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L'impact de la COVID-19 sur

l'économie sénégalaise
Entrevue

La crise sanitaire mondiale liée à la COVID-19 s’accompagne d’ores


et déjà de graves conséquences économiques pour l’Afrique. Les
sociétés sont dans la tourmente et les économies sont en chute
libre. L’agence onusienne[1] justifie cette forte baisse par l’impact
de la pandémie sur le commerce mondial et ses répercussions pour
les économies africaines. Au Sénégal, les autorités ont pris
beaucoup de mesures pour faire face à la crise sanitaire dont les
impacts sur l’économie se font déjà sentir, notamment sur le secteur
informel prédominant dans l’économie du pays. Nous nous sommes
entretenu.e.s avec un expert pour en savoir davantage.
19 juin 2020

by Dr Cheikh Ahmed Bamba DIAGNE


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Quel regard portez-vous sur la crise économique que va


engendrer la COVID-19 pour des pays comme le Sénégal ?
Quels sont les principaux risques ?

Le virus, de par sa rapidité et sa violence, a mis l’économie sénégalaise


en confinement depuis le mois de mars 2020. Comme l’activité
économique est portée à plus de 97% par le secteur informel qui est
dans l’économie immédiate, alors le fait de respecter le mot d’ordre
« restez chez vous » ralentit la production nationale. L’absence
d’activités est ressentie par le commerçant, le salon de coiffure, le
taximan, le musicien, l’artiste, le couturier. Et la quasi-totalité de ces
entreprenants sont dans le secteur informel. Au vu de la situation
actuelle dans le monde, marquée par un repli des Etats les plus
développés, l’Afrique doit développer une stratégie globale de sortie de
crise sur le plan économique comme sanitaire. Dès lors, il devient
nécessaire de se pencher sérieusement sur les solutions et les
perspectives, parce que l’après-crise peut être plus terrible pour nos
économies si extraverties et vulnérables. Plus la crise tire en longueur,
plus l’outil de production sera endommagé, plus la reprise sera
difficile.

Beaucoup d’entreprises qui travaillent dans le transport aérien, le


tourisme, l’hôtellerie, la culture, l’artisanat, les agences de voyages,
l’évènementiel, les métiers connexes iront en faillite par faute
d’activités. Donc, nous attendons une hausse vertigineuse de la
pauvreté après la crise. L’autorité doit commencer à réfléchir
maintenant sur l’économie post-COVID.

En quoi cette crise sanitaire et économique mondiale


pourrait ouvrir de nouvelles perspectives pour le Sénégal ?

La pandémie a stimulé la créativité du peuple sénégalais. A l’école


polytechnique de Thiès, des étudiant.e.s ont commencé à fabriquer des
prototypes de respirateur artificiel, à la faculté de médecine les
étudiant.e.s se sont mis.e.s à la production de gels antibactériens, les
couturier.e.s sont dans la fabrication de masques lavables, etc. L’Etat
doit capitaliser toutes ces énergies positives pour l’économie post-
Covid. Il est aussi nécessaire de reposer la consommation locale et
rendre nos entreprises compétitives, dynamiser les chaînes de valeur
sous régionale pour, au-delà de la sécurité alimentaire et sanitaire,
chercher une souveraineté alimentaire et sanitaire.

L'Afrique doit arrêter de penser que la première chose à faire en


temps de crise, c’est de demander l’aide des pays développés ou des
institutions financières internationales.

Jadis, les pays du Nord avaient la solution et les pays du Sud avaient
les problèmes, aujourd’hui on assiste à un changement brusque et
profond du monde. Le virus a mis les pays du Nord à genoux et ceux
du Sud résistent jusqu’à présent, alors faisons appel à l’Afrique pour
aider l’Afrique.

Le continent doit redéfinir ses relations avec le reste du monde, une


relation basée sur un partenariat inclusif et bénéfique pour chaque
partie.

Pouvez-vous nous donner quelques éléments sur les limites


dans la gouvernance de cette crise du Sénégal ?

On constate un certain comportement mimétique de nos gouvernants


vis-à-vis de la France. A chaque fois que les autorités françaises
prennent une décision (fermeture des écoles, couvre-feu, etc.), les
autorités sénégalaises reprennent les mêmes mesures.
Or, nous luttons contre le même ennemi mais à des niveaux de gravité
différents. On constate aussi que les décisions des autorités régionales
et départementales (gouverneurs, préfets) méritent une
harmonisation.

En période de crise, l’ouverture restreinte (2 à 3 fois par semaine) des


marchés ou leur fermeture pose problème. Les ménages ont besoin de
consommer et les commerçant.e.s ont besoin de vendre, surtout ceux
qui sont dans l’informel qui n’ont pas de protection sociale. Les
autorités doivent transformer tous les grands espaces et stades en
marchés aux normes COVID-19 (distanciation physique) afin de
permettre aux consommateur.rice.s de pouvoir effectuer leurs
opérations avec moins de risques et redémarrer l’activité économique.
S’y ajoutent les polémiques autour du marché de l’aide alimentaire,
une stratégie inopérante qui pose problème aux règles des marchés
publics et de la bonne gouvernance.

Quelle appréciation faîtes-vous de la mobilisation des 1 000


milliards CFA du fonds COVID-19 ?

Les 1000 milliards de FCFA du fonds Force COVID-19 représentent


10% du PIB et 25% du budget national, la dette publique va
allègrement augmenter. Mais en période de guerre, nécessité fait loi.
Les mesures sont pertinentes pour soutenir l’économie formelle. Le
secteur privé va recevoir sur ce fonds 657.6 milliards de FCFA, l’Etat
gardera 178 milliards de FCFA pour couvrir ses pertes de recettes, les
couches les plus vulnérables vont recevoir 100 milliards de FCFA et le
secteur de la santé 64.4 milliards de FCFA. Malheureusement ces
mesures ne sont valables qu’à court terme (maximum 40 jours). Donc
pour sauver l’économie d’une manière générale, il faudra sortir
rapidement de la crise pour redémarrer l’activité, il n’y a pas d’autres
issus.

Quelle leçon le Sénégal doit-il en tirer ?

Sur les 1000 milliards de FCFA du fonds de solidarité Force COVID-


19, il n’y a pas de filet pour sécuriser le secteur informel. Sur 16
millions d’habitant.e.s, il y a moins de 400.000 salarié.e.s (public et
privé) et plus de 97% des entreprenants au Sénégal qui sont dans
l’informel. Je pense qu'à pareil moment la grandeur de l’Etat se
mesure par l’inclusivité de ses plans de soutien. C’est vrai que
l’informel ne paye pas d’impôts directs, mais paye des impôts
indirects, et c’est pourquoi il est nécessaire de soutenir toutes les
couches de la population en relançant la consommation qui va
stimuler la demande pour sauver les unités de production des
Sénégalais.e.s et des étranger.e.ss qui vivent parmi nous.

Après la crise de la COVID-19, le relèvement doit ouvrir la


voie à quel type d’économie ? Autrement dit, que faudrait-il
mettre en avant pour réinventer la marche économique du
monde en vue d'une nouvelle culture mettant en avant un
développement humain durable ?

Une économie qui met l’humain au centre de ses préoccupations. A


chaque fois que le monde subit une crise économique violente, on note
dans les premières années après la crise un abandon de la vision
libérale au profit du keynésianisme, c’est à dire une intervention
rigoureuse de l’Etat pour relancer l’activité économique. Le monde a
besoin d’une économie sociale, solidaire et inclusive; mise au service
de l’humain. La crise a montré la vulnérabilité des économies
africaines qui exportent des produits primaires et importent des
produits finis. Donc, elle nous enseigne que nos économies doivent
être plus productives et transformatrices. Aujourd’hui, la
mondialisation apparait comme une chance pour les pays développés
et une menace pour les pays en développement où les coûts de
production sont très élevés. Mais après la crise, une nouvelle économie
s’impose, basée sur un partenariat gagnant- gagnant entre les pays
développés et les pays en développement dans le respect de
l’environnement et l’amélioration de la qualité de vie des citoyen.ne.s
de tous les pays.
Quels seraient les acteurs et actrices à davantage associer à
la préparation et la mise en œuvre de ce changement ?

Les peuples encore les peuples toujours les peuples, qui doivent être
associés à la prise de décision. Les organisations de la société civile
doivent assumer leur rôle dans la formation des peuples et l’éveil des
citoyen.ne.s, et suivre la mise en œuvre les décisions publiques. A la fin
de la crise, s’il n’y a pas de contrepouvoir, les dirigeants
recommenceront leur concurrences pures et imparfaites pour
l’humanité. Il faut coacher les peuples afin qu’ils soient plus exigeants
avec les autorités.

[1] https://news.un.org/fr/story/2020/03/1065072

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COVID-19 Senegal
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Démocratie
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