciée à une hématurie macroscopique massive, générale- suggèrent que ce pourcentage a augmenté dans les centres
ment dans le premier mois postopératoire. La prise en ayant fait l’acquisition d’un robot chirurgical.
charge relève de la radiologie interventionnelle par Le développement et la maîtrise des techniques chirur-
embolisation sélective. gicales moins invasives, et la robotisation de la chirurgie,
La surveillance carcinologique est ensuite identique, ont permis de diminuer la morbidité périopératoire de la
que la néphrectomie ait été partielle ou totale ; elle se fait néphrectomie partielle et d’en étendre les indications.
par tomodensitométrie ou par imagerie par résonance La néphrectomie totale élargie doit être réservée aux
magnétique en cas de déclin de la fonction rénale. tumeurs rénales localisées volumineuses rendant la
chirurgie partielle techniquement difficile, et aux tu-
AU CAS PAR CAS meurs localement avancées.
Toutes voies d’abord confondues, la néphrectomie par- Dans tous les cas, les indications de néphrectomie
tielle est une intervention techniquement plus complexe partielle ou totale sont discutées au cas par cas pour
que la néphrectomie totale élargie. chaque patient, et les voies d’abord choisies en fonction
Cependant, l’efficacité carcinologique équivalente et des particularités individuelles des patients, des carac-
le bénéfice apporté à moyen et long terme sur la conser- téristiques des tumeurs, du niveau d’équipement des
vation de la fonction rénale qui limite la survenue de dé- centres, et de l’expérience des équipes. V

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

RÉSUMÉ NÉPHRECTOMIE TOTALE OU nécessitant expérience et rapidité d’exécution afin de li- nephronic capital. However, this surgery is technically
PARTIELLE miter la durée d’ischémie rénale. demanding and requires experience and rapidity to limit
DANS LE CANCER DU REIN ? renal ischemia.
L’augmentation de l’incidence des tumeurs rénales de SUMMARY TOTAL OR PARTIAL
petite taille et les conséquences à long terme de la né- NEPHRECTOMY FOR RENAL TUMORS?
phrectomie élargie sur la fonction rénale ont conduit la Due to the raising incidence of small renal masses in the MOTS-CLÉS
chirurgie partielle à s’imposer comme traitement de réfé- past decades and long term consequences of enlarged chirurgie conservatrice, néphrectomie élargie,
rence des tumeurs rénales de moins de 4 cm. La néphrec- nephrectomy on renal function, partial nephrectomy has néphrectomie partielle, tumeur rénale
tomie partielle a démontré être équivalente d’un point de been recommended as reference treatment for renal tu-
vue carcinologique à la néphrectomie élargie et permet mors less than 4 cm. Partial nephrectomy has shown to KEY-WORDS
une préservation du capital néphronique du patient. Elle allow equivalent oncological control compared to enlarged nephron sparing surgery, partial nephrectomy,
n’en reste pas moins une chirurgie techniquement difficile nephrectomy and allows preservation of the patient’s renal tumors, total nephrectomy

RÉFÉRENCES cell renal cell carcinoma: a propensity et al. Comparative effectiveness for 13. Peng B, Zheng JH, Ren JZ.
1. Bensalah K, Albiges L, Bernhard JC, et score-matched analysis. World survival and renal function of partial Retroperitoneal laparoscopic
al. Recommandations en onco-urologie J Urol 2017;35:78-94. and radical nephrectomy for localized nephrectomy and open nephrectomy
2016-2018 du CCAFU : Cancer 5. Huang WC, Levey AS, Serio AM, renal tumors: a systematic review and for radical treatment of renal cell
du rein. Progr Urol 2016;27:S2-51. et al. Chronic kidney disease after meta-analysis. J Urol 2012;188:51-7. carcinoma: A comparison of clinical
2. Mir MC, Derweesh I, Porpiglia F, nephrectomy in patients with renal 9. Bernhard JC, Ferriere JM, Crepel M, outcomes Acad J Second Mil Med
Zargar H, Mottrie A, Autorino R. cortical tumours: a retrospective cohort et al. Quelle pratique de la Univ 2006;27:1167-9.
Partial nephrectomy versus radical study. Lancet Oncol 2006;7:73-40. néphrectomie partielle en France ? http://bit.ly/2DPhveP
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minimally invasive partial versus from EORTC randomized trial 30904. dans les indications électives : carcinoma by open or robot-assisted
minimally invasive radical Eur Urol 2014;65:372-7. jusqu’où doit-on aller ? partial nephrectomy. Urol Oncol
nephrectomy for cT1-2/N0/M0 clear 8. Kim SP, Thompson RH, Boorjian SA, Prog Urol 2015;25:145-6. 2013;31:92-9.

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

Traitements médicaux des cancers du rein métastatiques :


le ciblage de l’environnement tumoral

La survie des patients a doublé


en 15 ans

E
HÉLÈNE GAUTHIER nviron 30-40 % des patients ayant un cancer du growth factor (PDGF) ou le transforming growth factor
STÉPHANE CULINE rein développent des métastases, qui peuvent α (TGF-α). Par sa liaison au récepteur du VEGF (VEGF-R)
Service d’oncologie être présentes dès le diagnostic ou survenir au sur les cellules endothéliales et les péricytes présentes
médicale, hôpital cours de la surveillance après le traitement dans le micro-environnement tumoral, le VEGF repré-
Saint-Louis, AP-HP, local de la tumeur primitive. Les métastases métachrones sente le principal facteur de croissance impliqué dans
Paris, France peuvent se développer tardivement, parfois plus de 10 ans les processus de néo-angiogenèse. Parmi les autres voies
stephane.culine après le traitement initial. Les sites anatomiques les plus qui participent également à la néo-angiogenèse, la pro-
@aphp.fr fréquemment concernés sont les ganglions sous- et téine mTOR (mammalian target of rapamycin) induit
sus-diaphragmatiques, les poumons, les os, le foie et le également une surexpression de HIF1α et, par son inter-
cerveau. Mais les atteintes d’autres organes tels que la médiaire, des facteurs de l’angiogenèse.1
H. Gauthier déclare thyroïde ou le pancréas ne sont pas rares. À la fin des
n’avoir aucun années 1990, le pronostic des patients ayant un cancer du … à la clinique
lien d’intérêts. rein métastatique était très réservé puisque la médiane Les trois protéines VEGF, VEGF-R et mTOR sont les cibles
de survie était d’environ 1 an. Les traitements médicaux des médicaments qui ont été développés et ont obtenu une
S. Culine déclare étaient alors limités à l’interféron alpha et à l’in- autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le trai-
des interventions terleukine 2, aujourd’hui abandonnés. Depuis le début tement du cancer du rein métastatique (fig. 2). Le bévaci-
ponctuelles pour des années 2000, des progrès importants ont été réalisés zumab (Avastin) est un anticorps monoclonal anti-VEGF
Janssen, Roche, avec le développement de traitements ciblant le micro- administré par voie intraveineuse (IV). Le temsirolimus
MSD et Ipsen environnement tumoral, à savoir la néo-angiogenèse (Torisel) et l’évérolimus (Afinitor) sont des inhibiteurs
et avoir été pris et plus récemment l’infiltrat immunitaire. enzymatiques de l’activité sérine/thréonine kinase de
en charge lors de la protéine mTOR et s’administrent respectivement
congrès par Janssen, Ciblage thérapeutique par voies IV et orale. La cible préférentielle de l’axitinib
Astellas et Roche. de la néo-angiogenèse tumorale (Inlyta), du cabozantinib (Cabometyx), du pazopanib
(Votrient), du sunitinib (Sutent) et du sorafénib (Nexavar)
De la biologie … est l’inhibition de l’activité tyrosine kinase du VEGF-R.
Le cancer du rein à cellules claires est la plus fréquente D’autres cibles thérapeutiques sont également concer-
des variétés histologiques de cancer du rein (80 % des nées et peuvent expliquer les différences dans l’efficacité
patients). Il est reconnu depuis longtemps comme une et surtout les toxicités induites par ces traitements (v. ta-
tumeur maligne hypervascularisée, suggérant une im- bleau). Ils sont administrés par voie orale.
portante néo-angiogenèse tumorale en son sein. Les mé- Les toxicités observées avec ces traitements sont
canismes moléculaires sous-tendant cette observation avant tout générales (asthénie), cutanées (syndrome
ont été reliés à la fréquente détection d’une mutation mains-pieds), muqueuses (épistaxis, mucite buccale, épi-
du gène von Hippel-Lindau (VHL), acquise (somatique) gastralgies, diarrhées, hémorroïdes…), cardiovasculaires
chez la majorité des patients. Dans la cellule normale, (hypertension artérielle), hormonales (hypothyroïdie) et
la protéine pVHL interagit avec un facteur de trans- à moindre degré hématologiques (anémie, neutropénie,
cription, l’hypoxia-inducible factor 1α (HIF1α). Dans des thrombopénie). Leur intensité est variable d’une molécule
conditions de normoxie, l’interaction avec pVHL conduit à l’autre et d’un patient à l’autre. Certaines d’entre elles
à l’hydroxylation et la dégradation de la protéine HIF1α nécessitent un traitement préventif (bains de bouche al-
(fig. 1). En situation d’hypoxie, ou en cas de mutation de calins, inhibiteurs de la pompe à protons) mais la majorité
la protéine pVHL dans les cellules tumorales, la protéine sont gérées au cas par cas, avec adjonction à la demande
HIF1α n’est plus dégradée, migre dans le noyau et initie d’un traitement antihypertenseur, d’un traitement subs-
la transcription de gènes qui codent plusieurs facteurs titutif thyroïdien... Leur chronicité est parfois plus diffi-
de croissance impliqués dans l’angiogenèse : le vascular cile à supporter pour le patient que leur intensité, et des
endothelial growth factor (VEGF), le platelet-derived adaptations posologiques sont fréquemment nécessaires.2

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

Figure 1.
La protéine
VHL en situation
physiologique et
les conséquences
d’une mutation
inactivatrice.
EGF : endothelial
growth factor ;
HIF1α : hypoxia-
inducible factor 1α ;
PDGF : platelet-
derived growth
factor ; VEGF :
vascular endothelial
growth factor ;
VHL : von
Hippel-Lindau.

Figure 2.
Les cibles
thérapeutiques
des médicaments
ciblant la
néo-angiogenèse
tumorale.
HIF1α : hypoxia-
inducible factor 1α ;
mTOR : mammalian
target of rapamycin ;
R : récepteur ;
VEGF : vascular
endothelial growth
factor ; VHL :
von Hippel-Lindau.

Ciblage thérapeutique culaires impliqués a permis le développement récent


de l’infiltrat immunitaire de nouvelles armes thérapeutiques. Les cellules cancé-
reuses échappent au système immunitaire en inhibant
De la biologie… les cellules censées les détruire, et notamment les lym-
La restauration des défaillances du système immunitaire phocytes T. Cette inhibition est réalisée par l’activation
est une piste thérapeutique envisagée de longue date de signaux négatifs, physiologiquement présents afin de
en cancérologie. L’utilisation de l’interféron alpha et limiter l’intensité des réactions immunitaires normales
de l’interleukine 2 dans les années 1990 s’inscrivait déjà mais détournés par les cellules cancéreuses pour induire
dans cette perspective, mais avec des résultats décevants. un état de tolérance à leur égard (fig. 3A). Parmi les nom-
La meilleure compréhension des mécanismes molé- breux signaux négatifs potentiellement activables par

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

PRINCIPAUX TRAITEMENTS MÉDICAUX UTILISÉS DANS LE CANCER DU REIN MÉTASTATIQUE


Traitement Cibles thérapeutiques Voie d’administration Ligne Posologie
Pazopanib VEGF-R Orale 1 800 mg/j
PDGF-R
KIT
Sunitinib VEGF-R Orale 1 50 mg/j
PDGF-R
KIT
FLT3
RET
Axitinib VEGF-R Orale >1 10 mg/j
Cabozantinib VEGF-R Orale >1 60 mg/j
MET
AXL
Sorafénib VEGF-R Orale >1 800 mg/j
PDGF-R
KIT
FLT3
RAF
Évérolimus mTOR Orale >1 10 mg/j
Nivolumab PD-1 Intraveineuse >1 3 mg/kg/2 semaines
Tableau. AXL: anexelekto ; FLT3 : Fms-like tyrosine kinase 3 ; KIT : inhibiteur de tyrosine kinase ; MET : mesenchymal-epithelial
transition factor ; mTOR : mammalian target of rapamycin ; PD-1 : program cell death 1 ; PDGF : platelet-derived growth factor ;
R : récepteur ; RAF : homologue humain de l’oncogène viral v-raf ; RET : rearranged during Transfection ; VEGF : vascular endothelial
growth factor.

les cellules cancéreuses, la liaison du récepteur PD1 (pro- Stratégie thérapeutique


grammed cell death 1) et de son ligand PD-L1 est respon-
sable d’une inactivation lymphocytaire.3 Les patients reçoivent successivement une ou plusieurs
lignes de traitement, en fonction de la tolérance et
… à la clinique du contrôle de la maladie. Chaque ligne de traitement
Le nivolumab est un anticorps monoclonal humain an- ne comporte qu’un seul médicament dans la mesure où
ti-PD1 qui, en se fixant sur sa cible, interrompt la liaison les associations développées jusqu’à présent n’ont pas
avec son ligand PD-L1 et permet ainsi de restaurer montré d’augmentation d’efficacité et sont plus toxiques
l’activation du lymphocyte T et de détruire la cellule que les monothérapies.5 Le choix du médicament pour
tumorale (fig. 3B). L’administration est intraveineuse, une ligne donnée repose sur l’indication de l’AMM
en perfusion courte d’une heure en hôpital de jour. (première ligne ou post-première ligne) et la décision
La tolérance est très bonne, meilleure dans l’en- du prescripteur (v. tableau). Chaque ligne de traitement
semble que celle rencontrée avec les médicaments ciblant est prolongée jusqu’à la progression de la maladie ou
la néo-angiogenèse. 4 Des manifestations générales l’existence d’une toxicité limitante.
(fatigue, pics fébriles lors des perfusions) et spécifiques En pratique, la première ligne de traitement est,
peuvent néanmoins survenir chez environ 10 % des en 2018, fondée sur un inhibiteur du VEGF-R, le pazo-
patients, principalement cutanées (éruptions maculo- panib ou le sunitinib selon le choix du prescripteur.
papuleuses), digestives (colites avec diarrhées), endocri- La durée médiane d’efficacité est d’environ 11 mois. Une
niennes (hypothyroïdie, hyperthyroïdie, hypophysite), immunothérapie par nivolumab ou un autre inhibiteur
hépatiques (élévation asymptomatique des transami- du VEGF-R (l’axitinib ou le cabozantinib) peuvent être
nases), pulmonaires (pneumopathie interstitielle) et utilisés en deuxième ligne. D’autres médicaments (inhi-
cardiaques (myocardite). Ces effets indésirables peuvent biteur de mTOR ou inhibiteur du VEGF-R) sont encore
nécessiter une prise en charge rapide dans la spécialité disponibles pour les lignes ultérieures, si l’état général
concernée en cas d’intensité sévère. le permet. La durée d’efficacité de chaque ligne après

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TRAITEMENT DU CANCER
DU REIN

A B

Figure 3. L’inhibition du lymphocyte T induite (A) par l’interaction PD1/PD-L1 est levée (B) par les médicaments ciblant le PD1
ou son ligand PD-L1. PD-1 : program cell death 1 ; PD-L1 : ligand de PD-1.

l’utilisation du pazopanib et du sunitinib est beaucoup


plus courte, de sorte que la médiane de survie globale RÉSUMÉ TRAITEMENTS MÉDICAUX
d’un patient traité pour un cancer du rein métastatique DES CANCERS DU REIN MÉTASTATIQUES : LE CIBLAGE
à cellules claires est d’environ 2 ans. Les formes histolo- DE L’ENVIRONNEMENT TUMORAL
giques non à cellules claires (carcinomes papillaires, Le cancer du rein métastatique a un pronostic sombre. Des progrès ont néanmoins été
chromophobes…) sont traitées de manière similaire, mais réalisés au cours des dernières années avec le développement de médicaments ciblant
avec des médianes d’efficacité attendues inférieures. le microenvironnement tumoral, à savoir la néo-angiogenèse et plus récemment l’infiltrat
Rappelons enfin que l’exérèse chirurgicale ou la des- lymphocytaire. Les médicaments utilisés en première intention inhibent la néo-angiogenèse
truction des métastases doivent être réalisées chaque et ont pour cible le récepteur du vascular endothelial growth factor. Le nivolumab est un
fois que possible à la place ou en complément des traite- anticorps monoclonal humain anti-PD1 qui, en se fixant sur sa cible, interrompt la liaison
ments médicaux. Les meilleures indications sont repré- avec son ligand PD-L1 et permet ainsi de restaurer l’activation du lymphocyte T et de détruire
sentées par les maladies d’évolution lente et de faible la cellule tumorale. La médiane de survie globale des patients est d’environ 2 ans.
volume métastatique.
SUMMARY MEDICAL TREATMENT OF METASTATIC
OPTIMISER LA PREMIÈRE LIGNE DE TRAITEMENT KIDNEY CANCER: TARGETING
Le ciblage thérapeutique du microenvironnement tumo- THE TUMOR MICRO-ENVIRONMENT
ral a permis de réaliser des progrès dans la prise en Metastatic kidney cancer has a poor prognosis. Progress has been made in recent years
charge puisque la médiane de survie des patients a with the development of drugs targeting the tumor microenvironment, namely angioge-
doublé au cours des 15 dernières années. La recherche nesis and immune infiltrate. First-line drugs inhibit neo-angiogenesis and target the
clinique se focalise actuellement sur l’optimisation de vascular endothelial growth factor receptor. Nivolumab is an anti-PD1 human monoclonal MOTS-CLÉS
la première ligne de traitement (inhibiteur du VEGF-R antibody that, by binding to its target, interrupts binding with its ligand PD-L1 and thus cancer du rein
ou immunothérapie ?) et les associations de médicaments restores T-cell activation and destroys the tumor cell. The median overall survival of métastatique,
ciblant l’infiltrat lymphocytaire. V patients is about 2 years. micro-environnement
tumoral
traitements
anti-angiogéniques,
RÉFÉRENCES immunothérapie
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Vol. 68 _ Janvier 2018 55

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